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A BR A H A M

L I N C O L N
U
S A J E NE SSE E T S A VI E P O LI T I QU E

H I I
STO RE DE L

A BOLI T I ON DE

L E S C I A VA G E

É I
.

-
aux T A T S UN S

A L P HO N S E S
I O UA U L T

PA RI S
LI BRAI RIE H A C HE T TE E T G
79 , A
BO U L E V R D S A I N T — G E RMAI N ,
79
I N TRO D U C T I O N

OU L

AUT E U R FAIT LA C A S SAN C E
O NN I

DE S O N I I É RO S .

LA M O RT D UN J U S T E .

Ce livre a été commencé à Washington que l ques ,

j ours après la mort d u grand citoyen dont j e veu x


Ë/
'
r acon t e r l in s t r u ct i v e e t touchan t e histoire

.

ca J e la donne au publ i c dans l o r dre o ù j e l ai ap ’ ’

w prise .

3 Mont r er l homme comme il m est appar u d abo r d


’ ’ ’

pui s rech ercher sa j eunesse ce qu il a du aux cir , _


constances et a son éducation le suivre pas à pas de ,

p uis ses débuts dans la ca r riè r e politique j usqu au j ou r ’

où il arrive à la première magis t r ature des É t ats Unis —


,

v o il à le pl n de cet ouvrage que j e destine surtout


a
à la j eunesse des écoles et aux lec t eurs des biblio

'‘
A . J O UA UL I .
0
[ I NT R O D UC T I O N

A près avoir visité tout le nord des États Unis j a rr i -


vais temps dans la capitale pour assister le 4 mars


à ,

1 865 à la c érémonie qui devait inaug u re r la seconde


,

présidence d Ab rah am Lincoln réélu par ses conc i


t o y en s le 2 n ovembre de l année précédente



.
,

Le mo ment était solennel .

Le Congrès venai t de voter le t r eimem e amende


m ent à la Constitution qui abolit l esclavage aux

Etats Unis -
.

Les fo r ces du S ud étaient épuisées .

La chute de Vicksburg l entrée hé r mqu e du vieil


,

amiral Farr a gut dans la baie de Mobi l e la marche ,

h ardie de Sherman a travers la Géorgie l i n v e s t i s s e


‘ ’

m ent de R ic h mond par Gran t e t les expédi t ions h e u


r euses et bri l lantes du g a la n t Sheridan to ut annon ,

cait l a fin pro chaine de la lutte .

Les É t ats rebelles ne po u vaient plus r ésister lo n g


t emps entourés par les flottes et les armées d u N o r d
,

d un cordon mi l itaire dont le go uvernement de R ich


m ond c o mp ar aî t lui m é me l é t reint e à celle d un bo a


-
‘ ’

gigantesqu e .

Pour a tt eindre ce r ésultat o n avait fait des sacr i


fi c es i m m enses en hommes et en argent La guerre .

c oûtait déj à 8 3 0 mille morts un million de blessés et ,

1 5 milliards de not r e monnaie sans compte r l es r u i nes ,

a c cumulées par les arm ées belligé ra ntes .

C est dans c es cir co nstan c es q u e l e p r ési dent Ab r a



I RO DUC I NT T ON 8

h am L i n c oln ,
entou r é de ses minist r es
du S énat du , ,

Co r ps diplo matique venait devant le peupl e assemblé ,

sur la p l ace d u Capitole reno u v eler entre l es mains ,

du chef de la J ustice son se r ment de fidélité à la Cons


t it u t i o n .

Il est d usage qu avant cette cérémon i e le p r esi


’ ’

dent s adresse à ses concitoyens



.

J e n o ublierai j amais l impression p rofonde que j e


’ ’

r essentis quand j e vis arriver sur l estrade ce grand ’

homm e étrange au quel l e p euple amé r icai n ava i t eu


le bonheur de confier ses destinées .

L allu r e était lourde nonchalante irrégulière ; l e


, ,

corp s long maigre ; plus de six pieds des épaules


, ,

voûtées de grands bras de bate l ier de grandes mains


, ,

de cha r pentier des mains extraordinaires m ais qui


, ,

n avaient pourtant rien de dis p r0 p o r t io nné si on les


c o m p ar aî t à ses pieds .

Lincoln por t ait un vêtem ent noir mal aj usté qui


lui donnait l air d un employé des pompes funèbres
’ ’
.

Pour cravate une corde de soie noire arrêtée par


u n large n œ ud e t dont les b outs flottaient sur les

r evers de son gilet Le col de sa c h emise raba t tu lais.

sait voir les muscles saillants d un cou j aune a u ’

dessus duque l sor t ait d une grosse m asse de poi l s ’

n oirs hérissés et épais com me un bouquet de sapins


, ,

u n e figure d un a t trait irrésis t ible



.

Surpris d abord par ses grandes extrémi t és et ses


immenses oreilles j e fus bien vi t e séduit par l a do u


,

o eu r l intelligence la b onhom i e sagac e empreintes


, ,

sur sa phys i onom i e .


4 I NT RO D U C T I O N
R egardez son po rtrait La bouche est p r odig i euse .
,

les lèv res s étendent sur un e lign e droite d un côté de



la barb e à l autre a r rê t ées brusquement p ar deux sil


lons profonds qui n e sont pas placés bien loin des


oreilles Le nez se proj ette de la face a v ec un ai r
.

i nquiet co mme s i l fl air ait quelqu e cho se dan s l ai r


,
’ ’
.

Tou t c ela es t m al façonné mais t out cela n est pas ,


l homm e

.

De cette gross i ere é corce émergeaient un front et


des yeux apparten ant à une nature supérieure Ce .

corps servait de gaine à un e â me m ervei ll euse de


grandeur et de beau t é mora l e Sur le front tout sil .

lonn e de rides o n lisait les pensées et les soucis de


,

l homm e d É t at e t d ans de g r ands yeux noirs pro


’ ’

, ,

fonds pén é t ran t s où dominaient la douceur et la


, ,

bon t é noyées d ans un e cer t aine t ristesse on de v inait ,

u n e inépuisable chari t é si l o n entend ce m o t dans sa


plus hau t e ex pression j e veux dire l amo u r pa r fa i t de


,

l humani t é

.

Si le style p eint l homm e les paroles qu e Lincoln


va prononcer s u ffi rai ent p our le faire connaître tout


entier .

Il s avance sur le bord de l estrade et d u n e voi x


’ ’

, ,

qui r emue les fibres les plus intimes du cœur de ceu x


qui peuvent l entendre prononce le discours sui vant

Mes ch ers conci t oyens ,

A u moment de prêter pour la secon de fois le ser


m ent p our la présidence j a i moms à vous di e que ,

r
RO D U C T I O N I NT 5

l a p r e miè r e A lors un exposé dé t aillé de la conduite à


teni r était nécessai r e Maintenant durant quatre an
.

.
,

nées p endant lesquelles l opinion publiq u e a été con ’

s u l t é e sur chaque point a chaque phase du grand ,

c onfl it qui absorbe encore l a ttention et o ccupe l é ’ ’

n er g i e de la nation p eu de choses nouvelles peuvent


,

vous être dites .

Les progrès de no s a r mes dont to u t dépend p r inci ,


p a l e m e n t sont aussi bien connus de la na t ion que de


m o i même et j en ai la confiance ils sont de n ature a
,


,

nous satisfaire et a nous enco urager A vec une pleine


,

espérance dans l avenir j e ne p uis aventu r er aucun e


prédic tion
A la même date il y a qua t re ans tous les esprits
.

, ,

i nquiets s at t en daien t a une guerre civile i mminen t e



.

Tous la redoutaien t ; tous cherchaien t à l evi t er P en ’


.

dant que j e vou s adressais a cette place mo n discours ,


d inau g ura t ion des agents parcouraient la vi ll e cher


, ,

chant à dé t ruire l Uni o n par la guerre a l a disso udre


à la diviser Les d e u x partis maudissaien t la guerre ;


,

mais l un aimait mieux faire la guerre qu e de laisser


vivre la natio n l autre que la laisser périr e t la


,

guerre écla t a .

Un h uitième de la population se composai t d es ’

claves de couleur cantonnés au Sud de l Uni o n C es ’

esclaves étaient un intérêt par t iculie r et puissant .

T o u t le m o n d e s av a i t q u i ls é ta i en t en r éa li t é la

c a u s e d e la g u er r e F o r tifi e r étendre pe r pétuer .


, ,

cette institution était l obj et qui po ussait les insu r gés ’

à romp r e l Un i o n pa r les armes tandis que le g o u v er


,
6 I
R O DUC T I O N
NT

n ement réclamait seulement l e d r o i t de la limite r su r


l e terri t oi r e national .

A ucun des partis n e suppo sai t qu e l a gue rr e dût


atteindre de telles pro portio ns o u une si longue durée .

A ucun ne su ppo sai t que la cause du con flit cesserait


avec ce conflit o u même avant Chacun s attendait à .

un triomphe plus aisé à un r ésultat moins fondamental


, ,

moins surprenant .

Des deux côté s nous l is o n s la m ême Bible no us .


,

prions le même Dieu et chacun l in v o q u e contre son


,

ad versaire I l p eu t s em ble r é t r a n g e q u e d es h o m m es
.

o s en t i n v o q u er le D i e u j u s t e e n m a n g ea n t d u p a i n
,

à la s u eu r d u fr o n t d a u t r es h o m m es ; m a i s n e les

j u g eo n s p as p o u r n e p a s ê t r e j u g és Les prières des


,
.

deux partis ne p o uvaient pas être exaucées à la fois .

A u cune n e l a été pleinement Le Tout Puissant a ses


.

voies Malh eur au m onde à cause des scandales mais


.
,

m alheu r à ceux par qui v ien t le scandale .

Si nous po u v ons supposer que l esclavage amé ri ’

cain est u n d e ces scandales p ermis par Dieu mais ,

qu il lui plaî t enfin de dé t ruire e t s il a déc h aîné au


,

N ord et au S ud a la fois cet t e terrible guerre com me


,

le châti ment dû a ceux p ar qui a été fait ce scandale ,

p o u v o ns n o u s voir d ans ceci aucune d é r ogat i on à ces


attributs que tous ceu x qui croi ent à un Dieu vivant
lui r econnaissent ? N ou s espéro n s p r ofon dément n o u s ,

devons demander avec ferveur qu e cette te rri ble I na


l édi c t i o n de la gue r re cesse enfin
,

Mai ntenant si la volonté de Die u est que la gu e rr e


,

conti nu e j usqu à ce que toute la ri c h ess e acqui se pen



RO DUCT I O N I NT

dant de u x c ent c i nquante ans p a r le travail des è s


c laves soit épuisée et j u s q u à c e q u e c ha q u e g o u tte
,

d e s an g t i r ée p a r le fo u e t s o i t p a y ée p a r u n e a u t r e
g o u t t e d e s a n g t i r ée p ar le s a br e il fa ut enco r e re ,

di r e ce qui a été dit il y a trois mi l le ans


L E S J U G E M E N T S DU S E I G N E U R S O N T J US T E S E T E N

T I È RE M E N T D RO I T S .

Ces dernières pa r oles éta i ent comm e une p l 0p h é t i 6 ’

et d e v aient bientôt t r ouver leur accomplissement dans


le m artyre de ce l ui qui les prononçait .

N o n assez de sang n avait p as coulé p ou r apaise r



,

l i mm u ab le j us t ice qui préside aux destiné e s de c e


m onde Il fallait le sang d un j uste p ou r rach eter le



.

péché originel de la république américaine Lincoln .

était le plus j uste et Dieu va le choisir comm e v i ctime


,

exp i atoi r e 1 .

Le 5 avril R ichmon d est pris ; le 7 Lin c oln ent r e ,

dans la capi t ale du gouvernement reb elle aux acol a


m ations de son armé e victorieuse des n oirs a ff ranchis ,

et de tous les amis de la lib erté ; le 1 4 il mou r ait ,

assassi né .

Le soi r de l inau gu r ation enco r e tout ému d u d i s



,

cours que j e venais d enten dre j e fus présenté à la ’

Maison Blanch e pa r M Lafayette S F oste r et j eu s


-
. .
,

C ét t j t
1 lh t tm
ic e de
ai i s o i r e , q u e l a o b e d e l e s c la
la
’ ’

vg tt U àj iq é p

. us
a e au x E a s - n i s fû t m
am ai s i n d ar u n c r i e qu i

t m l l té êt glw D
u e

obi e q u e in r Bi e o i s co u r s
’ ’
n a eu d a u r e

éà P
. .

p r o no n c m
ar i s , l e 1 1 ai 1 86 5 .
8 RO D U C T I O N I NT

l honneur de se rr e r la m ain a l h o nn ê t e A braham Lin


’ ’

coln que j e revis enco r e deux fois d abo r d à un ban


, ,

quet et à un bal p uis une dernière la dernière p ou r


, ,

le monde comme po ur moi au p etit t héâtre Fo r d ,


.

C était un Vendredi S aint ; o n j ouait u ne pièce très



en vogu e ayant pour ti t re le C o u s i n d A m ér i q u e Le


p r ésident et madame Lincoln assistaient a la r e p ré s en


tation ac co mpagnés d u maj or R athbu r n et d e m iss
,

Clara H arris ; on attendait le géné r al Grant ; la salle


était co mble .

L e rideau venait de se lever su r le t r o i s 1 e me acte ,

lorsq u un co up de pistole t retentit du cô t é de la loge


p résidentielle Tous les rega r ds s y po rt ent et no u s


.

voyo ns debout sur le devant d e la loge un ho mm e


, ,

de taille moyenn e aux trai t s fortement accentués Il, .

agite un poignard et s é c ri e d une voix tragique ,



,

S i e s em p e r t y r a n n i s 1 ! Un e seco nde après il avait


disp aru dans les coulisses .

C e fu t d ab ord une s t up eur géné r ale e t comm e il


, ,

a rr ive souvent que l ques specta t eurs crurent à une


,

scène nouvel l e in t ercalée dans la pi èce Mais les cris .

p oussés par madame Lincoln et par miss H arris nous


fi r ent bientôt p resse n tir la t riste vérité Q uel spec t acle .

dans cette loge ! Le corps de Lin coln gisai t inanimé ;


son c r â n e brisé laissait fil t rer la cervelle ; a ses côtés ,

l a r m e du m eu r trier pistole t à u n seul coup Je re


,
.

non c e à décrire le tumulte épouvantable qu i suivit .

To ut cel a n avai t pas duré une minute et demie ; la


'
1 .
Q ue t el so it t o uj o u r s le sor t des t y r a n s !
I NT RO DUC T I O N 9

douleu r et la r age mordaient la foule au c œ u r et les ,

cris de vengean c e se mêlaient au x sanglo t s pendant ,

qu on t ransp ortai t du théâtre dans un e maiso n voisine



,

p ou r lui donne r les p r emiers soins et de l a à la Mai , .

son Blanche le grand ci t oyen qui avait avec tant de


-
, ,

sagesse de fe r meté et de p atriotisme condui t a la


, ,

vraie liberté le p euple américain mais com me Mo ï se , , ,

ne devait point en t rer dans cett e no uvelle terre p r o


mise rêvée dep uis cinquante ans par le p arti r é p u bli
ca i n l Un i o n s a n s l E s c la v a g e
’ ’
.

L e rappor t des médecins ne laissa bientôt plus de


porte ouverte a l esp érance A minuit tous les m em

.

bres d u cabine t é t aient réunis au t o ur du présiden t


inanimé ainsi que M M S ummer Colfax F a r n s w o o r t h
, .
, , ,

Cur t is O glesby et quelques amis personnels O n e s


, .

p é rait au moins qu e le mouran t reprendrait un instant


ses sens pour avoir la consolation de lui dire un s u
,

p r ê m e adieu Mais rien A sept heures vingt minutes


. .

du matin le 1 5 a v ri l 1 8 6 5 A braham Lincoln expirait


, ,

sans avoir repris connaissance assassiné p a r l acteur ,


John Wilkes Boo t h fils d un acteur a n g l ais fixé depui s


,

longtemps en A méri qu e où il s était acquis une grande ,


réputa t ion que le plus dé t estable des crimes a rendue


o d i eusem ent imp érissable .

Telles sont les circ onstances dans lesquelles j ai


connu A b r ah am Lincoln D epuis ce te m ps fidèle à sa .
,

mémoire j ai voulu fai r e r evivre l homm e le plus


,
’ ’
10 I RO DUC I O
NT T N

j uste qu a i t v u na î t r e le dix neuvièm e


S i è cl e et j a i -

d abord r eche r ch é sa j eunesse D ans les do cuments



.

que j ai consultés su r cette partie assez ob s c ure de


son existence la légende déj à se mêlait à l histoi r e


,

m ais grâce a des informations puisées aux meilleures


so urces j ai pu j e l espère ret r o uver à peu près
,

,

l ex ac t e vé r ité ; c est la p r emière par t ie de cet o uvrage


’ ’

que j e r ecommande particulièremen t à ceux qui s o n


gent à l avenir de la France notre chère patrie

, .

O n y verra que le Président de la R ép ubliqu e a tenu


les promesses de l enfant et du père de famil l e et que

les grandes vertus privées appliquées à la po l itique


sont des instruments plus puissants que le génie pour
faire triomph er en ce monde la j ustice e t la liberté .

Vo il à t out l espri t de ce liv r e complétem ent étra n ger


à no s luttes poli tiques et où j e n ai vo u lu montrer qu e ’

la puissance de l honnêteté et du caractère sur les


destinées d un p euple ’
.

P a r i s , le 7 n o vem br e 1 87 4 .
S OURC E S

TH E P au d Ho w h e b ec a m e P r e s i d en t by
ll M h t W lk W
ION E E R B OY , ,

Wi ia m . T aye r . Bo s on . a er , is e, and C °

I H MI I A I P I I L
l g h l tt lmt
S T O RY OF T H E AD N STR T ON O F RE S D E N T N C OLN

I nc u d in h is a dr e s s e s , io n s and

g th l y Sk t h lf
s p e ec es, e er s , pro c a a

m wi p r e i m i na r o f his i e, b y H e nr i
k y M ll
es s a es , a e c

J R m
. ay o nd . N e w- Y o r : J . C . De r b et N . C . i er .

IC
A E R A II A M L A g t C h (
p ar u u s in in m e m b r e d e l I ns

P l C t ( l thèq l i é l )
N OLN , oc

t it u t
) . aris , i b r a i r i e De g o r c e a d o -
. Bib i o ue b ra e .

THE MA ’
M ll t i o n d es d i s c o u r s p r o n o m
A h l t S g fi l W h gt
RT Y R S M O N U E NT ,
co ec

c é s p ar b ra am Li nco p rin e d et as i n

ll M F
n en re on,
rec u e i i s p ar . r a nc i s L i eb e r .

I é
L A M O R T D E L N C O L N , p o s i e c o u r o n n e p ar l A c a d é é m ’
ie
fran ç a i s e au c o n c o u r s d e 1 8 67 ,
p ar E do u ar d M
r en i e r G . .

M I A
TH E A E R C N C ON L FI t y g t ll i Hi s of th e r eb e

U t St t
CT a or r ea on
i n t he ni ed a es o f A m e r i c a , 1 86 0 G b y H o r ac e
tf l h C y
r ee
l ey H ar o r d
.
p u b is ed b y 0 D as e . . a n d c o m p an .
P R E M I ER E P A RT I E

LA J E U N E S S E

D ABRAII AM L I N COLN

16 LA J E UN E S SE

niers aussi p a u v r e que courageuse Po u r habitation .


,

une hutte de boi s faite de troncs d arbre enduits de ’

terre glaise et de mo usse co uverte en planch es mal ,

j ointes sans fenêtres avec une p orte seulement Le


, , .

m obilier était des plus simples quatre o u cinq esca


b eaux boi t eux que l ques pots deux marmites une
, , ,

daubière un four et une façon de lit comm e o n en


,

voyait autrefois dans les chaumiè r es de no s campa


gnes les plus déshéritées .

Le mari s appelai t T h o mas Lincoln N é dans le



.

comté de R o ckingham (Virginie ) il était resté o rp h e ,

lin à l â g e de douze ans



.

C était un h om me illet t ré mais un e nature d élite


,

si mple et bon très pra t ique et excellent obse r vateu r


,

-
.
,

D es temps rigoureux et des mal h eurs sans no mbre


l a c c ab l èr e nt par t out où i l a l la et il fi t l impossible
’ ’

, ,

p endant sa j eunesse abandonnée p our gagner son ,

p ain et res t er honnête S a volonté et sa p ersévérance


.

l aid èr en t seu l es à y réussir



.

Venu dans le Ke n t ucky en 1 7 7 7 il a vait épousé une ,

femme no mmée Mar y H anks To us deux a p p ar t e .

n ai ent a l a secte des Bap t istes .

D e leur union étaient issus trois enfants une fille .

dont l histoire n e rapp orte r ien un fi ls m ort p r esque


1609 é
Bo r n : a u N , p a r l
o b i o , q u i l e s pa r e d e s E a s
.

é tt
d O hio e t d I n d i a n a , e t a u S , p ar l E t a t d e Te n e s s e e ; à l E ,
‘ ’ ’ ’

V g t
. .

p a r la i r i n i e , e t a u S O , p a r l e M i s s i s s i p i L a p a r i e o r i e n
tl é lt l h t

. . .

a e a do s s e a u p a ea u d e s A p a a c e s , e s t m o n u e u s e e t t r a

v é t C
er s e p a r l e s m o n s u m b er a n d l C t
u n p a s a ri co l e , q u i

y g _

t éél t élèv g ét l
es .

p r o d u i d e s c r a e s e t d u a ba c , et r an d l e b
êt à àl hv
e en ai

( b es c o r ne s e t a i n e , c e a u x et p o r cs ) .
AR RA R A M L I N C O L N D

17

au be rc eau et notre hé r os A b r aham Lincoln né le


, , ,

1 2 février 1 8 09 q u on appelait par abrévia t ion A be


,

tout court nom qu il a conservé tou t e sa vie même


,

,

a r rivé a la première magis t ra t u re du p ays .

L h o n n é te A be au del à de l A t lan t i q u e c est A bra


’ ’

, ,

ham Lincoln p r és i dent de la rép ublique des E tats


,

Unis .

Les leçons que r eçut A braham d u r ant sa premiè r e ,

enfance furen t t rès élémentaires -


.

Mme Lincoln n étai t p oint une i n telligence c ul t i v ée


,

mais la nature l avai t douée de facultés remarquables



.

Un b on j ugement un esprit élevé u n c œ ur a ff ectueux , ,

e t droit unis à u n e grande force de caractère et a une


véritable p i été fa i saient d elle u n e femm e exceptio n
,

nelle .

Tout c e que j e suis to ut ce que j e vo udrais être , ,

a di t Lincoln lui m èm e j e le dois à m a mère q u e s a



,

mé moire soi t b énie !


Le p ère n e savait ni li r e ni écrire et il avait bie n ,

t r op de peine a gagne r le p ain de chaque j our p our ,

s o ccuper beaucoup ensui t e de l éduca t ion de ses en


’ ’

fau ts Toutefois lui aussi i l les ins t ruisait a sa ma


.
, ,

n i èr e en leur racontant l histoire de ces ha r dis p i o n


niers du grand O uest qui o uvrirent aux A mér i ca i ns la ,

route du Pacifique à travers le continent .

C étai t une rude expérience Il n e falla i t pas seule



.

m ent par u n incessant lab eur arrache r à une natu r e


, ,

sauvage les choses les plus nécessai r es à l exi stenc e ; ’

A JO UA UL T . .
18 LA J E UNE SS E

on avait à lutte r contre les épidémies m eurt r ières q u i


accom pagnent d ordinaire les premiers défrich ements

,

contre les bê t es féro ces contre les bandi t s et surto u t ,

contre les Indiens invisibles ennemis touj ours pré , ,

sents a la p orte du logis qu and s ab s en t ait le père de ,


famille p our alle r tra v ailler dan s les bois La cabane .

restai t alors sous la garde des femmes dont le san g


froid la présenc e d esprit et quelquefois l h é ro ï s me
,
’ ’

étaient du reste ext r aordinaires .

E n voici deu x exemples restés légenda i res dans


la contrée .

P eu de tem p s après qu e le grand p ère d A b r ah am —


se fu t é t abli dans le Kentuc k y un P eau R o u ge arm é ,



,

d un fusil et d un tomah awk entre dan s l a cab ane d u n


’ ’

,

M D av i e s s dans le but de piller et d em m ener la


.
,

famille prisonnière Madame D av i es s seule avec ses .


,

enfan t s n e p erd pas contenance D evinant les desseins


,
.

de l I n dien e ll e l invite a boire et place dev ant lui sur


,
’ ’

la table une bouteille de whi s ky Celui ci p our r em .


-
,

p li r son verre p ose à terre so n fusil ; la femme saisit


l arme couch e en j ou e le misérable et le men a ce S il

,

b o u ge de lui fai r e sauter la ce r velle Le Peau R ouge


,
.
-

laissa échapp e r la bouteille s as s it sur un escabeau ,


et promit de se te ni r coi Madam e D av i es s le ga r da .

dans cette posture j usqu au retou r de son m ari : ’

D ans une autre circons t ance à peu près ve rs l e ,

m êm e temps la maison d un M Merrill est attaquée


,

.

nuitammen t par quelques Indiens et le malhe u reu x


pionn i e r sérieuseme n t blessé au m om ent o ù i l se p r é
sentait s u r le seu i l Les sau vages c r oya i ent p énét r e r
.

D A B R A HA M L N I CO LN 19

fa c ilem ent dans l intérieur m ais madame Me rri ll avait


brusquem ent fermé et ba r ricadé la porte Ils y prati .

quent alo rs une o uverture avec la h ache La cou a .


r

geuse femme cachée dans u n e encoignure attendait


, , ,

u n e pio che à la main ento urée de ses enfants qui ,

po ussa i ent des cris déchirants son mari gisant à ses


pieds tout sa n glant mais sans avo ir en c o r e p er d u
, ,

entièrement connaissance .

Un Peau R ouge s i nt r o d u it a moitié dans la cham



b r e ; elle lu i assène un coup mortel tire à elle le ca ,

d e vre le repousse dans u n coin et attend Croyant


, .

l entrée forcée un second a gresseur se p r ésente t ri o m


phant et subit le m êm e sor t ; puis un t roisième un ,

quatrièm e alors les assaillan t s reconnaissent leu r


fatale erreu r et deux d en t re eux ivres de rage essayent

de descendre pa r la cheminée Madame Merri l l ne .

veut pas quitter son p o ste dans la crainte d un e su r ’

p r ise ; elle ordonne à ses enfants de vide r dans le


foye r le contenu d une paillasse Q u elques minute s

.

après l a flam me et la fum ée précipi t aient dans l a


,

c hambre les deu x Indiens à demi suffo qués et ils ,

étaient i mmédiatement assommés à coups de pio che


pa r M Merrill qui dans u n e ff o rt désespé r é avait fini
.
, ,

pa r se r elever Le r este de la t r oup e prit la fu i te


. .

L his t oire des ép r euves qu avait trave r sées la famille


’ ’

Lincoln n était pas moins émo uvante et q u and T ho mas


arri v ait au r é cit de la m ort de son p è r e assassiné par


les Pea u x R o u ges il c o nt i nu a i t gén é r ale ment en ces
-
,

te rm es 1
20 LA J E UNE SS E

Votre grand pè r e était né dans le co mté de R o cki n


-

gham ( Virginie) qu il quitta po ur s établir dans l e


,
’ ’

K entucky en 1 7 8 0 J étais alors u n tout petit enfant


.
, .

N ous h abitions un vé ri table déser t car nos plus p r o ,

ches voisi ns vivaient a plus de deu x ou trois milles et


nous étions entourés d l n di en s qui haï ssaient les ’

hommes blancs Il ent r eprit la p érilleuse besogne d é


.

c l ai r cir le pays b o i sé p o u r y établir une fe r me n ayant


p ou r compagnons da n s la forêt que sa hache et son


fusil Quatre ans s étaient déj à passés lorsqu un soi r
.

,

i l ne revint pas a la cabane O n se m i t à sa recherch e .


,

et o n ne r etrouva que son cadavre sca l p é par les


Indiens au pied d un arb r e qu i l était en train d abat
,
’ ’ ’

tre Il avait dû être surpris car sa h ache avait dispar u


.
,

et son f u sil cha r gé gisait dans l he r b e à quelq u es p as ’

de lui .

Triste temps et fasse le ciel que no u s n e le r é


,

voy i ons plus !


Votre grand p ère aj outai t il m a so u vent r aconté
-
,
-
,

la gue r re de 1 7 8 0 ave c les Indiens quand les colons , ,

r assemblés sous les ordres de Boone le grand chas ,

s eu r du Ken t ucky fu r ent taillés en pièces Le fils de


,
.

Boone fu t blessé et son pè re essaya de l empo r ter


,

dans sa retraite Il plongea dans la rivière avec son


.

p récieux fardeau sur les épaules ; mais l enfant eX p ir a ’

avant d atteind r e l autre r ive et Bo one dut l ab an do n


’ ’ ’

n e r aux flots pour échapper aux In die n s qui nagea i ent

à sa p o u r suite .

Peu de t emp s aupa r avant t r o i s petites filles , ,

appartenant au fort de Bo o ns h or e trave r saie nt en ,



D A BRA HA M L N I COLN 21

c anot la ri w ere Kentucky du de touch e r . A u mo ment


l autre bord quelques I ndiens se préci pitent des

b uissons dans la rivière tirent le canot a terre s e m


,

, ,

parent des j eunes filles et les e m men ent Les pauvres .

enfants eu r e n t g ran d p eu r et leu r s cris retenti r ent


vers le fort qui entendit leur détresse O n acco u rut ; .

mais pendant qu on se dirigeait vers le canot les



,

Indiens s étaient enfuis avec les t r oi s e nfants C ê



.

tait aux appro ches de la nuit il n e fallait p as songe r ,

à les suivre ; le lendemain seulem ent les gens d u


for t partiren t en ca mpagne pou r les délivrer .

Ils s étaient mis de b onne h eure en quête des


prisonnières et n e les r encontrèrent qu après u n e


,

c ourse de 40 mille s On dut camper to ute la n u it A


. .

l aube craignant que les Indiens n e tuassent l e s j eu


nes fi ll es dès qu ils se verraient décou v erts les colons


,

, ,

firent feu les premiers en prenant bien soin de n e ,

pas toucher les enfants L attaque fu t si so udaine qu e .


les Peaux R ouges se sauvè r ent ab andonnant leurs


-
,

capti ves et leurs a r mes .

Quand il avait fini ce récit Thomas Li ncol n faisait ,

le tab l eau de la triste situation dans laque l le l a mort


du chef avait laissé t oute la famille .

C était notre p r otecteur disai t il ; lui m ort o ù


,
-
,

t r ouver d u pain ? Que deveni r en ce désert ?


Votre g r an d m er e travailla dur p our m e no urri r

et mes fr ères et s œ u r s mes aî nés s en allèren t au , ,


loin afin de gagner leu r v i e où ils pu r ent Mais deux .

ou t r ois an s après la pauv r e femme étant ac c ablé e


,
22 LA J U SS
E NE E

d e m isè re il
m e fallut p artir auss i et j e vé cu s sans
, ,

log i s j usqu à m on mariage A lo rs j e vins ici



. .

Si tu m a v ais perdu A be t u aurais été forcé de


, ,

quit t e r ta m ère et d er r e r au loin p armi les é t r an g e r s


p ou r che r cher t a vie .

T els étaient les r écits qu i r empla ç aient dan s la c a


ban e les co ntes de P errault et berçaient la premiè r e
enfance d A b r ah a m le futu r capi t aine des volon t aires

de Salem dans la gu erre d e l I ll in o i s contre le Fau con


,

noir l e p résident auquel e n 1 8 65 les représentant s


, , ,

des dernières tribus indiennes expiran t es viendro n t à ,

la Maison Blanche demande r seco u r s et p r otection


-
,
.

LE P RE M I E R M AIT RE D E C O LE É CA I DU T ON RE L I C I E US E .

AM A
.

LE S p A S T E UR S B UL NT S .

La situatio n de la famille d A b rah am moins misé ’

rable que celle de son grand père était loin d êt r e


'
-
,

bril l ante Thomas ne gagnai t le pain q u à la sueur de


.

son fron t ; mais il était décidé à faire tous les sacr i


fi ces p ossibles p our donner à son fils les bienfaits
,

d une instruction d ont i l sentait d a u tant pl u s le p rix


’ ’

qu il en avait été lui même privé




.

A b r aham avait sept ans lo r squ o n l envoya à l é c ole ’ ’ ’


24 LA J E UN E SS E

pa r expé r ience dit Thomas ce qu il en c oûte po u r


, ,

être ignorant .

La P r ovidence nous viendra en ai de ; ayon s fo i


en Dieu mon ami , .

J e ne dispute pas l à dessus répliqua le bon -


,

ho mm e ; mais j ama i s la foi n ap p r en dra a not r e ’

pauvre A b e à écrire .

J e n en suis p as sûre r eprit madame Li ncoln


, .

La foi peut nous o uvrir un chemin elle a tiré Daniel


des griffes des lions elle p eut enlever notre fils à ,
'
celles de l i g noran ce ’
.

Tho mas souri t ne répondit rien p our ne pas h eurte r


,

les sentimen t s na i fs e t pieux de sa compagne et atten ,

dit que la Providence envo t a son fils u n p r ofesseu r


d écriture C e qui du res t e arriva

.
, ,
.

Abrah am reçut dans la p a u v r e cabane une fo r te


éducation chré t ienne dont l emprein t e se r etro uve r a
,

dans to us les actes et to u s les discours de sa v i e p oli


tique .

Un pasteur éloquent de B r o oklin frè r e de l a u teu r ,


de l O n c le T o m le révé r end Beech er Stove avait


, , ,

p endant la guer r e ci v ile fait de sa chaire une v é ri ,

table tribune et chacun de ses disc ours enfanta i t des


,

défenseurs no uveaux de la cause de l Un i o n et de ’

l E man c ip at i o n A utant il y avait de fougue et de pas



.

sion ch ez l o r at e u r sacré au t ant o n trouvait de foi et


,
A B RAHA M L I N C O L N
B

95

de r és i gnation chrétiennes dans les pa r oles d u p r é


s i den t Lincoln Les r ôles semblaient interve r tis et
.
,

j ai mainte fois entendu dire en ce temps là



Les sermo ns de Beech er sont des m essages et


l es messages de Lincoln des prières .

Les sentiments profondém ent religieu x qui forment


u n des t r aits distincti fs du caractère de Lincoln il les ,

doit non seulement a sa mère m ais aussi à l in



fl u en c e d un des prédicateurs ambulants qu i vis i


t ai ent quelquefois la contrée le pasteur E lkins ,


.

Ces humbles missionnaires n etaient pas des h ommes


de grande science O n comp t ai t ceux qui avaient fré
.

q u en t é le collège le p l us grand nombre n avait pas


même été à l é cole Q uelques uns néanmoins étaient




.

doués d un vér i table ta l ent



.

Tous croyaient à un e vo cation de Dieu et dé


ployaient dans l exercice de leu r apo stolat un e a r

deur infatigable et un désintéressem ent sans bornes .

Ils voyageaient sur de mauvais ch evaux semant ch a ,

que j our de place en place la parole de l É v an g ile et ’

couchant à la b elle étoi l e si la nuit les surprena i t en


,

route loin de tout e habita t ion .

D eux anecdotes empruntées à Milb ru n donneront


une idée exacte de la vie des pasteurs de l O u e st au ’

commencement de notre siècle .

Un de ces prédicateu rs qui t r ave r sa to u t le N ord


,

O uest d u t e rritoire homme long mince et ché t if


, ,

avec une physionomie séduisante et un regard ple i n


'

de do uceu r fort aimé de to utes ses ouailles reçut en


, ,
26 J U SS LA E NE E

p r ésent d riche p rop r iétaire un tit r e d t r o i s c e t



un e n

v i ng t ac r es Le prédica t eur était ex t rê mement pauvr


.
e,

et il a v ait été long t em p s avant de gagner à pein e de


q oi co
u t
n s er ver âm t o p e Il pa r t
son e e son c r s 1 . u

h eu r eu x de ce riche cadeau et par t it le c œ ur p énétré


d r econnaissance M ais au bo ut d t r o i s mois il avait
e . e

c han gé d avis et rencontrant un j our son bienfaiteur


, ,

Voici Monsieur lui dit i l vot r e titre que j e vo us


, ,
-
,

r emets .

P o u r quo i ? dit son am i s r pr i s ; n est i l pas en u



règle
C e n est pas cela ’

N e se r ait c e p as une bonne ter r e


E lle est plus fertile q u aucune aut r e



.

Croyez vo u s que j e regrette mon cadeau ?


-

J e n ai pas la moind r e r aiso n de do ute r de vot r e


généro sité .

A lors po urquoi ne pas la garder


,

E h bien Monsieu r dit le prédicateu r vo us savez , ,

que j e suis très amateu r de musique et mon liv r e de


-
,

chant contient u n hymne qui est un des plus grands


s o ut i ens de ma vie J e n a i pas été capable de le ’
.

chante r de tou t mon c œ ur depu i s que j e su i s p r o pri é


tai r e E t il se mit à chanter
.

J e ne po ssède pas un pied de ter r e ni chaum i ère ,

dan s le désert pauvre hom m e er r ant j e loge en ,

passa nt sous les tentes du ciel et j e va i s et j e v i ens ,

j oye u x j u sq u à c e que j e p u i sse atte i nd r e mon


,

1 E x me s s i o n q u e l o n

t v v t hz l es é riv a i ns
t t it i
e c
. r e ro u e s o u en c
b ap i s e s e t p u r a n s .
DA ’

R RA R A M L N I C O LN 27

Chanaan Là est m a m a i son et mon vé r itable pat r i


.

moine ; l a est mon tréso r l a mo n cœ ur comme


,

aussi mon séj our é t ernel .

R eprenez votr e titre aj outa t il ; j e p r éfè r e mon ,


- -

hymne .

Il y avait un autre prédicateu r de la classe des


pionnie r s passionné pour sa mission que ni faim ni
, ,

dé n ù m en t ne po uvaient rebute r I l était plu s instruit .

que la plupart des p rédicateurs des alento urs .

Lo n gte mps i l eut po ur li t le flanc nu e t g l acé d une ’

mon t agne les oreilles assourdies par les h urlements


,

en c h œur des loups D au t res fois il é t ait assez heu .


r eux pour rencontrer une ro ch e creu se où i l g l issait ,

son corps e t il tro uvait l a un bon abri contre la pluie


,

o u l a gelée .

Un j o ur qu il était assis pour dîner à la table d un


,
’ ’

trappeur l assistance f ut e ff rayée par de terribles cr i s


,

venus du côté de la porte de la cour O n se lève et .

l on voit un grand chat sauva g e s é lan c e r sur le plus


’ ’

j eune des enfants S aisissant un fu sil accro ché au .

dessus de la p orte le prédicateu r l é p au l a j eta l éclair


’ ’

, ,

d e son regard le long du cano n et fit feu Le point de .

mi r e avait été sûr mais t r o p tard l enfant était mo r t


, ,

déj à victime du fé r o ce animal .

Cette même année le mission naire eut corp s à ,

c o r ps avec un o urs une lutte dont il sortit vainqueur ;


i l avait plongé son co utea u dans les po u m ons de l a ’

n i mal j uste a temps pou r n e pas être éto u ff é dans sa


,

mo r telle ét r einte .
28 LA JU S E NE SE

D urant do u ze mois au milieu de tels a cc idents i l , ,

t r aversait a pied et à ch eval q u a t r e c e n t s m i l les p r é ,

c h a i t q u a t r e c e n t s fo i s et t ro u v ai t au bout de l an

, ,

en comptant ses recettes chausset t es de fil habits ,

de laine chemises de coton et quelqu e menue monna i e


,

d argent que son sal ai re s élevait à l a valeu r de


’ ’

1 2 d o lla r s e t 1 0 c e n t s (5 francs 50
I l p ersévérait quand m ême gagnait en savoi r et ,

en influence devin t do cteur en théologie et fut fait


,

président d une universi t é Il est connu dans l histoire



.

sous le nom de H enry Bi dle man Bascom 1 .

Le pasteur E l kins était un missionnaire aussi dé


voué que les précédents il aimait beauco up la famille
Lincoln et venai t la v isiter au ssi souvent que ses de
vo u s le lu i p e r mettaient S on attentio n avait été pa r .

1 D
l e r o m an d e s i o nn i er s d e P
o o p er , L o u s e G r a n C i t
t è é t t
. a ns ra
c o n e a i n s i l a v i e d e s o n p re à s es d b u s c o m m e m i n i s r e

m é th o d œ t e
è é
Mo n p r e a p a s s b i e n d e s a n n e s c o mm e m i s s i o n n ai r e , é
da n s l e s n o u ea u x t v ll ét tét l
a b i s s em e n s d u p a y s ; s e s o u a i e s ai e n
v l f v qé
p au r e s ; p u s d u n e o i s n o u s a o n s m an u

d e p ai n ; n o u S

v ht
n a io n s p a s l e m o y e n d e n ac e e r e t n o u s n o s i o n s p a s e n
’ ’

éh t f t s
d e m a n d e r , d e p e u r d e d s o n o r er s e s s a i n e s o n c io n

C él g f ll f t
.

o mb ien f j de o is l

ai

oi de am i fl
à f à l t q

e vu s ner sa e s ou an e ,

p ro i e la aim
l a m a ad ie , e t q u i p e r d a i s o n u n i u e
lt v t t ll t l
en et

c o ns o a io n e n le o y a n p a r i r ! O ù a a i - il ? r e m p i r d e s d e
lh
v o ir s q u e l e s m a tq v t
e u r s d o m es i u e s n e p o u a i e n l e d é t er
égl g
m in e r à n m t êt ffi l
i e r O li ! c o b ie n i l d o i h re di c i e d e c er
h l t q vé d
.

'
c e r à c o n s o er l e s a u r e s u a nd o n a l e cœ u r a b re u e1 a

t hg
m e r t u m e d e o u s l es c a r i n s
( f )
T r a d u c t i o n d e D c a u eo n p r e t
. .
D A AHA I C ’
29
RB N L N OLN

ti li è m t atti r ée par le j eune A braham uquel i l


cu re en a

ava i t prédit qu il se r ait un j o ur



non pas président ,

de la R épublique mais un excellent pionnier C é


.
,

tait le plus bel éloge qu o n pût faire de lui dans la ’

contrée .

PA P
DE RT O U R L HN DI A N A A RAHA M
B C MM
O -C D
EX SA VI E DE

P CAB NE T M
.

I O NN I E R . LA A E LE O UL I N .

Vers la fin de 1 8 1 5 l entreprise de Thomas Lincol n ’

avait relativement assez bien prospéré A utour de sa .

cabane quelques acres défrichés labourés et ens e m e n ,

c é s par ses mains donnaient chaque année de s at i s fai

santes récoltes L union et la paix régnaient sous son


.

modeste toit ; il avai t la meil l eure des femmes i n g é ,

n i e u s e ménagère épo use dévouée m ère v igilante ;


, ,

so n fils Abrah am gra n dissait chaque j o ur en sagesse


et en science a ff ectueux et obéissant déj à t rès fort
, ,

en l ec t ure e t p o u rtan t le pionnier n é t ai t pas sa tisfa i t ’

de sa condi t ion I l voulai t abandonner cette ferm e si


.

p éniblement é difiée émigre r dans u ne autre contrée, .

N o n qu il fût difficile a contente r ou que le goût du


changement et de la spéculation si commun chez les ,

A méricains se fût empa r é de so n esprit il avait une


.

au t re ra i son Le Kentucky était un pay s à esclaves où


.
30 LA J U SS
E NE E

le t r availleu r lib r e vivait non seulement s ans g r and -

p rofi t mais aussi sans considéra t ion ; v o i là po urquo i


,

Thomas Lincoln avait décidé d aller s établi r dans ’ ’

l état vo i sin l I n dian a 1 où il n y avait pas d es


,

,
’ ’

cla v es .

E n e ffet dans les travaux qui ne deman dent q u e d e


,

la force et peu d intelligence p our les cultures d u ri z ’

, ,

d u coton d u t ab ac pratiqué es dans les grandes plan


, ,

t at i o n s et p o ur lesque ll es la bête de so mm e rendra i t

autant de services qu e l homm e le nègre coûtant ’

moins ch er que le blanc que vouliez vous que fi s s e nt ,


-

l es gens pauvres q ui n avaie nt que leurs bras et leu r


courage pour sub v enir à leurs besoins ? O n ne voulait


pas d eux chez les pro priétaires et le p eu q u on en
’ ’

o ccupai t ç à e t l à et par intervalles vivait dans une si pro


fonde misère que les nègres eux mêmes bien soignés -
, ,

bien vêtus bien nourris et faisant p eu de besogne


, ,

n avaient que de la pitié et même du mép ri s pou r ces


f é V
1 L I n d i an a a é t é o n d à

F
i n c enn e s p ar d e s r an ç ai s v e

C v g é t ti
.

er s l a n 1 73 0 O r an i s e n err i o r e l e 7 m a i

nu s d u an a d a ,

t t hi g
.

18 00, o n e n a d i s r a i d e p u i s l e M i c an e n 1 805 e t l I lli n o i s


e n 1 809
tt t t j
.

U n e c o n s i u i o n fu t a do p é e l e 29 u i n 1 8 1 6 et l E t at a dm s

i
é ê é
d an s l U n i o n l e 1 1 d c e m b r e d e l a m m e ann e

ét t it é t ét t àl t
.

'
a d I n d i a na e s t s a s d I ll i n o i s ,

L en re les
’ ’

h àl t t h t M hig
u ou es ,
ic

e t d 0 io ,

I l o u c e au n o r d o u e s au lac an e t

é é l ét t t ky
es .


au s u d p ar l O h i o d e d u Ken u c

v è l h Wh t v f t W h
e s t s p ar a .

L O hi o , la r i i r e B an c e ( i e r i er ) , a fl u e n d u ab a s ,

et Wh h t
le l e s p r i n c i p au x c o u r s d e a u q u i arro s en

t
lt v t tè m t g
a as , son ce
i d e b o i s e t d e p ra i r es e t e n i r e e n a ri

l
p ay s p a , co u er

tl p l l ti ét t d
1
co e .

La c ap i a e e s t I nd i ana o i s , l a p o p u ai
h t t
a on e
ab i 1 860
S fi 3380 mi ll é
an s e n .

u p er c ie 9 e s ca rr s .
32 J LA E UN E S S E

Thomas Lincoln ; la ma i son et les te rr es , tout ce qu il ’

possédait en u n mot po ur quinze cent s fr an c s ! Si


encore Colby avait payé en espèces mais l argent ,

était r are ; le tabac le sucre le c oton serva i ent de


, ,

m onnaie ; Colby n avait lui récolté q u e du m ai s dont


, , ,

il avait fait du whisky et il n e p ut offrir en argent que


,

20 dollars et le reste du p r ix en whisky marchandise ,

d un placement facile d u reste dans un pays o ù déj à



,

l i v ro g n eri e co mmençait à sévir C était à p r endre o u


’ ’
.

a laisse r Thomas eut p eur de n e p as r et r o uve r l o c


casio n de se défaire d une p r opriété qui le forçait a


vivre so us un régime odieu x et il accepta l offre ’


.

C olby est un brave h omme disait Lincoln à sa ,

femme une fois le marc h é conclu et j e m é t onne


, ,

qu il semble si satisfait de venir s é t ablir dans le Ken


’ ’

tucky ; o n voit bien qu e l esclavage ne le tro u ble ’

pas .

Madam e Lincol n n avai t consenti q u a cont r e c œur



-

et el l e le fi t sentir à so n m ari .

I l est bie n h eureux m on ami rép ondit elle que


, ,

,

to ut le monde n ait pas vo s scrupules car le Kentucky


deviendrai t bientôt un désert E nfin que la volonté .

de Dieu et la vôt r e soient faites .

Les préparatifs du déménagement ne f u rent pas


longs Le p ère aidé d Ab rah am const r u isit en quel
.
,

ques j ours un de ces bateaux plats que no us ap p e



D A RRA H A M L N I CO LN 33

Ions sur leq u el il chargea le whisky quel


e h a la n cls , ,

ques m eubles et ses instruments aratoires Puis ayant .


,

embrassé s a femm e et ses enfants le pionnier des ,

c en d it seul l O hi o a la recherch e d un emplace ment


,

nouveau sur lequel il pourrait plan t er sa tente .

Comme la lai t i ère de la fable le br ave homm e ,

comptait ce que lui rapporterait en écus la v ent e de


son whisky et c omm ent il e n emploierait le prix en
,

semences en b étail en outils Mais v o il à q u à m oitié


, ,
.

ch emi n le bateau chavire et la cargaiso n tombe dans ,

l eau H eureusemen t quelques b ûcherons travai ll aient



.

sur la ri v e qui lui v inrent e n aide I l s repêc h èrent


,
.

t rois bari l s qui con t enaien t l a moi t ié du w h isky une ,

p a r t ie des o u t ils e t d u mo bilier remiren t à flo t l e ,

fr ê le esquif e t l e co urage u x Linco l n con t inua à des


,

cendre l a ri v ière j usqu à Thompson Ferry sur l a ri v e


droi t e Il étai t dans l I n dian a sur l a t erre l i b re q u il


.

,

avai t désirée Il s a gissait main t enan t de pénétrer dans


.

les terres .

U n nommé Po sey qui p ossédait une p aire de b œ u fs ,

moyennant l abandon qu e Lincoln lui fit de son b a


teau s enga g ea a le conduire l ui et c e qui res t ait d e


,

la cargaison à 1 8 mi ll es dans l intérieur d u comté


,

de S pencer Vo il à no s ho mmes en route ; m ais que d e


.

peines pour avan cer ! Il fallai t le plus souvent s e


frayer un chemin avec la hache si bien que plusieurs “

j ours fu r ent dépensés pour ce p etit traj et .

Tho mas Lincoln a raconté plus tard que j ama i s


d ans sa vie p o ur t ant si difficile il n avai t t r aversé

, ,

d au ssi rudes épreuves qu e durant ce voyage



. .

A . J O UA UL T . 3
34 LA J U SS
E NE E

A cinq o u six milles de l endroit ve r s lequel il se ’

dirigeai t en que l que sorte d i n s t i nc t e t sur les données ’

très v agues qu il avait p u recuei ll i r des bûcherons


-

qui l a v aient sau v é il arriva a v ec so n guide devant


l habi t ati o n d un fermier qui leur o ff rit u n e cordiale


’ ’

hospitalité et to us les r afr ai c h i s s em en t s que contenait


son humble logis Cet ho mme connaissait admirable
.

m ent la contrée Il indiqua à Thomas Lincoln un lieu


.

qui devai t ê t re très favorable po ur un n o uvel établisse


m en t e t o ff rit m ême de l y accomp agner C était une




.

j oie pour les co l ons d e ce t emp s là de voi r arri v e r —

dan s leurs alen t ours de nou v eaux hô t es p o ur a grandir


leurs rela t io n s et donner un p eu de mo uvement a leur
v i e soli t aire de pionniers I l s é t aien t to uj o urs disp osés
.

à prê t er assis t ance aux derniers v enus et m ême a


p ar t a ger avec eux les m odestes resso urces que leu r
a v ai t pro curées un t ravail O pini ât re .

M Linco l n é t ai t sa t isfai t d a v oir a tt eint le but de son


.

voyage mais i l fu t encore plus enchan t é de l em p la


,

cemen t que M Wo od ( c es t le n o m de son h ô t e ) v e


nait de l ui reco m mander ; c é t ait beauco up mieu x ’

que tout ce qu i l a v ait espéré Il n a p p ri t pas non plus


’ ’

sans une grande sa t isfac t ion qu i l aurai t que l ques e u


.

tres v oisin s une famille N eele vers l es t à enviro n deu x


,

m i ll es et deux au t res a six o u h uit mil l es au nord


M Woo d se chargea de lui garde r so n pe t i t m obi l ier
.

e t pendan t q u e Pos e y re t o urnai t à Thom pson Ferry


,

avec son a tt e l a ge Lincoln regagna a pied son do micile


,

par un c h emin p l us direc t au su d est qu il voulait é t u -


,

dier po ur rame ne r sa fa mille ave c moins de di fficultés .


D A RA A M I C’

R R 35 L N O LN

Je vo s laisse a p enser quelle fê t e au logis quan d il


u

f t de reto ur tou t es les questions auxqu elles il fallut


u ,

r épond r e le récit d aufr ge le voyage à trave r s les


,
u n a ,

bois l hospitalité de M W ood et les esp érances qu e


,

.
,

donnait la contrée choisie 0 11 se mit de suite en ro ute . .

Il n e restait dans la cabane que de s couvertu r es et


quelques vêtements et sou s un han gar trois ch evaux
, .

S ur l un o n plaça les c ouvertures qui servi r ent de selle


à Mme Lincoln et a sa fille ; A braham m on t a le second


et on lui confia la ga r de r ob e ; le père suivait avec le

t r oisième tantôt chevauchant tantôt a l lant à pied


, ,
.

Le v oyage dura sep t j o urs et n e fu t pas sans fa t igues ;


mais le courage et la force n e m anquaient ni à l a m ère
n i au x enfan t s et ils arrivèren t sans en combre chez
le u r plus pro ch e voisin M N eele qui leur o ffrit .

l hospi t ali t é j usqu a c e qu i ls eussent eu le temps de se


’ ’

bâti r un abr i .

Prends ta hach e mon fils dit un matin Thomas


, ,

L i ncoln nous al l ons b ât ir notre cab an e


, .

D eux j ours après l habi t ation n é t ait pas tout a fait


’ ’

terminée mais elle po u v ai t déj à ab riter la famille


, .

A près le g i t e il fallai t so n ger à la t able O n avait bien


,
.

du blé principal élém ent de l alimen t ation m ais l e


,

m ou l in l e plus voisin é t ait a près de vingt milles Ils .

en improvisè r ent un très primitif un grand t r o u -

c r eusé dans un t r onc d a r b r e avec un fe r r ouge et un


p il ou g r o ss i è r e ment ta i llé vo i l à to u t C e mo u l i n s e r vit


, .
36 LA JU
E NE S E S
néanmoins pendant plusieurs années à l a famille Un .

fou r et u n e daubière constit u aient dans la cabane , ,

toute la batterie de cuisine Leu r s au t res u ste nsi l es


.

étaient r estés au fond de l O hi o



.

Une des principales ressources était la ch asse Le .

gibier ab ondai t dan s l a contré e ; le t i r au dindon su r


to ut était un divertissement du p etit n o mbre de ceu x
que les planteurs ne négligeaient j am ais d adopte r ’

dans un no uvel établissement A p r ès avoi r employé


.

la co g née pour se pro curer de quo i se loger et se


cha u ffer les gens prenaient le fusil p our che r ch e r de
,

quoi se nourrir et se vêtir .

O n m it de bonne h eu re un fusil entre les mains


d A b rah am qui de v i n t rapidem ent un excellen t tire u r

.

Ce f ut sa première e t p eut ê t re sa seule ré création


-
.

To u t cela ne lui faisai t poin t o ub l ier l é t ude ’


.

D uran t les lo n gu es soirées du premier hi v e r passé


dans l I n di an a on voit A braham continuer à se pe r

f ec t i o n n er dans la lecture travaillant à la lu eu r du


,

foyer car les pionniers d e ce t emps l à n avaient pas


,
-

le moyen de brûler de l h uile ; à p eine tro uvaient ils



-

de quoi satisfaire à leurs b esoins les plu s i n di s p en


sab l es .

D A B RA H A M L N I C OLN 37

M O RT DE MA A M I C
D E L N OL N . A D R \ II A M
. C I
O NT N UE SE S É T UD E S .

Abraham a v ait do uze ans quand il p erdit sa mè r e .

La mor t d Mme Lincoln était la première qui fût


e

s r venu e parmi les famil l es de la colonie et el l e de


u ,

vint co m me la da t e d un e ère nouvelle dans l histoi r e ’ ’

de ce p e t it group e de pionniers .

O n prépara les f nérailles aussi bien que les cir u

constances le p erme t taien t Co mme manquait d é . On


glise de ministre de sacris t ain de sonneur et de c i


, , ,

m t iè
e il n y avait pas grand chose a faire
re ,

.

M Lincoln avait c h oisi p our la sépulture


. tertre un

isolé dans les bois a quart de mille de son habita, un

tion ; voisin y creusa la fosse et construisit p o r


nu u

servir de cercueil un coffre assez gro ssier .

Le j o ur et l heure des fu nérai ll es fixés tous les h a


b i t an t s a dix o u douze milles aux environs en f u rent


, ,

avertis Un ami pieux devait li r e les Écri t ures et u n


.
,

au t re r éci t er les prières .

Q u i a cheval qui en charriot le plus g r an d nombre


, ,

a pied toutes les familles de pionniers s as s embl èrent


à l habita t ion pou r payer u n j u ste et dernier t rib u t


de regre t s a la mémoire de celle qu elles avaient ’

aimée .
38 LA J E UN E SS E

Ce fut un mo ment solen nel des obsèques en de


p a r eilles circo n stances aux confins de la civilisation
,

doub l ent touj ours de maj esté La pau v reté et la situa


,

t i on pénible de la vie de pionnier s u ffis aient a les


empreindre du plu s doulo ureux intérêt au quel s aj o u ,

t ai ent en co re et les vertus de la défunte tant ap


r é ci é e s de toutes ses connaissa n ces et la désola
p ,

tio n de la fa mille S urto ut chacun é t ait ému a la vu e


.

d A b r a h am p auvre j eun e cœur brisé par la p erte


de cette mè r e qu i l chérissa i t d une a ffecti on sans


’ ’

bornes .

C e t te to mbe su r la hauteur des bois autel de la


, ,

p iété fi l iale fut longtemp s le refuge de l o r ph eli n


,

quand i l ne po u v ait plus rester dans son logis v i de de


celle qui le charma i t autrefois .

La c aban e était d evenue selon la touchante exp r es ,


'
sion du po ète am éricai n 1 c o m m e u n n i d d o ù la ,

m èr e s es t en v o lée e t s u r leq u e l i l es t t o m bé d e la

n ei g e .

Ene ff et la mort de madame Lincol n avait appo r té


,

u n grand changement dans cette famille do nt elle

était l â m e et pe r sonn e n e l é p re u va plus vivement


,

q u A

b r a h a m D urant quelques
. sema i nes so n espr i t
fut absorbé dans son deuil S es études co utumières .

du soir n e po uvaient chasser l e grand chagrin de


ses p ensées S on p ère qui s en a p erçut désira lui
, ,

appo r t er que l que so ulagement Il eut le bonheur de .

mett r e l a m ai n su r u n e x em plai r e du Vo y a g e d u

1 Lo n g f ll
e ow .
40 LA J E UN E SS E

d ire , et au m o ment où il en avait déj à r elu la m o i ti é


, ,

i l reç ut en cadea u u n autre v olum e qu i l int éres s a ’

aussi p r ofo ndément les F a bles d E s op e que lui o ff rit


, ,

m adam e Bruner pour le distraire et le co nsoler .

E s 0 p e devint bientôt le favo r i d Ab rah am et ses


fables son livre de ch evet .

Pendant qu il vivait dans ces deux livres arrive


dans la contrée u n nouveau voisi n D enis H anks


.

, ,

j eune homm e d enviro n vin g t ans qui savait un p eu ’

éc r ire .

O n lui demanda des leçons qu i l pro mit ’

L e temp s arriva donc pour A b r ah a m de prend r e


ses pre mières leço ns d éc r iture et il se mit à l œuvre ’

,

avec une ardeur entho usiaste Lisant bien i l voulait .


, ,

dès lors écrire de mêm e Il n e do u t ait pas de l a c


,
'
.

c o m p l i s s e m e n t de ce dess ein et il avait l a confian ce

que s i l po uvait apprendre a fo rmer des lettres il


,

ferait des progrès rapides .

H a nks s in t éressa à l ent r eprise presque autant


’ ’

q u A b r ah am lui même Il é t ai t h eureux de prê t er



-
.

aide a que l qu un qui montrait u n désir e t un goût S I


vifs po ur a pprendre H anks il est vrai était u n m é .


, ,

di o c re é cri v ain mais il savai t former les lett r es et po u


,

vait donner a un autre b eaucou p de renseignements


e t de conseils .

Les deux nou v eaux livres d A b rah a m et ses leçons ’

d é criture l a bs o rb èr ent a ce point qu il né ligea ses


’ ’ ’
g

t ravaux m anuels quotidiens S on p ère obser vait avec .

quel le ferveur il se plongeait dans ces études et l en ’

c o u ra g e ait fort ; mais il s ap e r ç u t un j our que le gar




D A B RA H A M L N I C OL N 41

co n donnait t r op al

esp ri t qu il o ubliait le pain quo
,

Viens A b e l Il ne faut pas négliger ton o uvrage


, ,

lui dit il -
.

Si nous ne no us o c cup ons p as suffisamment d ar ’

r ach er ces mauvaises herbes nous serons en retard ,

our l e s semail l es
p .

Laissez moi terminer m o n chapitre rép ondit


— —
,

l enfant

.

J e vois que tu ne fais rien et j e crains que tu n e ,

deviennes paresseux T ouj o urs étudier e t n e j a mais .

tra v ailler est pire que beaucoup de t ravail sans


étude .

Une minute et j y vais ,



.

Combien d enfants o n t répété la m ê m e cho se mille e t


mi l le fois ! A braham n a v ait p oin t l h abitude de parler ’ ’

ainsi e t c é t ai t quelque p eu nouveau pour son p ère


,

.

D o r d i nai r e i l était prom pt à obéir mê m e à quit t er


, ,

ses j eux ; mais l ab s o r b an t in t érêt de ses livres et de


ses écritu r es fut la cause de cet t e h é s Nat i o n .

Que ce soit une minute co ur t e ! répondi t le père


p r esque ir rité N ous devrions m aintenant do u bler

n otre besogne de chaque j our .

O ui dans une minu t e,


.

Mai nt en ant l m aintenant dis j e l



exclama le ,

pè r e avec un t on d autorité

.

A braha m ferma son li v re a co ntre c œ ur e t obéit —

parce q u il le fal l ait Ce n e fut pas avec un visage



.

aimab l e qu il se rendit au x c h amps et cependant il


,
42 LA JU S
E NE SE

Les braves gar ç ons dit son pè r e o be1 ss ent t ou , ,

j ours a leurs parents qui n o nt pas besoin de les ,


mener comme o n po usse du bé t ail .

J avais seulement b esoin de li r e une m i nute de


plus r épondit A braham


, .

E t moi j avais besoin que tu ne continuasses pas


, ,

et j e sais ce qui te vaut le mieux Que tu lises et qu e .

t u écrives bien ! Mais j e ve u x q u e tu travailles quan d


, ,

le t r avail l exige ’

ou LIN C OL N C
R E N O N T RE UN P F
RO E S S E U R DE MA É MA I
TH T Q UE S
E T DE NOU V E A UX L I V RE S p or n S A I I H
B BL O T ÈQ U E . V O Y AG E
A LA NOU V E LLE -
A
O RL E N S .

A qu elque temps de là Thom as Lin coln vint à se ,

remarier I l épo usa en secondes no ces une demoiselle


.

Sal l y J ohnston d E li s ab e t h t o wn ( Kentu cky ) A braha m


,
.

accueilli t t r ès cordia l ement sa b elle mère ; il lu i sem


— —

bla qu ell e co mblerait le vide laissé pa r la sainte


femme qu il avait tant pleu r ée et son at t ente n e fut


point déçue E lle fut pour lui une véritable mère


.
,

comme il étai t l u i même p ou r elle un fils affec t ue u x


-

et dé voué .

N ous a v ons vu comm ent le p etit pionnier ava i t


appris a lire e t à é cri r e Pou r complé t er cet t e i ns t r u c .

tion la Providence envoie dans le v oisinag e u n sav ant


,

D A B RA H A M L N I CO LN 43

c omm e on avait pas encore


n en

vu , M A n dre w
.

Cr awfo r d qu i po uvait enseigner


,
n o n- seulement la
lecture e t l écri t ure mai encore l

, s

a r i th m é t iq u e ju s
'
qu à la r èg le de t r o i s
S es cap acités une fois connues
.
,

M Li ncoln le pressa d ouvri r une é cole et p r om i t d y


’ ’

.
,

envoyer son fils .

Vo i là donc de no u vea u A b r aha m a l e c ole et fa i san t


de rapides prog r ès .

R ien de plus i ntéressant de plus i nstructif que , ,

l histoire de sa bibliothèque le hasard les c irc o n s


tances l ui app o r tent les meilleurs livres qu i l fa l lai t


'

pour former ce grand caractère dont la na t io n amé ,

ri caine aura b esoi n po ur son salut a l he u r e de la ’

guerre civi l e .

S a belle mère trouve à lui p r o curer de seconde main


la Vi e d H en r y C la y un des ho mmes poli t iques qui


se dé v ouèrent a v ec l e plus d in t e l ligence a l a cause ’

de l Uni o n e t de l E m a n c i p at i o n A b e au d ébu t de s a
’ ’

.
,

vie poli tique suivit le par t i de ce grand hom me qu il


, ,

p ri t pour maitre et po ur modèle .

La faço n dont le futur président devint pro priéta ir e


de la V i e d e Wa s hi n g t o n m érite d ê t re racontée Il

.

p ossédait la vie des grands hommes de P lu t ar q u e ,

c elle de Franklin ; mais le li v re qui racontait l hist oi r e ’

d u père de la p atrie du fonda t eur de la R épublique, ,

ap p artenait à son professeur M Cra w fo r d qui le lu i ,


.
,

avait prê t é .

ra h am avait fait de ce li vre une sorte de b r éviai r e


mettait dans sa po ch e le j our a so n chevet la ,

n u it , et dont il ne p o u va i t se sépa r er .
44 LA J E UNE S SE

Mais v o il à qu un o rage impré v u fon d su r la cabane


p énètre par les fissures d u toit et mo uille c o mp lét e


m e nt le volum e .

Co mment le rend r e a M C r awfor d en p a r eil état ? ’


.

se demandait il les larmes au x y eux



.

Il le fit séch er tant bien que mal et u n matin le ,

r apporta t out p enau d a so n m a ître e n lui demandant


,

du t emps p o ur p o uvoir en p ayer le prix quan d il


aurai t d u travail .

Vois tu ce t te pièce d e terre lui répondit Cra w


-
,

ford ? si tu veux m e la faucher le livre est à toi , .

Le march é f u t vite conc l u et dè s le lendemain à , ,

l aub e par une b e ll e matinée d automne a u s s i joy e u s e


,

que so n cœur il était a la b e s o g n e


,

Trois j o urs s u ffi ren t p o ur la m oisso n e t l h eureux ,


m oissonneur e m p o r t e son livre a la m aison plus fie r


.
,

de sa conquête q u A l ex an dr e de ses victo i res



.

A dix huit —
ans A b e est u n gran d et fort ga r çon
, ,

labo r ieux et relativement instruit très estimé déj à ,


-

d ans la co ntrée do nt il es t de v enu le secrét aire N o us


, .

le voyons alors choisi p ar un rich e m eunier M Pete r s ,


.
,

p our acco mp agner s o n fi ls J ohn qui devait condui r e ,

a l a N o u velle O rléans u ne imp ortante cargaiso n d e



-

farines e t autres marchandises destinées a app r ovi ’

s i o n n e r les planta t ions

C es t Lincoln b a t elier gagnant 1 0 dollars par m ois


.

Les deu x j eunes gens descendirent gaiement le


.
RAR A M L I N C O L N DA ’
R 45

g r an d fleuv e du Mississipi Ils avai ent à fa i re un t r aj et .

de m ille s .

L e paysage variait à tout moment Ils rencontraient .

souven t d autres bateaux conduits par un e bande


j oyeuse avec laquelle ils échangeaien t l es h u r r a h


traditionnels D e temps a autre ils é t aient arrê t és par
.

les habitants des plantatio ns riveraines D où v enez .


vous O ù allez vous ? Que l les sont vos denrées



? — ?

Les r éponses suivaient les questions et après qu el , ,

ques heures de repos les j eunes gens r epre n aient ,

leur course .

La nui t ils ama r raient à un des grands arbres d u


,

bord e t dormaien t sur le p ont en v elo p p és d une s i m ,


ple co uver t ure .

Parfois de lourds orages s ab at t ai e n t sur eux ; la ’

plui e tombait a to rrents le v ent faisai t r age e t i l fal , ,

lait défendre la frêle embarcatio n contre les assauts


de la temp ê t e .

E nfin no s deux j eunes voyageurs arriven t sains et


saufs eux e t la cargaison près du lieu de leur des t i
, ,

nation au n ord de la N o uvel l e O rléans Ils p r é v i en


,
-
.

n ent leurs clien t s qu i l s débarqueront le lendemain


et vont se coucher de bonne h eure sur leur bateau ,

pour êt r e frai s et dispos a la première h eure d u matin .

Abraham n était p as endorm i qu il entend dans des


’ ’
,

jo n es s i tués à p eu de distance de la crique où ils s t a


t i o n nai en t parle r à voix b asse comm e si l on t r am ai t

, ,

u n mau v a i s c oup .

Qui va là ? cria p ar deux fois A braham d u n e voix ’

forte en s am s s an t une barre de bois


, .
46 LA J U SS
E NE E

Ce sont des n ègres ; il n y a ri en à cr ai n dre ’

murmura le fils du meun ier a demi éveillé ,


-
.

Mais a pe i ne avait il p r onon cé ces m ots q u un de


-

c es nègres (ils étaient sep t) d un bond p r odigieux ,


sauta su r le bateau d o ù A b r ah am le précipita dans


,

l eau d un coup de sa b a rr e Les aut r es se ruent alo r s


’ ’
.

sur no s deux j eunes gens ; m ais i ls avaient co mpté


sans la force et le co urage de leurs adve r saires Ils .

fu r ent bâtonn és et po ursuiv i s j usque dans les bois .

Ces malheureux ne se doutaient guè r e qu ils y é ’

n ai e nt d at t aque r le futur lib érateur de leu r r ace !


La cargaiso n fu t livré e en b on état au x plan t eu r s de


la N o u v elle O rléans et A bra h am rap porta dans l I n

,

diana une r éputation de b atelie r p r udent h ab i le et ,

co u r ageu x .

V
N O U E LL E EMI C R A T I O N . LA F A M I LL E IC
L N O LN S

ETA D L I T
D AN S ’
L I LL INOI S .

Le g r and p ère d A b rah a m né dans la Virgin i e



était venu dans le Ken t ucky O n connaî t sa triste fin


,

Thomas Lincoln avait qui tt é le Kentu cky terre d es


.

claves po u r l e pays libre d I n dian a ; il devait encore


,

aller en avant G o a h ea d ! Les r écits les plus séduisants


.

c o mmençai ent à c ircu le r dan s les an ci ens E tats s u r


48 J U SS LA E NE E

aidés de leurs s œ u r s et de leu r m ère A insi éq ipé


u .

po ur u n voyage qui durai t des semain es souvent des


mois l é mi g t partait dédaignan t la fatigue p r o

,
r an ,

chaine les chemins m auvais les rivi ères sans p onts


, , ,

le so uci des orages le som m eil sur la dure o u dan s u n


,

c hariot la mal adie les acciden t s et fréquemm ent la


mort en route Il préférait arrê t er sa pensée sur la
.

no u v eauté et l excita t ion du voyag e sur les ressources


vantées d un pays inconnu et sur les avantages pro


b ab l e s de so n c h a n gement D urant dix o u quinze .

milles pa r j our les v oy a geurs rencon t raien t a tra v ers


, ,

des che m ins non frayés ici des m ontagnes des maré , ,

cages de s cours d eau la des forê t s épaisses tou ff ues


,

, , ,

de v as t es prairies où l horizon seul arrê t ait le regard ’


.

La caravane d e pio nniers hommes femmes et ,

enfan t s t roupea u x e t bêtes de somme avançai t péni


, ,

blement j our par j our do rmant la nui t sous la large ,

voûte des cieux et accomp l issant avec patience son


entreprise qui durai t des semaines sinon des mois ,
.

Vo ilà co mm en t voyagea M Lincoln Il avai t p ou r


,

. .
,

transporter les biens des trois famil l es deux at t ela ,

ges l un de deux b œ u fs l autre de qua t re A b raham


,

,

.

conduisait le dernier Leur traj et m esurait plus de .

deu x cents milles ce qui n était pas u n e entreprise


,

excessive pour la p ersévé r ance et l h é r oïs me des ’

fami ll es de pio nnie r s .

Le t emps les favorisa presqu e constamment malgr é ,

la boue qui enco mb r ait les chemins Pendant des milles .

Abraham cheminait dans un pied de fange ; so uvent


durant u n e longue distance il av ait de l ea u j usqu au x
,
’ ’
,

D A B RA H A M L N I CO LN 49

genoux et ses genoux étaient à une b elle hauteu r '


,

A u bo u t de cent cinquante milles la caravane se


; ,

tro uva en face de la rivière Kaskaskia où les ter r es ,

basses étaient inondées Que faire en pareille o ccur .

r ence ? Abraha m donna son a v is et l action s u ivit ,


-

de près Dans l eau j usqu à la ceinture il guida so n


.
’ ’

attelage po ussant ses b œ u fs et égayant ses co mpa


,

gnons par des paroles encourageantes S on h abi t ue l le .

énergie et sa force de caractère l ai dèren t à surmonte r ’

toutes les difficu ltés .

Le voyage du co mté de S pencer (Indiana ) a D eca


t u r ( l lli n o i s ) dura quinz e j o urs L e lieu c h oisi p o u r .

s y fixer était situé au no rd auprès de la rivière San



,

gamon a environ dix mi l les a l es t de D ecatur pos i


,

tion excellente en t re les bois et les prairies


,

La maison n e tarda p as a être co nstruite et A be ,

prit sa bonne part d u t ravail .

Dix acres de p rairie s f u rent réservés e t ento u rés


de ces fa meux piquets dont o n a tant parlé dans l a
ca mpagne présiden t ielle qui précéda l élec ti on de ’

Lincoln .

L existence de ces pi quets dit M S cripps fut


, .
,

signalée à l a tt ention publique p endant une sessio n


que t enait à D é c at u r la convention répub l icaine de


l Illin o is O n en prit deu x po u r y a t tac h er des ban

.

n i ère s portant des inscriptions de circonstance et ,

i l s furent présentés à l assemblée au mi lieu d u n ’ ’

enthousiasm e indescrip t ible A près cela on en de .

manda dans tous les E t ats de l Un i o n o ù le travail ’

était en ho nneur Ils fu r ent p ortés en procession


.
,

A J O U A UL T
. .
50 LA JE U SSNE E

co mm e des r el i ques et acclamé s pa r u n peu ple


,

entie r co mm e un symbole d u trio mph e des d r o i ts et


de la digni t é du tra v ail libre .

J ai v u une cann e qu avait envoyée à L i ncoln u n e


’ ’

de ses vie i lles connaissances de l I n diana c a n ne


faite d un des p i quets q u i l av ai t ta i llés d ans sa jeu


’ ’

nesse .

ABRAHA M I
QU TTE S A FA M I L LE E T DE V I E NT CO M M IS D UN

M E UN I E R .

A u p r intemp s suivant Lincol n , quitte s a famille ,

après l avoi r établie p our alle r


, chercher fo r t u ne
ailleu rs .

N ou s le renco ntrons d abord dans le co mté de


Menard près Petersb urg travaillant à l o uvrage qu il


, ,
’ ’

t r o uve Il p asse l hive r ch ez u n no mm é A mst r ong



. ,

h omme pauvre et avancé en âg e L h o s p i t ali t é qu o n



’ ’
.

lui av ait o ff erte gratuitement il la payait en leçons


qu il donnait l e j our au fils d e la maison un fo r t

,

m auvais suj et dont il sera question plus tard Il con


,
.

sacrait en p ar t ie la nuit à co mpléter son i nstruction


par la lecture de quelques livr e s nouveau x q u il av ait ’
f

t rouvés dans la maison .

La j eu nesse du pay s ne ta r da p as à le r ema r qu e r .


D A BRA H A N L N I CO LN 51

C est a cette épo qu e qu e l esti m e publiqu e aj outa au


’ ’

d iminuti f de son nom l é p i t h èt e d h o n n é te et q u on


’ ’


l ap p ela

L H O NNÊ TE A BE

.

Lincoln n e fut j amai s u n élégant : m ais il p ara î t


qu en ce temps l a il était des plus mal habi ll és si mal
’ ‘

-
,

qu il s en apercevait lui même


’ ’
Que vou l ez vo us ? -
.

disait i l a ce suj et ; moi j e p r éfère u n bon l i vre à un


-
,

bea u vêtement E t en effet p en dan t l hiver passé


.
,

chez A ms t ro n g i l aj outa quelques liv r es nou veaux à


,

sa précieuse bibliot h èque .

A u prin t emp s de 1 8 3 1 Lincoln est en gagé par un “

n ommé B e n t o n O ff ut m archan d m eunier a N ew ,

Salem po ur u n no u v eau voyage à la N o u v elle O rléans


,
-
,

moyennant 1 5 d o l la r s p a r m o i s prix extraordina i re ,

pou r le temps .

S on patro n n ayant pas tro uvé de bateau a acheter


,

charge Lincol n de lui en cons t ruire un L e b ateau ter .

miné A braham se m et en route et déploie dans le


,

voyage tant de qualités que p endant le re t o ur mêm e , , ,

il est engagé comme premier co mmis de la bo utique


et d u moulin de son pa t ron sis au vil l age de N ew ,

S alem .

Voilà don c le futur président de la république c ler k


de marchand et bien t ôt le premier du pays Il con
, .

q u i é rt la c onfiance de tous et devient un arbitre sans


ap p eL

A be l a dit ’
plus r ien a aj outer S on opin i on
.
52 LA J E UN E SS E

Il ex erça i t d epuis trois mois cette n o uvelle p ro fes


sion lorsqu un sieur N elson D ay qu i avait l h abi tu d e
,

,

de fréquenter la b outique vint le voir et le t r ouva , ,

u n livre à la m ain .

T ouj ours à l ir e c omm e d habitude l u i d i t il et


,

,
-
,

la grammaire en core ?

O u i ; j e désirerais en connaître quelque chose .

J e n e m en suis pas o ccupé j usqu à p résent


’ ’
.

Moi non plus ; mais j e ne m en p orte p as plu s ’

m al Co mment po u v ez v o us tra v aille r ici au milieu


des ac h eteurs qui vous dérangent a chaque ins t ant ?


.
,

Fra n klin avait to uj o urs u n li v re a la main ; j e


fais comme lui r épondit A b e , .

Vous co n naissez don c bien sa vie ?


Certainem ent depuis plusieurs années dé j à ; et
,

s il n avai t pas fai t précisemen t ce qui vo us semble s i


’ ’

extraordinaire il eût fabriqué des chandelles to u te sa


,

vie
Abra h am n e quit t a pas sa vieille gram maire sans la
.

p osséder sur l e bout du doigt et v o il à comment ave c , ,

de la p ersévérance sans autre m aître que la volonté


,

de savoir il apprit à parler et à écri re cor r ectement


,

sa langue maternelle Aj outons que ce fu t sans p réju


.

dice po ur son p atron et que l étude ne fi t o ublie r


,

à Lincoln ni ses devoirs de co mmis ni les in t érêts de


la bo utique et d u mouli n de N ew Salem -
.

D A B RA H A M L N I CO LN 53

GUE RRE DU FA C I
U O N- N O R . I
L N COLN CAP I AI T NE C EO MET RE

ÉGI AT E UR AV O CAT
, ,

L SL , .

A u pr intemps de 1 832 éclata l g e rr e d Faucon a u u

N oir ( B l h H w k)
a des chefs indien s les plus r e

a ,
un

d o u t abl e s L e go uv erneur de l Illi n o i s appela sou s les


.

armes quatre r égiments de volontai r es D es agences .

de recrutement furent o uvertes en diffé r entes lo ca


lités ; mais co mm e il n y en avait point a Salem Lin
,

c oln allait s engager dans u n e v ill e voisine lo r squ on


’ '

,

obtint l autorisation de lever une compagn i e entière


dans le pays .

Ce s era p o u r trente j o u r s disait o n ,



.

T r ente mois s il le faut r épondit Lincoln


,

,
.

E t p a r son ardeur patriotique il en fl am ma et en


]

, ,

t r aina toute la j eunesse du p ays si bien qu on le ,


nomma capitaine .

L a compagnie de N ew S ale m s e rendit au camp de -

Bea r ds t own et m archa de l a à l a rencontre du Fau


,

con N oi r
-
.

Les trente j ours exp i rés o n n avait p oint encore vu ,


l ennemi La compagn i e fut dissoute à O ttawa et en



.
, ,

v r a i s volonta i r es amé ri ca ins la plupa r t des hab i tants ,


54 LA J E UN E S E S
de S alem r entrè r ent chez eux la i ssant la place à ,

d autres

.

A ppel est fait a un e nouvelle levée et Abraham ,

s engage com m e sim ple soldat


Trente j o urs en core se passent et la gue rr e n éta i t


pas finie Le régiment avai t fait son temp s il est r en


.
,

v o yé dans ses foyers co mme le premier .

Lincoln s engage un e troisième fois et prend part à


la batail l e de Bad Axe qui termine la gue rr e par une -


,

é cla t an t e v ic t oire .

I l re t ourn e alors a Salem ayant p e r du son ch eval ,

p rès de Janes v ille (Wisc onsin ) descend en cano t la ,

ri v ière des R ochers j u squ à Dixo n t raverse à pied la ’

contré e j usqu à P eor i a où il t ro uve sur la rivière de


l I llin o i s un cana l qui le m ène à 40 milles de son do


,

m i c i le t ra j e t qu il dut faire a pied


.
,

S a ren t ré e a Salem fut j oyeu sement fêtée par ses


n ombreux amis .

A dater de ce t te campagne les v i eillards l ap p elèr ent ,


encore A be ; mais l es fam eux volo n t aires du premier


mois n e le nommaient plus que le C ap i ta i 7qe tout ,

fiers d avoir servi sous un tel chef



.

On
songea alo r s a l envoyer à la législatu r e de ’


l E t at quoiqu i l n h abit â t le pays que depuis n euf
,
’ ’

m ois et ne fû t connu q u à N ew Salem tandis que les ’


autres candidats hommes du r este fo rt dis tingués ,


étaient en r ép uta t ion dans tout le c ô mt é Il é ch o u e .


,
56 LA J U SS
E NE E

agitateur du S u d un des chefs les pl u s a r dents du ,

part i esclavagiste .

D onnez vous à l arp ent ag e ! dit Calhoun




.

J e n y co nnai s r ien

.

Apprenez .

Comment ?
Facilement si vous en avez b esoin p ou r v i v r e
, .

E t v o i là Lincoln arpenteur M Calhoun lui prête . .

F li n s et G i ls o n deux livres où il a pprend la g é o m é


,

t ri e pra t ique contin uant ainsi l étude des m at h émat i


,

ques qu il avait laissée à la règle de trois


,

L arrivée des émigrants qui ch erchaient des terres


don n ai t une grande impor t ance à la profession d ar


p en t e u r la première qu avait exercée Washington


, .

Lincoln y apporta des aptitudes spéciales et il la


remplissait avec su ccès depuis plus d un an lorsqu un ’

,

événement inattendu pour lui vint cha n ger sa po


s it i o n .

à M o n er e t y et tè tl e 1 er t
s e p em b r e 1 8 49 a do p C o ns t it u
t t l l l l lvg
, r en u ne
io n f r en erm an

ex c u s io n de

g vl
u ne c au s e pou r es c a a e .

L e S u d m e na ç a d e s c i s s io n e t d e

e s i l e s cl a ci i

v g ét t l C lf lt l v g t
u e rr e

ai ex c u d e l a a i o rnie et les u r a-e s c a a i s e s ,

t C lh l v t l
a e

co n d u i s p a r o u n , ce u i q u e i e n d e r e n c o n t er Li n c o n ,
t lm t jt C lif
a

d e m a n d a i en n o n - s eu e e n l e r e e d e l a a o r n i e d e l U

g i t
n io n , m a i s e x i e a e n t '
c o n c e s s i o ns , u n

t à C tt t à éq l
* *

en c o r e , e e au r e s

am en dem en la o n s i u io n ! t i né u i i b r er l e p o u

v ltq tt l tt à lv
.

o i r p o i i u e d e s E a s ib r e s e t d e s E a s C e bu t
t v êt tt t ti
esc a es .

p ar a i s s a i p o u o i r ein p a r l a n o m i n a o n d e d eu x p r é
tt l l t tt à l
re a

s id e n t s , l u n d es E a s au r e d es E a s

ib r e s ,

v t v t t v t
e s c av e s ,

q u i d e a i e n a p p r o u er o u s l e s a c e s a an q u e c e s d e rn i er s
v t l
d e i n s s en d e s o i s
( g l
.

B i e o w , Les E t a t s - Un i s d A m ér i q u e en

D A BR A H A M L N I CO LN 57

D ans l été de 1 8 3 4 avaient lieu de no uvelles é lec


tions pour la législatu r e de l I llin o i s et l on n o ub li a ’

,
’ ’

pas Lincoln .

Il commençait à êt r e connu de to ut le comté .

Soldat il s était engagé le p r emier et n avait qu i tté


,
’ ’

que le dernier le champ de bataille .

A rpenteur il avait rendu de grands services au x


,

colo n s .

D ans les a ff aires p ersonne n e m ontrait plus de ,

loyau t é et d in t el l igence e t ses ver t us privées a v aien t


fait l admira t ion de t o us ceux qui l a v aien t connu


’ ’

puisqu on le surnommait l H o n n ê te A be
’ ’
.

Les élections euren t lieu par u n e b el l e j o urnée


d août Les votants étaien t nombreux ; e t Linco l n

.
,

selon les prévision s de ses amis fut n ommé à une ,

forte maj orité Ceux ci l e soir vinrent le féliciter Il


.


.
, ,
.

était d us age de traiter ses par t isans en pareille o ccur


rence ; mais Lin coln s o b s t i n a a leur refuser du rhum ’

et d u whisky e t n e leur o ff ri t que du t h é et d u café


,
.

Ils le rai ll èren t for t a ce pro pos mais n e l en e s timé ,


rent que davantage .

C est p endant qu il Si é geait a la législative que L i n


’ ’

coln s e r ésolut à étudier le droit .

Il se lia avec J ohn T Stuart éminent j urisconsulte .


, ,

l un des ho mmes les plus distingués de l E t at qui en


’ ’

, ,

j u di cieux observateur s ap er ç u t bientôt qu e son j eune ,


_
collègu e était doué de talen t s Il lui conseilla d étudie r .

58 LA J U SS
E NE E

les lois l en c o u r ag e a et lui ouvr i t sa bibliothèque


,

.

A braham réfléchi t aux conseils de M S t uart dont .

il subit l as cen dant e t peu de temps après la fin de


la première session il t ravailla po ur de v eni r a v o cat


, .

A fin de m i eux étudier il p rit la r ésolution de ne ré ,

c ev o i r personne dans la soirée p our ne pas risque r ,

sa santé par de tr 0 p longues heures de travail noc


turne ni séduc t ion s ni pro messes de plaisir n e l an ’

raien t dé t ourné de la règ l e qu il s était imposée ’ ’


.

D e N ew Sa l em où il avai t son b u r eau de g é o mè


-

tre a S p ringfie l d où se t rou v ai t la bib l io t h èqu e de


,

M Stuar t on comp t ai t 22 milles Lincoln faisait à pied


.
,
.

fréque mmen t ce voyage A près u n e j o urnée d ar p e n .


tage il se me tt ai t encore en ro u t e le soir pour alle r


,

c h erch er les li v res nécessaires à ses é t udes de droit .

E n six m ms il a v ai t appris p resque par c œ ur les C o m


,

m e n ta i r es de Blacks t one 1 et i l n e t arda p oin t a être


reçu avo ca t c h ose du reste des plus faciles en ce
,

temps l à e t peut être encore auj ourd h ui


-
,


.

ét t v t l k
1 B ac s t o n e v tà
ai u n a o ca d e Lo n d r e s q u i o u r i Ox
f t vl ltq l
.

o r d e n 1 7 53 u n c o u r s d e d r o i c i i e t p o i i u e S e s e ç o n s
lé ti t
. .
,

r e d e C o m m e n t a i r e s s u r les l o i s d A n g le

p u b i e s s o u s le
t é A é iq q A gl t
t e r r e , a u s s i e s i m e s en m r u e u en

e e rr e , o n t d e

v t t y ê t té t
n

l e s r i b u n a u x d e c e s p a s l a m m e au o r i
P thi F v t C vi l q u e no r e
an

o er en r a n c e a an l e o de c i .

D A B RA H A M L N I CO LN 59

I
D É DU S B
'‘ ’
ABRAHA M IC
L N OL N A U B ARREAU DE P
S R NI GFI E LD .

O n sait p eu de cho se su r sa carr i ere d avo cat sinon ’

qu i l n e vo ulai t poin t se charger d une cause a laq el l e


’ ’
u

il ne croyait pas de droi t s scrupuleux à ce point ,

qu o n le vit

j o ur abandonner son c l ient au moment
un

de le défendre parce que l avo cat ad v erse v enait de


,

lui pro uver avant l audience q il avait t rès certaine


u

-

m en t tort .

Co mme o r ateu r il était plein d ,


i et d une ’
en t r a n

bonne humeur que rien pou v ai t al t érer S a parole


ne .

r espirai t la franchise et l honn êt e t é e t l esprit y abon


,

dait Dans ses plaidoiries on t r o uvait de quoi p enser


.

et de quoi rire .

Il était bien a la b ar r e le disc i ple de cet Es 0 p e dont


les fab l es a v aien t t ant char m é son enfance ; i l aimait
à frapper l espri t de ses audi t eurs par des anecdo t es

et des apologues qui lui réussissaient mieux que les


longs et pompeux disco u r s ordinaires aux avo cats
am éricain s .

Un j o u r i l avait po ur adversai r e u n de c es hommes


,

pa r lant sans cesse d u r espect qu o n doit au x p ri n ’


60 LA J U SS
E NE E

cipes aux lo i s de la société n e vo ulant p as en dé


, ,

m ordre et disant touj o urs avec leu r s lunettes su r le ,

nez leurs ch eveu x h érissés une gro sse voi x tonnante


, , ,

que leurs adversaires n e connaissent p as les


ci p e s violent les p r incip es et qu eux seuls
, ,

sont les organes et l es conservateur


Lincoln au lieu de se l aisse r déferrer p ar cette y ig o u
,

r euse argumentatio n de son adversaire en lunettes ,

lu i dit
Mon ch e r c ollègue vo us m avez r appelé to u t a
,

l h eure une h is t oire qui s est passée dans mon en


’ ’

fan c e J avai s un voisin qui sortant de sa maison



.
, ,

prit un fusi l et dit a so n fils Vois tu là bas u n écu — —

r ui l Il y a u n é cureuil sur ce t arbre


e ?
N o n j e n en .
,

vois p as Le père tire u n co up de fusil il y a touj ours


.
,

u n écureuil sur l arbre ; u n second coup il y a touj o u r s


un écureuil ; u n troisièm e coup l écureuil est t ouj ours ,


l a E nfin il di t a son fi l s R eprends ce fusil il est év i


,
.

dent qu i l n e v aut rien Mais non m o n p è r e c e


,

.
, ,

n es t pas la fau t e du fusil c est tout simplement un


,

p oi l de vos sourcils qu e vo us voyez à t raVer s vo s l n


n ettes et qu e vous prenez pour un écureuil qu i
,

n existe que dans votre i magination 1


Une des premières plaid oiries de Lincoln est r esté e


célèbre E l l e se r attach e au x so uvenirs de s a j eu
.

1 . Au g t C h
us e oc in

D A B RA H A M L N I CO LN 61

n esse i l défendait un accusé inno cent et r en c o n ,

t r ait l o qcasi o n de payer une dette de reconnais


sance la veuve d un de ses premiers bienfaiteurs’


.

Dans un c a m p m ee t i n g du co mté de M enard une ,

rixe avait eu lieu et un homm e avait été tué Les


,
.

soupçons se portent sur un nommé J c é qu on arrête ,


malgré ses pro t es t ations e t qui se t rouve ê t re cet an ,

cien élè v e d A b r ah am le fils de M A rms t rong don t il


,
.

avait habité la maison la p remière année après avoi r


,

quitté sa famille .

Les lan g ues a l laient leur t rain ordinaire sur les fâ


ch eux antécédents de l accusé ; o n rappelait les moin ’

dres inciden t s de so n enfance p as un de ses actes


l es plus i n s i g ni fiant s qui ne fût l indice cer t ain d une
’ ’

perversité préco ce expliquant l h o r rib l e crim e dont il ‘

venait de se rendre coupable O n plaignai t bien la .

pauvre mère mais il fal l ait que j ustice se fi t et la sur


, ,

excitation fut porté e a un t el point que si J o é n avait


,

pas été protégé par les murs de sa prison il eût été


p endu par la fo u l e après un simulacre de j u gement .

Il eût subi la loi de Lynch 1 .

h
L o i d e Ly n c j tL h - la w u s i c e s o m m a i r e q u e l e p eu
1
tt U v
.
, y n c ,

n i s d A m é r i q u e , c o n t r e l e s i n di i du s

l e x e rc e au x E
t l té l ffi l
e a s-
p
j i d i

m u ni i

s a n c e d e s o i s ; il l es

l g t f t
q u i o u s s e n e p p ar ns u

p e n d o u eu r i n fl i e u n c e r a i n n o m b r e d e c o u p s d e o u e
év t Jh h l C
.

O n d r i e c e n o m d u n c e r a i n o n L y n c , c o o n d e l a ar o

lin e eu X V II è l t v t t
s i c e , q u e s e s c o n c i o y e n s i n e s i r en d un

v ét j g é
°

p o u o i r d i s c r i o n n a i r e a fi n d e u er e t d e r p r i m e r i m m e
m é é l l t
d i a t e e n t l e s d s o r d r e s i n s p ar a b es d u n e co o n i e n a i s s a n e ;

tt m t été té
e s u r e au r a i t tt
a do p e p a r l es a u r e s E a s d e l A

t l l
ce e
m i
é r i q u e d u N o r d p o u r d e s c r c o n s a n c e s s e m b ab e s
( tt é
.

f ) Li r , D i c t de la L an g u e

. r a n ça i s e .
62 JU S
LA E NE SE

Le j e un e homme valait po u r tant mieu x que sa r é


puta t ion ,
et le p assage de Lin c ol dans sa maiso n l i
n u

avait p r ofité .

M A rmstrong était m o r t d eux o u tro i s an s ap r ès le


dépa r t de ce dernier ; Jo e s était mis à la tête d e la
.

fe r me et sa mère n ava i t eu q u à se lo u e r de s es
,
’ ’

bons p r o cédés .

La malheureuse femm e était au désespoir ; elle


cherchait en vai n ce qu elle pouvait faire po ur sauve r

son enfant retenu e chez e ll e par ses devoirs de m é


,

nage et for t éloignée de l a p ri son lorsqu elle r eç u t la ,


lettre suivante

S p r ingfield ,
ILL . sep .

Chère m adam e A rmstrong j e viens d appren dr e ,


vot r e p r ofonde afflict io n et l arrestation de vo tre fils


po u r un meur t re J e p uis hardimen t croire qu il ne


.

peut être coupab l e d u crim e don t on l accuse Cela ’


.

n e me para i t point p ossible J e suis impatient qu il



.

ait à to ut prix u n j ugement équi t able ; e t m a recon


naissance pour vos persé v éran t es b ontés envers mo i
quand j étais dans la détresse m e po usse à vou s o ff ri r

gratuitement mes humbles serv i ces en sa faveur C e .

m e sera une o ccasion de m a c q u i t t er dans une faible


m esure des bienfaits que j ai r eçus de vou s et de


,

vo t re regrettable mari lorsque votre toit m e donna


,

un e g r acieuse hospita lité sans argent n i r é c ompense .


Vot r e affec t ionné ,

Ab raham L IN C OL N .
64 LA J U SS
E NE E

faveu r de l asile des ’


o r ph elins et des écoles lib r es
d A l ex an dri e

Par une fro i de nuit de j anvier u n p etit gar ç on , ,

n ayant ni logis ni toit pour abrite r sa tête sans


père ni mère sans guide p o u r p rotéger son existen ce


, ,

s en vint frappe r à la porte d un riche planteur q


’ ’

l a c cu eill it lui donna à so uper et à c oucher et


, ,

lendemain le congédia a v ec sa bé nédic t ion Cette .

humanité réconfo rta son cœur e t lui inspira un n o u


veau courage po ur l utter con t re les obs t acles de la
vie Des années s é co u lèr en t ; l a P ro v idence l aida ; il
.
’ ’

était devenu avo cat S o n ancien h ôte mourut ; les


.

vautours qui font d ordinaire leur proie des biens


d un homme complotèren t de dépouiller la veu v e de


sa succession E l le co ur u t au plus pro ch e avo cat


.

p o ur lui confier sa caus e e t i l se tro uva que cet ,

a v o ca t é t ai t l o rp h eli n que feu son mari avait quel


ques années auparavan t bien accueilli et régalé L e


,

stimulant d une vi v e et fidèle reconnaissan ce vint


.

s aj o u t er aux devoirs de sa profession Il se chargea



.

de la cause avec une volonté contre laquelle de


v ai en t se briser les r ésistances e t gagna son pro cès

la fortune de la veuve fut mise en sûreté po ur to u


j ours ; e t , aj outa M Stephens avec une fo rce d é
.

mo t ion qui électrisa l auditoire cet orphelin c était


,

moi !

C est en 1 83 7 q u A b rah am Lincoln com mença l ex er


’ ’ ’

cice de s a p r ofession d av o cat ’

.

I C
D A BR A H A M L N OLN 65

i
V n gt-t r ois p l us tar d les citoyens d u N ouveau
an s ,

M onde plaçaient à la t ê t e d u go uvernemen t de l U


,

nion le p etit pionnier le ten deu r de bois comme o n


, , ,

dont j e vie ns de r aconter la j eunesse .


D E U X I È M E P A RT I E

L A VI E P O L I T I Q UE

B A B RA HA M L I N COL N

L A VI E P O L I T I Q U E

B A B RA HA M L I N COL N

IC
L N OL N AU C G
ON RES D E 1 8 47 G UE RR E DU M E X I Q UE DI S

C MI
. .

T RI C T D E OL O B E . D RO I T D E DET I T I O N , E T C E TC .

La j eunesse d Ab r ah am Lincoln c est l histoi r e


,
’ ’

même de tout l e peuple des É t ats Unis marcha n t -


, ,

dans le silence et l obscurité a la conquête pacifique


d u N ouveau Monde par le tra v ail et la liber t é



.

Pionnier du grand O ues t pendant la premiè r e partie


de sa vie nous l a v ons vu exercer t ous les m é t ie r s
,

mêm e les plus humbles que lui font ren contrer su r


son chemin les hasards et les nécessités de l existence
,

Qu on ne s étonne pas pou r cela de son éclatante


’ ’

D e l aut r e côté de l A t l ant iq u e on ne demande pas


’ ’

a un homme ce qu i l fait mais s il fait quelque c hose


’ ’

, ,
70 LA VIE P O I IQU
L T E

et s il fait b i en ce qu I l entrepren d L o u vrier qu i



.

porte devant son établi un c œ u r dro i t et des mœu r s


p r ob es peut traite r d égal à éga l avec l homm e de

to u t e condi t ion et chac u n est classé dans la société


, , ,

d après les services qu il y r end et les profits q u e son



t r avail aj o ute à la fortune commune O n ne m ép r ise .

qu e l o i s i v et é

.

O r dans un pays o ù la civilisatio n cherch e a s im


,

planter p ar les arts de la paix où les h ommes ont de ,

v ant eux des soli t udes sauvages a déboiser et a dé fri


cher quand il faut to ut créer la maison la ferme
, , , ,

le moulin la hache du bûcheron et la charrue du


,

l aboureur sont des armes plus utiles et plus nobles


que le fusil d u soldat o u l épée du capitain e Ces ’
.

armes là Lincoln les avai t co urageuse ment maniées


-
, .

L avo cat é t ai t un ancien pionn i er et quand il paru t


, ,

sur l arène poli tique le p euple n e tarda pas a voi r en


’ ‘

lui comme une incarnation vivante de la dignité et


des droits du travail manuel .

Lincoln fit pa r tie p endant si x ans (1 8 34 1 8 40) de la -

législature 1 de l I lli no i s co mm e m emb r e de la Cham


1 Les p ou vt t gé t
o ir s pub l
ic s E tt U ni s s o n

g v t tt ( g v
. au x a s- p ar a s e n re

)
er n em en s L ég is l a t u r es
d es E et le

m t fé é l (
les
é v t f
ou a s o u er ne

) C o n g r ès , l e s p r e m i e r s s e r s er an l e s a f a i r e s
té t t t h té êt t
en d ra
i n r i e u r e s e t o u c e q u i o u c e au x i n r s d e s c i o y en s , l e
t h t i t t
s e c o nd a y an lt v
l a a u e m a n s u r o u e s l e s re a io n s a ec l é

g t Ét t ê a s eu x m me s

lég l t é t v gt
t r an e r , e t e n r e l es —
.

i s a u r e d e l I l li no i s s e c o p o s e d u n s na d e i n
m

La

72 LA VI E P I IQ
OL T UE

dir avec le te mps et Lincoln trouvait dans c ette ci r , ,

constance u ne excellente o ccasion de la manifeste r


,
.

M ais ses e ff or ts et ceux de ses amis ne furent po i nt


couronnés de succès .

Le résultat de l élec t io n donna 1 7 0 votes à Polk et


1 05 à H enri Cl a y e t le 1 m ars 1 8 45 le Texas était


, ,

,

annexé au x E t a t s Unis en quali t é d E t at à escla v es




.

E n 1 8 47 Linco l n prend place au Co n grès comme ,

m embre de la C h ambre des représen t an t s envoyé ,

par l E t at de l I llin o i s Il était le seul whig d e la d é p u


’ ‘

t ation qui comp t ait sept membres


,
.

D e graves qu es t ions se déba tt aient en c e m oment .

La guerre du Mexique soulevai t d immenses diffi c u l ’

tés et l iné v i t ab l e escla v age se présen t ai t au Congrès


,

so us tou t es les formes e t a propo s de tou t es les ques


t i ons d r o i t d e p é t i t i o n ; a d m i n i s t r a t i o n d u d i s t r i c t
d e C o lo m bi e g o u v e r n e m e n t d es t er r i t o i r es e tc ,

D ès le début Lincoln se dis t in g ue par la net t e t é et


,

la franchise d e ses opinions ; on devine immédiate


men t qu il n e sera j amais l homme des co mpro m i s
’ ’

basés s u r l e q u i v o q u e q u il veu t a v an t t ou t la j ustice ,


e t répro u v e co m m e contraires au droit des gens les


,

r écen t es en t reprises sur le Mexique


,

Il a ll ait en cela co nt re l es p ri t nation al et les e s


, ,

p é ran c e s ca r essées par tous les par t i s

1 P l t ll g

in i t t
l a p ar i e p o i i u e d e c e i r e
de t ltq lv
à g t
. our e en c e ou e

i l e s t i n d mp e n s a b l e d e v o i r

l A p p e n d i c e l a s i n i c a io n d e s fi
t
m o s dé m o c r a t e e t r ép u b l i c a i n , p a r t i d é m o c r a t q u e e t p a r t i i
r é u bli ca i n
p ,
d a n s l a an u e d e s E a s - l g
nis tt U .

D A E RA HAM L N I CO LN 73

O n disait on enseignait alors que ce qu etaient dan s


,

l antiqui t é la Grèce à la Perse R ome à Carthage les


, ,

E tats Unis le sont aux races espagnoles de l A mé ri ’


-

que du N ord Il ne s agissait p as seulement du Mex i


.

que ; mais tout le con t inent j usqu à l is t h m e de P a ,


’ ’

nama était voué dans l esprit populaire a une i n ’

corporation graduel l e dans la grande R épublique


, ,

E t ce rêve ambi t ieux n étai t pas con fi né dan s les


.

chaudes régions du S ud e t l imagina t ion des p oli t iques ’

méridionaux ceux ci semblaient autorisés encore a -

croire en raison des nécessi t és prétendues de l i ns t i


,

t u t io n de l esc l avage que ne p ouvant s étendre ve r s


’ ’

, ,

l O u es t ni vivre en p aix par d autres m oyens a v ec les


’ ’

E tats libres grandissants il leur é t ai t nécessaire d an


n ex er Cuba e t les vas t es régions misérab l es e t mal

c u ltivées mais b elles et fer t i l es qui s é t endent entre


, ,

les frontières d u Texas et les deux O céans pour fini r à


Panama
O n trou v ai t ce sentimen t partagé par u n grand
.

nombre d hommes d u N ord froids et modérés q u i


déploraient une t el l e n écessi t é t ou t en l a p r o c lam e n t


,

, ,

et considéraien t comm e l a d es t i n ée m an i fes te de la


race anglo saxone de dominer le con t inent en t ier et

d absorber la race espagnole tenue po ur aussi inca


p ab l e que les Indiens de développer les ressources


du pays et d é t ablir un gouvernemen t ferme et
,

74 LA VI E P I IQ
OL T UE

Le Congrès sous l administration de Polk (1 8 45


,

p a t ronnait t outes ces idées épiant l o ccasion ,


de chercher quere l le a u Mexique l annexion du Texas ’

vin t en fournir une qu on ne l aissa point échapper



.

L e général ! achary Taylor avec une p etite armée , ,

o ccupait la région située entre le N ueces et le R io


Grande qu e les E t ats Unis prétendaient apparteni r
,
-

au Texas tandis que les Mexicains affi rmai ent que le


,

Texas ne s é t ait j amais étendu au d elà du N ueces Une



-
.

légère collision s é l ève e n avri l 1 8 46 entre les tro u


, ,

pes d u général Taylor et celles d u général m exicain


A rista e t v oici la guerre allum ée
,
.

Le président adresse i m médiatemen t au Sénat un


message déc l aran t que la g u er r e ex i s ta i t p a r s u i te
d e l a e t e d u g o u ve r n e m e n t d e Mex i co

Une voix é l o quen t e s é l è v e con t re tan t de p ré c ip i


.

tation a faire sor t ir la guerre d un ac t e qui p o u v ait ’

n être que la suite d un malentendu


’ ’
Lincoln de .

mande qu une enquê t e précède au moins la pri se


d armes e t que S i l y a e u inj ure répara t ion soit de


,

mandée par l es v oies diploma t i ques avan t de reco uri r ,

à la force N o n seulement il n e f u t p oint é couté mais


.
-
,

encore dans les de r nières anné es de sa vie ses


, ,

ennemis en quête de griefs contre lui l ac cu s èrent


, ,

d avoir manqué de patriotisme quand il s agissait d une


’ ’ ’

a ff aire aussi na t ionale D ans un disco u r s pro noncé à


'

O ttawa S t e phen A D ouglas affirma très net .


-

tement que Lincol n s était dis t ingué au co n grès par ’

son opposi t ion à la guerre d u Mexique s e r a n g ea n t ,

d u c ô t é d es e n n e m i s d e la p a t r i e et qu en r eto u r

,
DA ’
RB AHA N L N I CO LN 75

nant dans son pays il avait été pou r suivi tout le ,

long de la route par l indignation publique ’


.

C était p endant la campagne électorale où nous


ver rons Lincoln disputer Douglas u n s ié g e de s én a


teur au Congrès .

Voici ce qu il répondit à cette accusa t ion


J étais un ancien whig et quand le p ar t i dé mo cr a


, ,

« tique essaya de m e faire voter que la guerre avai t

été j u s tem en t comm en cée par le président Polk ,

j e m y refu sai énergiquement Toutefois quand o n


.
,

a demandé de l argen t o u des terres po ur p ayer les


soldats j ai to uj ours voté comme D oug l as Vo us


,

.

pou v ez t ro u v er ce l a inconséquen t si bo n v ou s s e m ,

b l e Vo ilà l a v éri t é e t D oug l as a l e droit d en t irer


.

toutes les conséquences qu i l p o urra Mais lorsque ’


.
,

so us une forme généra l e il co l po r t e ce t te idée qu e


« j ai refusé les subsides nécessaires aux solda t s qui
,

co mba tt aien t dans la g uerre d u M exique o u que j ai ,


tenté d e nt rav e r leur action l e moins que j e p uiss e


r épondre est q u il se trompe gro ssi èrement e t du ’

tout au t ou t co mme il p ourra s en convaincre en


,

lisant l es p ro cès verbaux d u C o ngrès -


.

Linco l n dans ce t te q u es t ion avai t vu que la force du


, ,

go uvernement devant le p eup l e au co mmencement ,

de la guerre tenait à ce qu on ne p erdait pas une o c


,

c asion de répéter que le M ex i q u e a v a i t v er s é le s a n g


a m é r i ca i n s u r le s o l d es É t a ts Un i s Lui c r oyai t le —
.

fait erroné et il avait mis en demeure le président de


,

d onner a la chambre des éclaircissements sur ce point ,


76 LA VI E P O I IQ
L T UE

Le cabinet esquiva les explications et les disposi ,

tions conquéran t es du peuple américain que nous ,

avons rapportées plus h aut donnent à penser que la ,

m aj orité préférai t ne pas savoir l a vérité .

Le Co n grès était souven t saisi de pétition s rela t ives


4

à l escla v age mais le même sort était réservé aux


m oin dres résolu t ions et proposi t ions touchant ce suj et


trop brû l ant O n l es déposait sur le b ureau et l o n
.
,

n e s en o ccupai t p l us au t rement

.

Dès son arrivée au Congrès Lincoln prit en main la ,

cause des pé t i t ionnaire s .

M Go tt avai t par une pr e position fortement mo


.
,

t i v é e in v ité le co mi t é adminis t rateur du dis t ric t de


,

Colombie à présen t er u n bi ll abolissant le commerce


des esclaves sur l e t erritoire du Congrès Lincoln ‘
.

p r 0 p o s e un amendemen t tendant à l abolition de l es


’ ’

c l av a g e l ui même-
.

Ce bil l portai t en substance


Défense d in t ro duire au cu n esclave dans le dis

tri et excep t é pou r l es fo nc t i onnaires du gouverne


,

m en t auxquels o n laissai t la facul t é d amener les nè


gres nécessaires à leur m aison p endan t la durée de


leur ser v ice .

« Tous les noirs r ésidant actuellement dans le

1 Le c o n r gè j t
u r id i c l v
i o n ex c u s i e l e d is t t
ric de
Cl té v ll W h gt
. s a u ne su r

o o m b i e, o ù es t s i u e la i e de as in on .

D A B RA H A M L N I CO LN 77

district et tous ceux q u i y naîtraient dans la suite


, ,

étaient déclarés libres et ne pourraient être r etenu s


,

en esclavage même en deho r s d u dist r ict


,
.

I ndemnité accordée au x prop r iétai r es su r le


t r ésor p u blic .

Ce bil l d émancipation devait êt r e so u mis a l accep ’



tation d u peuple .

Un autre bill fu t encore intro duit pendant la m ême ,

s ession pour p r ohiber dans le district la vente et le


,

lo u age des escla v es .

Lincoln défendit en vain toutes ces proposi t ions au


nom de la j us t ice et de l humanité Le m om ent n était

.

p oint encore venu le crime de l esclavage n avai t pas


,
’ ’

p esé assez lou r de m ent sur les amis de la liberté qui ,

le t oléraien t a v e u g l ément dans la crain t e de voir périr


l Un i o n Il fallait que le S ud eû t mon t ré plus d audace
’ ’
.
,

que les desseins no urris da ns l ombre se fussent pro ’

dui t s au grand j our A u début les p l an t eurs avaient


.
,

dans l intérêt de leurs ric h es cul t ures de co t on


demandé gr â ce pour une insti t ution nécessaire di ,

s ai en t ils a l a for t une pub l ique ; i l s v on t bientôt ériger


-
,

l escla v age en do c t rine pré t endre qu il es t l a condition


,

norma l e et régu l ière du nègr e et entreprendre une ,

croisade généra l e pour faire de la ser v i t ude h u


'
maine comm e dans l a nt iqui t é l a pierre a n gu laire de

la R épublique améric aine Le N ord alors ouvrira les


,

yeux u n g rand par t i républicain se fondera dont Lin


,

coln sera le chef et avec la liberté la j ustice p r end r a


, , ,

enfin possession du N ouveau Monde —


.
78 L A VI E P O I IQU
L T E

PA S S E DE S ET AT S - UN I S C I I
LA O N S T T UT ON E T L E S C L A V A GE

C MP MI MI I C MM PC
LE . .

O RO S DU S S O UR ET O E NT IL F UT RE S E TE .

Po ur bien co mprendre le r ôle de Lincoln dans la


crise que v a traverser la so ciété américaine il est ,

indisp ensable de revenir en quelques m et s sur l h is , ,


toire de l esclavage aux Etats Unis




.

Les colonisa t eurs du no uve au monde se tro uvaient


placés sur la plus magnifique des régions de la terre
où l humani t é puisse accomplir ses des tinées A près

la guer r e de l indépendance la sagesse et le patrio


tisme de leurs grands ho mmes d Et at Washington ’

Franck l in J efferson leur avaien t donné une con


,

, ,

s t i t u t i o n mo dèle sans parei l le dans le monde et


,

qui a peine née devai t avoir la singulière fortune


,

, ,

d ex cit er l envie de no s civi lisation s viei l les de trois


’ ’

mille ans .

D ès le début un immense courant d é mig rat io n s é


,
’ ’

t abli t d u vieux con t inen t vers l ancien et vient a ccr o î


tre a v ec u ne rapidi t é pro digieuse la pop u l a t ion des


E t a t s Unis E n 1 7 8 9 ce tt e po pulation n est que de

3 millions d h ommes en 1 8 74 elle atteint le chi ff re


.

de 4 2 millions voilà po ur la p r o spé ri té intérieure


A u deho r s les affai r es de la Confédé r ati o n ne vont
.

,
80 LA VI E P O I IQU
L T E

Ils avaient la maj orité dans l A ss emblé e mai s la ’

Caro l ine du Sud e t la Géorgie répétaient


Pas d e s cl avag e pas d u nion’

Telle était l al ’ ’

t ern at i v e .

La Caroline du N ord était passive ; la V i rginie et les


É t a t s voisins du N ord é t aient préparés a l abolition ‘ ’

L av i d it é de l extrême Sud l e mp o rt a
’ ’ ’
.

Les partisans de la liberté se c o nt é nt èr ent de la


faculté laissée au Congrès d interdire la traite au bo u t ’

de vingt ans par l ar t icle suivant ,


L immigra t ion o u impor t ation de toutes p ersonnes


que l un quelconque des États maintenant exis t ants


j ugera con v enab l e d admettre ne se r a pas interdit e


a v an t l an 1 8 08 1 ’
.

P uis p ersuadés qu e cette institution disparaîtrait


,

p eu à p eu repo ussée par l es progrès de la civilisa t ion


,

et de l a liber t é ils laissèrent s introduire dan s la ’

Constitu t ion des privi l èges qui ne font p oint partie de


l œ u vre qui é t aient l a négation même de son prin

cipe et qui de v aient comm e un corps é tr a n ger dans


, ,

u n o rganisme parfait arrê t er à chaque ins t ant et dé,

ranger la société j usqu au j o ur où l esclavage en se ’ ’

rai t v io l emment expu l sé .

I l f ut donc reconnu que l homm e de couleur était


suscep t ible de devenir la pro priété d au t rui comme ’

un m eub l e o u u n animal domes t ique qu on p eu t r e ’

v e n di q u er par t out où on le t rou v e C est le p a ra g r a


.

p h e 3 de la section I I de l ar t icle IV ainsi conçu ’

1 . C o n s t i t u t i o n des E t a t s - Un i s . A rt . s ec t . IX , I .

D A BRA H A M L N I C O LN 81

Toute p e r sonne obligée a un se r vice o u a un tra


v ail dans un État confo r mément à ses lois ne pourra
, , ,

s i elle s enfui t dans un autre être aff ranchie de ce


se r vice o u travail ; elle se r a livrée sur la réclama t ion


de la partie a qui ce ser v ice o u ce travail seron t dus .

Il semblait qu e ce fût assez d a v oir concédé aux ’

planteurs du Su d le maintien de leur propriété o dieuse ,

de les avoi r armés de la Co nstitution p our leur rendre


leu rs esclaves fugitifs et de leur avoir donn é v ingt ans ,

pour compléter leur p e r sonnel servile .

O n va plus loin .

D es privi l èges électo r aux sont attachés à la p r o


p ri é t é des esclav es
Les représentants ainsi que les taxes directes , ,

se r ont répar t is entre les di v ers États qui feront partie


de l Un i o n selo n le nombre des habi t an t s Ce nombre

, .

se détermine en aj ou t ant à la totalité des p ersonnes


libres ( y compris les engagés à terme excep t é les ,

Indiens ) les trois c inquièmes d u reste de la p o p u la


tion 1 .

Vis a v i s d e son m aî t re le nègre n est qu un e bête


-

-
,
’ ’

de somme mais vis à vis de l E t at il devient les trois


, ,
- —

cinquièmes d un ci t oyen ’
.

Ainsi di t M B Bigelow 2 l mt ro du ct ion de l es


,
. .
,

cl av ag e aux E t ats Unis avai t créé aussi bien en t hé o



,

r ie qu en pra tique deu x systèmes so ciau x et politi


ques qui devaient subsiste r conj ointement .

1 C o n s t i t u t i o n d es E t a t s Un i s Art I t
II
h tt

. . .
, s ec . .

2 L es E t a t s Un i s d A mé r i q u e
.

en 1863 . i
L b r ai r i e H a c e e .

A . J OU A UL T . ti
82 L A VIE P O I IQU
L T E

Dans le S u d, une so c i été fondée s u r l avilis s ement ’

des classes o uv r ières o ù p ar conséque nt t o u t t r a, , ,

v a i l m a n u e l dég r a d e le c i t o y e n m ais qu i en m ê m e , ,

t em p s p o s s èd e p r ès d e la m o i t i é d e la r ep r és en t e
,

t i o n d u p a ys ;
E n face au nor d une populatio n deu x fo i s plu s
, ,

nombreuse h abitant des É t ats distin cts et plus o u


,

moins éloignés o ù presque tout ind i vidu j ouit devant


, ,

la loi de l égalité politique où au cune espèce d e t r a


,

,

vai l honnê t e n e dég r ade et n e fe r me l accès des em ’

p l o i s et des dignités .

O n devait logiquement s attendre a écho u e r dans ’

to u t e tentative p our concilie r ces deu x intérêts fu ç o u


c i l i ab l e s To utefois le m al aurait p u finir pa r dispa
.
,

raitre s il avait été r estreint co mm e o n le supposait


d abord aux Etats primi t ifs e t ne s était po i nt étendu



, ,

aux te r ritoires encore ino ccupés comm e y avait


p our v u l o rdonnance de 1 7 8 7

.

Voi ci en e ff et quelle était la législati on de l es cla ’

vage en 1 789
1 La traite était a u tor i sée j usqu en 1 808

0

2 L e s cl av ag e était maintenu d ans les anc i en s É tats



0

qui vo u draient le conserver ;


3 I l était exclu des te r r i toires situés au no r d ouest
°
-

de l O hi o par l ordonnance de 1 7 87 qui en réglait l ad


’ ’ ’

ministration et contena i t cett e clause q u i l n y eu


’ ’

r ai t jam a is d a n s les d i ts t er r i t o i r es n i es c la v a g e
, ,

n i s er v i t u d e i n v o l o n t a i r e ex c ep t é p o u r p u n i r les
,

c r i m es d o n t les co u p a bles s er a i en t d û m en t c o n
vai n cu s .
AB RAH A M L I N C O L N
B

83

Ma i s , dès l origine c ette clause



es t foulée au x
,

pieds .

La Carol i ne du N ord le 2 2 déce mbre 1 7 8 9 , un ,

mois ap r ès la r atificat i on de la Constitution passe un ,

acte de cession de ses ter ri toires O uest (qui dev ie n


n ent l e T enes s ee ) à l Un i o n mais a la co n d i t i o n q u e

le C o n g r ès n e fer a j a m a i s a u c u n e lo i t en d a n t a
é man c i p er les es c lav es d a n s les d i ts t er r i t o i r es .

La Géorgie de même ( avril en cédant à


l Uni o n les territoi r es qui forment auj ourd hui l A la
’ ’ ’

bama et le Mississipi imposa à l Unio n et r equit le ,


Congrès d accep t er la condition suivan t e



que les
territoires cédés deviendraient un É tat et seraient
« admis dans l Uni o n aussi t ôt qu ils contiendraient
’ ’

6 0 mille habitants o u a une épo que plus rappro c h ée


,

si le Congrès le j ugeait convenable avec les mêmes ,

lé g es et de la même manière qu i l avait é t é


p r i v i
p r évu par l ordonnance de 1 7 87 pour le gouve r n e

ment des États Unis ; ladi t e ordonnance devant s ap


-

p li q u er a to utes les pa r ties du territoire cédé dans


toutes ses dispositions ex c ep té c e lles r ela ti v es la
,

p r o h i bi t i o n d e l es c la va g e

La découverte de la machine à nettoyer le co


ton découverte qui augmenta si rapidement dans
,

les É tats cotonniers la valeur du travail se r vile fit ,

fe r mer complé t ement l o r ei lle des planteu r s à toutes’

l es considérations p r ésentées j adis avec quelque


succès en faveu r d u ne extinction progressive de l es
,
’ ’

c l avag e .

On v oi t alo r s nettement les d e ux pa rtis se des


84 LA VIE P O I IQU L T E

siner 1et q u els ferments de discorde la j eune Répu


,

b li q u e po rte dans son sein Le S ud et le N o rd se su r .

veil len t avec u n e j alo usie pleine de défiance le


p remier pour empêc h er que son infl u ence poli t ique
,

n e diminue en pro portion de l indus t rie de la p uis ’

sance croissante d u N ord et de l immigration qui s a c ’ ’

cumulait su r ses fron t ières ; l au t re p o u r arrêter l e x ’ ’

tension des privilèges exagérés que la C onstitu ti o n


avait accordés seulement aux Etats originels .

I l en résultait que lo r squ un É t at à esclaves de


,

mandai t son admission d ans l Uni on un Et a t libre se ’

présen t ait a u ssitô t réclamant la même faveu r C était


, .

u n e véritable course aux Et ats .

ET A T S N O UV E A U X A D M IS D A N S ’
L UN IO N

L ib res . E sc lv
a es .

Da n s la sess i on de 1 8 18 1 8 1 9 le Cong r ès auto ri sa



,

l A l ab am a où se con c ent r a i t r apidement une p o p u la


tion esclavagiste a se dresse r une Cons t itution ne


,

r enfermant aucune p r ohibitio n r elati ve à l esclavage ’


.

Un bill semblable ayant été p r oposé en fav eu r d u


M isso ur i J ames Tallmadge de l É t at de New Y ork
, ,

-
,

1 Bi
. glw
e o .

D A BR A H A M L N I CO LN 85

p r ésenta à la Chambre un amendement inte r disant


to u t e nouvelle introduction d esclaves et a ff ranchis ’

sant dès qu i l s auraient vingt cinq ans les e n fants


,

-
,

des esclaves actue l s .

D e l a le différend connu s o us le no m de di fféren d


du Missouri lequel pour la première fois di v isa sé
, , ,

r i eu s e m en t le p ays sur la ques t ion de l esclavage



.

La dis c ussion f ut des plus violentes au sei n du


Congrès .

Cobb de la Géorgie s é cria


, ,

O n a allumé un incendie contre lequel toutes les


eaux de l O c é an ne pourron t pas p révaloi r Une m e r

de san g suffira seule a l é t ein dr e ’


.

A quoi T allmag de répondit


O n n ous menace d un e dissolution de l Unio n ’ ’

d une guerre ci v i l e E h bien soit ! Mo n existence


,

.
,

n est prob ablement pas plus assurée que celle d aucun


’ ’

des citoyens qui m é co u t ent ; mais tant que j e vivrai ’

, ,

chacun de mes j o urs sera consacré à la liberté de


l homme S il faut du sang pour éteindre l incendie

.
’ ’

que j au r ai bien a contre c œ u r contribu é allumer


,
-
, ,

sans hésitation aucune j e donnerai le mien .

Ces paroles p rophé t iques Parker le gran d ap ôtre , ,

ab olitionniste les reno uve l lera p l us tard dans une


,

lettre écrite de R o me en 1 8 59 à M Francis Jackson


, , . .

Les conséqu ences de l esclavage on t a l ors co mpromis ’

l avenir des Etats Unis to ut le monde le sent chacu n



-
,

attend dans l anxiété ’

Le peuple américa i n dit Parker va j e p ense , , , ,

m a r ch e r au so n d au e r nde musique et il vaut mieu x


°

,
86 L A VI E P O I IQ L T UE

pou r lu i qu i l y songe à temps Il y a quelques ann ées



.
,

il n e semblait pas difficile d abord d ar r êter l es cla ’ ’ ’

v age puis d y m ettre fin sans verse r le sang J e crois


,

.

que maintenant cela n e se peut plus ni maintenant ,

ni plus tard Toutes les grandes cha r tes de l humanité


.

ont été écrites avec du sa n g U n j o ur j es p é rai que .


,

celle de la démo cratie améri c aine p ourrait êtr e écrite


avec une encre m oins coûteuse ; mais a cette heure , ,

il est visib l e que notre p élerinage no us mèn e a une ‘

m er R o uge où plus d un Ph araon va sombrer o u ’

périr .

A u point où nous en sommes l heure de l a lutte n a ,


’ ’

poin t encore sonné Po ur arrêter l esclavage évite r .


la guerre ci v ile des hommes bien inten t ionnés vont


,

essayer de ces compromis b â tards qui en retardant ,

les révolutions nécessaires ne font que l es rendre ,

plus v iolen t es A u lieu de tuer par un acte d énergie


.
,

l institution honteuse qui comme un ver solitaire


, ,

minait la so ciété naissan t e absorbait ses meilleures ,

facu lt és p ara l ysait son ac t ion em poisonnait sa p ro s


, ,

p é ri t é et ses r ichesses on fit une t r ansactio n avec l e ,

crime .

C est donc pa r u n compromis que se termina le


conflit du Missouri com promis que l on r es p e ct e t ant


,

qu il se r v i t les in t érêts de l esclav age et que l o n se


’ ’

,

h ât a de violer dès qu il cessa de les favoriser ainsi ’

qu il en était arrivé de l o r donnance de 1 7 8 7 relative


’ ’

aux terri t oires .

L e Congrès supp r ima l a r ticle comportant la pro ’

h ibi t i o n de l esc l avage da n s l E t at du Missou r i mais


’ ’
,
88 P I IQ L A VIE OL T UE

mis d Misso uri pe r metta i t l esclavage dans une c on


u ,

t é d où il avait été formellement et aj amais e x clu



r e .

S on adoptio par le Sénat et la C hambre des rep r é


n

s en t an t s causa une vive émotion dans toute l Uni on ’


.

Il y avait à ce mo ment des élections dan s l I llin o is ; o n ’

renouvelai t la législatu re et la nouvelle législat u r e ,

devait choisir un sénateur p our le Congrès en rem


place ment de M Shie l ds qui a v ait voté avec M D o u
.
, .

g l as en faveur d u bill Kansas N eb r aska —


.

La cam pag n e électorale fut des p l us vives et


Lincoln y pri t une très grande part D eux fois dans —
.

les assemblées p op ulai r es il se tro uva en p r ésen c e de


D oug l as .

La prem i ere c e fut à S pri n gfield le 4 o ctob r e


, , .

Cette rencontre a été considérée co mme le point cul


minan t de la campagne et le discours d e Lin coln f u t
,

acclam é par to us les ami s de la liberté et de l Uni o n ’


.

L h o n n ê t e A b e ouvre la discussion et dans un lan



, ,

g age clair simple éloquent expo se les trahiso n s


, , ,

dont son ad v ersaire s é t ait rendu coupable et la vanité


des raisons qu il invoque p ou r j ustifier s a nouvelle


c o n du Ne .

J adi s Douglas app elait le comp r o mis Misso u ri du


u n p a c t e s a c r é et déclarait qu il n e se t r ouve r ait

j amai s une main barba r e assez h ardie pou r le brise r .

Auj ourd hui il p r étend qu en votant le rappel du


’ ’

compromis d u Missouri il n a fai t que défendre l e ,


grand principe de l a so uveraineté du peuple il


désire que les habitants du Kansas et du N ebras k a
soient lib r es de se go uverne r eu x mêmes c om me i ls -
,

D A B RA HA N L N IC O LN 89

en sont capables Voilà les prémisses qu i l p ose et i l


.

en tire cette con clusion que les citoyens dh Ka n sas


e t du N e b raska ont le droit d établir l esclavage

d ans leurs États .

Mon honorable ad v e r sai r e p r étend que ce serait


leur faire insulte de les supposer incapables de se
gou v erner eu x mêmes N e vou s laissez pas p r endre

.

a ce que ce langage p eut avoir de fl at t e u r po ur des


oreilles républicaines ; allons au fond de l argume nt ’
.

Qui conteste a l é mi g ran t de ces nouveaux pays le


droit de se gouverner a sa guise ? Je le lui reconnais


co mm e vo us Mais ce que j e l ui refuse c est le droit
.
,

de gouverner au cune aut r e personne sans s o n co u


s e n t e m en t .

Les deux adve rsaires se rencont r èrent une autr e


fois a Peo ria sans incident particulier a noter
, .

E n ces deux o ccasions l avantage resta à Lincoln


et le résulta t de l élec t ion fut la défaite du parti dé mo


cr at i q u e et l arrivé e à la Législa t ure de députés ho stiles


à l introduction de l esc l avage dans les nou v eau x te r


’ ’

r i t o i r e s situés au dessus d u 3 6 3 0 de latitude Cett e



- °
.

victoire donnait l assurance d envoye r au Congrès u n


’ ’

sénateur dé v oué à la liberté si l on p ouvait s arrê t e r ,


’ ’

sur le choix d un candidat Linco l n é t ai t le candidat



.

d ésigné des W h igs e t M Judge Trumbull celui d une


,
.
,

fr action no uvelle sortie du par t i démo cra t ique es cl a


,

vagiste et qui s appelait les D é m o c r a tes li br es


Il y avait l a un da n ge r que Lincoln évita en fai sant


donner les vo i x de ses amis a M T r umbull . .
90 LA VIE P O I IQ
L T UE

CA M PAG NE ELE C T O R A L E DE 1 8 58 A IC
L N O LN

PHE N
. .

ET S TE D OU G LAS

Le s p r emi è re s r en contres de Lincoln et de Stephen


D ouglas n avaient été que des escarm ou ch es E n 1 858

.
,

l expiratio n du manda t de c e dernier com me s é na


te u r de l I llin o i s au Co n grès mit de n o uveau en p r é


sence ces deux puissants adversaires C e fut u n .

v éri t able tournoi d ont le peuple entier des Etats Unis —

suivit avec autant de passion que les combat t ants eu x


m é m es les émo u v antes p éripé ti es Linco l n y conquit .

devant le pays en t ier la réputa t ion méritée n on seu —

lement d u n habi l e po l émiste mais aussi d un sage


,

p olitiqu e inébran l able dans ses princip es et coura


,

g eu x même contre ses amis par lesquels il n e se ,

laissa j amais entra î ner hors des vois légales co mm e


il a rri ve dans ces luttes ardentes de la p olitique où
,

t r op souvent p o ur le malheur de la liberté la pas


, ,

sion succède à la raiso n et compromet les meilleures


causes .

C était enco r e la questio n du Kansas qui agitait l es


’ ’

p r it p u bl i c et divisait les partis .


DA ’
RB AHAN I C L N OLN 91

Le 4 ma r s 1 8 57 Buch ana pris p ossessi on de m ava i t


l a présidence .

La Cou r suprême venait de décider implicitem ent


pa r u n arrêt que le compromis du Missouri était un
acte contraire à la Constitution C es t l arrêt m ém o .
’ ’

r able rendu a la requête de l esclave D red S cott ’


,

qui ses m aît res refusaient la liberté quoi qu il o ff rit ,


de l acheter D r ed avait appartenu en dernier lieu à



.

un c h iru r gien qui l amena successivement dan s di ’

verses lo bali t é s où il n y avait pas d e s cl av ag e d aprè s


’ ’

,

le compromis du Missouri et l esclave basai t l à ,


dessu s sa r écl amation .

La Cour après des débats qui duraient depu i s des


,

années débo uta D red de sa demande par le seul m otif


,

que les nègres n étaient pas des citoyens selon la loi


fédérale ; qu ils étaient une proprié t é a la discrétion


du propriétaire comme to ute autre et que le fait d a .


voir résidé dans un territoire libre n e signifiai t rien le ,

Congrès n ayant p as plu s le droit d interdire que l qu e


’ ’

p ar t l introduction de l esc l avage qu il n avait celui de


’ ’ ’ ’

l ab o li r l à où il existait déj à

A quelque temps de l a le Kansas demande à être ‘

admis comm e E tat dans l Uni o n ’


.

Malgré la décision de la Cour les défense u rs de la ,

libe r té sou t iennent la léga l ité du compromis et r efu ,

sent d admettre que l esc l avage soit toléré par la


’ ’

constitution d u n nouvel E tat situ é a u dessus du



° '
3 6 3 0 latitude .

D e leur côté les partisan s de l esclavage dan s le


,

Sud étaient déc i dés à ne p ermettre sous aucun pré


, ,
92 LA VIE P I IQ OL T UE

tex te que cette ins t itution fût l ég i s l at iv em en t p r o


,

h i b é e dans aucun E t at o u T erri t oire .

T elles sont les conditions dan s lesquelles fut p r é


s en t é e au Congrès ( session de 1 8 5 7 1 8 5 8 ) une Co n —

s t i t u t i o n pour l e Kansas dont le p roj et a v ait été


,

élaboré en 1 8 56 par une co nventio n tenue à L e


, ,

compto n .

Les artic les de cette Constitu t ion étaient a rt ifi ci eu


sement conçus de fa ço n à introduire forcé ment l es
,

c l a v a g e dans le no u v el E tat en dépit de la répugnan ce,

et d u vo t e mê me des habita nts .

Les r épublicains l at t aq u èren t v iolemment Un e



.

p or tion m ême d u p ar t i démo crati qu e r ec u l e devant


la fraude essayée et D ouglas s e fi t l interprète de ses

sen t iments M ais ici encore o n le voit m anquer d e


fr anc h ise o u d u moins rester indi ff érent entre le
.

crime e t la j us t ice I l j o u e le rôle de Pilate


. .

P e u importe disai t il que l es h abi t ants votent


-
,

p o ur o u contre l esclavage mais ils doiven t avoir le


,

droit de voter po ur o u contre la Constitution elle


mêm e .

La Cons t itution préparée a L eco mpton fut votée ‘

par le Co ngrès le 3 0 avril 1 8 58 et proposée à la


, ,

ratification du peuple d u Kansas O n lui pro mit s il .


,

l ac c e p t ai t de grandes concessions de terres L es


, .

o ff res étaient séduisantes mais la cons t itutio n n en ,


f ut pas moins r epo ussée a une imm ense maj orité .


I CO 93

D A RB A H A M L N LN

Le Cong r ès se sépare et S t eph en A D ouglas r e ,


.

to rne dans l I lli i pour p r éparer sa r éélectio n S o n


u

no s .

attitude dans l a ffaire du bil l Lecompton le é p


,

, s a

r ait d go uvernemen t ; la cause républicaine en avait


u

profi t é et les par t isans des compromis demandaient


,

q on lui laissât son siège où il p our r ait peut êt r e


u

-

r endre enco r e quelques services g â a ces p é ,


r ce ex

di t et à c es équivo ques dans lesquels il était passé


en s

maître .

Mais les rép u blicains sincè r es de l I llino i s p ensaient ’

d une autre manière Ils connaissaien t leur séna t eur



. .

Ils savaien t que sur le p oint capital de leu r pro ,

gramme O p p o s i t i o n l ex t e n s i o n d e l es c la v a g e
’ ’

d a n s les t er r i t o i r es D ouglas n é t ai t point avec eux ,


p u isqu il avait déc l aré de la manière la plus positi ve


que p eu lu i i m p o r ta i t s i les h a bi ta n ts d u K a n s a s
v o ta i e n t p o u r o u c o n t r e l es c la v a g e Pour eux sa

,
.

conduite dan s l a ffaire avait é t é plu t ôt diri g ée par la


c r ain t e de perdre to ute chance d ê t re réé l u que p ar ’

des considérations de j us t ice et de légalité A ussi ,

malgré l avis d hommes importan t s d u pays et des


.

’ ’

autres É t ats ils résolurent de le combat t re de toute


,

leu r énergie et désignèren t p ar u n v ote de la c o n v en


,

tion 1 d É t at tenue à S pringfield le 1 7 j uin 1 8 58 pour


, ,

candidat au Sé na t des Etats Unis l h onn ê te A braham -


,

Lincoln .

1 Le s v t t(
l es c o m i s é l e c
i o n s d e p ar i ) tté
é ig t él t t
. con en c o n cu s se s son
t o rau x q u i d s n e n au x e c e u r s l es c a n did a s au x fo n c

t lq
i o n s p u b i u e s O n l e s a p p e e c o n v en t i o n s d E t a t s i

ll
e c io n l él t ’

jt g t t l l ll
.

l a m a i s ra u r e o c a e o u c e e d e l E t a t ; c o n v en

a pour ob e
'
t i o n s n a t i o n a l es , S I l s a i d egt ec io n du

r s i d en l él t

Pé t .
94 LA VI E P O I IQL T UE

Le discours de Lin c oln devant cett e convention


dont il était m embre fut le commencement de la cam
p agne Les sentences par lesquelles i l débuta con
.

tiennent ces paroles célèbres si souvent citées de ,

pu i s par ses ennemis comme pa r ses amis


,

Une maison divisée cont r e elle m é m e disait i l , ne -


,
-

saurait r este r longtemps deb out J e c r ois que c e .

gouvernement ne peut pas supporte r la pe r ma


n e n c e d un régime moitié libre moitié esclave Je

, .

ne co m pte pas que l Un io n sera brisée j e ne compte


pas que la maison to mbera mais j e comp t e qu elle ,


cessera d ê t re divisée L u ne o u l aut r e chose arr i



.
’ ’

vera .

Lincoln voyait l avenir terrible q u e p ré p araient a


so n p ays les propriétaires d esclaves et tous ses dis ’

cours tendaien t à dévoiler les m an œ uvres par les


quelles ils espéra i ent arriver à leu r b ut Que leur fal .

lai t ii au point o ù en étaient les choses ? Un second


-

déclaran t que la C o n st it u
,

a r r ê t de la Co ur suprême ,

tion com portai t l e s cl av ag e dans tous les É t ats co mme


la décision Dred S cott avait établi qu el l e le faisait ’

dans les Te r ritoires et c en était fait de la l i be rté dans


,

le N ouveau Monde — .

Il devint évident dès le début que cette campagn e ,

électoral e était l e commencement d un duel à mo rt


,

entre les deux principes que p ers o nni fi aient l es deu x


puissan t s ora t eurs .

Doug l as au physique c o mm e au mo r al était to ut le


, ,

cont r ai r e de Lincoln .

A u phy si qu e u n peti t homme tr ap u ave c des yeux


, ,
96 LA VI E P I IQ OL T UE

s appl i que r aux hommes tenus dans u


servi t ude E n affirmant que la t a x a t i o n étai t i ns ép a


r able de la r ep r és en ta t i o n n av ait o u pas pro clamé le
,

-

droi t plus grand et plus essen t iel qu a tout être inno ’

c ent et raisonnable au contrôle et a l usage de ses ca ’

p a c i t é s e t facultés et a la j o uissance de son p r op r e


gain
Lincoln r ésu ma i t en d eu x m o t s sa p ensée S i l es ’

m a l, mal

c la v a g e n es t

p as u n r i en n es t u n .

Pour D ouglas qu on maintienn e l escla v age dans


,
’ ’

ses anciennes limites qu o n l é t en d e a tou t le ter r i


,
’ ’

toire pourvu que l Un i o n fû t sauvée le r este i mpo r


,

tai t p eu à la pro spéri t é de la R épublique .

Les deux adversaires se rencon t rèrent pou r la p r e


miè r e fois a Chic ago en j uillet R ien n avait été con
,
.

venu sur la manière dont o n engagerait l e comba t ;


mais D ouglas ayant tenu un meeting le 9 j uillet il était
, ,

iné v itab l e que M Lincoln lui répondrait le 1 0 Une


. .

semaine plus tard tous deux parlèren t le m ême j our à ,

S pringfield mais devan t des audi t oires di ff éren t s ; cela


n e suffisai t pas à Lincoln e t i l adressa a D ouglas u n e
,

le tt re dans laquelle il le provo quait a une série de


débats con t r ad i ctoires p endant la d u r ée de la cam
pagne .

Le c artel f ut a c cepté mais D ouglas y mit po u r c o n


,

d i tion de parle r le premier dans les quatre premiè r es


séan ces et le de r nier dans les trois autres
,
.

Les sept débats con tr adictoires furen t fi xés com me


suit dans l es principa u x c entres de p o pulation de
,

l I ll i n o i s

B

AB RAHA M I CO
L N LN 97

Ot taw a . 21 août .

Freepo r t . 27
J onesboro 15 septembre .

Charlesto n . 18
G als b o u r g 7 octob r e .

Quincy . 13
Alton . 15

O n p eut dire que non seulement to ut l I lli mais —



no i s ,

le p euple entier d es États Unis assistai t à cette grande -

lut t e oratoire mou v ement avant coureur d un c o m


,

bat plus terrible La presse por t ait les disco urs des
.

deux champion s aux plus loin t aines extrémi t és de


l Un i o n on les l isai t a v ec avidi t é on les co m m entait

, ,

on les j ugeait Les deux partis co mp t aient les coups


. .

A Ottawa Linco l n dédaig ne de répondre aux accu


,

s at i o ns p ué r iles par lesquelles avait débuté so n a dv er

s aire ( Il ne releva que plus tard ce qui ava i t trait à sa


.

conduite p endant la guerre d u Mexique ) .

Il veut placer d abord le débat sur so n véritable te r


r ain fai r e avouer aux hommes du S ud leurs desseins


,
.

R approchant les faits les p l us récents la guerre du


Mexique le m anifeste d O s t en de 1 l arrêt D red Scott
,

,

1 MM Bu c h S o u l é , m i n i s res d es E a s
Mas on et t
tt
gl t F g é t
. a n an ,

U n1 s e n A r a n c e e t e n E s p a ne , s e r u n i r en
t tè t é tl q t
n e e rr e, e n

e n 1 864, à
O s e n d e e t d i s cu r e n s r i e u s e m e n ac u i s i io n

d e u baC à
l E s p a g ne , q u i n a a i
’ ’
am a s m an i e sv tj i n e n io n i f té l t t ’

v
d e en d re s a c o o ni e e t , s i c e a l ai l ét t
n c e s s ai r e , l a c o n u é q êt
l é t tt ét
. e
f
p a r l a o r c e La c i r c u a i r e m an a n d e c e e p r e n d u e c o n fé
t t f t t l
.

r e n c e d i s ai er m e s I l e s t p ar a i e m e n c ai r
t th é é ht t
e u p r o p re s

pour ou o m m e q u i r fl c i , q u e p ar s a p o s i i o n g é o g r a
98 LA VIE P O I IQU
L T E

l e rappel du comp r omi s du Missouri il dé masqu e ,

cette vaste conspiration qui n e tendai t fa r i en moins


qu à légaliser l esclavage dans to ute l Un i o n au N ord
’ ’ ’

comme au S u d dans le s nouvea u x comm e d ans les ,

anciens Éta t s .

Puis p r enant à p arti son adversa i re i l lui disait


, ,

Vous parlez co mm e moi de liberté et il semble ,

étra n ge qu e nou s nou s c o mba tt ions en arborant les


m êmes devises C est que nous n ent endo n s p as c e .
’ ’

mot de la mêm e façon .

Moi j e crois qu e la déclarat i on d I ndépendance a


,

eu po u r conséquence logique l affi an c his s eme nt des ’

nègres .

D o u glas en prétendant le co nt r aire nous fait r e


, ,

cu l er en deçà de cette ère de j ustice


-
.

Quand il p ermet à un É t a t no u v eau d é t ablir l es ’

c l a v a g e i l é t ein t le sens m o r al i l arrach e l amour ’


, ,

de la l iber t é d u cœur des ci t oyen s qui tolèrent une


ins t i t u t io n si con t raire aux droits de l h umanit é ’

So n in di ff éren ce es t d autant plus coupable d au


.



,

tant plu s dan gereuse qu elle prend le m asque de la ,


liberté pou r autoriser la servi t ude .

p hi q u e C u b a n o u s a pp a r i e n t t S i l E spa
à v té êt é

g u e , s o u rd e la o ix d e s o n p ro p r e i n

g i l v gl f t t h
r e t p o u s s e p ar
au x s e n im e n f
v ll C tt U

u n or ue a eu e et u n d o nne u r , r e u s e
d e e n d r e î e d e u b a a u x E a s - n i s , a lo r s , p a r t o u t es les

l o i s d i v i n e s e t h u m a i n e s , n o u s a vo n s l e d r o i t d e l a r r a c h er à

l E sp a g n e , s i n o u s e n a v o n s l e p o u v o i r
D tt t t t v t C t

.

a n s le n o r d e n a i e p o u r o b en ir u b a p a ru
té l t t
ce e , su s
ci e , c o mm e l e r a p p e d u c o m p ro mi s d u M i s s o u ri , s u r o u
ét f t l lvg t
.


d a ns l e b u t d en d r e e t d e o r i fier i n fl u en c e es c a a i s e

tt U
au x E a s — n s i .
1 00 L A VI E P O I IQL T UE

Lecompton la hame wol ent e que lu i po r ta i ent dep u i s


,

cette épo que les chefs de l aristo c r at i e du Sud sans ’

compter les i nfluences lo cales engageaient b eau ,

coup de républicains a le renvoye r au Sénat Ils .

p ensaient que c était la récompense due aux e ff orts


heureux qu il avait faits grâce auxq u els on n avait


,

p oint imposé par s u rpr i se au p euple d u Kansas une


consti tution escla v agiste O n y voyait aussi un en co n
.

r ag e m ent pour les démo crates moins avancés qui

vo u draien t imi t er so n exemple .

Ces considérations prévalu r ent et D ouglas l em ’

p orta Le vote pop ulai r e lui don n a bien cin q mille


.

voix de moins q u à Lincoln mais D ouglas avait la ma


j o ri t é dans la Légis l a t ure ; elle le renvoya au S énat .

Malgré cet t e apparen t e défaite la lu tt e avai t été ,

féconde en résultats car le par t i anti esclavagist e


,
-

était enfin fondé ; il avait un chef .

E ntrela fi n de la campagne sénatoriale de 1 85 8 et


l o uverture de la campagne p r ésidentielle de 1 860

Lincoln visi t e plusieurs États de l Uni o n N ous le ’

voyons parcourir l O hi o le Kansas et l É t at de N ew


,

Y ork parlant dans les écoles et dans les clubs pour


, ,

suivan t par t o ut ses an ciens adversaires avec la même


l ogique le même espri t la m ême éloquence ,
.

Chose é t onnante qu i l ait fall u déployer tant de


,

t alent montrer tant de ver t us et en fin de comp t e


,

v erser des fl ots de sang pour dé montrer au dix neu ,



IC ’
1 01
D A BB A H A M L N O L N

v i èm l a peuple républi cain qu un vrai par


e Si èc e , un ,

tisan de la l i berté doit a i mer la liber t é pour tout le


monde même po r des hommes d une autre coule r !
,
u

u

EL E CI P I
T ON I
R ES D E N T E LL E ABRAHA M IC
L N O LN

PÉI
.

E ST É LU R S D E NT .

L élection p r ési dentielle devait avo ir lieu le É mo


v e mb r e .

Le parti r épublicain formula ai n si son programm e


(p la t fo rm)

Les prin ci pes pro mulgués dans l a déclaration d in ’

dépendance et com p ris dans la constitu t ion fédérale ,

sont essentiels a la sauvegar d e des institutions r é p u


b l i c ai n e s .

La con sti t ution l union et les droits des E tats


,

doivent être et seront maintenus .

Le m ain t ien invio l able des droi t s des E tats ,

p articulièrement du droit qu a chaque E tat d ordonne r ’ ’

et de contrôler ses propres ins t i t utions exclusive


m en t se l on ses propres inspira t ions est essentiel à
,

l équilibre des p ou v oirs sur lesquels so nt fondées la


p erfection et la d u r ée d e l organisation politique du


13 3 Y 5
Le no uveau dogm e su i van t lequel la co ns t i t u
1 02 L A VI E P O I IQ L T UE

tion p ar sa p r o pr e fo r ce établit l esclavag e dans un


,

o u dans la totalité des E tats Unis est une hé r és i e po —


,

li t i q u e da n gereu se .

Le congrès les législatures locales les i n div i , ,

dus n o nt l e p o uvoir de donner à l e s cl aVag e une


,
’ ’

existence légale dans aucun des te rr itoires des E tats


U ni s
La convention nationa l e r épublicaine de 1 860 se
.

r éunit à C h i cago le QG mai dan s un immense édifice , ,

appe l é le Wigwa m q u e le par t i avait fai t édifier pour ,

la circonstance O n co mp t ait 46 5 délégués et si x can


.

d i d at s t o us plus connus que Linco l n no t ammen t


, ,

MM C h ase B aÎe s S eward Mais la l utte ne devait


.
, ,
.

ê t re sérieuse qu entre Lincoln et S eward ’


.

S i l on avait voté le premier j our ce dernier l em


,

po r tait O n r envoya la séance au lendemain et de


.

no u velles combinaisons se p ro duisirent M S eward . .

avai t trop d a t t ach es po l itiques avec les ho mmes de


compromis il fallait un homme no uveau i n dé p en ,

dan t qui n e transigeâ t plus


,
.

La m aj ori t é absolue était de 23 3 sur 46 5 votants Le .

p r emier scrutin donna le résultat suivant

MM . S eward .

Lincoln .

Divers .

Au se c on d tou r on e ut un i ndice du résultat dé fi


n i ti f quand le président de la délégatio n du Ver m ont ,
,

laq u elle s était di visée au premie r to u r annon ç a à


, ,
1 04 LA VIE P O I IQ
L T UE

Pendant que ceci se p assait à Chi c ago l h o nn ê t e ,


Ab e était à S pringfi eld dans les b ureaux du j o u r nal


,

de la lo calité Vers cinq h eures du soir le di r e c te u r


.
,

du télég r aphe lui fait p asse r un billet ainsi conçu

M L IN COL N
.
,

Vo u s êtes no mm é au t r o i s 1 eme sc r utin .

S es amis l ento u r ent le félicitent et lui to u t s i l e n


, , ,

cieux met le billet dans sa po che et les quitte


, .

O ù allez vo u s do nc lui dit o n


- —
.

A la m aison répond i l I l y a l a une b r ave p etite


,

.

femme qui sera bien h eureuse de cette nouvelle j e


veux la lui apprendre l e premier .

L e j o ur suivant arriva à S pringfield le co mité chargé


de lui a nnoncer offic i ellement le choix de la Co nve m
tio n de Chicago .

Parmi les m embres se t r ouvait un j uge de Pensy 1


v ani e u n h omm e fort grand et qui regardait Lincoln
, , ,

homm e encore plus grand que lui avec u n œi l


étrange où l on p ouvai t lire à la fois l admiration et
’ ’

'
l envie Cela n avait pas échappé au futur p résident
.

,

qui en serran t la main d u j uge lui de manda


, ,

Quelle t ai ll e avez vous ? -

Si x pieds trois po uces E t vous monsieur Li n .


,

coln ?

D A BB A H A M L N I CO LN 1 05

S ix p i e ds quat r e pouces .

Alors dit le j uge la P en sylvani e doit s in cliner


, ,

devant l I llino i s Mon cher m onsieur il y a des années



.
,

qu e j e désire de tout mon c œ ur u n président que j e


puisse regarde r d en bas et j e le trouve a la fin dans

u n pays où j e cr oyais qu il n y avait qu e de p etits


’ ’

g éants .

La nomination de L i ncoln fut u niversellement ap


prou v ée par le parti r épublicain Co mme on recon
,

naissait en lui un homme de fermes princi pes un ,

ardent ami de la vérité o n se p r écipita dans la lutte,

avec une énergie et un enthousiasme qui étaient de


sûrs garants de la victoire en p résence su r to ut d ad ,

v er s ai r es hésitants et divisés .

Les E t ats du Maine d u N ew H ampshire du Ver ,



,

mont du Massachuse t ts du R hode Is l and du Con


, ,
-
,

n e ct i cu t d u N ew Yor k de la P en s y lVani e de l O hi o


, , , ,

de l I n di an a de l I lli n o is d u Michigan de l l owa d u


,

,

Wisconsin du Minneso t a et de la Ca l ifornie donnè ren t


,

a A braham Linco l n deu x millions de voix .


LA C
S E E S SI O N . V OY AG E D E S P RIN GFIE L D A A S H IN G T ON
W
C O M P L OT D E BAL T I M O RE
.

O n sait quel f ut le r ésultat de c ette élection Sans .


1 06 LA VI E P I IQU
OL T E

dé ral , sans qu aucun acte agressif ait été te nté contre


les droits des états du sud les chefs esclavagistes ,

pro clamèren t hautement le droit de sécession .

La Caroline méridionale se déc l are la première .

Les milices de cet é t at s emparent a Cha r les t on de


, ,

la douane des E tats Unis de l h ô t e l des postes de



,

l arsena l ains i que des for t s Pinckney et Moultries


qui dé fen d ent la rade Il ne reste p l us a l Uni o n que


,


.

le fort Su mter ave c une garnison de quatre vingts


,
-

hommes commandés par le maj or A nderson .

L e j uge fédéral de C h arleston dévoué aux inté r êts ,

du sud refuse de siéger et les principaux meneurs


, ,

du mou v ement se réunissent à Mi ll edgevi l l e p our


s en t endre sur la séparation et les mesures militaire s

qui devaient en ass u rer l e succès .

Le Congrès a ll ai t s ou v rir l e 3 décembre e t l o n


’ ’

co mptait avec raison sur la neutrali t é du go uve r ne


m ent .

E lu par la coalition des démo crates M Buchana n , .

n o s ai t rompre avec ses a nciens al l iés : i l a ff ectait de


voir dans le choix de so n su ccesseur un acte agressif


contre eux il cherc h ai t de vains moy ens de concilia
,

tion i l n a d m et t ait pas la possibilité de la sécession ; il


,

la condamnai t e t cependant il ne se croyait pas le


droi t de la réprimer Les par tisans du S ud étaient en
. .

maj orité d a ns son ministère et remplissaient la plu


]

pa rt des emplois fédéraux ils en avaient profité pou r


favoriser de mille manières les desseins de leurs co m
p li c es et entravaient to u tes les mes u res proposées par
l eurs collègues dévo ués à l Union L un d entre eux ’
.
’ ’

,
1 08 L A VIE P O I IQU
L T E

nelles et nous en t r ouvons la p r eu ve dans leu r s


,

pro p r es
Dans beauco up de ces états l esclave f ugitif est ,

d écha r gé de son t r avail et dans aucun le g o uv er


,

nement local ne s est so um i s aux stip ulations pres


crites par la
Ainsi l union co nstitutionnell e a été fo r mellement

brisée et méprisée .

O n aj outait à tous ces griefs 1 é lévation à la haute


dignité de président des E tats Unis d un homme —

dont les opinions et les desseins sont hostiles à l es


c l a va g e .

Que faisait il cet ho mm e j uste pendant que la



, ,

rébellion s o r g an is ait au grand j our avec la com


p c it é secrè t e d u gouve r nement auquel il allait suc


l i
céder ?
Il a t tendai t à S pringfield que son heure fût venue ,

sur v ei ll an t en si l en ce l a t rahison de ses ad v ersaires et


se défendan t a v ec énergie co n t re les ami t iés sp ont e
nées d un e fo ule de p ersonn a ges qu i l n av ait j amais
’ ’

connu s et qui enco mbraient main t enant sa m odeste


demeu re .

J e sui s t r ès surpris disait i l a sa femme ; j e reçois



,
-

maintenant le sixième de la nation qui voudrait vivre ,

aux dépens des autres cin q sixièmes Mais é l oignez .

de m oi to us ces solli ci t eurs ; on ne saura qui j e veux


choisir po ur mes fonc t ionnaires que le j our O ù j e serai
ins t allé à la Maison Blanche .

Ce j our arriva vite .


Les États esclavagistes avaient suiv i l exemple de la ’

Caroline du Sud .

Le 8 février 1 8 74 l assemblée de Mon t go mery v o


,

tait la Constitution des États confédérés e t choisissait


pour président et vice président de la Confédératio n
-

du Sud MM J efferson Davis et Ale x and r e A Ste


, . .

p h en s .

Le 1 1 du m êm e mois l h o nn ê t e Lin c oln quitte ,


Springfield po ur se r endre au poste d h onneur que lui ’

a v aien t confié ses concitoyens après a v oir adressé ,

aux h abitants de sa patri e adoptive ces t ouchantes


paroles d adieu ’

Mes amis p e r sonne s il n es t dans m a situa t io n


, ,
’ ’

ne p eut se r e ndre comp t e de la tristesse q u e j é p r o u v e


en me sépa r ant de v ous A ce peuple j e dois to ut ce.

que j e suis Ici j ai v écu plus d u n quart de siècle ; ici


.
’ ’

sont nés mes enfants ; ici l un d eu x est enterré J e ne ’ ’


.

sais dans combien de temps ni si j amais j e vo us re


verrai .

Um devoi r p èse sur moi le p l us lo urd peut être ,


-

qui ait pesé su r un homme depuis les j o u rs de Was


hi n g t on Il n au r ait j amais réussi sans l aide de la
’ ’
.

Providence en qui touj ours il se c onfia J e sens que .

j e ne puis réussi r a mon tou r sans la même assistance


divine qui le so utenait ; et dans le mêm e Tout Puissant -

j e place mon espérance .

Vous , mes amis p ri ez l e de m a i der S ans lu i pas



-
,
.
,
1 10 LA VI E P O I IQ
L T UE

de su ccès ; avec lui le triomph e est ce r tai n E n c o r e


,
.

une fois j e vo us envoie les adieux d un c œ u r qu i


,

vous est attaché par les liens de la plus profonde


a ffection .

I l part accompagné des v œ u x et des p r i ères de


,

tous A chaque station la foule at t end son passage


.
,

co mme celui d un lib érateu r acc laman t Lincoln et


la Co nst i tution !
Ce fut une véritable ovation que ce voyage de
Spr i ngfield à Washington Dans chaque grand cent r e .

de pop ulation il est ar r êté fêté co mplimenté Il r é , ,


.

p ond a to utes les députations et chacu n des discou r s , ,

petit o u grand qu il prononce est un v r ai mo dèle d à


,

,

propo s suivant les lieux les p e r son nes o u les c irc on


, ,

stances .

A N ew Y ork le maire de la cité lui dit toutes les e s


-
,

p é ran c e s que l e peu ple l oya l des É t a t s Unis avait mises


-

en lui pour le maintien de la Constitution violée par les


rebelle s .

Rien répondit Linc oln ne sa u rai t me faire con


, ,

sen t ir à la destru c t ion de cet t e Union à laquelle not r e


grande cité mari t im e de N ew York comme le pays —
,

to ut entier doi t sa mer v ei l leuse p rosp érité tan t que


, ,

l Uni o n sera consacré e au bu t po ur l equel elle a été


é t ablie D ans m a pensée le navire e st fai t pour la car


.
,

g ai s o n ; t ant qu il p e u t être sauvé avec elle il ne doit


j amais êtr e abandonné à moins que la derniè r e ,

chance de s alu t n e soit de j ete r p a r dessus bo r d le


- —

fre t et les passagers A ussi longtemp s donc q u e la .

p r ospé ri té et la libe r té du p euple t r o uve r ont u n sû r


1 12 LA VI E P O I IQU
L T E

a c te m é mo r able ; o n lui demande de leve r au , moye n


d une c o r de le dr apeau qui éta i t au dess u s

,
-
de l é

di fi c e .

M es amis , r épond il
vo u s me p ri ez de lever le —
,

drapeau sur cet édifice O ù a été prononcée la dé cla


ration d indépendance C est bien une image de c e

.

que j e suis Ce n est pas moi qui ai fait ce drap eau


.

ce n est pas moi qui ai fait la machine p our le ten ir


ce n est même pas moi qui ai fait la co r de pou r l e


tire r ; j e ne suis qu un instrument j e ne fais que ’


,

prêter mon bras c est la natio n qui fait le reste ’


.

Je m e suis souvent demandé en relisant notr e ,

Consti t ution qu est c e qui lui avait val u cette faveur


,

d être a la fois la plus j eune et la plus ancienn e des


constitutions qui soien t a u monde E t j e m e suis .

répondu c est que dans cet t e Constitutio n ses ’

, ,

immortels a u teurs ont écrit le principe admirable


de la liberté po u r tous e t qu en le faisant ils ont ,

prophé t isé non seulement l aveni r d e leu r pays -


« mais l aveni r du monde entier Ils ont annon c é



.

qu un j o ur viendra o ù l e poids qui p èse sur l es


épaules de tou t homme venant en ce mon de se r a


allégé et c est pa rc e qu ils ont m i s ce pr i nci p e
,
’ ’

dans leur Constitution que cette Consti tutio n a du r é .

Pour moi j e ne sais pas ce qu elle deviendra dan s


,

l avenir ; mais avant de me faire renon c e r à ses


princip es on m a ss as s i n er a s u r p lace
,

.

Cette cérémonie terminée Lincoln partit p our


H arrisburg où la législature de P e n s yl v an i e le reçut
,

officiellement A six h eu r es du soi r il montait s e cr è


.
,

D A B RA H A M L N I CO LN 1 13

tement dans une voiture qui le co n duisit à l e mb ar ca ’

dèr e où l at t en dait un train spécial et retourna à



,

Philadelphie D ès que le train se mit en route les


.
,

fils télégraphiques furent coupés afin que le départ ,

du président quand il serait connu ne pût être div ul


, ,

gué au loin A Philadelphie le p résident et le marshall


.
,

Lamon de Washington son seul co mpag n on m on


, , ,

t èr ent dans un wagon salo n du train pour Washing -

ton et ils arrivèren t dans la capi t ale fédéra l e le len


,

demain 23 février a six h eures du matin ,


.

Une foule immense dit M Bigelo w auquel nous ,


.
,

empruntons ces détails t rès précis s é t ait portée à la -


,

station de Bal t imore et sa conduite l o rsque passa le


, ,

train dans lequel croyait o n se trouvait le président


,
-
, ,

ne l aissa au c u n doute sur les mau v aises intentions d u


peuple Les précau t ions prises par M Linco l n se tro u
. .

v ai en t suffisamment j ustifiées Cette preu v e manifeste .

des proj ets désesp érés formés par les ennemis de la


no uve ll e administration rendit nécessaire la présence ,

dans la capita l e d une certaine force mili t aire pour


,

prévenir les tro ubles lors de l installation du nouveau ,


président .

A . J O UA U L T .
1 14 LA VIE P O I IQU L T E

IAG
N U UR T O N I A 4 DU MA R S 18 6 1 C I I
O N S T T UT O N D E S ÉT AT S
C FÉ É É PI PH I
.


ON D R S . H LO S O E DE L E S C L A VA GE .

L ina u guration d A b rah am Lincoln à W ashington


’ ’

l e 4 m ars 1 8 61 eut lieu sans manifestations ho s t iles


de la par t d e s agents du sud fo r t nombreux pourtant
,

dans la capi t ale .

L a cérémonie très simple en elle même e m p r u n


,
- —
,

tai t t ou t e sa solennité a la gravi t é des circons t ances .

O n a vu par le portrai t que nous a v ons tracé du


n ouveau présiden t et par l histoire de sa j eunesse e t
,

de sa v ie poli t ique qu il n e p ossédait aucun de ces ,


a v an t ages que donnent la richesse l extérieur les ,


man i ères l expérience de ce qu on nomm e le monde


,
’ ’

et le l ec t e u r comprendra sans peine que l h o n n ê te ’

A be ait été embarrassé confus presque honteux , , ,

quand aux acclamations d une foule en t housiaste et


,

frémissan t e il se présenta sur l estrade accompagné


,

de M Buchanan son p rédé c esseur et de son co m,

r S tephen Doug l as
,
.

p é t i t e u pour prêter le serment ,

cons t itu t ionnel et s adresser à l assemblée d u peuple


’ ’
.

Il s avance lentement et d un air inquiet raconte


’ ’

M A ugus t e Polo ; il a retiré son chapeau qui l u i


se mble un pesant fardeau ; il l e fa i t machinalement
.
11 6 LA VIE P O I IQU
L T E

Loin de moi dit i l l i dée de m i mmi s cer dir e c te


,

,
’ ’

ment o u i ndirectement dans l institution de l es cla


’ ‘

vage dans les E t ats O ù elle est en v i gueur J e p ense .

n avoir p as ce droit et j e n ai pas l intention d en agi r



,
’ ’ ’

ainsi C eu x qui m ont choisi et é l u savaient parfaite


.

m ent que j avais maintes fois fait un e semblable dé


c l ar at i o n e t que j amais j e ne m étais rétracté


, .

Mais ce que j e veux c est le maintien de la Cons ,


t itutio n .

A ucun E ta t
de son propre mouvement n a le
, ,

droit de se re t irer légal e ment de l Uni o n ’


.

Toutes les résolu t ions o u ordonnances qui con


courent a cette fin son t légale m ent nulles et tous ,

actes de violence co mmis p ar u n o u plusi eurs E tats ,

contre l autori t é des E tats Unis constituent suivant


’ —
, ,

la loi l insurrec t ion o u la ré v o l u t ion



.

J e p ense donc qu en ce qui concerne la Consti


,

t u t i o n et les lois l Uni o n n est pas dissoute ; et dans


’ ’

la limi t e de mes pouvoirs j e veillerai co mme la


,

, ,

C ons t itution m e l o r do nn e ex pressément à ce qu e les


lois de l Uni o n soient fi d èlement exéc utées dans


tous les E ta t s .

Il termina par un élo quent appel à la cons ci en c e


et au patriotisme de ses concitoyens égarés
'
Vo us q u i êtes mécontents c est dans vos mains et ,

non dans les miennes que se t r ou v e à cette h eure le


sort de la guer r e civile Le go uve r nement n e vou s .

a t taquera p as
Vo us p ouvez é vi te r un con flit en n étant pas vous
.

m ê me les agresseurs Vo u s n avez p oint u n se r ment .




D A B RA H A M L N I C O LN 117

e n r egistré dans le ciel ( o a t h r eg i s t r ed i n h ea v en ) de


d ét r uire le Gouvernement ; moi j ai solennellement

j u r é de le main tenir de le pro t éger et de le défendre


, .

J e n ai point envie de fermer la porte a la conci


l iat i o n N o us ne sommes pas des enn emis mais des


.
,

amis N o us ne devons pas être ennemis Qu e la


. .

p ass i on ne nous p o usse pas j usqu à brise r les liens de ’

not r e ancienne amitié .

A p r ès cette a dr esse au p e ple L i n c oln p r êta ent r e


u , ,

les mains du j ug e T aney le sermen t constitutionne l ,

J E J U R E S O L E N N E L L E M E N T D E R E MP L I R A V E C F I
DÉ L IT É L E S F O N CT I O N S D E P R ÉSI D E N T D E S E T AT S
U N IS E T D E F A I R E T O U T C E Q U I DÉP E N D RA D E M O I
,

P O U R M A IN T E N I R P RO T É G E R E T DÉF E N D RE L A C O N S
,

T I T U T I O N D E S E T A T S U N IS —
.

Le soi r même A braham Lincoln prenait p ossessio n


de la Maison Blanche —

Pendant ce temps son p r édécesseu r quitta i t W a


.

s h i n g t o n a des t ina t ion d e Wheatland


,

sa propriété ,

p atr i moniale n ayant plus a r endre compte que d e


,

vant l histoire de la fidélité ave c laqu elle il a v ait tenu


l e se r ment qu il avait lui aussi pr ê té à la C on s t i t u


, ,

tion quatre années auparavant


, .

Les E tats du sud n admett ai ent pas le principe posé


p ar Lincoln qu au cu n E ta t n a le d r o i t d e s o n
,
’ ’

,
118 LA VIE P O I IQL T UE

p r o p r e m o u v em e n t , d e se r e t i r er lég a le m e n t d e
l Un i o n

.

Pour le parti séparatis t e l union fédérale avait fai t ,


son t emps Les intérê t s des E t ats méridionaux deman


.

d ai e n t u n gouvernemen t dis t inc t e t indépendant et ,

c eux qui l e v oulaient étaien t libres de se re t irer de la


Confédéra t ion car l unio n n avait é t é qu un co n t rat
,
’ ’ ’

e n t r e l es E t a t s et non p as comme l e n v i s ag e ai e n t les


ho m mes du nord un gouvernement placé a u d es s u s


,

des E t ats e t leur étant par conséqu ent supérieur .

E n conséquence le congrès des dé l égués de la


,

C aroline du sud de la Géo rgie de la Floride de


, , ,

l A la b a m a du Mississipi et de l a Lo uisiane réuni


, ,

le 4 février 1 8 61 a Mont go mery avait adopté l e


, , ,

1 1 mars une no uvel l e cons t itu t io n défini t i v e et p er


,

m anen t e qui m e tt ai t dorénavan t a l abri de t o u t e ’

discussion de t o u t e at t ein t e l ins t itution de l esola


, ,

v age .

L ancienne c ons t itu t ion é t ait a p eu près muette s ur


ce p oin t I l é t ai t di t seu l em en t
. que les p erso nnes
t e n u es a s e r v i r o u a t ra v a i l le r qui ten t erai en t de s é

chapper seraien t rendues a leurs maî t r es .

La nouvel le s exprime en termes nets e t clairs



.

Voici ce qu on y li t ’

Les citoyens de chaque État auron t le droit de


transi t e t de séj o ur dans t out É t at de l a Confédération
a v ec leurs esclaves ; e t j amais i l ne sera por t é at t einte
au droit de proprié t é sur lesdi t s esclaves .

Les escla v es o u les indi v id u s contraints au service


o u au travail dans to ut É tat o u Te r ritoire de la Con
1 20 LA VI E P I IQ
OL T UE

L

existe dans le Misso u r i il n e s agit
es cl avag e ,

pas de le crée r mais de l e maintenir La situation de


, .

ce p ays est la même q u e la n ôt re vous n e pouvez at


taquer ses droits san s méconnaî t re ceux de tous les
États d u S ud sur un poin t que la constitution n e vous
,

p ermet pas de m ettre en question Vous avez admis .

le Kentucky et le T e n e s s ee avec la clause de l e s cl a ’

vage p o u rquoi traiteriez vou s di fféremment le Mis


,
-

souri ? E n vain direz vous que celui ci est un État


— -

no uveau et non poin t co mm e le Kentucky et le Te ,

n es s ee un démembrement des États primitifs qui


,

étaient en possession de l escl avage Cette c i r c o n s ’


.

tance ne change rien aux nécessi t és des lieux et i l ,

s agi t ici également non de c r éer u n droit nouveau


, ,

m ais d admettre un fait existant Le Missouri d ailleurs



.

faisait partie de la Louisiane que vous avez admise ,

avec l esclavage

Craignez si vo us p r ohibez l esclavage la où vo us


,

le trouverez é t ab l i de produire u n effet moral dan


,

g e r e u x dans les anciens États O ù il existe et que la ,

Constitution a vo u l u couvrir de son égide ; ne trompez


p as sa prévoyante sagesse ; songez que nous avons
deu x millions d esc l aves qui s ils se sentaient so u

,

tenus p ar vous peuvent se po r te r d un m omen t à


,

l au t re aux plus c r uelles extrémités ; souvenez vous



-

des désastres de Saint Doming u e et ne vo u s expo sez—

p as au x mêmes ho r r eu rs .

E s t ce n ot r e fa u te si no s ancêtres no us ont légué


-

ce tte plaie et que p ouvons no us faire de plus que de


,
-

t r aite r no s escl aves avec humanité et do u ceur de ,



D A BRA H A M L N I C OLN 1 21

manière à rappro che r autant que p ossible leur sor t de


celui des cu l ti va t eurs libres L e s c lav ag e après tout .

, ,

a existé dans les républiques les p l us fl o r is s an t es de


l antiqui t é Il ex i s t e enco re dans les colonies de to u t es

.

les puissances de l E u r o p e Pourquoi serai t il interdit ’

.
-

davantage chez nous ?


Laissez l a cette question brûlan te don t la discus ,

sion est pleine de dan ge r s ; ne nous donnez pas a p en ‘

ser qu un j ou r pourrait venir Où l O p in i o n qui nous


’ ’

est contraire ab usant de sa maj o rité dans le Congrès


, ,

p rononce r ait l aboli t ion de l esclavage dans toute l ê ’ ’ ’

tendue des Éta t s Unis ca r ce j ou r l à serait le dernier -


,
-

de l a Confédération .

A insi l on invo quait l es né cessités agricoles le fait


accompli le danger so cial O n faisait appel a la misé


,
.

ri c o r de et dans l inté r êt de l Uni o n cet app el était


, ,
’ ’

entendu .

L es cl av ag e était considé r é comme u n mal n é ce s


saire dont les planteurs d u S ud n o s ai en t pas m êm e ’

prononcer le nom et qu i l s appelaient leur i n s t i t u t i o n ,


p ar ti c u li èr e .

E n 1 8 60,le Sud ayant comp r is que le N ord se fati


g u ai t de la q u es t i o n n èg r e et sentan t quelle étai t
la fa i blesse de sa position sur le terrain de la t o l é
rance a cessé de fai r e appel a la miséricorde des eu
,

nemi e de l esclavage ’
.

E xaspéré dit M E dward Lee Childe de ce que


,
.

,

1 Le gé é l Le e, S a v i e e t s es c am p a g p a r E dw a r d
Ch l P h tt
. n ra n es ,

L ee i de . ar i s , L i b rai r i e; H a c e e et
1 22 LA VI E P I IQ
OL T UE

l e N ord , autrefois son allié ( puisqu il s etait uni a lui en ’

connaissance de cause ) lui j e t ait a uj o urd hui à la fac e ,


une honte do nt la res p onsabi l ité remontai t plus haut


dans le passé le S ud devient accu sateur
,
.

Ce n est plus comme un fait acquis q u e les rebelles


défenden t l esclavage ils le j us t ifien t comme un e i nsti


t u t i o n r a i s o n n a b le bi en fa i s a n te et d i v i n e une insti
, ,

t u t i o n d ordre na t urel m ei l leure p o u r l esclav e que la


’ ’

liber t é un système qui ne dép end mêm e p as de la


,

co uleur des ho mmes so umis à l esclavage et qui c on ’

vient aussi bien a la race blanche q u à la r ace noire ’


.

Le t ra v ail servile est représenté co mme la condi t ion


normale de t o u t e so ciété bien o rganisée I l y a une .

philo so phie de l esclavage p rofessé ex c a t h ed ra


L e s clava g e n est p oint un mal disen t les no u v eaux


’ ’

do c t eurs ; c es t la co ndi t io n qui convient l e mieux a la


masse de l h umani t é Le noir es t nécessairement le


premier esclave parce qu il es t le plus s t upide le


,

,

moins précieux le plus facile à capturer ; mais le tra


,

v e i ll eur blanc qui n a r i en a donn er au m onde dans


leque l i l est n é que le travail gro ssier de ses b r as ro


bustes est d e fa i t un esclave sur tou s l es points du
, ,

globe e t s il l é ta i t d e d r o i t i l se r ait plus heu r eu x


,
’ ’

q u il ne peut j amais espérer le de venir avec le systè me


qui p révaut en E u r ope et dans l es États lib r es de l U ’

nion .

Ce tt e philoso p h ie dev i nt bientôt u n dog me po liti


que et dans un disco urs prononcé à S a vannah M S t e
, ,
.

p h en s exp l iqu a ainsi les principes sur lesquels éta it


fondé le no uveau Gouve rne ment .
1 24 LA VI E P I IQ
OL T A B RAHA M L I N C O L N
UE B

Le général confé déré Beauregard o uvrit le feu con


tre le fort S um t er où fl o t t ait le drap eau de l Uni o n

.

A près un b ombardement de vingt quatre heures le -


,

m aj or A nderson capi t ula avec tous les honneu r s de la


gue rr e et s emb ar q u a en destinatio n de N ew Y ork

,
-
,

avec toute la garnison .

La rupture étai t définitive et le sort des b atailles


allait décider des destinées de la liberté dan s le N o u
veau Monde
-
.
T R O I S I EM E P A RT I E

A B RA HA M L I N C OL N
D
PRÉ SI E NT DE S

ETATS UNIS
1 28 A B B A II A M L N I C O LN

bles moyens n avaient été laissés à un chef d É t at par


’ ’

s o n prédécesseur p our entrep r endre une au ssi g r ande

t â che .

'
S ou s l administration de Buchanan les hommes d u
Sud avaient lit t é r alement dévalisé le go u v ernement
de l Uni o n

Un t résor vide ; des arsenau x avec leurs dépôts ,

leurs chantiers et leur m atériel o ccupés o u détruits ; ,

les n a v ires réunis à N orfolk incendiés et presqu e to ute


la flo t te fédérale dispersée sur tous les p oints d u
glob e ; dans les bureaux des ministères un personnel ,

de traît r es ; sous les drap eaux à p eine assez de sol ,

da t s fidèles pour mettre la capitale a l abri d un coup ’ ’

de main t el les étaient l es resso urces du p ouvoir ex é


c u t i f a u moment où Lincoln en prit les rênes E t les .

plus dangereux ennemis n é t aien t pas seulemen t les ’

confédérés D errière soi dans le N ord restaient des


.
, ,

mi l liers de par t isans de la cause d u Sud dont les ,

symp athies ac t ives n étaient un secret pour personne


et qui se tenaient prê t s au moment o pportun a don


,

, ,

ner la m ain aux rebelles .

Tou t efois si rien n étai t prépa r é pour l attaque et


’ ’

p ou r la défense le N ord avait en hommes et en ri


,

chesses des forces considérables qu il ne s agissait ’ ’

que de savoir employer .

D après le recensement officiel de 1 86 0 les états et


t er ri t oires du N ord renfermaient une population de


â m e s y compris quelques centaines de mille
noirs La popula t ion des é t ats confédérés n étai t que
.

de 8 desq u els étaient noi r s de ,


P R É SID E NT DE S E T AT S U IS
-
N 1 29

s orte qu en déduisant ceux ci de part et d autre i l



-

restait en chi ffres ron ds de blancs p ou r


sou t enir la lu t te contre
Les ressources matérie ll es n étaient pas m oins ’

i néga l es que le chi ff re des habi t an t s respec tifs La .

région qui formai t les éta t s confédérés es t p l u t ô t un


p ays de plan t a t ions produisan t le co t on l e t abac , ,

le riz qu un pays d agricu lt ure pro prement di t e O ù


,
’ ’

l on t ro m e le b l é la l aine l es b es t iaux les che v aux et



, , ,

tou t ce qui con t ribue a faire vivre de grandes armées ‘

Le N ord a v ai t au con t raire des ric h esses agricoles


, ,

inép uisab l es un commerce qui s é t endai t sur t ou s les


,

m a r c h é s e t u n e i nd u ë t r i e m e r v e il l e u s e m e n t d é v e lo p p é e
M l g ré l a d i s p ro p o r tion des force s au d é b u t l e S ud
.

parfa i t e men t or g n i s é de l o n gue main e u t u n e i n c o n


,

a ,

tes t a b l e supério r i t é Le N o rd q u i a v a i t t o u t a cré r


. e

fut len t à user d e ses moyens ; i l s u bi t de ang l a n t s


,

re v ers capables de déco ur a ge r l es plus in t répides


,
.

Mai s Lincoln a v ai t dans le succès fi na l de la cause


de l Un i o n une foi profonde q u il fi t p artager à la
’ ’

masse de la na t ion .

Le p remier ac t e d un no uveau président es t de choi ’

sir s o n cabine t Linco l n n avai t pas com m e b ea u


.

coup de ses prédécesseurs pris d engagements en ,


vers certains électeu r s in fl uents qui dans la dé ,

m o crat i e américaine vendent leur conco u rs aux ,

candidats Pendant l ebal l ot t age a la Conven t ion de ,

Chicago un de ses amis lui avait écrit par t élégraphe


.

Vou s serez nommé s i vous prome tt ez d accorde r ,


les p l aces d a t t o r n e y g én é r a l et de d i r ec t eu r g én é


A . J O UA U L T . J
1 30 AB RAHA M L I N C O L N
r a l d es p o s t es a messieurs X et La r épons e .

fut courte m ais cl aire ,


Je n accepte aucun m arché ’

et j e refuse absolumen t .

Lincoln s i n s p i ra de ce u x là mêmes qui l avaient



-

nommé ; il s a dress a aux candidats désignés ave c lui


par les électeurs et confia les principaux ministères à ,

ses concur r ents les a ff aires étrangères à Wil l ia m ,

H S e w ard de N ew York les finances à S almo n


.
,

,

P Chase la guerre à Simon Cameron de P e n syl va


.
, ,

nie l a j us t ice ( a t t o r n e y g é n ér a l) a E d ouard Bates


, ,

du M i ssouri Les au t res pos t es fure nt donnés aux


.

hommes l es p l us dis t i ngués de l U ni o n a G é dé o n ’

We l les du Connecticut la marine ; a Caleb B Smi t h


, . .
,

de l I ndi an a l intérieur ; enfi n à M o n t gomery Blair


,

du Maryland la direction géné r ale des postes ,


.

Av an t
d a ll er ch ercher l es rebe l les sur l eur terr i

toire l e gou v ernemen t de v ai t assurer la sécurité a


,

l intérieur s ar m e r con tre les traî t res e t po ur cela


,

to ucher a une des libertés les pl u s chè r es au x A nglo


S axons la liberté indi v iduelle
, .

A ux États Unis comme en Angleterre t oute per



, ,

sonne arrê t ée sans qu e les faits mo t i v an t son arres t a


,

t ion soient des délits o u des crimes éviden t s cont r e


l e droi t commun a la faculté de demander à ê t re con ,

dui t e dans le délai de t rois j ours devant u n m a gis t rat


1 32 A B RAHA M L N I CO LN

comm erce qui furent équipés en navi r es de gue rr e et ,

le 1 9 avril 1 8 61 le présiden t pro clamait le blo cus de


tous les por t s des États séparés .

To u t cela n e suffi sai t p oin t Les A mé r icains ceu x .


,

du N ord surtou t n é t aient point un peuple militaire,



,

bien q u o n l es eû t vus mon t rer à l o ccasio n cer t ain es


’ ’

qua l ités g u errières L armée régulière é t ai t insigni .


fi an t e ses m eilleurs officiers app artenaient au s u d


, ,

et 259 d entre eux avaient passé dans les rangs des


rebe l les .

D ès que la prise du fort S umter fut connue la ,

formation d une armée ch ar g ée de défe n dre la cons


t it u t i o n f u t considéré e comme une a ffaire na t io

na l e .

Le 1 5 a v ril le lendemain d u bombardement Lin


, ,

coln lan ça u n e pro clama t ion dans laquel l e i l deman


dait a u x g o uverneurs des différents É t ats de fo urnir ,

pour un service de t rois mois h o mmes


des t inés a con t ribuer a l a réo ccupa t io n des forts

arsenaux e t autres p r opriétés fédérales capturées p a r


les sépara t is t es .

Le 3 mai après la prise d e l arsenal d e H arper s


,
’ ’

Ferry en Virginie le Prési d en t fit un no u v el appel


, ,

de volon t aires pour un service de trois années


o u p our la durée de la guerre et aug men t a de
hommes l e ffectif de l armée de terre et de
’ ’

m a t e l ots celui de la marine


,

A la fin de l année 1 861 les États Unis avaient ’

,
-

enrôlé en v iron hom m es no n compris les ,

de milice appelés en avril qui avaient été congé


P E SI
R D E NT DE S É T AT S -
UN SI 1 33

dié s après leurs trois mois de ser v ice et ,

hommes de l armée régulière ’


.

Mais ce n étai t pas to ut d avoir le v é de grandes


’ ’

a r mées qui allait o u mettre a leur tête ? S ans do ute


,
-

de pa r la constitut i on Lincoln se t r ouvait c o m m an ,

dant eu chef des forces de te r re et de mer ; mais ,

parce qu il avait guerroyé p endant trois mois contre le


Faucon N oir il ne se croyait p as po ur ce l a un bien


-

grand ca p itain e et confia la direc t ion générale des


,

Opérations au généra l S co t t le vainqueur du M exique , .

Celui ci t rop â gé et trop infi rme p our tenir l a cam


-
,

pagne en personne compri t devan t la gravi t é des , ,

événemen t s la nécessi t é de re m ettre en des mains


,

fermes habiles et sûres l exécutio n de ses p l ans et


,

fit o ff rir par l e Président Lincoln le co mmandement


e ff ectif de l armé e fédérale a un des officiers s u p é

rieurs les pl u s dis t ingués de la guerre du M exique son ,

ami le colone l R ober t Lee de l a Virginie en ce mo , ,

men t campé c h ez les Indiens du T exas et qu o n fi t ,


mander en to u t e h ât e à Washington .

Arrêtons nous un instant devant l i mp



figure ’

o s an t e

du noble défenseur de R ichmond moins a cause du ,

r ô l e militaire qu il va j ouer dans la guerre ci v ile que


po ur montrer en sa p ersonne le représentant de ce q u il ’

y a eu de respec t ab l e dans la cause du S ud c est à dire ,



- —

tisme d É t at qui avait été le pre mier obstacle


et menaçai t encore de la brise r contre lequel


,

,
13 4 A B RAHA M L N I C OLN

il était j uste de lutter mais qu il est imp ossi ble de ,


n e pas respecter quand il s i n c ar n e dans certaine s


â me s vér i t ablement g randes sincères et dé s i nt é re s ,

s ées R obert Lee était de celles là


.

.

Lincoln plaçait avan t toute chose l Uni o n et la ’

Consti t u t ion Lee était Vi rg inien avant d être citoyen ’

des États Unis - .

O n se rappelle l h u mble o ri gine du premi er so n ’

pauvre logis son enfance ses p énibles t r avaux R obe r t


, ,
.

Lee lui était un vrai gentilho mme


, , .

Les Lee de Virgini e descendaient d un e ancienne ’

famille d A n gl e t e rr e d ont les dom aines patr i moniaux


étaient situés dans l E s s ex E n 1 1 9 2 nous tro uvons ’

u n L i o n n e l Lee à la tê t e d une compagnie de cheva


.
,

liers accompagnan t R ichard C œ u r de Lio n a la troi


,
— —

s i èm e croisade I l se distingue t ellement au siège d e


.

Sain t Jean d A cr e q u à son retour R ichard l e c r ée


’ ’
- -

comte de L et c h fi eld et lui donne la p ropriété de ,

D i tc h ley no m que p o r ta par la suite un e des ter r es


,

de Lee en Virginie .

O n p eut voir encore auj ourd hui a la tour de Lo u ’

dres l armure que p ortai t Li o n nel en te r re sainte



.

(Si vou s voulez u n so uvenir des ex ploi t s de Lincoln


il fau t al l er à Patent O ffic e à W ashing t on o ù l o n
,

-
, ,

conserve un modèle de b at eau i nve n t é et construi t par


l h o nn ê t e A be quand il était bûche r on et batelier )

, .

Sous Élisabeth sir H enry Lee éta i t chevalier de la


, _
13 A B RAHA M I CO
L N LN

R obe r t Lee ne f u t poin t obligé comme Lincoln de


1

fau cher pendant trois j ours les prés d un m aître ’

d école pour po uvoir a son a i se lire la vie de Was


h i n g t o n c est peut être la raison qui fit que le gen



-

t ilh o m m e com prit moins bien que l enfant du p eu ple


o ù étai t le devoir d un loyal citoyen le j o ur O ù la ’

guerre ci v ile éclata .

Tous d eux p our t a n t invo qu ent dan s leurs let tres et


l eurs disco u rs le so uvenir d u p èr e d e la p a t r i e ou ,

p o u r m ieux dire il se mb le q u i l s évo quen t sa grande ’

â m e e t lui demande n t des inspirations et des conseils .

Voici ce q u é c r i vait Lee de For t Mason ( Texas) le


,
-
,

23 j an v ier 1 86 1 b .

J ai reçu la V i e d e Wa s h i n g t o n p a r E verett

.

Combien ce grand espri t sou ffrirai t de voir ainsi ce


na u frage de ce qu i l a v ait fo ndé a v ec tan t de p eine '

Je m e r e fuse cepend ant à croire t an t qu i l reste ,


un rayon d espoir que t ous les frui t s de ce tt e belle


'
,

exis t ence doi v en t périr e t que ses sages conseils et ,

l exemp l e de ses vertus doi v en t être sitôt oubliés


par ses conci t oyens A utan t que j en puis j uger par .


l es j ournaux nous somm es en pleine anarchie et a


,

la vei ll e d une guerre civi l e P uisse Dieu éloigner de



.

nous ces d eux fl é au x l Il faudra bien des années


pour q u e les hommes soien t assez c h ré t iens pour
1 g A rri vé ra de de l t t gé
i eu e n a n è c o rp s du ni e , a p r

êt t l é l m l t W tP t t
. au au s

i i a ire d e R
G g W h gt P k
i de o in 1 829 , o ber
é M y fi ll

re s o r co e es —
en

p o u s a , e n 1 8 32, e de as in

C t ttfl
L ee
W hi gt tf
ar eo r e on ar e

us is , p e i - i s d e la f em m e de as n on e t fi ls ado p i d e

ce d e rn i er .
P R ÉSID E NT DE S ET AT S U IS

N 1 37

se passe r de lois sévères et d appels à la for c e J e


vois que qu atre E tats se son t retirés de l Uni on ’

quatre autres apparemment vont suiv r e leur ex em


p l e Si les E tats frontiè r es son t entraînés a leur tour ,

m oitié du pays sera rangée contre l au t re m oi t ié Il


.


.

m e faut ê t re patient et attendre la fin car j e n e p ui s ,

rien ni pour h â ter ni pour r etarder les é vénemen t s ! .

Cette fin q u il a t tendait c e t ait le parti que pren



,

drait da n s le confli t la Virginie qui fut la der n ière à.

quitter l Uni o n Cet t e sépara t ion accom plie R ober t



.
,

Lee crut que son devoir était d asso cier sa des t inée ’

à cel l e de son pays natal et il refusa les offres de Lin


co l n e t du généra l S co t t .

Mon mari a v e r sé des larmes de sang sur cette


malheure u se guerre écri t Mme Lee à une amie
,

m ais comm e homme et com m e Vi r g i ni en il doit


, ,

p ar t ag e r l es destinées de son E t a t qui s est prononcé


solennel l emen t p o ur son indépendance .

Qu on remarque bien les termes de cette lett r e c e


n é t ai t pas l esc l a v age mais l in dépendance de son


’ ’ ’

E t at qu e Lee se croyai t ob l igé de défendre I l n e p ar


,

t a g eai t aucunem en t les t h éories po l i t iques de Jeff erson


D a v is et de A lexandre S t ephens qui v oulaient fa i re de ,

la servi t ude humaine la pierre angulaire de la r epu


b li q u e nouvel l e S es idées su r ce suj et sont nettement
.

ex p r imé es dans une le tt re écri t e en 1 8 56

Bien peu de personnes disait ,


- i i, dans ce s i è c le
1 38 A B RAHA M I CO
L N LN

éclai r é se r efuseront à reconna î t r e j e p ense que , ,

l esclav age ne soit un m al m oral et p olitique d ans


n imp orte quel pays Inutile de s étendre su r tout



.

c e qu i l a de mau v ais A mes yeux la rac e blanch e



.

en sou ffre encore plus que la rac e

Il p ensai t toutefois qu i l était défendu p a r les lois


de toucher a cette institutio n et qu il fallait attendre ’

du temp s le r emède à u n mal si p rofon d .

To ut en nous rendant co mpte aj outait il que ,


-
,

l ab olition é ventue l le et finale de l esclav age est en


’ ’

bonne voie et tout en donnant a cette b onn e œuvre


le secours de no s prières et de to us les moyens


h on n êtes e t j u s t i fi a bl es en n o t re po u v oir il no u s en ,

faut laisser le dé v elo ppemen t e t l e résu l tat entre


les mains de Celui qui v oi t la fin de t ou t e chose qui
préfère agir par des infl uences lentes po u r qui
,

deux mil l e ans n e sont qu un seu l j our ’


.

Les véritables motifs qui o nt décidé la conduite d u


c olonel Lee se retrouvent encore dans la let t re sui
vante adressée à sa sœur a î né e dont le mari avait ,

d e s o pinions t rès prononcées en faveu r d u N ord


- .

A r l gt V g
in o n, i r i n i e , 20 avr i l 186 1 .

A
j ourd hui nous nous tro uvon s en pleine gue r re
u

et il n y a plus de rem ède Bi en que j e ne vo i e pas



.
1 40 A B RAHA M I C L N OLN

L es r ude s épreuves de la guer r e civile n ava i ent pas ’

encore blanchi ses ch eveux S a moustach e était noire .

le r este de sa barb e ét ait rasé de près S es bea ux .

yeux d un bleu clai r pleins de do uceur et de b onté


, ,

bri l laient sous ses sourcils noirs O n n e pouvait ren


con t rer ce regard sans l aimer D une t empérance
.

’ ’

presqu e absolue il buvait rarem ent autre chose que


,

de l ea u et é t ait d une indi ff érence comp l è t e po ur ce


’ ’

qu il mangeai t J am ais au cun excès n a v ai t a ff aib l i sa


’ ’

r obus t e v igueur Grave silencieux se renfermant en


.
, ,

lui même il donnait à qui le voyai t po ur la pre


-
,

mière fois l idée d un h o mme doué de p eu de sensi


’ ’

b ili t é S a sincéri t é sa franchise dan s to ute c i r c o n s


.
,

tance so n cœur grand e t généreux plein d h o nn é t e t é ,


et d une admirable si m plici t é ne p urent être connus


,

que p endant la gu e r r e

Le pl é b eœn Lincoln allait donc a v oir pour a dv er


saire le p l us noble des gen t ilho mm es adversaire digne ,

de lui car R ober t Lee fu t le représentan t le plu s


capable et l e plus ve r tueux de l aristo cra t ie am eri
,

'
caine .

É DO UA R D LE E CI Vi e e t c a mp a g n es d e R o be r t L ee
h tt
1 H LDE
ie
. .
,

i
L br a i r H ac e e et 1 8 73 .
P R É IDS E NT D E S ET A T S —
UN S I 1 41

LA P O L I T I Q UE E T L A G UE RRE L E G EN E RAL M A C— C LE L L A
N.

E M AN C I PAT I O N D E S N È G R E S APP R T E NAN T A


.

A DE S R E B E LL E S .

La vie d A b ra h a m Lincoln depuis son élé v ation a


la présidence se m ê l e d une façon si in t i m e à l histoire


,
’ ’

générale des E t a t s Unis que pour bien l a faire con


-
, ,

naî t re l au t eur de v rai t presque racon t er t ou t en t ière


,

cet t e gig an t esque gu erre ci v i l e qui se t ermina par la


soumission d u S ud e t l abol i tion de l e s c l a v a ge Mai s
’ ’

ce suj et est tro p vaste p our l e cadre qu i l s es t t racé


.

et n en t re pas dans son principa l dessein qui est sur


tou t de mon t rer l h o nn ê t e ho mme dans le grand ci


toyen A ussi ne trouvera t o n dans ce tt e dernière pa r t ie


.
- -

du li v re que ce qu i l est n écessaire de savoir de s faits


,

p oli t iques et mi l i t aires pour mieux apprécier la con


duite et le carac t ère du p e t i t pionnier arrivé a la pre
mière m a gis t ra t u re de son pays après avoir pas s é ,
'

par tous les degrés de la hiérarchi e so cial e .

Politi qu ement la lutte se divise en deux pério des


,

dis t i n ctes
1 42 A B RAHA M I CO
L N LN

ments que contient so n adresse du 4 mars ne de ,

mande a la force des armes que le moyen de fai r e


r en tr er dans l Uni o n les E tats qui en sont sortis et re

po usse to ute i dée d i mmixt i o n dans l institution de l es


’ ’ ’

c lav a g e .

Mais après deux années de luttes sanglantes quand


, ,

toute espérance de retour des E tats du sud à l Un io n ’

fut définitivement p erdue le gouvernement considéra ,

co mme une nécessité comme une m esure de gue r re


,

indispensable au salut public de c o n fi s q u er tous les ,

escla v es qui appartiendraient a des individus enco r e


en é t a t de rébellion le 1 j an v ier 1 8 6 3 "r
.

C est le 23 septemb r e 1 86 2 que Lincoln annonça


cette résolution pa r une pro clamatio n célèb r e qui


p or t ait pour tit r e

f
A c t e p o u r é t o u f er l i n s u r r ec t i o n , p o u r p u n i r la

t r a hi s o n e t la r é be l li o n , p o u r s a i s i r e t c o n fis q u c r
les b i en s d es r e be l le s e t pour d

au t r es f
i ns .

Le 2 décembre suivant dans son m essage annu el , ,

i l recommandait au Congrès les amendements s ui


vants a la Cons t itutio n
A rt .Chacun des E tats o ù l esc lavage e x iste ’

ac t u ellement qui abolira cet t e institu t ion à un mo


,

m ent quelconque avant le 1 j anvier 1 9 00 de N otre


S eigneur recevra une compensa t ion en titres de


,

r entes des E t ats


A rt 2 To ut esclave qu i au r a pratiquement j oui
. .
1 44 A B RAH A M L I N C O L N
n a î t r e et p r otége r la liberté de ce s p ersonnes et ne ,

m ettre obstacle en aucune manière au x e ffo r ts qu elles ’

p ourraient faire p our ob t enir leur liberté eff ective ;


Q u e ledit premier j an v ier le pouvoir exécu t if dé ,

s i gnera par une pro clama t ion les É t ats o u por tions
, ,

d É t at dans l esquels la po pulation sera en rébellion


con t re les É t a t s Unis -

Que le fait qu u n É t at ou sa population sera ce ’

j ou r l à représen t é de bonne foi au Congrès des


-
,

É t ats Unis p ar des m embres choisis a des élec t ion s


-
,

auxque l l es aura par t icipé la m aj o ri t é des élec t eurs l é


g al e m e nt désignés sera à défaut de preu v es s u ffi , ,

san t es é t ab l i s san t l e con t raire considéré co mme un .

témo i g n age conc l uan t qu e ce t É t a t ou sa po pula t ion


n es t pas en r é b e ll ion con t re les É t a t s Unis ;

Moi A b r ha m Linco l n président des É t a t s Unis


,
a ,
-
,

en ver t u des p o u v oirs don t je suis in v esti co m m e


commandant e n chef des armées de terre et de mer
des Et a t s Unis en ce tem ps de rébellion armée con
-
,

tre l au t ori t é e t le go u v ernement des États Unis et



-
,

comme m esure de guerre conven ab l e e t nécessaire


p our la ré p ession de ladite rébellion auj ourd h ui
r
,

premier j o ur de j an v ier de l an de N o tr e S eigneu r ’


-

1 8 6 3 conformémen t à ce que j e m e suis pro posé de .

faire après le délai de cen t j ours pleinement écoulé


,

depuis la da t e de l o rdre ci dessus mentio nné j e p ro’



.

cla me pub l iqu ement et j e désigne comme É t ats o u


p ortions d É t at dont les popu l ations respecti v es sont

auj ourd hui en rébel l ion contre les É t ats Unis



-

L Ark ans a s le Texas la Louisiane à l ex c ep


’ ’

, , ,
P R ÉSID E NT D E S ET A T S —
UN SI 1 45

tion des paroisses de Saint Bernar d Plaquemines -


, ,

J efferson Saint J ean Baptiste Saint Charles Saint - -


,
-
,

J acques A scension A ssomption Terre Bonne La


,

-
, , , ,

fourche Sainte Marie Saint Martin et Orléans y com


,
-
,
-
,

pris la v ille de la N o uvelle O rléans —

Le Mississipi l A l ab am a la F l oride la Géorgie,


, , ,

la Caro line du S ud la Caroline d u N ord la Virginie , ,

à l excep t ion des quaran t e h uit co m t és compris


,

sous la déno mina t ion col l ec t ive de Virginie O c c i den -

tal e ainsi qu e les com t és de Berkeley A ccomac


, , ,

N orthamp t on É li s ab et h City York Princ esse A nne


,
-
, ,
-

et N orfolk avec les villes de N orfolk et de Ports


,

mouth .

Les portions d É t at exceptées resteront pour le ’

présent comm e si ce tt e pro clamation n avait pas é t é


,

p u b h é e .

E t, en ver t u des po uvoirs et da n s le but ci dess u s -

indiqués j o r do n n e e t j e déc l are qu e t o u t es p ersonnes


r etenues comme escla v es dans les Et ats o u por tions


,

d É t at désignés sont libres à par t ir de ce j our et que


le gouvernemen t exécu t if des É t ats Unis comprenant


,

les au t ori t és mili t aires et na v ales reconnai sse et main


,

tienne la liber t é desdites personnes


,

J enj oins aux p ersonne s ainsi déclarées libres de


s abs t enir de toute violence excepté dans le cas de


légi time défense et j e leur recommande de travailler


,

loyalement au t ant qu elles le po urront moyennant


,

,

des salaires raisonnables .

Je déclare de plus et j e fais co nnaître que ces


, ,

p e r sonnes si elles se t r o uvent dans les condi t ions


,

A J O UA UL T
. . 10
1 46 A BRAH A M L I N C O L N
convenables se r o n t acceptées dans l e se r vi c e
,

l arm ée des États Uni s po ur fo r me r les garniso n s des


’ —
,

forts pour garder les po sitions les p ostes et autres


, ,

places ainsi que p o ur servi r à bo r d des navi r es de


,

guerre de toutes sortes .

E n agissant ainsi j e crois s i ncèrement acco mpli r


,

un acte de j ustice rester dans les presc ri ptions de la


,

Con stitution obéir aux nécessités militai r es et j in


, ,

v o q u e le j u gement réfléchi de l humanité et la grâce


du T out Puissant -
.

E n foi de quoi j e sign e la p r ésente de ma ma i n


, ,

e t j y fais app o ser l eîs c e au des États Unis



-
.

Fai t en l a ville de Was hington le p r emie r j our ,

de j an v ier de l an de N otre S eigneur mil h u it cent



s oix an t e trois et le quatre vingt sep t ième de l i nd é


-
,

p e n d an ce des É t a t s Unis d A m é r i q ue-



.

A B RA I IA M L IN C O L N .

P a r l e P r és i d e n t ,

W I IA M H
LL . S E W AR D .

La p oliti qu e d e Lincoln t o u c h ant l émancipat i on ’

m érite u n e attention par t ic u liè r e p a r c e qu elle fut ,


tou t a la foi s très loyale et e x trêm e m en t habile Il


-
.

dé t este l esclavage mais v eut r est er sur le ter r ain de


l a tolé r ance et de la C onstitution Seule ment avec la .


,

perspicac i té et la s agesse d un vé r itable homme d É t at ’ ’

,
1 48 A B RAHA M L N I C O LN

se r m ent qui m e l avait mis en ma i n J ai comp r is eg a



.

lement que dans la pratique de mo n administration


,

c i v i le il m était défendu d éco u ter m es sentiments


’ ’

particuliers sur la question de l esc l avage considérée


,

au p oint de vue m oral J ai déclaré cela main t es fo i s .


et en maintes circonstan ces et j a ffi r m e que j usqu à ,


’ ’

c e j our au cun de m es ac t es n a é t é dicté par m on ju ’

gemen t et mes sentiments sur cet t e ins t i t u t ion .

J e co mpris cep endant qu e mo n serment de con


server la Constitu t ion au mieux de m o n po uvoi r , ,

m i mp o s ai t également l obligation de préser v er p a r


’ ’

tous les m oyens indispensables le go uverneme nt de ,

l a n a t io n don t cette Constitu t io n é t ait la loi orga


nique .

É t ai t il p ossible p our conserve r la C onstitution ,


-
,

de laisser périr l a n atio n ?



C es t la loi géné rale qu il faille tan t qu on le peut ’

,

p rotéger a u ssi bien les m embres que le corps S eu l e


,

m ent quel quefois o n cou pe un des m embres pou r


sau v er le corps ; mais j amais le s age n e songera a
donner sa vie po ur sauver un de ses m embres .

J e p ense don c que des m esu res qui autrement


seraient incons t itutionnelles peuvent devenir l é g i ,

t imes quand elles sont indispensables au salut de la


n a t ion J us t e ou i nj us t e j accepte ce principe et j e le

.
,

professe Je n e puis adme tt re qu e j a u rais au mieu x


.

de mon po uvoir véritablem en t tenté de sauver la


,

Cons t itu t ion si pour l esclavage o u quelqu e autre


, ,

i ntérêt secondaire j e laissai s Sombrer t out ensemble


,

l e gouvernemen t le pay s et la Constitution


, .
P R ÉSID E N T DE S É T AT S —
UN S I 1 49

Lo rs qu co mmencem ent de la guer r e le géné



au

ral Fr emont essaya une émancipation militaire j e lui ,

défendis d en agi r ainsi parce q u e j e n e pensais pas


qu e ce fû t alors une nécessité indispensable .

Quand un peu plus tard le secrétaire de la gue rr e


, , ,

M Ca meron suggéra l idée d armer les nègres j e ’ ’

.
, ,

combattis égalemen t cet t e idée comme ino ppor t une .

Quand vers le même temps le général H un t er


, ,

essaya aussi une émancipatio n militaire j e m y o p po ,


sai de n ouveau parc e que la nécessité n était point


,

encore impérieuse .

A u contraire en mars mai et j uillet 1 86 2 j e fis de


, , ,

chaleureux e t réitérés appels aux Éta t s frontières


(B o r d e r S t a
-
t es ) res t és fidèles pour les engager à ac
cep t er l éman cipatio n de leurs nè g res avec indemnité

p arce que j e commençais a p enser qu il allai t falloi r ’

armer les noirs p our le su ccè s de l a guerre Ces États .

déclinè r en t m a p ro position et alors j e m e vis dans


c ette alterna t ive o u d abandonner l Uni o n et avec elle ’ ’

la Consti t u t ion ou de m em p ar er d une mai n ferm e


,
’ ’

de l élémen t de couleur E n le faisant j es p é r ai s plus


’ ’
.

ga g ner que p erdre et cependant j e n avais pas une ,


entière confian ce da n s ce moyen .

Une année d ex p érience es t ve n u e m e rassure r


N ous n avons rien p erdu dans l estime de la n at i on


.

’ ’

de l armée de l é t ra n ger et nous avons g a gné


’ ’

, ,

soldats marins et travailleurs Voilà des fai t s pal


, .

p ab les et sur lesquels comme faits il n y a pas a épi


’ ‘

, ,

l o g u er N ous avons les ho mmes et no us n aurions



.

pas p u les avoi r sans p r endre la m esure Q u e celui .


1 50

qui veut le maintien de l Unio n et bl â me l a r mement ’ ’

des noirs fasse cette expérience qu i l écrive su r une ,


ligne I l fa u t d o m p te r la r ébe lli o n p a r la fo r c e


d es a r m es et sur l a suivan t e
, I l fa u t en lev e r à la
n èg r es a r m és e t les r ep la

cau s e d e l Un i o n
où t p o in t é té é m a n

la i ls

c er s e r a i en t s i ls n a va i e n

c i p és , et j e le mets au défi de t enir tê t e a ce t te v ê


rité que san s la m esure prise par le go uvernement la
,

cause de l Uni o n se tro uvait compromise



.

J aj o u t e u n mot qui n a poin t été prononcé dans la


’ ’

con v ersa t ion Le réci t qui précède n a point été dicté


.

par le désir d ê t re com p l imen t é sur ma sagaci t é J e



.

'
n a i p o i n t la
p r é ten t i o n d a vo i r g o u ver n é les é t é

n e m e n ts j e c o n fes s e a u co n t r a i r e bi e n h a u t q u c j a i

é té d i r ig é p a r eu x

A
.

j ourd hui après trois années de luttes la situa


u

, ,

tio n n es t plus c c q u e les par t is o u les ho mmes a v aient


p roj e t é et at t endu Dieu seu l revendique ses droits .

L e b ut vers lequel il no us m ène semb l e man i fes t e .

S i l en t re dans sa volon t é de chasser de la t erre une


grande inj us t ice ; s i l veu t q u e nous hommes du nord ’

, ,

co mme vous hommes du sud nous p ayions chère


, ,

m ent notre complicité dans le mal l his t oire impa r ,


tiale n y ve r ra qu une cause de plus pour reconna ître


’ ’

et bénir la j ustice et la bonté du T o ut Puissant —


.

A
dater de l émancipa t ion des nègres les a ff aires

p r ennent u ne face to ute nouvelle O n a pu voir par la .


1 52 A RRA H A M L N I CO LN

gramme des r adicaux no us verrons r ap i dement se


,

di sso udre to utes no s armées .

Les amis du j eu n e N ap o léo n disaient tout bas


qu une grande victoire de l armée du Potomac pe r
’ ’

m et tr ai t a son ch ef de j ouer le rô l e de médiateur d im


poser la paix aussi bien au gouvernement de Washi n g


ton qu a celui de R ich mond

La condui t e de Mac Clellan était bien faite p o u r j u s


t ifier de p areilles supp osi t ions car no n seulement il ,
-

considérait co mme non a v enus les ordres qui lui arri


v ai e n t de Washington mais i l bl â mait p ubliquement
,

l a poli t iq u e du cabinet .

Par u n l ong ordre du j o ur da t é du 7 o ctob r e 1 le chef ,

de l armée du Potomac qui t enait t o us ses p ouvoirs


du président se p ermi t de co mmen t er la pro clama


,

tio n présidentielle d affran ch i s s e m en t du 2 2 septem


bre de manière à faire croire qu e les t roupes étaient


mé contentes d un acte qui sa t isfaisai t au contraire la

masse de l armé e compo sée en grande par t ie d aboli


’ ’

t i o n n i s t e s ; i l ne craignit même pas de b lâ mer indirecte


,

men t l e présiden t t ou t en a ff ec t an t de recommander


,

à ses soldats la s o umission à l autori t é ci v ile Lors



.

que des erreurs p oli t iques so n t co m mises disai t il ,


-

dans son o rdre du j our le remède doi t en ê t re c h e r


,

c h é seulement dans l acte so uverain d u peuple pa r


lan t par la v oix du scru t in


Le gou v ernement fédéra l plu s fort et plus résol u
.

d epuis la pro clamatio n de Lincoln décida que l armé e


1 . 1 862 .
P R E ID S A T S UN I S
E NT 1 53
DE S É T —

déso r mais serait uniquement employée à so n œ uv r e d e


gue rr e et que les ch efs même les p l us i l lustres n in
, ,

t e rv i en dr ai e nt plus dans les a ff aires de la R épublique


C es t la seconde partie de la lutte qui commence la
.

plus glorieuse la plu s féconde avec Grant Sherma n


, , ,

et Sheridan dignes adversaires de Lee de Beaurega r d


, ,

et de Johnston .

Le 5 novembre Mac Clellan après sa pro clamat i o n ,

i ntempesti v e é t ai t ren v oyé dans ses foyers


,
.

N ous laisserons le j eu n e N a p o léo n devenu simple ,

citoyen travaille r au renversement du p résiden t p en


, ,

dant que ses successeurs lut t ent d éne rgie et de talent ’

p o ur le triomphe de l Un i o n e t nous irons v oir ce que



,

fa isait l h o nn é t e Lin coln a la Maison Blanch e



-
.

A BR A H U I . IC
L N O LN A LA M AI S ON —
BL AN C HE

La Maison Blanche est une h abi t ation très simpl e


- -
,

très modeste qui sert d hôtel aux présidents des E tats


,

Unis : vérit able maison d e verre où tout le mon de


ent r e et est admis l amb assadeur et l e négo ciant le
,

,
1 54 A B R AHA M I
L N C O LN

sénateur et l o uv rier les é t rangers comme l es natio



,

naux A ussi la vie du so uverain tempo raire qui réside


.

l a est elle percée a j our


-
.

Lincoln fu t encore plus en proi e qu e ses p ré dé c es


s eu r s a la curio sité publique ; son h umble o rigine et

la gravi t é de sa mission suffisen t p our l expliquer O n ’


.

connut donc bien vite les habitudes du nouveau pré


s i d en t qui du reste n avait rien à cacher

.
, ,

I l se levait a cinq h eures du ma t in en été a si x ,


«

h eures en hiver e t consacrait deux ou trois h eures à


dépoui l ler sa v o l umineuse correspondance par t icu
,

l i èr e et à parco urir les j ournaux A neuf h eures i l dé .

j eûnai t e t se rendait ensuite a u bureau de la guerre ,

p our connai t re les nou v el l es appor t ées par le t élégraphe


e t causer de la situa t io n mi l i t aire avec le général
H a l leck D e re t o ur à la Maison B l anc h e il appe l ai t
.
-
,

s o n secrétaire auquel il dic t ai t les réponses à fa i re à

cer t aines le t tres retenan t l es au t res pour y répondre


,

lui même

.

Le mardi et le vendredi é t aient les jours de conse i l


des minis t res To u t le res t e d e la se m aine l es por t es
.
,

é t aien t ou v er t es depuis mid i a t ou s les visi t eurs po ur ,

la p l upar t des curieux o u des so l licite u rs N euf sur .

dix appartenaient à ce t te dernière ca t égo rie .

Lincoln écoutait avec une bienveil l ance infa t igable .

Les soucis les angoisses qui se p eignaient sur sa phy


,

s i o n o m i e ne l e mp ê c h ai en t pas d ê t re to ut entie r à son


’ ’

interlo cuteur et de temps a autre une anecdote lui


,

revenait un éclair de bonne h umeu r j aillissait de s es


,

ye ux accompagné d un é clat de ri re sonore S a ma


,

,
1 56 A B RAHA M L I N C O L N
ble envers chacun qui son t l essen c e sinon l e u ve
,
’ ’

loppe des gens bien nés .

Tout en payan t largement ses d evoirs au monde


l exce ll ent homme sa v ai t t ro uver des h eures de liberté
,

et déro u t e r la curiosi t é O n le croyai t à Washing t o n


.

et i l était à l armé e du Po t o mac chez Mac Clellan o u



,

chez Gran t I l partai t seu l la nuit p o ur al l er prendre


.
, ,

d e s no u vel l es sur place si les dépêches ne l a v aient


p o i nt satisfait ; puis après i l s as sey ai t sous la t ente ,


entre quelques officiers au coin d u feu écoutant les , ,

récits des anciens soldats d u Mexique o u répé t an t aux ,

plus j eunes avec sa b onhomie h abituelle une de ses


,

anecdo t es favori t es
,

S es amis les plus intimes n e lui connaissaient p as


de défa u t F u mer b oire j ouer j urer é t aien t c h oses
, , , ,

inconnues pour Lincoln qui l oin de s en vanter en


.

, ,

étai t p resque h on t eux Un j our en effe t dans une


.
,

so irée où t ou t l e monde fumait excep t é lui quelqu un ,


fit la remarque tou t hau t que le P r és i d e n t n a v a i t p as ’

d e v i c es Vo i là u n comp l iment dou t eux que vo u s


m e fai t es ob ser v a ce der nier J e me souviens qu u n
.


.
,

j o ur dans un t hé ât re en plein ven t un ho m me assis à


, ,

côté de m oi m o ffrit un cigare Je ref u sai en aj outan t



.

que j e n avais p as de vices Mon homme ne dit rien


.
,

fum a quelque t emp s encore et quand il eut fini , , ,

g r ogna sans m e regarder ces paroles que j entends


, ,

P R ÉSID ENT DE S É TATS —
UNI S 1 57

encore Jép r o u v é q u e

ai c eu x q u i n

o nt p as d e
v i c es o n t d ia ble m e n t p eu d e v er t u s .

Lincoln étai t un homme d espri t qu e ses adversaires ’

ont essayé de représenter com m e un bo u ffo n i l le t t r é .

O n a fai t u n volume in t i tu l é les C a le m br ed a i n es d u


E s t i l besoin de dire que l e l i v re n est

v i e i l A be -

qu un long me n so n ge un p amph l e t é l ec t oral I l est


c ertain q u à la présidence comm e au barreau Abraha m


se so uvenait t ouj ours de son E s 0 pe e t se servait a v ec


un grand bonheur de la fable e t de l ap o l o g u e pour ’

con fondre les indiscrets e t se débarrasser des fâ


cheux .

Voici qu elques anecdotes a uthentiq u es qui feront


bien c o nn ai t r e le côté hum oristique du c ar ac t ère de
l homme

.

Un gentleman vient lui demander u n e passe pour


R ichmond Très bien répo n d Linco l n Je serais
.
-
.

t r é s heureux de vou s ob l iger si mes passes é t aient


,

respec t ées mais le fait est monsieur qu e j ai depuis


, , ,

deux ans déli v ré deux cent cinquante mi ll e passes à


mes solda t s pour en t rer dans la capitale des c o n fé
dé r é s e t que pas un n a réussi

.
1 58 A BB A II A M L N I C O LN

Pendan t que Sherma n pré p arait l ex pédition qui ’

devait aboutir à la prise de Por t R oya l sur l O c é an -


,

A tlantique il y avai t grande curiosité pour app rendre


,

de quel c ôt é on devait d abo rd se diriger Les repor


[
.

ters américains e t étrangers les curieux les tra î tres , ,

m ême circon v enaient la Maison Blanch e pour rec ueil -

lir des no u v elles Un p ersonnage assez considérable


.

qui se trouvait à une soirée de la Présidence impo r


t u n ai t Linco l n d une manière indiscrète afin de c on

naitre quel qu e ch os e de la march e proj etée .

Vo u l ez vou s me pro mettre de garder le secret ?


dit le président d un air gra v e ’


.

« Sur mon h onne u r j e vou s le j ure répondit


, ,

l i mp o r t u n

.

Eh bien j e v ais v o us le dire


,
.

Le présiden t prend un air mystérieux s avan ce ,


pr ès de so n interlo cuteu r le laisse un moment anxieux


,

e t la bo uch e o uverte dans l attente de la fameuse ’

r évélatio n et lui souffle bruyamment à l o rei l le de


,

façon a ê t re entendu de tou t e l assemblée L ex ’ ’

p é dit i on est partie l O c é an A tlantique


Une au t re fois on lu i di t
Vo i là bien des défaites ; elle es t bien du r e cett e ,
1 60 AB RAHA M I CO L N LN

Eh bien ! le go uvern e ment por t e un lo u r d fardeau ; il a


en mains des trésors qui n ont pas été comptés S es ’
.

agen t s font du mieux q u i l s peu v ent ne les harcelez’

p as R estez silencieu x et nous ferons une heureus e


.

tra v ersée .

C e tt e spirituel l e comparaison f u t toute la réponse


de Lincoln a des doléances qui duraient depuis pl u s
d une heure et les donneurs de conseils s en allèrent

,

ch armés e t convainc us .

Voici maintenant u n fermier de la Virginie qui se


plain t au Pré s ident de c e qu e l es soldats de l U ni o n ’

en tra v ersan t la fer m e ne s é t aien t poin t con t ent és


,

de prendre le foin qu i l s avaient encore mis les che


,

vaux en réquisi t ion .

E h quoi ! m on cher m onsieur répliqua douce ,

m ent Lincoln co mment v o ulez v o us que j e p ense à


,
-

de parei ll es cho ses ? S o cc u p er de ces a ffaires là ! vingt



présidents ne s u ffi rai e n t
L ho mm e i ns i s t e

D onn ez moi dit il seule -
,
-
,

m e n t u n mot de v otre main p o ur le co l o nel .

Ah ! ah ! repartit Lincoln en décroisant d a ,


bord ses grandesj ambes po ur les recroiser ensui t e d un ’

au t re c ô t é vo us m e rappe l ez l h istoire de J ack C has è ’

de l I llin o i s C é t ait le p l us habi l e homme de la co n


,

’ ’

t r é e pour conduire u n radeau a t ravers les r a p i d e s e t «

entrer droit dans le chenal Un j o ur on lança sur le .


P RÉ I S DE NT D E S É T AT S —
UN S I 1 61

fleuve un bateau a v apeur ; Jack (i l est mort mainte


nan t l e pau v re garçon en fu t n ommé capi t aine .

A u premier voyage le b a t eau se t ro u v a en gran d


,

da n ger et dans l e moment où t ou t e la v igi l ance du


.

capitaine é t ait nécessaire au sa l u t de l équipage e t des


, .

passagers un enfan t se mi t à crier


,

Capitaine ! Capi t aine ! arrê t ez j ai laissé tomber ,


ma p omme dans la ri v ière .

Le fer mier qui é t ait u n h o mm e d espri t se m i t à


,

rire serra l a main que l ui t endai t Lincoln et fit i n t é


,

r i e u r e m en t le sacrific e de ses c h evaux .

Quelques o ffi c i e u x trop pressés venaien t souve n t lui


dire Allez don c plus vi t e é mancipez t ou t de suite ,

les escla v es p ro v o quez les étrangers


,
.

Vous v oulez que j é man c ip e l e s escl a v es leur ré


po ndai t il mais j e suis avan t t o u t ch argé de sauver


,

-
,

l U ni o n ; j ai m e mieux sacrifier une j am b e et sauver


’ ’

l e corps et quan t a u x esclaves j y viendrai Lorsque


'
, .

j é t ais dans la forê t j e sa v ais bien qu i l y a v ai t des


,
’ ’

torrents m a is je ne m e s u is j amais demandé comment


,

j e les traverserais avan t d être a r rivé au b ord ’


.

D autres p ensaient qu e mal g r é tout le sang versé


o n po uvait encore s entendre et arriver a un co m


p r omis Une députation de Baltimore vint dans cet


esprit demander à Lincol n de traiter avec les sépara
t is t es ; il leur répondit aussi par u ne histoire .

A J O U U LT
. A . M
1 62 A B RAHA M L I N C O L N
J ai con n u dit i l dans ma j eunesse un c h ar p e n

-
, , ,

t ier qui se vantai t de faire des p onts sur t ous les to r


ren t s Un j our p our se mo quer de lui on lui fi t cette
, ,

E s t c e que vo us feriez bien un pon t


.

question —

en t re la terre et l enfer ? Certainement répon di t


i l j e b â tirais très bien u n pon t entre l a terre et


l enfer seu l ement j e crois que de l au t re cô t é il n y a


,
’ ’

pas de point d appui ’


.

Vous m e demandez m es chers conci t oyens de , ,

j e t er u n po n t en t re les É t a t s Unis e t les Et a t s Go ufe - -

d er es j e le vo udrais bien mais j e ne v ois pas qu il y ,


ai t de poin t d appui d u c ôt é de nos adversaires


,

.

Comme on insistai t en racon t an t que C h arles I ,


er

a v ai t t rai t é avec son par l emen t il répondit à celui qui ,

a v a i t rapp elé ce t exemple h is t orique 1 °

J e n en t en ds rien à l h is t oire c est l a ffaire de



’ ’ ’

M S eward mon secré t aire d É t at ; cependan t j e crois


,

bien m e rappe l er que C h arles I y a perdu la t é t e


.

er
.

O n ne manquai t pas non plus de l t t i de la ’


en r e en r

con dui t e des gén éra x et que l qu un vin t même lui u


conse i ll er d e des t i t uer le g énéral Gran t le premier ,

q i a v ec Sherm an avai t ramené la victoire sous l


u , , es

drapeaux du nord .

Pourquoi le des t ituer ? demanda le préside nt


C es t parce qu i l boi t beaucou p de whisky
’ ’
.
1 64 A B R AHA M L I N C O L N
I l y a quatre vingt sept an s no s p è r es ont e h
- —
,

fan t e sur ce continen t une na t ion no uvelle conçue ,

dans la lib erté e t mise sou s l i n v o c at i o n d u p rincipe


de l égali t é humaine A présen t no u s so mmes e n gagés



.

dans une grande gu erre ci v i l e pour épro u v er si cet t e


na t ion si t oute au t re n ation ainsi con çue ainsi con
, ,

sacrée p eu t durer l ong t emp s


,

.
,

N ous sommes réunis sur un grand champ de b a


t ai ll e de ce tt e grande guerre N ous so mmes réunis .

p o ur en consacrer une p art au dernier repo s de ceux


qui on t donné leu r v ie po ur que la na t ion pût v i v re
Ce l a est j uste cela es t bien ; mais da n s un sens
.

p l u s é l e v é n o u s ne po u v ons consacrer nous ne p o u ,

v ons s an ct ifier ce tt e t erre .

Les bra v es gens v i v ants o u mor t s qui ont co m


, ,

bat t u ici l on t consacrée bien au de l à de no t re po uvoir


bien au d el à de notre l oua n ge ou de no t re b lâ m e


Le m onde t iendra p eu de compte et se s o u v i en
.

d r a p eu de temps de ce qu e n ous disons i çi ; mais il


n e pourra j amai s oublier ce qu ils y o n t fai t

.

C es t p l u t ô t à no us sur v i v ants de nous co n sacrer


, ,

à la grande tâ che qu i l s nou s ont laissée a fi n qu e ces


m or t s honorés no us inspiren t un d é v o û m en t no uveau


,

p our la cause a laque l le ils ont donné la dernière la ,

pleine m esure de l eur d é v o û m en t afi n que n ous pre ,

n ions ici hau t em en t ce t te résolution que les morts n e

sont pas morts en v ain et q ue le gouvernement du


,

p euple p ar l e p euple et pour le p euple n e périra p as


sur la ter r e .

O n r etrouve les mêm es sentim ents dans quelques


P R É ID S A T S UN I S
E NT DE S 1 65 É T —

paroles q u i mp r o v is a Lincoln à l inaugura t io n d un e


’ ’ ’

vente de chari t é organisée par les dames de V as h in g V

t on au profit de la commission chrétienne de secours


,

aux ma l a des et aux b l essés de l armée fédéra l e ’


.

L a cly s e t G en t le m e n j e ne veux qu e vous dire un


,

mo t Ce t te gue r re extraordinaire dans laque ll e nou s


.

sommes e n gagés pèse lourdem ent sans dou t e sur t ou t es


les classes de la so ciété m ais plus lourdem en t encore
,

sur le soldat N est il pas vrai q u e l homm e donnerai t


.


tout ce qu il po ssède pour conserver sa vie ? O r pen


dant que les au t res citoyens ne con t ribu e nt que de


leur bourse au succès de la guerre les so l da t s j ouen t ,

l eur v i e e t la perdent pour le sa l ut de la patrie A ux .

soldats d o n c les p l u s hauts méri t es


Ce tt e guerre si ex t raordinaire a donn é lieu a d es
éla n s eux mêmes ex t raordinaires comm e on n en
-
,

a v ai t p as encore v u dan s les gue rr e s précéden t es e t


parmi ces manifes t ations aucune n es t plus remar
, ,

q u ab l e qu e ces foire s organisées par les dames am eri


caines au pro fi t de nos solda t s et de leurs fami ll es
L é l o g e es t un genre d é l o q u en c e qui m es t p eu
.

’ ’ ’

fami l ier e t j e n ai j amais étudié l ar t de faire des com


’ ’

p li m ent s aux femmes mais j e dois a v o uer que t ou t ce


,

que les o r a t eurs e t l es poè t es ont di t en l eur honneur ,

depuis la créatio n du monde ne suffirait point certai ,

n ement pour rendre h ommage et j us t ice a la con duite

des dames américa i nes pendant ce t te triste guerre .

Que Dieu les bénisse et nou s protège !


66 A B RAHA M L N I C O LN

N ou s po urrions m ultip l ier les citations les an ec ,

dotes ; c e qui précède est assez complet pour donner


au lec t eur un e idée suffisante de la nature du génie de
Lincoln de so n carac t ère de ses sen t iments de ses
, , ,

pensées !
Ce qu il fau t surtout remarquer ch ez lui c est qu e

,

ses actes ét aient t ouj o urs a b s o l u m eu t conform es à ses


paroles O n se batt ait pour l esclavage mais les plu s
.

fougue u x aboli t ionnistes m éprisaien t profondément les


n oirs e t da n s le co m merce de la vi e ces pau v res gens
,

ét a ient t rai t é s com me de véritables p es t iférés par les


plus élo quen t s défenseurs de l émancipa t ion Les ’
.

a ffranchis a v aient leur place a p art dan s les w agons ,

les omnibus et les théâtres D éfense m ê me leur était .

faite d en t rer dans les églises ou de repo ser dans les


c ime t ières r éser v és exclusivemen t à l usage de l a race


blan c h e Dans l I llin o i s le pied d un n oir ne po uvait


.
’ ’

fou l er le so l de l E t at Il s ex p o s ait à être fou etté et


,
’ ’

reconduit à la fron t ière D ans d autres E t ats s il é p o u


.

’ ’

sai t une b l anc he on le rouait de co ups


.

.
,

Li nco l n f u t le p remier qui o uvrit les salons de la


Maison B l anch e a des n oirs c es t qu il avait pour

’ ’

ce tt e race déshéritée une vér i table charité d a p ôt re ’

m e t tant a u service des p etits comme des g r ands son


cœur tout entier .

Un exemple ent r e cent M c o r re s p o n d an t d u n


j o u rna l b elge a r ri v e un j our c h ez le Présid ent qui lui


. .

avait accordé une audience par t iculière d u matin et ,

t ro uve l ho nn èt e Ab e o ccupé à compte r un paquet de


G r een ba c ks des bi ll ets de un dollar


,
.
1 68 A B RAHA M L N I C O LN

Ab e demandait so u v en t
Père p ourquoi don c les In diens h a1 5 s ent ils tant
,

les homm es blancs ? E t Tho mas n e savait guère que


répondre car il sen t ait dans sa conscien ce qu e la
,

hain e es t la dernière arm e des v aincus et qu e ces pau ,

v r e s gens défendaien t a leur manière et suivan t le u rs

m oyen s ce que l ho mm e a de plu s sacré le so l natal


,
.

Peup l e de ch asseurs et non de pas t eurs ils avaient ,

au débu t accuei l li l es blancs comme des amis Mais .

quan d 1 agricul t eur euro péen se mit à sillonner la


terre du so c de sa charrue l a chasse se réfugia dans ,

l e s forêts plus épaisses et m oins en t amées po u r se


no urrir l l n di en du t suivre la chasse abandonner les
, ,

lieux O ù i l a v ait acco utumé de v ivre où reposaien t les ,

o ssements de ses an cêtres .

R efoulés au sud o ues t a mesure q u e l a colonisa tio n


-

s avance l es indigènes son t t o mbés a u n degré de mi


s èr e qui en annonce l ex t inc t ion prochaine E n l u tt e



.

p erpé t ue l le avec l es colons e t t ouj ours les plus fai ,

bles de t emps en t emps ils envoient demander j ustice


,

e t pro t ec t ion au Présiden t des É t ats Unis —


.

J eus l o ccasion de rencon t rer à Washington les


’ ’

grands ch efs d une t rib u indienne autrefois p uissante


venus t ou t exprè s de leurs can t onnemen t s loin t ains


p our faire en t endre a Linco l n l eurs p l aintes et leurs

prières A van t l audience qui leur avai t été accordée


,


.

ils nous racontaient leur misère et j en étais d a utant ,


’ ’

plus to uché qu i l s r egrettaient le t emps où la Fr ance


régnai t aux ri v es du Sain t Lauren t e t d u Mississipi -


.

i n t rodui t s par un in t erprè t e devant le P r ésiden t qui


PRÉ I A T S UN I S
S DE NT DE S 1 69 É T —

leur se rr a afi e ct u eu s em en t la main les Peaux R ouges ,


-

r estè r ent d ab ord comme émer v eillés a la vue des t en


tures e t d u m obi l ier du salon p our t ant fort modes t e , ,

O ù ils étaien t reçus .

A près quelques instants de silence le pl us ag é r a


conta qu ils é t aient ve n us vers leur Grand Père p our

-

apprendre de lui a de v enir ric h es .

« Co mm e vo us disaie n t ils no u s sommes les e u


,
-
,

fan t s du Grand E spri t e t nous avons t raversé d im




,

m enses espaces avant de po uvoir arriver j usqu ici ’


.

D abord nous voyagions len t emen t à c h aque é t ap e


nous espérions vo us rencon t rer ; m ais le p eup l e


nous répondai t V o u s a vez e n c o r e u n lo n g c h e m i n .

E nfin nous vous avons trou v é e t nous sommes con


tents N ous v oyons par t out ce qui nous en t oure
.

que vous ê t es rich e N ous aussi no us l avo n s é t é


.
,

j adis au t emps O ù l e Grand E spri t nous aimait Le


,
-
.

sol sur lequel no us marchons appar t enai t au t refois


a nos p ères (l ei l o r at e u r frappa du pied le parque t
.

et il y a v ai t p l us qu e des regre t s dans son regard o n


y lisai t le désespoir de l impuissance ) A u j ourd hui ’

.

nous sommes pau v res n ous so mmes t o u t a fai t p au ,

N ous n avons p l us rien p our garan t ir no s



v re s .

épaules d u froid Ch a ssés de la t erre n a t ale affa


.
,

m es nous sommes venus a vous p our v ou s dema n


,

de r de no us secourir Le Grand E spri t nou s parlera


.

par la bo uche de n otre Grand P ère ; i l nous consei l -

lera Tachez que nous n e res t ions pas p l us l o n g


.

temps pauvres et que no us devenions r iches comme


,

les blancs ..
1 70 AB RAHA M L I N C O L N
Toutes les fois que revenai t le mot p a u v r e dans
ce disco urs empreint de regrets si amers il avait le ,

don d ex ci t er l e rire de que l ques g en t le m en de l assis


’ ’

t ance gens riches ou enr i c h is sans doute mais assu


, ,

r é m ent san s cœur .

L h o n n é t e A be s en était ap erçu et avant de r é


’ ’

, ,

pondre aux ma l h eureux qui imploraient son secours


et sa protection il rappela avec beau co up d à pro po s
,

à l adresse des rieurs ce que disait W ashington au


su j et des Indiens
N o us so mm es plus écl airés et plus pu i ssants
qu eux il est de no t re honneur de les t r ai t er avec
'

bon t é et généro si t é .

P uis s adressant aux grands chefs il p r o mit de


,

veiller sur leur tribu de la protéger de la défendre , ,

contre les agressions inj ustes Mais aj o u t a b i ] .


,

,

pou r sor t ir de la pau v re t é il fau t au lieu de de , ,

mander exc l usivemen t à l a chasse v o s moyen s d exi s ’

t ence v ous me tt re à cul t i v er la t er re deve n ir


, ,

ba t e l iers c h arp en t iers m euniers maçons travail


, , ,

« leurs en u n m ot co mme j ai fai t moi mé m e m o i


,

-
,

que vo u s appele z a u j ourd hui votre Grand Père et ’


-

qu a protégé le Grand E spri t



-
.

L i n t e r p r èt e traduisi t aux Peaux R ouges les p aroles



-

du Président Les comprirent i l s bien ? Je l i g no re


.


.

Tou t ce que j e pui s dire c est que j e les vi s l e so ir ’

même qui tt er W ashington pour retourner dans leur


,

t ribu après avoir reçu de Lincoln sur ses fonds par ,

t i c u li e rs l argen t nécessaire a l e u h v o y ag e

, .

Lincoln p ourtant é tait loin d être r iche P r esqu e ’


.
1 72 A B RAHA M L I N C O L N
le président d u séna t M Fo s t er qui m avai t gra ,
.
,

c i e u s e men t o ffer t de m e servir de guide dans cette

circons t ance A vec u n p areil in t roduc t eur j aurais p u


.

peu t être pass e r p ar u n e por t e réser v ée Mais il aima


-
.

mieux m e faire prendr e le c h emin de t ou t le monde ,

et nous res tâ mes deux heures a faire queu e dan s le


j ardin de la Maison Blanc h e au milie u d une foule
-
,

immense qu a v ai t peine à contenir un e do u b l e haie de


so l da t s J e passai a mon to ur devant le Présiden t qui


.

éc h a n gea a m o n suj et a v ec M Fo s t er quelques m ots .

de présenta t ion qu e j e n ai poin t re t enu s t ant j é t ais


,
’ ’

é t o urdi par le brui t d u n e m u s i q u e criarde ; p u i s l e fl ux


des v isi t eurs n ou s poussa e t nou s a llâ m es nous per ,

dre dans la foule qui nous avai t précédés .

N o n seulemen t Lincoln se prê t ai t de bonne grâce à c es


-

péni b l es exigences mais i l y t ro uvai t plaisir e t pro fi t


, .

J e v e u x res t er disai t i l l e représen t an t d u p eu


,
-
,

ple et ne pas devenir u n p erso nn a ge officiel qui


, ,

n e sai t rien qu e d o ffi c i e l E n m e m e tt an t en con



.

t ac t a v ec t ous j e respire l e m ê me ai r que ce peuple


,

qui m e n t o u r e ; il m es t p l us faci l e de m e sou v enir


’ ’

que j en suis sor t i e t qu e da n s deux o u t rois an


« n ées j e dois y ren t rer J a p p e lle c e la m o n ba i n


,

'
d o p i n i o n p u b li q u e ! .

P o urquoi faut il dire ici qu on abusa quelquefo i s


-

o di eusement de la facilité avec laquelle Lincoln se


laissai t aborder ? Cer t ains j ourna l istes surto ut j ouèrent
u n assez t ris t e r ô le et ne rech erchaient l honneur

d être présen t és au Président de l a R épublique que


pour avoir le pré t exte de faire ri r e à ses dépens dans


P RÉ IS D ENT DE S É T I
AT S —
UN S 1 73

leurs c o rr es wn dan c es . O n remp l irait un


volume
av ec les anecdotes et les ré ci t s forgés
par l es
repor t ers é t rangers e t américai n s qui furen t reçus
à la Maison Blanche Si le p l us grand nombre a su
-
.

r endre à Lincoln et aux siens l ho mmage que m eri ’

t ai en t l eurs vertus il est r eg r et la b l e de consta t er que


,

d autres se sont plu a accab l er le Présiden t d epi


’ ’

grammes de mauvais goût et n ont même pas crain t ,


d a l ler j usqu à calomnier sa famille


’ ’
.

Mais ne rappelons pas ces so uvenirs eff acés Le .

t em ps a fai t j ust ice des c h ro niques inspirées autre


fois par la h aine po l i t ique e t le n o m d A b rah am ’

Linco l n n a plus besoin d être défend u contre le


’ ’

ridicule encore moins con t re la c alo mn i e l


,
.

Le président se trouvait placé au sein même des ,

É t ats restés fidèles à l union entre deux factions v io


lentes (les d é m oc r a t es e t l es r ép u b l i c a i n s r a d i c a u x )
qui sur chaque ques t ion réc l amaien t des solu t io n s
di ff érentes .

To u t es les m esures qu I l prit de v aient au début


d i v i s er le n o r d e t t r o u ble r le p a y s O n disait ce l a des .

bons du Trésor de la suppression de l H a bea s c o r p u s


,

de la pro clamation d émancipation de l emploi des


,

nègres comme so l dats dans l armée ’

Il n en fut rien Les faits ju s t i fi èr ent la sagesse des



.

1 . D u ver g i er d e Ha u r ann e .
1 74 A B RAHAM L I N C O L N
mesu r es p r ises par le p r ésident et bientôt toutes furent ,

ac ceptées co mme des armes de gue rr e indispensables


au salut public .

I l est assez curieux de passe r auj ourd hui en revue


les charges dont o n accablait Lincoln .

D un c ô t é on le tro uvait t r o p conservateur de l au


,

t re tro p radical Les conserva t eurs l accu s ai ent de


.

faire la guerre po ur dé t ruire l esclava g e ; les radicaux ’

le dénonçaient co mme ne faisant rie n o u p eu de cho se


p our la liberté Un parti le trai t ai t de t yran et d usur
.

p at e u r ; l au t re se p l aignait de la do uceur d u g o u v e r

nement po ur les t raîtres e t t ous ceux qui s ym p at hi


s ai e n t avec les rebel l es D après ceux ci il allait tro p

-
.

vi t e ; suivant ceux l à t ro p lentement Beauco up mau


-
.

di s s ai e n t ses t endances b e ll iqu euses quelques uns au -


,

con t raire déploraien t ses dispositions pacifiques Po ur


,
.

certains ses réso l u t ions despo t iques me tt aien t en péri l


,

la liberté américaine d au t res voyaien t l e péril dans


,

l a faiblesse de l au t ori t é

.

Toutes ces opinions finirent par se rallier à la poli


tique de Lincoln qui au j our où nous so mmes arrivés
,

en 1 8 6 4 a v ai t su se conduire à t ra v ers la tem pête de


,

p assions qui faisait rag e au t our de lui de fa ço n à


,

gagner les su ff r a ges de t ou s .

A ce mo ment to us les j o urnaux ne parlen t du pré


s i d e n t qu a v ec respec t ; les so l dats l ai m e n t et l ho
’ ’ ’

n o re n t ; dans le monde il n es t personne quelles que


, ,

soient son opinio n politique ses vue s su r l origine la ,


conduite e t la marche de la g u erre qui ne c on v 1 e nn e


,

très fr anchement que L i ncoln s est montré à la h a u




176 A E RA IIA M L N I C O LN

de l infanterie de marine servirent dans la flotte sans


comp t er les ouvriers et les autres em ployés dans les


,

chantiers et les arsenaux A u 5 décembre 1 8 64 l a .


,

marine de g u erre des E t ats Unis c omp t ait 5 59 stea -

mers dont 7 1 cuirassé s et 1 1 2 navires à voiles


, ,

t otal 6 7 1 .

Si l on se rapp e ll e combien était précaire en 1 861


,

la situa t ion du gouvernem ent fédéral on comprendra


,

avec quel élan la nation dut ré p ondre aux appels


successifs adressés p ar le président aux di ff éren t s
E t ats r estés fidèles à l Un i o n

.

Un des dernie r s historiens de la guerre civile en


A mérique co mpare la rapidi t é avec laq u el l e les ba
t aillons de vo l on t aires furen t recrutés rassemblés ,

e t organisés dans le N ord a ces l ég i on s de sque l e tt es


,

que l a Bible no us mon t re dans une plaine déser t e et


,

silencieuse où g is ent épars et desséchés des osse


men t s innombrables se levan t so udain et prenant
,

figur e e t vie a la voix du pro phète E z é c hi el .

Certes l image es t po étique ; à dis t ance la créatio n


soudaine de ces grandes armées américaines p eut


sembler t eni r d u miracle ; quan d o n a vu les choses
de près il en faut un p eu r abattre L é t ranger qui
,
.

assis t ai t sur place au recrutemen t de l armé e am é ri ’

caine a v ait so us les yeux u n spectacle étrange où la


,

grandeur du bu t dispa r aissai t so us le ri dicu l e des


moyens La mise en scène était grotesque e t der
.
,
P RÉ I
S D E NT D E S É T AT S -
I
UN S 1 77

r i ère la c oulisse il se passait so uvent les trafics les


moins avouables C est que si le patriotism e était im ’

mense il y avai t encore en j eu d au tres sen t iments


.

, ,

l ambi t ion la vanité la sp éculation ; e t l espri t pra


,

tique et calculateur de l A m é r i c ai n n e perdi t rien de


,

son ingéniosi t é au milieu des d angers de l a na t ion .

L armée américaine aussi nationale par sa co m po


sitio u que par so n espri t e t qui représentai t dans ,

une juste proportion l es divers é l éments de l a p o p u


lation n eut au cune analogie avec nos armées euro
,

p é e n ne s ni mêm e a v ec l a p e t ite armée p erman ente


,

des E ta t s Unis -
.

Le Congr ès vo t ait ou le p résident pro clamait en


ver t u de p o u v oirs ex t raordinaires un e l e v ée de
,

de de h om mes C e l a fait l au t o ri t é .
,

fédérale n int er ven ai t p as dans l e recrutemen t et


n avait qu à recevoir les régiments réunis da n s les


’ ’

divers E tats selon la quote part qui leur é t ait ass i ,


-

g n é e Dans les E tats p articu l iers le go u verneur faisait


.
,

la répar t itio n entre les di ff érentes cités et laissait à


l initiative individuelle le soin de fo u r n ir le contingent

deman d é 1 .

1
'
t tv v l
L i n i i a i e i n d i i du e l e c er c ai p a r fo i s

s affr a n h h t à ’

h f l t l t té C t
.

c i r d u ai b e c o n r ô e d e s a u o ri s d e l É t at e r ai n s c o rp s

t ff t t t é t

f
.

o e r s d i r ec e m e n p r s i den p ar c e u x q u i l e s
v t l vé ll g t é
u r en au

a a i en T e e f u t l a b r i a d e d i e E œce l s zo r c o m p o s e d e
q ég t l vé q lq à k
e s .

cin im e n s e u es s e m a i ne s N ew Y o r p a r u n
l t S k g v
r s en ue -

anc ien d ip o m a e , M i c 1e L e o u er n e u r d e l E t a t i n s i s

t f t t g t S kl
. .

t a i p o u r l a a i r e e n r e r d an s s o n c o n i n e n M ic e , p o u r
t t té l l g
. .

s e s o u s r ai r e à s o n a u o r i d e l a b ri a d e s u r l e s

, fit

gl f t i à j t fé é l tt
ap p e
acis d u n or soum s

la u rid ic io n d r a e e t p a r i au s
tt è
si ô h gt
ap r s p o u r W a s in La u er e e d u r a em p s , q ll l gt
él t é è t l
on on
fi à
.

m a i s en n d e s r c a m a io n s u n a n i m es d c i d r e n L i n c o n
A . J O U A UL T .
AB RAH A M I CO
L N LN

M le lieutenant colonel F err i P i san i qu i voyageait


-
,

aux États Unis en 1 86 2 a tracé de la fo r mation des


.

-
,

corps de volontai r es au déb ut de la guerre un tableau


vivant et d un e parfaite exactitude qu on n e li r a pas
’ ’

sans intérêt et qui m e para î t indispensable pour bien


se rendre compte de l état de la so ci été américaine ’

so us la présidence d A b r ah am Lincoln

A peine dit M Pisani le congrès a t ii déc r été les


, .
,
— -

premières levées q u e des milliers de citoyens sans


, ,

au t re m andat qu e leur confiance plus o u moins j us


t i fié e en eux mêmes et en leur notoriété présum ée
-
,

se sont partagé à leur profit bien entendu l im


, , ,

mense travail du r ecrutement de la fo rmation des ,

corps et des cadres laissant le gouvernement assister


, ,

les bras croisés à ce singulie r sp ec t acle d une armée


,

qui s organise elle même et attendre tran qui l lement



-
,

qu o n la lui r emi t tou t e faite e nt re les mains


L un a fait appel a tous ceux qui vo ulaient de lui


p our capitaine et a levé une co mpagnie ; l aut r e s est ’ ’

intitulé colonel et a l evé un régiment Q uelques uns .


-

i n c o r p o r e r c es ét t t g t
ro u p es i n d p en d a n es d a n s l e s c o n i n e n s
t l tt ll v t l vé ét t
p a r i c u i er s d e s E a s o ù e e s a a i e n ét é e es ai

j t ll v i t été
ce n

q u e u s i c e , c a r s i e e s n a a en p a s c o m p r is e s d a n s l a

q t t h tt l t
d e c ac u n d e c e s E a s , eu r c o n c u r r e n c e a u r a i
él vé ggm t é m h m
u o e — p ar
l a p r i m e d e n a e e n , d i m i nu l e no b r e d o m e s

l té t t t

e
'

m
d i s p o nib e s e t h â a i ns i l e o m en o ù l a c o n s c r i p i o n s e r ai
v é M i l q tt q t
d e e nu e n c e s s a i r e t hé u e s i o n fu t
g v t éj à é t té
a s , ors u e ce e
. ran c e,

l a b r i a d e E œee l s i o r a a i d é t é r d u i e d e m o i i p a r l e fe u
l m'
f ti g
d e e n ne i e t le s a g u e s d e la
( ) u erre C om t e de P a r is
. .
180 A E RA H A M L N I C OL N

ch aq u e c it o v e n Un empr u nt étant autorisé par le s


.

ch ambres le gouvernement en faisai t connaître les


condi t ions à un certain nombre de grands banquiers
,

qui fo r t i fi ai ent le créd i t de l É t at de leur pro pre c r édit


,

en t raînaien t les so uscripteurs p l açaien t l eurs t itres


, ,

e t apportaient au ministre des finances prê t a le re


c e v o i r de leurs mains le montan t de l emprunt co u

ver t en t otalité
A u x E t a t s Unis le crédit mili t aire et moral d un

-
,

cer t ain nombre de par t icu l iers s est in t erp osé entre ’

l Et at et la masse de la po pula t ion et a été l e levier


qui a fai t surgir presque t o u t a co up une arm ée m é


dio ere si on v eu t mais enfin un e armée nomb r euse
, ,

, ,

qui avec le temps p eu t de v enir excel l e nt e .

N a t ure ll emen t un parei l mo u v ement péné t rant ,

j u sque dan s les profondeurs de la so cié t é américain e


où t an t de choses son t à rebo urs de c e qui se v oi t dans
l a v ieille E urope a dû se traduire par les excentri
,

ci t és les plus singu l ières .

N o us a v o n s en c e m o m ent à N ew York le spec


,

tac l e ex t raordinaire de l op éra t ion du recrutemen t en


plein exercice L e grand Barnum es t l e mo dè l e et le


.

m ai t re de t o us les citoyens q u i aspiren t à venger


l h onn eur du d r ap e a u f é d é ral sous l e ti t re e t avec l e

s

appointemen t s de capi t aine de colonel e t de général


,

.
,

Le génie d e la r é Cla m e mis au service de la pa t rie ,

s é l è v e a des hauteurs incommensurables


,

.

La brigade dite E x ce ls i o r une des p r emiè r es for


,

m é es et qui est véritablement fort belle a eu


, ,

d abord son

P R É IDS E NT D E S ET A T S UN SI 1 81

magnifique maison couverte d affich es et de drapeaux ’


.

Un peup l e immense se pressait de v ant le g i gan t esque


balcon c h argé d e mb lèm es guerriers du mi l ieu des

qu e l s un o rchestre mili t aire versait su r la fou l e des


torrents d harmonie P uis par intervalle un disco urs

.
,

patriotique venait mettre le comble a l enthousiasm e .


excité par la musiqu e et par la vu e des drapea u x et


des trophées Alors un mouvemen t se propageai t dans
.

la foule et so us l a main é t endue de l o r at e u r geste


,

traditionnel accompagné d une formul e a n alogu e à l a ’

formule fam euse S u i vez le m o n d e des flo t s de peu


ple envahissaien t les sa l les et co u v raient de signatures
les regis t res de recru t emen t E n général chaqu e .
,

corps en forma t ion à N ew York a un bureau de recr u -

tement dans Broadway e t en o u tre une ten t e où , , ,

l on reçoi t les e n gagements sur la place de l H ô t e l



,

de Ville Ces tentes forment un p etit camp au milieu


- .
,

duquel circule u ne fo u l e curieuse et grave ; car tout


se fait gravement aux E tats Unis comm e cela se fait -
,

en riant en France .

Il est certain que si le sp ectacle d un camp pareil ’

était expo sé sur l a p l ace de l a Bas ti ll e l a g aî t é e t l i '

r o mie de no s o u v riers des faub o urgs auraient p our


,

s exercer d in é p u i s ab le s suj ets Ce qu i l y a de plai


’ ’
.

sant c est le contras t e entre le sérieux imperturbable


,

des recruteurs et des recrutés e t le style et la form e ,

et les dessins des réclames réclames qu on n aurait ,


’ ’

q u à transpor ter dans un d e no s p eti t s thé â t res po ur


soulever l hilari t é générale Ces affiches représen t ent



.

pour la plu p art un soldat de l Uni on exterminant des ’


1 82 A B RAHA M I CO
L N LN

ennemis A u dessou s vient un appel patriotique


.
-

adroitement mêlé à l é n u m é r at i o n des t itres par t ie n


,

hers que le chef de corp s et son r égiment croient


avoir à l a confiance publiq ue Par exemp l e : A t te n t i o n !
j e u n es g en s q u i v o u lez v e n g er la p a t r i e ! O i l t r o u v e
r ez v o u s u n r é g i m en t q u i l em p o r t e s u r c e lu i d es

-

c h a ss e u r s d e L i n co ln o u d es z o u a v es d e N e w Y o r k ? -

T o u s les o ffic i e r s y s o n t v e r s és d a n s l a r t d e la g u er r e

le c o lo n e l s er a u n g r a dé d e l Ves t P o i n t e tc S ouvent —
,
.

le ci t oyen qui lève le régim ent ne prend que la posi


tio n de lieu t enant colon el laissan t l emploi de colonel
-
,

ino ccupé afin d a tt irer le public p ar l espoir de le


,
’ ’

voir rempli par u n gradé de West P oint c est à dire —


,

- —

par un officier de l armé e p ermanente élève de ’

l école mi l itaire ; promesse séduisan t e do nt l e ffet sur


’ ’

l es masses pro uve qu e ll es son t anim ées au fond ’

, ,

d un vrai bon sens et d un cer t ain instinct militaire


’ ’

Puis vient le détail des avan t ages assurés par la


R épub l iqu e a l eng ag é 60 francs par m ois des vivres

en abondance de bons uniformes et un lot de ter r ai n


,

a l expiration d u temps de servi ce



Les parties capitales de l a réclam e sont presque


'

touj o urs signalées à l attention du public par une ’

main un doigt étendu comme o n en figure su r les


, ,

p oteaux des routes J ai v u de pauvres Irlandais .


a ff amés dévorer des yeux des affiches gigantes q ues ,

fascinés qu ils étaient par des mains diab oliques au


b out desquel l es se trouvait l é n u m é rat i o n complète des ’

co mestibles dont se compose la ration p ain vin , , ,

viande légu mes bière etc Il faut croire qu il y a eu


, , ,
.

1 84 A BB A I I A M L N O L N I C
J ai

qu il était intéressant de mont r e r au lecteu r
cru

comment s étaient formées ces grandes armées dont


la victoire a été sur le co ntinent du no uveau monde


le t riomph e de la j ustice et de la liberté La place et .

la compétence me manquent p o ur parler de cette


formidable g u erre au p oin t de vue pure m ent mili
taire Je n accep t e pas toutefois le j uge m ent qu en
.
’ ’

por t e un h istorien que j ai déj à cité dans ce chapi t re ’

M le com t e de Pari s
,

. .

Le réci t détail l é de ces campagnes di t cet éc r ivain ,

o ff re une sui t e de p etits événemen t s que rien n e


,

semble ra t tacher en t re eux e t qui para i t long u e e t ,

monoton e Cet t e guerre par bien des c ô t é s rappelle


.
, ,

celles du Moyen A ge où de p etites armées avancent


-
,

et reculen t sans cesse l un e de v ant l au t re se p erden t’ ’

so uven t de v ue p our se rencon t rer en un j o ur de


,

ba t ai ll e e t se dispersen t l e l e n de m ain fa u t e de moyens ,

de subsis t ance guerre fai t e no n seulemen t par l armée


,


, ,

m ais par de v rais a m a t eurs qui con ser ven t t o u t e leur


indépendance indi v iduelle ; g u erre a laq u elle t o ute l a
popu l a t ion divisée par des po u v oirs hostiles prend une
, ,

p art ac t ive e t qui p ar conséqu en t o ffre un cham p


, , ,

plus l arge que to ute autre guerre aux violences au x ,

pillages e t aux crimes .

C est l a il me se mble une vue de la lutte prise de


, ,

trop près Si en effet au premier ab ord la g randeur


.
, ,

du t erri t oire le c h aos des dates des chi ff res des


no ms d ho mmes et de li e ux l es m arch es e t les con t re
, , ,

marches des armées qui se disputent l esp ace compris ’

entre R ichmond et Washing t on font croire que t out ,


P R E ID S E NT DES ET A T S UN S I 1 85

est confu sion dans cet immense conflit il n en est ,


rien e n réali t é T out au contraire les é vénemen t s de


.
,

cette guerre o ff rent dans leur successio n u n carac t ère


de logiqu e et de s imp li cit é q u i se re t rou v e en bien ,

p e t i t no mbre dans d au t res guerres et qui serait ’

vraiment me r veilleux si la lu t te n avait été au fond ,


qu un choc entre deux principes


E ssayons don c de résu m er en quelques pages quatre


années de batai ll es et de mon t rer co mme en u n ta
bleau synop t ique les g ra n des lignes de ce tte gigantes
que lut t e .

E t d ab ord deux m o t s s u r l e t h é â tre de la guerre



.

Les Et a t s Unis formen t une i mmense vallée ce l le



,

d u Mississipi en cadrée par deux vas t es terr a sses


, ,

l une qui regarde l O c é an Pacifique ( Montagnes R o


’ ’

c h e u s es ) l au t re qui incline vers l O c é an Atl antique


’ ’

(Mo nts A lleghanys ) C est surto ut dan s la vallée du


.

Mississipi et sur la terrasse qui regarde l E u r o p e que ’

la vi e se concentre ; l a sera le t hé ât re de la guerre qui


s e divise en trois zones .

La première situé e au nord de l O hio q u l a guerre ’

,
e ,

n e nv ah i t pas fo urni t ses enfan t s à l armée et fabri


’ ’

que t rafi q u e spécule pour subvenir aux b esoi ns des


, ,

co mbattants .

La seconde 5 e t en d sur la rive droite du Mississipi


et comprend les pays le plus récemm en t conqui s
o u colonisés C est la guerre de partisans qui s y fait
.
’ ’
1 86 A B RAHA M L N I C O LN

g u e rr e irrégul i è r e sa n guinaire p r esque sauvage


, , ,

mais sans i nfluence sur l en semble des o pérations ’

militaires .

L e v éritable champ de ba t aille a p o ur limites au


nord l O h i o et le Potom ac a l o uest le Mississipi

,

de p uis C ai r o j usqu à la N o uvelle O r l éans au sud le



golfe du Mexi que e t à l est l O c é a n Atl an t ique depuis


,
’ ’

l a p oin t e de la Floride j usqu à la baie de la Ch esa


pea k e un cinquièm e en v iron des E tats Unis —


.

Les Eta t s fédéra u x o ccupaient l a partie supérieure


de ce tt e im mense t errasse qui depuis l a chaîn e des ,

A lleghanys v a en s ab ais s an t d u côté de la m er et


,

en s é l ar g is s a n t du c ôt é du sud Ils t enaien t aussi l e



.

bassin supérieur du Mississipi et de ses plus grands


affluen t s le Missouri sur la rive droite l O hi o le Ten
, ,

ne s s ee su r la rive gauc h e .

Les É t ats co nfédérés o ccupaient l embo uchure d u ’

Mississipi et une grande par t ie du co urs du fleuve


,

( Texas Lo uisiane e t A rkansas sur la rive droite ;


, ,

Mississipi e t Tennessee sur l au t re ) Ils ferma i ent t o ute



.

communication avec la mer aux riches pays de l ouest ’


.

I l s po ssédaient de larges plaines qui s é p ain o u i s s e n t ’

au sud est de la chaîne des A lleghanys (Al abama


-
,

G éorgie Flo r ide les deux Carolines une partie de la


, , ,

Virginie) et avaient un e longue é t endue de côtes ,

mais de côtes plates moins favorables aux ports e t a


,

la navigatio n q ue les c ô t es profondém ent déchi r ées


du nord .

E ntre le nord et le sud se tro u vait le gro up e des


Éta t s du centre qu on a ppe l ait États frontières ( B o r d er

1 88 A BRA I IA M L N I CO LN

Le go uve r nement fé dé ral comprit alo r s qu avant ’

d en t rer sérieusemen t en campagne il devait orga


h iser ses tro upes et met t re a leur tête non plus des ,

officiers improvisés m ais de véritab l es h o mmes de


,

guerre formés dans la carrière des armes ; que pour ,

obtenir le succès dans une gran de lutte de nom ,

breux soldats n e suffisen t pas qu il fa u t les instruire ,


les disc i p l iner les aguerrir


,
.

Les deux arm ées ri v ales restent don c en pr ésen ce


p endant neuf mois sa n s sortir des positions r e s p e c
,

t ives q u e leur a v ait fai t es la batai ll e du Bu ll R un .

Mac C l ellan o rganise l es forces fédérales assemblées


sur ce poin t e t qui por t en t le n o m d a r m ée d u P o
,

t o m a c I l exerce ses troup es l es soume t à une disci


.

pline sé v ère p uis prenant R ichmond pour obj ec t if il


,

marc h e sur York Town que l es confédérés évacuent


,

-
,

après l y avoir re t enu u n long mois Il l es j oint e t les



.

ba t à W i ll iamsburg (5 mai mais u n co mb a t de


sep t j o urs sur l es rives du C hik ah o m iny lui ferm e le
c h emin de Ri chmon d ( 23 3 0 j uin ) l oblige à t rans
-
,

por t er ses t rou pes sur le James R i v er e t deux m ois , ,

après ( 3 0 août ) une seconde bataille du Bul l R un


, ,

perdue par l e général Po pe con t re le général Lee ,

r emit les choses a peu près dans l état o ù e l les étaient ’

dix huit mois auparavant



.

Les confédérés semblent alors vouloir prendre une o f


fensi v e résolue ; le gén éral Lee en t re dans le Maryland
et menace à la fois Washington Bal t imore et les v illes ,

industrielles de la P ens yl vani e m ér i dionale L e p r és i .

dent Lincoln loin de s e laisse r abattre o r do n n é la


, ,
P R ÉSI AT S U N I S
D E NT 1 89
DES É T —

levée de no uvelles armé es et la sanglante bataille ,

d A nt i e t am gagnée pa r Mac Clellan dégage le Mary


, ,

land et sauve la capi t ale .

A près cette victoire le go uvernement voul u t presser


la guerre du c ôt é de R ichmond Mac Clellan restait
d a ns l i na ct io n

Le p r ésident le dest i tua et remit le commandement


de l armée du Poto mac a Burnside l ui ordonnant

d al l er ch erch er l ennemi qu i l tro uva sur le R ap


’ ’ ’

p ah an o c k .

La j o urnée de F r e d e rik s b ur g vivem ent dispu t ée ,

( 1 8 décembre f u t une éc l a t an t e défai t e p our


les fédéraux qui perdirent enco re une fois le frui t d e
,

t ous l eurs e fforts précédents .

A insi p endan t l année 1 86 2 l armée d u P otomac


,

,

avait é t é plus so uven t battue qu e vi ctorieuse e t rien


n e û t pu faire espérer une fin h e u re n s e de ce tt e grande
,

lutte si les opéra t ions m i l itaires avaient été c i r c o n s


,

crites dans les champ s de bataille de la Virginie .

après l e m an c ip ati o n des nègres le ca


E n 1 863 , ,

binet de Was h ington a des vues plus fixes sur la


guerre et son issu e O n s aperçoit que pour t rio m pher
.

du Sud i l fau t l é t r ei n dr e par un v aste blo cus ré


,

server l a prise de Ri chmond po u r le cou p décisif et


ne demande r aux armées d u Potomac que de d efe u
dre la ligne qui couvre Washi ngton cont r e l attaque ’

des confédé r és .
190 A B RA HA M '
L N I CO LN

Le succès final dépendra d autres opé r at i ons ’


.

La Virginie o ccidentale le Kentucky le Tennessee , , ,

c es t à dire les Etats fron t ières to mbent sous la main



— —
,

des fédéraux grâce aux victoires des géné r au x H alleck


,

F r emont Grant etc , ,


.

Par sa m arine le N o r d envelopp e les côtes de l A


t l an t i q u e et d u g ol fe de Mexique ; il blo qu e tous les


p orts du S ud fai t d h eu reu s e s expédition s au cap
,

H at t eras et à Port R oyal o ccup e Beaufo rt afin de


,

,

rendre l e blo cus plus e ff ectif et d empêch e r en échange ’

des expo rtations de coton l intro duction des secou r s ,


étra n gers .

Mais l a clef de la s i tuati on était sur le Mississipi .

Les t roupes fédérales a v aient pris pour base de leurs


opérations Cairo (Illinois) au confluen t de l O h io et ,

du Mississipi ; et d après les or d res du minis t ère on


,

,

équipait su r ce point u ne flotte formidable de ca


n o n n i ère s .

Les confédérés étaient mait re s de to ut le cours d u


fleuve j usqu à quelques kilomètres de cette m ême

place en ava l .

Les opération s combinées de G r ant de Butle r de , ,

Banks et du commodore Fa rr agut amènent la chute


successive de Memphis de la N ouvelle O rléans de ,
-
,

Vicksburg Ce t te derniè r e plac e succo mb e le 4 j uil


le t 1 8 63 Por t H udson se rend le 8 les Uni o nis t es sont
.

m aî t res de to u t le Cours du Mississipi depuis sa source


,

j usqu à ses embouchures et la confédération se trouve


par le fait coupée en deux parties incapables dès lors


de se rendre l une a l aut r e aucun service efficace
’ ‘

.
192 A B RAHA M I CO
L N LN

Le 13 j uillet i l éc r ivit au vainqueu r de W i cksb urg

Mon cher G én éral ,

Je n e crois pas avoir j amais eu l honn eur de vous


rencontrer e t j e v ous écris ces lignes pour vo us .

dire co mbien j e vo us suis reconnaissant des ser


v ices que v ous avez rendus a notre p ays J espérais .

bien en vo us voyant appro cher de Vicksb urg q u e


, ,

le succès final couronnerait vot r e entreprise a en ,

j uger d après vo s premières op é r ations T outefois


.
,

l orsque vous ê tes descendu e t avez pris le fort


Gibson Grand Gulf et les environs j e p ensais que
,
-

v ous descendriez l a rivière pour j oindre le général


Banks ; et lo rsque v ous avez donné au nord à ,

l es t de Big B l ack j e craignais qu e ce n e fû t une



-
,

faute A uj o urd hui j e m e plais à reconnaît r e que


.

vo us aviez raison et que j a v ais to r t ’


.

Au m omen t où Vicksb urg tombait au po uvoi r des


fédéraux ceux ci étaient égalemen t vainqueurs du
,

cô t é de l A t l an t i q u e

.

Le général Meade sauvait Washington du plus grand


p éri l que la capi t ale eût encore couru depui s le co m
m e n ce m en t de la guerre en chassant des hauteurs de
G e t t y s bu r g le gén éral Lee qui étai t forcé de ba t tre en
,

S gfi l v
pr in d h mm t t h z j gé é l e n r ai l

a d u dan t -

t è ét t é l l
e a ec s es o es , c e n ra

et p eu de emp s apr ai nomm d u 2 1 d e l I l li


t é t
°
s co o ne
n o ism Au o is m
d a o û 1 8 6 1 , i l f u t p ro u p ar l e p r s i d en L i n
l g ig gé é l v t mm

.

ra d e d e b r a di e r - I l d e ai c o a n de r l e

t t C Ill
c o n au n ra .

di s ric de ai r o ( in o is ) .
PRÉ I É
S DENT AT S U N I S

DE S 1 93 T —

ret r aite après a v oir de no uvea u envahi le Maryland et ,

de laisser sur le cham p de batai l le dix mille prison


niers et sept mil l e b l essés .

Le j our qui sui v i t ce t te ba t ai ll e et pendan t lequel l a


nouvel l e de l a v ic t oire se répandi t dans t o us les é t ats
,

du n ord é t ait précisémen t le 4 j ui ll et Par une sin .

g u lièr e co i ncidenc e bien fai t e po ur fr a pp er les p o p u


,

l at i o n s a esc l av es c es t éga l emen t le 4 j ui l let alors


que tou t es les v i ll es de l Uni o n cé l ébraie nt avec eri


,

t h o u s i a s m e la grande fête na t ionale e t l e t riomphe du


général Meade que Vicksburg l e bo u l evard de la
, ,

conféd ération rebe ll e sur le Mississipi ouvrait ses ,

portes au général Grant .

Ainsi la cause de l Unio n rempor tai t en même


t emps une grande v ic t oire sur c h acun des deux


poin t s l es p l us impor t an t s de l immense t erritoire dis ’

p u t é A l es t des All eg h anys l armée du Po t omac dé


’ ’

gageai t W as h ing t on e t reprenai t l off ensi v e ; a l ouest


.

’ ’

dans l a va l lée d u Mississipi l es so l da t s de Gran t rou


,

v r a i e n t aux v aisseau
,

x du N o rd le cours du fleuve
l ar t ère cen t ra l e du con t inent D ésormais di t M E li
,

.

s é e R e clus on considéra le C a p des te m pê t es comme


, .

défini t i v emen t dou b l é on sen t i t qu en dépi t de t ou t es


,

les v icissi t udes et de t o us l es ma lh eurs t enus en


réser v e par l a v enir le sor t de l a na tion ne s erai t p l us

exposés aux h as ard des comba t s e t que les dernières


j ournées l es p l us s anglan t es de la g uerre a v aien t é t é
, ,

v raimen t le p aroxysme de la crise qui depuis deux an


nées déj à me t tait en péril le salut de la R épub l ique
Pa r une pro clama t ion du 1 5 j ui l let Linco l n fixa un
.

13
1 94 RAHA M L I N C O L N
AB

j o u r de p ri è r e s na t iona l es e t d ac t ions de grâces p o ur


r e m ercier Dieu des succès qu on venait d obteni r ’ ’

E lle é t ai t a i nsi conçue


.

P RO C A MA I
L T ON

Le Dieu Tout Puissant a da i gné prêter l o r eille aux



supp l ica t ions e t aux prières d un peuple afflig é et ’

donner sur terre et sur m er à l armée e t a la flotte


, ,

d e s E t a t s Unis d asse z fécondes e t éc l a t an t es v ictoires


pour augmen t er no t re co n fiance dan s l e succès final ,

e t n ous permet t re de n e pas espérer sans fondemen t


que l union de ces Et a t s sera main t enue e t leur cons

t it u t i o n préservée qu e la paix e t la prospéri t é n e


,

t ardero n t pas a re n aî t re Mais pour p rix de ces vic .


,

t o i r e s de bra v es e t l oyaux ci t oyens on t immo l é a la

pa t rie l eur v ie l eurs membres l eur l i b er t é et le deuil


,

, , ,

s es t é t endu sur presque t ou t es l es familles du pays


a l a sui t e de si t errib l es sacrifices Dans ces vic t oires .

et dans ces deui l s i l es t con v e n ab l e e t j us t e de reco n


naî t re e t de confesser la mai n t o uj ours présente du
P ère To u t Puissan t -
.

Q u i l soi t donc auj o urd hu i con n u que j ai rése r vé


’ ’ ’

l e j eudi sixième j o ur du mois d aoû t prochain pour


,

ê t re obser v é comme un j our d ac t ion s de gr â c es na ’

t i o n a le s de l ouanges e t de prières ; que j in vi t e le peu


ple des E t a t s Unis a s as s em b le r a ce tt e o ccasion dan s



les lieux accou t umés où se pra t iquen t les diff ér ents


cul t es re l igieux afi n que ,

forme appro u v ée pa r sa
1 96 A B RAHA M L N I CO LN

et se r ésu mait en un mot : P o u r fa i r e le bi en et


r e m p li r t o n d e v o i r a i d e t o i le c i e l t a i d e r a

-
, , .

E n so mme si les succès obtenus do nnaient d e l é g i


,

tim es espérances i l restai t encore a porter le de r n i e r


,

co up et c est souvent le plus difficile Le N ord éta i t v ic


,

.

t o r i e u x mais i l n était pas le maî t re ; po ur le deveni r


entièrem ent p o ur subj ugue r le S ud et mettre fin à


,

la sécession il fa l lait plus d une sanglan t e bataille e t


,

u n ensemble d O p é r at i o n s a la ha u teu r du génie des


' ‘

plus grands capitaines .

J ai dit que nulle guerre n a v ait été plus logique


’ ’

dans la conduite générale de ses mu ltip l es o péra t ions


les campag n es qui vont ache v er l œuvre nous en ’

donne r ont la meilleure des preu v es .

A u poin t où en son t les choses après la Chute ,

de Vicksbur g le N ord n a plus q u à garder les p osi


,
’ ’

t ions conquises sur l A t lant iq u e le golfe du Mexiqu e et


l e Mississi pi dans l es E t a t s d u cen t re et ceu x de


,

l oues t To ut c e qu i res t era de t roupes disponibles



.

p o urra ê t re concentré sur R ichmond .

Grant a é t é placé à la tête d e l armée du Po t o mac ’

et n e v o u lant pas risquer so n armé e sur le théâtre


,

malheure u x où Mac Clellan a v ait perdu la moi t ié de


l a sienne deu x années aupa r avant il arrive pa r d ha

, ,

biles man œ u v res q u il eff ectua san s ê tr e inquié t é à



,

place r ses tro up es dans le va s te camp r et r anché q u e


P R ÉSID AT S U N IS
E NT DE S 197 É T -

fo rme la Péninsule co mp r ise entre la r iv 1 e r e Jam eg


et l A p p o m att ox

.

L à sans inquiétude pou r ses o pérations et ses r en


,

forts qui lui arrivent désorma i s t ous les j ours p ar la


,

ri vière James le général Grant j o u i t d une complète ’

l i berté de mouvements et n a plus à craindre d ê t re


,

’ ’

to u r né par l ennemi Il p eu t s o ccupe r uni quement



.

du siège .


L espace que défendent Lee et Beau r ega r d et dans ,

lequel o n p eu t dire que la confédéra t ion j ou e sa fo r


tune n e se co mpose pas de la seule vi ll e de R ich
,

m o nd ; ell e comprend aussi Petersburg et un c h emin


de fer qui réuni t les deu x cités L ensemble des r é .

t ra n c h e me nt s form e en réali t é une énorme citadelle ,

don t le front long de 4 0 ki l omè t res o ff re de fo rmi


, ,

d ab les o uvrages D erriè r e ces for t ifications une voie


.
,

ferrée p eut en quelques heures t ransporter la garni


,

son sur tous les poin t s menacés


,

C e sont là les retran ch ements que Grant solidemen t


.

retranché lui mê me cherch e à p ercer sur u n point


-
,

o u sur u n au t re afi n d isoler R ichmond d e ses com


,

m un ic at i o n s avec le S ud e t d en faire une simple en ’

c la v e des É t a t s libres destinée à tomb er t ô t o u t ard


, ,

et par la force mê me des ch oses au pou v oir des


fédérau x
,

t
M algré tou e la ténacité de Grant et les forces n ou
vel l es mises à sa disposition le go uvernemen t de ,

Lincoln comprit to utefois que la capi t ale des c o nfé


d er es ne tombe r ai t p eut ê t re j amai s si o n l at t a q uait


198 A BBA HA M L N I C OLN

seu l ement par la Virgini e o u en v enant pa r mer ; qu il ’

fa ll ai t péné t rer au cœur des É t a t s rebe ll es et couper


t o utes leurs commu n ica t ions .

P endan t don c que Grant prenait le commandement


de l armée du Po t omac S h erman partai t du Ten

h e ssee do n t l a conq u ê t e a v ai t é t é ach e v ée pa r la b a


,

t ai ll e d e C h a tt ano oga (2 7 28 e t 2 9 n o v embre,

Av ec hom mes e t 2 50 pièces de canon il se ,

diri g e ai t vers l es m on t agnes après a v oi r réuni à N ash ,

v i ll e une grand e q uan t ité d a p p ro v is io nn emen t s ; puis


g râce a des march es h a b iles fa isait t omb er l es re


d o u t ab l e s p o si t ions d u défi l é
,

repoussant
s a ns cesse les confédérés to urnant l e s o bs t acles qu il

,

n e pou v a i t renverser et d é b o uc h an t enfi n de l au t re


cô t é des All eg h anys pour al l e r m e tt re le si ège deva nt


l a forte place d A t lan t a où l ennemi s é t ai t retranché

,
’ ’

L e mom en t é t ai t dé isif N o n seu l e m en t le N o r d


c .

a v ait v aincu mais il a v ai t su pro fi t er de ses v ic t oires


, .

D e la m arche d e Sherman a tra v ers la Géorgie d é


p endait le sor t définitif de la guerre Lincoln voya i t
le su ccès cer t ain Que lui fal l ai t i l ? du t emps quel
.

,

ques mois Mais so n mandat a ll ait expirer ; le 2 no


v e mb re le scru t in devait décider si le peuple loyal des
.

E t a t s Unis serai t en maj ori t é pour l aisser aux mains


,

d e l h o nn ê t e A be les dest inées de la R épubliqu eamé


ricaine .
2 00 I CA B BA I I A M L N OLN

chaque scr tin sor t ou un a v e rt issement o u un blâme


u , ,

ouune approbation pour le par t i qui se trouve au po u


voir C est ainsi que l on comprend aux E tats Unis la
.
’ ’

p r a tique du go uve rnemen t républicain .

Pendant la guerre de sécession so us la prem i ere ,

présidence de Linco l n l es é l ec t ions p artiel l es furent


l image ex ac t e des crain t es o u des espéran ces qu m s
,

p ira i t la conduite du cabine t de Was h ing t on .

E n 1 8 6 2 année d incer t i t ude et de re v ers si l o ppo


’ ’

, ,

s i t i o n démo cratiqu e t riomp h e c est que les gens ’

réfléchis e t sans passion en t raînés par les é p o u v a n


tables défai t es d es arm é e s d u N ord en étaien t venus
,

à dou t er que l e gou v erne m en t fû t ass e z habi l e e t assez


puissan t pour réduire la r ébel l ion A près les succès .

de Vicks b urg G e tt ysb urg Po rt H udson l a r é o u v e r


, ,
-
,

ture d u Mississipi la c o n q u ê te du T ennessee e t d une


'

grande par t ie de l A rk an s as ’
en 1 86 3 l a dm in is t ra , ,

tion au co n t raire l em por t e da n s t ou t es les élec t ions


,

les j uges l es maires l es représen t an t s les séna t eurs


,

élus appar t iennen t a l O p i n io n répu b l icaine m o déré e


.
,

.

La no mina t ion d u généra l G ran t au co mmandemen t


en chef de tou t es les forces na t iona l es fo rt i fi a la con
fi ance du p eu ple dans l e gou v ernemen t de Linco l n .

S ans dou t e i l en es t encore qui n e désirent p as l a


ch u te de l a rébellion mais ceux qui dan s l e s heu r es les
p l us anxieuses n on t j amais désespéré du succès
,

voient au printemp s de 1 8 6 4 se ra ll ier à eux la m a


, ,

jo rit é des ci t oyens du N ord qui com m ence a croire ,

fermem ent q u e le général Grant aura vi t e ra i son de


c e qui res t ai t encore debo u t de la confédéra t io n .
P R É IDS E NT D E S É T AT S —
UN S I 201

A u ssi les élec t ions


de cet t e épo qu e furen t elles a -

peine disputées par l o pposition ; le p arti républicain


l e m p o r t a dans presque t ous les collèges



.

C es t dans ces circons t a n ces qu arri v ai t l époque


’ ’ ’

des é l e c t iO n s pour la présidence e t disons de suite ,

que le sen t imen t po pulaire se prononçai t ene1 g i q u e


men t pour re n o mm er Lin col n O n so n gea po ur t ant .

au débu t à lui opposer un ad v ersaire pris dans l e sein


m ême du par t i républicain .

Une prem i ere Conven t ion n at i o n al e , r é u nie à C l e


ve l and l e 3 1 mai 1 8 6 i a v ai t fai t appel à t ous l e s
,

radicaux du pa y s T O t h e R a d i c a l m en o f t h e n a
.

ti o n .E n v iron 3 5 0 personnes é t aien t présen t es ; mais


u n t rès pe t i t n ombre se t rouvai t muni de po uvoi r s

r éguliers .

Les m o t ifs de leur opposi t ion à la réélection de


Lin co l n é t aien t de di fféren t e na t ure
D a b ord les répu b l icains radicaux n a d m et t ai e n t pas
.

' ’

en prin cipe qu un pr é siden t p û t êt re réé l u d e ux fois


d e sui t e Qua t re ans de p ou v oir leur paraissaien t une


.

pério de suffisan t e et i l s demandaien t qu un amende


,
'

m en t â l a con s t i t u t ion conçu dans ce sens fû t voté par


le co n grès et soumis a la sanction du peuple
Quan t a l a po l i t ique de Lincoln les radicaux trou
.

v ai e nt q u à l e x t érieur il a v ai t m anqué d énergie d e


’ ’ ’

v an t les en treprises de l a France au Mex i que ; q u à ’


2 02 AE E AHAM L N I C OLN

l m t é ri e u r il n a v ai t poin t pri s de mesures assez é n er


g i q u e s pour domp t er l e S ud et serait t rop clément


après l a v ic t oire .

N o s l ec t e u rs n on t pas o ublié ce que nous a vons dit


dans u n de s précéden t s ch apitres d e s v ues de l a p oli


t ique américaine sur l e Mexique e t l A m é ri q u e cen ’

t ral e La guerre civi l e avai t p ermis au go u v ernement


.

de N apo l éon III de po r t er un coup qui po u v ai t de


venir mor t e l a la doc t rine de Monro e Le 1 0 a vr il .
,

l ar c h id u c M ax imi l ien rec e v ai t a Miramar une d é p u


t a t i o n qui v e n ai t l ui o ffrir l a couronne du Mexique il

l a c c e p t a i t dé b a rqu ai t a l a V e ra Cru z e t l ançai t le 29


sa p ro c l ama t ion au peu p l e m exicain c é t ai t un v é ri


,

t a b l e d é fi j e t é a u pe u p l e des E t a t s Unis Le c abinet de —


.

Linco l n crut néanmoins de v oir user de pa t ience dans


l in t érê t de l a cau se qu i l so u t enai t p our ne pas en
’ ’

, ,

do nnan t à Juare z l a p pui des fédéraux fo urnir au x


tr oupes fran çaises l o ccasion de prê t er m ain fo rte aux



confédérés .

Le peup l e qui ressen t t o u to u r s très v ivement l es


,
-

i nj ures fai t es à son pay s n e pou v ai t se rés i gne r à la ,

p r udence l o pinion des m a sses é t ai t s u r ce p oin t d une


’ ’

vivaci t é extrême e t e ll es m anifes t aien t l eurs sent i


,

m en t s con t re l a Fra n ce dans l es t erm es les plus bles


s au t s p our n otre amour p r opre na t ion al -
.

I l n e se passe guère di t M D u v erg ier de H au rann e


,
.
,

de semaine qu o n ne lise dans l e s jo u r n au x le


v rai o u m ensonger p eu l eur importe ,


de qu ,

défaite humi l ian t e o u de que l qu e la ch


cais

c est la p â ture que
204 A B RAHA M L I N C O L N
( o u la p la te fo r m e comme on dit aux États Unis)

,
-

d e la convention de C l eveland é t ait il cer t ain d e —

tro u v er u n écho re t en t issan t dans t o us les cœur s en


déclaran t que la p o li t i q u e n a t i o n a le co n n u e s o u s le
n o m d e d o c t r i n e d e M o n r o ë a v a i t é t é r eco n n u e p a r

t o u t es les p u i s s a n c es e t q u e l é ta bl i s s em en t d u n
’ ’

g o u ver n e m en t a n t i r ép u bli c a i n s u r le co n t i n en t

a m é r i c a i n n e p o u v a i t ê t r e t o lér é p a r le g o u v e r n e

m en t d es É t a t s Un i s .

S ur la p o l i t iqu e in t érieure voici quelles éta i ent les


r ésolutions du par ti r adical
1 L unio n fédérale sera maintenue

.

2 La constitu t ion e t l es lois des E tats Unis doivent


.

-
.

être ob ser v ées e t o béies .

3 La rébelli on sera do m p t é e p ar la fo rce des armes


.

e t sans compro mis .

4 La liber t é de la parole la liber t é de la presse la


.
, ,

liber t é individue ll e (h a bea s c o r p u s ) sont in v iolables ,

excep t é dans l es dis t ric t s o ù la loi martiale a été


pro c l amé e .

5 La réb el l io n a dé t ruit l esclavage et la c o ns t it u



.

tio n doi t ê t re mo di fiée par un amendemen t qui en


prohibe l e ré t ablissemen t et assure à t o u s les ho m
m es l égali t é devant la loi

.

S ur t ous ces p oints p as de di ff ére nce n otable au


,

fond entre le programme des r adicaux et c elui des


républicains m o déré s ; mais i l n en était point de ’

même des a r t i cles du manifeste relatifs à la reco n s


P R ÉSI D E NT DE S É T AT S I
-
UN S 2 05

des E tats séparés et au ch âtiment des r eb el


t it u t i o n
les Ces ar t icles étaient ainsi conçus
.

11 L œ uvre de la reconstruc t io n des E t ats rebelles


.

appar tient au peu ple par l intermédiaire de ses r ep r é


s e n t an t s au co n grès et no n au pou v oir exécutif


,

1 2 La confiscatio n des biens des rebel l es et le


.

partage de c es biens en t re les solda t s et les poss es


s e u r s actuels est un acte de j us t ice .

La pol i tiqu e de Lincoln é t ait plus clémente et le ,

p arti r épub l icain par t ageai t les sen t iments de Lincoln .

La conven t ion r a d i ca le avai t choisi comm e candi


dats a la présidence le gé n éral Fremont a la v i ce
, ,

présiden ce l e général Co chran e Tou s deux accepté .

r en t dans son en t ier le manifes t e de Cleve l and à


,

l excep t ion t ou t efois diso ns le a leur hon n eur de


,

’ —

l ar t icle 1 2 relatif à la confisca t ion Fremont l e r ep u


, ,

dia absolumen t et Cochrane s en remit sur c e p oint ’

à l a sagesse d u congrès quand le t emps serait venu


,

de s o ccuper des lois de recons t ruc t ion


La po l i t iqu e in t érieure d u par t i radical n e t rouva


dans le pays aucun écho e t ses deux candida t s n e t ar
,

d èr e n t pas à se re t irer de l arè ne é l ec t o ra l e dès qu ils


’ ’

furen t convaincus que la grande masse du peuple


serai t par t agée en t re les R ép u bli ca i n s Un i o n i s t es et
les D ém o c r a tes p a r t i s a n s d e la p a i x .
206 A B RAHA M I CO
L N LN

Le mard i 7 j uin une nouvelle Convention nationale


,

se réuni t à Bal t imore sous le no m de Un i o n n a t i o n a l


co n v en t i o n ; tous les é t a t s qui ne sont pas o uv er te
m ent e n r ébellion y sont représentés .

Ce tt e assem blée adhé r a a la politique suivie pa r


A braham Lincoln et la résum a en termes précis et
énergiqu es dans l e manifeste qu elle ad r essa au peu ple ’

loyal des E t a t s Unis -


.

Le premier de v oir d e t out ci t oyen américain di ,

s ai e n t les dé l égués de Ba lt imore est de maintenir


con t re l eurs enne mis l intégri t é de l Un i o n e t l auto
’ ’ ’

ri t é so uveraine de la Consti t utio n e t des lois des E tats


Unis
Me tt an t de c ô té t o utes les divergences de no s op i
.

nions po l i t iques no us no us engageons comme ci t oyens


,

de l Un i o n animés par un sen t imen t co m mu n et mar


chan t au même bu t a faire t o ut ce qui sera en notre


,

po u v oir pour aider l e gou v ernement à domp t er par la


force des armes l a ré b e ll io n soulevée con t re son au t o
ri t é e t a in fliger aux rebe l les l e ch ât iment dû a leu r s
crimes .

N o us approuvons la détermina t io n qu a prise le


gou v ernemen t des E t a t s U nis de ne poin t co mpro —

m e tt re a v ec l es rebe ll es de n é c o u t e r aucun e parole


,

de pai x a v an t l eur reddi t ion sans condi t ions et l eur re


t our a l obéissan c e a l a Cons ti t ution e t aux lois de

l Uni o n ; no us demandons qu il res t e ferm e dans


’ ’

résolu tions qu i l po ursuive la g u er r


,

grande énergie j usq u à la suppression ’


208 A BBA H A M L N I C O LN

comm e essen t iels à l a sau v egarde de no s institu t ions ,

l es actes du Président et les mesures qu il a p r ises ’

p our défendre la nation con t re ses ennemis déc la rés


et secrets ,
spé cia l emen t la pro c l ama t ion d é man ci ’

p at i o n des nègres appartenant à des rebel l es et l emploi ’

comm e solda t s de l Uni o n des h o mmes a ff ran chis de


l esc l av age N o t re confiance en Linco l n es t en t ière et



.

nous espérons qu il usera de t ous ses po uvoirs et em


ploiera t ous l es moyen s nécessaires p our m ene r à


bonne fin son œ uvre et sauver la pa t rie .

Le manifes t e de Baltimore reco mmandait enco r e


l union de tou s les esprits l in t égri t é e t l économie

,
’ ’

dans l adminis t ration de la fortune publique l a pro


t e c t i o n pour les i mmigrants l h u mani t é p our l es


prisonniers de guerre la reconnaissance pour l es sol


,

da t s t ombés au ser v ice du pays le respect des e n ga ,

g em e n t s con t rac t és sous l a foi de l a na t ion etc etc ,


.
, .

A u suj e t des a ff aires du Mexi qu e l a Con v ention r epu


bli c ai n e u nionis t e es t t ou t aussi énergique au fond que la
Con v ention radica l e mais e ll e s exprim e en t ermes p l us

dip l oma tiques Ce ll e ci disai t que l e p eup l e américain


.
-

n e v o u l ai t p l u s t o l é r e r ( t o ler a te) l entreprise é t ra n gère


’ ‘

co mm en cée par la France sur le con t ine nt américain


au mépris de la do c t rine de Mo n ro é Les républicains
em prun t en t au cabine t de Lincoln son l an g age
.

N ous approu v ons di t le manifeste la posi t ion


, ,

p rise p ar l e go u v ernement qui déclare que le p eupl e


des États Unis ne saurai t j amais r e garder avec in di i

ference l es attenta t s d u ne puissance européenne a yant


’ “
P R É ID ÉA S I E NT D E S 209T T S UN S—

po r but de r enverser par la force o u supp r imer par


u

la fraude les ins t i t utions républicaines d des p euples ’


un

de l A m é iq du N o r d N ous vo y ons avec une extrêm e



r ue .

j alousi e comme une menace po u r la p aix e t l i dé ’


n

t
,

pen d de notre
ance pays les e ff orts fai s par cette
pui s sance pour i m planter de nouveau a la p orte des
E t ats Unis un gouvernemen t m on archique sans autre

,

appui qu e la force d une armée étrangère ’


.

T e ll es é t aient les principales réso l utions contenues


dans le manifeste de Bal t imore el l es n é t aien t on le ’

voi t qu un e approba t ion presque sa n s réser v e donnée


à la p oli t ique de Lincoln l a con v en t ion le désigna


,

don c à l unanimi t é co mme can dida t a la présidence


a v ec A ndrew Johnson po ur v ice présiden t Quelques —


.

voix s é t aien t égarées au premier t our de scr u t in sur


le général G rant .

Les deux conventions de Cleveland et de Balti more ,

les républicains mo dérés et les radicaux ne par l aient ,

p as de comp romis le N ord t o ut entier vou l ai t que le


Sud se rendit d abord à discré tio n se croyan t cer t ain

d un triomph e complet à cour t e é c h éance



.

O n avait cette conviction que Grant et Sherman ,

ayant déj à r empo r té une série de succè s non inte r


r ompus et peu co û teu x la r éb ellion ne t arderai t pas ,

à su ccomb er sous leurs coups que R ichmond et A t ,

l anta pris leur chute entra în erait celle de la C o n fé dé


,

r at i on A u ssi aucun do ute au c u ne app r éhens i on n e


.
,

14
21 0 A B RAHA M I C
L N OL N

troublaient la sécurité des au t eurs


du manifeste qu e
no u s avo ns résumé plus haut Leur langage é t ait celui
.

d un m aî t r e qui v i ent de soum e t tre des suj ets i ns u fg é s


qui récompense les serviteurs fidèles et t raduit les


co upables devant son tribunal Tel fut l esprit dans .

le quel se r éunit agit e t se sépa r a la C onvention de


,

Bal t imo r e tous ses m embres étaient assurés que


l année 1 8 6 4 verrait et l a réélec t io n de Lincoln et la

chute de la Confédé r ation du S ud .

M ais voici que des événe m ents i mpré v us du j ou r ,

au lendemain changent complètem ent la face des


,

a ff aires
.

Gran t échoue da n s ses a t taques co ntre Cold H arbor


et P e t ersbu rg Sheridan m anque un mou v emen t tour
,

n ant qu i l opérait contre Lee l e Maryland es t de


nouveau m e n acé e t Sherman arrêté par des obsta cles


,

inat t endus dan s sa m arc h e sur At lan t a Ces revers .

é branlent l a confiance du N ord .

E n m êm e t emp s une pro clam a t ion apo c r yph e est


lan cée dans t o us l es É t a t s L e Présiden t Linco l n y
.

con fessait de pré t endues fau t es commises p ar le g é


n é r al Grant e t ordonnait une nouvelle levée d hommes

afin de recon stituer l arm ée du Potom ac décimée par


les dernières défai t es e t maintenant expo sée d un ’

j our a l a u tre a une destruction co mplète



.

Ces nouve ll es a v aient déj à porté un coup t


au crédi t des É t a t s Unis et pro du it une baisse

ble su r les fonds publics lorsqu on a,


c r o i t la retraite d u
2 12 A BBA HA M L N I CO LN


restaurée et déclarée perpétuelle ;
L Un io n
c l av ag e à to u t j amais abo l i dans son sein ; amn i stie
comp l è t e pour t o us le s ci t oyens ayan t pris part a la
rébe ll ion indemni t é pour les pro prié t aires des
esc l a v es affranchis ; répar t i t ion des représentants
et des taxes direc t es dans les anciens E t a t s à esclaves ,

d après leur popu l a t ion t o t ale y c ompris les h ommes



,

de co u l eur ; convocation d une Con v en t ion natio


n a l e chargée de ra t ifier les précédentes condi t ions et

de proposer t el amendemen t à l a Cons t i t u t ion qui


semb l erai t u t i l e .

Lincoln répondit à son h on orable corres p ondant


q u il pou v ait a ll er lui même au Canada se m et t re en

-

rapport avec l es co mmissaires en q u es t ion mais il


ne lui donnait pour t o u t es instruc t ions que la no t e ci
dessous

HO T E L DU P O UV O I R E X ÉC U T I F ( E x ec u t i ve Ma ns i o n ) .

W h gt
as in o n, 18 J u i ll t
e 1 864 .

A q u i de d ro i t

Toutes proposi t ions qui embrassent le ré t ablisse


men t de l a paix l in t égri t é complè t e de l Uni o n et
,
’ ’

l a b andon de l esclavage et viennent d une au t ori t é


’ ’

,

reconnue par les armées actue l lemen t en guerre


contre les É t ats Unis seront reçues et prises
-
,

sid era t ion par le Po uv oir exécutif des É


rencon t reront des conditions libérales
P R É ID SÉ A U IS
E NT D E S 21 3 T T S— N

tions essenti elles et sur les ci r constances secondaires ;


le porteur o u les porteurs de pareilles p r opositions
p euvent venir en t oute sécurité .

Signé A RAHA M L I C B N OL N .

C e qui p r écède se tro uvai t au bas de la le t tre que


le P résident écri v ai t à M Greeley à la s uite de sa
communica t io n le tt re qui lui f ut por t é e par le se
.

cr é t ai r e par t iculier de Lincoln le maj or H ay Une ,


.

pareille réponse pou v ai t à j us t e t i t re ê t re considérée


comme une v éri t a b l e fin de non recevoir ; MM C l ay .

et H olcomb e en tirèren t tou t l e p ar t i p ossib l e dan s ,

un manifes t e au quel on donna beaucoup de publici t é


pour exci t er l a r d e u r du S ud e t lui a tt irer les sympa
,

thies des citoyens qui dans l e N ord a t tendaient impa


t i e mm en t le j our O ù l on pourrai t signer un e paix h o

n o r ab l e .O n repro c h ai t au go uvernemen t de n e pas


avoir m ieux ac c u eill li les o u v er t ures des Confédérés
du Canada e t de vouloi r a t o u t prix continuer une
, ,

guer r e ruineuse dont le succès final était redeven u


,

aussi incer t ain qu au premier j o u r



.

Fo rt heureusement d autres négo ciations avaient eu


lieu v ers l e m ê me t emps du cô t é de R ichmond qui ,

ne t ardèrent pas à le v er tous l es dou t es sur les v é ri


tab l es dispositions d u Sud .

Le révérend J ames F Jaques de l I llin o i s et .


M J R Gilmo r e de N ew York S étaient rendus au




. . .
, , ,

su de Lincoln mais sans sa permission dans la capi


, ,
21 4 AB R AH A M L I N C O L N
tale des confédérés pour y po r t er des paroles de p ajx ;
il s a v aien t ob t enu du Présiden t Da v is une audience o ù
celui ci l e u r posa ne tt em en t son u lt i ma t u m
-
.

Je désire au t an t que v ous la p aix l eur di t il ; j e ,


dép l ore com m e v ous le fai t es t an t d e ff u s io n de sang ; ’

mais j ai ce sen t i m en t que pas une gou tt e du sang qui


a cou l é d ans ce tt e guerre n es t res t é sur m es mains : ’

j e puis regarder Dieu en face e t dire ce l a J ai fait .


t o u t ce qui dé p enda i t de moi po ur em p êc h er ce tte


« l u tt e Je l a v oyais b i en arri v er e t p endan t douze ans ,
.

j a i t ra v ai ll é n u i t e t j o u r p our l a pré v enir ; m ai s j e



«

n a i pas réussi Le N o rd é t ai t sourd e t a v eug l e ; i l ne


v o u l ai t pas n o us l a isser nous gouverner nous mêmes —


,

e t la guerre es t v e nu e main t enan t nous iro n s j us


qu au b ou t j usqu a ce que le dernier h omme de no

t re généra tion soi t t ombé pui s après nos e n fants


,

, ,

prendron t encore l e fusi l e t com b att ront no t re com


ba t à m o i n s q u e v o u s n e r ec o n n a i s s i e: n o t r e d r o i t
a u S E L F G O VE R N ME N T
,


N o u s n e n o u s ba l l o n s p a s
.

p o u

r l es c la v a g e N o us nous ba tt.on s pour l I ndé


p e n d a n c e e t c es t e ll e o u l ex t e r m i n at i o n que nous
’ ’

vo u lo n s î
Quand ses hô t es prirent congé de lui M Davis les ,
.

salua de ces dernières paroles


Di t es a M Lincoln de ma par t que j e r ecev r ai av e c
.

p l aisir en to ut t emps tou t e p r opo si t ion de pai x b a


, ,

sée sur la reconnaissance de no tr e indépendance I l . .

serait tou t a fai t inu t ile de venir à m oi


p ro positi ons .

O n ne p ouvait pas ê t re plus exp l icite ;


216 A BB A H A M L IN C OLN

vo ya i t un citoyen tenant à la m ain un t r anspare nt su r


les fac es d u quel on lisait des devises et des sentences
conçues dans le go ût suivant
L i n c o ln a r u i n é le p a y s en q u a t r e a n s n ou s ,

v o u lo n s n o s d r o i t s n o u s d em a n d o n s n o t r e li
,

q u o n n o u s r en d e l H a bea s c o r p u s
’ ’

be r t é , .

L Un i o n la C o n s t i t u t i o n e t L i t t le M a c !

O ld A be es t u n c h e v a l , M a c C le l la n u n ca v a l i er .

P lu s d e sp r i n g fi eld — j o k es j ou rd

au h u i ! P lu s d e
t es d r o g u es , v i eu œ c h a r la t a n !

Les disco urs v a l aient les senten ces .

A ppro chons d une des estrades en plein vent où ’

entre deux mo rceaux d un e criarde musique parle ’

un des ora t eurs les plus pop ulaires du N ew J ersey


,

-
,

le révérend C C h auncey B urn T o u t es l es sympa t hies .

de l o r at e u r son t pour les rebe l les É co u t ez le


.



.

N o us n avons pas le droi t di t i i de brûler leurs




, ,

récol t es de v oler l eurs piano s leurs cuillères leurs ,

j oyaux M Linco l n a v olé des milliers de n ègres ; v o


.
,

. .

ler un nègre c est la m ê m e chose que voler ,


cui l lères ! O n a di t que si le Sud vo ulai t mettre bas


les armes les por t es de l Uni o n lui seraient o uve r tes ;
,

le S ud n e p eut pas honorablement m e t tre bas les


armes p arce qu il co mbat po ur son h onneu r Deu x
,

mi l lions d hommes ont été empl oyés au massa cre


d u Sud et les v ides de l armée de Lincoln ne p euvent


plus être remplis ni p ar les engagements volontaires ,

ni par la consc r iption Po ur moi si j e faisais u ne


.

1 . Fo r e v y g
er ne ro h e h ad th u s s o entl s p o o ns .
P R ÉSI AT S U N I S
DE NT DE S É 2 17T —

p r iè r e j e demanderais q u au cun des E tats de l Uni o n


,
’ ’

ne pût Jamais être n i conquis ni subj ugué .

Le R ev H enri Clay D ean de l l owa s ex p rimait


.
,

,

ainsi d u haut du p erron de la maison voisine


Pendant trois an s Lincoln a demandé des soldats ,

et o n les lui a donnés Mais avec les grandes armées


.

dont il a le commandem en t qu a t il fait ? il a ,



- -

échoué ! éc h o u é De pa
r ei ll e s défaites étaient encore inconnues Une si .

grand e des t ruction d h ommes ne s é t ai t pas v u e de


’ ’

puis la destruc t ion de S enn ach é rib par le souffle du


Tout Puissan t E t le mons t re a en core besoin d hom

.

m es pour continuer son œuvre de bou ch er


Depuis qu e cet usurpa t eur ce traî t re ce t yran o c , ,

cu pe le siège de la Présidence le p ar t i r é pub l icain ,

cri e cou t eau en m ain guerre au cou t eau ! Le


san g a coul é par torren t s e t la soif du vieux mons t re
n est pas étanchée I l lui faut t o uj ours du sang

Voilà ce qu o n entendai t aux abords de la Con v en t ion


. .

démo cra t i que L au t eur n appré cie pas i l r a conte ; le


.
’ ’

lecteur fera bon march é de ces o dieuses attaques con


tre 1 h o nn èt e et exce ll ent Lincoln m ais i l é t ai t ind is

pensable de les rappor t er en c e tt e his t oire afi n de ,

montrer à quel degré d inju s t i c e et d ab e r rat i o n l esprit


’ ’ ’

de parti peut po usse r les hommes .

Le m anifeste de Chic ago fut réd i gé pa r C L . Vall au


dig b am ; il é t ait ainsi conçu
.
2i8 AB RAHA M L I N C O L N
N o u s a v o n s r és o lu d adhérer avec u n e fidélité

in altér ab l e dan s l a v enir comme dan s le passé à l U


,

,

nion t e ll e q u e l a é tablie l a Cons t itu t ion c est là l e


’ ’

seu l fondemen t so l i d e de no t re force de notre s é cu ,

ri t é de no t re bonh eur en tan t que p euple et le sys


, ,

t èm e de go u v erne m ent qui con v ien t le mieux à l a

pro spérité et aux progrès de t ou s l es E t a t s de ceu x


du N ord a ussi bie n que de ceux du S ud .

La Con v en t i on cro i t j us t emen t in t erpréte r les


sen t im en t s du peu p l e a m ér i c ai n en déclarant qu a ’

près qua t re années d effo r t s infruc t ueux po ur restau


rer l Uni o n par l a fo rce des armes après qu e l a Cons


t i t u t i o n au n o m de p ré t endues nécessités mili t aires


, ,

a é t é vio l ée l a l iber t é des ci t oyens foulée aux pieds la


, ,

fortune d e l a na t ion e t des par t iculiers compro mise ,

la j us t ice l humani t é la l iberté et le bien pub l ic de


,

manden t que des tenta t ives soien t immédia t ement


commencées pour arrê t er l es hos tili t és afin d arri v er ,

soit par la convo ca t ion d une Con v en t ion souveraine de


tous les E t a t s soi t par t o us au t res m oyens à rétabli r


, ,

la paix dans le p l us bre f dé l ai p ossib l e sur les bases ,

d un e Union fédéra l e où le droi t des E ta t s serait fo r


m el le m ent reconnu et solenne l lement cons acré .

Ce p r o gramm e signifiai t en langage améri cain q u e , ,

le parti démocra t ique dési rait bien l Uni o n m êm e ’

avec l esc l a v age m ais qu i l ne faisait pas du retour à


,
’ ’

cet t e U n ion une co ndi t ion essen t iel l e de la paix .

La Convention p or t a a la p r ésiden ce le général


C l el l an .
22 0 A B RAHA M L N I CO LN

r aditions m êmes du peuple américain ( dans


g n é s par les t
les limi t es de c e qui p eut ê t re com p a t ible avec l h ’
on

neur et les in t érê t s d pays) afin d arriver à ce tte


u ,

paix désirable d où sor t irai t pou r l a v enir l U i r e


’ ’ ’
n on

connue t acceptée par t ous les É t ats et les droits de


e

c h aque É t at garan t is dans l U i par la Cons t i t ution ’

n on .

LU i

est la seu l e condi tion de la paix nous ne
n on ,

d emandons pas da v an t age .

Laissez moi aj o u t er ce qui j e n en dou t e pas bien


, ,

qu on n e l ait poin t fo r mellement exprimé é t ait dans


’ ’

l esprit de to us les membres de la Co nven t ion ce qui


est dans l e sen t iment du peup l e qu i l s représen t ai n t ’


e

j e v eux parler de l accue i l qui a tt e d to u t É t a t décidé



n

auj ourd hui a reprendre sa place dans l Un i o n I l y


’ ‘
- ’
.

serai t reçu immédia t ement a v ec un e pleine e t en t ière


,

garantie pour to us ses droi t s co ns t i t u tionnels Si .

après a v oir fai t en t o u t e fran c h ise e t l oyau t é de per


s é v é r an t s e ffo r t s po ur arriver a u n résu lt at pacifique

no t re en t reprise v enai t à échouer la responsabi l i t é


,

des conséquen ces qui pourraient ul t érieurement s en ’

sui v re de v rai t re t o mber su r ceux qui rester aient en


armes con tre l Un io n car l Uni o n doit être à tout

,

pri x sau v ée .

J e ne pourrais plus regarder en face ceux de mes


an ciens camarades qui ont survécu à tan t de ba t ai l les
meurtrières si j ab an d o n n ai s cette Union p our la
,

quelle nous a v ons ensemb l e exposé si so uvent nos


j ours Sans do ute les soldats comme le p euple ver
.

raient avec u n e immense j oie qu une paix fondée sur ’

l U n i o n et la Constitution v i n t me t tre fin a tant d ef


’ ’
PRÉ I S DE N T D E S É T AT S —
I
UN S 22 1

fu sion de san g , m ais i l n


y a a
p s d e p a i x d u r a ble
'
s an s l Un i o n .

On pu croire q u à la suite de cet t e l e tt re le parti


e ût

démocra t ique cha n gerait de candidat ; i l n en f ut ’

rien Les lea d er s de la Conven t ion défendirent Mac


.

C l ellan mais de la façon l a plu s inj urieuse pour


,

son honn eur et son pa t rio t isme Le D a i l y N e ws l o r .


,

gane le plus avancé du p arti affirma que le général ,

a v ait eu connaissance des résolu tions de C h icago


deux mois avant la Con v en t ion qu e l les lui avaien t été ,

soumises au no m du parti démocrate par A lfred E dgar


ton de l I n dian a e t qu i l en a v ai t appro u v é sans

,

réser v e l espri t e t la le ttre Que l ques j ours après dans



.
,

u n meeting Fer n ando Wood pour défendre son can


.
,

di dat qu on at t aquai t au suj et de la l e tt re précédente


o sai t pronon cer ces paroles Mac Cle ll an sera


notre agen t no t re créature ; il ne p eu t d ésobéir a la
,

voix Quant a sa le tt re t ant pi s po ur qui ,

s y t rompe ce n est qu un sub t erfuge qu un e ruse


’ ’ ’

,

de guerre .

Le silence de Mac C l ellan fit pense r a j uste titre , ,

que s il ne répudiai t pas d une m anière éclatan t e des


’ ’

al l iés qui interprétaient ainsi sa p ensée et sa conduite


,

c es t que ceux ci disaien t l a v éri t é ; e t l e par t i r epu



-

b l i c ai n n eu t au cune peine à faire accep t er que l es


vrais principes du p art i démocratique qui vou l ait ren


verser Lincoln n étaient pas dans la let t re d ac c ep t a


’ ’

tio n de son candidat mais dans la plate forme de Chi ,



AB RAHA M L N I C OL N

C est ce q u ex pr i m a a v ec son esprit o r dinai r e le


’ ’

secré t aire d É t at M Seward à u n e p r o cessi on d ele o


,
.
,

teurs républi cai n s qui v inren t a cet t e épo que défi l er


so u s ses fenêtres e t lui do n ner une de ces fréquentes
a u bades au x quelles sont expo sé s les homm es d É t at ’

américains surto ut pendan t les épo qu es d ele c ’

tion .

z
-
Mes chers con ci t oyens di t M S eward (du haut de ,
.

sa fen êt re ) l a démo cra t ie à Chicago après avoir


, , ,

c h erc h é p endant six semaines si la guerre qu e


no us soutenons étai t un t riomph e ou un échec pour
« notre cause a fini par d écider qu e nous a v ions ,

éc h oué ; en conséquen ce elle a pris des résolution s


e t no mm é un candida t tels que cet t e opinion de ,

v iendra n écessairem en t une vérité si l o n cesse ’

le s ho stili t és et qu o n abandonne le t errain sans ’

con t es t e A Ba lt imore au contraire vous avez pensé


.
, ,

qu il n é t ai t pas aussi cer t ain que cela que nous


’ ’

e u ssions éc h oué ; e t en conséquence vous avez


d écidé de demander j usqu à la fin au sor t des ba

t ai ll es l e sa l u t de l Uni o n S h er m a n et F a r r a g u t

.

t i e n n e n t d e n le v e r t o u t e r a i s o n d ê t r e a u x n o m i n a
’ ’

t i o n s d e C h i c a g o e t les élec t ions par t ielles du Maine


et du Vermon t pro u v ent que les choix de Ba lt imore
sont bons e t salu t aires pou r le pays La question est .

a uj ou rd hui bien n e tt em ent posée


M ac C le lla n
e t la S ép a r a t i o n ou L i n co ln e t l Un i o n A vez v ou s

-
.

quelque doute sur l esuccès final ( C ris N o n fi o n


moi j e n en ai au cun M
,

.

amis po u r votre visite


, .
2 24 A B RAHA M L I N C O L N
militaires et fi nancières et j e r egrette pou r le p ays
que l on soit fo rc é de lui continue r so n mandat

.

Le scrutin du 8 nove mbre donna les r ésultats qu a ’

v ai e n t déj à prévu s depuis plusieurs semaines les O h

s er v a t e ur s in t elligen t s Lincoln fu t nommé pa r


2 21 3 665 voix ; Mac Clellan en obtint 1 8 02 2 3 7
, , , ,
.

La volonté de la maj orité du peuple dans les É t ats


loyaux n é t a i t plus do u t euse j amais on n avait vo ulu
’ ’

plus fermement plus unanimemen t q u à ce t te h eure


,

l in t é g ri t é de l Uni o n ni vu plus clairem ent la vani t é


’ ’

de t outes les espérances de concilia t ion L e devoi r .

d u go uvernemen t étai t donc désormais de n ac c u elli r ’

aucune proposi t ion de paix t ant que les rebelles n au ’

raient pas mis bas les ar mes .

D eux dern i eres tentatives f u rent pou r tant encore


fai t es au commencement de l hi v er de 1 865 pou r ar r é
'

, ,

te r les hostili t és L ho norable Francis P Blair d u Ma


.

.
,

ryland visi t a deux fois R ichmo n d dans c e b ut avec


, ,

le consentement d u Président Lincoln mais san s que ,

c e dernier l e ù t prié de faire au cune démarche E nfin


.
,

su r leur demande fo r melle MM A l ,


.

A John Campbel l et R obert M F


. . .

l auto ri sation de trave r se r le



P R ÉSI DE NT DES É T AT S -
UN S I 2 25

Pete r sburg pour se r endre a la forteresse Monro e O ù ils


devaient renco n trer le secrétaire d É t at M Seward ’

,
.

et le Présiden t Lincoln La conférence fut lo n gue et


,

bien remplie ; on y parla de part et d au t re en to u t e ’

libe rt é mais on n ab o u t i t à aucun résultat Les d élé


,

.

gués de la confédération n avaient pas pouvoir de pro ’

mettre l e retour a 1 Union ; le Président Lincoln ne


-

voulait pas traiter sur une autre base en sorte qu e les


parties se séparèren t co mme elles s étaien t ré unies ’
.

A u retour des délégués un grand meeting eu t l i e n a


,

R ichmond dans l equel le Président Jefferson D avis


,

s e x p r i m a ainsi

D ans ma correspondance a v ec M Lincoln ce


fon c t ion n aire n a ces s é d a ppeler l es É t a t s Unis e t la
.
,
’ ’

Confédéra tion n o t re pays déso l é ; j e n ai m o i ’

j amais manqué d é t ab l ir n e tt emen t l a dis t inc t i o n en t re


, ,

deux gou v ernemen t s déso r m ais séparés ; e t p l u t ô t que


de nous voir j amais de nouveau réunis j e préférerais ,

p erdre t out ce que j e possède sur ce tt e terre e t subir


mille mor t s si c é t ait possible

Il t erminait sa h aran gue en faisant un no uvel appel


à tous ceux qui se t ro u v aient en état de porter l es
armes leur pro me tt an t qu avant un an les Ya n kees
,

seraient chassés de l a Virginie e t demanderaien t l a


paix sur les bases qu e vo u lait le Sud .

Le meeting à l unanimité se prononça po ur cont i


nuer énergiquement la guerre .


226 ABBAH A M L N I CO LN

CA M PAG NE DE SHE R MA N E N G É O RG I E CA P I T UL AT I ON DU

GÉ É II
.


N RA L LE E . AB OL T ON D E L E S C L A VA GE .

Pendant la camp agn e électo r ale l a rmée de te rr e et ,


l a flot t e avaient rep r is le c o urs de leurs succès u n


m oment interro mpu par des échecs as s ez gra v es et ,

qui avaient menacé de ru iner l œ uvre si pénibleme nt ’

accomp l ie par Lincoln a l h eure O ù l on cro yait le ,


’ ’

t riomphe cer t ain


A u point O ù nous avons laissé les o pérations militai
.

res deux positions impo r t an t es restaient encor e à


,

pren dre p our co mp l éter le b l o cu s du S ud c éta ient ’

M o b i le dans le golfe du M exique et C h ar les t o n sur


, , ,

l A t la n t i q u e
Le 5 aoû t 1 8 6 4 la flotte fédérale s était présentée
.

de v an t l a b ai e de Mobi l e sous la conduite de l ami ral


,
‘ ’

Farr ag u t C e courageux marin fa t igué pa r l â ge et la


.
,

ma l adie s é t ait fai t a tt acher à la h une du v a i sseau ami


,

ral le H a r t fo r d d u hau t de l a que lle il com manda l ac


,

t ion L e combat était a peine commencé q u e le bélier


.

T ec u m s e h s ab î ma frap pé par u ne to rpil l e A l o rs l a


’ ’

, .

miral fi t prendre la t ê t e au H ar t fo r d et toute la flott e ,

criblan t de mi t raille et d o b u s les fo r t s e nn emi s fran


’ “

chi t la barrière intérieure e t g agna le milieu


baie O ù elle e n gagea contre
,

u n e action meurtrière mais ,


228 A B RAHA M I CO
L N LN

t r ait le 1 7 fév ri e r 1 8 65 à Colo mbie c est à di r e au c œ u r ,



- —

de la Caroline du S ud que Beauregard évacuait en ,

to u te h â t e puis montait a Fayetteville le 1 1 mars O ù


, ,

il se tro uvait encore a une distance de deux cents


milles de l a r mée de Grant mais sur le point d effec

,

tuer s a j onc t ion avec deux autre colonnes opé r ant s u r ,

le fl an c de cette armée .

Grant resserrait pendant ce temps ses lignes d i n ’

v e s t i s s em e nt autour de R ichmond et de P é t er s b u r g .

Le 2 a vril 1 8 65 il emportait Petersburg et Lee , ,

envoyait a Je ff erson D avis un exprès po ur l invi te r à ’

p rendre la fuite en t o u t e h ât e a v ant que les cavalie r s ,

de S heridan n e lui eu ssent coupé t ou t e re traite .

Le 7 Lee qui venai t de parcourir près de 3 00 milles


à travers un pays coupé de ra v ins de bois de to r
,

, ,

rents Lee qui n avait plus de canons plu s de vivres


, ,

presque pas d armes fuyant les troupes d u géné r al


,

,

O rd se réfugiait a Farmville su r l A p p o m at t o x
,

L é p u i s e m e nt des sold a ts confédérés qui de


puis cinq j ours de march e n avaient a la lettre r i en ’

m ang é excep t é des grain es de m ai s et des écorces


d arbres devint t el qu après un conseil de guer r e

,

tenu par les généraux le commandant en chef de ,

l ar t illerie le général Pendleton fut chargé de com


, ,

g tt
1 N ou s v
p o u o i r r a pp o r e r e n s o n e n i er
de t t
é ttè tq tlt é
. re re ons ne
l e r ci r s d ra m a i u e q u a d o n n

d e l a c a p i u a i o n d e l ar

V g Ch l té

m é e d e N o r d - i r i n i e , M E d o u ar d L ee i d e , d an s s o n i n
t ét gé é lR
.

u d e s u r l a Vi e e t l es C a mp a g n es d u o b e rt
l Cl t êt ll l
res se n e n ra

Le e , s o n o nc e e a eût é té p eu - r e l e m e i eu r e t le p u s

j t h g à à l h êt l t
.

omma e re n d r e c e i v re e e t é mu , o ù
t tg g

us e o nn au e ur

( d o n n o u s n e p a r a e o n s p a s l e s o p in i o n s ) ard e r u n e
tt t t t t f ll
su
i u d e c o n s c i e n c i e u s e en r e s e s s e n i me n s d e a m i e e t l a
vé té hi t q
a

ri s o ri u e .
P RÉ ID S AT S U N I S
E NT DE S 229 É T -

mu ni q u er au général en ch ef que l avis unanime du


conseil était qu il n y avait plus q u à se rendre Tel l e


’ ’ ’
.

cependant n était pas la m anière de voir de Lee Me



.

r endre ! s é crie t il le r egard en feu ; il me re ste tro p



- -
,

de bons soldats pour cela


Il croyait sans doute enco r e pouvoir a t teindre les
m ontagnes et tant que ce tt e chance lui res t ait il n e
, ,

se c r oyait pas au t o r isé a renoncer à la lutte


Mais Grant qui l e sui v ait de près le force à qui t ter


F ra mv i ll e e t lui écri t l e 7 a v ri l 1 8 6 5 qu en présence

de l i n u t i lit é d une résis t a n ce p l us prolon gée de la


’ ’

p art de l ar m ée de N ord Virginie et po ur se d ec h ar




,

ger de t ou t e responsabi l ité p our le sang qui pourrait


ê t re versé doréna v an t il v enai t demander la r edditio n
,

de ce tt e arm é e à l aque l le on ne ferai t qu un e seu l e ’

condi t ion l enga gemen t par le s officiers e t solda t s


de ne por t er en au cun cas de nou v eau les armes


con t re l e go u verneme nt des É t a t s Unis tant qu i l s —
,

r esteraien t prison niers sur parole


Gran t demandai t une en t re v ue pour arrêter dé fin i
.

t iv e me n t les condi t ions de la capit u lation .

Lee hésita j usqu au 9 et ce n e fu t q u à la dern i ere


'
’ ’

ex trémi t é q uand i l fut convain cu de l i n u t il it é ab so l u e


,

de to u t e no uve ll e t en t a t i v e qu i l accorda l e n t re v u e
’ ’

d emandée L a capi t ula t ion fut signée : t o us les officiers


.
,

en ga r dant leurs armes les soldats en livrant leurs , ,

fusils po uvaien t se retirer c h ez eux san s a v oir à crain


, ,

dre d etre poursuivis pa r les au t orités des États Unis




,

sou s la condition d observer la parole qu ils donnaient


’ ’

d o b é i r à l a Consti t utio n et aux lois du p ays



.
23 0 A B RAHA M L N I CO LN

Pendant que l armée terminait par les m er v eil


l e u s e s campagnes de Gran t et de Sherman la so umis


sion des É t a t s rebe ll es le Congrès sur la proposi t ion
, ,

d A b r a h a m Linco l n v o t ai t l aboli t ion de l escla v age


’ ’ ’

, .

L a m endemen t cons t itu t ionne l a b o l issant e t pro b i


ba n t a j amais l escla v a ge aux É t ats Unis e t dans l es




,

t erri t oires so umis a leur j uridic t ion a v ait été po ur l a


première fois présenté au séna t par M H enderson


,

.
, .

Le séna t l avai t adop t é par 3 8 v oi x con t re 6 ; mais i l fut


repo ussé a la c h ambre d es R eprésentants le scrutin


donna 9 5 oui ; 6 9 non .

Le premier vote avait eu lieu l e 29 avril 1 8 64 le ,

second le 15 j uin suivan t


,
.

S ur la pro posi ti on de M A s h ley de l O hio o n dé c ida


.
,

que la ques t io n serai t de no uveau soumise à la chamb r e


a l issue d e la gu erre et de la campagn e présidentielle

.

A ussi dans son dernier message du 6 décembre Lin


co l n rapp e l ant ce tt e réso l ution avait i l c r u devoir
, ,


, ,

engager for t em ent la chambre des R eprésentants à se


mettre d accord avec le sénat au suj et de l amende
’ ’

ment adop t é par ce dern i er .

Je ne me t s pas en doute disait ii la sagesse et l e ,


-
,

patrio t isme de ceux qui s opp o sent encore au pas ’

sage de cet amendement j ose seulement Vo u ,


mander que la mesure qu i l renferme soit de ’

p rise en considéra t ion et adoptée pendant la


session Certainement .
23 2 AB RAHA M I C
L N O LN

des divers É t ats comm e am en dement à la C o nst it u


t ion des É t a t s Unis et qu une fois ratifié par les trois

-
,

quarts des susdites législatures il sera bon et valable ,

à to utes fins comme faisant p artie de la Co nstitution


,

AR TICLE X I II

S E CT I O N I I l n y aura n i escla v a ge ni s e r v i t ude


.

involon t aire au x É tats Unis ainsi q u en to u t lieu —


soumis a l eu r j u ri di c t i o n si ce n est comme puni t io n ,


d un crim e d on t l a partie aura été dûmen t convaincue


S E CT I l Le Congrès aura le po u v oir de faire


. .

exé cu t er cet article a u moyen des lois à c e n é c es


saires .

Cet amendement fut ra t ifié par les législa t ures d I l ’

l i n o i s Rh ode Island Mi chigan Maryland N ew York


,

, , ,

,

Maine West V irginie Kansas Massachuse tt s P ens y l , , ,

Virginie Oh io Misso uri N e v ada Indiana


,

v an i e
, , ,

Louis i an e Mineso t a Wisconsin Vermont T e n n es s e


, , ,

, , , , ,

A rkansas Connec t icu t N ew H ampshire Caroline


, ,
-
,

d u S ud A labama Caroline d u N ord et Géorgie


, , ,

en t o ut v i n gt sept É t ats constituant les tro i s q u a r t du


-

n omb re en t ier des États Unis -


.

E n conséquence par un e p ro clamation du se c r e ,

taire d É t at M S evvard datée du 1 8 décembre 1 8 6 5


, .
,

qua t re v ing t dix ans après la déclaration d l n dé


,

- -

p en d an ce l amendem ent précité abolissant l es


,

cl av a g e devint valable à to u t es fins comm e faisa nt


.

,
P R É IDS E NT D E S É T AT S —
UN S I 23 3

ÉPIL O GU E .

Après la capitulation de Lee le S ud avai t encore ,

u n e a rmé e en camp ag ne l armée de J oh ns t on que ,


poursui v ai t S h erman e t qui n e de v ait se rendre que le


1 7 a v ri l 1 8 65 .

A u derni e r conseil de cabinet t enu sous la p resi


dence de A Lincoln e t au que l assis t ait le général
.
,

G r ant le j our même de l assassinat l e Présid ent


,

,

se to urna vers le généra l en c h ef e t lui demanda s il ,


avait des no u v el l es de Sherman L e généra l l ui ré .

pondit qu il n en a v ai t pas m ais qu i l a tt endai t d heure


’ ’

,
’ ’

en heure des dépèches l ui annon çant la reddi t ion de


J ohnst on .

E h bien ! dit le Président vous aurez pro chaine ,

ment des nouvel l es et el l es seron t impor t an t es .

Pourquoi pensez vou s ce l a di t l e général -


.

Parce que j ai rêvé la nuit dernière ; e t touj ours


depuis le commencement de l a guerre j ai i n v a ria ,


blement r èvé la même chose t outes les fois qu i l y a ’

eu un grand événement .

Il rappela a l ors B u ll s R un A n t ietam Get t ys ’

burg etc et di t q u à la v eil l e de c h acun de ces épi


,

so d é s de la guerre il a v ait eu le même rê v e


.
,

T enez ajo u t a t il en se tournan t vers le secr e


,
-

tai r e de la m a r ine c est votre partie M Welles J ai


,

,
. .

rêvé q u e j e voyais u n vaisseau qui cing l ait avec une


23 4 AB RAHA M L I N C O L N
ex trême r apidité et j e suis s û r que Cela p r ésage
,

quelque grand événement national .

E t r an g e p re s s ent i m e nt l C e grand événement que lui


a nnonçai t son rêve c est l attentat dont il al l ait êt r e
,
’ ’

v i ctime le soir même et que j ai raconté dans l int r o ’ ’

duction de cet o uvr age .

Voici c o m ment fut annonc é l assassinat de Lin c oln


pa r la première dé p êc h e officiel l e envoyé e de Was


h in g t o n a la léga t ion des É t ats Unis a Lo n d r es p a r le -
, ,

ministre de la guerre E M Stanton , . .

H ier soir ( 14 avril) ve r s 1 0 h du soi r le


, .
,

p r ésident Lincoln a été assassiné dans sa loge du


théâtre Fo r d dans la Cité, .

Il était arrivé ve r s hu i t h eu r es avec m i st r ess L i n


coln U n m onsieur et une dam e se t r ouvaient ave c
.

eu x dans la loge dont la p orte n était pas gardée ’


.

L assassin o uvrit cette porte s ap p r o o h a vivement du



,

p r ésident et lui ti r a par derrière un cou p de pistolet


dans la tête La balle frappa la parti e postérieure du
.

crâ n e et pénétra d outre en o utre L assass in sauta


’ ’
.

e nsuite de la loge sur la scèn e en brandissant un


co u telas ou un p oignard et s é c ri ant S i e s em
,

pe r ty r ann i s ! pu i s s é ch ap p a pa r les de rr i è r e s d u

théât r e .

Le p r ési dent était tomb é s u r le s o l privé de s en


t iment Il r esta dans le m ême état j usq u à 7 h 20 du

. .

matin et rendit l â me

.

A u moment même o ù c e m eu rt r e s ac co mplissait ’

au th éât r e un secon d assass i n se p r é sentait au do


,
23 6 A B RAHA M L I N C O L N
la lutte il semblait p ar la s agesse de son la n g age
, ,

et de ses vues devoir amener bientôt en t re les en


, ,

fan t s de la patrie américaine une féconde et du ,

rable réconciliation S es derniers actes sont le co u .

r o nn e men t de sa vie d h o n n é t e ho mme et de g r and


citoye n .

C e n est qu au bout de quelques j o urs que l on connut


’ ’ ’

le n o m de l assassin ? D ans que l bu t a v ai t il acco mpli



-

son exécrab l e forfai t ? Q u é t ai t i i de v enu ? Que l ques ’


-

personnes p endan t la co ur t e appari t ion du m eur t rier


,

b randissan t son poignard dans la loge du p résident ,

se so u v enaien t d a v oir d éj à v u ce tt e figure somb r e


et é n ergique mais c est en v ain qu e ll es cherchaient


.
’ ’

à m e tt re u n nom sur ce m asque pour t an t con n u .

Le crime avai t é t é longuemen t pré m édi t é ; car


tou t es les précau t ions ava i en t é t é pri s es pou r que rien
n en pû t en t raver l exécu t ion L assassin a v ai t pénétré
’ ’
.

dans l a sa ll e a v an t l a représen t a t io n e t dispo sé l es


m eubles de la loge de m anière à n ê t re gêné dan s ’

aucun de ses mou v emen t s Une por t e co mmuniquant .

avec les cou l oirs extérieurs a v ai t é t é condamnée et ,

u n t rou percé a l a vri ll e dans cet t e po rte permet t ait


,

de voir du deho rs ce qui se pass i t a l in t érieur


,


a .

Q uand les personnages du drame se t ro uvèren t placés


c o m m e l e vo u l ai t le meurtrier il pénétra dans la loge , ,

et les choses se passèrent exactemen t comme il l es


avait d avance arrangées Le géné r al G r ant en ne

.
,
P RÉ ID
S E NT D E S É T AT S —
UN S I 23 7

ve nant pas au théât r e fit seul manque r la pa r tie du ,

p r ogr amme qui le concernait .

P rofitant de la stup eu r générale le meurtrie r avait ,

p u t r averser la scène sans que p ersonne songe â t à ,

l ar r êter descendre u n escalier conduisant à u ne


po r te de derrière donn ant sur la r ue e t s élan c er sur ’

un cheval que lui tenait to ut prêt un complice .

To u t e la police fu t mise immédiatement su r pied .

Le général A nges commandan t mi l itaire de Was ,

hi ng t o n o ff rit une récompense de


,
dollars pour
l arresta t ion de l assassin Cet exemple fut imité pa r
’ ’
.

toutes les grandes v illes du N ord et pourtant pen ,

dan t p l usieurs j ours on n e put r ien déco uvrir .

L ar re s t at i o n de l assassin fut des p l us dramat i


’ ’

ques .

Booth ne dément i t p oint dans cette ci r constan ce ,

suprême l in do m p t ab le énergie de s o n caractère la


,

quel l e mise au servi ce d une meilleure cause eût p u


,

fai r e de lui un grand homme .

Poursuivi dans les marais de Ma r y s County dans ’

l I llin o i s il a v ait pu avec son complice H arrold g a


, , ,

g u er la ferme de Garret t pr ès de Port R oyal et se ,


-
,

barricader dans une gra n ge Les so l da t s d u colonel .

Baker cernèren t la grange menaçan t d y me tt re le ,


feu si les fugi t ifs refusaient de se rendre Boo t h s était .


fracturé la j amb e en sautant de la loge d u président


sur la scène et ses fa t igues et ses courses des j o urs
derniers avaient aggravé sa b lessure et la r endaient
,

t r ès douloureuse Il déclara cependant qu i l ne se


-
.

r endrait point et qu on ne l au r ait p as vivant Le ’ ’


.
23 8 A B RAHA M L IN C O L N
c olo n el Ba k e r fi t mettre le fe u a la g r ange O n en .

te ndi t a l ors u n collo que s éta bli r e ntre les fugiti fs


m e n a c é d ét r e br ûlé vif H ar r old voulait se re nd r e


, .

Booth l e t r aita d e lâch e et c ria lu i m èm e a ux sol dats —

de r ece voi r s o n complic e qui s e re nd ai t H a rr old .

so rtit e t fut i mmédiatement gar ro tté .

Cependant les flammes a vaient e nvah i to u te la


g ran ge Booth resté seul rassembla toutes ses fo rc es
.
, , ,

et u n revolve r dan s chaque main se j eta t ête baissé e ,

s u r la clôtu re qui ferma it l entrée du b â t i me nt



Une .

des planches céda et i l allait passer par cette ét r oite


,

o u ve r ture lo r sque le s e r gent Co r bett craigna nt po u r


, ,

sa vie et celle de ses c ama r ades lui déchargea a bo u t ,

p o r tant un coup de p i stolet d ans la tête Il vé c ut en .

co r e deu x h eu r es et eut une agonie te r rible ca r il


, ,

d emandait en g râce qu on lui ti r ât u n c oup de re


volve r da ns le cœ u r pour l ac h e Ver ; p uis on cha r


,

g e a s o n cadavre su r une charr e tte de rriè re laquelle ,

marchai t H ar r old attaché p a r le c o u La fami l l e de .

Bo o t h réclama e n vai n son c orps et l o n i gnore ce ,


qu il es t d evenu Bie n des légendes c irculent en c o r e



.

a ce suj et à Washington et à N ew Y o rk Il est p ro -


.

babl e qu il fut j e té à la mer



.

O n fit au p r ésid ent Li ncoln de magnifiq u es fu n é


rai lles et les j ou r naux du temps sont pleins de s r é c its
,

de c ette sole nnité .


2 40 A B RAHA M I CO
L N LN

de City H all D u r ant tout le p arcou r s les p op u lations


-
.
,

affluaient su r le passage d u funèbre c onvo i et venai ent


saluer une dernière fois avec toutes les marques de
,

la douleu r e t du r espec t l h o n n é te AB RAHA M L I N C O L N


,

.
2 44 A PP E N DIC E
contrer d oppo sition nulle part 1 Mais dès l année 1 7 7 5
’ ’

o n v i t se p ro duire un e opposi t ion énergique con t re


.

l es cl a v ag e Dans la P en s y l v an i e à N ew York des


so cié t és ab oli t ionnis t es se formèrent l escla v age dis



.
, ,

paru t de plusieurs Et at s du N o rd mais se main t int


,

vers le S ud O ù l on a ll éguait en sa fa v eur la nécessi t é


,

de la cul t ure d u coton Les fonda t eurs de la r epubli .

que américaine échouèrent dans les e fforts qu il firent ’

po ur l ex c l u r e de l a confédéra t io n

D ans l ac t e o rigine l de la déc l ara t ion d in dé p en


.

’ ’

dance Je fferso n repro c h ai t dure men t à Geo rge I II le


p a t ronage dont ce l ui ci a v ait favo risé la t rai t e
,

Le
-

roi disait J e ff erson a déc laré une gu erre cruelle


à l a na t ure h u maine il a violé les droi t s sacrés de
, ,

la v ie et de la lib erté dans la personne d un peuple


,

loin t ain qui n e l a j amai s o ff ensé Ces h ommes in ’

no cen t s i l les a rédui t s et l a cap t i v i t é il les a trans


.

« por t és
, ,

dans un a u t re h é mi s ph èr e pour y être


esclaves e t po ur p érir misérab l ement dans la tra


h l t l t ll
L a c o s e s e m b ai l a p u s n a u r e e d u m o n d e , e t l es s o u
v er e i n s d e l E u r 0 p e o c c i d en a e tl f t
l e s p r e m i er s à t
l t t ê à té êt

ure n au o

r i s er e x e r c i c e d e la rai e e t m me p r e n dr e u n i n r
tt l t v

d an s c e e u c r a i e e nt r e p r i s e
Jh k A gl i
.

S ir o n H a w i n s fu t l e p r em i e r a s q u i co mm and a

v t t ég l t
n

o u er em en ri er , e t l o n a c c u s e l a r e ne i
E i s ab e h

v t é é éfi l f
un n

a f ai r e

d a o ir p ar ic i p a u x b n ce s de

t St t q t g i gl f t
.

Au em p s de s u a re com pa ai s es

ég l t t t é t t Ch
u ar s , n es a n u r en

a em en d e l a r a i e et l es r o i s
i
J q fi t t è
con s u es en v u e ar
l es I I e t ac u e s I I ren p ar i e de l a d ern i re
fi t té é m g
.

E n n l e r ai d A s i e n t o , e n 1 7 1 3 , c r a u ne c o p a n i e p o u r

l l tt

èg
e x p o i a io n d e s n r es a r i ca i n s e t l e s a c i o n sf t ét i t
a i ns i

t gé
a en

p ar a es

à Ph l i i p p e d E s p ag n e

/àé vé A l i '
l 4
1 2
la r e i ne n n e d A n g le t e r r e ;

1 r s er e au pub c

l v m té l
.

m
Le b re d e s e s c a es i da n s l e s c o o ni e s a n g l a i
v r t tt Ui év l é à
no po r s
i d i l E 1 7 7 6 , es t
j q à tt è t
s es q u e n e n e s a s - n s en a u

us u c e e d ern i r e d a e .
A PP E N DIC E 245

R versée ! Cette conduite de pirates l o p p ro b r e des


Q puissa n ces i n fid èl es est la conduite d u roi chré t ien


Grande B re t agne D éci dé à t enir o u v er t un
,

R de la —

 m arc h é où l o n v end O ù l on ach è t e des h ommes


.

’ ’

i l a p r o s t i t u é s o n v e t o en annulan t t ou t es l es déci
, ,

fi sions de no s asse m b l ées qui a v aien t po ur obj et

Q de pro h iber ou de restreindre ce t exécrable co m

m erce E t pou r que ce t assemb l a ge d h o r re u r s soit


il exci t e les po p u l a t ions d esc l a v es a se


.

fl complet

â l e v er en armes au mi lieu de nous a fin d ac h e t er la


,

li berté don t il les a pri v és par le meur t re de ceux


,

fl auxqu els i l les a imposés leur v endan t ainsi au pri x

â de l assassina t ce t te liber t é dont il les a dépo ui ll és


,

â par un crime .

C e paragraph e de Jefferson dans ses m émoires


f u t re t ranc h é pour plaire a la Georgi e et à la ! a
,

r o l in e d u Sud Quant à mes co ll ègues du N ord


aj ou t e t il ils furen t aussi b l essés de ma censure ;
.
,
- —

car encore bien qu i l s n e u s s ent pas beaucoup


,
’ ’

d escla v es i l s en étaien t grands m archands pour


,

les au t res !
,

L e s É t at s du S ud firent do nc du maintien de l esclavage


la condition s i n e q u a n o n de leur entrée dans l Uni o n ; ’

il fa l lu t y souscrire sous p ein e de renoncer à établir


,

cette Union pour laquelle o n avait versé tant de sang .

LE S M I L IC E S ’
E T L A RM ÊE P E R M A NE NTE A UX ÉT AT S —
UN SI .

A côté de l armée permanente il y a aux É t ats Unis



-

c omme en France mais avec des pro por tions r en


, ,

ve r sées la garde na t ionale appe l ée mi l ice Les m i


,

, , .
246 A PP E N DIC E
lices sont organisées par régiments chaque r égi ment
é t an t compo sé d un s eul b a t ai ll o n et commandé p a r
,

u n co l one l un lieu t enan t colonel et un maj o r selon —

l a tradi t ion a n glaise Co mme en France t ous les ci


, ,

t o y en s en pr i ncipe fon t par t i e de la garde na t ionale ;


.
,

m ais de m ê me que c h ez nous le nombre des mil i


, ,

c i e n s eff ec t ifs c est à dire armés équip és e t p o u r v u s


, ,

d un rudimen t d ins t ruc t ion mili t aire se réduit pa r


, ,
’ ’

l e fai t aux gens de bonne volo n t é Ces mi l i ces en c e


, ,

qui concerne l eur o rganisa t ion leur armement et leu r


.
, ,

service ( en t emps o rdinaire ser v ice g ra t ui t bien en


,

tendu ) ne dépendent pas du go u v erneme nt fédéral


, ,

m ais uniquem ent d e s go uverne u rs pa rt iculiers des


,

É t a t s E ll es on t d ailleu rs t o us leurs o fficie r s no mmés


à l é l ec t ion
.

Quand le go uvernemen t fédéral a b es o i n pou r u n


.

ser v ice de guerre d e mo biliser u n co rps de m i lice il


,

adres se u n e réquisi t io n à l un o u ap lu s œ u rs des É t ats


, ,

s

Chaque É t a t mobi l ise alors u n cer t ai n nombre d e ré


.

g i m e n t s qui p a s s an t pour u n t emps sous l es o r d res


du présiden t reçoi v ent du go u v ernement fédé r al u n e
, ,

solde e t des pres t a t ions en na t u r e œ l c u lé e s p ar p a


,

r e n t hès e sur un pied fort é l e v é I l es t à remarque r


,

t ou t efoi s q u e si le nombre des régi ments mob i l isés


.
, ,

par un E t a t l e com por t e l e gouverneu r de ce t E ta t


.

( c h ef é l u d u p o u v o i 1 exécu t if) in v es t i t un ci t oyen


,

que l conqu e du g rade de généra l e t l ui donne le c o m


mandemen t d u con t ingen t de son E t a t Comme ce c i
,

toyen aussi t ôt que l es m i l ices re t o urnen t dans l eu r s


.

foyers rentre lui m ême dans l a v ie privée ne gardant


,

de ses fonctions qu un t i t re honorifique on comp r en d


, ,

d où provienn en t ces nombreux généraux qu e l on


,
’ ’

rencon t re aux E ta t s Unis d ans t ou t es les carrières o u


.

p rofessions civi l es p armi les m édecins les avo cats


les négo cian t s e t même les p as t eurs
, , ,

A u ssitôt qu e l armée du sud qui en 1 86 1 n était


.

’ ’

, ,
2 48 A PP E N DIC E
f u t admis en principe qu ils seraient tous au cho ix

du président d e la R é publique et pr i s pa r mi l uni


, ,

v er s ali t é des citoyens sans au t re condi t ion que celle


,

d un e xamen préa l able Vo us v oyez p a r l à e n al l ant


,

au fond des choses que ce que l es E t a t s Unis se sont


.
,

t ro u v é s dans l obliga tio n de fai re o u d u moins de


,

t en t er ç a é t é de fo rmer un e armée de même force


,

que l armée franç aise e t d une co mposi t io n analogue


,
’ ’

e t d en impro v iser to us les élémen t s personne l s et


,

ma t ériels aussi bien q u e les élémen t s moraux dans


l espace de quelques se maines A fin de se rend r e
,

comp t e d e la grandeur d un parei l effor t e t d en pré


.

’ ’

j uger les résul t a t s il faut se ra p pe l er que pou r un


en ta nt e m e n t semblab l e nous avons mis quelque chose
, ,

comm e 7 0 ans ; notre organisation m i l i t aire actuelle


,

ob j et d envie et d admira t io n po ur l E u r o p e étant à


,
‘ ’

tou t prendre le p ro dui t d une t radi tion n o n in t e r


, ,

rompue de dépenses i m menses d h ab it u de s i nv é t é ’

rées dans les mœurs les lois et l administra t ion enfin


,

d une série d expériences qui r emontent au mo i ns


, ,
’ ’

j usqu a la R é volu t io n française .

LE S m an s aux ÉT AT S -UN I S R É P UB L I C M N S

ÉM C A
.

ET D O R TE S .

Les d eux g r ands partis qu i se divisent l A mé ri qu e ’

du nord remontent à l origine de la C ons t i t ution m ê me ’

Les É t a t s Unis dit M To cquevi l le forment u n e


.

ins t i t ution co m p l exe ; o u y rem arque deux société s


.
, ,
A PP E ND IC E 2 49

e ng agées ou plutôt emb oî t ées l une dan s l autre O n y ’ ’

voi t de u x gou v ernements com plé t ement sé p arés et


.

presque indépendan t s : l un h a b i t uel e t i n d é fi ni qui


répond aux besoins j o u rna l i ers de l a socié t é l au t r e ’

excep t io n ne l e t circonscri t q u i ne s a p p l ique qu à cer


,
’ ’

tains in t ér êt s généraux sous l a fo r me fé d é ra l e qui se


trouve dans l a Cons t i t u t io n e t qui a p aru la d ernière
,

Le gou v ernem en t fé déra l es t une exceptio n le g o u


.

v e r n e m e n t des É t a t s es t la règ l e comm une


,

Les causes qui manquèren t de faire avor t er l U n i o n


€J
.

des É t a t s qui a v aien t conquis l eur indé p endance


subsi s t en t après l a pro m ulga t ion de l a Cons t i t u t ion D e
l a d eux grands par t is qui se par t a ge n t l e po u v oir qui
.

s a p p e la i en t au t re fois F éd é r a l i s t e e t D é m o c r a t e et qui
,

se no mmen t a uj ourd h ui R ép u b li ca i n e t D é m oc r a te

E n 1 7 89 quand l a Cons t i t u t io n en t re en v ig u eur


.

nous trouvons Wash i n g t on prési d en t chef du par t i


, ,

fédéra l is t e du parti qui v eu t un go u v ernemen t cen


, ,

t ral for t capab l e de résis t er à l é t ranger et donnant


,

le spec t acle d un des p l us grands po u v oirs de la terre


,

Un de ses minis t res qui fu t plus t ard aussi présiden t


.

J eff erson chef du parti démo cra t ique voyai t dans


,

l extension du pouvoir cen t ral un danger pour la


, ,

liber t é du peuple dans chaque É t at et le ge r me de


leur des t ruc t ion .

E n 1 8 6 1 les m êmes partis sont en présence


Les r ép u bli c a i n s so us l a présidence de Lincoln font
.
,

prédomi ner la do c t rine de l a supériori t é de l Uni o n ’

sur les É t ats e t défenden t ce t te idée que l es É t ats ne


peuven t au no m de leur so uveraine t é attenter à la
liberté h umaine ; en face d eu x les d ém oc r a t es au ’

no m de la l iber t é des É t ats et du texte de la C o n s t it u


tion réclament l i mm u nité pour leurs i nstitutions pa r

t i c u lière s
y a bien enco re d autres di ff é r ences entre les
.


Il
deux p artis qui suivant les circonstances leur ont
, , ,
2 50 A PP E N DIC E
fai t don n er les sobriquets oub li és auj ourd hui m ême ’

a N e w Yo rk e t à W a shin g t on : N u l li i e r s F r ee s o i /
,

/
— -
,

l e r s L o c o o o K n o w N o t h i n g N a t i v e A m é r i ca n s — —

Les D émocra t es exa lt aien t l É t a t par ticu l ier aux d é


, , , .

pens de l Uni o n les R épub l i cains sou t enaien t l Uni o n


’ ’

aux dépens de l E t at par t icu l ier L a nn exio n de nou


,
’ ’

v eaux t e r rit o re s é t ai t deman d ée par les premiers pour


.

é t e n dre l esc l a v age par l es au t res pour l y pro scrire


’ ’

Ceux ci appe l aien t de t o us leurs v œux l émigra t ion eu


.
,

-

r o p é e n ne e t acco rdaien t t ous le s droi t s po l i t iques aux

n ou v eaux v enus dès l e j our de l eu r a rr i v ée ; ceux l à -

au con t raire n e reconnaissaien t de dro i t s po l i t i ques


,

qu au x individus nés sur l e so l et vou l aien t garder


,

to us l es a v an t ages de l a cons t i t u t io n américain e po ur


,

les A méricain s
E n fi n l es R é pub licains en m aj ori t é d ans le nord
.

essen t iellemen t manufac t urie r é t aien t pro t ec t ionnist es


,

pour d e fendre l indus t rie ind i gène con t re l es fabriques


,

é t rangères t andis que l es Démo cra t es d u sud pays de


grandes cu lt ures demandaien t à éc h an g er l i b rement
, ,

les p rodui t s d e l eur sol fécond con t re les m ar ch an di


,

ses impo r t ées d E u r o p e ’

Si la doc t rin e du droi t des É t a t s a par deux fois


.

fai ll i faire sombr e r l U n io n l a première après l a pai x ’

de 1 7 8 3 l a seconde p ar c e qu e ll e co u v ra i t de sa pro
,

t e c t i o n l esc l a v a ge i l fau t prendre garde de t om b er


,

dans les ex t rê m es de la do ctrine o ppo sé e L e x c ès


,

d e l a c en t ralisation serai t mo r t e l po ur la l iber t é aux


.

Et at Unis s —

L ab o li t i o n de l esclav age a fai t p o u r jam ais dispa


.

’ ’

raî t re la cause de disj onc t io n qui existai t ent re le


N o rd e t le S ud et la po ssessio n du droi t de su ff rage
garan t it défini t i v emen t l a ff ran ehi con t re l a p o s s ibi
,

l i t é d ê t re rédui t de no u v eau en ser v i t ude ; i l ne


faut pas q u e le congrè s s a v ance plus loin q u i l ’ ’

fait dans
252 A PP E N D IC E
n aient p as tu é avec lui la clémence et décidé au l i eu

de la paix qu il voulait la paci fica t ion par la fo r ce !)


,

ce t ho m me demeu rera dans l a t rad i t ion de sa pa t rie et


,

d u monde en qu e l q ue sor t e le p euple incarné la


,

dé mo cra t ie m odern e e l le m ê me
.
,

I l fa ll ai t donc le sang d u j us t e pour sceller le g r and


.

œ u v re d émancipa t ion que le san g du j uste a v a i t inau


g u r é ! La t ragique his t oire de l abo l i t ion de l escla v age


’ ’

ou v er t e a v ec le gibe t de J ohn Brow se ferme r a s ur


l assassina t de Linco ln
,

E t m aintena n t qu il repose auprès de Washi n gton


.

c om me l e second fonda t eur de l a grande républ i que !


,

Tou t e la dé mo cra t ie euro péenne es t présen t e en


espri t à ces funérai ll es co mm e el l e a vo t é d u c œ u r
p our sa réé l ec t ion e t a p pl audi à la v ic t oire dans le
,

sein de laque l le il es t enseve l i Tout en t iè r e e l le vo u


dra s asso cier au m onumen t qu e l A m é r iq u e l u i
.

’ ’

élè v era sur le Capitole de l es c lavag i s me abat t u ’


.

A la mêm e date M H enri M a r tin p i m it ai nsi


. s ex

r a

dans le S i è l c e

Les É t a t s Unis on t fai t une p erte i r réparable et il


faudrai t remon t er j usqu à Washing t on po ur trouve r


,

un ci t oyen qui ait rend a la grande répub l ique amé u

ricaine au t an t de services que le noble et mal h eureu x


Président qui vien t de tomb e r sous les coups d ’
un

misérable assassin M Lincol était né en 1 8 09 ; i l n

encore et cependant o n p eut d ir e qu il n y


. .

’ ’
é t it j a eu n e

eut j amais de carrière d homme d état mieux r e mpli ’ ’


e

O n t rou v ait chez lui à défaut des quali t és trop b ri l


.

l n t es dont on fait trop de cas en E u r op e ces olides


,

e ,
s
A PP E N DIC E 253

v ert u s du citoyen et ce r obus t e bo n sens qui semblent


ê t re le pro p re de la race a méricaine L his t oire en e ffet

di r a avec quelle ferme t é e t en même t emps a v ec


.

quelle modération il a su diriger la poli t ique de l U ’

n ion dans les circons t ances les plus diffici l es et sans


reco urir a des lois d exception et sans s ar m er d un
,
’ ’ ’

pouvoir dictatorial t ra v erser v ictorieusemen t une crise


,

O ù son pays pou v ai t


,

L A m é ri q u e conser v e ra le sou v enir de Linco l n au


même t i t re que ce l ui de Washing t on ; e l le asso ciera ces


deux noms dans sa reconnaissance car si l un a fondé

l union l aut r e l a empê c hée de périr


,
’ ’ ’
.
,
2 56 T ABL E DE S M IÈR S AT E

I ll g él t l C l am p a d e 1 858 A Li n co et S te
h D gl
. ne ec o ra e . . n

l t r é t ll A h m l
p en ou as

I V 1 860 E e c i o n p s i den i e e b ra a Li n co n e s t
é t
. . .

élu p r s ide n
V Sé Vyg l S gfi l à
.

c e s s io n o a e d e Li nc o n d e prin e d
W h gt Cmlt lt m
La .
.

p o d e Ba i o r e
I g t
a s in
C tt t
on o

VI n au u ra i o n d u 4 m a r s 1 86 1 o n s i u i o n d es

Ét t U i Ph l h l l v g
.
.

i o so p ie de es c a a e

a s n s . .

T RO S I I EM E P A RT E I .

AB RAH M A IC
L N OLN PÉ R S I DE N T DE S ÉA T I
T S - UN S .

I Pé rat i fs d e g
o rc e s et r e s s o u r ce s r e s F
tt gé é l
.
pa r u er r e .

p e c t i v e s d es E a s d u N o r d e t d u S u d Le n ra .

L ee
gé é l ltq g
.

I I La p o i i u e e t l a Le M a c - C l el
t èg t tà
. u e r re n ra .

lan E m a n c i p a i o n d e s n r e s a p p a r ena n des re


l
.

b e le s
I IIA h l à Mi l h
bra am Li nco n la a s o n B anc e

C t g l t g
.

IV o m m en ran d p eu p e c o n du i ran de

g vl t fé é hé t
. un u ne
Les o o n a ir es e t le s d r au x T â re
g é t lt j
u erre .

d e l a u er r e O p r a i o n s m i i ai r e s Un o u r d e
è t g
. .

p r i r e s et d a c io n s d e râ c e s

V l t é t ll t
.

E e c i o n p r s i d e n i e e d e 1 8 64 L e s r o i s C o nv e n
t l Cl ll
. .

io n s L i n c o n o u M ac
C g Sh é gi
. e an .

VI a m p a ne d e er m a n e n G o r C ap i t u l a h o n
gé é l A lt
. e .

du n ra L e e b o i i o n d e l E s c lav a g e

I G
.

EP LO UE

A PP E N D IC E .

t
I I n r o d u c i o n d e e s c a a e au x É a s t l lvg tt U
l é

. nis —
.

I I Le s m i i c e s a m ri c a i ne s
t tt U i é t
.

I I I L e s p ar i s au x E a s - n s
. D m o c r a e s e t Ré p u .

b l i c ai n s
g f
.

I V H o m m a e s r e n d u s p ar l a p r e s s e r an ç a i s e à l a m é
l
.

m o i r e d A b r aha m L i nco n

.

C O UL O M M I E R S . T yp A . M O US SI N
A LA M ÊME L BRI AIRIE

E D W A RD L E E C H I L D E L g é é l L e s a v ie e t s e s c a m p a
e n ra e ,

O u v ra g e a c c omp a g n é d un por t ra i t e t d e d e u x
.

g nes
r te s
.

ca .
'
1 v o l i n 18 jé s u s b ro c h é
.
-
,
3 fr 50 . .

M In c L E E C I
H L DE . L e g é né r a l L ee , a vc
e un por t rai t e t d eu x
ca r te s . 1 vo l . i n - 3 2, b roc h é . 50 c .

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