Vous êtes sur la page 1sur 193

Drève Richelle, 159 - 1410 Waterloo

www.renaissancedulivre.be
Renaissance du Livre
@editionsrl

Manuel du savoir-vivre contemporain


Philippe Lichtfus

Couverture : Renaissance du livre


Dessins : Jacques Sondron
Imprimerie : V.D. (Temse, Belgique)

ISBN : 978-2-50705-668-1
Dépôt légal : D/2020.12.763/01

© Renaissance du Livre, 2020


Tous droits réservés. Aucun élément de cette publication ne peut être repro­
duit, introduit dans une banque de données ni publié sous quelque forme que
ce soit, soit électronique, soit mécanique ou de toute autre manière, sans
l’accord écrit et préalable de l’éditeur.
Philippe Lichtfus

MANUEL DU
SAVOIR-VIVRE
CONTEMPORAIN
L’art de la sociabilité
intelligente
À mon fils Thaddée
et à mes étudiants à Paris
En mémoire de mon père
et du professeur Overloop
Table des matières
Avant-propos11

Les salutations et les présentations 19


Quelques règles régissent la manière de saluer 19
Qu’en est-il des présentations ? 20
À l’oral 21
Les formules de politesse  22
Mais…23
Être opportun 24
Les détails qui tuent 24
Les mains 26
La bise 29
Le baisemain 30
La révérence 33
Les appels  35
État38
Diplomatie43
Académique – Liés aux diplômes et aux métiers 45
Armée47
Religieux50
À propos de la noblesse 53
Les appels  64

Les prédicats 69

Vouvoiement et tutoiement 71

Quelques détails de langage 75


Et aussi… 82

Ce qu’on ne dit pas... 85


Quelques astuces 89

La proxémie 91

Courrier, courriel et texto (SMS) 95


Courrier95
L’enveloppe102
Courriel107
Texto (SMS) 108

Inviter109

Répondre à une invitation 113


Remercier115

Recevoir chez soi 117


Le cadre 119
La musique  120
Votre tenue 121
Les heures 122
Le menu 124
Les boissons 125
Le choix des invités 126
Le placement à table  128
La fin de soirée 129
Les détails qui tuent 130

L’art de la table 133


La nappe 134
Les assiettes 136
Les couverts 137
Le(s) couvert(s) à salade 139
Et le foie gras... 142
Le porte-couteaux 142
Les verres 144
L’assiette à pain 145
La serviette 145
La décoration 146
Les bougies 147
Les autres ustensiles 148

Être reçu 151


Répondre à l’invitation 151
La tenue 152
Présent ou pas ? 153
Le cocktail 157
Déjeuner ou dîner dans la sphère privée 158
Quelques petits détails 167
Au restaurant  169
Recevoir au restaurant  169
Être reçu au restaurant 170
Plus simplement 171
Et quand vous arrivez en couple... 171

La conversation  173
Un détail important : le téléphone portable 176

À propos des tenues 177


Tenue de ville pour les hommes 181
Et pour les femmes 187

Conclusion189

Remerciements191
Avant-propos
Souvent, lorsque certaines personnes parlent de moi
à travers mon métier, ils disent que je suis « professeur
de bonnes manières »... Vous n’imaginez pas à quel
point cette définition a le don de m’irriter. En effet,
chères lectrices et chers lecteurs, je ne suis ni Nadine
de Rothschild, ni la baronne Staffe, pour les nommer
par leur nom d’auteure, ni les innombrables autres qui
se sont consacrés à écrire sur ce sujet trop souvent, à
mon goût, destiné « à l’usage des gens du monde », ce
qui me fait quelque peu sourire aujourd’hui. Je respecte
ces auteurs pour leur travail et parce que, parmi eux, il
y a des références certaines pour leur époque respective,
mais nous avons évolué vers un monde bien différent.
Si vous êtes un intégriste de l’étiquette tradition-
nelle, je préfère vous prévenir : je ne vais sans doute
pas répondre à vos attentes. Je me positionne comme

11
Manuel du savoir-vivre comtemporain

réformateur suite à de nombreuses observations dans


des milieux sociaux très différents les uns des autres.
Mon expérience est de les avoir réellement fréquentés
dans leur intimité et dans leur vie publique. J’assiste – et
reçois beaucoup également – à des déjeuners, cocktails et
dîners, dans certaines familles royales, chez des membres
élus au pouvoir à tous les niveaux, des aristocrates, des
diplomates, des intellectuels de tendances multiples, des
nouveaux riches, des paysans, des artisans, des bourgeois
et bien d’autres encore appartenant à plusieurs strates de
la population et dont l’énumération complète n’a pas
vraiment d’intérêt pour ce livre.
J’ai été bercé d’illusions, comme la plupart d’entre
nous, pour finalement me rendre compte que la réalité
est très souvent bien plus subtile que l’image donnée ou
que nous nous faisons des autres.
Je ne suis pas en train de jeter un pavé dans la mare,
mais simplement d’essayer de vous amener à une vision
des réalités du « vaste monde1 » et non plus du seul milieu
auquel s’adressaient ces livres destinés « au monde », ce qui
signifie en clair la « bonne société ». Définie par elle-même
de la sorte, cela veut dire « haute société » en langage plus
populaire, ce qui au XXIe siècle est fortement à revoir. En
effet, nous vivons une époque pleine de renouveau et à
la fois très déstabilisante. Quasi tout est possible. L’infâme
peut se retrouver aux plus hautes fonctions, l’ouvrier peut
se raffiner et le descendant de haute lignée sombrer au pays

1. Expression tirée du livre de Bertrand Buffon, Le goût de la politesse.


Petit précis des bonnes manières à l’usage du vaste monde, Éditions Transboréal,
2008, que je vous conseille vivement.

12
Avant-propos

des « pignoufs ». (Vous verrez par la suite, c’est un mot que


j’affectionne particulièrement.) Je vous rassure, il reste des
grands seigneurs et des grandes dames dont le raffinement
est sans faille, mais ils se font plutôt rares...
L’image ne renvoie plus à des réalités établies comme
autrefois. L’éducation n’est plus typique de certains
milieux. Nous éprouvons de plus en plus de difficultés
à étiqueter ceux que nous rencontrons. Faut-il encore
les étiqueter d’ailleurs ? Les différents milieux ne se défi-
nissent plus comme du temps de nos parents et encore
moins de celui de nos grands-parents. Ils se confondent
de plus en plus, du haut vers le bas et du bas vers le haut.
Je ne décris ici que leur évolution sociale, mais ils bougent
également de droite à gauche et de gauche à droite,
empreints d’un multiculturalisme de plus en plus présent.
Les bonnes manières en vigueur il y a cinquante
ans peuvent ressembler étonnamment à des mauvaises
manières pour certaines jeunes générations.
Savez-vous que la plupart de ces codes, qui sont encore
enseignés aujourd’hui, nous viennent du XIXe siècle ?
Moment de l’histoire que je n’affectionne pas parti-
culièrement, surtout pour le sujet qui nous occupe.
Quasi rien n’a été revu pour toutes ces femmes qui tra-
vaillent désormais ; on a l’impression qu’elles attendent
toujours leur mari à la maison... et on continue à donner
des cours sur ce qu’on appelle archaïquement l’« éti-
quette2 » comme si elles ne travaillaient toujours pas.

2. L’étiquette est née avec les règnes de Charles Quint et François Ier au
tout début du XVIe siècle. Elle constituait un ensemble de règles strictes
pour gérer le comportement de la noblesse au sein des différentes cours.

13
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Ne pensez-vous pas que cela change les rôles dans de


nombreux cas ?
Elles sont aujourd’hui actives, responsables et auto-
nomes, ce qui leur confère une position sociale très dif-
férente. Je ne revendique aucun mouvement sexiste ni
dans un sens ni dans l’autre ; je m’efforce simplement
d’observer et d’équilibrer les choses, en tout cas dans
mon domaine de compétence.
Je souhaite à travers ces quelques pages vous montrer
à quel point nous véhiculons toujours la poussière de la
non mise à jour du comportement bienséant. On ne peut
plus vraiment considérer une bienséance établie et réfé-
rentielle, mais de nombreuses bienséances en fonction
de l’âge, du sexe, du lieu, du pays et du milieu, etc. J’ai
lu beaucoup d’écrits traitant de l’étiquette, des bonnes
manières et du savoir-vivre, mais ils m’amènent à consi-
dérer, en comparaison à tout ce que l’évolution m’offre
d’analyser, qu’ils ne sont plus vraiment d’actualité.
La connaissance des règles encore utiles est impor-
tante, mais il est encore plus important à mes yeux de
savoir intelligemment s’en éloigner quand c’est néces-
saire. Celui qui ne les maîtrise pas fait n’importe quoi
et cela se remarque vite. Cependant, celui qui les maî-
trise est approprié partout et en toutes circonstances.
Gentleman dans les milieux raffinés, il est également à
l’aise avec tous les autres, qui représentent l’immense
majorité des habitants de nos pays.
Pour cette immense majorité et également d’autres,
je pense notamment à ceux qui restent persuadés d’ap-
partenir à l’élite de notre société, la plupart du temps en

14
Avant-propos

contemplant le passé de leur famille et en oubliant de


se réaliser eux-mêmes, j’ai décidé de vous proposer un
manuel de l’étiquette contemporaine, ce qui, je pense,
devrait faciliter et éclaircir le comportement en société,
mettre à l’aise, et faire appel à votre propre sens de l’ob-
servation et à votre bon sens, votre application des règles
avec mesure et élégance, dans le respect de vous-même
avant tout et des autres que vous rencontrez.

15
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Nous vivons une époque dans laquelle la commu-


nication est plus présente et plus importante qu’il y a
vingt ans, même si ce terme, je le concède volontiers, est
très galvaudé et parfois, trop sans doute, hypocritement
utilisé.
Communiquer en société aujourd’hui, ce n’est pas
montrer qui nous sommes ou ne sommes pas, c’est par-
tager. Le partage dont il est question ici, c’est faire appel
à votre connaissance de vous-même et de l’autre afin
d’utiliser intelligemment les codes adéquats, tant ver-
baux qu’écrits, gestuels, vestimentaires et d’image au
sens large.
Le raffinement actuel, ce n’est plus être tiré à quatre
épingles, comme on dit, en permanence et incarner
une éducation bourgeoise, voire aristocratique, parfaite,
c’est bien au contraire être vous-même et adapté aux
circonstances. Ce n’est plus être polissé, comme on nous
l’a enseigné si longtemps, c’est savoir dire « non » claire-
ment et avec fermeté. Répondre « non » par un sourire
et un signe de la tête acquiesçant l’affirmation qui ne
vous plaît pas est malsain, sauf si des circonstances supé-
rieures le réclament.
Ce que nous ne disons pas dérange beaucoup plus
que ce que nous disons. Notre intuition semble plus
éveillée au XXIe siècle. Même si elle est encore trop peu
maîtrisée, nous ne pouvons continuer à évoluer comme
si elle n’existait pas.
Dans les pages qui suivent, je reprends en grande par-
tie les conventions habituelles, tout en me permettant
d’en actualiser, voire d’en supprimer, un certain nombre.

16
Avant-propos

Je ne nivelle en aucun cas les règles du savoir-vivre vers


le bas. Bien au contraire, à travers un langage que j’espère
et souhaite simple pour tous, j’essaye de leur rendre leur
noblesse dans les circonstances où elles ont leur place.
Je me base sur le savoir-vivre culturel occidental prin-
cipalement francophone, en étant bien conscient que
les frontières de sa pratique sont beaucoup plus larges
aujourd’hui. J’essaye, tout en me nourrissant de nos
racines européennes, d’y apporter une dimension plus
universelle.
Je m’occupe essentiellement de notre époque
contemporaine. D’autres ont admirablement écrit sur la
politesse, l’étiquette et la bienséance dans l’histoire et
la philosophie. Je n’ai absolument pas la prétention de
pouvoir faire mieux.
Je propose ici simplement un livre clair, en langage
direct et franc, qui décrit les choses telles qu’elles sont
dans la réalité pratique et non dans la théorie quasi
jamais remise à jour, même dans les dernières éditions de
certains guides protocolaires et les services de protocole
officiels de différentes institutions.
Je me refuse à décrire les milieux sociaux par leurs
différentes caractéristiques établies autrefois ; cela ne
répond plus à leur évolution actuelle. Tout change ! Je
me garde également bien de commenter ces change-
ments, cela ne m’appartient pas. Je constate des milieux
raffinés et instruits, d’autres moins et encore d’autres pas
du tout. Je me contente du rôle d’observateur et propose
de mettre une expérience réelle au service de celles et
ceux qui souhaitent s’élever vers une forme naturelle et

17
Manuel du savoir-vivre comtemporain

intelligente d’humanisme de la communication sociale


dans le premier quart du XXIe siècle.
À travers la recette mêlant connaissance, observation,
analyse, intelligence, action mesurée et juste, élégance,
respect et bienveillance, je suis convaincu que nous pou-
vons trouver un bel équilibre pour communiquer.

18
Les salutations
et les présentations
Quelques règles 
régissent la manière de saluer
La première règle dit que c’est d’abord à l’homme de
saluer la femme. C’est à la femme ensuite de tendre la
main à l’homme ou non.
La deuxième prend le dessus sur la première : c’est
celle de l’âge. En effet, quel que soit le sexe, c’est la per-
sonne la plus jeune qui salue la plus âgée. Seule la plus
âgée tend la main ou non.
Il existe encore une troisième règle qui supplante les
deux premières : celle de la hiérarchie.
Donc, en principe, une dame plus âgée salue en pre-
mier un jeune député de quarante ans, par exemple. À
son tour, celui-ci décide de lui proposer une poignée de
main ou non.

19
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Cette trilogie est toujours en vigueur pour l’art des


salutations. Toutefois, dans la réalité, les choses se passent
très souvent différemment. Les gens n’y pensent pas
nécessairement, et cela se déroule de manière beaucoup
plus naturelle et spontanée.
Tant mieux, devrais-je dire, mais attention, il existe
des circonstances dans lesquelles il est préférable de
connaître ces principes afin de ne pas créer d’impair ou
vous faire passer pour un pignouf.
Je le répète plusieurs fois dans ce livre : lorsqu’on
connaît les règles, on peut décider de les appliquer ou
pas, avec mesure et discernement. Lorsqu’on ne connaît
pas ces mêmes règles, on est souvent livré à de l’impro-
visation plutôt malheureuse.

Qu’en est-il des présentations ?


Celle ou celui qui présente deux personnes entre elles
présente l’homme à la femme, ou encore la personne la
moins âgée à la plus âgée, ou encore la moins importante
à la plus importante. On suit les règles de salutations.
Vous rencontrez certainement des circonstances par-
ticulières dans lesquelles vous avez des difficultés à appli-
quer ces codes à la lettre, alors faites appel à votre bon
sens, agissez avec mesure et naturel. Dans d’autres cas,
éloignez-vous et évitez d’intervenir...
Il peut également vous arriver de vouloir présen-
ter deux personnes et d’oublier leur nom au dernier
moment, ce qui peut provoquer un malaise, de la gêne

20
Les salutations et les présentations

ou encore de la vexation. Si c’est le cas, il y a des moyens


pour échapper au pire. Par exemple, il est trop tard et
vous ne pouvez plus reculer, alors allez-y au culot : « Mais
suis-je distrait, vous vous connaissez déjà ! », « Mon cher
ami, je te laisse te présenter tout seul ! », « Je vous laisse
vous présenter, on m’appelle ! », etc.

À l’oral
On dit « Bonjour Monsieur » ou « Bonjour Madame ».
On ne dit pas « Bonjour Monsieur Trucmuch ». Ceci
est acceptable uniquement envers votre « patron(ne) »,
selon les règles de politesse, et est toléré pour la cour-
toisie commerciale (grands hôtels, grandes enseignes du
luxe, etc.). C’est une manière de reconnaître, réconforter
et fidéliser le client. C’est un choix qui réclame de la
vigilance malgré tout, surtout si votre client ne vient
pas toujours accompagné de la même personne, par
exemple.
Je dois avouer que je trouve que cette restriction
devient quelque peu désuète et commence à prendre
sérieusement la poussière... Cette manière d’appeler, il
faut tout de même le reconnaître, est intelligente et rem-
plit bien son rôle.
La France a légiféré sur le terme de « mademoiselle »
en 2012 et l’a supprimé administrativement. Dès lors,
à vous de sentir si vos interlocutrices l’ont abandonné
elles aussi ou si elles y tiennent. En tout cas, « mademoi-
selle » fait toujours partie de la langue française et plaît à

21
Manuel du savoir-vivre comtemporain

de nombreuses jeunes femmes qui ne souhaitent pas se


faire appeler « madame »...
On peut également dire « Bonjour » ou « Bonsoir ».
Il faut juste savoir à qui vous le dites. Certain(e)s le pré-
fèrent, d’autres le rejettent. Ce sont des formules qui
deviennent de plus en plus génériques. Elles sont moins
formelles et plus détendues.
« Bonjour » ne veut plus dire « Bonne journée », mais
« Je vous salue ». C’est devenu du second degré. Il en va
de même pour « Comment allez-vous ? », comme quoi
les mœurs changent. En réalité, il y a quelques siècles,
on s’informait de votre état de santé quotidien et cette
question renvoyait directement à la consistance, l’odeur
et autres qualificatifs de la déjection de l’interlocuteur.
Cela vous semble complètement trivial à notre
époque, mais cela ne l’était pas autrefois. Nous pouvons
donc parler de second degré dans son utilisation actuelle.
J’ose espérer que vous ne serez pas traumatisé la pro-
chaine fois qu’on vous posera la question...

Les formules de politesse


On entend très souvent deux personnes se dire
« Enchanté ». Sachez que cela ne se dit pas. C’est bien du
français, mais la politesse n’aime pas les raccourcis. On
dit : « Je suis ravi de vous rencontrer », « Je suis heureux
de faire votre connaissance » ou encore « C’est une joie
d’enfin pouvoir faire votre connaissance », etc.

22
Les salutations et les présentations

Mais…
Imaginez un seul instant arriver dans un groupe
dans lequel toutes les personnes présentes vous disent
« Enchanté », allez-vous vous démarquer en utilisant une
formule de politesse juste ?
Je ne le conseille pas. Dites : « Enchanté » également
ou « Moi de même » ou « Tout le plaisir est pour moi »,
communiquez sans heurt. L’inverse reviendrait, d’une
certaine manière, à vous différencier consciemment ou
inconsciemment de ces personnes.
Vous pourriez également, de la même manière, les
mettre mal à l’aise en leur faisant remarquer de la sorte
qu’elles ne sont pas polies ou que vous êtes mieux
qu’elles, ce qui ne me semble pas non plus être la
solution.
Dès lors, sachez utiliser les formules adéquates lorsque
l’usage le réclame et surtout si vous êtes le premier à
vous lancer (pas toujours non plus en fonction des
circonstances...).
La plupart du temps, vous devrez user de la commu-
nication sociale intelligente, celle qui fait de quelqu’un
qu’il communique intelligemment. N’est-ce pas là l’es-
sentiel finalement ?
Ceci exprimé, je constate que « Enchanté » se répand
de plus en plus, même chez les seniors appartenant
aux milieux raffinés. À vous de voir... Il faut dire que
ce terme devient générique et sort tout doucement du
cadre de la non-politesse.

23
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Être opportun
On salue quelqu’un lorsque la situation le permet.
On n’abrège pas la conversation des autres pour saluer
un des interlocuteurs. On n’interrompt pas son patron
avant de partir pour lui souhaiter une « Bonne fin
de soirée » (par exemple, s’il parle avec une personne
importante), même s’il est l’hôte de la soirée. Écrivez-lui
dans ce cas un e-mail pour le remercier et lui expliquer
brièvement que vous ne pouviez le faire en quittant la
soirée. La règle est de surtout ne pas être inopportun.
Il y a également des personnes qu’on ne peut saluer
de son propre chef, sauf si vous êtes très connu, occupez
une fonction importante ou avez une forte personnalité.
Parfois, il faut savoir se faire présenter ou user de subter-
fuges (toujours élégants bien entendu).

Les détails qui tuent


Lorsque vous vous présentez, n’oubliez jamais d’énon-
cer d’abord votre prénom, puis votre nom.
Il en va de même lorsque vous présentez quelqu’un
d’autre. C’est vraiment important ! Le nom de famille
précédant le prénom est réservé à l’administration.
Il y a trois erreurs à ne jamais commettre et qui vous
enverront directement au règne des pignoufs :

Bonjour, je suis Trucmuch Marcel NON

24
Les salutations et les présentations

Bonjour, je suis Monsieur/Madame Trucmuch NON


Bonjour, je suis Monsieur/Madame NON
Marcel Trucmuch

Bonjour Monsieur, Marcel Trucmuch, je… OUI

C’est valable en société, en privé, au téléphone, par


écrit et partout.
Les seuls titres ou grades acceptés devant vos pré-
nom et nom, énoncés par vous-même, sont ceux qui
répondent à des réalités tangibles aujourd’hui, donc
assortis d’une fonction réelle.

Je suis Marcel Trucmuch OUI


Je suis Monsieur Trucmuch NON
Je suis Monsieur Marcel Trucmuch NON
Je suis le docteur P. OUI
Je suis Maître P. OUI
Je suis le général L. OUI
Je suis le doyen L. OUI
Je suis le professeur L. OUI *

25
Manuel du savoir-vivre comtemporain

î Je suis le baron de L. NON


î Je suis l’ambassadeur de B. OUI
* Uniquement universités et certaines grandes écoles.

Cette liste n’est pas exhaustive, mais vous donne un


premier aperçu.

Les mains
Une poignée de main doit être franche, ferme et
mesurée. Elle doit aller jusqu’à la garde. Cela veut dire
que le creux entre le pouce et la main chez chacune des
personnes doit se toucher. Ensuite, il faut serrer avec fer-
meté sans pour autant écraser la main de celle ou celui
que vous saluez. Ce n’est, en principe, pas un ennemi...
Refusez de serrer la main de ceux qui vous tendent
un ou deux doigts. Cela arrive bizarrement de la part de
personnes appartenant à des niveaux professionnels plus
élevés que la moyenne, mais c’est d’une grossièreté sans
nom. Dans ce cas, soyez poli avec vous-même et refusez
d’attraper le ou les bouts de doigts, faites semblant de
rien ou tournez cela éventuellement en dérision. Nous
n’avons pas à accepter de qui que ce soit ce genre de
mépris...
Un homme m’a raconté que lorsqu’il était jeune, un
notable de province lui avait tendu son doigt pour le
saluer. Il avait attrapé ce doigt, l’avait observé intensément,

26
Les salutations et les présentations

puis lui avait demandé tout en le conservant prisonnier :


« Mais que voulez-vous donc que j’en fasse ? »
Je trouve cette réaction très drôle, mais je ne puis vous
conseiller de la reproduire lors d’un cocktail dans une
ambassade, par exemple...
Si on tend la main, il faut être en face de la per-
sonne, en posture droite et au moins croiser son regard.
C’est essentiel, le regard.Vous transmettez beaucoup plus
d’informations par lui qu’en racontant tout ce que vous
voulez.
Toutefois, ceci n’est pas forcément applicable avec
des personnes de culture différente : croiser le regard de
certains dignitaires étrangers, comme chez beaucoup de
princes arabes, ne se fait pas pour une femme. Si vous
allez au Japon, évitez de tendre la main pour saluer, cela
ne se fait pas non plus. À vous de vous renseigner au pré-
alable et, à défaut d’avoir pu le faire, d’observer et d’agir
avec intelligence et mesure.
Quant au regard, faites attention également de ne pas
trop ou trop peu en faire. C’est toujours une question de
discernement et de mesure. Je ne peux que vous pousser
vivement à exercer votre bon sens.
Se donner la main n’est pas une obligation ! Beaucoup
de circonstances le suggèrent ou l’imposent, cas dans les-
quels il est important de bien serrer la main. C’est, de
fait, devenu culturel en Occident.
Je pense toutefois qu’aujourd’hui, on pourrait parfaite-
ment saluer sincèrement du regard, avec un geste léger de
la tête vers le bas et sans geste de la main. Pourquoi pas ?

27
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Si c’est bien fait, naturel et adéquat, personnellement,


je l’accepte volontiers et le propose même pour des
situations précises, par exemple pour saluer discrètement
des personnes qui souhaitent garder l’anonymat, quand
on n’a pas pu faire semblant de ne pas les voir.
Une poignée de main se fait mains nues, on ne pro-
pose en principe pas une main gantée.
À propos, savez-vous d’où vient cette habitude de se
serrer la main ? Cela date du temps où les hommes por-
taient une épée fourrée du côté gauche. Tous les histo-
riens ne sont pas en harmonie sur les dates, mais nous
dirons au moins depuis la Renaissance.

28
Les salutations et les présentations

Lorsque deux hommes devaient se saluer, il fallait


montrer « patte blanche », donc une main non armée, et
se serrer la main droite, main qui servait à saisir son épée.
C’était la manière convenue pour permettre d’assurer
un moment de paix, aussi court fût-il...
Nous ne portons plus d’épée, mais la tradition a perduré
sans plus aucun sens originel. Cela évoluera peut-être éga-
lement. Dans beaucoup d’autres cultures, on ne se serre pas
la main et on a adopté des coutumes très différentes.

La bise
La bise pour saluer, ou les bises (deux, trois ou quatre,
en fonction des pays et des régions), reste réservée aux
situations non formelles. En principe, on ne fait la bise
qu’aux personnes que l’on connaît, ou dans le cadre
amical ou au sein des jeunes générations.
C’est à nouveau une question de circonstances rela-
tives et de bon sens, tout n’est pas noir ou blanc. Il faut
sentir le moment où cette attitude est la bienvenue et
les autres où elle ne l’est pas. La bise n’est toutefois pas
un dû et n’est pas imposable à tout le monde et à tout
moment. Elle reste, encore aujourd’hui, une forme de
faveur, si je puis dire, réservée aux individus avec lesquels
vous avez fait tomber le mur des conventions.
Il faut sentir ou apprendre à sentir les choses et agir
avec discernement. Dans le doute abstenez-vous... Je ne
parle pas ici des embrassades officielles bien évidem-
ment. C’est très différent et réservé à la solennité.

29
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Peu en font état dans les ouvrages consacrés à l’éti-


quette, mais de plus en plus d’hommes se font la bise
entre eux aujourd’hui, sans pour autant être homo-
sexuels. C’est un nouveau phénomène de société (pas si
nouveau, d’ailleurs) qui fait son chemin de plus en plus,
même auprès des personnes plus âgées.
A priori, j’aurais tendance à dire que cela suit les
mêmes principes que pour les personnes de sexes dif-
férents, mais malgré tout avec un peu plus de recul.
Certains, surtout chez les hommes, ne supportent pas
cette attitude de baiser la joue de leurs semblables ou
l’idée de recevoir cette bise.
Je propose dans ce cas précis de ne pas attendre uni-
quement que le mur des conventions tombe, mais éga-
lement que d’autres éventuels liens se tissent et surtout
que les choses soient naturelles.
À nouveau, agissez avec discernement...

Le baisemain
Venons-en au fameux baisemain...
Je vais sans doute en surprendre plus d’un, mais le
baisemain se fait encore et est même de bon aloi dans
certaines circonstances (de plus en plus rares, je vous
l’accorde).
Voici, en résumé, la règle qui régit cette pratique et
qu’on retrouve dans la plupart des ouvrages traitant du
sujet : on fait le baisemain uniquement à une femme

30
Les salutations et les présentations

mariée ou qui l’a été, dans la sphère privée ou sur le


parvis de l’église.
Lorsque j’observe certains chefs d’État faire le baise-
main, j’ai souvent l’impression de me retrouver dans un
film américain de seconde zone. C’est très surprenant,
surtout à un tel niveau de pouvoir, de n’avoir personne
pour être conseillé en la matière. Ils y vont comme si la
fonction les rendait élégants et parfaits, mais dérapent
bien souvent de manière malheureuse, ce qui les amène
à être populaires dans les bêtisiers de fin d’année.
La première règle, me semble-t-il, est de savoir le faire.
L’homme doit avant toute chose sentir si la femme qu’il
a en face de lui y est habituée et favorable. Avec sa main
droite, il prend délicatement la main droite de celle-ci,
l’élève légèrement vers lui tout en s’en approchant en
même temps. Il s’arrête avant de la toucher de ses lèvres.
En effet, on n’embrasse pas, lors du baisemain, la main
de la femme, ceci est réservé à l’intimité.
Attention aussi de ne pas succomber à la main trem-
blante d’une vieille rombière en manque d’attentions
qui vous la tendrait à un moment ou un lieu inoppor-
tun et de donner à ce moment-là l’image d’un manque
d’éducation aux yeux des autres, cela dans l’unique but
de lui faire plaisir.
Il y a fort à parier que vous passerez pour un pignouf
et non elle. Il suffit dans ce cas de rester très élégant et de
prendre simplement et délicatement cette main traîtresse et
de faire comme si vous saluiez normalement, avec un beau
sourire...

31
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Certains me diront que cet exemple est tiré par les


cheveux, mais personnellement, j’ai vécu cette situa-
tion et certains de mes amis également. Croyez-moi, les
« harpies » existent...
Pour en revenir aux règles de base, le baisemain se
fait, en effet, uniquement aux femmes mariées ou qui
l’ont été. Il faut, ceci dit, repenser ces règles, car que
faire désormais des couples pacsés, reconnus comme
tels fiscalement, après plusieurs dizaines d’années de vie
commune ? Et je ne vous parle pas des couples lesbiens
mariés...
Si vous avez un doute, abstenez-vous ou observez ce
que les autres font avant vous.
Si vous deviez ne pas l’avoir fait à une jeune dame
auprès de laquelle tout le monde se presse de le faire, il
vous sera toujours possible de lui faire remarquer délica-
tement que sa jeunesse vous avait trompé. Évitez dans ce
cas de le faire avec un regard trop soutenu et quelque peu
pétillant afin de ne pas vous attirer les foudres du mari.
Tout ceci n’est de bon goût que dans la sphère privée.
Je ne conserve pas l’idée du parvis de l’église, comme
dans certains ouvrages. Aujourd’hui, si tel était toujours
le cas, il faudrait y ajouter les parvis d’autres lieux de
culte afin de ne pas susciter des critiques.
De plus, cette pratique n’appartenant en général
qu’à certains milieux, il me paraît parfaitement inutile
de chercher à marquer sa différence en l’appliquant en
public.
Ceci dit, qu’est-ce que la sphère privée ? C’est
bien sûr chez vous ou chez les autres. Ce n’est pas au

32
Les salutations et les présentations

restaurant ni au bureau, et encore moins dans la rue ou


sur le trottoir devant chez vous.
On peut considérer qu’une soirée de gala et qu’un
dîner dans une salle privatisée font partie de la sphère
privée. J’ajoute également les stands des grands anti-
quaires à la biennale de Paris, par exemple, et d’autres
encore. C’est toujours une question de bon sens...
Il est admis qu’une femme propose une main gantée
à l’homme pour le baisemain, surtout dans le cas des
soirées où ces gants atteignent des longueurs parfois sur-
prenantes et deviennent difficiles à ôter. L’homme, quant
à lui, doit toujours se déganter la main droite au moins.
Il reste une exception – assez rare, je le concède –,
c’est le baisemain à une impératrice ou une reine,
qu’elles soient régnantes ou l’épouse d’un régnant. Si on
lui prend la main qu’elle offre, il ne faut pas l’élever vers
soi, mais simplement se baisser raisonnablement vers elle,
sans pour autant marquer un angle droit, ce qui pour-
rait donner l’impression que vous lui prêtez allégeance...
et peut-être susciter quelques sourires. C’est toujours
d’usage et aussi souvent transformé en un simple geste
de la tête.

La révérence
La révérence est ce mouvement du corps vers le bas
que font les jeunes filles en pliant les genoux et en fai-
sant passer un pied derrière l’autre afin de saluer une
personnalité de haut rang.

33
Manuel du savoir-vivre comtemporain

C’est évidemment très gracieux, mais je ne la retiens


pas non plus. Elle n’appartient plus à notre temps et n’est
plus qu’en usage lors de soirées privées dans une partie
de la noblesse. C’est, à mon sens, assez archéo-nostal-
gique. La plupart des maisons souveraines régnantes ont
aboli cette pratique et simplifié les choses.

34
Les appels
Les appels sont les termes que vous devez utiliser en
présence de personnes bien précises, lorsque vous les
saluez ou vous adressez à elles. Ils sont tous d’usage dans les
sphères officielles et publiques, voire privées pour certains.
Ils sont ci-après déclinés en français et sont d’appli-
cation dans les pays de langue française et, dans certains
cas précis, néerlandaise. Les appellations peuvent être très
différentes en anglais.
Par principe, j’apporte la version féminine à la plu-
part d’entre eux. Si cette version n’est parfois pas encore
reconnue par certains et, de manière plutôt surprenante,
aussi par certaines, ou d’application dans tous les pays, on
y tend fortement. Je me base ici sur une pratique réelle,
logique et grandissante qui sera certainement officialisée
un jour.

35
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Il n’y a plus de raison valable de refuser aux femmes


qui exercent une fonction ou un métier particulier l’ap-
pellation au féminin de ceux-ci. Je pense que ce n’est plus
qu’une question de temps, lorsque ce n’est pas déjà le cas.
Vous verrez, je me permets d’y apporter également,
sans complaisance, commentaires et nuances lorsque je le
juge nécessaire...
Veuillez noter que j’inclus dans cette seconde édition
les différentes féminisations des noms de métiers et de
fonctions reprises dans la séance du 28 février 2019 de
l’Académie française.

Quelques précisions
D’une manière générale, notre époque a simplifié les
appels.

EXEMPLE
î A
 utrefois on appelait un président de la République
« Monsieur le Président de la République » ;
aujourd’hui on se contente de « Monsieur le
Président ». C’est une règle admise qui s’applique à
la plupart des appellations longues.

Il est important de savoir également, qu’en français,


contrairement à la pratique en anglais (qui ne manque pas
de logique, ceci dit), on ne dit jamais les « sous », « vice »,
« adjoint », « substitut », etc. Ils peuvent apparaître à l’oral
ou à l’écrit, mais jamais dans l’appel.

36
Les appels

EXEMPLES
î O
 n dit « Monsieur le Préfet » et non « Monsieur
le Sous-préfet ».
î 
On dit « Monsieur le Directeur » et non
« Monsieur le Directeur-adjoint ».

Une erreur fréquente est d’utiliser le « votre » devant


certains prédicats comme « majesté », « altesse », « émi-
nence » ou « excellence ». Cela se pratique en anglais,
mais jamais en langue française. C’est une erreur renfor-
cée par le cinéma et les mauvaises traductions de films
américains.
Notre langue est suffisamment riche pour utiliser des
appels traduits sans nuance de langues étrangères dans
l’immense majorité des cas, sauf pour certains appels réser-
vés à des dignitaires religieux issus de confessions moins
représentées autrefois dans nos pays. Ils n’existent toujours
pas en français et sont issus de l’usage suite à des traduc-
tions simples. Je n’ai pas trouvé mieux à vous proposer. La
religion orthodoxe a, quant à elle, calqué quelque peu ses
appels en français sur la religion catholique.
Certains étudiants m’ont fait remarquer que les appels
catholiques étaient issus d’une autre époque.
Je ne peux pas leur donner complètement tort, mais
ils sont toujours d’usage.
On peut également rencontrer des différences d’ap-
pel au sein d’une même religion, mais dans ce cas, il ne
m’appartient pas de juger et encore moins trancher.

37
Manuel du savoir-vivre comtemporain

J’ai opté pour une écriture de tous les appels avec


majuscule, ce qui les rend également utilisables tels quels
pour l’écrit.

État

Empereur ou roi Sire


Le protocole indique même de leur parler à la troi-
sième personne du singulier, mais cet usage a été prati-
quement abandonné.

Impératrice ou reine Madame

En Belgique, il est demandé désormais d’appeler la


reine Mathilde « Majesté ». Je considère cela regrettable,
même si cet appel fut en vigueur dans le passé. C’est
pour moi, aujourd’hui, une erreur majeure de commu-
nication. Certains prétendent que cela a été décidé afin
de distinguer l’épouse du roi régnant des deux autres
reines (Fabiola et Paola), mais le protocole indique
aujourd’hui qu’on peut également appeler la reine Paola
« Majesté », ce qui n’est pas retenu dans l’usage.
Aux Pays-Bas, il a été décidé qu’il n’y avait qu’un roi
et qu’une reine, celui qui exerce réellement la fonction.
Dès lors, lorsque la reine Beatrix a abdiqué en faveur de
son fils, elle est redevenue princesse.

38
Les appels

39
Manuel du savoir-vivre comtemporain

C’est une autre manière de voir les choses qui ne


manque pas d’intérêt pour notre époque contemporaine.

Président de la Monsieur le Président*


République
Madame la Présidente*

* À vie. C’est une chose qui évoluera certainement avec


le temps. Intrinsèquement, il n’y a pas de réelle raison
de conserver une appellation ne répondant plus à la réa-
lité. C’est en quelque sorte calqué sur l’usage nobiliaire,
qui, en l’occurrence, répondait à la logique de l’Ancien
Régime. Si, toutefois, on pouvait encore l’accepter pour
un chef d’État, cela ne fait déjà plus vraiment faire partie
des mentalités pour les premiers ministres, sénateurs ou
députés.

Leurs époux respectifs n’ont pas de rôle officiel et


n’ont droit à aucune appellation particulière.

Président d’institution Monsieur le Président*


internationale (Conseil
européen, Parlement Madame la Présidente*
européen, etc.)

Prince régnant Monseigneur


(Monaco et Liechtenstein)

40
Les appels

Princesse Madame
(épouse du prince régnant)

Grand-duc Monseigneur
(Luxembourg)

Grande-duchesse Madame

Tous les vice-présidents Monsieur le Président

Madame la Présidente

Premier ministre Monsieur le Premier


ministre*

Madame la Première
ministre*

Ministre Monsieur le Ministre**

Madame la Ministre**

Secrétaire d’État Monsieur le Secrétaire


ou Monsieur le Ministre

Madame la Secrétaire
ou Madame la Ministre

Sénateur Monsieur le Sénateur*

Madame la Sénatrice*

41
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Député Monsieur le Député*

Madame la Députée*

Conseiller Monsieur le Conseiller

Madame la Conseillère

Maire Monsieur le Maire

Madame la Maire***
Madame la
Mairesse****

Bourgmestre (Belgique) Monsieur le


Bourgmestre

Madame la
Bourgmestre

Préfet Monsieur le Préfet

Madame la Préfète

Sous-préfet Monsieur le Préfet

Madame la Préfète

Procureur du Roi Monsieur le Procureur


ou de la République
Madame le Procureur

42
Les appels

* À vie.
** Temps de la fonction, sauf ministre d’État (à vie).
*** Pas admis par tout le monde.
**** « Mairesse » peut être ironiquement la femme du
maire ou être une femme exerçant la fonction au Canada
et certaines régions de France.

Tout le monde n’est pas d’accord avec les différents


termes féminins utilisables (procureure, procureuse et
procuratrice), mais chacun s’utilise sans règle réelle et en
fonction des régions, semble-t-il.

Diplomatie

Ambassadeur Monsieur l’Ambassadeur

Madame l’Ambassadeur

Ne pas confondre avec « ambassadrice », un terme


qui, actuellement, n’existe pas en diplomatie. Une
femme peut être ambassadrice d’une fondation ou
d’une marque, mais pas d’un pays en langage protoco-
laire. Contrairement à ce qui est très répandu et admis en
langue française depuis la fin du XVIe siècle, l’épouse de
l’ambassadeur s’appelle « Madame » et n’est pas ambas-
sadrice non plus. Cet appel date d’une époque révolue.
C’est une erreur très courante et plutôt flatteuse chez des
femmes d’ambassadeur elles-mêmes... Cela s’applique

43
Manuel du savoir-vivre comtemporain

également aux maris d’ambassadeurs, ils n’ont pas droit


à l’appellation « Ambassadeur », mais de « Monsieur ».
Toutefois, il est très probable, ainsi que certains l’ont
déjà admis, que le terme « ambassadrice » soit dans un
futur proche reconnu comme étant le féminin d’« ambas-
sadeur », ce qui serait logique. Cela demanderait d’abord
de clarifier son utilisation abusive par les épouses de
ceux-ci.
Il y aurait peut-être une alternative, mais il semble
que personne n’y songe.
On pourrait utiliser la terminologie d’« ambassa-
deure » pour la femme exerçant la fonction. Tant à l’écrit
qu’à l’oral, cela permettrait tout au moins d’éviter les
quiproquos.

Nonce Monseigneur

Chargé d’affaires Monsieur le chargé


d’affaires

Madame la chargée
d’affaires

Ministre plénipotentiaire Monsieur le Ministre


Ministre conseiller
Madame la Ministre

44
Les appels

Consul général Monsieur le Consul


général

Madame le Consul
général

Consul Monsieur le Consul

Madame le Consul

Académique
Liés aux diplômes et aux métiers

Professeur Professeur (ou Monsieur)


Professeure (ou Madame)

Il s’agit d’un titre académique qui ne concerne pas


tous les enseignants. Compliqué au féminin ; on utilise
traditionnellement l’appel masculin. Certaines femmes
utilisent depuis peu l’appel « professeure » ; si cela ne
plaît pas à tout le monde, cet appel retient désormais
l’attention de l’Académie française. Il existe aussi une
forme alternative : « professeuse ». L’usage en est assez
minoritaire, mais attesté depuis le XVIIIe siècle.

45
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Docteur Docteur (ou Monsieur)


Docteure (ou Madame)

Pour tous les détenteurs de diplôme de docteur et pas


uniquement docteur en médecine.
Au féminin, vous pouvez employer le terme mas-
culin. Toutefois, aujourd’hui, le gouvernement fran-
çais et l’Académie française autorisent « docteure ».
Il en va de même en Belgique et en Suisse avec
« doctoresse », mais qui, à mon avis, évoluera assez
rapidement vers « docteure ».

Notaire, avocat et huis- Maître


sier de justice

L’usage est d’appeler les docteurs en droit « Maître ».

Commissaire-priseur Maître
(en France uniquement)

L’appel de « maître » est également utilisé pour


quelqu’un qui est reconnu à un haut niveau dans cer-
tains arts comme la musique, le théâtre, la peinture, la
sculpture, les arts martiaux et la spiritualité.
Certains enfants appellent leur instituteur(trice) ou
professeur(e) d’école « maître » ou « maîtresse » ; cet
usage leur est exclusivement réservé. D’autres appels
moins formels leur sont de plus en plus proposés.

46
Les appels

Armée
Le protocole lié aux appels militaires est assez rigide,
mais semble enfin présenter certains symptômes d’adap-
tation aux nouvelles réalités.
On peut encore souvent lire que les hommes doivent
appeler un officier3 par son grade précédé de « mon » et
les femmes appeler ceux-ci uniquement par leur grade.
Les civils étrangers ne doivent pas utiliser le « mon » non
plus. La courtoisie militaire veut que le « mon » soit
toujours de mise entre militaires quel que soit le grade
(sauf dans la Marine).
On enseigne dans les écoles militaires que le « mon »
signifie clairement « Monsieur ». Pourtant, il me semble
que si les règles liées à ces appels n’évoluent pas, ce
« mon » pourrait être interprété comme un déterminant
possessif.
Permettez-moi de m’expliquer...
Cet usage date d’une époque où seuls les hommes
faisaient leur service militaire ou incorporaient l’armée.
D’ailleurs, presque tous les hommes faisaient leur service
militaire et non les femmes.
Cependant, aujourd’hui, des femmes ont incorporé
l’armée et doivent appeler les militaires portant un
grade par ce grade précédé de « mon ». Mais ce qu’il y
a de plus surprenant encore, c’est que certains appellent
leur capitaine de sexe féminin « Mon Capitaine », donc
« Monsieur (le/la) Capitaine », alors qu’il s’agit bel et
bien d’une femme. Le/la capitaine en question, que
3. S’applique à partir du grade d’adjudant.

47
Manuel du savoir-vivre comtemporain

j’ai interrogée, trouve même cela très bien ainsi qu’on


interprète le « mon » d’une manière ou d’une autre, ce
qui me surprend. Toutefois, je me suis fait confirmer
au service du protocole du ministère de la Défense à
Bruxelles que le « mon » n’est pas d’application dans
la pratique pour les femmes officiers, même si cette
évolution semble encore flottante.
Dans d’autres protocoles, notamment en France, on
propose officiellement d’appeler les femmes portant
un grade uniquement par celui-ci, sans être précédé du
« mon ». Ailleurs, on peut parfois même observer que
certains grades portés par des femmes sont déclinés au
féminin.
Il y a de quoi y perdre son latin... d’autant plus
qu’aujourd’hui certaines femmes font leur service
militaire ou embrassent la carrière, alors que beaucoup
d’hommes ne mettent jamais un pied dans une caserne
ou une base de toute leur vie.
Ce sentiment qui me chatouille et qui me fait penser
que ce « mon » (Monsieur) pourrait se transformer en
adjectif possessif se renforce lorsque je lis que les civils
étrangers ne doivent pas utiliser le « mon »... Mais le
protocole reste ferme sur cette question : cela veut bien
dire « Monsieur ».
Dès lors, ne pourrait-on pas clarifier cette règle qui
perd de sa logique ?
J’aurais tendance à suggérer, dans un premier temps,
que toute personne, femme ou homme, incorporée ou
non dans l’armée, ayant fait son service militaire ou non,
utilise le « mon » devant un grade pour l’appel d’un

48
Les appels

officier de sexe masculin et uniquement le grade non


précédé de « mon » pour un officier de sexe féminin. Cela
résoudrait tout au moins l’interprétation du « mon ».
Une seconde question vient alors faire de l’ombre
à ce tableau : les femmes officiers n’auraient-elles pas
le droit de réclamer le « ma » (Madame) devant leur
grade ? Logiquement, je ne vois pas de raison de le leur
refuser.
La question ne semble pas d’actualité, mais le sera
certainement dans quelques années, comme pour tous
les autres appels liés à des fonctions exercées par des
femmes. Dès lors, peut-être serait-il judicieux d’anticiper
plutôt que de répondre à une exigence qui prendra de
plus en plus forme.
Quant à la féminisation de certains grades militaires,
c’est encore un autre débat pour lequel je rencontre
beaucoup de réticences chez les militaires et au niveau
du protocole militaire.
Veuillez noter toutefois que l’Académie française a
donné son feu vert pour la féminisation des grades en
février 2019...
En l’occurrence, je n’ai pas autorité pour trancher et
apporter de nouvelles réponses officielles.
Je ne puis que porter certains éléments à votre bonne
réflexion...

49
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Religieux

CATHOLIQUES
Pape Très Saint Père

Cardinal Éminence
Monsieur le Cardinal

Archevêque et évêque Monseigneur

Abbé mitré ou Révérendissime Père


supérieur d’un ordre

Prêtre Mon Père*


Père**

Chanoine Monsieur le Chanoine

Doyen Monsieur le Doyen

Curé Monsieur le Curé

Vicaire Monsieur le Vicaire

* Uniquement si vous êtes catholique.


** Si vous n’êtes pas catholique.

50
Les appels

ORTHODOXES
Patriarche Très Saint Père

Métropolite Éminence

Archevêque et évêque Excellence

Prêtre (pope) Mon Père*


Père**

* Uniquement si vous êtes orthodoxe.


** Si vous n’êtes pas orthodoxe.

PROTESTANTS
Pasteur Monsieur le Pasteur

Madame le Pasteur ou
la Pasteure

JUIFS
Grand Rabbin Monsieur le Grand
Rabbin*

51
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Rabbin Monsieur le Rabbin

Madame la Rabbin ou
la Rabbine * & **

* Référence : professeure Liliane Vana.


** Rabbine, dans ce cas, n’est pas reconnu par tous les
juifs, tant dans l’appellation que pour certains dans la
fonction.

MUSULMANS
Grand Mufti Excellence
(Muphti, Moufti)
Monsieur le Grand
Mufti

Mufti (Muphti, Moufti) Excellence

Monsieur le Mufti

Aga Khan (ismaéliens) Monseigneur

Begum Aga Khan Madame


(son épouse)

Imam Monsieur l’Imam

52
Les appels

BOUDDHISME
Dalaï-lama Sainteté

À propos de la noblesse
Voilà l’annonce d’un chapitre bien délicat... que je
décide, malgré tout, de traiter sans complaisance.
Je ne cherche pas à heurter les sensibilités de certains. Si
cela s’avérait être le cas, je leur demande de me pardonner.
Je souhaite seulement inscrire ce sujet dans notre contexte
historique contemporain, à travers ses nombreuses évolu-
tions, en langage franc et direct, il est vrai. C’est aussi une
manière de rompre avec une formulation habituellement
trop courtoise, voire précieuse, pour exprimer les choses
et qui ne réserve le message qu’aux initiés.
La noblesse a des statuts différents selon les pays. Je me
contente d’aborder ici le chapitre français et le chapitre
belge, deux noblesses confrontées à des sorts différents,
l’une en république et l’autre en monarchie.
En France, la noblesse n’a plus aucun statut officiel, ce
qui revient à dire que la République ne la reconnaît pas.
Par contre, les lois qui concernent les titres de noblesse
n’ont jamais été abrogées, ce qui implique qu’elles sont
toujours en vigueur.
Vous n’y comprenez déjà plus rien ? C’est normal ! Il
faut savoir que la noblesse et les titres de noblesse sont
deux choses différentes. On peut être noble sans titre

53
Manuel du savoir-vivre comtemporain

et être titré sans être noble, même si c’est assez rare. Le


président de la République française, par exemple, est, le
temps de son mandat, également prince d’Andorre. Peu
de gens le savent.
D’une manière générale, les titres de noblesse sont
tout de même portés par des personnes appartenant
à la noblesse. Il existe des confréries vendant des titres
soi-disant de noblesse, mais ceux-ci n’ont aucune valeur
sociale et ne sont jamais reconnus par les associations
de noblesse, quel que soit le pays. Leur port officiel est
même formellement interdit dans les monarchies et les
républiques.
Pour être noble en France, il faut être reconnu par
l’ANF (Association de la noblesse française), qui statue
sur votre état de noble ou non-noble. Cette association
n’a pas de caractère officiel, mais fait autorité.
Que faut-il pour être admis au sein de l’Association
de la noblesse française, donc pour être reconnu noble
ou d’ascendance noble pour les réticents ?
Sans entrer dans trop de détails : il faut prouver
l’anoblissement, sans restriction, de l’un de vos ancêtres
à un moment ou l’autre de l’histoire et que vous en
descendiez officiellement en ligne directe par les mâles
suite à des mariages catholiques ou protestants jusqu’à
aujourd’hui sans interruption. Les règles actuelles sont
toujours celles qui étaient en usage sous l’Ancien
Régime et un peu différentes pour la noblesse d’empire
qui respectent le décret du 1er mars 1808 à l’origine de
celle-ci.

54
Les appels

L’anoblissement, pour simplifier, c’est recevoir un


document signé, qu’on appelle « diplôme » ou « lettre
patente », par un souverain, en l’occurrence ici un roi
de France ou encore éventuellement un empereur, qui
certifie vous anoblir.
L’ANF, par contre, ne s’engage pas sur les titres de
noblesse, mais uniquement sur le statut de noblesse en
France.
Les titres de noblesse, quant à eux, sont gérés par la
République. En effet, aussi surprenant que cela puisse
paraître, la République reconnaît officiellement certains
titres, ceux pour lesquels tous les documents sont réunis
et pour lesquels, en principe, le doute n’est pas permis.
Vous pouvez, à ce moment-là, le faire enregistrer
et voir s’inscrire votre titre de noblesse sur votre carte
d’identité française. C’est toujours très chic !
Toutefois, ne vous y méprenez pas, dans cette masse de
titres utilisés en France, peu sont réellement officiels, non
pas qu’il y en a peu, mais tout le monde n’y trouve pas
son avantage à se voir titré sur ses documents administra-
tifs, d’autres ne possèdent plus toutes les archives néces-
saires, d’autres s’en moquent complètement et beaucoup
d’autres encore, une majorité, portent des titres qui sont
faux. On entend par « titre faux » un titre qui n’a pas été
donné par un souverain dans l’exercice de sa fonction
ou de son règne, si vous préférez. Cela peut vouloir dire
aussi, par exemple, qu’un roi non régnant n’a pas le droit
d’anoblir ou de donner un titre de noblesse à quelqu’un.
On nomme certains de ces titres « titres de courtoisie »,
voire « titres de convenance », « titres d’apparence » ou

55
Manuel du savoir-vivre comtemporain

encore « titres d’apparat ». Contrairement à ce qu’affir-


ment certains, ils sont « de fantaisie », donc parfaitement
faux et n’ont de sens aujourd’hui que le snobisme. Le
titre de courtoisie a parfois été utilisé par des personnes
non titrées sous l’Ancien Régime lorsqu’elles devaient
être présentées au roi. C’était relativement coutumier,
mais ce titre de courtoisie devait se dissoudre, comme
par magie, aussitôt la personne sortie du palais, pour ne
plus réapparaître.
Déjà sous l’Ancien Régime, il y avait beaucoup de
fausse noblesse et de port frauduleux du titre de noblesse,
ce qui était condamnable et souvent condamné. Alors,
imaginez par la suite...
Dès lors, il faut de la culture et de la pratique dans le
domaine pour savoir sentir et distinguer le vrai du faux.
Même les ouvrages respectables reprenant, comme dans
un bottin de téléphone, la liste de toutes ces personnes
appartenant au milieu des familles qui descendent des
anciennes classes dirigeantes sont loin d’être des garants
de l’histoire. La vérité y côtoie assez facilement, et avec
courtoisie, la complaisance.
Je ne rentrerai pas non plus dans toutes les distinctions
qu’on peut faire entre toutes ces familles. Même si tout
cela se perd et se nivelle fortement, tout le monde ne
regarde pas malgré tout de la même manière ceux qui,
parmi eux, ont des ancêtres qui ont brandi l’épée et sai-
gné pour défendre des êtres, des idées et des valeurs et
ceux à qui Napoléon Ier a donné un titre de baron pour
les remercier d’avoir été maire d’une ville très moyenne
pendant quelques années, ces mêmes personnes qui

56
Les appels

adjoignaient le nom de leur épouse au leur pour donner


l’illusion d’un fief... et dont les descendants sont toujours
fiers d’appartenir à ce qu’ils aiment croire être l’élite, à
laquelle, objectivement, ils n’ont jamais appartenu. C’est
aussi cela la noblesse.
Méfiez-vous des prétentieux, ils sont souvent encore
et toujours dans la course aux vanités et n’ont rien com-
pris à l’évolution du monde. Par contre, apprenez des
grands seigneurs et des grandes dames, je parle de ceux
dont la noblesse n’est pas qu’un bout de papier ; ils ont
beaucoup à donner et à partager. Parfois, derrière une
apparente simplicité se cache beaucoup de grandeur et
d’humanisme.
En Belgique, c’est très différent. C’est un royaume
dans lequel la noblesse a un statut officiel, du moins la
noblesse belge. Le roi des Belges anoblit encore à l’heure
actuelle, et certains y sont très attachés.
Personnellement, je pense que cela n’a plus aucun
sens. Je ne suis en rien pour supprimer ce qui existe et
faire la révolution, loin de là, mais pour cesser d’encou-
rager un système obsolète qui devient malsain.
La noblesse, dans sa continuité, avait un sens lors-
qu’elle était liée à des fonctions ou à des responsabilités
réelles.
Anoblir encore aujourd’hui n’entretient, me semble-
t-il, que cette course aux vanités.
Si certaines personnes méritent les honneurs pour ce
qu’elles apportent à la nation, il existe malheureusement
aussi toutes les autres, toutes celles qui vendraient leur
mère pour gravir les échelons sociaux par le seul moyen

57
Manuel du savoir-vivre comtemporain

qu’elles ont ciblé : la noblesse, comme si celle-ci leur


conférait le respect, le raffinement, l’éducation, l’intelli-
gence et la culture...
J’ai de l’estime pour certaines personnes que le roi
a anoblies comme Dirk Frimout, Eddy Merckx, Annie
Cordy, Herman Van Rompuy, et bien d’autres encore.
Il est juste que le chef de l’État, le roi des Belges en
l’occurrence, les remercie pour ce qu’ils ont apporté et
apportent encore au pays, mais n’y a-t-il pas d’autres
moyens que celui-ci issu d’un temps révolu et qui n’est
plus en accord, selon moi, avec l’évolution de notre
monde à tous ?
Il fut une époque où les meilleurs, ceux qui pro-
curaient la fierté à leur nation, étaient remerciés en se
voyant confier la charge de diriger et d’élever tout ce
qui gravitait dans leur domaine d’excellence.
C’était un honneur immense et surtout une vraie
reconnaissance, en plus d’être d’une utilité réelle.
Le choix même des nouveaux anoblis et titrés me
laisse penser que ce système est défaillant.
Prenez, par exemple, Herman Van Rompuy : il a été
Premier ministre belge, puis est devenu le premier pré-
sident du Conseil européen. Sous l’Ancien Régime, on
l’aurait élevé au rang de prince ou de duc pour avoir
exercé une fonction aussi importante. Il a été fait comte à
titre personnel en 2015. En réalité, c’est bien peu d’hon-
neur en comparaison à tous les autres créés comtes ou
barons par les rois des Belges, ne serait-ce que depuis la
fin de la Seconde Guerre mondiale. Parmi ces nouveaux
titrés, un certain nombre n’a jamais rien fait pour son

58
Les appels

pays, parfois que s’enrichir personnellement. Certains


me rétorquent que c’est un privilège qui appartient au
roi que d’anoblir qui il veut. À ces nostalgiques qui me
répondent naïvement de la sorte, je pourrais leur expli-
quer comment cela fonctionne réellement...
Ce que je déplore dans ce système, c’est qu’il y a
énormément de vrais athlètes, voire des champions à
la course aux vanités, et qu’ils gagnent. Cela affaiblit
considérablement les faveurs accordées à ceux qui les
méritent réellement.
En France, on n’anoblit plus, évidemment, mais il
y a d’autres champions, ceux de la course à la Légion
d’honneur, pour ne parler que de cet ordre...
Bref, je souhaite tout de même vous rassurer, la
noblesse en Belgique n’est pas qu’une pièce de théâtre.
Il y a d’illustres familles, dont quelques-unes d’extrac-
tion chevaleresque, plusieurs ex-souveraines, d’autres
exemplaires, qui ont marqué l’histoire et qui forcent
le respect. Il ne faut simplement pas tout mélanger : la
majorité des familles nobles belges sont issues d’éléva-
tions sociales relativement récentes, voire très récentes, et
n’ont, la plupart du temps, pas d’histoire digne de figurer
au palmarès de ce que l’avenir retiendra.
Je vais vous raconter brièvement une petite aventure
qui me permettra d’en venir à un autre aspect de ce que
je souhaite aborder.
Je reçois il y a quelques années un ami issu de la
noblesse belge dans un petit village du fin fond de la
France, dans lequel les habitants sont parfaitement

59
Manuel du savoir-vivre comtemporain

étrangers à ce milieu. Mon invité porte un nom connu,


mais sans histoire fracassante.
Nous avons la joie d’être tous reçus à déjeuner chez
des amis du même village et habitant un peu plus loin.
Dès que je présente cet ami par son prénom, puis son
nom, nos hôtes sont en quelque sorte honorés de cette
visite. Quant à lui, il joue fièrement le jeu, comme s’il
venait d’un monde se situant un peu plus haut que le
leur. Lorsque la personne qui nous reçoit lui demande
de quand date sa famille, il répond avec beaucoup d’as-
surance « du XIIe siècle », ce dont je suis assez surpris
et ce qui place son interlocuteur devant beaucoup
d’admiration...
Tout cela a l’air très anodin, et pourtant... Que s’est-il
passé au juste ?
Les amis nous recevant ont sacralisé mon invité, car il
a fière allure, il est vrai, mais il a surtout un nom à parti-
cule. Lorsqu’il comprend cela, inconsciemment je pense,
il se positionne de manière supérieure. Donc, cette supé-
riorité est purement cérébrale.
Lorsqu’il répond « XIIe siècle » à la question qui lui
est posée, il rabaisse ces personnes, même si son inten-
tion n’est pas de le faire.
Cette petite histoire, beaucoup d’autres pourraient
vous la raconter...
Le premier souci, c’est de sacraliser quelqu’un à
cause de son vernis apparent. Le second, c’est de vivre
comme si on était sacré et de finir par y croire. En plus,
il s’avère que sa famille avait été anoblie à l’extrême fin

60
Les appels

du XIXe siècle. Ce n’est ni une noblesse d’épée ni même


de robe, mais quasi administrative.
Pourquoi alors parler du XIIe siècle ? C’est de fait
la date jusqu’à laquelle ils ont pu remonter leur arbre
généalogique et rien d’autre, mais cela n’a pas plus
de sens : toutes les familles, même les plus populaires,
remontent plus ou moins loin dans le temps.
« De quand date ta famille ? » veut dire : « À partir
de quel moment dans l’histoire avez-vous été connus et
reconnus ? » Il est bien de savoir d’où l’on vient et com-
ment, mais s’en enorgueillir, n’est-ce pas plutôt un aveu
de faiblesse, voire de complexe ?
Il est toujours préférable socialement, semble-t-il, de
descendre d’une lignée noble et pure que d’une lignée
de violeurs patentés, mais est-ce l’élément le plus déter-
minant chez un être ?
L’inconscient collectif du milieu de la noblesse parle
toujours d’ailleurs de « descendre ». Peut-être serait-il
intéressant d’inverser cette tendance et d’apprendre aux
jeunes à monter à nouveau afin de rejoindre la sphère de
ceux qui savent et font...
En janvier 2016, Olivier de Trazegnies, féru d’histoire
et digne représentant de la noblesse belge et beaucoup
plus ancienne, nous livre une observation dans le journal
Le Monde que je trouve très intéressante :
« En réalité, tout est question d’image. La valeur de
référence de la noblesse devient l’art d’incarner l’image
que renvoie le miroir de l’opinion publique. La noblesse
rêve inconsciemment de se montrer à la hauteur de ce
que l’on imagine d’elle. »

61
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Pour ceux qui ont des difficultés avec mes propos, je


leur suggère de méditer sur ce diagnostic. Pour les autres,
apprenez à aller au-delà des apparences sociales. Une
particule ne signifie pas noblesse. Il y a même beaucoup
de particules bourgeoises, beaucoup de noms nobles
sans particule, beaucoup de fausses particules, celles nées
des noms coupés en deux parties inégales notamment
ou simplement ajoutées, beaucoup de faux noms égale-
ment ou empruntés, même officiellement, etc. Tout cela
ne veut plus rien dire.
Je ne vous parle ici que de ce qui existe depuis long-
temps, mais imaginez : aujourd’hui, on peut choisir le
nom de l’enfant à la naissance. Portera-t-il celui du père,
celui de la mère ou encore les deux ? « Mais finalement,
Chérie, celui de ta grand-mère sonne mieux ! Cela
serait peut-être un plus pour son avenir ! » On y arrivera
peut-être aussi...
Si certains changements peuvent être louables et
compréhensibles, ils vont provoquer des bouleverse-
ments dans la noblesse, étant donné que celle-ci se trans-
met par le mâle, du moins chez nous (ce n’est pas le cas
dans tous les pays).
Nous pourrions parler également du sexe neutre, une
réalité dont on parle peu, mais sur laquelle certains pays
ont déjà légiféré dans le sens de la reconnaissance.
Le monde change et ce qui en fait partie aussi...
Vous trouverez des personnes de grande qualité dans
tous les milieux et l’inverse également.
Il est vrai que c’est plus facile de se maintenir quand
on a reçu et de s’élever quand tout le reste va bien. Il y

62
Les appels

a et il y a toujours eu des personnes plus privilégiées et


d’autres moins favorisées.
Il faut reconnaître, ceci dit, que quand un aristocrate
est vraiment bien, il passe de la définition sociale du
terme à son sens qualitatif plus ancien. Lorsqu’on a le
bonheur de les côtoyer ou juste de les rencontrer, on ne
les oublie jamais.
Derrière l’apparence sociale, il y a toujours un homme
ou une femme. Être noble, ce n’est pas être élu par un
dieu quelconque pour entrer dans le panthéon des divi-
nités, c’est avoir reçu, directement ou indirectement, un
bout de papier signé par un souverain qui vous élève
socialement pour diverses raisons. Il n’y a aucune trans-
cendance à chercher et encore moins à trouver...
Donc soyez vous-même, dans le respect de vous-
même et des autres. Rendez grâce à Dieu ou à l’Uni-
vers, et non aux fabrications d’un système social artifi-
ciel dont l’histoire est déjà en train de s’occuper.
Revenons-en à notre sujet.
La noblesse a droit également à ses appels, mais pas
toujours ceux auxquels vous pensez, qu’on retrouve
de manière obscure comme si rien n’avait changé
depuis très longtemps dans certains ouvrages pourtant
respectables.
Ceux que je vous propose ci-après correspondent à
l’usage réel au sein même de ce milieu.
Je préviens celles et ceux qui lanceront du « Monsieur
le Comte » ou du « Madame la Baronne », vous passerez
pour des pignoufs.

63
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Les appels

Prince (avec prédicat*) Monseigneur

Princesse Madame**

* Il y a une nuance en Belgique de nouveau, le protocole


du Palais royal propose pour les membres de la famille
royale portant le titre de prince un appel supplémentaire à
celui de « Monseigneur » : « Altesse royale ». Cela ne me
semble pas être une bonne idée. Cela pourrait impliquer
qu’on puisse également appeler toutes les autres personnes
bénéficiant d’un prédicat devant leur titre par leur prédicat.
Pensez-vous que cela soit judicieux au XXIe siècle ?
** L’appel pour les femmes non mariées et portant un
prédicat d’altesse, altesse sérénissime, altesse royale, altesse
impériale ou encore altesse impériale et royale reste
« Madame ».

Tous les titres de prince et princesse avec un prédicat


d’altesse (S.A.), d’altesse sérénissime (S.A.S.), d’altesse
royale (S.A.R.) ou d’altesse impériale (S.A.I.), les titres
de duc et duchesse avec prédicat d’altesse sérénissime
(S.A.S.), les titres de grand-duc et grande-duchesse
(russe) avec prédicat d’altesse impériale (S.A.I.), et les
titres d’archiduc et archiduchesse (autrichien) avec
prédicat d’altesse impériale et royale (S.A.I. et R.)
réclament l’appel « Monseigneur » pour les hommes et
« Madame » pour les dames.

64
Les appels

Tout le monde n’est pas en accord avec cette règle.


Je me base sur la pratique réelle au sein de ces milieux.

Duc (sans prédicat) Monsieur le Duc*

Duchesse Madame la Duchesse

Prince (sans prédicat) Prince


Monsieur

Princesse Princesse
Madame

Marquis Monsieur

Marquise Madame

* L’appel pour les ducs et duchesses est basé sur celui en vigueur
sous l’Ancien Régime. Lorsque la France a décidé de revoir,
pour le protocole national, les appels liés à la noblesse, elle n’a
conservé que celui de duc en mémoire de leur rôle historique. Il a
simplement été conservé, mais n’a pas été adapté. Cela évoluera
peut-être également. Les seules personnes à bénéficier de cette
appellation en noblesse belge sont le duc et la duchesse d’Ursel
(on ne prononce pas le « el ») et le duc et la duchesse de Looz-
Corswarem et de Corswarem Looz. Tous les autres ducs et
duchesses en noblesse belge ont droit à l’appel « Monseigneur »
et « Madame ». Ils sont tous, en effet, altesses sérénissimes,
sauf la duchesse de Brabant, princesse héritière, qui est altesse
royale. Si Élisabeth, duchesse de Brabant, est toujours une jeune
demoiselle, on l’appelle également « Madame ».

65
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Comte Monsieur

Comtesse Madame

On rencontre parfois aussi des titres de comte et


comtesse avec prédicat d’altesse illustrissime (S.A.Ill.),
c’est allemand et souvent lié à des branches cadettes de
familles princières ex-souveraines. L’appel reste le même.

Vicomte Monsieur

Vicomtesse Madame

Baron Monsieur

Baronne Madame

Chevalier Monsieur

Madame Madame

Écuyer Monsieur

Madame Madame

66
Les appels

Dans le milieu de la noblesse, certains disent que


les « Monsieur le Comte » et « Madame la Marquise »
sont réservés aux domestiques, ce qui, entre nous, est
aujourd’hui assez décadent comme réflexion... tout aussi
décadent que d’entendre à la fin de l’apéritif : « Madame
la Baronne est servie. »
De manière mondaine, il est admis de dire « Comte »
dans des formules comme celle-ci : « Cher Comte, com-
ment allez-vous ? »
Il y a beaucoup de subtilités, mais je ne peux tout
traiter ici, ne s’agissant pas d’un ouvrage consacré à la
noblesse. Néanmoins, retenez celle-ci : certaines familles
royales, régnantes ou non, utilisent des titres aussi appelés
de courtoisie, mais qui n’ont rien à voir avec les autres
titres de courtoisie qui, ceux-là, n’existent pas.

EXEMPLES
î L e comte de Paris (le chef de famille d’une des
deux familles prétendant au trône de France : il
est avant tout duc de France et duc d’Orléans).
î Le comte de Barcelone* (un titre lié à la famille
royale d’Espagne)
î Le comte de Flandre** (un titre lié à la famille
royale belge).

67
Manuel du savoir-vivre comtemporain

* Le dernier à avoir porté ce titre était le prince Juan de


Bourbon de 1977 à 1993.
** Le dernier à avoir porté ce titre était le prince Charles
de Belgique de 1910 à 1983.

L’appel lié à ces personnes est donc « Monseigneur » et


« Madame » étant donné qu’ils sont tous altesses royales.

68
Les prédicats
Les prédicats ne s’utilisent pas à l’oral en langue
française, sauf éventuellement pour une exception en
Belgique (voir page 64). Il existe certaines nuances, en
Grande-Bretagne par exemple, mais je ne souhaite pas
m’étendre sur cette matière.

LE PRÉDICAT EN TOUTES LETTRES SON PLURIEL


S.M. Sa Majesté L.L.M.M.

S.A.I. et R. Son Altesse impé- L.L.A.A.I.I.


riale et royale et R.R.

S.A.I. Son Altesse L.L.A.A.I.I.


impériale

69
Manuel du savoir-vivre comtemporain

S.A.R. Son Altesse royale L.L.A.A.R.R.

S.A.S. Son Altesse L.L.A.A.S.S.


sérénissime

S.A. Son Altesse L.L.A.A.

S.A.Ill. Son Altesse L.L.A.A.Ill.Ill.


illustrissime

S.Ém. Son Éminence L.L.Ém.Ém.

S.E. Son Excellence L.L.E.E.

70
Vouvoiement et tutoiement
Dans notre société, il est d’usage de vouvoyer lors-
qu’on ne connaît pas son interlocuteur, du moins à un
certain âge. Cela reste la règle. Cependant, les jeunes
générations se tutoient aujourd’hui beaucoup plus faci-
lement qu’à la fin du XXe siècle, par exemple.
Il ne s’agit pas ici d’un manque de respect, mais de
mœurs qui évoluent, sans doute au contact quasi omni-
présent de la culture anglo-saxonne.
À nouveau, il s’agit de bon sens et de sentir les êtres et
les situations. Le vouvoiement peut servir à installer une
distance entre deux personnes pour des raisons profes-
sionnelles, pour marquer son respect ou encore comme
paravent psychologique lors d’une négociation.
Le vouvoiement reste encore aujourd’hui la seule
approche polie vers un supérieur hiérarchique, une per-
sonne plus âgée, une personnalité, un inconnu, etc. Le

71
Manuel du savoir-vivre comtemporain

tutoiement spontané de certains peut heurter ou dés-


tabiliser. On ne peut toutefois le reprocher aux jeunes
enfants – pour eux, c’est de la communication natu-
relle–, ni à des adolescents, jusqu’à une certaine maturité
et dans la mesure où il ne s’agit pas de déstructuration
volontaire de leur part.
Je pense que le vouvoiement est de rigueur lorsqu’on
arrive dans un contexte formel, professionnel et officiel.
Il peut très vite se transformer en tutoiement avec cer-
taines personnes, mais dans le doute, je vous conseille
d’éviter l’impair éventuel.
Il pourrait vous arriver d’aller dans un lieu qui vous
est étranger et où se trouvent des personnes d’un certain
niveau susceptible de vous impressionner.Vous pourriez
être surpris en étant tutoyé d’emblée. Ne le prenez pas
automatiquement comme un rabaissement, c’est simple-
ment de cette manière que tout le monde communique
sur place. Si vous vous sentez étranger, eux ne vous ont
peut-être pas perçu comme tel ou ont décidé de facto
de vous accepter dans leur meute. Dans ce cas précis,
tutoyez à votre tour évidemment et communiquez de la
même manière qu’eux.
Cela reste du bon sens et une application avec
mesure. N’allez évidemment pas tutoyer le président de
la République même si c’est lui qui vient vers vous en
vous tutoyant... La seule raison qui pourrait vous per-
mettre de le tutoyer serait qu’il vous le demande.
C’est un peu la même chose dans le cadre de votre
travail. Suivez le mouvement en place, tout simple-
ment. Toutefois, imaginez que vous soyez appelé dans

72
Vouvoiement et tutoiement

le bureau de votre directeur et que celui-ci prend la


liberté de vous tutoyer, il ne vous appartient pas non plus
dans ce cas d’en faire autant, sauf, à nouveau, s’il vous le
demande. À vous de gérer ensuite votre position dans la
société sans éveiller la jalousie de certains s’il s’agit d’une
exception.
On peut aussi s’appeler par son prénom tout en
conservant le vouvoiement, c’est plus fréquent à Paris
qu’à Bruxelles. C’est simplement une manière douce
et intelligente de communiquer avec son interlocuteur
tout en conservant une distance raisonnable ou encore
un premier pas pour les inconditionnels de l’étiquette
afin de faire un effort de rapprochement sans ébranler
trop la tour de leurs principes.
Il peut, au contraire, arriver que des pignoufs vous
tutoient d’emblée. Vous n’êtes absolument pas obligé
de l’accepter. Vous le pouvez, tout comme vous pouvez
continuer à les vouvoyer tout en souffrant leur manque
d’éducation, ou encore, si la situation vous porte négati-
vement atteinte, les remettre à leur place (verbalement).
La communication sociale intelligente ne veut pas
dire d’accepter de s’adapter à tout lorsque cela ne nous
plaît pas, mais d’exiger le respect ou encore d’imposer
ses propres règles si cela semble nécessaire. À vous de
voir si vous l’envisagerez avec le sourire ou non... ce qui
reste préférable, mais pas toujours possible.
Il y a bien évidemment le « vous » ou le « tu », mais
autour de cela toute la scène sur laquelle se joue la com-
munication, le décor en quelque sorte. Le décor, ici, c’est
le ton employé, et aussi le regard de votre interlocuteur,

73
Manuel du savoir-vivre comtemporain

l’attitude de son visage, sa posture, son origine culturelle


et le moment choisi...
Je me répète à nouveau : c’est à vous d’analyser rapi-
dement la situation et de réagir, dans un sens ou dans
l’autre, avec mesure et justesse.

74
Quelques détails de langage
Nous avons déjà abordé en début de livre les salu-
tations et les formules de politesse lorsqu’on rencontre
quelqu’un.
Je vous propose maintenant une série d’expressions
dont la bienséance pourrait vous surprendre.

À QUELLE HEURE ON MANGE ?


À quelle heure déjeune-t-on ? À quelle heure dîne-
t-on ? Quant au petit déjeuner, on dit « À quelle
heure prend-on le petit déjeuner ? » Le verbe man-
ger est bien français, je vous rassure, mais non sou-
haité dans les milieux raffinés..

75
Manuel du savoir-vivre comtemporain

BON APPÉTIT
Dans certains milieux, point n’est besoin d’une
baguette magique pour se transformer en pignouf.
Il suffit de prononcer l’incantation « bon appétit » et
c’est aussitôt chose faite...
En effet, il y a certaines règles qu’il vaut mieux
connaître lors de repas en délicate compagnie, dont
celle de ne rien dire avant de prendre ou en prenant
vos couverts.
En réalité, ce que peu de personnes savent, c’est qu’il
n’est pas vraiment ici question de politesse, mais bien
de marqueur social.
À la fin du Moyen Âge, il était de bon ton de s’in-
téresser ouvertement au déroulement gastrique des
un(e)s et des autres. On souhaitait le plus normale-
ment du monde « bon appétit ». Ce mot nous vient
du latin apetitus ; le désir, voire, pour d’autres, du
verbe aperire ; ouvrir. Il faut replacer cette expression
dans le même registre que « comment allez-vous ? »
qui sous-entendait « comment allez-vous à la selle ? ».
Souhaiter « bon appétit » est attesté comme étant une
politesse par certaines instances académiques fran-
çaises dès le XIXe siècle. Il semble cependant qu’au-
jourd’hui seuls les milieux plus populaires en usent
a contrario des sphères plus vernies qui préfèrent
conserver cette expression aux oubliettes.
Toujours est-il qu’en français, souhaiter « bon appétit »
revient intrinsèquement à vous encourager pour

76
Quelques détails de langage

77
Manuel du savoir-vivre comtemporain

manger ce qui vous attend dans votre assiette, ce qui


est plutôt péjoratif.
Je suis certain que la plupart d’entre vous n’imaginent
pas un seul instant suggérer une telle chose lorsqu’ils
ouvrent les « plaisirs culinaires » en prononçant ces
deux mots. L’immense majorité des personnes s’expri-
mant dans la langue de Molière est rodée à ce « bon appé-
tit » depuis des générations. Sont-ils tous des pignoufs
pour autant, comme certains ont tendance à le dire ?
Bien sûr que non !
« Bon appétit » est une expression passée au second
degré et qui se veut bienveillante. Cela fait partie du
savoir-vivre qui évolue. Dès lors, si on vous le sou-
haite, la politesse réclame aujourd’hui qu’on ne laisse
pas cette « maladresse » réveiller la solitude et la honte
chez son auteur. Bien au contraire, elle vous demande
de remercier de cette attention et d’ajouter, par
exemple, « à vous pareillement ».
Si, lors d’un dîner, tous les convives prononcent cette
petite formule, il est inutile de prendre des airs de
portrait d’ancêtre ; je vous conseille vivement de le
dire à votre tour et de bon cœur.Vous verrez, on n’en
meurt pas et votre repas n’en sera pas moins bon.

Il y a tout de même une règle...


La règle de bienséance, toujours d’usage malgré tout,
est d’attendre, une fois les assiettes servies, que la pers-

78
Quelques détails de langage

onne qui vous reçoit donne le ton en commençant


elle-même à manger ou en vous invitant à le faire,
ceci sans petite formule magique...
Il est important de garder à l’esprit que ces règles ne
sont que des garde-fous qui évoluent avec le temps en
prenant parfois même des formes contradictoires au
sein des différents milieux sociaux...

BONNE DÉGUSTATION
Cela ne se dit pas plus, même si c’est parfaitement
français. Certains y voient une surenchère de « Bon
appétit ». Cela s’entend dans les restaurants plus chics,
par exemple, mais la règle reste de ne rien dire. La
plupart d’entre nous sont mal à l’aise aujourd’hui de
ne rien dire. Je peux les comprendre, mais on peut
apprendre... Si c’est à ce point insupportable, dites
éventuellement, dans le cadre du service culinaire
professionnel : « Je vous souhaite un bon déjeu-
ner ! » ou « Je vous souhaite un excellent dîner ! »

CE MIDI
À midi ou à l’heure du déjeuner.

79
Manuel du savoir-vivre comtemporain

MON ÉPOUX, MON ÉPOUSE


Non, c’est votre époux ou votre épouse, mais mon
mari ou ma femme.

AU PLAISIR
Jamais ! C’est lourd et inachevé. On dit et on écrit
toujours au plaisir de quelque chose : « Au plaisir
de vous revoir », « Au plaisir de vous entendre », etc.

MESSIEURS-DAMES
Bonjour Monsieur, Bonjour Madame ou Monsieur,
Madame et inversément bien entendu aujourd’hui.
Ne pas confondre avec l’appel dans un courrier et
lors d’une conférence, par exemple, cas dans lesquels
on commence toujours par les femmes..

VOTRE MAMAN, VOTRE PAPA


Non, votre mère ou votre père. Maman et papa sont
réservés à l’intimité et non au social.

80
Quelques détails de langage

JE M’EXCUSE
C’est français et subtil pour celui qui ne veut pas
présenter ses excuses tout en en donnant l’illusion
au minus habens, mais la politesse rejette l’expression.
On dit : « Je vous prie de m’excuser », « Veuillez
m’excuser » ou « Excusez-moi » (c’est plus impéra-
tif, mais tout de même retenu).

À VOS SOUHAITS
Cela ne se dit pas, pas plus que « À vos amours ».
Vous ne savez de toute façon pas ce que l’autre sou-
haite réellement...

DE RIEN
Ce n’est jamais de rien. « Je vous en prie » ou « Avec
plaisir » sont beaucoup mieux.

Ce sont là les principales erreurs commises fréquem-


ment. Il y en a beaucoup d’autres, mais elles relèvent, me
semble-t-il, plus de la langue française que de la com-
munication sociale.

81
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Et aussi…
Il y a une autre erreur qu’on entend très souvent et
qui peut, sans directement vous envoyer au royaume des
pignoufs, ne vraiment pas vous rendre service dans cer-
tains milieux.
Lorsque vous parlez de noms de famille, par exemple.
On entend souvent certains dire « Je suis invité chez les
de Merode », «Je connais bien les de La Rochefoucauld ».
Sachez que dans ces cas, on ne prononce pas la particule
noble précédent une consonne. On dit et on écrit donc :
î Les La Rochefoucault
î Les Merode
Toutefois, la règle n’est pas la même avec les noms de
familles nobles commençant par une voyelle. On dit et
écrit :
î Les d’Albignac
î Les d’Estampes
î Les d’Indy
î Les d’Oultremont
î Les d’Ursel (l’usage veut qu’on ne prononce pas le « el »)
î Les d’Yve

Évidemment, il faut savoir s’il s’agit de noms nobles


ou pas, car « de » ou « De » peuvent être bourgeois,
auquel cas la règle ne s’applique pas comme pour « les
de Decker » et » les De Decker », par exemple.
Il peut y avoir de rares exceptions pour des familles
nobles d’origine étrangère ou portant un nom à conso-
nance étrangère. L’usage nous montre parfois qu’on cite

82
Quelques détails de langage

leur particule devant le nom après « les ». On dit par


exemple : « les del Marmol » ou encore « les della Faille ».
Notez qu’il y a des familles nobles sans particule ou
avec « De » plutôt que « de » devant le nom, ou encore
« Le » et « Des ». On utilise à ce moment-là l’appellation
« à la bourgeoise », donc en prononçant le « De ». C’est
la même chose pour quelques familles belges récem-
ment anoblies et d’origine bourgeoise, qu’on continue
à appeler selon l’usage plus ancien, donc bourgeois, sans
doute par habitude.
Il y a également, pour ne pas simplifier les choses, des
noms de familles nobles qui ne se prononcent pas de
la même manière qu’ils s’écrivent, comme « d’Ursel »,
qu’on vient de voir plus haut, et aussi « de Croÿ » qui
se prononce de Crouï, ou encore « de Broglie » qui se
prononce de Breuil, et d’autres surprises...
Lorsqu’il y a plusieurs particules ou un nom simple
suivi de particule(s), la règle générale est de ne jamais
donner le nom en entier. Il y a là également beaucoup
d’exceptions liées à l’usage.
En France, la tendance est d’utiliser seulement la der-
nière particule suivie du nom. En Belgique, la tendance
est plutôt inverse.

EXEMPLES
î A
 nne de Kerchove de Denterghem de Pinto (nom
belge), on dit ou présente Anne de Kerchove.

83
Manuel du savoir-vivre comtemporain

î Igor Picot de Moras d’Aligny (nom français), on dit


ou présente Igor d’Aligny.

Cette règle est loin d’être absolue, il y a beaucoup de


noms belges en France et vice versa, et d’autres particulari-
tés encore liées à l’usage. En fait, il faut quelque peu baigner
dans le milieu pour savoir où s’informer discrètement.
Tout ceci n’est pas essentiel pour vivre évidemment,
entendons-nous, et même assez subtil, voire futile pour
d’autres, mais ce sont toutes des petites choses qu’il est
préférable de maîtriser si on choisit d’évoluer dans cer-
taines sphères.
Encore une petite pour terminer sur le sujet. Lorsqu’on
dit ou écrit « Le comte de Renesse », c’est parce qu’il
s’agit de l’aîné des mâles de toute la famille de Renesse,
donc celui qu’on considère comme le chef de famille. S’il
n’est pas le chef de famille, on trouve toujours un prénom
devant le nom. Cette règle est normalement réservée à la
noblesse.
Il y a en outre quelques petites exceptions très subtiles
pour certaines familles possédant plusieurs titres, celles
qui ont plusieurs branches, etc., mais ce n’est pas le véri-
table sujet de ce livre.

84
Ce qu’on ne dit pas...
Saviez-vous que l’essentiel de ce que vous transmettez
passe par le non-verbal ? En effet, lorsque nous voyons
une personne pour la première fois, nous avons immé-
diatement une série d’informations qui nous sont trans-
mises, que nous captons et analysons en fonction de nos
propres paramètres, tout cela en moins d’une seconde.
Cela ne signifie pas que, comme on l’entend fré-
quemment, la première intuition est la bonne. En prin-
cipe, cela devrait être le cas en effet, mais cela se vérifie
auprès de personnes dont l’intuition est réveillée avant
tout, voire exercée, et qui ne sont pas sujettes, même très
momentanément, à un émotionnel mal géré, un ressenti
lié à une origine plus profonde, une altération de son
état de santé normal, une nuisance extérieure, etc.
Dans tous les cas, vous percevez une information qui
vous parle d’une manière ou d’une autre.

85
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Il y a d’abord la connexion, c’est-à-dire le moment


d’entrée en contact avec l’autre, en fonctionnant quasi
comme le wi-fi, le Bluetooth, etc. C’est à ce moment
que l’on reçoit le plus d’informations. Il s’agit en quelque
sorte du sixième sens, même si certains ne l’admettent pas.
C’est là que l’on peut percevoir l’émotion de la per-
sonne, ses émanations éthériques, ses énergies, son âme
pour ceux qui préfèrent.
Ensuite, il y a ce que montre l’autre à travers sa ges-
tuelle, sa tenue vestimentaire, ses mimiques, son odeur,
le son ou le ton de la voix, en résumé ce qui fait appel à
trois sens physiologiques : la vision, l’odorat et l’audition.
Puis, il y a la troisième étape, celle où l’autre parle à
travers sa langue, son accent, sa culture, son éducation,
ses formations, ce moment où interviennent les codes,
la connaissance et leur application. Cette étape consti-
tue, selon les ouvrages spécialisés en la matière, plus ou
moins dix pour cent de l’ensemble des informations
échangées. Vous le constatez, c’est finalement très peu
par rapport à tout ce qui précède.
Très souvent, on s’arrête à ces trois points, mais on
oublie alors deux sens : le toucher et le goût.
On peut également recueillir des informations,consciem­
ment et inconsciemment, en prenant la main ou serrant la
main de quelqu’un. Je ne parle pas ici d’extralucidité, mais
d’informations concernant la personnalité, le caractère et
l’état émotionnel, voire parfois de santé, de l’autre.
Il faut de l’expérience pour en arriver là, pas
nécessairement pour ressentir mais pour interpréter
correctement le ressenti.

86
Ce qu’on ne dit pas...

Quant au goût, je me limite dans ces lignes au


moment de la bise pour saluer. Vos lèvres aussi sont des
capteurs, peut-être plus exercés chez certains que les
mains. On reçoit donc également des informations par
ce biais. C’est à nouveau une question de savoir ou non
les interpréter.
Je pense qu’après avoir lu ces quelques dernières
lignes, la plupart d’entre vous se disent : « Mais oui, je le
savais, moi aussi j’ai déjà senti ça ! » C’est normal. Il y a
juste qu’en général, on n’y pense pas.
Une fois qu’on a cela à l’esprit, on peut s’exercer.Vous
verrez, c’est étonnant tout ce qu’on peut percevoir sur
les êtres et les choses.
Les yeux sont le miroir de l’âme, dit-on. En effet,
lors de salutations ou de conversations, si vous avez
des doutes, observez, dans la mesure du possible et de
la décence, le regard de la personne en face de vous.
Avec de l’expérience, lors des salutations, vous pouvez
capter les sentiments que la personne nourrit à votre
égard et, lors d’une conversation, estimer sa franchise et
la véracité de ses propos. D’autres vont plus loin encore
et entendent au-delà des paroles les pensées réelles de
leur interlocuteur.
C’est plus courant qu’on ne pourrait l’imaginer et
je crois que notre époque favorise et favorisera de plus
en plus ce genre d’échanges à travers une lucidité plus
ouverte. Tout cela est en nous, très enfoui chez certains
et en éveil ou en phase d’éveil chez beaucoup d’autres.
Ce que vous en ferez vous appartient... mais si vous ne
le faites pas, personne ne le fera à votre place.

87
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Une étude récente, menée par le professeur Amy


Cuddy de la Harvard Business School, démontre éga-
lement que lors d’une rencontre, les gens répondent
inconsciemment à deux questions : la confiance (puis-je
faire confiance à cette personne ?) et le respect (puis-je
respecter cette personne ?).
Les psychologues se réfèrent à la chaleur du rapport
humain, à la fiabilité et aux compétences. Idéalement,
nous voulons être perçus comme un leader dans les deux
champs respectivement. Fait intéressant, Cuddy dit que
la plupart des gens, en particulier dans un contexte pro-
fessionnel, croient que les compétences sont le facteur le
plus important. Après tout, ils veulent prouver qu’ils sont
intelligents et assez talentueux pour gérer votre entre-
prise. Cependant, c’est la fiabilité qui est le facteur le
plus important dans la façon dont les gens nous évaluent.
« D’un point de vue évolutif, dit Cuddy, il est plus
primordial pour notre survie de savoir si une personne
mérite notre confiance. » C’est tout à fait logique
lorsque l’on se réfère à l’ère des hommes des cavernes…
Il était plus important de savoir si votre camarade allait
vous tuer et voler toutes vos possessions que s’il était
assez compétent pour faire un bon feu ou à manger4.
Le professeur René Zayan arrivait, en coupant le son
de la voix et uniquement en analysant la gestuelle et
les mimiques de certains hommes politiques, à prédire

4. Amy Cuddy, Presence: Bringing Your Boldest Self to Your Biggest Challenges,
Little, Brown and Company, 2015. Espritsciencemetaphysiques.com, par
C. Claire, 29 novembre 2016. https://www.ted.com/talks/amy_cuddy_
your_body_language_shapes_who_you_are?language=fr#t-49588

88
Ce qu’on ne dit pas...

sans se tromper ceux qui seraient élus et ceux qui ne le


seraient pas. C’est vous dire l’impact que le non-verbal
peut avoir sur nos regards à travers notamment notre
analyse inconsciente des autres.
En résumé, le langage non verbal est plus important
que le langage verbal, sauf dans le cas d’un choix tac-
tique exercé. Les autres perçoivent beaucoup plus avec
leurs sens que ce que vous pourrez leur dire en respec-
tant parfaitement les codes comportementaux dans nos
sociétés.
Je maintiens tout de même qu’il faut connaître ces
codes, car si on ne les maîtrise pas, on fait de toute façon
n’importe quoi. Une fois la connaissance de ceux-ci
active, grâce à l’écoute de tous vos sens, vous pouvez
la reproduire telle quelle ou adaptée pour une com-
munication meilleure et plus juste avec ceux que vous
rencontrez.

Quelques astuces
Évitez lors de rendez-vous de rester les bras croisés
devant votre interlocuteur. Même si différentes causes
peuvent provoquer cette attitude fermée, il y a fort à
parier qu’elle soit interprétée comme une forme de
rejet de la situation ou de la conversation.
Cette attitude ne peut que vous desservir, même si
vous pouvez avoir l’impression qu’elle vous protège.
Évitez d’affirmer quelque chose, comme le font
beaucoup de politiciens, en vous touchant le nez, même

89
Manuel du savoir-vivre comtemporain

d’un geste rapide. Cette attitude trahit un malaise quant


à votre affirmation, voire qu’elle est en partie ou entiè-
rement fausse.
Ne cachez pas vos mains et ne fermez pas vos mains
lorsque vous parlez avec quelqu’un. Sans voir, on peut
ressentir une position fermée.
Dans une conversation, il est souhaitable d’adapter
votre corps en orientation directe vers l’autre personne.
Votre échange en sera d’autant meilleur.
Regardez la personne avec qui vous parlez, ne la fuyez
pas des yeux. Cela reviendrait à diminuer votre crédi-
bilité. Le manque de communication avec le regard est
souvent interprété négativement.
Veillez à ce que votre visage soit ouvert et non figé
par d’éventuels problèmes. Cela ne signifie pas de sourire
béatement en permanence, mais d’accueillir l’échange
de manière positive.

90
La proxémie
Dans le cas qui nous concerne, il s’agit de la distance
physique qui sépare deux interlocuteurs.
Edward T. Hall, qui est le fondateur de cette approche,
remarque que la distance idéale varie, entre autres, en
fonction des pays et de la culture. On constate que cette
distance est assez réduite en Afrique, légèrement plus
grande dans les pays latins et plus importante encore
dans les pays nordiques et au Japon, par exemple.
Il est bon de savoir s’adapter en fonction des circons-
tances et de son interlocuteur. Si, au restaurant, le ser-
veur se colle à vous afin de prendre la commande, il y a
de fortes chances que vous soyez gêné. Il en va de même
si un inconnu vous parle en se tenant à quelques centi-
mètres de vous, sans envisager les désagréments de cer-
taines haleines, détail auquel il est important également
de faire attention.

91
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Dès lors, parlons peut-être plus de conventions, de


distance à respecter entre les êtres pour ne pas incom-
moder son prochain.
Beaucoup d’analyses circulent sur le sujet et proposent
des chiffres différents. Je me suis donc permis d’adapter
certains d’entre eux à ce qui me semble correct.
Il me paraît juste d’observer une distance de 80 à
120 centimètres avec son interlocuteur afin de ne pas
le gêner et de ne pas piétiner son champ énergétique.
Cette distance est cependant relative. Deux personnes
ayant envie de partager d’autres joies que le langage ver-
bal auront la douce tendance à se rapprocher. En sens
inverse, vous pourriez avoir envie d’augmenter celle-ci
dans un cadre purement social et public.
Ce qu’il faut retenir, c’est de respecter un certain
espace avec les autres, que celui-ci est différent selon les
personnes et les circonstances. Je fais appel à nouveau à
votre bon sens et particulièrement, dans ce cas-ci, à votre
mesure.

92
La proxémie

93
Courrier, courriel
et texto (SMS)
Courrier
Même si la technologie nous pousse vers d’autres
moyens de communication écrite, il n’en demeure pas
moins que nous utilisons toujours un porte-plume ou
un stylo et du papier dans différentes circonstances.
Les règles sont plus strictes et plus nombreuses que
pour les courriels. Je vous les propose dans les grandes
lignes.
Le format du papier habituellement admis est le for-
mat A4, si possible de meilleure qualité que les feuilles
se trouvant dans la plupart des réservoirs d’imprimantes.
Beaucoup de choix s’offrent à vous, mais ils sont trop
nombreux que pour vous en faire le détail. Retenez
toutefois que, en principe, le papier doit être de couleur
claire et, si possible, blanc ou encore blanc cassé.

95
Manuel du savoir-vivre comtemporain

EXEMPLE DE LETTRE
Jean Pomme de Tertre

Monsieur Ferdinand de la Malcour


rue de l’Inattendu 40
9933 Bar-le-Soiffard
Bruxelles, le 7 mai 2019
Cher Monsieur,
Votre courrier m’est bien parvenu.
Je vous remercie infiniment des quelques précisions que vous
avez bien voulu me transmettre.
J’ai bien noté que vous descendiez directement du comte
Dracula.
Je me ferai un plaisir d’établir clairement votre ascendance
avec une ligne rouge continue dans votre interminable arbre
généalogique.
Je ne vous ai pas consulté pour le choix de cette couleur ô
combien symbolique, mais j’ose espérer avoir devancé votre
souhait.
Je vous prie d’agréer, cher Monsieur, l’expression de ma
profonde considération.
Signature
rue Alain Proviste 3
1000 Bruxelles
jpdt@gmaile.com
+32456778899

96
Courrier, courriel et texto (SMS)

Il est d’usage d’indiquer vos prénom et nom dans


le coin supérieur gauche de la feuille. C’est ce qu’on
appelle l’en-tête. L’adresse suit en général juste en-des-
sous, mais peut également se trouver dans le coin infé-
rieur droit, parfois en impression plus claire et alignée
vers la droite.
Il est courant d’y faire figurer aujourd’hui votre
adresse électronique, numéro de téléphone et, éventuel-
lement, site internet.
Si vous faites figurer votre numéro de téléphone, pen-
sez à être plus international : +336, +324, etc.
Il est inutile d’inscrire tél., puis votre numéro, puis
e-mail suivi de votre adresse électronique et ainsi de
suite. Cela devient ringard...
Retenez qu’on écrit e-mail et non mail. C’est une
erreur courante.
Les nom et adresse du destinataire se trouvent en
général un peu plus bas que l’en-tête et décentrés vers
la droite.
Juste au-dessous, un peu plus bas et alignée de la
même manière vient la date : « Le 7 mai 2017 » avec des
variantes, si cela vous amuse, en fonction du destinataire.
Vient ensuite plus bas à gauche l’appel.
Voici quelques exemples d’appels séants.

Bonjour Philippe Réservés aux courriels


Bonjour Monsieur

97
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Madame, Mais jamais


Mademoiselle, Chère Madame*
Madame Trucmuch,
Chère Madame
Trucmuch,

Monsieur, Plus administratif

Cher Monsieur, Plus élégant

Cher Monsieur Plus familier ou


Trucmuch, commercial

Madame, Monsieur, Remarquez qu’ici on


commence par s’adresser à
la femme.

Chère Marie,
Cher Philippe,
Chers Marie et
Philippe,

* Cet appel est cependant très pratiqué et le sera sans


doute de plus en plus. La position des femmes dans la
société évoluant, il devient de plus en plus difficile de jus-
tifier le rejet de cette forme.

Pour les autres appels liés à des fonctions, vous pouvez


reprendre d’une manière assez générale les appels oraux
vus précédemment.

98
Courrier, courriel et texto (SMS)

Vous pouvez, au besoin, ajouter un objet au-dessus


ou au-dessous de l’appel. Il est d’usage ensuite de ne pas
commencer le corps de votre lettre par « Je ».
Le courrier réclame de vraies formules de politesse.
Cela ne veut pas dire qu’il est exclu d’utiliser des formules
courtes comme « Bien cordialement » ; c’est à nouveau une
question de savoir à qui vous écrivez et de bon sens.Tout le
monde cependant ne les accepte pas pour une lettre.
Quelques formules5 parmi beaucoup d’autres :

PRIVÉ
î R ecevez, Madame, Monsieur, mes salutations
distinguées.
î Croyez, Madame, Monsieur, à mes sentiments les
meilleurs.
î Veuillez trouver ici l’assurance de mon amitié.

ADMINISTRATIF
î D ans l’attente de votre accord, je vous prie
d’agréer, Madame, Monsieur, mes salutations
distinguées.
î Je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’assu-
rance de ma sincère considération.
î Veuillez recevoir, Madame, Monsieur, nos plus
cordiales salutations.

5. Dont certaines proviennent de ce site web : www.lettres-gratuites.com.

99
Manuel du savoir-vivre comtemporain

100
Courrier, courriel et texto (SMS)

FORMEL
î D ans l’attente de vous lire, je vous prie d’agréer,
Monsieur, l’expression de ma considération
distinguée.
î J’ai l’honneur, Monsieur l’Ambassadeur, de pré-
senter à votre Excellence l’expression de ma très
haute considération.

COURT
î Bien cordialement.
î Au plaisir de vous lire.
î Bien à vous.
î Sincères salutations.

Il y a quelques erreurs discrètes qu’on rencontre cou-


ramment. Peu les relèvent tellement elles sont subtiles :
î « l’expression de » et « l’assurance de » doivent être
suivis d’un nom désignant un sentiment. On rem-
place alors « salutations distinguées » par « sentiments
distingués » ou encore « parfaite considération ».
î « l’expression de » ne peut être associée avec le verbe
« croire », mais bien « agréer ».
î En revanche, « Veuillez croire en mes sincères saluta-
tions » est correct.
î On évite le mot « sentiments » pour une femme seule,
sauf s’il s’agit d’une déclaration d’amour...

101
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Quelques détails :
î Il est courant désormais de commencer chaque élé-
ment du corps d’une lettre à gauche sans espacement.
î Il faut toujours signer une lettre manuellement.
î Il est parfaitement possible d’écrire une lettre entiè-
rement à la main, de se servir d’un traitement de
texte pour son entièreté (sauf la signature), ou encore
d’écrire de manière manuscrite uniquement l’appel,
la formule de politesse et la signature, afin de la rendre
plus personnelle lorsque tout le reste est imprimé.

Il existe de nombreuses autres nuances bien évidem-


ment, les explications ci-avant sont basiques, mais per-
mettent à ceux qui ont perdu la notion du courrier de
se débrouiller correctement.
Écrire à certaines personnalités réclame parfois une
disposition modifiée des différents éléments de la lettre
et des formules précises. Il existe dans ce cas des infor-
mations sur internet et dans les différents services de
protocole associés à ces personnes.

L’enveloppe
Parler de la manière dont on écrit l’adresse sur une
enveloppe a l’air anodin et pourtant...
Idéalement, l’emplacement réservé au nom et à
l’adresse du destinataire se trouve vers la droite et vers le
bas.Vous pouvez nuancer quelque peu celui-ci en fonc-
tion de la dimension de l’enveloppe, mais jamais en haut
à gauche ou à droite.

102
Courrier, courriel et texto (sms)

Si cela semble évident pour vous, sachez que c’est


visiblement loin de l’être pour tout le monde.
Il y a également des manières de rédiger les nom et
adresse.
Pour un couple mixte6 marié :

Monsieur et Madame Jean Trucmuch OUI


Monsieur et Madame Jean Trucmuch NON
- Trucman

La règle est de ne pas mentionner le nom de l’épouse


à la suite du nom du mari. Cela fait également très mau-
vais genre dans les milieux raffinés.
Je suis favorable au maintien de cette règle.
Toutefois, contre une levée éventuelle de boucliers,
que je sens venir de la part de femmes qui refusent de ne
pas pouvoir socialement porter leur nom, ce que je peux
parfaitement comprendre et accepter, je propose ceci :

Monsieur Jean Trucmuch et Madame OUI*


Isabelle Trucman

Jean Trucmuch et Isabelle Trucman OUI*

6. Je suis conscient que le terme « mixte » ne plaît pas à certaines personnes, mais
ce livre s’adresse à tout le monde à travers les réalités de notre époque.

103
Manuel du savoir-vivre comtemporain

* Ce n’est pas accepté par tout le monde, mais c’est une


tendance qui prend de l’ampleur.

On peut logiquement décliner quasi de la même


manière le nom de destinataires homosexuels vivant
ensemble, pacsés ou mariés :

Mesdames Isabelle Dupont et Véronique OUI


Durand

Messieurs Jean Dupont et Marcel Durand OUI


Dominique Dupont et Dominique OUI
Durand

Les abréviations sont tolérées sur l’enveloppe et non


dans le contenu de la lettre :

M. et Mme Jean Trucmuch OUI

Mr. et Mme Jean Trucmuch NON*


Mmes Isabelle Durand et Véronique Dupont OUI
* Notez que « Mr » n’est pas une abréviation de la langue
française, mais anglaise.

104
Courrier, courriel et texto (sms)

Voici les abréviations les plus courantes :

TITRE ABRÉVIATION PLURIEL


Monsieur M. MM.

Madame Mme Mmes

Mademoiselle Mlle Mlles

Professeur Pr ou Prof. Prs

Docteur Dr Drs

Maître Me Mes

EXEMPLES
î Colonel et Madame Jean Trucmuch
î Professeur et Madame Jean Trucmuch
î Docteurs Jean et Isabelle Trucmuch
î Marquis et Marquise Jean de Trucmuch
î Marquis et Marquis de Trucmuch (si c’est le chef
de famille)

Il y a évidemment des cas compliqués, comme pour


les ambassadeurs, par exemple, qui comportent en plus
quelques subtilités.

105
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Je ne suis pas en accord avec la pratique proposée


dans les différents protocoles, car je pense sincèrement
qu’ils ne sont plus adaptés aux nombreuses possibilités
nouvelles qu’offrent notre début de siècle et l’évolution
des mentalités, mais rien que ce cas particulier me
demanderait de nombreuses pages d’explications et
de propositions, ce qui n’est, à nouveau, pas le but du
présent livre.
Dès lors, en attendant que les choses changent, je
ne puis que vous suggérer de suivre les indications des
protocoles officiels.
Il y a, dans ce paragraphe, encore un point que je
souhaite aborder. C’est un détail qui peut vous procurer
un passe-droit gold pour le royaume des pignoufs... en
tout cas au regard de certains milieux. C’est pourtant
très fréquent et même de la part de chefs d’État ou du
moins de leur cabinet. Voici :

Famille Jean Trucmuch NON

Sachez que si cela reste tout à fait du français, le


savoir-vivre ou le savoir-faire ou encore l’élégance ne
l’acceptent pas.
S’il y a des enfants et que l’on veut les associer à
l’envoi du courrier, on ajoute simplement leur prénom
au-dessous de celui de leurs parents. C’est aussi simple
que cela et ne prend pas beaucoup plus de temps que
d’écrire « Famille ».

106
Courrier, courriel et texto (sms)

À terme, et à partir de ce que je peux observer, même


dans les milieux raffinés, instruits et cultivés, je pense
qu’on abolira l’usage des titres (Monsieur, Madame et
autres). On écrira de plus en plus naturellement les pré-
noms et noms des destinataires. Ce mouvement tend
à se généraliser et, personnellement, je pense que c’est
peut-être une bonne chose...

Courriel
Écrire un courriel est bien plus simple, plus rapide et
gratuit. Si le texto permet de plus en plus d’abréviations
heureuses et malheureuses ou un langage propre, ce n’est
pas le cas de l’e-mail. Les règles de communication y sont
simplifiées, mais doivent rester dans un français maîtrisé.
Il admet toutes les règles de langage du courrier tra-
ditionnel et permet surtout beaucoup de simplification :
î Inutile d’indiquer la date.
î Il ne faut plus indiquer le nom du destinataire,
sauf éventuellement dans l’objet si vous l’envoyer à
une adresse plus générale comme « contact@ » ou
« info@ ».
î Vous ne devez plus signer manuellement.
î Vous pouvez (tout le monde ne l’admet pas, je le
rappelle) commencer par « Bonjour », « Bonjour
Monsieur », idem pour « Madame ».
î Vous pouvez utiliser des formules de politesse beau-
coup plus courtes telles que « Bien cordialement »,
« Cordialement », « Bien sincèrement », « Bien à

107
Manuel du savoir-vivre comtemporain

vous », mais jamais « Au plaisir », comme on l’a déjà


vu, mais bien « Au plaisir de vous lire », par exemple.

Texto (SMS)
Celui-ci permet beaucoup plus de libertés, surtout
dans les jeunes générations.
Il permet toutefois de reproduire le même genre de
texte que celui contenu dans un courriel et aussi d’en-
voyer des informations simplifiées. Il est malgré tout
important, dans le cas où le destinataire n’est pas un
habitué de vos envois, de signer. Personnellement, je
reçois de temps en temps des SMS de personnes dont le
numéro de portable n’est pas encodé dans la mémoire
de mon téléphone et dont j’ignore complètement
l’identité.
Pour la manière d’écrire chez de plus en plus de
jeunes, je ne suis pas compétent. Je remercie les autres
de faire attention lorsqu’ils s’adressent à moi et d’utiliser
la langue de Molière : communiquez intelligemment.
Je leur laisse les nouveaux langages, c’est peut-être
l’avenir et celui-ci leur appartient...

108
Inviter
Il y a de plus en plus de manières d’inviter à notre époque
avec tous les supports qui nous sont proposés. La manière
la plus raffinée reste le carton de belle qualité, avec le nom
écrit à la main bien sûr, mais beaucoup d’invitations se font
aussi par e-mail et texto. L’important est d’adapter le support
et les formules en fonction des invités et de la réjouissance.
Je vous propose d’envisager ici le carton. Il suffit par-
fois de reproduire les différentes invitations papier par
e-mail, tandis que le texto s’adresse à la sphère nette-
ment plus amicale, intime, jeune et certains marketings.
Si vous optez pour un carton, choisissez-le de pré-
férence épais et de belle qualité (au moins 300 g).
Traditionnellement, on utilise les tons clairs, des formats
standards ou non et des typographies classiques.
Rien de tout cela n’est obligatoire, mais sachez alors
qui vous invitez et pour quelles circonstances.

109
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Le design actuel vous permet de transgresser toutes


les règles de présentations anciennes et toujours en
cours. À vous de voir, mais faites attention à rester dans
le bon goût et l’élégance...
î On commence par le nom de celui, celle ou ceux
qui invitent. Généralement, on les porte vers la droite,
mais ceux-ci peuvent être aujourd’hui centrés égale-
ment. Si on respectait vraiment les règles, tout devrait
plutôt être porté vers la gauche, mais quasi plus per-
sonne ne le fait.
î En deuxième lieu, le verbe : « prie » ou « prient », placé
à la suite des noms qui invitent si le tout est porté vers
la droite ou centré à la ligne s’ils sont centrés.
î En trois, les pointillés..............................................
qui accueillent le nom écrit à l’encre du, de la ou des
invités.
î En quatre, l’action : « de leur faire le plaisir d’assister ».
î En cinq, le détail de l’action : « au cocktail qu’ils
donneront ».
î En six, le motif éventuel : « à l’occasion des cinq ans
de leur caniche ».
î En sept, le lieu : « chez eux, au château de Montmiraille
à 78999 Montmiraille » ; on peut voir parfois aussi :
« au château de et à 78999 Montmiraille ».
î En huit, la date : « le samedi 7 mai prochain (ou 2023)
de 18 heures 30 à 21 heures 30 (ou dès ou à partir de
18 heures 30). Notez que, dans ce cas, on écrit « heures »
en toutes lettres.
î En neuf, les indications pratiques, souvent en ita-
lique et plus petit, en bas à gauche : « Tenue de ville »,

110
Répondre à une invitation

« Tenue autre », « Touche de couleur », « Parking


réservé », « Service voituriers », etc.
î En dix, comment répondre, toujours en italique et
plus petit, en bas à droite : « R.S.L.P. avant (ou pour)
le 15 avril 2023 », et, en dessous, l’adresse électronique
par exemple pour répondre. On utilise « R.S.L.P. »
lorsqu’on invite à la troisième personne, sinon « R.S.V.P. »
ou encore « Réponse souhaitée » (de plus en plus à la mode).
La demande de réponse à une adresse e-mail se généralise.
Dans certains cas, est joint à l’invitation un carton de réponse
sur lequel il suffit de cocher des cases et de le renvoyer.

Je viens de proposer un exemple d’invitation classique


et relativement mondaine. On peut décliner tout cela de
nombreuses manières. Le tout est de bien le faire. Si vous
avez des doutes, un bon imprimeur est censé pouvoir
vous répondre, mais ceux qui savent se font rares.

EXEMPLE DE CARTON D’INVITATION


Geoffroy et Laurence Jossenaude
prient

...................................................................................................
de leur faire le plaisir d’assister au cocktail qu ils donneront
chez eux, 125, rue Las Cases à 75007 Paris,
le jeudi 7 mai prochain de 18 heures 30 à 21 heures 30.

Tenue de ville R.S.L.P. avant le 30 avril


Parking réservé place Saint-Boniface cocktail@ jossenaude.fr

111
Manuel du savoir-vivre comtemporain

112
Répondre à une invitation
Lorsqu’on reçoit une invitation, il faut y répondre
correctement.
Si c’est par SMS, vous répondez par SMS, si c’est par
e-mail, vous répondez par e-mail et si vous avez le bon-
heur de recevoir un magnifique carton, vous répondez
selon la manière indiquée en bas à droite de celui-ci.
La formule de réponse doit correspondre à celle de
l’invitation, que la réponse soit demandée par carton en
retour, donc lorsque vous voyez indiqués un nom et une
adresse postale, ou par e-mail.
Il y a, en outre, quelques détails importants à connaître.
î On écrit à l’encre sur un carton ou avec un feutre qui
fait illusion, mais pas avec un stylo à bille.
î La couleur de l’encre doit, si possible, rester classique ;
noir, bleu, sépia, etc. vers les tons foncés. Évitez le rose,
fuchsia, etc.

113
Manuel du savoir-vivre comtemporain

î On n’ajoute pas de formule de politesse.


î On ne date pas un carton de réponse.
î On ne signe pas un carton de réponse.

EXEMPLES DE RÉPONSE
« Jean et Isabelle Trucmuch remercient vivement
Monsieur et Madame Edward Bol pour leur très
aimable invitation à assister au cocktail qu’ils don-
neront chez eux le 7 mai prochain. C’est avec plaisir
qu’ils s’y rendront (ou qu’ils y assisteront)*. »

ou

« ... C’est avec regret qu’ils ne pourront s’y rendre


étant à l’étranger à cette date. »

* Vous n’êtes pas obligé d’ajouter « pour les cinq ans de


leur caniche », le château et les heures. Ce n’est pas inter-
dit, mais cela reste très scolaire et alourdit surtout le texte.

Les formules peuvent varier. Il ne s’agit ici que d’un


exemple parmi d’autres, mais qui a le mérite d’être clair
et court.
Dans le cas d’une invitation à un cocktail de mariage,
on peut notamment ajouter par anticipation des félicita-
tions si on ne peut s’y rendre.

114
Remercier
Après avoir assisté à l’événement, il est parfois de bon
ton de remercier, essentiellement si celui-ci se déroulait
dans la sphère privée. La manière de remercier dépend
de la manière dont vous avez été invité et aussi du rap-
port que vous entretenez avec ces personnes.
Donc, à vous de choisir intelligemment entre le car-
ton, le courriel ou le texto.
Les invitations à des événements plus formels, comme
à une ambassade, à l’Élysée ou au palais de Bruxelles ne
réclament aucun remerciement. On ne vous en voudrait
certainement pas, mais vous risqueriez de passer pour un
brave provincial.
Il en va de même pour tout ce qui est vernissage,
même de très haut niveau, sauf éventuellement si vous
connaissez très bien les hôtes et que vous avez envie de
leur faire plaisir ou d’être invité à nouveau.

115
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Dans ce cas, il vaut mieux acheter et devenir client.


Il y a fort à parier qu’on ne vous oubliera pas pour les
prochains cocktails de vernissage.

116
Recevoir chez soi
Brillat-Savarin (1755-1826), Jean Anthelme de son
prénom, célèbre gastronome, écrivait dans la Physiologie
du goût : « Convier quelqu’un, c’est se charger de son
bonheur pendant tout le temps qu’il est sous votre toît. »
Cela résume assez bien dans l’ensemble l’esprit des
lignes qui suivent...
En effet, recevoir, c’est en quelque sorte accueillir
afin de partager. À partir du moment où l’on décide
de recevoir qui que ce soit, pour quelque raison que ce
soit et sous une forme ou une autre, il faut en avoir la
volonté sincère et le faire bien. Il y a des personnes pour
qui recevoir est quasi inné et d’autres qui feraient bien
de s’inspirer de ce chapitre. Ce n’est à nouveau pas une
question de milieu social, si ce n’est que le savoir-faire
peut être favorisé dans les milieux habitués, mais ce n’est
pas absolu, loin de là. Il y a également des entreprises

117
Manuel du savoir-vivre comtemporain

qui s’occupent de tout organiser pour vous dans les


moindres détails, c’est un avantage à notre époque, mais
cela a aussi son prix...
Ainsi, rien de tel que d’incarner la philosophie du
« bien recevoir », que vous déléguiez ou organisiez tout
de votre propre chef.

118
Recevoir chez soi

Le cadre
Il y a quelques règles auxquelles je suggère de ne pas
déroger, que vous réchauffiez une pizza (n’y voyez pas
un dénigrement de ce plat, j’adore les pizzas) ou envisa-
giez un menu gastronomique.
Avant tout, que cela soit chez vous ou dans un lieu que
vous louez, vous devez faire en sorte que tout soit propre,
sans aucune négligence. Les invités doivent sentir qu’ils sont
attendus avec plaisir. La propreté dont il est question ici, ce
n’est pas éventuellement quelques poussières qui traînent (il
faut bien entendu que l’endroit ne soit pas non plus com-
plètement poussiéreux), mais que cela soit rangé, que tout ce
qui pourrait s’accumuler dans la vie de tous les jours ne soit
plus apparent, que les choses soient agréables pour la vue.
Pour la joie du regard, vous pouvez ajouter des fleurs.
Elles rendent toujours un lieu plus vivant. Si ces fleurs
dégagent un parfum relativement fort, laissez-les dans
un lieu de passage ou dans un salon dans lequel le repas
éventuel n’est pas servi.
Si votre maison devait souffrir de quelques mauvaises
odeurs d’humidité, de cuisine ou autres, envisagez, avant
l’arrivée de vos invités, de faire brûler un encens natu-
rel de qualité, par exemple, afin de rendre l’atmosphère
agréable pour l’odorat. Faites toutefois attention aux
odeurs artificielles et chimiques, cela peut rendre le cli-
mat encore plus désagréable...
Si vous avez une cheminée qui fonctionne bien et si
la saison le permet, faites un feu. Tout le monde aime le
feu, tant pour sa chaleur que pour son chant et le plaisir

119
Manuel du savoir-vivre comtemporain

de le regarder. Il en va de même pour les bougies, allu-


mez-les. Si vous ne pouviez le faire pour une raison ou
une autre, ne laissez pas une mèche blanche, mais brû-
lez-la au moins une petite minute lorsque vous placez la
bougie dans son bougeoir.
Si ce détail semble anodin, il ne l’est pas pour les per-
sonnes raffinées qui, en général, ont l’œil exercé.

La musique
Si vous diffusez de la musique, que celle-ci soit audible,
mais non désagréable à l’oreille. Une musique de fond,
cela veut dire ce que cela veut dire, sinon, invitez vos
amis à un concert. Beaucoup de personnes reçoivent
chez eux sous une musique diffusée plein tube : cela
empêche tout simplement les convives de converser
entre eux, sauf en faisant de terribles efforts.
Il y a également le choix de la musique. Il est pré-
férable dans ce cas d’opter pour une musique agréable,
douce et joyeuse, dans le genre concerto baroque ou
classique, jazz, variété, etc.
Évitez les musiques trop rythmées, tant anciennes que
contemporaines, ou soporifiques ; votre soirée en subi-
rait les inconvénients. La musique est très importante :
elle est véritablement actrice de l’énergie qui se forme
lors d’une réunion. Elle est d’ailleurs utilisée dans cer-
taines rares entreprises pour réguler l’humeur du per-
sonnel, voire augmenter la production. Dès lors, préférez
Bach à Malher ou encore Bénabar à ACDC...

120
Recevoir chez soi

Voici en quelques lignes ce à quoi il faut penser pour


recevoir convenablement chez soi, qu’on soit riche ou
non, qu’on habite un château ou un studio, qu’on serve
un sanglier aux airelles ou un spaghetti au beurre.
Il s’agit ici à nouveau de respect de vous et de vos
invités. C’est la première impression qu’ils vont avoir
en arrivant. Vous pouvez orienter de cette manière leur
humeur et leur envie de partager ou non. Ce cadre
d’accueil vaut aussi bien pour un apéritif que pour un
cocktail, un déjeuner ou un dîner. Cela s’adresse aux
situations non improvisées, bien que certains aient une
maison toujours prête à recevoir, même en situation de
surprise. Je dirais que c’est plus une question de menta-
lité, voire un véritable art de vivre.

Votre tenue
Il est d’usage pour ceux qui reçoivent d’adopter la
tenue de circonstance, mais juste un petit cran en dessous.
Le principe est de faire honneur à vos invités, mais de
ne pas les mettre mal à l’aise.
Dès lors, respectez le thème de manière simple. Les
femmes peuvent bien évidemment être élégantes, mais
sans se laisser aller à la surenchère vis-à-vis de certaines
invitées qui n’ont pas les moyens de s’offrir des articles
de grand luxe et donc coûteux. C’est toujours une ques-
tion de bon sens et aussi d’humanisme.
Lors d’une conférence que je donnais sur le thème
de savoir recevoir, je parlais de la manière de s’habiller

121
Manuel du savoir-vivre comtemporain

et de se « garnir ». Une jeune femme a insinué que je


racontais n’importe quoi, car sa mère lui avait toujours
dit, lorsqu’elle était petite, qu’elle devait être la plus belle
lorsque ses parents recevaient à la maison. C’est vrai, les
enfants de parents qui reçoivent doivent être bien habil-
lés pour faire honneur aux invités et également à leurs
parents. Cette jeune femme avait juste oublié qu’elle
avait grandi – elle devait avoir une bonne trentaine d’an-
nées – et que les règles changent en fonction des âges et
aussi des circonstances.
Je ne puis, une fois encore, suite à cet exemple anodin,
que vous encourager à exercer votre bon sens à travers la
connaissance, l’observation, l’analyse et une application
intelligente en fonction des paramètres.

Les heures
Il y a dans notre société occidentale des heures pour
tout.
Si vous invitez pour un petit déjeuner d’affaires,
adaptez-vous à l’emploi du temps de votre interlocu-
teur. Cela peut être tôt, à 7 heures par exemple, mais, en
général, pas au-delà de 9 heures 30.
Il est d’usage pour le déjeuner d’inviter entre 12 et
13 heures, en tout cas dans la sphère privée.
Dans la sphère professionnelle, il faut bien entendu
adapter ces heures en fonction de la distance séparant les
bureaux, du temps qu’il faut pour se rendre éventuelle-
ment au restaurant, du temps disponible, etc.

122
Recevoir chez soi

Pour un cocktail, on n’invite normalement que très


rarement avant 18 heures et jamais au-delà de 20 heures,
ce qui n’implique pas que tout se termine à 20 heures
(on envisage ici les heures de début des festivités). On
rencontre souvent, en fonction des villes et pays, « de
18 heures 30 à 21 heures 30 » ou encore « dès 19 heures ».
Quant à l’apéritif, il est courant d’inviter autour de
19 heures. Le principe est de permettre aux gens de
prendre au moins un ou deux verres avant de dîner, sauf
évidemment si cet apéritif se veut dînatoire, ce qui se fait
de plus en plus.
En effet, il y a l’apéritif, l’apéritif dînatoire, le cocktail,
le cocktail dînatoire, le cocktail et buffet, etc. Le principe
est de grignoter tout au long de la soirée et, dans le cas
du buffet, de le proposer dès 21 heures.
L’heure traditionnelle pour le dîner est en général
20 heures. Celle-ci peut aussi varier en fonction des pro-
fessions de chacun et donc être fixée à 20 heures 30, et
dans d’autres cas être avancée à 19 heures, par exemple,
lorsqu’il y a des enfants qui se joignent à celui-ci.
Dans ce cas de figure, n’hésitez pas à faire dîner les
enfants plus tôt, pendant que les adultes prennent l’apé-
ritif, et de les occuper à autre chose, voire de les coucher,
lorsque le dîner des adultes commence. Il y a heureu-
sement des enfants bien éduqués qui se tiennent très
bien à table avec les adultes et également les autres qui
retiennent toute l’attention et dont il faut s’occuper tout
le temps. C’est un choix, mais n’imposez pas celui-ci à
vos invités, sauf s’ils sont complètement fous des enfants.

123
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Les parents ne se rendent pas toujours compte que


leurs enfants ne sont pas ceux des autres et que la joie de
s’en occuper n’est pas de facto contagieuse...

Le menu
Le choix de votre menu est aussi un élément impor-
tant lorsque vous recevez chez vous.
Que vous ne cuisiniez qu’un plat très simple ou pré-
pariez un menu complexe, la trame est la même.
Dans la mesure où vous ne connaissez pas les goûts de
tout le monde, il est préférable de rester dans un choix
culinaire relativement neutre. Cela reste vaste, je vous
rassure. C’est ce qui se passe pour les dîners officiels
et plus formels. En général, les personnes subissant un
interdit alimentaire, ou adhérant à certaines prescrip-
tions restrictives, le font savoir gentiment à un moment
ou l’autre à l’hôte afin d’éviter un désagrément. Ce
n’est pas impoli et plutôt préférable que de risquer de
se retrouver devant un plat que vous ne pouvez manger.
Dans les situations plus formelles, vous pouvez contacter
le secrétariat afin de faire part d’un interdit alimentaire,
ils en ont généralement l’habitude.
Si vous recevez à la maison de manière élégante, mais
non formelle, vous pouvez très bien demander lors de
l’invitation à vos invités s’ils souhaitent éviter un aliment
ou l’autre. Si cela vous semble compliqué, prévoyez alors
un plat facile de rechange.

124
Les boissons
C’est toujours une question de circonstances. Je ne
peux envisager toutes les circonstances, mais voyons les
principales. D’une manière générale, ayez toujours du
vin rouge, du vin blanc au frais, des bières fraîches, du
porto, du whisky, du jus de fruit et de l’eau. En principe,
avec cela, vous pouvez sauver la mise. Dans le Sud de la
France, n’oubliez pas le pastis...
Si vous organisez un cocktail, il est idéal de retrouver
sur les plateaux des flûtes de champagne en majorité
(plus ou moins les deux tiers) ou contenant une bonne
méthode traditionnelle, un cava ou autres bulles, des
verres de vin rouge et de vin blanc (car tout le monde
n’apprécie pas les bulles), deux ou trois jus d’orange, un
ou deux jus de tomate et de l’eau. Cela suffit amplement.
Il est inutile, sauf pour un thème bien précis, d’y ajou-
ter d’autres boissons. Toutefois, il est important d’avoir
en réserve au frigo de la bière, du coca (ne serait-ce
que pour pallier une chute de tension de la part d’un
invité), du jus de pomme pour les enfants et également
du whisky, de la vodka ou autre. Les habitués de ces
breuvages non conventionnels sur les plateaux savent
qu’ils ne les y retrouveront pas et en feront la demande.
Il est heureux de pouvoir les satisfaire également.
Pour un repas assis, si vos invités viennent tous avec
du vin alors que rien n’est demandé, ce qui est de plus en
plus fréquent – nous abordons ce sujet un peu plus loin
–, n’ouvrez pas ces différentes bouteilles pour eux. C’est
la meilleure manière de rendre tout le monde malade

125
Manuel du savoir-vivre comtemporain

à cause des mélanges. Si vous recevez convenablement


chez vous, vous êtes censé avoir tout prévu : non seule-
ment du vin en harmonie avec votre soirée et vos plats,
mais également du vin qui n’a pas été agité pendant le
trajet de vos invités pour se rendre chez vous.
Ayez du blanc et du rouge, tout le monde ne boit pas
les deux. Tout prévoir signifie aussi de commencer par
un vin plus léger afin de terminer par le même ou un
vin plus corsé. Si vous n’y connaissez rien, un caviste
pourra en principe vous conseiller. Ce n’est pas pour
cela que vous devrez débourser plus d’argent...
Il s’agit ici de conseils pour un repas conventionnel
normal. Rien ne vous empêche de proposer un concept
« découverte », où chacun amène sa part ou son flacon.Tout
est possible aujourd’hui, il faut juste savoir de quoi on parle.

Le choix des invités


Il est essentiel de bien choisir ses invités. Il n’est pas
toujours possible d’éviter certains invités dont le carac-
tère est à risque, comme dans le cas des mariages, par
exemple, mais on compte alors sur le nombre de per-
sonnes et la politesse de chacun.
Nous n’aborderons pas ici le thème des grands cock-
tails dans lesquels il y a plus de monde, voire beaucoup
de monde, mais intéressons-nous à des nombres plus
restreints.
Dans ces cas précis, il est souhaitable de bien sélec-
tionner ceux qui viennent s’asseoir à votre table. Un

126
Recevoir chez soi

repas, c’est bien sûr boire et manger, mais c’est aussi,


et surtout, rencontrer d’autres personnes, partager des
idées sur des sujets, échanger, séduire, etc. La nourri-
ture et la boisson peuvent être des supports à l’alchimie,
voire dans certains cas une véritable alchimie en soi...
Dès lors, il faut choisir des personnes qui sont dans le
respect d’elles-mêmes, qui sont agréables et ouvertes à la
rencontre ainsi qu’aux échanges d’idées. Cela ne devrait
normalement pas être compliqué, mais cela peut parfois
demander de la subtilité. Évitez de placer côte à côte un
religieux conservateur intégriste et un militant pour le
mariage pour tous, cela serait assez maladroit...
Il y a également l’importance des invités, sociale
ou professionnelle. Il y a des places traditionnellement
réservées aux invités d’honneur, mais nous aborderons
ce chapitre un peu plus loin.
L’essentiel, c’est de bien les choisir. Si vous recevez,
présentez-les aux autres lorsqu’ils arrivent.
Si vous n’êtes pas trop nombreux, présentez-les une
seule fois, puis présentez-leur chaque invité présent,
ou laissez-les évoluer eux-mêmes seuls vers les autres.
Il est inutile de se formaliser aux différentes règles qui
régissent les salutations dans ce cas. Cela pourrait être
lourd. Suivez simplement l’évolution logique de leur
emplacement dans la pièce.
Si les choses sont très formelles, alors appliquez les
règles. Cela évite de froisser la susceptibilité des uns et
des autres. C’est à nouveau une question de bon sens.

127
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Le placement à table
Ici également, il y a deux manières traditionnelles de
bien faire les choses. Il y a le placement à la française
qui suggère que le maître de maison s’assoit au milieu
de la partie longue de la table et son épouse en face. En
Angleterre, ceux-ci s’assoient aux extrémités de la table.
Dans les deux cas, on place l’invité d’honneur à droite
de Madame et l’invitée d’honneur à droite de Monsieur.
La gauche des maîtres de maison est également réservée
pour un(e) autre invité(e) d’honneur.
En principe, selon tous les ouvrages traitant du sujet,
on place un homme, puis une femme et ainsi de suite.
On sépare les couples, sauf si ceux-ci sont fiancés ou
mariés depuis moins d’un an.
Lorsqu’il y a plusieurs tables, on peut également,
lorsque les couples ont l’habitude de tous ces dîners, les
installer à des tables différentes.
C’est ce qu’on appelle une règle générale qui ne peut
que subir de plus en plus d’exceptions vu l’évolution
de notre société. En effet, les repas ne sont pas toujours
possibles avec une parité parfaite. On parle de couples
mariés. Ne doit-on pas prendre en considération ceux
qui sont pacsés, les couples de fait (de longue date) ou
ceux qui paient leurs impôts ensemble car reconnus
comme couple fiscal ? Je pense sincèrement qu’on ne
peut ignorer ces réalités et qu’il faut les intégrer sans
restriction.
Si vous décidez de recevoir de manière formelle, faites
alors le nécessaire pour respecter les règles. Vous verrez,

128
Recevoir chez soi

ce n’est pas toujours évident et il faut parfois être subtil,


voire stratège.
Dans l’immense majorité des autres réceptions, l’al-
ternance homme/femme reste une bonne chose, mais
je pense que cette considération peut s’incliner devant
les affinités des uns et des autres. N’est-ce pas là le plus
important finalement, que tout le monde présent puisse
agréablement partager à travers ses centres d’intérêt, ses
désirs, ses apprentissages ? Placer vos invités à table, c’est
vouloir leur faire vivre une belle soirée en répondant à
leurs attentes, qu’elles soient formulées ou non.
Ceci dit, il faut prendre en considération la préséance
de certaines personnes. Cette préséance peut être liée
à l’âge, à la fonction ou encore à la position sociale. En
général, elle se sait et cela se fait naturellement. Dans
d’autres cas, il existe des listes de préséances officielles
émises par les services de protocole. Elles sont très pré-
cises, longues et consultables sur internet. Certaines
mériteraient, selon moi, quelques améliorations (dans le
sens d’un petit coup de vent frais), mais il semble difficile
de faire bouger la montagne...

La fin de soirée
Elle peut être différente chez les uns et les autres, mais
d’une manière générale, il y a des petites astuces pour
faire comprendre, lorsque la chose n’est pas entendue,
que tout a une fin...

129
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Vous pouvez ne plus servir d’alcool. Ceux qui aiment


bien boire un « petit verre » comprennent alors qu’il est
temps de partir. Les pignoufs, eux, réclament l’ouverture
d’un autre flacon.
Si le temps vous semble long, il est toujours temps
de bâiller discrètement en priant de vous excuser, car
vous êtes surpris par la fatigue. Si les pignoufs ne lèvent
toujours pas le camp, il est temps de dire gentiment et
poliment que vous avez été ravi de les recevoir, que vous
avez passé une belle soirée en leur compagnie et que
sur cette belle note, il est l’heure de rejoindre les bras de
Morphée... En principe, cela devrait être suffisant.

Les détails qui tuent


Il y en a malheureusement aussi. Comme je l’écris un
peu avant, recevoir, c’est vouloir faire plaisir.
Je vais vous raconter une petite histoire qui m’est
arrivée il y a de nombreuses années.
Je n’aime pas particulièrement fêter mon anniver-
saire, car je n’y accorde pas vraiment d’importance. Cette
année-là, une connaissance insiste afin d’organiser un dîner
d’anniversaire pour moi en compagnie de quelques amis.
Je décide d’accepter, me disant que c’est tout de même
très gentil de sa part et que cela me fera plaisir de revoir
mes amis. Le rendez-vous est fixé et je m’y rends l’âme
légère et réjouie. Arrivant chez elle, je sonne et personne
ne répond. Elle était en retard. Cela peut arriver, ceci dit,
même si l’occasion était mal choisie. Après 20 minutes

130
Recevoir chez soi

d’attente, elle arrive, s’excuse à peine, le boulot avant


tout, et nous fait monter dans son appartement. À ma
grande stupéfaction, rien n’était rangé ni préparé pour
recevoir. Sensible aux choses pourtant naturelles, ma
joie s’éteint quelque peu avant de s’effondrer complè-
tement lorsqu’elle nous réclame dans sa cuisine afin de
faire avant toute chose sa vaisselle qui traînait et s’était
accumulée depuis quelques jours. Cet anniversaire s’est
transformé en enfer. Je suis resté poli et ai fait semblant
de rien, mais j’étais furieux. Aujourd’hui, sans hésitation,
je la planterais seule chez elle et repartirais avec mes amis
au restaurant ou ailleurs. Il ne s’agit pas ici, de sa part,
que d’un manque de savoir-faire, masqué en plus par
beaucoup de prétention, mais d’indélicatesse grave et
de non-respect. Je suis convaincu qu’il n’y avait aucune
intention de nuire, mais la médiocrité n’est pas toujours
excusable.
Malheureusement, j’imagine que certains parmi vous,
chères lectrices et chers lecteurs, doivent sourire et se
rappeler qu’ils ont vécu des choses plus ou moins sem-
blables. C’est, en effet, plus courant qu’on ne le pense. Et
dire qu’une bougie allumée, quelques verres de bon vin
et un plat de pâtes auraient fait mon bonheur ce soir-là...
La petite liste non exhaustive des détails qui tuent :
î Demander aux invités de faire la vaisselle.
î Demander aux invités de préparer le repas, sauf si c’est
prévu ainsi.
î Demander aux invités d’aller faire les courses
manquantes.

131
Manuel du savoir-vivre comtemporain

î F aire visiter aux invités, les uns après les autres, toute
la maison.
î Laisser la télévision allumée. Elle capte en général
l’attention.
î Passer en boucle votre reportage de mariage.
î Laisser les invités seuls pendant une heure, le temps
que vous cuisiniez.
î Ne pas être chez vous lorsque vos invités arrivent.
î Fumer à table, même si vous êtes chez vous, sans
savoir si cela dérange quelqu’un.
î Ne pas chauffer en hiver sous prétexte que la maison
est trop grande et qu’on y a toujours vécu de la sorte.

132
L’art de la table
Dans nos pays, surtout en France, l’art de la table est
quelque chose d’important et qui ne manque pas de
noblesse, même s’il est trop souvent négligé à mon goût.
Si certaines choses semblent parfois inutiles à certains,
tout a pourtant un sens, pratique ou esthétique. C’est
également un art différent des autres, un art qu’on peut
modifier, moduler, avec lequel on peut jouer en per-
manence et avec élégance si on ne sombre pas dans les
tristes codes de la fin du XIXe siècle.
Nous vivons pour cet art une époque extraordinaire.
Nous pouvons créer des tables de la Renaissance, du
XVIIIe siècle, des années 1930 et parfaitement contem-
poraines ou design. Il faut un peu de moyens ou de
l’imagination, il est vrai, mais c’est possible et à la portée
de beaucoup de monde.

133
Manuel du savoir-vivre comtemporain

L’art de la table nous permet, si on le désire, de par-


tir en voyage et de créer des toiles d’ambiance qui
accueillent les idées, les partages, les sourires, les aven-
tures culinaires, les dégustations de bons vins, tout ce
que la terre et le soleil nous offrent, que nous pouvons
transformer ou non à travers une alchimie qui est propre
à chacun.
C’est cela aussi la table et l’art de la table.
Il y a des règles. Toutes existent pour des raisons pré-
cises, la plupart du temps afin de rendre plus agréable le
déroulement du repas. Elles existent pour tout le monde
et ne réclament pas qu’on soit fortuné. Elles font partie
d’un savoir-faire accessible à toutes et tous.
Autant je suis pour réformer certains usages quand
ils me semblent désuets, autant sur ce point j’insiste sur
l’utilité de la connaissance de l’art de la table. Cela fait
partie de notre identité culturelle.
Une vilaine table se remarque immédiatement, déçoit
et donne une image négative de ceux qui reçoivent.
C’est un ticket pour le monde des pignoufs.
Une belle table, en revanche, procure de la joie à ceux
qui vont s’y asseoir, les honore et honore fièrement ceux
qui reçoivent également. Une belle table peut être très
simple, mais doit toujours être juste et élégante.

La nappe
Il y a avant tout l’emplacement de la table dans la
pièce. Elle doit être située à un endroit où tout le monde

134
L’art de la table

peut se déplacer autour de celle-ci, tant pour le service


que pour se retirer le cas échéant, et là où il ne fait ni
trop chaud ni trop froid, sans courant d’air ou rayon de
soleil accablant.
Déposer sur la table un prénappage en caoutchouc ou
en feutre et seulement ensuite la nappe.

135
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Certains me diront : « Mais cela ne se fait plus, cela


date de nos grands-mères ! » Eh bien non, cela sert tou-
jours aujourd’hui pour « bourgeoisement » éviter cer-
tains coups dans une belle table en bois poli, par exemple,
et surtout afin d’amortir le bruit provoqué par certains
lors du retour des verres sur la table ou encore rendre
la sensation du toucher plus agréable pour vos mains.
C’est un peu « tiré par les cheveux » me diront d’autres,
mais ce sont ces petits détails qui font que la vie est plus
agréable, en tout cas pour ceux qui veulent l’apprécier...
La nappe se dépose sur l’entièreté de la table de
manière à déborder équitablement de chaque côté.
Elle peut être blanche ou de différentes couleurs,
pour autant qu’elle soit en harmonie avec ce qui l’en-
toure dans la pièce et votre décoration de table. Préférez
le tissu, le lin ou d’autres matières nobles et abandonnez
définitivement le papier ou le synthétique de mauvaise
qualité, laissez-les aux fêtes d’écoles. Ne choisissez pas la
nappe trop courte : plus elle est longue, plus elle donne
de l’allure à l’ensemble de la table. Si celle-ci présente de
gros plis, souvent dû à l’amidon, je suggère de la repasser
à même la table afin de la rendre plane.

Les assiettes
On continue ensuite en disposant les assiettes à égales
distances les unes des autres et en prévoyant un espace
suffisant entre les convives afin que le repas soit phy-
siquement agréable. Il faut éviter de remplir la table

136
L’art de la table

d’invités comme lors de soirées de gala pour lesquelles


on privilégie la rentabilité – ce que je peux comprendre
– en plaçant régulièrement dix personnes aux tables pré-
vues pour huit.
Ce n’est pas agréable de passer une soirée dans de
mauvaises conditions, sauf peut-être si vos voisin(e)s de
gauche et de droite sont des offrandes de la nature...
On prévoit de laisser entre le bord de la table et les
assiettes un espace de plus ou moins deux centimètres.
Ce n’est pas qu’une question d’esthétique ; c’est avant
tout pratique et cela permet d’éviter la catastrophe lors-
qu’une personne se lève maladroitement en accrochant
la vaisselle avec un de ses boutons ou sa ceinture.
Les assiettes vides qu’on dispose avant le repas
s’appellent « assiettes de présentation ». Elles peuvent
faire partie du service utilisé ou être en d’autres matières
et prévues spécialement à cet effet. Une table est plus
élégante avec des assiettes de présentation qu’un
espace vide entre les couverts. Si votre service se fait
essentiellement sur plateaux, sachez qu’on ne dispose
jamais plus de trois assiettes les unes sur les autres à table.

Les couverts
Une fois les assiettes en place vient le tour des cou-
verts. Ceux-ci doivent répondre à la seule logique de
l’ordre de leur utilisation. On dispose les fourchettes à
gauche, et les couteaux ainsi que les cuillères à droite. La

137
Manuel du savoir-vivre comtemporain

partie coupante des lames des couteaux doit toujours


être orientée vers l’assiette.
Pour le reste, il y a deux écoles ; la française et l’an-
glaise. En France, on dispose les fourchettes et les cuil-
lères pointes vers la table et dos vers le ciel. D’ailleurs,
lorsque les couverts français sont gravés d’armoiries ou
de monogrammes, ceux-ci le sont sur le dos des couverts.
À l’inverse, en Angleterre, on dispose les fourchettes et
les cuillères pointes vers le ciel et dos vers la table.
Les armoiries et les monogrammes, lorsqu’il y en
a, sont dans ce cas gravés sur la partie intérieure des
couverts afin d’être visibles.
Ce livre s’adressant essentiellement au monde fran-
cophone, je suggère vivement de disposer les couverts à
la française. Je suis toujours triste de découvrir dans les
grandes enseignes de la gastronomie française les cou-
verts placés à l’anglaise, cela n’a pas de sens. Cela fait
aussi partie de notre identité culturelle, et d’une certaine
manière, de notre patrimoine. Il en va de même pour la
Belgique, issue de la tradition française en cette matière.
L’ordre d’utilisation des couverts est de l’extérieur vers
l’intérieur. Dès lors, on dispose traditionnellement au plus
proche de l’assiette les couverts pour le plat, puis plus vers
l’extérieur l’éventuelle cuillère pour le potage à droite,
puis encore plus vers l’extérieur les couverts pour l’entrée.
Les couverts pour l’éventuel fromage se place au-dessus
de l’assiette, entre celle-ci et les verres. On prévoit nor-
malement un couteau et une fourchette ou un couteau
seul pour le fromage, manche du couteau vers la droite et
manche de la fourchette vers la gauche. De plus en plus, le

138
L’art de la table

seul couteau est utilisé pour ce plat.Vient ensuite le des-


sert, pour lequel on prévoit également le ou les couvert(s)
au-dessus de l’assiette, au-dessous des couverts à fromage.
S’il s’agit d’une cuillère, son manche sera orienté vers la
droite.
Dans certains cas, on amène les couverts à fromage et
à dessert en même temps que les assiettes les contenant.
Pourquoi pas...
Si vous utilisez des couverts en argent ou métal
argenté, ceux-ci doivent impérativement être frottés et
briller, même s’ils sont anciens et patinés. Les couverts
oxydés par le temps n’ont pas leur place sur une belle
table.
Si vous frottez vos couverts juste avant de les disposer
à table, je vous conseille vivement de les savonner ensuite,
puis de les rincer avant de les sécher. Les produits utilisés
pour faire briller l’argenterie sont toxiques pour la santé,
même sur les lingettes et gants prévus à cet effet.

Le(s) couvert(s) à salade


La salade se mange traditionnellement avec une seule
fourchette et de la main droite.
Cette tradition nous vient directement des codes
bourgeois du XIXe siècle et a perduré jusqu’il n’y a
pas si longtemps. Les couteaux étaient armés de lames
en acier forgé. Celles-ci s’oxydaient très rapidement au
contact de la vinaigrette et devenaient complètement
noires. De plus, pour arriver à bout de cette oxydation,

139
Manuel du savoir-vivre comtemporain

on brûlait un bouchon de bouteille de vin en liège et


on frottait énergiquement la lame pour la nettoyer afin
qu’elle retrouve son éclat. Autant vous dire que ce n’était
pas ce qu’il y a de meilleur pour la santé. Par conséquent,
on a instauré le fait que ce plat se mangeait avec la seule
fourchette. Toutefois, on suggère tout de même de pré-
couper la salade afin de ne pas rendre cette tâche trop
ardue. C’est ce qu’on peut encore lire aujourd’hui dans
les ouvrages qui traitent des bonnes manières...Tout ceci
avait un sens, mais aujourd’hui, depuis quelques dizaines
d’années, nos lames de couteaux en acier forgé ont été
remplacées par des lames inoxydables.
La plupart continuent à répondre à l’usage de la seule
fourchette, qui ne fait de tort à personne ceci dit, mais
qui n’a plus de raison d’être. Ainsi, quelqu’un qui mange
sa salade avec une fourchette et un couteau n’est, pour
moi, pas dans l’erreur, mais en accord avec notre époque,
d’autant plus que les salades actuelles sont de plus en
plus gourmandes et constituent parfois de véritables
plats complets à elles seules. Alors, une fois de plus, je fais
appel à votre bon sens. Les deux manières sont valables.
À vous de vous adapter en fonction des circonstances.
Que vous prévoyiez un ou deux couverts pour la salade,
il faut les disposer correctement. Encore faut-il savoir
quand on doit manger la salade... Traditionnellement, la
salade se mange après le plat principal, avant le fromage.
Vous placez donc une fourchette, de la même taille que
la fourchette qui sert pour le plat principal, à droite des
autres fourchettes, plus proche de l’assiette.Vous l’utilisez
avec la main droite malgré son emplacement, qui

140
Couvert posé à la française
4
Couvert posé à l’anglaise
1 2 3
I
B
m h
g

l e c D f
Si potage Si potage
après entrée en entrée
Si salade après
plat principal

J k

A – Assiette de présentation J – Fourchette pour la salade (facultatif)


B – Assiette à pain K – Cuillère pour le potage
C – Fourchette pour le plat principal L – Serviette
D – Couteau pour le plat principal M – Couteau pour le beurre
E – Fourchette pour l’entrée
F – Couteau pour l’entrée 1 – Verre à eau
G – Cuillère pour le dessert 2 – Verre à vin rouge
H – Couteau pour le fromage 3 – Verre à vin blanc
I – Fourchette pour le fromage 4 – Flûte à champagne (facultatif)

141
Manuel du savoir-vivre comtemporain

n’a de logique que l’esthétique de la table. Si vous


décidez d’adopter le couteau en plus pour la salade,
vous le disposez de l’autre côté de l’assiette, à gauche
des autres couteaux, tout simplement. En effet, tout va
par paire.
Ceci dit, les études récentes qui traitent de nutrition
et de diététique démontrent clairement qu’il est préfé-
rable de manger la salade avant le plat principal ou en
entrée afin de faciliter la digestion.
Alors, peut-être vaut-il mieux évoluer avec son temps...

Et le foie gras...
Je vais sans doute en surprendre plus d’un : le foie gras
ne se mange pas avec un couteau, mais avec une four-
chette. Soyons réalistes, quasi plus personne ne le fait.
Quoi qu’il en soit, au niveau des couverts, adap-
tez-vous comme pour la salade, et disposez les couverts
dans la logique de leur utilisation et de l’esthétique,
pourquoi pas...

Le porte-couteau
On ne parle pas ici du porte-couteau utile dans une
cuisine pour recueillir les lames coupantes qui servent à
préparer les repas, mais de ces petits objets que certains
disposent sur les tables pour « faire plus joli » et y laisser
reposer la lame du seul couteau disposé à table.

142
L’art de la table

On en trouve de toutes sortes : en argent, ivoire, cristal,


stylisés, etc. Il s’agit en réalité d’une invention du XVIIIE
siècle qui se diffuse fortement au siècle suivant dans la
petite bourgeoisie. Cela servait à déposer le couteau, puis
la fourchette afin de ne pas salir la nappe, puisque celle-ci
est censée servir à nouveau pour les autres repas..
Il ne s’agit plus ici d’art de la table, mais de survie de la
table... Oui, je n’ai pas peur de le dire.
L’art de la table refuse l’usage du porte-couteau, il est en
contradiction avec le raffinement et le savoir-vivre. Une
nappe sert pour un seul repas, tout comme les serviettes.
Leur seul principe d’utilisation, en dehors de l’esthétique,
c’est de pouvoir être salies. Il y a bien sûr l’exception de
recevoir chez soi de la famille ou des amis proches pour
plusieurs repas d’affilée. Dans ce cas, on peut évidemment
comprendre de conserver une même nappe, pour autant
qu’elle reste propre, et les mêmes serviettes, afin de ne pas
donner trop de travail à celle ou celui qui en a la charge.
Il reste de bon ton, tout de même, de renouveler le linge
de maison une fois par jour dans ce cas, d’autant que la
blanchisserie du début du XXe siècle a été aujourd’hui
remplacée par la machine à laver le linge dans toutes les
maisons. Dès lors, si vous en avez chez vous de ces petites
choses disgracieuses, héritées ou achetées, cachez-les loin
de certains regards.

143
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Les verres
La tradition, qui est toujours d’actualité, propose de
disposer au moins deux verres par personne à table : un
pour l’eau et un autre pour le vin. Les dîners tradition-
nels assortis d’une entrée en comportent trois : un pour
l’eau, un pour le vin rouge et un dernier pour le vin
blanc. On peut rencontrer des tables avec beaucoup plus
de verres évidemment, mais cela devient de plus en plus
rare ou est attaché aux représentations officielles.
Ce qui est important, c’est de respecter l’ordre des
verres ; on commence à gauche par le verre à eau, puis,
à sa droite, le verre à vin rouge et encore à sa droite le
verre à vin blanc.
De plus en plus de restaurants utilisent des gobelets
(verres sans pied) pour l’eau, par conséquent plus petits
en hauteur, et des verres sur pied pour le vin. Étant
donné que les boissons se servent chez nous par la droite,
ils ont disposé, afin de faciliter le service, le verre à eau
en troisième lieu (puisque le plus petit), donc après le
verre à vin blanc, contrairement à ce que recommande
la règle.
Si je comprends la démarche, je vous avoue ne pas
trop savoir quoi en penser... Il est vrai qu’on rencontre
aujourd’hui des verres à vins beaucoup plus hauts qu’au-
trefois. On pourrait aussi voir devant soi un grand verre
à vin rouge, juste à sa droite un moins grand verre à
vin blanc et le verre à eau (dans ce cas sans pied) d’une
couleur reprenant un élément de la table ou du ser-
vice, derrière les deux précédents, juste au milieu. Cela

144
L’art de la table

serait peut-être plus heureux à la vue, tout en permettant


un service sans difficulté par la droite. Et puis finalement,
pourquoi ne pourrait-on pas servir l’eau par la gauche ?
Ce n’est jamais qu’une question de convention...
La tradition parle de la position des verres sur la table à
la française ou à l’anglaise ; en haut de l’assiette et à droite
en oblique, et inversement, selon les sources. En réalité, il
n’y a pas vraiment d’historicité à celle-ci.
Je fais le choix dès lors de m’en référer à Jacqueline
Queneau, papesse de l’art de la table historique en France,
qui les positionne en haut de l’assiette.

L’assiette à pain
L’assiette à pain est toujours à votre gauche et se place
dans l’angle formé par vos verres et vos couverts. Sur celle-ci
se trouve en général un petit couteau différent des autres et
dont la lame est assez arrondie. Il sert uniquement pour le
beurre et en aucun cas pour couper le pain.
Cette assiette n’est pas obligatoire. On peut très bien
disposer un petit pain à même la nappe dans le même
angle, comme rompre une baguette devant ses invités et
distribuer le pain, du moins si la situation le permet.

La serviette
N’oubliez pas de prévoir une serviette par personne.
(Cela n’a pas toujours été le cas dans l’histoire.) Elle doit
également être en tissu (ou en matière noble) et non
en papier. Elle peut être assortie à la nappe ou encore à

145
Manuel du savoir-vivre comtemporain

d’autres éléments de la table, pour autant qu’elle rejoigne


l’harmonie esthétique. Là aussi, il y a des règles, un peu
dépassées sans doute, mais je vous les énonce tout de
même. Il était prévu de disposer, pour le déjeuner, la
serviette pliée en carré sur l’assiette et, pour le dîner,
la serviette pliée en rectangle à gauche de celle-ci, à
côté des fourchettes. Autrefois, à midi, on glissait un
morceau de pain chaud dans la serviette afin qu’il ne
refroidisse pas trop vite. Le soir, le repas commençait par
un potage qu’on avait coutume de servir avant l’arrivée
des convives à table. Donc, tout cela avait un sens.
Aujourd’hui, les coutumes ont quelque peu évolué.
Je vous propose, d’une manière générale, de disposer les
serviettes pliées en rectangle à gauche de l’assiette, à côté
des fourchettes et non sous les fourchettes.
Restez simple en ce qui concerne le pliage de
celles-ci. Évitez, je vous en prie, les pliages magiques
qui vous les transforment en accordéon, cygne ou en
deux cornes d’antilope qu’on retrouve dans le verre : cela
ne fait jamais bon genre. On pensera peut-être de vous
que vous vous êtes donné du mal pour réaliser une telle
table, mais cela ne vous élèvera pas.

La décoration
On retrouve la plupart du temps un montage floral
comme milieu de table ou une décoration en différents
endroits. C’est un choix toujours gagnant depuis des
siècles. Veillez toutefois dans ce cas à choisir des fleurs

146
L’art de la table

dont le parfum est discret. L’inverse peut déranger les per-


sonnes autour de la table.
Vous pouvez également choisir une sculpture adaptée
en taille et agréable de tous les côtés ou encore improviser
et inventer une décoration de bon aloi en accord avec
votre table et vos invités.
Beaucoup de choix sont possibles, le tout est de rester
dans la justesse des choses.

Les bougies
La flamme de la bougie est importante. Ce n’est pas
une obligation, mais une suggestion vive. Tout le monde
aime assister à un repas aux chandelles. Si vous possédez
de beaux bougeoirs, disposez-les sur la table. S’il s’agit de
chandeliers, assurez-vous qu’ils n’empêchent pas les per-
sonnes installées l’une en face de l’autre de communiquer,
sauf si c’est stratégiquement planifié.
Si vous n’avez pas de beaux bougeoirs, il existe dans de
nombreux magasins des supports en forme de verres droits
(souvent colorés) pour les bougies chauffe-plats. Choisissez-
les en harmonie avec votre table ; ils donnent aussi une
lumière agréable en plus de l’avantage de ne ruiner personne.
Le seul impératif est d’allumer les bougies lors du repas s’il
y en a à table. Il n’y a rien de pire que d’assister à un repas
auquel les bougies ne sont pas vivantes, même si leur sens
premier d’éclairer n’est plus. La flamme est une présence
symbolique qui réchauffe, au propre comme au figuré, et
peut-être bien plus que cela.

147
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Les autres ustensiles


Il est de bon goût de trouver sur une table des sou-
coupes pour accueillir les bouteilles de vin, voire les
carafes d’eau. Elles ne doivent pas obligatoirement être
en argent et armoriées, mais en équilibre avec le reste
de la décoration. Évitez les bouteilles d’eau, elles sont
rarement jolies et n’apportent rien dans la décoration
d’une table. Ce n’est pas toujours possible sans doute,
mais pensez-y... On peut toujours trouver une astuce
ou l’autre.
Il est important de proposer du sel et du poivre. Il y
a toujours quelqu’un qui en demande et cela vous évite
de vous lever. Ne disposez pas sur une belle table les
contenants achetés directement en grande surface, cela
serait dommage. Je suis conscient que tout le monde n’a
pas la chance d’avoir en sa possession la parfaite pano-
plie de l’héritier, mais il existe beaucoup de salières et
poivriers du plus bel effet et à la portée de toutes les
bourses. Cherchez, vous verrez...
Pensez éventuellement au beurre. Cet élément est
fréquemment réservé à des repas de plus grande impor-
tance. Il n’est pas obligatoire d’avoir un petit beurrier
par personne, mais un seul par nombre raisonnable de
convives semble suffisant.
Dans certains cas, vous pouvez ajouter des petits car-
tons avec le nom de vos invités sur les tables en face de
chaque emplacement afin de désigner la place de cha-
cun. Usez de ceux-ci uniquement lorsque vous recevez

148
L’art de la table

beaucoup de monde et non pour un repas de six per-


sonnes, par exemple.
Cette description n’est ni absolue ni exhaustive, elle
n’est qu’un schéma, une ligne directrice qui a le mérite
de vous éviter les maladresses. Une fois qu’on maîtrise
l’art de la table – il faut l’aimer pour cela –, on peut décliner
certaines choses et se lancer dans des variations sur un
même thème.
N’oubliez pas que rendre une table belle, ce n’est pas la
rendre précieuse ni bourgeoise (au sens péjoratif du mot),
c’est lui donner de l’allure et du caractère, aussi simple
soit-elle.
La table est le premier repas, celui des yeux...

149
Manuel du savoir-vivre comtemporain

150
être reçu
Répondre à l’invitation
La première chose à envisager avant d’être reçu, c’est
d’être invité. L’invitation peut prendre beaucoup de
formes aujourd’hui. Il y a les invitations formelles que
nous avons vues précédemment, et puis toutes les autres
qui font partie de la grande majorité, et ce, dans tous
les milieux, sauf peut-être les officiels représentatifs et
conservateurs.
Elles peuvent se faire par e-mail, par téléphone ou
tout simplement oralement. Dans tous les cas, il faut
répondre oui ou non, sous une forme plus ou moins
élaborée si l’invitation elle-même le suggère.
Si vous répondez positivement, vous vous engagez
à respecter les consignes (heure, tenue, participation
éventuelle…).

151
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Si vous êtes attendu à 20 heures, il faut arriver entre


20 heures et 20 heures 15. Arriver en avance se faisait,
mais c’était il y a très longtemps.
Si vous êtes attendu à 20 heures, tout est censé être
prêt pour cette heure, mais peut-être les toasts seront-ils
moins frais ou moins chauds une heure après. Par ail-
leurs, vous n’avez plus d’excuse valable, à notre époque,
si vous arrivez au-delà de l’heure souhaitée sans prévenir
de votre retard, ne serait-ce que par un SMS. On par-
donne le retard, car il n’est pas toujours dépendant de
votre volonté, mais on ne pardonne pas de ne pas pré-
venir. Je propose le SMS pour les situations courantes,
mais dans des situations plus formelles ou officielles, il
vaut mieux téléphoner.
Quant au cocktail, il se déroule en général sur au
moins deux ou trois heures. Dans ce cas, je vous conseille
plutôt de ne pas arriver à l’heure stricte de début, sauf
si vous n’avez pas le choix ou que vous nourrissez une
intention précise, mais un peu plus tard.
Évitez à tout prix d’imposer votre animal de compa-
gnie aux autres. Cela ne se fait absolument pas pour de
nombreuses raisons évidentes, me semble-t-il, d’autant
plus qu’il n’y a pas que des chiens et des chats de com-
pagnie. Je vous laisse imaginer...

La tenue
Quand la tenue n’est pas communiquée, c’est qu’elle
est évidente. À vous de savoir chez qui vous allez et à

152
Être reçu

quelle heure. Si vous avez le moindre doute, n’hésitez


pas à demander avant à la personne qui reçoit ou à son
secrétariat ; on ne vous jugera pas pour cette question,
mais on considérera plutôt de bon ton de l’avoir
demandé.
Il y avait des règles strictes à ce niveau-là, mais elles
ont explosé. N’allez cependant pas à une réception
d’ambassade ou chez le chef de l’État en jeans. Soyez
respectueux de vous-même et de ceux qui vous
reçoivent. Ne cherchez pas à être original. Si vous êtes
un personnage public ou très connu, on pourrait vous
le pardonner et mettre cela sur le compte de votre forte
personnalité. Dans le cas contraire, vous n’avez plus qu’à
signer le registre de « Bienvenue chez les pignoufs ».
Nous envisagerons quelques tenues un peu plus loin
dans ce livre.

Présent ou pas ?
Que faire lorsque vous êtes invité quelque part ?
Amener un présent ou non ?
Je vous propose d’abord de prendre connaissance des
règles à ce niveau-là, puis d’analyser ensuite toutes les
nouvelles réalités.
En principe, la première fois qu’on est invité chez
quelqu’un pour un repas, on arrive les mains vides. Il
vous est possible de faire envoyer des fleurs le lendemain
afin de les remercier. La deuxième fois que vous y êtes
invité, vous pouvez faire envoyer des fleurs avant ou

153
Manuel du savoir-vivre comtemporain

154
Être reçu

pour le jour J ou en apporter vous-même qui sont


alors cueillies dans votre jardin. Vous pouvez aussi en
envoyer le lendemain pour remercier.
Si vous n’êtes pas à l’aise avec cela, c’est parfaitement
normal... Cette règle n’est plus d’application que dans
les milieux strictement formels.
Dès lors, je vous propose de respecter cette règle dans
les milieux qui l’ont suivie jusqu’à nos jours ou lorsque
le formel est de rigueur. Ainsi, vous ne vous trompe-
rez pas. Ne confondez pas formel et officiel. Lorsque les
circonstances sont officielles, n’envoyez pas de fleurs, ni
avant ni après. Sachez juste remercier l’hôte en partant.
Il en va de même pour une invitation à un cocktail,
privé ou officiel, on n’offre surtout rien. Ce n’est pas
un apéritif entre personnes qui se connaissent bien chez
l’une d’elles.
Pour les autres cas, lorsqu’on est reçu à déjeuner ou
à dîner chez quelqu’un, je constate de plus en plus que,
même dans les milieux très raffinés, les invités arrivent
avec un présent.
Je vous conseille dès lors de, malgré tout, oublier les
fleurs. Pourquoi, me demanderez-vous ? C’est simple :
lorsque vous offrez des fleurs, même si cela fait toujours
plaisir, la personne qui les reçoit doit s’absenter quelques
instants afin de trouver un vase, déballer celles-ci, les
disposer dans le récipient et puis venir avec le tout en
main pour le poser en un endroit visible afin de vous
faire plaisir, à son tour, alors que, normalement, elle a déjà
tout prévu à ce niveau-là. Je pense donc que ce présent
n’est pas pertinent. Heureusement, il y en a d’autres.Vous

155
Manuel du savoir-vivre comtemporain

pouvez offrir une bouteille de vin, mais du bon vin alors.


Certains me diront qu’ils n’ont pas les moyens d’acheter
un grand vin. Si c’est le cas, poussez la porte des belles
enseignes pour le vin.Vous pouvez toujours y trouver un
flacon à bas prix et qui contient un bon vin. Les bonnes
enseignes ne vendent en principe pas de mauvaises bois-
sons. Il y a également le champagne, cela fait toujours
plaisir. Et puis les chocolats... Je ne parle pas des chocolats
achetés en grande surface, mais de ceux qui viennent de
chez les chocolatiers. En général, tout le monde adore ça.
Il y a beaucoup d’autres possibilités, à vous d’être
pertinent.
On rencontre aussi des personnes qui vous
demandent : « Que puis-je apporter ? » Ce n’est pas la
bonne question. Cela peut même être parfois quelque
peu pervers, puisque la réponse habituelle, sauf dans les
cas où les personnes sont très proches, est : « Rien du
tout ! » Si vous voulez vraiment faire plaisir, par exemple
à quelqu’un qui a peu de moyens et qui décide malgré
tout de vous recevoir avec cœur, il faut vous y prendre
autrement.
« J’ai découvert dernièrement un bon petit vin chez
mon caviste, cela me ferait plaisir de te le faire décou-
vrir. Puis-je t’en apporter ? Combien serons-nous ? », ou
encore « Charlotte et moi avons découvert un petit pâtis-
sier qui a des mains en or dans le quartier. Ses gâteaux
sont délicieux. Tu me permets d’apporter le dessert ? »
De cette manière, vous aurez toutes les chances de
recevoir une réponse positive tout en faisant plaisir et en
soulageant votre hôte.

156
Être reçu

Le cocktail
Si vous avez le bonheur d’être invité à un beau cock-
tail où le champagne coule à flots, je vous conseille pre-
mièrement de grignoter avant, afin de ne pas subir les
effets des bulles trop rapidement.
Quoi qu’il en soit, un cocktail n’est pas un lieu dans
lequel on vient se gaver, c’est avant tout un phénomène
social, pour une raison ou pour une autre, auquel vous
êtes associé et donc en représentation, car vous n’y êtes
normalement pas invité sans motif. En effet, sachez être
raisonnable tant avec la boisson qu’avec les petits fours.
On s’habille bien pour se rendre à un cocktail, en géné-
ral en tenue de ville, sauf pour certains mariages, et on
se tient convenablement.
Les personnes qui reçoivent repèrent très rapidement,
l’air de rien, les pique-assiettes et les fraudeurs, je préfère
prévenir les éventuels « experts ».
Il est important de saluer la ou les personnes qui vous
reçoivent, à condition que la situation ne soit pas trop
impersonnelle et les circonstances, opportunes.
Lors d’un mariage, vous devez tout au moins féliciter
les mariés ainsi que leurs parents, même si la file d’at-
tente est longue.
Il n’est pas obligatoire, sauf pour les petits comités, de
signifier votre congé aux hôtes. L’attitude la plus cou-
rante est de « s’échapper » à l’anglaise.

157
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Déjeuner ou dîner dans la sphère privée


Une fois entré dans la pièce dans laquelle se trouvent
déjà d’autres invités, il est essentiel, si la personne qui reçoit
vous livre à vous-même, d’aller saluer en vous présentant.
Dans ce cas précis, s’il n’y a pas deux cents personnes évi-
demment, c’est à vous d’aller vers les autres, puisque vous
êtes le nouvel arrivé. Oubliez la trilogie du sexe, âge et
hiérarchie, sauf peut-être pour la poignée de main.
Dans la sphère amicale, si on vous offre le premier
verre, et s’il n’y a pas de personnel, vous n’êtes pas obligé
d’attendre que la personne qui reçoit vienne vous res-
servir à nouveau.Vous pouvez le faire vous-même si les
circonstances le permettent bien entendu. Il faut sentir
les choses et savoir chez qui on est.
Messieurs, vous avez la responsabilité des verres des
femmes. Ce n’est pas une raison pour les enivrer, mais
vous devez faire en sorte qu’elles ne manquent de rien.
Ce n’est pas ici une question de sexe faible ; c’est tout
simplement une courtoisie toujours bienvenue dans
beaucoup de milieux. Évidemment, s’il s’agit d’une réu-
nion exclusivement féminine, usez de bon sens et de
courtoisie envers votre prochaine.
On dit également que les hommes doivent s’occuper
des femmes seules ainsi que de leurs voisines et leur faire
la conversation. C’est vrai, mais cela va dans les deux sens
aujourd’hui. Les choses doivent avant tout être naturelles
entre personnes de bonne composition.
Vous pouvez proposer un coup de main à la personne
qui reçoit, cela fait toujours plaisir, mais en principe, sauf

158
Être reçu

si un élément imprévisible devait se présenter, on devrait


vous répondre non.
Même si vous avez très faim, vous devez attendre
qu’on vous convie à table d’une manière ou d’une autre.
Une fois la chose proposée, vous devez vous diriger vers
celle-ci et attendre qu’on désigne votre place si elle
n’est déjà indiquée. Si on ne vous demande pas de vous
asseoir, vous attendez debout derrière votre chaise que
la personne qui reçoit s’installe.
Le savoir-vivre suggère d’accompagner le siège de la
femme vers la table. Si cela se fait encore, sachez avec
qui et chez qui. Ce geste élégant dans certaines maisons,
voire de grands restaurants, peut aussi être anachronique
et déplacé dans d’autres lieux et avec d’autres personnes.
Une fois de plus, je ne puis que vous recommander de
vous adapter à l’environnement.
Dès que vous êtes assis, la première chose à faire
lorsque tout le monde est à table et que vous n’êtes pas
susceptible de vous lever à nouveau afin de saluer un
nouvel arrivé, c’est de prendre votre serviette et de la
déposer dépliée délicatement sur vos genoux. Certains
écrivent qu’il faut la déplier complètement, d’autres
seulement en deux parties. Ne perdez pas votre temps
avec ces détails, agissez naturellement en fonction de la
dimension de celle-ci.
L’étiquette prescrit aux dames assises de le rester pour
saluer un nouvel arrivant, peu importe le sexe. Cette
pratique ne se fait plus que dans la sphère privée. Même
si elle fait toujours partie de la courtoisie, elle peut com-
mencer à déranger, tant les femmes que les hommes. Il

159
Manuel du savoir-vivre comtemporain

est séant aujourd’hui, lors d’un dîner professionnel, par


exemple, qu’une femme se lève pour saluer des confrères,
des collègues, des clients ou encore ses supérieurs hiérar-
chiques. Dans ce cas précis, il n’est pas unique, les règles
à appliquer ne sont pas celles de la courtoisie, mais celles
liées à sa position ou sa fonction dans un cadre défini.
Il est toujours de coutume pour les hommes de se
lever lorsqu’une femme le fait pour se retirer.
La France prescrit de garder ses mains sur la table,
contrairement à l’Angleterre qui les trouve très bien sous
la table, plutôt sur vos genoux que sur ceux du voisin ou
de la voisine bien entendu...
Les deux traditions refusent toutefois les coudes sur
la table, sauf, poursuivent-elles, pour une femme mariée,
ce qui lui permet de montrer ses bijoux ou encore ses
avant-bras.
Autant vous dire que je ne suis absolument pas en
accord avec cette dernière prescription, aujourd’hui
décadente. S’il fut un temps, dans la seconde moitié du
XIXe siècle essentiellement, où il était normal d’afficher
son ascension sociale et sa richesse croissante, c’est com-
plètement déplacé de nos jours. Dès lors, il est inutile de
provoquer par ce geste les autres convives.
Je ne voudrais pas être trop catégorique : j’ai sou-
vent observé certaines dames très élégantes, en fin de
dîner, déposer délicatement un coude sur la table pour
accompagner la conversation et cela ne m’a pas choqué
le moins du monde.
En principe, la première chose qui vous est servie
à table sont les boissons. Si vous ne buvez pas de vin,

160
Être reçu

évitez tout de même de retourner votre verre.Vous pou-


vez faire remarquer très gentiment et discrètement que
vous ne buvez pas de vin ou vous laisser servir sans y
toucher.
S’il n’y a pas de service, c’est au maître de maison de se
servir en premier un fond de vin afin de le goûter, et ce,
pour chaque nouvelle bouteille. Il peut également goûter
les différentes bouteilles avant le repas. Il sert ensuite
d’abord les femmes, puis les hommes, sauf exception
d’invités très importants. D’une manière générale, servir
le vin est le rôle des hommes et non des femmes, cela
reste encore d’application aujourd’hui, sauf lors d’un repas
entre femmes bien sûr. L’homme est censé veiller à ce que
la femme ne manque de rien et si ce n’est pas le cas, la
femme peut très bien lui demander de la servir. Les règles
laissent cependant les femmes se servir d’eau elles-mêmes.
Tout ceci évoluera peut-être également, mais en société
c’est toujours de la sorte que cela fonctionne.
Certains auteurs proposent de servir le vin en bouteille
en tenant la bouteille par le cou. Je ne puis les suivre. Si
cette manière de faire était répandue il y a longtemps,
cela date d’une époque à laquelle on le servait en carafe,
cas dans lequel il était normal d’attraper la carafe par
le cou. Une bouteille de vin se tient cependant par le
corps.
Une fois le vin servi, exception faite de la sphère
intime et amicale, c’est à l’hôte de porter éventuelle-
ment un toast. Il peut être suivi par l’invité d’honneur.
On peut lever le verre symboliquement, surtout s’il y
a beaucoup de monde, ou le faire retentir délicatement

161
Manuel du savoir-vivre comtemporain

avec celui du voisin ou de la voisine, du moins dans les


sphères amicale et familiale. C’est un geste ancien qui
peut ne pas manquer d’élégance, même s’il est proscrit
par une certaine bienséance dixneuvièmisée. Autrefois,
on cognait plus virilement les verres, qui n’étaient pas
aussi fragiles que maintenant mais en d’autres matières
comme l’étain, le grès, etc., afin qu’il y ait un échange
de liquides au cas où celui-ci aurait contenu un poison
quelconque (pratique courante à l’époque) dans le but
d’éliminer son ennemi.
Rassurez-vous, il y a de magnifiques verres depuis très
longtemps, mais ils étaient réservés aux cours, aux riches
seigneuries ou encore aux bourgeois très argentés.
Il y a deux manières de tenir son verre : celle qui pro-
pose de le tenir par le bas du « ballon » et l’autre par le
haut du pied. Si vous deviez rester longtemps, lors d’une
réception, avec un verre de vin blanc ou de champagne
à la main, il serait préférable de le tenir par le haut du
pied afin de ne pas en réchauffer le contenu.
Il est toutefois très inélégant de le tenir par le milieu
ou le haut du « ballon », sans compter les traces de doigts
qu’on y laisse et qui n’ajoutent rien au charme.
Il est recommandé, à table, de s’essuyer la bouche
chaque fois avant de saisir votre verre. Je pense ne pas
avoir besoin de vous en expliquer les raisons...
Lorsqu’on vous sert le plat, ce pour quoi vous n’ou-
bliez pas de remercier (contrairement au moment
auquel on vous le retire), vous attendez que la personne
qui reçoit commence à manger ou vous y invite. On se
tient droit et on prend ses couverts correctement. On

162
Être reçu

porte la nourriture à la bouche et non le contraire. On


mâche sans bruit, la bouche fermée. C’est peut-être la
pire chose que vous puissiez rencontrer à table : avoir
à côté ou en face de vous une personne qui mange la
bouche ouverte. Si vous souhaitez déposer vos couverts,
le temps de boire un peu de vin, par exemple, faites-le
naturellement et simplement, dans le prolongement de
vos bras et mains, à 4 h 37 dans l’assiette, les pointes de
la fourchette vers l’assiette. On ne laisse pas les manches
de ceux-ci traîner sur la table. Si, par malheur, on avait
dû vous servir une montagne de choucroute avec toutes
ses garnitures, évitez tout de même de les piquer dedans
afin qu’ils ne reposent pas sur la table...
On évite, lorsque les couverts sont « au repos » dans
vos mains, de les tenir lame et piques vers le haut.
Savez-vous qu’on n’est pas obligé d’utiliser son cou-
teau si la seule fourchette suffit ? On utilise alors celle-ci
de la main droite (si on est droitier, bien entendu).
Vous lirez certainement ailleurs qu’il est préférable
d’utiliser un morceau de pain pour amener des aliments
qui ne se piquent pas sur la fourchette. Si c’est encore
la règle, je ne le conseille plus aujourd’hui. Il est pré-
férable, selon moi, d’amener élégamment ce qui ne se
pique pas avec son couteau sur la fourchette. Certains
ont réussi à appeler cela la « manière américaine ». En ce
qui me concerne, j’appelle cela du bon sens. Je ne consi-
dère plus approprié le fait d’utiliser un morceau de pain
comme « outil » à notre époque. C’est encore d’usage
dans quelques rares milieux et chez quelques personnes
plus âgées, mais cela tombe heureusement en désuétude.

163
Manuel du savoir-vivre comtemporain

J’en ai même vu devant moi à table, qui, lorsqu’ils


n’avaient pas de pain, utilisaient leur doigt pour amener
des petits pois sur la fourchette afin de ne pas déroger à
cette règle. Il faut arrêter avec ce genre d’interdits com-
plètement dépassés qui poussent certaines personnes à
se comporter comme d’épouvantables gueux. Je ne vous
révélerai jamais leur identité, mais vous seriez sans doute
très surpris d’avoir croisé leur portrait dans certaines
revues où le temps semble s’être arrêté...
Retenez toutefois qu’on ne sauce pas avec un mor-
ceau de pain, tenu à la main ou piqué délicatement au
bout de la fourchette, ni à la campagne ni en ville.
Ceci affirmé, soyons honnêtes : si la sauce est bonne,
voire trop bonne, et que vous êtes seul, il n’y a aucune
raison valable de ne pas la terminer avec un morceau de
pain et de ne pas s’empiffrer jusqu’à la dernière goutte.
Mais il est vrai qu’il est hautement préférable d’éviter
les témoins.
On raconte aussi qu’on peut manger en société cer-
tains aliments avec les doigts. Plusieurs auteurs retiennent
cette pratique. C’est assez limité : cela concerne les
cuisses de poulet, de grenouille, les têtes d’asperges, etc.
C’est la même chose que juste précédemment, faites-le
éventuellement chez vous si cela vous plaît, mais alors
seul, en famille ou avec des amis et pas en société.
Il y a une exception toutefois, dans les cas où cela est
suggéré par un rince-doigts disposé à côté des verres ou,
plus souvent aujourd’hui, par une serviette humide et
citronnée.

164
Être reçu

Si des invités, importants ou non, devaient ne pas


connaître ces règles et y aller sincèrement de bon cœur,
alors faites de même afin de ne pas les gêner et deve-
nir indélicat à votre tour. Il y a beaucoup d’exemples
cocasses dans l’histoire, dans les plus beaux palais et châ-
teaux, souvent lors de dîners prestigieux.
Je dois vous dire également qu’on ne croque pas le
morceau de pain qui se trouve sur la petite assiette à
votre gauche. On en détache un morceau en le rompant,
qu’on peut beurrer éventuellement, puis qu’on porte à
sa bouche avec la main.
Contrairement à tout ce qu’on peut trouver dans la
littérature sur le sujet, on n’est pas obligé de terminer
tout ce qu’il y a dans l’assiette et encore moins de devoir
y laisser quelque chose, ce qui serait désobligeant au vu
de tout ce qu’on essaie de mettre en place aujourd’hui
pour ne rien gaspiller.
On peut trouver aussi des illuminés qui vous font
tout un descriptif sur la façon de positionner ses cou-
verts quand le repas est moyen ou carrément mauvais.
Imaginez-vous un seul instant que la politesse ait prévu
pareil affront ? Non, évidemment ! Lorsque vous avez
terminé de manger, contrairement à ce qui est ensei-
gné d’habitude, on ne range pas ses couverts parallèles
à 3 h 15.
Je soupçonne fortement les écoles d’hôtellerie, par
leur intervention à un moment ou l’autre, d’avoir ins-
tauré cette nouvelle règle pour faciliter le service. Cela
a visiblement assez bien marché, mais moi, je leur dis
non ! Il ne faut pas inverser la vapeur... Si service il y a,

165
Manuel du savoir-vivre comtemporain

c’est pour rendre plus agréables les plaisirs de la table en


les facilitant, et non le contraire. C’est leur travail après
tout, avec tout le respect que je leur dois.
De plus, le fait de rassembler ses couverts pour les
disposer à 3 h 15 est un geste contre-nature.
La manière juste, ce que peu de monde pratique
encore aujourd’hui, je dois malheureusement bien
l’avouer, c’est de les déposer devant soi dans l’assiette,
dans le prolongement de vos bras et mains à 4 h 37,
piques de la fourchette orientées vers le haut.
Que cela soit pour les fourchettes ou les cuillères, les
pointes vers le bas dans l’assiette signifient qu’on n’a pas
terminé et les pointes vers le haut qu’on peut débarrasser.
À ce propos, je rappelle qu’en France et en Belgique,
on débarrasse seulement une fois que tout le monde a
terminé.
Lorsque le repas est terminé, on quitte la table seulement
si les personnes qui reçoivent le font également. Cependant,
si l’heure est très tardive et que la fatigue vous terrasse, trou-
vez une formule élégante afin de vous échapper.
Avant de vous lever, enlevez la serviette de vos genoux
et déposez-la, non repliée, sur la table à votre droite.
Évitez tout de même qu’elle ne prenne la forme d’un
gros dinosaure, cela ne fait pas bon genre non plus.
En partant, n’oubliez pas de remercier et de saluer les
autres convives si vous sentez que cette action ne brise
pas l’ambiance de la soirée. Dans tous les cas, saluez au
moins vos hôtes et voisins de table.

166
Être reçu

Quelques petits détails


Si vous êtes gaucher, sachez que les tables sont tou-
jours dressées pour les droitiers. Vous en avez certaine-
ment déjà pris l’habitude et savez qu’on n’inverse pas les
couverts, probablement pour répondre à une certaine
esthétique de la table. Cela ne vous oblige pas à manger
comme un droitier, je vous rassure.
On peut se moucher à table. On le fait alors le plus
discrètement possible en se tournant de manière à
incommoder le moins de monde possible.
On peut se lever pour satisfaire quelque besoin natu-
rel. Faites-le alors entre les plats, lorsque tout le monde
a terminé, si possible. Si vous ne pouvez attendre, alors
levez-vous sans fracas, et faites savoir, à voix basse à votre
voisin, que vous revenez, sans lui révéler le malheur qui
vous guette.
Évitez, Mesdames, de dire que vous allez vous repou-
drer le nez, vous risqueriez de vous faire suivre par des
cocaïnomanes...
Pour vous, Messieurs, il faut savoir qu’on ne retire
pas sa veste lors d’un déjeuner ou dîner, où que cela
soit, même à l’extérieur sous 35 °C à l’ombre. La seule
exception est si l’homme qui vous reçoit le fait lui-
même ou vous y invite. Évitez, lorsque vous pouvez
prévoir pareille situation, d’enfiler une chemise dont la
couleur ne serait pas assez claire. Il se pourrait qu’il soit
trop tard lorsque vous pourriez ôter votre veste...

167
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Si on ne vous propose pas de vous resservir, il est plu-


tôt malvenu de le demander. Si on vous le propose, il est
plus séant de ne se resservir qu’une seule fois.
Lorsqu’on vous propose du fromage, la politesse vous
conseille de n’en prendre que trois morceaux, sans pou-
voir vous resservir...

168
Au restaurant
Recevoir au restaurant
Si vous choisissez de recevoir au restaurant, laissez
savoir clairement, sans insister non plus, que vous invitez,
quelles qu’en soient les raisons.
Vous devez impérativement y être à l’heure, et même
si possible arriver avant vos invités.
Laissez aux femmes les places les plus agréables, soit les
plus confortables, soit celles avec vue. Je sais, cela vient
d’un temps où elles ne travaillaient pas et n’occupaient
pas de position sociale sans leur mari. On parlait du sexe
faible... Mais bon, un peu de courtoisie ne tue pas.
Proposez à vos invités un apéritif ou directement du
vin, ce qui se fait de plus en plus. Choisissez le vin vous-
même : c’est vous qui recevez. Cela vous évitera en plus
d’avoir des déconvenues.

169
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Dans les bonnes enseignes, on propose aux femmes,


voire à tous les invités, des cartes ne mentionnant pas les
prix. Il vaut mieux le savoir et le prévoir. Si votre budget
est large, c’est l’occasion de proposer à vos invités de se
faire plaisir. Si ce n’est pas le cas, il est toujours possible
de les conseiller adroitement.
Vous devez agir au restaurant comme si vous receviez
chez vous.
Il est plus élégant pour payer l’addition de vous éloi-
gner vers l’endroit où vous pouvez le faire que de la
demander à table au vu et au su de tout le monde.

Être reçu au restaurant


Si vous êtes invité, tâchez d’arriver à l’heure ou dans
le quart d’heure, exactement comme si vous alliez dans
un lieu privé. Attendez qu’on vous propose les choses et
ne réclamez rien.
Lorsque la carte vous est présentée, demandez à votre
hôte ce qu’il vous conseille ; vous aurez directement
la température. Même si on vous donne carte blanche,
restez dans la moyenne, sauf si votre hôte insiste pour un
plat en particulier, même très cher.
Le comportement est assez parallèle à celui vu
précédemment pour la table.
Prenez congé lorsqu’il est temps et surtout remerciez.

170
Au restaurant

Plus simplement
Si vous invitez au restaurant une personne dans le but
de la séduire, sachez l’inviter. Ne soyez pas surpris
dans le cas contraire qu’elle veuille rentrer directement
chez elle, seule.
Dans les mœurs, il est toujours admis que l’homme
invite une femme, mais c’est de moins en moins vrai. Cela
évolue comme tout le reste. C’est finalement assez bon
signe pour la position de la femme dans notre société. Il y
en a toujours qui en use et en abuse, mais Rome ne s’est
pas construite en un jour... Cela dépend essentiellement
aujourd’hui de la position sociale ou financière d’une per-
sonne par rapport à l’autre, ou encore du but de la réunion.
Si vous allez vous restaurer à plusieurs, évitez de
décortiquer l’addition et divisez-la par le nombre de
convives. Il va de soi que dans ce cas, il ne faut pas qu’un
petit malin en profite pour commander ce qu’il y a de
plus cher et le répercute sur l’addition collective. Cela ne
signifie pas pour autant que si tout le monde commande
un poulet rôti à 12 euros, vous soyez obligé de suivre
le mouvement ; vous pouvez commander votre sanglier
aux airelles à 29 euros, mais prévenez alors et assumez
la différence.

Et quand vous arrivez en couple...


Saviez-vous que l’étiquette propose une manière
bien précise d’entrer dans un restaurant ? En effet,

171
Manuel du savoir-vivre comtemporain

contrairement à ce que beaucoup pensent, la courtoisie


demande à l’homme d’y entrer en premier et seulement
ensuite d’inviter la femme à le suivre.
Cela vient du XIXe siècle, époque à laquelle les lieux
publics étaient loin d’être des havres de paix et où les
bagarres étaient monnaie courante. C’est pour cette rai-
son que l’homme devait pénétrer en premier à l’inté-
rieur afin de vérifier qu’une femme y serait en sécurité.
Cette règle est toujours d’usage, mais pour d’autres
raisons. Elle recommande encore à l’homme de prendre
les devants, mais aujourd’hui afin de protéger la femme
des regards masculins animés par l’instinct de chasse
et dont la discrétion n’est pas toujours le point fort.
C’est également pour cette même raison que l’homme
avancera devant sa compagne jusqu’au moment où ils
s’assoiront.
Tout cela changera certainement un jour...

172
La conversation
On a l’habitude d’entendre qu’il y a des sujets de
conversation interdits à table ; la politique, la religion,
l’argent et le sexe. Il semble, en effet, qu’ils forment un
petit quatuor assez dissonant.
En réalité, ils ne sont pas interdits, mais l’on vous pré-
vient qu’ils suscitent régulièrement des heurts et des
réactions vives non souhaitées, surtout si vous alimentez
le feu avec un peu d’alcool.
On vous demande de les aborder avec discernement
et diplomatie, de ne pas enfoncer le couteau dans la
plaie aussitôt que vous percevez une gêne ou encore
une colère naissante, parce que vous estimez avoir raison
et voulez le faire reconnaître.Vous ne savez pas toujours
qui est à côté de vous, ce qui se cache derrière cette per-
sonne, qui est sa famille et ce qu’elle pense réellement. Il
faut être prudent et avoir du tact.

173
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Cela ne signifie pas non plus qu’il ne faut jamais


aborder ces sujets de manière claire en défendant son
point de vue, même si cela engendre un débat, mais il y
a des circonstances propres à tout.
Ne jamais le faire serait une erreur, le faire, c’est avan-
cer, si on est de bonne composition, mais choisissez vos
interlocuteurs, votre moment et l’endroit (si possible
chez vous).
Vous pouvez annoncer lors de l’invitation que vous
souhaitez aborder des sujets que vous savez sensibles,
mais je vous déconseille vivement de jeter le feu de
manière improvisée lors d’une soirée entre personnes
convenables.
En sens inverse, vous n’êtes pas non plus obligé d’ac-
quiescer à des propos insupportables et intolérables en
faisant semblant de rien, ainsi que le suggèrent certains
ouvrages de bonnes manières. Comme je l’écris dans l’in-
troduction, il faut savoir dire non. Les pervers profitent de
la politesse, de la naïveté ou de la faiblesse de certains pour
lancer l’air de rien leur venin. Il faut apprendre à se battre
contre cela, d’autant plus si vous occupez une position à
responsabilités ; c’est votre devoir. La décence exige, dans
la plupart des cas, une réaction ferme. Celle-ci peut s’ex-
primer par votre retrait « de la scène », voire votre départ
anticipé, s’il apparaît que c’est le choix le plus sage.
Je considère, contrairement à l’application habituelle
de l’étiquette traditionnelle, qu’il est préférable de s’éloi-
gner des personnes toxiques. Ne rien dire et laisser dire
ou faire au nom de la politesse est négatif. La politesse
est là pour nous aider à vivre en société entre gens de

174
La conversation

bonne composition et non pour avancer constamment


en eau douce en fermant les yeux devant la tempête.
Il faut savoir réagir lorsque c’est nécessaire, avec tact si
possible, et sortir les malfaisants de votre univers.
Ceci exprimé, je dois reconnaître qu’il n’y a pas de
règle absolue. Imaginez-vous à table avec votre directeur
général qui vous dépeint sérieusement ses convictions
profondes, comme quoi il va investir des sommes d’argent
considérables dans le clonage de Napoléon Ier afin de faire
renaître l’empereur pour changer le monde, annexer les
pays voisins et exiler la classe politique actuelle en enfer.
Allez-vous le traiter de fou furieux et appeler un
exorciste ? Non, bien évidemment. Il y a donc des situa-
tions où le silence est peut-être la meilleure solution,
d’autant plus que le projet semble peu réaliste...
Je ne vous dis pas qu’il faut de facto aller dans le sens
unique du politiquement et moralement correct. Il est, à
mon sens, nécessaire également de parvenir à prendre du
recul avec ces appellations bien contrôlées.
Ce que je souhaite vous dire, c’est de vous respecter et
de respecter les autres, même s’ils ne pensent pas comme
vous, de rester ouvert au changement, d’apporter intel-
ligemment les éléments auxquels vous avez réfléchi et
qui sont constructifs lors d’une conversation, de ne pas
accepter l’inacceptable, d’élever le débat ou le partage
afin de toujours lutter contre la stérilité mondaine, et
d’offrir un peu de lumière sur toute chose.
Ce n’est pas qu’une belle phrase, c’est un état d’être
ou un choix qui est offert à tout le monde et à chacun...
Cela dépend de vous !

175
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Un détail important : le téléphone portable


Il faut bien en parler puisqu’il fait partie intégrante de
nos vies aujourd’hui. Il est notre outil de travail ou de
plaisir, un passe-temps pour certains, une nécessité psy-
chologique pour d’autres, voire un compagnon pour les
solitaires... Cet instrument, à la fois téléphone, message-
rie, ordinateur et tout le reste est désormais omniprésent
près de nous.
Cela ne signifie pas pour autant que vous deviez
accepter de la même manière le téléphone des autres et
encore moins leur imposer le vôtre.
Un téléphone ne se pose pas sur une table lors d’un
repas. Si vous attendez des informations importantes,
alors demandez gentiment si cela ne dérange pas. Il y
a peu de chance qu’on vous le refuse. Dans d’autres
cas, si votre réunion est formelle ou officielle, et même
tout simplement élégante, cela me semble plus délicat.
Il faut vous débrouiller autrement, quitte à le confier
à quelqu’un qui pourrait venir vous prévenir en cas
d’urgence.
Il est toutefois important, qu’il soit dans votre poche
ou disposé sur la table, de le régler en « mode silen-
cieux ». C’est du savoir-vivre élémentaire.
Si vous ne pouvez vous passer de l’observer en per-
manence, comme une télévision allumée dans une pièce
attire l’attention, alors faites un choix. Partager agréable-
ment avec vos interlocuteurs ou pacsez-vous avec votre
machine...

176
À propos des tenues
Jusqu’il y a seulement quelques années, les codes vesti-
mentaires étaient assez respectés. Aujourd’hui, une fois de
plus, ils restent réservés d’une manière assez générale aux
milieux officiels, formels et pour certaines professions.
On rencontre de plus en plus fréquemment des per-
sonnes qui s’inventent un style et y restent fidèles pour
toutes les circonstances. Ainsi que je l’ai écrit auparavant,
si vous êtes connu et reconnu du public, cela fera partie
de votre personnage et on vous acceptera la plupart du
temps tel quel. Il en va de même pour des personnes très
riches. Dans le cas contraire, on dira de vous que vous
êtes un peu excentrique ou original, que vous êtes un
artiste, un peu différent (ce qui est pire...), du moins dans
la vie de tous les jours. En revanche, dans les milieux
officiels, formels et dans certaines professions, on ne l’ac-
cepte pas. Si vous décidez de marquer votre différence

177
Manuel du savoir-vivre comtemporain

par le port de certains vêtements, pourquoi les autres


devraient-ils vous accepter comme leur semblable ? Cela
n’a pas plus de sens.
Cela ne signifie pas qu’il faut faire comme tout le
monde, mais il y a des règles à respecter convenablement
lorsque les codes le réclament. Ne pas les respecter, c’est
vous exposer inconsciemment ou consciemment à une
certaine forme de rejet en société. Cela fonctionne ainsi
depuis des siècles. Si on peut considérer certaines tenues
comme des sortes d’uniformes de bienséance, c’est éga-
lement une forme de respect de vous et des autres. Si le
concept était autrefois l’illustration de l’appartenance à
certains milieux sociaux, il a bien évolué aujourd’hui.
Certains détails, en effet, peuvent l’être, mais le principe
du code vestimentaire est à notre époque un acte de
communication à travers le respect.
Lorsque j’écris plus haut « respecter convenablement »,
cela signifie qu’il ne faut pas simplement appliquer un
code de manière basique. Autant vous dire que cela peut
vous faire plus d’ombre encore. Par exemple, si vous êtes
invité à une réception à l’ambassade de Grande-Bretagne
à Paris, où la tenue vestimentaire souhaitée est la plupart
du temps la « tenue de ville » et que vous vous habillez
comme vous avez l’habitude de le faire en ville, avec un
jeans, des chaussures décontractées, une chemise ouverte
(je vous passe toute une série de détails qui peuvent se
révéler très croustillants...), je ne suis même pas certain
qu’on vous laisse entrer, du moins si vous n’êtes pas
quelqu’un d’important ou de très connu, raisons pour
lesquelles on pourrait fermer les yeux. Si vous adoptez

178
À propos des tenues

le code avec un costume mal coupé, une chemise fon-


cée, une cravate blanche en cuir et des chaussures rouges
en lézard, on vous laissera peut-être entrer. Vous serez
peut-être fier d’être invité et de vous retrouver dans
ce lieu magnifique, mais pensez-vous que ce public, a
priori, ressentira l’envie de venir vous parler ? Et pourtant
vous aurez respecté le code « tenue de ville » (costume,
cravate, etc.), mais sans aucune nuance, de manière non
adaptée et peut-être même égocentrique. Ce n’est plus
une question d’argent aujourd’hui. Notre époque nous
offre tous les moyens de très bien nous habiller, avec des
vêtements bien coupés et de bonne qualité. Il faut juste
le vouloir... et puis après observer et chercher.
Il y a une manière de porter ses vêtements, surtout
pour les hommes. Il faut le reconnaître, les femmes ont
beaucoup plus de possibilités et facilités que le genre
masculin à ce niveau-là, sans pour autant pouvoir échap-
per au manque de respect et aux fautes de goût.
Il y a beaucoup de codes vestimentaires, certains
même possédant plusieurs noms différents, d’autres en
anglais, présentant même des nuances selon les pays, etc.
J’ai choisi de vous épargner la plupart d’entre eux et de
n’en traiter qu’un seul ; la tenue de ville pour les hommes.
C’est à mon sens la plus importante pour eux dans la vie
de tous les jours, qu’elle soit professionnelle ou sociale.
Pour les autres, n’hésitez jamais à demander des pré-
cisions aux personnes qui reçoivent ou organisent. C’est
une question qui marque votre souci de bien faire les
choses et qui vous honore.

179
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Dans la vie quotidienne, faites-vous plaisir, dans le


respect de vous-même, mais n’oubliez pas tout de même
que le choix de votre tenue vestimentaire est également
une manière de communiquer qui vous êtes ou voulez
être. Il n’y a rien de totalement neutre, même pas le
choix de vouloir être neutre...

180
À propos des tenues

Tenue de ville pour les hommes


Le costume
Il y a avant tout le choix des couleurs qui est de plus
en plus vaste, mais avec une constante : on peut préférer
le clair pour la journée, mais pas pour le soir.
Vous pouvez choisir de porter un costume clair ou
foncé la journée et même un pantalon et une veste de
couleurs différentes, le tout est que cela soit en harmo-
nie. Le soir ou pour certaines réunions officielles, on
privilégie uniquement le foncé (et le plus couramment
le gris). Certains ouvrages interdisent formellement
le noir et le bleu. Si je suis assez d’accord d’évincer le
noir de la palette – je considère qu’il ne sied jamais aux
hommes (jeunes et moins jeunes) –, je n’ignore pas que
c’est à la mode. Mais en ce qui me concerne, je le laisse
à certains uniformes. Quant au bleu, il peut être très
flatteur. À vous de savoir où le porter : tous les bleus ne
conviennent pas partout. Pour le reste, c’est à nouveau
une question de bon sens, mais vous ne vous trompez
pas avec le gris en général. Évitez toutefois les tissus bril-
lants ou avec reflets.
La veste doit comporter deux ou trois boutons de
fermeture, ni moins ni plus, sauf pour les vêtements de
chasse ou taillés dans le style autrichien. On ne ferme
jamais le bouton du bas (idem pour l’éventuel gilet), mais
celui du dessus s’il y a deux boutons, et celui du milieu,
voire les deux supérieurs, s’il y a trois boutons. Sachez
toutefois que les hommes doivent ouvrir ces boutons
lorsqu’ils s’assoient, sauf dans le cas de la veste croisée.

181
Manuel du savoir-vivre comtemporain

Il y a également des boutons à la fin des manches,


entre trois et cinq. Il est bien de déboutonner le dernier
vers votre main, ce qui n’est pas toujours possible, car ils
sont souvent cousus. Les manches doivent laisser dépas-
ser la chemise de plus ou moins deux centimètres.
Il y a une poche de chaque côté et parfois une troi-
sième un peu plus petite à droite au-dessus de l’autre.
Il y a une poche en haut à gauche pour y mettre un
mouchoir. Les deux ou trois poches du bas peuvent être
droites en parallèle avec le sol ou dessinées en oblique.
La veste doit impérativement être fendue dans le bas
du dos, idéalement à gauche et à droite ou parfois juste
au milieu.
N’oubliez pas, dans certains cas, d’enlever le fil des
poches qui seraient encore cousues et de défaire éga-
lement ceux-ci dans le bas des fentes arrière. Ne laissez
pas non plus la marque de votre costume visible lorsque
celle-ci est cousue sur la manche...
Le pantalon, quant à lui, dans le cas du costume doit
impérativement être en matière et couleur identiques à
la veste. Ce qui varie, c’est la taille de celui-ci. Il n’y a
pas de règle générale ; il peut être à pince(s) ou non, avec
un pli central, plus ou moins long, avec un double bord
dans le bas, avoir une fermeture à boutons ou Éclair. Il
s’agit ici plus d’une question de goût et de tendance du
moment. Quoi qu’il en soit, vous devez le porter avec
plaisir ; c’est important d’être à l’aise dans ses vêtements.
Je dirais que l’ensemble doit adhérer à votre personnalité
et la refléter.

182
À propos des tenues

La veste peut être de différentes couleurs. À vous de


la préférer de la sorte ou non en fonction des circons-
tances et d’assortir de manière juste le pantalon. Celui-ci
peut également être de couleur, être en jeans ou fla-
nelle. Il faut cependant être attentif au fait que toutes les
matières ne font pas bon ménage ensemble.

La chemise
Dans la « tenue de ville », la chemise est conven-
tionnellement claire. Autrefois, seul le blanc était admis,
aujourd’hui on rencontre de nombreuses variantes, ce
qui n’est pas plus mal lorsque c’est bien porté.
Le col doit être simple, en une pièce et sans bou-
tons pour attacher les pointes à la chemise. Sa fermeture
centrale au niveau du cou ne peut se faire que par un
seul bouton, contrairement à ce qui se voit de temps en
temps. Quant à la forme du col, restez dans la gamme
classique et choisissez-le en fonction de votre personna-
lité et de votre nœud de cravate.
La chemise classique, en principe, ne comporte pas de
poche.Vous pouvez y faire inscrire votre monogramme.
La règle suggère qu’il soit de couleur bleu marine et
cousu sur votre gauche au niveau du cinquième bouton
en partant du cou. La mode, elle, vous offre beaucoup
d’autres possibilités...
Les manches doivent dépasser de votre veste de plus
ou moins deux centimètres. Elles peuvent être simples
ou doubles avec des boutons de manchette, ce qui reste
plus élégant.

183
Manuel du savoir-vivre comtemporain

La cravate et le mouchoir
La cravate est un accessoire important pour l’homme ;
elle peut être simple, classique et conventionnelle, mais
également un choix beaucoup plus personnel (toujours
dans le bon goût).
Sont interdites les cravates illustrant un poisson et
reprenant sa forme, celles illustrées par un grand person-
nage de bande dessinée, les noires avec une tête de mort,
etc. Si cela semble aller de soi dans le bon aloi, tout le
monde ne montre pas la même sensibilité.
Il y a toutefois une constante à respecter, c’est la
matière : elles doivent être en soie, laine ou coton et
en aucune matière synthétique. Elles se doivent d’être
souples et d’une belle consistance pour que le nœud soit
beau. Une belle cravate coûte un peu plus cher, c’est vrai,
mais il vaut mieux avoir une seule belle cravate dont on
est fier que plusieurs de mauvaise qualité. N’oubliez pas
non plus d’en défaire le nœud après chaque utilisation.
Celles qui restent en permanence nouées se remarquent
après un certain temps aux traces plus foncées sur le
nœud...
Il reste cependant encore un petit détail : on privi-
légie en général les cravates foncées pour le soir et les
réunions solennelles ou officielles. Elles ont l’avantage
de donner de vous une image inconsciente de sérieux
et de confiance.
Si beaucoup ne se posent jamais la question d’utiliser
leur petite poche située sur le sein gauche, elle a pourtant
une utilité très esthétique, celle d’accueillir un mouchoir.
Ce n’est pas obligatoire, mais tellement plus élégant. Il

184
À propos des tenues

peut être en coton blanc ou de la couleur de la chemise,


mais en aucun cas identique à la cravate, tant par la matière
que par le motif. Le mouchoir (ou pochette) doit être
différent de la cravate. Il y a plusieurs manières de le faire
ressortir de la poche : en dents de scie, droit, frivole, etc. À
vous de voir en fonction de votre personnalité et aussi des
circonstances dans lesquelles vous l’arborerez.

Les chaussures et la ceinture


Les chaussures peuvent être dans les tons bruns ou
noirs. Ce sont les seules couleurs traditionnellement
admises pour la tenue de ville conventionnelle. Le brun
est réservé à la journée, tandis que le noir se porte la
journée et le soir. Elles doivent être bien évidemment
en cuir, voire en daim brun dans certains cas, mais alors
en journée.
Il existe beaucoup de modèles de chaussures, mais je
vous conseille dans ces cas précis de rester dans la gamme
classique, dans le genre Richelieu et ses variantes.
Je considère que le bout des chaussures doit être
arrondi et non angulaire. Elles doivent être entretenues.
Pour la ceinture, c’est assez facile : elle doit être assor-
tie aux chaussures, tout simplement.

Les détails
La simplicité reste un maître mot dans l’élégance. Dès
lors, je suggère vivement d’abandonner tous les artifices
du genre épingle à cravate, pince à cravate, petite barre
dorée que certains portent pour resserrer le col de la
chemise tout en laissant une petite chaîne souligner le

185
Manuel du savoir-vivre comtemporain

nœud de la cravate. Ce dernier exemple signe un goût


de pignouf sans faille.
Dans la même veine, évitez aussi les gourmettes et les
bagues. Les seuls bijoux ou accessoires qu’on permet à
l’homme sont la montre (même en plastique), les bou-
tons de manchette (sauf les trop voyants en or massif, par
exemple, en forme de tête de dragon, les yeux incrustés
de rubis et d’une taille trop respectable), l’alliance et la
chevalière.
Je souhaite attirer votre attention sur le fait qu’il est
préférable de ne pas porter de chevalière si elle n’est pas
armoriée.Vous devez savoir que certains milieux raffinés
n’affectionnent pas particulièrement le port de la cheva-
lière simple ou reprenant un monogramme.
Si la chevalière armoriée n’a plus de sens intrin-
sèque aujourd’hui, elle se porte encore fièrement d’une
manière ou d’une autre, en fonction des pays et de la
position que vous occupez dans une famille.
Dès lors, si vous possédez des armes, nobles ou bour-
geoises, vous pouvez les porter, si cela vous fait plaisir.
Toutes ces considérations sont en train d’évoluer for-
tement au sein des jeunes générations. L’avenir, c’est eux
de toute façon ! Lorsque je vous parle de chevalières
armoriées, même si c’est une réalité, j’ai l’impression
d’être un dinosaure... Il y a une nouvelle manière de
considérer et vivre les choses qui est déjà présente. Cela
me permet de vous rappeler que ces usages ne sont pas
absolus et intemporels. Ils seront peut-être complète-
ment obsolètes d’ici peu de temps. J’en appelle à votre

186
À propos des tenues

bon sens, votre intuition et votre observation, à travers le


respect et la bienveillance.
Si vous avez la connaissance de ce qui est d’usage
aujourd’hui chez nous, c’est en revanche au fond de
vous-même que vous trouverez la réponse à la question
de le faire évoluer ou non.

Et pour les femmes


Les femmes sont plus favorisées que les hommes dans
les codes vestimentaires. Elles ont une liberté beaucoup
plus large. Il n’en demeure pas moins qu’on leur demande
de respecter également dans certaines circonstances des
codes de bon sens.
Il leur est recommandé de se conformer à la sobriété
des couleurs dans la sphère professionnelle et dans
d’autres formelles. En dehors de cela, elles ont un
choix incroyable de couleurs qui n’attendent plus que
d’être portées. Elles peuvent se rendre agréables, belles
et parfois parfaites en utilisant des subtilités que les
hommes n’imaginent même pas.
Dans le cadre de la tenue de ville, il leur est vivement
conseillé tout de même d’éviter les jeans, même de
grande marque, les jupes trop courtes et les chaussures
trop décontractées, même à la mode et coûteuses.
S’il semble que beaucoup de choses soient permises
dans les séries télévisées ou encore les téléréalités, la
vérité est ailleurs.

187
Manuel du savoir-vivre comtemporain

L’élégance et l’harmonie restent souhaitables, dans le


respect de soi-même et des autres.
Je ne prendrai pas le risque de me lancer dans des
conseils concernant leurs cheveux et ce qu’elles en font,
leur maquillage, leur parfum et leurs accessoires. Cela
demanderait un livre entier, avec tellement d’illustra-
tions qu’il faudrait l’éditer en plusieurs volumes. De
plus, je suis certain que d’autres s’en chargeraient mieux
que moi.
Elles ont cet avantage sur les hommes de pouvoir
revoir certains codes, de les interpréter et de faire en
sorte que ceux-ci signent individuellement leur beauté,
leur caractère et leur charme.
Que puis-je vous dire de plus sans prendre le risque
de m’essayer comme poète ?

188
Conclusion
Il y a d’autres domaines encore à explorer dans l’éti-
quette contemporaine, beaucoup de cas de figure à
envisager et énormément de détails à analyser, mais j’ai
préféré soulever l’essentiel.
Vous l’avez compris, j’ai opté pour un langage sans
détour et clair pour tous, au risque de m’attirer des ini-
mitiés. Je pense, en effet, qu’il faut dire les choses quand
on les pense justes afin de faire évoluer ce qui nous
semble être anachronique ou archéo-nostalgique. J’aime
le spirituel, mais me méfie des faux mysticismes ; je parle
de ceux qui nous maintiennent très habilement dans
un trouble sociétal, de ceux qui nous poussent encore
à sacraliser ce qui ne l’est pas, et nous cachent l’essence
même de réalités parfois bien plus lumineuses.
J’ai choisi de traiter cette matière à travers une réflexion
intellectuelle propre et en me référant à une expérience

189
Manuel du savoir-vivre comtemporain

assidue et certaine dans beaucoup de milieux tant en


France qu’en Belgique. Je n’ignore pas aller à l’encontre
de certains ouvrages, qui pourtant ont eu leur heure de
gloire, mais je ne puis souscrire à enseigner une matière
devenue désuète, car quasi jamais remise en question
dans un monde qui évolue à une vitesse vertigineuse. Je
me garde de la facilité en préférant m’engager pour une
cause qui me paraît juste, plutôt que de pondre ce que
d’autres ont déjà écrit en leur temps, parfois même avec
de nombreuses maladresses.
Je suis pourtant un homme qui aime la douceur et les
bonnes choses que nous offre la vie.
Je ne revendique rien d’autre qu’une communication
humaine propre, à travers l’élégance, le respect et le par-
tage. Je veux rendre sa vraie noblesse à cet art de vivre en
société au sein de toutes les tendances qui la composent.
Je le fais pour mon fils Thaddée et mes étudiants
en manque de repères dans l’époque complètement
déstructurée dans laquelle ils doivent évoluer...
Je le fais en mémoire de mon père Lichtfus et du
professeur Overloop, « un de ces fous sans lesquels notre
monde serait invivable7 », qui m’ont aidé à m’élever.
Je le fais pour vous, femmes et hommes du XXIe siècle.
Puissent ces quelques pages réfléchir en vous ne
serait-ce qu’un peu de lumière sur votre conception
de communiquer avec vos semblables et mon pari sera
gagné..

7. Extrait de « Sire Overloop, moderne bâtisseur », par Pierre Maury, Le


Soir, 20 janvier 1988.

190
Remerciements
Je remercie les quelques ami(e)s qui m’ont encouragé
et soutenu dans cette aventure,
celles et ceux qui ont contribué à la récolte de cer-
taines informations, et particulièrement Arnaud Du
Jardin et Joëlle Micha pour le temps qu’ils ont offert à
me relire et parfois critiquer de manière constructive ma
démarche...

191
Achevé d’imprimer en décembre 2019
sur les presses de l’imprimerie V.D. (Temse, Belgique)

Vous aimerez peut-être aussi