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« L’ouvrage que j’ai le plaisir de préfacer est un petit bijou

qui se déguste avec le plaisir du gourm et. Mais lecteur,


accroche-toi, ce livre est aussi de la littérature. Prends ton
tem ps ; savoure, ça vaut le coup. N ’avale pas ; mastique
et concentre-toi sur les saveurs. C’est si rare de nos jours
la belle écriture, celle qui nous transporte et nous fait
voyager... loin, très loin. Mais vraim ent très très loin
pour le coup, puisqu’il est question ici de l’au-delà et du
m onde subtil des esprits.

Tu ne devrais ni t’e nnuyer ni te perdre si tu suis bien le fil


du récit. Par m om ents tu plisseras tes yeux pour esquisser
un sourire ou m ieux te concentrer, puis tu les sécheras
entre deux ém otions. Tu seras tour à tour intrigué,
étonné, amusé, bluffé, sidéré, torturé, m en acé... Oui,
parfaitement, torturé et m enacé ! Torturé par les idées

© Photographie couverture : Benjamin Decoin


exposées car elles viendront m enacer les certitudes dans
lesquelles tu t’e s peut-être enferm é au fil du tem p s... »

jtasi-jfcuxfrujL A CJvartboniw,

978- 2- 8132- 1743-1 1 4 ,9 0 €

www.editions-tredaniel.com 9
Depuis son enfance, GENEVIÈVE DEIPECU,
e, ULIVLVILVL UL Lf LUH a toujours
évolué dans un milieu d’artistes et d’écrivains. Élevée par
sa grand-mère dans ses premières années, elle a été très
marquée par sa marraine, l’écrivain Lise Deharme qui
lui a transmis une liberté d’esprit très moderne avant
la lettre. C’est d’ailleurs vers douze ans qu’elle affichera
sans complexes ses premières voyances. Artiste peintre
et auteure de romans policiers, elle rencontre Michel
Delpech en 1983. Coup de foudre et révélation totale de
sa médiumnité. Un fils, Emmanuel, naît de leur union,
Geneviève amenant « en dot » deux enfants d’un premier
mariage : Pierre-Emmanuel et Pauline. Sa rencontre avec
le père Brune en 2015 la libérera totalement quant au
fait de rendre publique sa médiumnité. Le don d’ailleurs
sort en 2015 chez Pygmalion suivi de Te retrouver chez
Flammarion. Geneviève a aussi prêté ses dons à la police
dans la recherche de personnes disparues. Amoureuse
de l’Afrique, elle y apporte son aide et son soutien sur le
terrain.
Michel Delpech, quand j ’étais chanteur, Flammarion, 2017
Te retrouver, First Édition, 2017
Le Don d ’ailleurs, Pygmalion, 2015
De cendres et de braises, Presses de la Renaissance, 2000.

© Guy Trédaniel éditeur, 2018


ISBN: 978-2-8132-1743-1

Tous droits de reproduction, traduction ou adaptation réservés


pour tous pays.

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info@guytredaniel.fr
www.facebook.com/editions.tredaniel
GENEVIÈVE DELPEC
PRÉFACE DUDrJEAN-JACOUES CïIARBOIR

CETTE EXPÉRIENCE INOUÏE

GuyTrédaniel éditeur
19, rue Saint-Séverin
75005 Paris
Préface........................................................................... 13

Préambule..................................................................... 19

Chapitre 1 L’Expérience du Tout............................. 35

Chapitre 2 Les nombres.............................................. 49

Chapitre 3 La connaissance du Tout.......................... 65

Chapitre 4 Nous appartenons tous


à une communauté divine..................... 73

Chapitre 5 Le parc dans le Lubéron.......................... 79

Chapitre 6 Une petite histoire................................... 85


Chapitre 7 De la vie après la mort........................... 91

Chapitre 8 Notre vie sur Terre................................. 103

Chapitre 9 Un moment de récréation..................... 107

Chapitre 10 Les ateliers du docteur


Jean-JacquesCharbonier......................... 111

Chapitre 11 Afrique mon amour:


l’expérience de l’iboga............................. 123

Chapitre 12 À la recherche des aurores boréales...... 131

Chapitre 13 Le sens de mon expérience.................... 137

Chapitre 14 Le sens de la connaissance du Tout...... 141

Chapitre 15 L’éthique et les voies de la vie................ 147

C onclusion.................................................................... 153
Remerciements............................................................. 157
Imagine there’s no heauen
It’s easy if you try
No heîi below us
Aboue us on/y sfcy
Imagine ail the people
Liuing for today...

Imagine there’s no countries


It isn’t hard to do
Nothing to kill or die for
And no religion too
Imagine ail the people
Liuing life in peace...
You may say l ’m a dreamer
But l ’m not the on/y one
I hope someday you’ll join us
And the world will be as one

Imagine no possessions
I wonder if you can
No need for greed or hunger
A brotherhood o f man

Imagine ail the people


Sharing ail the world...
You may say I’m a dreamer
But l ’m not the only one
I hope someday you’ll join us
And the world will liue as one
À Gabrielle, petit ange...
À mon ami, le très saint père Brune.
Je l’aime tant.
entre les objets éclairés et la lumière. On aime la lumière
à cause des objets qu’elle éclaire. Il faudrait arriver à aimer
les objets éclairés à cause de la lumière.»

«Ne demande pas à Dieu de te guérir du doute


et du désespoir. Dis-toi plutôt que tu es une parcelle
de Dieu qui doute et qui désespère. »

«La connaissance s ’acquiert par l’expérience,


tout le reste n ’est que de l’information.»
«La distinction entre le passé, le présent,
le futur n ’est qu’une illusion, aussi tenace soit-elle.»
Geneviève Delpech, que l’on présente trop souvent
comme la récente veuve de l’une des plus grandes stars
de la chanson française de ce dernier siècle, est aussi,
et sans doute surtout, une artiste aux multiples talents.
Elle manie la plume aussi bien que le pinceau
puisque ses toiles ont déjà été exposées dans les plus
prestigieuses galeries de France.
Désolé pour le mot «plume», il peut sembler vieillot
et désuet, mais c’est de cette façon que l’on désigne les
véritables écrivains dans les milieux autorisés : ce sont
des «plumes». Geneviève n’en est pas à son premier
opus, et cela se voit rapidement. Elle a écrit un certain
nombre de romans - policiers en l’occurrence - sous
différents pseudos que je ne dévoilerai évidemment pas.
L’ouvrage que j’ai le plaisir de préfacer est un petit
bijou qui se déguste avec le plaisir du gourmet.

Mais lecteur, accroche-toi, ce livre est aussi de la


littérature. Prends ton temps ; savoure, ça vaut le coup.
N’avale pas ; mastique et concentre-toi sur les saveurs.
C’est si rare de nos jours la belle écriture, celle qui
nous transporte et nous fait voyager loin... très loin.
Mais vraiment très très loin pour le coup, puisqu’il est
question dans cet ouvrage de l’au-delà et du monde
subtil des esprits.
Tu ne devrais ni t’ennuyer ni te perdre lors de ta
lecture si tu suis bien le fil du récit.
Par moments, tu plisseras tes yeux pour esquisser
un sourire ou mieux te concentrer, puis tu les sécheras
entre deux émotions. Tu seras tour à tour intrigué,
étonné, amusé, bluffé, sidéré, torturé, menacé... Oui,
parfaitement, torturé et menacé! Torturé par les idées
exposées car elles viendront menacer les certitudes
dans lesquelles tu t’es peut-être enfermé au fil du temps.
Bref, ce texte qui fait bouger les codes de nos socié­
tés occidentales ne te laissera pas indifférent, et c’est
bien pour cela que j’éprouve autant de joie à rédiger
ces quelques lignes d’introduction. Tu vas être bousculé,
crois-moi.

Que ce soit sa fameuse «Expérience du Tout» - qui


mérite des initiales en majuscules tant elle semble
extraterrestre - ou ses ressentis médiumniques, dont
certains, et j’en suis très fier, se déroulèrent lors de deux
séances d’hypnose dont je fus l’instigateur, tout porte
à croire que Geneviève est un canal privilégié entre
notre monde et l’invisible.

Depuis une vingtaine d’années, j’ai fréquenté beau­


coup de médiums durant mes recherches sur l’après-vie
et le fonctionnement de la conscience. Je l’écris ici
sans aucune exagération : la médiumnité de Geneviève
Delpech est l’une des plus puissantes et des plus com­
plètes que je connaisse. Puissante par la précision des
détails donnés, et complète, car Geneviève reçoit non
seulement en clairvoyance ou en clairaudience des
messages des défunts, mais elle est aussi saisie par des
flashs impérieux. Elle travaille régulièrement avec la
police pour aider à résoudre des enquêtes complexes
et se déplace souvent à l’étranger pour retrouver les
traces de disparus. Mais de cela elle n’en parle jamais
ou presque. Qu’elle m’autorise de profiter de l’occasion
pour le dire à sa place.
Le père François Brune, qui a fréquenté toute sa vie
des médiums réputés, partage mon avis, et ce n’est pas
pour rien qu’il lui a demandé avec beaucoup d’insistance
d’écrire il y a deux ans un premier livre sur ce sujet*.
Alors bien sûr, on peut se demander comment vivre
avec tous ces «dons d’ailleurs»? Comment les accepter
et que faut-il en faire ? La première chose est de les par­
tager, de les livrer tels qu’ils sont sans nécessairement
les expliquer, tout en y apportant une sorte de touche
philosophique personnelle qui annonce autant de pistes
de réflexion. C’est ce qui est fait dans ce travail avec
beaucoup de rigueur, en pesant chaque mot, chaque
phrase. Sans fioritures et sans concession. Une sorte

* Le Don d ’ailleurs, éd. Pygmalion, 2 0 1 5 .


de confidence introspective qui permet l’analyse d’une
situation hors-norme. Point de méli-mélo ou de drama­
turgie. L’auteure n’est pas préoccupée par son culte.
Du brut. Oui mais du brut poétique. Avec des fleurs...
Oui c’est possible. Tu verras...
Mais sortir du lot, naviguer hors du cadre, ne pas
être comme tout le monde, suscite des moqueries, de
la colère, des jalousies, de méchantes attaques. Je sais.
Je connais. Geneviève et moi nous avons dû encaisser
pas mal de coups tordus. Et il y en aura certainement
d’autres après cette publication.

Chers, très chers ennemis, sachez que nous n ’en


voulons à personne car la nature humaine est ainsi
faite. Ceux qui nous jalousent nous font briller, ceux
qui nous critiquent nous font avancer, ceux qui nous
détestent nous rendent plus forts, et enfin, ceux qui
nous aiment nous les font oublier.

Bonne lecture à tous.


La jeunesse est comme une photo Polaroid qui vient
detre prise. Tout est flou. On ne sait pas quelle va être
l’image. Alors on fonce. On tente des choses, on projette,
on imagine. On donne sa chance à tout ce qui passe. Le
monde est beau et improbable, comme la terre bleutée vue
d’un satellite. Puis les années commencent à arriver sur
la pointe des pieds. L’image Polaroid révèle une forme.
Pas tout à fait celle que l’on attendait mais l’on s’ajuste.
Et l’image devient de plus en plus précise à mesure que
les années se font de plus en plus pressantes. «Ah, je vois,
c’est donc ça la vie. Elle a cette tête-là. »
On s’ajuste encore. On revoit ses ambitions à la
baisse. Ou à la hausse selon que l’on a le tempérament
bouteille à moitié vide ou bouteille à moitié pleine.
Et arrivé à un certain âge, on vit avec la photo bien
révélée, bien définie, bien précise. Et elle est tellement
crue que l’on en devient aigri. Ou empreint de sagesse.
Ou que l’on décide de tirer un autre Polaroid pour se
repaître du beau flou blanchâtre et mystérieux de la pre­
mière minute. Porteur du champ de tous les possibles.
C’est ce que j’ai choisi de faire après mon Expérience
du Tout.
Mais pour bien comprendre ce qui m’est arrivé avec
l’Expérience que je relate dans ce livre, il est néces­
saire que je me rassemble, que je remonte au plus loin
que ma mémoire me le permet, et ce, pour vous, lec­
teur, comme pour moi. Par cette reconstitution, je dois
savoir qui je suis, enquêter sur moi-même dans ce pré­
ambule, comme un commissaire de police fait le point
sur son affaire dans le dédale des informations, indices
et péripéties.
Ce qui ressort tout d’abord, c’est que je suis la
femme de Michel Delpech. Depuis toujours dirai-je car
toute ma vie d’avant lui convergeait vers lui et toute
ma vie d’après est encore étroitement liée à la sienne ;
passée et «trépassée».
Loin de me sentir «femme de», j’assume et je reven­
dique d’avoir vécu dans l’ombre et la lumière de cet
immense artiste qu’était mon mari. Malgré tout, je ne
me suis jamais sentie femme de célébrité, même si j’en
ai tiré beaucoup d’avantages. Il faut le noter, car mon
Expérience est certainement arrivée en contrepoint
à cette vie d’apparat, factice souvent, «people» encore
plus souvent, que j’ai pu mener par et pour mon mari,
figure marquante de la chanson française. J ’ai vécu aussi
intensément, en marge de lui qu’avec lui, la difficulté
de son métier au niveau où la popularité l’avait porté.
Particulièrement en gérant l’ingérence de sa popula­
rité dans notre vie privée. À aucun moment nous ne
pouvions nous «couper» d’avec son métier de chanteur
populaire. Il se devait toujours d’être plus ou moins en
représentation et de faire bonne figure, sourire à l’ap­
pui, son atout majeur, comme il le dit dans Quand
j ’étais chanteur. Sous peine d’une rumeur du style «il
n’est pas sympa, Delpech». Parce qu’il se devait d’être
sympathique, tel un gendre idéal, comme on l’avait
catalogué au début de sa carrière. Et à ce niveau-là de
célébrité, on se doit d’afficher un bonheur rayonnant.
Alors, la plupart du temps, il déchargeait cette pres­
sion sur moi, quand il avait besoin de se retirer en
lui-même, comme il le faisait souvent. Et, encore une
fois, ces vibrations que je prenais à mon compte ne
furent certainement pas étrangères à mon Expérience.
J ’ai même le sentiment que tout s’est passé comme si
j’avais besoin, pour Elle, de ce tourbillon de vie publique,
exposée sous le regard et le jugement des autres.
J ’ai toujours été un «moteur» pour mon mari. Et j’ai
dès le début accepté la donne. À savoir qu’il était connu
et reconnu comme une icône de la chanson française
et que j’étais en quelque sorte son clown blanc. Mais
depuis que je suis toute petite, j’aime les deux clowns :
le drôle et le blanc, son faire-valoir. Et je ne les ima­
ginais pas séparés, jamais. Il aurait manqué quelque
chose au spectacle. Un écho, une résonance ; j’étais
l’écho, la résonance de Michel. Et cela s’est affirmé
d’autant plus lorsque ma médiumnité s’est intensément
révélée à son contact.
Toute petite, j’avais des dons médiumniques, déjà.
«La petite a le don», disait-on dans ma famille. J ’avais
annoncé à ma grand-mère la mort d’un jeune homme
qui devait se marier et que tout le monde croyait vivant
et en pleins préparatifs. Et plus tard, la mort du fils de
la cuisinière de ma grand-mère dans un accident de
voiture. J ’ai donc, avec mon don, commencé à me fami­
liariser très tôt avec la mort. Ce don s’est ensuite invité
très fréquemment dès la naissance de mes enfants, et
s’est installé définitivement quand j’ai connu Michel,
donc. Cette médiumnité a alors littéralement pris pos­
session de moi, envahissante, exigeante, lancinante,
contraignante et... fabuleuse. Combien de fois, quand
je voulais être une femme comme les autres, avec des
envies normales et des soucis de tous les jours, ce don
très cavalier est-il venu pour m’emmener ailleurs ! Un
ailleurs dont je me serais bien passée. J ’étais un peu
comme Django Reinhardt, guitariste de génie, qui ado­
rait jouer au billard et qui oubliait parfois qu’il avait
un concert à honorer. Il envoyait promener son don
phénoménal pour s’amuser normalement, sainement,
dirai-je. Je comprends ce qu’il devait ressentir. Il y a
quelque chose de dérangeant à bénéficier de facultés
qui ne sont pas de ce monde palpable, codé, répertorié,
référencé, globalement vérifié par la science.
Ce «don d’ailleurs», pour citer le titre d’un de mes
livres, m’a fait vivre des choses que les scénaristes les
plus déjantés auraient eu peine à imaginer. J ’ai pres­
senti des événements complètement improbables, des
scènes folles, j’ai vécu des bilocations, des synchronici-
tés, j’ai décrit des situations qui se sont ultérieurement
produites. Je me suis retrouvée en éclaireur au cœur
d’événements non encore survenus ; j’ai reçu des aveux
et des confessions en clairaudience. «On» m’a aussi
avertie de choses inéluctables qui ont pu ainsi être
détournées ou enrayées.
Je ne sais par quelle pudeur mal placée, par quelle
peur du jugement à l’emporte-pièce j’ai longtemps tu
ce don. Le fait est que j’avais l’impression qu’on me
percevrait un peu comme ces comédiennes du dix-
neuvième siècle, qui ne pouvaient être que des filles
de mauvaise vie, frivoles, intrigantes, légères, avec une
moralité à géométrie variable. J ’avais peur de l’étiquette
de cartomancienne, diseuse de bonne aventure, bohé­
mienne. Ces appellations qui n’étaient romanesques
que dans les films en noir et blanc des années cinquante.
De plus, ce n’était pas non plus dans mon éducation.
Ma grand-mère qui m’a, je dois bien l’avouer, élevée,
était une femme libre, fréquentant Prévert, Lacan et
tenant salon chez elle. Ma mère en revanche s’em­
pêtrait dans sa bourgeoisie de province, soucieuse du
jugement et du regard des autres, comme on répétait
à l’envi dans les années Delarue.
En fait, pour révéler mon don au grand jour, j’avais
besoin d’une caution morale, d’un blanc-seing. Le père
François Brune m’a apporté tout cela. J ’ai eu la chance
de le rencontrer par l’intermédiaire d’un ami. Je lui ai
raconté mon histoire dans un bar du quinzième arron­
dissement de Paris autour d’un chocolat chaud. Bluffé,
il m’a regardé avec ses yeux pleins de bonté et de dou­
ceur et m’a dit: «Il faut que vous écriviez cela. Vous
vous devez de le faire. »
Je lui avais bien sûr parlé de mon Expérience du
Tout. Il m ’a en quelque sorte adoubée. Et, forte de
la caution morale de cet homme, je me suis lancée.
Jusqu’alors beaucoup de choses me retenaient. Entre
autres, je ne voulais pas faire «doublon» avec mon
mari. Rester dans son ombre m’allait très bien. Tout en
étant dévouée corps et âme à sa carrière et à l’homme

h
exceptionnel qu’il était, c’était un peu comme si je
m ’interdisais de me réaliser en marge de lui, ou pire,
comme si je me faisais remorquer par sa notoriété.
J ’avais la mienne, plus modeste, dans ma peinture. Je
suis artiste peintre. Et je me satisfaisais largement de
m’épanouir dans mon art tout en élevant mes enfants.
Et ce conseil ô combien péremptoire du père Brune
a provoqué un déclic en cette période de ma vie où les
choses prenaient à la fois une tournure pesante, avec des
allures de rédemption, à travers la maladie de mon mari.
Seuls mes proches me connaissaient ce don. Mais
à cause ou grâce, plutôt, à mes fulgurances, vérifiées la
plupart du temps, le bouche-à-oreille a vite fonctionné.
Il en est cependant ressorti que je ne «vois» bien que
pour ceux que j’aime. C’est pour cela que je ne me
sens pas capable, tels certains médiums, de voir tout
et pour tout un chacun dans une salle. Et c’est donc
aussi, outre cette gêne qui me retenait, pourquoi je
n ’ai jamais monnayé ma médiumnité. Médiumnité que
j’ai longtemps perçue moins comme une grâce qu’un
handicap. Elle m ’envahissait, ne me lâchait pas; je
ne pouvais jamais me retirer dans la normalité, faire
sécession. Comme ces antiquaires qui ont toujours
l’oeil, même une fois qu’ils ont fermé leur boutique ou
quitté le salon des antiquaires. Invités chez des amis, ils
regardent les meubles, les bibelots, évaluent, resituent
dans les époques, comparent.
Avoir la précognition d’événements dramatiques
n ’est pas l’idéal pour élever ses enfants et seconder
son mari célèbre.
Outre l’intervention du père Brune, d’autres facteurs
sont venus se greffer pour que je décide du jour au len­
demain de rendre mon talent public, de l’officialiser.
Tout d’abord le décès d’une de mes deux meilleures
amies, Christine. Sa disparition m’a révélé la tournure
du monde avec son lot d’injustices et d’horreurs. Celle
de mon ami Charb a suivi. Christine est une blessure
profonde mais l’assassinat de Charb m ’a dévastée.
Depuis, c’est vrai que je peux difficilement regarder
les infos. J ’ai utilisé mon capital «nouvelles du monde»
comme lorsqu’on a utilisé son capital soleil et que l’on
sait que sa peau peut devenir vulnérable aux mélanomes.
À une époque, l’information se laissait décou­
vrir. On avait le temps de supputer. Là, elle est en

U
temps réel, hautement détaillée, fouillée, déclinée. On
nous exhibe, nous exhume les vilenies, le cynisme des
possédants et l’orgueil délétère du pouvoir politique,
ses tenants et ses aboutissants, de façon crue, rude,
vulgaire. Toute la beauté des êtres et des choses est
occultée au profit de la déviance. Depuis Christine, je
suis devenue très vulnérable à la violence de ce monde,
jolie pierre chauffée par le soleil et arrosée par la pluie
des nuages. Mais qu’il ne faut pas soulever. Ça grouille
de vermine et de cancrelats dessous.
Après le décès de mon amie, la grave maladie de
Michel. Comme si un nouveau malheur arrivait pour
m ’étourdir et en chasser ainsi un autre. Cependant,
pour le côté positif, toujours via le père Brune, je
dois aussi ce coming out, comme on dit maintenant,
à mes retrouvailles avec un ami après plus de cinq ans
de brouille aussi bête qu’irraisonnée. Cet ami est un
parolier avec qui Michel a beaucoup collaboré, sur
deux albums pratiquement entiers. 11 allait voir Michel
régulièrement à l’hôpital durant sa maladie. C’est d’ail­
leurs là que cet ami lui a appris qu’il était voisin du
père Brune.

n
Depuis le temps que je voulais rencontrer cet
homme ! J ’admirais ses travaux sur les conversations
avec les morts et sa posture par rapport à l’Église
catholique qui, disait-il, en était encore, après tous
ces siècles, à prendre comme référents saint Thomas
d’Aquin et saint Augustin qui prônaient, entre autres,
la relégation aux enfers des enfants non baptisés qui
mouraient. Ajouté à cela, Dieu qui envoie son fils au
supplice pour laver les affronts des péchés... ! Comme
si Dieu, dans sa toute-puissance, sa magnificence et son
infinie miséricorde, se livrait à des calculs d’épicier pour
décerner l’enfer ou le paradis à ses ouailles. Pourquoi
pas un permis à points?
Ce saint homme, le père Brune, tout bien consi­
déré, fut donc le déclic. Il a su me convaincre de rendre
publique ma médiumnité. Il arguait quelle s’avérerait
utile aux gens, qu’elle les ouvrirait à une certaine forme
de spiritualité, les préparerait à intégrer le fait que la
mort n ’est pas une fin définitive, si je puis me per­
mettre ce pléonasme. Il existait une survie de l’âme qui
d’ailleurs préexistait avant que le corps ne devienne
dépouille mortelle. Les gens étaient en attente de ça,

B
dans ce monde d’argent, de course au profit, ce monde
profondément matériel pris dans la fuite en avant de
l’ici et maintenant.
Pour expliquer cette Expérience du Tout dont j’ai
reçu la grâce, je peux dire que je fréquentais ma vie
d ’avant un peu comme les gens que l’on fréquente
distraitement. Comme on écoute une chanson. La
musique nous plaît bien, on retient quelques vers du
refrain ou quelques mots dans les couplets et on déroule
les jours comme ça. Il y en a même qui deviennent
des amis mais on est incapables de savoir ce que leur
chanson raconte exactement. Et un jour on tombe sur
les paroles. Leurs paroles. Et là on se rend compte de
toute la puissance, de toute la poésie, de toute l’hu­
manité du texte. Et on se dit: waouh! je le fredonnais
seulement alors que les paroles sont incroyables !
On le découvre alors avec un autre regard, une
autre dimension. Et on mesure quel ami il est.
Dans le cas d’un grand amour, on la connaît par
cœur, la chanson. Bien sûr. Et on ne se lasse jamais de
l’air. Il joue toujours en nous et sur tous les registres,
de la joie à la mélancolie. Et on l’écoute comme on
peut écouter sans se lasser la Cinquième Symphonie
de Mahler ou la Pavane de Ravel. Quant aux paroles,
on les redécouvre à chaque fois et elles nous hissent la
foi aux lèvres et les larmes aux yeux. Et jusqu’à la mort
on ne saura jamais quel souffle a inspiré une chanson
pareille.
Eh bien, et je rends hommage au passage à mon
mari en faisant la comparaison avec la chanson, avant
mon Expérience du Tout, je fredonnais les êtres et
les choses sans vraiment comprendre le sublime des
paroles. Après mon Expérience, j’ai mesuré à quel
point elles étaient profondes et belles.
Comment douter, après cette Expérience, que
«Tout s’enroule, tout va dans tout», comme l’écrivait
Jean-Michel Rivât, le parolier fétiche de Michel. Oui,
tout jouxte, de l’infiniment petit à l’infiniment grand, et
tout sert la création, tout joue son rôle. Mon Expérience
m’a prouvé à quel point nous sommes infirmes avec
nos cinq sens et nos trois dimensions. Tout se poursuit
dans d’autres sphères. Nous sommes voisins d’un mer­
veilleux ailleurs. Qui va finir par se savoir à une grande
échelle.
Des gens comme Pierre Monnier, ce garçon mort
très jeune pendant la Grande Guerre en est un témoi­
gnage avec ses multiples ouvrages «dictés» à sa mère.
Ce qui est fou, c’est que ses incursions depuis l’au-delà
apportent des preuves on ne peut plus convaincantes
de la survie et que, alors que ces livres devraient être des
best-sellers puisqu’ils apportent en de multiples points
la preuve de la pérennité de l’âme, il faille les recher­
cher ou les commander dans une librairie spécialisée.
Comme si les gens préféraient ne rien savoir de l’après-
mort, ou pire, comme s’ils étaient effrayés d’être encore
«en conscience» après leur trépas. Tout comme ceux
qui préfèrent l’anesthésie totale lors d’une intervention
chirurgicale. J ’en connais beaucoup qui le disent claire­
ment : ils préfèrent le néant et l’oubli du tombeau à la
subsistance de l’esprit. Et ils s’accrochent désespéré­
ment aux choses terrestres, comme si ces choses-là,
elles, étaient empreintes d’immortalité. Comme si ce
à quoi ils étaient confrontés ici-bas était si important... !
Pour relativiser les fâcheries, les passions et les
idéaux défendus bec et ongles, il n’est qu’à considérer
une maison en démolition, ouverte aux quatre vents,
où l’on resitue la distribution des pièces par les carre­
lages et les papiers peints encore accrochés aux murs :
cuisine, salle de bains, chambre des enfants, salon.
On se dit que des vies, avec des certitudes et des pro­
jets, se sont succédé dans ce pauvre décor d’ancienne
habitation qui donne le même sentiment de délabre­
ment qu’une maison bombardée. Précarité des choses,
sentiments provisoires, passions émoussées, serments
dérisoires exsudent de ces vestiges de misère qui ont
jadis été témoins de drames, de bonheurs et de pro­
messes définitives.
C’est peut-être pour ça que je ne me suis jamais
alourdie d’une âme de propriétaire. Et que je n’ai jamais
exigé une exclusivité amoureuse. Quant à mes amis, je
prends ce qu’ils me donnent et ils resteront toujours
mes amis même s’ils doivent à l’avenir me trahir.
Je ne sais toujours pas pourquoi c’est moi qui aix
reçu ce cadeau du Tout ni qui je suis vraiment ; mais je
sais ce en quoi je crois. Ce en quoi j’ai toujours cru et
que mon Expérience n’a fait qu’affirmer. Je crois aux
herbes folles, au rythme des saisons, aux lucioles, au
mariage d’amour, à la parole donnée, à l’odeur de la
terre après la pluie, à l’effort pour se faire accepter, aux
champs de blé et aux coquelicots, au respect, au repas
partagé, au rire des enfants, aux arcs-en-ciel, à l’écoute
de l’autre, à l’odeur du linge séché au soleil, aux merles
et à la pie voleuse, à l’humus des sous-bois, aux boutons
d’or sous le menton pour voir si j’aime le beurre, au
temps ralenti, à la toile cirée des tables de cuisine, aux
groseilles pas mûres, aux parfums des vieilles roses des
jardins de curé, aux poignées de main dans un regard
franc, aux hannetons et aux coccinelles, au retour des
amis et à l’odeur des livres oubliés.
CHAPITRE 1

L'EXPÊRiENCE
Je suis née dans le sud de la France où j’ai vécu de
façon intermittente. J ’ai franchi beaucoup d’obstacles
dans ma vie, depuis l’école jusqu’à aujourd’hui. Je suis
tombée amoureuse, j’ai beaucoup aimé, j’ai aussi vécu
des expériences plus difficiles, dont l’expérience de la
mort. J ’ai perdu ma grand-mère maternelle adorée,
mes parents, mon mari. Bien sûr, tout le monde passe
par là et nous devons faire notre deuil. Mais certains
ont une croyance qui les aide à faire face à la peine. Ils
sont sûrs de revoir leurs proches au paradis alors que
pour d’autres, ce n’est pas si simple. Que se passe-t-il
lorsque nous mourons? That is the question...
L’Expérience du Tout m ’a apporté la preuve de
l’immortalité de l’âme. Celle de mon mari, notamment,
car il s’est manifesté à plusieurs reprises. Comment
décrire cette expérience métaphysique, ce sentiment
d’illumination? Comment parler de l’origine divine de
ces nombres qui flottaient tout autour de moi, expli­
quer que j’étais une fourmi sur une branche, que je
voyais et pensais comme elle, tout en l’observant de
l’extérieur? J ’essaie «simplement» de comprendre et
de transmettre l’incompréhensible en remplaçant mon
ressenti, la «touche de Dieu», par des mots simples. Et
que faire de ce cadeau ? Comment le transmettre avec
la limite des mots et de nos cinq sens? Que faire de
tout cela?

Encouragée par le père Brune, j’ai décidé de me


battre, d ’affirmer, de témoigner. Rien n’a été facile
et tout l’a été. Peu à peu, j’essaie de me détacher des
biens matériels pour me rapprocher d’une vie spiri­
tuelle. Oh, bien sûr, je ne suis pas devenue une sainte
prête à vivre dans un dénuement total. Et je suis restée
la même par bien des côtés. Tout cela pour vous dire
qu’il a ouvert une brèche qui jamais ne se refermera.
Aujourd’hui, toutes religions, tous dogmes, sont der­
rière moi. Seule m’importe la spiritualité.

11 est question de Dieu dans tout ce qui suit...

11 y a plusieurs années, j’ai vécu une histoire, ou


plutôt un moment étrange de nature «originel» qui
a bouleversé ma vie : l’Expérience du Tout. Avant de
connaître cette merveilleuse aventure, je n’avais jamais
entendu parler de ce phénomène, bien qu’il soit connu,
par mon mari le premier, qui, dès l’instant même où
j’en fus sortie, m’a raconté ce que je venais de vivre :
«Tu sais que tu viens de faire l’Expérience du Tout?»
Par la suite, au cours d’une visite dans un ashram
près de Paris, à Gretz, j’eus un entretien avec Swami
Ritajananda qui me rassura. Il est vrai que je n’étais
pas sans me poser de questions. Je cherchais surtout
à comprendre.

À cette époque, je ne pouvais pas rendre publique


cette aventure sans courir le risque de passer, au mieux
pour une originale, au pire pour une folle. Seules des
personnes averties versées dans la spiritualité ou qui
s’intéressent aux phénomènes paranormaux y auraient
accordé un intérêt. Aujourd’hui, je peux en parler en
toute tranquillité. On assiste en effet à un regain d’in­
térêt pour le paranormal qui est sur le point de s’ériger
comme conscience, comme science, comme connais­
sance à part entière, en association avec d’autres
domaines tels que la physique quantique, la cosmologie,
la sociologie ou la philosophie.

Cette évolution dans le domaine de la connaissance


est le résultat de la remise en cause du cartésianisme
dans nos sociétés en proie à de profonds changements,
aussi bien du point de vue climatique que des moeurs.
Les crises que traverse le monde sont à la fois poli­
tiques, économiques, spirituelles et matérielles.
De même que toute action de l’homme suit naturel­
lement sa nature, autrement dit que l’on ne peut pas
empêcher l’esprit d’être irrationnel pas plus qu’on ne
peut lui enlever ses velléités de rationalité, l’esprit n’est
ni rationnel ni irrationnel, il est simplement esprit.
La rationalité serait ainsi définie comme la mise
en oeuvre des moyens pour atteindre ses fins, en vue
de la conservation de la vie. Rationalité et irrationalité
sont les deux modalités indissociables de perception et
d’intégration au monde. Ce sont les deux faces d’un
même esprit. En fait, la rationalité est irrationnelle et
l’irrationnel est rationnel. Tout dépend de l’angle ou
de l’éducation intellectuelle religieuse et socioculturelle
dans lesquels on se place. Tous les points de vue se
valent à la condition que les actions ne soient pas atten­
tatoires à la vie.

De mon point de vue, la vie est faite pour voir Dieu,


dans les limites cependant de la conscience de chaque
individu, chaque société humaine, chaque cœur. Nulle
illusion de l’esprit chez cet homme d’une société primi­
tive qui, voyant un avion atterrir sur ses terres, demande
au pilote s’il a vu Dieu.
«Non, je n ’ai pas vu Dieu, répondit ce dernier.
— Alors pourquoi voles-tu si haut dans le ciel, si ce
n ’est pas pour voir Dieu?
— Et toi, l’as-tu déjà vu?
— Ici, nous n’avons jamais cherché à Le voir. Dieu
est partout, Il est l’esprit qui se manifeste partout dans
la nature. »

Dieu est le problème de l’homme, sa question


névralgique. Le cordon qui s’est noué entre l’homme
et Dieu a donné naissance à autant de sensibilités reli­
gieuses qu’il est possible d’imaginer et qui ne sont pas
toujours en accord les unes avec les autres. Je me sou­
viens de l’une de mes lectures qui disait, de mémoire,
à peu près ceci: «Si Jésus revenait, les hommes le
crucifieraient à nouveau tellement les désaccords et
les problèmes de communication seraient grands. » Je
ne suis pas d ’accord avec cette assertion, mais elle
montre combien la question de Dieu est problématique,
tout comme le sont les frontières entre le rationnel et
l’irrationnel.

Cet échange entre les deux hommes démontre


assez l’esprit religieux de ce peuple. Il est vain de voler
pour voir Dieu. Aucune médiation matérielle n’est effi­
cace pour voir Dieu. Dieu est en quelque sorte la roue
invisible qui cercle la croix. Quelque position que prenne
l’homme sur la croix, à l’horizontale ou à la verticale, n’a
aucune importance dès lors que la roue tourne. Et pour
moi, ce jour-là, en Provence, elle a tourné à une vitesse
si incroyable que j’ai été réduite à ma part de divinité.

L’homme n ’est pas le centre de la Terre. En


revanche, le centre de la croix est le réceptacle de l’éner­
gie cosmique. La croix est son pathos. Autrement dit,
l’énergie cosmique passe non seulement par l’amour,
mais aussi par la souffrance, quand ce n’est pas une
seule et même chose, à l’endroit où se situe la fissure
qui sépare l’homme de son origine.

Ce jour-là, nous avions fini de déjeuner et je suis


sortie sur la terrasse pour fumer une cigarette. En
fait, cette cigarette constituait mon seul «écart», car je
n’avais bu que de l’eau. Cette cigarette était tout à fait
ordinaire, je veux dire, dénuée de «substances». Mon
état de conscience était normal. Je n’étais ni en prière
ni en méditation, et notre repas frugal n’avait altéré en
rien mes facultés cognitives et sensorielles.
J ’admirais ce parc en tirant sur ma cigarette lorsque,
soudain, j’ai senti que je quittais mon corps à une vitesse
étourdissante. Je n’étais plus «locataire» de mon enve­
loppe charnelle tout en restant cependant moi-même,
mais à l’image d’une fusée, j’avais largué les étages.
D’un seul coup, je passais dans une autre dimension
à une vitesse vertigineuse. Je n’habitais plus ma chair
et mon sang.

J ’ai d’abord eu une vue panoramique du parc du


Lubéron avant d’avoir cette impression de pénétrer
dans les arbres, dans la cellule, dans son intimité.
C’était à la fois une vision et une personnification. Il
en a été de même pour la pierre, l’arbre, l’eau, l’herbe,
l’insecte jusqu’au cheval du champ d’en face. C’était
une impression d’être tout à la fois en gardant cepen­
dant ma propre identité. Je comprenais la matière, de
quoi tout était fait. Je ressentais tout ce que les êtres
ressentaient. La peur, les dangers, le vent, les sensa­
tions du soleil qui brûle.

kl
Je me suis retrouvée dans l’écorce d’un magnolia,
puis dans son tronc où j’entendais la sève circuler et
battre. Je savais que l’arbre était vivant et capable de
ressentir la peine, la joie, la souffrance morale, l’amour.
En transition, je me suis retrouvée dans une feuille,
percevant toutes les capillarités de ses nervures, et sur­
tout je me sentais à la source de toute vie. De La vie.
De l’écorce du magnolia en passant par le tronc de
l’arbre, j’avais conscience des différents états dans les­
quels je transitais et du mouvement pour passer de l’un
à l’autre. Et surtout de la fulgurance avec laquelle toutes
ces choses se manifestaient. Les couleurs pouvaient
s’apparenter à celles de la vie réelle bien qu’elles soient
magnifiées, comme «recolorisées». En même temps, je
percevais des sons célestes, et parallèlement, tout avait
un son propre, unique, dans une unité globale. La vie
avait un son.

Je rêvais de l’arbre qui rêvait du magnolia qui rêvait


de moi. Le tout dans le même rêve, dans une sorte de
triangulation de la conscience du Tout. L’Expérience
du Tout est proprement vertigineuse. En contrebas de
la terrasse se trouvaient d’anciens thermes romains.
Et simultanément, j’étais dans l’eau et dans la pierre.
L’eau était vivante. J ’étais elle, et j’étais la fleur à côté,
et dans chaque micro-organisme du cheval dans le pré
d’en face. J ’étais dans une instantanéité d’éternité. Je
comprenais tout avec fulgurance, comment et pourquoi
le cosmos, comment et pourquoi l’univers et les êtres,
et les animaux, et les insectes et le minéral et le végétal.
J ’avais la connaissance tout en éprouvant en même
temps une compassion infinie pour chaque chose.

La vie était en tout et partout. J ’avais la révélation


implacable qu’il n’y avait aucune différence entre la
fourmi, le brin d’herbe, la goutte d’eau et moi car j’étais
eux. J ’étais en phase avec l’Univers tout entier, comme
dans une solidarité d’amour, d’interaction et de par­
tage. Il n ’y avait pas de sensation de chronologie durant
mon voyage. J ’étais en dehors du temps. Je percevais
et entendais des choses qui ne faisaient pas intervenir
les sens habituels. Sans la vue ni l’ouïe, je voyais et
entendais pourtant. Devant et derrière moi, à travers
les choses, une vision holographique. J ’étais à la fois
moi-même et ce que j’observais. Il y avait en même
temps la vue et le ressenti, un contact, une perception
extraordinaire et intime de la chose que je voyais.

C’était à la fois une vision panoramique et un zoom.


Lorsque je me déplaçais d’un endroit à un autre, la
perception et le déplacement ne faisaient qu’un. En
revanche, j’avais une certaine notion de l’espace mais
un espace sans limites, de la même façon qu’il n’y
a pas de sens définis, cloisonnés. L’espace et le temps
n’étaient pas cloisonnés.

Hemingway disait : «Il y a certaines choses qu’on ne


peut pas apprendre rapidement, et pour les acquérir
il nous faut payer lourdement de notre temps, qui est
tout ce que nous possédons. Ce sont les choses les
plus simples, et comme il faut toute une vie humaine
pour les connaître, la petite connaissance nouvelle que
chaque homme tire de la vie lui est très coûteuse, et
c’est le seul héritage qu’il ait à laisser... »
Là, j’avais brûlé les étapes. Je connaissais d’un
seul coup tout ce qu’une vie humaine n’aurait pas suffi
à comprendre. J ’avais l’immense faveur de bénéficier
de la connaissance en accéléré, de l’accession directe
aux choses. Je bénéficiais d’un formidable passe-droit,
d’une délicieuse imposture. J ’étais comme une amou­
reuse de la Terre transportée dans les entrailles du
globe, comme une psychiatre spectatrice de toutes les
pensées de tous les êtres, comme une lectrice invétérée
ayant lu tous les livres, mais sans cette nuance désa­
busée, désenchantée du poème de Mallarmé*. Et la
chair n ’était pas triste non plus, elle était amour et joie,
comme la pierre ou l’ivraie. Les choses les plus simples
dont parle Hemingway, qui nécessitent toute une vie
humaine pour les posséder et en avoir conscience, j’y
avais accès. Comme à ces «jolies choses de la vie» que
chantait Michel dans Les Divorcés. Quant à la petite
connaissance nouvelle «grappillée au cours d’une vie

* «La chair est triste, hélas! et j ’ai lu tous les livres.» Brise marine, de
Stéphane Mallarmé.
par le sang et les larmes», je l’avais de façon exponen­
tielle jusqu’à devenir la connaissance.

Ce parc avait quelque chose de magique qui réveillait


en moi un sentiment sublime, comme si je le décou­
vrais pour la première fois. J ’admirais le parc, je goûtais
ma cigarette, même si ce n’est pas «médicalement cor­
rect» pour ma santé, mais il n’en demeure pas moins
que cela plaçait mon cerveau en «récompense». J ’étais
contemplative de la nature tout en étant disponible, je
n’avais ni entraves ni besoins.

C’est notre survie, la plupart de temps, qui nous


entraîne hors de la perception des choses, de l’essence
des êtres. Nous nous offrons très rarement ce luxe de
nous poser, de communier avec les éléments, trop
accaparés par la nécessité, une sorte de gangue qui
nous entoure.

Le parc était d’une incroyable majesté, avec des


magnolias tricentenaires et une grande bambouseraie
bien que le climat plutôt sec ne se prête pas à ce genre

kl
de végétation. J ’étais avec tous ces êtres dans une rela­
tion d ’échange d’âme à âme qui n’était en rien une
inversion des statuts, moi devenant eux et réciproque­
ment. Il s’agissait d’une conversion dans le Tout, dans
la totalité de la nature, une conversion non pas en Dieu
mais dans Dieu. C’est à partir de ce moment que je fis
partie du Tout et que je le reste encore à ce jour, en
tant que membre de la communauté divine.

J ’ai ressenti tellement de choses ! D’où la difficulté


de rapporter ces impressions qui ont modifié mon
regard sur la nature, les animaux, les plantes. Je vais
jusqu’à lire dans leur passé désormais. Je suis impré­
gnée de leur propre vie, de leur propre réalité.

La nature est vivante. Tout est vivant dans la nature.


C’est ce que l’on appelle «le monde du vivant».
CIAPITlf l

LES NOMBRES
Depuis que les hommes sont sur Terre, ils essaient
de donner un sens au monde et de prédire ce que nous
réserve l’avenir. Pourtant, aujourd’hui, nos vies sont
plus complexes et plus imprévisibles que jamais.
Chaque jour, des milliers de gens se croisent sans
qu’apparemment il n’y ait de véritable ordre dans tout
cela. Difficile de savoir comment tout est lié. Lorsqu’on
commence à y regarder de plus près, pourtant, des
schémas impressionnants émergent... Et si tout cela
était régi par les nombres ?
Quelque part, il existe un modèle qui décrit notre
monde et qui définit aussi notre futur. Ce sont les
nombres que j’ai vus lors de mon expérience du Tout.
N’y aurait-il pas derrière le chaos qui semble régir nos
vies un dessein complexe de causes et d’effets dont
les moments les plus infimes interféreraient avec des
événements qui peuvent changer nos vies à jamais?
La moindre décision, aussi petite soit-elle, peut avoir
des conséquences importantes sur notre avenir. Cette
sensibilité extraordinaire au moindre changement pro­
voque un chaos apparent et ce chaos est si instable et
changeant qu’il est difficile d’imaginer que derrière lui
se dessine un schéma très précis. C’est pour cela que
nous avons du mal à comprendre ce qui nous arrive
et pourquoi notre interprétation de la vie est faussée.
C’est «l’effet papillon».
En regardant cependant les choses sous un autre
angle, des schémas surprenants émergent de ce chaos
apparent. Des «plans» révèlent des vérités détermi­
nantes sur nos vies et sur notre avenir. Observons une
grande ville, par exemple, comme Paris ou Lyon, voire
New York. Vue d’en haut, elle semble s’articuler dans un
bazar arbitraire. Des immeubles, des maisons, des rues,
des canalisations, des réseaux électriques, la foule...
Mais s’il y avait un ordre derrière tout cela? Plus une
ville est en expansion, plus ses œuvres se multiplient,
mais ce qu’à découvert le physicien Geoffrey West - qui
a passé sa vie à étudier le rapport entre les villes, leur
étalement, leur croissance et les nombres, les mathé­
matiques - est une grande surprise. Lorsqu’une ville
double de taille, ses activités augmentent systématique­
ment de 15%. Cela n’est pas une formule magique,
mais un nombre calculé scientifiquement. Les êtres
humains ont un nombre ultime qui est 15% ou 1,15.
Notre physicien pense même que ce nombre est la plus
grande force de l’humanité. Ce nombre prédirait notre
avenir. Alors là, on ne parle plus d’irrationalité ni de
superstition mais de nombres, tout comme la taille de
l’orbite des planètes, des constellations, les galaxies, la
vie elle-même suivant un schéma où tout se résout à la
cause et à l’effet. Le symbole du hasard n’a rien à voir
en fait, mais c’est ainsi qu’il nous apparaît, comme la
conséquence du chaos et du hasard. Cela est faux. La
vérité est bien plus extraordinaire encore que ce que
nous pensions. Les mathématiques et les nombres sont
partout comme je les ai vus et quand tout sera décom­
posé, il restera les nombres.
Pendant mon voyage, tout semblait partir des
nombres. Ils revenaient sans cesse, en tout et dans
tout. Ils se regroupaient et s’étendaient à l’infini. Ils se
présentaient sous la forme d’une spirale sans fin. Ce
nombre commençait par le fameux Pi 3,14 qui se conti­
nuait à l’infini. Mais le plus extraordinaire était que, au
milieu de cette succession de chiffres, apparaissait ma
date de naissance. Ce fut pour moi la révélation. Je
comprenais que ces nombres constituaient le codage
de la vie dans sa totalité.
J ’étais le monde et la possibilité du monde, un Tout
en devenir, un devenir en puissance. J ’insiste sur le fait
que je voyais des nombres et pas des chiffres. Le chiffre
est fixe, stable, rationnel. 1 c’est 1, ce n’est pas 2, et
1 + 1 = 2, non pas 3. Il ne faut pas chercher à com­
prendre. Il ne faut pas recourir à plus de compréhension
que ce qui s’offre à nos yeux. La réalité rationnelle du
chiffre ressortit de la distinction que les Grecs établirent
avec le nombre. Le chiffre est mathesis, il renvoie au
calcul. Le nombre, quant à lui, ressortit de la gnose,
c’est-à-dire de la connaissance à la compréhension. La
synthèse que j’ai pu en tirer, c’est que dans notre rela­
tion à la transcendance, au Tout, le chiffre est religion
et le nombre est la voie de la spiritualité, du mystique.
Les religions, dans leur réalité multiple, font simple­
ment connaître les dieux, alors que la spiritualité, et il
y en a qu’une, mène à Dieu, c’est-à-dire au Tout.
Dans l’existence, je suis un chiffre, malgré mon
statut d’individu, c’est-à-dire une personne indivisible,
non dénombrable. Dans le Tout, j’étais un nombre
et ma conscience était pure connaissance. J ’avais la
conscience de la connaissance. L’être dont j’avais
conscience était un Tout-connaissant. La conscience
que j’avais des autres êtres par le fait d’être en eux ne
veut pas dire que nous étions des êtres doubles inhé­
rents au chiffre et au calcul. Je n’avais pas la conscience
d’appartenir à une communauté chiffrable de 1, 2, etc.
Ma conscience était la seule réalité consciente, comme
si, finalement, ce n’était plus moi qui étais entrée dans
ces êtres, mais ces êtres qui avaient fondu en moi sans
jamais les avoir vus auparavant. J ’appelle cet échange
«l’effet nombre».
L’homme est par nature un nombre, une connais­
sance. Il me semble que le principe d’individu s’enracine
dans la notion du nombre. Certains ont vu dans le nom
et dans le nombre une racine commune: «nom».
Dans le Tout originaire, l’être est donc le nombre.
J ’évite ici d’user de l’article indéfini un. Si dans l’exis­
tence il est devenu chiffre malgré le statut d’individu,
c’est parce qu’il est sorti de son être pour devenir exis­
tence. L’existence est régie par la logique du chiffrage,
du dénombrement, de la classification de la vie en
espèces, en genre et en race. Cette différentiation et
cette spécification ont conduit à l’établissement des iné­
galités, du racisme. A contrario, la connaissance de la
vie fait appel au caractère philanthropique, à l’amour.
En devenant tous ces êtres que je voyais se transfor­
mer en moi et moi en tous ces êtres, je comprenais que
le Un est l’Univers qui est à l’origine de tout et du T o u t .
Je comprenais que nous sommes «nombre», que la
vie est «nombre». Je voyais des chiffres groupés entre
eux, des milliards de chiffres. J ’avais la connaissance,
et si ma conscience s’est ainsi imprégnée du Tout, c’est
parce que j’étais dans ce que Vitruve, architecte romain,
disait de la proportion (que les Grecs appelaient «ana­
logie») : une consonance entre les parties et le Tout.
La notion d’analogie renvoie aux rapports justes
entre les divers éléments qui composent le monde,
entre l’homme et l’architecte divin, entre notre âme et
celle d’un animal, d’une plante, etc. Elle est la clé de ce
que les anciens appelaient les «petits mystères», c’est-
à-dire les premiers degrés de l’initiation qui consistent
à se connaître soi-même et à s’intégrer dans l’esprit
d’une communauté, quelle soit humaine ou cosmique.
À côté de l’analogie, on trouve également une autre
posture qui explique une expérience. C’est la notion
d’anagogie qui est la clé des «grands mystères». C’est le
sens de la spiritualité, de l’essentiel, la capacité à perce­
voir la nature réelle des êtres et des choses. L’anagogie
est le véhicule de ma conscience. Elle garde, durant ma
vie, la conscience dressée vers le ciel. Pratiquer l’ana-
gogie, c’est faire de notre existence quotidienne une
recherche de l’invisible sans négliger le visible.
J ’avais la connaissance parce que ma conscience
savait, au sens où le sage sait sans autre forme de
«question». Je savais que je sais. La connaissance
est une chose mais c’est une autre chose que d’avoir
l’explication et les mots pour le dire - que je n’avais
justement pas. En fait, on sait aujourd’hui que les clés
du mystère des nombres sont inaccessibles, et pourtant,
ils sont omniprésents dans l’Univers. Si l’on prend
l’exemple de la cathédrale de Chartres, au xue siècle,
le clergé pensait que les nombres divins émanaient de
l’essence même de Dieu. Ces nombres révèlent les lois
qui régissent l’Univers. Des nombres et des schémas
relient toutes les choses entre elles. Du nombre des
écailles des poissons à leurs couleurs, du nombre des
pétales de toutes les fleurs, du passé le plus éloigné au
futur lointain, tout est lié.
Au IVe siècle, saint Augustin avait établi que le chiffre
7, par exemple, était tellement spécifique qu’il repré­
sentait tout l’Univers. 7 représentait toute la création,
et 1 0 ,l’outre-univers. Il justifiait sa thèse par la somme
10, produit de 3 et de 7, 3 étant l’aspect de la Trinité,
le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Le chiffre 12 compte
aussi beaucoup, non pas à cause des 12 tribus d’Israël
et des 12 apôtres, mais parce qu’il est divisible par 1,
2, 3, 4, 6 et 12. Selon saint Augustin, les nombres
viennent de Dieu car ils obéissent à des lois qu’aucun
homme ne peut changer. 800 ans après, l’école de
Chartres corrobore cette pensée augustinienne, de
sorte que la plus modeste des chapelles comme la
plus importante des cathédrales sont érigées selon les
règles de la divine proportion. Le corps humain répond
à cette même logique. Lame même de l’Univers, selon
Robert Grosseteste, au xii®siècle, est formée de droites,
de courbes et d’angles, ce qui n’est rien d’autre que la
géométrie divine. Les maîtres enseignaient cette géo­
métrie aux Compagnons par une science appelée «le
Trait». Quant aux cisterciens, ils étudièrent et cher­
chèrent à harmoniser l’espace architectural des édifices
religieux, mais aussi l’espace intérieur de l’homme.
Le Trait, la divine proportion et le nombre d’or sont
des éléments qui se mutent en sagesse. Chaque édifice
devient un corps vivant. Le nombre permet de décou­
vrir l’identité profonde des éléments qui composent
l’Univers. Ainsi, 4 est le chiffre de la Terre, avec ses
quatre orients. 5 est le nombre de l’homme, né de
l’étoile à 5 branches. Le 10 est le nombre de l’accom­
plissement, de la communauté qui retrouve l’unité.
Si les cathédrales furent construites sur la base des
nombres sacrés, c’est parce qu’eux seuls donnent la clé
des proportions qui assurent leur extraordinaire stabi­
lité. Nous pouvons encore en témoigner aujourd’hui.
Les nombres traduisent les principes de la création par
la géométrie et ils enregistrent les harmonies secrètes
qui font chanter la pierre.
C’est le nombre huit qui préside aux fonts baptis­
maux. Il est formé du quatre du corps, du trois de lame
et du un du divin. Toutes les conditions sont ainsi réu­
nies pour favoriser l’essor vers une nouvelle vie, celle
de l’être purifié.
Durant cette expérience, j’ai compris que derrière
le monde dans lequel nous vivons réside un formidable
royaume mathématique qui décrit le processus que
nous observons tout autour de nous. Aujourd’hui, nos
vies sont plus complexes et imprévisibles que jamais.
La moitié des populations vivent dans des villes trépi­
dantes, en pleine expansion. Chaque jour des milliers de
personnes se croisent. C’est une masse d’interactions
et de forces qui semblent échapper à notre contrôle.
Difficile de croire que tout peut être lié et que tous sont
liés. Lorsqu’on commence à regarder cette complexité
de plus près, des schémas mathématiques commencent
à émerger. Et ne contrôlent pas seulement notre monde
et ce qu’il englobe. Nous sommes également sous
contrôle, du mouvement rapide des foules aux figures
coordonnées d’un vol d’étourneaux au Danemark, en
passant par les milliards de recherches sur Internet et
par les caprices de la météo ; tous ces schémas mathé­
matiques et leurs connexions forment un code qui décrit
non seulement le fonctionnement du monde mais qui
peut également prédire ce que réserve l’avenir.
Il semble inconcevable que les humains puissent
être réduits à un modèle mathématique comme celui
du vol des étourneaux ou des caprices de la météo,
et pourtant! Les colonies de fourmis, les bancs de
poissons et les foules humaines qui se déplacent dans
le métro et dans les halls de gares utilisent des inte­
ractions très simples, identiques à celles des fourmis.
Ces règles sont si importantes pour anticiper nos
faits et gestes qu’elles peuvent être utilisées en infor­
matique pour simuler les déplacements de foules.
Quand on comprend ces chiffres, leurs schémas, leurs
connexions, quand on comprend ces règles, on com­
prend ce qu’est la base de l’Univers, et que rien n’est
le fruit du hasard. De la manière dont on commet un
meurtre ou qu’on se déplace dans une foule jusqu’à
notre prise de position dans un jeu, rien n’est dû au
hasard. Tout fait partie du Tout.
Les clés du mystère du code sont peut-être cachées
dans une cathédrale. Selon le clergé du Moyen Âge,
les nombres divins ont été créés par Dieu. Un code est
caché, qui sous-tend le monde qui nous entoure et qui
a le pouvoir de dévoiler les lois qui dirigent l’Univers.
Des nombres et des schémas relient les choses entre
elles, des poissons aux cercles de l’Antiquité au futur
lointain. Ensemble, ils constituent le code, un monde
abstrait de nombres.
Les nombres sont la clé du mystère de la création.
Bien plus que de simples entités abstraites, ils décrivent
le monde qui nous entoure et lui donnent son sens,
de même qu’ils nous offrent la capacité unique de
comprendre notre univers.
Les nombres sont à la base de toute chose, de tout
corps existant, de la biologie, de la musique.
La musique, par exemple, définit qui nous sommes.
Chaque culture arbore son propre style. Tout comme
les nombres qui régissent la vie des cigales, ils défi­
nissent la façon dont nous entendons les sons. En effet,
la fréquence d’un do aigu est deux fois celle du grave
et cela se produit quelles que soient les deux notes
qui sont choisies. Si une octave est séparée, alors la
fréquence de l’une sera deux fois supérieure à celle de
l’autre.
Deux notes séparées par une octave sonnent
agréablement et constituent la combinaison la plus
harmonieuse. Parce que la même note doublée est la
relation la plus simple entre deux fréquences. C’est ce
qui fait la musique. C’est le rapport harmonieux entre
deux nombres qui est agréable. Une quinte parfaite
est un rapport de 3 à 2. La quinte parfaite est un rap­
port de 4 à 3, etc. Chaque combinaison de notes de
musique est définie par des rapports simples.
Même si nous n’en avons pas conscience, ces rap­
ports numériques sont la base de la chanson la plus
simple comme de la symphonie la plus élaborée. Ils sont
si vrais que lorsque ces règles sont brisées, nous savons
intuitivement que quelque chose ne va pas. On constate
que les schémas numériques dans le code contrôlent les
combinaisons des sons que l’on entend comme de la
musique. Les notes ne sont pas seulement des sons. Et
ce qui est si étrange, c’est que ce sont les nombres qui
composent les murs de la cathédrale de Chartres.
Deux notes qui ont un intervalle d’une octave ont un
rapport de 1 à 2. La largeur de la nef de la cathédrale
fait deux fois la distance qui sépare chacune de ses
colonnes qui sont sur toute la longueur. Un rapport de
1 à 2 est la combinaison la plus harmonieuse de notes
que l’on peut entendre. L’autel divise la nef en un rap­
port de 8 à 5, une sixte mineure de 8 à 5, une quinte
parfaite de 3 à 2, une quarte parfaite de 4 à 3, une
tierce majeure de 5 à 4. Et voilà ce qu’est la musique.
Saint Augustin croyait que ces rapports étaient uti­
lisés par Dieu pour construire l’Univers. C’est la raison
pour laquelle ces mêmes rapports ont produit l’harmo­
nie en musique. En construisant sa cathédrale ainsi, le
clergé de Chartres espérait faire écho à la création de
Dieu. Cette cathédrale parfaite est une symphonie dans
la pierre. En utilisant les nombres du code, nous, les
hommes, avons bâti une beauté extraordinaire.
Les nombres représentent alors la seule vérité qui
soit. En cherchant le sens divin dans les nombres, les
ecclésiastiques du xiie siècle ont découvert les éléments
du code. Je comprends ainsi la portée de mon expé­
rience. En fait, les nombres et les schémas mystérieux
que j’ai vus sont inscrits dans notre biologie.
Tout comme le cercle apparaît partout dans la
nature, Pi ne cesse d’apparaître dans le monde mathé­
matique. Encore et encore. C’est un exemple frappant
de l’interconnectivité des nombres. Pi est ce que l’on
appelle un nombre rationnel. Écrit à la décimale, il a un
nombre infini de chiffres arrangés en une séquence qui
ne se répète jamais.
Et l’on sait que n’importe quel nombre imaginable
apparaîtra dans Pi à un moment ou à un autre, que ce
soit la date de mon anniversaire, la vôtre, la réponse
à la vie, l’Univers et tout le reste... Parce que les
nombres sont infinis, on ne pourra jamais connaître
tous les chiffres qui composent Pi. Heureusement que
l’on n ’a besoin que des 39 premiers pour calculer une
circonférence ! La taille de l’Univers est observable au
rayon près d’un seul atome d’hydrogène. Mais aussi
étrange que soit Pi, il décrit au moins un objet physique.
Aussi étrange que cela puisse paraître, le code nous
fournit une description très précise du monde.
Derrière le monde dans lequel nous vivons existe
un formidable royaume mathématique. Le nombre et
les connexions qui le composent décrivent le processus
que nous observons tout autour de nous. Les nombres
contrôlent les lois de la Terre et de l’Univers.
On dit que le chemin le plus court entre deux points
est la ligne droite. Cependant, que se passe-t-il s’il y a
un obstacle sur le chemin? Lorsqu’une rivière est entra­
vée, elle change son cours, elle zigzague au lieu de
suivre son chemin habituel. La symétrie est le langage
de l’Univers. C’est un langage mathématique fondé sur
une base de triangles, de cercles et de figures géomé­
triques sans lesquels il est humainement impossible de
comprendre un seul mot.
CHAPITRE 3

NNAISSANCE
n

\j

Aujourd’hui, je ne crois pas, je sais.


Les idées que je me faisais du monde sont à présent
bouleversées.
Avant l’Expérience du grand Tout, je n’étais pas
une personne méchante, quoique agressive et souvent
en colère au cours de mon enfance, notamment. Je
cassais les choses presque systématiquement. J ’agissais
de la sorte parce que j’estimais que l’on m ’avait fait
du mal. Je détruisais tout ce que la vie m ’offrait de
beau. Je recevais ce qui me venait de l’extérieur comme
une intrusion, une violation de mon être intime. J ’étais
matérialiste. Aujourd’hui, mon leitmotiv est l’Amour.
Voir les gens heureux autour de moi, vouloir et pouvoir
si possible les rendre heureux, voilà qui participe à mon
bonheur. Avec le recul, j’ai l’impression que j’endossais
un rôle dérisoire, avant. À présent, ma nature s’est
définitivement transformée. Mais en dehors de mon
entourage proche, je ne sais même pas si les gens se
sont rendu compte de ce changement...
Ce qui a changé ma vie, et qui a néanmoins intri­
gué mon entourage, c’est d’avoir reçu la connaissance
absolue du Tout et de ne pas pouvoir l’exprimer et la
décrire exactement. Dire ce qui a été vu et ressenti et
pouvoir l’expliquer avec mes mots sont deux choses
différentes. On peut être prise pour une folle. Pourtant,
les changements drastiques de valeurs dans ma vie
étaient bien la preuve qu’il s’était passé quelque chose.
J ’étais frustrée et prostrée dans la certitude de la vérité
des choses que j’avais vues. C’est ce qui m’a le plus
marqué. L’émotion que je ressens encore lorsque je
pense à cette expérience est la preuve du bouleverse­
ment consécutif à cette expérience dans ma vie.
Entre mes interlocuteurs et moi, la difficulté de
communication qui s’est installée est la même que celle
qui peut exister entre des êtres appartenant à deux
univers langagiers différents.
Dans un monde où 1 % de la population possède
40% des richesses de la planète, où trente-cinq mille
enfants meurent chaque jour de pauvreté et de maladies
que l’on aurait pu éviter et où 50% de la population
mondiale vit avec moins de deux dollars par jour, je dis
que quelque chose va mal. Les processus qui produisent
la cupidité, la bigoterie, les préjugés et l’exploitation
des êtres humains entre eux, ainsi que l’élitisme, ne
sont pas innés à l’être humain. 11 n’y a pas de nature
humaine, il n ’y a que des comportements humains qui
ont changé à travers l’histoire. L’homme ne naît pas
avec l’intolérance, la cupidité, la corruption et la haine.
Il les acquiert au sein de la société... Les guerres, la
corruption, la faim, la misère, la souffrance humaine,
ne changeront pas si nos consciences ne s’ouvrent pas.
11 faut se libérer de toutes nos anciennes supers­
titions. Lorsque l’homme comprendra que seule la
compassion libère l’humanité, il connaîtra l’éveil.
Les motivations des hommes doivent être changées.
Apprendre à donner plutôt qu’à vendre. Nous sommes
formatés depuis l’enfance et intégrons la société sans
les outils émotionnels pour résoudre les problèmes d’in­
tégration au monde.
Pour avoir une pensée critique, l’homme, mais aussi
les nations, doivent s’unir au profit du bien commun de
tous les êtres, sans qu’aucun ne soit asservi à un autre.
«Mon pays est le monde et ma religion est de faire
le bien», disait Thomas Paine.
L’homme doit considérer ses erreurs sans jugement
et sans les associer à l’échec. Car découvrir ses erreurs
a cette vertu quelles ouvrent à un nouveau niveau de
compréhension qui favorise la prise de conscience.
Je précise que le Tout n’est pas le paradis tel qu’il
est appréhendé dans les diverses religions. L’idée du
paradis n ’est pas absurde par nature, car le paradis
existe ; il est aussi sur Terre, c’est le Tout.
C’est par ce cheminement que j’ai compris que
ma conscience est devenue connaissance, c’est-à-dire
une connaissance qui a pénétré ma conscience et qui
se trouve au-delà de ce que l’on peut expliquer. Je
précise cependant que la connaissance peut se définir
comme la naissance à soi par la grâce de la révélation.
La connaissance est le fait de naître à soi avec et pour
son prochain.
Le cheminement l’homme depuis sa création a été
culturellement dévié de sa trajectoire. Seules certaines
consciences lumineuses s’échappent de cette voie,
comme le poisson saute hors de l’eau pour reprendre
la ligne divine de l’éternel, comme un retour à l’origine.
Le cercle divin est la seule et unique réalité, la plus
grande, la seule et unique grande vérité finale, d’une
grandeur telle que le mystère en est l’essence. La vraie
réalité est un Tout unifié; elle n’a rien à voir avec ces
réalités individuelles, lesquelles, par le processus culturel
d’agrégation, finissent par former ce que l’on appelle
la «conscience collective».
Et pour quelle raison un tel cheminement est-il
le but téléologique de l’existence de l’hom me? La
véritable chute de l’homme n ’est pas celle qui est
enfermée dans les écritures. Elle réside dans l’oubli
de soi. Il n ’y a pas pire chute que d’avoir oublié qui
l’on est. En langage humain, on l’appelle Alzheimer,
qui conduit dans certains de ses effets à l’errance.
L’homme a oublié qu’il est Connaissance. Il doit
prendre conscience que son existence est consécutive
à cette scission originaire.
Lorsqu’on parle de l’Expérience du Tout, que les
bouddhistes appellent «illumination», l’homme évoque
l’idée d’un état surhumain et son ego en est glorifié.
Pourtant, l’illumination est un état naturel, la sensa­
tion de ne faire qu’un avec l’Univers, avec l’Être. C’est
un état de fusion avec quelque chose de démesuré,
indescriptible et indestructible. C’est un état qui est
naturellement et simplement «nous», mais aussi qui est
bien plus vaste que nous.
L’illumination par l’Expérience du Tout, c’est retrou­
ver sa véritable nature au-delà de tous les mots, de tous
les noms et de toutes les formes.
J ’ai eu un aperçu de la façon dont Dieu, dans son
intemporalité et dans son unicité, peut transformer nos
perceptions à travers ce genre d’expérience. Mais cette
seule expérience, aussi belle et intense soit-elle, ne suffit
pas, car elle nécessite une transformation permanente
et définitive de notre conscience et de la réalité.
Dans la dimension où l’on comprend le règne
de Dieu, dimension qui doit être également notre
prérogative à tous, l’alpha et l’oméga, le début et la fin
ne font qu’un et l’origine de tout ce qui est et sera est
éternellement présente sous une forme invisible d’uni­
cité et de perfection. Cette essence est inimaginable
pour l’esprit humain et incompréhensible à son mental.
Mais tout ce qui existe possède cette essence divine
en soi. Un certain degré de conscience. Y compris
les pierres, y compris l’eau, sinon elles n’existeraient
pas. Tout est vivant au même titre et au même niveau
que nous autres, êtres humains. Le soleil, la terre, les
plantes, les animaux, sont tous des expressions de l’Être
Dieu qui se manifeste sous toutes ces formes.
Pourquoi nous décidons-nous à faire une chose plu­
tôt qu’une autre? Quelle importance que cette décision
soit la conséquence d’une série de liens de cause à effet
d ’un sentiment diffus qui réside en moi, que tout ce
que j’ai vécu mène vers cet instant précis? Ne suis-je
qu’une pièce d’un puzzle que je ne peux ni comprendre
ni influencer? Non, rien n’est vain! La moindre res­
piration, le moindre pas, le moindre mot, la moindre
douleur, tout a un sens, une relation de cause à effet
qui est en lien avec Dieu. C’est souvent à travers la
douleur que les hommes le comprennent. Aucune de
nos souffrances et de nos expériences n’est vaine et ne
doit l’être, car elles font de nous ce que nous sommes.
Elles nous donnent notre force, elles nous façonnent.
Nous ne sommes pas libres de nos actes, car nous
sommes soumis à nos plaisirs. Difficile de combattre
alors ce qui est en nous. Ne sommes-nous que des
pions déplacés par Dieu pour un dessein supérieur, des
coups d’échec malheureux mais nécessaires dans l’af­
frontement perpétuel entre le bien et le mal, la lumière
et l’ombre ?
Nous appartenons à la lumière et à rien d’autre,
même si certains de nos actes sont de nature obscure.
Le temps ne doit pas être notre terrain de jeu perpé­
tuel. Le temps ne doit pas être. Mon Tout est en moi et
le diable n ’existe pas. L’obscurité est en nous et nous
y sommes tous confrontés un jour ou l’autre. Nous
devons le savoir car en dépit de la souffrance quelle
occasionne, elle nous pousse finalement à être bons.
Sans le mal, comment aurions-nous développé notre
capacité à l’empathie, à la compassion, à l’amour?
CHAPITRE 1

MOUS APPARTENONS
IOUS A UNE
MM
E
n

Le concept de Dieu créé par l’homme est en réalité


une méthode pour inventer ses petites histoires. Aussi
Dieu a été créé à l’image de l’homme. 11 se met en
colère, punit, juge, provoque des tremblements de terre
et des inondations.
Les croyants sont divisés, culpabilisés, et se
combattent entre eux. En réalité, il n’y a aucune indé­
pendance dans la nature. La nature est unifiée, chaque
élément étant une cause et un effet, une réaction, et
n ’existe que comme un tout concentré.
Retirez l’oxygène et nous mourons ;
retirez la vie végétale et nous mourons ;
retirez les abeilles et nous mourons ;
retirez le soleil et toute vie mourra.
Nous sommes tous connectés, alors nous devons
penser comme une seule entité, nous devons prendre
en compte la totalité de ce que nous sommes...
Le monde entier est une communauté, mais pas
seulement une communauté d’êtres humains. Le
monde est également une communauté de plantes,
d’animaux, d’éléments. Le Tout formant un système
que j’appelle «la spiritualité». Ainsi, le bonheur et la
joie viendront d’êtres en connexion. C’est cela l’esprit
de Dieu.
Quelque chose de grand se passe...
Il est temps pour l’homme de s’en apercevoir.
Le temps est venu, pour les êtres humains que nous
sommes, de nous tourner vers la connaissance en tant
qu’individus et en tant que société.
Nous ne faisons qu’un. Nous ne sommes qu’un. Je
le redis, nous ne sommes pas séparés les uns des autres
et nous le sommes encore moins de Dieu. Tout ce que
nous faisons, toutes les choses que nous entreprenons,
tous les actes qui nous incombent, nous les réalisons en
commun, dans un but commun. Les uns avec les autres.
Si je tue, c’est nous tous qui tuons. Et tout ce que nous
entreprenons, nous le faisons de concert avec Dieu.
Rien ne se fait sans Lui.
La seule raison d’être est de comprendre et de
savoir qui nous sommes et ce que nous voulons être.
Et la seule vérité est la compréhension et la certitude
qu’il existe une expression divine encore plus grande
que celle que nous croyons voir et comprendre. La
seule voie possible : trouver cette vérité.
Nous ne faisons qu’un avec cette vérité. Nous ne
faisons qu’un avec la création. Nous ne faisons qu’un
avec Dieu.
L’homme se perd parce qu’il croit être séparé. Nous
recevons de l’Univers des signes irréfutables que nous
ignorons ou écartons de peur de passer pour des fous.
Nous doutons de Sa puissance et de son omniprésence.
Mais lorsque le disciple est prêt, le maître apparaît.
La mort n ’existe pas. Le corps même ne meurt
jamais. Il épouse une autre forme, celle de son âme.
Après l’expérience que j’ai vécue, j’ai compris que
la mort est un moment de gloire. L’âme retrouve sa
liberté et sa véritable nature. Elle est sans limites. Elle
retrouve la conscience de l’Unité sublime et extatique.
Comment remercier l’Univers de m’avoir fait vivre ces
sentiments «avant l’heure»?
Nous avons peur de la mort parce que nous ne la
comprenons pas. Parce que nous pensons que c’est
une fin alors qu’il n’en est rien. Et en ayant peur de
notre mort, nous craignons notre propre vie.
Lorsque nous aurons compris que la mort est une
illusion, nous cesserons alors d’en souffrir.
Quand nous comprendrons que la vie est étemelle,
nous aurons pris conscience de l’illusion de la mort,
mais aussi de celle de notre corps que nous pensons
n ’exister qu’à travers elle.
La mort doit nous apprendre que ce qui est réel,
c’est l’éternité de la vie.
Rien n ’est définitif. Tout se transforme, tout le
temps, à chaque instant.
Nous sommes l’arbre, et nos racines sont profondes
en Dieu. Il est la terre d’où l’arbre a jailli et tout ce que
produira l’arbre - feuilles, fruits, branches - retournera
à lui.
Ainsi, la vie engendre la vie et ne peut connaître
de fin.
CHAPITRE

N
LE
LE LUBERON
Face à moi-même devant une telle expérience, une
seule question revenait : pourquoi moi ? Comment une
telle chose a-t-elle été possible ?
L’éducation esthétique et religieuse que j’avais reçue
jusqu’à ce jour peut-elle expliquer ce phénomène?
Mes passions avaient-elles préparé ma conscience
à cette expérience? Mon goût de la nature, l’amour
des livres, des voyages, des animaux, mon amour du
genre humain? Ces passions à la portée initiatique
ont construit autant d’expériences de vie et peut-être
préparé ma conscience à recevoir cette expérience,
c’est-à-dire Dieu. Je reprends ici l’assertion du mystique
allemand maître Eckhart, qui affirmait que durant son
existence, l’homme doit préparer son âme à recevoir
Dieu. Cette formule m’a profondément touchée car je
l’ai comprise à l’aune de mon cheminement spirituel
qui tend à dépasser le paradigme dans lequel j’ai été
élevée. À mon avis, c’est parce que l’âme n’a pas été
suffisamment préparée à recevoir Dieu que l’homme
est sourd aux alertes de la nature et de la société.
La vie ne meurt jamais. Elle nous met en demeure
de recouvrer l’instinct de protection et d’assistance
à son plus noble trésor: la vie. L’expérimentation de
la part de Dieu qu’il a en lui, l’expérimentation de la
vie est en quelque sorte un processus de naissance
d’une nouvelle conscience ouverte à l’Expérience du
Tout. Nous voyons donc que finalement, ce n’est plus
l’homme qui est en attente de recevoir Dieu mais le
Tout qui attend de recevoir la conscience pour confir­
mer le test de vie qui justifie sa présence sur Terre. La
préparation de l’homme consiste à faire l’expérience
de sa part divine par l’exercice des passions nobles.
La noblesse de la passion tient dans l’action qui est
porteuse d’amour et qui remplit une fonction sociale
et humaine.
C’est donc là une connaissance esthétique ou intui­
tive à travers la lumière de laquelle j’ai vu ce que j’ai vu,
que j’ai été connectée aux confins de lam e humaine.
Lorsque je me suis retrouvée devant ce parc que je
sublimais, je me suis rendu compte de mon change­
ment de conscience. À présent, il n’était plus question
que cette beauté me laisse entrevoir que tout était bien
dans le meilleur des mondes. Le monde dans lequel
j’étais revenue me paraissait tout à coup chaotique,
bruyant et violent. Inhospitalier même.
La vie est ma passion. Elle est tout dans la mesure,
mais la mesure elle-même n ’est pas sans une cer­
taine démesure qui représente le beau, selon moi. Je
m’enivre des choses que j’aime. Je me fonds en elles.
La nature fait partie de celles-là. Mon cadre d’habitation
et la région dans laquelle je me trouvais ne manquaient
pas d’exciter mon sens esthétique. En ces moments
de tendresse avec la nature, j’étais hantée par l’esprit
initiatique de Jean-Jacques Rousseau dans ses Rêveries
du promeneur solitaire. Je ne posais mon regard sur
aucune chose sans que je ne la restitue dans l’ensemble
de l’environnement, de sorte que je me trouvais finale­
ment au centre d’un tableau que je composais, que je
peignais avec les yeux et l’esprit.
C’est dans ce tableau que se trouvait notre bastide,
en Provence. La propriété culminait en haut d’une
colline du massif du Lubéron. Elle se composait d’une
maison de deux étages, mais aussi de communs et d’an­
ciennes écuries à restaurer. Une petite maison d’amis
sur la colline à sa droite clôturait la propriété. Mais
c’était ce parc qui faisait la beauté du lieu et lui donnait
toute sa noblesse.
À midi, le soleil était si haut que l’on pouvait croire
que la Terre s’en était rapprochée. Et ce jour-là, à
14 heures environ, le soleil de ce début d’après-midi
me surprit. Les arbres du parc avaient filtré les rayons.
À travers les trous, on apercevait la chaîne du Lubéron,
mais aussi loin que pouvait se porter mon regard, ce
parc, du sud au nord, de l’est à l’ouest, était revêtu de
formes verticales et les arbres à perte de vue revêtaient
la beauté impériale de leur royaume.
Leur feuillage, surtout celui des magnolias tricente­
naires à l’est, était lourd, vert foncé, et se dressait vers
le ciel très pur à cette heure en pyramides tournantes.
Il y avait ce bruit des feuilles et le frémissement de celles
des bambouseraies plus au nord qui devenait parfois
assourdissant à cause du mistral descendant de la vallée
du Rhône en rafales violentes.

Aix-en-Provence n’est qu’à une vingtaine de kilo­


mètres de notre village. Nous avions choisi cet endroit
de Provence un peu isolé mais rassurant par la pré­
sence d’une ville proche. Aix en est le centre culturel
où nous nous rendions régulièrement. C’est une ville
à l’italienne, belle et lumineuse malgré ses rues pavées
et étroites bordées de magnifiques maisons en pierre
aux fontaines plus belles les unes que les autres dont
l’eau pure nous rafraîchissait le visage.

Le cour Mirabeau bordée de platanes centenaires


offre de l’ombre aux touristes assis à la terrasse des
cafés et fait la fierté des Aixois, à juste titre d’ailleurs,
tant cette ville est belle. Une grande animation y règne
été comme hiver. Aix-en-Provence a le côté éternel de
la Toscane, de Florence, de Pise, un côté immuable.
C’est l’endroit où je me laissais tenter par la terrasse
d’un restaurant ou pour faire du shopping.
L’ambiance était toujours animée à la bastide, entre
le passage des amis et la présence des enfants. On
y sentait la douceur électrique et légère des soirs d’été,
des repas où le vin coule à flots. Les conversations
y étaient drôles et menées à voix basse, Michel ne
pouvant supporter qu’il en fût autrement. C’était des
moments heureux dans un lieu caché où le bruit de la
fontaine romaine se répercutait sur les arbres et sur le
vieux mur qui entourait la propriété.
Face à ce tableau panoramique, je promenais mon
regard lorsque la bouffée de cigarette m’a enveloppée.

U
CHAPITRE 6

UNE PETITE UiS


Avant cette expérience, il m ’arrivait de faire du mal
aux autres. J ’avais parfois l’impression de perdre pied,
de me noyer. Je me débattais. Et j’avais la réaction de
ceux qui se noient et qui donnent des coups de poing
à celui qui vient les sauver.
Ce sentiment sournois remonte au temps de
l’enfance ou à des blessures d’amour-propre mal cica­
trisées. En général, les autres autour de nous, proches
ou amis, ne comprennent pas. Ils considèrent que vous
avez tout pour être heureux. Dans mon cas, cela se
vérifiait. J ’avais de beaux enfants qui se débrouillaient
bien dans la vie, j’étais mariée à un grand artiste connu
et reconnu, j’avais une jolie maison... Tous ces élé­
ments ne justifiaient pas mes réactions de mal-être qui
me conduisaient à me venger des services que l’on
me rendait ou de l’amour que l’on me vouait. J ’étais
comme ces enfants qui en font voir de toutes les cou­
leurs à leur mère de trop s’occuper d’eux, d’être trop
à leur écoute et qui retournent une forme d’insatis­
faction diffuse contre elle. Ce n’était pas le syndrome
de la «pauvre petite fille riche», comme l’entendait la
chanson. C’était plus acerbe que cela. Je ne voulais
pas qu’«ils» s’en tirent comme ça mais qu’«ils» sachent
que je n ’étais pas dupe de leur noirceur, de leurs coups
bas, de leurs petits arrangements avec eux-mêmes pour
s’en tirer à bon compte. Je ne me rendais pas compte
que je me plaçais délibérément au-dessus d’eux, m ’ar­
rogeant une morale, un code de vie qu’ils se devaient
de respecter.
Je cours tout le temps. Je tombe et je me relève.
Ou alors je trébuche mais je me rattrape toujours au
dernier moment. Je plie, un genou au sol, envahie de
doutes. Ma culture cartésienne léguée par mon beau-
père refuse de l’admettre. Mais cela ne dure pas, car
l’expérience la plus extraordinaire de ma vie fut sans
conteste celle de «l’envol» sur la terrasse, face au parc
de ma maison du Lubéron. J ’ai reçu une secousse qui,
loin de me faire tomber, m’a révélée et m ’a projetée
dans le véritable combat de la vie.
Depuis cette expérience du Tout, j’ai souvent eu
envie de remonter le temps, pour aller réconforter la
petite fille de douze ans que j’étais. J ’avais envie de
lui dire: «Il faut que tu saches que tu es magnifique,
que tu fais partie d’un Tout et que tu es indispensable
à ce Tout. » Ce n’est pas grave que cette prof te mette
à l’écart. Tu lui rappelles certainement qui elle était
à ton âge et elle reproduit le même schéma avec toi
pour régler quelque chose avec elle-même. Et les gamins
qui se moquent de toi en te traitant de «petit pruneau»,
c’est parce qu’ils ne sont pas bien eux-mêmes avec leur
nez, leurs dents ou leurs taches de rousseur. Ce n’est
pas méchant ou du moins pas tant que ça. Tu n’es pas
responsable de la violence qu’ils déploient contre toi.
Tu sais, ils sont comme ça, les humains ; ils se débattent
parce qu’au moment de leur naissance, on «les a reti­
rés du ventre de leurs mères dans lequel ils baignaient
bien au chaud. Et la vie leur donne l’impression qu’ils
se noient dans une mer froide et agitée». C’est beau ce
que tu as en toi. Tu verras, ça sortira tout seul. Tu en
écriras des poèmes ou des choses sur la vie qui feront
du bien aux autres. Et cette authenticité te vaudra des
amis sincères et l’amour inconditionnel d’un homme.
Lui aussi, petit garçon, aura vécu les mêmes choses
que toi, et même pires, mais il te donnera tout. Alors...
Oui, pendant cette expérience, ce n’était plus moi
qui contenais mon amour, mais c’était mon amour
qui me contenait. Je n’avais plus à veiller sur lui car il
appartenait au monde des choses divines et je ne res­
sentais plus la peur.
Aujourd’hui, c’est sur moi que je dois veiller afin
de garder ce mystère qui m’a enveloppée. L’amour ne
peut plus me manquer mais je peux manquer à l’amour.
Mon âme, désormais, est à l’amour ce que l’air est
aux poumons. L’air est inépuisable, mais les poumons
peuvent tomber malades et cesser de respirer. Je
veille...
Lors de mon expérience, j’ai été libérée du temps.
Je suis entrée dans le moment présent et j’ai perçu
l’arbre, la fourmi, l’herbe, l’eau, sans aucun obstacle
mental. Une approche de la réalité vraie qui exprime
le sacré dans un profond amour pour tout ce qui est.
Lors de cet état de conscience, je comprenais que
rien ne s’était jamais produit dans le passé, que rien ne
se produira jamais dans le futur, mais que tout est dans
le présent. Le passé et le futur sont indissociables du
présent. L’instant présent est le point de mire de notre
vie. J ’ai compris qu’il n’y a rien de plus futile et de plus
fou que de résister à ce qui est déjà ici et maintenant. 11
n ’y a rien de plus fou que de s’opposer à la vie même
qui est maintenant, toujours maintenant.
CIAPM f 7

LA ViE APRES
LA noR
Qu’y a-t-il après la mort et comment le savoir?
Certaines personnes pensent qu’elles le savent - et
j’en fais partie - parce quelles ont vécu des expériences
extraordinaires. Certaines ont vécu des NDE*, d’autres,
comme moi, des expériences physiques - je ne sais
d’ailleurs pas si on peut les appeler comme ça - qui
prouvent que l’âme survit à la mort du corps et qu’il
existe d’autres dimensions. En ce qui me concerne, j’en
suis totalement persuadée.

* NDE: Near Death Expérience (Expérience de mort imminente, en


français).
L’histoire des religions et de leurs manifestations
dans les différentes cultures du monde montre que
les peuples sont en quête d’éternité. Pour ce faire, ils
recourent à la prière, aux méditations, aux exercices
spirituels... La science est à rebours de cet idéal. Je
pense que les lumières que la science projette dans ces
dimensions vont aboutir à apporter l’éternité dans nos
vies. Puisque l’éternité est là, présente dans nos vies,
dans la vie, que serait donc la mort sinon notre vie
emportée par l’éternité déjà présente dans nos vies?
Ceux qui ont vécu des NDE rapportent tous le même
témoignage. Ils traversent un tunnel sombre, ou lumi­
neux, pour d’autres. Puis ils remarquent une lumière,
des milliards de fragments de lumière, une lumière si
intense, si puissante, si pure mais qui n’aveugle pas,
avec des couleurs différentes qui dansent, qui tour­
noient comme si elles ne faisaient qu’un seul et même
esprit, et ceci, à l’infini. Ils ont conscience qu’ils ne
sont plus sur Terre, qu’ils ont quitté leurs corps. Et
l’Univers dans lequel ils entrent leur semble familier.
C’est une connexion très profonde. Ils arrivent à un
point où cette lumière ou bien des êtres de lumière leur
parlent. Des défunts qu’ils ont connus viennent à leur
rencontre et leur disent, du moins à certains : «Tu dois
retourner d’où tu viens, ce n’est pas encore ton heure,
tu as encore un travail à faire. » Ils n’ont pas envie de
réintégrer leur corps. Ils redescendent cependant. Ils
ont froid. C’est étroit. Quand ils sont réveillés, se sou­
venant de cette expérience, ils affirment de manière
unanime qu’ils n’ont plus peur de la mort. Ils ont hâte
de retourner à cet état de grâce.
Et c’est la science, aujourd’hui, qui se penche sur
la probabilité d ’une vie après la mort. Les médecins
des soins intensifs, comme le docteur Jean-Jacques
Charbonier, mais bien d’autres aussi, ont étudié des
centaines de survivants qui ont fait des NDE - ou expé­
riences aux frontières de la mort, à la suite d’un arrêt
cardiaque.
Rien ne semble disparaître. La vie continue au
moins un moment dans tous les cas puisque ces
patients reviennent et qu’ils témoignent de ce qu’ils
ont vu, alors que leur cerveau ne fonctionnait plus.
C’est donc extraordinairement intéressant car ce sont
des médecins qui témoignent, des chercheurs, des
neurochirurgiens. La science commence à témoigner
d’une vie après la mort. Ce qui semblait impossible
depuis toujours semble maintenant plausible aux yeux
des scientifiques.
Il n ’y a donc qu’une seule énergie divine car il n’y
a qu’un cosmos, et donc qu’un seul Dieu. Les disparités
géographiques, climatiques et raciales ne suffisent pas
à voiler cette vérité. Les disparités de vie, de pensées,
de visions du monde et de Dieu, ne sont pas non plus
l’expression d’une pluralité des cosmos. Il n’y a qu’une
seule race, celle des êtres existants qui sont reliés entre
eux par l’énergie cosmique qui enveloppe l’Univers.
Cependant, il ne suffit pas que la totalité des êtres soit
reliée par cette énergie, encore faut-il qu’ils soient en
connexion. C’est là la finalité des religions dans leur
prétention à l’universalité. Toute Vérité établie est par
nature dogmatique et universelle, même si elle n’est
pas revendiquée comme telle, sans quoi elle ne serait
pas une vérité.
En fait, la vérité est que l’âme est en tout et partout
dans une dimension où elle est partout et en même
temps. L’âme existe depuis toujours et ne cessera
d’exister. Elle ne peut pas ne pas exister. Elle est ce
qui est.
Il n ’y a pas que le passé qui influence le futur, le
futur influence aussi le passé, c’est un paradoxe. La
notion du temps n’existe pas, comme l’avait affirmé
Einstein. Passé, présent et futur: tout se passe au
même moment, dans des plans différents.
L’intérêt éthique et intellectuel de la vie après la
mort prend sa place dans la problématique religieuse
de notre époque. Séparation de l’Église et de l’État en
France, droit d ’expression des opinions religieuses,
liberté de culte, qui font des démocraties occidentales
des pays de droit où règne le double pluralisme poli­
tique et religieux. Il existe bien un foisonnement des
sensibilités religieuses, une manifestation de foi indivi­
duelle, mais le phénomène religieux de notre époque
ne donne pas l’impression que le siècle soit religieux.
Ce que j’appellerai «pléthorisme religieux» n’est pas la
foi. Dans le tiers-monde, en Afrique, qui est mon Tout
à moi, des églises au nom de tous les dieux, des cha­
pelles aux noms de toutes les saintes et saints, sortent
de toute part et envahissent la société entière comme
de l’herbe sauvage. Cela est du messianisme sauvage.
Les religions révélées servent de source théologique et
tout un chacun se révèle prophète. Du point de vue de
l’esprit de l’époque, si j’ose encore cette épithète, on
n ’assiste pas, paradoxalement, à un renforcement de la
foi ou de la croyance en l’existence de Dieu. Trop de foi
tue la foi. Les foules religieuses ne sont religieuses que
par l’existence d’une relation avec leur prophète. Mais
ce type de lien ne fait pas religion au sens spirituel et
mystique du terme. Il se perd plutôt dans ces échoppes
à dieux qu’il ne sauve les âmes. Dieu ne se prête pas au
commerce. Les âmes qui ont commis les pires crimes
au nom de Dieu, ces âmes immorales et amorales, sont
immortelles au même titre que les plus vertueuses. Dans
le monde du Tout, le jugement dernier n ’existe pas
puisque le Dieu du Tout ne juge pas. L’âme est sauvée
par le geste cathartique du Tout, d’où elle revient trans­
formée, l’oeil rempli de lumière d’amour sur le monde,
sur la vie. En revanche, le fait du religieux aujourd’hui
trahit un besoin de spiritualité qui est primaire chez moi
et qui a été satisfait par l’Expérience du Tout. Dans
l’un de ses ouvrages, Stig Dagerman affirmait que le
besoin de consolation est impossible à rassasier. Je
partageais ce point de vue avant que l’enseignement
du Tout ne vienne me prouver le contraire. L’homme
d’aujourd’hui a besoin de consolation et de spiritualité.
Les liens entre les consciences, les forces et les éner­
gies de l’Univers sont de mieux en mieux éclairés. La
science, conformément aux règles de la méthode qui
la caractérise, se départit de tout esprit religieux, et ce
sont les futures découvertes scientifiques sur la vie après
la mort qui parviendront à convaincre de la réalité de
l’immortalité de l’âme.
L’âme peut vivre sans le corps, mais le corps ne
peut vivre sans l’âme.
Ma vie, telle qu’elle s’est manifestée dans le Tout,
est à l’image de ce qui se passe après la mort. Il
conviendrait d’ailleurs de parler de la vie à la mort plu­
tôt que parler de la vie après la mort, tant vie et mort se
confondent du point de vue de la nouvelle cosmologie,
de la véracité avérée des NDE et des diverses expé­
riences de sorties hors du corps. Nous sommes entrés
dans l’ère d’une nouvelle vision du monde.
J ’ai eu la confirmation que l’âme, c’est-à-dire la
conscience, est extérieure au cerveau humain. Nous
avons un mental, créé dans notre cerveau par nos
expériences, nos acquis, notre éducation, nos fré­
quentations, bref, par le cadre social dans lequel nous
sommes insérés. Mais l’âme ne souhaite pas toujours ce
que le corps lui propose ou ce dont il se satisfait pour
fonctionner ou s’épanouir. L’âme attend le moment où
nous avons conscience de ce quelle veut, le moment
où nous désirons fusionner avec elle. Elle n’impose rien
de son désir. La partie consciente de mon moi décide,
dans le corps physique, ce qui veut dire que Dieu n’im­
pose pas sa volonté à son enfant, ce qui serait tricher
envers sa propre nature. C’est à ce stade que l’on
entrevoit les limites de Dieu, c’est à son allégeance...
On ne peut pas s’empêcher de se demander quel
impact dans le monde peut avoir un seul être humain,
que son action soit héroïque, remplie d’abnégation ou
de lâcheté. En réalité, chaque action laisse une trace,
chaque chose que nous faisons a un impact sur les gens
qui nous entourent et sur l’Univers tout entier. Chacun
de nos choix envoie des ondes dans le monde et dans
l’Univers. Les plus petits gestes peuvent provoquer des
réactions en chaîne, de belles conséquences imprévues
ou totalement catastrophiques. Nous ne voyons pas
toujours ces résultats, bien qu’ils soient réels.
Lorsqu’une tempête au pôle Nord descend vers le
sud, se confronte brutalement à un ouragan tropical
remontant vers le nord, elle se transforme en un violent
orage. La somme d’énergie générée est destructrice
et bien plus grande que si chacun des éléments avait
agi séparément dans un hémisphère isolé. Dans le cas
présent, nous assistons à la manifestation d’un orage
«parfait». Ainsi, si nous unissons nos forces, nous chan­
gerons le monde.
Le temps n ’existe pas. Les hommes l’ont construit
pour organiser et quantifier leur vie. Einstein croyait
à l’intemporalité qui veut que tout instant existe simul­
tanément en un passé-futur-avenir.
Notre impuissance apparente face aux événements
nous ramène tous au même niveau. Le monde n’en est
que plus juste. Les probabilités n’existent pas non plus.
Pourtant, lors d’un cataclysme mondial, les nombres
cessent soudain d’être aléatoires. Notre conscience
se synchronise tout comme les nombres et la science
n ’a pas encore expliqué ce phénomène. En revanche,
la spiritualité l’a fait sous la forme de la prière. Une
requête collective est mise à l’unisson, créant un égré-
gore. Les nombres sont constants jusqu’à ce qu’ils ne le
soient plus. Ce qui est errance pour l’oiseau est, pour
le ruisseau, le chemin le plus efficace entre sa source
et la rivière dans laquelle il se jette. La nature trouve
toujours un chemin...
Le corps contrôle le mental et le mental contrôle
le corps, mais le corps et le mental réunis ne peuvent
pas contrôler l’âme. Celle-ci, contrairement au corps
et à l’esprit, emprisonnés par les besoins, en est tota­
lement dépourvue. Elle n’a pas les mêmes aspirations,
et nous laisse ainsi libre d’agir à notre guise. Elle ren­
contre rarement le corps et le mental d’ailleurs. Dans
mon expérience, les trois ont fusionné : âme - corps -
mental. Ce syncrétisme m’a donné la sensation de tout
comprendre, au sens étymologique, de comprendre, de
prendre le tout dans un Tout.
Si notre âme laisse notre corps et notre esprit libre
d’agir, c’est que Dieu nous laisse notre libre arbitre. Elle
n ’est pas tenue à l’obéissance inconsciente à Dieu, elle
demande une volonté consciente, que l’on découvre
lorsqu’on fait cette expérience du Tout.
L’obéissance est un réflexe. Elle ne nous permet
ni d’avancer ni d’évoluer, car elle nous maintient dans
l’illusion. L’âme cherche des choix purs qui engendrent
un salut, mais celui-ci ne doit pas être motivé par le
besoin d’être sauvé de l’enfer mais par la connaissance.
L’âme montre le chemin mais ne l’impose pas. Le men­
tal et le corps doivent choisir, quant à eux, parmi les
possibilités offertes à notre libre arbitre.
Lorsque le corps, le cerveau, le mental, le moi, le
surmoi et l’âme sont réunis dans une unité harmo­
nieuse, alors nous sommes à l’image de Dieu.
La vertu du Tout réside dans le fait que le jugement
y est absent et l’unité est telle que la mort n’existe pas.
csftPim e

NOIRE VIE
SUR IERRE
L’existence n’est que l’expérience de la part divine
sur Terre. C’est cette part divine, qui, malgré la perte
de la connaissance originelle, permet à la conscience
de rester en connexion avec Dieu. L’homme a oublié
qu’il ne doit pas juger. En jugeant, en comparant, en
créant une échelle de valeur, l’homme a créé lui-même
la souffrance dans laquelle il se trouve.
La raison semble donc avoir été donnée à l’homme
pour qu’il se souvienne de son être, de sa vraie réalité,
de la connaissance.
Dieu n ’est pas responsable des actions morales
des sociétés humaines. Le mal vient de l’esprit de
comparaison, de la classification raciale, du jugement
moral et esthétique. Le mal vient de la mal-mesure que
l’homme a opéré sur la nature.
Le Tout est harmonieux, perfection, mesure. À ce
sujet, les sophistes résument ainsi la règle et le rôle
que l’homme s’est donné au monde : celui d’être la
mesure de toute chose. En s’érigeant comme maître de
la cité terrestre, l’action de l’homme a eu pour consé­
quence de produire les désastres que l’on connaît, tout
ayant été mal mesuré. L’homme est la mal-mesure de
l’homme (titre d’un livre de Stéphan Jay Gould).
Il est vrai que selon sa nature, l’homme ne peut se
passer d’émettre des jugements esthétiques et moraux,
de comparer sans cesse, car il est et il sera toujours
confronté à la problématique de ses choix en ce qui
concerne ses besoins naturels. Il importe simplement
de ne pas enlever à son prochain sa part de divinité,
autrement dit, son humanité. Tout n’est pas égal et
différent. La part divine n’est pas justiciable. Elle est
non négociable.
Encore une fois, le mal n’existe pas en soi. La culpa­
bilité est inutile. C’est un poids qui empêche de grandir,
NOIRE VIE SUR TERRE

d ’avancer. Elle est, avec la peur, notre pire ennemi


qui nous fait reculer et mourir avant la mort. Là où je
suis allée, il n’existe aucun jugement, aucune culpabi­
lité, aucune peur, car ces sentiments conduisent à la
dépréciation et à la haine de soi, et par conséquent,
à l’incapacité d’aimer les autres.
La recherche de qui je suis, bon ou mauvais, accom­
pli ou pas, tout cela m’est appris depuis ma naissance.
Mais c’est un enseignement erroné dont on peut chan­
ger le cours. Tout est question de choix. J ’ai alors
réalisé ne pas avoir compris les lois. L’enseignement
était de savoir ce que j’étais et qui j’étais déjà. Il est
donc temps de réaliser dans l’esprit humain une révo­
lution radicale. C’est une question de changement de
conscience.
Les motivations des hommes doivent changer.
Apprendre à donner plutôt qu’à vendre. Et comme nous
l’a appris Marcel Mauss, à propos de l’économie de la
kula, dans les sociétés trobriandaises, bien recevoir,
c’est déjà donner.
CIAPITIE1

UN nOHENT
DE RÉCRÉATION
Voyager, chercher à comprendre... J ’ai traversé
beaucoup d’étapes, les unes après les autres, j’ai dia­
logué avec une multitude de gens, posé des questions,
cherché à comprendre l’incompréhensible. J ’ai pris
des trains, des avions, lu des dizaines de livres... À tra­
vers des initiations, des ateliers de transcommunication
hypnotique, je suis parfois parvenue à toucher du doigt
des parcelles de cette expérience du grand Tout. Mais
toujours cette volonté de comprendre me tenaillait...
pourquoi moi? Alors, au fil des jours et des semaines,
une véritable solitude m’avait envahie.
Il me fallait transmettre, bien sûr. Mais avant de
le faire, je devais tirer l’enseignement de cette expé­
rience pour moi-même. J ’ai compris, en premier lieu,
le besoin de changer mes désirs les plus intimes. De
renoncer à tout ce qui n’était pas «réel». Car je savais
que rien ne l’était dans la vie que j’avais menée jusqu’à
présent, sauf la relation avec moi-même et avec celui
que nous appelons Dieu.
Je ne veux pas dire qu’il s’agissait pour moi de
reniement. Impossible de renoncer à toute chose. Il
était plutôt question de changer, de mettre de côté tout
ce qui représentait un frein à mon évolution spirituelle,
de même que l’on s’allège de ce que l’on n’utilise plus.
Me recréer, telle était l’urgence. Être constamment
dans l’acte de me recréer. Prendre du recul sur les pas­
sions, les observer, et me demander à quoi elles me
sont utiles pour servir qui je veux être à présent. Il n’est
toutefois pas question de nier la passion car la pas­
sion est amour ; elle nous motive à exprimer qui nous
sommes. Mais vivre la passion créatrice sans jamais se
soucier du résultat car c’est l’attente et l’attachement au
résultat qui sont le vrai danger. L’attente est le contraire
de la liberté. La joie doit venir de la création, de la
connaissance et non de l’attente des conséquences qui
en découlent.
Je me suis donc réveillée. L’Expérience du Tout m’a
simplement transmis la «vérité».
Le monde est dans un état léthargique, alors il faut
le secouer. L’homme agité, stressé, pressé, croit vivre
alors qu’en fait, il n’en a aucune volonté.
Bien sûr, pour comprendre cela, j’ai vécu ce que
j’appellerai une conversion instantanée. J ’étais profon­
dément endormie, et cette expérience m’a drôlement
secouée.
J ’ai cherché et essayé de la revivre coûte que coûte.
Je me disais qu’il existait sûrement quelque part un
endroit où une si belle aventure pouvait se reproduire.
J ’avais entendu parler des chamans sud-américains, des
sages africains qui initient ceux qui cherchent à devenir
des «Banzi» (celui qui éclôt, qui est sorti de sa coquille).
Portée par l’envie insatiable de revivre cette expé­
rience, il fallait que j’aille à la rencontre de ces autres.
Je suis donc partie vers ces lieux prometteurs, au
risque de m’y perdre...
CHhPITRE 10

LES ATEUERS
OOCTE
JEAN-JACQUES
CU NiER
Un été où je m ’apprêtais à m ’envoler vers
l’Afrique, je fis un détour chez Corinne et Jean-Jacques
Charbonier. Rencontrer le docteur Charbonier était
pour moi un événement heureux dont je rêvais depuis
longtemps.
Le ciel commençait à blanchir lorsque le TGV s’ar­
rêta à la gare de Toulouse. Le voyage s’était effectué
en silence, le train filant à travers la campagne française
du nord au sud. J ’arrivai seule sur le quai. Encore et
toujours en deuil, perdue dans l’absence de Michel.
C’est dans ces moments-là que les amis sont précieux.
Corinne a parfaitement capté l’état de désespérance
dans lequel je me débattais. Elle s’est vite doutée que
le sommeil m’avait fuie depuis longtemps.
La maison rose et verte se dressait fièrement au
bout d’un chemin sinueux qui montait sur les hauteurs
du village de Lavelanet. Du haut de la terrasse, lors­
qu’on regarde à gauche, en face de la piscine, on jouit
des formes et des couleurs des vallées et des hautes
montagnes qui se déploient, avec les prairies accolées
les unes aux autres, abritant des maisons dont les toits
ont la couleur du soleil et dont l’ombre des murs semble
s’enfoncer dans la terre. Les montagnes s’élèvent très
haut, recouvertes par des sapins noirs, dominées par
un autre pic dont la neige au sommet fait fumer le vent,
au loin...
Des chevaux broutaient. L’air était léger et silen­
cieux. Quelques oiseaux passaient en planant au-dessus
des prairies.
Les nuits sont d’une telle beauté en Ariège que l’on
traîne toujours un peu sur la terrasse, l’été, avant d’al­
ler se coucher. Les étoiles scintillent les unes après les
autres dans un ciel pur. Par endroits, elles apparaissent
en parcelles lumineuses, telles des grappes de raisin
d’or. Posées sur les ténèbres, elles éclairent la nuit.
À droite de la maison des Charbonier, le long de la
route, un bois domine, brun et sombre, et le long du
chemin, des chèvrefeuilles et des aubépines exhalent
un parfum sucré. Les tiges des mûres noires se mêlent
aux feuilles écarlates des ronces. La route qui mène au
portail la maison serpente pendant quelques kilomètres
les pentes boisées...
Corinne s’assoit souvent sur la terrasse pour fumer
de petits cigares, sa chienne Zaza à ses pieds. Jean-
Jacques, de l’intérieur du salon, sourit, amusé par ce
personnage haut en couleur dont il est toujours très
amoureux.
Et moi, un peu plus loin, je suis plongée dans la
Cinquième Symphonie de Mahler, les écouteurs dans
les oreilles. Je sais pourquoi j’aime tant sa musique. Il
est présent en elle comme Van Gogh l’est dans sa pein­
ture. Tout comme l’étrangeté de la décoration hante
cette maison, Mahler hante son oeuvre.
J ’ai toujours pensé qu’il était important que les êtres
humains se parlent. Le destin des autres peut toujours
nous servir de mise en garde.
Jean-Jacques et moi sommes très différents, mais
nous communiquons avec fluidité. Nous nous compre­
nons, nous parlons la même langue.
Communiquer ne veut pas dire se perdre en
paroles, mais être conscient de ses sentiments et de
ceux des autres sans jamais les cacher. Les sentiments
représentent le véritable langage de lam e afin de se
connaître mutuellement dans la vérité. Viendra le
temps pour les hommes où les paroles ne seront plus
nécessaires. Ils communiqueront alors leurs sentiments
par vibrations, par télépathie. Lorsque s’exprime un
amour profond, les paroles sont inutiles. L’amour crée
la communication et toute communication véritable

m
émane de la vérité. Et la seule vérité, c’est l’amour.
Voilà pourquoi, lorsque l’amour est présent, la com­
munication l’est, elle aussi.
Tout cela je l’ai expérimenté grâce à Jean-Jacques
Charbonier. Il m ’a offert de vivre deux expériences
fabuleuses lors de ses ateliers de transcommunications
hypnotiques. La première se déroula chez lui, dans sa
maison de l’Ariège, en privé, un matin d’été. La seconde
eut lieu lors d’une réunion publique à Toulouse. Jamais
je ne l’oublierai.
Allongés confortablement sur des transats, les yeux
fermés couverts par un bandeau, un casque sur les
oreilles, la séance commença. La musique puis la voix
du docteur Charbonier, grave et douce, nous entraî­
nèrent alors dans un merveilleux voyage.

Mon corps s ’allège. Il semble flotter jusqu’à ce que


je voie du haut de la pièce où nous nous trouvons.
Je ne reste là que quelques secondes. Je traverse le
plafond qui est mou, sans réelle consistance, alors
je ne résiste pas. J ’ai l’impression d ’être soulevée,
tirée dans le dos, tenue par mon pull, comme une
poupée de chiffon. Je flotte. Je suis soulevée. Ce
n ’est pas désagréable. C’est presque un jeu, je ne res­
sens aucun danger. Je uois la terre bleue et blanche.
Elle est ronde, très ronde et petite, de plus en plus
petite jusqu’à ce qu’elle devienne un point au loin
qui, peu à peu, finit par disparaître. Je flotte alors,
sans peur aucune, dans un vide sidéral noir, très
noir, qui n ’est ni chaud ni froid.
Dans ce noir absolu, ni lumière ni son. A un
moment, je perçois une vibration, comme un rythme
récurrent, et à une vitesse incroyable, je suis projetée
dans un tunnel aux parois de verre. Des anneaux de
lumière de toutes les couleurs défilent et forment
ce rythme que «j’entendais». Des lumières laiteuses
dorées, bleues, roses, chaudes et tendres. Au bout du
tunnel, j ’aperçois de hautes silhouettes lumineuses
et blanches qui s ’écartent sur mon passage. Je ne dis­
tingue pas leurs traits, mais je sais que ces êtres sont
bienveillants. Ils forment comme une haie d ’honneur
et je peux aisément, bien que je ne puisse voir ni leur
visage ni leurs traits, deviner leurs sourires. À nou­
veau, je flotte dans le noir, mais entourée cette fois
par des milliards de points lumineux, comme des
étoiles dans la nuit d ’un ciel d ’été sur Terre. C ’est
alors que, toujours retenue par mon pull au niveau
du dos, je ralentis. J ’arrive à présent au-dessus d ’une
nouvelle planète, révélant de doux paysages. Elle
me rappelle en tout point la Terre, bien que ses cou­
leurs soient plus vives et plus belles. La descente me
paraît lente, comme une montgolfière vacille len­
tement, très lentement. J ’ai une vue panoramique
d ’un endroit vallonné. Un lac, au milieu, dont les
eaux d ’huile ont la couleur argent du mercure avec,
par endroits, des reflets dorés.
Sur la droite de ce tableau que je survole, se
trouve un homme penché sur ses cultures. Il jardine,
puis se redresse et m ’aperçoit, me fait un signe de la
main gauche, un large sourire sur le visage. Il tient un
objet qui ressemble à un râteau. Je reconnais immé­
diatement papy Bertrand, mon beau-père, le père de
Michel. À gauche, un nuage de fumée s ’échappe de
la cheminée d ’une petite maison. J ’ai l’impression
d ’atterrir dans un paysage d ’un dessin animé de Walt
Disney. C ’est alors que je vois trois personnes sortir
de la maison, une fem m e et deux hommes, que je
reconnais immédiatement, notamment la mère de
Michel, ma belle-mère. Michel, mon mari, est là aussi,
ainsi q u ’un jeune homme que je ne connais pas. Ma
belle-mère arbore une coiffure impeccable, exacte­
ment la même q u ’elle affectionnait de son vivant.
Michel, quant à lui, est resplendissant de force et de
jeunesse. Il essaie de m ’attraper tandis que je flotte
car la gravité n ’étant pas la même que sur Terre,
je n ’arrive pas à atterrir. J ’échappe à la pesanteur,
affranchie des lois physiques, flottant au-dessus du
monde, contemplant le paysage aux couleurs fée­
riques qui se répandent sur le lac, vigoureuses et
dorées. Puis Michel réussit à m ’attraper, après deux
ou trois tentatives; il me tire à lui et me serre dans
ses bras. Je balbutie quelques mots q u ’il ne peut
pas comprendre tant l’égarement de ma joie m ’em­
pêche de parler clairement. Il me garde ainsi serrée
contre lui, mes jambes mollement suspendues dans
les airs, et me dit que le jeune homme à côté de lui
est Samuel, le bébé dont la naissance avortée n ’avait
pu se manifester une vingtaine d ’années plus tôt.
II n ’exprime pourtant ni regrets, ni reproches, ni
chagrin. Au contraire, je ne ressens qu’un sentiment
collectif de paix et d ’amour.
Puis je me retrouve à flotter dans une immense
sphère lumineuse. Elle brille intensément d ’un feu
immense qui ne brûle pas. Je ne vois plus Michel,
mais je sais q u ’il est là, tout près de moi. Nous
communiquons par télépathie. Nous flottons dans
cette lumière gigantesque. Il est vrai que la notion
d ’espace est délicate. On ne peut pas parler de dis­
tance, d ’espace. Je vais où je veux, sans impression
de haut et de bas, de droite et de gauche. Il y a des
êtres tout autour de nous mais je ne les vois pas. Je
sens leur présence dans cette fantastique lumière
blanche indescriptible. Je suis dans un bien-être
total. Pas de jugement, mais de la bonté. Que de
bonté! De cette boule de lumière, je vois s ’échap­
per des milliards de longs filam ents de la même
lueur intense, au bout desquels se trouve une petite
boule lumineuse qui est, je le sais, autant d ’univers...
J ’aurais voulu rester là, auprès de Michel, dans cette
béatitude absolue, dans cet amour inconditionnel et
ne jamais revenir, lorsque j ’entendis de loin, de très
loin, la voix de Jean-Jacques nous demander alors...
de «revenir».
Commença alors un retour progressif. Réintégrer
son corps après une telle expérience n’est pas agréable.
Je prenais conscience de la froideur, de la solitude et
de la peur qui nous habitent sur cette Terre. Mais je
revenais avec, une fois de plus, une connaissance de
l’amour sacré, et je comptais bien me servir de ce
cadeau pour le partager désormais autour de moi.
Nous ne faisons qu’un. La vie ne commence jamais
puisqu’elle ne finit jamais...
Grâce à ces ateliers, j’ai entendu Michel me mur­
murer des mots à l’oreille en me serrant dans ses bras.
Je garderai pour moi, si vous le voulez bien, deux ou
trois conseils qu’il me prodigua et qui répondaient à des
questions vitales pour moi.
Lors de ces expériences, à l’instar de celle du Grand
Tout, j’étais libérée de toute peur. Des larmes de joie et
d’émotion coulaient involontairement sur mes joues. Je
ne contrôlais rien. Ma vie terrestre fusionnait une fois
encore avec la vie universelle. Je m’éveillais à la vérité
de la vie comme dans le Lubéron, quelques années plus
tôt. Mon corps se répandait dans tous les territoires de
l’Univers, mon esprit pénétrait la vie de tous les êtres.
Ces expériences, bien que très différentes de celle du
Tout, m ’ont marquée à jamais... Je sais que Michel
m’attend. Alors merci Jean-Jacques...
Car lors de ces deux expériences, je me suis accep­
tée telle que je suis, un être individuel entier qui occupe
totalement un espace de lumière, d’amour et de beauté
absolue. Lorsque je suis entrée avec Michel dans cette
boule de lumière, j’ai ressenti une sensation de béati­
tude semblable à celle que j’avais ressentie lors de mon
expérience du Tout: une révélation.
Je pense de tout mon coeur que les expériences
vécues dans les ateliers du docteur J.-J. Charbonier
sont d ’utilité publique. La mort n’a plus de sens. La
mort ne m ’apparaît plus comme le vide, l’absence de
vie, le mal, l’obscurité et l’irrationnel. La perception
négative de la mort ne me concerne plus. Les ren­
contres avec Michel, avec les êtres de lumière, avec
Dieu, si j’ose dire, m’apparaissaient alors dans une
dimension sereine et heureuse, emplie d’une joie
profonde et éternelle. La mort n ’est pas la fin d’une
existence et le début d’une autre. Non, la mort est un
élément du cycle de l’alternance infinie. Nous ne mou­
rons pas pour rien. Le but fondamental de la mort est
la naissance. La vie perdure...
Grâce à sa voix envoûtante, J.-J. Charbonier nous
a transportés dans une dimension où m’attendaient
Michel et d’autres proches perdus sur Terre. Ils étaient
la preuve vivante de l’éternité de la vie. Lorsque nous
nous éveillons à cette vérité, nous prenons conscience
de l’aspect éternel de notre vie, qui transcende nos
perceptions du monde physique ainsi que les cycles de
la naissance et de la mort.

m
CIAPITIE 11

AFRiOUE riON A M :
L'EXPÉRIENCE
de L i r a
La découverte de l’Afrique fut une révélation pour
moi.
L’air est un élément particulier en Afrique. 11 est
chargé d’histoires de fantômes et d’apparitions mysté­
rieuses. Le jour, il vibre comme les notes des violons
qui font frissonner les plantes, les arbres et la terre tout
entière en ondes chaudes et humides.
Pendant la saison de pluies, le sol des prairies qui
longeait par endroits la rivière était recouvert d’herbe

m
fraîche d’un beau vert foncé. J ’avais l’impression de
marcher sur un tapis de laine épais. On apercevait des
espèces de gazelles, attirées par l’herbe grasse. Nous
avons marché trois jours avant d’arriver au village.
Imaginez un être humain qui ne découvre la mer
qu’à l’âge adulte ou bien un musicien avec un don inné
qui n ’aurait pas entendu avant l’âge de trente ans une
symphonie de Mozart ou un opéra italien, vous aurez
alors une idée de ce que j’ai pu éprouver en découvrant
l’Afrique. Et lorsque j’ai connu les Africains je n’ai eu
qu’un seul désir, une seule pensée, celle de m’accorder
à leur rythme, à leur âme.
Ce n ’est pas simple de connaître et de comprendre
les Africains, mais ils sont l’Afrique personnifiée, en
chair et en os. Ils sont aussi bien les plaines du Serengeti
que la forêt équatoriale du Gabon ou les volcans de la
vallée du Grand Rift. Les animaux sauvages ne repré­
sentent pas mieux l’Afrique que les Africains, grandes
et minces silhouettes sous un soleil écrasant.
En Afrique, la notion d’espace et de temps perd
de son sens. En Afrique, tout est beau après la pluie.
Tout est vivifiant. Je me demande s’il existe un bonheur
terrestre plus grand que de découvrir les vastes plaines,
de se trouver dans la brume et d’entendre le vacarme
assourdissant de la splendeur des chutes Victoria. Ces
grandes espaces qui s’étendent à l’infini, peuplés de
zèbres, de gnous, de girafes. Les jeux d’ombre et de
lumière lorsque le soir tombe sur le fleuve Congo.
Libérée des routes étroites et des pistes dangereuses,
l’immensité de l’Afrique nous projette dans une autre
dimension.
L’Afrique a sur moi un effet magique. Elle me pro­
cure un sentiment de bonheur que je ne ressens nulle
part ailleurs dans le monde.
«L’Afrique doit être vue du ciel», disait Karen
Blixen. Elle avait raison. Alors, j’ai essayé là-bas d’al­
ler au ciel lors d’un voyage au nord-ouest du Gabon
à la frontière du Cameroun. En perpétuelle recherche
de l’Expérience du Tout, j’ai voulu découvrir celle de
l’iboga...
Au coeur de la forêt équatoriale du Gabon et de
celui des traditions spirituelles se dresse un arbre, mys­
térieux et dangereux, le Tabernanthe iboga. C ’est
un bel arbre qui produit des fruits d’un jaune ou rose
pâle. Ses fruits, sucrés et délicieux, n’ont aucune pro­
priété psychoactive. C’est dans l’écorce des racines de
l’iboga que l’on trouve un alcaloïde puissant, et c’est
au cours d’un rite initiatique appelé «Bwiti», provenant
des populations pygmées du centre du Gabon, que les
premières cérémonies apparurent. Il est aujourd’hui
largement répandu dans tout le pays. À l’origine, il
n ’était réservé qu’aux hommes qui, une fois initiés,
étaient appelés «Maîtres» et devenaient les gardiens
du mystère de la connaissance de l’au-delà, celle du
monde des ancêtres. L’initiation apporte la preuve
visuelle de percevoir d’autres dimensions. L’iboga, en
outre, révèle la pluralité des existences et supprime
la notion du temps. Aujourd’hui, le rite est accessible
aux femmes.
C ’était une journée excessivement chaude et
humide. Le mois de février, en Afrique équatoriale, est
l’un des plus torrides. Au coeur de la forêt, l’humidité
peut atteindre quatre-vingt pour cent au sol. À quelques
kilomètres de Makokou, dans la province d’Ogooué-
Ivindo, se trouve le village pygmée de Zoula, situé
lui-même à une vingtaine de kilomètres de la petite
ville de Mékambo. D’un côté, les Kwélés, et de l’autre,
les Pygmées.
J ’y étais parvenue quarante-huit heures plus tôt. Le
chef de la communauté locale des Kwélés m ’avait
reçue, entouré de villageois portant des tam-tams et des
chaises. Ils chantaient et dansaient joyeusement autour
de moi, en signe de bienvenue. Les enfants tapaient
en rythme sur des bouteilles de bière vides avec des
branches sèches. Ils chantèrent et dansèrent ainsi toute
la nuit. Le lendemain, ce fut pour moi le début de l’ini­
tiation. Une journée de jeûne total, isolée dans une case
en banco, strictement réservée aux futurs initiés. Un très
vieux villageois que je devais appeler «mère» me par­
rainait. Il surveilla tout au long de la cérémonie le bon
dosage de la préparation ainsi que mes réactions, véri­
fiant mon pouls, écoutant les battements de mon cœur.
Le grand jour arriva enfin. On me conduisit vers un
cours d’eau où les femmes du village me lavèrent et me
recouvrirent le corps d’une pâte de kaolin blanc, et la
tête d’une pâte de kaolin rouge. Le kaolin blanc repré­
sente le sperme, mais aussi la pureté, tandis que le rouge
évoque les menstruations de la femme, la chair, la terre.
C’est au son d’une harpe que commença alors véri­
tablement l’initiation, dans un temple sacré.
Ce rituel est une quête de la Vérité. La recherche
du lien que l’homme entretient avec le cosmos et la
mémoire de l’humanité. Et bien que loin de l’Expérience
du Tout, je garde de ce «voyage» une reconnaissance
particulière de mon passé ainsi que les messages vibra­
toires de ces êtres lumineux que j’ai rencontrés alors.
Au cours de ce voyage, j’étais une Africaine qui
pillait le mil, un enfant sur le dos. Cette femme pleurait
son mari parti de l’autre côté de la mer dans une galère,
enlevé par des colons blancs qui en firent leur esclave.
Lors de mon «retour», le chef auquel j’expliquais mon
rêve très réaliste m ’affirma que dans une autre vie,
j’avais été cette Africaine, et que, dans ma vie actuelle,
je recherchais inconsciemment ce mari. Mon amour
pour l’Afrique s’expliquait tout simplement par le fait
qu’en posant le pied sur le sol africain, j’étais rentrée
chez moi. C’est alors que je me souvins qu’enfant, je
ne voulais que des poupées noires...
Ainsi, je ne revécus pas l’Expérience du Tout pour
laquelle j’étais venue dans cet endroit du bout du
monde, mais j’étais «rentrée à la maison»...
Je voudrais insister sur le fait que l’iboga est une
drogue, et je ne peux que mettre en garde tous ceux
qui, venus de l’Occident, seraient en quête d’initiations
de ce genre. C’est un rituel qui se manifeste au début
par des moments très douloureux physiquement et psy­
chologiquement, voire dangereux, et qui dépasse de
loin le folklore africain. Ce rituel mystique n’est pas sans
danger, disais-je, et bien qu’il s’ouvre aux Occidentaux,
il est important de souligner que cette drogue est l’une
des plus puissantes au monde.
C’est pourquoi on la boit d’une manière régulière,
par petites gorgées. La poudre issue de l’écorce de la
racine est obtenue après avoir été longuement râpée.
Elle peut être soit mâchée soit diluée dans l’eau. C’est
alors une boisson amère qui nous entraîne dans un
long voyage empli d’hallucinations. Un long voyage
qui peut durer plusieurs heures, voire plusieurs jours,
à l’issue duquel une femme qui avait très récemment
accouché prit soin de moi, car j’étais alors redevenue
un nouveau-né. Je commençais ma nouvelle vie.
La mort, le voyage, la renaissance - le Kombo. Mais
en réalité, ma nouvelle vie avait commencé le jour de
mon expérience du Tout, en ce début d’après-midi dans
le sud de la France...
Ü A P IT tf 12

A LA RECLJ[RCUE
DES AURORES
BORÉALES
Le bac en poche, je suis partie seule à l’aventure, en
stop ! Et c’est chez les Samis, des éleveurs de rennes en
Laponie finlandaise, que j’ai posé mon sac à dos. Au
pays des elfes légendaires, composé d’immenses pay­
sages à perte de vue, du soleil de minuit et des aurores
boréales. Dans les années 1980, il existait encore des
autochtones qui vivaient sous des tentes en peau de
rennes, se déplaçaient en fonction des besoins de leurs
troupeaux, et vivaient de leur viande et de leur lait, de
cueillette et de pêche.
La toundra s’étendait à perte de vue, blanche l’hi­
ver et très sèche l’été. Des milliers de sapins et de lacs
formaient un paysage féerique. J ’étais dans le pays du
chamanisme. Aujourd’hui, je me rends compte à quel
point cette destination, dans le monde du sacré, était
un premier signe des connexions spirituelles à venir.
Au sein de la tribu dans laquelle j’ai séjourné
quelques semaines, tout était initiatique et symbolique.
L’énergie ressentie au contact des pierres, des arbres
et des rennes était très particulière. J ’ai le souvenir
de fjords profonds et sublimes en bas desquels la mer
plate et froide avait une couleur sombre, magique,
inquiétante.
À l’intérieur des tentes des Samis, le sentiment de
l’écoulement du temps n’était pas le même qu’à l’ex­
térieur. Les heures s’écoulaient, douillettes et tièdes.
Dehors, même durant l’été, les nuits étaient froides, les
heures se traînaient.
L’été, en Finlande, le soleil ne se couche pas, alors
des milliers d’oiseaux chantent jour et nuit. Alors que
l’hiver, le froid pétrifie la vie. Pas un oiseau ne crie. Pas
un son ne résonne. La Laponie attend son réveil printa­
nier. Tout est suspendu. L’eau, le ciel, le silence même.
Mais dès le printemps revenu, la vie coule sur les pentes
des falaises, les rennes reviennent brouter avec leurs
nouveau-nés et les nuages d’été planent vers le nord.
Une nuit, j’ai fait un rêve étrange. J ’étais assise sur
un rocher en bas d’une falaise, la mer à mes pieds.
Puis soudain, j’ai vu émerger une orque. La tête hors
de l’eau, elle me fixait. Dans mon rêve, je comprenais
que l’orque me disait qu’elle cherchait son bébé. Je
ressentais sa souffrance, son désespoir. «Où est mon
bébé? Je cherche mon bébé, rends-le-moi ! » J ’étais
bouleversée et lui montrais le large: «Va là-bas. Va au
large. Cherche ton bébé là-bas. » Mais elle me regardait
fixement et semblait me dire : «Non ! Pas la peine, c’est
vous, les hommes, qui l’avez tué. »
Le lendemain matin, après m ’être réchauffée, nous
avons pris notre petit déjeuner consistant en un bol
de thé au beurre rance et d’une soupe aux champi­
gnons, avant de sortir avec les femmes Samis pour
la toilette dans le lac qui bordait le campement. Sur
le chemin du retour, nous avons longé un sentier qui
suivait un bras de mer en bas d’une haute falaise. Tout
en haut, au sommet, régnaient la pierre, la neige et
le ciel. Les femmes ramassaient des champignons et
cueillaient ces baies dont elles sont très friandes. Leurs
silhouettes rouge et jaune, à l’instar de petits person­
nages de contes de Noël, avançaient sur la grève devant
moi. Au loin, les tentes fumaient au milieu des bosquets
de pin dont les troncs à la couleur de pain d’épice me
donnaient faim.
J ’en profitai pour fumer une cigarette, assise sur un
rocher à fleur d’eau. C’est alors que je le vis. Un énorme
corps noir, brillant et lisse, qui bondit hors de l’eau
dans une explosion d’écume. L’animal plongea puis
ressortit hors de l’eau, et avança calmement dans ma
direction. C’était une orque. Elle s’approcha et garda la
tête hors de l’eau, immobile quelques secondes, comme
dans mon rêve. Ses yeux me fixaient. Des yeux un peu
jaunes d’où suintaient un liquide épais, telle une larme.
Elle était là, toute proche, et je n’avais pas peur.
Son souffle puissant m ’inondait. Nous nous faisions
face dans un dialogue silencieux. Cela a duré quelque

m
temps. Dans une position à la verticale, elle se remit
à plonger puis à rejaillir, me regardant intensément
pendant de longs instants lorsqu’elle était hors de l’eau.
Alors, je compris. Je sus quelle cherchait son petit...
Désemparée, elle me disait: «Au nom des hommes,
rends-moi mon bébé... »
Nous vivions toutes deux une tragédie. Elle qui me
suppliait et moi qui ne pouvais pas l’aider.
Elle replongea alors lentement, une dernière fois,
et s’éloigna.
J ’eus l’impression de perdre une amie après l’avoir
trahie.
Sa douleur était mienne.
Par la suite, il ne fut plus question pour moi de
couper la branche d’un arbre ou la tige d’une fleur. Le
monde avait mal, la création souffrait, et je souffrais
avec elle. L’orque me regardait et je lisais la souffrance
dans ses yeux. Nous souffrions ensemble. L’orque était
ma sœur cosmique et elle était devenue ma raison de
vivre...
CHAPITRE 13

LE Ml DE
NON EXPÉRIENCE
«Expérience » est un maître-mot, une voix locomo­
tive, si ce n ’est un leitmotiv planté dans ma conscience.
J ’ai conçu ma vie comme une sorte de succession d’ex­
périences en continu qui m’ont conduite à travers le
monde. J ’ai la certitude inébranlable d’y avoir trouvé
cette autre connaissance de moi-même, cette lumière
qui m’a permis de me connaître et de renaître toujours
davantage. Au cours de notre vie, on renaît chaque jour
jusqu’à l’accomplissement...
Depuis ma plus tendre enfance, je voulais tout
voir, tout découvrir et tout connaître. La somme de
mes expériences m ’a portée à cette conclusion que
la vie n ’est qu’une expérience ontologique. Et ce que
j’appelle «l’aventure gnostique de l’homme» en est la
preuve. Autant dire que la connaissance s’inscrit dans
une dimension mystique, car elle s’enracine dans le
Tout.
Dans le Tout, la vie ne connaît pas la mort. En
revanche, c’est dans cette dimension-là que les états
se déroulent pour mieux se renouveler. Durant cette
expérience, j’ai vécu ces cycles de renouvellement de
la vie. Je suis passée par tous les états de l’être. J ’ai
vécu la réminiscence, la métempsychose, l’incarnation
et la réincarnation. J ’ai vécu toutes sortes de formes du
divin, toutes sortes de religions.
Rencontrer l’humain est toujours mon projet exis­
tentiel. Je suis allée à la rencontre des peuples que
je ne connaissais pas. J ’ai vécu parmi eux. Alors que
souvent, l’Occidental arrive dans ces contrées imbu de
sa personne, de sa technologie, de sa technique, mais
il se rend compte rapidement que ces peuples ont tel­
lement plus à nous apprendre. Ce qui importe, c’est
l’échange. En matière de culture et d’humain, on ne
peut raisonner en termes de plus de connaissances chez
LE SENS DE Ï10N EXPERIENCE

les uns et de moins chez les autres, dès lors qu’il s’agit
d’éduquer et de «grandir» l’humain. On a toujours peur
de ce que l’on ne connaît pas. Ô homme, va à la ren­
contre de celui que tu ne connais pas et tu te connaîtras
toi-même! En conscience, j’invite l’homme à opérer
un prolongement tendanciel du désir de connaissance
physique et métaphysique. Ce que le calcul et le rai­
sonnement n ’ont pu réaliser, l’Expérience du Tout m’a
permis de voir et Dieu et l’homme.
Notre visage devrait s’inscrire dans cette démarche
de connaître les autres dans le miroir de la simplicité.
Voilà la véritable figure de la vie qui n’est pas autre
chose que la connaissance de l’autre, pour naître avec
lui. Ma conscience n’était pas aussi éveillée que lorsque
je m’y éveillais grâce à la rencontre de ma figure dans le
visage de l’autre. Ce dernier, porteur du Tout, a éveillé
ma conscience. La connaissance de l’autre a insidieu­
sement tracé le chemin qui m’a conduit à connaître
l’Expérience du Tout, d’où la conscience éveillée est
née. Ainsi va le bonheur de la vie. Ainsi je m’explique
l’abandon de «moi-même» sur les routes du monde et
sur la route de l’humain.
L’action de l’homme va dans le sens contraire de
l’ego lorsqu’elle n’a pour motivation que sa part divine.
Sinon, l’ego mène l’homme dans le sens contraire de
l’éveil, dans le sens contraire de la vie. Celle-ci est ce
qu’il y a de plus sacré chez l’homme et ce dernier le sait.
Pourtant, il continue de polluer, de construire toujours
plus grand son ballon de gaz capitaliste et financier qu’il
manipule comme un incapable majeur, sans aucune
surveillance. L’homme est dans l’enfance au regard de
la conscience du Tout.
Pour ma part, l’Expérience du Tout a enrichi ma
faculté altruiste et m’a convaincue de cette vérité selon
laquelle l’altruisme consiste à une transmission réci­
proque du divin.
CIMUE 11

LE SENS DE LA
E
Lorsque je dis que j’avais la connaissance, je parle
d’une connaissance qui se trouve au-delà de tout ce que
l’on peut imaginer. En fait, l’homme se trompe complè­
tement de but, de chemin. S’il souffre autant sur Terre,
c’est qu’il chemine trop lentement vers la connaissance.
Il est alors de son devoir de connaître absolument l’éter­
nelle vérité de tout ce qui est, la vérité du Tout. C’est
lors de cette incroyable expérience que j’ai compris les
grands mystères que je ne peux cependant expliquer.
Mais les grands mystères sont-ils explicables? J ’avais
l’expérience de la réalité la plus grande. Car il n’existe
qu’une seule et unique vérité, la vérité finale, et l’homme
prend des chemins tellement compliqués pour y accé­
der. Lorsqu’il arrive sur Terre, il oublie qu’il avait cette
connaissance, avant. Lors de cette expérience du Tout,
j’ai compris ma divinité. Dans la dimension dans laquelle
nous vivons, nous créons une réalité individuelle qui est
une forme d’illusion alors qu’il existe une réalité plus
vaste, la réalité du Tout qui, elle, est unifiée.
Dans notre vie terrestre, tout est question de choix.
En fait, tout au long de notre vie, nous faisons l’expé­
rience de ce qui a déjà été vécu, de ce qui a été créé. En
réalité, nous ne créons rien. C’est la conscience univer­
selle qui crée.
L’infiniment petit n’a pas de fin, tout comme l’infi-
niment grand. Notre condition d’être humain est une
infime partout du Tout que j’ai vécu. Lorsque j’étais hors
de mon corps, j’avais élargi ma vision comme si j’avais
réalisé des sauts quantiques. J ’avais alors une vision glo­
bale de tout. J ’avais cette impression de tout comprendre
et j’ai compris que tout cela était immensément plus

w
grand que la réalité que nous expérimentons dans notre
corps au quotidien.
Cette compréhension m ’avait transcendée. Je
me disais: «Oh, mon Dieu! Je n’avais pas compris
ça?» J ’étais émerveillée d’avoir compris ce que Dieu
comprend lui-même. Je savais ce que Dieu sait.
La vie, telle que je l’ai ressentie lors de cette expé­
rience, n’a pas de commencement puisqu’elle n’a pas
de fin. La vie s’étend, prend des formes différentes, des
formes nouvelles qui créent indéfiniment la vie.
Lorsqu’on arrive dans une nouvelle vie, nous nous
donnons une autre forme physique chargée d’énergie.
C’est une autre forme de vie et d’énergie qui existait
déjà sous la forme de lame. La vie est toujours là, jamais
loin, jamais proche, jamais absente. Elle ne commence
ni ne finit pas.
J ’ai compris qu’aucun être humain, même s’il tue
son voisin, son mari, un enfant, un chat, un chien... ne
tue personne. C’est la forme physique qui est tuée, une
énergie physique, mais la vie ne s’arrête jamais car on
ne peut pas tuer lame. La notion de crime, bien qu’inac­
ceptable, est au niveau spirituel complètement différente.

m
La grande leçon que je tire de ce voyage sublime,
c’est que nous ne faisons qu’un, non seulement avec
le reste de la Terre mais avec le reste de l’Univers ou
des univers. Nous ne faisons qu’un avec Dieu qui n’est
pas, ici, celui des juifs ou des catholiques ou des musul­
mans. Nous ne faisons qu’un avec la connaissance. Nous
sommes la volonté de Dieu et Dieu est notre volonté. Et
c’est parce que nous ne faisons qu’un avec cette image
de Dieu que toute notion de jugement, de culpabilité, est
fausse. Je suis toi et tu es moi.
En fait, nous sommes sur Terre, dans cette dimen­
sion, sans en faire réellement partie. Notre place est
ailleurs. Ce qui laisserait à penser que la réalité terrestre
n ’est pas la vraie réalité. Ce n ’est peut-être qu’une
illusion que nous empruntons, que nous créons nous-
mêmes pour apprendre.
L’Unité est la seule vérité ; la séparation est l’Ultime
illusion.
Vivre dans l’illusion, c’est vivre dans la souffrance.
Rien ne changera tant que l’homme ne comprendra pas
cet état de fait.
Il n ’existe que l’amour et la connaissance.
Le temps n’existe pas. Le seul instant qui compte,
c’est celui qui existe ici et maintenant. Le temps n’est
qu’un aspect des choses...
Lors de mon expérience, j’ai vu les événements défi­
ler, passer les uns devant les autres. Ils se produisaient
tous en même temps, de sorte que la notion de temps
et d’espace n’avait rien à voir avec ce que je vivais ici et
maintenant.
Parler du mal, cela reviendrait à supposer un dieu
malsain. Or, le mal est absent dans le monde du Tout.
Nous sommes parfaits tels que nous sommes. Il faut
nous aimer tels que nous sommes et ainsi on ne peut
plus faire d’erreur. Le mal est un concept créé par l’être
humain. Les règles ont été créées par les hommes et ce
sont eux qui les modifient en fonction de leurs besoins
du moment.
Dans le Tout, il n’y a aucun enfer, aucun purgatoire,
pas de punition ni de jugement après la mort. Il n’y a que
des conséquences relatives à notre vie sur Terre.
C M P I T l f V>

L'ETUiQUE [1 LES
VOIES DE LA VIE
Nos pensées sont créatrices. Nos paroles et nos
actes s’envolent dans l’Univers. Le bon, le mauvais,
la justesse, l’illusion. Elles opposent des forces dans
un combat sans fin. Seuls la compassion, l’empathie,
l’amour, permettent à nos consciences de créer dans
cet Univers au creux duquel nous sommes immergés.
À nous de nous libérer. Abolissons l’égoïsme, oublions
notre ego, notre individualisme, en consacrant notre
vie à apporter de l’amour aux autres. Notre conscience
s’en trouvera alors profondément modifiée. Changeons
de paradigme par la destruction des murs meurtriers

1ü7
et séparateurs qui sont marqués par le sceau de nos
actions passées.
L’idée que tout est écrit et que nous ne pouvons rien
changer est vraie et fausse à la fois. Nous avons une
multitude de possibilités et de choix qui s’offrent à nous.
L’Univers nous donne la liberté de créer nos vies, et par
\

conséquent, de nous créer nous-mêmes.


À un âge très jeune et doux, entre ma douzième
ou quinzième année, je pense, j’avais pris l’habitude
de scruter l’horizon longuement. Je passais ainsi des
heures sans fin, assise confortablement dans mes pen­
sées. Au bout d’un long moment m’apparaissait une
vaste étendue abandonnée, vide de plein d’ombres dan­
santes. Mon esprit se formait alors à l’idée selon laquelle
la vie n ’offrait guère que deux grandes voies finales au
sein desquelles pouvaient se dessiner une infinité de
sillons : l’homme avait dessiné sur le mur une porte qu’il
tentait désespérément d’ouvrir sans jamais y arriver,
d’abord tout seul, puis aidé par des foules d’illusion. Et
plus cette porte résistait, plus l’homme y épuisait ses
forces. Je choisis alors l’autre voie qui appelait, elle
aussi désespérément sans jamais être entendue de moi,

m
à ouvrir la porte du vaste jardin abandonné et de quêter
dans la lumineuse obscurité les essences de la vie.
Nous aurons la possibilité de faire exploser tous les
morceaux de la mosaïque. Nous pouvons tout changer,
changer notre avenir afin que nous n’ayons pas à faire
l’expérience du passé.
Nous avons pris l’habitude de vivre continuellement
et indéfiniment des vies bornées.
Vivons nos vies de diverses façons...
Nous sommes des dieux ou plutôt nous sommes
tous minéraux, animaux, végétaux et humains, conçus
dans des proportions divines sans aucune limite. Nous
sommes la vie, et nous en portons les essences qui nous
permettent de faire l’expérience de qui nous sommes,
ici et maintenant.
Nous sommes dans un éternel instant de création
car l’homme est dans un perpétuel renouvellement,
à chaque instant de sa vie. L’homme est en perpétuelle
mutation au creux desquelles fluctuent les rencontres.
Nous attirons à nous les circonstances de la vie pour
comprendre et construire la version la plus magnifique
que nous n ’avons jamais eue de nous-mêmes. C’est
\
un processus de création infinie et éternelle dans un
espace-temps qui n’existe pas, car nous vivons toutes
nos vies en même temps.
Chacun de nous crée tout ce qui est vécu à l’ins­
tant même ; nous sommes chacun et cet instant et la
création.
Nous accédons alors à la réalité ultime de toute
chose, une force de vie pure. C’est le grand Soi qui
oeuvre pour le bonheur de tous, la force qui rendrait
toute vie terrestre heureuse.
C ’est ce que les bouddhistes l’appellent «la
conscience du Bouddha» ou la nature du «dharma»,
parce quelle est l’illumination potentielle, présente en
chacun de nous, en chaque être. L’homme ainsi révélé
à lui-même peut transformer totalement le principe de
cause à effet qui illumine la conscience quand elle est
aveugle, pour nous conduire vers la sagesse plutôt que
nous maintenir dans l’illusion.
Comment ne pas succomber à la folie après toutes
ces expériences? Michel ainsi que la méditation m’y
ont aidée. Je me mis surtout en quête des autres:
orphelinats en Afrique, refuges d’animaux, groupes de
prière et d’accompagnement aux mourants. Je voulais
tout prendre sur moi et avec moi. Je voulais alléger la
souffrance du monde. J ’avais compris en quelques ins­
tants, lors de cet envol extraordinaire de l’Expérience
du Tout, que sauver une fourmi sauvait le monde.
Je ne sais si de telles expériences se produisent
fréquemment et comment reconnaître les critères attes­
tant que cette expérience est vraiment celle d’une autre
dimension, d’une expérience de Dieu.
Celui que Dieu a touché et qu’il accueille possède un
rayonnement particulier, surtout lorsqu’il vient d’éprou­
ver l’expérience, mais aussi lorsqu’il reste porté par son
action.
En une seconde, le monde m ’est apparu sous
un autre jour. J ’ai pris la décision et j’eus la force de
commencer une vie complètement différente de celle
que j’avais menée jusqu’alors.
Tout ce qui me paraissait stable et rassurant s’est
révélé être bâti sur du sable. Tout ce qui paraissait judi­
cieux devenait vide de sens.
J ’ai jeté par-dessus bord toutes mes conceptions
antérieures de la vie. J ’avais été de la famille de l’arbre,
de la feuille de l’arbre, la feuille qui n’avait plus peur de
l’automne qui viendra et la verra tomber, se dessécher
et devenir poussière. Oui ! J ’étais la feuille qui était elle-
même l’arbre dans toute sa totalité en ressentant que
la vie et la mort annuelle de la feuille font partie de la
totalité de l’arbre. J ’avais une autre vision de la vie. Le
Tout était ma vie secrète, ma partie transcendante. Elle
était promesse et vérité vraie.
Tous les choix que nous faisons envoient des ondes
dans le monde, comme ces galets que nous jetions,
enfants, à la surface des plans d’eau. Nos petits gestes
de bonté peuvent provoquer une réaction en chaîne
et de magnifiques conséquences. Même si nous ne les
voyons pas, ils sont pourtant réels...

m
^ r

j L

Les grandes expériences de la vie ne sont ni des


inventions ni des créations du cerveau, mais bien des
découvertes. Mon expérience du Tout a été un grand
moment de l’amour et de la vie. Dans ces instants, nous
découvrons l’objet contemplé, c’est-à-dire que nous
dépassons la matière, traversons le voile pour retrouver
dans sa splendeur, l’essence éternelle.
L’Expérience du Tout a été une expérience de
l’épaisseur de l’être. Ce qui s’est révélé à ma conscience,
c’est que le monde, tel que je le connaissais, avec ses
innombrables formes, est à la substance universelle ce
qu’est l’écume des vagues à la profondeur des océans.
Alors naît la certitude suprême et rassurante de ne pas
pouvoir toucher le fond.
Je n ’ai pas découvert Dieu à la manière de l’ex­
plorateur qui part à la conquête d’une terre inconnue.
C’est à travers moi-même, au sens primitif du mot que
je l’ai trouvé. L’Expérience du Tout m’a dépouillée de
tout ce qui empêchait ce contact avec l’absolu, et m’a
permis d’accéder à la lumière divine.
Alors pourquoi «tout ça»? Les étoiles, les galaxies,
les arbres, les minéraux, les animaux et nous? Pourquoi
sommes-nous ici et maintenant? Où étions-nous avant?
Où se trouve cette dimension des esprits où Michel
a rejoint ses parents? Cette infinité d’univers et l’au-
delà? Il n ’y a pas de véritable réponse, ni scientifique
ni religieuse. La réponse est en nous, la seule qui soit.
Nous sommes uniques et merveilleux. Nous portons
tous une étincelle divine. Nous sommes si fragiles, si
petits, et pourtant si importants. Nous transmettons
de génération en génération l’avenir du monde et de
l’Univers. Chaque être humain est exceptionnel. Il l’est
et l’a toujours été, bien avant sa propre conception.
Bien avant le big-bang. Il l’est depuis toujours et le sera
éternellement. Au coeur de notre galaxie, au milieu de
ces milliards d’étoiles, chaque être humain est unique et
sa présence est un miracle. Vivants, fragiles et puissants,
nous sommes tout cela à la fois : les planètes, les étoiles,
l’Univers. Nous sommes une partie de ce Dieu étoilé.

m
CONCLUSION

Mais, comme Lui, nous ne sommes pas seulement


cela...
Nous ne sommes pas seulement faits de poussière
d’étoiles, de chair, d’eau et de sang.
Non, nous sommes beaucoup plus que cela !
Nous venons d’avant et nous existerons toujours !
En premier lieu, je voudrais remercier cette lumière,
source de vie, qui est à l’origine de ce livre. Ensuite, je
voudrais remercier mes guides spirituels dont Michel,
mon mari, qui en fait partie aujourd’hui, de là où il se
trouve...
Mais aussi tous ces amis qui ont touché ma vie d’une
façon si profonde et si importante, qu’ils ont et gar­
deront une place toute particulière dans mon cœur
reconnaissant.
Ceux qui ont partagé avec moi leur connaissance,
leur savoir, leur sagesse, et qui m’ont toujours trans­
mis leur vérité. Ceux qui ont enduré mes faiblesses, et
qui, malgré tout, ont vu en moi ce que j’avais de meil­
leur. Parmi eux, je citerai Didier van Cauwelaert pour
tout ce qu’il m'apporte ainsi que sa délicieuse épouse
Françoise, dont le talent et l’humour m’enchantent à
chaque fois. Mais également, ma si précieuse amie
Anouk Papadiamandis, Bérengère, Sofie, Sandrine,
Pierre-Marie Oum Sack, avec une mention spéciale
pour le docteur Jean-Jacques Charbonier qui m’a fait
l’amitié d’écrire la préface de ce livre.
Et bien sûr mes éditeurs qui ont cru les premiers
en moi dans cette aventure. Claudia et Guy Trédaniel
que j’aime pour leur écoute et la chaleur de leur
accueil, et Cathy Selena, pour sa délicatesse et son
professionnalisme.
Mais aussi, ma raison de vivre, mon socle : mes
enfants, directs ou indirects...
Pierre, Pauline et Emmanuel.
Garance et Barthélémy.
Pauline jolie et Pierre-Antoine.
Et les rois de ma vie aujourd’hui, Estéban et Rachel,
mes petits-enfants. J ’ai enfin une pensée très tendre
pour Elliott et Gabrielle. Ils sont eux aussi dans mon
cœur, qu’ils le sachent.
Et pour terminer, je voudrais remercier chaleureuse­
ment tous ces gens merveilleux, humbles et aimants que
REnERCIEÎlENTS

je n ’ai jamais ou rarement rencontrés et qui pourtant


me témoignent une tendresse et une fidélité qui me
bouleverse, pour l’encouragement extraordinaire que
leurs courriers provoquent en moi et qui renforcent ma
détermination à poursuivre mon chemin...
Vous tous, soyez remerciés, et sachez que je vous
aime pour toujours.

Et pour terminer, je voudrais citer deux phrases qui


guident ma vie aujourd’hui. Elles sont tout particulière­
ment destinées à E. G., qui se reconnaîtra:
«Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas
qu’on te fasse.», et: «Aime et fais ce qu’il te plaît.»,
Saint Augustin.

GENEVIEVE DELPECH

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