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APPROCHE SPIRITUELLE DE LA PEUR

PEUR DE QUOI ? PEUR DE QUI ? Q U I A PEUR ?


APPROCHE
SPIRITUELLE
DE LA PEUR

PEUR DE QUOI ?
PEUR DE QUI ? QUI A PEUR ?

Michel Sokoloff
Bernard Mirande
Samuel Djian
Robert Faure
Dr. Jean-Marc Mantel
Lama Denys Teundroup
Dr. Bernard Pernel

avec la participation de Frédéric Mantel

EDITIONS DIAMANTEL
Collection Spiramed

Recueil de textes des rencontres de


l'Association Internationale de Psychiatrie
Spirituelle, créée pour favoriser l'intégration
de la dimension spirituelle en médecine,
psychologie et psychiatrie.

Dans la même collection:

Psychothérapie et réalisation spirituelle


Brigitte Kashtan, Pierre Weil, Ferdinand Wulliemier
Martine Quentric-Séguy, Sylvia Ostertag,
Jan Foundraine, Douglas Harding, Peter Fenner,
Jean-Marc Mantel,
avec la participation deJacques Donnars.

© Editions Diamantel 2000


BP 29 - 13390 Auriol - France
ISBN: 2-912677-14-9
Imprimé en Italie
La peur a ceci de particulier, qu'elle est
stimulée par le refus et se résorbe dans
l'acceptation. Créée par le mental, elle ne
peut être résolue par le mental.
Indissociable du moi et de la croyance en la
réalité d'un territoire à défendre, la peur est
étroitement liée au sens de séparation. Sur
un plan ultime, se libérer de la peur signifie
se libérer du moi.
Cet ouvrage extrait d'une rencontre
organisée par l'Association Internationale
de Psychiatrie spirituelle, présente la peur
sous des approches diverses qui ont toutes
la particularité d'intégrer la dimension
verticale, globale et spirituelle.
Nous remercions chaleureusement tous
les auteurs qui ont accepté de partager ici
leur expérience, tous les généreux
bénévoles qui ont c o n t r i b u é à la
préparation de l'ouvrage, et les éditions
Diamantel qui continuent à soutenir et
encourager les projets de l'association
Essence. A tous, nous souhaitons une vie
sans peur, libre et consciente.
Dr. Jean-Marc Mantel
Il n'y a que deux émotions : l'amour et la
peur. L'amour et la peur ne peuvent pas
coexister.L'une engendre ouverture et
acceptation, l'autre fermeture et refus.
Refus d'amour, refus de reconnaître ce que
nous sommes.
Au plus profond de notre être, nous
sommes amour. Et comme nous sommes
amour, la peur ne peut être qu'illusion. La
peur n'existe pas essentiellement. Elle va et
vient, semblable aux nuages qui
apparaissent et disparaissent sur un ciel
immaculé. Tout ce qui va et vient dans le
monde des manifestations n'a aucune
réalité véritable. C'est notre mental qui
donne existence et réalité à la peur et ses
multiples facettes, en s'y accrochant, en la
nourrissant.
Le ciel s'accroche-t'il aux nuages? Il se sait
immaculé, intouchable, inchangeable.
Soyons comme le ciel. Laissons passer les
nuages de l'illusion pour réaliser notre
nature véritable sans peur: Notre Divinité
qui est Amour.
Marion Mantel
PROLOGUE

Michel Sokoloff

uand nous nous interrogeons sur la


c o n d i t i o n humaine il est souvent
Q question de l'enfance, un paradis pour
les uns et un enfer pour les autres. Quoi
qu'il en soit nous sommes paraît-il devenus
des adultes en prenant corps dans l'espace
et le temps social. Parfois je retrouve le
goût de l'enfant en devenir caché sous la
cendre. C'est comme une braise ardente qui
m'enflamme, donnant sens au mystère que
je suis à moi-même. Il m'est impossible de
formuler avec des mots cet état paradoxal
qui m'abstrait parfois du temps et de
l'espace social pour me plonger dans un
ailleurs que j'ai fini par appeler le pays de
l'émerveillement. Un autre regard un autre
ressenti.
Ce n'est plus seulement du sens dont il
s'agit mais d'une corporalité affective qui
anime ce sens. Le monde extérieur n'a pas
changé; mon humeur a changé. Tout
mouvement, toute action, tout rapport
avec l'environnement devient familier et
amical. La peur a disparu. J'ai fini par me
demander si ce n'était pas Dieu qui avait
peur de cette création. Peur de cette
nécessité que nous avons de tuer toujours,
même une carotte, pour pouvoir exister,
peur de tuer des animaux, peur d'être tués
nous-mêmes. Loi fondamentale qui pose le
problème de la création dont bien entendu
je n'ai pas résolu l'énigme. Mais il m'arrive
de pouvoir en goûter le goût quand je suis
dans ce pays de l'émerveillement.
Derrière la peur il y a l'incapacité d'agir, de
donner une réponse immédiate à un danger
qui surgit en nous ou autour de nous. La
peur empêche de vivre car elle empêche de
mourir. Je pense qu'en Inde on appelle cela
la fin de l'ego. Certaines personnes restent
toute leur vie au bord de l'eau, au bord de
l'amour, au bord de soi, dans l'incapacité
d'aller à la découverte de l'inconnu, de
l'autre, de cette partie invisible de soi que
certains appellent Dieu ou l'inconscient, ou
l'universel. La peur nous fige. Il n'y a plus
de réponse juste. Il n'y a même pas de
réponse du tout à la situation qui a surgi
dans notre vie. Certes, tout franchissement
des limites sert sa part d'émerveillement.
Mais pour certains le risque à prendre est
trop grand.
Ce qui se passe actuellement est plus
grand que la découverte du feu, nous allons
connaître le temps électronique ! Nous
allons recevoir de nous-mêmes et des autres
des images qui circulent à la vitesse de la
lumière et il n'y aura pas l'espace que nous
connaissons. Nous aurons juste un petit
écran dans lequel le virtuel va prendre la
place du réel e s c a m o t a n t le temps et
l'espace de notre réalité quotidienne.
Je m'interroge par r a p p o r t au mot
"spirituel". Je ne suis pas psychiatre et je
vais donc vous poser deux questions :
Quel est le sens donné en psychiatrie au
mot "spirituel" ?
Et quelle est cette corporalité affective et
sensorielle qui l'anime ?
Christian Bobin, dans son livre sur Saint
François d'Assise, raconte qu'il y a un âne
dans la vie de Saint François d'Assise. Il dort
quand François dort, il mange quand
François mange. Il prie avec lui, il ne le
quitte jamais, il l'accompagne du premier
au dernier jour de sa vie.
C'est son corps, le corps de François
d'Assise. C'est ainsi qu'il l'appelle, "mon
frère l'âne". C'est une manière de s'en
détacher mais sans le rejeter, car c'est avec
ce compagnon qu'il faut aller au ciel, avec
cette chair impatiente et ses désirs
encombrants. Pas d'autre accès aux
sommets éternels que par cette voie-là,
escarpée, caillouteuse, un vrai chemin de
mulet.
Voyez-vous ce que je veux dire ? Un vrai
c h e m i n de m u l e t . Et n o u s s o m m e s ce
pauvre âne, malfoutu, sac d'os, toujours un
peu abîmé aux oreilles. Cela me rappelle
une histoire dans la Bible, dans le livre de
Tobie, où à la fin, quand ils arrivent en terre
de Nohab, le roi de Nohab a très peur des
Israélites parce qu'il c o n n a î t le livre du
passé, et il se d e m a n d e quelle révolution
vont faire ces êtres étranges appelés des...,
je ne sais pas c o m m e n t on les appelait à
l ' é p o q u e , p e u t - ê t r e des J u i f s o u des
I s r a é l i t e s . Il va t r o u v e r le m a g i c i e n de
Balâam qui a le pouvoir de retenir la foudre
et de la faire parler par sa voix pour qu'il les
maudisse. Balâam au début dit non, et puis
comme tous les gens qui se sont dits "oh!
après tout je vais quand même le faire", il
dit "je vais aller voir". Et quand on dit "je
vais aller voir" c'est q u ' o n a déjà décidé
qu'on allait le faire. Il part sur son âne et
t o u t d'un c o u p , l'âne voit d e v a n t lui un
ange avec une épée qui lui dit. "Stop !" Alors
l'âne change de direction, il va à travers
champs. De nouveau, l'ange est là: stop !
Alors, comme l'âne voit qu'il y a un peu de
place entre les deux murs, il se glisse entre
les deux murs et là, évidemment, Balâam
s'écorche un peu les genoux en passant. La
troisième fois l'âne voit l'ange qui tient
toute la route entre les deux murs. Comme
dirait l'autre, si c'était Coluche, vous voyez
de quoi je parle? Là, l'âne en a marre. Il se
couche. Alors Balâam, qui ne voit toujours
rien, lui, Balâam parle avec l'âne qui lui dit :
il y a un ange qui est là, je ne peux pas
passer. Et là Balâam renonce.
Moi, ce qui me touche dans cette histoire,
c'est qu'un âne voit plus de choses que
nous. Même si nous sommes très
intelligents, si nous croyons avoir tout
compris, il est possible que le moindre brin
d'herbe, comme pour Saint François
d'Assise, ou la moindre rencontre, avec un
caillou même, ait plus d'importance que
tous les discours que l'on peut entendre de
gens qui semblent être très intelligents ou
très instruits. Votre gourou sera peut-être
cette pierre que vous avez rencontrée sur le
chemin, même si elle vous a fait chuter.
Saint François d'Assise a réussi sa thérapie
et l'exorcisme de sa peur; il s'est identifié
non pas au très haut mais au très bas ; dans
le moindre brin d'herbe qui frissonne, dans
le v e n t qui le caresse, dans le c h a n t des
oiseaux qui volent, dans le m u r m u r e de
l'eau. Il a incarné l'essentiel, le lieu où le
sens et les sens deviennent l'essentiel.

Nous avons chacun notre manière


d ' e x o r c i s e r n o t r e p e u r et cela p e u t être
extrêmement différent pour chacun.
Certains anorexiques mystiques arrivent à
ne p l u s m a n g e r d u r a n t des a n n é e s e n
r e s t a n t en p l e i n e santé. M a i n t e n a n t , la
m o d e est a u x p s y c h o t r o p e s , aux
a n x i o l y t i q u e s . Il y a a u s s i la r e l a t i o n
affective ou t h é r a p e u t i q u e , la science, la
recherche, l'amour, les jeux de rôle, le sexe,
les religions, les idéologies, la philosophie.
Depuis l'origine des temps, chacun essaye
d'exorciser sa p e u r de la m o r t selon ses
m o y e n s , m a i s p a s t o u j o u r s s e l o n ses
besoins.
REVE, PEUR, KARMA
ET THÉRAPIE SPIRITUELLE

Bernard M i r a n d e

'ai choisi ce sujet parce que le rêve est


m o n d o m a i n e de t r a v a i l , mais aussi
J p a r c e q u e d a n s le g r a n d n o m b r e de
thérapies spirituelles qui existent à l'heure
actuelle ou dans le travail analytique de
psychanalyse, l'étude des rêves est souvent
négligée
En psychologie on mentionne très peu le
rêve. Les psychanalystes d'orientation
traditionnelle n'interprètent pas les rêves.
Ils demandent à leurs clients de leur parler
de leurs rêves, de leur dire ce que cela veut
dire. Comment ceux-ci peuvent-ils le faire
puisqu'ils n'ont pas appris à interpréter les
rêves et que les analystes ne leur en disent
rien ?

Dans le domaine mystique, nous


trouvons beaucoup de livres qui sont la
plupart du temps des clés des songes, assez
pauvres. Cette vision du rêve un peu
simpliste donne quelques éléments sur le
plan divinatoire mais elle n'a pas du tout
cette approche extraordinaire qui peut
nous amener à une plus grande conscience.
Le rêve est une des voies pour atteindre la
conscience cosmique.
C'est pour cela que le rêve est délaissé. Il
engendre deux peurs : la première est celle
d'aller voir son ombre, la deuxième celle
d'aller voir sa lumière. Ceux qui ont une
orientation spirituelle ont souvent peur
d'aller voir leur ombre, et ceux qui ont une
orientation psychanalytique ont souvent
peur d'aller voir leur lumière. Donc le rêve
est dérangeant. Il est révolutionnaire. C'est
pour cela que l'onirologie sera peut-être la
dernière science humaine qui fleurira.

Tout ce qui apparaît dans les rêves, c'est


nous-mêmes. Tout ! Un véhicule, un objet,
un animal, un personnage, un paysage, un
chiffre, une couleur, une sensation. Tout
nous représente. Notre père, notre mère,
nos frères et soeurs, notre mari, ou notre
femme ou nos enfants, nos amis, sont une
partie de nous-mêmes. Et c'est dérangeant
de se dire: mais là, ce personnage qui a vécu
telle action dans le rêve, c'est moi ? Nous
commençons par dire: non ! Ce n'est pas la
bonne interprétation! Ce rêve correspond à
ce que j'ai vécu dans la journée ! Je rêve
exactement ce que j'ai vécu dans la journée
et ce que m'a dit telle personne. Donc ce
n'est pas moi.

Pourtant, le fait de sélectionner ce qui


s'est passé dans votre journée et d'en rêver,
prouve que cela vous représente quelque
part ; cela fait écho en vous. C'est pourquoi
il faut se rappeler tout ce qui apparaît dans
les rêves. Tout, absolument tout ce qui
apparaît dans le rêve, c'est soi-même. Si
vous voyez un monstre, il est une partie de
votre ombre, une imperfection, ou une
épreuve à surmonter. Et cela fait peur. Si
vous voyez un sage, un maître, ou un ange,
c'est aussi une partie de vous-même et cela
aussi fait peur. Pourquoi ? Parce qu'une fois
que nous avons développé une vertu,
comment arriver à ne plus nous adonner à
nos défauts habituels ?
Se surprendre dans le quotidien avec son
ombre est extrêmement dérangeant. Il est
difficile de se mettre en quête de sa
lumière.

Si l'analyse des rêves présente un tel


intérêt, c'est parce qu'elle nous renvoie à
tous les sujets possibles. Il n'y a pas
d'interdit. Tous les thèmes apparaissent
dans les rêves. Par conséquent, nous allons
être bousculés dans toutes nos certitudes,
en même temps que nous allons les élargir.
Notre idéologie va être bousculée. Le rêve
r e n v o i e t o u j o u r s à q u e l q u e chose de
nouveau, à quelque chose que nous n'avons
encore jamais osé nous dire.

Ce qui a p p a r a î t d a n s les rêves n o u s


conduit à différentes interprétations
possibles. Il y a plusieurs clés. Nous n'avons
jamais fini d ' i n t e r p r é t e r un rêve. Si nous
relisons notre rêve, quelques semaines ou
q u e l q u e s a n n é e s plus t a r d , n o u s a l l o n s
trouver d'autres indications qui a p p o r t e n t
un autre éclairage. Le rêve nous amène à
tous les possibles.
Ce qu'il faut savoir aussi, c'est que tous
les r ê v e s f o r m e n t u n e s e u l e et m ê m e
h i s t o i r e . En é c r i v a n t n o s r ê v e s , n o u s
écrivons notre histoire, notre quête
i n t é r i e u r e . N o u s en s o m m e s l'auteur, et
nous p o u v o n s suivre pas à pas n o t r e
évolution, notre progrès de rêve en rêve.
"Vous êtes le héros de votre quête". Il y a
un m o m e n t où il faut arriver à cela, pour
tendre vers une réalisation ; la connaissance
du rêve en est l'un des moyens privilégiés.
C'est un fil d'Ariane extraordinaire. Il est,
c o m m e la m é d i t a t i o n , u n e a p p r o c h e
essentielle p o u r celui qui recherche une
évolution psychologique et spirituelle.
Et m ê m e si l ' u n des a v a n t a g e s de la
méditation réside dans le fait que, dans un
premier temps, nous pouvons imaginer tout
ce que nous voulons (c'est intéressant sur
un plan psychologique), sur le plan de la
progression de nos méditations, nous ne
t r o u v e r o n s pas a u t a n t de détails précis
qu'avec le rêve.
Tous les rêves d'une même nuit forment une
s e u l e et m ê m e h i s t o i r e . M a i s p o u r
interpréter les rêves, il faudrait connaître
un g r a n d n o m b r e de s i g n i f i c a t i o n s
symboliques. Cela demande une recherche
élargie et de ne pas s'arrêter à une seule
interprétation.
J'ai parlé de la peur de rencontrer, à travers
ses rêves, son ombre et sa lumière, celle de
r e n c o n t r e r d ' a u t r e s idéologies, d'autres
religions ou d'autres philosophies, mais si
nous cherchons à aller plus loin, le rêve va
nous amener devant ce que nous ignorions
jusqu'alors et ne voulions pas savoir. Il va
nous dire : "tu n'as jamais voulu savoir cela,
et bien je vais te le dire maintenant".

D'où vient ce rêve? De l'inconscient.


Mais au c œ u r de cet i n c o n s c i e n t , il y a
n o t r e s u p r a c o n s c i e n c e . Tous les rêves
viennent de notre divinité intérieure. Alors
le t r a v a i l sur les r ê v e s n o u s p o u s s e à
t r a v a i l l e r s u r t o u t ce q u i p e u t f a i r e
progresser cette conscience, pour atteindre
progressivement une conscience cosmique.
La p e u r p r i n c i p a l e , q u e n o u s p o u v o n s
retrouver dans le domaine psychanalytique,
ou dans d ' a u t r e s t h é r a p i e s , sur laquelle
repose toute la psychanalyse, est le déni de
la c a s t r a t i o n . C ' e s t - à - d i r e le refus de la
castration ; donc celui de mourir. Tout ce
que nous faisons dans notre vie, c'est pour
combler la vie afin de ne pas penser à la
mort. Donner une conférence, écouter une
conférence, peut être aussi quelque part un
déni de la castration. Nous occupons notre
temps à faire quelque chose p o u r ne pas
nous poser les q u e s t i o n s essentielles qui
sont : d'où venons-nous ? Qu'ai-je à faire
maintenant ? Et où allons-nous ? Jusqu'au
j o u r où n o u s p o u r r o n s t r a n s c e n d e r le
temps, nous avons à travailler sur cet aspect
spatio-temporel.

Le travail du rêve va nous pousser à


r e n c o n t r e r une histoire intérieure, notre
histoire, qui nous c o n d u i t à nous poser
toutes les questions. N o u s p o u v o n s par
exemple nous poser des questions avant de
nous endormir pour avoir un rêve sur tel ou
tel sujet, ce qui nous entraîne également à
repousser tous les interdits. Nous pouvons
aussi é t u d i e r dans le rêve les différents
systèmes liés à la peur. Par exemple, pour
un psychothérapeute ou un analyste, le fait
q u e s o n c l i e n t v i e n n e sans rêve à u n e
séance, signifie qu'il y a c e n s u r e , d o n c
r e f o u l e m e n t de q u e l q u e c h o s e d a n s
l ' i n c o n s c i e n t . Et ce qui est i n t é r e s s a n t
provient du fait que le premier rêve qui va
suivre, va nous expliquer pourquoi il y avait
eu censure.
La peur est aussi liée aux mécanismes de
défenses, mis en place pour se protéger, vis
à vis de toutes ces peurs. Le mécanisme de
défense est également un révélateur. Il ne
fait pas que cacher. Il révèle ce pourquoi
nous cachons les choses, ce pourquoi nous
avons peur. Donc il est très intéressant pour
un t h é r a p e u t e de travailler sur ces
mécanismes de défense parce que cela va lui
permettre d'une part, de savoir ce qu'il ne
faut pas dire, et de l'autre, de savoir ce qu'il
faut dire. Cela va aussi l'aider à comprendre
comment dire les choses à propos du rêve
qui a été donné. Dans le travail du rêve,
nous allons donner certaines interprétations
qui peuvent être entendues par la personne,
et nous allons en taire d'autres et attendre
de pouvoir les dire, parfois durant des
années. Mais quelques fois nous sommes
rappelés à l'ordre, parce que la personne va
nous apporter un rêve pour nous dire : tiens
tu ne m'a pas parlé de cela !

Dans la succession des rêves, nous


voyons apparaître tous ces mécanismes de
défense. Le symbole est déjà un mécanisme
de défense, un révélateur, un langage du
rêve. N o t r e santé, n o t r e vie amoureuse,
notre vie professionnelle, notre enfance,
nos projets vis à vis de l'avenir, tout cela
apparaît dans les rêves. Le mécanisme de
défense nous p e r m e t de nous les révéler
progressivement.

Le rêve est le passage du flou au net, de


l'obscur au lumineux. Si nous notons nos
rêves tous les jours, ce qui était abstrait va
devenir de plus en plus concret. Mais il
faudra associer les rêves les uns aux autres
et savoir que tous les rêves forment une
seule et m ê m e histoire, c o m m e tous les
r ê v e s d ' u n e m ê m e n u i t . D o n c si n o u s
accolons les rêves les uns aux autres nous
p o u r r o n s v o i r c o m m e n t m u t e n t les
symboles. Nous étudions leur
t r a n s m u t a t i o n , car t o u s les s y m b o l e s
é v o l u e n t dans l'inconscient et i n d i q u e n t
notre progression dans tous les domaines.
C'est donc la succession des symboles et
leur progression qui vont rythmer notre
c h e m i n e m e n t initiatique.
Il y a un m o t d o n t je n'ai pas encore
parlé, c'est celui de karma. Beaucoup de
thérapies existent, mais il leur manque
encore une ouverture sur la théorie de la
réincarnation et du karma. Je ne crois pas
que nous puissions faire sans. Si nous
choisissons d'aider à guérir et d'aider les
gens à sortir de leur problématique, il faut
remonter à la cause. Dans la psychanalyse
traditionnelle, nous remontons à la petite
enfance, la prime enfance, voire même la
vie i n t r a - u t é r i n e . Mais il est parfois
nécessaire de remonter aux vies antérieures,
à un traumatisme vécu dans une autre vie
p o u r sortir d'une difficulté. Cette
dimension réincarnationniste et karmique
manque encore à la psychanalyse.
Celle-ci établit les p a r e n t s comme
responsables au départ. C'est-à-dire que
nous sommes le fruit de notre éducation,
conditionnés par le fameux complexe
d'œdipe, la relation au père, la mère, etc....
et nous croyons être nous-mêmes. La
psychanalyse, en renvoyant la responsabilité
sur les parents, fait une erreur.
Heureusement, elle nous met en position
de responsable qui doit transformer ce
conditionnement pour arriver à progresser,
sortir de ses souffrances ou essayer de les
réduire. Mais cela ne suffit pas. Il faudrait
que la psychanalyse aille plus loin, s'ouvre à
cette dimension de vie antérieure. Cela
suppose d'en avoir conscience et nécessite
que les thérapeutes spirituels aient eux-
mêmes déjà expérimenté cette démarche
pour pouvoir l'aborder chez les autres. Le
risque est de se mettre dans une position de
père ou mère et de dire à l'autre : tu as été
ceci ou cela. Ce n'est pas souhaitable car,
premièrement, ce n'est peut-être pas la
vérité, deuxièmement, c'est encore une
façon de déposséder l'autre de sa
responsabilité. Si, au début, cela peut être
une aide, il est important d'arriver à rendre
l'autre autonome. Lorsque des paysages, des
architectures, des ornements ou des
vêtements d'un temps passé, révolu,
apparaissent en rêve, nous pouvons penser
que c'est notre imagination, même si les
rêves sont très précis. Pourtant, si nous
introduisons cette notion de karma, les
interprétations prennent parfois tout leur
sens.
Karma vient de la racine sanscrite "Kri" qui
veut dire "faire". C'est une action. Cela
veut dire que toutes nos actions passées et
présentes, tout ce que nous allons faire va
entraîner notre avenir. Tout ce que nous
avons vécu dans les vies antérieures entraîne
ce que nous vivons à l'heure actuelle, en
négatif ou en positif.
Si nous étudions les rêves dans ce sens-là,
ils vont nous donner ce pourquoi nous
avons tel ennui à l'heure actuelle ou
pourquoi nous avons telle qualité. Les rêves
vont nous le dire dans le détail. Nous allons
nous apercevoir que tout ce que nous
vivons provient de ce que nous avons
effectué dans les vies passées. Et là, une
thérapie devient possible, parce que nous
nous sentons responsables. Tant que nous
ne nous sentons pas responsables, il est
difficile de nous transformer. Si nous nous
disons que nous avons choisi de tels parents
en raison de nos vies antérieures, nous nous
mettons en position de responsables. Bien
sûr, nous pouvons nous dire qu'une maladie
ne vient peut-être pas forcément d'une vie
antérieure, mais d'un vécu de l'enfance.
Mais un accident de la route ? Si nous
sommes dans une voiture dont nous ne
sommes pas le chauffeur, en train de rouler
tranquillement ou de dormir et qu'un
accident survient, nous rendant
paraplégique, cet accident n'est pas
explicable par la psychologie. Nous nous
disons que c'est la destinée, le hasard, que
nous n'en sommes pas responsables. La
seule philosophie qui nous place comme
responsable est celle du karma qui apparaît
dans toutes les grandes traditions mystiques
des religions du monde entier.
C'est un terrain peu défriché par les
thérapeutes, les psychanalystes ou les
psychologues contemporains.
La compréhension de ce que l'on a vécu
dans l'enfance, ou dans une vie antérieure,
n'est pas toujours suffisante pour retrouver
le bien-être ou la guérison. Ainsi, nous
pouvons avoir une maladie assez sévère,
retrouver dans un ou plusieurs rêves la
cause dans une vie antérieure, et ne pas
guérir. Pourquoi ? Parce que parfois, dans
l'inconscient, nous avons encore un
jugement sur les autres. Si nous portons un
jugement agressif sur un sujet, sur un être
ou une chose, nous risquons d'en conserver
des traces, des souffrances dans notre vie de
tous les jours.
Je voudrais ajouter que Dieu est la
connaissance. Si nous voulons atteindre une
plus grande divinité, nous devons tendre à
une plus grande connaissance de nous-
mêmes et cette connaissance passe
obligatoirement, mais pas seulement, par
celle de nos vies antérieures. D'autres
expériences sont également utiles pour
savoir ce que nous avons encore à faire
pour atteindre cette divinité.

Dans le domaine de la psychanalyse,


Freud a beaucoup parlé de l'idéal du moi,
du moi idéal. Lacan a repris cela dans sa
théorie sur le miroir. Mais au niveau du moi
idéal, il s'agit d'un m o n o l o g u e . N o u s
pouvons le vérifier quand nous parlons à
quelqu'un. A certains moments, nous
n'écoutons plus l'autre, nous n'entendons
plus l'autre, nous parlons de nous, nous
oublions l'autre. C'est ce que nous appelons
le narcissisme primaire, le moi, moi, moi.
L'autre n'existe pas, ou n'existe plus. Cela
nous arrive à tous.
Ensuite, nous avons l'idéal du moi, c'est le
narcissisme secondaire ; il consiste dans le
dialogue, reconnaître l'autre, l'autre parle
avec nous, il existe, mais ce qu'il pense est
faux. C'est nous qui détenons la vérité. Ce
que dit l'autre est sa vérité à lui ! Nous,
nous avons une vérité qui est plus juste.
Il est un autre terrain où nous pouvons
vérifier cela, c'est le plan de la religion. Tout
le monde a sa religion et "accepte" la
religion de l'autre, mais, au fond de nous,
nous préférons la nôtre avec ses dogmes
que nous n'avons pas vérifiés. Là, c'est
l'idéal du moi, qui pense détenir la vérité.
Nous avons gagné, nous sommes le plus
grand, le plus beau, le meilleur ! C'est l'idéal
du moi. Le but est d'arriver à se dire : mais,
peut-être y a-t-il chez l'autre une part de
vérité que je ne veux pas entendre. Il faut
nous en souvenir toute notre vie, même si
nous avons terminé et réussi une analyse :
que ce que dit l'autre, qui me dérange et
que je ne veux pas savoir, avec lequel je ne
suis pas d'accord, peut m'apporter des
choses. C'est peut-être lui aussi qui a
raison, et qui détient une part de vérité que
je pourrais intégrer.
Si nous faisons tous les jours cet effort dans
une conversation, ou ailleurs, si nous nous
rappelons cela toute notre vie, nous allons
dépasser notre peur, la peur de sortir de
notre structure psychologique, celle de
rencontrer la vérité de l'autre, parce qu'elle
nous remue. Cela va nous obliger à nous
remettre en cause.

Nous pouvons dire qu'au départ notre


lien à la mère est un lien fusionnel. Pour
nous détacher de la mère, dans un premier
temps, nous entrons dans un mécanisme
d'opposition. Pour arriver à réellement
sortir de ce conditionnement de l'enfance,
il nous faut passer à une individuation.
C'est-à-dire évaluer ce que notre mère nous
a apporté de positif, et de moins positif, et
faire la balance pour déterminer ce qui est à
conserver. Dans l'opposition nous allons
dire : "ma mère s'est trompée et j'ai raison",
mais nous agissons par opposition et non
par individuation. Nous pouvons rester à ce
stade et dire la même chose que notre mère
ou que notre père. Nous faisons ainsi avec
nos parents, notre groupe socio-culturel,
notre groupe de psychothérapie, notre
groupe philosophique.
La fusion est le fait de ne pas être soi-
même, de rester dans le moi. Mais le but
est d'arriver à une unité qui serait une
conscience cosmique. Ce chemin-là est
celui d'une mort-résurrection, qui passe par
une confrontation à la mort nécessaire à la
renaissance. Nous sommes obligés de
mourir à ce que nous étions, de mourir à
notre c o n d i t i o n n e m e n t . Ainsi, nous
sommes confrontés à la difficulté
d'abandonner nos liens avec le passé, et à
celle de rencontrer l'ailleurs, l'étranger, le
grand autre comme l'appelle Lacan, ce que
l'on appelle Dieu dans la mystique. Ce
mouvement de transformation est difficile
à cause de deux peurs, celle de se détacher
de ses idées, de ses origines ou de son moi,
et celle de rencontrer quelque chose de
nouveau. Un autre chemin qui serait plus
facile, plus rapide, est celui de passer de la
fusion à l'unité, par la voie de la joie, de la
métamorphose.

Mais le travail sur le rêve n'est pas


suffisant parce que nous travaillons
endormis et malgré la possibilité d'arriver à
une conscience, un éveil dans le rêve, il est
important d'ajouter à cette dimension-là la
méditation qui va nous pousser à avoir de
grands rêves.
Des exercices de respiration, visualisation,
concentration, contemplation, prière,
d'ascèse ou de jeûne, nous conduisent aussi
plus facilement à de grandes expériences. Si
dans notre cabinet d'analyse nous
rencontrons quelqu'un qui nous dit : "j'ai
parlé à mon ange, ou j'ai parlé à un mort
disparu", ou "on me dit que je dois faire
ceci o u cela", o u "je m e suis d é d o u b l é , je
suis sorti de m o n corps, j'ai eu u n message
c o n c e r n a n t l ' h u m a n i t é " , il f a u t ê t r e soi-
m ê m e passé p a r des e x p é r i e n c e s intérieures
p o u r c o m p r e n d r e cette personne, pour
savoir si, d a n s ce qu'elle dit, il y a u n e p a r t
de délire, o u u n e p a r t de vérité, o u s'il y a
un peu des deux. Un t h é r a p e u t e devrait
travailler à des exercices spirituels p o u r
a v o i r eu u n n o m b r e suffisant d ' e x p é r i e n c e s
p o u r p o u v o i r c o m p r e n d r e celle des autres.
C ' e s t ce q u e p e u t a p p o r t e r la t h é r a p i e
s p i r i t u e l l e , p a r le b i a i s d u r ê v e et d e la
m é d i t a t i o n , la c o n n a i s s a n c e des s y m b o l e s
qui va n o u s p e r m e t t r e d ' i n t e r p r é t e r , de
savoir ce qui n o u s arrive, la connaissance de
la p s y c h a n a l y s e , d e s d i f f é r e n t e s t h é o r i e s
p s y c h a n a l y t i q u e s , et celle aussi des
différentes approches métaphysiques.

Pour terminer par une approche


m é t a p h y s i q u e d e l ' Ê t r e , je c i t e r a i u n e
p h r a s e de F r a n ç o i s Brousse qui est d o n n é e
d a n s ses "Pensées divines", d u B u l l e t i n d u
M a î t r e Polaire :
La peur irradie un pouvoir attractif. Ce
que l'on redoute au fond du cœur tend à se
réaliser. Cherchez ce que vous r e d o u t e z
d a n s le s e c r e t de v o t r e Ê t r e , c h i m è r e
g r i m a ç a n t e , la c r a i n t e se m a t é r i a l i s e
lentement à travers les événements effarés.
C o m m e n t éviter la catastrophe ressentie?
Le meilleur scalpel est l' e s p r i t
c o n t e m p l a t e u r d a n s sa sérénité. Il f a u t
regarder a t t e n t i v e m e n t le m o n s t r e , sans
h a i n e et sans amour, c o m m e u n e i m a g e
étrangère. Il faut en découvrir les racines,
t a n t conscientes qu'inconscientes, dans la
l u m i è r e et le c r é p u s c u l e q u i l u i - m ê m e
devient lumière. Q u a n d le jour se lève les
fantômes disparaissent.

C'est une a p p r o c h e intéressante de la


p e u r q u i n o u s d i t q u e si n o u s r e s t o n s
agrippés à notre peur nous finirons par faire
venir dans la réalité ce qui nous fait peur.
P o u r é v i t e r cela, il f a u t c o n t e m p l e r la
divinité, la beauté, l'amour, la sagesse.
J'ajouterai que l'esprit étant i m m o r t e l , la
peur est aussi une maya, une illusion.
La peur du changement, la peur de la perte,
la peur de sortir des protections, la peur de
connaître ses imperfections, la peur d'avoir
à faire de nouveaux efforts, sont les pires
freins de l'évolution.
La souffrance peut être d'ordre physique,
affectif, moral ou métaphysique. François
Brousse, dans "Les visiteurs des millénaires"
nous dit encore :

Nous pouvons repousser la peur de


l'espace en découvrant l'infinité, la peur du
temps en découvrant l'éternité, la peur du
déterminisme en découvrant le libre arbitre
et la peur de la souffrance en découvrant le
bonheur et la sérénité.
Il faut avoir fait un long chemin pour
arriver à sortir du temps, de l'espace, de la
souffrance et du déterminisme. Vaste
programme que nous devons réaliser sur
terre, pour nous réaliser.
PEUR ET PSYCHO-ASTROLOGIE

Samuel Djian

vant de vous parler de Leela, le jeu que


j'ai traduit, je voudrais vous situer la
nature de mon travail. Je suis avant tout
astrologue et travaille depuis vingt ans avec
des thérapeutes, des psychologues et des
p s y c h o t h é r a p e u t e s de t e n d a n c e s et
d'obédiences différentes. Je suis
universitaire de formation, diplômé de
sciences politiques, licencié en droit et en
psychologie. Lorsque j'ai d é c o u v e r t
l'astrologie, j'ai eu la réponse, l'outil qui
répondait à mes besoins. L'astrologie nous
permet de voir avec précision qui nous
sommes, ce que nous sommes, vers où nous
allons, en tout cas vers où nous pouvons
aller.

Ce que nous voyons dans un thème ce


sont précisément nos peurs. Nous y voyons
inscrit le thème de notre naissance,
c'est-à-dire la configuration des astres à ce
moment-là. Ainsi se révèle à nous ce qui
vient du passé d'une part, et tout ce qui
nous permet d'aller vers notre devenir
d'autre part. Cela est l'outil que nous avons
en mains. Comme nous nous réincarnons, il
s'agit de savoir qui se réincarne, et quoi...
Nous avons sous les yeux une photographie
de nous-mêmes au moment de la naissance,
i n d i q u a n t certains aspects, certaines
positions planétaires dans le thème natal
qui nous confèrent des facilités, ce que
nous appelons des acquis, pour accomplir
notre devenir. Nous voyons, et c'est cela
qui nous intéresse aujourd'hui, d'autres
aspects qui nous révèlent des blocages, des
limitations, des freins, donc des peurs. Ces
p e u r s s o n t i n s c r i t e s é g a l e m e n t d a n s ce
processus astrologique. C'est pourquoi cela
va de pair avec le travail p s y c h o l o g i q u e
psychanalytique, thérapeutique.
Le but de tout cela, est de nous permettre
de voir le c h e m i n e m e n t qui est le n ô t r e
dans une vie d o n n é e p o u r a t t e i n d r e une
certaine forme de réalisation. Nous partons
d'un état d'être, inscrit au départ, et il nous
est proposé d'aller vers un autre état d'être,
que nous pouvons refuser, éventuellement,
et q u e n o u s p o u r r i o n s a p p e l e r l ' u n i t é .
C'est-à-dire que nous nous incarnons dans
la multiplicité, dans la dualité. Tout notre
chemin d'incarnation à travers ces blocages,
ces facilités, nous permet d'atteindre cette
unité que nous pourrions appeler l'âme, ou
le soi, ou encore pour reprendre les termes
de Dürkheim, l'Etre Essentiel.
Ce que n o u s p e r c e v o n s au d é p a r t , c'est
l ' ê t r e e x i s t e n t i e l , la f o r m e , q u e n o u s
p o u r r i o n s a p p e l e r aussi d a n s u n a u t r e
l a n g a g e , la p e r s o n n a l i t é .
Le but de l'incarnation est de nous faire
grandir pour nous approcher de plus en
plus de cette lumière intérieure, la lumière
de l'âme.
L'astrologie, ou d'autres outils du même
ordre, dont la méditation, nous permet de
comprendre les grands moments de notre
existence dans ce chemin du retour vers ce
q u ' o n p o u r r a i t appeler la conscience
cosmique. Il ne s'agit donc plus ici d'une
astrologie déterministe ou événementielle,
mais d'une astrologie qui s'intéresse au sens
caché symbolique de notre incarnation. De
ce point de vue, cela rejoint le travail
thérapeutique. Que va chercher le
psychothérapeute quand il travaille avec
l'astrologie ? Il va chercher les blocages, les
freins.
L'un des maîtres d'astrologie avec lequel
j'ai travaillé, et dont j'ai traduit deux
ouvrages, s'appelle Dane Rudhyar. Il a écrit
"Approche astrologique des complexes
psychologiques" et "Astrologie et psyché
moderne". Ces titres sont révélateurs de
l'étroitesse des liens entre l'astrologie et la
psychologie.
En d é t e r m i n a n t les blocages, les
difficultés, les états de peur et d'angoisse
qui sont inscrits dans les carrés et les
oppositions - pour ceux qui connaissent un
peu l'astrologie - nous allons essayer
d'aider la personne, mais aussi soi-même,
parce qu'en étudiant les thèmes des autres
personnes, nous étudions aussi notre propre
thème.
C'est un chemin de connaissance qui va
nous aider à comprendre comment libérer
ce qui est bloqué et à aller vers l'âme, vers
l'unité, vers la Conscience, vers le Soi. C'est
donc le chemin du retour et des grands
événements de notre vie qui sont inscrits
dans le thème, ainsi que les principales
étapes de notre t r a n s f o r m a t i o n , de la
libération de nos peurs, de nos angoisses
grâce à nos facilités acquises ou innées.
Cela nous permet de comprendre, à un
moment donné de notre vie, où nous en
sommes dans ce travail de libération. Nous
avons le choix d'accepter ou de refuser.
Plus nous sommes dans l'existentiel, plus
nous subissons, évidemment. Tout
thérapeute sait cela. Plus nous avançons
dans la Conscience, plus nous nous libérons
et effectivement, plus nous arrivons à
mieux cerner le sens caché des événements
de notre vie. Mais ces événements ne nous
arrivent pas par hasard. Nous pourrions
discuter sur le fait de savoir si cela vient du
passé, et de quel passé, mais cela n'est pas
vraiment important.
Cette astrologie, dite transpersonnelle,
regroupe aussi d'autres approches comme
la psychologie transpersonnelle et
particulièrement la psychosynthèse de
Roberto Assaggioli, celle de Stanislas Grof
ou de Richard Moss. Nous avons à notre
disposition un certain nombre d'outils,
comme les transits, les progressions, les
révolutions solaires... qui nous permettent
de voir quels défis à la transformation nous
sont proposés à un moment donné. Et
quand nous sommes face à ce défi,
évidement nous avons des facilités. Il y a
par exemple des moments de plénitude,
d'accomplissement, de réalisation qui sont
liés à des aspects de Jupiter. Mais quand
nous sommes face à des défis, tout d'un
coup tout peut s'écrouler autour de nous,
par exemple à travers le transit de Pluton.
Pour ceux qui ne connaissent pas
l'astrologie, le transit est le passage d'une
planète dans le ciel à un moment donné, à
un endroit où nous avons une planète
natale. Les planètes sont des énergies. Il y a
donc une transformation énergétique qui se
fait. Qu'allons-nous r é p o n d r e à cela ?
Allons-nous subir toute cette destruction ?
Nous pouvons avoir des problèmes
professionnels, affectifs, tout d'un coup
quelque chose peut brusquement se casser
dans notre vie de couple ; nous pourrions
l'analyser sous différents angles, comme le
ferait Jacques Salomé par exemple, mais
nous pourrions aussi nous dire que ce qui
nous intéresse est la cause. C'est-à-dire qu'à
un moment donné de notre évolution vers
cette Conscience, vers cette âme, ce retour
à l'âme, à cette divinité intérieure, à cet être
essentiel, le temps est venu de nous libérer.
L'univers nous le demande, notre âme nous
demande de faire un pas en avant. En
c o n s u l t a t i o n d ' a s t r o l o g i e , avec ou sans
thérapeute, nous comprenons pourquoi
n o u s s o m m e s en t r a i n de v i v r e c e t
événement. Pourquoi il nous est demandé
de n o u s s é p a r e r de la f e m m e ou de
l'homme que nous aimons. Pourquoi tout
d'un coup nous perdons notre travail, nous
nous retrouvons au chômage. Ce sont des
p h é n o m è n e s existentiels. Qu'est-ce qui
nous pousse à nous dépasser à ce moment-
là ? Si nous perdons quelque chose sur un
p l a n , n o u s a - t - i l é t é d i t p a r les
Enseignements, c'est p o u r gagner sur un
autre plan de conscience. C'est pour cela
que l o r s q u ' o n regarde un t h è m e
a s t r o l o g i q u e , on r e g a r d e d ' a b o r d où se
t r o u v e la Lune p l u t ô t que le Soleil. La
Lune va représenter le passé, ce qui vient de
la m è r e , du p è r e , é v e n t u e l l e m e n t , elle
représente notre personnalité existentielle.
N o u s sommes à la fois dans un système
géocentrique et un système héliocentrique.
Le Soleil lui, du fait qu'il est au centre du
système solaire, va représenter la lumière de
l'Être essentiel. C'est une étincelle, la porte
vers le Soi ou vers l'âme, il représente cette
l u m i è r e - l à . Q u a n d je dis "je vais m e
recentrer", nous, astrologues, nous
traduisons, je vais vers m o n Soleil.

Je vais p r e n d r e juste un petit exemple


personnel parce que je le connais bien et
que je l'ai beaucoup vécu. Je suis quelqu'un
au départ e x t r ê m e m e n t Poissons, c'est-à-
dire fusionnel, affectif, avec t o u t ce que
cela peut comporter au niveau émotionnel
de sensibilité, mais aussi - car il y a de
bonnes choses dans ce signe - d'intuition,
de p e r c e p t i o n s a u - d e l à des a p p a r e n c e s .
T o u j o u r s est-il que cela me p o s e des
problèmes évidents, parce que la Lune en
Poissons, c'est comme un p o t de colle au
n i v e a u de la f u s i o n , c e l a a m è n e u n e
confusion. Mais, par ailleurs, là où est la
souffrance, là est la peur de se libérer de la
fusion. Dans le thème, les peurs se voient
bien. Mais j'ai le Soleil en Verseau, ce qui
est presque antinomique. C'est-à-dire que
m o n discours est celui de l'indépendance,
voire d'interdépendance, égalité,
fraternité... M o n idéal est le Soleil.
Tout ce qui concerne le Verseau est très
m a r q u é p a r le b e s o i n d ' a u t o n o m i e et
d'indépendance ; l'idéal du Soi est celui du
Soleil, mais l ' i d é a l du p e t i t moi est la
Lune... p o u r aller vers le grand Moi, le
Soleil ou le Soi.
Au début, avant de faire le chemin à travers
les d i f f é r e n t s é v é n e m e n t s de ma vie, je
tenais un discours, Soleil-Verseau, parce que
c'est ce qui me pousse à être, à m'expliquer,
mais ce n'était pas ce que je vivais dans la
réalité. Dans mon couple, je disais "nous
devons être indépendants, autonomes", et
la sociéte disait "voilà quelqu'un qui est en
avance sur son temps". Quelque part c'était
vrai, mais quand il s'agissait de vivre dans
l'existentiel, la Lune se manifestait, c'est-à-
dire l'horizontalité. Malgré m o n idéal de
v e r t i c a l i t é , la f u s i o n r e p r e n a i t et mes
proches me disaient : "mais, tu m'as berné !
tu m'as trompé ! tu m'as tenu un discours
d'autonomie, d'indépendance et voilà que
tu m ' e n f e r m e s dans q u e l q u e chose". Je
caricature un peu mais ce n'est pas loin de
la vérité.

Ainsi, on retrouve en psychanalyse, en


psychologie, le but de se libérer de cet état
fusionnel, pour pouvoir s'aligner dans cette
verticalité ; le but est donc l'alignement de
la personnalité sur l'âme. Evidemment, il y
a tout un travail à faire au niveau de la
personnalité, travail de purification,
dirait-on dans le Yoga Sutra de Patanjali,
travail de libération, d'affinement, pour
pouvoir, par décodages successifs en
astrologie, nous aligner. Notamment par le
passage à travers Saturne, pour ceux qui
connaissent, l'outil principal de karma.
Saturne représente aussi la socioculture.
C'est dans un premier temps le Surmoi.
Mais la t r a n s m u t a t i o n de ce qu'il
représente dans notre thème, cette énergie,
peut nous amener à la conscience du
Dharma. C'est le chemin qui nous permet
de grandir. A un certain niveau de la réalité
existentielle, on a besoin de l'astrologie
pour faire ce travail de décodage karmique,
de décodage de l'être inférieur, pour lui
permettre de se manifester vers l'Etre
supérieur.
C'est pour cela que, chemin faisant, en
évoluant, je me suis rapproché aussi de ce
qu'Alice Bailey dit dans la "Guérison
ésotérique", que vous avez peut-être lu. En
voici un court passage lié à ce qu'elle
appelle la psychothérapie traditionnelle et
la technique dite spirituelle. Elle parle du
psychologue traditionnel, et dit :

"... il emploie la méthode consistant à


découvrir les complexes profondément
enracinés, les cicatrices, les anciens chocs
ou les peurs dissimulées derrière
l'expérience du présent et qui ont fait de
l'homme ce qu'il est aujourd'hui. Il est
généralement possible de suivre ces facteurs
conditionnants à la trace, jusque dans le
subconscient, en exhumant le passé, en
tenant compte de l'ambiance actuelle, en
calculant avec l'hérédité et en étudiant les
effets d'éducation, soit académiques, soit
basés sur l'expérience même de la vie.
Alors, si possible avec l'aide du patient, on
ramène à la surface de sa conscience le
facteur qui était pour lui un handicap
majeur et avait transformé le sujet en un
problème psychologique. En le lui
expliquant intelligemment, on le relie à son
état tel qu'il est et l'homme en arrive à
découvrir sa personnalité, ses problèmes et
l'occasion imminente qui se présente."

Là est la première étape, que nous


faisons aussi en astrologie, en étudiant les
fondements de l ' i n c a r n a t i o n , donc la
personnalité, avec tous ses chocs
émotionnels, affectifs, ses instincts, limités,
freinés par la socioculture dans laquelle
nous vivons pour l'amener précisément à un
processus d'individuation : deuxième étape.

"... toutefois la technique spirituelle est


entièrement différentẹ".

Quand nous partons, nous, du Soleil,


vous allez voir... Et elle ajoute:
"... elle laisse de côté les problèmes de la
personnalité et la fouille du subconscient
parce qu'elle considère que les conditions
indésirables résultent d'un manque de
c o n t a c t avec l'âme et d'un défaut de
contrôle par l'âme. On enseigne au patient,
(si j'ose l'appeler ainsi), évidement, à cesser
de se regarder et en conséquence à se
détourner de lui-même, de ses sentiments,
de ses complexes, de ses idées fixes et de ses
pensées indésirables, pour focaliser son
attention sur l'âme, sur la divine réalité à
l'intérieur de la forme.
...On pourrait bien appeler cela le processus
qui substitue scientifiquement un nouvel
intérêt dynamique à celui qui a tenu la
scène jusque-là. Cela met en mouvement
l'activité d'un facteur coopératif dont
l'énergie envahit la vie inférieure de la
personnalité et la débarrasse des mauvaises
tendances psychologiques et des complexes
indésirables c o n d u i s a n t à de fâcheux
égarements dans la conduite de la vie. Ce
processus arrive à régénérer la vie mentale,
de sorte qu'une juste façon de raisonner
permet à l'homme de s'orienter sous
l'impulsion ou l'illumination de l'âme. "
L'étude porte maintenant sur l'âme et le
domaine des causes au lieu de la
personnalité et du domaine des effets.
Les blocages sont en réalité des
identifications à des plans de conscience
inférieurs.
Le jeu de connaissance de soi, Leela, que
j'utilise en astrologie comme outil
thérapeutique, a deux mille ans. Il a été
reçu, par intuition, par méditation, par des
sages hindous. Il représente une autre
manière de voir ce que je disais à propos de
l'astrologie. Il représente le sens de
l'évolution, comme un jeu de l'oie : il y a
72 cases, huit rangées de 9 cases qui
chacune correspond à un des plans de
l'être, un des plans que l'on p o u r r a i t
associer aux différents chakras,
correspondant à des plans de conscience. En
astrologie, en psychologie ou dans les rêves,
nous pouvons retrouver le passage d'un
plan de conscience à un autre, vers un état
qui s'affine de plus en plus. C'est ce que les
événements de la vie nous proposent.
L'astrologie peut nous permettre de les
décoder, sans risque de se tromper, parce
que, lorsqu'il y a un transit en astrologie,
nous savons de quoi il s'agit. Nous
n'inventons pas, c'est quelque chose qui
correspond à un état d'être actuel.
Ce jeu nous permet donc de faire ce
cheminement, en partant de la case 68, la
conscience cosmique, pour s'incarner, faire
ce chemin du retour. Retourner vers l'unité
implique de nombreuses vies
évidemment...
Nous jouons avec un dé, il faut faire un 6
pour s'incarner. Nous commençons tout de
suite sur le plan physique et essayons de
remonter vers le plan cosmique. Chemin
faisant, il y a des flèches et des serpents : les
anglais ont repris cela en revenant d'Inde,
dans un jeu pour enfants qui s'appelle
"snakes and ladders". Il s'agit donc de faire
l'expérience de chaque état d'être, mais
quand nous tombons dans la gueule d'un
serpent, nous rencontrons nos ombres. La
seule flèche qui permet réellement
d ' a t t e i n d r e le but d'un seul coup est
appelée "dévotion Bakti", c'est un
enseignement plutôt fondé sur la loi de
l'amour universel, de l'amour inconditionnel.
Evidement par la Bhakti, nous oublions
notre petite personnalité pour d'abord
aimer Dieu et à travers Dieu. N o u s
pouvons nommer cela aussi conscience
cosmique, ou comme nous le voulons,
l'essentiel étant d'aimer, de s'unifier avec
l'univers tout entier.
Ce jeu est donc à la fois un jeu de
croissance, de compréhension, d'évolution,
comme le Yi King. Là est inscrit un
enseignement global, l'enseignement du
Yoga, celui de l'Advaïta Vedanta.

Quand j'interprète un thème à travers


les progressions, les transits, tous ses
aspects, j'essaye de voir, je dis bien essaye
parce que cela dépend de mon propre état
d'évolution, de ma propre conscience,
j'essaye donc de voir où en est l'autre à ce
moment-là, et de le guider vers la loi du
Dharma qui est la sienne plutôt que vers les
aspects de son être existentiel qui a envie
de ceci ou de cela.
Je lui dis: "ce que te dit Pluton, ce que te
dit Uranus, voilà la voie qu'il t'est demandé
de prendre". Et là il n'y a pas de risque de
se tromper. Ceci dit, pour chaque thème,
pour chaque personne, le même événement
peut être décodé d'une manière différente.
A une personne nous allons dire, "oui c'est
le m o m e n t p o u r t o i de q u i t t e r , de te
séparer, de partir, parce qu'il est temps pour
toi qui as été un martyr, de devenir un
vagabond, p o u r te libérer et aller vers le
guerrier en toi, à cause de ta dimension
n e p t u n i e n n e . " N o u s utilisons aussi cette
dimension de la psychologie transpersonnelle
que l'on appelle le "héros intérieur", qui est
lié aux subpersonnalités. Ceci est relié au
t r a v a i l de C a r o l P i e r s o n , "Le h é r o s
intérieur", que vous connaissez peut être.
La p r e m i è r e fois que j'ai utilisé le jeu,
d é c o u v e r t à F i n d h o r n , c ' e s t avec u n e
personne avec laquelle j'avais un conflit très
fort ; j'étais convaincu de m o n bon droit
cosmique, et qu'elle avait tort... Nous avons
joué. A peine commencé, elle fait un 6 et
en p e u de t e m p s elle se r e t r o u v e à la
conscience cosmique. Q u a n t à moi, je
continue à jouer pendant plusieurs heures
tandis qu'elle me regarde, dégagée du
problème, non identifiée à cette situation,
même si elle la vivait également. C'est moi
qui étais dans le conflit, et le jeu me l'a
bien montré.
Je devais apprendre la défusion, sortir de
ma ligne de fusion Poissons. Des aspects de
mon thème me disaient que c'était le
moment de dépasser mes peurs, de devenir
a u t o n o m e , i n d é p e n d a n t , responsable.
Même si on nous quitte, c'est ce qu'il nous
faut à ce moment-là.

Je pratique le Kriya Yoga enseigné par


mon maître, Paramahansa Yogananda, dont
vous avez peut-être lu "L'autobiographie
d ' u n Yogi". A travers des techniques
spécifiques du souffle nous arrivons à nous
recentrer, à intégrer les émotions. Le
Pranayama m'a permis d'avoir le courage de
franchir ce pas. Cela n'enlève pas la
souffrance, ni la difficulté, mais on vit les
choses en toute conscience.
Il y a quatre ans, j'ai eu une hépatite pas
bien grave, mais il a fallu que je m'arrête
p e n d a n t trois semaines. J'ai su d é c o d e r
p o u r q u o i . Cela ne m ' a pas e m p ê c h é de
descendre dans ce temps de dépression, lié
à des transits de Pluton. Il fallait descendre
pour transmuter des aspects de mon ombre
que je ne voulais pas regarder en face. Je l'ai
vécu en toute conscience, je n'ai pas fait
l'impasse. J'étais un avec ma dépression,
mon petit travail intérieur, et je l'acceptais
tellement bien que cela a été un m o m e n t
extraordinaire de connexion avec mon être
essentiel, de découverte et de libération.
Rudyar, m o n maître en astrologie, fait la
distinction entre psychologie normative et
psychologie métamorphique. La première
cherche le r e t o u r à une normalité qui a
causé l'état de difficulté dans lequel nous
s o m m e s . P o u r la d e u x i è m e , il ne s'agit
a b s o l u m e n t pas de r e t o u r n e r d a n s les
é l é m e n t s du passé, c'est-à-dire du "moi
inférieur", qui nous a limité, fait souffrir,
qui nous angoisse et nous fait peur, mais il
s'agit d'utiliser l'énergie de la difficulté
comme une métamorphose, comme une
transmutation.
Grâce à l'astrologie, nous pouvons dire : à
tel moment, j'étais confronté à tel défi,
mais je n'étais pas suffisamment conscient
pour pouvoir le vivre pleinement avec
justesse, bien que la vie, comme vous le
savez, nous pousse à aller dans le sens de ce
qui est juste pour nous. Le traumatisme
initial, inscrit dans le thème, va être
transmuté et servira de levier plus tard. Le
but étant d'aller vers la conscience
cosmique.
LA PEUR, LAMÉMOIRE
ET L'AMOUR

e voudrais vous raconter une histoire


que j'aime bien. Une femme va faire le
J marché un beau matin. En parcourant
les étals, elle voit une enseigne qui dit "À la
pure vérité". Elle interroge celui qui se
trouve derrière :
— Que vendez-vous exactement ?
Ce qu'elle ne sait pas, c'est que Dieu en
personne s'y trouve.
Le vendeur, donc Dieu lui-même, lui
répond :
— Mais, je vends absolument tout ce que
vous voulez.

Alors, elle lui dit :


— Vraiment tout ce que je veux ?
— Oui, bien sûr, tout ce que vous voulez !
Vous êtes ici "À la pure vérité".
Alors le regard de cette femme s'illumine et
elle lui dit :
— Et bien voilà, je voudrais que les
hommes soient frères, que les êtres ne
souffrent plus. Je voudrais que les êtres
humains soient heureux et qu'il n'y ait plus
de peur dans le monde.

Alors le vendeur part d'un bon et franc


éclat de rire et répond :
— Madame, je regrette ici nous vendons les
graines, pas la récolte !

Il s'agit en effet bien de graines, parce


que l'homme en est une et quand on
regarde au microscope ce que contient
cette graine, il y a t o u t ce que les
psychiatres savent déjà et que vous savez
aussi, bien sûr, la peur, l'amour, le désir.
Comme le disent les textes des traditions
indiennes, toutes les soifs, toutes les faims,
toutes les musiques, tous les désirs, toutes
les strophes, tous les poètes, toutes les
poésies, toutes les musiques, toutes les
joies, toutes les danses, toutes les peurs,
toutes les merveilles sont déjà contenues
dans cette graine. Je voudrais aborder deux
éléments à l'intérieur de cette graine, que
sont la dormance et l'origine de la graine.
La dormance n'est rien d'autre que cet état
intérieur de somnolence apparente, je dirais
même de bienveillante somnolence, qui fait
que si toutes les conditions ne sont pas
réunies - l'hygrométrie, la saison, l'altitude,
l'ensoleillement - le fait que cette graine
soit sur un coteau, sur une pente, au fond
d'une vallée ou sur une montagne, l'année
où elle a été plantée, la variété dont elle fait
partie, le degré d'humidité de la terre, la
composition de cette terre... la graine
n'éclôt pas.
Aborder la peur d'une façon positive
suppose un certain nombre d'épreuves,
dirais-je, qui se trouvent à mon avis
rassemblées dans ce récit de la Genèse, en
quatre étapes.

Campons le paysage. Nous sommes dans


le jardin Eden. Il n'y a pas de différence
entre Adam, Eve, et il y a un téléphone
direct, par Internet interposé, entre Dieu,
Adam et Eve. Le courant passe. Il y a juste
un interdit, ce fameux arbre qui est planté
au milieu, l'arbre de la connaissance,
symbole déjà d'une rupture, puisque c'est la
connaissance du bien et du mal. Toute
connaissance entraîne déjà une rupture, une
rupture existentielle.
Ces expériences sont nécessaires pour
parvenir à cette autre naissance qui est
l'instant qui suit la rupture, celui qui suit la
mort. C'est l'instant important qui donne le
sens de cette rupture.
Alors nous sommes devant cet arbre du
discernement, l'arbre de la connaissance, de
la distinction entre le bien et le mal.
Imaginons Eve, astucieuse, intuitive, qui se
rapproche comme par hasard de cet arbre
de la connaissance. Le serpent, le tentateur,
celui du désir, du toujours possible, celui
qui fait en sorte que tout se passe comme si
nous devenions propriétaires d'une vérité,
celui qui a toute la connaissance mais qui
ne la partage pas, comme l'expriment les
Indiens dans le terme sanskrit "walla". Le
propriétaire d'une vérité incite Eve à
manger la pomme, pour être détentrice de
cette vérité, de cette connaissance. Elle se
laisse séduire et croque la pomme.
Comme par hasard, il y a notre "bon
bougre de père", arrière grand-père d'Adam
qui passe par là, et Eve lui dit : "tu devrais
faire comme moi." Il se laisse tenter. Je ne
sais pas si dans le récit, on dit que c'est la
même pomme, mais nous ne sommes pas à
une morsure près, et à ce moment-là,
comme par hasard, arrive Dieu. Il y a une
sorte de grondement, un frissonnement à
travers les branches et les buissons, et voici
que le Créateur, Dieu en personne arrive.
Remarquez alors la question, d'une naïveté
incroyable. Il s'adresse à Adam et lui dit :
"qu'as-tu fait ?".
Vous imaginez-vous, parents d'un enfant,
voyant le verre que votre enfant vient de
laisser tomber, lui dire en regardant le verre
cassé par terre "qu'as-tu fait ?" Et bien voilà
une question extraordinaire. Pourquoi?
Parce qu'il appartient seulement à celui qui
a agi de révéler le sens qu'il a mis dans son
action.
Dieu n'est pas là pour constater. Il ne prend
même pas la peine d'interpréter lui-même
ce qui s'est passé. Il demande à Adam ce
qu'il a fait : "explique-moi, donne moi la
manière dont tu interprètes ce que tu viens
de faire". En fait, c'est ce qui compte à Ses
yeux, n'est-ce-pas ?
Si nous étions aussi pédagogues que cela
avec nos enfants, nous ne dirions pas "mais
pourquoi as-tu cassé ce verre", ce qui laisse
l'enfant complètement coi parce qu'il n'en
sait rien et ne voulait surtout pas casser ce
verre, ni le vase de la grand-tante. Mais
"qu'as-tu fait" nécessite un apport de sens à
ce qui a été fait.
À m o n avis, la p r e m i è r e r a c i n e de la
culpabilité humaine, la première rupture, se
trouve là : Adam répond, et je trouve cela
m e r v e i l l e u s e m e n t lâche, " c ' e s t pas moi,
c'est elle". C'est très pratique! En fait, la
p r e m i è r e é t a p e de la d i v i s i o n d a n s la
Genèse est causée p a r l ' i r r e s p o n s a b i l i t é .
N o u s ne sommes pas loin de la peur. La
première racine de la culpabilité humaine
est l'irresponsabilité : c'est pas moi, c'est
elle. C'est la faute de l'autre, la faute du
G o u v e r n e m e n t , celle de l ' o r d i n a t e u r , de
p a p a , de m a m a n , d u f r è r e . D e t o u t e s
f a ç o n s , il f a u t q u e ce s o i t la f a u t e de
quelqu'un d'autre. Finalement, le poids de
la séparation dont nous supportons encore
aujourd'hui les conséquences est bien dans
le rejet d'une responsabilité sur quelqu'un
ou sur un événement. Le chemin sera long,
et il existe encore bien des étapes à notre
maturité, avant de p o u v o i r imaginer que
n o u s s o m m e s les r e s p o n s a b l e s de n o s
choix. N o u s préférons garder cette sorte
de réserve d'irresponsabilité c o m m e une
ressource .
À partir de la réponse d'Adam, les choses
vont aller très vite. Adam et Eve vont très
subitement se percevoir dans leurs corps
nus, alors que le corps de Gloire est celui
qui n'a plus rien à cacher ! Et ces
considérations relèvent peu de la
connotation sexuelle.
Qui n'a jamais connu la honte ? La honte
d ' ê t r e nu. Et bien, c'est une honte
existentielle, la honte d'être vus tels que
nous sommes, la honte d'être vus différents
de ce que nous croyons être à nos propres
yeux. Nous supportons très mal cela. Dans
des entretiens thérapeutiques, j'ai vu la
honte d'exister chez certains patients,
jusqu'au bord du suicide, et il m'a semblé
que face à cet homme, à cette femme, dans
un entretien, ma honte d'exister n'était pas
du t o u t éloignée de la leur. Et je les
comprenais. Je comprenais que l'on puisse
avoir honte, et ne pas pouvoir en supporter
le poids, ne pas oser exister. C'est cela qui
fait envisager de se suicider, qui tue petit à
petit ce désir de vivre. Vivre c'est choisir.
Nous touchons ici au mystère même de la
m a t i è r e , et je d i r a i s au m y s t è r e de
l ' i n c a r n a t i o n m ê m e . C a r q u i p e u t se
réconcilier avec sa honte, s'installe dans le
corps qui lui a été donné; pardon, qui lui a
été p r ê t é . C a r n o u s ne s o m m e s q u e les
locataires de cet espace. A p a r t i r de ce
moment-là, où Adam et Eve, notre père et
n o t r e m è r e o n t eu h o n t e , nos vies v o n t
devoir être incarnées, inscrites dans la chair,
et non pas dans un corps de Gloire. Toutes
nos a s p i r a t i o n s , t o u s nos désirs, t o u t e s
nos faims, t o u t e s nos soifs, t o u t e s n o s
envies, t o u t e s nos a s p i r a t i o n s , tous nos
é m e r v e i l l e m e n t s v o n t d e v o i r passer p a r
notre corps.

Ainsi donc, il y a plusieurs étapes : la


première est l'irresponsabilité, la deuxième
la honte, la troisième : Adam et Eve qui
sont rentrés dans les limites du corps, vont
devoir rentrer maintenant dans les limites
du t e m p s et de l ' e s p a c e . Et n o t r e c h e r
premier couple est chassé du paradis, chassé
du jardin d'Eden. Au m o m e n t d'ouvrir la
très lourde porte du paradis qui s'ouvre sur
la terre, au moment d'ouvrir cette porte sur
le monde de la dualité tel que nous le
connaissons aujourd'hui, Eve s'inquiète,
elle a peur. Vous savez une peur sans objet,
ce que les psychologues et les psychiatres
nomment l'angoisse. Quand on a peur de la
nuit, on sait au moins de quoi on a peur.
Quand on a peur du gendarme, on sait au
moins de qui on a peur. Mais quand on a
peur d'on ne sait quoi, et bien cela s'appelle
l'angoisse, parce que c'est une peur
insaisissable. Et là, elle est prise d'angoisse.
Et elle dit à Dieu en se retournant, avant
que la lourde porte ne se referme: "mais les
autres vont nous apercevoir et ils vont nous
tuer". Ce qui est d'ailleurs très paradoxal
parce que ce sont les premiers êtres vivants,
mais nous n'allons pas entrer dans l'exégèse
biblique. Elle a un pressentiment qu'il va y
en avoir d'autres, d'autres peuplades : "ils
vont nous voir et ils vont nous tuer". Déjà
la peur de la mort. Déjà l'angoisse de la fin,
de la grande rupture. Elle ne connaît pas la
nature du danger, elle sait qu'il peut y en
avoir un. En tout cas, le corps d'Eve a
pressenti qu'il pouvait y avoir ici
l'expérience de la limite et de la mort. Alors
Dieu, par un ange interposé - car il va
parler par interposition, maintenant qu'il y
a rupture, que le "téléphone" direct est
coupé - leur dit, en leur faisant une marque
rouge sur le front, "lorsqu'ils verront cette
marque, ils vous laisseront saufs". Maigre
consolation !
Quand la porte se referme derrière eux, ils
c o m m e n c e n t à créer ce que nous
continuons encore aujourd'hui à créer : le
monde des habitudes, des repères; ce
monde des habitudes rassurantes, et en
même temps, dans cette graine d'homme,
dans cette graine de femme, ils ont
pourtant éveillé l'espérance. Je viens ici de
t o u c h e r cette troisième racine de la
culpabilité et de la peur, qui est l'angoisse,
la peur sans objet.

On imagine aisément Adam et Eve à la


tombée du jour se réchauffant autour
d'un feu, j'espère qu'ils avaient aussi la
possibilité d'être proches du feu. Je ne sais
pas si la guerre du feu était avant ou après,
mais on les imagine dans un corps de
fatigue le soir, en épiant les bruits de la
nature et en cherchant dans les yeux de
l'autre à comprendre exactement ce qui
s'était passé. On les imagine aisément dans
ce rythme dans lequel nous sommes, ce
rythme des saisons, soumis aux lois de la
nécessité, dans l'obligation de manger, de
boire, de se reposer, de dormir, de se
protéger. On sent encore la transpiration
d'Adam en train de planter ses graines dans
la terre pour que la nourriture pousse et on
entend encore les gémissements d'Eve pour
enfanter. Nul besoin d'avoir une très grande
imagination pour entendre ce premier
couple d'hier repenser au passé "Tu te
rappelles, comment c'était avant !" Et
lorsque les regrets atteignent leur comble,
on les sent encore envahis d'un certain
poids à l'intérieur. L'irresponsabilité est
passée. La honte n'est plus. L'angoisse
s'estompe, mais il y a le souvenir.
Et voilà la quatrième racine de la culpabilité
et de la peur. La nostalgie du passé. La
nostalgie de : "avant". Et en même temps,
voyez comme les choses sont
r e m a r q u a b l e m e n t bien faites, encore
aujourd'hui. Nous pouvons remonter,
comme le saumon remonte le cours d'une
rivière, intuitivement chercher notre origine,
notre source, le lieu d'où nous venons. Il est
possible de s'enfermer dans la nostalgie du
passé, comme il est possible de ne pas le
faire. Il est possible de créer l'espérance,
possible de donner un sens à l'avenir. Parce
qu'il y a une nostalgie du passé, il est même
possible d'ébaucher timidement des artifices
de définitions du divin, de la religion, du
sacré, de Dieu, de la spiritualité.
Pourrions-nous seulement le faire s'il n'y
avait pas une nostalgie de l'infini ? La
nostalgie de l'infini... comment ne pas se
sentir parfois puni ? Comment ne pas se
sentir dans une nostalgie du passé, dans
cette nostalgie triste ? Comment ne pas se
sentir parfois puni ou pas libre encore de
nos choix... N'avons nous pas parfois
l'impression qu'il faut payer cher une
miette de bonheur, non pas pour payer le
prix, mais p o u r d é c o u v r i r la liberté au
travers de l'implacable responsabilité de nos
actes d'hommes ?

La p e u r est un p a r a d o x e . Je viens de
parler de ces quatre éléments fondamentaux
dont je tire lecture à travers le symbole de
ce récit. Un paradoxe est une tension de
vie, sur tout chemin de vie. La vie est une
tension. Bouddha disait que cette tension
doit être juste, comme celle d'un instrument
que l'on accorde. L'intérieur de l'homme
doit être détendu comme l'instrument de
musique. Mais une corde t r o p d é t e n d u e
s o n n e faux, cela s o n n e le r e l â c h e m e n t ,
l'endormissement. N o u s sommes près de
cette graine que nous avons le choix de
faire sortir de cette d o r m a n c e , mais qui
p a r f o i s chez n o u s d e v i e n t un v é r i t a b l e
refuge. Il y a une différence entre cette
graine qui dort encore, parce qu'elle est en
attente de son éveil, et de cette dormance
de la cette graine qui dort encore, parce
qu'elle se réfugie dans l'endormissement.
Attente ou refuge ? Nous avons toutes les
raisons de continuer de dormir. Alors il y a
un enjeu. Je suis un peu provocateur, mais
c e l a f a i t p a r t i e de m o n m é t i e r d e
philosophe que d'être provocateur. L'enjeu
est entre le corps et l'esprit, entre soi et les
autres, car, entre m o n corps et mon esprit,
il va y a v o i r la p e u r , il va y a v o i r
l'irresponsabilité, il va y avoir ces quatre
ingrédients fondamentaux cités
p r é c é d e m m e n t . Il va même y avoir de la
honte car mon esprit est subtil, mais m o n
corps, lui, me tire parfois, à hue et à dia. Il
y a un travail à réaliser entre notre corps et
notre esprit.

Finalement, nous sommes renvoyés


perpétuellement à l'enjeu entre nos besoins
et nos désirs d'infinitude, entre nos limites
humaines et le territoire de notre véritable
liberté.

Je t e r m i n e r a i e n v o u s l i v r a n t s e p t
principes qui nous permettent de dépasser
ces accidents de la culpabilité, de dépasser
l'irresponsabilité, la h o n t e , l'angoisse du
lendemain et peut-être aussi de dépasser la
nostalgie du passé. Sept principes qui nous
permettent d'oser être.

Oser être suppose:

1 • Qu'il n'y ait jamais de précipitation.


Nous prenons souvent ce qui est important
pour de l'urgent. Savoir faire la différence
est essentiel.

2 . Oser être suppose la responsabilité


de nos choix. N o u s avons choisi déjà ce
que nous sommes aujourd'hui, jusqu'à
m a i n t e n a n t , j u s q u ' à l ' i n s t a n t où n o u s
sommes en train de respirer en ce moment.
Nous ne pouvons plus choisir la seconde
d'avant. Nous sommes en train de vivre la
seconde présente, comme la conséquence
de la précédente, mais nous avons la liberté
de choisir celle qui se prépare. Quand nous
pensons à cette fraction, à cette pédagogie
du temps, et notamment cette pédagogie de
l'instant, nous nous apercevons que nous ne
pouvons nous résoudre à continuer de vivre
les conséquences des quelques milliards de
secondes précédentes que nous avons
vécues. Cela n'est pas vivre. Il y a le vivre
dans l'audace, j'allais dire dans le risque de
vivre la seconde qui va suivre d'une façon
différente. Nous avons en nous-mêmes des
prodiges de créativité et d'inventivité. Nous
souffrons de cette dormance de nos habitudes.

3 . Oser être suppose la liberté de faire


ce qu'exige une situation donnée. Agir par
rapport à ce qu'exige une situation donnée.
Bien entendu si nous voyons quelqu'un qui
tombe, qui s'écroule sous nos yeux, et que
personne n'est là, légalement, nous sommes
tenus à l'assistance à personne en danger.
Mais il n'y a pas de telle situation tous les
jours. Quand nous rencontrons quelqu'un
qui souffre, non pas d'une fracture ou d'un
accident de la route, mais qui souffre
intérieurement, nous sommes totalement
libres de donner ou de ne pas donner.

4 . Oser être suppose qu'on ne plaise


pas à tout le monde. Si vraiment vous
voulez une vie difficile, avec un facteur
p e u r à la c l é d a n s d e s p r o p o r t i o n s
logarithmiques, mettez-vous en tête que
tant que vous n'êtes pas approuvé, aimé,
observé, applaudi par tout le monde, vous
êtes un mal aimé, vous êtes un rejeté, et
vous ne pouvez pas commencer à exister.

5 • O s e r ê t r e s u p p o s e q u e l ' o n ne
s ' a t t r i b u e pas u n r ô l e d a n s c e r t a i n e s
situations, un masque en quelque sorte.
Nous ne sommes pas dans le rôle du père
de famille, dans le rôle du chef d'entreprise,
de l'artiste, du philosophe, de l'écrivain, du
directeur de ceci ou de cela, ou dans le rôle
du président de telle association. Dès que
nous chaussons un rôle, nous avons une
cuirasse. N o u s n'avons plus ce corps de
Gloire, mais nous n'avons même plus un
corps de chair.

6 . Oser être suppose a b a n d o n n e r la


peur de l'échec. Abandonner des questions
du genre : est-ce que je vais être compris ?
Est-ce que je vais être jugé ? Est-ce que je
vais être d r ô l e ? Est-ce que je vais ê t r e
accepté ?...

7 . Oser être s u p p o s e de puiser dans


l'héritage de sa sensibilité. N o n pas faire de
la s e n s i b l e r i e ou r e t o u r n e r d a n s u n
infantilisme de sensibilité, mais être humain
d a n s le r e s p e c t de l ' a u t r e , d a n s
l'acceptation de la différence. Oser être,
oser cette audace, p o u r c o u r i r le risque
d'être un h o m m e , c'est aussi r i s q u e r
d'accepter la différence.

Telles sont les racines de la peur et, selon


moi, quelques étapes pour la dépasser.
DE L'OBJET DE LA PEUR
À CELUI QUI A PEUR

ous allons donc aborder le thème de la


peur.
N En fait, nous ne pouvons pas parler de la
peur, nous ne pouvons que la ressentir.
La peur est avant t o u t une sensation
physique. Elle est une réaction. En parler
sur un plan abstrait ou conceptuel n'a pas
d'intérêt particulier. Par exemple, lorsque
vous êtes en état de parfaite écoute, comme
certains d'entre vous maintenant, la peur
n'apparaît pas. Par contre, confronté à une
situation ou à une pensée, à ce moment-là,
il y a réaction. Cette réaction s'exprime au
niveau corporel, elle est donc objectivable.
Essayons de descendre dans les mécanismes
intimes de cette réaction.

La p e u r est p r o f o n d é m e n t reliée au
sentiment d'individuation, à la conviction
d'être une entité séparée. Une de nos amies
ici présente a eu un incident. Son sac a été
volé avec tous ses papiers, et, pendant un
temps bref, elle a expérimenté un sentiment
de p e r t e d ' i d e n t i t é qui s ' a c c o m p a g n a i t
d ' u n e i m p r e s s i o n de l i b é r a t i o n . C e t t e
i m p r e s s i o n - l à , n o u s l ' a v o n s t o u s déjà
c o n n u e , dans une foule par exemple ou
d a n s u n lieu n o u v e a u , é l o i g n é s des
c o n d i t i o n n e m e n t s h a b i t u e l s de la
personnalité : une impression de légèreté,
de t r a n s p a r e n c e , q u i est s u r v e n u e de
manière spontanée, qui n'était pas le fruit
d ' u n e intention calculée, d'un état
conditionné.
Dans ces papiers d'identité que l'on trouve
dans un sac sont réunis tous les éléments
qui définissent, au sens ordinaire du terme,
u n e i d e n t i t é : u n n o m , u n e d a t e de
naissance, une m o r p h o l o g i e physique, un
numéro d'identité sociale, une photographie.
C ' e s t ainsi que le m o n d e , la société, la
c u l t u r e , les p a r e n t s , c o n t r i b u e n t à
l ' é l a b o r a t i o n dans n o t r e m é m o i r e de la
conviction profonde d'être cela, d'être tous
ces éléments qui constituent ce que nous
croyons être.
Tout au fond de nous-mêmes, nous savons
cependant très bien que tout cela n'est pas
vrai, n o u s savons très bien que n o u s ne
s o m m e s p a s ce q u i est i n s c r i t s u r n o s
papiers, nous en avons l'intuition profonde,
directe et permanente. Simplement, assez
souvent, nous l'oublions.
Il est c e r t a i n q u e si n o u s s o m m e s
c o n v a i n c u s que n o u s s o m m e s ces objets
d'observation, ce personnage, la peur est
a b s o l u m e n t i n é v i t a b l e . T o u t ce q u i va
porter atteinte à cette entité - danger de
destruction, souffrance ou contrariété d ' u n
désir - va engendrer une réaction.
Les thèmes de la peur sont innombrables :
j'ai peur de la souffrance, j'ai peur de
mourir, j'ai peur d'être seul, j'ai peur de ne
pas être aimé, de ne pas savoir aimer, j'ai
peur de ne pas être à la hauteur, peur des
lieux fermés, des animaux. Pourtant il y a
bien un dénominateur commun à toutes ces
peurs. Il est facile à identifier. Ce qui est
commun à toutes ces peurs et à toutes ces
formulations, c'est le "Je". Le "Je" est
comme la racine de l'arbre et les thèmes de
la peur en sont les branches. Tentons donc
de remonter à la source de la racine de
l'arbre. Quel est ce "Je" central ? Ce "Je" a-
t-il peur ou ce "Je" est-il en dehors de la
peur ? Lorsque la peur est objectivée au
niveau corporel, en tant que réaction, elle
perd son caractère magique, effrayant, elle
devient une sensation. Si cette sensation
n'est pas qualifiée de peur, elle n'est qu'une
sensation parmi d'autres, sensation de
contracture, s'exprimant à un niveau ou à
un autre. Si nous laissons cette sensation de
contracture se dévoiler pleinement dans
l'espace de la conscience, se dévoiler
pleinement dans le regard, cette
contracture se dissout d'elle-même.
Il est possible d ' e n faire l ' e x p é r i e n c e
instantanée m a i n t e n a n t . Laissez la
sensation corporelle appelée peur vivre à
l'intérieur de vous, se dévoiler dans toute sa
splendeur. Vous verrez alors que la
contracture est remplacée par le souffle,
que le souffle emplit l'espace, et que, dans
ce phénomène d'ouverture, vous n'êtes pas
véritablement concernés. Ce phénomène
d'ouverture se fait indépendamment de
votre volonté et de votre i n t e n t i o n
d'ouverture. Il s'agit simplement d'un effet
indirect de l'arrêt du réflexe de préhension,
de la tentative de contrôler. Le besoin de
c o n t r ô l e r disparaît parce qu'il est vu
comme n'aboutissant à rien. Quelque chose
qui n'a plus d'utilité tombe, disparaît.
Ce que nous appellons peur est un réflexe
profondément incrusté dans la structure
psychocorporelle. Mais, à chaque moment
de relâchement profond, à chaque moment
où vous allez entrer dans le sommeil
profond, ce réflexe va vous quitter.
Même si ce réflexe vous quitte, vous vous
savez être. Il y a donc une intuition directe
que ce que nous sommes est en dehors de la
p e u r , en d e h o r s de la r é a c t i o n . C e t t e
intuition va s'affirmer au fil d'une écoute
d é g a g é e de t o u t e i n t e n t i o n n a l i t é :
intentionnalité de comprendre, de saisir, ou
même d'écouter. Il y a là un dégagement
complet des tendances de la personnalité.
Le corps devient ainsi habité. Il se déploie
dans un espace élargi. Au fur et à mesure
que le corps se déploie dans un espace
élargi, la c o n t r a c t u r e , la réaction q u ' o n
appelle peur se dissout, exactement comme
un sucre qui est mis dans l'eau. Ce n'est pas
la volonté du sucre de se dissoudre, ni de
l'eau de dissoudre le sucre, mais le sucre se
dissout.

Il n'y a pas de guérison mentale de la


p e u r , car la p e u r est un p h é n o m è n e
d'origine mentale. Et ce qui est créé par le
mental ne peut pas être guéri par le mental.
Donc chercher à se libérer de la peur est
une vaine tentative. L'acceptation intégrale
de la peur telle qu'elle est, dans tous ses
registres, est déjà une tentative qui est
moins vaine.
Vouloir se dégager de la peur est également
l'expression d'une peur, et ce mécanisme-là
ne peut être que vu. Il ne peut pas être vu à
travers la mémoire, il ne peut pas être vu
hier ou demain, il ne peut être vu que sur le
vif, à l'instant même où ce mécanisme se
présente. Et lorsqu'il est vu, il disparaît,
comme un voleur qui disparaît à l'instant
même où nous le voyons.
Ce réflexe de défense est profond, il sera
donc amené à r é a p p a r a î t r e dans des
circonstances diverses, mais cette même
qualité de regard, qui laisse vivre en son
sein la réaction appelée peur, va
littéralement liquéfier la réaction jusqu'à ce
que le réflexe disparaisse. Plus le regard est
aigu, plus le réflexe est vu tôt, telle une
habitude de rentrer dans les vieux moules
qui revient. Colère, solitude, tristesse,
souffrance : nous pouvons dire en langage
imagé que le souffle nettoie ces nuages. La
seule chose qui ne soit pas altérée, qui ne
soit pas modifiée, c'est le regard, c'est l'oeil
qui perçoit.
L'attention est habituellement focalisée sur
ce qui est perçu. Il y a une sorte de
concentration sur l'objet de perception et
cette concentration fait oublier que cet
objet de perception n'est perçu que parce
qu'il y a quelque chose qui perçoit. Nous
pouvons appeler ce quelque chose qui
perçoit : "Je". Mais nous avons vite
tendance à faire également de ce "Je" un
objet de perception.
Il y a une habitude à cristalliser les objets
du fait d'un besoin de sécurité, d'un besoin
de fixité, et le "Je" lui-même peut être la
victime de ce processus. A ce moment-là, se
crée une représentation mentale, une image
construite. C'est à partir de ce processus,
d'une image construite, que la réaction
appelée peur prend sa racine. Si quelqu'un
vous fait une réflexion comme quoi vous
êtes incompétent, incapable ou inintelligent,
si au fond de vous-mêmes vous n'avez pas
le désir d'être le contraire de ce qui est dit,
et bien il n'y a pas de réaction. La réaction
de contrariété que vous allez ressentir est
en r a p p o r t d i r e c t avec le d é s i r d ' ê t r e
compétent, performant, intelligent.
Il y a donc une réaction qui trouve sa racine
d a n s de p r o f o n d s c o n d i t i o n n e m e n t s
psycho-corporels. Remonter à la source de
la peur amène inévitablement à remonter à
la source du moi. Sinon, nous n ' a r r i v o n s
qu'à remplacer un conditionnement par un
autre c o n d i t i o n n e m e n t , qui p e r m e t t r a
p e u t - ê t r e un f o n c t i o n n e m e n t plus
c o n f o r t a b l e sur un plan social, mais qui
reste un conditionnement.

Le "Je" est comme un axe central autour


d u q u e l la p o r t e p i v o t e . La p o r t e est en
m o u v e m e n t c o n s t a n t , mais l'axe est
immobile, l'axe ne se sait pas tourner, l'axe
se s a i t en d e h o r s d u m o u v e m e n t . La
r é a c t i o n appelée peur, la s e n s a t i o n , fait
partie du m o u v e m e n t . Cette réaction est
mouvante, changeante, fluctuante,
s'exprimant de manière différente à chaque
instant. Le fait que ce m o u v e m e n t soit
reconnu comme mouvement signifie qu'il y
a quelque chose qui est en dehors du
mouvement, sinon comment serait-il
possible de reconnaître le mouvement ?
Nous pourrions dire que le mouvement est
la preuve de l'immobilité. Prenons par
exemple deux trains qui seraient côte à
côte, parallèles, roulant à la même vitesse.
Si vous regardez d'un train dans l'autre
train, vous n'avez pas l'impression de
mouvement. Le train est vu en mouvement
parce que vous êtes assis au bord de la voie.
Sur le plan du déroulement des sensations,
du déroulement des processus mentaux,
c'est exactement la même chose.
Ces processus mentaux, ces sensations, ces
émotions, sont reconnues comme mouvantes
parce que le connaisseur du mouvement est
en dehors du mouvement. Il y a alors
comme un lâcher prise qui se fait
naturellement, un lâcher prise de l'objet de
perception qui ramène spontanément à ce
qui est en arrière plan de la perception. Du
fait que l'attention peut être focalisée au
niveau des lettres noires qui viennent
s'inscrire sur une feuille blanche, dans une
tentative de c o m p r e n d r e ce qui est dit,
de c o m p r e n d r e la signification des mots
qui s o n t écrits sur la feuille, il y a un
oubli de l'espace au sein duquel les lettres
a p p a r a i s s e n t . Il s ' a g i t d ' u n e s o r t e de
distraction.
Si, par le p o u v o i r de l'imagination, vous
vous transformez en une feuille blanche,
vous allez voir les lettres se former en vous.
Le dessin q u ' e l l e s f o r m e r o n t , les m o t s
qu'elles f o r m e r o n t ne s e r o n t p o u r vous,
feuille blanche, qu'un mouvement, un objet
de perception. Mais ces dessins, ces mots,
n ' o n t d ' e x i s t e n c e que p a r v o t r e p r o p r e
e x i s t e n c e . Si v o u s , en t a n t q u e f e u i l l e
b l a n c h e , en t a n t q u e s u j e t p e r c e v a n t ,
n'étiez pas présent, ces lettres n ' a u r a i e n t
pas d'existence pour vous.

A travers l'observation de la peur en tant


que sensation, réaction, pensée, il y a donc
un dégagement s p o n t a n é de la peur elle-
même, de la réaction, et ce dégagement est
libérateur. Il est curateur.
Lorsque nous parlons de peur de la mort, il
y a u n e c o n f u s i o n c e r t a i n e . De q u o i
parlons-nous lorsque nous parlons de la
mort ? La destruction du corps est-elle la
mort ? A l'instant même où la pensée "Je"
réintègre sa source, il y a disparition, il y a
mort. Il s'agit là d'une mort véritable qui
n'a rien à voir avec le devenir physique, la
transformation corporelle.
L'angoisse du vide, la peur du vide : nous
sommes tellement habitués à remplir le vide
par ces objets de perception, par ce que
nous appellons nous-mêmes, qu'il y a une
a n g o i s s e i n t e n s e de l ' a b s e n c e . La
contracture sur ces objets de perception est
profonde.
La conviction d'être ce que nous voyons,
d ' ê t r e ce que n o u s p e r c e v o n s , est une
conviction enracinée, une certitude
c o n f o r t é e p a r l ' e n v i r o n n e m e n t . L'arrêt
d'activité entraîne ainsi une réaction du fait
qu'il n'y a pas eu a c c o u t u m a n c e à cette
suspension d'activité.
L'habitude est prise de remplir le silence, de
remplir l'espace, et l'absence de ces objets
de p e r c e p t i o n est ressentie c o m m e une
mort, comme un anéantissement. Et cette
mort, cet anéantissement, est refusée.
Mais qu'est-ce qui p e u t donc bien
s'anéantir ? Est-ce moi ou est-ce l'idée que
je me fais de moi ? Puis-je m'anéantir ?
L'expérience du sommeil profond, qui est
vécue de nombreuses heures par jour, est
une expérience très riche. Il y a souvent au
réveil une sensation de p r o f o n d e
tranquillité, avant que l'esprit ne se soit
agité.
Cette tranquillité est l'expression d'une
présence qui se révèle dans l'absence.

Si vous voulez nous pouvons maintenant


dialoguer sur ce thème, sur les questions
ainsi soulevées,... ou sur l'absence de
questions ainsi soulevées.
La méditation n'est pas le fruit d'une
intention. La méditation se révèle à travers
la vision des contradictions, car la vision
des contradictions entraîne une suspension
intérieure. Dans cette suspension intérieure,
la méditation se révèle, spontanée, non
intentionnelle.
-

Participant : J'ai cru comprendre que je


peux remettre en question les fondements
mêmes de l'objet de ma peur, si j'essaye de
descendre en moi, d'être rigoureux. Cela
m'amène à remettre en cause aussi les
fondements même de celui qui a peur.
C'est-à-dire que, en même temps que
l'objet de la peur commence à apparaître
comme non réel, celui qui a peur de cet
objet commence aussi à vaciller dans sa
réalité. Cela me paraît très important. Cela
appelle à se demander qui a vraiment peur,
qui est ce "je suis" qui a peur ? Est-ce que
j'existe en tant que moi qui a peur ? Est-ce
que l'objet de ma peur existe ?
Est-ce que je n'ai pas peur en fin de compte
d'une situation, ou d'un objet, ou d'une
personne que je crée ?
Vous avez parlé des choses que l'on crée
soi-même, il y a quelques instants. Si nous
n'étions plus là, les lettres sur la feuille
blanche n'existeraient même pas. J'ai peur
du monde extérieur et ce monde, je le crée.
C'est ma propre création. C'est comme si
c'était moi qui avais peur de moi-même. A
la limite, les deux s'effacent. C'est quelque
chose qui va dans cette direction. C'est
comme si, dans les silences, vous tiriez un
tapis sur lequel je me tiens, cela me ferait
perdre pieds dans ce que je crois réel.

Dr. Jean-Marc : La perception


première est non mentale. Il y a d'abord
perception, puis, dans un second temps,
dénomination de la perception. Mais la
perception première, dans son essence, est
de nature vibratoire. Il est possible de vivre
les perceptions sur un premier plan
vibratoire et d'en rester là. Le mental à ce
moment-là intervient, si nécessaire, par
exemple pour communiquer. Mais, sur un
plan essentiel, la perception première est
suffisante et complète. Dans le vécu de
cette p e r c e p t i o n première, il y a
méditation. Il n'y a plus d'interférence des
conditionnements de la personnalité. Les
c o n d i t i o n n e m e n t s de la p e r s o n n a l i t é
n'interviennent que dans un second temps.
Ils ne sont pas nécessaires. Ils sont comme
une crème que l'on mettrait sur le visage.
Le visage n'a pas besoin de la crème pour
être.

Participante : Je voulais dire comment


j'avais été interpellée par rapport à votre
technique de laisser du silence entre vos
mots. Je voudrais intervenir à deux niveaux
de perception : celui d'une enseignante, que
je suis, et celui d'une hypno-thérapeute,
que je suis aussi. Au niveau de l'enseignante,
c'est-à-dire au niveau du dialogue qui peut
se faire entre une personne supposée avoir
un savoir et une personne supposée entendre
ce savoir, je me suis rendue compte que la
plupart du temps, nous ne laissons pas le
temps à l'autre de reprendre pied pour
savoir ce qu'il pense.
Ce qui est intéressant dans ce silence, dans
ce dialogue, c'est que, à la fois comme par
habitude, j'étais porté à accueillir vos
paroles, mais le silence était là pour dire ce
que j'en faisais. Dans ce silence, très
rapidement pour moi, il y a eu une espèce
de manque : tiens, il ne parle plus. Et puis,
ensuite, l'idée est venue que je pouvais le
remplir par ce que je pensais. Il m'est ainsi
arrivé quelque chose qui ne m'arrive que
très rarement. Quand je prends en note
quelque chose, je note ce que la personne
dit. Et là, j'ai plutôt pris en note ce que je
pensais à propos de ce que vous disiez. La
deuxième chose qui m'a permis, d'une
certaine manière, d'écouter ce que vous
disiez, faisait référence à ma compétence en
hypnose. C'est vrai que dans la technique
d'hypnose, il s'agit de créer, à un moment
donné, une dissociation entre le mental et
le sensible, et laisser la personne être
profondément ancrée dans ce que nous
pourrions nommer une conscience, plus
consciente.
A ce niveau-là, au sein de ce silence
intérieur que vous aviez installé, nous
pourrions trouver dans cette situation de
petites tranches d'hypnose. Nous savons
évidemment que, dans cette situation-là, les
mots ont beaucoup d'importance, qu'ils
sont colorés à un niveau vibratoire. Au
niveau des symboles, des métaphores, ils
r a p p e l l e n t b e a u c o u p de c h o s e s et
évidemment, les mots ont vibré en nous à
un niveau de conscience qui est peut-être
différent de la conscience ordinaire.
Ce qu'il m'a semblé, c'est que vous avez,
dans votre dernière intervention, dit cela.
L'angoisse du vide, la peur du vide, remplir
le vide. Là j'ai été confrontée à la portée
prophétique, la portée profonde d'un mot
q u ' o n e n t e n d en p o s i t i o n h y p n o t i q u e .
Après, je me suis demandé si ce grand vide,
ce g r a n d silence, ce n ' é t a i t pas c h a c u n
qui travaillait le vide en soi.
C ' é t a i t une question ! M a question est :
Quelle est la portée du mot qui est donné
en finale ?

D r . J e a n - M a r c M a n t e l : Une fois de
plus, le vide ne se réfère qu'à votre plein.
Donc le vide vous renvoie à ce que vous
êtes. Quant aux mots, il est préférable de
les laisser se r é s o r b e r dans leur source,
comme une note de musique, comme une
note de piano qui est jouée, puis réintègre
le silence d'où elle vient.
Les mots, lorsqu'ils sont utilisés dans cette
perspective, nous ramènent naturellement
vers ce que nous sommes. Ils perdent alors
leur utilité fonctionnelle et sont l'écho
vivant de notre propre nature. C'est à ce
niveau que le mot peut-être utilisé comme
enseignement, non pas dans sa valeur
intrinsèque, mais dans l ' é c o u t e de sa
complète résorption ; comme dans le souffle
où l'expiration se résorbe totalement dans
l'espace.

Participante : J'aimerais faire l'éloge de


la lenteur avec des pensées analogiques et
métaphoriques, la lenteur de l'idéation,
la lenteur dans la verbalisation, qui sont
comme les mailles larges d ' u n filet,
c'est-à-dire qui contiennent sans enserrer.
Entre les mots et dans l'attente du mot
suivant, il y a une induction à la méditation.
Plus l'expression est lente, plus nous
ralentissons nous-mêmes notre idéation, ce
qui permet d'entrer dans un état méditatif.
Il y a d'autres techniques qui amènent à
cette même lenteur, telle que l'hypnose.
Dans l'hypnose, on retrouve de plus en plus
la lenteur à mesure que la transe
s'intensifie. C'est la lenteur du geste, des
pensées. Et finalement, certaines personnes
accèdent à un stade émotionnel et sensoriel
où les pensées deviennent secondaires et
dénouées.
Je voudrais aussi évoquer ces techniques de
plus en plus utilisées, comme la faciathérapie,
le mouvement fondamental, apportées en
France par Dany Bois, qui viennent de
techniques ancestrales, comme on peut le
voir en Indonésie, au Brésil et dans
lesquelles Dany Bois fait expérimenter la
lenteur du geste, habité par ce qu'il appelle
le m o u v e m e n t fondamental. Cette
concentration, cette attention portée au
mouvement entraîne aussi cet état que j'ai
retrouvé en vous écoutant. Egalement,
certains yogas très lents.

P a r t i c i p a n t : Juste une question,


pourquoi répondez-vous aux questions ?
Dr. Jean-Marc : Pourquoi pas
! Les réponses viennent ou ne viennent pas.
Il n'y a pas de résistance particulière. S'il y
a des réponses qui viennent, elles viennent.
Il n'y a pas de raison de s'y opposer.

Participant : Merci !

P a r t i c i p a n t e : Je n'ai pas perçu les


silences comme un vide mais comme une
vacuité. Vous nous avez invités à dissoudre
les peurs et, dans ces silences, justement, on
trouvait la paix. Les silences, c'était le
moment où l'on passait du "je" au "je suis".

Dr. Jean-Marc Mantel : Merci à vous.


CONFIANCE ET NON-PEUR

Lama Denys Teundroup

e vous propose un moment d'expérience


pour commencer.
J
Nous nous asseyons confortablement, le
dos bien droit, stables, bien dans notre
assiette, bien posés sur terre...
Je vous propose que nous respirions
ensemble, doucement et profondément.
Faisons quelques respirations, expirant
profondément, nous laissant aller dans
l ' e x p i r a t i o n . . . Laissons-nous partir,
relâchons-nous... Nous pourrions dire :
décontractons-nous, relâchons le corps..., le
corps et l'observateur... Nous nous
relâchons, nous relaxons notre
observateur... Nous laissons se détendre
toutes les formes de contractures, de
fixations sur nos perceptions...
En respirant profondément, nous entrons
dans nos perceptions..., nous nous laissons
entrer calmement dans toutes nos
perceptions... Tout notre champ visuel est
ouvert, dégagé... Notre champ sonore est
lui aussi tout ouvert, sans entraves... Nous
entrons dans les sens... Nous nous laissons
partir..., nous nous laissons nous évanouir
dans l'espace..., sans nous retenir..., sans
rien retenir... et sans que rien ne nous
retienne... Les résistances sont une forme
de peur...
(silence)
Nous nous laissons plonger dans l'ouvert,
sans peur... L'ouvert est bon..., "life is
good"... En nous immergeant dans l'ouvert,
nous nous plongeons dans les sens..., dans
les sensations toutes simples..., dans
l'expérience toute simple des sens...,
l'expérience avant même qu'elle soit
e x p é r i m e n t é e . . . , avant que nous ne
l'habitions comme un expérimentateur...
Nous nous laissons partir dans cette absence
de l'expérimentateur..., nous nous y
évanouissons pour y vivre la présence des
sens...
(silence)
Cette présence, si elle est authentique, est
absolue : elle est sans rien d'autre. Elle peut
s'appeler expérience d'éveil, nature de
bouddha, grande félicité, etc...

Le point que je voudrais transmettre est


que c'est la peur qui nous retient. Si nous
n'avons pas peur, nous ne nous retenons
pas ; il est alors possible de plonger dans
l'ouvert, dans les sens..., sans nous retenir...
Le Docteur Mantel nous expliquait combien
la peur trouve sa racine dans le moi. C'est
vrai, et aussi le moi trouve sa racine dans la
peur.
Dans la peur, il y a la peur de perdre, de
perdre ce à quoi l'on tient. La peur de la
perte est, de bien des façons, le dénominateur
commun des passions, des émotions
conflictuelles et des illusions. Il y a la peur
des pertes, et la peur de la Perte..., les
petites pertes et la grande perte..., la grande
perte étant de se perdre, de perdre "moi".
C'est là qu'arrive la mort...
(silence)
Derrière la peur, d'une façon ou d'une
autre, se cache l'ombre de la mort.
Travailler sur la peur, c'est expérimenter la
mort... La mort ou le lâcher prise, la non-
fixation, le non-appui..., tous sont en
continuité. Lâcher est une petite mort, un
petit abandon ; le plus grand abandon étant
l'abandon de soi.

C'est en abandonnant soi que l'on entre


en Soi. C'est l'absence du soi qui permet la
présence du Soi, en-Soi, par-Soi, de-Soi,
présence totale et toute simple.
Une parole célèbre de Milarépa, le grand
yogi, mystique et poète tibétain, dit :
"C'est la peur de la mort qui me fit entrer
en la Voie. C'est la conscience de la mort
qui me fit sur celle-ci pratiquer sans relâche.
La mort est aujourd'hui ma compagne, en
laquelle je vis la félicité. "

Pour mourir, ou pour entrer dans la


non-peur, la confiance est nécessaire.
Confiance, ici, nous ne l'entendons pas
comme la confiance en quelque chose, ou
la confiance en quelqu'un, ou la confiance
en la vérité. Il ne s'agit pas de la croyance
en un concept, en une n o t i o n , en un
discours, en une référence du mental. Il
s'agit justement et e x a c t e m e n t de la
confiance du non-mental : cette confiance
qui permet de lâcher toutes fixations
mentales. Notre expérience, en cet instant
de n o n - f i x a t i o n f o n d a m e n t a l e , est
foncièrement saine. Cette expérience, dans
son instant premier, avant que nous ne
l'habitions, est absolue. C'est la peur qui
nous retient d'entrer dans l'absolu ; c'est la
peur qui nous empêche de nous y
abandonner.

La pratique de la méditation - puisqu'on


emploie ce mot - est l'apprentissage de
cette plongée dans l'ouvert non mental
qu'est l'expérience des sens, libre de toutes
fixations. Nous ne parlons pas de
l'expérience d'un au-delà - l'au-delà est
dualiste et mental -, mais d'être dans les
sens, de s'y relâcher, de s'y détendre sans se
retenir. Si nous le faisons vraiment, nous
découvrons un seuil. En nous abandonnant
vraiment au grand ouvert, il y a une perte
de repères, un vertige, comme dans un
évanouissement, et, à un moment, surgit la
peur... et nous nous ressaisissons.
Nous pouvons en parler comme d'une peur
du vide. C'est la peur de nous perdre ; la
peur d'être confrontés à notre vacuité.
Le point très i m p o r t a n t est que cet
évanouissement, cet abandon, ce passage
dans l'absence, cette mort est en même
temps une naissance..., une naissance aux
sens, une naissance à la présence des sens, à
l'état de présence.

Il s'agit de faire corps avec les sens. Tout


le cheminement est, en ce sens, une
incorporation. L'enseignement du Bouddha
conduit à la réalisation de l'absolu exprimé
comme trois corps : le " trikaya C'est la
réintégration de l'expérience des sens
au-delà de toutes fixations. Il s'agit de faire
corps avec l'essence des sens. Cette
réintégration, c'est se perdre dans l'absence
pour se gagner dans la présence absolue.
Mourir pour naître. Mourir à l'illusion
pour naître à la réalité.

La voie est donc fondée dans cette


confiance qui consiste à faire confiance à ce
que nous sommes avant nous-mêmes...,
avant "moi" : ce que je suis avant que
j'habite mon expérience. C ' e s t cette
expérience essentielle qui se découvre et se
cultive dans ce que nous n o m m o n s la
méditation assise. C'est elle aussi qui
s'intègre dans la vie quotidienne comme
méditation en action, quotidiennement,
dans la famille, au travail, n'importe où.

La n o n - p e u r consiste à a b o r d e r les
situations sans préconceptions, sans à
priori, sans projections. C ' e s t une façon
extrêmement pertinente, intelligente, terre
à terre, de vivre les situations, avec une
intelligence qui n'est pas celle du mental
mais du cœur.
C e t t e i n t e l l i g e n c e du c œ u r n ' e s t pas
sentimentale, sauf si l'on entend ce m o t
comme "vécue dans les sens" et non comme
fantasmes ou frivolité émotionnelle.

Nous utilisons certaines fois l'image du


g u e r r i e r sur le c h a m p de bataille p o u r
i l l u s t r e r l ' e f f i c a c i t é de cet é t a t . C ' e s t
l'attitude même du samouraï. Elle est au
cœur des arts martiaux authentiques, c'est
leur essence.
Ce guerrier est sacré au sens étymologique
de sacré : qui a fait le sacrifice - ce qui rend
sacré.
Le guerrier ou héros sacré, le chevalier, ou
bodhisattva en terme bouddhiste, est celui
qui a le courage de s'ouvrir, de s'ouvrir aux
autres, de s'ouvrir au monde ; le courage de
plonger dans l'ouvert, et de s'exposer.
La peur anime la résistance. La vaillance est
la voie de la non-peur. Si ce guerrier, héros
sacré, est dans son mental, s'il songe à sa
bien-aimée qu'il a laissée au foyer, s'il pense
à ses cours de stratégie à l'école militaire,
ou à quoi que ce soit, il sera absent à la
s i t u a t i o n , il ne s e r a pas p r é s e n t s u r le
champ de bataille.
Le h é r o s e n t r e d a n s le m o n d e sacré en
m o u r a n t , c'est-à-dire en se laissant aller
complètement dans l'expérience des sens.
Si n o t r e héros est c o m p l è t e m e n t p l o n g é
dans l'expérience totale des sens en s'étant
oublié lui-même, il est dans une attitude
de " s e n s i t i v i t é " , de r é c e p t i v i t é et d e
disponibilité totales ; il est dans la non-peur
authentique. Cette qualité d'absence de soi,
qui permet la présence totale, est l'état de
sensibilité, de "sensitivité" totale. C ' e s t
a u s s i u n e a t t i t u d e de n o n - v i o l e n c e
e s s e n t i e l l e . Et q u e l l e s q u e s o i e n t la
demande et l'énergie de la situation, dans
cette sensibilité complète, le guerrier sacré
se "coule" c o m m e l'eau sur le terrain, il
danse spontanément avec la situation, dans
une adaptation parfaite. Et il est capable, si
elle est nécessaire, de la réponse la plus
fulgurante qui soit ; ceci pour illustrer la
c o n t i n u i t é e n t r e l ' e x p é r i e n c e assise et
l'action, le quotidien.
Comme beaucoup le savent, le Bouddha
lui-même est parti de l'expérience de la
s o u f f r a n c e p o u r e x p o s e r ce q u e l ' o n
nomme : "Les Quatre Nobles Réalités" ou
"Les Quatre Vérités". Celles-ci sont, dans
le contexte : l'expérience de la peur et de la
s o u f f r a n c e , l ' o r i g i n e de c e t t e p e u r , la
possibilité de s'en libérer, et la méthode ou
la voie qui le permet.
Il y a la souffrance du corps et celle de
l'esprit, mais la souffrance est d'abord et
s u r t o u t , m e n t a l e . La s o u f f r a n c e est
d ' a u t a n t plus aiguë que nous luttons et
sommes en conflit avec elle.
Ce qui est vraiment crucial est la confiance
qui p e r m e t de s ' a b a n d o n n e r , de lâcher,
permet l'ouverture de l'esprit et du cœur.
A s s o c i é e à c e l l e - c i , est c e t t e v o i e de
vaillance, de courage, qui est la voie du
chevalier d'éveil, du héros ou de l'héroïne
d'éveil.
Dans notre contexte occidental
moderne, c'est un déni et une occultation
de la mort. De bien des façons, il est
important de vivre dans la conscience de la
mort. La conscience réelle de la mort est
loin d'être macabre ou masochiste ; c'est au
contraire dans la capacité même à mourir
que se trouve le fond de la non-peur et de
la libération : la naissance à la réalité
fondamentale.
DE LA PEUR FONDAMENTALE
QUI NOUS SÉPARE
VERS LA SÉCURITÉ DE L'ÊTRE
QUI NOUS RELIE

ous sommes amenés à parler de la peur,

N de cette attitude intérieure qui nous


coupe, nous sépare de la vie.
Il est assez difficile pour un psychothérapeute
de parler de cela, parce qu'il est amené à
parler d'une réalité que la plupart du temps
il ne vit pas. Là est le problème.
La parole de ceux qui parlent d'un sujet est
différente de ceux qui ont "réalisé" cette
conscience, sont tombés dans cet absolu et
sont devenus libres. Les paroles de ces
derniers sont paroles de vie. Elles viennent
d'ailleurs, d'eux-mêmes, du cœur de l'être.
En tant que thérapeute, je suis donc amené
à parler de la peur au niveau du moi, au
niveau de la personne, du sentiment
d'insécurité lié au départ de notre vie. Mais
il existe aussi un sentiment d'insécurité
d'origine spirituelle. Il est de nos jours très
à la mode de parler de l'ego, du sentiment,
des fantasmes de séparation. Nous sommes
coupés de la réalité et nous sommes
identifiés à notre ego. Pour certaines
personnes, c'est un langage nouveau et il
n'est pas facile de faire sentir de quoi il
s'agit.

A chaque instant, au cœur de nous-


mêmes, l'histoire d'Eve et de la chute du
Paradis, de la Genèse existe. A chaque
instant le monde se crée, nous sommes
chassés du Paradis et avons l'opportunité de
retourner à l'origine, à cette unité perdue.
Ce mot origine est très important. Il est très
difficile de comprendre intellectuellement ce
concept. C'est une réalité qui ne peut être
saisie par le mental qui fonctionne dans un
temps et un espace, dans la dualité.
Le mot commencement évoque un temps,
un début, il y a très longtemps... le big bang
relaté par les physiciens et scientifiques, qui
a eu lieu il y a des milliards d'années.
Mais... il y a en nous une petite voix qui
murmure "Messieurs, qu'y avait-il avant le
big bang ?"
Il y a aussi plein d'autres théories ; celle de
l'univers en expansion, avec ses limites qui
reculent... et on touche là aussi à une cause
première de la peur. A chaque fois que nous
abordons ces grands problèmes, nous
a p p r o c h o n s une réalité à travers une
dimension simplifiée de la réalité. Et nous
nous trouvons dans une impasse !
L'origine fondamentale de la peur vient du
sens de la séparation. Elle vient du fait que
nous sommes coupés de la vie, que nous
prenons pour une réalité, notre personne,
notre petit "moi je". A chaque fraction de
seconde (cela se passe très vite), nous
tombons dans ce piège.
Tous les maîtres le disent, chacun à leur
manière, dans les traditions.
Je suis tombé moi aussi dans ce piège, et je
ne sais pas pourquoi, j'ai le désir d'en sortir
et l'intuition d'être dedans, véritable
paradoxe !
Dans beaucoup de traditions l'on dit que
l'homme dort, qu'il n'est pas éveillé, qu'il
croit l'être. Je trouve cette image très juste.
Il y a des gens qui dans le rêve de leur
existence font vraiment un cauchemar,
d'autres font des rêves plus légers. Le
chemin spirituel consiste à mieux rêver, à
être plus au fait de son rêve, "sur le toit" de
son rêve pour créer les conditions qui à un
moment donné, vont faire surgir l'éveil du
rêve.
Il y a des moments où je me dis que mes
réflexions sont celles d'un maître endormi
qui rêve de l'éveil.
L'origine de la peur est donc métaphysique,
spirituelle.
Je ne peux ni vous parler de l'éveil ni du
"non-éveil", car pour le faire, il faut en
avoir fait l'expérience. Les t r a d i t i o n s
enseignent que cette réalité est tout et est
en tout. Nous serions en quelque sorte le
prolongement, l'excroissance de Dieu, du
Réel, de la réalité ultime et cela est la
création de Dieu.
Il est dit: "Et Dieu vit que sa création était
bonne". Nous n'avons pas à nous
culpabiliser, à refuser le fait d'être un être
humain, une excroissance du Divin. C'est
cela l'anima, le jeu de Dieu et c'est bon, et
c'est bien !

Le vrai problème est la réalité historique,


psychologique, physique, tout ce moi qu'il
faut absolument aimer puisque c'est Dieu
qui l'a créé. Le vrai problème vient du fait
que, au lieu de prendre cela comme un jeu,
comme un rôle de plus, nous prenons le
moi pour la réalité et nous l'impliquons
dans tous nos mécanismes mentaux, dans
tous les mouvements de notre esprit (avec
un petit "e"). L'origine profonde,
métaphysique de la peur vient du fait que
nous prenons des vessies pour des lanternes,
c'est-à-dire la forme pour la Lumière et que
nous ne nous en rendons pas compte.
Heureusement que la plupart des traditions
ne parlent pas que du Paradis, de la
réalisation, ce serait vraiment très dur pour
nous. Elles disent aussi comment sortir de
cette peur fondamentale. Le Bouddha n'a
pas cherché tout de suite à faire un tableau
extraordinaire de la réalisation. Il est parti
du fait qu'il fallait prendre conscience de la
maladie, et qu'il fallait essayer d'en
comprendre l'origine. C'est cela la
souffrance. Mais il y a un chemin qui mène
de l'état de maladie à l'état de santé.
Considérons donc que la peur est notre
maladie et qu'il existe une possibilité, un
chemin qui mène de la peur à la "non-
peur". Le chemin spirituel me semble être
la seule solution pour sortir de cette peur
fondamentale. Mais si nous sommes trop
frustrés, trop malheureux, quand le mal de
vivre est trop grand, le travail spirituel n'est
pas favorisé, et c'est là que le thérapeute
intervient. Il est i m p o r t a n t de r é u n i r les
conditions favorables à une grande
o u v e r t u r e de c o n s c i e n c e , d ' ê t r e le plus
heureux possible et' de pouvoir s'épanouir
dans la vie, de pouvoir dire "oui" à la vie.
C e t t e o u v e r t u r e à t o u s les a s p e c t s de
n o u s - m ê m e sur le p l a n p e r s o n n e l , est
fondamentale. Je ne dis pas que la porte est
fermée si nous avons beaucoup de blocages
et de p e u r s a f f e c t i v e s , m a i s c'est p l u s
difficile et le chemin spirituel peut être pris
c o m m e une c o m p e n s a t i o n à u n m a n q u e
affectif.
O n dit en Inde: "Une mère vaut mille pères
et un père v a u t mille g u r u s " . C e l a m'a
frappé que, dans une civilisation où le guru
est si i m p o r t a n t , o n e x p r i m e cela. Le
t h é r a p e u t e q u e je suis, s a i t b i e n
l ' i m p o r t a n c e du d é p a r t d a n s la vie,
l'importance de la relation première avec la
mère qui c o m m e n c e dans le subtil avant
tout autre relation.
La qualité de la relation entre les deux êtres
qui nous ont créés, leur qualité de présence,
leur m a n i è r e d'être, sont aussi très
importantes.
Le contact avec une "vraie" mère, épanouie,
dans une relation, non pas en mots, mais
archaïque, vibratoire, constitue peu à peu
au cœur de nous-même, au niveau affectif,
u n e s é c u r i t é de b a s e , q u e le p è r e va
confirmer.
Quand le père au moment de la naissance,
c o u p e le c o r d o n qui vient de cesser de
b a t t r e , il m a r q u e le p r e m i e r acte
d ' i n d é p e n d a n c e , la s é p a r a t i o n d'avec la
mère.
J ' a i t o u j o u r s été f r a p p é p a r ce c ô t é
c h a l e u r e u x des mères en Afrique ou en
Inde. Ce côté féminin, chaud et accueillant
est t r è s i m p o r t a n t . Il y a e n s u i t e le
processus d ' a t t a c h e m e n t de l'enfant à sa
mère, mais un a t t a c h e m e n t dans le bon
sens, p o u r a l l e r p e u à p e u vers plus
d'autonomie, d'indépendance, à partir d'une
sécurité au fond de lui qui va lui donner
confiance en la vie.
Pour pouvoir s'ouvrir à une confiance en la
vie, il faut d'abord s'ouvrir à une confiance
en soi-même que donne la mère. Pour un
petit, la mère est tout l'univers. C o m m e n t
avoir confiance en la vie si on ne trouve pas
que la vie est bonne ? La beauté de la vie
commence à se sentir dans les bras de la
mère.

J ' a i b e a u c o u p v o y a g é et ai f a i t de
nombreuses expériences en essayant de ne
pas me disperser. Dans m o n périple, j'ai
connu un chamane indien d o n t le maître
était un tibétain réputé. Il fait faire un très
beau travail qu'il appelle "la danse du feu".
Il danse p e n d a n t trois heures en rythme,
tandis qu'autour, les autres participants se
centrent sur lui. A un m o m e n t donné, tout
le monde s'arrête et lui continue à danser
puis se prosterne devant la réalité ultime. Je
me r a p p e l l e q u ' u n jour, au m o m e n t du
dernier pas, il a dit: "life is good" (la vie est
bonne).
Ce jour-là, je l'ai entendu pour la première
fois de ma vie. Ce n'était pas avec ma tête,
non je savais à cet instant que la vie est
bonne quelles que soient les souffrances,
quels que soient les événements difficiles
qui ont lieu, c'était fondamentalement vrai !
Si nous souffrons de ce qui se manifeste
dans la vie à l'extérieur, c'est uniquement à
c a u s e de n o u s , p a r c e q u e n o u s ne
connaissons pas le m o d e d'emploi et ne
respectons pas les lois de la vie.
Nous parlons toujours de la peur, mais la
p l u p a r t des enseignements font ressortir
que peur et désir sont accolés comme deux
d o i g t s de la main. L'un ne va pas sans
l'autre. Nous pouvons donc dire que pour
se libérer de plus en plus de la peur, il nous
f a u t n o u s l i b é r e r p r o g r e s s i v e m e n t des
désirs.
Pour la plupart des gens qui vivent dans le
monde et veulent vraiment vivre un chemin
spirituel, il est temps de tendre vers une
libération saine des désirs. Cela ne peut se
passer que dans un accomplissement sain et
i n t e l l i g e n t des d é s i r s . C ' e s t - à - d i r e en
r e t i r a n t la j o u i s s a n c e (dans le sens de
libido) des désirs. Retirer la satisfaction des
désirs, nécessite une maturation en spirale.
D a n s le c h e m i n q u i me c o n c e r n e , j'ai
beaucoup travaillé avec Swâmi Prajnanpad.
Il utilisait le terme "Boga" qui signifie :
"décider d'accomplir un désir en étant à la
fois a u s s i c o n s c i e n t q u ' u n m o i n e e n
méditation et en vivant, en même temps,
les s e n s a t i o n s c o m m e le p l u s g r a n d
jouisseur du monde. Vivre simultanément
les deux, devait amener à la fois à découvrir
qu'aucun désir d'un objet extérieur ne peut
être satisfaisant et à découvrir l'état sans
désir. À t r a v e r s l ' o b j e t d u d é s i r , n o u s
cherchons autre chose : retrouver un état de
non-séparation, un état sans désir, un état
de non-peur.

Cela me fait penser à cet analyste connu,


Lacan, qui disait que le bébé, au début de
sa vie, désire être le phallus de sa mère,
c'est-à-dire d'être complètement le désir de
sa mère. A un certain moment, cet enfant
r e n c o n t r e la loi du père. Le père, garant
symbolique de l'ordre, de la loi, empêche la
relation duelle entre le petit garçon et sa
m è r e . Il a m è n e a l o r s l ' e n f a n t d a n s s o n
é v o l u t i o n à r e c h e r c h e r d a n s des objets
extérieurs ce désir tout puissant de la mère
et c'est ainsi que toute sa vie il va se tourner
vers des objets extérieurs, chercher quelque
chose qu'il a perdu, la source, l'objet même
de ce désir.
Ainsi, dans la vie, nous ne trouvons jamais
la satisfaction de nos désirs. C'est un peu la
même chose sur le plan de la spiritualité : la
mère est la Grande Mère divine. C'est
pourquoi il est important de bien accomplir
un désir vital légitime, i m p o r t a n t de
pouvoir satisfaire des désirs de plus en plus
subtils jusqu'au désir d'être soi-même, le
beau, le bien suprême.
Dans toutes les traditions, on travaille sur
les émotions. Cela afin de se voir en face,
d'apprendre le discernement, ce qui est réel
de ce qui ne l'est pas.
Quelle que soit la préparation sur le plan
affectif, l'épuration que l'on aura faite, on
ne pourra vraiment sortir de la peur que si
on a touché la réalité ultime de soi.
Il y a dans ce chemin des étapes. Des idées
purement intellectuelles peuvent devenir
peu à peu plus pures et se rapprocher du
Réel. Le grand piège serait d'en arriver à
mépriser la personne, le petit "moi je", le
corps, la vie concrète, relative. Il ne faut
pas croire que ce monde relatif n'existe pas,
qu'il est illusion à supprimer. Malgré le
concept de Maya (l'illusion), c'est dans les
apparences, et non derrière, qu'il faut agir
et t r o u v e r l'ultime Réalité. Il faut
concentrer l'être profond au cœur de la
personne. C'est pour cela que tous les
aspects de notre vie sont importants.

Participant : Comment vaincre la peur ?

Dr. Bernanrd P e r n e l : Il est nécessaire


de s'ouvrir à l'énergie de la vie. Par exemple
un moine qui par peur, s'est coupé de son
é n e r g i e s e x u e l l e ne p o u r r a p a s ê t r e
pleinement d'accord avec son énergie de vie
et ne pourra donc pas la transmuter. La
peur fondamentale nous coupe de tous les
aspects de la vie.
La vraie non-peur pour moi, celle que mes
maîtres m'ont enseignée, est de ne pas avoir
peur d'avoir peur. Cela signifie qu'aucune
de mes peurs ne m'empêchera jamais de
faire ce que je considère comme juste de
faire, d'aller là où je considère comme juste
d'aller... Je ne m'identifie pas à cette peur.
Je crois que la vraie non-peur,
fondamentalement, est un sentiment très
profond de sécurité, de confiance, d'unité.

La recherche du spirituel n'est pas la


recherche d'un mieux-être, mais celle
d'être. La voie spirituelle ne s'oppose pas au
bonheur, mais elle n'est pas la quête.

P a r t i c i p a n t : Croyez-vous que nous


puissions nous dispenser du moteur de la
peur pour développer notre conscience ?

Dr. BernardPernel : Je pense qu'il faut


avoir vécu un état d'insatisfaction
important, quelque chose de négatif, pour
créer le désir de se développer.

P a r t i c i p a n t : Est-ce que la joie peut


être un bon remède à notre mal-être ?

Dr. Bernard Pernel : La joie n'est pas


un médicament, c'est la santé. Elle surgit
quand le "moi je" disparaît. La joie est un
attribut de la réalisation.
COMPRÉHENSION SPIRITUELLE
ET GUÉRISON

r. J e a n - M a r c M a n t e l : U t i l i s e r la
notion de compréhension spirituelle est
D
quelque peu ambigu. Comment peut-on
comprendre l'impalpable ? Il me semble
qu'il y a plusieurs sortes de compréhension :
celle qui reste sur un plan intellectuel, et
celle qui peut être vécue, intégrée. Dans
quelle mesure une compréhension intégrée
est-elle curative, est-elle un outil de
guérison ? Voilà le t h è m e de notre table
ronde qui est en quelque sorte une synthèse
de ces deux journées. Peut-être pourrions-
n o u s c o m m e n c e r en l a i s s a n t c h a c u n
exprimer ce que cela évoque pour lui.

Michel Sokoloff : pour moi, je ne parle


jamais d'une conceptualisation des choses.
Il y a toujours des choses qui m'arrivent...
Elles surgissent p r e m i è r e m e n t dans m o n
corps, dans m o n système émotionnel, et
sont parfois suivies par quelque chose que
l ' o n p o u r r a i t e f f e c t i v e m e n t a p p e l e r de
l ' o r d r e de l'esprit ; qui p e r m e t d'unifier
t o u t cela. Je dirai p o u r résumer, que ma
quête a toujours été le sens, les sens et une
rencontre totale à tous les niveaux, c'est-à-
dire une non-dualité, une unité qui est à ce
moment-là unifiée dans ce que j'appellerais
l'essentiel. Que reste-t-il ? L'essentiel de
cette rencontre à travers ces dichotomies
créées par le monde moderne, à savoir qu'il
y aurait un corps, une âme, un esprit, et
toutes sortes de morceaux spécialisés dans
le c o r p s . Je p e n s e ê t r e q u e l q u ' u n q u i
cherche plutôt à trouver la vérité par le bas,
que par le haut. Autrement dit, comme
pour Saint-François d'Assise, il est pour moi
plus important de pouvoir dialoguer avec
un brin d ' h e r b e ou un arbre, et de
comprendre l'humilité de la terre que
d'avoir seulement une vision de l'esprit.
C'est l'humus qui crée la vie.

BernardMirande : Dans une thérapie,


autant le thérapeute que son client veulent
que le symptôme disparaisse.
Effectivement, si le symptôme est là, nous
souffrons, nous avons peur de ce symptôme
qui est là et risque de rester. Or le but serait
d'arriver à réellement guérir. Le symptôme
a un sens, que nous pouvons voir au niveau
du corps, dans les problèmes de la vie de
tous les jours, de la personne. Ce
symptôme, en psychanalyse, lacanienne ou
jungienne, nous n'allons pas essayer de
l'effacer. C'est pourquoi nous avons besoin
d'un travail de soutien pour le corps qui
souffre, d'aller voir un médecin ou un
thérapeute qui va travailler directement sur
le corps. Essayer d'effacer le symptôme ne
l'empêche pas de revenir sous la même
forme ou sous une autre.
Pour qu'il ne revienne pas, il faut guérir non
seulement au niveau de son corps, mais au
niveau de son âme et de son esprit. La
compréhension doit donc se faire à ces trois
niveaux.

Nous confondons souvent le mental


avec l'esprit. L'esprit n'est pas le mental,
même si certains lacaniens ont pu donner
cette idée-là. Nous savons surtout que
l'analyse marche par le transfert, et donc
par une relation d'amour. Mais je pense
qu'il y a également une dimension de
l'esprit. Si nous arrivions à faire en sorte
que la psychanalyse rejoigne ce que tous les
grands mystiques et tous les grands sages
ont toujours dit, nous aurions une
psychanalyse mystique extraordinaire,
spirituelle.

Dans notre civilisation à l'heure actuelle,


je crois qu'il manque une philosophie liée à
toutes les thérapies. C ' e s t - à - d i r e que
chaque thérapeute travaillerait avec sa
méthode, mais devrait se retrouver autour
d'une même philosophie, une philosophie
concernant le corps, l'âme et l'esprit. Je
crois que cette philosophie passe par la
notion de karma. En analyse, nous pouvons
t o u t focaliser sur un p r o b l è m e de
souffrance. Prenons le cas par exemple de
l'obésité. Quelqu'un souffre d'un problème
au niveau du corps, il doit être guéri à ce
niveau-là. Si la personne arrive à
comprendre en fonction de ce qui s'est
passé avec son père et sa mère, pourquoi
depuis l'enfance elle a ce problème de
poids, mais qu'elle garde son problème de
poids, alors le thérapeute va essayer de
l'aider à comprendre autre chose. Quelle
est son attitude dans la vie de tous les jours,
qui fait que ce problème de poids subsiste ?
La personne va se rendre compte que ce
problème de poids est lié à ce qu'elle vit, à
ses confrontations au quotidien. Des rêves
très clairs l'indiquent. La personne arrive à
cette compréhension, mais le problème de
poids est toujours là. Alors le thérapeute va
p o u s s e r la p e r s o n n e à p o u r s u i v r e s o n
enquête à travers ses rêves. Et les rêves vont
indiquer que le problème de poids est lié à
u n e r e c h e r c h e i n t é r i e u r e qui n ' e s t pas
assouvie. C'est-à-dire qu'il y a problème de
poids parce qu'il y a encore un défaut, une
imperfection dans la réalité. N o u s allons
nous rendre compte que ce problème de
poids vient, par exemple, du fait de s'être
m o q u é , d a n s u n e vie a n t é r i e u r e , de
p e r s o n n e s qui s o u f f r a i e n t de ce m ê m e
p r o b l è m e , ou d ' a v o i r laissé t o m b e r
q u e l q u ' u n que l'on aimait mais qui avait
pris du poids. P o u r t a n t le p r o b l è m e de
poids reste toujours là, même si la personne
a compris beaucoup de choses. Plus tard,
des rêves arrivent en disant que, s'il y a un
p r o b l è m e de p o i d s , c ' e s t p a r c e que la
personne n'a pas réussi à trouver ce qu'elle
attendait de la vie. Et peut-être ce qu'elle
ne s ' e s t pas dit, c ' e s t q u ' i l f a u d r a i t se
réaliser, sortir de cette succession de vies,
sortir de son karma. En fait, si la personne
focalise comme cela sur son symptôme tous
les éléments liés à ce symptôme, jusqu'au
désir de réalisation, elle a fait le tour de ce
qu'elle avait à trouver en elle, c'est-à-dire le
désir de sortir de cette roue des existences
et d'atteindre le Nirvana.

Je p e n s e q u ' i l e x i s t e u n e v é r i t é
universelle, et cette vérité universelle doit
être reliée à ce que tous les t h é r a p e u t e s
devraient rechercher.
Mais quelques fois nous assistons aussi en
analyse à la disparition du symptôme afin
d ' é v i t e r la r e n c o n t r e s p i r i t u e l l e : "le
symptôme a disparu, j'arrête ma thérapie,
j ' a r r ê t e m o n a n a l y s e . Le s y m p t ô m e a
disparu, et bien la voie spirituelle que j'ai
suivie a marché. Ça y est, je vais b i e n . "
Mais plus tard, de t o u t e façon, q u e l q u e
chose n'ira pas bien à nouveau, parce que le
sujet ne sera pas guéri au niveau de l'esprit.
Les thérapies qui se mentent à elles-mêmes,
et n'utilisent pas une recherche au niveau
de l ' e s p r i t , s o n t i n s u f f i s a n t e s . E l l e s
d e v r a i e n t être reliées à la r e c h e r c h e du
d i s c e r n e m e n t spirituel, à la q u ê t e de la
vérité. Cette recherche de vérité partagée
manque à la psychanalyse qui s'est voulue
rationaliste. Heureusement, commencent à
fleurir des initiatives, comme l'AIPS depuis
quelques années, qui proposent la
rencontre entre la psychologie et la
spiritualité, entre les différentes recherches
spirituelles et les différentes recherches
thérapeutiques. Là, nous touchons ce qu'il
nous manque pour sortir finalement de
tous nos symptômes dérangeants, pour que
ces symptômes ne se reproduisent pas dans
la vie suivante. Si nous sommes heureux
dans cette vie pour les retrouver dans la vie
suivante, nous n'aurons pas réussi.
Je crois qu'à l'heure actuelle la philosophie
de la réincarnation et du karma est utile.
Elle n'est pas suffisante, mais elle est un
passage pour arriver à mieux se libérer du
symptôme.
Cette conscience qui est demandée
s'intègre par un travail intérieur, en tendant
vers une conscience cosmique, en suivant
donc une voie spirituelle en parallèle avec
un travail psychologique.
D r Bernard Pernel : Compréhension
spirituelle et guérison. De quelle
compréhension peut-il s'agir et de quelle
guérison ?
J'entends aussi le mot compréhension dans
le sens de p r e n d r e en soi, de devenir
vraiment. C'est, pour moi, lié à se
connaître : " c o n n a i s - t o i t o i - m ê m e "
vraiment !
La seule vraie maladie est celle du mental.
Si j'étais encore psychiatre, je dirais : la
maladie mentale, c'est la maladie du
mental. Comment guérir de cette maladie
qui consiste à p e r m e t t r e au "moi" de
s'impliquer dans tous les mécanismes de
son mental et de les considérer comme une
réalité ?
Pour moi, c'est cela la guérison. C'est en ce
sens que nous appelons le Bouddha le grand
médecin.

D r . J e a n - M a r c M a n t e l : De mon
point de vue, la compréhension peut être
considérée à plusieurs niveaux.
La c o m p r é h e n s i o n intellectuelle a
p r o b a b l e m e n t un intérêt, celui de
p e r m e t t r e une représentation, une
clarification des choses, mais elle a ses
limites. Elle n'est certainement pas
libératrice.
Mais il existe une compréhension de nature
différente. Par exemple, nous lisons une
phrase qui éveille à l'intérieur de
nous-mêmes un écho de vérité, quelque
chose qui ne ment pas, ne trahit pas,
comme un frémissement d'une réalité
profonde, et ce frémissement n'est pas
d'ordre mental. Il s'agit pourrions-nous
dire, de l'éveil de la vérité en nous. Cet
éveil de la vérité ne peut pas être mis dans
un cadre, ne peut pas être représenté. Il ne
peut être qu'expérimenté.
La vraie compréhension est vécue, intégrée.
Il n'y a plus de dissociation entre le langage,
la parole, le comportement et le vécu. C'est
ce qui fait la différence entre le philosophe
et le sage. Des philosophes ont pu manier
des concepts très remarquables, mais bien
souvent, ils n'en ont pas intégré la beauté,
l'amour et la splendeur, dans leur vie
quotidienne. Il ne les ont que pressentis. Le
sage ne parle que de l'expérience directe. Il
quitte le registre de la connaissance
conceptuelle.

Frédéric M a n t e l : Je voudrais abonder


dans ton sens en ce qui concerne la com-
préhension. Ce que nous appelons
"spirituel" se passe au-delà des mots et au-
delà de ce qui est connu. Ce n'est par
c o n s é q u e n t , plus une q u e s t i o n de
compréhension, mais une question de
réalisation. Cela a été évoqué dans le
message de Michel Sokoloff et du Lama
Denys. C'est quelque chose qui se passe. A
partir du m o m e n t où cela doit être
expliqué, parlé, cela devient un objet, et
nous ne sommes plus un avec cela. Ce n'est
plus du spirituel.

Participante : Avant de dire compréhension


je dirais acceptation parce que, s'il n'y a
pas d'acceptation, il ne peut pas y avoir de
compréhension.
M i c h e l S o k o l o f f : Accepter quoi ?
Comment vis-tu cette acceptation ? Peux-tu
l'exprimer ?

P a r t i c i p a n t e : C'est une expérience


vécue. Quand tu as une mort physique qui
est là, qui arrive, et qu'à un certain moment
on te dit de choisir entre la mort ou la vie.
C'est quelque chose de très fort. Tu as la
possibilité d ' a c c e p t e r la m o r t physique,
mais aussi celle d'accepter encore la vie.

M i c h e l SokoLoff : Oui, tu m'intéresses


tellement que je veux savoir le goût de la
chose ! Qu'est-ce que tu as comme goût ?
Sont-ce tes pieds qui frémissent ?

Participante : C'est mon cœur qui bat,


et mon cœur qui parle.

Michel Sokotoff : Non, le coeur ne parle


pas. Pour le moment, il parle en battant.

Participante : Je terminerai par le mot, le


silence. Actuellement j'ai le cœur qui bat,
(silence) là, tu l'entends ?

Michel Sokoloff : Oui, là j'ai compris.

Participante : Ensuite il y a l'acceptation


qui apporte une transformation parce que
tu existes d'une autre façon. J'accepte qu'il
batte, mais il va battre d ' u n e autre façon
une fois que j'aurai accepté la vie. Je suis le
mouvement de mon cœur, je suis le rythme,
il s'apaise.
Ensuite, cette a c c e p t a t i o n va m e n e r à la
transformation, à une guérison. Cela peut
être u n e g u é r i s o n m e n t a l e , celle qui va
t'amener à pouvoir toi-même guérir.

M i c h e l Sokotoff : Donc, au départ, tu


avais une question à poser, étais-tu malade?

Participante : Bien sûr, dans m o n corps,


dans mon âme, j'étais malade.

Michel Sokotoff : Tu sais jouer avec ce


coeur qui bat, et saisir les changements de
rythmes comme une danse avec lui, p o u r
arriver tout doucement à atterrir là où tu
es?

Participante : Oui, mais c'est lui qui joue


avec moi aussi.

M i c h e l Sokoloff : Bien sûr. Parce que


sinon on reste dans l'abstrait, et moi j'ai
envie d ' a v o i r le g o û t de l ' e x p é r i e n c e .
Autrement, je ne peux pas te connaître. En
fait, j'ai envie de t'embrasser, de te toucher.
Je suis dans l'interaction.

P a r t i c i p a n t e : Je crois que, par cette


expérience, nous pouvons atteindre la joie,
celle d'une existence vraie qui n'est pas
dans un monde de l'au-delà, mais qui est là,
maintenant et ici.

Michel Sokoloff : Tu sens cette joie-là?

Participante : Oui. Je dois terminer en


disant le silence et le verbe.

Michel Sokoloff : Et le verbe s'est fait


chair.
Merci beaucoup. Excuse-moi, mais j'avais
envie de te connaître.

DrJean-Marc M a n t e l : Le pouvoir
de guérison de l'acceptation est un beau
thème. Mais l'effort d'accepter est un état
de conflit. L'effort d'accepter signifie qu'il
y a un choix entre ce qui est bon et ce qui
n'est pas bon. Ce qui est bon pour moi et
ce qui n'est pas bon pour moi. Une lutte est
présente.

P a r t i c i p a n t : Goethe a dit "J'étais un


homme parce que j'étais un lutteur".

D r . Bernard Pernel : Il y a quelques


minutes j'ai fait l ' e x p é r i e n c e entre
l'acceptation et la résignation parce que
j'acceptais très mal ta manière d'intervenir,
Michel, je m'y résignais. Mais parce que j'ai
accepté de ne pas avoir pu accepter,
maintenant je suis bien.
Pour moi, c'est difficile de dire ce qu'est
accepter. Je crois que c'est voir en face,
simplement, reconnaître que c'est comme
cela. Voir, c'est tout. Ce qui me paraît
important dans le travail sur soi, est de faire
cette tentative. Mais le vécu de tous nos
refus sera le point d'appui de notre travail.
Prendre conscience de nos refus va nous
donner les points précis sur lesquels nous
allons essayer de desserrer l'emprise de ces
refus.
Un acte d'acceptation ne peut pas être
volontaire, volontariste. On arrive à
l'acceptation, dans un acte de lâcher prise.
On ne peut-pas faire un acte de lâcher-
prise. On peut faire un acte de
désagrippement et cela tombe tout seul.
Quelque chose surgit quand on accepte.
C'est généralement très paisible. Quand on
refuse, on est mal. Cette acceptation
pourrait donc être un axe de travail. Tenter,
dans toutes les situations que la vie me
propose, de dire oui. Cela rejoint ce qui a
été dit, s'ouvrir à l'ouvert, comme dit Yvan
Amar, s'ouvrir, embrasser, accueillir tout ce
qui vient. Mais en se confrontant au refus,
on voit ses limites, ce sur quoi on doit
travailler.
Il y a q u e l q u e chose qui m ' a b e a u c o u p
e n s e i g n é à ce sujet, c ' e s t le ski. Je m e
rendais compte q u a n d je montais sur des
skis en prétendant glisser, me laisser aller,
qu'en fin de compte, malgré moi, pour des
raisons inconscientes, je me crispais. Je me
p e n c h a i s vers l ' a v a n t et je m e t t a i s des
c a r r e s , et je t o m b a i s . P o u r m o i , sur le
chemin, c'est pareil. Dès q u ' o n m e t des
carres (l'écart), dès q u ' o n se crispe, on
tombe, on prend mal le virage, on ne fait
plus de surf sur les vagues de la vie. En fin
de compte, on ne fait plus l'amour avec la
vie. Cela est important. Dès qu'on se laisse
glisser, on fait réellement ce qu'on prétend
faire.
Si nous prétendons vivre, alors autant nous
laisser aller. Pour moi, l'acceptation c'est
cela. Il ne faut pas la c o n f o n d r e avec la
résignation qui est une fausse acceptation,
dénoncée dans beaucoup d'enseignements.
Mais il n'est pas t o u j o u r s facile de bien
prendre conscience que nous n'acceptons
pas. D a n s c e r t a i n s cas, n o u s c r o y o n s
accepter, et, en fin de compte, nous nous
résignons simplement.

Lama Denys Teundroup : Un mot sur


la guérison puisque le Bouddha fut
mentionné comme le grand médecin. La
guérison consiste à être en état de santé. Il
s'agit d'être sain, dans la santé de la vie qui
se vit. La confiance est le processus qui, de
maintes façons, permet l'intégration de la
santé fondamentale ; la santé est
foncièrement l'état naturel. L'harmonie est
santé ; c'est la vie qui se vit harmonieusement.
La maladie est dysharmonie.
Pour changer de sujet, il serait très utile,
comme vous le suggériez pertinemment, de
constituer un glossaire pour s'entendre sur
certaines notions et bien se comprendre. Il y
a une t o u r de Babel ; nous l'avons
découvert fort amicalement, Arnaud
Desjardins et moi, depuis des années, dans
ce que nous avons appelé : "un dialogue à
deux voix". Les mots sont souvent source
de malentendus...
Une parenthèse par rapport à l'acceptation.
Ne pas accepter le réel, n'est-ce pas
illusoire ? Dans l'acceptation du réel nous
avons néanmoins une certaine liberté de
choix, celle de dire non. Cette liberté est le
lieu de notre responsabilité.

B e r n a r d M i r a n d e : Ce qui est
important, je crois, pour chacun, c'est de
chercher la vérité à travers sa vérité. Mais je
pense que Dieu étant un, il n'y a qu'une
vérité. La remise en cause perpétuelle du
cherchant de vérité, cela est intéressant, et
d'accepter que chacun soit cherchant de
vérité à part égale, c'est extraordinaire.
Mais il ne peut exister qu'une seule vérité
qui est la cause de toute cause, qui est
Dieu. Ceux qui ont rencontré cette vérité
ont la sagesse de ne pas l'imposer aux
autres.

DrJean-Marc M a n t e l : Je voudrais
faire une remarque par r a p p o r t à
l'acceptation. Il me semble que c'est une
question importante. Lorsqu'il y a unité
avec ce qui est ressenti, la question de
l'acceptation ou du refus ne se pose pas.
L'acceptation appartient au temporel, elle
est sous-tendue par un désir de contrôle,
d'atteindre. Etre avec ce qui est ressenti, en
unité avec, implique qu'il n'y a plus de
place pour le conflit. L'unité avec ce qui est
ressenti ne se situe pas dans le temporel.
Elle est vécue dans l'instantané,
expérimentée au niveau corporel, au niveau
de l'écoute.
A PROPOS DES AUTEURS

S a m u e l D j i a n est d i p l o m é de Sciences
Politiques, licencié en droit et ancien élève de
l'Institut Français de Presse de Paris.
Il a entrepris l'étude de l'astrologie en 1972,
d'abord en autodidacte, puis auprès de Jacques
Berthon à l'Ecole Supérieure d'Astrologie de Paris
(1976-1977). Il a traduit deux ouvrages: de Dane
Rudhyar, Approche Astrologique des Complexes
psychologiques et Astrologie et Psychée Moderne
(Ed. Librairie de Medicis).
C o - f o n d a t e u r du groupe de Lucinges (Haute-
Savoie), Groupe de Recherche et de Partage pour
une Nouvelle Conscience (1985). Il a également
effectué des séjours en Inde pour étudier le Kriya
Yoga selon l ' e n s e i g n e m e n t de P a r a m a h a n s a
Yogananda (1978 et 1981) et à la Communauté de
Findhorn (Ecosse).
Conférencier, enseignant, consultant, traducteur,
écrivain, Samuel Djian diffuse l ' A s t r o l o g i e
Humaniste et Transpersonnelle dans l'esprit de
Dane R u d h y a r en i n t é g r a n t l ' a p p o r t d'autres
astrologues, notamment Charles Vouga et Germaine
Holley, et en respectant l'apport technique de la
Tradition.
Il a créé en 1995, avec son épouse Catherine, le
Centre de Recherches et d'Etudes Transpersonnelles
q u i p r o p o s e , p a r a l l è l e m e n t à la f o r m a t i o n
a s t r o l o g i q u e , u n t r a v a i l de d é v e l o p p e m e n t
personnel avec le thème natal comme support.

Robert J aure : D e f o r m a t i o n s c i e n t i f i q u e
( m i s s i o n d ' o b s e r v a t i o n en a s t r o n o m i e ) e t
philosophique. Enseignant et formateur en Afrique
n o i r e p u i s . F o n d a t e u r d u C e n t r e d ' E t u d e des
sagesses traditionnelles dans la Alpes maritimes.. Il
enseigne le yoga et le philosophie indienne p e n d a n t
une vingtaine d'années. Directeur de publication de
la r e v u e S o u r c e s p e n d a n t s e p t ans. Il c r é e s o n
c a b i n e t de f o r m a t i o n en e n t r e p r i s e et en milieu
institutionnel en 1992 et exerce comme professeur
d a n s u n e école d ' i n g é n i e u r . A la suite d ' a u t r e s
r e n c o n t r e s avec d e u x m a î t r e s c a l l i g r a p h e s , l'un
chinois et l'autre japonais, il étudie puis enseigne la
calligraphie sumi-e. Il a publié: Vaincre la peur, La
f e m m e à venir (Albin Michel), T o u t reprendre à
zéro avec J.C. Marol, chez Dervy livres. Il a écrit
d e u x o u v r a g e s :Les g r a n d s t e x t e s de l ' a v e n t u r e
intérieure et Spiritualité de l'instant.

Lama Denys Teundroup e s t le d i r e c t e u r


spirituel de la C o n g r é g a t i o n b o u d d h i s t e D a c h a n g
R i m a y d o n t d é p e n d e n t l ' I n s t i t u t K a r m a Ling en
S a v o i e e t p l u s i e u r s c e n t r e s d ' é t u d e s et d e
méditation en Europe.
Il p a r t i c i p e f r é q u e m m e n t à d e s r e n c o n t r e s
interreligieuses ou transdisciplinaires où dialoguent
grandes traditions et scientifiques. Il est par ailleurs
P r é s i d e n t h o n o r a i r e de l ' U n i o n B o u d d h i s t e
Européenne.

D r . J e a n - M a r c M a n t e l : Médecin psychiatre.
Ancien interne des hôpitaux psychiatriques. Formé
dans l'esprit de l'Advaïta-Vedanta. P r é s i d e n t
f o n d a t e u r de l'Association I n t e r n a t i o n a l e de
Psychiatrie Spirituelle et de l'Association Essence.
Organisateur des congrès Spiramed. Enseigne une
approche non dualiste dans la connaissance de soi,
le yoga et la méditation. Un recueil de textes a été
publié : "Au cœur de l'impensable", éd. Recto-
Verseau, 1999.

B e r n a r d M i r a n d e , né en 1949 à Montpellier, est


psychologue-onirothérapeute, D.E.A de littérature
française et c o n t e m p o r a i n e (1979). Il a suivi
pendant dix-sept ans (1978-1995), l'enseignement
spirituel de François Brousse (1913-1995), p o è t e ,
philosophe et métaphysicien.
Il exerce en libéral à Castelnau-le-Lez (banlieue de
Montpellier). Conférencier, il anime des groupes
t h é r a p e u t i q u e s sur le rêve et la p s y c h o l o g i e
spirituelle depuis 1980.
Il a créé l'Association S.O.N.G.E. (août 1981) pour
promouvoir l'étude des rêves et un enseignement
psychologique et spirituel universaliste.
Il est l'auteur du livre : "Le tarot initiatique et les
rêves" - Ed. François de Villac - 1992.
Dr. Bernard Pernel:Docteur en médecine,
neuropsychiatre, psychothérapeute. Ancien interne
des hôpitaux psychiatriques. Formation en lying,
p s y c h o t h é r a p i e humaniste, h a p t o n o m i e et
haptopsychothérapie, auprès de Arnaud et Denise
Desjardins, Swami Prajnanpad, Frans Veldman...
Depuis plusieurs années, travail et contacts
privilégiés avec Amrita Anandamayi ( "Amma") et le
maître spirituel américain Lee Lozowick.

M i c h e l Nicolas Sokoloff : Né en 1924 à St. Jean


Cap Ferrat (France), de parents russes émigrés.
Déporté en Allemagne entre 1942 et 1945.
D o c t e u r en Sciences H u m a i n e s , Sociologie,
Psychologie, Ethnologie. Psychothérapeute de 1958
à 1990. Fonde en 1975 le Centre Trimurti de
Recherches, à Cogolin, dans le Var.
Son axe directeur; Saisir le véritable processus par
lequel la réalité s'organise et un questionnement sur
la dissociation entre le sujet et l'objet (Descartes), et
comment Jésus, Don Juan (de Castaneda), le
B o u d d h a , etc... p r o p o s e n t une expérience
permettant à l'Esprit d'inventer de nouvelles voies
de connaissance de la réalité.
En 1990, il devient sculpteur et crée 250 sculptures
en état modifié de conscience (comme un mode
d'écriture automatique).
Pour toute information
sur les activités de Spiramed et de l'Association
Internationale de Psychiatrie Spirituelle,
veuillez s'adresser à:

essence

Association à but non lucratif


2094, avenue des Templiers,
06140 Vence, France
Tel.: +33 (0)4 93 58 53 53
Fax: +33 (0)4 93 58 53 63
Email: info@essence-euro.org
http://essence-euro.org
Diffusion:
D.G. Diffusion (France)
Transat diffusion (Suisse),
Raffin (Canada)
Rabelais (Belgique)

Editions Diamantel
BP 29 - 13390 Auriol - France
Tel / Fax: +33 (0)4 42 72 74 09
Email: diamantel@stel-fr.com
Site: http://www.stel-fr.com
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Ioana Morange
Djaï ou l'autre chant de la terre
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Le goût de la vie, confessions d'un ver à soie
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sur les presses de
l'imprimerie Grafica Santhiatese
13048 Santhià (VC)
Tel./Fax: +39. 0161 94287
Italie

D é p ô t légal: octobre 2000

Tous droits réservés. La loi du 11 mars 1957 interdit les


copies ou reproductions destinées à une utilisation
collective. Toute représentation ou reproduction intégrale
ou partielle faite par quelque procédé que ce soit,
photographie, photocopie, microfilm, bande magnétique,
disque ou autre, sans le consentement de l'auteur et de
l'éditeur, est illicite et constitue une contrefaçon
sanctionnée p a r les articles 4 2 5 e t suivants du C o d e pénal.
Michel Sokoloff
Bernard Mirande
Samuel Djian
Robert Faure
Dr. J e a n - M a r c M a n t e l
Lama Denys Teundroup
Dr. B e r n a r d P e r n e l

avec la participation de Frédéric Mantel


Participant d’une démarche de transmission de fictions ou de savoirs rendus difficiles d’accès
par le temps, cette édition numérique redonne vie à une œuvre existant jusqu’alors uniquement
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La couverture reproduit celle du livre original conservé au sein des collections


de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.

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La société FeniXX diffuse cette édition numérique en vertu d’une licence confiée par la Sofia
‒ Société Française des Intérêts des Auteurs de l’Écrit ‒
dans le cadre de la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012.

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