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Génétique des populations

et Evolution
Le contexte d’émergence de la GéPop.
Le modèle panmictique
Structuration des populations et écarts à la panmixie
Un facteur déterministe: la sélection naturelle
Un facteur stochastique: la dérive génétique
Espèces et spéciation
Les débats actuels

Cours de Mr Jean‐Rémi PAPE (MCU, Bordeaux 1)


1
Année 2014
G. Mendel
Recherche sur des hybrides végétaux (1865)

La situation antérieure…? (1860-1920)

C. Darwin
L’Origine des Espèces (1859)
2
1860-1900

Concept d’hérédité par mélange (ou


blending inheritance)

Transformistes

Evolution individuelle
Transformation
Transmission (hérédité des caractères
acquis)

________________________________
Darwinistes

Evolution collective (échelle de la Mendel : ségrégation


population polymorphe) des caractères
Tri (sélection naturelle) (réunion et
Fitness séparation d’entités
Hérédité par mélange / Hérédité des non-miscibles, les
caractères acquis allèles)

3
1900-1920

Gène, génotype, phénotype (W Johannsen)


Mutation (De Vries, C Correns et E Tschermack)
Mutationisme Génétique (W Bateson)

Tous les éléments sont là pour la découverte d’une


application majeure… la génétique des populations.
R.A. Fisher réconciliait théorie des facteurs alléliques
disjoints et maintien du polymorphisme génétique.
Les pères de la génétique des populations sont R.A.
Fisher, J.B.S. Haldane, S. Wright

4
L’espèce

Le concept typologique

Description et dépôt d’une « specimen type »


dans un Institut, faunothèque ou florothèque.

Le concept biologique

1. Ascendance commune
2. Plus petit ensemble de populations partageant
une ascendance et descendance commune
3. Communauté reproductive

Le concept phylogénétique

Une espèce correspond au plus petit ensemble


d’organismes partageant :

1. des caractéristiques permettant de le distinguer


d’autres ensembles du même type,
2. une ascendance et une descendance commune.

Ce concept définit une espèce aussi dans le


temps!!

Heteropoda maxima, Laos, 2001


La population

Une population est un ensemble d’individus :


1. appartenant à la même espèce
2. susceptibles de se reproduire entre
eux
3. occupant une aire géographique
commune
4. jouant un rôle particulier dans un
écosystème

Cette définition s’appuie sur deux critères :


Même espèce
Reproduction croisée
Et deux corollaires :
Aire géographique commune
Fonction écologique commune

ATTENTION! L’identification
d’une population peut être
rendue difficile par des
particularités d’ordre
éthologique, démographique ou
génétique, qui font que des
individus qui occupent la même
aire géographique et semblent
appartenir à la même espèce
ne se croisent pas (ex du
saumon rose).
6
Caractérisation des populations nord-américaines du
Saumon Rose :

Mdh: alloenzyme* malate deshydrogénase

*: Protéines présentant des activités enzymatiques qualitativement identiques,


codées par des allèles différents d'un même locus. Elles sont séparables par 7
électrophorèse et représentent des marqueurs génétiques codominants.
La Biologie des Populations

Les deux disciplines fondatrices de la Biologie


des Populations sont la Dynamique des
Populations et la Génétique des Populations.

La biologie des populations est une discipline


récente qui s’intéresse aux propriétés collectives
des individus organisés en populations et qui
analyse l’évolution de ces propriétés au cours du
temps :

• Abondance et variations d’abondance dans le temps


et l’espace

• Phénomènes démographiques par lesquels une


population se renouvelle et structures
démographiques (fréquence des différentes classes
d’âge et de sexe)

• Fréquence des génotypes (structure allélique),


degré de polymorphisme, le degré
d’hétérozygotie,…

• Structure sociale (organisation de la population


animale avec rôles différents des individus et
hiérarchie)
8
Le gène peut être considéré comme l’unité du
changement évolutif,

l’individu comme l’objet de la sélection,

et la population comme l’unité d’évolution.

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Génétique des populations
et Evolution

Le contexte d’émergence de la G.P.


Le modèle panmictique
Structuration des populations et écarts à la panmixie
Un facteur déterministe: la sélection naturelle
Un facteur stochastique: la dérive génétique
Espèces et spéciation
Les débats actuels…

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Notons dès à présent que la
génétique, par la découverte
progressive des processus de
« mutations » (mutations
géniques, chromosomiques et
génomiques), a répondu à une
question cruciale pour Darwin:
quelle est la source de la
variabilité phénotypique
observée?

En réalité, c’est encore un peu


plus élaboré…car du génotype
au phénotype, la relation est
souvent complexe
(épigénétique…)

11
Les niveaux d’investigation du polymorphisme:

1. Etude du polymorphisme phénotypique


2. Etude du polymorphisme protéique
3. Etude du polymorphisme génétique

Les pères de la génétique des populations sont R.A.


Fisher, J.B.S. Haldane et S. Wright
Pour tout gène, la diversité génétique d’une population
est appréhendée par sa composition génétique qui est
définie à trois niveaux:
• Phénotypes avec fréquences phénotypiques
• Génotypes avec fréquences génotypiques
• Allèles avec fréquences alléliques

12
13
Le modèle de HW

•Formation des couples: condition de panmixie

•Probabilités et fréquences des évènements:


condition d’effectif infini de la population

•Gamétogenèse: condition d’absence de mutation

•Fécondation: condition d’absence de sélection


gamétique

•Développement des descendants: condition


d’absence de sélection zygotique

•Fréquences des génotypes chez les adultes


reproducteurs de la génération suivante: condition
d’absence de sélection et de migration

14
La génétique des populations est la
science qui :
•décrit la structure génétique* des populations
•étudie les forces qui modifient les populations

* La structure génétique d’une population est renseignée par


les fréquences alléliques ou génotypiques de gènes ou
groupes de gènes.

Fréquences génotypiques attendues dans la population


si équilibre de HW?
Dans le cas d’un gène autosomique diallélique (sexes séparés, générations séparées):

F(A)n = p
15
F(A)n+1 = p2+2pq/2 = p (p+q)= p
Fréquences génotypiques et alléliques au sein des
populations humaines
Cas du système de déterminant antigénique sanguin MN

16
Une population à l’équilibre pour un ou plusieurs loci maintient
son polymorphisme génétique en l’état.

17
Une population où les croisements se font au hasard est dite
panmictique.
Au contraire, on dit qu’une population est structurée
lorsqu’elle est composée de sous-populations génétiquement
différenciées.

Question posée : Comment savoir si des populations


sont génétiquement différentes?

Exemple tiré de la vie courante : on compare le


public de deux salles de cinéma et on constate
que dans l’une il y a plus de garçons que de
filles, et dans l’autre, plus de filles que de
garçons. On voudrait savoir si la différence
tient au hasard, ou au fait que chaque film
attire des publics différents. Pour le savoir,
on doit d’abord vérifier que les deux
populations ne sont pas le résultat de tirages
au hasard dans un système binomial.

1. Si on prouve que la différence entre les deux


salles est trop importante pour être due au
seul hasard, alors cela renforce la thèse
qu’une autre cause intervient (test de
l’équilibre de HW)

2. Et l’on peut avancer l’explication que cela


vient du film (NB : mais cela ne démontre pas
que cette hypothèse est vraie).

18
Notion de diversité allélique

C’est la probabilité de tirer au hasard deux allèles différents à


un locus dans une population.

Exemple: locus à 2 allèles M et N; la probablité de tirer deux


fois le gène M (M/M) est de p2 et la probabilité de tirer deux
fois le gène N est de q2. La probabilité de tirer deux fois le
même gène est donc p2 + q2

S’il y a plus de 2 allèles et que l’on appelle i le ième d’entre


eux, cette probabilité devient : Σ pi2

La probabilité de tirer deux allèles différents est donc:


H = 1 – Σ pi2

Dans le cas à deux allèles (M et N), cette fréquence est égale à


2pq.

Dans le cas général, elle est égale à la fréquence attendue des


hétérozygotes. La fréquence attendue des hétérozygotes
s’appelle aussi Hétérozygotie (notée HT).

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Génétique des populations
et Evolution

Le contexte d’émergence de la G.P.


Le modèle panmictique
Structuration des populations et écarts à la panmixie
Un facteur déterministe: la sélection naturelle
Un facteur stochastique: la dérive génétique
Espèces et spéciation
Les débats actuels…

21
Une population où les croisements se font au hasard est dite
panmictique.
Au contraire, on dit qu’une population est structurée
lorsqu’elle est composée de sous-populations génétiquement
différenciées.

La signature de la structuration est le déficit d’hétérozygotes


de la population générale.
La proportion réelle d’hétérozygotes n’est plus 2pq, comme
attendu, mais : H = 2pq – 2pqF = 2pq (1 – F)

Dans cette formule:

H est l’hétérozygotie moyenne des sous-populations (c’est-à-


dire la moyenne de leurs diversités alléliques) appelée HS,

2pq est l’espérance de l’hétérozygotie de la population


totale, c’est-à-dire sa diversité allélique, que l’on préfère
appeler HT,

F, déficit d’hétérozygotes, sorte de coefficient de


consanguinité moyen des sous-populations appelé FST pour
marquer son usage comme indice de différenciation.

Ce qui fait écrire: FST = (HT – HS) / HT

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Deux modèles populationnels de différenciation

A, phylogénie en étoile: la différenciation des populations dépend


directement du rapport du temps sur la taille de la population (t/2N).

B, modèle en île: la différenciation mène à un équilibre dépendant du


nombre absolu de migrants.

23
Une manière facile de comparer la diversité des espèces est de mesurer le
polymorphisme des allozymes. Les allozymes (ou "alloenzymes") ont été
utilisés pour la première fois en génétique des populations en 1966 par
Hubby et Lewontin (chez Drosophila pseudoobscura) et par Harris (chez
l'homme).
Les différents allèles sont identifiés par leur vitesse de migration, c'est-à-
dire, dans la pratique, par leur distance de migration par rapport à la ligne
de départ, après un temps fixe de migration.

Noter :
- chez l’homme, seulement 8,8 %
des différences génétiques à
l’échelle planétaire tiennent à
l’une des grandes divisions
géographiques.
- chez un petit peuple de
chasseurs-cueilleurs amazoniens
organisés en clans fermés
(Yanomami) la différenciation
interne est aussi grande qu’à
l’échelle macrogéographique,
malgré une variabilité générale
très basse.
- que certaines espèces sont très
différenciées pour des raisons de
comportement social (rat
kangourou)
- que le colibacille est très
polymorphe et très peu
différencié : il y a beaucoup de
migration.

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Titre
Isolement reproducteur par homogamie entre deux «races
d'habitat» sympatriques chez Drosophila melanogaster
(Reproductive isolation through homogamy in two sympatric «habitat reaces» of Drosophila
melanogaster)

Auteur(s) PAILLETTE M. ; CAPY P. ; PLA E. ; DAVID J. R.


Affiliation(s) du ou des auteurs CNRS, lab. biologie génétique évolutive, 91198 Gif-sur-
Yvette, FRANCE

Résumé Il est mis en évidence une situation d'homogamie dans


deux races d'habitat quasi-sympatriques dans la région de
Brazzaville au Congo chez Drosophila melanogaster. Cette
homogamie (indice d'isolement 0,2) contribue a maintenir distinctes
ces deux races. L'une (Loua = L), d'origine campagnarde, vit sur
des résidus de manioc, l'autre, citadine (K), se trouve dans et à
proximité des bars et utilise les résidus de bière dans les bouteilles
vides. Elles sont morphologiquement indiscernables, mais se
distinguent par leurs génotypes enzymatiques pour l'allèle de
l'alcooldéshydrogénase. Cette enzyme, liée à la tolérance à l'alcool,
se retrouve dans 85 % des individus K et seulement 5 % des L dans
la nature (100 % et 0 % respectivement par sélection au
laboratoire).

Revue Revue d'écologie 1993, vol. 48 (n° 2) pp. 229-238

25
26
27
Evolution des fréquences génotypiques dans le cas de
l’autofécondation

28
Populations humaines et consanguinité

Evolution de la fréquence des mariages consanguins en France au début du


XX ème sciècle (Sutter et Goux.,1962, Population 17: 683). [Nombre de
mariages consanguins pour 1000 naissances ]

Période étudiée 1926-30 1931-35 1936-40 1941-45 1946-50 1951-55 1956-58

Cr. oncle x nièce 0,2 0,16 0,14 0,06 0,12 0,13 0,06
Cr. cousins germains 9,1 7,2 5,8 5 3,4 2,4 2,1
Cr. cousins inégaux 2,9 2,2 1,8 1,8 1,3 1 0,8
Cr. issus de germains 11 9,6 6,9 6,7 5,9 4,6 4,1
-5
ca. 10 86 68 57 52 36 27 23

Comparaison des fréquences d'anomalies observées entre descendants de


cousins germains et ceux de conjoints non apparentés (D'après Sutter et
Tabah, 1952, Population 7:249).

Loir et Cher Morbihan


Familles témoins Cousins germains Familles témoins Cousins germains

Nombre d'enfant/famille 2,32 2,2 2,37 3,45


Taux de mortalité périnatale (°/°°) 29 55 37 101

Proportion d'enfants anormaux [non tuberculeux] (°/°°) 16 163 19 132


Proportion d'enfants tuberculeux (°/°°) 16 7 15 35
29
Génétique des populations
et Evolution

Le contexte d’émergence de la G.P.


Le modèle panmictique
Structuration des populations et écarts à la panmixie
Un facteur déterministe: la sélection naturelle
Un facteur stochastique: la dérive génétique
Espèces et spéciation
Les débats actuels…

30
En génétique des populations, on distingue 3 types de
mutations :
- avantageuses
- neutres
- désavantageuses (délétères, létales)
De ce fait, trois types de mutations déterminent trois types de
modèles sélectifs.

31
Le théorème fondamental de la sélection naturelle : R.A.
FISHER (1890-1962)

C’est la démonstration mathématique que la ségrégation des


facteurs alléliques (théorie Mendélienne) peut participer au
maintien du polymorphisme génétique. Le concept
d’hérédité par mélange (blending inheritance) s’efface.

Quantifier et modéliser l’évolution génétique des


espèces en particulier sous l’action de la sélection
naturelle

32
Modèle génique
On nomme ainsi un modèle où
la valeur sélective des
hétérozygotes est
intermédiaire entre celles des
homozygotes. C'est le modèle
le plus simple parce qu'il est
additif : tout se passe comme
si chaque gène ajoutait une
dose unitaire d'avantage
sélectif. Dans ce modèle, on a
par
définition (w11 - w12 ) = (w12
- w22 ) , c'est-à-dire h = 1/2.
La fréquence de l’allèle A
augmente de façon continue
selon une courbe en « S dite
courbe logistique.

33
On ne l'observe pas dans les
populations naturelles. Il peut
cependant avoir une certaine
pertinence pour expliquer
l'instabilité des populations
hybrides entre espèces
différentes, qui retournent
souvent vers l'un des types
parentaux.
Ce phénomène, la "réversion",
a été reconnu par les
horticulteurs dès le
début du 19ème siècle.
Grands amateurs
d'hybridation interspécifique
pour créer
de nouvelles variétés, ils
avaient du mal à stabiliser
certaines de leurs créations.

34
On voit que lorsque p est
inférieur à sa valeur
d'équilibre, p est positif,
donc p augmente.
Inversement, lorsque p est
supérieur à sa valeur
d'équilibre, p est négatif,
donc p diminue.
Par conséquent, peq est un
équilibre stable : lorsqu'on
s'en éloigne, on y revient ..
Ce modèle s'appelle modèle
de l'hétérosis. Il a été
découvert par Fisher, et a
très longtemps passionné les
généticiens des populations
(notamment Teissier en
France et Dobzhansky aux
Etats-Unis), parce qu'il offre
une explication possible au
polymorphisme des
populations naturelles. Si les
hétérozygotes sont
avantagés, alors le
polymorphisme se maintient
aussi longtemps que subsiste
le modèle déterministe.

35
36
How is it, then, that selection against extremes
has not led to genetic uniformity?

3 raisons peuvent être évoquées:

• Different types may be favoured by selection at


different times or in different places

•The fittest type may be a heterozygote

•The fitness of genotypes may vary with frequency,


increasing as they become rarer

Dans « The Theory of evolution », J. Maynard Smith, 1993,


Cambridge University Press

37
Le paysage adaptatif de Wright

38
Trois cas de pressions évolutives sur
un caractère quantitatif (phénotype).

*
On distingue diverses formes de sélection quantitative :
‐ sélection normalisante : défavorable aux individus qui s’éloignent d’une
valeur optimale
‐ directionnelle : qui tend à accroître (ou diminuer) la valeur d’un
caractère : par ex, la taille
‐ disruptive : qui tend à favoriser deux types discrets sans intermédiaires.
C’est le cas des mâles « forts » et « faibles » dans les espèces où deux
types de mâles existent (par ex. insectes à mâles ailés ou aptères), des
espèces où mâles et femelles ont des niches écologiques différentes ou
un phénotype différent (par ex. la bonellie), et lorsque les hybrides entre
deux espèces naissantes sont moins bien adaptés que les espèces
parentales.

* exemple observé en temps réel dans la nature, pinsons de terre à bec 39


moyen(Geospiza fortis), île volcanique Daphné, Galapagos, PR Grant , Science, 2006
40
P L’Héritier (à gauche) et G Teissier (à droite) complètent dans les
années 1930‐40 la théorie (théorème fondamental de Fisher,
théorie d’Haldane) avec la démonstration expérimentale en
laboratoire.
Ceci est rendu possible grâce à la cage à population (encore
appelée démomètre).

En 1965, T Dobzhansky réalisera des expériences similaires sur


des populations naturelles de Drosophila pseudoobscura avec des
résultats tout aussi probants!

La théorie synthétique de l'évolution (TSE)


Au début des années trente, les recherches entreprises indépendamment par R.
A. Fisher, S. Wright, J.B.S. Haldane, G. Teissier et P. L'Héritier ont assuré la
réactualisation du darwinisme en le faisant bénéficier de l'acquis de la génétique
des populations. Elles ont conduit, par intégration des données accumulées par
les systématiciens de populations et les écologistes, à la théorie synthétique de
l'évolution. Leur mérite essentiel a été de faire comprendre que la sélection
naturelle était un processus statistique jouant en termes de probabilités sur des
populations... Le plus apte dispose, dans des conditions définies, d'une
probabilité plus grande de transmettre ses caractères. La sélection naturelle
assure en fait la transmission statistiquement préférentielle des génotypes...
(E. Mayr, 1964 in Enc. Univ. 1968) 41
Dans un démomètre…
• Quelques milliers d’individus
• Aucune émigration, aucune
immigration
• A intervalle régulier, dépôt de
godets de nourriture pour les larves
• Nourriture très pauvre (moins de
10% des larves écloses atteignent
l’âge adulte)
• Possibilité de récupérer (sans ouvrir
la cage) un échantillon de la
population

Expérience 1 avec variabilité génétique sur un gène codant


le caractère « ailes vestigiales »
• 2 allèles vg et vg+; p(vg)=0,5 au départ à la génération 0;
• p(vg)=0 à la fin de l’expérience à la génération 8 (environ
3 mois);
• différences de compétitivité entre génotypes;
• les valeurs sélectives des génotypes s’établissent ainsi
vg+/vg+ > vg+/vg > vg/vg ;
• élimination de l’allèle défavorable dans les conditions de
l’expérience
•La sélection ne maintient pas la variabilité au sein de la
population 42
Expérience 2 avec variabilité génétique sur un gène codant le
caractère « ebony » du corps
• 2 allèles e et e+; p(e)=0,999 au départ à la génération 0;
• p(e)=0,145 (diminution jusqu’à la génération 54 (environ 20
mois) puis stabilisation à cette valeur;
• différences de compétitivité entre génotypes; les valeurs
sélectives des génotypes s’établissent ainsi e+/e > e+/e+ >
e/e ;
• hétérozygotes sont favorisés, maintien des 2 allèles
• Supériorité des homozygotes e+/e+ sur e/e est responsable
de la différence entre p et q
• La sélection maintient la variabilité au sein de la population
• La conservation du génotype le moins adapté constitue le
fardeau génétique ségrégationnel

43
Un exemple de sélection à valeur sélective variable :
exemple de la sélection dépendant de la fréquence

Un exemple classique de sélection dépendante de la fréquence est


l'avantage du mâle rare chez Drosophila melanogaster. Deux types de
gènes sont en compétition, "oeil white" [w], récessif, et son allèle
sauvage [+]. L'allèle w a un avantage, la fréquence d'équilibre se
situant vers q(w) = 60 %. On observe que cet équilibre est dû à un
avantage des mâles du génotype rare. Evolution possible: q augmente.

En effet, les deux phénotypes courtisant les femelles de façon


différente (de manière frontale ou dorsale), ils sont en compétition
pour des aires différentes autour de la femelle. (D'après C. Petit, 1958)

Pourquoi q n’augmente-t-il pas et reste-


t-il stable?
Si l'avantage sélectif d'un allèle devient
supérieur à la moyenne de la population
lorsqu'il est rare, et inférieur lorsqu'il
est fréquent, alors il se maintiendra à
des valeurs intermédiaires fluctuant
autour d'une valeur d'équilibre. C'est un
mécanisme possible de maintien du
polymorphisme génétique.

44
Un exemple de polymorphisme équilibré

La phalène du bouleau (Biston betularia) présente deux variétés


interfécondes qui ne diffèrent que par un caractère : leur couleur. L’une
claire (typica) et l'autre sombre ou mélanique (carbonaria).

Résultats d'expériences de lâchages-recaptures de formes


claires ou foncées de Biston betularia ( Kettlewell, 1973).

Région industrielle Birmingham Région rurale de Dorset


Région polluée Région non polluée
Couleur papillon Claire Foncée Claire Foncée
Nbre pap. lachés 64 (29%) 154 (71%) 393 (49%) 406 (51%)
Nbre pap. recapturés 16 (16%) 82 (84%) 54 (74%) 19 (26%)
Taux de recapture 0,25 0,53 0,14 0,05
relatives 0,47 1 1 0,36 45
Un exemple de polymorphisme équilibré

L’anémie à hématies falciformes

*: fitness des différents génotypes : viabilité de la


naissance à l’âge reproductif, en région impaludée.

Elle se rencontre chez l’homme dans les régions d’Afrique


tropicale où sévit le paludisme (Plasmodium falciparum).

Alors que l’homozygote pour la mutation HbS a une fitness très


faible, l’hétérozygote avec l’allèle commun HbA / HbS a une
survie au parasite plus élevée qu’aucun autre génotype.

On voit que l’allèle commun de l’hémoglobine (HbA) a une


fitness inférieure aux hétérozygotes, mais supérieure à celles
des homozygotes pour les allèles mutants (HbC, HbS) et à celle
de l’hétérozygote double mutant (HbC/ HbS).

46
L'allèle S, est un allèle anormal du gène codant pour la chaîne
bêta de l'hémoglobine.

Fitness moyenne de l’allèle S


p x 0 + (1-p) x 1,15
Fitness moyenne de l’allèle A
q x 1 + (1-q) x 1,15 ce qui s’écrit aussi, en tenant compte du fait que p + q = 1,
(1-p) x 1 + p x 1,15
Pour atteindre la stabilité (polymorphisme équilibré), les fitness moyennes des
deux allèles doivent être égales :
p x 0 + (1-p) x 1,15 = (1-p) x 1 + p x 1,15
Résolution pour p :
p = 0,11 ce que l’on observe sur le terrain

47
Un exemple de sélection sur des caractères quantitatifs

Exemple de survie différentielle en fonction de la taille :

Karn & Penrose (1951) ont suivi 13.730 bébés pendant les 28
premiers jours de leur vie.
Sur les 6.693 filles, ils observent une survie s = 0,959 ± 0,02,
avec de grandes disparités selon le poids [0,985 ± 0,003 de
7,5 à 8,5 livres, 0,414 ± 0,037 en dessous de 4,5 livres, et
0,905 ± 0,064 au dessus de 10 livres].

Cette survie différentielle détermine un changement du


poids moyen à la naissance de 7,06 à 7,13 (+ 1%), et un
changement de déviation standard, qui décroit de 1,22 à
1,10, soit de 10%. Ce phénomène a pour effet de diminuer
la variance.

48
Cas des mutations désavantageuses
Populations naturelles et cryptopolymorphisme

Expérience de Mukai et Yamaguchi (1974)


in Genetics, 76: 339‐366

49
Expérience de Mukai et Yamaguchi (1974)

Les deux distributions se chevauchent à peine montrant que la plupart des


chromosomes chez les inbred portent des mutations affectant la survie.
• On peut en déduire que dans les conditions naturelles, les gènes létaux
ou délétères se manifestent très peu parce qu’ils sont à l’état
hétérozygote.
Le génome est donc soumis à une pluie continuelle de mutations
désavantageuses qui sont éliminées par la sélection naturelle : c'est la
sélection conservative.

La banque de mutations délétères qui « dort » dans le génome, son renouvellement par
mutation et sa disparition par purge, est redevenue d'actualité récemment pour
deux raisons. La première vient de la multiplication des espèces menacées et
suivies en biologie de la conservation. Ces espèces ont des effectifs petits, ce
qui a deux conséquences:
1. D'une part, une consanguinité accrue qui augmente la dépression de
consanguinité.
2. D'autre part, la dérive génétique qui mène à la fixation aléatoire de gènes
faiblement délétères, entraînant le phénomène de fusion génomique (genome
meltdown), un processus encore hypothétique, selon lequel l'adaptation d'une
population s'étiolerait lorsqu'elle passe durablement par un faible effectif.

Question : pourquoi, au bout d’un certain temps, tous les gènes n’ont-ils pas
accumulé des mutations délétères chez tous les individus ?

Réponse : les expériences de Mukai, et plusieurs autres ensuite, on montré que les
mutations délétères ont un léger effet de dominance. Il y a donc variation au
sein de la classe des individus outbred selon le nombre de mutations délétères :
cela explique en partie l’étalement de cette distribution. Les mutations
délétères sont donc éliminées lentement à l’état hétérozygote, sans affecter
grandement la survie.

50
Génétique des populations
et Evolution

Le contexte d’émergence de la G.P.


Le modèle panmictique
Structuration des populations et écarts à la panmixie
Un facteur déterministe: la sélection naturelle
Un facteur stochastique: la dérive génétique
Espèces et spéciation
Les débats actuels…

51
Cas des mutations neutres

Question. Puisque les mutations délétères sont souvent éliminées,


et que les mutations avantageuses sont rapidement fixées (sauf dans
le cas de l’hétérosis), pourquoi les populations sont-elles
polymorphes ?

Réponse. Parce que la plupart des allèles présents dans une


population peuvent être considérés comme neutres. On appelle
«neutre » un allèle dont l’avantage ou le désavantage sélectif est
inférieur à 1/2N. Cette valeur est la conséquence de modèles
mathématiques que l’on ne détaillera pas ici.

L’équilibre neutre mutation-dérive

A propos de la dérive il faut savoir que tout allèle appartenant à


une population de 2N gènes a une probabilité 1/2N de remplacer
tous les autres au bout d’un temps suffisamment long (par exemple
A1 remplace A2, A3 et A4 au locus A). Une fois ce temps écoulé, les
gènes présents sont donc les descendants de ce gène de départ, et
les allèles que l’on observe sont les gènes issus de lignées ayant subi
une mutation dans l’intervalle (A1a, A1b, A1c). Ajoutons que ces
mutations sont neutres, sinon elles auraient été soit fixées, soit
éliminées.

52
Le hasard de la transmission génétique

Dans une population d’effectif stable N, dans le cas d’un allèle à un locus
quelconque, (ou chaque famille a en moyenne deux descendants) on a alors:
p = (1‐1/2N)2N = 0,367

Cette valeur, p = 0,367, et plus grande que la valeur mesurée dans le cas où la
taille des familles est strictement égale à 2, p = 0,25.

Ce phénomène est utilisé en biologie de la conservation des espèces captives


(comme dans les parcs zoologiques) où on égalise la taille des familles pour
diminuer la vitesse de perte de lignées génétiques.

A chaque génération, 36,7 % des allèles d’une population d’effectif stable ne


sont pas transmis à la génération suivante : des lignées génétiques
disparaissent.

Au bout de 2 générations, la probabilité est de 0,55 si la population est


d’effectif stable. Au bout de 7 générations, on passe à 80%, etc.

53
The Buri’s Drosophila experiment (1956)

• Heterozygote frequency = 2 pq
– Alternatively 2p(1‐p)
– At a maximum when p = 0.5
• 107 lines of 8 females 8 males
• Start p = q = 0.5
• Qualitative: heterozygosity decrease
• Quantitative: for population with size 16, heterozygosity should
follow dashed line; instead followed solid gray line – the prediction for
n=9

54
55
Dans une population
de 10 individus
diploïdes, on va fixer
rapidement un allèle ou
un autre. Notez la très
grande amplitude des
changements de
fréquence d'une
génération à l'autre.
Dans une population
de 50 individus, un
polymorphisme va
pouvoir être maintenu
pendant une plus
longue période, mais au
final on aura aussi
fixation ou perte
d'allèle. Les fréquences
alléliques varient
toujours fortement
d'une génération à
l'autre. Avec 500
individus, aucune
population n'a fixé
d'allèles au bout de 150
générations. Les
variations de fréquences
alléliques sont aussi de
plus faible amplitude.
Les fréquences varient
relativement faiblement
autour de la fréquence
initiale. La moyenne des
fréquences alléliques
tend vers la fréquence 56
initiale.
Noter que deux lignées fixées ont une chance sur deux d’avoir fixé le
même allèle. Sur n loci bialléliques de fréquence initiale 0,50,
elles auront fixé le même allèle une fois sur deux en moyenne.

Plus généralement, on voit que l’on peut espérer mesurer le temps


écoulé en examinant la forme de la distribution, comme si la
dérive constituait une sorte d’horloge.

Noter cependant que l’on ne peut se fier à seulement deux


populations pour un locus, car elles peuvent avoir divergé dans le
même sens. Il faut, soit prendre un grand nombre de
populations, soit un grand nombre de locus.

On démontre alors que la variance des fréquences alléliques


s’accroit avec le temps suivant une formule mathématique
simple.

Conséquences :

(1) Les populations devraient devenir monomorphes. Or elles sont


polymorphes. Cela est dû au fait qu’il y a restauration de
variation génétique par les mutations. Hormis certains cas de
sélection, toutes les mutations que l’on trouve dans une espèce
sont donc relativement récentes. On ne le démontrera pas ici,
mais « récentes » signifie moins que 4N générations.

(2) L’hypothèse nulle en génétique des populations n’est pas la fixité


des espèces, puisqu’il y a changement de matériel génétique.

57
58
59
Effet fondateur, dérive génétique et populations
humaines

Comparaisons des constitutions géniques pour divers groupes


sanguins, entre des populations d'Europe occidentale relativement
isolées et leurs populations voisines. (Daprès Mourant,1983, et
Roychoudhury et Nei, 1988).

(Allèle d pour Rhésus, Allèle K pour Kell, Allèle M pour MNS)

% des allèles à différents loci


A B O
I I I M d K
Islandaise 20 5 75 58 37 5
Irlandaise 17 7 76 57 43 4
Iles hébrides 18 7 75 70 37 5
Anglaise 27 5 68 54 40 5

Basque 24 2 74 63 56 5
Béarnaise 23 2 75 45 50 4
Corse 22 6 72 48 37 6
Française 26 6 68 52 42 4

Sarde 20 7 73 75 22 3
Italienne (Sud) 24 8 68 66 22 4

Bergamasque 24 6 70 56 43 5
Ladinienne 20 3 77 78 56 *
Allemande 28 9 63 54 43 4
Autrichienne 29 11 60 55 41 4

60
L’effet fondateur (1)

L'effet fondateur a cependant pu être clairement démontré par des


expériences en laboratoire (Dobzhansky et Pavlovsky, 1957).

20 populations expérimentales de Drosophila pseudoobscura ont été


constituées ayant chacune 50 % de chromosomes III possédant
l'arrangement Arrowhead [AR] et 50 % le type Pikes Peak [PP]. Donc
la moitié des individus est AR/AR et l’autre moitié PP/PP.

•10 de ces populations ont été fondées par 20 individus


•10 autres par 4000 individus.

RESULTAT 1: après 18 mois d'évolution séparée, chaque population


avait atteint un effectif de plusieurs milliers et les fréquences du type
[PP] ont été observées. Les fréquences moyennes étaient similaires
pour les populations petites à l'origine (0,27) et pour les grandes
(0,33).
NB: Ce résultat était conforme à des observations antérieures montrant que le
génotype PP/AR présentait un avantage sélectif par rapport aux deux autres.

61
L’effet fondateur (2)

RESULTAT 2: la variance des fréquences observées était quatre fois


plus grande (118,91 contre 27,96) dans les populations issues
d'un petit nombre de fondateurs.

INTERPRETATION:
1. L'augmentation de la diversité observée a été interprétée en
supposant que les valeurs sélectives des génotypes PP/PP,
PP/AR, et AR/AR dépendent également du reste du génome
dans lequel se trouvent ces chromosomes.
2. Cet "environnement génique" est d'autant plus différent entre
les populations (dérive génétique) que ces populations ont été
fondées par un petit effectif.
3. Cette plus grande variabilité ne masque pas l'évolution
moyenne vers une plus basse fréquence de chromosome PP,
mais la module considérablement.

62
Variations de la structure génétique inter- et intra-
populationnelle.

63
Impacts ciblés des facteurs d’évolution
sur la fréquence allélique.

64
Génétique des populations
et Evolution

Le contexte d’émergence de la G.P.


Le modèle panmictique
Structuration des populations et écarts à la panmixie
Un facteur déterministe: la sélection naturelle
Un facteur stochastique: la dérive génétique
Espèces et spéciation
Les débats actuels…

65
Même espèce ?

1 mm

Drosophila melanogaster Drosophila simulans

NON!

Espèces différentes ?

Motacilla alba alba Motacilla alba yarrellii


Bergeronnette grise

NON!
66
67
68
Répartition géographique des 5 grand groupes
biochimiques de souris d’Europe

On observe une zone d’hybridation dans le Sud Est de la France entre Mus
musculus domesticus et Mus musculus musculus. Il existe un IR post-
zygotique intrinsèque incomplet.

69
Représentation schématique du modèle bi-locus
(d’évolution de l’IR postZ) de Dobzhansky-Muller

Population ancestrale

Allopatrie

Combinaisons avec a et b sont nouvelles!


Effet de dominance entre allèles

Dépression d’hybridation

70
Spéciation sympatrique

Rhagoletis pomonella Crataegus sp., Rosacées


Mouches de la pomme et de l’aubépine Aubépine (fruit: cenelle)

Développement
Larve (asticot)
Nymphe (pupe)
Eclosion

Adulte

Ponte

Reproduction

71
72
Drosphila willistoni

Populations naturelles, relations phylogénétiques et spéciation (1)

Relations phylogénétiques entre


espèces sœurs du groupe de
Drosophila willistoni. Relations
basées sur l’intégration de résultats
multiples venant de l’étude des
affinités de reproduction, des
différences chromosomales, du
comportement sexuel, de la
distribution géographique, de
l’écologie et des différences
morphologiques.
Le diagramme doit
être imaginé
comme une
section à travers
les branches
phylogénétiques.
Le trait gras
représente le
niveau « espèce
jumelle ». (from
Spassky et al, 1971,
Evolution 25 : 129‐
143).
73
Drosphila willistoni

Populations naturelles, relations phylogénétiques et spéciation (2)

Phylogénie des espèces parentes


de Drosophila willistoni basée sur
l’analyse de différences de
séquences nucléotidiques portant
sur 36 gènes codant pour des
allozymes.
Les valeurs numériques sur les
branches de l’arbre correspondent
à une estimation des substitutions
nucléotidiques par locus étant
survenues au cours de l’évolution.
Les distances verticales entre
groupes voisins sont
proportionnelles à la
différenciation génétique. Il y a au
total 7 espèces étudiées. Deux
espèces D. willistoni et D.
equinoxialis se composent de sous‐
espèces. L’espèce D. paulistorum
est formée de 6 sous‐espèces (CA,
TR, etc…) certaines d’entre‐elles
formant une semi‐espèce (ex : IN +
OR) (from Ayala et al, 1974,
74
Genetics 77: 343‐384).
Effet fondateur
1. Migration avec perte de diversité allélique (petit
échantillon pris dans la population mère initiale)
2. Dérive génétique (effectif N faible) avec perte de
diversité allélique
3. Processus stochastique puisque la population 1 est
différente de la population 2

75
Gradualisme phylétique

Ammonite, Kosmoceras sp.,


exemple d’étude: G.G.
Simpson, 1940

Anagenèse et cladogenèse

Equilibres ponctués

Radiation et stase

Trilobite, Phacops rana,


76
exemple d’étude: N. Eldredge
and S.J. Gould, 1972
Mer épicontinentale Mer marginale

16 17 18 18 17 16/15

Phylogénie hypothétique de Phacops rana du Dévonien moyen


(Amérique du Nord). D’après les travaux de S.J. Gould et N.
Eldredge
77
Génétique des populations
et Evolution

Le contexte d’émergence de la G.P.


Le modèle panmictique
Structuration des populations et écarts à la panmixie
Un facteur déterministe: la sélection naturelle
Un facteur stochastique: la dérive génétique
Espèces et spéciation
Les débats actuels…

78
La théorie de l’évolution et l’embryologie
La théorie de l’évolution formulée par Darwin explique que toutes les
espèces actuelles descendent d’une même espèce ancêtre dont elles se
sont progressivement différenciées au cours du temps en accumulant
des caractères nouveaux.

L’embryologie devait confirmer cette théorie de la descendance,


l’étude du développement de l’embryon apportant en effet des
informations sur l’évolution de l’espèce à laquelle il appartient.
A l’époque les scientifiques étaient frappés par la ressemblance qui
existe entre les structures dont est pourvu l’embryon humain à un stade
de son développement et les branchies des poissons. On en concluait
que chez les êtres vivants la succession des stades du développement
embryonnaire reproduisait fidèlement la série des stades évolutifs
qu’avait traversée l’espèce. On disait alors que le développement de
l’embryon « répétait » ou « récapitulait » la série de ses ancêtres.

79
La loi de la récapitulation ou loi biogénétique
d’E. Haeckel

La loi biogénétique de Ernst Haeckel, formulée en 1866, stipule:


« L’ontogenèse récapitule la phylogenèse » signifiant que l’embryon se
développe en passant par différents stades semblables aux organismes
qui l’ont précédé, avant d’aboutir à un stade de complexité ultime qui
caractérise son espèce.

Dessinée par Haeckel, cette planche montre trois étapes successives (de haut en
bas) du développement embryonnaire de diverses espèces (de gauche à droite).
Non conforme à la réalité, elle suggère exagérément que, dans les deux premières
étapes, les embryons des espèces « plus évoluées » ressemblent aux embryons
des espèces « moins évoluées »

80
La TSE ignore l’embryologie
Depuis 30 ans se manifeste un retour remarquable et remarqué de
l'ontogenèse dans le domaine des sciences de l'évolution. Ce retour
emprunte deux voies de recherche complémentaires : la première est
née sous l'impulsion du paléontologiste américain S.J. Gould et
concerne surtout la morphologie; la seconde coïncide avec l'essor de
la génétique du développement.

81
T. Dobzhansky (en bas) et S. Wright (en haut) en congrès à l’Université de
Chicago (1959)
L’heure du renouveau: le travail de Gould

La publication par S.J. Gould en 1977 de l'ouvrage Ontogeny and


Phylogeny a ouvert une ère nouvelle pour la paléontologie
évolutive, celle de l'ambition d'accèder à certains des processus qui
sous‐tendent l'évolution.

On est ainsi passé du simple constat des changements évolutifs,


éventuellement intégrés et interprétés dans leur contexte
paléoenvironnemental, paléogéographique ou stratigraphique, à
une explication des mécanismes du changement. Ces mécanismes
sont abordés au niveau morphologique et ils sont déduits de la
confrontation entre ontogenèse et phylogenèse.

82
Séquences récapitulatives et inversées

Si l'on démonte une ammonite de l'espèce Epideroceras


ponticum, on constate que les tours internes qui correspondent
aux stades juvéniles ont une ornementation complexe avec des
tubercules latéraux et des côtes secondaires ventrales. A
l'opposé de la spire, les tours externes qui correspondent au
stade adulte ont des côtes simples. Entre les deux, les autres
tours ont une ornementation intermédiaire. Les membres
suivants de la lignée montrent une expansion de la
morphologie complexe initialement restreinte aux stades
juvéniles, d'abord dans les tours intermédiaires (chez E.
planarmatum), puis dans les tours adultes (chez E. biruga).

d'après J. L. Dommergues, 1989

L'enchaînement des stades ontogénétiques observés chez


l'espèce ancestrale se retrouve donc inversé dans la
séquence phylétique des adultes.

83
Les hétérochronies du développement

Deux espèces apparentées partagent une histoire commune


(jusqu'à leur ancêtre commun inclus), à laquelle vient s'adjoindre
une histoire propre à chacune d'elles. Les différences entre adultes
de ces deux espèces sont la manifestation de ces histoires
personnelles.

Or, "les différences entre adultes ne reflètent jamais que les


différences entre les processus de développement qui produisent ces
adultes" (F. Jacob, 1981).

La confrontation des ontogenèses doit permettre d'approcher les


mécanismes qui ont sous‐tendu la divergence entre les deux
espèces. Cette démarche souligne que l'évolution doit être
envisagée comme un processus de modification des
développements plutôt que comme une simple accumulation de
différences entre adultes. Dans cet esprit, Gould et d'autres auteurs
comme P. Alberch, K. McNamara, D. Wake… ont proposé un
système rigoureux d'analyse des décalages entre ontogenèses et
de leur interprétation en termes évolutifs. Ces décalages sont les
hétérochronies du développement.

84
Les hétérochronies du développement

Hypermorphose

Accélération

1 2
5

Néoténie

Progenèse

1 – Amplitude du développement: hypermorphose ou hypomorphose


2 – Rythme du développement: Accélération ou décélération
3 – Pédomorphose
4 – Péramorphose
5 – Séquence développementale initiale (ancêtre)

85
Homologie de séquences
Conservation et synténie 86
Les expériences de substitution

L'origine unique de ces complexes de gènes est attestée par des


expériences de substitutions entre organismes appartenant à des
groupes ayant divergé depuis plusieurs centaines de millions
d'années.

Ainsi, lorsque des gènes homéotiques de drosophile sont


substitués à ceux d'un oursin au tout début du développement,
l'édification du plan de construction "oursin" commence par être
perturbée, mais cette phase n'est que transitoire et l'organisme
achevé est un oursin tout à fait normal.

Ceci atteste que le développement est un processus très robuste


qui peut s'accomoder de l'intrusion de gènes "étrangers".

Mais ceci démontre aussi que les complexes homéotiques de


l'oursin et de la drosophile sont homologues et que donc que
l'évolution a été remarquablement conservatrice en ce qui
concerne les modes de construction de ces organismes bien qu'ils
aient divergé depuis plus de 600 millions d'années.

87
L’émergence de l’EVO‐DEVO
(evolutionary developmental biology, 1990)

L'affirmation "le développement documente l'évolution" a


récemment trouvé une validation et un prolongement extraordinaire
dans la génétique du développement et la découverte des gènes
homéotiques (gènes qui président à l'élaboration du plan de base
d'un organisme).

Parmi les directions actuelles de la recherche sur l'évolution, celle qui


est maintenant universellement connue sous le terme "évo‐dévo"
associe génétique du développement, embryologie, anatomie et
paléontologie dans une dynamique pluridisciplinaire extrêmement
féconde.

Dans le domaine de la macroévolution, les avancées les plus


spectaculaires concernent:

• la confirmation qu'il existe une grande unité entre tous les grands
plans d'organisation du règne animal;

• la formulation de nouvelles hypothèses sur l'origine de structures


permettant d'expliquer comment des transformations rapides ont
pu se produire;

• la complète remise en cause de l'histoire phylétique de certains


88
groupes.
Protocole expérimental pour l’expression
ectopique de l’oeil

Developmental Biology, S. Gilbert

89
Œil ectopique et gène maître

Induction du gène eyeless


dans le disque imaginal des
antennes
(drosophile)

Knock out du gène small eye chez


la souris
90
Des homologues de Pax6 ont été trouvés dans tout le
règne animal

Sequence similarities Paired domain Homeodomain

Fly‐Mouse 94% identical 90% identical


Human‐Mouse 100% identical 100% identical

91
Emergence des organes complexes:
exemple de l’oeil

W. Gehring en 1995 résume ses travaux qui montrent :


1. Qu’un seul gène suffit pour déterminer la fabrication
d’un œil (expérience de l’œil ectopique)
2. Que ce gène est le même chez la souris, la drosophile
et le calmar
3. Que ce gène est un gène maître (master gene) qui
contrôle en cascade près de 2500 gènes impliqués
dans l’édification de l’œil
4. Que ce gène porte le nom d’eyeless chez la souris et
small eye chez la souris
5. Que eyeless et small eye sont similaires à 90% et qu’ils
sont homologues
6. Que l’on peut les intervertir (substitution) et obtenir
un œil chez le receveur

et suggère que les yeux à facettes ou bicamérulaires


dérivent du même œil rudimentaire (cellule
photosensible) qu’un seul gène à pu suffire à réaliser.
Cet œil primitif est sans doute apparu une fois au cours
de l’évolution chez un ancêtre commun aux
arthropodes, mollusques et vertébrés

92
Evolution of various
eye‐types from a
common ancestral
prototype Step 1: photosensitive cell
with light receptor (rhodopsin)

Step 2: Under control of


Pax6 the photo-sensitive
cell associated with
pigment cell to form an
Step 3: By
organ
divergent, parallel
and convergent
evolution, various
eye types are
generated from this
prototype

93
Gehring, J Her 2005
Génétique des populations
et Evolution

Bonne révision!

Cours de Mr Jean‐Rémi PAPE (MCU, Bordeaux 1)


94
Année 2014

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