Vous êtes sur la page 1sur 28

ECOLE NATIONALE D’ARCHITECTURE ET D’URBANISME DE TUNIS

COURS D’INITIATION À L’ANTHROPOLOGIE


ET AUX SCIENCES SOCIALES

DESTINE AUX ETUDIANTS DE LA PREMIERE ANNEE EN ARCHITECTURE

RESUME:
Le préambule du cours présentera l’apport des sciences humaines et sociales dans
la formation en architecture et en urbanisme.
La première partie du cours comprend l’exposé des notions de société : relations
sociales, faits sociaux et culture. Elle traitera de la dimension sociale de l’espace,
montrant que la limite de l’espace est doublement sociale et que l’orientation
permet d’organiser et de qualifier socialement l’espace.
Par ailleurs, la partie suivante du cours, montrera que l’espace, champ
d’intervention professionnel de l’architecte, doit être saisie dans son imbrication
entre ses dimensions spatiale, sociale et culturelle. Ainsi, les relations dialectiques
entre l’espace et la société sont abordées à la troisième partie du cours, à travers
trois exemples d’études. Ces études illustrent l’influence des empreintes sociales
et des valeurs culturelles sur l’espace, mais aussi, elles montrent les effets des
changements spatiaux sur le fonctionnement social. Enfin, la dernière partie du
cours se présente sous forme d’atelier qui exercera l’étudiant à la méthodologie et
aux techniques de la recherche, à la documentation bibliographique, à l’analyse
de texte et à la pratique de l’exposé.

ENSEIGNANTES :
- RAOUDHA BEN AYED NAJJAR
- IMEN OUESLATI HAMMAMI
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

PLAN
INTRODUCTION 5
PREMIERE PARTIE : INITIATION A LA SOCIOLOGIE DE L’ESPACE 8
CHAPITRE 1 : DEFINITION DE LA SOCIOLOGIE 8
I- Qu’est ce que la sociologie ? ........................................................................... 8
II- Des outils pour appréhender concrètement les faits sociaux ? ..................... 9
III-Les grands courants de la sociologie classique ........................................... 10
CHAPITRE 2 : LES TECHNIQUES D’ENQUÊTE EN 13
SOCIOLOGIE DE L’ESPACE 13
I- Définition et données générales.................................................................... 13
II- Types d’enquête de terrain ............................................................................ 14
1. Enquêtes qualitatives 14
a) Définition 14
b) L’Entretien 14
Objectif 14
Types d'entretiens : 14
Analyse 15
c) Parcours commenté 15
Analyse 16
d) Carte mentale 16
Analyse : 17
2. Enquête quantitative 17
a) Définition 17
b) Population initiale 17
c) Echantillonnage si nécessaire 18
d) Le questionnaire 19
CHAPITRE 3: Qu’est-ce que la sociologie de l’espace 21
I- Tentative de définition de la sociologie de l’espace .................................... 21
II- Spécificité de la sociologie de l’espace (l’imbrication entre le social et le
spatial) ................................................................................................................. 21
CHAPITRE 4 : La notion d’ « acteur » et la production sociale des espaces 22
I- La notion d’acteur social .............................................................................. 22
II- Qu’est-ce qu’un acteur social de l’espace ? ................................................. 23
III-L’interaction entre les acteurs sociaux et la production des espaces ........ 23
CHAPITRE 5 : Quelques approches sociales de l’espace 26
CHAPITRE 6:L’ Etude de la ville arabo-musulmane : expression d’un code
social / stratégie et enjeux de création Erreur ! Signet non défini.

2
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

I- La typologie et la structure urbaines islamiques classiquesErreur ! Signet


non défini.
II- Organisation spatiale de la médina : Expression d’un code socialErreur !
Signet non défini.
III-Choc colonial et déstructuration des villes islamiques traditionnelles
Erreur ! Signet non défini.
IV- Les enjeux des acteurs et leurs impacts sur l’espace urbain de la ville
nouvelle : exemple du projet d’embellissement de l’Avenue Habib Bourguiba
de Tunis. .....................................................................Erreur ! Signet non défini.
DEUXIEME PARTIE : INITIATION A L’ANTHROPOLOGIEErreur ! Signet
non défini.
DE L’ESPACE Erreur ! Signet non défini.
CHAPITRE 1 : DEFINITION DE L’ANTHROPOLOGIEErreur ! Signet non
défini.
I- Qu’est ce que l’anthropologie ? ...........................Erreur ! Signet non défini.
II- Les grands courants de l’anthropologie ..............Erreur ! Signet non défini.
CHAPITRE 2 : DEFINITION DE L’ANTHROPOLOGIE DE L’ESPACE
Erreur ! Signet non défini.
I- OBJET d’étude et objectif ....................................Erreur ! Signet non défini.
II- DOMAINES D'INVESTIGATIONS ...................Erreur ! Signet non défini.
CHAPITRE 3: L’anthropologie de l’espace domestiqueErreur ! Signet non
défini.
I- Pourquoi s’intéresse –t- on à l’espace domestique ?Erreur ! Signet non
défini.
II- Les caractéristiques de l’espace domestique ? ....Erreur ! Signet non défini.
« REFORMULER L’ESPACE : COMPETENCES ET SAVOIR-FAIRE DES
HABITANTS A BIZERTE (TUNISIE) » de Rabia BEKKAR, avec la
collaboration de Sabri SFAXI .................................Erreur ! Signet non défini.
Conclusion : Erreur ! Signet non défini.

3
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

BIBLIOGRAPHIE :
- ABDELKEFI Jallel, La médina de Tunis : espace historique, édition Alif, 1989, 280 pages.
- BERRY CHIKHAOUI Isabelle et DEBOULET Agnés, Les compétences des citadins dans le
monde arabe : Penser, faire et transformer la ville, collection Hommes et sociétés, édition
Karthala, 2000, 408 pages.
-BOUHDIBA Abdelwaheb et CHEVALIER Dominique (sous la direction), La ville arabe dans
l’islam, histoire et mutations, Actes du 2ème colloque de l’ATP « Espace socio-culturels et
croissance urbaine dans le monde Arabe », Crathage –Amilcar, 12-18 Mars 1979, imprimerie
Al Asria, Tunis, 1982, 573 pages.
- BILILI TEMIM Leila, Histoire de familles, mariages, répudiations et vie quotidienne à Tunis.
1875- 1930, édition Script, Tunis, 1999,280 pages.
- CLAVEL Maïté, Sociologie de l’urbain, Série Ethnosociologie, collection Anthropos, 2dition
Economica, Paris, 2002, 124 pages.
-DORTIER Jean François (sous la direction), Le Dictionnaire des sciences humaines, édition
Sciences Humaines, PUF, 2004, 857 pages.
- MAUSS Marcel, Sociologie et Anthropologie, Paris, PUF, 1967.
- SANTELLI Serge, Le creuset méditerranéen : Tunis, collection la ville, les éditions du demi
cercle/ CNRS éditions, Paris, 1995, 128 pages.
- STAZAK Jean François, L’espace domestique : pour une géographie de l’intérieur, in
Annales de géographie, t110, n°620, 2OO1, pp 339-363.
- ZANNAD Traki , Symboliques corporelles et espaces musulmans, collection Horizon
maghrébin, édition Cérès Productions, Tunis, 1984, 155 pages.

4
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

INTRODUCTION

L’espace qu’il soit architectural, urbain ou géographique, fait intervenir trois dimensions
essentielles :
1- La matière sous ses trois formes : solide, liquide et gazeuse. (exemple : la masse d’air
nécessaire pour un bâtiment). Cette matière consiste également en un ensemble de dispositif
technique et bâti que nos sociétés mettent au service des populations et des hommes, il s’agit
des maisons où nous habitons, des rues …
2- Les représentations mentales qui intègrent la dimension abstraite de l’existence humaine,
c’est-à-dire les idées, les émotions, les théories, les perceptions, etc.
En effet, l’homme se met en relation avec l’espace par le biais d’un phénomène que les
psychologues appellent la perception. A partir de ce moment (c’est à dire le moment où
l’homme perçoit l’espace dans lequel il se trouve) il se développe une réaction entre l’homme
et l’espace sachant qu’il va donner un sens à cet espace. Autrement dit, les homme perçoivent
l’espace et se le représentent dans le sens où ils font une construction des images mentales de
cet espace.
3- l’organisation sociale dans la mesure où les hommes vivent dans des réseaux structurés
(famille, groupe professionnel, groupe ethnique, une nation, le monde, etc...)

(1) Homme (2) Espace :


et espace : Réalité
Individus, technique, réalité
groupes, sociétés. matérielle, réalité
physique →
(3) Espace espace concret
abstrait :
Représentati
ons mentales,
émotions,
idées, …

Remarque : toutes les recherches faites par les théoriciens tournent autour du
fonctionnement de ce triangle. En effet, chaque discipline essaie de comprendre quel est le pôle
le plus important dans la définition de l’espace : est-ce le pôle (1), (2) ou (3) ?
Par exemple :
-la psychologie dans ses recherches concernant l’espace, part de la dimension n° (2).
-La géographie se base sur la dimension n° (1)
-Les écrivains, les philosophes quant à eux essaient de déterminer le sens de l’espace tout
en s’appuyant sur la 3ème dimension.

L’espace en tant qu’environnement est donc à la fois une infrastructure matérielle, une
réalité sociologique et culturelle et une dimension symbolique et psychologique.
L’étude de l’espace ainsi définie est nécessairement pluridisciplinaire, elle inclut donc
l’ensemble des sciences de l’ingénieur (architecture, génie civile, etc.) et l’ensemble des
sciences humaines économiques et sociales. Le champ sociologique s’attache tout
particulièrement à étudier la dynamique sociale entre les différents intervenants dans la
production et la reproduction de cet environnement spatial qu’autant de celle de ses usagers.

5
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

L’anthropologie sociale et l’ethnologie permettent de saisir les spécificités et les identités


culturelles des habitants qui utilisent cet espace afin de comprendre la signification de ses
éléments architecturaux ou urbain au niveau de leur vécu.
L’histoire aussi ouvre des perspectives d’analyse importante dans la mesure où elle permet
d’interpréter les différentes identités des groupes sociaux et leur évolution dans le temps.
Enfin, la science économique s’attache à montrer les déterminants qui conditionnent toute
production de l’espace en s’appuyant surtout sur les notions de valeur, de force productive, de
mode de production …
Cette pluridisciplinarité n’est pas seulement le résultat d’une interprétation des sciences
sociales, mais elle est aussi un pont entre le domaine des sciences de l’ingénieur de l’architecte
et le domaine des sciences de l’homme.
Ce pont n’a pas pour seul but la compréhension de l’espace qui nous entoure, mais il nous
permet aussi d’agir sur lui en vue de le transformer selon une approche scientifique et globale.
Une approche claire et globale de « l’espace construit » devrait permettre aux architectes de
concevoir, d’imaginer et de créer un environnement urbain qui soit le plus socio-dynamique
possible. Elle devrait les doter de compétences pour concevoir des objets spatiaux, à leur
identité culturelle et à leur évolution dans le temps.
Qu’est-ce que l’espace ?
Selon le Larousse, l’espace est « l’étendue indéfinie qui contient et entoure tous les objets ».
Dans cette définition le terme le plus important est sans doute « indéfinie » (par exemple : les
oiseaux volent dans l’espace indéfini ). Celui-ci peut d’ailleurs s’étendre dans son acceptation
mathématique (c’est-à-dire qu’on ne peut limiter et qui est synonyme d’infini puisque l’espace
apparaît dans ce domaine comme « un ensemble de points, de vecteurs, etc., muni d’une
structure, spécial ».) ou dans son acceptation banale (« qu’on ne peut définir »). Cependant,
bien que ce terme est devenu récemment d’un emploi généralisé, souvent excessif et dénué de
rigueur, il constitue la raison d’être d’un certain nombre de disciplines comme par exemple :
-les études spatiales qui se consacrent aux objets expédiés par l’homme au-delà de
l’atmosphère ;
-l’astronomie et l’astrophysique qui étudient la constitution, la position et les mouvements
des corps dans l’espace céleste (l’espace infini) ;
-les sciences de la terre, et en particulier : la géologie, la géographie …
-l’aménagement et l’urbanisme qui traitent de l’intervention volontaire et organiser de
l’homme pour « disposer avec ordre » (aménager) hommes, activités et équipements sur une
portion de la surface terrestre, et pour assurer une évolution et un développement des villes à la
fois harmonieux et efficace ;
-l’architecture, c’est-à-dire la conception, la réalisation et la décoration des édifices ;
-les arts plastiques, telles la peinture où l’espace (à travers la perspective en particulier) tient
un grand rôle.
Sachant que la discipline qui nous intéresse le plus c’est l’aménagement et l’urbanisme, il
devient important, à ce niveau de la définition de l’espace, de dépasser la question de savoir ce
qu’est l’espace en général, pour aborder une autre question précise et plus rattachée à l’objet de
notre cours : c’est quoi un espace urbain ?
Qu’est-ce que l’espace urbain ?
Nous entendons par « espace urbain » l’ensemble des dispositifs techniques et bâties que
nos sociétés ont mis et mettent au service des populations urbaines. Il s’agit des maisons où
nous habitons, des rues dans lesquelles nous marchons, des autoroutes sur lesquelles nous
circulons, de tous les autres réseaux de transports, de tous les réseaux énergétiques qui
produisent et acheminent la force dont nous avons besoins pour faire marcher nos machines, de
tous les réseaux communicationnels qui nous permettent de transmettre et de recevoir des
informations à distance, etc.

6
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

C’est tout l’univers du construit et du bâti, c’est tous ce que les hommes et les femmes ont
rajouté à leur environnement naturel.

En quoi consiste l’étude de l’espace urbain ?


L’étude de l’espace urbain (ou de l’environnement construit), est donc celle de la totalité
des infrastructures architecturales et techniques qui donnent forme à notre vie quotidienne, en
canalisant ses divers flux de personnes, d’énergie, d’informations et de biens matériels qui nous
permettent de vivre et de produire dans un environnement devenu essentiellement urbain.
L’espace urbain est à la fois un héritage culturel dans lequel s’inscrit l’identité d’une société,
d’une région ou d’un lieu, de même qu’en tant qu’infrastructure, il est un capital économique
d’une importance considérable. Il s’agit dès lors de considérer cet espace urbain d’une manière
très large. Ce n’est pas seulement d’une maison ou d’un équipement dont il s’agit, ni même de
la somme de ceux-ci : c’est la mise ensemble, l’agencement, la mise en réseaux de cette
multitude d’infrastructures très diverses que les hommes ont mis en œuvre. Une autoroute, un
aéroport, une voie de chemin de fer, un pont, n’ont de sens qu’à partir du moment où l’on
considère quelles personnes, quelles villes, quelles agglomérations, quelles sociétés, .., se
relient mutuellement à travers ces infrastructures.
L’étude de l’espace urbain ainsi défini est nécessairement et rigoureusement
interdisciplinaire. En effet, cette interdisciplinarité n’a pas comme seul but la compréhension
de l’espace urbain qui nous environne, elle veut aussi nous permettre d’agir sur lui en vue de le
transformer.
Pourquoi étudier l’espace urbain ?
Il y a au moins deux raisons qui nous pousse à étudier l’espace urbain :
-D’abord, étudier l’espace urbain, revient à comprendre comment s’orchestrent et
s’agencent les différents éléments de la vie, c’est chercher à se donner les moyens d’agir sur les
espaces dans lesquels nous vivons, de manière « harmonieuse ».
-Ensuite, étudier l’espace urbain en se dotant d’un regard interdisciplinaire, c’est tenter de
se donner les moyens pour la prise en charge collective de notre avenir.
Et pour mieux connaître ces moyens voir ces outils constructeurs et structurants de notre
espace urbain, il faut étudier l’interaction entre espace, homme et société de telle sorte que ces
outils constructeurs de l’espace puissent se rapprocher de l’homme et non le contraire.
Par exemple la possibilité de modifier à peu de frais l’aménagement d’un quartier, manifeste
un aménagement socio-dynamique, puisqu’il prévoit de pouvoir s’adapter aux transformations
de mode de vie des habitants tout en prenant en considération leurs représentations de l’espace
urbain dans lequel ils vivent, leurs besoins, leurs aspirations, leurs façons de faire, leurs
habitudes, etc.
Les objectifs du cours :
Sachant que notre cours, cherche à comprendre, avant tout, ce que c’est l’espace ; il faut
savoir qu’il est intéressant de prendre en considération les différentes disciplines et recherches
qui ont tenté d’élaborer des outils et des notions capables d’expliciter l’interaction entre
l’homme et l’espace qui les supporte et les enveloppe.
Parmi toutes les notions existantes, nous avons retenu celles qui nous semblent les plus
pertinentes et les plus en rapport avec le contenu du cours. C’est-à-dire celles qui ont tenté de
répondre aux questions suivantes : quelle est la véritable nature de l’espace ? quelle est le sens
de l’action humaine engagé dans cet espace ? quel statut accordé à l’interprétation
(représentation) que les hommes donnent à leur relation avec cet espace, à leur place dans cet
espace ?

7
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

PREMIERE PARTIE : INITIATION A LA SOCIOLOGIE DE


L’ESPACE

CHAPITRE 1 : DEFINITION DE LA SOCIOLOGIE

I- Qu’est ce que la sociologie ?


La naissance de la sociologie
Avant le XIX e siècle des analyses intéressantes et pertinentes de la vie sociale existaient
mais la sociologie n’existait pas. La sociologie a été en quelque sorte inventée au XIXe siècle
par ceux qu’on appelle aujourd’hui les pères fondateurs de la sociologie (Max Weber, Emile
Durkheim et quelques autres).
Le terme sociologie lui-même a été crée par Auguste COMTE en 1838. Etymologiquement,
sociologie signifie science de la société. Effectivement, une préoccupation centrale anime les
fondateurs de la sociologie des approches antérieures : c’est la volonté d’adopter une démarche
rigoureuse aussi scientifique que possible pour rendre compte de la vie en société.
La sociologie un regard particulier sur la société
Tous les domaines de la vie sociale peuvent être analysés par le sociologue.
Pour les fondateurs de la sociologie, analyser la vie sociale, c’est d’abord comprendre les
multiples changements sociaux qui marquent la société du XIXe siècle dans la quelle ils vivent,
société marquée à la fois par les effets de la révolution industrielle et ceux des révolutions
politiques, mais c’est aussi comprendre les interactions les plus élémentaires entre les acteurs
de la vie sociale. Ainsi défini, le champ de la sociologie est très vaste : la famille, la religion,
les relations de pouvoir, les systèmes politiques, les négociations commerciales et bien d’autres
questions peuvent être étudiées par le sociologue.
La sociologie et les autres sciences sociales, une différence de questionnement
Qu’est-ce qui distingue la sociologie des autres sciences qui s’intéressent à l’Homme en
société telles que l’économie, les sciences politiques, la psychologie ou l’histoire ? Pour mettre
en lumière la spécificité du point de vue de la sociologie, prenons quelques exemples.
Le regard du sociologue sur le sport :
Alors que l’économiste voit, par exemple dans le sport, un marché où s’échangent des biens,
ou bien une production destinée à satisfaire les besoins en fonction des revenus de chacun, le
sociologue s’interroge par exemple sur les interrelations entre l’équipe de football et ses
supporters ; il se demande aussi pourquoi les ouvriers jouent plus fréquemment au football que
les cadres supérieurs, pourquoi les homme sont plus nombreux que les femmes à pratiquer le
rugby et dans la réponse à ces questions ils s’interrogera sur le rôle que joue l’environnement
social. Le sociologue est ici centré sur la recherche de la compréhension des comportements
des individus en interrelation les uns avec les autres, alors que l’économiste analyse le
mécanisme de l’échange proprement dit.
Le regard du sociologue sur le suicide :
Prenons un autre exemple, le suicide, qui a fait l’objet d’une étude célèbre de DURKHEIM.
Face au suicide, le psychologue cherche dans le passé de l’individu les événements particuliers
qui peuvent expliquer son geste alors que le sociologue cherche à comprendre non pas un
suicide particulier mais l’ensemble des suicides tels qu’ils se produisent à un moment donné
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

dans la société et à mettre en relation ce fait social avec d’autres caractéristiques sociales. Le
fait d’être marié ou célibataire, ou le fait d’appartenir à tel ou tel groupe social, a-t-il une
influence sur la fréquence du suicide dans une société ?
Le sociologue étudie donc la vie sociale sous un angle différent de celui des autres sciences
sociales, il se pose d’autres questions.
Tous les sociologues n’ont pas la même conception de la sociologie
La difficulté à définir la sociologie tient à ce que tous les sociologues n’ont pas la même
conception de la sociologie. Deux définitions classiques s’opposent, celle de DURKHEIM et
celle de WEBER.
La sociologie explique les faits sociaux par d’autres faits sociaux :
Pour Emile DURKHEIM la spécificité de la sociologie est d’expliquer les faits sociaux par
d’autres faits sociaux. Les faits sociaux « consistent en des manières d’agir, de penser et de
sentir, extérieures à l’individu, et qui sont douées d’un pouvoir de coercition en vertu duquel
ils s’imposent à lui » (E.DURKHEIM, Les règles de la méthode sociologique, 1895). Ainsi, par
exemple, le suicide est un fait social qui s’explique par d’autres faits sociaux (l’appartenance à
une catégorie sociale, la situation de famille, etc.…). Dans cette approche la société exerce une
influence sur le comportement de l’individu même si cette influence n’exclut pas que l’individu
conserve une certaine autonomie. C’est ainsi que même si le célibat est un facteur de suicide,
tous les célibataires ne se suicident pas.
La sociologie compréhensive :
Max WEBER propose une approche de la sociologie différente. Pour Max WEBER
l’essence du social est l’interaction entre les acteurs sociaux : la collision entre deux cyclistes
par exemple, est un simple événement au même titre qu’un phénomène de la nature. Serait une
activité sociale , la tentative d’éviter l’autre et les injures, la bagarre ou l’arrangement à
l’amiable qui suivrait la collision. N’importe quel contact entre les hommes n’est pas de
caractère social, seul l’est le comportement propre qui s’oriente significativement d’après le
comportement d’autrui (WEBER, Economie et société).
Dans cette approche, la question centrale qui se pose au sociologue est de savoir quel sens
donner à une activité sociale. Comment l’interpréter. Pour cela, il importe de se demander
quelle signification l’acteur social donne à sa relation avec l’autre. Il s’agit de comprendre la
subjectivité de l’acteur social en interrelation avec d’autres acteurs sociaux, c’est pourquoi on
parle à son propos de sociologie compréhensive.
II- Des outils pour appréhender concrètement les faits sociaux ?
Pour connaître la réalité sociale, le sociologue dispose de différentes méthodes qui peuvent
souvent se conjuguer. Selon la nature des informations dont il dispose, le traitement des données
peut relever soit des méthodes qualitatives, soit des méthodes quantitatives. Examinons
quelques exemples de modalités permettant au sociologue de regrouper des informations sur la
réalité sociale.
L’observation participante :
L’immersion d’un observateur dans un groupe où il participe aux activités du groupe dans
le but de mieux comprendre les comportements au sein de ce groupe. Cette démarche a surtout
été pratiquée par des ethnologues pour l’étude des société primitive, mais elle s’applique aussi
à l’étude des sociétés contemporaines : par exemple un sociologue peut s’intégrer à une secte
pour étudier les mécanismes de pouvoir au sein de celle-ci.

9
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

Enquêtes, sondages, interviews :


L’enquête est une technique de recherche en sociologie qui consiste le plus souvent à
questionner un échantillon de population.
Le sondage est une technique d’enquête consistant à analyser un échantillon représentatif
d’une population et à étendre les conclusions à l’ensemble de la population.
L’interview est une rencontre en tête à tête entre un enquêteur et un interviewé dans le but
d’obtenir des informations de la part de celui qui est questionné.
L’analyse statistique :
Les données statistiques présentent l’intérêt de quantifier les variables. L’observation,
même répétée, de faits individuels ne permet pas de dégager un fait social. En revanche le
regroupement de faits individuels pour former une grandeur statistique peut permettre de révéler
l’existence de faits sociaux. Mais l’interprétation correcte des données statistiques suppose une
bonne maîtrise des règles d’interprétation.
L’expérimentation :
Elle est souvent difficile en sociologie et est très utilisée en psycho-sociologie.
L’expérience de MILGRAM : L’objet annoncé tester l’effet d’un choc électrique sur la
mémoire ; l’objet réel : le comportement d’obéissance aux ordres de la part des individus.
III- Les grands courants de la sociologie classique
Au départ, il y a eu deux orientations différentes de la sociologie : une sociologie holistique
et une sociologie individualiste.
La sociologie holistique : Explicative , totaliste ,française
C’était le choix des sociologues Français : Auguste COMTE et Emile DURKHEIM. Leur
Objectif était de faire de la sociologie une science qui obéit aux mêmes exigences que les
sciences de la nature. Mais en même temps il fallait assurer l’autonomie de la sociologie par
rapport aux sciences de la nature et aux autres sciences de l’homme.
Ce courant de la sociologie refuse l’individu comme unité de recherche. On insiste sur la
nécessité d’adopter la méthode des sciences de la nature. On met l’accent sur l’autonomie de
la sociologie qui a pour objet les faits sociaux et les ensembles sociaux qui sont différents de
la somme des individus qui les composent.
Ainsi, et selon le holisme, on ne peut comprendre les comportements sociaux à partir des de
l’étude des seuls comportements individuels. Il faut prendre en compte les caractéristiques
globales de la société.
La sociologie individualiste :
C’est le choix de la sociologie allemande, qui est plus mariée avec la psychologie et la
philosophie.
Max WEBER se situe par rapport à cet philosophie, il insiste sur la possibilité de constituer
la sociologie comme science mais il ne voit pas de contradiction entre la méthode généralisante
des sciences de la nature et la méthode individualiste qui consiste à prendre comme objet
d’investigation les acteurs sociaux et la sens qu’ils donnent à leurs propres actions sociales et
celles des autres. C'est-à-dire que l’unité d’analyse est l’individu qui agit en connaissance de
causes qui est capable d’interpréter ses actions.

10
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

Selon cette conception les phénomènes sociaux résultent de l’interaction des


comportements individuels. C’est l’étude des actions individuelles qui permet de comprendre
la vie sociale.

Tableau récapitulatif des principes fondamentaux des deux courants sociologiques

Totaliste , explicative , Comprehensive


Sociologie holistique française Sociologie individualiste ,interpretative ,allemande

Auguste Comte / Emile Durkheim Max Weber


- L’objet de recherche : des ensembles - L’objet de recherche : les individus ; le
comportement des individus considérés
comme acteurs sociaux

- l’individu est porteur de structure : la - les individus ont une marge de liberté
structure façonne les individus (la socialisation) de choix Il ya tjrs une marge de risque

- les explications sont toujours en terme de - Le comportement individuel est


détermination et déterminisme. interprété par rapport à un intérêt : c’est une
- Il y a toujours une relation de causes à stratégie
effets - On parle d’action rationnelle,
d’autonomie des individus.
- il est porteur le résultat de sa position
dans la société - L’individu est un acteur social

Exemple : l’inégalité des chances face à l’école


L’analyse holistique: (Totaliste)

Pierre BOURDIEU pense que l’ensemble des goûts, des manières de percevoir, de ressentir
et de dire, est lié au milieu social qui crée des dispositions permanentes chez les individus.
Mais il existe une indépendance par rapport aux déterminations sociales. La structure sociale
tend à se reproduire. Cette reproduction sociale est liée à la transmission du capital économique
mais aussi du capital social et culturel. Ainsi un enfant dont les parents sont de simples ouvriers,
est voué à rester dans cette catégorie socioprofessionnelle. Ses chances de scolarisation sont
limitées par le capital culturel, social et économique que lui lèguent ses parents.
L’analyse individualiste: (Interpretative)

Raymond BOUDON pense, quant à lui, qu’il faut d’abord identifier les acteurs, comprendre
leurs comportements et expliquer comment les comportements produisent un phénomène.
Il explique l’inégalité des chances face à l’école par le fait que les motivations,
l’appréciation des coûts et des avantages de la formation sont marqués par l’origine sociale.
Un enfant de famille modeste et dont les parents sont peu instruits ne peut choisir de suivre
une formation dans le domaine artistique. Ce cursus coûteux ne lui permettra pas une promotion
sociale. Il va être alors amené à choisir une formation universitaire moins coûteuse et à cycle
court qui pourrait lui permettre une promotion sociale (pas très importante) dans un bref délais.
Le comportement individuel est ainsi dit rationnel, c'est-à-dire il vise une satisfaction
maximum en fonction de ses ressources et ses contraintes.

11
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

On peut dire que le risque encouru à s’engager dans un investissement scolaire varie selon
la classe sociale. L’enfant et sa famille choisissent de s’engager, ou pas, dans une stratégie
d’investissement scolaire selon leurs attentes et leurs motivations.

12
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

CHAPITRE 2 : LES TECHNIQUES D’ENQUÊTE EN

SOCIOLOGIE DE L’ESPACE

I- Définition et données générales

Qu’est-ce qu’une enquête


Toutes les recherches ont ceci de commun : elles obligent à poser des questions, à
émettre des hypothèses, à recueillir des informations et des réponses. On peut dire que toutes
les techniques des sciences sociales sont en quelque sorte des techniques de question.
On désigne par enquête la quête d'informations orales. Elle concerne la collecte des
faits. L'enquête au sens scientifique, implique un effort pour quantifier les informations
recueillies. Créant en général ses propres documents, elle doit donc prévoir comment elle les
obtiendra. En dehors de l'objectif même de la recherche, de l'hypothèse émise, elle suppose
un problème de conception : comment transcrire l'idée de départ en termes susceptibles de
quantification ? L'enquête, le plus souvent, cherche à découvrir la distribution ou la
répartition de ce que l'on appelle des variables, c'est-à-dire les facteurs qui influencent les
résultats.

Les techniques, quant à eux, désignent les procédés opératoires rigoureux, bien définis,
transmissibles, susceptibles d'être appliqués et adaptés à un problème ou à un phénomène.
Le choix de ces techniques dépend de l'objectif poursuivi, lequel est lié lui -même à la
méthode de travail.

La technique est, comme la méthode, une réponse à un « comment?». C'est un moyen


d'atteindre un but, mais qui se situe au niveau des faits ou des étapes pratiques. C’est que la
technique représente les étapes d'opérations limitées, liées à des éléments pratiques, concrets,
adaptés à un but défini, alors que la méthode est une conception intellectuelle coordonnant
un ensemble d'opérations, en général plusieurs techniques.

Les techniques ne sont donc que des outils, mis à la disposition de la recherche et
organisés par la méthode ans ce but. Elles sont limitées en nombre et communes à la plupart
des sciences sociales.

Les techniques sont des moyens d'aborder les problèmes, lorsque ceux-ci sont précisés.
Le plus difficile et l'essentiel c'est de poser les bonnes questions. La technique, à elle seule,
ne suffit pas pour mener à bien une recherche et vis versa. Ce n'est en effet qu'un « comment

13
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

», utilisable en fonction d'un but, c'est-à-dire lié au contenu du domaine à étudier, aux
problèmes qui se posent.

II- Types d’enquête de terrain


1. Enquêtes qualitatives

a) Définition
L’enquête qualitative est très employée pour s'approprier un sujet, explorer un univers,
saisir ce qui le caractérise, évaluer, pondérer et comprendre des besoins, des comportements,
des attitudes, des opinions, ou récolter suffisamment d'informations avant de lancer une
opération d'analyse de grande envergure. Elle répond à la question "Pourquoi?". Elle explique
et cherche à dépasser le simple discours afin d'analyser les motivations profondes.

b) L’Entretien
C’est un procédé d'investigation scientifique, utilisant un processus de communication
verbale, pour recueillir des informations, en relation avec le but fixé.

L'utilisation de tel ou tel type d'entretien dépend :

 Soit du moment de cette recherche.

 Soit du type de recherche et de l'objectif poursuivi

Objectif

-Obtenir de l'information d'un interlocuteur soit sur des faits qu'il connaît, soir sur ses
propres comportements

-Sonder l'opinion de l'interlocuteur, explorer ses attitudes ou ses motivations


-Evaluer les capacités de l'interlocuteur en vue de l'orienter, le sélectionner

Types d'entretiens :

Les entretiens d'enquête peuvent être classés selon un degré décroissant de liberté .de
réponse de l'interlocuteur, soit :

 L'entretien non directif :l'enquêteur laisse l'enquêté créer lui-même le cadre dans
lequel il s'exprime et développer comme il l'entend son information et ses opinions sous la
forme et dans l'ordre qu'il veut, l'enquêteur joue un rôle de stimulation et de facilitateur

 L'entretien guidé : permet à l'enquêteur d'opérer avec un guide d'enquête.

14
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

Souple où les questions ne sont pas formulées d'avance, mais seulement les thèmes à
explorer au cours de l'entretien, l'ordre clans lequel ils seront abordés reste libre.

 L'entretien dirigé : se déroule à partir de questions précises, strictement formulées,


posées dans un ordre immuable. L'enquêteur joue par là même un rôle de direction stricte et
contraignante. L'enquêté n'a aucune initiative et doit couler- ses informations et ses opinions
dans le moule préfabriqué par l'enquêteur.

Le choix entre l'un ou l'autre type d'entretien est effectué en fonction du projet de
recherche préalablement établie ; du type d'information que l'en recherche, du niveau de
profondeur de l'information visée, de la phase d'enquête dans laquelle on se trouve : au début
de la recherche, les entretiens seront souvent très libres, ils pourront être beaucoup plus dirigés
dans une phase ultérieure quand les aspects du problème auront été nettement dégagés.

Analyse

Le corpus recueilli est traité, par la suite, selon la méthode de l’analyse de contenu

c) Parcours commenté

C’est une technique adaptée à l’étude des comportements spatiaux, dès lors que l’on
cherche à décrire et comprendre ces derniers dans leur dynamique socio-environnementale.
Elle est spécifique à l’étude de l’espace public. Elle se base sur un postulat prétendant que la
perception ne se déploie qu’en fonction d’un milieu : elle doit donc être rapportée aux qualités
propres du site étudié. Les façons de percevoir sont alors indissociables du cours d’actions dans
lequel le passant est engagé.

Cette technique correspond à des comptes-rendus de perception et d’évaluation en


action, elle permet de décrire et de comprendre les stratégies de déplacement des individus dans
l’espace locomoteur. Trois activités sont sollicitées simultanément : marcher, percevoir et
décrire. Les commentaires sont saisis sur un enregistreur audio numérique, adapté à ce type de
prise de son, permettant de conserver une qualité sonore optimale pour l’analyse ultérieure. Ce
procédé repose sur trois types de consignes, qui en fixent le cadre :

Les consignes relatives à la description : le sujet doit faire état, aussi précisément que
possible, de l’ambiance immédiate du lieu, telle qu’il la perçoit ici et maintenant. Toutes les
modalités sensorielles peuvent être mobilisées : auditives, tactiles, olfactives, kinesthésiques,
etc.

15
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

Les consignes relatives au cheminement : le terrain d’investigation est fixé à l’avance.


S’il le souhaite, le sujet a le loisir de s’arrêter momentanément ou de revenir sur ses pas.

Les consignes relatives aux conditions de l’expérience : compte tenu de l’effort


d’attention demandé, un parcours s’étend sur une vingtaine de minutes en moyenne dans notre
expérimentation. Il est effectué avec le chercheur, à qui sont adressées les descriptions. Celui-
ci intervient le moins possible : il se limite à un rôle d’auditeur bienveillant, et relance
éventuellement la parole dans le cas d’une difficulté manifeste du participant dans l’échange.

Analyse

Il faut relever:

- les jugements personnels (j'aime, je sens, c'est sale...), ceci peut nous renseigner sur le
milieu social de l'enquêté.

- Les manières de décrire (là, l'espace, là-bas...), ceci peut nous renseigner sur la relation
qu'en entretien avec l'espace.

- Les descriptions qui portent sur les formes d'usage ou le comportement des autres
usagers.

- Les associations spatio-temporelles (ça me rappelle mon enfance, on dirait dans un


champ...)

- Des transitions perceptives (là c'est plus calme, là-bas est mieux...), aide à répartir le
parcours en séquences.

Procéder par la suite par une analyse de contenu

d) Carte mentale

La carte mentale est une technique graphique reflétant une réalité subjective de l’espace,
c’est-à-dire la façon dont un individu se représente une portion d’espace. Cet outil permet donc
de recueillir les représentations spatiales que les individus se font de leur environnement. Ces
représentations spatiales, ou représentations cognitives de l’espace, sont nourries de
représentations mentales, ou individuelles (faisant référence au vécu, à l’expérience, à
l’éducation, à la culture de l’individu) mais aussi de représentations sociales, c’est-à-dire
partagées par un groupe social ou professionnel

En 1913, Charles Trowbridge a été l’un des premiers à faire l’hypothèse d’un lien entre
la capacité de certains individus à s’orienter et se déplacer, et l’existence de « cartographie

16
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

mentale » comme support de cette capacité (Gould et al., 1984). Cette géographie du
mouvement avait pour but de comprendre les images mentales qui affectaient les déplacements
des individus.

D’une manière générale, il existe deux façons de recueillir des représentations spatiales
par le biais des cartes mentales : demander aux enquêtés de dessiner une portion d’espace sur
une feuille blanche, ou à partir d’un fond de carte faisant figurer un minimum d’informations
(zones urbaines et noms de villes, frontières et délimitation du trait de côte).

Analyse :

Procédez à l'analyse des cartes en répondant aux questions suivantes :

- où sont les éléments repères, les nœuds, les voiries structurantes ... ?

- L'espace vous parait-il homogène ou hétérogène ?


- Définissez les limites de l'espace, puis les limites des quartiers.
- Fait-on allusion aux activités ; quelles sont les activités dominantes ?
- Comment est représenté le bâti (haut, bas ...)?
- Fait-on allusion aux usagers ? Quelle est la forme d'usage la plus dominante (passage,
détente ...)
- Fait-on allusion à la circulation véhiculaire ?(Encombrée, allégée...)
- Fait-on allusion au mobilier urbain ? (Bancs publics, poteaux d'éclairages publics )
- La carte représente-t-elle la réalité ou au contraire est-elle loin de la réalité ?
- Quelle est l'image globale immanente?

2. Enquête quantitative
a) Définition
Une étude quantitative est une étude des comportements, attentes ou opinions réalisée
par questionnaire auprès d’un échantillon de la population étudiée et dont les résultats chiffrés
sont ensuite extrapolés à l’ensemble de la population étudiée. Elles sont donc faites par sondage.

Les études quantitatives sont généralement menées auprès de quelques centaines à quelques
milliers d’individus.

b) Population initiale

La population correspond à l’ensemble des individus concernés par l’enquête. Ces


individus peuvent ne pas être des personnes. Il peut s’agir de groupes de personnes (par exemple
des ménages ou des équipes d’employés), ou même d’unités associant des humains avec des
machines (des automobilistes ou des motards, par exemple) ayant des tailles fort variables.

17
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

Lorsque l’on conduit une enquête par questionnaires, plusieurs questions se posent à
nous avant que nous puissions en poser à d’autres personnes. Tout d’abord, il faut se demander
qui est concerné par l’enquête. Quelles sont les limites de la population que nous avons choisi
d’étudier. Une fois cette population déterminée, et sachant qu’il est rarement possible d’en
interroger tous les membres de façon exhaustive que l’on se situe au niveau d’un pays, d’une
région, d’une commune ou même d’une entreprise ou d’une institution, comment faire pour
s’assurer que ceux qui seront interrogés seront représentatifs de l’ensemble, que leurs réponses
pourront être généralisées à la population ? Quelle sera la taille de notre échantillon et comment
allons-nous devoir le composer ?

Le chercheur s’attachera à déterminer les limites de sa population en construisant son


objet d’études et en le comparant à d’autres, quitte à revenir à plusieurs reprises sur ses options
de définition de la population.

c) Echantillonnage si nécessaire

L’échantillonnage est né d'une impossibilité pratique : interroger individuellement toute


une population à laquelle on s'intéresse , et d'une possibilité statistique : décrire le tout par la
partie

Les enquêtes par sondages sont adaptées à l'étude de populations nombreuses et


suffisamment fractionnées. Elles sont sans intérêt dans le cas d'une population réduite, et
délicates lorsque les individus composant la population sont de taille très inégale. La population
étudiée doit être suffisamment bien définie et localisée. Le sondage aléatoire exige même une
liste complète des individus composant la population mère

Un échantillon est représentatif s’il reproduit les même caractéristiques de la population


mère et que toutes les composantes de la population mère ont eu la même chance d’appartenir
à l’échantillon

Le représentativité de l’échantillon dépend, ainsi, de :

 Nature des éléments observés. - L'échantillon de 50 litres d'essence suffit pour


connaître les particularités de l'ensemble de la cuve. Le problème de l'échantillonnage se
trouve lié à l'homogénéité du produit.
 Sélection : c’est à dire la méthode utilisée pourprélever l'échantillon, elle se pose
pratiquement dans les termes suivants : comment désigner les personnes à interroger ?

18
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

d) Le questionnaire

C’est une série de questions précises, détaillées et ordonnées. Peut faire l’objet d’une
passation orale ou écrite.

Le questionnaire doit être circonscrit et assez clair.

La liberté de l’interrogé est limitée dans des catégories de réponses prédéfinis.

Traitement des résultats

Forme du questionnaire

Les données obtenues sont différentes selon que l'on aura posé des questions fermées
ou des questions ouvertes.

Questions fermées : Les questions fermées sont celles qui définissent d'avance

les différentes formes de réponses possibles. Elles contraignent le sujet enquêté à choisis
entre les réponses. Ici le degré de liberté de l'enquêté est minimum. Elles comprennent les
questions dichotomique (oui/non, pour/contre) et les questions à choix multiples.

Pour les questions dichotomique, qui impliquent une troisième réponse possible (« je ne
sais pas ») on a constaté que statistiquement, une partie des « non réponse » et des « sans
Opinion » correspond aux sujets qui ne veulent pas dire oui mais n'osent pas dire non pour des
raisons multiples.

Les questions à choix multiples sont aussi appelées questions pré-fermées.

Il s'agit de plusieurs réponses pré-établies entre lesquelles le sujet doit choisir.


Néanmoins on laisse généralement une rubrique « autres » dans laquelle peuvent entrer des
réponses non prévus par l'enquêteur.

Les avantages des questions fermées incitent à les utiliser en très grande proportion dans
un questionnaire. En effet ces questions conviennent bien à toutes les questions d'identification,
car elles permettent de caractériser, puis de classer rapidement un individu à l'intérieur des
catégories précises d'analyse.

Les limites des questions fermées sont leur domaine d'application.

La question fermée ne saisit pas les indispensables nuances d'expression.


Néanmoins, dans la limite de ses possibilités de saisie, et sous réserve qu'on n'étend
pas son usage aux domaines complexes, la question fermée est susceptible d'une excellente
interprétation.

19
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

Questions ouvertes :

les questions ouvertes laissent à l'enquêté la liberté de structurer lui-même une réponse
et de l'exprimer dans son langage

Les questions ouvertes permettent d'aborder presque la totalité des sujets. Le problème
principal devient alors une question d'expression.

Si les questions ouvertes fournissent des renseignements nuancés et détaillés, elles sont
longues à faire passer, délicates à enregistrer.

Il paraît donc souhaitable de combiner au cours d'un même questionnaire les deux types
de questions, ouvertes et fermées.
Formulation stylistique des questions :

Ce problème est important, car la formulation peut modifier complètement la réponse.


Les recommandations en la matière consistent à :

- utiliser des termes simples, précis, et éviter les mots à double sens ou les mots valeurs,
fortement chargés affectivement.

Il s'agit aussi d'être compris par tous de la même manière.

Ordre des questions :

On préférera un ordre psychologique à l'ordre logique ou chronologique. Ainsi les questions de faits

précédent les questions d'attitudes, les questions plus compliquées ou embarrassantes viennent lorsque l'intérêt est

éveillé.
Enfin les questions sur les caractéristiques sociales de l'enquêté doivent venir à la fin, pour éviter au sujet

l'impression d'un interrogatoire officiel.

20
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

CHAPITRE 3: Qu’est-ce que la sociologie de l’espace

I- Tentative de définition de la sociologie de l’espace


Commençons d'abord par définir ce qu'on entend par sociologie, bien que Raymond ARON
ait eu à ce propos la phrase célèbre suivante: « Sur un point et peut être sur un seul, tous les
sociologues sont d’accord : la difficulté de définir la sociologie ». Pour rester à un niveau de
généralité et sans prétendre à la scientificité de l’énoncé, on dira que la sociologie est la
discipline des sciences humaines qui a pour objet l’investigation de la réalité sociale. Dans cette
réalité sociale, la sociologie s’intéresse tout particulièrement à l’étude des acteurs sociaux,
c’est-à-dire des individus, des groupes, des classes sociales, des sociétés qui, engagés avec
d’autres acteurs, s’activent pour, d’une part produire les biens indispensables à leur existence,
d’autre part donner un sens à la place qu’ils occupent dans la société, la culture, l’économie...
de leur époque.
Ainsi en abordant l’étude de l’espace des villes, la sociologie urbaine s’intéresse aux
différentes manifestations de leur existence collective. Elle est donc amenée à aborder les
phénomènes tels que la distribution et les mouvements de la population dans l’espace, les
comportements et les attitudes des hommes insérés dans l’urbain. Tous ces phénomènes, pour
être analysés et maîtrisés, doivent être mis en relation avec la structure et la dynamique de la
collectivité urbaine dans son ensemble.
II- Spécificité de la sociologie de l’espace (l’imbrication entre le social et le
spatial)
La sociologie de l’urbain se distingue des différents champs de la sociologie par le fait
qu’elle ne dissocie pas les phénomènes sociaux des espaces dans lesquels ils se déroulent.
La sociologie de l’espace fait de l’imbrication du social et du spatial la condition et l’axe de
ses analyses. La composante spatiale n’en devient pas une variable explicative des activités
sociales. L’espace seul n’explique rien, un même espace peut être utilisé par différents groupes
sociaux qui lui attribueront différentes significations : Par exemple, les lieux de culte, églises
ou mosquées, sont parfois simultanément des lieux touristiques et des lieux de dévotion, le
même espace permet différentes attitudes parce qu’il est porteur de plusieurs représentations.

L'espace est neutre jusqu'au moment où il est habité , il devient social

Les normes et les valeurs de l'espace sont dictées par ses habitants
et notre façon d'habiter définit l'espace.

L'espace aura du sens et une fonction

21
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

CHAPITRE 4 : La notion d’ « acteur » et la production sociale des espaces


I- La notion d’acteur social
La définition de l’acteur en sciences sociales
L’acteur social peut être un ou plusieurs individus, des groupes, des classes sociales, des
sociétés qui engagés avec d’autres acteurs, s’activent pour :
1- Produire des biens indispensables à leurs existences
2- Donner un sens à la place qu’ils occupent dans la société, la culture, l’économie… de
leur époque.
En effet chacun de nous s’engage dans des relations afin de satisfaire ses besoins d’un côté
et de confirmer son statut. Pour atteindre ces objectifs on s’engage dans un jeu de rôle et on
adopte une stratégie tout en ayant conscience de la marge du risque d’échec possible.
L’acteur social est , ainsi, un être social doté d’une autonomie relative parce que limitée par
des systèmes de normes, de règles, de valeurs, de religions, d’éthiques….etc. il est porteur de
projet, producteur de sens, capable de stratégie et d’innovation. Il est caractérisé par sa
négatricité propre c'est-à-dire sa capacité à déjouer par ses propre contre stratégies.
L’acteur est contraint, mais il a aussi sa marge de liberté, son comportement est le résultat
d’une stratégie rationnelle mais aussi du côté aléatoire et incertain de l’acteur, l’imprévu, car
chaque acteur a sa propre logique à lui.

R. Boudon distingue trois phases importantes dans l’analyse d’une théorie de l’action :
a- Identifier les acteurs ou les
catégories d’acteurs responsables du Définir
phénomène qu’on cherche à expliquer. les acteurs
On
remarque
b- Comprendre le comportement de ces acteurs. Comprendre un oubli
les mobiles du
Cerner les contexte
représentatio de
ns l’action
dans ces
c- Expliquer comment ces principale
comportements individuels produisent s étapes
Analyser les recomma
le phénomène macroscopique qu’on effets de leurs ndées par
cherche à étudier actions Boudon

Le contexte de l’action : le
cadre dans lequel interviennent
les acteurs et l’ensemble de
données dans lequel l’action se
déroule

22
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

II- Qu’est-ce qu’un acteur social de l’espace ?


Quand on parle de la dynamique et des transformations de l’espace urbain, on se pose en même temps
la question de l'origine de ce phénomène. Et la réponse, on la cherche parmi les individus et les institutions
qui sont censés être intéressés par la ville et ses enjeux.
L'acteur social intervient dans les transformations et la dynamique de l'espace urbain
Les acteurs sociaux de l’espace :
Le terme convenu pour désigner ces animateurs de la "scène" urbaine est celui d' « agents urbains ». Ces
derniers pouvant être formés d’un regroupement de personnes impliquées dans des relations de rôles avec
d’autres intervenants, qu’on appelle acteurs urbains.
Les acteurs des villes sont donc soit des personnes physiques, soit des entités collectives (ou les deux à
la fois) engagés dans un contexte urbain et intéressé par les enjeux et les usages dont ce contexte est l’objet.
On distingue deux types d'acteurs urbains: les acteurs privés et les acteurs publics.

1. Les acteurs privés :


Quand une entité collective ou individuelle engage une action dans la ville et entraîne un certain nombre
d’effets sur le devenir de celle-ci tout en réalisant des bénéfices ; c'est un acteur privé.
L’exemple le plus courant d’ acteur privés est donné par les promoteurs et constructeurs qui interviennent
sur la ville. Mais ce ne sont pas les seuls puisque, par extension, on peut dire que tout promoteur dans les
secteurs industriel, commercial ou tertiaire a des intentions sur l’espace urbain et vise donc à lui donner une
forme et un contenu spécifiques.

2. Les acteurs publics :


La mission de toute puissance publique est la défense de la collectivité et de l’intérêt général. Elle exige
donc que les acteurs privés se soumettent à son contrôle et à son autorité puisqu'elle est, en principe,
l'émanation et la représentation de la volonté générale de la société.
L’action des pouvoirs publics sur la ville est donc double étant donné qu'ils considèrent l’espace urbain
comme objet et instrument. Ceci implique que ces acteurs publics utilisent la ville pour exercer leur pouvoir
et ils interviennent sur la ville pour concrétiser leur politique.
Parmi les acteurs collectifs publics des villes, on peut citer les acteur municipaux qui assurent un contrôle
social typiquement urbain et font partie d’institutions qui jouent un rôle d’intégration à la ville.
Il y a aussi les acteur des services locaux des administrations centrales qui détiennent leur pouvoir des
collectivités locales.

Remarque : Il existe aussi dans une ville un certain nombre d’autres acteurs qui sont impliqués dans la
dynamique urbaine par le biais des compétences, des jugements, des savoirs ou des représentations qu’ils
ont sur ou de la ville. C’est le cas de l’habitant, du politique ou de l’expert qui sont intéressés, chacun à sa
manière et en fonction de sa « spécialité », par les processus et les changements urbains.

III- L’interaction entre les acteurs sociaux et la production des espaces


 L’interaction des acteurs sociaux de l’espace :
Entre les différents types d’acteurs urbains précédemment cités, il s’établit des relations déterminées qui
vont retentir sur le mode de gestion de la ville, les formes d'intégration des comportements et les processus
de participation des personnes formant la collectivité urbaine.
Il n’y a pas un acteur social qui a le privilège exclusif de l’action et de la réaction vis à vis de la
transformation de l’espace , mais tous les acteurs sociaux devraient interagir les uns avec les autres.

23
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

Le concept de l’action en sociologie


1- La notion d’action sociale selon Weber
Pour Weber le sociologue doit principalement s’efforcer de saisir la signification que donne un
individu à son action. C’est la raison pour laquelle la démarche qu’il préconise est dite compréhensive.
Elle vise à comprendre les motifs qui poussent l’individu à adopter tel type de comportement.
Weber distingue quatre formes d’actions sociales : il s’agit de divers modèles d’action possibles pour
un individu.
- L’action traditionnelle : s’appuie sur les coutumes, les habitudes acquises, elle caractérise
l’ensemble des activités familières à l’individu. Exemple : obéir à son père.
- L’action affective : guidée par les pulsions telles que l’amour ou la haine envers les autres.
- L’action rationnelle en valeur : vise à se conformer à ses convictions sans attacher
d’importance à leurs conséquences pratiques.
- L’action rationnelle en finalité : consiste à évaluer les moyens dont on dispose afin d’atteindre
un objectif préalablement fixé. Exemple : l’ingénieur qui fait construire un pont procède de
cette façon ;
RQ : Les catégories d’action ne vise pas à répertorier les activités sociales. Weber précise que la
majorité d’entre elles relève en pratique des formes mixtes.
Weber construit la méthode de l’idéal type : un tableau de pensée (modèle abstrait élaboré de certains
traits volontairement accusés d’un phénomène.
La construction de la méthode de l’idéal type intervient dans le travail du sociologue, elle permet
d’apprécier l’écart entre la réalité qu’il observe et le tableau imaginaire qu’il construit. (il s’agit de
l’approche comparative).

 Les acteurs sociaux et la production des espaces :


Certains acteurs sociaux apparaissent clairement comme des producteurs d’espace, comme les
professionnels qui interviennent directement sur la production des espaces urbains, par rapport aux autres
acteurs ordinaires comme les citadins par exemple :
1- Les professionnels :
Ceux sont :
- ceux qui exercent la profession de concepteurs et de réalisateurs d’espaces, architectes, urbanistes,
promoteurs,
- et ceux qui décident de construire : le maire et le conseil municipal assistés par les techniciens et ingénieurs
municipaux et départementaux.
En effet, par exemple l’initiative individuelle de celui qui souhaite faire construire ou aménager son
habitation ou d’autres locaux s’intègre dans les circuits du permis de construire qui nécessitent l’appel (ou
non) à un architecte et l’accord de la mairie qui vérifie la conformité du projet avec les documents
d’urbanisme.
Les initiatives publiques : rénovations de quartiers insalubres, construction de logements sociaux,
ménagement de squares ou de jardins, ouverture ou élargissement de voies, création d’équipements (école,
piscine par exemple) s’insèrent de même dans des processus dont les différentes étapes sont connues, même
si elles ne suppriment pas les négociations.
Les promoteurs privés sont le plus souvent des vendeurs de projets, qui intègrent habitations, voirie,
parfois services, aménagement paysager, modalités de crédit, et ont été élaborés par des équipes associant
des architectes, des paysagistes, des techniciens, des établissements bancaires, des conseils juridiques, avant
d’être présentés directement aux maires.
2- Les citadins :

24
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

La production des espaces n’est pas seulement celle des professionnels de l’espace construit ou aménagé
et des groupes sociaux qui les soutiennent ou engagent des rapports de force.
Les usagers, habitants, habitués, clients, employés, passants, occupent ces espaces, les transforment en
lieux habités, des lieux qui se chargent d’histoires individuelles et d’histoires collectives. Ils sont le cadre
d’évènements infimes et mémorables, et font partie de la vie et des activités quotidiennes de ceux qui les
occupent ou les traversent.
Les lieux proches sont le plus souvent investis de façon active par ceux qui les habitent. La « maison »,
pavillon ou appartement, la rue ou le tronçon de rue, le quartier ou le marché sont, journellement ou
occasionnellement, parcours, appropriés, marqués.
Habiter un lieu suppose la possibilité de le faire sien, de se l’approprier, non pas pour le défende contre
des importuns, pour en interdire l’accès, mais parce qu’un lieu habité et un espace devenu familier. Les
habitants, les passants, l’adaptent à leur regard et à leurs pratiques autant qu’ils s’adaptent à sa configuration
et aux activités qui s’y déroulent.
C’est le cas d’une habitation, d’une rue, d’un café, comme de tous les lieux fréquentés. Certains
architectes cherchent à ménager des possibilités d’adaptation des espaces construits plutôt que d’envisager
l’architecture et l’urbanisme comme des moules dans lesquels leurs occupants se rangeraient.
Cette reconnaissance des capacités des citadins à la co-production d’espaces est cependant peu fréquente.
.

CONCLUSION:
La production de l’espace urbain est une pratique pluridisciplinaire
Progressivement, l'urbanisme est devenu une pratique pluridisciplinaire. Aux architectes sont venus se
joindre divers ingénieurs (dont ceux spécialisés dans les problèmes de voirie), puis des sociologues, des
hygiénistes, des géographes, des économistes, des juristes, des paysagistes, etc. Ainsi ont été créés des
bureaux d'études, la plupart privés, avant que ne soient formés, dans des municipalités importantes ou dans
des groupements urbains régionaux, des agences d'urbanisme. À ces intervenants viennent utilement
s'associer, se joindre, les décideurs politiques souvent éclairés par la consultation des citoyens concernés.

25
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

CHAPITRE 5 : Quelques approches sociales de l’espace

 DURKHEIM :
L’étude de l’espace dans la sociologie durkheimienne s’est développée implicitement selon
deux axes relativements indépendants l’un de l’autre.
Le premier consiste à analyser et à mettre en relief le rôle de la ville dans l’apparition de
nouvelles formes de relations sociales.
Durkheim, considère la ville comme le lieu où se concrétise le passage d’une société à
solidarité mécanique à une société à solidarité organique
Primitive traditionnelle (conscience collective) Moderne industrielle
Le second qui consiste à faire la sociologie de l’habitat dans ses aspects physiques et
matériels. Dans la terminologie de Durkheim, l’habitat est un des aspects de la morphologie
sociale.
Durkheim commence par définir (in « Année sociologique 1897-98 ») le concept de
morphologie sociale comme « la masse des individus qui composent la société, la manière dont
ils sont disposés sur le sol, la nature et la configuration des choses de toutes sortes qui affectent
les relations collectives ». Il marque donc que la forme spatiale n’est pas indépendante du
fonctionnement social et même le soutient ; tandis que celui-ci la modèle pour ses propres
besoins.
Mais, pour Durkheim, l’espace social est plus qu’un miroir de l’organisation sociale, c’est
une catégorie1, comme le temps dont la base est « le rythme de la vie sociale » ; alors que « c’est
l’espace occupé par la société qui a fourni la matière de la catégorie d’espace ».
 MARCEL MAUSS :
Il propose une définition très proche de celle de Durkheim, dont il a été l’élève. La
morphologie sociale, c’est, « le substrat matériel des sociétés, c’est à dire la forme qu’elles
affectent en s’établissant au sol, le volume et la densité de la population, la manière dont elle
est distribuée ainsi que l’ensemble des choses qui servent de siège à la vie collective ». C’est
ce que nous appelons actuellement l’habitat.
Mauss illustre sa théorie dans une brillante étude sur les variations saisonnières de la société
eskimo. Il note que leur mode de vie et d’habitat varie selon les saisons :
- En hiver, l’habitat est collectif, c’est à dire qu’il concerne des familles élargies
regroupées autour d’une salle de réunion ; l’esprit et la conscience de la collectivité se
développent et se renforcent grâce aux fêtes religieuses, réunions et rencontres.
- En été, l’habitat est individuel, il concerne donc une famille restreinte et il est dispersé.
Il n’y a ni fêtes, ni manifestation publique d’appartenance à une collectivité.
En poursuivant son étude, Mauss constate que la différence observée entre hiver et été au
niveau de la morphologie, se prolonge dans d’autres dimensions. Ainsi dans la religion : il y a
une religion d’hiver et d’été ; pour cette dernière il n’existe qu’un culte domestique. Par contre

1
Durkheim considère qu’il existe quatre catégories de l’esprit sous-jacentes à l’organisation sociale des sociétés
sans écriture : la force énergétique, le lieu spatial, le moment temporel, et l’agencement de l’ensemble, qui en
assure les correspondances et la pérennité.

26
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

en hiver la vie religieuse est intense : fêtes, cérémonies, enseignements, confessions, apparitions
des shamans (sortes de sorciers), etc.
Dans le droit, on retrouve le même clivage, ainsi que dans la sexualité. Mauss parle en hiver
du communisme sexuel des eskimos. Nous voyons donc, que toutes les normes sociales jusqu’à
l’intimité d’une unité familiale se transforment. En d’autres termes l’habitat eskimo s’explique
certes en partie par le climat, mais aussi par une culture spécifique qui régit aussi bien les
rapports sociaux que l’organisation de l’espace. Si le climat était le seul élément explicatif, tous
les habitants du Grand Nord auraient le même habitat, ce qui est loin d’être le cas.
 HALBWASCH :
La répartition des activités et des lieux de pouvoir, les séparations entre les espaces
résidentiels et économiques, les formes d’habitations et de peuplement sont l’expression de la
société, de ses normes, valeurs et habitudes.
Tous ceux qui interviennent dans la production de l’espace se sont interrogés sur la manière
dont celui-ci renforce ou détruit les groupes sociaux qui y résident ou vont y habiter. L’un des
pionniers de la sociologie urbaine, Maurice HALBWACHS qu’une relation réciproque entre la
cohésion des groupes sociaux et l’espace produit par la société s’établit
La morphologie sociale de Maurice HALBWACHS
Pour Maurice HALBWACHS, l’organisation spatiale agit sur la société par la façon dont
celle-ci l’appréhende : « les formes matérielles de la société agissent sur elle non point en vertu
d’une contrainte physique comme un corps agirait sur un autre corps mais par la connaissance
que nous en prenons (….) ; il y a là un genre de pensée ou de perception collective qu’on
pourrait appeler une donnée immédiate de la conscience sociale » (1970, p 182-183). Il
convient de s’attacher aux représentations collectives de l’espace qui renvoient aux sentiments
communs » de la société. Or la production de l’espace urbain est le résultat d’une action
collective.
Cette théorie s’applique d’abord au marché foncier. Le niveau de prix du sol, urbain ou
rural, est un puissant déterminant de la répartition des groupes sociaux dans l’espace. Il se
répercute sur les prix immobiliers et les loyers. Ainsi, l’explication des prix fonciers se révèle
fondamentale. Cependant il existe dans l’espace urbain des phénomènes qui dépassent la
théorie économique classique de l’ajustement offre- demande. Non seulement les prix fonciers
sont déterminés par l’anticipation des acheteurs et des vendeurs (ce qu’on pourra faire de tel ou
tel terrain), mais ils reposent également sur un prix d’opinion qui renvoie à la représentation de
l’espace qu’en ont les acteurs (par exemple ce que peut devenir tel ou tel quartier). En outre
l’intervention publique de l’état ou des collectivités locales modifie considérablement les
conditions du marché dans la mesure où elle contribue à transformer substantiellement la nature
du sol. Ainsi, l’équipement d’une ville en réseaux de transport la désenclave et la valorise.
Maurice Halbwachs, évoque les actes d’expropriation des biens individuelles opérés par les
acteurs publics à Paris entre 1854 et 1870 ; Il pense que ces actions émanent d’une logique et
une politique publique qui vise à améliorer la circulation, l’hygiène, à réprimer les
manifestations populaires et à favoriser le retour de la bourgeoisie. Pour Halbwachs, une telle
action répond sans la savoir à des besoins et à la pression collective.
En effet, si Maurice Halbwachs s’intéresse autant à la morphologie sociale, c’est qu’il pense
que derrière les formes générales (importance, étendue, localisation, etc.) d'un phénomène, il y
a " un monde de représentations et d'états affectifs ", " des pensées, une vie psychologique ";
" toutes les formes [...] ne nous intéressent que parce qu'elles sont étroitement liées à la vie
sociale, qui consiste toute entière en représentations et tendances ". Ainsi, " la morphologie

27
Cours initiation à l’anthropologie et aux sciences sociales (première année architecture)

sociale part de l'extérieur. Mais ce n'est pour elle qu'un point de départ. Par ce chemin étroit,
c'est au cœur même de la réalité sociale que nous pénétrons ", " la morphologie sociale, comme
la sociologie, porte avant tout sur des représentations collectives " (Halbwachs Morphologie
sociale, colin, 1970, p. 10, 11, 13 et 18).

28

Vous aimerez peut-être aussi