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[Début de la dictée] Une motocyclette conduite par un petit homme sec, m'avait doublé et s'était

installée devant moi, au feu rouge.


En stoppant, le petit homme avait calé son moteur et s'évertuait en vain à lui redonner souffle. Au
feu vert, je lui demandai, avec mon habituelle politesse, de ranger sa motocyclette pour que je
puisse passer. Le petit homme s'énervait encore sur son moteur poussif .Il me répondit donc,
selon les règles de la courtoisie parisienne, d'aller me rhabiller. J'insistai, toujours poli, mais avec
une légère nuance d'impatience dans la voix. On me fit savoir aussitôt que, de toute manière, on
m'envoyait promener.
Pendant ce temps, quelques avertisseurs commençaient, derrière moi, de se faire entendre. Avec
plus de fermeté, je priai mon interlocuteur d'être poli et de considérer qu'il entravait la
circulation. L'irascible personnage, exaspéré sansdoute par la mauvaise volonté de son moteur,
m'informa que si je désirais ce qu'il appelait une dérouillée, il me l'offrirait de grand coeur. (fin)
Tant de cynisme me remplit d'une bonne fureur et je sortis de ma voiture dans l'intention de
frotter les oreilles de ce mal embouché. Je ne pense pas être lâche (mais que ne pense-t-on pas!),
je dépassais d'une tête mon adversaire et HYPERLINK
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muscles m'ont toujours bien servi. Je crois encore maintenant que la dérouillée aurait été reçue
plutôt qu'offerte. [Fin de la dictée]
L'homme au volant - Albert Camus

Puis, une clameur s'éleva, où l'on distinguait les voix aiguës et les sauts de joie des enfants. Et il y eut
une rentrée triomphale : Gervaise portait l'oie, les bras raidis, la face suante, épanouie dans un large rire
silencieux ; les femmes marchaient derrière elle, riaient comme elle ; tandis que Nana, tout au bout, les
yeux démesurément ouverts, se haussait pour voir. Quand l'oie fut sur HYPERLINK
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table, énorme, dorée, ruisselante de jus, on ne l'attaqua pas tout de suite.

Emile Zola, L’Assommoir (1877).

Tous les émigrants n'étaient pas obligés de passer par Ellis Island. Ceux qui avaient suffisamment
d'argent pour voyager en première ou en deuxième classe étaient rapidement inspectés à bord par
un médecin et un officier d'état civil et débarquaient sans problèmes. Le gouvernement fédéral
estimait que ces émigrants auraient de quoi subvenir à leurs besoins et ne risqueraient pas d'être à
la charge de l'Etat. Les émigrants qui devaient passer par Ellis étaient ceux qui voyageaient en
troisième classe [...] dans de grands dortoirs non seulement sans fenêtres mais pratiquement sans
aération et sans lumière, où deux mille passagers s'entassaient sur des paillasses superposées.

Georges PEREC, Ellis Island, 1980.


Vingt ans sont passés et l'homme que je suis, depuis longtemps abandonné de sa jeunesse, se
souvient avec beaucoup moins de gravité et un peu plus d'ironie de celui que je fus alors avec
tant de sérieux, tant de conviction. Nous nous sommes tout dit et pourtant il me semble que nous
nous connaissons à peine. Était-ce vraiment moi, ce garçon frémissant et acharné, si naïvement
fidèle à un conte de nourrice et tout entier tendu vers quelque merveilleuse maitrise de son
destin ? Ma mère m'avait raconté trop de jolies histoires, avec trop de talent [...], nous nous
étions fait trop de promesses et je me sentais tenu. Avec, au cœur, un tel besoin d'élévation, tout
devenait abime et chute.

R. Gary La Promesse de l'aube, 1960.

Ce sont de petits carrés de papier, misérables. Des feuilles mal venues, imprimées ou tapées à la
diable. [...] On fabrique comme on peut. [...] Mais le journal parait. Les articles suivent des
routes souterraines. Quelqu'un les rassemble, quelqu'un les agence en secret. Des équipes furtives
mettent en page. Les policiers, les mouchards, les espions, les dénonciateurs s'agitent, cherchent,
fouinent, flairent. Le journal part sur les chemins de France. Il n'est pas grand, il n'a pas bel
aspect. Il gonfle des valises usées, craquantes, disjointes. Mais chacune de ses lignes est comme
rayon d'or. Un rayon de la pensée libre.
J. Kessel L'Armée des ombres, 1943.

Un moustique s’approcha d’un lion et lui dit : "Je n’ai pas peur de toi, et tu n’es pas plus
puissant que moi. Si tu veux, je te provoque même au combat". Et, sonnant de la trompe, le
moustique fondit sur lui, mordant le museau dépourvu de poil autour des narines. Quant
au lion, il se déchirait de ses propres griffes, jusqu’à ce qu’il renonce au combat. Le
moustique, ayant vaincu le lion, sonna de la trompe, entonna un chant de victoire, et prit
son envol. Mais il s’empêtra dans une toile d’araignée : tandis qu’elle le dévorait, il se
lamentait d’être tué par un vulgaire animal, une araignée, lui qui avait combattu les plus
puissants animaux.
D’après Ésope, Fables, VIIe -VIe siècle avant J.-C

e suis parti avec les tracts.


Je les enterrés dans la rivière.
J'ai tracé sur le sable un plan...
Un plan de manifestation future.
Qu'on me donne cette rivière, et je me battrai.
Je me battrai avec du sable et de l'eau.
De l'eau fraiche, du sable chaud. Je me battrai.
J'étais décidé. Je voyais donc loin. Très loin.
Je voyais un paysan arc-bouté comme une catapulte.
Je l'appelai, mais il ne vint pas. Il me fit signe. [...]
Moi j'étais en guerre. Je divertissais le paysan.
Je voulais qu'il oublie sa faim. Je faisais le fou. Je faisais
[le fou devant
mon père le paysan. Je bombardais la lune dans la rivière.
K. Yacine
Nedjma, 1956.

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