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Romain Murcia
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All content following this page was uploaded by Romain Murcia on 28 May 2015.
Promotion 2014
Ces remerciements sont les derniers que je fais dans le cadre de mes études à l’INSEEC
Business School – Paris.
Lorsque j’ai voulu rejoindre une école de commerce, afin de poursuivre mes études de droit
par une spécialisation en finance, je me suis tourné vers cette école car je crois en son
potentiel et en ses enseignements. Je tiens donc à remercier d’une façon générale les membres
de l’administration qui m’ont permis de rentrer dans cette école et d’y poursuivre mon cursus,
à savoir M. Rémy CHALLE et Mme Marina GALDERISI. C’est avec leur soutien et leur
confiance que j’ai pu passer mes deux dernières années à étudier la finance.
Je tiens également à remercier, en tant que pilote certes, mais surtout en tant que Professeur et
Responsable de Majeure et de Pôle M. Alfred BONNARD qui a toujours su être à l’écoute,
de l’ensemble de ses étudiants, et m’a permis de retrouver l’aisance que j’avais avec les
chiffres, mais que mes études de droits avaient un peu effacées. Sa clarté d’enseignement et sa
patience sont de véritables soutiens. En tant que pilote de mémoire et professeur de finance,
sa vision est toujours originale, il essaie de nous pousser plus loin et crois en nous.
Je remercie M. Martin KAMGUEN pour son écoute et sa bonne humeur. Il œuvre pour les
étudiants et pour l’école. Mes échanges avec lui ont été constructifs et ses cours de
comptabilité sont passionnants.
J’ai également pu faire cette école grâce à Mme Sophie ROULOT, Manager chez IBM, qui
m’a recruté comme apprenti en Août 2012. Je la remercie pour son implication et la chance
qu’elle m’a donnée d’évoluer pendant 2 ans au sein d’IBM France. Je remercie également
l’ensemble des Managers qui m’ont eu sous leur tutorat, notamment Jean-François PEYRIN
et mon Manager actuel, Luc WATTELLE.
Enfin, je tiens à remercier l’ensemble des répondants qui ont accepté de participer à l’étude.
Je tiendrais leur anonymat mais leur communiquerai ce mémoire. Membres directs ou
indirects de mon réseau professionnel, ils ont été un support majeur à la réalisation de celui-
ci.
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Introduction
Warren BUFFET exprime alors deux idées fondamentales, la première, lors de l’éclatement
de la bulle internet, il apparaissait totalement impossible d’évaluer avec logique les sociétés
majeures de ce marché comme Amazon ou bien d’autres à l’époque. Le marché d’internet
générait 30 Milliards de dollars de chiffre d’affaire mais pesait plus de 1 000 Milliards de
dollars en terme de capitalisations boursières. La seconde, qui sera présentée tout au long de
ce mémoire, c’est la complexité des méthodes d’évaluation. Complexité que nous allons
tenter de mettre en avant, plus particulièrement à une époque où les exigences de rentabilité
sont plus que fondamentales, et les secteurs des nouvelles technologies ou les nouvelles
économies sont très peu connus.
Depuis 2007, La France et le monde connaissaient une crise sans précédent, par sa durée, par
sa structure, et par le nombre des secteurs concernés. En Finance, c’est principalement par
une crise des investissements que se traduit aujourd’hui la fin de la crise financière des années
2007-2008.
De nouveaux business model ont vu le jour, les réseaux sociaux sont devenus en quelques
années, incontournables, et l’économie ne semble plus aussi rationnelle et facile à anticiper
que par le passé. Les financements sont difficile à trouver, et les risques semblent de plus en
plus contrôlés afin d’anticiper une nouvelle crise. Toute entreprise qui décide de se vendre, ou
de se développer par la voie des fusions-acquisitions se doit de parvenir à valoriser au mieux
la transaction afin d’optimiser la rentabilité de l’opération.
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marché des fusions-acquisitions qui a dépassé encore une fois les 2 000 Milliards de dollars
en 2013.
Ce mémoire tentera d’apporter des éléments afin d’éclairer le choix d’une méthode
d’évaluation plutôt qu’une autre. Il vise à se concentrer sur l’évaluation financière des
entreprises, et son objet premier sera de démontrer la pertinence de l’approche multicritères
dans les opérations de fusions-acquisitions, mais également de recherche de nouveaux
éléments créateurs de valeur non intégrés par les méthodes d’évaluation actuelles. L’origine
de cette réflexion et de tenter de comprendre si certains domaines, comme Internet dans les
années 2000, subissent des règles différentes des grandes théories d’évaluation. Alors que le
marché des fusions acquisitions s’est terriblement ralenti depuis 2008, la reprise semble
s’amorcer. Certaines transactions atteignent des montants considérables alors qu’au regard
des théories les plus répandues, leur évaluation n’aurait jamais atteint une telle valeur.
L’étude d’une des méthodes les plus utilisées montrera également qu’elle ne peut se suffire à
elle-même aujourd’hui et qu’elle connait de nombreuses critiques.
Le contexte principal est celui des opérations de fusions-acquisitions dont l’historique met en
avant une activité cyclique au cours du XXème siècle. Une première partie présentera donc le
marché des fusions-acquisitions ainsi que l’importance du diagnostic financier et les
fondements de celui-ci. Une seconde partie présentera les différentes méthodes d’évaluation
ainsi que les limites soulevées contre la méthode des Flux de Trésorerie Actualisés, qui reste
pourtant la plus utilisée. Enfin, l’étude tentera de qualifier les éléments déterminants dans le
processus de décision des évaluateurs de recourir à telle ou telle méthode afin d’étudier
l’impact du secteur d’activité, de la taille de l’entreprise, du financement, ou de tout autre
informations fondamentales qui seraient pertinentes. L’acquisition récente de WhatsApp par
Facebook par un montant exceptionnel vient renforcer l’idée que de nouveaux éléments
doivent être pris en compte dans la décision d’évaluer une entreprise, éléments souvent
créateurs d’une nouvelle valeur difficilement quantifiable à première vue. Ce sont les
négociations entre acheteurs et vendeurs qui déterminent et quantifient la valeur définitive de
la transaction.
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I. L’analyse financière : approche fondamentale à l’évaluation financière.
2014 est annoncée par un grand nombre d’analystes financiers comme l’année de la
reprise pour le marché des transactions en fusions-acquisitions au niveau mondial. En effet,
on parle de reprise car depuis la crise de 2007 et l’explosion du nombre de transactions,
l’activité s’était violemment ralentie. Cette phase, d’une durée de 6 ans, est en fait le creux
d’une vague. Nombreux sont les analyses du marché qui reflètent l’activité cyclique de ce
secteur.
De la fin du XIX siècle aux années 1990, la majeure partie des transactions avaient lieux aux
Etats-Unis. Il faudra attendre la globalisation initiée en 1993 pour que les pays développés tel
que la France, le Japon, le Royaume Uni, l’Italie, l’Allemagne… développe un réel marché
des fusions-acquisitions. Cela concerne principalement les grandes entreprises à l’époque.
Sur l’ensemble des opérations depuis 1882, on peut distinguer 5 aspects ou périodes qui ont
précédé celle que nous semblons avoir quittée en 2013 (Scherer et Ross, 1990 ; Capron,
1996 ; Coutinet et Sagot-Duvauroux, 2003).
Cette période sera marquée par une majorité d’intégrations horizontales. C’est une
période de développement de la taille des entreprises américaines et également de l’économie
américaine. C’est une époque où la décision d’acquisition est souvent liée à la peur de la
concurrence, et racheter ce concurrent permet de dominer le marché avec moins de risques.
C’est principalement des fusions, la plupart du temps de 5 ou 10 entreprises en même temps.
On retrouve également, ce fut le cas pour J.P. Morgan, des fusions qui intègrent des centaines
de compagnies, plus de 700 pour J.P. Morgan. Jusqu’en 1903, avant l’effondrement du
marché du capital, l’économie américaine a donné naissance à des géants comme Kodak,
American Tabacco, General Electric.
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2. De 1916 à 1929 : la vague des transformations.
C’est après la première guerre mondiale qu’un boom économique revient aux Etats-
Unis, et que de nombreuses transformations sont faites dans l’activité économique du pays.
L’industrie automobile se développe, tout comme l’électricité. C’est une période qui va tendre
vers la domination du marché, et qui sera marquée par une forte concentration, ce qui aboutira
à l’émergence d’un « oligopole » constitué des quelques géants du marché, jusqu’à
l’effondrement du marché avec la crise de 1929.
Cette troisième vague verra l’émergence des conglomérats. C’est une vague courte, 4 à
5 ans. Les règlements antitrust et le cadre réglementaire américain va favoriser l’émergence
de ce type de regroupement. L’orientation restante sera un développement par l’acquisition
d’autres domaines de compétence et donc d’entreprises dans des secteurs différents de celle
qui cherche à se développer. Ces décisions se révèleront parfois très mauvaises dans les
années 1980, et de nombreuses compagnies rencontreront des difficultés financières
importantes.
Il faut attendre 1981 pour qu’une nouvelle vague de transaction se dessine. C’est la fin
des conglomérats (l’un des restants étant General Electric), nombre d’entre eux seront ruinés
et disparaitront. On va retrouver une époque de nouvelles fusions, et un marché beaucoup plus
dynamique et agressif qu’il ne l’a été jusque-là. Cette période est également soutenue par une
politique d’anti-monopole aux Etats-Unis. Cette période ne dure que jusqu’en 1990.
A partir de 1992 débute une période relativement riche en transactions. Cette période
s’étend jusqu’aux années 2000-2001 avec la fin du boom de l’économie numérique et
d’internet.
Cette période sera marquée par les plus grosses fusions ou acquisitions de l’histoire. Pendant
cette période on retrouve plusieurs des plus grosses opérations qui n’ont toujours pas été
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égalées en termes de montant de transaction. Cette période, à la différence des quatre
précédentes, ne sera pas uniquement focalisée sur les Etats-Unis. C’est ce qui marque les
années 1990. L’Europe va connaitre une explosion du nombre et de la valeur de ses
transactions. Les opérations hostiles vont également émerger en Europe, notons notamment la
transaction Vodafone-Mannesmann qui reste à ce jour la plus grosse transaction de l’histoire
($183Mds). Les choses s’accélèrent entre 1998 et 2000 avec l’éclatement de la bulle internet
et de très grosses transactions. Plus de 26 000 transactions en 1998, et plus de 40 000 en 1999.
Le volume atteint 340 Milliards de dollars ce qui est à l’époque jamais vu. L’année 2 000
connaitra un volume de 400 Milliards de dollars, ce qui sera alors le plus haut historique. Ci-
dessous se trouve la liste des 10 plus grosses transactions de l’histoire parmi lesquelles 5 ont
été signées entre 1999 et 2001.
Après 2001, le marché s’est ralenti, et a connu un nouveau creux dans les années 2002/2003.
Certains analystes pensent que l’année 2007 a été le pic d’une nouvelle vague puisqu’après
celui-ci l’activité s’est effondrée pendant la crise, et semblerait repartir à la hausse sur la fin
de l’année 2013, et évoluer positivement en 2014. Voici deux graphiques qui représentent
l’activité après les années 2000, on peut voir le volume (Mds de Dollars) des transactions par
zones géographiques, la répartition trimestrielle, et le nombre de transactions. Les chiffres
diffèrent selon les sources, une variation de près de 450 Millions en 2007 entre les chiffres de
Thomas Reuters et ceux de MergerMarket.
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Source : Thomas Reuters Full Year 2013 M&A review.
Aujourd’hui, malgré cette reprise espérée et pressentie par les analystes, de nouvelles
problématiques se posent ou se renforcent. La valeur réelle des entreprises, celle que l’on
appelle valeur économique ou valeur fondamentale, est souvent très différente de la valeur de
marché, celle qui est payée par les acquéreurs. Comme le disent Jean Florent REROLE et
Christian WALTER dans un article de la Revue Banque de septembre 2008, n° 705 p. 80, la
valeur économique des entreprises s’est rapprochée au cours des 30 dernières années de la
valeur comptable de celle-ci, mais est souvent bien différente de la valeur de marché. De plus
en plus, les investisseurs et les acquéreurs vont chercher à obtenir le prix le plus juste
possible. Mais ce prix n’est plus déterminé par les méthodes classiques d’évaluation
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financière, les exemples du rachat par Yahoo de Tumblr ou d’Instagram par Facebook
démontrent que le prix payé aujourd’hui n’est plus définit comme avant.
Avec une reprise des opérations de fusions-acquisitions, notamment dans les secteurs
technologique, pharmaceutique ou biotechnologique et financier, les enjeux vont être de plus
en plus grands. Les analystes s’accordent à dire que la crise a fragilisé le marché et modifié
les comportements et les courants de pensées. Le management du risque, la recherche de la
rentabilité, vont influer de plus en plus sur la détermination du prix d’une acquisition. D’un
côté vendeur, on va retrouver certaines sociétés capables de faire monter les enchères, et
refuser des offres déjà survalorisées, dont l’évaluation de leur propre valeur, parfois
exorbitante, sera imposée à l’acheteur malgré les évaluations traditionnelles.
Enfin, comme l’explique Marina ALCARAZ, journaliste et analyste financier pour Les
Echos, pendant la crise, entre 2007 et 2013, de nombreuses entreprises ont fait des réserves de
cash afin de pouvoir faire face aux coups durs. La situation s’améliorant, la croissance
pointant son retour et la bourse ayant repris de la dynamique haussière, les chefs d’entreprises
commencent à s’orienter vers de la croissance externe, afin notamment d’accélérer leur
développement et de reconquérir des marchés perdus ou difficiles d’accès. Des PME au
Grands Groupes, les réserves de cash sont immenses. Elle dit, à propos des entreprises du
CAC 40 « les groupes ont cherché à assainir leur bilan et à se désendetter ces dernières
années. La dette nette des entreprises du CAC 40 en excluant le secteur financier (et l'Oréal
qui publiait ses comptes au moment de l'écriture de cet article)) est passée de presque 273
milliards au 30 juin 2012 à 234 milliards à la fin du premier semestre, selon les données de
Ricol Lasteyrie. Six entreprises (Capgemini, EADS, Gemalto, Renault, STMicroelectronics,
Technip) ont même une trésorerie supérieure à la dette. Les ratios d'endettement se sont
nettement améliorés. Le « gearing » sur fonds propres est passé de 54 % à 46 %. Le ratio
dette nette sur capitalisation de 45 % à la fin du premier semestre de l'an dernier à 32 %
aujourd'hui ». Cette situation était présentée au 30 aout 2013 et s’est encore améliorée. La
notion de création de valeur est fondamentale dans ces décisions. Les opérations de fusions
acquisitions ont pour objectif cette création de valeur et de synergie, et l’évaluation financière
sera un des grands enjeux de ces transactions.
« On n'attrape pas un couteau qui tombe.” Désormais, nos clients sont passés à : “Il ne faut
pas rater le train qui part.” Le changement d'état d'esprit est notable », résume Arnaud
BOUYER, Managing Director chez Morgan Stanley à Paris en janvier 2014.
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B. Les enjeux de l’évaluation financière et la nécessité d’une évaluation
encadrée.
L’analyse financière est orientée aujourd’hui plus que jamais vers les investisseurs, afin de les
sécuriser. Une des théories de GRAHAM est la « marge de sécurité » qu’il faut toujours
prévoir pour les investisseurs. Acheter un actif à son prix réel est un trop grand risque.
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Au-delà du marché, la santé des entreprises est régie par un cadre réglementaire et des
obligations particulières. Des auteurs comme ELLIOT & ELLIOT ou NOBES mettent en
avant l’importance de l’analyse financière, les enjeux liés à la transparence financière et la
compréhension des Etats Financiers. L’observation du Bilan, de la Trésorerie ou du Compte
de Résultat va apporter des éléments, qui seront une base pour l’évaluation financière, mais
qui sont souvent complémentaires pour estimer la juste valeur de l’entreprise. La norme IFRS
13 Evaluation de la juste valeur, publiée en mai 2011 et entrant en vigueur pour les exercices
ouverts à compter du 1er janvier 2013, définit la juste valeur comme « le prix qui serait reçu
pour la vente d’un actif ou payé pour le transfert d’un passif lors d’une transaction normale
entre des intervenants du marché à la date d’évaluation ».
Dans son livre « Analyse financière et évaluation d’entreprise », (2013) Simon PARIENTE
met en avant les enjeux du diagnostic financier et de l’analyse financière comme composante
de l’évaluation des sociétés. Selon lui, il est nécessaire d’avoir des « références intrinsèques
et des éléments à la frontières de la discipline ». Il y a autant de technique que d’image et de
perception externe qu’interne. La stratégie viendra compléter l’analyse ou le diagnostic
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financier avec notamment des modèles de SWOT. Son ouvrage s’oriente principalement
autour de la lecture des Etats financiers et de la perception boursière des sociétés. D’autres
auteurs reprendront plus largement la perception boursière comme la perception externe ou
l’image de la société, qui influera sur sa valorisation (exemple des cas Tumblr et Instagram).
Selon PARIENTE, la structure financière de l’entreprise joue un rôle fondamental dans sa
valorisation. Le résultat de l’entreprise doit être interprété et il faut savoir « l’apprécier sous
l’angle de la rentabilité et du risque ».
Philippe de la CHAPELLE, dans son ouvrage « L’évaluation des entreprises » (2004), p. 18,
reprend également la comparaison entre l’analyse financière et l’analyse stratégique de
l’entreprise. Il insiste sur l’importance de la compréhension des flux financiers. Il considère
« qu’on ne peut apprécier et donc bien vendre ou bien acheter que ce que l’on connait bien.
Une évaluation sérieuse ne peut résulter d’un travail rapide ou sommaire. La seule démarche
qui vaille, celle qui est commune aux analystes financiers, aux conseils en fusions-
acquisitions et aux spécialistes du capital-développement, consiste à franchir successivement
les étapes suivantes :
- Accéder à une bonne connaissance de l’entreprise sous ses principaux aspects,
- Mettre en place des prévisions qui serviront de bases au travail d’évaluation,
- Se forger une opinion sur l’investissement étudié en intégrant la valeur ainsi estimée,
le prix observé (si entreprise cotée) et certaines autres données de marché ».
C’est ce qu’il appelle « l’analyse fondamentale ».
Pour lui, les fondements d’une entreprise viennent de ses flux d’exploitation et de la
rentabilité qui en découle. Il observe la rentabilité, à la fois sur l’activité elle-même mais aussi
par rapport aux capitaux investis.
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Il définit également l’évaluation de la façon suivante : « évaluer tout ou partie d’une
entreprise consiste à déterminer le prix plus probable auquel une transaction pourrait se
conclure dans des conditions normales de marché ». Définition dans la logique de la théorie
du prix et de la loi de l’offre et de la demande.
3. La recherche de la performance.
Il est d'actualité de pouvoir mener une évaluation financière afin de prendre des décisions
appropriées avec un minimum de temps et de dépenses. Il est impossible de dissocier le
processus d'évaluation financière des rapports financiers et d'autres informations (l’image de
la société sur le marché boursier pour une société cotée par exemple). La divulgation de
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l'information a une signification ambivalente dans l'évaluation des entreprises (ARZAC,
2005).
D'une part, en fonction l'information disponible sur l'entreprise, il est possible de choisir des
méthodes particulières d'évaluation financière. Souvent, le sujet n'a pas encore évalué toutes
les informations sur l'entreprise concernée, ce qui limite les possibilités dans le choix des
méthodes d'évaluation. D'autre part, les méthodes d'évaluation financière révèlent souvent une
valeur différente, parce que la base de calculs comprend des données différentes. Certains
gouvernement, comme la France dans son rapport de la Direction Générale des Finances
Publiques de 2006 sur « l'évaluation des entreprises et des titres de sociétés », conseillent de
recourir à plusieurs formes d’évaluation, plusieurs méthodes, car souvent, il apparait
fondamental d’étudier le patrimoine d’une société, mais aussi de comparer une société à une
qui lui serait similaire dans son activité, sa taille, son secteur et son marché. Simon
PARIENTE, dans son ouvrage « Analyse financière et Evaluation financière » de 2013,
rejoint ces propos. Selon lui, « Fondamentalement, l’évaluateur doit prendre en considération
une double réalité, celle de l’entreprise et celle qui l’entoure, dans laquelle le ou les métiers
sont exercés ».
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II. Méthodes d’évaluation financière : vers une approche multicritères.
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Figure 1 : Les différentes étapes d’une évaluation (Arnaud THAUVRON, Evaluation
Financière (2013), p. 18).
Prise de connaissance générale de
l’entreprise
Préparation de la mission
Perspective stratégique
Business plan
Evaluation
Négociation
Prix
Cette méthode va principalement s’appuyer sur une analyse et une comparaison de ratios
financiers, pour des entreprises d’un secteur comparable (élément relativement subjectif selon
beaucoup d’analystes, notamment dans le cas de holdings cotées ayant de nombreuses
activités). On va se concentrer sur le revenu résiduel ou sur le chiffre d’affaire, et on va le
multiplier par un coefficient. Cependant, il y a ici deux conceptions. Selon Simon
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PARIENTE, mais aussi Arnaud THAUVRON, « Evaluation financière » (2013), on
n’observe pas la même démarche dans ces deux cas. Lorsque l’on prend le Résultat Net ou
Bénéfice résiduel comme base, l’application d’un coefficient donnera un prix direct, qui sera
basé sur le retour réel sur l’investissement de l’acquéreur au regard des bénéfices. Cependant,
appliquer un coefficient au chiffre d’affaire implique que la valeur d’entreprise obtenue par
cette méthode sera ensuite à répartir entre les propriétaires et les créanciers.
On calculera en général plusieurs multiples afin d’obtenir plusieurs valeurs et d’identifier une
valeur « moyenne » des capitaux propres de l’entreprises.
Source :www.analyse-sectorielle.fr
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Selon Philippe CAMPOS, dans son article « Comment déterminer la valeur d’une entreprise
du non coté : DCF, multiples ou multicritères ? » du 30 avril 2013, cette approche est
fortement utilisée par les acteurs du capital investissement. « Celle-ci semble à la fois simple
et cohérente avec les prix observés sur le marché ». Cependant, malgré la proximité de cette
méthode avec les prix observés sur le marché, l’approche par les comparables, ou multiples, a
de nombreuses limites, comme la plupart des méthodes. Le simple fait de comparer nécessite
une basa comparable sérieuse. Par exemple selon lui, « lorsque l’échantillon est constitué de
sociétés cotées, les PME et ETI n’ont pas nécessairement un flottant et une liquidité suffisante
pour assurer la pertinence du cours de bourse ». Il précise également que bien souvent
l’information est difficile à obtenir, parfois elle n’est pas disponible et cela crée des
distorsions de valeurs. Il analyse : « L’ensemble des informations concernant l’échantillon
retenu n’est pas nécessairement connu (dépenses exceptionnelles, troubles sociaux, nouveaux
contrats ou pertes de contrats…). »
Il existe un premier type d’approches, que nous pouvons qualifier de base. Ces
méthodes se fondent en réalité sur une vision « statique » de l’entreprise, par opposition à une
vision « dynamique » de celle-ci qu’abordent d’autres méthodes.
L’actif qui apparait au bilan, se présente sous sa valeur comptable, et donc « au moment le
plus bas de sa valeur historique et de la valeur de marché », c’est donc une approche
forcément trop éloignée de la réalité.
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Cette méthode va donc nécessiter des aménagements et des retraitements afin d’être
pertinente. Cependant, dans la réalité elle reste peu utilisée car elle implique des conditions
fiscales qui deviennent rapidement désavantageuses pour les actionnaires.
Arnaud THAUVRON, dans son manuel « Evaluation d’entreprise » (2013), présente le même
schéma que Philippe DE LA CHAPELLE. On parle alors en analyse financière de l’Actif Net
Comptable Réévalué ou Corrigé (Actif Net Réévalué ou ANR).
On va donc observer le bilan sous un autre angle, et chaque poste du bilan sera analysé avec
une attention particulière. On va considérer que la valeur de l’entreprise et la richesse des
actionnaires se trouve dans la différence « entre la valeur de marché des actifs et celles des
dettes ».
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effectuent des calculs avec un endettement net acquis après avoir déduit la trésorerie
d’actif ».
Cette méthode est utilisée par des sociétés qui « sont tenues de justifier d’un certain niveau de
fonds propres ou lorsqu’elles sont en difficulté. {…} On peut également penser que cela a du
sens pour les TPE ou pour déterminer une valeur plancher ». Lors de la crise de 2007/2008,
de nombreuses sociétés avaient une capitalisation boursière « inférieure au prix de ventes
potentiels des actifs ».
Les éléments de correction, et donc de réévaluation de l’actif net seront par exemple les
marques et brevets (Alcatel, Motorola), ou certains avantages économiques, concurrentiels,
stratégiques ou parfois géographiques. L’évaluation des marques suivant également des
modèles particuliers mais qui ne sont pas l’objet de cette étude.
Cette méthode va donc permettre de rendre valable des projets dont l’investissement initial
trop important les rend peu viables avec les autres méthodes d’évaluation. Le risque dans la
plupart des méthodes va être dévalorisant, et réduira d’autant la valeur obtenue. Dans la
méthode des Options Réelles, plus la période de risque et l’incertitude sont longues, plus
l’actifs sera valorisé.
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Cependant, cette méthode reste très subjective, dans le sens où l’évaluateur peut agir très
fortement sur les paramètres et les variables utilisées. Comme l’explique Christophe
BOUCHER, comme pour les options, il y a une dimension plus stratégique que financière, et
il est possible que cette méthode soit utilisée, a contrario, pour justifier un niveau de
valorisation élevé. Cette méthode apparaît en partie arbitraire. Il sera très intéressant de voir
l’importance qui pourra lui être attribuée dans le cadre de l’étude qualitative qui sera menée
dans la seconde partie de ce mémoire.
La méthode d’évaluation des actions par les dividendes est présentée par l’ensemble
des analystes comme l’une des moins utilisée. Sa dimension pratique se heurte souvent à une
incertitude sur l’avenir, et comme le rappelle Simon PARIENTE dans son manuel de 2013
« Analyse financière et évaluation d’entreprise », « l’équivalent actuel des revenus futurs
générés par un actif, que celui-ci soit mobilier ou immobilier, détermine son prix ». C’est la
base de l’analyse financière et de l’évaluation financière mis en avant par John BURR
WILLIAMS dans son ouvrage « The theory of investment value » (1938), qui a notamment
permis les fondements de la théorie du portefeuille de MARKOVITZ « The value of any
stock, bond or business today is determined by the cash inflows and outflows – discounted at
the appropriate interest rate – that can be expected to occur during the remaining life of the
asset ».
Cette méthode se concentre donc sur les flux liés à des dividendes espérés. Cette méthode est
peu fiable donc car la politique de distribution des dividendes n’est pas contractuelle, et peut
s’avérer beaucoup moins généreuse que prévu. On peut donc en déduire que dans le cas de
société immobilière, les dividendes sont soumis à une fiscalité particulière ce qui sécurise leur
versement plus que dans d’autres types de sociétés. De plus, comme nous l’expliquer Simon
PARIENTE, depuis 2008, à l’exception du deuxième semestre 2013, l’ensemble des marchés
boursiers sont majoritairement baissiers. Or, c’est dans ces périodes là que le dividende peut
prendre une toute autre dimension. Cela peut devenir la seule forme, ou la principale, de
rémunération des actionnaires. Sur des marchés fragilisés, ou des sociétés comme en France,
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PEUGEOT SA, ou ALCATEL-LUCENT, vont avoir une politique de versement des
dividendes très réservée, mais sur d’autres marchés, ce sera la seule solution pour rassurer et
conserver les actionnaires, et cette méthode de calcul peut prendre tout son sens.
Dans le modèle, le taux de croissance des dividendes est un élément fondamental pour une
modélisation juste et cohérente. Arnaud THAUVRON, « Evaluation d’entreprise » (2013) p.
153, distingue trois phases propres au modèle.
Il considère que dans une entreprise, le taux de distribution des dividendes ne dépend pas
directement de la croissance de celle-ci. Une croissance faible ne signifie pas forcément peu
de dividendes. La croissance de l’entreprise se décompose en trois phases, une croissance
forte pendant une certaine période, puis une croissance qui se réduit pendant une phase de
transition, puis enfin une phase de maturité ou la croissance peut être faible ou nulle. Cela
implique que l’entreprise va réduire ses besoins d’investissement et donc sa CAF, ce qui lui
permettra théoriquement de verser de plus gros dividendes. Cela permet donc d’analyser
également un modèle en trois étapes pour la distribution des dividendes, avec un taux de
croissance des dividendes faibles pendant une certaine période, puis un taux de croissance qui
va s’amplifier pour finalement se stabiliser à un niveau assez élevé, on retrouve la phase de
maturité.
Il existe cependant quelques nuances à ces propos. En effet, de nombreuses études montent
l’irrégularité d’un tel modèle. En 2004, deux auteurs, BAKER et WURGLER, font un constat.
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Selon eux, « le niveau des distributions serait fonction d’effets de mode, dictés par les
marchés financiers. Les dirigeants ne feraient que répondre aux attentes du marché qui, selon
les périodes, valorise mieux les sociétés qui distribuent de forts dividendes ou les sociétés de
croissance, qui en distribuent peu ». Cela rejoint l’analyse de Simon PARIENTE sur la
situation des marchés boursiers baissiers entre 2008 et fin 2013, ou encore fait penser au cas
d’Apple qui n’a versé ses premiers dividendes qu’il y a quelques mois.
Cette méthode d’évaluation est revenue à l’ordre du jour dans les années 1990 après
avoir été utilisée par General Motors en 1920. Elle fait partie de ce qui s’appelle aujourd’hui
le Management par la valeur. Il s’agit non pas seulement de déterminer la valeur d’une
entreprise, mais d’essayer de l’accroitre. Ces méthodes permettent une prise en compte des
décisions et de la stratégie des dirigeants de l’entreprise. Nous n’entrerons pas dans le détail
de cette méthode de calcul dans le cadre de ce mémoire, cependant certains points restent
essentiel pour la poursuite de l’étude empirique. Arnaud THAUVRON, « Evaluation
d’entreprise » (2013), explique dans son livre que certaines méthodes d’évaluation financière
ont d’importantes limites. Il entend le mot limites dans le sens où, certaines méthodes ne
mettent pas à jour certains éléments de la santé financière de l’entreprise, et notamment
occultent certaines dettes qui pourraient être fondamentale.
La méthode RIM (Residual Income Model) ou EVA (Earning Value Added) ou encore
du nom de ses modélisateurs EBO (Edwards, Bell et Ohlson), s’appuie sur l’analyse du
bénéfice résiduel de la société. Cette méthode pointe du doigt le risque de se concentrer
seulement sur le cash flows ou sur le résultat net de l’entreprise.
Le résultat ou bénéfice résiduel est une minoration du résultat net avec les coûts ou gain qui
reviennent aux actionnaires. En d’autres termes, une entreprise « peut réaliser des bénéfices
mais ne pas être profitable du point de vue de ses actionnaires si ce bénéfice est inférieur à ce
qu’ils sont en droit d’attendre, compte tenu du risque qu’ils prennent en ayant investi dans
cette dernière ».L’évaluation se focalise donc réellement sur l’attente de l’actionnaire, sur la
rentabilité qui est selon lui nécessaire à la société mais aussi à une rentabilisation de son
investissements.
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c) La méthode des DCF.
La méthode des DCF ou Discounted Cash Flows en anglais, est en fait une actualisation des
flux de trésorerie. En d’autres termes, on va évaluer les flux futurs et déterminer un taux
auquel les actualiser afin de déterminer une valeur d’entreprise. Cela revient à suivre la
théorie de John BURR WILLIAMS sur la valeur d’une société, d’une action ou d’une
obligation.
Cette méthode est très particulière car elle se base sur un processus d’actualisation que l’on
retrouve dans de nombreuses méthodes et dans de nombreuse situation en finance
d’entreprise. C’est également l’une des méthodes les plus utilisées, en quelque sorte la
méthode fondamentale pour une évaluation financière.
Il prend en compte la valeur de l’Actif Financier (AF) et l’inclut dans sa formule. Plusieurs
auteurs, comme Arnaud THAUVRON (« Evaluation d’Entreprise » (2013)), traite cela
séparément, et c’est ce qui se fait souvent dans la pratique.
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On peut noter l’expression d’une « valeur terminale ». Cette méthode permet de ne pas faire
des prévisions sur des périodes de 10 ou 20 ans, voire plus, et définit une valeur basée sur une
croissance constante liée à l’état de maturité de l’entreprise.
Arnaud THAUVRON et la plupart des auteurs étudiés la présente comme « une croissance
stable des flux de trésorerie, à un taux g, jusqu’à l’infini ». Cette vision se modélise sous la
forme suivante :
Le CMPC ou Coût Moyen Pondéré du Capital (WACC en anglais) sera lui calculé sur la base
d’une pondération entre le coût des dettes et le coût des capitaux propres. Il se modélise par la
formule suivante (Simon PARIENTE « Analyse Financière et Evaluation d’Entreprise »
(2013)) :
CP étant les capitaux propres, D les capitaux empruntés, le coût des capitaux propres le
coût de la dette. T étant le taux d’imposition sur les bénéfices (IS).
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L’auteur présente aussi trois modalités pour calculer les flux annuels de trésorerie :
Dans son livre « Evaluation d’Entreprise » (2013), Arnaud THAUVRON définit plus
simplement le calcul du Flux Net de Trésorerie.
La méthode des DCF est comme nous l’avons vu l’une des méthodes les plus utilisées.
Historiquement modélisée pour être une prévision sûre et une référence dans l’évaluation
financière, aujourd’hui son efficacité fait de plus en plus débat. Il existe de nombreuses
critiques de cette méthode, malgré ses apports et concepts fondamentaux et incontournables.
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C’est en soulevant les limites de cette méthode que se dessinera le chemin de l’étude
empirique qui sera menée dans ce mémoire, afin d’évaluer d’une part la pertinence de la
méthode des DCF dans sa conception actuelle, mais aussi les facteurs déterminant dans le
processus de décision de recourir à une méthode d’évaluation plutôt qu’une autre.
Au cours des études en école de commerce ou en finance, la majorité des matières ont
recours à la méthode d’évaluation par les DCF et a ses grands principes fondamentaux.
ADLER remet d’un côté en cause l’utilité du modèle en lui-même aujourd’hui et ses dangers,
mais il remet surtout en cause le fait qu’aujourd’hui, avec un cadre d’application qui connait
des changements très fréquents, de nombreuses théories et évaluations s’appuient seulement
sur la méthode des DCF, pour lui cette méthode ne peut pas être le « seul outil de décision ».
De nombreux auteurs présentent les mêmes remarques, et, de plus en plus, se fier à une seule
méthode de calcul, d’évaluation, devient irrationnel car il ne semble plus exister de modèle
unique.
Avec une vision moins tranchée, trois auteurs, Pascal ALPHONSE, Pascal GRANDIN et
Michel LEVASSEUR, ont écrit un article intitulé « 15 règles pour un bon usage des méthodes
d’évaluation par les flux actualisés », la Revue du Financier (2009). Selon eux, la méthode en
elle-même n’est pas à rejeter, car elle reste utilisée en très grande majorité dans le domaine de
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la finance et de l’évaluation financière. Cependant, ils notent des points fondamentaux sur
lesquels il faut être très vigilant, comme par exemple la détermination du taux d’actualisation
qui peut vite modifier la valeur définitive obtenue, ou encore certaines règles dans le
traitement des flux en eux même et leur détermination. Ils expliquent que les critiques faites à
cette méthode le sont souvent « au motif que les chiffres qu’elles produisent sont extrêmement
sensibles aux choix des paramètres ».
La méthode des DCF ne prend en compte que le côté matériel de la société, son bilan, son
avenir financier, et son potentiel à dégager ou générer du cash. L’exemple le plus récent, bien
que toutes les informations ne soient pas disponibles, serait le rachat pour un prix impossible
à prévoir, de WhatsApp par Facebook. Le montant de l’opération est de 19 Milliards de
dollars. Ce montant peut être rabaissé à 16 Milliards de dollars puisque 3 Milliards sont
destinés au maintien des 50 employés. Malgré la meilleure volonté, des tentatives avec
plusieurs taux différents, jamais cette valeur n’aurait pu être prévisible avec la méthode des
DCF. WhatsApp a un bilan relativement faible voire inexistant, et un Chiffre d’Affaire qui est
estimé à un peu plus de 20 millions de dollars en 2013 selon des analystes. Avec le système
d’abonnement mis en place, et le nombre de clients, on peut espérer atteindre un Chiffre
d’Affaire de 450/500 millions de
dollars et des cash flows légèrement
inférieurs. Cet exemple montre
réellement que la structure financière,
les revenus potentiels, et les cash
flows futurs, même actualisés, ne
peuvent justifier un tel montant. C’est
peut-être là qu’est la limite des
méthodes d’évaluation en général,
conceptualisés il y a plusieurs
décennies, aujourd’hui elles ne peuvent quantifier le prix de l’information, et de la clientèle.
WhatsApp a atteint 450 Millions de clients en 5 ans, alors que Facebook en n’avait atteint que
145 Millions et Gmail 123 Millions sur la même période.
L’incertitude qui est le fondement de la théorie d’évaluation par la méthode des DCF est ici
totalement occultée. Ce qui génère une valeur aussi importante c’est le passé, la croissance
exponentielle du nombre de clients, et la situation présente, le nombre d’interactions entre les
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clients. Quelque part, le nom, le bilan, la situation financière ou comptable de la société n’a
aucune importance, tout ce qui compte, c’est ce qu’elle peut apporter sur le marché de
l’acheteur, Facebook. C’est là qu’est la justification de la valeur de cette transaction. Ces
éléments, tout comme l’image de la société, sa perception par le marché, et par les clients a
créent une nouvelle forme de valeur, qui ne peut être quantifiée par des modèles mis en place
au siècle dernier. Il est donc de plus en plus normal, tout comme ce fut le cas lors de
l’éclatement de la bulle internet dans les années 2000, de s’interroger sur la pertinence de
cette méthode.
D’autres auteurs mettent en avant que d’une façon générale la méthode des DCF est sous-
évaluatrice. Dans leur article « Why Does DCF Undervalue Equities? » (2009), Jacob ODED
et Allen MICHEL expliquent que dans de nombreux cas, le coût de la dette est mal défini et
réduit fortement la valeur qui est obtenue par la méthode de calcul. En effet, selon eux, de
nombreux évaluateurs ou analystes utilisent le YTM (Yield to Maturity) ou taux de rendement
à l’échéance comme coût de la dette dans la formule de calcul du CMPC. Cette méthode selon
eux créée un réel écart avec la valeur normalement attendue par la méthode des DCF. Cette
différence tient selon eux de la prise en compte des cash flows. La méthode classique des
DCF doit prendre en compte les cash flows attendus ou espérés, il n’y a aucune certitude.
L’utilisation du YTM est valable pour le calcul de la valeur d’une obligation, car il y a une
contractualisation des cash flows futurs et une certitude de ceux-ci. Ils expliquent donc qu’il
faut déterminer un coût « attendu » de la dette, coût qui ne peut être « garanti » par
l’entreprise ou ses actionnaires.
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Dans un article intitule « In Defense of the DCF Method », Richard R. CONN explique les
avantages de cette méthode malgré plusieurs condamnations par les tribunaux.
La détermination des Beta ainsi que du taux d’actualisation, restent des éléments
fondamentaux pour analyser la précision de cette méthode et la validité de la valeur
d’entreprise qui sera déterminée. Elle reste la méthode la plus fréquemment utilisée, à défaut
d’un modèle plus adapté ? Ou pour la souplesse des facteurs qui peuvent être utilisés ?
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Un modèle tel que la valorisation par la méthode des DCF qui est resté inchangé depuis sa
création peut-il encore permettre de répondre aux attentes du marchés et évaluer les attentes
des investisseurs ?
Les exemples récent comme Instagram, Tumblr, Snapchat refusant une offre de facebook de 3
milliards de dollars, ou encore le rachat de WhatsApp évoqué précédemment montrent que
cette méthode à ses limites et ne permet pas d’anticiper la juste valeur de transactions
majeures, ou du moins la valeur que l’acheteur est prêt à accepter de payer. Il n’existe
probablement donc pas LA valeur d’une société, mais plutôt UNE valeur négociée qui peut
être acceptée par toutes les parties.
Bruno Husson et Henri Philippe expliquent dans un article « Haro sur le DCF » que
« L’approche intrinsèque de l’évaluation considère l’actif évalué isolément. La méthode
phare de cette approche est justement la méthode DCF, devenue incontournable pour bon
nombre d’évaluateurs. […] A travers les critiques contre la méthode DCF, c’est donc
l’approche intrinsèque de l’évaluation en général qui est rejetée, au profit des deux méthodes
relevant de l’approche analogique, supposées plus objectives et moins manipulables ». Ils
expliquent comme beaucoup d’auteurs que le principal problème de cette méthode est sa
subjectivité, cependant elle reste selon eux incontournable et c’est là que leur vision résume
les grandes interrogations de l’évaluation financière aujourd’hui. Ils concluent « Lorsqu’elle
est mise en oeuvre avec exigence, la méthode DCF permet donc d’éviter les excès propres aux
méthodes simplistes en explicitant les hypothèses fondamentales sur lesquelles reposent les
fourchettes d’estimations obtenues. Pour autant, notre propos n’est pas de préconiser
l’utilisation de la méthode DCF à l’exclusion de toute autre méthode. Nous soutenons plutôt
la mise en œuvre d’une approche multicritères raisonnable qui tienne compte de la pertinence
au cas par cas des différentes méthodes disponibles. A cet égard, le contexte et l’objectif de
l’évaluation sont assurément des éléments à prendre en compte ».
L’universalité de la méthode des DCF semble donc incontestable, elle apparait comme une
base, la méthode d’actualisation semble devoir être intégrée dans une analyse financière afin
d’évaluer au plus juste la valeur d’une entreprise. Mais il apparait également que cette
méthode de peut pas se suffire à elle-même, ou peut-être ne peut plus. Il sera donc pertinent
au travers d’une étude qualitative d’analyser ce qui mène les évaluateurs, les acheteurs ou les
vendeurs à évaluer une société selon telle ou telle méthode, si le secteur ou d’autres éléments
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peuvent déterminer le choix de la méthode, mais il sera aussi important de rechercher s’il
existe des éléments qui pourraient justifier une importante création de valeur qui ne peut être
prise en compte par les méthodes d’évaluation actuelles, comme le rythme de croissance, la
taille de la clientèle et des parts de marchés, le potentiel de communication sur les réseaux
sociaux, ou tout autre éléments qui peut apparaitre impossible à quantifier selon certaines
méthodes actuelles.
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III. Etude empirique : pertinence de l’approche multicritères dans les opérations de
fusions-acquisitions et recherche de nouveaux éléments créateurs de valeur non intégrés
par les méthodes d’évaluation traditionnelles.
A. Méthodologie de recherche.
Avec une base d’étude solide, reprenant la nature cyclique du marché des fusions-
acquisitions, les nombreuses théories d’évaluation financière qui ont vu le jour, ou encore les
critères qui peuvent prévaloir selon les différentes méthodes, la méthodologie de recherche
peut s’axer sur l’existant, le passé, ce qui est prouvé et établi par la doctrine financière, afin
d’aller vers une nouvelle analyse, étude, des comportements ou des ressentis des
professionnels de l’évaluation ou de ceux, non professionnels, qui y auront recours une ou
plusieurs fois au cours de leur vie.
La revue de littérature aura donc permis de regrouper de nombreux éléments, qui seront
différemment perçus et utiles selon les intervenants qui accepteront de participer à cette étude.
La volonté de poursuivre une étude qualitative est d’une part essentielle, car elle permettra de
mettre en avant des processus de réflexion, de décisions, et de laisser une plus grande liberté
aux intervenants de s’exprimer sur des domaines en lien avec le sujet traité. Cependant, cette
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étude qualitative n’est pas exclusive d’un approfondissement du sujet par une approche
quantitative, mais nous reviendrons sur ce point après la réalisation de l’étude et l’analyse des
résultats.
La recherche sera axée sur les éléments qui vont influencer le choix d’une méthode
d’évaluation, extérieure à la méthode et le plus souvent propre à une entreprise ou à un
domaine, mais aussi à l’étude d’élément propre à chaque méthode d’évaluation, des risques,
des dérives, ou une part plus ou moins grande de subjectivité et d’influence sur les paramètres
utilisés lors de l’évaluation.
Cette partie du mémoire se voudra donc être une présentation de l’étude qui a été réalisée, tant
dans sa forme que sur son fond, mais aussi nous aborderons les difficultés pratiques
rencontrées dans la réalisation de celle-ci, des entretiens, ou du traitement des données.
Traitement qui aboutira à des résultats que nous présenterons également ici afin de faire
émerger quelques recommandations quant au sujet et à la problématique abordés.
Comme nous l’avons vu, l’étude la plus appropriée, au regard de l’approche que nous
avons choisie, est une étude qualitative. Cette décision a été prise afin d’observer l’adaptation
que chacun fait de son comportement dans le cadre d’une évaluation financière. Il apparaît
évident que la subjectivité, dans le choix de l’approche, dans l’expérience, dans la méthode,
va avoir une part importante dans la détermination des critères, et donc de la valeur
d’entreprise. C’est dans ce but que l’échantillon a été déterminé afin d’avoir un panel de
répondants qui fait face aux différentes problématiques propres au sujet.
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de recourir à telle ou telle méthode, avec les différents enjeux, risques, traitement, qui peuvent
être apportés à chacune d’elles.
Les 4 premiers entretiens ont été réalisés sur la base d’un guide d’entretien, les questions
pouvaient être adaptées selon les réponses des intervenants afin d’approfondir la discussion.
L’objectif était d’avoir des entretiens semi-directifs qui laissaient un champ de liberté autour
du sujet à chacun des participants. L’objectif était de les amener à parler ouvertement, se
sentir à l’aise, afin de s’impliquer personnellement dans cette étude. Liberté leur étant laissée
de se présenter, d’intervenir à leur rythme, et apporter leur niveau de priorité aux éléments
abordés par le guide d’entretien.
L’idée de départ était de trouver des professionnels de plusieurs domaines en rapport avec les
évaluations financières. C'est-à-dire, autant un mandataire financier qui va avoir un objectif
précis d’obtention de valeur, un vendeur qui va vouloir valoriser au maximum sa société, un
acheteur qui va tenter d’optimiser sa rentabilité, ou encore un évaluateur ou analyste
indépendant qui va réaliser des analyses par exemple pour une revue financière. L’approche
des praticiens et des théoriciens apparaît également intéressant à comparer, c'est-à-dire qu’un
professeur de finance, d’évaluation, aura probablement une approche différente d’un
professionnel qui est au contact des difficultés quotidiennes, des exigences de ses clients, ou
de ses propres exigences, et qui va devoir adapter sa pratique. La grande difficulté a été de
cibler des cessionnaires. En effet, la plupart de ces derniers faisant appel à des mandataires ou
évaluateurs professionnels qui refusent de communiquer les coordonnées de leurs clients par
soucis de confidentialité.
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Au regard des éléments mis en avant par la revue de littérature, il était également important de
trouver des professionnels ou des théoriciens qui ont soit travaillé sur des nouvelles méthodes
ou expérimentations, ou qui, selon leur domaine et vie professionnelle, vont être confrontés à
une autre approche de l’évaluation, à des éléments qui pourraient ne pas apparaître dans les
méthodes traditionnelles.
L’anonymat nécessaire à cette étude garantissait de pouvoir avoir accès à des personnes qui
travaillent dans une confidentialité extrême, ce qui rend intéressante l’approche très concrète
de leur analyse ou réaction.
Nous avons ensuite réuni trois analystes financiers afin de voir l’approche que ceux-ci
pouvaient avoir, sur le plan financier, et sans se concentrer sur l’environnement de
l’entreprise, du client, du mandat qui peut être contraignant dans la détermination de la valeur.
Ils sont âgés de 28 à 47 ans, uniquement des hommes. Nous avons également complété cet
échantillon par deux professeurs de finance qui ont exercé dans le monde entier. Cela permet
d’avoir une vision plus globale/généraliste et une approche réellement théorique de l’analyse
financière.
Nous avons également interrogé un directeur financier qui a évolué en grande partie dans
l’évaluation du patrimoine intellectuel / immatériel. Cet échantillon vise à déterminer
l’existence d’éléments créateurs de valeurs qui n’apparaîtraient pas dans les méthodes
d’évaluation traditionnelles. Afin de compléter ce profil, nous avons également interrogé un
professionnel de la corporate finance qui a travaillé pendant 15 ans avec des étudiants à la
mise en place d’une nouvelle méthode d’évaluation basée sur les actifs immatériels. Nous
avons également interrogé un PDG qui réalise de nombreuses évaluations et écrits, de
nombreux articles dans le cadre de son expérience et pratiques de la propriété industrielle et
intellectuelle.
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2. Elaboration du guide d’entretien.
Le guide d’entretien permet d’aborder les aspects majeurs du sujet, tout en laissant la liberté
aux répondants d’exprimer leur point de vue, leur expérience, leurs anecdotes. En abordant à
la fois des éléments pratiques et théoriques, le guide d’entretien permettra de faire le tour des
questions portant sur le sujets, ses enjeux et ses limites.
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Le choix d’un seul guide d’entretien a été le plus pertinent. Au début, il avait été envisagé une
population différente, de plusieurs investisseurs privés ou cessionnaires d’entreprises. Cette
population n’a pas pu être contactée, mais elle aurait fait l’objet d’un guide d’entretien
différent.
Nous avons également 3 répondants qui sont des contacts indirects, communiqués par des
contacts directs. Plusieurs contacts ont également été directement apostrophés sur LinkedIn et
ont accepté un entretien.
Enfin, un des répondants a été communiqué par l’une des personnes interrogées, qui
s’appuyait sur ses théories dans son travail quotidien.
Nous nous sommes également tenus à un réel respect du cadre contractuel imposé par cette
étude, à savoir une confidentialité et un anonymat total, tant sur le nom de la société
(plusieurs répondants ayant créé leur propre structure) que sur le nom du répondant lui-même.
Nous avons cependant pu laisser la liberté à chaque répondant de se présenter, afin qu’ils se
sentent plus à l’aise et décontractés, mais de nombreux entretiens ayant été réalisés par
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téléphone, la plupart des entretiens restaient plus « froids » que les 4 entretiens réalisés en
tête-à-tête.
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en fin d’étude, c’est pourquoi nous reviendrons sur une synthèse des enjeux au regard des
autres thèmes abordés ci-après.
L’encadrement de plus en plus fort a énormément impacté les enjeux d’une part de
l’évaluation elle-même, mais de la profession en général. Depuis 20 ans, que ce soit l’AMF,
l’Association des Evaluateurs, et les différents acteurs de la profession tentent de se structurer
au maximum. Il y a une réelle recherche d’harmonisation des normes, et de volonté de
travailler ensemble.
On comprend que sur l’ensemble des répondants les enjeux vont varier, par exemple s’il
s’agit d’un expert-comptable ou d’un évaluateur professionnel. Il y a également presque
autant de conceptions de l’évaluation financière qu’il y a de gens la pratiquant. On notera par
exemple que les professionnels de la Corporate Finance, de l’Evaluation ou des Fusions-
Acquisitions, reprochent aux experts comptables ou aux cabinets d’audit dans certains cas de
faire un mix de méthodes, des pondérations très approximatives de méthodes qui elles-mêmes
semblent approximatives.
Comme nous l’avons vu dans la revue de littérature, un des points clefs de l’évaluation
financière est de ne pas tomber dans une utilisation de chaque méthode et d’en faire une
simple pondération ou moyenne de valorisation. De nombreux auteurs soulèvent les dangers
de cette pratique mais elle semble pourtant bien une réalité. Nous reviendrons plus tard sur
cette idée avec la notion d’approche multicritères.
Un des enjeux majeurs qui ressort de cette étude est également le risque. Il sera traité à part
entière dans le thème suivant, mais il est lié au contexte économique actuel. Par exemple le
répondant 12 explique que le « calcul du risque lié au financement par la dette » sera un des
enjeux pour l’avenir. C’est une notion très vaste, mais qui se repose sur la crise qui a touché
autant le marché des fusions-acquisitions que la finance en général et les transactions.
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Les méthodes actuelles semblent de plus en plus critiquées par certains évaluateurs, car ils ne
retrouvent pas les éléments nécessaires à la valorisation réelle de l’entreprise. L’enjeu va donc
être d’une façon générale de « coller le plus possible à la réalité » au regard notamment de la
crise que le monde de la finance vient de traverser.
Par exemple le répondant 12 évoque comme la plupart des répondants que le risque ne peut
être évité, il fait partie du métier et de l’évaluation en elle-même. Le répondant 1 avait
également insisté sur ce point « Il faut arrêter de dire qu’on peut éliminer tous les risques. On
ne peut pas éliminer tous les risques. Dans la vie on prend des risques, on ne peut pas
éliminer les risques. On peut les diminuer, en France ça s’appelle le principe de précaution ».
C’est la base de travail. Si on part du principe que le risque doit faire partie de l’évaluation,
l’erreur est toujours possible. C’est d’une façon simple que plusieurs répondants mettent en
avant la qualité du travail, la précision des recherches et de l’analyse. L’expérience de chaque
évaluateur va être un atout pour manager le risque.
Les répondants 10 et 12 reviennent sur les deux éléments qui selon eux sont à manager.
Comme nous l’avons vu dans la revue de littérature, il y a de nombreux enjeux sur la
détermination du taux d’actualisation, mais également sur l’utilisation du beta. Nous
reviendrons sur la méthode des DCF et sur le taux d’actualisation, mais le beta détermine ce
taux, et ce taux peut être un risque. « Le taux d’actualisation en lui-même, qu’il s’agisse d’un
coût du capital ou d’un wacc, est basé sur un découpage (minutieux) de la dette et des
capitaux propres. Classer en BFR des éléments de dette financière, conduirait par exemple à
sous-estimer celle-ci, d’où deux conséquences : un mauvais bêta (si l’on parle de beta
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désendetté), et surtout un wacc non représentatif de la structure financière de l’entreprise »
nous explique le répondant 12.
Ce que nous avons cherché à savoir était l’existence de déterminants propres à chaque
méthode ou alors extérieurs, propres à l’entreprise, son activité, sa taille, son ancienneté, son
secteur.
Le répondant 1 relève que par exemple, le vendeur, va « penser à son plan d’affaire, regarder
ses concurrents, et va en quelque sorte refuser de se vendre moins cher que son concurrent ».
Comme vu dans la revue de littérature, il confirme que pendant la crise, les vendeurs se sont
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focalisés sur la méthode d’évaluation patrimoniale afin d’obtenir un prix minimum en dessous
duquel on refuse de se vendre.
Le répondant 12 nous explique par exemple que « Le choix d’une méthode ne dépend pas tant
du domaine d’activité que des données dont on dispose. Une entreprise qui n’a par exemple
jamais bâti de BP ne pourra pas être valorisée en DCF, de même qu’une entreprise qui œuvre
sur un micromarché ne peut pas être valorisée par la méthode des comparables ».
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Il apparaît donc évident que la profession ou les professions limitrophes se scindent autour de
ces questions, doit-on choisir une seule méthode, et comment la choisir. Le répondant 1,
théoricien et professeur de finance, nous explique que « en général les évaluateurs sont très
mal à l’aise lorsqu’il n'y a qu’une seule méthode. Parce que lorsqu’il y a plusieurs méthodes,
il y a plusieurs chiffres, et les comparer entre eux permet de réfléchir, d’observer la
différence et corriger le tir », alors que le répondant 3 se penche sur « un choix de méthode
selon le contexte », et critique le recours à une « pondération de plusieurs méthodes, et la
moyenne approximative des valeurs obtenues ». Le répondant 1 nous explique également que
les avancées technologiques, « le développement du tableur et des capacités de calculs ont
réellement permis à la méthode des DCF de prendre la place qu’elle a aujourd’hui. Tout
comme, la méthode des options réelles a été promise à un bel avenir mais n’a jamais réussi à
décoller ».
Il a été posé à chaque répondant une question précise afin de comprendre leur appréhension
d’un dossier : « Imaginez… Un dossier arrive, comment traitez-vous celui-ci? Que dites-
vous au client, que regardez-vous en premier? Pourquoi? »
Le but étant de les laisser s’exprimer le plus librement possible sur leur façon de travailler,
leur priorité, de nous donner le « par où commencer » qui est subjectif la plupart du temps ou
alors qui a simplement été enseigné par le formateur du répondant. Les répondants 1, 2, 3, et 4
pour ne prendre que ceux-là ont donné quatre réponses très différentes. Et c’est en réalité
douze réponses qui sont assez différentes qui ont été données. On pouvait s’y attendre, mais
cela retrace en fait bien l’ensemble de notre étude. Pour le répondant 1 « chacun a ses
techniques et ses méthodes, moi la première chose c’est d’essayer comme ça d’avoir une
première vue de ce que ça peut valoir. Moi je regarde beaucoup la rentabilité que dégage la
boite par rapport à son cout du capital. Ça me permet d’avoir une idée de la valeur que je
devrais trouver. Je ne veux pas avoir d’idée préconçue, mais je ne peux pas m’empêcher avec
l’expérience d’avoir une idée directement en regardant le dossier. C’est en général ce
qu’attend le client, il a une valeur en tête ».
Mais encore, pour le répondant 8 « c’est essayer de comprendre ce qu’est le business model
de l’entreprise, ce qu’est son marché, et que sont ses points forts et points faibles au point de
vue économique, humain, avant même de regarder ses performances financières. Dedans je
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vais mettre en vrac la qualité du dirigeant, l’organisation, la structure, tout ce qui permet de
comprendre ce qu’est réellement la différenciation de l’entreprise sur son marché ».
Pour le répondant 12, « Les premières choses à regarder sont l’existence de transactions
comparables, d’un peer group acceptable, les opérations récentes sur le capital,
éventuellement l’exposition aux différents marchés ».
C’est une notion qui s’est fortement normalisée selon plusieurs répondants et qui est une des
bases de l’analyse d’une entité/entreprise. Cependant, sur l’ensemble des secteurs nouveaux,
on ne peut pas s’engager sur le long terme, exemple de MySpace cité par le répondant 1,
entreprise qui a disparu en quelques années.
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l’activité, notamment qu’il s’agisse d’une activité industrielle ou commerciale, industrie
ancienne ou moderne…
Le répondant 5 a posé une théorie afin d’évaluer les actifs immatériels, nous y reviendrons.
Certains préconisent même « l’abandon des méthodes traditionnelles au profit de la seule
évaluation des actifs immatériels, au-delà de la performance financière qu’on pourrait
déterminer ».
Les opérations de rachat de Whatsapp ou d’Instagram par Facebook et Yahoo sont le reflet
d’une création de valeur particulière. Bien que la valorisation soit très élevée, on ne peut pas
la regarder comme une valorisation mathématique. C’est un « potentiel de création de
valeur » qu’on va déterminer, et qui sera alors une « prime stratégique ». Cela rejoint la
notion d’évaluation des actifs immatériels. Cependant, l’absence de valorisation de ces
éléments va entraîner une très forte négociation, et c’est le prix qui déterminera la valeur.
Cependant, le répondant 1 explique qu’un prix élevé n’est pas forcément preuve d’une
création de valeur. En effet, lors des opérations mentionnées ci-dessus, les transactions ont
lieu majoritairement en transfert de titres. C’est donc la facilité du mode de financement qui
va jouer sur la valeur si on considère que le prix payé représente la valeur. C’est une
intégration horizontale et une émission d’actions relativement simple pour augmenter une
base de clients/utilisateurs. Plusieurs répondants insistent sur le fait que la valeur reste
intrinsèquement déterminée par l’acheteur, c’est lui qui fait le chèque, il sait ce qu’il achète et
s’il est prêt à payer un prix c’est que la valeur est là. Mais il y a aussi des échecs comme
MySpace cité précédemment.
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5. Notion "d'approche multicritères".
Le répondant 1 quant à lui va revenir sur l’origine de cette approche, imposée historiquement
par l’AMF afin de tenter d’améliorer l’objectif de l’évaluation, mais selon lui « c’est un peu
du bullshit. Encore une fois, l’AMF est contente, mais les mandataires vont ainsi déterminer
plusieurs prix et pouvoir justifier leur prix qui devrait tomber dans une fourchette faite avec
les différentes méthodes. Le multicritères c’est formalisé par l’AMF, il faut pointer toutes les
cases, mais un évaluateur fait toujours du multicritères, de façon très artificielle ». Plusieurs
répondants sont revenus sur ce point, bien que l’on retrouve cette notion d’approche
multicritères dans de nombreux manuels ou revues, elle reste aujourd’hui très subjective, car
chacun l’adapte dans le but d’obtenir un résultat précis, une valeur anticipée ou souhaitée.
L’Evaluation devient un simple processus de justification et non plus un processus de
recherche de valeur.
Le répondant 4 revient également sur cette notion : « vous voulez vraiment mon sentiment ? –
Oui. - Je pense que c’est vraiment n’importe quoi. C’est n’importe quoi parce que si on
examine l’ensemble des méthodes pratiquées pour faire ces approches multicritères, on se
rend compte que ces méthodes ont un objectif qui ne peut répondre qu’à des situations
particulières qui ne sont pas celles de la valorisation dans laquelle on s’engage. C’est
déconnecté de la réalité et du marché. Prenez un exemple, débat que l’on a avec nos clients,
une entreprise industrielle va avoir un actif net élevé, avec une performance économique
faible, et faire une moyenne entre ces deux valorisations n’est pas intéressant, car la
rentabilité est tirée vers le bas. A contrario, une activité purement commerciale va avoir un
actif net très faible et une rentabilité très élevée. J’ai vu parfois 6 méthodes différentes,
pondérées au fil du vent… pour modifier le prix ou la valorisation obtenue. C’est le reflet
d’une incompétence, souvent chez les Experts Comptables ».
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Ces résultats montrent qu’aujourd’hui, bien qu’au cœur de leur métier, la notion d’approche
multicritères n’est qu’un substitut pour obtenir une fourchette de valeur, et surtout encadrée,
une valeur souhaitée, recherchée.
La construction d’une approche multicritères se conçoit ici dans la logique d’une transaction.
Sans parler d’approche multicritères, aujourd’hui il y a des bases qu’on n’arrive pas à éviter,
c’est-à-dire d’une part la méthode des DCF, et d'autre part, les comparables « Quelle que soit
la méthodologie, le prix sera toujours libellé comme étant un multiple d’un résultat plus la
trésorerie nette. On comparera toujours ».
C’est avant tout celui qui paye qui est prêt à obtenir sa valeur, cela va influer sur l’évaluation
en elle-même.
Les répondants 4 et 9 expliquent que ce CMPC est une base de travail, mais qu’il faut
modifier les risques, les atténuer, comme les risques de l’entreprise, du marché, de liquidité.
« Ces facteurs de risques doivent servir à pondérer le CMPC afin d’avoir un taux plus proche
de la réalité, le plus souvent ce taux est augmenté afin de palier le risque ».
Le répondant 12 nous explique que « le calcul d’un taux d’actualisation dépend de nombreux
facteurs, le meilleur moyen d’en calculer un « bon » / « le meilleur » est de l’adapter aux
types de flux pour lesquels il sera employé. Le WACC est pertinent pour les flux incorporant
de la dette comme des DCF basés sur des FCFF, ou pour un APV faisant appel à des flux de
dettes. En somme, le WACC est toujours pertinent lorsque son usage l’est aussi ».
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La limite évidente du DCF est la capacité des entreprises à anticiper l’évolution de leur
activité. Généralement correct, ce genre de Business Plan comporte évidemment un risque.
Toutefois, la crise de la dette européenne est l’illustration que les bonds ne sont pas toujours
moins risqués.
On a également une incertitude réelle des flux de trésorerie, qui ne sont pas contractuels. Le
répondant 3 nous explique que l’on a 3 risques majeurs avec la méthode des DCF, « ce sont
des éléments qui peuvent pervertir le résultat final, à savoir la valeur terminale, car la
visibilité long terme aujourd’hui n’est plus possible, le second c’est l’appréciation des flux de
trésorerie futurs et donc la vraisemblance du business plan, qui n’est pas soutenue par des
éléments objectifs, et enfin, la compréhension des facteurs de risque de l’entreprise, liés à son
organisation, ses hommes, sa position sur son marché… et c’est ce qui rend délicate la
manipulation de cette méthode qui est très peu objective ».
Certains répondants, comme le répondant 12, ont simplement pris une position
réductrice en évoquant la place de l’analyse financière. Il résume à « 80% / 20% » entre
l’analyse financière et l’analyse stratégique.
De nombreuses sociétés, à la fin des années 1990 ou 2005/2006, des sociétés au bord de la
faillite, avec un BFR croissant, auraient fait faillite. Et de nombreuses sociétés étaient ou sont
survalorisées car on ne se base que sur leur croissance, les marges, qui augmentent, et leur
marché, mais trop nombreux sont les évaluateurs qui négligent l’examen du BFR qui peut être
réellement la mort d’une société.
De nombreux évaluateurs commencent par faire une évaluation estimative, et ensuite vont se
pencher sur l’analyse financière. Les répondants 1 et 8 nous expliquent qu’il est inapproprié,
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et impossible de commencer à travailler sans analyse financière, c’est la base de tout, et « le
travail d’évaluation ne peut être juste et précis sans cette analyse ». C’est le préalable au
diagnostic approfondi.
Par exemple, deux entreprises semblent comparable, Nike et Adidas, et pourtant rien ne l’est.
Le répondant 3 nous explique que Nike délocalise toute sa production à l’étranger, et
qu’Adidas produit quasiment tout en local. Il y a donc énormément de points peu
comparables, et on ne pourra pas valoriser ces sociétés en prenant de simples ratios financiers
qui seront totalement différents.
La plupart de ces méthodes sont donc inchangées depuis plusieurs décennies, et il peut
apparaître étonnant, qu’avec une économie aussi changeante, bien que cyclique, nous
utilisions toujours des théories qui ont 70 ans sur un marché où l’innovation, la technologie,
les Start-Up, sont devenus les acteurs les plus influents et les paramètres incontestables sur
lesquels se focalisent les transactions et négociations.
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Plusieurs répondants, 2, 3, 6 et 10 ont fait écho d’une nouvelle méthode, fondamentale, et qui
transforme la vision des choses. L’un des répondants est l’inventeur de cette méthode. Avec
de nombreux étudiants d’HEC Paris, il a passé plus de 15 ans à modéliser ses pensées, et à
essayer d’établir des critères d’évaluation le plus objectifs possible.
Par souci de confidentialité nous ne dirons pas de quel répondant il s’agit, ancien avocat
d’affaires, il a consacré plus de 25 ans de sa vie à l’évaluation financière des actifs
immatériels. Il accompagne tout type de structure, dont beaucoup de Start-Up.
Cependant, il est important de noter que la plupart des répondants qui évoquent cette méthode
ne disent pas qu’elle doit et peut totalement se substituer aux autres. Pour eux, c’est avant tout
un équilibre à trouver entre une approche par les comparables et l’évaluation par les Actifs
Immatériels. Il y aura certains cas où d’autres méthodes resteront plus pertinentes dans
certains cas.
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Toute la difficulté de l’étude et de l’évaluation financière elle-même est de faire
apparaître des méthodes objectives.
En effet, comme nous l’avons vu au cours des différents entretiens, et au travers des différents
thèmes abordés par le guide d’entretien ou alors soulevés par les répondants, il apparaît très
compliqué de mettre en place une méthode réellement objective.
Cette étude qualitative met en avant ce que les répondants, les professionnels, ont rencontré
comme difficultés, interrogations, au quotidien. Le panel de répondants nous a permis
d’évoquer de nombreuses questions, critiques, solutions, concernant les pratiques courantes
de l’évaluation financière.
Aujourd’hui l’évaluation financière ne peut pas être pensée sans considération de la crise
majeure que le monde et particulièrement la finance viennent de traverser. Depuis 2006/2007,
la finance, bien que toujours imparfaite et controversée, a dû faire face à des remises en
question, des enjeux, des virages, qu’il a fallu anticiper ou prendre de justesse. Comme nous
l’avons vu avec les répondants, les enjeux de l’évaluation se jouent dans l’objectivité de celle-
ci, et la subjectivité des méthodes actuelles.
Le processus qui va déterminer le choix de la méthode d’évaluation reste encore très flou. On
se rend compte au travers de nos analyses que d’une profession à l’autre, il y a plusieurs
écoles. Plusieurs façons d’appréhender une évaluation, un résultat. Car oui, c’est bien souvent
un résultat qui est attendu de la part de l’évaluateur, il doit savoir trouver la méthode, les
critères, qui permettront d’aboutir à une valorisation convenable afin d’obtenir le meilleur
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prix, le plus élevé pour le vendeur ou le plus faible pour l’acheteur. C’est au final l’acheteur
qui semble être l’unique évaluateur, car au-delà de quelconque méthode, celui qui est prêt à
payer le prix est capable de déterminer la valeur que peut avoir une société, à ses yeux, ou
alors lavaleur qu’il est prêt à payer pour que ses concurrents n’y aient pas accès.
L’appréciation que chacun peut faire d’un dossier à son arrivée, c’est-à-dire, le reflexe
primaire que les répondants, en tant que professionnels, ont dans l’appréhension d’un nouveau
cas en dit long sur leur perception des éléments fondamentaux d’une évaluation. Nous l’avons
vu, les deux écoles se partagent la place de l’Analyse Financière et de l’Analyse Stratégique
et de l’Environnement de l’entreprise.
Cette vision permettra ensuite de développer des méthodes innovantes, comme la valorisation
des actifs immatériels, pour l’école qui tente de penser l’évaluation comme une étude très
large des capacités d’une entreprise, de ses concurrents à son dirigeant en passant par sa santé
financière, stratégique, ses capacités d’innovation…
Les notions de création de valeurs, d’approche multicritères, sont au cœur des enjeux de
demain. Certaines professions ont banalisé cette notion de multicritères en en faisant une
simple pondération, une moyenne, une fourchette qui permettait de justifier la valeur espérée
par l’initiateur de l’évaluation.
Cette étude a été volontairement menée sans distinction entre les nouveaux domaines, les
Start-Up et les industries ou activités traditionnelles. Il apparaît que la facilité du financement
par émission d’actions lors du rachat des sociétés influe réellement sur la valorisation possible
de la société. Si on considère que le prix payé n’est pas totalement déconnecté de la valeur
réelle de l’entreprise, aussi subjective soit-elle, alors cette valeur va tendre vers des sommets
comme ce fut le cas pour Whatsapp.
La traditionnelle méthode des DCF, sous toutes ses formes, montre alors ses limites et
s’essouffle. Comme c’est le cas sur les Start-Up, un Business Plan solide suffit-il ?
L’incertitude de l’avenir fait de plus en plus peur car elle est de plus en plus concrète, la chute
peut être très rapide, alors quand on n’a pas de passé, d’historique, il devient très dur
d’obtenir une valeur sur des revenus espérés, potentiels, et incertains.
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Le développement de nouvelles méthodes paraît compliqué, car les éléments aujourd’hui
créateurs de valeurs ne sont pas objectivement valorisables. Il n’y a pas de règle sur la valeur
du capital humain, des compétences, des ressources. La méthode d’Evaluation par les Actifs
Immatériels reste cependant très intéressante. Elle met à jour de nombreux éléments non pris
en compte par l’ensemble des méthodes traditionnelles, et certains analystes tendent à se
passer de l’utilisation de ces méthodes.
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Conclusion et recommandations managériales.
Pour cela, nous avons pris le temps d’étudier ce processus en faisant appel à des
professionnels de divers horizons, qui ont une pratique quotidienne de l’évaluation financière,
et qui ont pu construire un raisonnement dans le traitement de leurs dossiers. Au travers une
étude qualitative, que nous avons réalisé avec un échantillon de 12 répondants, nous avons pu
naviguer pour découvrir les aspects, les critiques, les écueils que chacun pouvait avoir de sa
profession ou de son domaine. C’est à travers des entretiens, dits semi-directifs, et des
questions larges, qui amenaient l’interlocuteur à parler librement et revenir plusieurs fois sur
un même sujet afin de se délier la langue, que nous avons pu faire émerger plusieurs thèmes.
Certains de ces thèmes ont été la base pour construire notre guide d’entretien, car ils étaient
fondamentaux dans le traitement du sujet et dans sa contextualisation. Seuls les éléments les
plus pertinents ont été conservés. Nous avons également rencontrés plusieurs notions, aspects,
ou thèmes, soulevés directement par les répondants, que nous avons pu traiter comme partie
intégrante de cette étude, puisque repris par plusieurs d’entre eux, ils représentent l’intérêt
même de ce mémoire.
Ce qu’il faut retenir de ce mémoire, et surtout de cette étude, c’est l’avenir. Depuis des
décennies, on enseigne et on pratique des méthodes d’évaluations plus ou moins fiables,
transparentes, objectives. Mais depuis l’explosion de la bulle internet, des Start-Up, des
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sociétés innovantes, la donne a changé, le monde a changé, et la finance doit aussi s’adapter.
Ce mémoire n’est pas un réquisitoire contre l’enseignement de la méthode des DCF, méthode
le plus fréquemment utilisée, mais aussi aujourd’hui la plus remise en question. Les résultats
de cette étude, et l’analyse des entretiens effectués mettent en évidence le besoin qu’à la
profession des évaluateurs de se remettre en question, de s’avoir s’adapter. La solution, aucun
ne la, certains ont développé des alternatives, mais tous connaissent, maitrisent, et adopte
même partiellement l’approche par les DCF. Cette approche est devenu trop incertaine, sa
valeur terminale n’est plus réellement fiable, elle intègre une notion d’infini qui n’est plus
possible après la crise que nous venons de traverser. Ce qu’il faut retenir, ce sont deux écoles,
deux façons de penser, les analystes financiers et les experts comptables, très théoriciens, qui
se basent sur l’analyse financière, la santé financière d’une société pour valoriser celle-ci, et
utilise un business plan, estimatif, pour prévoir sa rentabilité future. Très peu d’autres
éléments étant réellement pris en compte. L’autre école, ce sont les praticiens, pour la plupart,
PDG ou investisseur, ou professionnels de la Corporate Finance. La conception change, car
l’analyse ne se veut plus financière, mais elle se veut globale. On va donc avoir un équilibre,
plus ou moins pondéré selon les cas, entre une analyse financière poussée mais classique, et
une analyse stratégique de l’entreprise. Nos répondant ont tenu à mettre en avant la nécessiter
d’observer la structure, l’organisation, les dirigeants d’une société, mais aussi ses employés,
ses ressources, et au-delà de ça, sa force concurrentielle, en bref, la vie quotidienne de la
société sur son marché, son activité. Cette approche tend à se développer, certains ont
développé des théories, notamment une nouvelle méthode d’évaluation, par la valorisation des
Actifs Immatériels. Cette méthode permet d’observer et d’analyser la société autrement que
par sa simple performance passée ou future. Le manque d’objectivité de chaque méthode, car
il n’existe aucune règle mathématique d’évaluation financière, est un réel obstacle
aujourd’hui. Sur un secteur où la transparence est de plus en plus traquée, la finance doit
pouvoir s’adapter. Aujourd’hui, une évaluation n’est plus un moyen de valoriser, c’est un
moyen de justifier un prix. La majorité des répondants ont soulevé ce point, la manipulation
des critères des différentes méthodes, notamment des DCF, transforme ces outils en bouclier,
derrière lequel se cachent les évaluateurs. On cherche à obtenir tel prix, telle valeur, on veut
vendre pour tant, alors il faut trouver une fourchette de tant à tant. La recherche de
l’objectivité est l’enjeu fondamental auquel se confronte la profession. Le développement des
Start-Up, de l’immatériel, et les dernières transactions du domaine qui ont atteint des sommes
folles, montre que la profession doit s’adapter. Aujourd’hui, il y a une valeur qui est créer,
probablement faussée (augmentée) par la facilité de paiement qu’est l’émission de nouveaux
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titre de la société acheteuse, mais qui au regard des sommes, montre l’intérêt nouveau pour
des éléments qui autrefois ne se monétisaient pas. Aujourd’hui, chaque transaction tente
d’observer un aspect de comparaison, soit en utilisant la méthode des comparables, soit en
observant le prix payé par ou pour un concurrent direct. On ne peut pas réaliser d’évaluation
financière en se focalisant sur les seuls éléments intrinsèques de l’entreprise, aujourd’hui un
fondateur, un acheteur, un PDG, va vouloir regarder ce qui a pu se faire autour de lui, la crise
a amplifié ces démarches à une époque où l’offre et la demande ont été totalement
déséquilibrées.
Ce mémoire présente alors certaines limites, par manque de temps et car il ne s’agit pas là
d’une thèse, nous n’avons pas pu creuser davantage les relations ou corrélations qu’il peut
exister entre prix et valeur. Celles-ci semblent malmenées ou vouées à être modifiées, de par
l’évolution du marché, des technologies, des facilités de paiements et de réaliser des
transactions pour des sommes considérables. Il suffit de comparer WhatsApp et Alstom,
WhatsApp a été racheté 35% de plus que ce que Alstom semble valoir. C’est au cœur de ces
questions qu’il faut se pencher. Si aujourd’hui la valorisation traditionnelle, le recours aux
méthodes anciennes d’évaluations financière ne peut pas déterminer et prévoir les prix que les
acheteurs sont prêts à payer ou que les vendeurs peuvent espérer encaisser, alors il y a une
lacune dans le secteur.
Dans le cadre d’un mémoire plus long ou d’une thèse, il aurait été intéressant de pousser cette
étude vers une analyse quantitative. Dans l’idéal, il aurait fallu prendre une base de données,
qui n’existe pas actuellement dans le monde, regroupant 1 000 transactions financières depuis
1999, et le boom de l’internet et les fusions télécoms et dans l’industrie pharmaceutique. Il
aurait fallu étudier ces données secondaires, et calculer, avec une détermination préalable des
critères utilisés, la valeur d’entreprise obtenu avec les principales méthodes traditionnelles,
DCF, Comparable, Actif Net. Il serait alors intéressant d’étudier l’évolution selon l’époque,
l’année, les secteurs, les acteurs, des rapports entre la valorisation obtenue et le prix payé. Il
serait également intéressant de regarder la pertinence d’une telle démarche avec la méthode
d’évaluation des actifs immatériels, au regard de l’industrie, de l’époque, et des informations
dont on dispose sur les sociétés, cette méthode nécessitant une analyse de la société, de ses
concurrents, et de l’ensemble de son secteur.
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BIBLIOGRAPHIE
MANUELS
ARZAC E.R., (2005) Valuation: Mergers, Buyouts & Restructuring, édition Wiley
Finance.
ELLIOTT, B. & ELLIOTT, J. (2011), Financial accounting and reporting. 14th ed.
Essex, England: Pearson Education Limited.
ARTICLES / REVUES
ADLER, R. W. (2006) « Why DCF capital budgeting is bad for business and why
business schools should stop teaching it », Accounting Education: an international
journal, 15, p. 3–10.
Page 60 of 71
CAMBLAIN E., « Dis-moi comment tu valorises ma société, je te dirai quel
professionnel tu es ! », date inconnue.
PRESSE
AUTRE
http://business.lesechos.fr/directions-financieres/enjeux/0202974380206-les-fusions-
acquisition-profitent-de-la-solidite-financiere-des-entreprises-8774.php
http://www.cafedelabourse.com/dossiers/article/benjamin-graham-pere-de-linvestissement#
http://www.fusacq.com/buzz/qu-est-ce-que-la-valorisation-par-les-dcf-dans-quel-cas-peut-on-
l-utiliser-a19161.html
http://www.challenges.fr/revue-de-presse/20140103.CHA8854/fusions-acquisitions-les-
banques-americaines-prennent-le-pouvoir-en-france.html
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Table des Matières
REMERCIEMENTS ................................................................................................................ 3
Introduction .............................................................................................................................. 5
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A. Méthodologie de recherche. .......................................................................................... 35
BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................. 60
ANNEXES 1 ............................................................................................................................ 63
ANNEXES 1
THAUVRON A. (2013), « Evaluation d’entreprise », p. 14 édition ECONOMICA. (D’après
KIENAST (1992), « Encyclopédie du management », Vuibert tome 1, p. 732.)
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Points clés Critères d'évaluation
1. Entreprise = Capacité de production
Evaluation technique et financière Quelle serait la valeur de
du matériel remplacement du matériel?
Evaluation qualitative de Quelle serait la valeur de
l'organisation de la production et reconstitution de l'organisation?
de son efficacité
Evaluation de la souplesse de En cas de sous-utilisation de la
l'outil capacité de production, pourrait-on
produire d'autres produits?
2. Entreprise = Parts de marché
Evaluation de l'intérêt des Quel serait le montant des
produits: qualité, image, fidélité de investissements nécessaires pour
la clientèle, complémentarité avec acquérir de telles parts de marché?
les produits de l'acquéreur, Quels bénéfices retirer de
marges, investissements à réaliser l'acquisition?
3. Entreprise = Réseau de distribution ou d'achat
Evaluation de la qualité du réseau Quel serait le coût de
(clients, CA, marges, fidélité) reconstitution du réseau?
Réseau d'achat: évaluation de Peut-on utiliser le réseau pour
l'efficacité et de l'intérêt du réseau d'autres produits?
4. Entreprise = Actifs corporels
Evaluation technique des actifs Quelle est la valeur de marché des
Existence d'un éventuel marché actifs en cas de cession, en tenant
secondaire compte de la fiscalité?
Destinations des actifs Si conservation, la rentabilité de
(conservation ou liquidation) l'exploitation est-elle cohérente
avec la valeur des actifs?
5. Entreprise = Actifs incorporels
Evaluation scientifique et Quel serait le coût de
technique de la qualité des actifs reconstitution des brevets?
incorporels
Nombre de brevets déposés, frais Quelle est la synergie possible
de R&D avec l'activité de l'investisseur?
6. Entreprise = Actifs financiers
Comment utiliser la trésorerie, la Quelle est la valeur, nette de
capacité d'endettement ou les l'impact fiscal, des actifs
déficits reportables? financiers?
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Guide d'entretien
1. Enjeux de l'évaluation financière. Quels sont aujourd'hui pour vous les enjeux de l'évaluation
financière?
Pour l'avenir?
3. M anagement et nature du risque. Pensez-vous qu'il existe des méthodes pour réduire ou éviter le
risque dans le cadre de l'évaluation?
Sont-elles fiables?
Influence extérieure?
domaine/activité?
taille?
ancienneté?
4. Définition de la création de valeur. selon vous doit-on définir aujourd'hui la notion de création de
valeur? Est-elle universelle? Subjective?
5. Notion " d'approche multicritères". Que vous inspire la dénomination "approche multicritères"?
6. Retour sur la méthode des DCF. comment parvenir à déterminer le meilleur taux d'actualisation?
Le CMPC est-il toujours pertinent?
9. Objectivité de l'évaluation financière. que pensez vous des acquisitions de Whatsap par Facebook? Ou
même Instagram?
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Annexe 2 : Retranscription Entretien 12.
1. Pensez-vous qu'il existe des méthodes pour réduire ou éviter le risque dans le cadre de
l'évaluation?
Il faut aujourd’hui admettre que le risque est quotidien. Que ce soit la crise, dans nos dossiers,
au quotidien avec nos clients, nous devons admettre qu’il faut bosser avec le risque. Il est
impossible à éviter. Nous travaillons à réduire le risque, par l’expérience, par la rigueur de nos
analyses.
Sont-elles fiables? Oui la plupart du temps, nous essayons de garder le plus d’objectivité
possible lorsque nous procédons aux analyses, les méthodes qui suivent l’étant moins.
Nature du risque? Mauvais détourage dette / capitaux propres, mauvaise appréhension des
risques liés au business model, mauvaise anticipation du risque de l’environnement
économique, échantillon de comparables inadéquat, etc …
Comment les évitez-vous? La liste des risques potentiels est bien trop longue et fluctuante
pour lister tous les remèdes. Dans les grandes lignes, l’importance de ces risques est à rapport
à celle du calcul du taux d’actualisation et du beta employé dans celui-ci :
- le beta est basé sur un peer group qui doit être approprié, et est déterminant pour le
taux d’actualisation, lequel doit capturer le risque économique via les risk-free
rates et éventuels primes de risque spécifiques.
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valeur qu’il emploie, qui se doit d’être la plus juste possible. A toutes fins utiles, rappelons
qu’une valorisation a valeur légale et est donc opposable à celui qui la signe, il est donc de
l’intérêt du signataire et de son équipe d’employer les moyens les plus appropriés.
D’expérience, le DCF sous toutes ses formes (FCFE, FCFF, DDM, APV, etc …) est de loin la
méthode la plus fiable car la plus détaillée et celle sur laquelle la visibilité est la meilleures, en
ce sens qu’il doit être bâti sur des BPs détaillés, qui permettent ensuite d’isoler les éléments
créateurs ou destructeurs de valeurs, luxe que n’offre par exemple pas la méthode des
comparables ou des transactions.
3. Imaginez…. Un dossier arrive, comment traiter vous celui-ci? Que dites vous au client, que
regardez-vous en premier? Pourquoi?
Question beaucoup trop large en ce qui concerne le traitement de chaque dossier, il y a
beaucoup trop de diversité parmi ceux-ci. C’est pareil pour ce que l’on pourrait dire à un
client.
Les premières choses à regarder sont l’existence de transactions comparables, d’un peer group
acceptable, les opérations récentes sur le capital, éventuellement l’exposition aux différents
marchés.
4. Selon vous doit-on définir aujourd'hui la notion de création de valeur? Est-elle universelle?
Subjective?
La création de valeur à proprement parler n’a pas lieu d’être au niveau de l’évaluation
financière, elle survient dans le cadre de l’activité de l’entreprise, et éventuellement de ses
opérations de capital, mais pas de la valorisation.
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Doit-on actualiser cette notion?
Il faudrait d’abord la définir avec rigueur, ce n’est pas le cas ici.
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Le cédant aura l’avantage du terrain en ce sens qu’il sera le premier à choisir une méthode.
Concrètement, il choisira celle qui lui permettra d’arriver à un haut de fourchette raisonnable
et défendable. Le contraire pour l’acquéreur. Le choix des méthodes dépend des secteurs,
entreprises, contextes de transactions, etc.
10. a.Que pensez-vous des acquisitions de Whatsap par Facebook? Ou même Instagram?
C’est au final une simple intégration horizontale, finalement assez standard en dépit de
montants impressionnants. Il y a une réelle simplification de l’opération par le volume payé
en titre Facebook, ce qui permet d’atteindre de tel montant.
b. Des acquisitions de Yahoo pour "acheter des talents et compétences"? Où sont les
éléments créateurs de valeurs?
Autre type d’acquisition, il s’agit ici de R&D et d’avantage compétitif dans ce domaine, alors
que WhatsApp repose davantage sur l’achat d’une base d’utilisateurs. La recherche n’est plus
celle du développement ou d’un positionnement stratégique, c’est la volonté de renforcé une
R&D, des compétences, de mettre la main sur des profils rares qui ont su innover très
rapidement (Instagram).
11. La méthode des DCF est réputées comme la plus répandues et utilisées, parlez-moi de ses
limites selon vous, l'incertitude des flux de trésorerie? Non contractuel comme Bond?
La limite évidente du DCF est la capacité des entreprises à anticiper l’évolution de leur
activité. Généralement correct, ce genre de BP comporte évidemment un risque. Toutefois, la
crise de la dette européenne est l’illustration que les bonds ne sont pas toujours moins risqués.
12. Le mode de financement peut-il jouer sur la valeur? Exemple avec Vivendi/SFR,
Numéricâble et Bouygues ?
Evidemment, puisque cela touche directement le ratio d’endettement dette nette sur capitaux
propres, donc impacte notamment les beta et wacc.
Quelle est selon vous place de l'analyse financière dans une évaluation? De l’analyse
stratégique ?
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80 % / 20 %. L’analyse financière reste fondamentale. Elle est la première approche, la
première compréhension du dossier. La performance va être déterminante, que l’on se base
sur la performance passée ou future, on va chercher à savoir dans quel état est la société,
quelle est sa santé financière.
14. a. Eléments nouveaux ou amplifiés? : Présence sur internet et réseaux sociaux? Clientèle?
Parts de marchés? Potentiel de communication? Rythme de croissance? Capturé dans
business plan.
15. Quels sont aujourd'hui pour vous les enjeux majeurs de l'évaluation financière?
Question beaucoup trop vaste. Probablement le calcul du risque lié au financement par la
dette. De plus en plus la valeur sera le cœur de la stratégie, des décisions, des innovations. La
force du marché des transactions tient à son pouvoir d’achat, et sa capacité à pouvoir évaluer
et payer la bonne valeur aux yeux du marché. Les choix de taux d’actualisation dans la
méthode des DCF par exemple restent des enjeux majeurs, le choix du financement, le coût de
la dette, de plus en plus incertain sur de nombreux marché vont réellement être des enjeux
clefs pour les évaluateurs et les investisseurs.
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Résumé
L’objet de ce mémoire est de faire un état des lieux des méthodes d’évaluation financière
actuellement utilisées. Avec l’évolution du marché des fusions-acquisitions et la reprise des
transactions, la question du processus d’évaluation et du choix de la méthode semblent
pertinents.
Avec une étude qualitative et l’interrogation de 12 professionnels, nous avons pu cerner les
enjeux de ces professions qui tendent à se normaliser, s’organiser, afin de recherche la plus
grande transparence possible. L’absence d’une méthode d’évaluation réellement objective
laisse place à de nombreuses adaptations selon les professions, l’expérience, les domaines
d’activités. Nous reviendrons également sur la découverte d’une nouvelle méthode, basée sur
l’évaluation des actifs immatériels, qui met en évidence des éléments créateurs de valeurs que
nous n’avions pas repérés au travers des méthodes traditionnelles. Enfin, ce mémoire se
voudrait plus constructif avec la poursuite d’une étude quantitative portant sur les corrélations
entre la valeur calculée par chaque méthode d’évaluation, et le prix réellement payée par
l’acheteur, réel acteur de la valorisation finale.
Abstract
With a qualitative study and examination of 12 professionals, we were able to identify issues
that these professions tend to normalize, organize, to establish the greatest possible
transparency. The lack of a truly objective evaluation method leaves room for numerous
adaptations by occupation, experience, and areas of activity. We also present the discovery of
a new method, based on the evaluation of intangible assets, which put in evidence the creative
elements of values that we had not identified through traditional methods. Finally, this
dissertation would be more constructive with the pursuit of a quantitative study on the
correlation between the calculated value by each method, and the price actually paid by the
purchaser, real player in the final valuation.
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