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CAROLINE cÔTÉ

LA VIOLENCE DANS LES RELATIONS AMOUREUSES


CHEZ LES LESBIENNES

Mémoire
présenté
à la Faculté des études supérieures
de l'Université Laval
pour 1' obtention
du grade de maître ès arts (M.A.)

École de s e ~ c social
e
FACULTÉ DES SCIENCES SOCIALES
U'NIV'ERS~~É LAVAL

MAI 1997

O Caroline Côté, 1997


of Canada du Canada
Acquisitions and Acquisitions et
Bibliographie SeMces services bibiiographiques
395 Wellington Street 395, nie Wellington
Ottawa ON K1A ON4 OttawaON K1AON4
Canada Canada

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may be printed or othewise de celle-ci ne doivent ê e imprimés
reproduced without the author's ou autrement reproduits sans son
permission. autorisation.
A Berthe, ma mère qui m'a quittée durant ce périple sur une
note d'amour, de courage et d'extrême douleur.
À mes filles Claudel et Éléonard nées durant ce périple, ù qui
je souhaite des amours sans violence.
Et enfin 6 toutes lesfemmes qui aiment lesfemmes, qu'elles
vivent Mau grand jourw ou cachées&,ajîn qu'elles aient le
droit de vivre leur préféence sans être bafouées ni par la
société ni par leur conjointe.

AVANT-PROPOS

Je désire remercier ma p r e m i h directrice, Franche Oueilet d'abord pour m'avoir initie et


donne le goût de la recherche durant mon baccalaureat. Ensuite pour m'avoir aidée tout au long
de ma scolarité de maîtrise. Sa grande compdhension face aux divers évenements survenus dans
ma vie pendant la realisation des cours, m'a aidé à poursuivre mon cheminement. Je remercie ma
seconde directrice, Guylaine Racine qui a su prendre la relkve malgr6 la distance gdographique
qui nous separait. Ses conseils judicieux et son enthousiasme m'ont aidé à terminer ce mémoire.

Je tiens & remercier aussi MichUe CMment pour son soutien sur le plan de la réflexion, de
la mdthodologie et pour l'encouragement et I'amitib qu'elle m'a apportés au moment ou j'étais au
Quebec. Un merci tout spécial au Centre de Recherche Interdisciplinaire sur la Violence
Familiale et la violence faite aux Femmes et plus particulièrement A la section CRI-VIFF-
Québec. Aux collègues de travail: Ginette Beaudoin, Dominique Damant,Jocelyne Gallant et ii
I'equipe programmation qui m'a permis de prendre de l'expérience en recherche et ce tri%
agréablement,je les remercie.

Je veux exprimer toute ma gratitude aux femmes qui m'ont fait confiance et qui ont accepte
de participer ii cette recherche. Sans leur temoignage, il aurait et6 impossible de realiser cette
enide. Également plusieurs personnes et des associations m'ont aide à rejoindre les participantes
de cette btude, je les en remercie.
Je tiens ik souligner un appui f'imancier dont j'ai pu bCn&Mer durant la realisation de ce
memoire et sans lequel il m'aurait tté difficile de faire faire la transcription des verbatim:
d'entrevues. Ii s'agit du Fonds Simone Paré que je remercie pour la confiance accordée face 5
mon projet Mes remerciements vont aussi a Pierrette Robichaud qui a fait la transcription d a
verbatim d'entrevues et a Paula Robichaud pour la correction de l'orthographe du mémoire.

Je tiens exprimer ma reconnaissance à la Maison des Femmes de Quebec, B Dominique


Bilodeau pour la supemision lors de mes stages, aux tmvaiUeuses présentes durant les annees
1987 a 1995, ainsi qu'aux femmes hkbergées durant cette periode. Ce passage dans cette maison
thebergement m'a fait grandir en tant que femme et en tant qu'intervenante. Cette expCrience a
suscité en moi l'intérêt de poursuivre le travail necessaire à accomplir pour diminuer la violence
faite aux femmes.

Merci à Lise Darveau pour m'avoir non seulement enseigne l'intervention de groupe mais
pour m'avoir transmissa passion des groupes.

Je suis très reconnaissante envers tous les membres de ma famille et envers une amie,
Christiane Delamarre, qui chacune et chacun ii leur façon m'ont apporté des élements
indispensables a la réalisation d'un tel travail. Leur confiance, leur appui et leur amitié huent très
précieux et appri5cib.

Et enfiin, le soutien et l'appui de mon conjoint Michel ainsi que la joie de vivre de ma füe
Claudel m'ont aide à mener B terme ce projet.
RÉSUMÉ DU MÉMOIRE............................................................... 1

AVANT-PROPOS .......................................................................... u

TABLE DES MATIÈRES ........................................................... iv

INTRODUCTION .......................................................................... 1

CHAPITRE 1 L'OBJET. LES BUTS ET LA PERTINENCE DE

1.1. L'objet et les buts de la recherche .................................


1.2. La pertinence de la recherche ........................................
CHAPITRE LI LA VIOLENCE DANS LES RELATIONS
AMOUREUSES CHEZ LES LESBIENNES
2.1. Préambule ............................ . ...... . ..........................
2.2. Éiéments de définitions et précisions de termes
utilisés ..............................................................................
2.3. Recension des écrits ........................................................
2.3.1. L'étendue et les formes de la violence .........................
2.3.2. Les facteurs de risques ................................ . . ..........
2.3 . 3 . Le vécu des victimes et les conséquences de la
violence ...................................................................
2.3.4. Les préjugés et les mythes ..................................... .. .
2.3.4.1. Ceux entourant le lesbianisme ................................
2.3.4.2. Les préjugés sur la violence conjugale chez les
lesbiennes ......................................................
2.3.5. Les besoins des victimes ...........................................
2.3.5.1. Besoins de toutes les femmes victimes de violence ........
2.3.5.2. Besoins spécifiques des femmes lesbiennes victimes
de violence ...........................................
CHAPITRE VI SECOND VOLET : ANALYSE DE L'AIDE.
DES BESOINS ET DES SERVICES
6.1. Les types d'aide utilisés par les femmes violentées ......
6.1.1. Les ami(e)s et les proches ..........................................
6.1.2. Les thérapies individuelles .........................................
6.1.3. Les interventions de groupes ......................................
6.1 .4. Les services sociaux et les services de santé ................
6.1.5. Les maisons d'hébergement .......................................
6.1.6. Les services policiers ................................................

6.2. Les besoins des l e s b i e ~ e sviolentées par leur


conjointe ..........................................................................
6.2.1. Besoins émotifs, sociaux et physiques ........................
6.2.2. Besoins en terme d'intervention et services souhaités....

6.3. Les appréhensions des femmes face aux ressources


d'aide ..................... .
.....................................................
6.4. Synthèse et discussion ..................... . ............................
CONCLUSION .................... ,
,.....................................................
BIBLIOGRAPHIE .........................................................................
ANNEXE A Annonces pour participer à la recherche .................................
ANNEXE B: Annonces pour participer à la recherche .................................
ANNEXE C : Protocole de contact teMphonique ........................................
ANNEXE D: Formule de consentement ..............................................
ANNEXE E: Schéma d'entrevue .........................................................
INTRODUCTION

La violence conjugale chez les lesbiennes est un sujet tabou qui soulève toutes sortes de
réactions : occasion d'attaquer cette communaut6, denégation du probl&me,grande désolation
pour les tenantes de l'utopie feminine sans violence, blessure il l'identité puisque cette redite
touche notre conception des femmes et des relations d'amour entre eues (Demczuk: 1995).
Marginalisées par la sociéte, les lesbiennes le sont également au niveau de la violence qu'elles
peuvent subir par leur conjointe, ce qui n'est pas sans cons&pences sur l'aide qu'elles
reçoivent.

Impliquée pendant huit années dans le réseau qu6bécois des maisons d'hébergement pour
les femmes victimes de violence conjugale, j'ai pu constater que la realité des lesbiennes etait
absente de notre analyse et, par conséquent, que nos outils d'intervention étaient inadequats pour
les lesbiennes violentees par leur conjointe. Cette simation d'impuissance il laquelle j'ai été
confrontée lors d'une intervention menée auprès d'une lesbienne violentée m'a incitee il r&tliser
cette 6tude. Ma motivation etait d'abord de mieux comprendre leur situation. Comme
intervenante, je ne me sentais pas outiil6e pour faire une intervention de qualit6 qui tiendrait
compte de leur r6alit6. Je me servais des grilles et des outils cr&s pour intervenir auprès des
femmes ht5t&osexuelies, mais je demeurais insatisfaite puisqu'il y avait beaucoup de questions
sans réponses et quelquefois des non-correspondances. Par ce mémoire, je souhaite répondre
certaines questions et, surtout, je souhaite que les résultats de l'étude puissent aider les
intervenantes et les intervenants qui travaillent avec les lesbiennes violentées par leur conjointe.

Mieux comprendre la réalité des lesbiennes violentées demeure un projet ambitieux. Cela
exige de se détacher en partie d'une conception h&&osexiste de la réalité. Differencier les
prejugés de la réalité, reconnaître l'existence d'un mode de vie homosexuel, prendre conscience
du pouvoir que l'on détient quand on est intervenante et que l'on peut malgr6 nous encourager
l'homophobie. Les lesbiennes peuvent vivent des amours qui les font grandir mais,tout comme
les femmes hétérosexuelIes, elles ne sont pas l'abri de la violence de leur conjointe. C'est dans
cet esprit que j'ai tenté de mieux comprendre la réalité des lesbiennes violentees par leur
conjointe et ce, partir de la perception des lesbiennes elles-mêmes.

Ce mémoire s'organise autour de six chapitres. Le premier porte sur l'objet, les buts et la
pertinence de la recherche. La revue des dcrits sur la problematique de la violence conjugale chez
les lesbiennes constitue le deuxi&rnechapitre. Le suivant porte sur les differents cadres
conceptuels à partir desquels il est possible d'expliquer la violence conjugale et explicite
l'approche feministe qui hit préconisée dans cette 6tude. La m6thodologie de recherche employee
est decrite dans le quatriéme chapitre. Les deux suivants nous amènent à l'analyse des entrevues
réalisées aupres des femmes, Le chapitre cinq porte principalement sur l'analyse du vécu et
l'exp8rience reliés à la violence. Le chapitre six concerne l'analyse de l'aide, des besoins et des
services. E n f i , la conclusion permettra de faire la synthèse de cette étude, de discuter des
résultats et des questions qu'ils soulkvent ainsi que des pistes de recherches et d'interventions
qui en découlent
CHAPITRE 1

L'OBJET, LES BUTS ET


LA PERTINENCE DE LA RECHERCEIE

1.1. L'objet et les buts de la recherche.

La violence faite aux femmes a 6té abondamment documentée ces vingt dernières années.
e nce
Plus ~ p ~ ~ q u e r nen t qui concerne la violence conjugale, l'intervention auprès des femmes
violent6es par leur conjoint s'est grandement d6velopp6e au Qutbec, d'abord dans les groupes
de femmes (le réseau communautaire) et ensuite dans le réseau gouvernemental. Un nombre
important de recherches a vu le jour en ce qui concerne cette probl6matique. Cette grande
préoccupation pour la violence faite aux femmes par les hommes s'est traduite par la mise en
place de services d'aide pour répondre aux besoins des victimes h6t6rosexuelles. En ce qui a trait
a la violence conjugale chez les femmes lesbiennes, il en est tout autrement En effet, l'existence
même de la conjugalité de cette minorité invisible n'est que très peu connue et reconnue. C'est
davantage aux États-unis que l'on retrouve les Btudes portant sur la violence conjugale chez les
lesbiennes. Le gouvernement qu&cois, par sa politique d'intentention en mati&rede violence
conjugaie : Prévenir, dépister, contrer la violence conjugale (1995), vient tout juste de
reconnaître l'existence de ce probkmel. La violence conjugale chez les lesbiennes y est traitée
dans l'un des quatre grands axes d'intenrention, soit celui de l'adaptation aux situations
particulières2. On y mentionne que :
«Les femmes qui vivent de la violence conjugale de la part de leur conjointe se
trouvent confrontées Z i de graves difficultés dTacc&saux ressources. (...)
Lorsqu'elles demandent de l'aide auprés des services de santé, services
sociaux et judiciaires, elles se trouvent souvent devant un personnel peu
sensibiLisé i leur réalité et peu prépare à leur offrir un soutien approprié. En
fait peu de ressources communautaires peuvent rependre aux besoins des
lesbiennes qui vivent une situation de violence conjugale» (Gouvernement du
Québec, Comité interministériel, 1995: 48).

Un article récent, paru dans La Presse, avançait que la fréquence des agressions etait
comparable chez les couples de lesbiennes et chez les couples hét&osexuels (Lacroix, 1995).
Malgré la tendance à surestuner le nombre de lesbiennes violentées par leur conjointe sans avoir
de donnees il l'appui, ou une autre tendance qui porte A croire que le probkme n'atteint pas les
mêmes proportions que chez les couples h&érosexuels (Cot, 1995). une constatation s'impose :
aucune recherche ne nous permet actuellement de statuer sur l'ampleur et la Mquence de la
violence conjugale chez les lesbiennes.

On estime entre 10 et 15 % le nombre de femmes lesbiennes au Canada (Chesley,


MacAuley, Ristock, 1992). Au Québec, il y aurait de 4 à 8 % de lesbiennes (Demczuck, 1995a).
Les etudes qui ont tenté de d6tefnilner le pourcentage de cette population affecte par la violence
ont 6té fortement critiquées, les m6thodologies employh étant considerées comme non fiables
(Renzetti, 1992; Demcnùc, 1995).Toutefois, il demeure que ces recherches ont le mérite d'avoir
dkmontré l'existence du problème et d'avoir documenté les types de violence vécue.

Plusieurs 6crits portant sur la violence conjugale chez les lesbiennes, qu'il s'agisse de
rapports de recherches, de r6flexions ou de discussions, font ressortir de manihre évidente que
les modes d'intervention des ressources d'aide en violence conjugale3, au Québec comme
ailleurs, ne peuvent rependre ou répondent difficilement aux besoins des lesbiennes violentées

I Demczuk cf d.(1995b)soulignent, juste titre d'ailleurs. le paradoxe dans lequel le Gouvernement du QuCbec se
retrouve en reconnaissant l'existence de la violence conjugale chez les lesbiennes tout en omettant la It5gitimitb des
unions de fait entre femmes.
La prdventioa. le depistage et l'intervention dans les domaines psychosocial. judiciaire et correctionnel representent
les m i s autres grands axes d'intervention de la nouvelle politique gouvernementale en matière de violence-conjugale
(1995: 9).
Ceci inclut les différents services auxquels peuvent avoir recours les lesbiennes violentées par leur conjointe (les
services de santé et les services sociaux privés et publics, Ies services policiers et les services associbs au domaine
judiciaire).
par leur conjointe flreize, 1995; Pink Triangle Services, 1994; Toronto CounseUing Centre for
Lesbians and Gays, 1992). Renzetti (1992) avait d'ailleurs ciblé la n&essité de mener des 6tudes
sur l'aide que les victimes lesbiennes reçoivent et sur leurs besoins en terme d'intervention.
Parce que les recherches canadiennes sur ce sujet sont relativement récentes et que la
méconnaissance de cette réalité constitue un obstacle à l'aide offerte. i1 m'a semblé pertinent de
mener une &ude sur la violence conjugale chez les lesbiennes.

Dans ce mémoire de recherche, deux objectifs principaux sont poursuivis. Le premier vise
à documenter la réalité des victimes af5n de développer une meilleure compréhension du vécu des
lesbiennes violentées par leur conjointe. Ceci B partir des types de violence vécue et en accordant
une importance à la violence psychologique puisqu'elie semble être la plus kéquente et la plus
dBicile il definir (Brand et al., 1986; Lie et Gentlewarrier, 1991; Renzetti, 1992). Ce premier
objectif permet aussi de mieux connaître les reactions des lesbiennes violentées, les
conséquences de la violence sur eues et sur leur vie, de même que leurs explications des causes
et des facteurs reliés à la violence. Le second objectif de l'étude consiste à documenter la
recherche d'aide des femmes violentees, leurs besoins en terme d'intervention et enfin les
senrices qu'elles souhaiteraient obtenir pour y répondre.

Pour atteindre ces objectifs, une approche qualitative fut privilégiée. Huit femmes ont
accepte de me livrer une partie de leur v k u lors d'une entrevue individuelle. C'est à partir de
l'analyse de ces differentes expériences que j'ai cherche mieux comprendre ce qu'elles
vivaient.
1.2. La pertinence de la recherche.
L'intention première est de contribuer à l'amélioration de l'intervention pratiquee auprès
des lesbiennes victimes de violence conjugale. Cette recherche rejoint tout il fait le dtfi que pose
la nouvelle Politique d'intervention en matière de violence conjugale, c'est-à-dire adapter les
interventions afim de r6pondre aux besoins des lesbiennes.

Ce memoire de recherche pourrait contribuer à l'atteinte des objectifs visés par cette même
politique qui consiste, primo, à «Reconnaître particulih-ement l'existence de la violence
conjugale chez les personnes (...) lesbiennes (...)» et, secundo, à «(...) promouvoir, auprès de
la population et chez les professionnelles et les professionnels en cause, des attitudes
d'ouverture 2 la diversittb4. Ainsi, ce mémoire se veut être une contribution à une meilleure
compréhension de la violence chez les lesbiennes et aussi une contribution la déconstruction
des pr6juges hornophobes.

Cette recherche informe sur le vécu des femmes Iesbiemes violentees par leur conjointe et
sur leurs besoins en terme d'intervention individuelle et de groupe. En ce sens, elle offre des
pistes pour les intervenantes et les intervenants qui ont travaüler auprès des lesbiennes.
D'ailleurs, cette ttude soul&vedéja l'inter& d'intervenantes et d'intervenants sociaux (réseau
public, prive, groupes communautaires) qui sont entrés en communication avec moi pour dire
combien elles et ils avaient besoin d'être t5clairés pour mieux intervenir dans des situations de
violence conjugale chez les lesbiennes.

Je souhaite enfin que les r6sultats de l'étude aient des retombees sur l'tvolution de la
comprehension de la violence conjugale chez les lesbiennes et que cette compréhension permettra
d'ajuster et d'amtliorer les seMces d'aide auprés de ces femmes. Cette recherche se veut une
contribution à la demarche plus gédrale qui vise à enrayer la violence faite aux femmes.

Cf. Politique d'intervention en matiike de violence coojugde. Gouvernement du Quebec. Cornit6 inteimùiist6xieI.
1995: 25.
CHAPITRE II

LA VIOLENCE DANS LES RELATIONS AMOUREUSES


CHEZ LES LESBIENNES

2.1. Préambule.
Malgre la juste critique portée aux 6tudes qu6bt5coises réalisées en violence conjugale il
l'effet qu'eues cloisonnent les problematiques ou les clientèles (Rinfret-Raynor, Oueiiet, Cantin,
Clement, 1996)' j'ai quand même choisi de poser un regard spécifique sur la violence conjugale
chez les lesbiennes. Toutefois, il est important ici de preciser que je ne me dissocie pas de cette
critique, c'est-Mire que le grand théme explor6 est celui de la violence, plus particuliérement la
violence vecue dans les relations intimes. Qu'il s'agisse de victimes immigrantes, handicapées,
lesbiennes, etc., la definition de la violence demeure la même dans la mesure ob l'idée
fondamentale du contrale exerce reste @sente. Par contre, il faut reconnaître que des
particularit6s peuvent exister, et qu'il est utile et nt5cessaire dors de s'interesser aux spécificités
dans les groupes lorsque leurs besoins, Bgalement sp&ifiques, restent sans repenses.

Depuis le debut des annees 1970, bon nombre de travaux ont et6 r&iises sur la
problematique de la violence conjugale chez les couples h&érosexuels. En ce qui concerne la
violence chez les Lesbiennes, les auteur(e)s soulignent une pénurie de recherches. Par ailleurs,
des ecrits int6ressants ont vu le jour en 1994 et en 1995. Dans le cadre de ce chapitre, un regard
sera d'abord pose sur quelques d6finitions et précisions de termes utilis6s. Je poursuivrai ensuite
sur ïetat actuel des connaissances en violence conjugale, chez les hét6rosexuels et chez les
lesbiennes, il partir de six th&mes:1) l'etendue et les formes de la violence; 2) les facteurs de
risque; 3) le v6cu des victimes et les conséquences de la violence; 4) les préjugés et les mythes;
5) les besoins des victimes; 6) la recherche d'aide. Une synthbse de la revue de littérature
terminera ce chapitre.

2.2. Éléments de définitions et précisions de termes utilisés.


Dans le cadre de cette étude, j'ai retenu la definition de la violence conjugale formul6e par
le Centre de recherche interdisciplinaire sur la violence familale et la violencefaite auxfemmes
(CRI-VIEF). Cette ddhition s'inscrit dans une perspective feministe et sptcifie les motivations
à choisir la violence. La violence y est définie comme suit :

«La violence est un exercice abusif du pouvoir par lequel un individu en


position de force cherche B contrôler une autre personne en utilisant des
moyens de differents ordres afin de l'obliger a adopter des comportements
conformes A ses propres désirs» (CRI-VIFF, 1995: 7).

I'emprunterai tgalement la dkfinition de la violence conjugale formulEe par le


Regroupement provincial des maisons d'hébergement pour femmes et enfants victimes de
violence conjugale. qui permet d'identifier les diff&entes formes de violence :
«Femmes battues (violence physique), menacees de l'être ou objets de scknes
de violence qui laissent pr6sumer qu'elles le seront (violence verbale) ou
encore humilides par des critiques, des railleries et des insultes qui, Zî la
longue, peuvent détruire la personnalit6 et l'assurance (violence
psychologique), des relations sexuelles influencdes par la violence ou
contraintes par l'agresseur (violence sexuelle), le contrôle des moyens et des
choix financiers des femmes (violenceéconomique) : la violence se deroulant
dans le cadre d'une relation de couple»?

Pour parler de la violence, le terme agression sera employe et la conjointe violente sera
design& sous le terme d'agresseure. En ce qui concerne les femmes violentées, j'ai priviltgie
l'appellation de victime malgré que cette denomination soit souvent rejetée puisque, selon Noël :
«(...)être qualifie de victime est de plus en plus perçu par l'opprimt comme une forme d'insulte
plutôt que comme un statut sur lequel fonder des revendications» (1989: 267). Cette
identification de statut ne duninue en rien les efforts déployés par ces femmes pour s'en sortir.

Regroupement provincial des maisons d'hebergement et de transition pour les femmes victimes de violence
conjugale, 1994: 17.
En ce sens, eues sont des «survivantesn, eues survivent d'une façon extraordinaire aux
agressions subies.

La façon de nommer les femmes homosexuelies fait l'objet de plusieurs debats. Je laisse à
d'autres le soin d'entrer dans les spécificités idt5oIogiques. Toutefois, voici les termes les plus
couramment employes et leur d6fiition. Ainsi, le terme «homosexuel» refère A des relations
sexuelles avec les personnes du même sexe. Pour sa part, le terme «Gay>>est un terme d'origine
américaine qui engloberait les hommes et les femmes (Brooks, 1981). Le terme lesbienne
identifie l'homosexualité fihinine. Bien que le terme homosexualitt5 sera employé à l'occasion,
j'ai priviit5gi6 dans ce mernoire le terme lesbienne parce qu'il est sp6cifique aux femmes et qu'il
englobe une réalit6 plus large que celle uniquement basée sur la pratique sexuelle.

La conviction de la sup6riorite d'un modèle de type de relation amoureuse par rapport un


autre a donné naissance à ce que l'on qualifie d'h6térosexisrne. En d'autres mots,
l'h~térosexismecorrespond il la :
«(..) position selon laqueue ~'h~térosexualit6
constitue la «norme», qu'elle est
(OUdu moins qu'elle devrait être) 1'expérience sexuelle ou intime universelle.
Cette position donne lieu des attitudes, à des croyances systémiques, à des
convictions religieuses, à des lois et à des politiques discriminatoires à
l'endroit des personnes lesbiennes et gaies»%

il est important de souligner que dans cet univers d'êtres majoritairement h&&osexuels, rares
sont les institutions et les organisations qui tiennent compte de la rdalité des lesbiennes.

Dans cette perspective, cette domination qui entraîne le rejet de ce qui diffère du mod8le de
relation homme / femme a pour consequence l'homophobie. Celle-ci est decrite comme &nt la
<<( ...) peur des sentiments amoureux à ITt5garddes membres de son propre sexe et par
consequent la haine de ces sentiments chez les autres» (in Franklin & Stacey, 1991: 134). Il
faut souligner que l'homophobie n'est pas seulement un sentiment que l'on retrouve chez les
hétérosexuels. Les homosexuels, incluant les lesbiennes, auront eux et elfes aussi souvent
int&ioris& cette haine, ce rejet de leur attirance pour des personnes de leur propre sexe
(Woodman, Lema: 1980). Une fois integré ce degoilt de leur homosexualité, les lesbiennes
peuvent avoir des dïffï~ult& à développer une estime d'elle-même. De plus, cette homophobie
contribue à leur isolement et leur procure un certain stress, qui peut être associe A l'absence de
possibilité de devoiler Leur orientation sans subir le rejet, un rejet qui les contraint au silence 7.

Ccae d 6 f i t i o n est tirde de C. Champagne (1994).


Cf. Ristock, 1991; Boiogaa et d . 1987; Demczuk, 1995.
2.3. Recension des écrits.
La recension des dcrits dont il sera question porte sur la violence conjugale chez les
hétérosexuels et chez les lesbiennes. Parce qu'on retrouve peu d'écrits sur la violence dans les
relations amoureuses chez les l e s b i e ~ eet
s que les recherches existantes concernant les femmes
h6térosexuelles permettent de comparer tes données, elles ont ét6 retenues.

2.3.1. L'étendue e t les formes de violence.

Toutes les statistiques sur la violence conjugale au Canada portent sur les relations de
couples h&kosexuels. Les résultats de la demigre enquête menée par Statistique Canada (1993)
démontrent qu'une femme sur quatre est ou a 6té victime de violence physique ou sexuelle de la
part d'un conjoint actuel ou precedent. En ce qui concerne la violence conjugale chez les
lesbiennes, aucune statistique canadienne n'est actuellement disponible. Cette absence de
données peut s'expliquer par le fait qu'aucune recherche ne semble avoir éte menee au Canada
sur la frequence et la prevalence de la violence conjugale chez les lesbiennes. Malgr6 cette
absence de données, le Comité canadien sur la violence faite aux femmes reconnaît l'existence
de ce problhne :
«Les relations lesbiennes ne sont pas I'épreuve de la violence et de
l'agression. Tout comme des femmes sont battues par leur partenaire intime,
une lesbienne peut être victime de violence infligee par sa partenaire pour la
priver de pouvoir et tenter de contrôler sa conduite et ses pens&s» (1993: 84).

Toujours en ce qui a trait à la violence chez les lesbiennes, des études américaines ont tente
de cerner la prevalence de cette violence. Ainsi, selon Loulan (1987)' sur un CchantiUon de
1 566 lesbiennes, 17% des lesbiennes seraient violentCa par leur conjointe. Coleman (1990)
qui a ment5 une ttude auprès de 90 couples de lesbiennes constate pour sa part un taux de
violence chez 46.6% des couples. Les methodes employées dans le cadre de ces Ctudes ont ét6
fortement critiquees parce qu'elles s'appuient sur des échantïlions volontaires, ce qui n'est pas
représentatif de l'ensemble des lesbiennes.

En 1993, le Comité pancanadien s'est penche sur les differentes formes de la violence
faite aux femmes. Cinq types de violence ont été identifiés, soit les violences physique, sexuelle,
psychologique, fmancibre et spirituelle. Plusieurs recherches ont tenté de decrire la violence,
d'en mesurer la fréquence et la gravité à partir d'instruments de mesure tel que le Confict Tactics
Scales (CTS) élabore par Strauss (1979) et qui est d'ailleurs l'instrument le plus connu et le plus
u W (Ouellet, Lindsay, Clt5ment et Beaudoin, 1996). Face aux différentes formes de violence,
ces mêmes auteur(e)s ont constaté que I'agression physique avait fait l'objet de plusieurs études
et qu'il en était tout autrement pour la violence psychologique. Le caractkre subjectif de
l'agression psychologique expliquerait le sous-developpementdes recherches sur cette forme de
violence.

Des Etudes menées conjointement auprès de population h&érosexueile et homosexuelle ont


démontré que l'on y retrouve les mêmes types de violence. Kelly et Warshafsky (1987)' qui ont
mené une recherche comparative auprès de femmes lesbiennes et d'hommes gais, ont constaté
que la ciifference signifcative entre les sexes se situe au niveau de la fréquence de la violence
physique qui est moins Blevée chez les lesbiennes. Brand et Kidd (1986)' avec leur recherche
comparative entre femmes ht5t6rosexuelles et femmes lesbiennes violentées, arrivent au même
Constat. Pour sa part, Renzetti (1992)' qui s'est intéressee uniquement aux victimes lesbiennes,
a dénote une fréquence de l'agression psychologique plus élevke que l'agression physique.

2.3.2. Les facteurs de risque.

Certaines études démontrent un lien entre la violence vécue durant l'enfance et celle subie à
l'âge adulte, ce qu'on appelle la transmission interg6n&atio~ellede la violence. L'enquête de
Statistique Canada (1993) a r6vélb que les femmes agressees par leur conjoint dtaient trois fois
plus susceptibles d'avoir un beau-p&reviolent et deux fois plus susceptibles d'avoir vu leur p&re
agresser leur mére que les femmes non violentees par leur conjoint Lie, Schlit, Bush, Montagne
et Ryes (1991) confirment ce lien dans leur recherche auprès des Lesbiennes violentées par leur
conjointe. Malgré la reconnaissance d'un Lien possible entre les antecédents de violence et la
violence conjugale, plusieurs chercheur(e)s soulèvent Bgalement des questions en ce qui
concerne les personnes qui n'ont pas v&u ou qui n'ont pas 6îé temoins de violence durant leur
enfance (MacLeod et Cadieux, 1980; MacLoed, 1987; Gondolf, 1985). On peut ici retenir que la
violence vEcue durant l'enfance ne mène pas nécessairement à l'adoption de comportements
violents.

Des recherches ont également dkmontré l'existence d'un lien entre les abus d'alcool et de
drogue et la violence conjugale. Selon l'Enquête sur la violence envers lesfemmes de Statistique
Canada (1993), le taux d'agression est plus éleve chez les femmes qui ont un conjoint qui boit
L'Enquête sociale et de santé I992-1993 du rninist8re de la Santé et des Services sociaux
(Gouvernement du Qut5bec)s fait ressortir l'effet particuli8rement devastateur de l'usage de la
drogue combi.6 à celui de l'alcool. Mais la determination de la nahm de ce Lien, en tant que
facteur declencheur ou cause de la violence, n'est pas unanime. Par ailleurs, Rinfret-Raynor et
Cantin (1994) ramenent que des recherches approfondies ont demontre que l'usage abusif
d'alcool ou de drogues facilite l'utilisation de la violence. En effet, pour Gelles (in Frankel-
Howard, 1989: 14), ces substances sont des déclencheurs, eues facilitent un passage l'acte et
servent d'excuse, c'est-&-direqu'elles d~responsabilisentlTagresseur(e).En ce qui concerne les
lesbiennes, dans l'dtude de Kelly et Warshafsky (1987), la présence de consommation d'alcool
et de drogue était relatée dans 33% des couples homosexuels alors que la recherche de Coleman
(1990) démontre une présence de la consommation de ces substances dans presque 71% des
couples lesbiens.

En égard à la probMmatique de la violence chez les lesbiennes, des ttudes ont demontre
que l'hétérosexisme et l'homophobie pouvaient être des facteurs favorisant la dynamique de la
violence. Dans un sondage réalisé par le Toronto Councelling Cenne for Lesbians and Gays,
30% des repondantes affirmaient que l'isolement et l'homophobie avaient ét6 des facteurs
contribuant à la violence dont elles furent victimes (Chesley, MacAtiiay, Ristock, 1992). Face à
l'hétérosexisme qui contribue I'isolement socid des lesbiennes, le couple peut dans certain cas,
selon Demczuk et al. : a( ...) devenir le seul lieu de refuge face à l'intolérance de la societb
(1995: 8).

Un des derniers facteurs de risque dont il faut discuter est l'âge des victimes
(h6térosexueiles)qui distinguerait le plus fortement les femmes violentées de celles qui ne le sont
pas. Les enquêtes de Statistique Canada et Sant6 Québec9 anivent à des conclusions similaires:
l'âge serait un facteur d&enninant, les taux d'agression les plus Blevés se retrouvent dans le
groupe d'âge des 18 à 24 ans. Toutefois, aucune donnee n'est disponible à savoir si l'âge est
aussi un facteur dttenninant dans les couples lesbiens.

* Cf. C. Lavallée, 1996.


9 opcit.
2.3.3. Le vécu des victimes et les conséquences de la violence.

Lorsque I'on parle de violence conjugale il ne s'agit pas d'un acte isolé de violence. Le
facteur déterminant en est la notion de repbtition, une constance dans les agressions"? Aussi,
c'est parce que la violence conjugale se vit d'une façon circulaire et répetitive que l'on en parle
comme &tantun cycle de violence. Renzetti (1992) a aussi observe le cycle de la violence chez
les lesbiennes. Ce cycle est decrit par Waker (1977 et 1978) et Larouche (1987) selon les trois
périodes succinctement 6noncécs ci-après:
1) La période de tension : des tensions existent entre les partenaires, elles s'accumulent et
progressivement les conflits augmentent;
2) La période d'eclatement : il s'agit de la phase d'agression. Le conjoint met ses menaces
à exécution;

3) La ~ e r i o d ed e remission : le conjoint a peur de perdre sa partenaire A cause de


l'agression. Il s'excuse, regrette son «geste>>et promet de ne plus jamais
recommencer.

Le cycle de la violence, qui decrit les comportements de la personne qui est violente, a
beaucoup iniïuenct l'intervention au Qubbec. En maison d'htbergement, il sous-tend plusieurs
outils d'intervention individuelle et de groupe. Pour bien comprendre la dynamique de la
violence conjugale, il est utile de superposer au cycle de la violence le schéma de la
victimisation. Pour ce faire, j'expliquerai d'abord ce qu'est le processus de victimisation des
femmes.

La victimisation est un processus dynamise par l'apprentissage de la peur et de


l'impuissance dès le jeune âge. Ce processus implique un double message :
«D'un côté, on minimise la peur ressentie par les Nles et de l'autre, on les met
constamment en garde contre Ies dangers d'agression. (...) On les prévient
d'un danger sanskur expliquer exactement contre quoi, et comment eues
doivent se dtfendre. (...) Les petites filles comprennent que certaines
situations sont risquées et qu'à défaut d'être prudentes, elles seront agressees»
(Bilodeau, 1989: 10).

C'est ainsi que la peur s'empare d'elles et que tout ce qui est extérieur d'elles devient une
menace.

l0 Regroupement provincial des maisons d'bdbergcrnent et de transition pour les femmes victimes de violence
conjugale, 1990.
Une fois intégr6e' cette peur omnipresente conduit les femmes à retenir le pire des
scenarios et ainsi le plus impossible à maîtriser. Dans une situation donnée, peu importe ce que
les femmes feront, leur jugement sera constamment remis en question. Dans le cas d'une
situation sans agression, elles se seront tourmenth pour rien et si, au contraire, l'agression es1
commise, elles se responsabiliseront et associeront l'acte de violence à une imprudence de leur
part. Il est clair que les femmes sont habitees par un doute constant de leur perception de la
réalité. D'après Andrde Lafrance (1987). la victimisation, dans un contexte de violence, peut
prendre la forme suivante :

Climat de menace du conjoint violent / Apprentissage la peur de la femme violentée

Durant la période de tension, la femme ressent de la peur, elle cherche à se proteger contre la
menace de violence à son égard.

1 Agression par le conjoint violent / Sentiment d'ounage de la femme violentée 1


Quelle que soit l'agression commise, la femme se sent humiliée, elle est en colbre, elle est
outragee.

Invaüdation de la part du conjoint violent / Responsabilisation de la femme violentée

La c o k e et les sentiments d'outrage de la femme sont rapidement an6antis par les remords
du conjoint, qui est alors dans une période de rémission, et par les efforts fournis par celui-ci
pour justifier son comportement Parce que le conjoint agresseur se montre affectueux et qu'il
justifie ses actes par le fait d'une provocation par la personne agressée, une légitime defense en
quelque sorte ,la femme se sent fialement responsable des comportements du conjoint et croit
fermement qu'elle a le devoir de modifier ses propres comportements, qu'elle perçoit comme
étant agressants, pour que cesse enfh cette violence. Dans de pareilles conditions, très souvent
la femme ne parle pas de l'agression et du contexte dans lequel elle a été commise de <<peun
d'être culpabilisée davantage.

Valorisation et protection sociale de la part de l'homme violent /


Sentiment d'impuissance de la femme violentée

Si la femme se conforme aux stMotypes f6minins, elle sera assurée d'être prise en charge
aux niveaux 6conomique, social et affectif. Dans cette perspective, elle se trouve protégee par un
homme au prix de son independance qui joue sur tous les plans. En d'autres mots, la privation
de libertés élémentaires pour la femme est le prix de cette prise en charge. Toutefois, «(...) le
jour où le protecteur devient agresseur, il n'y a plus d'issues» (Regroupement provincial des
maisons d'hébergement et de transition pour les femmes victimes de violence conjugale, 1990:
34).

Pour saisir les conséquences de la violence, il est essentiel de faire un retour sur le vécu de
ces femmes. Les femmes violentées vivent dans un c h a t de peur et de tensions. Parce que leur
conjoint les invalide et souvent les responsabilise, elles n'ont plus confiance en eues et arrivent
même douter de leurs perceptions vis-&-visla situation (Lafiance, 1987). En raison de ce que
leur dit leur conjoint, souvent les victimes se sentent coupables et impuissantes, ce qui touche
considkrablement leur estime de soi. De plus, eues ont des sentiments d'ambivalence pour
l'agresseur envers qui elles ressentent de I'amerturne, mais aussi de l'amour (Larouche, 1987).
Cette situation les amène à se considerer péjorativement comme des être fragùes, dépendantes et
émotives (Bilodeau, 1990). Tellement envahies par le doute, elles ont tendance il d é f i r leur
réalité a partir d'un point de vue qui refEte la pensée de leur conjoint La peur d'être culpabilis6e
davantage les amène à taire les agressions subies. Se croyant potentiellement menacees de
violence, les femmes tentent de contourner, pour survivre, les menaces qui pèsent contre elle en
intégrant les stéreotypes f6minins leur garantissant, par ailleurs, une protection sociale qui, on
l'a vu, les prive des libertés les plus élémentaires. Parce qu'elles sont victimes de violence, elles
apprennent à nier leurs besoins, leurs désirs et leurs intérêts.

Plusieurs recherches confirment que la violence conjugale a des effets sur la sant6
physique et mentale des femmes (Kerouac et al., 1986; Iaffe et al. , 1986; Chenard et al. ,
1990). Les femmes violentées présentent plus de malaises somatiques, d'anxieté, d'insomnie et
de depression que les femmes non violentées. De plus cette étude demontre que les victimes ont
un niveau élevé de détresse psychologique et qu'elles sont cinq fois plus nombreuses avoir des
problèmes de dépression que les autres femmes de l'enquête. Statistique Canada (1993) conclut
que les femmes victimes de violence conjugale, en plus de souffrir d'un niveau élevé de détresse
psychologique, sont trois fois plus nombreuses que les autres à avoir pense au suicide. Il semble
que mettre fin a une union avec un conjoint violent «représente la meilleure garantie d'une
amélioration de [son] état de santé» (Chenard et al., 1990: 71).

On ne sait pas vraiment si les consequences de la violence sont les mêmes chez les
lesbiennes. Quelques études (Porat, 1986; Renzetti, 1989) font cependant ressortir que les
lesbiennes victimes de violence conjugale se défendent davantage que les femmes violentées par
des hommes. Pour les victimes lesbiennes qui se défendent, il peut être facile de se considérer
violente plutôt que violentée. Il est aussi plausible d'avancer que la double oppression que
subissent les lesbiennes, la première Ctant basee sur le genre alors que la seconde l'est sur
l'orientation sexuelle, ait des répercussions sur leur vie. En effet, des &udes non spécifiques à la
violence ont demontré : 1) un niveau élevé de stress chez les lesbiennesH;2) qu'en comparaison
aux femmes h&érosexuelles, on retrouve des taux plus élevés d'alcoolisme, de toxicomanie, de
tentatives de suicide12; 3) celles-ci auraient moins de support social et familial que les hommes
gais13. Pour les lesbiennes violentées par leur conjointe, s'ajoute une autre oppression, soit celle
que peut faire subir une sene de prejugés vehicults dans la societe. Nous verrons à la section
suivante quelques-unes des formes que peuvent prendre ces préjugés et ces mythes.

2.3.4. Les préjugés et les mythes.

2.3 -4.1. Ceux entourant le lesbianismel?

Plusieurs mythes et prejuges ont cours pour tenter d'expliquer l'orientation sexuelles des
lesbiennes. Un de ces mythes tient l'apparence physique des lesbiennes : c'est parce que les
hommes les ont «repousst$es>>, jugees «non attirantes» qu'elles se sont cons~quemment
«tournées» vers les femmes. Leur orientation sexuelle ne serait donc pas fondee sur une attirance
sexuelle et inteliecnielle vers une personne de leur sexe mais constituerait plutôt un «deuxiérne»
choix, ou pire, une consdquence de ne pas avoir 6te <«choisie».Un autre mythe visant
expliquer l'homosexualit~féminine porte sur les mauvaises exp6riences (la violence) que ces
femmes auraient vecues avec les hommes et que par conséquent elles se tourneraient vers les
femmes. Or les statistiques nous démontrent qu'une femme sur quatre (25%) subit une
agression sexuelle de la part d'un homme durant sa vie, mais toutes ces femmes ne sont pas
lesbie~es.De plus, toutes les lesbiennes n'ont pas été victimes d'abus dans leur enfance.

A tort, une association est faite entre le ferninisrne et le lesbianisme sur la base d'une haine
envers les hommes. Pour plusieurs, être feministe implique un rejet et une haine des hommes,
haine que l'on attribue particuli8rement aux lesbiennes pour justifier leur orientation sexuelle. Il
faut préciser que le ferninisrne est une perspective politique's à laquelle, d'ailleurs, n'adhèrent

Cf.: Brooks, 1981.


12 Cf.:Ldem,
l 3 Cf.: Bologna et ai.. 1987.
l4 l e me suis inspirte ici des guides suivants : London Battered Women's Advocaty Centre (1994); Toronto
counselling Cenire For Lesbim A n d Gays (1992).
l5 Comme tel. le fdministe n'a rien a voir avec certains sentiments et attitudes de haine vis-h-vis les hommes.
pas toutes les lesbiennes. Les mythes dont je viens de traiter demeurent puissants et camouflent
peut-être une raison plus simple. mais socialement encore moins acceptable, pour expliquer
l'orientation sexuelle de beaucoup de lesbiennes :elles aiment les femmes tout simplement

Ceci n'exclut pas la possibilité qu'être lesbienne» peut être un choix politique, ou que
ceriaines femmes peuvent avoir «choisi» cette orientation sexuelle en raison de violences subies
dans le passé. Ce qui demeure, c'est qu'il est inapproprié et inadequat de tirer des
g6néralisations de la communauté lesbienne. Comme chez les femmes hétérosexuelles, il y a à
l'intérieur même de la communauté lesbienne des sous-groupes qui varient selon l'âge, les
affinités, les exp6iences de vie, etc. 16.

2.3-4.2. Les préjugés sur la violence conjugale chez les l e ~ b i e ~ ~ .

Comme dans les situations de violence conjugale dans les couples h~térosexuels,plusieurs
analyses sont possibles et beaucoup de préjugés sont presents. Les préjuges servent
habituellement à nier, à expliquer ou à justifier la violence. Ils contribuent egaiement à maintenir
un seuü de tolérance eleve face la violence et orientent l'intervention auprès des victimes. Les
reactions face à la violence dans les relations amoureuses chez les lesbiennes peuvent être
cat6gorMes selon trois types : 1) la négation de l'existence de la violence dans les couples de
femmes; 2) la reconnaissance de l'existence de la violence sans y voir une agresseure et une
victime et, enfi; 3) la reconnaissance de l'existence de la violence seulement chez certains types
de lesbiemes17. Nous d o n s regarder de plus près les préjugés s'inscrivant dans chacune de ces
tendances et leur impact sur l'intervention.

L'argument qui milite en faveur d'une négation de l'existence de la violence dans les
relations amoureuses chez les lesbiennes tient d'abord sur les stéréotypes fdrninins. Les femmes
seraient non-violentes par nature, douces et genîdies et elles ne seraient pas des êtres de pouvoir.
Dans cet ordre d'idées, Johnston, qui s'appuie sur une thdorie biologique de I'oppression des
femmes avance que «La femme lesbienne n'est pas équipée physiologiquement pour opprimer sa
propre esp&ce»(in de Lesseps, 1980: 60). L'autre argument pour justifier la non possibilite de
violence chez les lesbiennes porte sur la solidarite de genre de la communauté lesbienne,
nécessairement existante, pour contrebalancer le rejet que les lesbiennes subissent par la société.

l6 À ce suje%il est i n t 6 ~ s a n tde consulter Chesley. MacAulay. Ristock 1992: 4.


l7 II s'agit d'un article de Janice L. Ristock. 1991. dans lequel eiie aborde k s embQches la compr6hsnsion du
probl&mede la violence conjugale chez les lesbiennes. J'ai repris ici les catégories de l'auteure qui réfèrent aux types
de compréhension du problème et j'ai fait des ajouts.
La négation de l'existence de la violence dans les relations amoureuses chez les lesbiennes a
pour effet de maintenir le silence sur cette r6alit6 et encourage une minimisation des agressions.
Dès lors, on peut comprendre que les femmes qui 18vent le voile sur cette redit6 et qui
confiontent ces préjugés puissent ne pas être crues et non plus supporttks.

Une dewrième réaction est de reconnaître l'existence de cette violence mais de la considérer
mutuelle parce qu'il s'agit de deux femmes. Ici on croit que les lesbiennes detiennent le même
pouvoir dans la relation et c'est pour cette raison que la violence et les effets de celle-ci
diff&xxaient de ceux produits dans les couples h6t6rosexuels. Le fait que les victimes lesbiennes
semblent se defendre davantage que les victimes h&érosexueUes encourage une teile analyse de
la situation. Cette reconnaissance de la violence, sans y voir une agresseure et une victime,
privilegie souvent une intervention auprès des deux femmes, soit une thérapie de couple. Or des
réserves sur ce type d'intervention dans les situations de violence conjugale ont 6te soulevt5es.
Une recherche 6valuative (Rinfret-Raynor, Pâquet-Deehy, Larouche, Cantin, 1992) portant sur
l'efficacité de l'intervention en violence conjugale, a d6montré qu'une intervention centree sur la
victime plutôt que sur le couple s'avdrait plus efficace. Malgré qu'il soit possible que deux
femmes issues du même couple se violentent mutuellement, Hart (1986) insiste davantage sur le
fait que les lesbiennes violentes, tout comme les hommes violents d'ailleurs, ont tendance ii se
voir violentées par leur victime.

Une autre reaction fréquemment observée, tant chez des membres de la communaute
lesbienne que dans la sociét6 en gdntral, est que la violence ne peut se produire que dans des
couples lesbiens reproduisant des rôles sexuels stér6omés. On refère ici aux couples où l'une
des partenaires aura des allures plus masculines, une femme rbutchw par exemple, et I'autre
aura des ailures plus typiquement considtrees comme feminines. On fait alors un lien entre
l'apparence physique et le rôle joue dans le couple pour automatiquement attribuer les
Comportements de violence à la femme qui semble s ' i d e n ~ e àr un homme et qui, dans ce rôle,
abuserait de son pouvoir. À ce sujet' Caldwell et Peplau (1984) remarquent, dans leur recherche
sur les couples lesbiens, l'absence d'evidences pour supporter l'idée que l'apparence physique
est une variable qui détermine les rôles l'intérieur des couples lesbiens.

Non seulement ces chercheures suggèrent que ce n'est pas ddtenninant dans l'équilibre du
pouvoir, mais elles considerent que cette idee est de l'ordre du mythe. Il existe differents
mod&lesde couples chez les lesbiennes et aucun de ces mod&lesne met à l'abri de la violence.
C'est-à-dire que la violence peut aussi exister dans un couple compose de deux femmes aux
«allures plutôt f&ninines». Finalement, il n'est pas n&essaire de ressembler à un homme pour
user de violence.

Enfin, un autre mythe est de croire que la violence ne peut exister que dans des couples
lesbiens où les partenaires ne se reconnaissent pas comme féministes. Sous ce mythe, il y a une
double presomption : le fait de s'identifier comme lesbiennes f6ministes. prônant des relations
égaütaires, constituerait une assurance>> contre la violence; les lesbiennes reproduisant des rôles
st&eotypés dans leur couple ne seraient pas f6rninistes et constitueraient un groupe où l'on
risque de trouver plus de violence conjugale.

Le danger d'entretenu de tels mythes est de ne considerer l'existence de la violence que


chez certains types de lesbiennes. Ceci a pour conséquence d'individualiser le problbne et
d'encourager une proposition de solutions basées sur un modèle construit sur des idtes fausses
qui representent plus nos malaises envers le lesbianisme qu'une exploration sérieuse de la
violence chez les lesbiennes.

2.3.5. Les besoins des victimes.

2.3.5.1. Besoins de toutes les femmes victimes de violence.

Larouche (1987) parle de trois catégories de besoins a combler, soit les besoins d'ordre
physique, Crnotif et social. Les besoins d'ordre physique sont ainsi défmis : soins de santé,
hebergement, s6curité financihre et juridique. Au niveau émotif, l'auteur spécifie que les victimes
ont besoin d'écoute, de chaleur, de compréhension et de respect dans leur cheminement Sur le
plan social, elles ont besoin de vaincre leur isolement

Le premier besoin des femmes violentées est d'abord celui d'être crue. Pour ce faire, il est
important que les intervenantes prennent une position claire contre la violence en recomaissant
qu'elle appartient à celui (ou à celle) qui l'exerce. Toutes doivent être rassurées sur la
confidentialité et la s~curïttdes lieux, surtout pour celles qui craignent pour leur vie. Eiles ont
egalement besoin d'être soutenues dans ce qu'elles vivent et entreprennent, mais aussi d'être
informées des ressources existantes pour leur venir en aide. Il est nécessaire qu'elles puissent
exprimer ouvertement ce qu'eues vivent sans avoir peur d'être jugées. Avoir la possibilite de
parler de leurs sentiments et d'aborder l'analyse qu'elles font de la situation tout en ttant validees
dans les moyens qu'elles utilisent pour survivre. Elles ont besoin aussi de comprendre les
rouages de la violence conjugale et les causes de celle-ci pour amiver B se déculpabiliser et il se
donner la possibilite de developper et d'expérimenter de nouveaux comportements
(Bilodeau, 1990).

Les victimes ont besoin de soutien dans les moments de crise et tout au long de leur
dernarches. Une aide concrète doit être apportée (soins médicaux, logement, information sur les
services, etc.), en plus d'accorder une importance au travail sur l'estime de soi et sur les
emotions liees à la violence (Rinfret-Raynor, Paquet-Deehy, Larouche, Cantin, 1992). Selon la
Fédération des ressources d'hébergement pour femmes violentées et en dificulté du Québec et le
Regroupement provincial des misons d'hébergement et de transition pour les femmes victimes
de violence conjugale (1994)' des services à moyen et à long terme sont essentiels pour
restaurer l'estime d e soi des femmes et pour favoriser une ventable reprise en charge. Les
femmes hébergées et les intervenantes des maisons d'hébergement identifient clairement les
besoins de services de suivi post-hebergement (individuel et de groupe). Ces services, en plus
de contribuer la dt5victirnisation des femmes violentées, diminuerait le ph6nornhne des «portes
tournantes» (idem, 1994: 17).

2.3.5.2. Besoins spécifiques des femmes lesbiennes victimes de violence.

D'abord et avant tout, Les lesbiennes ont besoin que la double stigmatisation dont elles font
l'objet soit prise en compte en intervention. En effet, elles sont victimes de violence conjugale
dans le cadre d'une orientation sexuelle qui est hors de la norme. À cause de l'homophobie
possiblement rencontrée, une lesbienne peut choisir de dkclarer ou de rester silencieuse sur son
orientation (Guay et O'Brian, 1995). De plus, en maison d'hebergement, les résidentes e t les
intervenantes peuvent manifester de l'homophobie. Ceci démontre l'importance que les
intervenantes reçoivent une formation adequate sur la violence conjugale chez les lesbiennes
(Demcnik et al., 1995: 12).

Au niveau de leur s&xrité, il peut y avoir un problème puisque toutes les femmes (y
compris la conjointe violente) ont la possibilité d'obtenir l'adresse d'une maison d'hebergement
et de s'y rendre sans aucune mcuIt& en invoquant qu'elles sont violentées (Hart, 1986). Guay
et O'Brian (1995) suggerent de donner une autre adresse à l'ex-conjointe d'une lesbienne
violentée qui se présenterait comme une femme elie aussi violentée. Le réseau des maisons
d'hebergement est suffiamment grand pour qu'elle puisse aller ailleurs.
Les chercheures Porat (1986) et Renzetti (1989). qui ont demontré que les victimes de
violence conjugale issues de couples lesbiens se defendent davantage que les autres victimes,
soulignent qu'il est essentiel, quand on intervient aupres de ces femmes, de démystifier
I'autodefense et le désir d'user de la violence. La violence conjugale ne doit pas être minimisée
au profit d'une analyse qui porte à croire qu'il s'agit d'une violence mutuelle (Porat, 1986).
Selon cette auteure, les intervenantes doivent examiner leurs préjugés de près pour commencer il
faKe de I'bducation ce propos et ce, dans la socibté en g6n6ra.i.

En ce qui concerne les besoins en terne de services, il apparaît que le reseau des services
sociaux «(...) n'est pas adapté pour accueillir et répondre aux besoins des lesbiennes en g6nh.b
(Demcnik et al., 1995: 11). Divers ateliers pour lesbiennes realisés par Mbrents groupes de
femmes ont permis de constater une absence de ressources adequates pour soutenir les
lesbiennes victimes de violence conjugale. Celles-ci ont donc souvent recours aux services d'une
professionnelle privee, mais eues n'ont pas toutes les moyens de se payer ces services (idem,
1995).

2.3.6. La recherche d'aide.

Angele Bilodeau (1987) s'est intéressée aux stratt5gies de recherches d'aide des femmes
h&érosexuelles victimes de violence conjugale. Elle demontre que la mani5re d'uuliser les
réponses du milieu et leur effet sur la violence distingueraient les dkmarches de recherches d'aide
les unes des autres. Elle distingue trois types de d6marches qui ont un effet variable sur la
continuation ou l'arrêt de la violence. Il s'agit des démarches centrees sur la confidence, le
cumul des moyens et la prise en charge vers le changement. Indépendamment de la ressource, il
ressort qu'une réponse efficace doit comporter une proposition de moyens, une aide concrète et
un engagement personnalis6 et soutenu qui oriente vers le refus et la cessation de la violence.
Renzetti (1992),qui a fait des recherche auprès de victimes lesbiennes, dhontre elle aussi qu'il
existe un lien entre le soutien accorde la victime lesbienne et le bris du cycle de la violence.

L'abandon elevb du nombre de plaintes au criminel d6post?es par des femmes


h&érosexueiles victimes de violence conjugale est révelateur d'un malaise des victimes face au
systeme judiciaire. Ce système, en plus d'avoir le mandat de protéger les victimes et de réprimer
les gestes violents peut, de l'avis de certains auteurs, devenir un outil d7~empowennentwet donc
contribuer à la d&M.misation des femmes18. Mais le malaise des victimes lesbiennes face au
système judiciaire, pouvant s'expliquer entre autres choses par i'homophobie et l'hétérosexisme,
est tel qu'il ne facilite en rien la reprise de pouvoir des lesbiennes sur leur propre vie (Demczuk
et al., 1995: 13).

Tel que mentiornt5 précbdemment, les ressources pour les femmes violentées peuvent être
tout aussi imprégnées de préjugés I'egard des l e s b i e ~ e que
s le reste de la sociétt5. Il ressort de
la recherche menee par Renzetti (1992) que les femmes l e s b i e ~ e violentées
s par leur conjointe
ne fréquentent pas les ressources pour femmes victimes de violence conjugale. Dans son 6tude,
sur les treize femmes qui sont allees chercher de l'aide auprès de ces ressources, neuf d'entre
elles affirment que leurs besoins n'ont pas été satisfaits. Les peurs entretenues à l'égard des
l e ~ b i e ~lae haine
~ , envers elles, le langage h6t&osexiste7ont et6 des 616ments qui ont influencé
les lesbiennes violentées dans leur recherche d'aide.

Martin et Lavoie (1988) ont men6 une recherche sur les attitudes et les mythes auprès des
intervenant(e)s de prerni8re ligne ii 176gardde la violence conjugale chez les ht5térosexuels. Les
mythes qui demeurent présents sont relies aux rôles d'une femme et à sa responsabilit6 dans la
situation de violence.

La part de responsabilité accordee à la victime dans une situation de violence est parfois
interpretée comme un @juge (Brunet, 1987; Lavoie et Martin, 1988). Par ailleurs, d'autres
considkrent qu'il s'agit d'une violence mutuelle entre conjoint(e)s (Lie, Schilit, Bush,
Montagne, Lynn, 1991). En ce qui concerne la violence chez les lesbiennes, la plupart des
chercheur(e)s ont porté leur attention sur les comportements violents en n'accordant pas, au
dgpart, d'attention la position de victime ou d'abuseure. Ce qui amène Renzetti (1992) à faire
une mise en garde à l'effet qu'il ne faut pas interpreter de la même façon une agression et une
Iegitime défense. L'interpretation faite est determinante dans l'aide et le soutien accordés. Ce qui
est confïm6 également par des ressources qukbécoises intervenant auprès des victimes : dl va
de soi que la compr6hension de la cause, des effets de la violence et des normes sociales
innuencent directement la quaiïte de l'aide et du supportd9.

l8 Fédération des ressources d'hébergement pour femmes violentdes et en difficult6 du QuCbec et le Regroupement
provincial des maisons d'hébergement et de transition pour les femmes victimes de violence conjugale (1994); CRI-
VIFF, 1995.
l9 Cf. Féd6ration des ressources dVb&bergement pour femmes violentées et en difficult6 du Quebec et le Regroupement
provincial des maisons d'hkbergement et de transition pour les femmes victimes de vioIence conjugale, 1994: 12.
Pour que les femmes i e s b i e ~ epuissent
s recevoir une aide, on doit reconnaître l'existence
de la violence conjugale dans les couples lesbiens. Pour que les victimes puissent briser leur
isolement, il faut briser le silence entourant cette problématique dans la population en gdn6ral et
dans les communaut6s lesbiennes. La recherche de Renzetti (1992) démontre que les femmes
lesbiennes et violentees ne sont pas souvent crues par la police et les autres ressources
d'urgence.

2.3.7. Synthèse de la revue de littérature.

Bien qu'il soit difficile d'évaluer l'ampleur du problème, les statistiques &tantinexistantes
en ce qui concerne la présence de la violence dans les relations amoureuses chez les lesbiennes,
nous savons que ce problkme existe. Malgré le fait que l'on retrouve les mêmes formes de
violence que chez les couples hétérosexuels, les auteurs dénotent une prédominance de violence
psychologique chez les lesbiennes et une présence moins marquee de la violence physique. De
plus, la legitune défense est plus usuelle chez ces derni5res, ce qui doit être pris en consid6ration
en intervention. Les facteurs de risques sont à peu de choses près les mêmes que chez les
h6térosexuelles. mis A part I'hétérosexisme et l'homophobie qui font uniquement partie de la
trame de fond chez les lesbiennes.

Le cycle de la violence, documente chez les femmes hétérosexuelies, est aussi présent chez
les lesbiennes. Cependant, les lesbiennes sont plus isolees socialement que les femmes
hétérosexuelles. Les prkjugés véhiculés à leur egard constituent toujours une barri&reimportante
qui peut amener certaines lesbiennes ne pas chercher d'aide. En ce qui concerne l'analyse de la
violence chez les lesbiennes, elle glisse facilement vers une perception de violence mutuelle
parce qu'il s'agit de deux femmes et que les victimes lesbiennes semblent se defendre davantage
que les victimes hét&osexuel.ies.

Les lesbiennes violentées qui ont besoin d'être crues et soutenues rencontrent de véritables
bhtxes, c'est-à-dire l'homophobie et l'h~térosexisme.Actueiiement, les services d'aide pour
les victimes de violence conjugale ne sont pas aptes à intervenir auprès des femmes lesbiennes
violentées par leur conjointe.
C a A f ITRE III

CADRE CONCEPTUEL

3.1. Les différentes théories explicatives des causes de la violence


conjugale.
La recension des écrits permet de distinguer trois courants de pensee dans l'analyse des
causes de la violence conjugale. soit les approches psychologique, sociologique et structurelle
qui se distinguent les unes des autres comme nous allons le voir ci-après. Dans ce chapitre, je
traiterai particuli&rementde l'approche smctureUe en mettant l'accent sur l'analyse feministe, q u i
est le cadre de référence retenu dans cette étude,

Les approches psychologiques rejoignent les approches psychanalytiques et


pathologiques. Pour expliquer l'origine de la violence, elles ont pour prémisse le
dysfonctionnement de l'individu. En psychologie, on decrit l'agresseur comme ayant un
fonctionnement pemubé de son ego, c'est-&-dire qu'on relie les comportements violents il des
troubles vecus durant l'enfance. Ainsi, ce type d'analyse, développa dans la foulée de Freud,
considere l'homme violent comme une personne malade et donc irresponsable de ses
comportements violents. De plus, Freud s'est attardé au concept de «masochisme féminin»,
lequel supporte l'idée que la femme entretient la violence conjugale, la punition et l'humiliation
parce que ces états sont une sorte de <<gratificationmasochiste», ce qui a pour effet de
responsabiliser la victime de la violence qu'elle subie. D'autres analyses psychologiques ont
identifié la source du probléme de la violence comme pouvant être dans le pattern de la relation.
En d'autres mot, elle serait liée il un dysfonctionnement dans la dynamique de couple (O'Leary
& Vivian, 1990). Or ii est demontre ailleurs que la violence des conjoints violents se dkplace
d'une relation il une autre (Oueiiet, Lindsay et St-Jacques, 1993) independamment du pattern en
question.

En ce qui concerne les approches pathologiques, les causes de la violence sont expliquées
2 partu de la maladie mentale. Ainsi, le degcé de sMrité des actes de violence serait lit au degr6
de désordre de personnalité du conjoint (O'Leary, 1993). Également, selon cette perspective, la
toxicomanie et l'alcoolisme, perçues comme maladie, pourraient expliquer l'origine de la
violence20. Les recherches menkes à partir de ces théories explicatives de la violence ont été
fortement critiquees par Straus et al. (1980) et Gelles (1979) qui remettaient en question
I'dlaboration des hypothèses et Les échantillonnages, et donc les résultats de ces Btudes. Malgré
la présence de 1' alcool qu'on retrouve chez plusieurs conjoints violents21, il apparaît évident
pour Gelles et Straus (1988) que l'alcool est un declencheur plutôt qu'une cause de la violence.
L'alcool serait un désinhibiteur qui permettrait aux hommes violents de se déresponsabiliser,en
quelque sorte, face à leurs comportements violents.

Pour expliquer l'origine de la violence, le courant sociologique s'appuie pour sa part sur
l'apprentissage de la violence ou sur une reaction face des situations stressantes. Les
approches sociologiques regroupent les théories liees l'apprentissage social, à la socialisation
en fonction des rôles et aussi les theories liées au stress socio-&onornique. Les théories de
l'apprentissage social postulent que les comportements violents sont appris. Il s'agirait d'une
transmission intergt5n&atiomelIe, d'une forme d'identification à l'agresseur et ce, que I'enfant
soit victime de violence (Bandura, 1973) ou ternoin de la violence entre ses parents (Kalmuss,
1984; MacEwen, 1994).

De plus, la socialisation qui conduit les hommes et les femmes à adhérer A des modèles
rigides de masculinité et de férninite expliquerait l'origine de la violence. D'après Pagelow
(198 l),l'adhésion à une idéologie traditionnelie dans un couple contribuerait à la violence. Plus
particulièrement, les rôles distincts conduiraient à une mauvaise communication qui engendrerait
cette violence.

Des facteurs environnementaux peuvent aussi être pris en compte. Bien qu'on reconnaisse
que la violence est présente dans toutes les couches socio-économiques, le risque augmenterait à
20 À ce sujet, voir :Rinfret-Raynor. Oueilek Cantin. CYment (1996: 3 1-32) qui ont abordé ce phenomihe particulier.
21 L'enquste de Statistique Canada (1993) a démontré en effet qu'il y a présence d'alcool chez plusieurs conjoints qui
commettent des actes de violence dans leur couple.
partir de certaines conditions de vie plus stressantes. Par exemple, la perte d'un emploi, la
pauvreté qui créent un stress important, affecteraient les individus et leurs comportements, ce qui
augmenterait l'occurrence de violence (Oueliet, 1995). Selon cette perspective, la source de la
violence s'inscrit dans le cadre des Mgalités sociales structurelles, des attitudes et des normes
cultureues,

Carrier et Grenier (1982) soulignent que les approches sociologique et psychologique


confondent les facteurs associés la violence avec ses causes premi5res. Cette indifrenciation
entre les facteurs déterminants et les facteurs précipitants a un impact direct sur l'analyse de la
violence et, conséquemment, sur l'intervention auprès des victimes et des agresseurs. À cet
égard, Jurgen Dankwort (1988) fait Btat du problème posé par l'absence de distinction dans ce
courant, entre un acte violent et la légitime defense. De ce point de vue, il n'y aurait pas de
ciifference entre une femme agressée illégitimement et une femme qui se défend légitimement
contre une agression. Ce qui revient considem une victime qui se ddfend contre une agression
comme une personne violente. On peut donc voir une victime comme un agresseur.

Finalement, l'approche structurelle ou politique situe les causes premières de la violence


dans la structure même de la soci6tB à partir de laquelle eiîe est organisee. L'analyse fBrniniste
fait partie de cette approche. Dans une dynamique de violence conjugale, la perspective fBministe
identifie clairement les femmes et les enfants comme les victimes et les hommes comme les
agresseurs. La sociétB sexiste et patriarcale est ici pointée du doigt comme l'est Bgalement la
responsabilité individuelle de l'homme. En effet, selon Schechter, la violence (conjugale) est
«(...) perçue comme étant construite par la societé et choisie par l'individu» (1982: 108). Pour
les tenant(e)s de l'approche fBministe, les aspects socio-politiques, les questions de pouvoir et
de contrôle sont centrales. Pour Larouche : a(...) la violence sert de moyen aux hommes pour
assurer leur domination et le maintien des régles culturelles, sociales et bconomiques» (1987:
34). Selon Frankel-Howard (1989), la violence trouve son origine dans l'histoire et eue est
renforcée par diffdrentes institutions. L'institution de la famille est particulitxement ciblee par
Pahl(1985). Le principal reproche qui est fait iice courant est d'expliquer la violence par une
ideologie qui ne s'appuie pas sur des recherches empiriques (Rinfret-Raynor et Cantin; 1994: 7).
Par contre, on reconnaît l'apport d'une tel analyse en violence. En effet, une recherche
hluative a démontré que l'intervention auprès des femmes violentées en milieu conjugal &ait
plus efficace si eue d&oulait d'une analyse feministe de la probldmatique (Rinftet-Raynor et al.,
1992).
3.2. L'approche féministe.

Iï est important de signaler que certains fondements de l'approche feministe ne


s'appliquent pas ou s'appliquent diff6remment dans une situation de violence conjugale chez les
lesbiennes, c'est-à-dire quand il est question de la violence d'une femme envers une autre
femme. Ce qui revient à dire, dans ce cas particulier, que la perspective feministe pose certaines
limites.

Selon la perspective feministe, les fondements de l'analyse de la violence conjugale


reposent sur la socialisation et sur le patriarcat. En d'autres ternes, les raisons qui expliquent ce
type de violence relevent d'un rapport de domination homme-femme. Ce rapport serait la
résultante d'une «historicisation» selon une certaine logique culturelle d'organisation
predestinant le genre masculin aux positions de pouvoir politique au detriment des femmes
prédestinées, elles, à être contrÔl&s (Savard, 1992). Effectivement, on peut difficilement nier la
diEf6rence de socialisation des garçons et des filles. À cet égard, il est important de signaler que
les stéréotypes caractérisant le genre féminin tels la douceur, la passivité, la censure à la c o l h et
l'oubli de soi, limitent le développement des capacités affirmatives (Paquet-Deehy, Rinfiet-
Raynor, Larouche, 1989) et la prise de pouvoir des femmes sur leur propre vie. De plus, les
questions d'in6gaiiî.é~entre les hommes et les femmes sont inhkrentes à la structure patriarcale de
la societé et ce qu'elle implique concr&ement En effet, force est de constater que les
institutions sociales, &onorniques et judiciaires n'accordent pas la même place, ni les mêmes
droits aux hommes et aux femmes dans notre societé. Bref, il appamît clair que les steréotypes et
les droits des individus varient en fonction du sexe.

Dès lors, si l'on s'en tient uniquement à l'analyse de genre pour comprendre et analyser la
violence conjugale chez les lesbiennes, quelques apparaissent. D'ailleurs, parmi les
auteur(e)s se preoccupant de la violence chez les couples homosexuels, certains idenment la
résistance à reconnaître la violence chez les lesbiennes la croyance que la violence est un
probkme masculin, patriarcal (IMne, 1990). D'après Letellier (1994)' l'analyse de la violence
qui porte uniquement sur les rapports hommes-femmes serait responsable de IYinvisibilit6de la
probl6matique de la violence conjugale chez les homosexuels et les lesbiennes. D'après YU6
(1993), les causes de la violence ne peuvent se réduire qu'a la soci6t6 patriarcale. Ce qui amène
DescafTies-Bélanger (1994) à souligner que l'analyse à partir de la seule variable de sexe est une
embltche au fërninisme. Dans ce même ordre d'idée, si la violence est uniquement consid6rée
comme le résultat ou I'aboutissement des inegalités liées au sexe et à la socialisation, comment
peut-on croire, d'une part, qu'une femme puisse violenter sa conjointe et, d'autre part, comment
peut-on expliquer cette violence puisque les femmes sont socialisées à devenir des victimes?

N&nrnoins, face à ce constat, certaines chercheures et des groupes de femmes ont propose
l'idee de conserver l'approche f6ministe pour analyser la violence conjugale chez les lesbiennes.
En effet, certains éléments de l'analyse feministe s'appliquent aussi à la violence chez les
lesbiennes :
R W can~ transfer some of our understanding of violence in heterosexual
relationships into an analysis of violence in lesbian relationships. Violence is
still an issue ofpower and controL It is a leamed behaviour and it is a choice
women who batter are choosing to do i t w (Papsco, 1993: 27).

La violence ne serait pas uniquement un rapport de domination homme-femme.


Cependant, l'id6e d'une domination peut être conservbe, mais celie du sexe n'est pas
exclusiveu. Pour sa part, Renzetti retient aussi l'analyse fi?ministe, cependant elle considère que
celle-ci n'est pas uniquement basee sur l e genre: Feminist theorists, however, are not
unidimensionally focused on gender (1994: 196). Mon experience comme intervenante
f6ministe en maison d'hebergement m'a amenée à constater que l'application du cadre tht5orique
feministe dans la pratique parait être axée presque uniquement sur le genre. Quoi qu'il en soit, la
tendance actuelle est d'approfondir la perspective feministe traditionnelle. Le cadre conceptuel
préconisé est basé sur la demarche proposée par les fkministes contemporaines ayant travaille sur
la question. Elles s u g g h n t de pousser plus loin l'analyse en la complexifiant :
(<Ourfeminist analyses of violence against women are applicable tu
understanding violence in lesbian relationships. (...) But despite this cornmon
ground with male violence against women, the context of violence in lesbian
relatiomhips is slightly different: we will not undersmnd iesbian violence wtil
we broaden the conceptual fiamework tu explore the impact of
infernalized heterosexism and humophobia » (Ristock, 199 1: 75).

D'ailleurs, au Quebec, Demczuk et a1.(1995) ont propose au Comité interministériel de


coordination en matière de violence conjugale et familiale d'inclure à l'approche feministe les
effets de l'hbt&osexisme et de l'homophobie afin de comprendre la violence conjugale chez les
lesbiennes23.

22 Ii importe ici de faire une mise en garde sur l'interprétation hfitive qui pounail etre faite de ce qui est avancé. Cette
façon de voir ne veut en aucun cas banaliser la violence des hommes envers les femmes ou laisser croire qu'il y a
autant de femmes violentes que d'hommes violents. Ce serait un manque de discernement que d'affirmer une teiie
chose.
23 il s'agit d'une proposition d'inclusion d'un volet sur la réalitt lesbienne pr6sent6 au Cornit6 iotemwiist&iel de
coordination en matière de violence conjugale et familiale.
il s'agit donc toujours d'une lecture fi5ministe s'appuyant sur les rapports de pouvoir. La
violence conserve sa même définition, c'est-à-dire qu'elle sert à maintenir ou instaurer un
pouvoir, un contrale sur l'autre. Mais le contexte plus large dans lequel se vit cette violence doit
être pris en compte. Dans le contexte de la violence chez les lesbiennes, il s'agit d'accorder une
importance à la structure hétt5rosexiste de la société. Cette structure permet à la culture
hMrosexuelle de dominer la culture homosexueUe. Ce qui a pour conséquence que les
institutions sociale, économique et judiciaire n'accordent pas la même place, ni les mêmes droits
aux hétérosexuelies et aux homosexuelles dans notre société. Ce qui revient à dire que les droits
des individus varient en fonction de leur orientation sexuelle. De plus, d'autres 6Ements peuvent
être ii consid&er, comme le rapporte Demcnik :
«D'un point de vue social, il importe de souligner que la violence entre
lesbiennes n'est pas une violence systhique :elle est un moyen d'assurer le
contrôle personnel d'une individue sur sa partenaire. Elle n'est pas soutenue et
renforcée par le manage et la famille, la dépendance économique, la division
sexuelle du travail, l'inégalité salariale statutaire entre les sexes et un syst&me
judiciaire plus tolérant envers l'agresseur. Elle n'est pas encouragée
directement par la t6lévision, le cinéma, la pornographie. La violence des
hommes envers les femmes, si» (1993: 6).

Si l'homophobie est considérée pour analyser la violence dans les relations amoureuses
chez les lesbiennes, ce n'est pas pou.excuser l'agresseure. En effet, le rejet et la violence que
subissent les lesbiennes de la part de la soci6té ne doivent pas être considérés comme une cause
de la violence exercée. À cet égard, Hart (1986) ne voit pas dans la violence une rkponse à
l'oppression. Selon eue, la consideration d'une injustice subie ne doit pas nous amener à
négliger la capacité à choisir d'être violente. La recherche d e Bologna, Wateman, Dawson
(1987) appuie l'idée que l'homophobie affecte signiucativement l'estime de soi des lesbiennes ce
qui contribuerait à leur isolement. Or l'isolement social qui résulte d e la haine entretenue à leur
6gard contribue 6galement à la violence dans les couples de lesbiennes. Les chapitres cinq et six
permettront une application de cette analyse.
CHAPITRE IV

4.1. La méthode de recherche.


qu'émerge la cornplexit6 du vecu des victimes lesbiennes, sans complktement
determiner au prealable ce qu'il pouvait être, une approche qualitative fut favoriste. C'est
également par souci des retombées que pourrait avoir cette recherche sur la pratique, qu'une
grande place fut accordee à la perception des lesbiennes. En effet, je crois que la qualité d'une
intervention repose, entre autres, sur la capacité tenir compte du propre vécu des femmes et de
leur système de valeurs et de croyances.

Un autre niveau de préoccupation a favoris6 le choix d'une approche qualitative. Comme


les recherches réalisées auprès des lesbiennes ont demontre que la violence psychologique etait
un type de violence que l'on retrouve couramment, la mCthodologie de recherche devait
permettre de rendre compte de cette dimension de la violence. De plus, considérant la lunite
reprochée aux instruments d6veloppb pour mesurer la violence, c'est-&-dire ceiie accordant la
priorite à l'agir au détriment de la perception de la violence subie, considérant aussi que les
instruments sont d'une fiabilite et d'une validitt? plus ou moins reconnues (Oueuet, Lindsay et
Clement, 1996), j'ai opté pour une approche qualitative de type pht5nom6nologique :
«(..) la phénom&ologie est une approche qualitative qui tente de pousser plus
loin la volonté de respecter la signification du v&u tel que perçu et d6nni par
les personnes qui sont les sujets d'une recherche» (Poisson, 1991: 27).

Il s'agit en quelque sorte de priviIt5gier la «(...) perception que les sujets ont de la r&lité»
(Poisson, in Lapointe, 1994: 12). Appliquée à notre problématique de recherche, l'approche
ph6nom&ologique a permis, primo, de mieux comprendre le vécu des lesbiennes violentées par
leur conjointe e t secundo ,d'identifier leur besoin d'intervention.

4.2. La population de l'étude.


Il est question bien sûr d'un échantillon non probabiliste, c'est sur une base volontaire que
les lesbiennes ont participe à l'étude. Je souhaitais au départ interroger une dizaine de femmes
lesbiennes victimes de violence conjugale. Neuf ont Btt5 rencontrees. Cependant une des
entrevues n'a pu faire partie du corpus d'analyse pour la raison suivante :il s'agissait d'un acte
isolé de violence, la dimension de la répétition d'un comportement violent n'btait pas présente. Ii
peut pmAtreétrange d'avoir un si petit échantino~age,mais il faut considerer qu'une approche
qualitative n'a pas comme objectif de tirer des g6n6ralites. Cette Btude veut au contraire
démontrer la cornplexit6 et la diversité des situations possiblement rencontrees. Comme le
souligne Jean-Pierre Deslauriers :
«Larecherche qualitative est plutôt intensive en ce qu'elle s'intéresse surtout
des cas et à des échantillons plus restreints mais Ctudies en profondeur»
(Deslauriers, 1991: 6).

Les neuf repondantes ont et6 rejointes par divers moyens, notamment par l'intermédiaire
dYaffiches ou d'annonces placées dans des journaux homosexuels et des revues lesbiennes24,et
aussi à partir de la methode de la tierce personne. La technique d'échantillonnage de type aboule
de neige» qui consiste «(...) ajouter à un noyau d'individus (des personnes consid6rt5es
comme influentes par exemple) tous ceux qui sont en relation (d'affaire, de travail, d'amitie.
etc.) avec eux et ainsi de suite» (Beaud, In Deslauriers, 1991: 58), a aussi et6 utile pour
rejoindre les femmes de Mude. Voici les premiers critères établis auxquels devaient rependre
Ies femmes de l'étude :
1) vivre ou avoir vecu une relation de couple avec une femme;

24 Cf.Annexe A et B.
2) vivre ou avoir vécu de la violence (psychologique, verbale et / ou physique) de la part
de sa conjointe;
3) si la relation etait terminée, eiie devait l'être depuis moins d'un an.

Le troisième crit5re avait et6 retenu pour s'assurer que la memoire ou les souvenirs des
répondantes ne soient pas altérés par le temps. Mais constatant le peu d'appels e16phoniques que
je recevais pour participer à la recherche, j'ai dû ajuster et élargir les criteres aux relations dont la
rupture pouvait remonter à six ans. J'ai pris la peine de v6rifier par Mkphone avec la rdpondante
s'il y avait eu plusieurs incidents de violence (notion de &petition) avant de faire l'entrevue pour
eviter le probleme rencontre précédemment.

Des diffcuit& pour le recrutement avaient et6 anticipés puisqu'il n'est pas facile pour
toutes ces femmes de revéler, d'une part, leur orientation sexuelle et, d'autre part, d'avouer
qu'eues sont victimes de violence dans leur couple. De plus, subissant l'hornophobie, ces
femmes pouvaient avoir une mefiance (légitime) à l'égard de ce qui serait fait des résultats de la
recherche. Pour ces raisons, il a et6 dacile de trouver des repondantes. Il m'aura fallu plus
d'un an pour recruter neuf femmes.A titre anecdotique, et pour illustrer l'ampleur des difficultés
rencontrees durant le recrutement, une annonce2s, comme on en retrouve couramment pour le
recrutement de repondantes, avait et6 soumise au Fil des événements,journal de l'université
Laval. Cependant, de nouvelles exigences sont apparues à la soumission de cette annonce.
S'agissait-il d'un hasard ou d'un sujet qui paraissait trop délicat? Il n'en demeure pas moins que
l'annonce n'a pu p a r a b dans ce jomal.

Plus concrétement, voici comment le contact se faisait avec les répondantes. C'est par
l'entremise d'une boîte vocale, pnvee et réservée ii cet effet, que les femmes laissaient leur
coordonn6es. Vous trouverez en annexe le protocole de prise de contact utilisd lorsque je
retournais les appels26. Un rendez-vous Ctait fixe au jour, l'endroit et à l'heure qui convenaient
à la personne. Un grand soin fut accorde à la confidentialité. Également, une formule de
consentement qui decrit l'engagement des répondantes et des chercheures impiiqu&s dans cette
étude fut c0rnplét6e~~.

Lors de l'entrevue, pour instaurer un c h a t de confiance, je rassurais les femmes sur la


confidentialité et l'anonymat. J'expliquais à nouveau le but de la recherche en mettant l'accent

25 Cf. Annexe B.
26 cf.Annexe C.
27 cf.Annexe D.
sur l'importance de développer des senrices appropriés pour elles ou pour ajuster ceux dejjà
existants. Une fois que la confiance semblait sufïisamrnentinstallée, les femmes &aient à I'aise
pour partager leur perception et leur analyse de leur v6cu et de l'aide B d6velopper. Vous
trouverez au chapitre suivant des renseignements plus precis portant sur les caractéristiques des
répondantes.

4.3. La collecte des données.

C'est par la technique de l'entrevue individuelle non directive mitigee et A l'aide de


questions ouvertes que j'ai rthiisé la recherche auprès de ces femmes. Cette semi-directivite est
ainsi decrite par Michelat :
«Le chercheur se laisse d'abord diriger par la spontan6it6 de son interlocuteur
sur chaque thème à la suite d'une question ouverte; mais le chercheur sert de
guide aussi pour s'assurer que toutes les composantes importantes du théme
soient abordées durant l'entretien» (Michelat, 1975, in Mayer et Oueilet, 1991:
315).

Cette approche fut retenue dans un contexte où la souplesse Etait de mise. Ainsi, j'ai pu
prendre connaissance des perceptions qu'ont les répondantes des divers themes liés illa violence
conjugale chez les lesbiennes. Avec l'accord des rkpondantes, toutes les entrevues ont pu être
enregistrees.

Le sch6rna d'entrevue, que l'on retrouve en annexe E, comportait deux volets. Le premier
traitait de l'experience vecue au niveau de la violence. Un premier bloc de questions avait pour
but de mettre en contexte la relation, ensuite nous entrions dans I'experience de violence et plus
particulièrement les types de violences vecues, l'agir de I'agresseure, la reaction de la victime,
les conséquences de la violence et enFm les explications des causes et les facteurs relies à la
violence etaient abordes. Le second volet portait sur leur expérience de recherche d'aide et les
diffi5rents besoins des lesbiennes violentées en regard des services d'aide. Les entrevues ont et6
rMi&es entre le mois d'aoot 1995 et le mois de janvier 1996. La durée de chacune d'elles varie
entre une heure et demie et deux heures et demie.
4.4. L'analyse des données.
R s'agit d'une analyse qualitative du contenu de la representation (contenu manifeste).
Toutes les entrevues ont été retranscrites intégralement Chaque entrevue contient de 83 il 138
pages, le corpus total comprend plus de huit cent pages. J'ai par la suite procedé à l'analyse de
contenu du matériel afin de comprendre le sens que les femmes donnent à leur experience.
L'analyse de contenu est d'ailleurs definie par Mayer et Ouellet comme 1'«( ...) analyse
systématique des idées contenues dans un texte qui peut s'appliquer à des k i t s ou à des
communications verbales» (1991: 493). Le choix de cette m&hode d'analyse etait directement lie
à l'objectif de recherche qui visait une meilleure compréhension de la violence conjugale chez les
lesbiennes en tenant compte de leur vision à eiies. L'analyse du matériel recueilli a porte
principalement sur la présence et non la frequence des idées, comme le suggèrent certains
auteurs28 en ce qui a trait à l'analyse de contenu.

Après avoir codifie chacune des transcriptions d'entrevues, j'ai procedé à une analyse par
th&me.Les Wmes sont ceux constituant le schema d'entrevue et kgalement ceux apparus dans
les propos des femmes. Il s'agissait d'abord d'effectuer une lecture verticale, c'est-à-dire une
lecture de chacune des entrevues, durant laquelle le materiel a été classe selon le t h h e aborde.
Par la suite, 1' analyse comportait une lecture horizontale des entrevues, c'est-&-dire une analyse
de l'ensemble des experiences partir des thèmes abordés. Comme le souligne Michelat : «On
est ainsi conduit à alterner les lectures verticales des entretiens (en gardant la logique propre à
chacun) et les lectures horizontales pour établir la relation avec les autres entretiens» (Michelat,
1975, in Mayer et Oueilet, 1991: 493).

L'analyse par thème consiste B établir une catégorisation des differentes composantes de ce
theme. Pour ce qui est de l'analyse des manifestations de la violence, je me suis inspirée de
categories ddveloppdes par d'autres auteur(e)s et je les ai e ~ c h i e às la lurnikre des propos des
femmes. Ainsi. on retrouve l'analyse des manifestations de la violence physique et celle des six
composantes de la violence psychologique. En ce qui a trait aux autres thèmes analysés dans le
cadre de ce memoire, il s'agit de cat6gorisations d6veloppées partir des idees a v a n c h par les
femmes de Mude. On retrouve aux chapitres cinq et six les résultats de cette analyse.

28 Cf.Deslauriers. 1991; écuyer. 1985: Mayer et Oueiief 1991.


4.5. La délimitation de l'étude.
Les limites de cette étude rejoignent celles dejà notées dans d'autres recherches", et sont
liées au fait que les résultats ont Bté obtenus à partir d'un Bchantillon non-probabiliste, compose
de femmes qui se sont portees volontaires. Ainsi, I'Bchantillon est composé uniquement de
femmes blanches et francophones. La plupart ont une bonne éducation, sont de la classe
moyenne et supérieure. De plus, le recrutement ayant &t! fait auprès d'associations de femmes
lesbiennes ou dans des bars pour gais et lesbiennes, ceci porte croire que ce sont davantage les
femmes qui s'affichent ouvertement et qui sont plus int6grées dans la communauté lesbienne qui
ont Bté rejointes. Il est aussi plausible de croire qu'elles avaient déja fait un bon cheminement par
rapport à leur lesbianisme. En effet, accepter de participer une telie recherche implique de
devoiler une double stigmatisation : homosexualit6 ferninine et violence dans sa relation
amoureuse. Double tabou, qui d'ailleurs représente une réelle pour mesurer l'incidence
de la violence (Miller, 1994). Tout porte à croire que les lesbiennes très isolées sont plus
difficiles à rejoindre et qu'elles aumient nifficilement accept.6 de participer à une teile recherche.

Ces lirnites rendent ainsi extrêmement difficile la gBnéralisation des résultats de cette étude
a l'ensemble des lesbiennes victimes de violence conjugale. Ceci &nt dit, les résultats de cette
etude peuvent cependant nous informer sur le v6cu et les vulnérabilités de femmes lesbiennes
évoluant dans un contexte de violence conjugale en faisant emerger, par exemple, tout ce qui
peut entourer un possible devoilement de l'orientation sexuelle. Les propos des repondantes sur
leurs besoins en terme d'aide et de services peuvent aussi nous donner des pistes pour mieux
cerner les besoins de l'ensemble des lesbiennes victimes de violence. Par contre, au niveau des
besoins en terme d'aide il recevoir, il s'agit de ceux identifiés par des femmes ayant pour la
majoritk des ressources fmancières. De plus, ces femmes semblent moins isolées que d'autres
lesbiennes. Iï est ainsi possible que des lesbiennes violentées aient des besoins qui n'ont pas Etc5
mentionnés par les rBpondantes. C'est peut-être là où il faut être plus prudente et ne pas croire
que toutes les lesbiennes victimes de violence conjugale pourraient trouver réponse à leurs
besoins dans les pistes d'intervention que suggère cette étude.

29 Cf. Brand & Kidd. 1986; Keiiy & WarshafsLy. 1987; Louian, 1987; Coleman. 1990: Lie et aL 1991; Rcnzctti,
1992; Chesley et ai., 1992; Demczuk, 1995.
PREMIER VOLET :
ANALYSE DU VÉCU ET DE L'EXPÉRIENCE

La première section du chapitre présente certaines caract6ristiques des répondantes et le


contexte de la relation dont elles allaient me parler. La deuxième section traitera de la violence
vecue, et plus précïs6ment des comportements violents des conjointes et les reactions que les
femmes de l'étude ont eu face à cette violence. La troisième partie portera sur l'identification des
conséquences de la violence sur leur vie. Enfin,la quatrii2rne et demi&repartie permet de dresser
un portrait de ce que les femmes rencontrées ont identifie comme causes et comme facteurs
associés à la violence vécue.

5.1. Caractéristiques des répondantes.

Pour obtenir des renseignements sur les caractéristiques des répondantes30, j'ai choisi de
ne pas proceder à l'aide d'une fiche signalétique. Les questions furent posées verbalement au
début de chacune des entrevues.

30 Cf. Annexe E.
Les huit répondantes qui ont participé à l'étude proviennent de la province de Québec. Sept
d'entre elles vivent dans un milieu urbain. Une des femmes vit dans une région éloignée des
grands centre& Au moment où les entrevues ont été réalisées. du mois d'aoflt 1995 au mois de
janvier 1996, leur âge variait entre 30 et 60 ans. Plus de la moitié d'entre eues se situent dans la
tranche d'âge 30 à 40 ans. Deux des repondantes de l'etude ont des enfants. L'une des deux
n'en avait pas la garde tandis que l'autre était parent unique. Six des répondantes ont une
formation universitaire, les deux autres ont des formations techniques. Elles exercent des
professions reiiees à des domaines vari& tels le milieu des affaires, la relation d'aide,
l'enseignement, les arts, les services. Il s'agit de femmes qui. pour la majorité, sont relativement
à l'aise économiquement. Par ailleurs, une répondante était aux études tandis qu'une autre &ait
en recherche d'emploi et prestataire d'aide sociale.

Toutes m'ont affirme qu'elles révélent leur homosexualité parcimonieusement, en


choisissant à qui elles le disent Trois femmes ont sp&ifié que la r6v6lation de cette confidence
était le fiuit d'un cheminement et qu'il n'en avait pas toujours et6 ainsi. Deux des femmes
kprouvent des avec leurs parents du fait qu'elles sont lesbiennes. Deux autres femmes
ne peuvent pas en parler ouvertement avec leurs parents, quoique ceux-ci le savent Quatre
femmes de I'Btude sont impliquees dans la communauté lesbienne d'une quelconque façon.
Parmi ces dernières, l'une d'eues a une majorité d'arni(e)s h~térosexuel(1e)s.L'autre moitie des
femmes rencontrees n'est pas impliqute dans la communauté lesbienne et a une majorite
d'ami(e)s hétérosexuel(le)s.

5.1.2. En ce qui a trait à leur relation de couple.

Deux des femmes de l'etude en Btaient leur première vraie relation amoureuse avec une
femme. Six d'entre elles avaient déjà eu des relations avec des hommes. Des huit femmes
rencontrées, quatre d'entre elles ne vivaient pas avec leur conjointe. Pour l'ensemble, la durée de
la relation amoureuse varie entre 2 ans et 23 ans. Sept des relations ont eu une durée de 2 ans à 4
ans. Une des femmes vit une relation de couple qui dure depuis 23 ans. Pour les autres femmes
de l'etude, les ruptures ont eu lieu il y a de cela entre 6 mois et 6 ans.

Pour conserver l'anonymat, je m'en tiendrai à cela pou. ce qui est de kur provenance. ïi faut se rappeler que la
conununauté lesbienne est très petite, j e ne voudrais en aucun cas causer de préjudices aux femmes qui ont bien voulu
me faire confiance.
Chez les répondantes, la perception de l'&olution de la relation démontre deux tendances
dans la diversite des parcours. Pour la moiti6 des femmes de I'&ude, leur relation était au depart
une belle relation amoureuse, sérieuse, que cenaines qualifient de «bonheur parfait>».C'est par la
suite que cette relation serait devenue malsaine et empreinte de violence. Pour l'autre moitit5 des
femmes rencontrées, il semble que dès le depart, il s'agissait d'une relation amoureuse qu'elles
qualifient de compiiqu&, conflictueUe et malsaine.

Je ne dispose que de très peu de données sur les conjointes des participantes de l'enrde. Je
note cependant qu'une seule de ces femmes en était à sa première relation homosexueLle.
Finalement, deux de ces femmes ont des enfants : dans un cas il y avait une garde partagee avec
le p&e, et dans l'autre cas, il s'agissait d'une f d e monoparentale.

5.2. Analyse des manifestations de violence.


Avant de présenter les résultats, il s'avkre necessaire de revenir rapidement sur la façon
dont j'ai recueilli les données. Tel que mentiorne précédemment, des entrevues individuelles ont
6té r6aIïsées auprès de huit femmes lesbiennes violentées par leur conjointe. C'est partir des
réponses aux questions portant sur le v&u et l'experience de violence que fut constitué ce
chapitre. Il portera sur les types de violence vécus.

Plusieurs 6tudes portant sur la dynamique de la violence chez les h&érosexuels ont
documente les caract&istiques fondamentales de celle-ci. Entre autres, le caractére repétitif,
c'est-à-dire la constance des agressions, qui est le facteur d6tenninant de la violence (Lacombe,
1990)' la notion d'intentiomalite qui, en d'autres mots, precise que les comportements violents
relévent d'un processus conscient (Hoffman, 1984) et l'escalade de la violence (Larouche,
1987) en temie de pouvoir qui s'intensifie. Les entrevues r&lis6es dans le cadre de cette &ude
permettent aussi de corroborer ces notions que L'on retrouve au sein de la dynamique de la
violence. Voici comment est expdde, par deux femmes de IT&ude,la notion de répetition : .Au
début il y avait pas vraiment d'impacts (...) c 'est à la répétition qu'il y en a eusw (3: 11). c Une
journée après l'autre ça revenait u s e z souvent» (7: 7). Les propos de Sarah-And2 illustrent
bien quant à eux la notion d'intentionnaiite et à quel point les gestes sont posés de façon
consciente et dans un but bien precis :..Alors qu 'elle savait très bien qu 'elle m'atteignait hein?

Les pr6noms apparaissant dans le texte sont fictifs.


(...) elle voulait me faire mal. Elle voulait me blesser. C'est ce qu 'elle voulait, c'était délibéré
hein?# (5: 1).

L'escalade de la violence peut être v&ue diff6remment d'une situation à une autre, c'est-&-
dire que le contrôle ailant en s'intensifiant peut se vivre à I'intéieur d'un même type de violence
comme nous le decrit Chantale : uPlus elle sentait que j'étais sérieuse dans mu décision de la
quitter, plus je vivais de violence psychologique» (6; 33). Pour SarabAnne, le contrôle s'est
intensifie travers l'apparition de d'autres types de violence: #Au début c 'était de la violence
verbale. Beaucoup de jugements, beaucoup de critiques vis-à-vis moi Puis au bout d'une
couple de mois, Ga a commencé à être plus physique, elle me poussait (...)» (5: 12).

Comme des h d e s anterieures l'ont d6montr6, la violence psychologique est la forme


d'agression la plus frequernrnent rapportee par les lesbiennes (Renzetti, 1992; Chesley,
MacAulay, Ristock, 1992; Hammond, 1989). Cependant, panni les huit femmes de IT&ude
quatre d'entre elles ont subi des agressions physiques. Je traiteraï d'abord de ce type de violence
et je poursuivrai ensuite avec la violence psychologique.

5.2.1. La violence physique.

Des quatre femmes ayant subi de la violence physique, deux d'entre elies mentionnent que
le recours à cette forme de violence n'&ait pas fréquent dans leur situation alors que pour les
deux autres femmes, cette violence etait couramment exercée envers elles. Les prises de contrôle
par la violence physique peuvent s'exprimer par des gestes tels que secouer l'autre, la pousser,
lui donner des coups de pied, des coups de poing, la «lamen>sur les murs, lui serrer le cou, etc.
Bien que la st5vérité des gestes posés varie, il n'en demeure pas moins que dans une des
situations, il s'agissait d'une voie de fait grave. Le témoignage de Sandrine montre d'ailleurs
jusqu'où peuvent d e r les agressions physiques :
des fois elle m'accotait sur un mur. Elle me secouait (...) elle me tenait par
les épaules et la tête et me cognait sur le mur. Ou bien elle me tenait comme ça
sur un mur puis là elle me donnait un coup de pied dans la cuisse. Puis Ià ça
devenait tout bleu. Un moment donné je m'en allais m'étendre sur le lit, je
pleurais, elle a été prendre un couteau à steak puis elle est venue dans le lit
puis elle me l'a mis sous la gorge. 11y a une fois où c'était très violent, elle me
garochait partout, elle me jetait ii terre et elle me donnait des coups de pied
pariout dmrs le corps» (8: 39).
En soit, les manifestations de violence physique subie par les femmes lesbiennes de
l'etude ne semblent pas diE6rer de celle vecue par des femmes hétérosexuelIes. Cette violence se
distingue cependant par le fait que l'agresseure est une femme et que cela ionuence la conception
que l'on se fait de cette violence. Aïmi, une femme qui est violente physiquement va l'encontre
des valeurs feminines prônees (douceur, don de soi, passivité, etc.). Cette agresseure
transgresse les images que nous nous faisons du mod&lef&nhh. À cet égard, la violence des
femmes dans notre société est moins tol&ée que celle des hommes. En effet, les comportements
violents des femmes sont clairement identifiés comme &nt antisociaux alors que les
comportements violents des hommes sont rational&%et glorifih (Campbell, 199l)? De plus,
et comme nous le verrons plus loin, il appert que les victimes de violence, qu'elles soient
lesbiennes ou hétérosexuelles, ont tendance à vouloir proeger la réputation de leur agresseur(e).
Ce qui n'est pas sans consequence puisque dans le contexte des relations amoureuses entre
femmes, briser le mur du silence face à la violence subie peut exposer les victimes (et leur
agresseure) a une plus grande vuln&abilité, un jugement plus sévi% et discriminatoire.

S. 2 . 2 . La violence psychologique.

Si la violence physique semble facile à identifier, il en est tout autrement pour la violence
psychologique qui est plus ambiguë défiinir et à reconnaître. Comme le disait Anne, une des
femmes intenriewées :du violence psychologique, ce n 'estpuspalpable, c'est ubstraitw (7: 53).
Des chercheur(e)s ont également souleve la difficulté qui existe quand il est question d'essayer
de saisir cette forme de violence. D'a@ Ouellet, Lindsay, Clément et Beaudoin (1995)' ce
serait le caractere subjectif de la violence psychologique qui expliquerait en partie le sous-
developpement de l'op6ratiomalisation de ce concept. Ces derniers ont effectué une recherche
sp&ifïque sur ia violence psychologique et ont propose une definition de celle-ci :
«La violence psychologique, en contexte conjugal, est un comportement
intentionnel et rt5pCtitif qui s'exprime à travers differents canaux de
communication (verbal, gestuel, regard, posture, etc.) (...) dans le but
d'atteindre (ou risquer d'atteindre) l'autre et de le blesser sur le plan
émotiomel» (1995).

Pour présenter les resultats, je me suis inspirée de douze manifestations de la violence


psychologique identifiées par ces auteur(e)s. Cependant, j'ai effectue des regroupements pour en

33 Margolies et Leeder (1995) ont constatC qu'au sein meme de la communautt5 lesbienne il y a un inconfort avec les
agresseures, justement parce qu'eues ont abris& les regles de comportement des femmes.
arriver à obtenir six types de manifestations de violence psychologique: 1) blâmer, critiquer,
accuser, de façon indue; 2) contrôler; 3) degrader, denigrer, humilier, insulter, abaisser; 4)
harceler, intimider, menacer, faire du chantage; 5) manipuler. suresponsabiliser,
d&esponsabiliser, recours imprévisible et variable à l'indulgence; 6) priver de façon
intentionnelle, simuler l'incW6rence. Ii est important de noter que ces regroupements ne sont
pas &tanches», au sens où il n'est pas facile de decouper en morceaux une r6alité. C'est à partu
de ces types de manifestations que je procéderai B I'analyse de la violence psychologique subie
par les femmes de l'btude.

5.2.2.1. Blâmer, critiquer, accuser de façon indue.

Les accusations portees à l'endroit des victimes tournent autour de la responsabilite de la


situation qui fait probleme. Il est frappant de constater que cinq des femmes de 1'Caide ont 6t6
responsabilisées du malaise vécu dans leur couple. Pour l'une d'elles, ce fut en présence des
enfants, comme en témoigne Ginette : rTu sais c'était tout le temps moi qui étaitpas correcte.
(...) Elle rn 'a dit, devant le petit, t'as un problème (...) Et là elle me responsabilisait d'être
incapable de parlerw (3:85). En ce qui concerne Chantale, sa conjointe lui faisait porter la
responsabilite de la d&&ioration de son Btat de santé : elle me disait :xBon mon médecin est
obligé d'augmenter ma dose d'antidépresseursw. Bon c'était à cause de moi évidemment* (6:
34).

Deux femmes ont Bté accusees d'être violentes. Il s'agit ici de situations particulihs
puisque ces comportements, qu'ont réellement poses les femmes de 196tude,ne se sont produits
qu'une seule fois. Mireille, qui précise qu'il s'agissait d'une légitime defense, exprime aussi que
peu importe le comportement qu'elle adoptait, elle etait tenue responsable d'un problème de
communication :
Après que la victime ait poussé sa conjointe :aAh! elle m'avait dit :La
violence physique me fait horreur. Ah! j'ai dit :T'en auras pas de violence, ça
ira pas plus loin que ça. Moi aussi, ça me fait horreur. Là,j'en pouvais plus,
je comprends que des fois il puisse y avoir des coups qui se donnent. Mais,
j'ai dit :J'essaie de te parler, pis tu dis que je fais des chichis. Ou je
communique mal. Pis quand je me taisais, tu disais :Tu t'sais! On peut pas
communiquer! Comprenez-vous là ? Toujours un réseau de contradictions et
d'oppositions qui était inextricable. Pis, moi, j'uppelle ça des p'tites violences
quotidiennes* (2: 26A).
On retrouve souvent, dans les situations de violence conjugale. une déresponsabilisatioo
de la personne violente et une culpabilisation de la victime. Noël parle de la dynamique d'une
pedagogie de la culpabilité qui consiste «(...) ii faire porter par l'opprimé la responsabilite
premiere de sa condition et à assimiler toute velleité de liberation de sa part un geste
d' agression à l'endroit de 1' agressetue-victime» (1989: 95).

Les femmes ont éîé la cible de reproches de la part de leur conjointe et ceci pendant la
relation et lors des ruptures. Pendant la relation, trois femmes se sont fait reprocher par leur
conjointe de ne pas l'aimer suffiiarnment. L'extrait suivant demontre qu'une passion souhaitée
mais non partagée etait reprochée à Mireille :
mais, le pire. c'est qu'elle me disait :Tu ne m'aimes pas. Ou :Tu ne
m'aimes pas arsez J'avais beau lui dire : Oui, je t'aime. C'est pus une
passion. j'pew pas t'mentir. C'est pas une passion, mais je t'aime. Mais,
c'était pas assez. Elle me traitait d'égor~te.Dans sa tête je ne l'aimais pas
assez Pis, j'pense qu 'à me l'a faite (...). A m'a faite payer pour çaw (2: 2 1A).

Les attentes des conjointes violentes peuvent parfois être très 6lev6es. Lorsque leurs
besoins ne sont pas satisfaits, eues ont tendance remettre en question le comportement de
l'autre par des reproches. Par exemple, la conjointe de Chantale lui reprochait de ne pas prendre
plus de temps avec elle, de ne pas s'occuper d'elie ou de ne pas être suffisamment
reconnaissante de ce qu'elle lui donnait ou faisait pour elle :
«Puis quand elle me disait qu'elle vivait ses angoisses, qu'elle avait besoin
que je sois 12, puis que (...). Après le m a i l elle trouvait que j'amvais de plus
en plus tard. Pourtant je n'arrivais pas tard J'am-vais pour le souper. Elle me
trouvait tout le temps quelque chose. (...). Quand elle me faisait des cadeaux,
il auraitfallu que j'en sois reconnaissante pendunt des jours et des joursw (6:
82).

Il est important de souligner que pour une seule femme de l'étude, la rupture a été initiee
par la conjointe violente. Dans les six autres situations, les conjointes violentes, qui se sont fait
quitter, n'acceptaient pas la rupture et diverses stratégies pouvaient alors être mises en oeuvre
pour déstabiliser les victimes. Par exemple, la conjointe de Chantale jouait sur son sentiment de
culpabilité en lui reprochant de lui faire subir du rejet :
«Parce qu'elle me disait tout le temps que je ne la comprenais pas dans sa
maladie, tu sais. Alors c'est parce que je ne ln comprenais pas que je me
permettais là de la (...) quasiment de la mettre à la porte Ià, tu sais lù.Puis elle
me disait :Tu m'exclus de ta vie, tu sais, tu me rejettes après tout (...) tout ce
qu'on a vécu» (6: 34).
Lise etait blâmee d'être trop sensible face aux paroles blessantes que lui proferait sa
conjointe :rT'es tropfragile, tu te laisses trop attehdre par ce que j e te dis, je pense pus tout le
temps ce que j e dis» ( 1 : 22). Paradoxalement, la conjointe reprochait egdement ii Lise d'être trop
dure et rancunière quand elle voulut mettre ses limites et se prott5ger en voulant couper les
contacts : aÇa se peut par quelqu'un dur comme toi, j'aijcunuis connu quelqu'un d'aussi dur
que toi&( 1 : 63). Pour sa part, Mireiile s'est fait reprocher par sa conjointe son manque de sens
de l'humour après que celle-ci l'eut humiliée en racontant des év6nements très personnels et ce,
devant des amies-

Et enfiin, voici les jugements portés sur les comportements des victimes. L'une d'elles se
faisait critiquer sur sa façon d'entretenir son appartement. Elie avoue avoir aussi v6cu des
pressions de la part de sa conjointe qui lui reprochait sans cesse un manque d'ambition face sa
c a r r i h professionnelle. Une autre se faisait reprendre sur son comportement en g6neral.

Si l'on compare maintenant nos résultats d'étude il ceux de la recherche chez les femmes
h&érosexuelles de Ouellet, Lindsay, Cletnent et Beaudoin (1995)' il y a des similitudes. En
effet, dans les deux cas, on retrouve une responsabilisation de la victime face il la violence, des
blâmes concernant l'insatisfaction des agresseur(e)s face à l'amour que les victimes leur portent
Une autre tactique de contrôle commune aux agresseurs hétérosexuels et aux agresseures
lesbiennes consiste il nourrir le sentiment de culpabilitk des victimes pour les empêcher de
rompre la relation Cependant, les zones de vulnérabilité chez les femmes h6térosexuelles et chez
les femmes lesbiennes peuvent differer. Par exemple, la dimension du rejet a une connotation
particulikre dans un contexte de relation amoureuse entre femmes. Il s'agit d'une orientation
sexuelle qui est hors de la norme et l'homophobie et le rejet dont sont victimes les lesbiennes a
pour conséquence de les contraindre il l'isolement.

5.2.2.2. Contrôler.

Des propos recueillis en entrevues, il apparaît que le contrôle est une manifestation
importante de la violence subie par les femmes de 1'etude. Ii appert aussi que la domination est
une condition implicite au contrôle dans le contexte de relations conjugales. La domination peut
s'inscrire dans l'attitude et la façon d'être en géneral des conjointes violentes, dans un
agissement qui va à l'encontre de la demande de la victime ou dans le contrôle de ses activités.
Il y a des attitudes et des façons d'être des conjointes violentes qui nous éclairent sur la
domination qu'eues imposaient Ainsi, trois femmes disent que leur conjointe avait toujours
raison lors de discussion et que parfois l'argumentation était d'une logique deconcertante :
d l faut dire qu'elle avait le don de convaincre. C'est une fille très articulée
(...). Elle était très convaincante, tu sais, elle avait toujours les arguments
(6:12). (...) Elle n 'am-vaitpas avec ses gros sabots là^ (6: 8 1).

Pour deux autres femmes de l'étude, la discussion Ctait impossible puisque la conjointe s'y
opposait.

France s'est vue imposer la presence de sa conjointe dans son propre appartement, une
occupation en quelque sorte : «Alors je savais très bien qu'une fois entrée dans mon
appartement, elle ne voulait plus sortir- Même si (...)je lui demandais Id de n'importe laquelle
façon là il n 'y avait rien àfaire, elle ne voulaitp1u.s sortrrtrr»
(4:65).

Deux femmes se sont vues contrôler leurs sorties, leurs rencontres avec des amies. La
violence peut être une tentative d'empêcher l'indépendance de l'autre (Renzetti, 1988). Pour
Sarah-Anne, il s'agissait d'une r&gle respecter, elle &ait surveillee et si elle dérogeait, la
menace était grande :
d e l a faisait trois, quatre mois que j'avais a d t é de boire. Puis Marthe ne
voulait pas que j'aille dans le mouvement des AA [AlcooliquesAnonymesJ. Je
n'avais pas le droit d'appeler les membres. Elle tassait mes amis pour avoir
plus de contrôle sur moi (...). Puis en tout cas, quand on revenait chez nous
pis que j 'avaisparlé à quelqu'un, le soir, c'était la grosse violence» (5: 12).

Sarah-Anne raconte tgalement qu'eue était contrainte d'adopter les mêmes habitudes de vie
que sa conjointe, par exemple, boire et se coucher tard, malgr6 qu'elle lui signifiait que ça ne lui
convenait pas :
<<Unmoment donné on était en party chez nous. parce que Marthe était
toujours en party, puis si moi je ne faisais pas le p a w bon 12 elle me rentrait
dedans. Puis elle me faisait de la violence parce qu'il fallait que je fasse la
même chose qu'elle tout le temps. II fallait toujours que je la suive. Puis à un
moment domé bon moije n'étais plus capable. J'étaïs fatiguée, je voulais aller
me coucher. Mais Marthe elle ne voulait pas aller se coucher, alorsje devais
rester debout» (5: 13).

Reduire la mobilité des femmes en leur bloquant le passage ou en leur volant les clés de leur
voiture a aussi été utilisé comme tactiques de contrôle.
uEl2e voulait avoir le contrôle tu sais. Elle ne voulnit jamais embarquer avec
moi c'est toujours elle qui conduisait. C'est toujours elle qui prenait le
conrrble, tout le temps (...). Unefois, j'ai voulu partir, elle est allée danî ma
chambre puis elle m'a volé mes clésw (4:43 et 68).

Pour Chantale, ce contrôle s'instaura de façon plus insidieuse, il s'agissait d'une emprise
sur le mode passionnel. C'est au nom de l'amour, de ieur bien-être que la conjointe la persuadait
de ne pas d e r voir ses amies, de ne pas réaliser des activités seules et se permettait de lui rendre
de nombreuses visites sur son Leu de travail :
d e ne pouvais jamais lire. Elle disait :On ne se voitjamais Ià,puis tu lk. Fait
que bon je fermais nion Ziwe. Je me suis mise à tricoter, elle me disait :Bon
bien c'est Fa, tu vas tricoter là,je ne pourrai plus me coller, (6: 29). J'avais
beau lui en parler, elle me disait :Oui, oui,je vaisfaire attention,je le sais que
tu as raison. Mais elle disait, tu sais, je t'aime tellement là, je t'aime tellement
là, quand je passe devant ton bureau,je ne p e u . pas passer sans aller te dire
un petit bonjours (6: 15).

Le contrôle pouvait aussi s'exercer lors des activités sexuelles en terme de fiequence et de
d6roulement Pour Anne, voici en quoi il consistait : «C'est elle qui contrôlait tout, même dms le
lit. Fait que à un moment donné c'était juste elle qui avait le droit de me toucher, moi je ne
pouvais pus lui toucher,, (7:10 et 16).

Six femmes de 1'6mde qui souhaitaient une rupture définitive et une coupure de contact
n'ont pas et6 respectées. C'est-&-direque leur conjointe entrait continuellement en contact avec
elles. Tandis que pour Mireille, il s'agissait d'une fin de relation sans qu'il y ait eu aucune
explication :
((Puiselle ne m'a pas rappelée de la semaine. Puis la semaine d'après j'avais
réussi à la rejoindre :j'ai dit :Qu'est-ce qui se passe? Ah, elle dit, c'est une
relation à laquelle j'ai décidé de mettrefin. Bon, j'ai dit, on pourrait peut-être
s'en parler. Non ? Ah bien écoute Mireille j 'ai pas le goût de parler de ça ce
soir. D'ailleurs, elle dit, je ne vois pas pourquoi tu appelles à cette heure-là, il
est assez tard» (2: 10).

Voilà ce qui se ddgage de l'experience des femmes en ce qui a trait au contrôle. Celui-ci
n'est pas toujours relie à une menace, il peut s'installer de façon pernicieuse par la force de
persuasion et l'habilité d'argumentation de la conjointe violente. On peut voir des liens entre le
contrSle exercé envers les lesbiennes et celui exercé par les hommes dans les couples
h6t6rosexuels. Par exemple, le contrôle des rapports sociaux, qui a pour consequence
l'isolement, a été observé dans plusieurs Ctudes chez les h&érosexuels (Avni, 1991; Ganley,
1981; Walker, 1984). L'imposition de règles et la surveillance des activites ont aussi bte
abordées dans la recherche de Ouellet, Lindsay, Clement et Beaudoin (1995). Par contre, si on
considere i'incidence que peut avoir la présence de la conjointe violente sur les lieux du travail de
la victime, quand il s'agit de relation amoureuse entre femmes, elle peut être double. C'est-à-dire
que les coEgues de travail pouront se rendre compte à la fois que la femme subit de la violence,
mais aussi qu'elle est lesbienne. Le dkvoilement de cette r é a l i ~dans un milieu de travail peut
occasionner beaucoup de problemes ii la victime.

5.2.2.3. Degrader, denigrer, humilier, insulter, abaisser.

Cette manifestation de la violence consiste ii diminuer la valeur de l'autre, à I'affaiblir, à


ternir sa réputation, abaisser sa dignité. Les femmes de l'&ude ont rapporté avoir eté dénigrées
de diBrentes façons, soit par la parole et I ou par le comportement. On a denigr6 ce qu'elles
étaient, leurs capacités ou encore le milieu social dont eiles provenaient Lise a 6té atteinte dans
ce qu'eue etait à partir de remarques blessantes sur son corps :
<<AUdébut [de la relation ça allait bien]. Mais rapidement ça c'est devenu
différennt. Il y a eu des remarques au niveau de mon corps. Comme (...) des
remarques que je trouvais plates! T'as des grosses cuisses. Tes seins aussi
(.*.)# ( 1 : 9).

La conjointe de Chantale s'est attaqu6e à sa dputation auprès d'êtres qui lui etaient chers et dans
son milieu professionnel :
parle aux autres, puis elle dit :Ah moi j'ai assez hôte de finir mon contrat
<<Elle
Tu sais en voulant dire :Je ne la rencontrerai plus. Puis enfin la (...) ça
(...).
achève. Elle sait très bien commentje perçois ça Cela me fait toujours mu2 à
chaquefois, même encore mintenmtw (6: 62).

Certaines femmes disent avoir ét6 souvent denigrées et abaissees par des paroles
déplaisantes et ceci surtout en privé bien qu'une l'ait et6 devant des amies. Pour Anne, il
s'agissait d'une humiliation qui était ressentie lorsqu'en public et devant eue, sa conjointe
séduisait sexuellement des hommes :
nElle me testait au niveau de (...) mon amour face à elle, elle pouvait soudoyer
un homme, essayer de l'amadouer là puis elle revenait avec, puis c'était dans
un coin, puis elle faisait comme si elle était en amour avec. Là elle me
regardait pour voir ma réaction. (...) Je pleurais plus que d'autre chose Ià, de
rage. Fuit que là, après ça, elle me disait :Bon non. Je faisais juste Fa pour te
taquinerw (7:45).
Les conjointes violentes usent de stratégies diverses qui ont pour effet d'abaisser la dignité
de leur partenaire. Elles cherchent à toucher l'autre en s'attaquant d'une mani&regenérale ou
sp6cifique à ses capacités ou encore à d6valoriser l'autre en denigrant le milieu social dont elle
provient :#is, à disait :C'estparce que t'es snob. Y vafalloir que tu te déniakes, ph, ramasse-
toi. J'en r'viem pas comment t'as été élevée. Tu viens d'un clan. C'était tout le temps, ça Tout
le tempsw (2: 22A).

L'analyse du contenu de l'ensemble de ces comportements, déait dans cette sous-section,


permet de voir que ces femmes ont Bté dbnigr6es dans leur corps, leur personnalit& leurs
cornpetences tout comme les femmes hBtérosexuelles peuvent l'être. Contrairement aux résultats
de l'etude de Ouelleî, Lindsay, Clément, Beaudoin (1995), le ddnigrement n'a pas tout fait les
mêmes cibles. Ça ne joue pas ici sur le rale st&&otypt!des femmes : rôle de m&e, épouse,
ménagère. Le dhigrement peut être tout aussi présent chez les h&6rosexuels que chez les
lesbiennes, mais de façon clifferente.

5.2.2.4. Harceler, intimider, menacer, faire du chantage.

Harceler consiste à tourmenter une personne en la poursuivant sans cesse, d'une


quelconque manière, en lui imposant toutes sortes de demandes. Deux femmes de l'étude ont
ainsi v6cu du harcèlement Pour Chantaie, il s'agissait d'appels et de visites sur les lieux de son
travail :
&lle pouvait m 'appeler six, sept fois par jour. C'était effrayant, elle avait
toujours une question à me poser. Souvent je raccrochais :Excuse-moi je ne
peux pas te parler, tu sais il y a toujours du monde dans mon bureau, ce
n'était pas le moment. Mais c'était enayant elle était très, très, très
accaparmte. Puis elle passait dmis mon bureau, elle arrêtair,j'étais obligée de
la mettre à la porte, puis moi j'ai (...) il y a quelqu'un d'autre dans mon
bureau,, (6: 15).

Dans ie cas de Anne, deux types de harci9ement furent vécus. Pendant la relation, il y avait
insistance pour avoir des rapports sexuels au moment où la conjointe etait en 6tat dYbri6té.
L'autre type de harcèlement fut vecu cette fois aprh la rupture. En effet, après avoir mis fin à la
relation, Anne a reçu des appels tdl6phoniques pendant pres de 18 mois et a eu une visite
surprise en pleine nuit. La conjointe voulait reprendre la relation il tout prix :
nJ'ai changé mon nwnéro & téléphone, un numéro de téléphone confidentiel
Mais elle pouvait réussir à me rejoindre à mon ouvrage. Même encore, il y a
deux ans, elle m'a appelé et m'a dit :je sais où tu habites, ton auto est comme
ça, voici ton numéro de licence, etc. Pourquoi tu m'appelles pas?» (7:13).

Certaines femmes ont subi des intimidations qui consiste à faire peur à l'autre par divers
moyens, soit en créant un malaise dans leur environnement, soit par des gestes brusques et
violents ou par des crises.

Une forme d'intimidation particulière aux lesbiennes consiste à laisser entendre


l'orientation sexuelle de l'autre. Par exemple en l'embrassant en public alors que la victime ne
souhaite pas s'afficher publiquement Ou en faisant de très fortes allusions à l'existence de leur
couple dam le milieu de travail de la victime. Une femme s'est dite particulihment incommodée
et intimidee par sa conjointe lorsque celle-ci lui téEphonait au bureau et l'engueulait sans aucune
retenue. Elle devenait troublde et ne pouvait parler. Ou bien la conjointe venait sur les lieux de
son travail et pleurait devant tout le monde, lui faisant ainsi perdre ses moyens et la remplissant
de gêne.

Deux femmes de I'btude ont ressenti une peur efioyable. Dans un cas, pendant un souper,
un couteau a été land sur le mur,juste à côté de la victime. Dans l'autre situation, une conjointe
violente a usé d'une stratégie de coercition, c'est-à-dire qu'elle a mis le couteau sous la gorge de
la victime qui ne voulait pas reprendre la relation, créant ainsi une peur pour sa vie. Pour sa part,
France hit troublée par des apparitions surprises de sa conjointe : «Elle stationnait sa voiture plus
loin, puis l'été ma porte patio est ouverte et je reste au premier étage. Elle m'arrivait par le coin et
elle sautait sur le balcon, elle pensait que j'avais quelqu'un d'autre (...), (4:39).

Anne et Sandrine se sentaient envahies par un malaise, une peur, quand leur conjointe
criait et se fâchait Anne rapporte comment sa conjointe les contrôlait, elle et sa famüle :
on savait qu'elle pouvait devenir agressive. Elle avait juste à monter le
a(...)
ton de sa voixpis on disait oui» (7:26).

Les propos de Sandrine à ce sujet sont très près de ce qu'Anne exprimait :


«Quandje voulais parler à ma conjointe, elle se fachuit. je devenais toute mal.
Elle élevait toujours la voix et moi dans ce temps Ià,j'amêtais de parler» (8:
9).

Certaines femmes peuvent vivre du chantage et des menaces qui les amènent il craindre que
leur conjointe puisse accomplir une action qui leur serait préjudiciable. Ii y a ciifferentes
menaces, certaines font croire que ce qui leur est cher sera d6tniit. Pour France, il s'agissait de
ses biens :.rUn soir on était chez nous, y a eu encore une engueulade pis elle a menacé de tout
casser. elle a jeté le miroir par terre* (4: 20). Anne a craint pour la vie de son chat car les
menaces laissaient sous-entendre que sa conjointe pouvait s'attaquer B l'animal :d e trouvais des
lettres d m la boîte aux lettres, As-& déjà vu ton chat se faire égorger?^ ( 7: 13).

Sarah-Anne a vu son enfant menacé : «Elle me poussait, j'avais ma fille dans mes bras.
j'ai pris les escaliers pour me sauver. Elle m'a poigné par le bras. m'a viré & bord pis est partie
pour venir poigner ma fille. pour me l'enlever» (5: 24).

Parfois, c'est leur propre vie qui est menacee; dans le cas de Anne, il s'agissait d'une
tentative de meurtre : elle avait encore les clés pour entrer dans la maison. Durant la nuit est
entrée, elle m'a mis m couteau. avec une lame de 6 à 8 pouces de long, en dessous de la gorge
(...)N (7: 13).

Les incidents d'intimidation reliés aux gestes brusques et violents ainsi que les crises
peuvent se rencontrer chez les ht5t6rosexuels. Toutefois, l'intimidation reliée au malaise créé en
divuiguant I'orientation sexuelle est évidemment specifque aux lesbiennes.

5.2.2.5. Manipuler, suresponsabiliser, d&esponsabiliser, recours imprevisible et variable


l' indulgence.

Manipuler signifie influencer quelqu'un à son insu, agir par moyens détournés pour
l'amener à ce que l'on souhaite. La suresponsabilisation consiste à exiger d'une personne une
charge de travail, des prises de dtkision, des responsabilids ou des tâches qui excèdent de
beaucoup ce a quoi on serait normalement en droit de s'attendre d'elle. Et le recours
imprévisible et variable & l'indulgence s'apparente ii une reconnaissance occasio~elle.

Toutes les répondantes de l'btude disent avoir vécu de la manipulation. Ce type de


comportement refère souvent à une réalité qui est faussee ou, en d'autres termes, à une
d6forrnation des faits.

La conjointe de Lise, par exemple, manipulait la perception de la réalité :uElle transfomiait


tout ce que je disais à sa façon. Elle interprétait tout le temps. Puis elle portait des jugements de
valeursw (2: 83). La conjointe d'Anne la manipulait par les sentiments afin de l'empêcher de
sortir et de voir d'autres personnes : nPour elle, dans sa manipulation :Bon bien moi je suis
toute seule, je n'ai pas de famille, je n'ai pas d'amis. Bon tu me laisses toute seule, je vais
manger toute seule, (7:20). France rapporte que son entourage imm6diat a é E fortement enjôle
par sa conjointe qui manipulait les faits à son avantage pour aller chercher des appuis et nuire
sa réputation tout en brisant des liens de confiance :
nParce que eux-autres ils avaient l'air de l'idolâtrer. Pis elle lesjZattait tout le
temps hein. Elle avait le tour avec eux-autres,jlattait ma mère, flanait mon
père. J'ai jarnais vu man père aussi proche de quelqu'un. Fait que 16 moi
j'étais complètement décontenancée Ià tu sais» (4:42).

Chantale, qui en &ait B sa première relation amoureuse avec une femme, s'est sentie
manipulée par sa conjointe qui, en quelque sorte, profitait de sa méconnaissance de ce type de
relation pour donner plus de force à son argumentation :
N J ne
~ connaissais pas fa, puis elle elle savait que je ne connaissais pas Ca
aussi. Puis elle me le dirait :Tu sais si on veut développer une belle relation à
deux, faut aussi faire des concessions. Il faut s'ajuster. Je trouvais que des
ajustements il y en avait beaucoup 1à» (6: 25).

Le déni, qui consiste li nier la realité, est un comportement fréquent chez les personnes
violentes. Plusieurs femmes ont rapporte que leur conjointe refusait de reconnaître leurs gestes
violents et ce, peu importe le type de violence vkue. La conjointe de Anne niait la violence
physique qu'elle lui avait fait vivre : nElle ne me l'a jamais avoué ça. Parce que des fois je lui
ramenais là des affaires qu'elle m'avait fait. Bon non! Je n'ai jamais fais ç a Je ne te ferais
jamais m a b (7:45). Quant A la conjointe de Lise, elie niait les propos qu'eue avait tenus à son
égard :
nMais quand je lui ramenais J'en peux plus là de tes remarques
désobligeantes. Elle me disait :Ben j'ai jamais dis ça. Ben voyons donc. Tu le
sais je te dis que tes yeux sont beaux (...).Là je disais :Ben voyons je suis
par folle là tu m'as dit telle et telle affaire* (1: 12).

En plus de la negation de la violence exercee par l'agresseure, il peut y avoir une


distorsion de la r6alid qui a pour effet de créer une conhision et de semer le doute chez la victime
ii un point où c'est celle-ci qui pourrait avoir un comportement problematique. Par exemple,
dans la situation suivante, la conjointe de S a n d ~ se e choque lors d'une discussion et lui
reproche alors de s'en d e r et de ne pas vouloir discuter :
«Moi j'aime discuter calmement sans me choquer. Et puis dès qu'elle se
choque bon je monte dans ma chambre. Puis là elle dit : Bon c'est ça.
Envoies! Ne parle pas 16. Var te coucher puis (...) Mais je le sais que ça ne
donnera rien Lù elle dit que je boude* (8:28).
Dans certaines situations, il y a un deni relie à l'orientation sexuelle. En effet, il amive que
les conjointes acceptent leur homosexualité ou qu'elles aient un doute face leur
préference sexuelle. Pour Ginette, il semble que le pire a eté de ne pas avoir eu la possibilit6 d'en
parler ouvertement avec sa conjointe :
«Je pense qu'elle se questionnait et (...) et elle arrivait elle disait :Non ça
toujours par de bon sens que je sois homosexuelle. Elle avait besoin d'aller
vérifier. Avec son pouvoir de séduction parce que c'était une grande
séductrice. Alors elle allait du côté des hommes. Le plus diafcile c'est qu'elle
rejùsuit d'en parler* (3 : 75).

Dans d'autres situations, il peut y avoir une banalisation de la violence, par exemple en
détournant l'attention de ce que la victime ramène sa conjointe. Comme le raconte Lise :
asouvent elle banalisait ce qu'elle avait fait en me disant :Bon tu m'aimes,
arrêtes donc, je suis correcte. Après, il y avait un peu de tendresse bien sûr
parce que c'est souvent comme ça que ça se passe.-Pis après tu t'accroches*
(1: 18).

Ou encore, le lendemain d'un eclat, la conjointe violente de Sarah-Anne adoptait un


comportementqui laissait croire qu'il ne sYt5taitrien passe la veille :
~ M a n h es'endormait après sa violence là, moi j 'étais dans m o n coin puis là.
14 j'étais en train de digérer ça là. Mais les lendemains matins, non Marthe
elle, elle buvait son café, puis c'est comme ci de rien n'était» (5: 14).

Suresponsabiliser l'autre est aussi une des manifestations de violence psychologique.


Évidemment, s'il y a une suresponsabilisation de la victime, cela sous-entend qu'il y a une
d6responsabilisation de la conjointe violente qui peut ne pas s'impliquer dans les tâches qui lui
sont dEvolues, ou qui se soustrait ii ses devoirs et responsabilités.

En même temps que les personnes violentes peuvent vouloir tout decider, elles peuvent
parfois se décharger de leurs responsabilitc?~ et surcharger leur conjointe face il celles-ci. Dew
femmes de lTt5tudeont et6 suresponsabiiis6es dans des prises de decision. Dans le cas de
Ginette, sa conjointe comptait sur elle pour prendre une décision concernant son homosexualité :
«.(...)je me suis rendue compte qu'elle comptait sur moi pour répondre à sa
question Là çafait oups! J'ai assez eu à répondre à cette question là pour moi.
Je lui ai dit :je p e u t'aider. te supporter &s tes démarches, je lui trouvais
des références mais je ne pouvais pas prendre la décision à sa placew (3: 34).

Chantale s'est vue dans l'obligation de prendre des decisions importantes seule alors que
cela concernait aussi sa conjointe : a(. ..) elle ne prenait plus aucune décisions par rapport à ça,
elle attendait toujours que ce soit moi qui lui en parle. Elle, elle faisait comme si plus rien
n'existait» (6: 3 1).

Il peut y avoir une suresponsabilisation face l'aide que la conjointe souhaite obtenir. Par
exemple, France a senti une responsabiüte si grande dans l'aide qu'eue devait apporter à sa
conjointe, que cela l'empêchait de rompre la dation :
d ' e s t un peu ~aje te dirais qui m'a comme incitée à continuer à rester avec
elle. Parce que bon elle me disait que je la comprenaispuis que j'éîais In seule
avec qui elle pouvait parler comme ça. S'ouvrir ça luifaisait du bien Elle ne
parlait avec personne d'autre. J'étais la première là d m sa vie avec qui elle
s'ouvrait un peîïtpeu. Je lui avais comme appris wr peu à parler* (4:16).

La conjointe de Chantale lui avait dit qu'elle ne pouvait vivre saos elle et surtout qu'elle
avait besoin d'elle lorsqu'elle avait des crises d'angoisse : «Tu sais, je sentais qu'elle avait
besoin de moi, elle vivait des anguisses terribles. Puis elle, elle jouait beaucoup là-dessus# (6:
23).

Le recours imprévisible et variable A l'indulgence s'apparente i% la phase de rt5mission du


cycle de la violence. En effet, à partir du moment où la conjointe sent qu'elle peut perdre L'aune,
elle adopte des comportements pour se faire pardonner, ce qui équivaut à une reconnaissance
occasionnelle. Ii peur s'agir d'excuses, de promesses, de cadeaux comme en temoigne Sarah-
Anne :
<<Quand il y avait de la cuZpabilité de lendemain d'une c h e , Ià elle m'aimait. Je
vaisfaire attention à toi, elle pleurait, elle était quasiment à genoux devant moi.
Elle promenait plein de choses, elle m'achetait des bijoux, elle me rachetait
(rire). Quand elle voyait que j'étais ben sérieuse pis ben écoeurée, elle me
faisait un chèque en blanc» (5: 30).

Toutes ces manifestations de violence psychologique que sont la manipulation, le deni, la


banalisation de la violence, une suresponsabilisation de la victime et le recours imprévisible et
variable l'indulgence peuvent aussi se retrouver chez les coupies hétérosexuels. Par contre, au
niveau de la manipulation des sentiments, certaines conjointes violentes peuvent se semir de leur
sentiment d'isolement reel (pas de famiile, pas d'ami(e)s, etc.) et en relation directe avec leur
lesbianisme, pour empêcher I'independance de leur partenaire. La victime &que de ne pas être
insensible puisqu' elle sait ce que c'est que d'être lesbienne et comprend l'impact de l'isolement
dans sa vie.
5.2.2.6. Priver de façon intentionnelle, simuler l'indiffirence.

Priver de façon intentiomeile signifie créer le manque, l'absence de jouissance, d'un


plaisir, d'une chose qu'on avait ou qu'on allait avoir. C'est aussi creer la penurie des choses
agréables et nécessaires et de ne pas accéder aux demandes et aux exigences de quelqu'un. Les
femmes rencontrées ont vecu diff6rentes privations. Sarah-Anne et son enfant ont 6té privés au
niveau matériel, financier et affectif :
nQuand j'avais pas eu mon chèque, elle savait que mon enfant pis moi on
n 'avaitplus rien à manger, pis elle en avait de l'argent, on aurait dit qu'elle se
faisait un plaisir de rien me donner!» (5: 46). n r l a première m é e qu'on a été
ensemble, elle s'occupait beaucoup de mon enfmt, elle jouait beaucoup avec.
mon enfant l'aimait beaucoup. Après elle l'ignorait complète ment^ (5:47).

D'autres femmes ont souffert de privation au niveau affectif et emotionnel. Ginette


rapporte que sa conjointe ne s'est jamais engagée ou investie d'une ma.ni&reaffective dans sa
relation de couple et dans sa relation avec son propre enfant : .<Elleavait un enfmt, ça faisait
partie de la dynamique. J'ai réalisé pendant la relation qu'elle avait les mêmes attitudes par
rapport à son enfant, le reîrait affectif» (3: 56). Pour Lise, il s'agissait de privation au niveau
sexuel :nLes relations semelles. c 'était peu fréquent. Je savais jamais si j'avais le droit d'y
toucher. Des fois j'y touchais pis là elle tenait ma min. Elle disait que chez les lesbiennes y en
avait pas de relations sexuelles» ( 1: 13).

Des femmes ont vécu des privations sur le plan de la communication. La conjointe rehisait
de communiquer sur quoi que ce soit ou refusait de parler d'un sujet en particulier comme de son
lesbianisme. C'est ce qu'a vecu Mireille : aOn aurait dit qu'elle avait quelque chose Ù oublier.
Peut-être le fait qu'elle était lesbienne. Je ne le sais par. Je ne l'ai jamais su. J'avais pas le droit
de parler de faw (2: 30).

Deux femmes ont et6 priv6es de sommeil des nuits entikres. La conjointe de Chant.de la
tenait dveillée pour discuter : d n a beaucoup parlé, elle pleurait et me tenait réveillée des nuits
complètes, elle disait que Ca ne se pouvait pas qu'on se quitte» (6: 22). Anne a pass6 plusieurs
nuits a venir en aide à sa conjointe qui faisait des tentatives de suicide : elle prenait des
bouteilles d'aspirines, elle avalait ça Je passais des nui^ à prendre son poulsw (7:7).

Simuler I'indifErence consiste à faire semblant de ne pas être &mu,de ne pas être concerne
ou de ne pas être interesse par une personne, un &&nement ou une chose. Agir consciemment
dans le but de montrer à l'autre qu'eue n'est pas importante, que ses besoins ne sont pas
importants. Comme pour Sandrine que sa conjointe ignorait : d'étais en haut pis je pleurais.
Elle émit en bas, elle m'ignorait. Elle f k a i t comme si je n'étais pas dans la maison. elle faisait
ses Maires pis par plus* (8:20). Pour Ginette, il s'agissait de sa conjointe qui non seulement
lui 6tait indiff6rente en public mais qui allait jusqu'à l'ignorer compl&tement : d l était pus
question de laisser croire qu'on se connnissait, t3 répétition elle m'ignoraitw (3: 11).

Des manifestations de violence physiques et psychologiques decrites dans les pages


pr&t5dentes, il ressort des spécificités reiiees aux femmes l e s b i e ~ eLes
~ . zones de vulnérabilité
chez les lesbiennes et les femmes hétérosexuelies dif€èrent quelque peu. Par exemple, une corde
sensible sur laquelle peuvent jouer les conjointes violentes est de reprocher à l'autre de la rejeter
et 1 ou de la laisser seule. En effet, le rejet et l'isolement peuvent faire partie de la trame de fond
chez les lesbiennes qui subissent l'homophobie. Les victimes peuvent donc être très sensible
ce genre de remarque et d&elopper un sentiment de culpabilité. Une autre zone de vulnérabilite
sur laquelle peuvent jouer les agresseures concerne le d6voilement de I'hornosexualité, faire
connaître l'orientation sexuelle de l'autre pour lui nuire et ce, dans sa vie privée ou au travail.
Les manifestations de violence décrites pr&demment ont permis de tracer un portrait assez
exhaustif de comportements de violence des conjointes des femmes de l'étude. Mons
maintenant voir comment ces demii?resont rhgi.

5.3. Les réactions des victimes.

Contrairement à l'opinion courante selon laquelle il y aurait une sorte d'inertie chez les
victimes, les femmes de l'6tude rendent bien compte de I'dnergie considérable qui est deployee
pour survivre dans une situation de violence. Ainsi. ce passage sera consacré aux réactions
qu'elles ont eues. Il sera d'abord question des reactions face à elle-même pour ensuite
poursuivre avec les réactions face leur conjointe.

5.3.1. Les réactions face à elle-même.

Face elle-même. il semble y avoir deux principales rkactions. Chercher sa part de


responsabilité dans la situation qui fait problhe et d6velopper des stratkgies de survie. Il s'agit
ici de stratégies d'adaptation et de résistance pour tenter de diminuer la gravité et la portée de la
violence (Schechter, 1994). La première reaction est directement relik au comportement des
agresseures qui se d6responsabiLîsent de leurs comportements violents et qui vont souvent, par
diverses stratégies, blâmer la victime. Ce qui amenait France ii être très critique face a elie-
même :
d e me disais :Bon peut-être que j'aurais dû la ménager. Sachunt qu'elle ne
peut pas être contrariée. Peut-être que j'aurais dû dire ça autrement ou peut-
être que je n'aurais pas diî le dire du tout Alors veut, veut pas. on se
culpabilise à quelque par*. (4:24).

Ainsi, se croyant d'une part, responsable du probleme et, d'autre part, hadequate, Mireille
avait tendance essayer de changer sa propre façon d'agir dans le but d7am&liorerla situation :
d ' a i toujours pemé que j'étais prise avec mes problèmes. Fallait que ça change. C'érait à moi à
travailler ça* (2:55).

Anne, qui a été contrainte de mettre sa conjointe la porte pour se protéger, s'est laissée
emporter par la douleur que devait avoir sa conjointe. Ainsi, elie a eu tendance a invalider le
moyen qu'eue avait pris pour mettre fi au cycle de la violence : «Le fait de l'avoir mise à la
porte. Je n'avais jamais fait ça. Puis c'est ça aussi Je pense d'avoir (...) d'avoir fait du mal à
quelqu'un. Tu sais je me suis retournée ça contre mi làw (7:38).

En ce qui concerne les strategies de suMe dt5velopp6es par les victimes, certaines sont
reliées à l'analyse du problème. Par exemple, Lise, qui ne voulait pas croire que sa conjointe lui
faisait du mai de façon délibée, avait développé une analyse du problème qui comporte un effet
de déresponsabilisationchez la conjointe :
&.) je pense que c'était ma survie. T'es mieux de dire :Elle a un problème
psychologique. que de te dire :Elle fait ça de sang-froid. Parce que ça fait
deuxfois plus mal là, quand tu sais qu'elle est consciente de ce qu'elle faitw
(1: 56).

De plus, pour survivre, plusieurs femmes se sont accrochées aux bons moments vécus
avec leur conjointe en esp6rant que la violence disparaisse, tel que l'exprime Lise :
sTu dis :Bon ben là me semble qu'elle a compris. Ça va changer. Là tu
retombes dans l'espoir. Pis elle dit :On oublie tout ce qui s'est passé Ià pis on
repart à zéro. Bien sûr que c'était Ià le moment de tendresse aussi. Tu restes
là-dessus. C'est ce qui fait que tu maintiens la relation. C'était ben moins
compliqué de rester. C'était l'espoir (...)w ( 1: 18- 19).

Ce comportement d'autoprotection peut prendre d'autres formes. Par exemple Anne, qui
etait constamment harcelee par sa conjointe et qui avait reçu des menaces de mort, a renoncé à
demander l'aide des policiers pour s'éviter une autre forme de violence possiblement v&ue :le
jugement et le rejet :
«Elle n 'aurait par eu le droit de me contacter. Çaj'ai pemé à en demander un
mmidat de paix (...) C'est parce que les policiers, c'est un milieu fenné aussi,
c'est pas évident de parler de l'homosexualité hein ? (Rire)(...) Surtout à (nom
de la ville). ce n'est pas ouvert comme à Montréal* (7:6 1-62).

Parce que les conjointes violentes ont souvent le contrôle des discussions et qu'elles ne
manifestent pas d'ouverture vis-à-vis les propos des victimes, certaines femmes de l'ttude
considéraient qu'il etait preférable de leur donner raison. Ainsi, elles créaient les conditions
necessaires à 1'6vitement d'une crise de la part de leur conjointe. Comme dans le cas de Anne :
d'avais horreur de ça,j'allais chercher sa boisson parce qu'elle me le demandait, et pour ne pas
avoir la violence, je lui disais o u i Parce que je me disais, elle ne montera pas, elle ne me
frappera par dans le dos, elle ne sera pas violente si j'y vais» (7:21). Il s'agit en quelque sorte
d'«acheter la p a b . Les femmes sont contraintes à une grande vigilance, c'est-&-direqu'elles
doivent modifier leurs comportements pour prévenir de hitures agressions (Chesley, MacAuley,
Ristock, 1992). Les propos de France sont révelateurs à cet égard:
quand Josée venait au bureau là puis mettons on avait eu une altercation là
Heille j'étais comme un mouton. Je faisais la fille douce, douce, douce.
J'acquiesçais tout ce qu'elle me disait là. Pour ne pas qu'elle se mettre en
réaction parce que elle aurait aussi bien pu virer les chaises à l'envers Ià Ou se
mettre ri crier devant tout le monde Ià Elle elle n'avait rien à son épreuve Ià Je
ne savais jamais comment elle réagirait. Je filais mal. Parqe que tu sais, quand
même, ton milieu de travail c'est ton milieu de travail. A tout ce qu'elle me
disait là :Oui, oui, oui, tu as raison. Tu as raison. Alors là elle partait* (4:
76).

Si certaines femmes peuvent decider de ne pas dire ce qu'elles pensent pour éviter une
crise, d'autres circonstances peuvent aussi les amener à ne pas s'affirmer auprès de leur
conjointe. Mireille ne s'Humait pas face à sa conjointe durant la relation par peur de la perdre et
de se sentir abandomte :«Je ne disais pas ce que je pensais par peur que l'autre m'abandonne.
La peur de l'abandon c'est terrible (...) ça te colle aux iripes~(2: 88). (...) Je ne parlais pas*
parce que j 'avaispeur qu'elle s'en ailleB (2:94).

Lorsqu'il y avait des attaques physique ou verbale, certaines femmes se defendaient :


pousser l'autre, lui enlever une anne des mains. Les deux femmes de l'Cnide qui ont reagi
physiquement à une agression physique perçoivent qu'il s'agissait d'une Mgitime defense. Par
contre, Ginette qui a réagi physiquement & une violence psychologique, s'est sentie et vue
violente.
d ' e s t moi qui l'ai poussée dmis le frigdaire. Je le sais pas qu'est-ce qui s'est
produit. Mais et je la tenais sur le mgidaire, elle ne pouvait pas bien bien
bouger de Ia Et k2 mije me suis vue en trah de lafrapper et Iàje l'ai lalrsée.
J'ai pas été fière de moi, j'étais dans un état lamentable. Je me suis assise
j'avais de la misère à reprendre mes idées. Je me disais :Cela se peut par. Je
ne suîi pas rendue àfaire des affaires de même. Cela y est, je suis violente. Et
Iàje me disais :C'est mi qui a le problème Ià Et ça c'était clair d m ma têtew
(3: 86-87).

Au moment d'une agression commise contre eiies, certaines optaient pour la fuite, «sauver
sa peau». Quelques-unes ont dfi changer la serrure de leur porte pour éviter que leur conjointe ne
revienne les importuner. Demander une amie de l'accompagner pour ailer chercher ses effets
personnels chez l'autre &ait aussi une façon de se protéger. Anne a dormi pendant six mois
devant sa porte pour empêcher son exconjointe d'entrer chez elle :
c'est comme dans unfilm, tu vois la lame du couteau miroiter à la lueur (...)
Mais j'ai réussi à le lui enlever. ça ça été lu pire fois (...). Ensuite de ça j'ai
dormi dans le salon. couchée sur le divun. collée szir la porte d'en-avant de
peur qu'elle entre. Fait que j'ai dormi six mois de temps devant ma porte.
Ensuite de ça bon j'ai changé ma semire, mon numéro de téléphone» (7: 13).

es qui étaient responsabilisées de la violence et qui se sont senties envahies par un


doute face B leur comportement violent et une culpabilité possible, se sont données differents
moyens pour verifier leurs perceptions. Par exemple, demander à une ex-conjointe ou à un ex-
conjoint si elie avait eu des comportements violents dans le passé, ou questionner des ami(e)s,
prendre des notes sur ce qui venait de se passer pour savoir si la conjointe avait tendance à
d6former les faits, s'informer à partir de la documentation, des écrits sur la violence, sur les
probl2me.s rencontrés dans les couples homosexuels.

Et fialement, face à la violence qui perdurait et malgré les excuses et les promesses de
leur conjointe de ne plus recommencer, plusieurs des femmes ont tenté de rompre. Comme le
montre les propos suivants, ces tentatives se sont multipliées :
<-Jel'ai quittée peut-être cinq ou sir fois. Je voyais que ça marchait jamais
parce qu'elle voulait qu'on continue à se voir pi& àfaire comme dans le temps
si on s'était pas quittées. Donc une fois, je l'ai quittée, c'émit assez drastique
comme façon de faire. Là je me sentais mal, je me sentais coupable. Mais je
travaillais en thérapie aussi que c'était mon moyen de survie. Parce que cette
fuis-là a& c'était rendu ça ou lu psychiatrie. Ça devenait dangereux Je me
suis dit :Je sauve ma peau* (1: 61).
((...) parce que là moi l'ai laissée souvent hein? Je suis allée porter sa valise
chez sa mère une fois. Je suis allée porter sa valise une autre fois chez une
amie. En tout cas. J'ai porté sa valise souvent. Là elle me rappelait. Je pouvais
passer des heures et des heures à parler, elle m'avait par l'épuisement* (4:18-
19).

Lors des tentatives de rupture, résister aux avances et aux promesses de leur conjointe
pouvait être difF~cile,surtout s'il s'agissait de ruptures évolutives ou vecues à contrecoeur. Ceci
fait ressortir le dechirement et l'ambivalence que peuvent vivre les victimes entre les sentiments
amoureux qu'eues ont envers leur conjointe et la non-acceptation de la violence que cene même
personne leur fait subir. Comme le mentionne Chantale, ne pas entrer dans le jeu de l'autre pour
se prot&gerest parfois douloureux :«(...) elle me saute au cou puis elle me serre fort. Moi il faut
que je réagisse mais (...) en même temps ça me fait de quoi aussi de lu voir. Je me fais violence
Ià puis je me dis :Non il ne faut pas que j'embarquew (6: 63).

Sarah-Anne, après plusieurs d6part.s. revenait toujours chez sa conjointe. Ces retours
n'&aient pas tant provoqués par l'espoir que la situation change que par une question de survie
économique pour elle et son enfant :
rrAh je suis partie une bonne dizaine de fois. Je revenais parce que je n 'avais
rien hein ? J'avais vraiment rien, démunie ben raide avec ma fille. C'étaitjuste
une question de sécurité là. Ce n'était vraiment pas pour Marthe. Plus après
parce que je ne croyais plus en rien de ce qu'elle me promemitw (5: 26).

Avec l'aide reçue34, certaines femmes en arrivaient toutefois a développer de nouvelles


réactions, c'est-&-dire qu'elles apprenaient à mettre leurs limites et à s'affirmer envers leur
conjointe. À ce sujet, Sandrine, qui vit toujours avec sa conjointe, mentionne une difference par
rapport son seuil de tolérance face la violence :&.)je lui donne moins de pouvoir. Quand
même qu'elle se choque j'en accepte beaucoup moins maintenant* (8: 42).

5.3.2. Les réactions face à leur conjointe.

Les femmes de l'6tude semblent avoir eu trois types de reactions face il leur conjointe.
Elles ont cherché à leur venir en aide, à les protéger et, dans certains cas, elles ont privilegi6 les
justifications de leur conjointe vis-&-visleur comportement, comme nous le verrons ci-dessous.

Bien que six des huit femmes aient initié la rupture d&ïnitive, elles sont demeurées plus ou
moins longtemps avec leur conjointe qui etait violente. Quand eues identifiaient alors qu'elles
n'étaient pas responsables du problème, pourquoi ne partaient-eues pas? Pour la majorite, il

34 Le chapim suivant sera consacré h l'aide que les femmes lesbiennes violentées par leur conjointe ont 6tC chercher.
s'agissait de rester avec leur conjointe pour l'aider à changer et la rendre heureuse, comme le
rapporte Sandrine : :Puuù moi bon je suis fait comme ça,vois-tu, je pensais toujours à l'autre,
qu 'elle était mal. puis je voulais essuyer de l 'aider dmrr sa misère. dàns su peihew (8: 15). Ainsi,
certaines femmes rencontrées se sont vues adopter des rôles maternants envers leur conjointe.
Dans une des situations. une femme associait le rôle qu'avait joué sa conjointe à celui d'un
enfant qui cherche sa mère en sa conjointe. Dans une autre situation, où l'enfant de la conjointe
violente etait present, la femme violentee se voyait comme celle qui apportait une stabilitk
affective dans le couple et dans la famille.

La plupart des femmes, après avoir demandé des explications à leur conjointe sur ses
comportements, ont essaye de les aider à se sortir du problhme identif6 comme la source
possible de la violence. Par exemple, France tentait d'apporter de l'aide à sa conjointe qui avait
v6cu de l'inceste : rParce que moi je l'excusais. Bon je savais qu 'elle avait des problèmes, elle
me disait ce qu'il lui uvait fait son père. Aiors moi je l'écoutais, je l'amenais à des conférences»
(4: 63).

Dans les situations où les conjointes abordaient leur douleur personnelle et qu'elles
disaient regretter leurs agissements, les femmes violentées avaient tendance les excuser, à les
pardonner. Ce qui demontre que les justifications des conjointes violentes peuvent avoir un effet
de d6responsabilisationface à la violence et egaiement avoir un impact sur le fait de se considérer
victime ou agresseure. C'est-à-dire que l'agresseure devient en quelque sorte la victime et que la
victime se detache de sa propre souffrance. Picard et O'Brian (1995) parlent d'un désarroi crée
par la conjointe qui «joue la victime». Ce fut le cas pour Sarah-Anne :
ide l'ai crue plusieurs mois, j'avais comme pitié d'elle :Oui c'est vrai Eue
travaille trop. Puis elle boit beaucoup, puis elle a beaucoup de pression. Puis
sonfrère vient de se suicider. Ah ouij 'en trouvais des défaites. Sauf que je me
trouvais par de défites à m i p o u r partim (5: 15).

Dans le but de protéger leur conjointe et sa reputation, certaines femmes s'imposaient le


silence. Chantale s'est empêchee de parler à ses proches de la situation qu'elle subissait pour
eviter de mettre à jour les comportements violents de sa conjointe : d ùje ne pouvais pas en
parler, ni dans mon milieu, ni dans le groupe, ni à mes amis. Je ne pouvais pas parce que je me
disais :Dans le fond elle a m l et qu'est-ce que les autres vont penser d'elle. C'est ça que je me
aïsais» (6: 55-56).
Même lors de rupture, des femmes ont cherche ii aider leur conjointe. Chantale, qui avait
initie la rupture, ressentait de la culpabilité face il sa conjointe qui vivait mai la séparation. Elie
s'est endettée pour lui venir en aide :
uElle dkait :TUsuiF dje ne suis pas capable de vntre Fa la rupture. Alors je
l'ai aidée à s'installer9je lui ai même prêté de l'argent, je dis ça, maisje n'ai
par prêté d'argent, j'en ai pas d'argent. Je lui ai prêté mes deux cartes de
crédit Fait que là hein? Je me sentais coupable quelque part encore mettons
hein?» (6: 41).

Plusieurs femmes ont tendance à pnvilegier les justifications de leur agresseure. L'emprise
et la force de persuasion qu'avait la conjointe de France l'empêchaient de mettre hn la relation
et ceci maigré le fait qu'eue se reconnaissait une force de caractère :
d e me disais :c'est pas ce genre de vie là que je veux Il faut que je fasse
quelque chose. C'est pour ça que je voulais toujours la quifier. Ça ne marchait
pas, elle me rappelait tout le temps, c'était épouvantable les promesses qu'elle
pouvait me faire. Elle me convainquait. Je ne comprenaii pas pourquoi qu'elle
me convainquaitparce que je me disais :C'estfini, quand tu décides quelque
chose habituellement tu ne reviens pas en arrière parce que ta décision elle est
réfléchie, elle est &ie, t'es sûre de ton Maire quand tu prendr une décision.
Puis là à chaque fois tu sais j'étais découragée de mi parce que je m'étais
laissée avoir» (4:34-35).

Quand on regarde les réactions qu'ont eues les femmes de l'btude face à la violence subie,
on se rend compte qu'elles sont semblables celles des victimes h6térosexueUes. Par exemple,
chercher sa part de responsabilite et d6velopper diverses stratégies de survie. Par ailleurs,
certaines stratégies de survie semblent s'appliquer davantage chez les lesbiennes. Il s'agit du
renoncement il demander l'aide des policiers pour s'éviter une autre violence, l'homophobie. De
plus, certaines victimes doivent developper une vigilance pour bviter, lors de crise, que leur
conjointe ne devoile leur orientation sexuelle.

Des Btudes ont montre que la légitime dkfense, dans des situations de violence conjugale,
est plus fréquente chez Les lesbiennes. Tel que decrit par une femme de 1'6tude et comme le
sugg8re (Lacombe. 1990), cette riposte, même s'il s'agit d'une légitime defense, renforce les
sentiments de honte et de culpabilite?de la victime.

Quant aux &actions des femmes face à leur conjointe, c'est-&-due aider l'autre, priviiégier
ses justifications et avoir l'espoir d'un changement, on les retrouve chez les femmes
hét6rosexuelies (Barnea et Lopez-Real, 1985) et chez les lesbiennes (Renzetti, 1992; Hammond,
1989). Cependant, les motifs qui poussent les lesbiennes vouloir protéger leur partenaire sont
souvent refit%h la réalité lesbienne. Connaissant la fragilité et la souffrance de sa partenaire, le
manque de soutien social qui rend vulnerable les lesbiennes, la victime peut &treprête à accepter
ce qu'elle n'aurait peut-être pas accepté autrement (Guay, 1995).

5.4. Les conséquences de la violence.

Les conséquences de la violence conjugale sont innombrables. Peu importe le type de


violence vecue, eue affecte la fois l'intégrité psychologique et physique d'une personne
(Larouche, 1987). De plus, les effets dévastateurs de cette violence se font sentu sur divers
plans. Ii sera question des conséquences sur le plan personnel, sur le plan amoureux avec
d'autres personnes, au niveau social, fmancier et les effets de cette violence sur le travail.

5.4.1. Sur le plan personnel.

Sur le plan personnel, il semble que le doute occupe une grande place. De quoi les femmes
violentees doutent-elies? De leur jugement et de leur compréhension des Bvenements comme en
témoigne Lise : elle disait :Tu me parles bête, tu me parles fort, arrête de crier. on aurait dit
que c'est moi qui était violente. elle a fait atteinte à mu perceptionw (1: 10).Plusieurs femmes se
sentent mêltes, elles perçoivent deux personnalit& chez leur conjointe, une qui incarne la
douceur, la génerositk et l'autre qui est violente, comme le mentionne Chantale : «J'étais
comblée nffectivernentpar cette fille là, c'était quelque chose de très beau pour moi. D'un autre
côté, il y avait de la violence. j'avnis de la diflculté à faire le ménage dans tout ça. Je ne
comprenait pas vrai ment^ (6: 16). Eiies finissent par douter de leurs propres agissements, de
leur façon d'être en relation, de leur engagement Pour certaines femmes de lT6tude,le doute &ait
si préoccupant qu'elles se demandaient si elles n'étaient pas en train de devenir folles. Ceiies qui
en sont leur première relation amoureuse avec une femme peuvent kgdement être menees A de
grands questionnements sur leur orientation sexuelle, comme ce fut le cas pour Lise : «Est-ce
que c'est vraiment avec une femme que je veux être? Ou est-ce que je peux plaire à une autre
femme? Parce qu'elle semblait tellement dire que je ne plaisais pus» ( 1 :41).

Par le contrale, le blâme, les blessures, l'humiliation et la manipulation par leur conjointe,
l'identité des femmes violentées est fortement affectée. Mireille se sentait detruite :
uPqrhologiquernent j'ai trouvé ça terrible. Je me sentais complètement démolie, je ne me
reconnaissaisplus, ça m'attaquait dans ma personnalité^ (2: 2). Plusieurs femmes ont vu leu
confiance touchee. confiance en soi, confiance dans leurs comp&.ences et ce, sur difftrent!
plans. Sur le plan sexuel pour Lise : rÇa eu comme conséquence que le sexe (...) j'en sui!
venue à croire que moije l'avais surtout par l'&%ire avec une femme* (1: 13). Sa coni?ance fu
egalement touchée sur le plan du travail : d e manque de confiance en mi au travail étai
flagrant. Là j'étuis rendue que j'avais de la misère à m'exprimer, à prendre position. Avant, jt
n'étais pus comme GaH (1: 34). La confiiance de Sacah-Anne fut tbranlee dans son rôle de mère
d e l a n'avait par d'allure, je n'avais même plus confiance en moi vis-à-vis ma fille. Je me disuii
queje n'étais pas une bonne mère. Je remenais tout en questionw (5: 27).

Les femmes victimes de violence ont traversé differents ttats, des dtats d'âme, des étau
d'être, des états physiques. Ces dtats peuvent être transitoires, reliés à une crise situationnelle
Pou.certaines femmes de l'étude, après avoir rompu la relation, cette crise s'est tranquillemeni
estompée. Pour d'autres. les traces sont encore bien presentes malgre le temps qui s'tcoule.
Dans certains cas. peut-être s'agit-il de conséquences qui vont jusqu'à créer des problèmes de
sant6 mentale. Nous ne pouvons cependant l'affirmer puisque le cadre de cette recherche ne
permettait pas de mesurer ce type de problème.

Ce qui demeure, c'est que chez toutes les femmes i n t e ~ e w hbeaucoup


. de sentiments
s'entremêlent. Les victimes peuvent vivre des Btats de grandes tristesses face à la perte de leur
conjointe, car les agresseures n'ont pas eu que des comportements violents envers elles comme
en témoigne Lise : d'était une femme très attachante, on avait parfois énormément de plaisir
ensemble. elle était très intelligente. Nos grandes conversations me manquent& ( 1: 19).
Évidemment, comme il s'agit d'une relation amoureuse, le côte affectif entre en ligne de compte.
Ainsi. pour Chantale, la rupture, même si elle permettait le bris du cycle de la violence,
comportait aussi un grand vide : d'avais un grand vide affectif; elle me manquait tellement,je
me disais il ne faut pas qu 'elle m'appelle, sinon je vaisflancheru (6: 46). Mais comme il s'agit
aussi d'une relation amoureuse dans laquelle il y a de la violence, d'autres ttats accompagnent
aussi les sentiments de regrets. Le climat de peur, entretenu par les agresseures, a eu des
répercussions importantes sur les femmes. Voici ce qu'en dit Anne : d'avais énormémentpeur,
je savais qu'elle était capable d'aller chercher un fusil chez son oncle. Je faisais tellement
d'angoisse, je n'étais plus capable de rester chez moi, j'avais des sueurs froides, je pouvais
perdre connaissancew (7: 13).

D'autres sentiments sont partagés par plusieurs victimes, la honte et la cuipabüité face la
situation de violence. comme ce fut le cas pour Sarah-Anne :al'étais gênée de moi,j'étak déçue
de mi de m'être retrouvée en relation avec Marthe, je me sentais coupable de vivre ça* (5: 46).
Les victimes se sentent honteuses d'avoir endure cette violence et de ne pas être parvenues y
mettre fin (Larouche, 1987).

Les commentaires precedents m'amknent à aborder la perte d'estime de soi que vivent les
femmes de LT6tudeet que l'on retrouve aussi chez les victimes h&érosexuelles (Bamett & Lopez-
Real, 1985; Bowker, 1986). Toutefois, il y a encore ici une sptkificité. Car pour Ginette, qui
vivait avec une conjointe qui acceptait difficilement son homosexualit6, une des conséquences
hit une perte d'estime de soi reliée au fait d'être lesbienne :«Et aussi toute la perte d'estime par
rappoa à mon orientation. Le reflet de mon i m g e comme quelque chose qui n'était par correct
d'être homosemtelle~(3: 80). Pour Sandrine, cette perte d'estime &ait generalist5e : nElle me
faisait sentir inférieure, elle m'enlevait l'estime de moi en m'attaquant verbalement ou
physiquement. Je n'étais pas capable de me défendre, ça me faisait vivre des échecs. je me
voyais écrasée et sans moyen pour m'en sortir)>(8: 38).

Il semble que la perte d'estime de soi puisse avoir un effet sur la capacite faire face à
l'agression. En effet, la violence subie peut gEntrer un sentiment d'impuissance. Hammond
(1989), qui intervient comme psychologue auprés de lesbiennes, a constat6 que cette
impuissance peut contribuer maintenir les victimes dans la relation. Pour cenaines femmes, ces
sentiments d'impuissance les amhent à une consommation plus importante d'alcool et de
drogue, une forme d'autodestruction observée aussi chez les femmes h6térosexueiles violentees
par leur conjoint (Larouche, 1987). Elles peuvent même aller jusqu'à d6velopper des idees
suicidaires comme ce fut le cas pour Sandrine : «A toutes les fois que je rencontrais un char.
j'avais envie de donner un coup de roue. Je ne pouvais plus vivre cette situation-là» (8: 47). Si,
A certains moments, la situation de violence generait de la peur et un sentiment d'impuissance,
elle generait aussi de la col&re,comme le souligne Chantale :
.J'étais complètement vidée. des nuits entières à l'écouter. J'ai perdu
beaucoup de poids, j'avais de la peine pis en même temps j'avais peur, elle
entrait chez mi. (...) J'ai repris mes clés parce que j'avais peur* (6:46). «Je
me sentais tellement en colère, il fallait absolument que je trouve un moyen de
la libérer cette colère-là, mis je ne savais par commentfaire* (6: 54).

Larouche (1987) rappelle que toutes les victimes de violence ressentent de la c o k e et que
certaines l'occultent et la retourne contre elles.

Le climat de peur et d'ins~curitévecues par les femmes interviewées, les diverses pertes
auxquelles eiles ont fait face (liees ii I'estime de soi, à la confiance en soi et aux pertes affectives)
peuvent avoir de nombreuses repercussions sur leur état physique. Ginette decrit ainsi comment
elle se sentait envahie par les émotions :~J'étaisperturbée, il y avait une perte de concentration
Je pensuis juste à ça. j'étais tout le temps dans une boule d'émotionsw (3: 36). D'autres femmes
ont pu vivre des d6balancements divers au niveau de leur état de santé :perte d7ap@titqui amène
une perte de poids, ou prise de poids importante : pendm mit qu'on a vécu ensemble,je mruigeais
mes émotions, j'ai pris 30 livres. Quand elle me harcelait. après la rupture, j'ai fait de
1'angoisse, de l'insomnie, j'avais toujours mal au coeur, je ne mangeais plus>cs»(7:35). II est
évident, pour Lise, que les malaises physiques qu'elle a eus étaient relies ii la situation de
violence :
d e me suis mise à faire des chutes de pression. J'avais jamais fait ça avant.
C'est drôle ça fait trois m i s que je suis en relation avec une autre personne
avec qui ça va bien et tout est entré dans l'ordre. Mais quand j i pense, il y
avait le sommeil, je ne dormais à peu près par. Le stress aussi, les tensions
qui étaient présentes. Je me souviens un bout de temps, j'avais toujours un
serrement à l'estomac,j'avais peur de faire un infarctus. Tout ça c'est appam
durant la relation et c'est complètement arrêté Ià* (1: 36).

5.4.2. Sur le plan amoureux avec d'autres personnes.

La violence conjugale peut avoir des effets sur les relations amoureuses subsequentes.
D'abord, cela peut créer un sentiment de mefiance qui empêche les femmes de vivre d'autres
relations, comme pour Sarah-Anne : «Avec ce que j'avais vécu, Fa pris deux ans avant de me
dire peut-être qu'il y a des femmes qui sont douces. Je n'avais plus confiance, j'étais très
mTante face aux autresfemmes Zesbiennesw (5: 38). En effet, la violence d'une conjointe brise
quelque chose dans la capacite d'intimite (Guay, 1995). Cette violence vécue de la part d'une
femme peut aussi provoquer une grande déception, comme ce hit le cas pour Chantale :
«Je me disais c'est pas vrai qu'une femme va avoir des comportements de ce
genre-lh C'est un des aspectr décevants et d i m e s à accepter ç a Je me disais
c'est pas vrai que je vais revivre les mêmes affaires que dans un couple hétéro.
Je vivais beaucoup de colère^ (6: 39).

Pour Lise,cette colih-e fut ressentie au moment où elle vivait une nouvelle relation, laquelle lui
permettait de prendre conscience de l'impact qu'avait eu sur elle tout ce que son ex-conjointe
avait tenté de lui faire croire et qui en fait était faux : «Quand j'ai vécu une autre relation de
couple avec une aunefemme,je me suis souvent sentie en colère. Parce que je voyais que c'était
par ce que L'autre m'avait dit. C'étnitpas m i qui n'avais par le mur. Ça lui appartemnart
tout çafB
(1: 14). Pour une autre femme, la violence qu'elle a subie a engendre chez elle des sentiments
d'amertume qui ne la quittent toujours pas d'ailleurs :
après la rupture je constatais qu'elle était venue chercher chez moi ce que
j'avais de meilleur. Et je réalise qu'il y a encore un impact, c'est l'amertume.
La personne m e c qui je partage maintenant ma vie me disait dernièrement
qu'avant de vivre de la violence avec cette personne-là, je n'étais pas comme
ça» (3: 25).

5.4.3. Sur le plan social.

Sur le plan social, une constquence ineluctable de la violence conjugale est trés
certainement l'isolement. Cet isolement peut être provoqué d'une part par des interdictions de la
conjointe qui empêchent les victimes de prendre ou de garder contact avec leur entourage. Ou
encore, l'isolement peut être provoqué par des reproches faits aux femmes, ce qui les améne à
faire d'&ormes concessions dans le but d'accorder une priorité aux besoins de leur conjointe au
detriment de leurs propres besoins et plaisirs. D'autre part, il peut s'ensuivre un isolement qui
decoule des comportements des conjointes qui sont inadéquats et qui occasionnent des ennuis
aux victimes. En effet, Anne ressentait différents malaises face au comportement qu'avait sa
conjointe devant les amis, eile craignait que l'agir de celle-ci contribue au dévoilement de son
orientation sexuelle et ce, en public :
(<Jem'empêchais d'aller voir mes amis parce qu'elle me gênait, elle buvait et
disait toutes sortes d'affaires. Après 8-9 mois vécus ensemble j'ai arrêté le
sport, j'ai arrêté de voir mes amis. C'était même gênant d'aller souper au
restaurant avec elle, elle était tellement d é m n r n a ~ v eelle
, s'en foutait que les
autres se rendent compte que nous étions lesbiennes. Ça me mettait beaucoup
sur les n e g b (7: 18).

Après une rupture, les victimes peuvent être confrontées à un autre type d'isolement Tel
que nous l'avons vu pr&6demment, la m6fiance developpée à partir d'une mauvaise experience
vecue ne les encourage pas à créer facilement des liens avec de nouvelles personnes. De plus, et
pour diff6rentes raisons, les victimes peuvent vouloir 6viter de revoir leur ex-conjointe ou sont
contraintes, à cause des menaces, ne pas remettre les pieds dans des l i e u fréquentés parcelle-
ci. Les endroits de rencontre, les bars gais ou pour lesbiennes sont rares, ce qui fait que
plusieurs n'ont plus d'endroits où d e r , comme en témoigne Sarah-Anne : 4 e bar-là c'était sa
place à elle. Je ne savais pas tout ce qui s'était dit sur moi. De toute façon,je ne voulais pas la
revoir, avec les menaces qu'elle m'avait fait, j 'avais peur. Ça fait que j'ai arrêté de sortirw
(5: 49). Les services du Triangle Rosd5 decrivent bien ce probléme qu'est l'isolement des
lesbiennes puisque les bars continuent d'être les principaux lieux où elies peuvent créer des
contacts avec les membres de leur communauté,

Après la separation, certaines femmes ont aussi vécu des ruptures amicales, c'est-à-dire
qu'elles n'ont plus eu de contact avec les amis de leur ex-conjointe. Dans les cas oh la conjointe
a des enfants, aprks que la rupture ait eu lieu, les liens entre ces derniers et la victime sont
souvent coupés, ce qui était particulièrement douloureux pour Ginette : «Et d'ailleurs je pense
que c'est la plus grande perte que j'ai eue quand je me suis retirée de la relation. Je perdais le
contact avec cet enfmrtlà» (3 :57).

5.4.4. Sur le plan financier.

Pou. venir en aide à leur conjointe, quelques femmes ont également eu à assumer des
pertes financi&res.Cenaines ont perdu leurs économies mises de côte! de peine et de misère.
D'autres ont perdu «un coussin» qui leur procurait une sécurité financikre. D'autre se sont
endettées et ont subi des pertes consid&ables, comme ce fut le cas pour Anne :
nT'es plus capable de faire des projets, je ne comptais plus à lu fin- Mon
argent. je ne l'ai jamais revu. (... ) Tu p e r h au niveau monétaire, tu perds au
niveau de ta personne, tu perds au niveau de ta confiance. Tu te retrouves dans
le néant» (7: 32).

S. 4.5. Sur le plan du travail.

La violence semble avoir des consdquences dgalement sur le travail. Certaines femmes
disent que leur rendement fut atteint. En raison de la situation de violence, plusieurs ont dû
prendre des journees de maladie, comme le rapporte Sandrine : d e pleurais tellement, le marin je
me levais et j 'allais travailler avec les yeux tous pochés. Ça n'allait pas, j 'étais ben moins
eflcace. Je prenais souvent des congés de maladie» (8: 41). D'autres ont dû s'absenter du
travail durant des périodes plus ou moins longues, c'est-à-dire prendre des congés de maladie.

35 Les Services du Tr*ugk Rose (STR) est une agence ontarienne de services sociaux qui offre divers services
principalement aux gais, aux lesbiennes et aux bisexuels.
Tel que l'a constat6 Hammond (1989), les cons6quences de la violence conjugale et le
portrait des pertes pour les victimes lesbiennes ne sont pas si differentes de ceiles identifiées
chez les femmes hétérosexuelles. C'est-à-dire que cette violence &ecte la sante, l'estime de soi,
la confiance en soi. Elie entraîne l'isolement, eiie peut porter atteinte à l'autonomie financiére,
avoir des repercussions sur d'autres relations et sur le travail. Cependant, il y a des
particda&&, par exemple, la perte d'estime que peuvent vivre certaines lesbiennes par rapport à
leur orientation sexuelle et qui est reliée au le contexte de vie des lesbiennes. En effet,
l'homophobie les amènes souvent intégrer une image negative d'elles-mêmes. Or, il est
demontre qu'une faible estime de soi contribue à augmenter la tolt5rance envers la violence
(Carlson, 1978). De plus, le stress auquel doivent faire face certaines d'entre elles qui ont peur
du devoilement de leur orientation et des conséquences que cela pourrait avoir sur leur vie (un
rejet pius important, une perte d'emploi, etc.), est aussi sp6cifque aux lesbiennes.

Enfin, une autre particularité concerne l'isolement auquel sont conhaintes certaines d'entre
elles après une rupture. Comme elles ont peu d'endroits de rencontre, et si la conjointe
«s'accapare» le bar fmuent6 par les lesbiennes, eues perdent le lieu qui leur permettait de briser
leur isolement et où elles pouvaient se permettre d'être elles-mêmes sans être jugees sur leur
orientation.

5.5. Les causes et les facteurs associés à la violence.

Cette section permet de constater comment les femmes lesbiennes violentées par leur
conjointe expliquent le fait d'avoir bté violentées et comment elies expliquent la violence de leur
conjointe.

À la question posée : comment expliquez-vous le fait d'avoir été violentée?, les femmes
interviewées ont eu deux types de repenses. La majorite l'explique à partir de facteurs
individuels. Ce type d'explication implique que la victime serait responsable de la violence. Soit
qu'elle ait fait quelque chose, soit qu'elle ait omis quelque chose ou encore qu'eue poss&dedes
caractéristiques qui ~attirenbla violence. Une seule réfère des facteurs sociaux.

En ce qui concerne les comportements individuels et les traits de personnalité, il semble


que pour Mireille, la violence qu'elle a vecu s'expliquerait par un manque d'affirmation de sa
part. La peur de la solitude l'aurait empêchee de s'af%ier : pourquoij'ai subi cene violence
psychologique? J'ai de la misère à me l'eapliquer. J'ai l'impression que sije répondF, la fille va
me quitter. C'est cette peur là de solitude qui m'empêche de parlerw (2: 36). Comme le souligne
Re~lzetti(1989), la peur d'être quittée est reliée à l'isolement Comme les lesbiennes ne sont pas
validees socialement, l'hostilité leur endroit les amene à se refermer sur elles-mêmes. Cette
fermeture sur elles-mêmesg&n&eraitde 17Wcuritéface à une séparation 6ventueUe.

Sandrine s'explique le fait d'avoir et6 violentée par son incapacite à se défendre et sa
dépendance affective envers sa conjointe : J'étais incapable de me défendre et je retournais
toujours parce que je suis dépendante affective d'elle* (8: 87). Pour sa part, Sarah-Anne a
l'impression d'attirer les femmes dominantes : rJe pense que je suis une femme qui est faible,
j'ai pas confiance en moi. Ces personnes Id, les dominants, ik le sentent hein?# (5: 42). Ginette
explique qu'elle a vtcu de la violence en raison de sa naïveté : d e pense que j'aiparkipé d'me
certaine façon. Lu participation c'est d'avoir été là pendmit deux ans. Je pense que j'ai été nafve,
je croyais ses belles histoires* (3: 64). Cette naïveté-là peut être liée à ce que certaines femmes
ont rapporté à l'effet qu'elies ne savaient pas que la violence entre femmes pouvait exister et que
si eues l'avaient su, elles auraient probablement quitté leur conjointe plus tôt.

En ce qui a trait à Anne, le fait d'avoir Cté violentée rekve d'une socialisation déficientepar
rapport à l'affirmation. La socialisation il laquelle elle fait allusion refère à la victimisation : J'ai
pas appris quand j'étnk petite à me respecter pis à dire :T'as par le droit de me faire ça Je n 'ai
jamais voulue déplaire, je voulais l'aider. Quand elle me faisait mal, mon moyen de défense
c 'était de pleurer# (7:43). Le modele f6minin qui encourage des attitudes de passivit6 rend les
femmes wlnerables à la violence en augmentant leur paralysie devant les agressions (Larouche,
1987).

Qu'elles attribuent le fait d'avoir Cté violentée à un manque d'affirmation, à une incapacité
se defendre, à une dépendance affective, à des caract6ristiques personnelles qui attireraient les
personnes violentes ou ii leur naïveté, il apparait clairement que les femmes cherchent leur part
de responsabilité dans la violence qu'elies ont subie.

Maintenant à la question posée :comment expliquez-vous le fait que votre conjointe ait CtC
violente avec vous?, tout comme à la question precbdente, les femmes ont eu deux types de
réponses. On retrouve des explications d'ordre individuel et d'ordre social.

Ainsi, plusieurs femmes expliquent les comportements de leur conjointe par des facteurs
individuels, par exemple : une grande dépendance affective de leur conjointe, un manque de
confiance en elies ou le fait qu'elles soient mal dans leur peau. À cet effet, Lockart et al. (1994)
voient un lien entre la dependance, c'est-&-dire la fusion, et la violence. Pour ces auteures, la
dt5pendance serait davantage marquée chez les couples lesbiens qu'ht5térosexuels. Ce phenornihe
s'expliquerait par l'isolement que vivent les lesbiennes et qui les pousserait à developper une
furion dans leur couple. L'étude de Kurdek (1988) et celle de Renzetti (1992) montrent une forte
corrélation entre la violence, la dependance de la partenaire violente et l'existence d'un contlit
autour du désir d'autonomie exprimé par h partenaire violentée.

Certaines femmes refirent à la personnalité de leur conjointe pour expliquer leurs actes.
Ainsi, Lise dira qu'il s'agit d'une question de temperament et de gains : p c'était pour obtenir ce
qu 'elle voulait, elle a besoin de décider et qu 'on subvienne à ses besoins, c 'est sa personnalité
qui est comme ça* (1: 60). D'autre part, pour Ginette, la violence de sa conjointe serait Me sa
difficulté d'accepter son homosexualit6 : nElle était perturbée, elle ne voulait pas être
homosexuelle. C'est comme si elle avait voulu m e r avec cet aspect-là de sa personne et elle
s'est retrouvée avec des réponses qui ne faisaientpas son affaires (3: 101). L'abus d'alcool fut
aussi cible par une femme qui disait avoir v&u du contrôle en permanence avec sa conjointe,
mais de la violence uniquement quand celle-ci etait en dtat d'&ri&& Pour Anne, la violence de sa
conjointe s'explique par une enfance et plus particuli&rementpar le rejet vécu durant
cette période ainsi que l'homophobie v&ue en tant que lesbienne :
«Je sais qu'elle a vécu beaucoup de rejet durant son enfance. Puis tu sais
quand on est lesbienne, et c'est une des spécificités, on vit beaucoup de rejet.
A plusieurs niveaux Et c'est toujours dur de vivre du rejet, on ne s'habitue
pas à fa. Je pense que les gens violents doivent beaucoup souffrir. Puis elle
avait un comportement c o r n si elle en voulait à la terre entière% (6: 84).

Une femme interviewCe a referer des explications plus sociales pour comprendre les
comportements de sa conjointe. Ainsi, Lise fait un lien entre la socialisation et les
comportements de sa conjointe : M L besoin ~ de contrôle et de pouvoir peut venir de
l'apprentissage familial et aussi la société. Je pense que même en tant que femme, tu peux
odopter des valeurs comme écraser les autres pow amber à tesfinsw (1:56).

Enfin, plusieurs femmes ont parle des ressemblances et des differences qu'elles
percevaient entre la violence conjugale chez les het&osexuels et les lesbiennes. Kl est intéressant
de constater que lorsque l'on interroge les repondantes sur les raisons qui expliquent la violence
qu'elles ont subie, les femmes ont tendances à donner des explications relides à des
carac~ristiquespersonnelies. Par contre, lorsqu'eiies abordent d'elles-mêmes les ressemblances
et les ciifferences entre la violence chez les hetérosexuels et les lesbiennes, elles refèrent à des
facteurs d'ordre social.
Ahsi pour Mireille, la ressemblance se situerait au niveau de la présence de rapports
in6galitaires dans le couple : quand il y a de la violence danr un couple. quel qu'il soit, c'est
qu'il n'y a pas de rapports égalitaires. Les hommes comme les femmes ont un potentiel de
violence en eux, c 'est qu 'on ne 1'exprime pas de la même façon* (2: 43). Ginette parle du
potentiel de violence qui peut se trouver chez les femmes :«C'est juste que chez lesfemmes ça
se manifeste autrement. L a femmes. on peut être violente à notre façon, mec les moyens qu'on
nous a permis d'avoir» (3: 137).

Certaines ont mentionné une difference dans la présence, la fréquence et les types de
violence exercés. De plus, Mireille mentionne une normalisation de la violence des hommes
envers les femmes :
d e crois que les hommes sont plus violents physiquement que les femmes
peuvent l'être. Les hommes sont très dominants dans notre société. Ils
peuvent tout se permettre. C'est comme si c'est quelque chose d'acquis. C'est
nomtul qu'une femme vive de la violence de la part d'un homme» (2:42).

À l'inverse, la violence des femmes envers les femmes est -cile à concevoir, ce qui peut avoir
des cons6quences sur I'identifcation du probléme, comme le rapporte Chantale :~ û idéalise
n les
relations entre femmes. On a de la dificulté à penser qu'une femme peut avoir des
comportements violents. Je pense que peut être plus long à identifier qu'on vit de la violence.
En général, y a plus d'hommes qui sont violents, (6: 92).

Dans les spécificités relevees par les répondantes de lt6tude, il y a l'homophobie identifiée
précedemment au rejet que subissent les lesbiennes. De plus, une Merence dans les services
d'aide hit idenWi6e : NAUniveau de l'aide, ce n 'est même pas à comparer. On a beaucoup moins
de services que les hétérosexuelles» (5:46). Également, le fait que la cornrnunauk2 lesbienne soit
si petite ne facilite pas les confidences :Non a besoin d'en parler. Et dam le milieu, c 'est comme
tellement restreint,pour toutes cesfemmes Id c 'est d i n d e d'en parler» (6:92).En effet, trouver
quelqu'une qui ne soit pas une connaissance de son ex-conjointeest dificile (Guay, 1995).

De tous les facteurs qui furent identifiés aux causes de la violence ou aux facteurs qui
accroissent la vuln6rabilité à celle-ci, ce sont les facteurs individuels que l'on retrouve
majoritairement. Mon expérience comme intervenante auprès des femmes violentees m'amène à
constater que les victimes de violence conjugale ont une grande facilite identifier les facteurs
d'ordre individuel tels des problèmes emotifs, la dependance, un manque de confiance, l'alcool,
etc. Toutefois, ce que les repondantes ont identifie des specificit6s chez les lesbiennes
violentées relkve davantage de facteurs sociaux, tout comme dans la recherche de Chesley,
MacAuley, Eüstock (1992) où 30% des r6pondantes de l'étude ont identifie i'isolement et
l'homophobie comme des facteurs ayant contribué à l9appa&ion de comportements violents.

5.6. Synthèse et discussion.


Avant même de vivre de la violence dans leur couple, certaines des femmes de l'étude
étaient isolees ou rejetées par leur famille et / ou par la société en raison de leur orientation
sexuelle. Les repondantes ont avoue ne pas divulguer à n'importe qui et n'importe où leur
orientation sexueile, elles sont vigilantes il cet égard et prefèrent parfois qu'on présume qu'elles
sont h6tt5rosexuelles pour s'eviter des jugements et du rejet. Signalons que les femmes
lesbiennes peuvent être contraintes au silence (dans différentes sphères de leur vie, par exemple
dans leur milieu de travail) en ce qui a trait à leur relation amoureuse avec une femme et ce, avant
même d'être violentées dans leur couple.

En quoi le vecu e t l7exp&ience de violence des lesbiennes diffèrent-ils des femmes


h&érosexuelles? En ce qui concerne la violence subie, on retrouve des similitudes entre le
contrôle exerce par des hommes dans les relations hét&osexuelles et celui exercé par des femmes
dans des relations lesbiennes. Mais il ressort aussi des dB6rences. Celles-ci semblent, une fois
de plus, tenir l'isolement, au rejet et à I'homophobie. En effet, et tel que decrit précedemment,
les conjointes violentes peuvent par exemple manipuler l'autre afin d'obtenir ce qu'eile veulent,
en jouant sur des plans (des sensibilités) qui toucheront assurément les victimes lesbiennes. Une
zone importante de vuln6rabilité sur laquelie peuvent intervenir les conjointes violentes concerne
le devoilement possible de leur orientation sexuelle.

Pour ce qui est des reactions des femmes lesbiennes violentées, les particularit&
retrouvh sont davantage reLiées aux motifs qui encouragent les victimes B vouloir protéger leur
conjointe violente. Motifs qui decoulent une fois de plus de la riealité lesbienne. Le fait de faire
partie d'une minorité qui est exclue et jugée s6vhement a m h e certaines victimes à cacher la
violence qu'elles subissent ou cacher le fait que leur conjointe est violente. De plus, cette rc5aiit6
les améne A se sentir dans l'obligation d'aider leur conjointe violente qui peut être isolée' rejetee,
etc.

Les conséquences de la violence qui sont plus sp6cifiques aux lesbiennes touchent l'estime
de soi, c'est-à-dire que la violence a pu les atteindre directement dans leur identité lesbienne qui
était, dans certains cas, déjà affectée par l'homophobie. Également, un stress particulier peut être
vecu par les victimes qui craignent que leur orientation ne soit d6voilée et ce que pourrait avoir
comme consQuences ce devoilement dans leur vie, au travail, etc. L'isolement, apr&sune
rupture, peut être v&u de façon tout aussi particulière. li s'agit cette fois des endroits spécifiques
aux lesbiennes (les bars) qui existent en nombre limité et du fait que certaines des victimes se
voient interdire l'accès ces lieux par la conjointe ou encore qu'eues prgfèrent ne plus y aller
pour eviter de rencontrer leur exconjointe violente. Les victimes peuvent alors être confkontées à
un très grand isolement social.

Parmi les causes et les facteurs associ& à la violence qui ont tté idenWrés par les femmes
de l'étude, il ressort aussi des particulantés reliées à l'isolement et à I'homophobie, ceux-ciCtant
consid&& comme des facteurs ayant contribués il I'agression.
CHAPITRE VI

SECOND VOLET :
ANALYSE DE L'AIDE, DES BESOINS ET DES SERVICES.

Ce chapitre correspond au second volet du schema d'entrevue, soit a 1'6valuation de l'aide


reçue et à ce que pourraient être les services offerts. Les questions posées dans le cadre de ce
volet ont permis d'identifier les types d'aide utilisés par les femmes de I'etude, certains de leurs
besoins et, enfin, les seMces qu'elles souhaiteraient avoir pour y r6pondre.

6.1. Les types d'aide utilisés par les femmes violentées.


Les femmes de l'btude ont utilisé divers types d'aide pour tenter dT6chapper la situation
de violence. Je documenterai la recherche d'aide partir des personnes ou des services consultés
en regard du motif de la demande (le besoin initial), les seMces reçus (la réponse à ces besoins)
et 196valuationque les femmes font de cette aide. D'abord, je traiterai de l'aide apportee par les
proches, les therapies individuelles et les interventions de groupe, les services de sant6 et les
services sociaux, les services policiers et les maisons d'hebergement.
6.1.1. Les ami(e)s et les proches.

La plupart des femmes de l'etude se sont tournées vers leurs amies ou leurs proches pour
recevoir de l'aide. Pour certaines, il s'agissait d'un besoin d'bcoute alors que pour d'autres il
pouvait s'agir d'un besoin dT&laircissementface la situation difdciie qu'elles vivaient À cette
aide demandée, les réponses varient En effet, des femmes ont reçu du support de leur entourage
allant de l'identification de la violence i la proposition d'un support concret (scenario de
protection, hebergement, accompagnement dans les démarches). Iï semble que le succks de
l'aide apportée réside dans le fait d'avoir permis, dans un premier temps, la reconnaissance du
probkme de violence et, ensuite, de favoriser une non-acceptation du comportement de la
conjointe violente. Concrètement, pour France, l'identification de la violence a eu comme
conséquence de mettre un terme A l'acceptation des excuses de l'agresseure et de permettre à la
victime d'envisager une rupture.
«Moi ça a prit Carde (une amie) qui me l'a dit (...). C'est comme une femme
battue lù avec son mari. C'est d partir de là que j'ai essayé de trouver
davantage de solutions. Alors, c'est pour ça que je te disais, avoir rencontré
cette fille-là tu sais. Pour moi, ça été une libérationw (4: 37-38).
elle m'avait appris quelque chose que je ne savais pas. Bon, elle a été
l'élément déclencheur. Pour faire voir que :Oui tu vis de la violence. Parce
que moi, je (...)je l'excusais (...).Bon je savais qu'elle avait des problèmes
puis je l'excusais. Un peu comme la femme battue avec son bonhomme fait
( ) (4: 62-63).

De plus, la dt5mystîfïcation de la Egitime defense et de l'usage de la violence amena un


éclairage d6termùiant à Ginette qui s'&ait defendue physiquement lors d'une agression de la part
de sa conjointe :
d e voudrais mentionner, parce que je pense que c'est important, c'est par
rapport aux gestes de violence que moi j'ai fais. II y a une amie qui m'a
beaucoup aidée (...).C'est comme ci j'étais plus capable de m'expliquer les
choses. Et à partir de cette explicution-làj'ai compris ce qui c'était produit. Et
j'ai rencontré cette amie-là quand même assez rapidement après l'événement
alors ça comme recadré le geste que j'avais eu» (3: 121- 122).

D'autre part, le succès de l'aide pour Lise et Sandrine repose sur le fait d'être crue, de ne
pas être jugée et d'être respectée dans leur rythme et surtout dans leur prise de décisions :
R(. ..)je me sentais crue de mes amis. Ca c'était ben ben important. Souventje
disais :Je p e u pas te reparler de ça. Tu dois être écoeuré, mais je sentais
qu'il y avait une réception . Je sentais pas de jugements. Je me jugeais
beaucoup là mais je sentais par de jugements de lu part de mes amis. Des fois
où on me disait :Je commence à avoir de la misère à la côtoyer ta blonde.
Mais notre relation a toujours été respectée. C'était mon choix. Pis on
m'isolait pas. Tu sai3 si il avait f d u que je sois isolée par mes amis en plus là
. ( 1 41).
<Ma soeur c'est bien sûr qu'elle elle ne comprenait pas que je restais l a Je
pense qu'elle aurait souhaité que je parte. Mais c'était ma décsion à moi. Il
falhit que ça vienne de moi. Parce qu'elle ne pouvait le faire à ma place mais
elle m'afait sentir que ça aurait été une des solutions* (8: 66).

Dans les situations de violence, ii est fréquent que les victimes ne soient pas crues et
supportées par les proches et l'entourage comme en témoigne Sarah-Anne :
fi(...) même au début j'en parlais avec du monde (...) à des M u s qui n'étaient
par gais, j'en aiparlé aussi à des amis qui étaient gais' qui n'ont pas vécu fa,
quelque part, ils ne voient pas vraiment ça' plus les hétérosexuels. Ils vont
prendre ça à la rigolade. Th ne prennentpar ça au sérieux Fait que tu n'as pas
le goût d'en parler. Je veux dire que tu ar besok de dire :Heille j'ai mal (...)
moi là, Ià. Je viens de vivre l'enfer* (5: 21).

L'&ude de Renzetti (1994) demontre bien que la négation de l'existence de cette violence
est un problème sérieux et qu'elle est la plus grande source d'insatisfaction des femmes. Ii ne
faut pas oublier que cette negation de l'existence de cette violence est en relation avec une autre
negation plus profonde et associée au statut ou à l'orientation sexuelle d'un groupe spécifique
dans la soci&& Dans un pareil contexte, il n'est pas etonnant que la relation d'aide soit
insatisfaisanteet inefficace par conséquent

Chez celles qui sont crues, les difficultés rencontrées sont souvent reliées au manque de
respect vis-à-vis leur rythme et leur choix de ne pas quitter leur conjointe. La pression ainsi créee
a eu comme consequence de confimer une femme au silence. Dans la situation de France, la
mt!comaissance du problème de violence et de ne pas l'identifier par conséquent amenait une
parente à viser une réconciliation, ce qui a contribu6 à la banalisation du danger qu'elle courrait
Comme le rappelle Renzetti (1992). chercher à préserver la relation de couple peut rendre la
victime vulnerable à de futures agressions.
nSaufque ma mère elle n plus essayer là de nous réconcilier. Elle me disait :
Var-t'en chez vous la Parles-lui pas. Puis elle dit je vais te téléphoner. France
me disait 56 bêtises. C'était épouvantable. Puis là je me souvenais de ce que
ma mère me disait :Répondî-lui pas. Parles-lui pas. Répondr pas elle va se
tanner à un moment h é . Puis elle va arrêter. Moi je vivais tout Ca id! fi!
J'aurais aimé que ma mère lui dise là :Bon vas-t'en chez vous (...)B (4:43-
44)
6.1.2. Les thérapies individuelles.

Les femmes violentées par leur conjointe qui ont consulté des ththpeutes l'ont fait pour
differents motifs. Ainsi, certaines femmes entreprennent des demarches auprès de diK&ents
sp&5aiistes (psychologue, psychiatre, travailleuse sociale) pour briser le cycle de la violence,
pour recevoir une aide afin de quitter la conjointe violente, pour questionner leur orientation
sexuelle ii partir d'un éclairage nouveau, pour liquider la colbre ressentie face la violence
vécue, pour recevoir de l'aide concernant un probléme de phobie, d'alcoolisme, ou encore une
peine d'amour qui n'est pas résolue, pour accompagner leur conjointe, à la demande de cette
dernière, ii une therapie de couple. Dans ce dernier cas, aprés que la thérapeute ait pris une
position ferme contre la violence, la conjointe violente cessa la th&apie.

Au niveau de la recherche d'aide vers les thérapies individuelles on retrouve des


exp6riences positives et des expériences moins positives. Je traiterai d'abord des experiences
heureuses. Pour ceiles qui ont consulté dans le cadre d'une therapie individuelle et privée, bien
que le mot violence n'ait pas éte nommé, la therapeute se positionnait en refusant clairement les
comportements de la conjointe violente. Pour Lise, le fait que la thérapeute soit lesbienne a
facilité la demarche thdrapeutique. Le plus grand apport fut d'abord de comprendre la redite
lesbienne (ghetto, bars et exclusion) et de briser quelques tabous face aux modèles types de
couples (et de règles) et l'hétérog6néité dans les mod&Ies:
rSi on parlait de sexualité. Ma copine elle me dit elle que c'est n o m 1 qu'on
fmse l'amour a u trois m i s . Mais elle elle pouvait me situer à dire :Non,
non. Il y en a qui le font comme d m tous les autres couplesfinalement. Il y a
pas de spécijicité. Aussi (...) elle pouvait savoir ce que l'isolement peur
provoquer ù cause d'un lieu par exemple. II y en avait pas soixante-quinze
bars où tu peux aller. Je pense qu'elle est consciente de tout ça. Elle pouvait
être consciente que mi mes amis étaient pas dans le réseau. Donc si je me
ramassais au bar je pouvais être isolée parce que les amis étaient plus les
siens. Je disais :C'est dificile pour moi de sortir. Et fout Fa elle pouvait très
bien le comprendre, (1: 47).

Dans une autre situation, le succès de l'aide apportée semble li6 à l'ouverture qu'avait la
thérapeute hét&osexuelle face au lesbianisme. Aucun sujet n'ttait tabou, eue n'était pas jugeante
et elle s'impliquait personnellement. La femme qui a consulté s'est sentie l'aise et a poursuivi
sa demarche jusqu'a ce que les objectifs qu'elle s'&ait fiés soient rencontrés.

S'il y a des interventions professiomeiIes qui aident les femmes à grandir et à cheminer,
d'autres sont plus douloureuses à vivre. Ainsi, pour Mireille, malgré que l'approche prc5conisée
par sa therapeute lui ait permis d'identifier la source de certaines peurs ressenties, elle n'a pas
permis de développer un soutien face à la violence vécue. De plus, Mireille a eu le sentiment
d'&trejugée en tant que lesbienne. L'attitude et les comportements, des regards désapprobateurs
et un evitement d'aborder le sujet de l'homosexualit6, témoignent en effet du malaise de la
therapeute face au lesbianisme :
&) quand je parle de lesbiqisme (...). Elle me regarde d'une drôle de
façon. Puis je lui demande :Ecoutez si vous ne m'acceptez pas comme je
suis, hein? Que vous acceptez pas l'homosexualité moi je ne pourrais pas
continuer une thérapie avec vous. C'est impossible. Je ne pourrais pus parler
de ce que je vis. Elle, elle ne parle j a m s de ça C'est comme ci ça n 'avaitpas
d'importance. Peut-être qu'elle est homophobew (2: 6 1).

Sandrine, une autre des répondantes, ne s'est pas sentie prise au sérieux dans sa douleur et
dans sa démarche. Aprks qu'elle eut avoue qu'elle était lesbienne et qu'elle vivait une peine
d'amour, elle ne s'est pas sentie comprise, ce qui l'amena d'ailleurs à meme fin, après quelques
rencontres, la therapie :
«Cela n'a pas été d'une grande aide. Et puis il me semble qu'il ne me posait
pas les bonnes Moi je le savais que je vivais Ûne grande'peine
d'amour puisque j'étais beaucoup dérangée puis affectée par ça, je n 'am-vais
pas à m'en somk C'était très dur. Puis il me semble que pour lui ça n'avait
pas l'air si dur que ça. Il minimisait, II n'avait pas l'air de comprendre
iraiment ce que j;! viiuis. Puis je ne me suis pas sentie comprise. parce que
d'une rencontre à l'autrej'ai décidé par moi-même d'arrêter d'y aller. Puis je
lui ai dit que j'étais guérie. J'ai dit que j'étais guérie. J'y suis dlée troisfois»
(8: 71-72).

6.1.3. Les interventions de groupe.

Une femme violentée a entrepris une demarche d'intervention de groupe avec une
thérapeute qui etait confortable avec le lesbianisme. Que le groupe soit h&&ogène, qu'il
rassemble des personnes h&&osexuelles et homosexuelles de tout âge et vivant differents
problèmes fut très bEn6fique et lui a p e d s de briser son isolement. Il semble que la notion de
respect, particulièrement le respect des ciifErences, &ait au coeur de la demarche, il y avait la une
reconnaissance d'un état, d'un statut, d'une identité.

L'autre succès notable pour les femmes qui se sont jointes ki des groupes non spécifiques à
la violence a 6té réalisé dans un groupe homosexuel où il y avait aussi beaucoup de respect,
dT6couteet de repenses apportées, tel que le rapporte Mireille :
dupsychologue impliquée à (nom de la ressource). Elle était très à 1'écoute.
Très humauie. C'était m e thérapie h u ~ i s t e(....) Quand je pleurais elle me
prenait dans ses brus pour me consoler. Elle n'était pas lesbienne . Mais je
veux dire que j'avais (...) les réponses d ce que je disais, tu sais. ..Cela ne la
dérangeait pas que je sois lesbienne. Elle était sensibilisée à l'homosexualité
c'est évidents (2: 74-75).

Ii ressort des experiences vecues par les femmes que certains groupes sont plus ou moins
~upportants».Ce phenomkne semble être directement lie au fait de la non-reconnaissance et de
la non acceptation du lesbianisme. Dans un pareil contexte Mrapeutique, il s'offre dors deux
choix, dont l'un consisite Zi rester dans le groupe et d76couterles autres en essayant de dkcouvrir
des points communs tout en evitant de parler de sa propre r6aiïté pour eviter le jugement et le
rejet. De cette façon, une femme disait qu'elle avait au moins brisé son isolement Pour Sarah-
Anne, le malaise cause par cette impossibilité de s'exprimer sur sa réalité l'a incitee A opter pour
l'autre choix, c'est-à-dire celui l'obligeant à quitter le groupe :
*Tu sais ce n'est pas ouvert d'après mi Non j'en ai même pas parlé. J'ai
écouté les autres, puis je me suis fermée, j'ai dit Fa par de bon sens, je vais
me faire juger!(me). . C'est Ga, ce groupe-là j'ai laissé parce que je ne me
sentais par bienw (5: 73).

6.1.4. Les services de santé et les services sociaux.

Au niveau des services de santé, une femme a éte admise à l'hôpital suite à une tentative de
suicide. Aucun depistage de la violence n'a été fait par le psychologue impliqué dans le dossier
et SarabAnne n'a pas mentionne qu'eue était violentee par sa conjointe de peur de ne pas être
crue :
aPuis le lendemain matin,à l'hôpital, il y a un psychologue ou je ne sais pas
quoi qui est venu me voir (rire). II a essayé (...) il m'a dit :Pourquoi vous
avezfuit ça? Qu'est-ce que j'allais lui dire moi (rire)? Je savais bien trop qu'on
ne me croirait pas. Moi j'étais sûre qu'on ne me croirait pas. que ma blonde,
ma blonde me frappe sur mi*(5: 33).

Dans un article traitant de l'invisibilite des lesbiennes dans le système de santé, Sandee
Potter (1985) souleve cette peur qu'ont les lesbiennes de consulter à cause de I' h6térosexisme et
de 1' homophobie chez les professionnels.

Pour ce qui est des services sociaux, les femmes de l'etude ont v k u des expériences
polarisées aiiant de l'écoute à la réference à une ressource appropriée et du rejet et du jugement A
la réference des ressources pas toujours appropriées. Les femmes v i o l e n t h ont ressenti le
malaise des intervenantes face au lesbianisrne et particulierement dans les situations qui
impliquaient des enfants.
#On ne m'a pas écoutée au CLSC. (...) Cette femme-là en tout cas n'a pas
voulu m'écouter. Elle ne voulait pas traiter mon dossier. Elle voulait le donner
à UR gars, un autre travailleur social Iù, je ne sais pas qui, il travaillait l a Moi
j 'ai dït :Non j'ai le goût de travailler avec une femme. Mais elle ne m'ajamclis
rappelée. Jamais, jarnuis. Puis tout ce qu'elle rn 'a dit c'était ça :Ecoute (...)
Le groupe des gais c'est en haut Bon je le sais, j'en fais partie. Tu sais. Puis
ce n'était pas plus que ça. Vraimentpas plus que ça. Je suis sortie du bureau.
ma petite me était avec moi (...) Pouf! Bien déçue en me disant :Oh Boy!
Non merci (...)# (5: 56).
«Il faisait semblant là, comme je disais tantôt, quand je parlais de ma blonde,
il changeait de sujet, puis :Oui. Puis tafile à l'école ? Ah bien moije te parle
de moi là (rire). Mais non. Il m'a dit qu'il y avait des rencontres de groupe
pour les alcooliques/toxcornanes (rire). C'est le seul support qu'il m'a donné
(rire). Il a pris la peine de venir ici, chez moi, il est venu voir ma fille, il a dit
« j e vais te donner de mon temps,je vais venir m'asseoir avec toi, on va jouer
ensemble. On va parler, on ira prendre une marche. Tout ça. Il ne l'a jamais
fait. Il ne l'a jamais fait. Ceh vafaire un an de Gaaw (5:7 1).

6.1.5. Les maisons d'hébergement.

L'existence des maisons d'hebergement pour les femmes victimes de violence conjugale
est connue par presque l'ensemble des femmes de l'étude. La plupart d'entre elies considerent
ces ressources pour les femmes h6tt5rosexuelles et leurs enfants. Eiies hesitent & se réferer aux
maisons d'hebergement pour recevoir de l'aide. Pourquoi hésitent-elies? Elies ont le sentiment
que ce n'est pas leur place. Pour Chantale, les maisons d'hebergement sont là pour aider les
familles et il peut y avoir, de la part des femmes h&ergees, une minimisation des difncultés que
les lesbiennes rencontrent :
d e s ressources là c'est pour celles qui ont des enfanf i Les lesbiennes ne se
sentiraient par comprises, elles auraient peur de ne pas être prise au sérieux
par les autres femmes. Elles penseraient qu'une femme qui te violente est
moins forte qu'un homme, donc c'est plus facile à arrêter pis souvent on n'a
pas d'enfant, les femmes peuvent penser que c'est plus facile de finir la
relation. La relation est moins prise au sérieux* (6: 78).

L'experience d'une femme qui y est alMe rejoint, en partie, les réticences pr6ddemment
exprimées. Sarah-Anne fut hebergée dans une maison pour femmes violentées par leur conjoint
Elle s'est sentie en conhnce avec l'intervenante qui lui etait attitrée. Elle fut crue, appuyee et
aucun sujet n'était tabou. Cependant, elie a rencontre deux limites : elle etait exclue de
l'intervention de groupe et ne se sentait pas capable de parler ouvertement de sa réalit6 (violentée
par une femme) devant les autres femmes hbbergées :
uJe m'empêchais de parler. Je truwait ça dur. Parce que eux autres iLr
disaient :Heille mi mon churn m'a fait ç a Puis il m'a dit ça. Heille moi
j'avais le goût de dire :Heille mi tu ne sais pas ce qu'elle m'a dit? (Rire).
Mais quelque part encore c'est la peur du ndin<le aussi hein ? Parce que il n'y
a pas d'intervenante, on était juste entre nous autres. La peur du ridicule. Lu
peur de (...)parce que c'était une femmeM (5:67).

Alors que pour plusieurs femmes h&érosexuelies violent6es par leur conjoint, les maisons
d'hébergement sont consid&& comme le lieu par excellence pour leur venir en aide, il semble
que pour les lesbiennes il en soit tout autrement En effet, que les femmes lesbiennes utilisent ou
non les maisons d'hébergement pour les femmes victimes de violence conjugale, elles ressentent
un malaise face à ces ressources d'aide.

6.1.6. Les services policiers.

Une seule femme a fait appel aux seMces policiers de sa region pour se protéger contre la
violence physique de sa conjointe. L'expérience fut pénible puisque la situation ne fut pas prise
au s6rieu.x' les policiers se moquaient ouvertement d'elle et de sa conjointe, ils banalisaient le
danger et l'ont laissée sans protection.
KI~Snous ont quasiment ri en pleine face. ILF se regardaient J'ai même pns le
goût d'en parler. Mais c'était comme ça. Ils ne prenaient pas ça au sérieux
Pas du tout. Parce que tu ne te sens pas du tout soutenue Ià, absolument pas.
En tout car. mi j'ai pas senti ça. Au contraire là, j'ai senti qu'ils riaient de
nous autres. T'aurais besoin de soutien, qu'on te sécurise. Mais je me disais à
moi-même là en sortant d'ici qu'est-ce qu'ils vont dire? (...), (4:66).

Renzetti (1992) abonde aussi dans ce sens, les lesbiennes violentées par leur conjointe ne
sont pas souvent crues et protegees par la police, les réponses à l'aide tendent à être
homophobes et hétérosexistes. Ce qui fait que chez plusieurs lesbiennes, la police n'est pas
considérée comme une source d'aide.
6.2. Les besoins des lesbiennes violentées par leur conjointe.
Lors des entrevues, les femmes ont ciblé certains de leurs besoins. Dans un premier temps
je vais traiter de leurs besoins Cmotifs, sociaux e t physiques. Dans un deuxième temps, je vais
m'attarder plus spécifiquement aux besoins en terme d'intervention.

6.2.1. Besoins émotifs, sociaux et physiques.

Tout comme les femmes hétérosexuelles, les lesbiennes ont besoin d'écoute, de
compréhension, tout cela vécu dans un climat de confiance. Pour être en mesure de parler de ce
qu'eues vivent, ces femmes victimes de violence doivent sentir une acceptation de ce qu'elles
sont en tant qu'être humain à part entiere et lesbienne. II est primordial qu'elles soient crues et
prises au drieux et que leur vécu de violence ne soit pas minimisé simplement parce qu'il s'agit
d'une femme qui les violente.

Au niveau social, les femmes ont mentionne l'importance que la société reconnaisse à la
fois la realitt5 homosexuelle et/ou lesbienne et le sérieux de l'engagement dans les relations
amoureuses chez les femmes.
<<On a besoin de p d'être reconnue en tant que personne. Et la confiance que
ces gens-là me portaient dans le sens (...). On sait que tu vas t'en sortirw (3:
116).
uPuis accepter que cette vie-là c'est une vie normale et de même niveau (...).
Parce qu'on a l'impression des fois que c'est moins sérieux Puis ça je le vois
beaucoup chez les gens qui vivent des ruptures, c'est comme si c'était moins
pire. Parce que c'est quelqu'un de ton sexe. C'est drôle hein? C'est perçu
comme mains pire » (6: 7 1).

Le rejet qu'elles peuvent vivre parce qu'eues sont lesbiennes et, de surcroît, violentees
dans leur relation amoureuse, les amène à dire qu'il y a un travail important ii faire sur
l'kducation et les préjugés entourant 1'homosexuaIit~et la violence.
«Même les thérapeutes, il y en a des thérapeutes elles sont pleines de
préjugés, les psychologues, les psychiatres Id, tu as un problème (...) c'est
que t'es gai tu sais» (7:64). 4 1 va falloir que la population apprenne que
nous aussi on vit des affaires que (...) des situations dificiles comme
n'importe qui, comme n 'importe quel couplew (7: 86).
Les femmes ont egalement souleve l'importance de recomaître l'existence de la violence
d a m les relations amoureuses chez les lesbiennes.
eAn-êter de cacher cette réalité-là. La réalité homosexuelle en quelque port je
pense qu'elle est encore cachée. C'est encore tabou. C'est dérangeant. Peut-
être c'est qu'on est différents, pas pareils. Et que la violence c'est pas juste
w e histoire de gars. Bon c'est gros la manière que je le dis là. Mais cela se
manifeste peut-être autrement mais les femmes je pense qu'on peut être
violente à notre façon. Dans notre façon, avec les moyens qui nous son1
donnés et qu'on nous a petmir d'avoir* (3: 137).

En ce qui a trait aux besoins physiques, et tel que l'avait identifie Larouche (1987) pour les
femmes violentées par leur conjoint, les victimes ont besoin d'un lieu pour être en securité, un
endroit protégé où la confidentialite est de mise.
«Moije garderais une confidentialité. Je pense qu'il y a desfemmes (...) dans
les couples lesbiens (...) qui peuvent allerjusqu'au bout (...) de leur violence
autant que chez les hommes. (...) J'aimerais ça pouvoir savoir que je suis
d m s un milieu où je suis en sécurité» (1: 79-80).

Irvine (1990) et Renzetti (1992) souEvent un problbme en ce qui a trait à La sécurït6 des
victimes quand la conjointe connaît le lieu du refuge. Ce probBme existe chez les femmes
ht5térosexueiles; par contre, il est plus facile pour une femme d'obtenir l'adresse de ces lieux que
pour un homme. Les conjointes violentes peuvent se dire violentées, obtenir l'adresse du rehige,
ce qui rend les victimes lesbiennes en danger.

Toutes les femmes de l'ttude arrivent au même constat, c'est-à-dire que le plus grand
besoin pour les victimes correspond au dCve1oppement de l'aide et des services. Ce qui mTam&n
à considerer les besoins de ces femmes en terme d'intervention.

6 . 2 . 2 . Besoins en terme d'intervention et services souhaités.

Au niveau de l'intervention psychosociale, Lise souligne I'irnportance de sentir une


ouverture de la part des intervenantes, qu'elles soient prêtes à tout entendre, même en ce qui
concerne la sexualité :
c parce que c'est là que ça s'actualise on pourrait dire la relation lesbienne.
Mais aufond quand on commence à parler de sexualité là on rentre h s le vif
du sujet pis :Oui c'est pas juste deux femmes qui sont copines ensemble là.
Elles ont des relations sexuelles ensemble qui sont parfois bonnes ou
mauvaises (...)» (1: 78).
Pour France il est important que les intervenantes se soucient de la façon dont les femmes
assument leur homosexualité :
d ' e s t sûr que ça dépend comment on vit notre homosexualité. Je pense
qu'au départ peut-être que les intervenantes devraient le savoir comment la
personne le vit dans un premier temps. Comment elle se sent là-deduns 1 à (4:
~
74).

Pour certaines femmes, le fait que les intervenantes qu'elles ont consultées connaissent les
particularités du monde gai devenait une exigence, alors que pour d'autres, une ouverture
suffisait. Les victimes ont besoin de savoir et d'entendre qu'elles ne sont pas les seules à vivre
cela. D'ailleurs, réunies sur la base d'une exp&ience commune liée la violence, les femmes
peuvent partager leurs vkcus et prendre conscience des racines sociales de leurs problemes. Les
femmes qui n'ont pas identifie leur probleme de violence avant de demander de L'aide ont besoin
d'être eclair6es. Les femmes veulent comprendre ce qu'est la violence, pourquoi il est difficile de
quitter sa conjointe dans une situation de violence. Elles veulent aussi comprendre la dynamique
qui s'est installée tout au long de la relation et être validées dans les gestes qu'elles posent À ce
sujet, Lise sp6cifiait le besoin d'adapter l'analyse de la violence pour qu'elle corresponde à celle
vkue entre femmes plutôt que de prendre l'analyse qui prévaut chez les h6térosexuelles :
*La besoin est important. C'est de comprendre :*Pourquoije suis restée là?
Qu'est-ce qui se passe ?N Bon... comprendre la dynamique. la problématique.
Mais si on arrive dans une analyse qui est l'analyse féministe où on met
toujours le rapport hommdJeme. C'est la société patriarcale, moi je suis
plus là. Comment ça se fait que dans ma situation moi c'est deux femmes,
qu'est-ce qui se pmse on es-tu deux ovnis? Comment ça? Je comprends pas.
J'ai besoin de savoir aussi que ça passe dans d'autres couples lesbiens. Parce
que là sinon je ramène toute à nous deux Donc fa fait (...) l'analyse est pas
bonne. Ça fait une analyse qu'est soit très psychologisan te ou individuelle.
Mais si on universalise un peii pis qu'on dit :«Ben il y en a aussi dans ces
couples-là.* Pis là ça t'amène à un autre niveau, c'est moins culpabilisant.
responsabilisant là d'avoir toi enduré ça. Je trouve l'universalisation Ca
pourrait être important^ ( 1: 73).

Pour en arriver a recevoir une aide appropriee, les femmes rencontr6es ont clairement
idenme un besoin de formation auprès des intervenantes, et ce quel que soit leur titre ou leur
provenance. Voici ce qu'en dit Chantale :
eBien peut-être essayer de conscientiser les gens qui interviennent, les
intervenants. (6: 113) 11 ne faut pas se surprendre que les intervenunts ne
soient pas préparés à ç a On ne peut pas leur demander d'être préparés ù ça si
tu ne connais pas ça Bon je veux dire qu'il faut connaître ça un peu là. h?faut
en avoir entendu parler. Il faut en avoir discuté. R faut avoir fait un peu de
recherche là-dessus. 11faut avoir peut-être même côtoyé quelques personnes
(...) être sensible à ça Mais si tu ne l'us pas, on ne peut pas demander aux
intenenanuits de comprendre. Je pense que la majorité ne diront pus :d e suis
contre., Sauf que s'ils ne comprennent pas c'est pareil. (...). Dans la
formation (...).Il y a des moyens d'apprivoiser Fa. C'est considéré encore
comme pas trop important* (6: 1 15-116-117).

Une femme de l'btude s'interrogeait sur le nombre d'heures consacrees iî l'étude de


l'homosexualitt?et du lesbianisme dans les programmes de formation des professionnel(1e)s de
la sant6 et des services sociaux. La question doit en effet se poser. Par exemple, si on regarde la
formation en s e ~ c social,
e Sandee Potter (1985) a constaté dans son Ctude que le matdriel
utilise pour la formation est h6t6rosexiste et que l'information traitant des gais et des lesbiennes
est presque inexistante.

France, pour qui le problème de violence dans les relations entre femmes etait rn&omu, a
identifie un besoin en terme d'intervention préventive. Elle sugg&reque des moyens soient pris
alin qu'on sache que cette violence existe aussi chez les femmes et que des services soient
offerts :
@Dansun premier temps il faudrait que les femmes soient informées que ça
existe. Celles qui se font battte par leur bonhomme, elles le savent. C'est su
qu'il y a des places pour recevoir ces femmes-là. Premièrementje ne savais
pas que j'avais besoin d'aide. Je ne savais même pas que je vivais de la
violence. Je ne savais même pas que ça existait chez les femmes. Que les
ressources qui existent le disent que ça existe et qu'ils offrent des services*
(4:7 1-72).

Toutes les femmes de 1'6tude reconnaissent l'absence de services d'aide pour les
lesbiennes violentées. Ainsi eues proposent que les ressources existantes pour les femmes
hétérosexuelles adaptent leurs services afin qu'ils répondent aussi aux besoins des lesbiennes.
Pour certaines d'entre elles, de nouveaux services spbcifiques aux lesbiennes devraient être
crees. Qu'il s'agisse d'adapter les s e ~ c e existants
s ou encore d'en creer de nouveaux,
l'important pour ces femmes est qu'elles sachent qu'elles pourront recevoir de l'aide quelque
part, et que ces services soient connus.
6.3. Les appréhensions des femmes face aux ressources d'aide.
Les appréhensions ressenties par les femmes face aux ciifErentes ressources d'aide sont la
peur d'être jugee, marginalide et rejetée, la peur de ne pas être comprise et crue par les
intervenantes et par les femmes Mbergées dans le cas des maisons d'hebergement comme le
rapporte Lise :
«Comment les gens &bas? Comment ik vont me recevoir? Est-ce que je vais
être jugée ? Il y a des préjugés Pis aussi :Quandje vais être là-bas c'est toutes
des femmes. En tout cas ça risque d'être beaucoup de femmes qui vivent la
violence de la pan de leurs conjuÏntss.Commentje vaisfaire moi Ià-dedans Ià?
Commentje vais être vue?* ( 1:66-67).

Ces peurs deviennent parfois si paralysantes qu'une femme de l'&ide a decide, pour se
protéger, de ne pas faire de demande d'aide aux ressources institutionnelies et communautaires.
Il y a un type d'appréhension qui concerne le fait que l'agresseure soit une femme. La peur de ne
pas être prise au sérieux, que la portée de la violence soit banalisée, que l'on croit que dans une
relation amoureuse entre femmes, il est plus facile de rompre. Et, finalement, face à toutes ces
peurs, la grande question est la suivante : est-ce qu'une intervenante pourra m'aider, je suis
lesbienne et violentée par une femme?

Au sujet des maisons d'hebergement pour les femmes victimes de violence conjugale,
comme nous l'avons vu, plusieurs femmes de l'etude perçoivent ces ressources uniquement
pour les femmes h&érosexuelles qui ont des enfants et des problemes familiaux. Vision qui
rejoint d'ailleurs celie de plusieurs femmes de l'etude de Renzetti (1992). Par contre, Lise qui
considibe cette ressource pour toutes les femmes, s'interroge tout de même face il l'intervention
de groupe qu'on y pratique. Devrait-elle reveler aux autres femmes hebergees qu'elle est
lesbienne lors des rencontres oh chacune partage son vecu? Devrait-elle laisser croire que son
agresseure est un homme afin d'éviter un rejet possible, les prejjugés et ainsi ne pas parler de ce
qui l'habite profondkment?
~ M u i en
s groupe, si il y avait une intervention de groupe,je pourrais peut-être
pas nommer ma situation. Donc je vais toujours faire comme si c'était un
homme, mais j'ai pas la réponse Ià. Pis je me sens une bébitte. Si je me disais
là :Faut que je cache mon identité, faut je coche ma situation. Alors que tu
p e u avoir le goût d'en parler en maudit. Pis Ià comme première fois tu sais?#
(1: 74).

En ce qui concerne le réseau des CLSC,certaines femmes ont une reticence, soit parce
qu'elles sont connues par les intervenantes et qu'elles devront revéler leur homosexuaiit6, soit
qu'elles savent que plusieurs intervenantes ont des malaises avec l'homosexu&té et qu'elles
seront réferées au groupe de soutien pour les personnes homosexuelles.

Pour une question d'ordre fmancier. toutes ont soulev6 l'importance que soit developpé
des seMces d'aide publics.
d i 1 y avait une maison spéciale, d'un autre côté je veux pas me retrouver
comme &ns un ghetto. Je trouve c'est déjà assez ghetto. Mais là comment
organiser ça? C'est comme impossible faire une maison spécijque (...) être
stigmatisée, je déteste toialement Faut plutôt que les ressources en place
s'organisent (...)» (1: 68 et 81).
«(...) puis des ressources il n'y en a pas. Il y a très peu de choses qui
existent, hein? Très très peu de choses, le CLSC. la seule chose qui vontfaire
ils vont dire :Bon bien il y a un groupe tel qui existe. Mais c'est pas
spécifique à la violence même que si on y va on n'a surtout pas le goût d'en
parler* (6: 105).

C'est peut-être la raison qui explique que plusieurs femmes souhaiteraient qu'une
intervention de groupe soit mise sur pied. En ce qui concerne la constitution du groupe, il y a
diff6rents points de vue. Pour certaines femmes, il serait souhaitable que lThomog6n6itérepose
sur le fait d'être des femmes violentées par leur conjoint ou leur conjointe alors que d'autres
souhaiteraient que I'homogén6it6 se determine à partir du crit8re d'homosexualit~ferninine et
violentée par leur conjointe. Cette preference d'être entre lesbiennes tient sur la possibilit6 de
parler autant de leur homosexualit6, de leur relation amoureuse que de la violence dans ce
contexte de vie et ce, sans être marginaüsée. Un autre point de vue rejoignait l'idee de viser la
plus grande diversite possible des hét6rosexuelles (hommes et femmes), des gais, des
lesbiennes, des couples et des personnes seules dans le but de recréer l'image de la soci6t6 et
ainsi d'avoir un terrain propice pour travailler les préjugés.

Concernant les groupes de soutien existants pour les personnes homosexuelles, une
difficulté h t identifiée à l'effet que si le groupe n'est pas spécifique à la violence, cette réalit6 est
omise. Certaines femmes rencontrées expliquent le fait de passer sous silence la violence, qui
peut être v h e dans les relations amoureuses chez les lesbiennes, à partir des caract6ristiques du
milieu gai. Un milieu restreint dans lequel il y a beaucoup de relations inter-reliees et un ghetto
qui provoque l'isolement. Un milieu dans lequel des mythes sont profondément ancrés, tels la
non-violence des femmes et la solidarit6 entre lesbiennes. Pour Chantaie, la raison qui explique
la d . B ï c u l à~ aborder la violence dans ces groupes est reMe au milieu «ghenoïsC», au manque
d'anonymat et tout le monde qui se connaît et se parle.
d e vois que dnns un groupe comme ça, par exemple, on est &peuprès trente-
cinq à chaque réunion, les femmes, plusieurs, ont déjà été d'anciennes
conjointes. Bon alors il y a des choses qu'on se dit, il y a des choses qu'on ne
se dit pas, parce que c'est un peu compliqué. C'est ça que j'aime beaucoup
moins. Alors si toi tu vis de la violence là tu n'iras pas parler de ça dans ce
groupe-là. Parce que la personne avec qui tu vis?eux autres. ils la cunnaissen
là» (6: 92-93).

Certaines femmes qui voient I'importance de l'intenrention de groupe qui traiterait de


violence et d'hornosexuaiît6 féminine soulèvent aussi une difficulté au niveau de la
confidentialit6. Ce manque d'anonymat se situe cette fois à lYext6rieurdu groupe, que cela se
sache qu'à tel endroit, à une telie heure ce sont toutes des femmes lesbiennes et violentées qui se
rencontrent.

Les femmes voyaient des intervenantes animer ces rencontres. Il serait intéressant qu'elles
soient lesbiennes, mais ça ne serait pas un critEre absolu. Par contre, elles devraient avoir
l'ouverture necessaire pour travailler auprès des femmes lesbiennes.

6.4. Synthèse et discussion.

Une aide favorable aux victimes, qu'elle soit apportée par des professionnels ou des
proches, doit comporter une reconnaissance de l'existence de la violence. Sans quoi, elle
n'amhe pas les femmes ii se protéger contre les agressions. La repense est donc déterminante
dans la continuation ou la cessation de la violence (Dobash et Dobash, 1980). De plus, une aide
qui n'est pas adequate peut avoir pour effet d'isoler les victimes (Renzetti, 1992).

Les femmes rencontrées dans le cadre de cette recherche sont aliées consulter des amies à
elles (pour plusieurs des hét&osexueUes) et non pas des amies de couple (lesbiennes) comme ce
fut davantage le cas dans l'etude de Renzetti (1992). Faire appel à quelqu'une ou quelqu'un qui
n'est pas en relation Ctroite avec sa conjointe semble garantir une aide plus appropriée qui
comporte moins de blâme pour la victime et d'effort de réconciliation. L'idée ici avancée pourmit
être liee à la difficulte pour la cornmunaut6 lesbienne de reconnaître l'existence de la violence
entre les femmes.

Les besoins des lesbiennes victimes de violence conjugale sont les suivants :être ecoutée,
être crue, être prise au s6riet.m et être respectée en tant que lesbienne et victime de violence
conjugale. Des auteurs ont avance l'idee que l'aide apportée aux femmes violentees par leur
conjoint serait plus positive lorsqu'elles sont conformes aux stéréotypes traditionnels (Renzeai,
1992: 89). Ce qui signifie qu'il y aurait une corrélation entre l'adhésion aux stééotypes féminin
et le soutien accorde aux victimes. Or, plusieurs egards, les lesbiennes peuvent être hors de la
norme et non conformes aux stereotypes féminins. D'abord parce qu'elles ne sont pas en
relation avec un homme e t aussi parce qu'elles se dtfendent davantage que les femmes
h&&osexuelles quand elles vivent de la violence conjugale. Ceci confirme une fois de plus
l'impact de l'hétérosexisme dans les services offerts.

À ce propos, l'expérience d'une femme de 1'6tude est révélatrice de l'inconfort vecu par les
lesbiennes face aux sewices d'aide. Sarah-Anne a fait une recherche d'aide assez variée relik à
la violence qu'elle subissait de la part de sa conjointe et elle a été souvent d6çue et blessée des
reactions homophobes qu'eue rencontrait Pour une question de délit mineur (non relie à la
violence) eue s'est retrouvee en prison. De toutes les ressources qu'elle a visité, la prison a ttt5
l'endroit où elle se sentait le plus à l'aise. On peut se demander pourquoi elle s'est sentie
confortable entre les murs? C'est qu'elle ressentait enfin une liberte et un respect face à son
lesbianisme.
d e sors de prison, ça ne faitpas longtemps. On était à peu près quinze, seize
femmes, puis il y en avait six qui étaient vraiment lesbiennes comme moi.
Puis les autres ils ne l'étaient pas, mais je veux dire que c'était ouvert c'était
bien correct. On était enfermées dans les mêmes murs. On se respectait, je te
le jure, je ne voulais même pas m'en aller (rire). Je voulais rester en prison,
est-ce que Fa se peut?» (5: 73-74).

Pour ce qui est des centres de femmes et des maisons d'hebergement qui sont une source
importante d'aide pour les femmes h&érosexuelles (Bowker, 1986)' il en est tout autrement pour
les lesbiennes. L'étude de Renzetti (1992) demontre que celles qui ont fait appel il ces ressources
ne se sont pas senties soutenues. Pour ma part, les femmes rencontrees dans le cadre de ce
mémoire, sauf une qui y est allee, entrevoyaient difficilement la possibilité que ces ressources
puissent leur venir en aide. Le Regroupement provincial des maisons d'hébergement reconnaît
qu'il y a un travail ilfaire a h de dt5mystifïer le lesbianisme et de faire tomber les préjugés.

Qu'ils et qu'elles soient travaiileuses sociales, psychologues, polici&res,psychiatres, issus


du milieu prive, public ou communautaire, toutes e t tous pourraient avoir une partie de leur
formation qui porte sur cette rthüté. Car il est clair que les seMces ont été d6veloppés pour
rependre aux besoins des femmes agressées par des hommes (Hammond, 1989; Renzetti, 1992)
et que la formation actuelle les prépare à cette unique réalit&
Il apparaît important que ies ami(e)s et la communauté reconnaissent que la violence
conjugale chez les lesbiennes a des conséquences sérieuses et padois même pires que celle chez
les hétérosexuelles à cause de la double stigmatisation et de l'absence de ressources pour leur
venir en aide. Quand le silence est brise, l'isolement peut aussi être brisé et dès lors les services
apparaissent lente men^

L'intervention individuelle et l'intervention de groupe doivent être d6veloppées. Des


seMces accessibles et gratuits qui tiendraient compte du vecu des lesbiennes, de leurs besoins et
de leurs appréhensions. Une volonté politique est necessaire pour que les institutions se
questionnent sur les valeurs qu'elles véhicuient ai5.n d'encourager dorénavant le respect envers la
diversité. Ainsi pourrions-nous voir apparaître des formations plus adéquates et les services
existants se réorganiser pour rependre aux besoins des lesbiennes violentées par leur conjointe.
CONCLUSION

La violence dans les relations amoureuses chez les lesbiennes est une realite encore peu
explorée. La présente recherche qualitative se situe parmi les premières études de ce genre au
Quebec. EUe avait pour principal objectif de documenter la réalite des femmes lesbiennes
violentées dans leur relation amoureuse a f i n de développer une meilleure compréhension de leur
v6cu. L'etude visait egalement à documenter la recherche d'aide des victimes, leurs besoins en
terme d'intervention et les services qu'elles souhaiteraient obtenir pour y répondre. Pour ce
faire, huit femmes lesbiennes violentees par leur conjointe ont accepte de me rencontrer, ce qui
m'a permis d'analyser leurs expériences de violence.

Pour comprendre le vécu des lesbiennes violentées on doit d'abord prendre conscience que
le v6cu lesbien diffère du vecu hét6rosexuel et ce, avant même qu'il soit question de violence. En
effet, les lesbiennes sont souvent confrontées au rejet ii cause de leur orientation sexuelle. Ceci
peut les contraindre à vivre dans le silence et I'isolement. Les prejugés à leur 6gard ont pour effet
d'entretenir une haine des lesbiennes qu'elles peuvent elles aussi integrer, ce qui amhe des
difficultés à d6velopper une estime de soi. C'est dans ce contexte que l'on doit chercher à
comprendre le vécu des lesbiennes violentées par leur conjointe.

Les repondantes de l'étude ont subi divers types d'agressions, physiques et / ou


psychologique. Cependant, elles ont davantage v&u de contrôle psychologique de la part de leur
conjointe. Plusieurs des manifestations de cette violence dont ont eté victimes les r6pondantes
sont comparables aux tactiques de contrôle utiiisées par les hommes qui violentent leur
conjointe. Toutefois, il y a des clifferences. Les cibles pour atteindre l'autre peuvent dBi5rer. Les
zones de vulnérabilité chez les lesbiennes ne sont pas les mêmes, particulièrement en ce qui
concerne la menace du dévoilement de l'orientation sexuelle qui peut devenir un enjeu majeur.
C'est pourquoi la dimension du secret doit être prise en consideration pour comprendre et aider
les lesbiennes violentées. Également, les reproches que peuvent faire les conjointes violentes aux
victimes et qui référent il l'isolement et au rejet ont une portée particulière. Car pour les
lesbiennes, l'isolement et le rejet rejoignent directement l'homophobie dont eues sont souvent
victimes dans la société. Ce qui ne les laisse pas indifferentes.

Quant aux réactions qu'ont eu les répondantes face à la violence qu'elles subissent, eiles
utilisent des stratégies de survie communes à celles des femmes h6térosexuelles. Par ailleurs. il y
a aussi des sp&ificités, par exemple: le renoncement à une demande dans les services d'aide
existants pour éviter d'être confrontée à l'homophobie des intervenant(e)s. Ou la grande
vigilance que doivent exercer certaines femmes afin que leur conjointe ne dtvoile pas leur
orientation sexuelle. Tout ce qui entoure le dtvoilement du lesbianisme et ce, surtout dans un
milieu de travail, rend particulièrement vulnerable les lesbiennes violentées. De plus la légitime
defense, qui semble être une reaction plus usuelle chez les victimes lesbiennes et qui renforce
leurs sentiments de honte et de culpabilitt, sont des tléments auxquels on doit accorder une
importance si on souhaite adapter I'intervention au vecu des lesbiennes. En effet, parce que les
victimes qui se defendent peuvent s'identifïer à des agresseures, elles ont besoin de développer
une autre lecture de leur realité. Soit d'apprendre à differencier une agression d'une 16gitime
défense.

La violence v&ue a de nombreuses consCquences sur leur vie. Le portrait des pertes
rejoint celui des autres femmes violentées. Ainsi, la violence affecte la santé, l'estime de soi, la
confiance en soi, elle peut nuire I'autonomie financih, avoir des répercussions sur d'autres
relations et sur le travail. Par contre, l'isolement qu'entraîne la violence et la perte d'estime de
soi se greffent un vecu lesbien, ce qui a un impact différent Une fois de plus, le contexte
social de l'homophobie doit être pnse en compte pour comprendre le v6cu des victimes.

Tout comme les victimes hétérosexuelles, les lesbiennes violentees ont des référents
theoriques multiples pour expliquer les causes et les facteurs associés il la violence. II demeure
cependant que la plupart refèrent spontanement des approches psychologiques et / ou
pathologiques. Les femmes de l'étude ont tendance à s'expliquer la violence à partir de
caracttristiques personnelies et il se responsabiliser face à la violence subie. Par contre, certaines
femmes expliquent la violence à partir d'une approche sociologique incluant l'hétérosexisme et
1'homophobie.

Pour tenter d'tchapper la violence, les femmes ont utiiisb divers types d'aide. Eues ont
fait appel i leurs arni(e)s, leurs proches, certaines ont 6té en therapie individuelle ou en thérapie
de groupe. Les expériences vanent les unes des autres. Pour qu'une aide soit favorable, eile doit
comporter une reconnaissance de l'existence de la violence ou sinon une non-acceptation des
comportements violents de leur conjointe. Une aide inadéquate qui comporte un jugement face
au lesbianisme a pour effet d'isoler davantage les victimes.

Face aux seMces de santé et aux seMces sociaux, on note des problèmes qui rekvent
d'un malaise des intervenant(e)s face au lesbianisme et de l'absence d'un dépistage de cette
violence. Pour ce qui est des maisons d'hebergement sp~cifïquesaux femmes violentées, les
femmes de l'étude hesitent s'y référer. Elies ont le sentiment que ces ressources ne sont pas
pour eiies. Une femme qui y est alide a vécu des diEîcuités face aux autres femmes hébergees
qui etaient toutes hétérosexuelles et un malaise face il I'intervention de groupe de laquelle elle
etait exclue. Pour ce qui est des services policiers, une femme a vécu une expérience qui fut
pénible. Le danger qu'elle courrait hit banalid et on la laissa sans protection.

S'il est difficile de parler à leurs proches ou dans la communauté lesbienne du fait qu'elles
sont violentées, il est aussi très difficile de trouver des services pour leur venir en aide. Les
femmes ne sont pas toujours crues, prises au sérieux et comprises. Les seMces d'aide existants
sont très peu adaptés ii la réalit6 des lesbiennes. Les sources de satisfaction semblent plus
grandes en pratique pnvee. Au niveau des seMces publics, des lacunes importantes existent
pour venir en aide aux l e ~ b i e ~quie s subissent de la violence.

Bien que les besoins des femmes lesbiennes violentees rejoignent ceux des femmes
hét&osexuelles violentées, elles ont aussi des besoins spbcifques. Elles doivent sentir une
ouverture de la part des intervenant(e)s, une acceptation de leu.lesbianisme. Elles ont besoin
d'être prise au serieux face à leur relation amoureuse qui diffère de la norme et face aux
difficultés qu'elles rencontrent. Il doit donc y avoir une reco~aissancede la réalité lesbienne et
une recomaissance que la violence peut exister dans ce type de relation amoureuse.

Ce qui amène les femmes de I'btude à cibler un besoin de formation pour les différents
intervenant(e)s des &eaux public et prive. Ceci afin dT&iterla présomption à lThét&osexualitt5
et pour développer une compréhension du vécu et des sp6cificités liees au lesbianisme. Eiles
voient qu'un travail important doit être fait au niveau des préjugés entourant l'homosexualité et la
vioience. Elles souhaitent une aide qui tiendrait compte des spécificités reliees au vécu lesbien
qui diffère de celui des h6térosexuels. Car actuellement plusieurs femmes ont peur d'être jugées,
rejetées, incomprises par les divers intervenant(e)s, et d'aillews plusieurs le sont Les malaises
des intervenant(e)s empêchent les femmes de demander de l'aide ou les empêchent de poursuivre
leur démarch66.

Face & ce constat, les femmes sont d'avis qu'il faut ajuster les services publics existant
plutôt que de créer des services spécifiques aux lesbiennes. Sauf en ce qui concerne
l'intervention de groupe. Les groupes homosexuels existant peuvent ciifEdement répondre aux
besoins des lesbiennes violentées. A l'intérieur même de la communauté, il peut être difficile de
briser le silence sur la violence vecue. La cornmunaut6 est si petite. certaines femmes ressentent
le besoin de proteger la réputation de leur conjointe. Plusieurs femmes de Mtude souhaiteraient
la mise sur pied d'un groupe spécifique aux lesbiennes violentées par leur conjointe.

Telle qu'appliquée par Renzetti (1992)' une lecture Eministe de cette violence entre
femmes est possible. Et comme l'ont suggerk d'autres auteurs (Ristock, 1991; Papsco, 1993;
Dernczuk, 1995). cette approche est convenable à condition d'en enrichir la grille d'analyse. En
effet, les rencontres avec les femmes qui ont accepté de me livrer une partie de leur vécu
permettent de soutenir l'idée selon laquelle 1' homopho bie (le rejet), 1' h t t6rosexisme et
l'isolement vécu en tant que lesbienne sont des r6alité.s qui doivent faire partie intégrante de la
grille d'analyse pour comprendre la violence conjugale chez les lesbiennes. Cette
cornplexifcation de l'analyse n'a pas pour objet de prendre en compte ces 6lkments en tant que
cause, mais en tant que facteurs associés à cette violence. c'est-à-dire qu'ils contribuent ii la
violence d'une quelconque façon. Plus particuliérement, 17h6t&osexismeet I'homophobie ont
des cons6quences aux niveaux suivants : au niveau du dkveloppement de l7identit6lesbienne
(estime de soi), au niveau de la vie du couple (tensions vecues à cause de leur sexualité hors
norme qui les contraint à vivre cach6 ou dans le secret) et aussi au niveau du vecu des femmes
violentées par leur conjointe ainsi que sur l'aide et les seMces pour les lesbiennes violenth.

Il serait pertinent de mener une btude sur les seMces d'aide afin d'identifier comment les
intervenant(e)s se sentent face Zi cette problhatique et ce qu'elles et ce qu'ils entrevoient comme
piste de solutions pour ameliorer les services. Une autre avenue à explorer serait de s'intéresser
aux conjointes violentes. Quels sont leurs besoins en terme d'intervention et quels services
souhaiteraient-ellesobtenir pour y dpondre? L'intervention devraitelle se réaliser en groupe? Si
- - -- - -- - - - -- - ---

36 La Commission des droits de la personnes du Quebec (1994) fait des recommandations a l'effet que le
M.S.S.S. s'assure que les intervenant(e)s soient sensibilises et reçoivent une formation adéquate pour
répondre aux besoins des lesbiennes. Qu'une campagne de sensibilisation sur les réaiités lesbiennes soit
menée aup* des professionnel(1e)s de la sane. Que les milieux coiiegiaux et universitaires incluent dans leur
programmes un volet traitant de l'homosexualité. Et enfm que les organisations communautaires qui offient
des services spécifiques aux femmes, telles que les maisons d'hebergement révisent leurs pratiques afin
d'assurer l'accb des lesbiennes victimes de violence à ces mêmes services.
oui, veulent-elies être avec des agresseurs masculins h6térosexuels ou des agresseurs gais? Peut-
être souhaiteraient-eues être entre lesbiennes.

ï I faut se rappeler que cette &de a et6 r6alisée auprès d'un nombre restreint de femmes et
que celles-ci ne représentent pas l'ensemble des lesbiennes. De plus, la réalisation de ce memoire
se situe à un moment d'exploration. Ce qui explique que les fondements théoriques sur lesquels
nous pouvons nous appuyer pour comprendre et intervenir pourraient faire l'objet d'une
recherche plus approfondie. Il s'agit d'un discours e n émergence influence par le modele
féministe mais qui cherche aussi à s'en distancier. ConsCquemment, il y a encore tout un travail
a faire avant de prétendre à une analyse solide en ce domaine.
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Facilitating Positive LifeStyl es. San Francisco, lossey-Bass Publishers.
ANNEXE A

LA VIOLENCE DANS LES RELATIONS


AMOUREUSES ENTRE FEMMES

Nous entendons parler de plus en plus de la violence conjugale chez les lesbiennes.
R&emment, le quotidien Le Presse publiait, dans un article de Lacroix (1995). ce qui suit :
«Violence entre lesbiennes. Les agressions sont aussi fiequentes dans les couples de femmes
que dans les couples hétérosexuels». Que les agressions commises soient plus ou moins
fh5quentes que dans les autres types de couples n'est pas vraiment important d6terminer. Ce
que l'on peut retenir est que la violence entre conjointes existe réellement

Bien que des femmes lesbiennes osent un peu plus qu'avant parler de la violence vkue
dans leur couple, très peu d'entre elles se sentent comprises, et donc très peu d'entre elles
reçoivent une aide adéquate. Des intervenantes et des intervenants d'horizons diff6rents (réseaux
communautaire, gouvernemental et prive) sont consultés face à ce probkme, cependant plusieurs
ne se sentent pas outillés pour intervenir convenablement

Suite à ce constat, j'ai decide de mener une &ude sur le sujet Je la réalise dans le cadre de
ma maîtrise en service social à l'Université Laval. Cette recherche vise à mieux comprendre la
violence conjugale chez les lesbiennes pour permettre d'ameliorer l'intervention. C'est-&-dire
que les résultats de cette &tudepourraient servir adapter les services pour que ceuxci tiennent
compte de la réalité des femmes lesbiennes victimes de violence conjugale.
Les personnes les plus adequates pour m'aider à identifier les besoins de ces femmes sont
les lesbiennes qui subissent elles-mêmes cette situation. C'est pourquoi je sollicite votre
participation qui implique une rencontre d'environ une à deux heures. Celle-ci portera sur votre
vecu de violence et sur l'aide que vous avez reçue et / ou sur l'aide que vous auriez souhaité
recevoir,

Je dois rencontrer une douzaine de femmes lesbiennes victimes de violence conjugale qui
répondent ilces trois critères :
1) Vivre ou avoir vecu une relation de couple avec une femme;
2) Vivre ou avoir vécu de la violence (psychologique, verbale et ou physique) de la part
de votre conjointe;
3) Si la relation est terminée, elle doit l'être depuis moins de 5 ans.

C'est en toute confidentialité que je vous contacterai et vous rencontrerai. Pour me joindre,
composez le numero de télephone suivant : (418) 522 1546.

Ne soyez pas surprise, c'est le nurnero d'une boîte vocale privee. Laissez-y votre prenom
et votre numéro de télephone et soyez assuré que je vous contacterai dans la semaine suivante.

Cette demarche vise à enrayer la violence faite aux femmes, merci d'y participer.

Caroline Côté
ANNEXE B

APPEL AUX FEMMES G A E S ET LESBIENNES

Vous avez ou vous êtes en relation amoureuse avec une femme et vous avez vecu de la
violence (psychologique, verbale et / ou physique) de la part de votre conjointe. Dans ce cas,
vous pouniez contribuer une recherche qui vise à developper une meilleure compr6hension de
la violence chez les femmes gaies. Cette recherche a pour but de developper l'intervention auprès
des victimes. Nous garantissons la plus totale confidentialité.

Communiquez avec le 524 5769.


ANNEXE C

Bonsoir, est-ce que je suis bien au numero de telephone ? Est-ce que je


pourrais parler à madame s'il vous plaît? Si elle n'est pas là, je ne laisse aucun
message à qui que ce soit ou dans une boîte vocale. Je tt%phone plus tard.

Si elle répond :

Je suis Carohe Côte, c'est moi qui fais une &ude sur la violence dans les relations
amoureuses chez les lesbiennes. Vous m'avez laisse un message sur ma boîte vocale. Je tiens
tout de suite B vous rappeler que la demarche que je fais actuellement auprès de vous est
confidentielle. Est-ce que vous avez quelques minutes me consacrer ou si vous preferez que je
vous rappelle plus tard? Si elle veut que je la contacte à un autre moment, je lui demande quand,
i?iquelle heure et à quel num6ro. Si eue est disponible, nous poursuivons.

Avant que nous parlions un peu plus du projet de recherche, je tiens à vous remercier
d'avoir telephone, je sais que ça n'est pas facile et j'apprecie grandement votre demarche. le
poursuis actuellement des etudes de maîtrise en service social et ce qui m'amène à travailler sur
ce sujet en particulier, c'est mon experience d'intervenante A la maison des femmes de Québec
(maison d'hébergement pour les femmes et enfants victimes de violence conjugale). C'est qu'à
quelques reprises des femmes lesbiennes ont et6 Mbergées et j'ai pu constater que notre façon
d'intervenir ne répondait pas leurs besoins.
L'etude que je mène porte sur 19exp6riencedes femmes lesbiennes violentées par leur
conjointe. Le but de la recherche est de connaître ce que ces femmes vivent afin de mieux
comprendre leur situation pour mieux identifier leurs besoins spt!cifiques. C'est aussi pour
amkliorer l'intervention pratiquée auprès des femmes qui sont confrontees à ce problème. Cette
recherche est très importante puisqu'elle va permeme d'améliorer les services d'aide auprès des
femmes lesbiennes violentées et qu'elle s'inscrit dans une demarche qui vise à enrayer la
violence faite aux femmes.Jusqu'ici est-ce que ça va? Est-ce que vous avez des questions?

La façon dont je dois m'y prendre est la suivante :je souhaite recueillir le temoipage de
femmes qui répondent aux trois critères suivants :
1) Être ou avoir été en couple avec une femme;
2) avoir subi de la violence (ou en subir) de la part de votre c0njouite3~.Peu importe le type
de violence (psychologique, verbale, physique, sexuelle, économique);
3) si vous n'êtes plus avec cette femme, ça doit faire moins d'un an que la relation est
terminde38.

Est-ce que vous répondez à ces critères? Si oui, il s'agirait d'une rencontre d'environ une il
deux heures qui pourrait se derouler A l'endroit de votre choix, chez vous ou ailleurs. Les
informations demeureront anonymes et confidentielles. Auriez-vous des questions sur la
recherche ou la rencontre?

Accepteriez-vous de me rencontrer? Votre témoignage serait tri% précieux. Si vous aviez


des interrogations, n'hésitez pas à me rappeler, je prends régulikrement les messages de ma boîte
vocale.
Merci de votre collaboration et au plaisir de vous rencontrer.

37 prenions soin de v M i a si la notion de répétition des actes de violence etait présente.


NOUS
* Ce cri*hit modifie pour prolonger la m o d e & cinq ans.
ANNEXE D

ÉTUDE SUR LA VIOLENCE DANS LES RELATIONS


AMOUREUSES LESBIENNES
Formule de consentement

Madame,

L'intervention pratiquee auprès des femmes lesbiennes victimes de violence conjugale


répond rarement à leurs besoins. Cette recherche vise Zi mieux comprendre ce que les femmes
lesbiennes violentées par leur conjointe vivent afin d9am6liorerles services d'aide aux victimes.
Les personnes les plus ad6quates pour nous aider à identifier les besoins de ces femmes sont les
lesbiennes qui subissent elles-mêmes cette situation. C'est pourquoi nous sollicitons votre
participation A la présente étude r6aiisée par Caroline Côté, Btudiante à la maîtrise en seMce
social à 17Universit6Laval, sous la direction de Francine O u e ~ e t 3 professeure
~, à 1'Universite
Laval.

Votre participation implique une rencontre d'environ une à deux heures. Celle-ci portera
sur votre vecu de violence et sur l'aide que vous avez reçue ou que vous auriez souhaitee
recevoir. En tout temps, vous êtes libre de revenir sur votre decision et vous pouvez vous retirer
de 17&ude.

A œüe epoque, seulement la professeure Francine OueiIet etait engagée daus la recherche.
Toutes les informations que vous me confierez durant l'entrevue derneureroni
strictement confidentielles. En aucun cas, les noms des femmes ayant participe à cette
étude ne seront mentionnés et aucune information permettant leur identification ne sera retenue.
Je m'engage par écrit il respecter la confidentialité des informations recueillies dans le cadre de
l'entrevue.

A h de faciliter L'analyse des informations, toutes les entrevues seront enregistrées.


Seules ma directrice et moi aurons accès à ce matériel et celui-ci sera détruit une fois la recherche
terminée-

Ayant pris connaissance des principales conditions de l'etude, je consens & y participer.

Date (signature de la répondante)

En tant quYEtudianteimpliquée dans I'etude, je m'engage ii respecter la confidentialité des


informations qui me seront fournies dans la présente entrevue.

Date (signature de l'&udiante)


ANNEXE E

ÉTUDE SUR LA VIOLENCE DANS LES RELATIONS


AMOUREUSES LESBIENNES
Schéma d'entrevue

PREMIER VOLET : LE VÉCU, L'EXPÉRIENCE DE VIOLENCE


BLOC 1: CARACTÉRISTIQUESDES RÉPONDANTES ET
RFSNSEIGNEMENTS SUR LA RELATION DE COUPLE.
Questions concernant l'âge des répondantes, leur occupation, leur lieu de résidence, si elles ont
des enfants.

I1 <<Est-ce
«Est-ce ou ttait-ce votre premiere relation avec une femme? Viviez-vous ensemble?»
que vous avez ou vous aviez un cercle d'amies?»
«Est-ce que vous cachez ou cachiez votre homosexualité à votre famille? dans votre
milieu de travail?>>
«Vous êtes en relation ou vous avez bté en relation pendant combien d'annés avec cette
personne? J'aimerais que vous me parliez du début de votre relation et de la façon dont
les tensions se sont installées».
BLOC 2: LES MANIFESTATIONS DE LA VIOLENCEET LES &ACTIONS
DE LA VICTIME.

Question 1 :

I Est-ce que vous pouniez me parler des moments mciIes, de la violence que vous avez
subi ou que vous subissez de la part de votre conjointe?
Les questions suivantes pourront être PO& aux femmes qui auront plus de difficultés il parler
ou qui n'aborderaient pas d'elle-même les aspects &bas mentionnés. Comment votre conjointe
se comportait avec vous? Qu'est-ce qu'elle vous disait? Qu'est-ce qu'eue vous faisait? Comment
eile se comportait avec votre famille et ou vos arni(e)s?

Question 2 :
1 Comment vous sentiez-vous & ce moment-1%et que faisiez-vous?
Question 3 :

I Que se passait-il aprés une épisode de violence? Comment réagissait votre conjointe
après avoir eté violente? Et comment réagissiez-vous?

BLOC 3 : LES CONSÉQUENCES DE LA VIOLENCE.


Question I :
1 Pourriez-vous me parler des conséquences qu'a eu la violence sur votre vie?
Pour poser cette question, je me servirai (si cela est possible) de ce que la femme aura dejà
identifier comme conséquences pour introduire l'impact qu'il eu la violence su.eiie et sur sa vie.
Par exemple :«Vous disiez tout à l'heure que vous n'aniviez plus ildormir tellement la situation
vous stressait, est-ce que la violence a eu d'autres répercussions sur votre santé ou sur d'autres
plans de votre vie?»

BLOC 4 : LES CAUSES ET LES FACTEURS ASSOCIÉS À LA VIOLENCE.


Question 1 :
1 Comment vous expliquez-vous le fait d'avoir vecu de la violence?
Question 2 :
1 Comment vous expliquez-vous le fait que votre conjointe ait 6té violente?
SECOND VOLET : L'AIDE, LES BESOINS ET LES SERVICES.

BLOC 1 : LES TYPES DE DÉMARCHES DE RECHERCHE D9AIDE.


Question 1 :

II
J'aimerais maintenant savoir si vous avez été chercher de l'aide face il la situation de
violence que vous viviez?
Si oui, pourriez-vous me d'écrire l'aide que vous avez reçue?
1 Si non, pourquoi vous n'êtes pas d e r chercher de l'aide?
BLOC 2 : LES BESOINS.
Question 1 :
1 D'après vous, quels sont les besoins d'une femme lesbienne violentée par sa conjointe?
BLOC 3 : LES SERVICES.
Question 1 :

I1 Comment
Que pensez-vous des services d'aide?
auriez-vous souhaité être aide ou souhaiteriez-vous être aide?
APPLIED IMAGE. Inc
--
.-.
, 1653 East Main Street

=
--
--
- -
Rochester, NY 14609 USA
Phone: 716/482-0300
F a 7161288-5989

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