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CHAPITRE II : ETUDE DE LA DIVERSITE

PHENOTYPIQUE DES POPULATIONS NATURELLES


DE L’EUPHORBIA RESINIFERA O. BERG

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I. Introduction

Dans le but d’assurer la sauvegarde et la conservation des ressources génétiques


d'Euphorbia resinifera au Maroc, il est important de repérer les différentes populations
naturelles dans leur aire de répartition, d'en faire une évaluation génétique et de les conserver
pour une utilisation ultérieure. En effet, la connaissance des traits de la variabilité génétique
peut fournir une information importante sur la façon dont les populations se comportent à
l'intérieur et entre elles. On considère généralement que la variation entre écotypes ou variétés
permet de choisir la forme la plus adaptée aux conditions spécifiques à un type
d'environnement.
Dans le cas d’Euphorbia resinifera, les données relatives à la diversité génétique de
cette espèce au Maroc sont très rares. Dans cette optique, il a été procédé dans une première
étape à une évaluation de la diversité des caractères morphologiques qualitatifs et quantitatifs
liés à l’appareil végétatif et reproducteur. En effet, dans les programmes de sélection et
d’amélioration des espèces végétales des plantes, les caractères morphologiques sont les
premiers à être observés pour estimer la variation intra- et interpopulations. En plus, ces
caractéristiques phénotypiques constituent un outil incontournable dans la classification et la
taxonomie des espèces végétales. Cependant, ils sont généralement limités en nombre de
caractères relevés et directement influencée par l’environnement. Néanmoins, ils fournissent
des informations utiles pour décrire et identifier le matériel biologique (Andersson et al.
2006).
Dans cette optique, nous nous sommes intéressés dans ce chapitre à l’étude de la
diversité phénotypique des populations naturelles collectées dans l’aire de répartition
géographique de l’espèce au Maroc. En effet, l’évaluation de la diversité au sein de

cette espèce au moyen des marqueurs morphologiques serait d’un apport considérable dans
la mesure où elle permettrait comme objectif à court terme, une caractérisation fiable des
populations naturelles, ainsi qu’une meilleure connaissance de la variabilité chez cette espèce
L’objectif de cette étude est d’identifier les critères les plus discriminants des
populations étudiées et d’analyser la structure de la variation phénotypique au sein de 12
populations pour ensuite faire une comparaison avec la diversité de marqueurs moléculaires et
la mettre en relation avec l'origine géographique des populations.
Nous décrivons dans une première partie le matériel biologique utilisé et les méthodes
d’évaluation de la variabilité morphologique.

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Dans une deuxième partie, nous présentons les résultats expérimentaux de la
variabilité morphologique des populations considérées.

II. Matériel et méthodes


1. Matériel végétal

Douze populations spontanées d’Euphorbia resinifera provenant de différents sites


représentatifs de son aire de répartition géographique au Maroc ont été étudiées (Figure 16).
Le tableau 13 résume les caractéristiques géographiques et écologiques des différents sites.
L’échantillonnage du matériel végétal a été effectué entre 1et 13 juin 2019. Lors de cet
échantillonnage, 10 touffes matures par population ont été collectés au hasard. Sur chaque
touffe, 10 tiges ont été choisi. De même, 10 épines, 10 fleurs et 10 fruits matures par tige ont
été étudiés.

Figure 15 : Répartition géographique des populations naturelles d’Euphorbia


resinifera étudiées.

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Tableau 13 : Les principaux paramètres géographiques et données météorologiques
des sites de d'échantillonnage des 12 populations naturelles étudiées.

Longitud Température
Origine Zone Latitude Altitude Pluviométrie
Population Abréviation e moyenne
géographique (Montagne) N (m) (mm/an)
W (°C/an)

16,4
Elksiba KSB 1 km Nord Moyen Atlas 32°34' 6°2' 1045 718
d’ElKsiba
18,5
Tagzirt TAG 5 km Nord de Moyen Atlas 32°25' 6°11' 751 550
Taghzirt
18,3
Ain AAS 2 km Sud de Moyen Atlas 32°19' 6°19' 771 493
Asserdoune Béni Mellal
18,9
Oulad OAY 4 km Sud de Moyen Atlas 32°11' 6°48' 564 506
Ayyad Oulad Ayyad
18,8
Afourer AFO 6 km Sud Moyen Atlas 32°11' 6°31' 793 443
d’Afourer
18,1
Modj MOD 15 km Est de Moyen Atlas 32°17' 6°18' 1223 550
Béni Mellal
17,6
Bin El BIN 6 km Sud- Haut Atlas 32°4' 6°27' 936 490
Ouidane Ouest de Bin
El Ouidane
19,3
Bzou BZO 3 Km Sud de Haut Atlas 32°5' 7°3' 494 350
Bzou
17,4
Foum Jemaa FMJ 7 km Ouest de Haut Atlas 31°59' 7°1' 773 444
Foum Jemaa
16,4
Imi n’Ifri IMI 10 km Est de Haut Atlas 31°43' 6°58' 1127 478
Demnat
16,2
Wawla WAW 30 km Est Haut Atlas 31°54' 6°43' 1237 521
d’Azilal
17,7
Ouzoud OUZ 3 km nord Haut Atlas 32°01' 6°41' 941 456
d’Ouzoud

2. Traits morphologiques étudiés


Pour la caractérisation phénotypique des 12 populations de l’Euphorbe résinifère, deux
catégories de traits morphologiques ont été étudiées: six traits quantitatifs et onze traits

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qualitatifs liés aux touffes, tiges, épines, fleurs et fruits. Les caractères morphologiques
suivants ont été mesurés sur chaque individu :

- DB : Diamètre de la touffe (cm)


-
-
-
-

Tableau14 : Traits morphologiques utilisées pour l’étude de la diversité phénotypique


des populations naturelles de l’Euphorbe résinifère au Maroc

Traits des Label Traits des Label Traits des épines Label Traits des fleurs Label Traits des Label
touffes tige fruits
Diamètre de la DB Hauteur de HS Longueur des épines LSPS Longueur de la fleur LF Épaisseur du FT
touffe (cm) la tige (cm) de 10 paires supérieurs (mm) fruit (mm)
dans la tige tétragone
(mm)
Type de substrat TSB Distance DBD Distance entre 10 DPST Nombre de fleurs NFS Diamètre du FD
dans lequel la G entre les TS paires supérieures des S dans la tige fruit (mm)
touffe est cotes de la épines dans la tige
poussée tige tétragone (mm)
tétragone
(contour)
(mm)
Type de tiges TSB Couleur de CS Couleur des épines CSP Longueur du LFP Poids du fruit FW
dans la touffe la tige de chaque paire pédoncule floral (g)

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(mm)
Présence de tiges PBSB Présence du LPS
ramifiées dans la latex dans la
touffe tige

Les mesures des paramètres de l’appareil végétatif sont réalisées par un pied à coulisse
numérique dans les sites étudiés. Par contre, les caractères liés aux fruits sont mesurés par une
balance de précision un mois après la récolte, une fois la teneur en eau dans les fruits est
inférieure à 8 %.

3. Méthodes d’analyse statistique des données


Le caractère étudié est considéré comme une variable dont la description peut être
résumée par des paramètres statistiques comme l’analyse de variance et l’analyse en
composantes principales (A.C.P). Ces techniques sont d’emploi généralisé dans l’évaluation
des ressources phytogénétiques.

a) Analyse de la variance à un seul facteur (ANOVA)


Les données obtenues des ….. plantes évaluées ont été d'abord soumises à une analyse
statistique descriptive au niveau de la population : la moyenne et le coefficients de variation.
Par la suite la variation des caractères a été étudiée par une analyse de variance à un seul
critère de classification (modèle aléatoire avec effet population), qui consiste à comparer les
moyennes observées sur les échantillons afin de conclure à des différences significatives. De
même, le test de corrélation de Pearson a été effectué pour mesurer l’association entre deux
variables continues. Ces analyses ont été réalisées par le logiciel XLSTAT® (version 2020.1).

b) Coefficient de corrélation de Pearson


En utilisant le XLSTAT® software (version 2017), une matrice de corrélation a été
établie entre les variables étudiées en se basant sur le coefficient de Pearson qui consiste à
calculer le quotient de la covariance de deux variables aléatoires par le produit de leurs écarts-
types. Plus ce coefficient est proche de -1 ou +1, plus l'association entre les deux variables est
forte, jusqu'à être parfaite

c) Analyses multivariées

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Pour mieux estimer la divergence entre les populations, nous avons procédé à des analyses
multi-variées traitant simultanément toutes les données: il s’agit de l’Analyse en Composantes
Principales (ACP) et de la classification hiérarchique ascendante.

- Analyse en composantes principales (ACP)


Cette analyse, décrite par de nombreux auteurs (Lebart et al., 1977; Benzekri, 1980),
est une analyse multivariée basée sur des combinaisons de caractères quantitatifs. Elle a pour
but de condenser et réduire des données quantitatives à l’aide d’un petit nombre de nouvelles
variables synthétiques, appelées composantes principales. Cette analyse descriptive permet de
convertir les variables de départ correspondant aux données phénotypiques en variables
synthétiques ou en axes. Les données du tableau réduit sont ensuite projetées sur ces axes. Les
coefficients de corrélation étant toujours compris entre -1 et +1, le programme affiche le
cercle de corrélation de rayon 1. Le logiciel utilisé pour cette analyse est le XLSTAT®
(version 2020.1).
Les premiers axes de l’ACP montrent la disjonction maximale des groupes d’écotypes
dans les plans définis par les composantes prises deux à deux. Plus les points moyens
représentant deux écotypes sont proches, plus la ressemblance entre eux est élevée.

- Classification hiérarchique ascendante


Une classification hiérarchique ascendante selon la méthode d’agrégation d’UPGMA
basé sur la distance euclidienne, a été réalisée sur la matrice des valeurs moyennes des
caractères mesurés à l'aide du logiciel statistique Statistica (version 10, StatSoft).
Toutes ces analyses statistiques ont été effectuées par le programme STAT-ITCF. Nous
présentons dans un premier temps les résultats de l’analyse des caractères pris séparément et
dans une deuxième étape ceux relatifs à l’analyse conjointe de tous les caractères.

III. Résultats
1- Analyse des caractères séparés.
Pour examiner la variabilité phénotypique chez Euphorbia resinifera, une analyse de la
variance a été effectuée sur chaque caractère morphologique. L’objectif principal de cette
analyse est de déterminer l’ampleur de la variabilité et identifier les critères les plus
discriminants.
a- Analyse des traits morphologiques qualitatifs

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Les résultats de l'analyse de la variance des caractères qualitatifs ont montré des
différences très significatives entre les populations étudiées pour la couleur de la tige (CS) et
la présence de latex dans la tige (LPS) (Tableau 15). Les données observées montrent que la
majorité des populations présente des touffes qui poussent sur un substrat rocheux (TSBG)
(72,5 %), suivis de ceux qui poussent sur le sol (27,5 %). Les données obtenues montrent
également que la moitié des plantes ont des tiges serrées (TSB) (50,83%), suivies par des tiges
moyennement serrées (29,6%) et des tiges non serrées (20%). De plus, 68,33% des touffes
contiennent des tiges ramifiées (PBSB) et 31,67% ont des tiges non ramifiées. Parmi les trois
couleurs de tige (CS) observées, la couleur verte normale (86,66%) est la plus dominante.
D’autre part, le latex est très présent dans toutes les populations (LPS) (90% du total des
plantes). Le reste varie entre moyennement laiteux (8,34%) et faible présence du latex
(1,66%). Finalement, la couleur des épines de chaque paire (CSP) est principalement blanche-
marron (70,05%). Cependant, 29,95% des individus présentent une couleur rouge.

Tableau 15 : Fréquences des caractères morphologiques qualitatifs considérés chez


les 12 populations d’Euphorbia resinifera étudiées.

Fréquence du
Caractère
Caractère mesurées Échelle d'évaluation caractère CV%
dominant
dominant

Type de substrat dans lequel la


Sol – Roche Roche 72,5 ns 10,51
touffe est poussé (TSBG)

Type de tiges dans la touffe Serrées - Moyennes – Ouvertes


Serrées 50,83 ns 24,38
(TSB) (non serrées)

Présence de tiges ramifiées


Oui – Non Oui 68,33 ns 22
dans la touffe (PBSB)

Verte claire - Verte normale -


Couleur de la tige (CS) Normal green 86,66 ** 12,06
Verte foncée

Présence du latex dans la tige


Faible - Moyen - Très présent Très présent 90 ** 7,34
(LPS)

Couleur des épines de chaque


Rouge - Blanche marron Blanche marron 70,05 ns 0
paire (CSP)

Niveau de signification : ** : p< 0,01 ; ns: non significative; CV: coefficient de variation.

b- Analyse des traits morphologiques quantitatifs

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Concernant les traits morphologiques quantitatifs, l'analyse de la variance a révélé des
différences significatives entre les populations étudiées pour tous les traits mesurés à
l’exception du diamètre de la touffe (DB) (Tableau 16). Cela témoigne de la présence d’une
hétérogénéité importante au sein des populations étudiées
Les paramètres morphologiques qui présentent la plus grande variabilité sont en
général les paramètres relatifs à la hauteur de la tige (HS), la longueur des épines de 10 paires
supérieurs dans la tige tétragone (LSPS), la distance entre les 10 paires supérieures des épines
dans la tige tétragone (DPSTS), la longueur de la fleur (LF), la longueur du pédoncule floral
(LFP), le diamètre du fruit (FD) et le poids du fruit (FW).
Les résultats montrent également que les tiges les plus longues (HS) sont celles de la
population originaire d'Ain Asserdoune (67,01 cm), alors que les tiges les plus courtes sont
celles de la population de Wawla (46,42 cm). D’autre part, La distance entre les cotes de la
tige (DBDTS) est comprise entre 28,26 mm et 38,39 mm. La distance maximale a été trouvée
chez la population d’Ain Asserdoune alors que la distance minimale a été observée chez la
population de Bzou. De même, le diamètre des touffes (DB) oscille entre 83 cm pour la
population d'El Ksiba et 196,6 cm pour celle de Bzou, avec une moyenne générale de 159,04
cm.
Les données obtenues révèlent que la population Wawla a la valeur la plus élevée pour
la longueur des épines (LSPS) (3,88 mm) et la population originaire d’El Ksiba présente la
valeur la plus petite (1,95 mm). En outre, la distance entre les 10 paires supérieures des épines
dans la tige (DPSTS) varie de 2,77 mm pour la population d'El Ksiba à 7,12 mm pour la
population de Modj, avec une moyenne générale de 4,69 mm.
Pour le nombre de fleurs dans la tige (NFS), il varie de 12,5 pour la population
d'Afourer à 14,99 pour la population de Wawla, avec une moyenne générale de 13,92 fleurs
par tige.
Concernant les paramètres relatifs aux fruits, on note que la valeur la plus élevée du
poids a été trouvée chez la population de Imi n'ifri (0,17 g) et la plus faible a été observée
chez la population de Bzou et Modj (0,05 g). De même, le diamètre des fruits varie de 5,36
mm pour la population de Wawla à 7,99 mm pour la population d’Ain Asserdoune avec une
moyenne générale de 6,82 mm. Enfin, l'épaisseur des fruits oscille entre 4,58 mm et 5,82 mm.
La plus grande épaisseur a été observée chez la population d’Imi n'ifri alors que la plus faible
a été enregistrée chez la population de Oulad Ayyad.

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Concernant le coefficient de variation, on note que parmi les 17 caractères qualitatifs
et quantitatifs considérés, 12 avaient des coefficients de variation supérieurs à 10 %, ce qui
montre une large gamme de variations entre les populations étudiées.

Tableau 16 : Statistiques descriptives des caractères morphologiques quantitatifs


considérés chez les populations naturelles étudiées.
Populations DB HS DBDTS LSPS DPSTS LF NFS LFP FT FD FW

Elksiba (KSB) 83 48,43 32,04 1,95 2,77 7,50 12,92 4,49 5,22 6,75 0,10

Tagzirt (TAG) 168,3 59,93 31,95 3,48 4,11 12,59 13,61 9,38 4,77 5,68 0,07

Ain asserdoune (AAS) 193,7 67,01 38,39 2,86 5,39 14,72 14,79 11,07 5,69 7,99 0,10

Afourer (AFO) 160,2 61,29 31,48 3,19 5,59 11,60 12,5 8,37 5,56 7,52 0,10

Oulad Ayyad (OAY) 160,6 57,23 34,96 3,29 4,55 10,28 13,98 7,22 4,58 6,59 0,09

Bzou (BZO) 196,6 50,70 28,26 3,77 4,45 8,57 13,65 5,50 4,78 7,16 0,05

Foum Jemaa (FMJ) 169,9 51,10 32,95 3,40 4,96 14,66 14,06 11,08 5,22 7,89 0,10

Imi n’Ifri (IMI) 136,2 48,46 34,92 3,51 4,54 9.78 14,11 6,84 5,82 7,69 0,17

Wawla (WAW) 154,3 46,42 30,68 3,88 3,06 12,56 14,99 9,37 4,61 5,36 0,06

Ouzoud (OUZ) 157,5 49,02 33,81 3,63 4,98 13,30 14,37 9,14 5,21 6,56 0,09

Bin El Ouidane (BIN) 172,7 48,15 36,74 3,12 4,73 13,22 13,82 9,13 4,77 5,59 0,09

Modj (MOD) 155,5 47,14 35,74 3,28 7,12 12,96 14,22 8,78 5,17 7,02 0,05

Moyenne 159,04 52,91 33,50 3,28 4,69 11,82 13,92 8,37 5,12 6,82 0,09

CV% 18,33 12,72 8,45 15,36 24,14 19,58 5,06 24,17 8,26 13,26 37,27

Valeur de F 1,76ns 2,72** 4,07*** 4,48*** 6,04** 23,01*** 1,92* 19,79*** 66,98*** 109,6*** 1,91*
*

CV : coefficient de variation ; Niveau de signification : ** : p< 0,01; ns: non significative; les valeurs maximal et minimal
pour chaque trait sont écrites en gras.

c- Matrice des coefficients de corrélations


L’examen de cette matrice des coefficients de corrélation (Tableau 17) montre
l’existence de fortes corrélations positives passant de la valeur 0.50 à 0.98 entre les variables
suivantes :

- Le diamètre de la touffe (DB) est corrélé positivement avec le type de tiges dans la
touffe (TSB, r = 0,71), la hauteur de la tige (HS, r = 0,66), la distance entre les dimensions de
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la tige tétragon (DBDTS, r = 0,5). Ce résultat suggère que plus la touffe est robuste plus la
tige est assez longue, …...

- La hauteur de la tige (HS) est corrélée positivement avec le contour de la tige (DBDTS, r =
0,59). Donc toute augmentation de la hauteur de la tige est accompagnée par une
augmentation de son contour.
- La longueur de la fleur (LF) présente une corrélation positive et significative avec la
longueur du pédoncule floral (LFP, r = 0,98). Ce résultat montre que plus le pédoncule est
long plus la fleur est longue.
- Une forte corrélation positive notée entre le diamètre du fruit (FD) et l'épaisseur du fruit (FT,
r = 0,71).
-
-
De même, l’analyse de cette matrice montre encore une fois de fortes corrélations
négatives entre plusieurs paramètres retenus dans cette étude :

- La hauteur de la tige (HS) est corrélée négativement avec la présence de tiges ramifiées dans
le buisson (PBSB, r = -0,56). Donc toute augmentation de la hauteur de la tige est
accompagnée par une diminution du nombre de tiges ramifiées.
- De même, le type de substrat dans lequel la touffe pousse (TSBG) s'est avéré être
négativement corrélé avec le type de tiges dans la touffe (TSB, r = -0,57).
-

Concernant la corrélation entre les caractères morphologiques et les paramètres


géographiques, on note des valeurs du coefficient de corrélation relativement faible.

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Tableau 17 : Matrice des coefficients de corrélation entre les paramètres géographiques, précipitations et les caractères morphologiques
mesurés chez 12 populations naturelles d'Euphorbia resinifera au Maroc.

Precipitation
DB TSBG TSB PBSB HS DBDTS CS LPS LSPS DPSTS LF NFS LFP FT FD FW Altitude Latitude Longitude (mm)
DB
TSBG -0,44***
TSB 0,71*** -0,57***
PBSB -0,047*** 0,26** -0,41***
HS 0,66*** -0,43*** 0,58*** -0,56***
DBDTS 0,5*** -0,24** 0,44*** -0,4*** 0,59***
CS 0,10 0,05 0,03 -0,10 0,36*** 0,19*
LPS 0,16 -0,14 0,13 -0,16 0,10 0,18 0,37***
LSPS 0,27** -0,34*** 0,28** -0,24** 0,17 0,11 0,07 0,23*
DPSTS 0,25** -0,13 0,25** -0,07 0,11 0,25** -0,02 0,15 0,19*
LF 0,29** -0,15 0,27** -0,25** 0,12* 0,32*** 0,15 0,23* 0,26** 0,38***
NFS 0,4*** -0,21* 0,28** -0,28** 0,31** 0,45*** 0,14 0,18* 0,25** -0,01 0,26**
LFP 0,29** -0,14 0,26** -0,27** 0,24** 0,3** 0,19* 0,22* 0,27** 0,32*** 0,98*** 0,26**
FT 0,02 -0,04 0,07 0,16 0,14 0,22* -0,06 -0,06 -0,15 0,25** 0,09 -0,05 0,10
FD 0,02 0,01 0,04 0,02 0,13 0,10 -0,04 0,07 -0,09 0,32** 0,02 -0,03 0,03 0,71**
FW -0,03 -0,12 0,10 -0,01 0,10 0,17 0,03 0,06 -0,01 -0,03 -0,01 0,10 0,04 0,23* 0,18
Altitude -0,21* 0,08 -0,10 0,14 -0,27** 0,11 -0,12 -0,05 -0,05 -0,01 0,09 0,12 0,05 0,21* -0,22* 0,06
Latitude -0,09 0,02 -0,03 0,03 0,19* 0,02 0,14 -0,27** -0,4*** -0,02 -0,12 -0,17 -0,14 -0,10 -0,08 -0,15 -0,18*
Longitude 0,15 -0,02 0,05 -0,10 -0,11 -0,15 -0,14 0,24** 0,39*** 0,02 -0,03 0,10 0,01 -0,05 0,27** 0,07 -0,29** -0,83***
Precipitation
-0,31** 0,15 -0,25* 0,13 -0,06 0,10 -0,01 -0,33*** -0,41*** -0,23* -0,21* -0,06 -0,21* -0,01 -0,27** 0,01 0,49*** 0,62*** -0,78***
(mm)

Niveau de signification ; * : significatif (P<0.05); ** : hautement significatif (P<0.01); *** : très hautement significatif (P<0.001), les autres valeurs non significatives

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2- Analyses multivariées: Analyse en composantes principales et classification
hiérarchique ascendante

Afin d’étudier les relations phylogénétiques entre les populations étudiées, une analyse
en composante principale et une classification hiérarchique ascendante ont été réalisées sur la
base des paramètres morphologiques étudiés.
Les deux premières composantes (PC1 et PC2) absorbent 52,63 % de la variabilité
totale (Figure 16). La première composante (PC1) qui absorbe 33, 15 % de la variation totale,
est défini positivement principalement par des variables liées au diamètre de la touffe (DB),
au type de tiges dans la touffe (TSB), à la présence du latex dans la tige (LPS), à la longueur
de la fleur (LF), à la longueur du pédoncule floral (LFP) et à la présence de tiges ramifiées
dans la touffe (PBSB). L’axe 2 absorbant environ 19,49% de la variabilité totale, est défini
positivement par les caractères du contour de la tige (DBDTS), le diamètre du fruit (FD),
l'épaisseur du fruit (FT) et le poids du fruit (FW).
La projection des populations dans le plan défini par les deux premières composantes
montre la présence de trois groupes distincts (Figure 3). Le premier groupe est constitué par 8
populations : 5 populations originaires du Haut Atlas (Foum Jemaa, Ouzoud, Bin El Ouidane,
Bzou et Wawla) et 3 du Moyen Atlas (Modj, Oulad Ayyad et Tagzirt). Ces populations se
caractérisent par des touffes d'un diamètre compris entre 1,5 et 2 mètres, une hauteur de tige
comprise entre 46 et 60 cm, de longues épines, un nombre élevé de fleurs sur les tiges et un
poids relativement faible des fruits. Le deuxième groupe comprend trois populations, une
originaire du Haut Atlas (Imi n'Ifri) et deux du Moyen Atlas (AinAsserdoune et Afourer). Ces
populations se distinguent par un diamètre des touffes varie entre 1,3 et 2 mètres, une hauteur
de tige comprise entre 48 et 67 cm et un poids relativement élevé des fruits. Quant au
troisième groupe, il est formé d’une seule population originaire du Moyen Atlas (Elksiba), qui
se différencie des autres groupes par des touffes de diamètre inférieur à 1 mètre, des tiges
souvent très serrées et non ramifiées, des épines courtes et de petites fleurs. Le regroupement
des populations en trois groupes s'est donc fait en fonction des caractéristiques
morphologiques et non pas en fonction de leurs origines géographiques.

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Figure 16 : Diagramme de dispersion des populations étudiées, basé sur les deux
composantes principales.

Le dendrogramme UPGMA construit sur la base des 17 variables quantitatives et


qualitatives montre que toutes les populations peuvent être regroupées en trois groupes
(Figure 17). Le premier groupe comporte deux populations : une originaire du Moyen Atlas
(Ain Asserdoune) et une autre du Haut Atlas (Bzou), qui se caractérisent par un grand
diamètre des touffes, des valeurs élevées de la hauteur des tiges et le diamètre du fruit. Le
deuxième groupe est subdivisé en deux sous-groupes. Le premier sous-groupe contient cinq
populations originaires du Haut Atlas (Foum Jemaa, Bin El ouidane, Wawla, Ouzoud et Imi
n'Ifri) et une population qui provient du Moyen Atlas (Modj). Ces populations se caractérisent
par des valeurs moyennes des diamètres des touffes, de la hauteur des tiges, du contour des
tiges et un nombre élevé des fleurs dans la tige. Le deuxième sous-groupe renferme trois
populations (Tagzirt, Afourer et Oulad Ayyed) provenant du Moyen Atlas qui sont
caractérisées surtout par des valeurs moyennes de la longueur de la fleur, de distance entre les
10 paires supérieures des épines dans la tige, de l’épaisseur et le diamètre du fruit. La
population d’Elksiba originaire du Moyen Atlas constitue seule le troisième groupe qui se
différencie fortement des autres groupes par des valeurs faibles du diamètre de la touffe, de

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longueur des épines de 10 paires supérieurs dans la tige, de distance entre 10 paires supérieurs
des épines dans la tige, de longueur de la fleur et de longueur du pédoncule floral.

Figure 17 : Dendrogramme résultant de la classification hiérarchique ascendante


basée sur 17 caractères morphologiques.

3- Discussion
Au cours de cette partie, notre travail a porté sur la mise à profit des paramètres
morphologiques afin d’explorer la variabilité phénotypique chez quelques populations
marocaines de l’Euphorbe résinifère. Pour ce faire, nous nous sommes basés sur des
paramètres quantitatifs et qualitatifs liés aux touffes, aux tiges, aux épines, aux fleurs et aux
fruits. L’analyse de la diversité des paramètres morphologiques se rapportant à l’appareil
végétatif et reproducteur des plantes a montré une forte hétérogénéité entre les populations
étudiées.
Concernant le type de substrat dans lequel la touffe pousse, les résultats obtenus
montrent que la majorité des touffes de cette espèce (72,5%) poussent sur les roches et
seulement 27,5% se développent sur le sol. D’autre part, 68,33% des touffes contiennent des
tiges ramifiées et 31,67% possèdent des tiges non ramifiées. Le diamètre de la touffe varie de
83 cm chez la population d’Elksiba à 196,6 cm chez la population de Bzou. Ces valeurs sont
comparables à celles mentionnés par Fennane & Ibn-Tattou (2007) chez cette espèce (50 à

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200 cm) et inférieures à celles obtenues par El Kharrassi et al. (2017) chez une autre plante
xérophyte marocaine (Opuntia Megacantha). D’autre part, on note que la moitié des individus
ont des tiges serrées et près de 30% ont des tiges moyennement serrées. Par conséquent, E.
resinifera a une physionomie en forme de coussin constitué d’une touffe de tiges juxtaposées.
Leur croissance en hauteur ne dépasse pas un mètre en moyenne, mais leur croissance latérale
est beaucoup plus importante grâce à l'émission de nouvelles tiges latérales à la base des
anciennes. Ce comportement rampant de cette espèce peut jouer un rôle considérable dans la
lutte contre l'érosion du sol. Ainsi, l'espèce E. resinifera pourrait être utilisée pour le
reboisement et la réhabilitation des zones dégradées, permettant ainsi de restaurer les
couvertures végétales du sol et de préserver la végétation associée. Néanmoins, des études sur
la régénération d'E. resinifera sont nécessaires.
Quant à la couleur des épines, on note que la couleur blanche-marron est la couleur
dominante au sein des populations marocaines de cette espèce avec un pourcentage de
70,05%. D'autre part, les données obtenues montrent que la longueur des épines varie de 1,95
mm chez la population d’Elksiba à 3,88 mm chez la population de Wawla.
Concernant les fruits, le poids varie de 0,05 g à 0,17 g et l'épaisseur du fruit oscille
entre 4,58 mm et 5,82 mm. En outre, nos résultats montrent que le latex (liquide riche en
composés diterpéniques) est très abondant dans presque toutes les populations (90% du total
des plantes). Ce résultat est similaire à celui obtenu pour certaines espèces d'Euphorbia
(Mahlberg et al. 1987). Les populations marocaines d'E. resinifera ont été rassemblées en
trois groupes distincts. Ce résultat est différent de celui rapporté par Pahlevani et al. (2017)
concernant certaines espèces du genre Euphorbia (Euphorbia austro-iranica, E. buhsei, E.
khabrica, et E. osyridea). La structuration des populations a été opérée en fonction de leurs
traits morphologiques mais indépendamment de leur origine géographique et du type de la
chaine montagneuse. Ceci indique que les conditions climatiques ont eu peu d'effet sur la
structuration des populations, ce qui suppose qu'il n'y a pas d'adaptation locale des
populations étudiées ; cela est renforcé par l'absence de corrélation entre les paramètres
écologiques tels que l'altitude, les précipitations moyennes et la température moyenne et les
caractères phénotypiques. Par conséquent, l'isolement par des barrières n'a pas joué un rôle
important dans l'établissement du regroupement de ces populations naturelles. Des résultats
similaires ont été trouvés par Kabiri et al. (2018, 2019) en étudiant la diversité génétique et la
structuration des populations de noyers marocains (Juglans regia) en utilisant des traits
morphologiques et ISSR respectivement. Cependant, la structure génétique des populations

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naturelles de pin maritime (Pinus pinaster Aiton), évaluée à l'aide des isozymes, a montré une
corrélation avec le type de la chaîne montagneuse au Maroc (Wahid et al. 2004).
4- Conclusion
Dans cette étude, les caractères morphologiques des deux appareils végétatifs et
reproducteurs ont été utilisés pour la caractérisation de la variabilité génétique au sein des
peuplements naturels d'Euphoria resinifera au Maroc. Cette étude a permis d'obtenir des
résultats préliminaires sur la diversité de cette espèce. Les résultats obtenus ont mis en
évidence une diversité phénotypique élevée intra et interpopulations qui se traduit par une
diversité de couleur des tiges et des épines, de taille des tiges et des inflorescences, de
………….
D’autre part, la structuration des populations a abouti à une différentiation en trois
groupes de populations indépendamment de leur origine géographique et du type de la chaine
montagneuse.
Cette analyse de la structure de la variation génétique d'Euphoria resinifera peut servir
de point de départ pour un programme de gestion et de conservation des ressources génétiques
de cette espèce encore peu étudiée et menacée d'érosion de sa diversité. En effet, l’évaluation
de la variabilité des caractères adaptatifs s’avère très utile pour la présélection de plantes
élites, mais elle reste insuffisante pour une description de la structure génétique des
peuplements d'Euphoria resinifera. Pour cela, l’exploitation du polymorphisme des marqueurs
moléculaires neutres vis-à-vis de l’environnement, est une approche complémentaire et très
utile pour la conception de la gestion des ressources phytogénétiques.

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