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Quelles sont les risques d’une légalisation du cannabis

récréatif au Maroc. L'Hétérogénéité des Cadres Légaux


Mondiaux Concernant l’Achat et la Consommation de
Cannabis.
Amine ELBOUZAIDI,
Docteur en Développement Territorial et Aménagement de l’Espace, Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan
II Rabat, Maroc. amine.elbouzaidi@gmail.com, a.elbouzaidi@iav.ac.ma

Résumé : Cet article examine les implications de la légalisation du cannabis


récréatif dans six pays, nous évaluons les effets de cette légalisation sur la
prévalence de la consommation de cannabis, les conséquences judiciaires et les
répercussions économiques. Les résultats des études menées dans les pays
précités révèlent une variabilité des politiques adoptées et de leurs impacts.
L’objectif est de prendre en compte ces éléments dans le contexte marocain
pour évaluer les avantages et les inconvénients d’une légalisation potentielle
du cannabis récréatif. Cet article fournit une synthèse des recherches
existantes sur l'impact de la légalisation, offrant ainsi une base pour prendre
des décisions éclairées sur la politique du cannabis récréatif, médical et
industriel tout en préservant le patrimoine historique et cognitif Marocain.
Mots clés : légalisation, cannabis récréatif, prévalence chez les jeunes adultes,
trafic illicite, prévention de l'addiction, politiques antidrogue.

Abstract : This article examines the implications of legalizing recreational


cannabis in six countries, evaluating the effects of such legalization on cannabis
consumption prevalence, legal consequences, and economic repercussions.
The results from studies conducted in the mentioned countries reveal a
variability in the policies adopted and their impacts. The objective is to consider
these elements in the Moroccan context to assess the advantages and
disadvantages of potential legalization of recreational cannabis. This article
provides a synthesis of existing research on the impact of legalization, offering
a basis for making informed decisions on recreational, medical, and industrial
cannabis policies while preserving the Moroccan historical and cognitive
heritage.

Keywords : legalization, recreational cannabis, prevalence among young adults,


illicit trafficking, addiction prevention, antidrug policies.
Introduction :

Le Maroc est le premier pays producteur de résine de cannabis, plus


communément appelée haschisch, au monde. Pour lutter contre le trafic illicite
de cannabis, le pays a adopté la nouvelle loi 13-21 en 2021, qui réglemente les
utilisations industrielles et médicales de cette plante. Ce projet complexe en est
encore à ses débuts, mais à terme, l'objectif est de réduire les activités des tra -
fiquants et de se positionner sur le marché mondial du cannabis légal. L’objectif
est de stimuler l'économie de la région du Rif, qui a longtemps été négligée, en
exploitant la culture du chanvre qui existe depuis des siècles.

La loi 13-21 a engendré de nombreux dispositifs, règles et connaissances "for-


malisés", institutionnalisés, voire standardisés. Cependant, étant donné que le
marché du cannabis à usage médical est encore émergent et que celui à usage
industriel n'est pas encore estimé, tous les cultivateurs ne pourront pas inté-
grer l'économie légale, même s'ils le souhaitent. Il y aura donc une coexistence
entre un marché légal (utilisations industrielles et médicales) et un marché illé-
gal (récréatif), reposant tous les deux sur des types de connaissances concur-
rentes. La mise en place de réglementations exclusivement axées sur les as-
pects industriels et médicaux est susceptible d'engendrer des conséquences
préjudiciables sur les connaissances ancestrales acquises au fil des décennies
dans le domaine de la culture du cannabis, ainsi que sur l'accumulation de
connaissances qui confère au Maroc son statut de leader en la matière. Les
graines employées dans l'agriculture du cannabis médical et industriel n'entre-
tiennent aucun rapport avec celles disponibles sur le marché marocain, ce qui
risque de détruire les connaissances et le savoir accumulé à travers des siècles
et d’exterminer ce patrimoine national. Il n’y a aucun cadre législatif actuelle-
ment qui permet de protéger les connaissances locales (appelées tradition-
nelles ou autochtones) contre la biopiraterie. Plusieurs pays sont en train de
changer les lois relatives à l’accès aux ressources génétiques et à leurs savoirs
pour que soient reconnus des droits de propriété aux communautés autoch-
tones sur les ressources qu’elles ont préservé de génération en génération.
Concernant le cannabis, sa prohibition n’a aidé ni les États, ni les acteurs les
plus vulnérables, à revendiquer des droits sur ces ressources et les savoirs
qu’ils ont contribué à enrichir pendant des générations, le plus souvent dans la
clandestinité. Mais, dans un contexte international favorable à la reconnais-
sance des savoirs locaux, la situation pourrait évoluer.

La notion de savoir est multifacette, et le cannabis est le résultat d'une histoire


et d'une construction sociale et économique en constante évolution. Cette
complexité rend l'analyse des conditions de production des connaissances déli-
cate, comme le souligne N. Collomb (2014). Les connaissances, où qu'elles se
déploient, font l'objet d'enjeux et sont soumises à diverses formes d'évaluation
et que la législation pour les utilisations industrielles et médicales ne peut ré-
soudre les problèmes liés à cette plante. Si une protection juridique n’est pas
mise place, le risque est grand que des productions étrangères légales du can-
nabis récréatif s’appuient sur des ressources inspirées des variétés et des pro-
ductions traditionnelles marocaines (Afsahi, 2017a). On retrouve ainsi des se-
mences de beldiya ou de Ketamia, ainsi que d’autres appellations marocaines
ou encore des variétés hybrides modernes créées à partir de variétés locales
marocaines, qui achalandent actuellement les catalogues des banques de
graines commercialisées ou des produits fabriqués et distribués à l’étranger
portant également une appellation marocaine.
Il convient d'accorder une réflexion spéciale à la légalisation du cannabis récréa-
tif au Maroc, en raison de toutes ces raisons évoquées. La légalisation la possi-
bilité de réguler et de contrôler la production, la distribution et la vente du can-
nabis, ce qui permet de garantir la qualité du produit et de réduire les risques
sanitaires liés à une consommation de cannabis de qualité douteuse. De plus,
cela permet d'éliminer le marché noir, contribuant ainsi à la sécurité publique
et de s’ouvrir sur le marché international en présentant un produit purement
marocain. La légalisation permet la génération de revenus et la création d'em-
plois, la réduction des coûts judiciaires en ne poursuivant plus les infractions
liées à la possession et à la vente de cannabis récréatif. En ce qui concerne le
tourisme, la légalisation du cannabis récréatif peut attirer des visiteurs intéres-
sés par cette substance. Enfin, la légalisation permet de mettre en place des
mesures visant à réduire les risques pour la santé publique. Grâce à des régle-
mentations strictes, il est possible de contrôler et de limiter l'accès des mineurs
au cannabis.

La législation entourant l'achat et la consommation du cannabis récréatif varie


considérablement à travers le monde, avec une multitude de pays adoptant
des approches juridiques divergentes. Dans de nombreux États, l'acquisition et
la consommation de cette substance sont strictement interdites. Cependant,
dans certains cas, pour de petites quantités destinées à un usage personnel
sont tolérées comme au Maroc. Parallèlement, quelques pays ont même
légalisé, dans certaines conditions, la culture et la vente de cannabis.

Cependant, l'effet de la légalisation du cannabis récréatif sur le nombre


d'utilisateurs, en particulier parmi les jeunes, ainsi que son rôle potentiel en
tant que passerelle vers la consommation d'autres drogues, suscitait beaucoup
de questions. Ceux qui sont contre la légalisation du cannabis récréatif
expriment leurs inquiétudes quant à une possible augmentation de la
prévalence de l'usage, en particulier chez les jeunes. En revanche, les partisans
d'une approche plus laxiste soutiennent que la tolérance de la consommation
de cannabis pourrait avoir des avantages en termes de prévention précoce et
ciblée de l’addiction. De plus, il est primordial d'allouer des ressources
financières adéquates pour soutenir les mesures préventives et d'assistance
aux personnes confrontées à des problèmes de dépendance.

La problématique de la légalisation de la consommation du cannabis et son


impact sur la prévalence de la consommation de drogues ont été l'objet
d'études approfondies et de débats intenses. Les politiques adoptées par
différents pays varient considérablement.

Cet article s'appuie sur une compilation de recherches portant sur l'impact de la
légalisation du cannabis récréatif dans quatre pays différents, à savoir, les Pays-
Bas, le Canada, le Portugal et les États-Unis d'Amérique. Ces études examinent
les changements observés en termes de prévalence des nouveaux consomma-
teurs de cannabis, les conséquences judiciaires découlant de cette légalisation,
ainsi que les répercussions économiques qui en résultent.

Il est essentiel de tenir compte du type de collecte de données utilisé lors de


l'analyse des résultats des études. Il s'agit généralement d'enquêtes, parfois
limitées à des groupes spécifiques tels que les élèves de certains niveaux
scolaires.

Etant donné que la dépénalisation ou la légalisation du cannabis est


relativement récente dans la plupart des pays étudiés, les données à long
terme sur l'évolution des taux de consommation ne sont pas encore
disponibles. Enfin, il convient de noter que d'autres facteurs, tels que les
conditions économiques et sociales, peuvent également influencer les taux de
prévalence de la consommation de drogues.

1- Pays-Bas :
Contrairement à ce que l'on pourrait penser, la possession, la production,
l'achat et la vente de toutes les drogues sont illégaux aux Pays-Bas, mais la
consommation personnelle de cannabis n'est pas considérée comme une
infraction pénale. La libéralisation de la législation néerlandaise sur les drogues
a été mise en place en 1976, avec un amendement à la loi sur l'opium
(Opiumwet) qui a introduit une distinction fondamentale entre les drogues
dites dures et douces, y compris le cannabis. Cette distinction avait pour
objectif de classer les drogues dures comme étant plus dangereuses,
notamment pour les jeunes. D'un point de vue purement formel, la possession
et la vente de drogues aux Pays-Bas restent soumises aux dispositions pénales
de la loi sur l'opium. Cependant, la possession d'un maximum de cinq grammes
de cannabis et d'un maximum de cinq plantes de cannabis n'est pas considéré
comme crime. La distinction entre drogues dures et drogues douces et la
tolérance de la détention d'un maximum de cinq grammes ont conduit à
l'émergence de cafés où les consommateurs peuvent acheter du cannabis. Bien
que la vente de cannabis ne soit pas légale, elle est tolérée, contrairement à la
vente d'autres drogues dans les coffee shops agréés. Les coffee shops sont
actuellement confrontés au problème que la vente de cannabis dans les limites
de la tolérance n'est pas poursuivie, mais la culture et l'achat de quantités plus
importantes de cannabis sont toujours considérés comme des infractions
pénales (problème de la porte dérobée). Depuis mai 2012, les propriétaires de
cafés sont autorisés à vendre du cannabis uniquement aux résidents des Pays-
Bas âgés d'au moins 18 ans, dans le but de réduire l'attrait pour les touristes et
les désagréments pour les riverains 1. Cependant, cette règle n'est pas respectée
partout aux Pays-Bas.

Différentes études ont analysé les effets de la dépénalisation du cannabis aux


Pays-Bas sur la consommation de drogues. Certaines de ces études ont conclu
que la dépénalisation du cannabis aux Pays-Bas n'a pas entraîné une explosion
de la consommation de drogues et que les politiques en matière de drogue ont
eu peu d'impact sur les taux de consommation. De plus, il n'y a aucune preuve
d'une augmentation des taux de consommation due à la modification de la loi
en 1976. Bien qu'il y ait eu une augmentation de la prévalence de la consom-
mation de cannabis entre 1984 et 1996, les experts n'attribuent pas cette aug-
mentation à la modification de la loi de 1976, mais plutôt à l'expansion de la
publicité commerciale liée à la consommation de cannabis dans les coffee
shops.

Les politiques antidrogue des Pays-Bas ont entraîné une diminution du nombre
de consommateurs de drogues dures à un niveau inférieur à celui de la plupart
des pays d'Europe occidentale et des États-Unis. Entre 1979 et 1994, la préva-
lence de la consommation de drogues dures est passée de 15 % à 2,5 %. Le
nombre de décès liés à la consommation d'héroïne et de méthadone aux Pays-
Bas est également faible par rapport à la moyenne mondiale, et le taux de per -
sonnes qui s'injectent des drogues est l'un des plus bas en Europe. Un rapport
du gouvernement néerlandais de 1995 a également montré que, comparé au
reste de l'Europe, peu de jeunes développent une consommation probléma-
tique de drogues. Ainsi, l'objectif de séparer les marchés du cannabis et des
autres drogues a été atteint.

1
Gouvernement néerlandais. Toleration Policy Regarding Soft Drugs and Coffee Shops. Consulté sur le site web
du gouvernement néerlandais à l'adresse https://www.government.nl/topics/drugs/toleration-policy-regarding-
soft-drugs-and-coffee-shops (dernière consultation le 11 novembre 2019).
En 2017, la prévalence chez les adultes âgés de 15 à 64 ans aux Pays-Bas était
de 26,6 %, légèrement inférieure à la moyenne européenne de 27,4 %. En re-
vanche, la prévalence de consommation chez les jeunes adultes âgés de 15 à 34
ans était de 17,5 %, supérieure à la moyenne européenne de 14,4 %. La préva-
lence chez les élèves âgés de 15 et 16 ans était de 22 % en 2020, en baisse par
rapport aux 27 % signalés en 20152.

Plusieurs études comparent le nombre de consommateurs de cannabis aux


Pays-Bas avec ceux d'autres pays ayant adopté une politique plus restrictive en
matière de drogue, ou qui l'avaient à l'époque où les études ont été menées.

Une étude publiée en 20043 a pour objet d’examiner si la condamnation pour la


consommation de cannabis entraînait une diminution de celle-ci. Les cher-
cheurs ont sélectionné des villes similaires avec des politiques drogues diffé-
rentes dans le but de comparer les comportements de consommation de can-
nabis. Ils ont choisi la ville néerlandaise d'Amsterdam, où la consommation de
cannabis est autorisée, et la ville américaine de San Francisco, où la consomma-
tion de cannabis était alors interdite. Des enquêtes ont été menées dans les
deux villes concernant les habitudes de consommation de cannabis. Les résul-
tats ont montré de fortes similitudes entre les deux villes, indiquant qu'il n'y
avait aucune preuve que la criminalisation ou la dépénalisation de la consom-
mation de cannabis avait un impact significatif sur la consommation.

2
European Monitoring Centre for Drugs and Drug Addiction (EMCDDA) (ed.) (2020). European Drugs Report -
Trends and Developments 2020. Consulté sur le site web de l'EMCDDA à l'adresse
http://www.emcdda.europa.eu/attachments.cfm/att_239505_DE_TDAT15001DEN.pdf, p. 79.
3
Reinarman, C., et al. (2004). The Limited Relevance of Drug Policy: Cannabis in Amsterdam and in San
Francisco. American Journal of Public Health, 94(5), 836-842. Consulté sur le site web du National Center for
Biotechnology Information (NCBI) à l'adresse
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1448346/pdf/0940836.pdf.
Une autre étude réalisée en 20104 a comparé les taux de prévalence de la
consommation de cannabis chez les adolescents aux États-Unis, au Canada et
aux Pays-Bas, en tenant compte des différentes politiques en matière de
drogue dans ces pays. Les résultats ont montré qu'il n'y avait pas de différences
significatives dans les comportements de consommation de cannabis entre les
pays, malgré les politiques différentes. Les auteurs ont conclu que ces résultats
ne soutenaient pas l'idée selon laquelle une politique de prohibition des
drogues empêche la consommation ou qu'une politique plus libérale entraîne
une augmentation des taux de prévalence. Ils ont également souligné que le
lien entre la politique en matière de drogue et le comportement des consom-
mateurs était moins marqué pour le cannabis que pour l'alcool.

Une autre étude publiée en 2011 5 a examiné l'impact de la politique néerlan-


daise en matière de drogue par rapport à d'autres pays européens et aux États-
Unis. Dans cette étude les chercheurs se sont basés sur les données recueillies
par l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT) et le pro-
jet d'enquête scolaire européenne sur l'alcool et les autres drogues (European
School Survey Project on Alcohol and Other Drugs, ESPAD) ainsi que les don-
nées de « Monitoring the Future » financée par l'Institut national de la drogue
(National Institute on Drug Abuse, NIDA) pour la comparaison avec les États-
Unis.

Selon les résultats de cette étude, l'existence des coffee shops aux Pays-Bas
avait une influence modérée sur les taux de prévalence de la consommation de

4
Reinarman, C., et al. (2004). The Limited Relevance of Drug Policy: Cannabis in Amsterdam and in San
Francisco. American Journal of Public Health, 94(5), 836-842. Consulté sur le site web du National Center for
Biotechnology Information (NCBI) à l'adresse
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1448346/pdf/0940836.pdf.
5
MacCoun, R. J. (2011). Que pouvons-nous apprendre du système néerlandais des coffeeshops de cannabis ?
Addiction, 106(11), 1899-1910. Consulté sur le site web du Transnational Institute (TNI) à l'adresse
https://www.tni.org/files/publication-downloads/what_can_we_learn_from_the_dutch_cannabis_coffeeshop_
system.pdf.
drogue, mais n'entraînait pas une augmentation significative de la durée ou de
l'intensité de la consommation. Cependant, les taux de traitement des consom-
mateurs de cannabis étaient plus élevés aux Pays-Bas par rapport aux autres
pays européens. Dans l'ensemble, les valeurs observées aux Pays-Bas étaient si-
milaires à celles des autres pays européens. La séparation des marchés de la
drogue aux Pays-Bas semblait avoir affaibli le lien entre la consommation de
cannabis et celle de la cocaïne ou des amphétamines6.

2- Canada :

Le 17 octobre 2018 a marqué l'entrée en vigueur au Canada de la Loi sur le can-


nabis (C45)7, communément appelée la loi sur le cannabis. Cette législation a lé-
galisé la possession d'un maximum de 30 grammes de cannabis pour les
adultes, ainsi que la consommation de cannabis dans des lieux désignés. De
plus, chaque foyer est autorisé à cultiver jusqu'à quatre plantes de cannabis, et
les adultes peuvent fournir (sans vente) jusqu'à 30 grammes de cannabis à
d'autres adultes. Par ailleurs, la fabrication de produits contenant du cannabis à
domicile est permise. Il convient de souligner que la possession de cannabis ac-
quis illégalement reste strictement interdite. Toute vente ou achat légal de can-
nabis ne peut être effectué que dans des points de vente agréés. En ce qui
concerne les jeunes âgés de 12 à 18 ans, la loi sur le cannabis autorise une pos-
session maximale de cinq grammes de cannabis, à des fins non commerciales,
et uniquement pour échange avec d'autres jeunes du même groupe d'âge. Tou-
tefois, les provinces et les territoires ont la possibilité d'interdire complètement
la possession de cannabis par les jeunes. Selon les informations fournies par le

6
Neu, P. (2018). Discuter de nouvelles réglementations possibles dans la politique allemande du cannabis avec
une attention particulière aux expériences aux Pays-Bas et au Colorado. Advances in Neurology and Psychiatry,
86(7), 428-433. Consulté sur le site web du journal à l'adresse https://doi.org/10.1055/s-0044-100504.
7
Lien vers le texte de la loi en anglais et en français : https://www.parl.ca/Content/Bills/421/Government/C-
45/C-45_1/C-45_1.PDF
ministère de la Santé du Canada, toutes les provinces et tous les territoires in-
cluront les réglementations correspondantes dans leur législation respective 8.

Suite à l'instauration de la Loi sur le cannabis, Statistique Canada (SC) a mis en


place un système statistique national visant à évaluer les répercussions sociales
et économiques de la légalisation du cannabis. Depuis février 2018, l'enquête
nationale sur le cannabis (ENC) est réalisée trimestriellement, permettant ainsi
d'obtenir les premières données sur la consommation de cannabis à des fins
non médicales avant et après la modification de la loi, seulement un an après la
légalisation.

Jusqu'à présent, les données sont disponibles jusqu'au premier trimestre 2019
inclus, couvrant ainsi la première période complète de trois mois après la
légalisation du cannabis. Au cours du premier trimestre de 2019, on a observé
une augmentation significative du nombre de nouveaux consommateurs de
cannabis par rapport à la même période de l'année précédente. Parmi ces
nouveaux consommateurs, certains ont fait l'expérience de la consommation
de cannabis pour la première fois, tandis que d'autres avaient déjà consommé
du cannabis et ont réitéré cette expérience après la légalisation.

Le nombre de primo-utilisateurs a presque doublé, passant de 327 000 au


premier trimestre 2018 à 646 000 au premier trimestre 2019. Selon les
données de SC, environ 5,3 millions de Canadiens âgés de 15 ans et plus ont
consommé du cannabis au cours du premier trimestre de 2019, ce qui
représente 18 % de la population. Cette proportion est supérieure de quatre
pour cent à celle enregistrée un an plus tôt (donc avant la légalisation), qui
était de 14 pour cent.

8
Ministère canadien de la Santé. Backgrounder: The Cannabis Act - Les faits. Consulté sur le site web du
gouvernement du Canada à l'adresse https://www.canada.ca/en/health-canada/news/2018/06/backgrounder-
the-cannabis-act-les-faits.html (dernier accès le 11 novembre 2019).
Une grande partie de cette augmentation peut être attribuée à une
augmentation de la consommation de cannabis chez les hommes âgés de 45 à
64 ans. Les résultats de SC indiquent également que les primo-consommateurs
étaient plus âgés après la légalisation du cannabis qu'auparavant. La moitié des
nouveaux utilisateurs avait au moins 45 ans, tandis qu'à la même période en
2018, seulement un tiers des nouveaux utilisateurs appartenait à cette tranche
d'âge. Cependant, la proportion de consommateurs de moins de 25 ans est
restée inchangée. Néanmoins, dans l'ensemble, la proportion de
consommateurs de cannabis dans le groupe d'âge de 15 à 24 ans était de 30 %,
soit un chiffre supérieur à celui des Canadiens plus âgés, parmi lesquels
seulement 16 % étaient des consommateurs de cannabis.

En outre, il a été constaté que, dans l'ensemble, 47 % des consommateurs se


fournissaient auprès de sources légales plutôt qu'illégales, ce qui représente
une augmentation significative par rapport au taux précédent de 23 % de
consommateurs se fournissant auprès de sources légales.

Selon les conclusions de SC, il est important de prendre en considération le


nombre d'utilisateurs de cannabis qui en consomment de manière plus
fréquente ou régulière, c'est-à-dire (presque) quotidiennement, afin de
déterminer les effets de la légalisation, plutôt que de se focaliser uniquement
sur le nombre total d'utilisateurs. Cette approche s'explique par le lien existant
entre une consommation régulière et un risque accru de dépendance, de
problèmes de santé mentale et de résultats scolaires moins satisfaisants.

Après la légalisation, environ 6 % des répondants ont déclaré consommer du


cannabis (presque) tous les jours, ce qui représente près de 1,8 million de
Canadiens. Par rapport au premier trimestre de 2018, cette proportion, tout
comme celle de la consommation mensuelle qui était de 2 %, est restée
relativement stable, selon les données de SC. Cependant, on observe une
augmentation des chiffres concernant la consommation hebdomadaire,
passant de 2 % à 4 %, ainsi que pour la consommation occasionnelle, atteignant
4 %.

Dans ce contexte, SC souligne qu'il est nécessaire d'observer si les fluctuations


constatées à court terme lors de la période de légalisation du cannabis sont
temporaires ou s'il s'agit d'un développement à plus long terme.

Avant même la légalisation du cannabis, le Canada a connu une augmentation


constante des taux de consommation. Une évaluation basée sur neuf enquêtes
nationales menées auprès des ménages entre 1985 et 2015 a conclu que la
consommation actuelle de cannabis des répondants avait augmenté de
manière générale sur cette période. L'analyse de données comparables
provenant de l'Enquête de surveillance de l'usage du tabac au Canada et de
l'Enquête canadienne sur le tabac, l'alcool et les drogues pour la période de
2004 à 2015 a montré des résultats différents selon les groupes d'âge et de
sexe. La consommation chez les hommes âgés de 15 à 17 ans est restée
inchangée, mais a diminué chez les adolescentes du même groupe d'âge ainsi
que chez les jeunes adultes âgés de 18 à 24 ans, pour les deux sexes. Toutefois,
à partir de 25 ans, la consommation a augmenté9.

3- Portugal :

Au Portugal, une politique de drogue plus libérale a été mise en place relative-
ment tôt. La loi 30/2000 est entrée en vigueur le 1er juillet 2001, décriminali-
sant la possession de drogues plutôt que de la légaliser. Selon cette loi, la pos-
session d'une petite quantité de toute drogue, y compris les drogues dites
dures, n'est plus considérée comme un délit pénal, mais est désormais classée

9
Rotermann, M., & Macdonald, R. (2018). Analyse des tendances de la prévalence de la consommation de
cannabis au Canada, 1985 à 2015. Rapports sur la santé, 29(2), 10-20. Consulté sur le site web de Statistique
Canada à l'adresse https://www150.statcan.gc.ca/n1/en/pub/82-003-x/2018002/article/54908-eng.pdf?
st=G6I3bxOF (dernière consultation le 11 novembre 2019).
comme une infraction. Une quantité maximale équivalente à dix doses quoti-
diennes est considérée comme une petite quantité, et des limites spécifiques
ont été établies pour différentes substances 10. Les quantités précises pour
chaque drogue ont été définies par le législateur dans une annexe à la loi
30/2000. Par conséquent, la possession d'une quantité maximale de cinq
grammes de résine de cannabis ou de 25 grammes de cannabis (herbe), d'un
gramme d'ecstasy, d'un gramme d'héroïne ou de deux grammes de cocaïne
n'est plus considérée comme un crime. Les personnes trouvées en possession
de telles quantités de drogue sont référées par la police à la Commission
d'avertissement sur la toxicomanie (Comissões para a Dissuasão da Toxicode-
pendência) de leur région respective. Chaque région du Portugal dispose de sa
propre Commission, composée de trois membres : un avocat, un travailleur so-
cial et un professionnel de la santé. En collaboration avec le consommateur, la
Commission examine sa situation de santé individuelle et propose, si néces-
saire, des mesures d'assistance médicale appropriées. Toutefois, en cas de réci-
dive, des sanctions telles que des travaux d'intérêt général, le retrait du permis
de conduire ou des amendes peuvent être imposées. Entre 2002 et 2013, entre
6 000 et 8 000 cas ont été traités par les Commissions.

La grande majorité (plus de 80 %) des cas traités par les Commissions étaient
liés à la possession de cannabis. Parallèlement à la dépénalisation des drogues,
l'État portugais a effectué d'importants investissements dans la prise en charge
médicale et sociale des toxicomanes.

Les opposants à la dépénalisation craignaient une augmentation significative


du nombre de consommateurs au Portugal suite à l'adoption de la loi 30/2000.
Cependant, les données disponibles ne permettent pas de déduire une
augmentation correspondante ; au contraire, la dépénalisation a eu un impact
10
Lien vers le texte juridique en portugais : http://www.pgdlisboa.pt/leis/lei_mostra_articulado.php?
nid=186&tabela=leis&ficha=1&pagina=1& (dernière consultation le 11 novembre 2019).
mineur sur le nombre d'usagers.31 Bien que la prévalence de la consommation
de drogues au cours de la vie ait légèrement augmenté au Portugal, cette
évolution était conforme à la tendance générale en Europe. La prévalence de la
consommation de cannabis au cours de la vie au Portugal est estimée à onze
pour cent, ce qui est nettement inférieur à la moyenne de l'Union européenne
de 26,3 pour cent. La consommation récente de cannabis a également diminué,
passant de 3,7 % à 2,7 % au cours de cette période, tandis que la
consommation régulière est passée de 31 % à 28 %. Selon des études, le
nombre d'usagers de drogues problématiques a diminué de manière constante
au Portugal, et le nombre d'usagers de drogues injectables a diminué de plus
de 40 % depuis la dépénalisation. En 2011, l'enquête scolaire européenne sur
l'alcool et les autres drogues (ESPAD) a signalé une augmentation de la
consommation de drogues illégales chez les élèves portugais. Cependant, il
convient de considérer cette augmentation dans le contexte d'une évolution
similaire en Europe et de la crise financière qui a affecté particulièrement le
Portugal. Une diminution de la consommation de drogues parmi les étudiants
avait été observée précédemment.33

Le nombre de toxicomanes bénéficiant d'un traitement médical a


considérablement augmenté au Portugal ces dernières années, tandis que le
nombre d'infections par le VIH et la tuberculose a considérablement diminué.
De plus, la dépénalisation des drogues a entraîné une réduction du nombre de
décès liés à la drogue. Le nombre de décès par overdose est passé de 268 en
2000 à 22 en 2013. Cependant, il convient de souligner que cette réussite est
probablement due en grande partie à l'augmentation simultanée des
investissements financiers dans la santé et la prévention. De plus, le nombre
d'affaires judiciaires liées à la possession illégale de drogue et le nombre de
personnes incarcérées pour des infractions liées à la drogue ont diminué au
Portugal. Les deux développements auraient conduit à une réduction signifi-
cative des coûts sociaux de 18 % au cours des dix premières années après la
dépénalisation11.

4- États-Unis :

La situation juridique concernant l'achat, la possession et la consommation de


cannabis aux États-Unis est incohérente. Bien que de nombreux États aient
maintenant légalisé le cannabis à des fins médicales, la plupart ont des
politiques plus restrictives pour un usage non médical. Ce n'est que depuis
quelques années que l'usage récréatif du cannabis par les adultes a été légalisé
dans certains États. Les États de Washington et du Colorado ont été des
pionniers, ayant légalisé la possession et la consommation de cannabis dès
2012. Depuis lors, onze États américains, ainsi que Washington DC, ont légalisé
le cannabis12.

Figure1 : Lois en matière de cannabis aux USA.

11
European Monitoring Centre for Drugs and Drug Addiction (EMCDDA) (ed.) (2019). European Drug Report -
Trends and Developments 2018. Consulté sur le site web de l'EMCDDA à l'adresse
http://www.emcdda.europa.eu/system/files/publications/8585/20181816_TDAT18001DEN_PDF.pdf.
12
Aperçu de la situation juridique de la marijuana dans les différents États : Titre : "Marijuana Over-
view". Date : 26 juillet 2019. Source : National Conference of State Legislatures (NCSL) Lien :
http://www.ncsl.org/research/civil-and-criminal-justice/marijuana-overview.aspx. Étude sur les effets
de la marijuana médicale et de la légalisation de la marijuana : Auteurs : Pacula, Rosalie, et al. Titre :
"Medical Marijuana and Marijuana Legalization". Source : Annual Review of Clinical Psychology. Date :
février 2019. Lien : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6358421/
Source : l'Institut national de la drogue (National Institute on Drug Abuse, NIDA)
2022.

Au Colorado, la consommation de cannabis a été légalisée en 2012, et la


fabrication et la vente de cannabis sont légales depuis le 1er janvier 2014. Les
adultes âgés de plus de 21 ans peuvent légalement acheter du cannabis dans
différentes formes et cultiver jusqu'à six plants de cannabis pour un usage
personnel. Conduire sous l'influence du cannabis est autorisé jusqu'à un taux
sanguin de tétrahydrocannabinol inférieur à 5ng/ml, mais la consommation de
cannabis en public reste interdite. Une licence est requise pour la production et
la vente de cannabis, et seuls les résidents du Colorado sans antécédents
judiciaires peuvent obtenir ces licences.

À Washington DC, la possession d'une once de cannabis (28,3 grammes) a été


dépénalisée en juillet 2014, et la légalisation de l'usage personnel du cannabis a
été adoptée en novembre 2014 grâce à la Ballot Initiative 71. Les personnes de
plus de 21 ans sont autorisées à posséder jusqu'à deux onces (56,7 grammes)
de cannabis et à cultiver jusqu'à six plants. Ni la possession ni la culture de
cannabis n'ont été sanctionnées depuis lors, mais la consommation en public et
la vente de cannabis restent des infractions pénales. La conduite sous
l'influence du cannabis reste également illégale.

En Californie, la possession, l'utilisation et la culture de jusqu'à six plants de


cannabis sont légales pour les personnes âgées de 21 ans et plus depuis fin
2016. La vente de cannabis a été légalisée début 2018. Cependant, la
consommation de cannabis dans les lieux publics et la conduite sous l'influence
du cannabis restent interdites13.

Il convient de noter que bien que la légalisation du cannabis dans certains États
des États-Unis soit relativement récente et qu'il n'y ait pas encore d'études à
long terme disponibles, certaines premières études ont commencé à examiner
l'impact sur le nombre de consommateurs. Il est important de souligner que ces
études varient en fonction des États considérés, et certaines études portent sur
la légalisation générale du cannabis, tandis que d'autres se concentrent unique-
ment sur l'approbation du cannabis à des fins médicales. Les résultats de cer-
taines de ces études sont brièvement présentés ci-dessous, en se limitant à
celles qui ont examiné les effets de la légalisation du cannabis à des fins récréa-
tives.

Une étude publiée en 2017 a examiné l'impact de la légalisation du cannabis


sur les taux de consommation chez les jeunes dans les États du Colorado et de
Washington. Cette étude a également évalué l'influence potentielle de la
légalisation sur la perception du risque et de la nocivité du cannabis par les
étudiants14.

13
Cerdá, M. (et al.) (2017). Association of State Recreational Marijuana Laws With Adolescent Marijuana Use.
JAMA Pediatrics, 171(2), 142-149.
14
Dilley, J.A. (et al.) (2019). Prévalence de la consommation de cannabis chez les jeunes après la légalisation
dans l'État de Washington. JAMA Pediatrics, 173(2), 192f.
Les données de 253 902 élèves de huitième, dixième et douzième année,
recueillies entre 2010 et 2015, ont été analysées. Les données provenaient
d'une enquête nationale annuelle appelée Monitoring the Future (MTF). Les
périodes comparées étaient de 2010 à 2012 (avant la légalisation du cannabis
dans les deux États) et de 2013 à 2015 (après la légalisation). Des comparaisons
ont également été effectuées avec les tendances observées pendant les mêmes
périodes dans d'autres États qui n'avaient pas encore légalisé le cannabis à
l'époque.

Les résultats de l'étude sont variés et ne permettent pas de tirer de conclusion


claire. Pour l'État de Washington, les auteurs ont observé une augmentation de
14,2 % à 16,1 % de la perception du cannabis comme nocif parmi les élèves de
huitième et de dixième année. En même temps, la consommation de cannabis
a augmenté de 2 % à 4,1 % pour les élèves de huitième année et de 8,2 % à
20,3 % pour les élèves de dixième année, au cours des 30 derniers jours. En
revanche, dans les États qui n'avaient pas légalisé le cannabis, le pourcentage
d'élèves percevant le cannabis comme nocif a diminué de 4,9 % (huitième
année) et de 7,2 % (dixième année). La consommation de cannabis a également
diminué de 1,3 % et 0,9 % respectivement. Ces résultats étaient
statistiquement significatifs15.

Cependant, aucune différence statistiquement significative n'a été trouvée


pour les élèves de douzième année dans l'État de Washington ni pour les élèves
des trois années dans l'État du Colorado. Contrairement aux élèves de huitième
et de dixième année dans l'État de Washington, il n'y a pas eu d'augmentation
de la consommation chez les élèves de douzième année dans cet État ni chez
les élèves de huitième, de dixième et de douzième année dans l'État du

15
Anderson, M.D. (et al.) (2019). Association of Marijuana Laws With Teen Marijuana Use: New Estimates From
The Youth Risk Behavior Surveys. Lettre de recherche dans JAMA Pediatrics.
Colorado16. De plus, la perception de la nocivité du cannabis n'a pas changé
après la légalisation du cannabis dans ces États

Une autre étude publiée en 2018 a examiné l'impact de la légalisation du


cannabis sur le comportement de consommation chez les élèves de
Washington. Contrairement à l'étude précédente, cette étude a conclu qu'il n'y
avait pas d'augmentation des taux de consommation pour les élèves de
huitième et de dixième année, mais au contraire, la légalisation du cannabis
avait entraîné une réduction de la consommation.

Cette étude s'est basée sur le Washington Healthy Youth Survey (HYS), qui est
réalisé tous les deux ans depuis 2002 et interroge les élèves de huitième, de
dixième et de douzième année. Les données des années 2010 à 2012 ont été
comparées aux données de 2014 et de 2014 à 2016. Les résultats de l'analyse
de l'HYS ont montré une diminution statistiquement significative de la
consommation de cannabis de 2010/2012 à 2014/2016, passant de 9,8 % à 7,3
% pour les élèves de huitième année et de 19,8 % à 17,8 % pour les élèves de
dixième année. Aucun changement de comportement des consommateurs n'a
été identifié pour les élèves de douzième année, tout comme dans l'étude
précédente basée sur le MTF.

Les différences entre les résultats des deux études peuvent s'expliquer par
plusieurs facteurs. Tout d'abord, l'HYS a inclus un nombre beaucoup plus élevé
d'écoles et d'élèves enquêtés par rapport au MTF. De plus, la composition
socio-économique des participants à l'enquête était différente entre les
périodes avant et après la légalisation du cannabis. Les objectifs et les
questions des deux enquêtes étaient également différents.

16
Texte de la loi lien : http://lims.dccouncil.us/Download/29565/B20-0409-SignedAct.pdf : Source :
Marijuana Policy Project (MPP) Lien : https://www.mpp.org/states/district-of-columbia/an-overview-
of-dcs-decriminalization-ordinance/.
Les auteurs soulignent la nécessité de poursuivre les recherches pour mieux
comprendre la relation entre la légalisation du cannabis et le comportement
des consommateurs, car les résultats divergents des études actuelles montrent
que cette question nécessite une attention continue.

Une publication de 2019 a examiné l'impact de la légalisation du cannabis à la


fois à des fins médicales (lois sur la marijuana à des fins médicales - MML) et à
des fins récréatives indépendantes de l'usage médical (lois sur la marijuana à
des fins récréatives - RML) sur les comportements de consommation chez les
jeunes. Les chercheurs ont utilisé les enquêtes sur les comportements à risque
des jeunes (YRBS) menées de 1993 à 2017 auprès de près de 1,5 million
d'élèves de la neuvième à la douzième année pour leur évaluation. Ils ont
analysé la consommation de cannabis au cours des 30 derniers jours et
l'utilisation régulière de cannabis pendant au moins 10 des 30 derniers jours.
Les résultats ont montré que la légalisation du cannabis à des fins non
médicales réduisait la probabilité de consommation de cannabis de 8 % et la
probabilité de consommation régulière de cannabis de 9 %. Les chercheurs ont
conclu que l'approbation du cannabis à des fins récréatives pourrait entraîner
une réduction de la prévalence de la consommation chez les jeunes, ce qui est
cohérent avec d'autres études et soutient l'argument selon lequel la
légalisation remplace les revendeurs par des dispensaires réglementés, rendant
ainsi plus difficile l'accès des jeunes au cannabis17.

Dans l'État du Colorado, l'un des premiers États américains à avoir légalisé le
cannabis, des constatations ont également été faites sur l'évolution de la
consommation après la légalisation. Une publication de 2017, basée sur les
données du Département de la santé publique et de l'environnement du

17
Austin, G. (2018). Climat scolaire, consommation de substances et bien-être des élèves en Californie, 2015-17
- Résultats de la seizième enquête biennale auprès des élèves de l'État, 7e, 9e et 11e année. San Francisco:
WestEd. Disponible sur https://data.calschls.org/resources/Biennial_State_1517.pdf.
Colorado, a conclu qu'il n'y avait pas eu d'augmentation de la consommation
de cannabis après la légalisation. Les taux de consommation au cours des 30
derniers jours chez les adultes sont restés à 13,4 % en 2015, comparable à 13,6
% en 2014. De même, la proportion de consommateurs de cannabis parmi les
élèves du secondaire n'a pas augmenté de manière statistiquement
significative. Par exemple, en 2013, 19,7 % des élèves du secondaire avaient
consommé du cannabis au cours des 30 derniers jours, tandis qu'en 2015, ce
chiffre était de 21,2 %. De plus, la proportion de jeunes qui considéraient le
cannabis comme présentant un risque élevé a diminué de manière
statistiquement significative, passant de 54 % en 2013 à 48 % en 2015 18.

Des informations sont également disponibles pour la Californie sur l'impact de


la légalisation du cannabis sur la consommation chez les adolescents. Une
enquête menée dans le cadre de la California Healthy Kids Survey a révélé une
diminution de la consommation de cannabis pour les élèves de septième,
neuvième et onzième année. Par exemple, le taux de prévalence de la
consommation au cours des 30 derniers jours est passé de 5 % à 2,3 % chez les
élèves de septième année, de 13,4 % à 9,5 % chez les élèves de neuvième
année et de 20,1 % à 16,7 % chez les élèves de onzième année, ce qui
correspond à une baisse de trois à quatre points de pourcentage. La prévalence
à vie a également diminué, passant de 7 % à 4 % en septième année, de 17 % à
17 % en neuvième année et de 32 % à 17 % en onzième année de 2013 à 2017,
selon les niveaux scolaires19.

En ce qui concerne l'Oregon, une étude de 2018 a examiné les effets de la


légalisation du cannabis sur les comportements de consommation chez les
18
arvet, A.L. (2018). Medical marijuana laws and adolescent marijuana use in the United States: A systematic
review and meta-analysis. Addiction. Retrieved from
https://onlinelibrary.wiley.com/doi/pdf/10.1111/add.14136.
19
Kerr, D.C.R. (et al.) (2018). Oregon Recreational Marijuana Legalization: Changes in Undergraduates'
Marijuana Use Rates From 2008 to 2016. Psychology of Addictive Behaviors, 32(6), 670-678. Résumé disponible
sur https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/30010351.
étudiants âgés de 18 à 26 ans. Les chercheurs ont utilisé les données du
"National College Health Assessment - II Surveys" de 2008 à 2016, y compris
deux collèges de l'Oregon et 123 établissements d'autres États où le cannabis
n'était pas légal au moment de l'enquête. Les résultats ont montré un taux de
prévalence significativement plus élevé de la consommation de cannabis chez
les étudiants de l'Oregon après la légalisation par rapport aux niveaux
antérieurs à la légalisation. Les étudiants de l'Oregon ont également montré
une probabilité plus élevée de consommer du cannabis par rapport aux
étudiants des autres États. Cependant, il convient de noter que cette étude
présente des limites en raison d'un faible taux de réponse et du nombre limité
d'institutions impliquées dans l'Oregon.

Conclusion :

En conclusion, les études examinées dans cet article mettent en évidence le fait
que l'adoption d'une politique antidrogue stricte a peu ou pas d'impact sur le
comportement des consommateurs. Il est intéressant de constater que certains
pays qui ont des lois très strictes affichent des taux de prévalence élevés en
matière de consommation de drogues, tandis que ceux qui adoptent une ap-
proche plus libérale affichent des taux de prévalence plus faibles. Cependant, il
convient de souligner que les recherches supplémentaires sont nécessaires
pour mieux comprendre les conséquences de la libéralisation des drogues, en
tenant compte des facteurs sociaux qui influencent également la consomma-
tion de drogues.

Les principaux résultats de cet article indiquent que les lois sur le cannabis mé-
dical ont des effets négatifs ou insignifiants sur la consommation de cannabis
chez les adolescents. Les études sur les lois sur le cannabis récréatif sont limi-
tées mais donnent des résultats mitigés, avec une augmentation de la préva-
lence de la consommation chez les jeunes dans certains États, mais pas dans
d'autres. De plus, les effets des lois sur le cannabis médical sur les troubles liés
à la consommation de cannabis sont également mitigés, avec des résultats va-
riables en fonction de la mise en œuvre et des mesures des politiques.

Il convient de noter que les conclusions tirées des études actuelles sont limi-
tées en raison de la disponibilité limitée des données et de la complexité de la
question. Par conséquent, il est difficile de formuler des conclusions définitives
à partir des études actuelles. Cela souligne la nécessité de mener davantage de
recherches approfondies pour mieux comprendre l'impact des politiques anti-
drogue et de la libéralisation des drogues, en tenant compte des facteurs so-
ciaux et des différentes mesures opérationnelles. Ces recherches futures aide-
ront à guider les décisions politiques et à développer des approches plus effi-
caces pour faire face aux défis de la consommation de drogues.

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