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Les Livres de Mes Bã - ©nà - ©dictions6
Les Livres de Mes Bã - ©nà - ©dictions6
Livre 6
Trois accords en poche, je devrais dire en main, grâce à mes copains débutants comme
moi, je pouvais accompagner une multitude de chansons. Il suffisait de passer de l’un à
l’autre aisément et rapidement. Dans ma besace, j’avais le Mi, le La, et le Ré …
Cela se travaille ; au grand dam des oreilles alentours.
J’ai ensuite ajouté d’autres accords mineurs, majeurs, 7ème, diminués et j’ai appris un
dictionnaire complet d’accords de guitare. Les portes du pénitencier de Johnny Halliday,
n’avaient plus aucun secret pour moi et la poupée qui fait non a eu de sacrés tortis-colis à la
suite des milliers de représentations où elle faisait non, grâce à mon instrument.
Je commençais à bien me débrouiller. C’est dans les sous-sols de l’école Marca, que
j’ai fait ma première expérience d’orchestre.
Premièrement, il me fallait des groupies. La fille du gardien du château fut ma première
fan inconditionnelle. Un bassiste et un batteur, et nous voila partis à l’assaut des foules en
délire… Bon j’exagère un peu ! Nous nous étions « spécialisés » dans la musique country et la
musique negro-spiritual. Nos exploits se déroulaient surtout dans le cadre de l’école nous y
étions bien, dans notre petit confort.
J’ai ensuite fait partie d’un orchestre baptisé « Les Shadoks » J’adorais l’entrée en
scène quand le speaker disait : « Vous les avez vu à la télé… Vous allez les voir en chair et en
os…. Et voici les….. roulements de tambour…. SHADOKS ! » et nous entrions dans une
acclamation générale et un tonnerre d’applaudissements. Il me semble que j’avais eu assez
d’argent pour m’offrir un banjo guitare, mais je ne sais pas ce qu’il est devenu. Vendu ?
Donné ? Échangé ? Perdu ?
Dommage, je l’adorais.
Bernard, il faudrait que tu chantes une chanson d’Otis Redding, voici les accords, la
musique et tu l’apprends pour la semaine prochaine. Je me sens mal, quelle trouille, mais
quelle peur cauchemardesque !, jamais je n’arriverai à sortir quelques mots ni quelques
notes…
La répétition se passe à peu près bien mais un trac monstrueux s’empare de moi et je ne me
sens pas bien avec des envies de vomir. Plus la date de la représentation se rapproche, plus je
suis mal à l’aise.
Bizanos, sa mairie, salle des fêtes, l’estrade qui est placée à droite en entrant, et
Bernard qui pense défaillir de trac dans une marre de vomis, avec la tête éclatée et les
jointures des doigts bloquées et blanches tellement elles sont crispées.
Et puis, tout se passe bien. Les gens présents ne se sont aperçu de rien et ma première
chanson, même si elle ne devait pas être chantée très juste à cause des mes émotions, passe
comme une lettre à Elise, pardon à la poste.
Mes compagnons et surtout, le directeur de l’orchestre, Monsieur Dussau lui-même a
dû trouver correct car ils me demandent de suite d’en étudier une autre, puis une autre, puis de
me construire tout un répertoire. Ce que je ferai avec un plaisir de plus en plus soutenu et
après quelques mois, c’est lorsque je ne chante pas que je suis en état de manque.
4 Mes groupies
Je peux le dire, maintenant qu’il y a prescription, j’avais un succès fou auprès des
demoiselles. A peine arrivé, tout juste le matériel déballé, (le matériel de musique s’entend)
j’avais des filles partout, tout autour de moi.
Ce que j’aurais appris :
Il ne faut pas aller plus vite que la musique. Petit à petit, vaut mieux que quelques
grands coups. Travailler, prendre de la peine, répéter ses accords, apprendre la mobilité des
doigts de la main gauche, le rythme de la main droite, les repères pour jouer la musique en
solo, en fait ce que l’on appelle « jouer de la guitare » n’a rien d’un jeu. C’est une vocation
comme pour être prêtre, qui demande beaucoup de renoncements.
Le travail d’équipe est très important. Quand nous répétons un nouveau morceau, il
faut que tout le monde soit parfaitement au point et non pas passer à la partition suivante car
ce sera une catastrophe sur scène. Le moindre accord faussé, et c’est le chanteur qui risque de
faire un couac.
Sortir de sa zone de confort est primordial dans ce métier. C’est ainsi que l’on avance.