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Obtenu par l’ONG française Les Amis de la Terre, cet «audit pilote» confidentiel, a été préparé – à la
demande du fisc zambien – par le cabinet d’audit Grant Thornton et la firme de conseil norvégienne
Econ Pöyry, il y a un an. Couvrant la période 2005-2008, cette enquête met en doute les quantités de
minerais déclarées aux autorités locales et révèle un «véritable problème de tarification du cuivre».
Raison de l’écart grandissant observé entre les cours mondiaux et le prix – plus faible – que Mopani
reçoit de ses cathodes orangées? Son principal acheteur s’appelle Glencore. Ce dernier fixe le prix
d’achat du métal rouge qu’il revendra ensuite – de Suisse – aux utilisateurs finaux. Glencore surfacture
en outre des «frais de transports fixes jusqu’à Rotterdam», même si le métal est livré dans d’autres
ports, «plus proches», poursuit le rapport. Parfois, les ventes relèvent «d’anciens contrats» et se font
ainsi au quart du prix mondial.
La filiale zambienne écumerait en outre les marchés dérivés pour se livrer à des opérations de
couverture «anormales». Normalement ces interventions sont utilisées pour s’assurer d’un prix de
vente favorable au fil du temps. Rien de tel avec Mopani, qui «cherche à couvrir ses ventes au niveau
[de prix] le plus bas», souligne le document. Une stratégie visant surtout «à faire sortir du pays des
revenus imposables», notent les auditeurs.
Selon leurs estimations, Mopani aurait dû afficher, entre 2003 et 2005, des ventes de cuivre de
4 milliards de dollars. Au lieu de cela, ses comptes ne totalisent que 3,3 milliards de recettes sur cinq
ans. En parallèle, la filiale de Glencore aurait surévalué ses dépenses de fonctionnement, que les
comptables à l’origine de l’enquête ont tenté de reconstituer: sur la seule année 2007, cette
majoration atteignait 380 millions de dollars.
«Notre comptabilité est exacte et validée chaque année par le cabinet Deloitte», rétorque un porte-
parole de Mopani, qui rappelle que ce rapport accusateur n’est «en rien une version définitive».
Ce document vient pourtant appuyer une autre enquête sur un prêt 48 millions d’euros accordé par la
Banque européenne d’investissement à la filiale de Glencore. «Selon l’administration fiscale
zambienne, Mopani est l’une des compagnies minières qui, depuis son arrivée, n’a jamais déclaré de
profits imposables», révèle ce rapport des Amis de la Terre et du collectif Counter Balance. Un manque
à gagner crucial pour un pays dont plus du tiers de la population vit dans une «pauvreté extrême»
selon la Banque mondiale.
Dans l’entourage de l’empire de Zoug, on rétorque cependant que 1,2 milliard de dollars ont été
investi en Zambie depuis la privatisation de Mopani, il y a dix ans. Mais que, comme dans d’autre
pays, il est possible d’amortir un tel investissement sous forme de crédit d’impôt.
© 2011 Le Temps SA