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Introduction :
1. La mondialisation peut être définie comme l’extension du capitalisme et de l’économie de marché à
l’échelle mondiale. Le phénomène de mondialisation comporte deux dimensions :
La mondialisation désigne d’abord un processus de développement des échanges et de montée des
interdépendances. La mondialisation de l’économie se traduit par la croissance des flux
commerciaux, des flux d’investissement et des flux financiers. Les firmes multinationales (FMN)
jouent une part active dans ces évolutions : un tiers du commerce mondial est un commerce intra-
firmes ; ce sont aussi ces entreprises qui déterminent, pour une large part, la localisation des
principaux sites de production. Flux commerciaux, flux d’investissement et flux financiers sont, bien
entendu, liés : la décision d’une entreprise de créer un site de production à l’étranger va générer des
flux d’investissement vers le pays d’accueil, puis suscitera des flux commerciaux au départ de ce
même pays.
La seconde dimension de la mondialisation réside dans l’émergence de problèmes globaux. Les
termes de « mondialisation », ou de « globalisation » sont d’ailleurs souvent associés. L’émergence
de problèmes globaux résulte elle-même de la prise de conscience de l’existence de « biens publics
mondiaux ». Le climat et la couche d’ozone sont les deux biens publics mondiaux les plus
fréquemment cités, même si cette notion est aujourd’hui élargie à d’autres biens, tels les fonds
marins, les forêts humides, ou la biodiversité. Ces biens profitent à tous, et leur préservation requiert
une coopération internationale poussée.
2. Cette mondialisation des économies et des marchés nous amène à nous poser une série de questions :
Pourquoi les nations commercent-elles ? Pourquoi importent-elles certains biens et en exportent-
elles d'autres ? À quels niveaux de prix les échanges se réalisent-ils ? Quelles sont les
conséquences du commerce ? Ces conséquences sont-elles bénéfiques ou néfastes pour les pays
qui y participent et pour les diverses catégories d'agents à l'intérieur de chaque pays ? Les gains
issus du commerce profitent-ils identiquement à tous les pays ? Ces interrogations théoriques
conditionnent directement d'autres questionnements d'un intérêt plus immédiat pour chacun d'entre
nous : Faut-il redouter la concurrence des pays à bas salaires ? Faut-il ouvrir plus largement les
frontières aux produits étrangers ? etc.
Quel est le rôle des acteurs économiques dans ce processus de mondialisation ? Pourquoi les FMN
préfèrent-elles investir à l’étranger plutôt qu’exporter ? Quels sont les raisons qui les poussent à
globaliser leur production ? Comment organisent-t-elles leurs implantations à l’étranger ? Qu’en
résulte-t-il pour la « division internationale du travail » et pour la compétitivité de chaque pays ?
Qu’en résulte-t-il pour le développement des échanges et pour l’emploi ? Comment les Etats sont-ils
partie prenante de cette mondialisation ? Leur capacité à réguler leur économie est-elle menacée
par la globalisation des marchés ? Peuvent-ils peser sur la capacité de leurs économies à affronter
la concurrence internationale ? Comment les modes de vie se transforment-ils avec la croissance de
ces échanges à l’échelle mondiale ? Peut-on parler d’une « mondialisation culturelle » ?
Comment peut-on réguler une économie qui se mondialise ? Les nations doivent-elles aiguiser la
concurrence internationale ou bien collaborer pour construire des règles communes à tous ? Quel
est le rôle des grandes institutions internationales dans l’élaboration de ces règles communes ? Les
citoyens ont-ils la possibilité de se faire entendre ?
Les économies sont de plus en plus extraverties. La part des exportations dans le PIB (taux
d’exportation) et le taux d’ouverture augmente dans tous les pays depuis 1950 Cette ouverture est
inversement proportionnelle à la taille du marché intérieur. En effet, un grand pays a moins besoin
de se spécialiser et de trouver des débouchés à l'extérieur qu'un petit pays. Ainsi, les échanges
internationaux de marchandises ne représentent que 10% du PIB américain alors qu’ils représentent
plus de la moitié du PIB des Pays-Bas.
Une interdépendance accrue des économies : les économies sont contraintes d'importer une part
croissante de biens et de services étrangers pour satisfaire leur demande intérieure. Ceci nous est
donné par le taux de pénétration :
On peut, ainsi, calculer, la part de marché des entreprises automobiles étrangères en France
(montant des importations d’automobiles étrangères en France/ achat d’automobiles neuves en
France, en %). Ainsi si le taux de pénétration du marché automobile dans un pays est de 45%, on
saura que sur 100 voitures neuves achetées une année donnée, 45 étaient importées de l’étranger).
Tout ralentissement de la croissance dans un pays se traduit par une baisse des exportations et de
la croissance chez ses partenaires commerciaux.
2. La mondialisation passe, ensuite, par des échanges massifs de capitaux. La croissance des flux
financiers, enregistrés dans le compte financier de la balance des paiements, a été encore plus
spectaculaire que celle des flux commerciaux. Ces flux financiers, qui impliquent des transactions
bancaires (prêts, emprunts) au niveau international et le marché des changes (devises), concernent :
Les investissements en portefeuille : ils correspondent à des placements c'est-à-dire à l'achat de
titres financiers (actions, obligations, bons du trésor...) entre résidents et non résidents qui
soulignent l’internationalisation croissante des marchés boursiers.
Les investissements directs à l’étranger : création de filiales à l’étranger, prise de contrôle d’au
moins 10% d’une société étrangère, prêts à une filiale, réinvestissement d’une partie des profits
d’une filiale à l’étranger.
3. La mondialisation c’est également la mise en place d’un système mondial de production animé par les
firmes transnationales, qui sont des firmes qui ont une ou plusieurs filiales à l'étranger. Elles utilisent les
investissements directs à l’étranger et les nouvelles technologies de l’information et de la
communication (NTIC) pour répartir les tâches productives sur l’ensemble de la planète en fonction des
avantages comparatifs de chaque pays.
4. La mondialisation c’est enfin l’accroissement des migrations internationales. Les migrants vont résider
dans des pays qui ne sont pas ceux de leur naissance et importer leurs modes de vie tout en devant
s’adapter à celui du pays d’accueil.
Mondialisation
1. La mondialisation n’est pas un phénomène nouveau. Depuis le milieu du XIXe siècle, il y a eu au moins
deux vagues de mondialisation comme le montre Suzanne Berger dans son livre « Notre première
mondialisation » (2001).
La première a commencé vers le milieu du XIXe siècle pour se terminer au début de la Première
Guerre mondiale. Elle est caractérisée par une division traditionnelle du travail entre les pays. Les
pays européens font venir des matières premières de leurs colonies et exportent des produits
industriels. Ceci s’accompagne d’importantes migrations de mains d’œuvre et de flux de capitaux.
Cette première mondialisation est interrompue par les guerres mondiales et la crise de 1929 qui
provoquent une montée du protectionnisme, un reflux des échanges internationaux, un rapatriement
des capitaux et un arrêt des flux migratoires qui aggravent la crise.
3. Dans cet exemple, le Portugal et la Grande Bretagne, en produisant chacun de son côté un tonneau de
vin et une mesure de tissu, mettent au total 390 heures de travail pour les réaliser.
Le Portugal a un avantage absolu dans le vin puisqu’il met 40 heures de travail de moins que la GB
pour produire un tonneau ;
La Grande Bretagne a un avantage absolu dans le tissu puisqu’elle met 10 heures de moins que le
Portugal pour en produire une mesure.
Adam Smith va montrer que chaque pays a intérêt à se spécialiser dans l'activité pour laquelle ses
coûts sont inférieurs aux coûts de l'étranger et à s'y approvisionner quand celui-ci produit à de
meilleures conditions. En effet, en se spécialisant dans le vin, le Portugal va produire deux tonneaux
de vin et économiser 20 heures de travail. La Grande Bretagne va réaliser deux mesures de tissu et
économiser 30 heures de travail. Au total les deux pays auront gagné 50 heures de travail qu’ils
pourront consacrer à une augmentation de la production.
4. La spécialisation et l’échange international ont donc trois avantages :
Pays A Pays B
Coût le plus faible dans le Coût le plus faible dans le
produit X produit Y
Spécialisation
et DIT
Echange
international
2. Dans le modèle simplifié proposé par Ricardo, qui met en relation la Grande Bretagne et le Portugal,
produisant tous deux du vin et du tissu, la Grande Bretagne ne dispose d’aucun avantage absolu
puisqu’elle est la moins efficace dans la production des deux biens. Les coûts de production (en heures
de travail) sont les suivants :
Portugal Grande Bretagne
Coût d’un tonneau de vin en heures de travail 40 h 200 h
Coût d’une mesure de tissu en heures de travail 80 h 100 h
Avantage comparatif dans le vin du Portugal 200/40 = 5
Avantage comparatif dans le tissu du Portugal 100/80 = 1,25
Coût total en autarcie 120 h 300 h
Coût total après spécialisation 80 h 200 h
Gain horaire procuré par la spécialisation 40 h 100 h
Quantité produite après la spécialisation 3 tonneaux de vin 3 mesures de drap
Dans le vin, le Portugal est 5 fois plus productif que la Grande-Bretagne ce qui signifie que le coût
de fabrication d'un tonneau au Portugal représente 20% de celui de la GB ;
Dans le tissu, le Portugal est 1,25 fois plus productif que la Grande-Bretagne ce qui signifie que le
coût de fabrication d'une mesure de tissu au Portugal représente 80% celui de la Grande Bretagne.
Le Portugal a donc le plus grand avantage dans le vin. Il va abandonner la production de tissu et se
consacrer uniquement au vin. La Grande-Bretagne a le moindre désavantage dans le tissu. Elle va
abandonner la production de vin et se consacrer à la fabrication de tissu. Après spécialisation, le
Portugal « récupère » 40 heures qu'il va affecter à la production de vin, ce qui lui permet d'en
produire 2 tonneaux de plus. La GB, quant à elle, peut réaffecter 100 heures dans le tissu, ce qui lui
permet d'en produire 2 mesures de plus. La spécialisation a donc augmenté la production mondiale
de 2 tonneaux de vin et de 2 unités de tissus supplémentaires.
3. Chaque pays va pouvoir échanger ses excedents et gagner à l'échange à la condition que les prix
relatifs du marché mondial ou termes de l'échange soient compris dans la fourchette des prix relatifs de
l'échange interne :
Prix relatif = Prix d’un bien B/Prix d’un bien A
Dans notre exemple, la fourchette des prix relatifs internes se situe entre 2 (le tissu coût 2 fois plus cher
que le vin au Portugal) et 0,5 (il faut deux fois moins d’heures pour fabriquer du tissu que du vin en
Grande-Bretagne). Ainsi, si le prix mondial s'établit à 1 (une tonneau de vin s’échange contre une unité
de tissu), le Portugal gagne 1 mesure de tissu soit 100% de tissu en plus en vendant son vin et la GB
gagne 1 tonneau de vin soit 100% de vin en plus en vendant une unité de tissu. Mais, si le prix mondial
se fixe à 3 tonneaux de vin pour 1 mesure de tissu, le Portugal perd 0,33 mesure de tissu en plus (une
perte de 33%) alors que la GB gagne 5 tonneaux (un gain de 400% !).
Pays A Pays B
Coût relatif le plus faible Coût relatif moins élevé
dans le produit X dans le produit Y
Spécialisation
et DIT
Echange
international
Pays A Pays B
fortement doté fortement doté
en force de travail en capital
Spécialisation
et DIT
Echange
international
Economies de
travail
16
14
12
10
-2
-4
-6
-8
-10
-12
-14
1950- 1960- 1970- 1980- 1990- 2000- 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010
60 70 80 90 00 10
Exportations PIB
2. On peut noter, ensuite, une corrélation positive entre l’ouverture des pays au commerce extérieur et la
croissance de leur PIB. En 1950, l’Europe occidentale exportait 8% de son PIB. Soixante ans plus tard,
elle en exporte près de 40% ce qui a favorisé la forte croissance des Trente glorieuses. De même, le
Japon et la Chine, en s’ouvrant à l’extérieur ont connu des croissances très rapides entre 1950 et 1973
pour le Japon et depuis les années 1980 pour la Chine.
Exportations de marchandises en % du PIB et croissance du PIB
Croissance annuelle
Exportations en % du PIB
moyenne du PIB
1950 1973 2007 1950-1973 1973-2008
Europe occidentale 8 15 37 4,4 2,0
Etats-Unis 3 5 10 3,9 2,8
Japon 3 8 15 9,3 2,4
Chine 3 2 38 4,6 7,6
PIB mondial 4,1 3,3
Exportations mondiales 7,9 4,9
(Source : Baldwin et Martin 1999 actualisé Ocde 2008)
3. Cependant, tous les pays ne semblent pas avoir profité de la même façon de cette ouverture au marché
mondial :
Tout d’abord, le commerce mondial est encore largement dominé par les pays développés. Les pays
européens et l’Amérique du Nord réalisent près des deux tiers des échanges mondiaux. Ce sont les
européens qui ont le plus profité de cette ouverture puisque leur part du marché mondial est passé
du tiers en 1948 à plus de 50% en 1973 mais il s’agit essentiellement du commerce à l’intérieur de
l’UE (commerce intra-zone).
Ensuite, ce sont les pays d’Asie et le Moyen-Orient qui ont su augmenter leur part de marché à partir
des années 1970. Ces deux régions représentaient un 16% du commerce mondial en 1948 et 37,6%
de nos jours. Les NPI asiatique, la Chine et l’Inde ont su s’insérer dans la division internationale du
travail en exportant leurs produits manufacturés et leurs services (Inde). La Chine est devenue, en
2010, le premier exportateur mondial. Le Moyen-Orient a bénéficié de la hausse des prix du pétrole.
Mais, les autres pays en développement et les pays en transition (ex bloc de l’Est) ont vu leur part
de marché se réduire. Ces trois régions représentaient un cinquième des échanges mondiaux en
1948 et un huitième de nos jours. La mauvaise spécialisation de l’Amérique Latine et de l’Afrique
dans les produits primaires et l’effondrement du bloc soviétique expliquent cette marginalisation du
commerce mondial.
Exportations mondiales de marchandises, par région et par certaines économies
((En milliards de dollars et en pourcentage)
GATT
Libre-échange Multilatéralisme
2. Depuis 1947, les différentes négociations commerciales au sein du GATT ont aboutit à une baisse
considérable des droits de douane moyens : en 1947, le droit de douane moyen était égal à 40% ce qui
signifiait que le produit étranger, dont la valeur était de 100 $, était vendu en France, par exemple, 140
$. Les 40 $ supplémentaires étaient prélevés par l’Etat au même titre qu’une taxe. De nos jours, les
droits de douane moyens se situent à 4% et les recettes, pour l’UE, sont versées directement au budget
de l’Union Européenne.
Tarifs moyens Réduction
Nom du round Date des Nb de pays
avant le round moyenne des
du GATT négociations participants
en % tarifs (en %)
Genève 1947 23 40,0 35,0
Annecy 1949 13 26 2,0
Torquay 1950-1951 38 23,9 25,0
Genève 1955-1956 26 17,9 3,5
Dillon 1961-1962 26 16,5 7,0
Kennedy 1964 62 15,2 35,0
Tokyo 1973-1979 102 9,9 34,0
Uruguay 1986-1993 117 6,5 39,0
Doha 2001- ? 145 4,0 ?
La France dispose d’avantages comparatifs plus dispersés : les services (le tourisme, les
services financiers), l’agriculture, et certains secteurs industriels (les avions, les produits
pharmaceutiques, les produits de luxe…).
Les pays en développement doivent se spécialiser dans les produits primaires (agricoles, minerais,
combustibles) et dans des industries de main-d’œuvre car les coûts salariaux unitaires y sont plus
faibles.
La Chine dispose des avantages comparatifs importants dans les industries de main-d’œuvre
(produits informatiques, électroniques, électroménager, textile).
Le Brésil a des avantages comparatifs dans les produits agricoles (soja, volailles…) et les
industries agro-alimentaires.
Avantage Avantage
productif naturel
Spécialisation
Gain de Importations
productivité moins chères
Baisse du coût
Baisse des prix
unitaire
Hausse de la Hausse de la
demande compétitivité
Hausse de la taille
des marchés
Ainsi, le Japon a quintuplé sa part du marché mondial des marchandises entre 1950 et 1991 mais sa
compétitivité a diminué depuis. L’Allemagne est restée le premier exportateur mondial jusqu'en 2009
mais sa part dans le marché mondial s’effrite depuis le début des années 1990. La Chine a accru, dans
le même temps, sa part de 1% dans les années 1980 à 10,5% en 2010 et est devenue le premier
exportateur mondial.
D’autre part, les soldes des balances commerciales révèlent le degré de compétitivité et la plus ou
moins bonne spécialisation des pays.
Soldes commerciaux 1967-2010 (En % du commerce mondial de biens à prix courants)
La Chine dégage d'importants excédents commerciaux depuis les années 1990 grâce à sa
spécialisation dans des industries utilisant une main-d'œuvre abondante et peu chère.
Le Japon et l'Allemagne sont également excédentaires depuis les années 1970 grâce à leur
spécialisation dans industries à haute intensité technologique.
En revanche, les Etats-Unis sont fortement déficitaires car ils sont spécialisés dans l'agriculture et
les services qui ne suffisent pas à compenser leur faiblesse dans l'industrie et leurs besoins de
produits primaires.
2. La compétitivité-prix d’un pays peut être attribuée à plusieurs facteurs :
Niveau de la marge
Coût unitaire bénéficiaire Taux de change
Compétitivité-prix
Le coût horaire du travail recouvre les salaires nets, les cotisations salariales et les cotisations
employeurs, d’origine légale ou conventionnelle, (dont les allègements de cotisations sociales
pour la France), auxquelles il faut ajouter les impôts et taxes sur les salaires et la main-d’œuvre
(versements transport, formation, logement, apprentissage...), dont l’existence et l’organisation
varient sensiblement d’un pays à l’autre. Ainsi, en 2011, les coûts horaires de la main-d’œuvre
ont été estimés en moyenne à 23,1€ dans l'économie marchande de l'UE, et à 27,6€ dans celle
de la zone euro. Toutefois, cette moyenne masque des écarts importants entre les États
membres, les coûts horaires de la main-d’œuvre variant de 3,5€ (Bulgarie) à 44,3€ (Norvège).
Cette contrainte explique sans doute en partie la quasi-stagnation des taux de marge des sociétés
non financières entre 2000 et 2009 qui contraste avec la remontée enregistrée dans plusieurs autres
pays européens. L’enjeu est important pour la compétitivité future puisque des marges dépend en
partie la capacité d’investissement des entreprises : investissements matériels mais aussi
investissements immatériels (recherche et innovation, prospection commerciale, design), qui
deviennent de plus en plus déterminants et exigent de plus en plus de ressources propres.
Enfin, compétitivité-prix dépend de l’évolution du taux de change. Le prix du bien exporté va être
facturé dans la monnaie du pays d’accueil. Toute variation du taux de change va donc modifier la
valeur de ce bien. Ainsi, une dévaluation (décidée par l'Etat) ou une dépréciation (décidée par le
marché des changes) d'une monnaie nationale par rapport aux monnaies étrangères, c'est-à-dire
une baisse du taux de change se traduit par une baisse des prix à l'exportation pour ce pays. En
effet, les acheteurs étrangers vont donner moins de leur monnaie pour obtenir les produits du pays
qui a vu sa monnaie se déprécier sur le marché des change. Supposons qu’un € soit égal à un $.
Pour acheter un produit valant 10 €, un américain devra donner 10 $. Si le cours de l’Euro baisse et
passe à 1,5 € = 1 $, un américain n’aura plus a donner que 6,6 $ (10/1,5) pour obtenir le même bien.
Lorsque cette sous-évaluation de la monnaie nationale entre dans une stratégie de conquête des
marchés étrangers, on parle de dévaluation compétitive.
1,9 5,4
Europe
2,8 3,5
occidentale (37,9)
26,9
Commerce mondial
Interbranche Intra-branche
Nord/Pays
Nord/Sud Nord/Nord
émergents
Les pays du Nord échangent entre eux des produits similaires (des produits chimiques, des
médicaments, des biens d’équipement, des automobiles, des produits de télécommunications,
des produits électroniques...mais aussi des produits agricoles et alimentaires). Ce commerce
intra-branche représente plus de la moitié des échanges.
Les pays du Nord échangent avec les pays émergents des biens manufacturés différents. Les
pays du Sud exportent des produits intermédiaires (acier), des biens de consommation (textile,
cuir, habillement, jouet) mais aussi des produits des NTIC (électronique grand public,
télécommunications). Ce commerce interbranche se développe avec le transfert d’une partie de
l’industrie mondiale dans les nouveaux pays industrialisés (NPI) et l’ensemble constitué du
Brésil, de la Russie, de l’Inde et de la Chine.
Les pays du Nord échangent avec le reste des pays du Sud des produits manufacturés contre
des produits primaires car l’ancienne DIT n’a pas disparu.
Part de la Triade (UE, Etats-Unis, Japon) et des BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) dans les exportations
mondiales en 2006 et évolution de cette part sur la dernière décennie (en %)
b) – Les exportations reposent aussi sur la compétitivité hors-prix ou structurelle
1. La compétitivité hors-prix ou structurelle : Un pays détient une compétitivité structurelle ou hors-prix
lorsque, à prix équivalent, ses produits sont mieux adaptés à la demande mondiale. Afin de s’adapter en
permanence à l’évolution de la demande, à l’émergence de nouvelles concurrences et de nouvelles
exigences du consommateur, chaque entreprise doit faire preuve de toujours plus de réactivité pour
préserver ses positions sur ses marchés, les développer et en conquérir de nouveaux. Preuve en est le
positionnement de l’Allemagne : d’une manière générale, on observe que les secteurs où les entreprises
allemandes sont les plus concurrentielles sont les entreprises de haute technicité ou de produits haut de
gamme, quel que soit le niveau de salaire. La compétitivité structurelle ou hors-prix dépend donc d’un
certain nombre de facteurs :
L’utilisation des TIC : une meilleure utilisation des TIC dans la gestion des entreprises et leurs
relations commerciales est un facteur de gains plus importants de productivité (facture électronique,
plateformes communes, dématérialisation des commandes ...). A cet égard, la France accuse un
retard important : en 2010, seulement 58% des entreprises françaises avaient un site Internet,
contre 84% en Allemagne et plus de 80% dans les pays scandinaves. De même, seulement 13%
des entreprises françaises utilisaient les TIC dans leurs relations avec leurs fournisseurs et leurs
clients.
Dans ces domaines, les dernières enquêtes auprès des importateurs européens montrent un recul
du rapport qualité-prix des produits français (biens de consommation, biens intermédiaires, biens
d’équipement). Ils se situent désormais à la 5ème position du classement parmi dix origines de
produits : Allemagne, Japon, États-Unis, France, Royaume-Uni, Italie, Espagne, PECO, Asie, Chine.
Enfin, l’appareil productif doit être réactif vis-à-vis des variations de la demande. Ceci implique :
Une amélioration de l’organisation productive et du management : La compétitivité des
entreprises est aussi fondée sur la qualité de l’organisation et du management, vecteurs de
mobilisation des salariés, donc de productivité. La performance d’une entreprise repose à la fois
sur des relations collectives constructives et sur une réelle attention portée aux salariés en tant
que personnes (principes du Toyotisme).
Une bonne implantation à l’étranger permet de mieux connaître les goûts des consommateurs
locaux et une organisation de la production flexible de faire face à la diversité des goûts.
2. les dotations de facteurs mais sur les stratégies des firmes et sur celles des Etats. Les avantages
comparatifs ne tombent pas du ciel. Ils ne sont pas acquis. Ils sont construits par les acteurs en
concurrence imparfaite. Il faut donc se tourner, comme Schumpeter, vers l’offre pour comprendre les
avantages comparatifs :
L’écart technologique de Posner et Krugman : une firme qui introduit un nouveau produit peut
profiter d’un monopole provisoire à l’exportation jusqu’à ce que les brevets tombent et que des
firmes imitatrices lancent un produit comparable à un prix plus faible .Selon Posner, c’est donc
l’avance technologique caractérisant un pays qui conduit à déterminer les avantages comparatifs du
pays. Krugman va approfondir les intuitions de Posner. Il va différencier deux types de zones :
les firmes du Nord innovent, ce qui permet de développer de nouveaux produits qui offrent une
situation de monopole et peuvent donc produire sur son territoire des biens de haute
technologie à un prix élevé.
inversement, les firmes du Sud ont des capacités d’innovation réduites. Dès lors, elles ne
peuvent que copier les innovations réalisées au Nord, mais avec un décalage plus ou moins
long .Ils fabriquent et exportent des produits banalisés à un prix réduit en raison de la
concurrence.
Les capacités d’innovation et donc les efforts de recherche-développement jouent alors un rôle
essentiel.
Le cycle de vie du produit de Vernon : un produit est lancé dans le pays qui l'a créé, puis exporté,
lorsque la demande s'accroît, vers des pays à niveau égal de développement. Ensuite, une fois le
produit normalisé, sa production peut être délocalisée ce qui suscite des échanges intra-firmes au
sein des firmes multinationales qui sont, en partie, des échanges intra-branches. Ce schéma semble
bien s’appliquer au développement « en vol d’oies sauvage » japonais (Akamatsu).
3. Ainsi, contrairement à la théorie traditionnelle, ce n’est pas l’avantage comparatif qui crée la
spécialisation et l’échange mais l’inverse. En effet, lorsque deux pays ont des dotations de facteurs
identiques, ils ne devraient avoir aucun intérêt à échanger. Pourtant, en se spécialisant et en
échangeant, ils agrandissent la taille de leur marché et dégagent des économies d’échelle qui leur
donnent un avantage comparatif. On a donc la séquence :
Echange international => Economie d’échelle => spécialisation => avantage comparatif
A partir des années 1990, les pays émergents deviennent exportateurs de produits manufacturés qui
vont représenter plus des 2/3 des exportations des pays en développement en 2010. Une nouvelle DIT
se met en place.
2. En théorie, l’insertion des PED dans le commerce international par une spécialisation dans les produits
primaires devait les aider à impulser leur développement :
Les exportations de produits primaires constituent un apport de devises et des recettes fiscales et
douanières. Ces recettes permettaient d’investir dans des industries de transformation (industries
agro-alimentaires, raffineries pétrolières…) et dans des infrastructures publiques (routes, ports,
réseau électrique…).
Les recettes d’exportation servent de caution aux prêts des banques des pays du Nord. La dette des
pays du Sud, si elle est investit dans du capital fixe productif, peut servir à financer le décollage des
pays en développement.
Les ressources naturelles des pays du Sud attirent les FTN primaires. Celles-ci apportent leurs
capitaux et leur technologie, ce qui devrait favoriser le développement.
3. Cependant, la spécialisation dans les produits primaires présente plusieurs inconvénients pour le
développement des PED.
Tout d’abord, les FTN mettent en concurrence les pays du Sud pour un même produit. En
conséquence l’offre de ces produits tend à devenir excédentaire ce qui entraîne une baisse relative
des prix à long terme de ces produits primaires. Pour savoir si un pays gagne ou perd à l'échange,
on doit donc calculer les termes de l'échange qui sont des prix relatifs calculés à partir de l'indice
des prix des produits exportés rapportés à l'indice des prix des produits importés.
Termes de l’échange = Indice des prix des produits exportés/indice des prix des produits importés x 100
Indice > 100 = Amélioration des termes de l’échange. Le pouvoir d’achat des exportations
en produits importés s’améliore (ATE) ;
Indice = 100 = Equilibre des termes de l’échange. Le pouvoir d’achat des exportations en
produits importés se maintient ;
Indice < 100 = Détérioration des termes de l’échange. Le pouvoir d’achat des exportations
en produits importés diminue (DTE).
Ce sont les pays les plus pauvres (PMA) qui subissent la DTE la plus forte depuis le milieu des années
1970. Cependant, la forte demande des pays émergents en produits primaires au milieu des années 2000 a
permis aux pays en développement exportateurs de ces produits de profiter d’une ATE jusqu’à la crise de
2009.
Ensuite la demande mondiale pour ces produits est en faible croissance car les produits alimentaires
se saturent vite (loi d'Engel), les matières premières sont concurrencés par des produits industriels
de substitution et les économies d'énergie limitent la demande. D'où des excédents qui pèsent sur
les prix de ces produits.
Volume du commerce mondial des marchandises par grand groupe de produits, 1950-2010 (100 = 1950)
12
Produits agricoles
10
Combustibles et produits des industries extractives
8
Produits manufacturés
6
0
1950-1973 1973-1990 1990-2010
Part des biens et services dans le total des exportations mondiales (en %)
De plus les prix des matières premières est fixé par des bourses spéculatives installées dans les
pays du Nord et dépend des cycles économiques des pays riches. Les pays pauvres sont « price
takers » alors que les pays riches sont « price makers ». D’où une forte instabilité du prix des
produits de base et une tendance à la baisse (les pays compensant la baisse des prix par une
augmentation des volumes, c’est à dire de l’offre, ce qui déprécie davantage le produit).
En conséquence, les pays en développement ont des pertes de recettes et sont incapables de
planifier à long terme leur développement. Ils sont obligés de produire et d’exporter davantage pour
avoir les mêmes recettes et de recourir à l’endettement.
Plus d’exportations de café, moins de recettes
La spécialisation des produits primaires d’exportation se fait au détriment des ressources vivrières.
En conséquence, les pays en développement sont obligés d’importer leurs produits alimentaires
alors que leur agriculture pourrait être autosuffisante. Les subventions des pays riches à leur
agriculture faussent la concurrence sur le marché mondial.
Or, un très grand nombre de pays en développement, en particulier les PMA africains, dépendent
des recettes d’exportation car ils sont mono-exportateurs.
De plus, une partie des recettes douanières et fiscales sont détournées par des élites
kleptocratiques et servent à financer des « éléphants blancs » (infrastructure de peu d’utilité pour le
développement. La corruption détourne une partie non négligeable des recettes d’exportation.
La spécialisation dans les produits primaires empêche tout progrès technique car ils ne dégagent
pas des innovations comme le secteur des télécommunications, par exemple. Les effets
d’entrainement n’ont donc pas lieu. Le pays ne peut donc pas se spécialiser dans des produits à
forte demande mondiale. Il devient dépendant tant en matière d'approvisionnement qu'en matière de
débouchés. Ce sont les pays qui n'ont pas de produits primaires (Japon, NPI) qui ont connu le
développement le plus rapide.
4. Les producteurs de produits primaires peuvent-ils contrôler le prix de leurs produits ? L’organisation des
pays exportateurs de pétrole (OPEP) a limité artificiellement les quantités offertes de pétrole au moment
où la demande était élevée pour imposer une hausse des prix. Le cartel est donc une entente entre les
offreurs qui contrôlent les quantités vendues pour imposer un prix. Chaque participant au cartel doit
respecter un certain quota de production pour éviter les excédents. Le cartel suppose :
Un contrôle de l'exportation du produit : les puits de pétrole ont été nationalisés dans les années
1970 ;
Une part de marché suffisante pour s'imposer : l'OPEP contrôlait 80% des exportations de pétrole
en 1973 ;
Un produit stratégique : le pétrole représentait les 3/4 de l'énergie consommée par les PDEM en
1973.
Les deux chocs pétroliers sont les principaux responsables de l'amélioration des termes de l'échange
pour les PED entre 1970 et 1980 : le prix des matières premières a augmenté beaucoup plus vite (40%
de plus) que le prix des produits importés par l'OPEP, ce qui a gonflé les recettes de la balance
courante de ces pays et a financé leur industrialisation et leur développement.
5. Cependant, cette stratégie de cartellisation d’un marché n’est pas reproductible (tous les produits
primaires ne sont pas des produits stratégiques comme le pétrole) et ne dure qu’un temps. Les prix
élevés du pétrole ont incité les pays du Nord à trouver des énergies de substitution (nucléaire,
solaire...), à faire des économies d’énergie et à exploiter le pétrole des pays du Nord désormais rentable
(Mer du Nord, Norvège, Alaska...). L’offre de pétrole est ainsi devenue supérieure à la demande.
L’OPEP n’a pu empêcher le contre-choc pétrolier de 1985 et la baisse des prix du pétrole tout le long
des années 1990. La balance courante de l'OPEP devient négative, ce qui freine le développement.
D'autre part, les pétrodollars ont eu des effets déstructurant pour l'économie des pays de l'OPEP :
abandon de l'agriculture vivrière, urbanisation sauvage, corruption étatique, création de secteurs
parasites peu productifs et peu exportateurs, ce qui oblige ces pays à importer massivement des biens
alimentaires et des biens d'équipement qu’ils ne peuvent plus payer lorsque les prix du pétrole
deviennent trop bas.
Conclusion :
1. Il semble donc difficile de montrer que le développement des échanges internationaux et le libre
échange se soient traduits par des « gains mutuels ». On peut même observer :
Qu’il n’y a pas de liens entre ouverture et convergence des économies : sur plus de trente ans, les
pays qui ont convergé ne sont pas, systématiquement les plus ouverts. Les pays émergents qui se
sont développés rapidement (NPI, Chine, Inde) ont su conserver un certain degré de protection pour
préserver leurs industries.
Qu’il n’y a pas d’accélération de la convergence avec la hausse du libre-échange : l’intégration de
l’UE, qui devrait constituer un bon « laboratoire » de la relation (suppression des droits de douane à
l’intérieur de l’UE) entre ouverture et convergence, ne permet de conclure ni sur une convergence
régionale ni sur un effet permanent de l’ouverture sur la croissance des pays membres.
Qu’il n’y a pas diminution des inégalités de niveau de vie : en effet, si à partir de 1980, on observe,
une réduction des inégalités de revenu par tête au niveau mondial, celle-ci masque les différences
régionales et l’augmentation des inégalités internes. Ainsi, si l’on exclut la Chine (20 % de la
population mondiale), qui connaît un rattrapage économique rapide sur la période, on constate que
les inégalités entre les niveaux de vie ont, au contraire, tendance à s’accroître à partir du début des
années 80.