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RESUME : Dans le cadre de la mise aux normes de la station d’épuration de Nancy, située à
Maxeville en bordure immédiate de la Meurthe, les terrassements d’une nouvelle unité de
traitement appelée « Biolift » ont nécessité la mise en place d’un important blindage. L’objet de cet
article est de présenter l’apport de la méthode des éléments finis (MEF) dans le dimensionnement
de ce blindage et plus généralement dans le cas des rideaux de soutènement. Pour valider la
démarche proposée, le dimensionnement du blindage a été conduit d’une part à l’aide des méthodes
usuelles et d’autre part avec le logiciel PLAXIS. Différents exemples simples mais éloquents
mettent en évidence la contribution de la MEF dans la prise en compte des mécanismes
d’interaction sol-structure.
Mots clés : interaction sol-structure ; soutènement ; méthode des éléments finis (MEF) ; états
limites de service ; état limite ultime ; rideau de palplanches.
1. INTRODUCTION
zone 2 zone 2
zone 2 zone 2
zone 3
zone 3
N
zone 3
zone 3
zone 3
zone 3
zone 1
zone 1
zone 3
0,12 MPa Pf 1,50 MPa 0,16 MPa P 2,00 MPa 1,80 MPa E M 50,00 MPa
Un essai de cisaillement direct non drainé a permis d’obtenir les paramètres suivants :
c u 30 kPa , M u 15q
Des dépôts alluvionnaires grossiers. L’épaisseur de ces alluvions était comprise entre 2,00 m et
3,00 m, avec pour caractéristiques pressiométriques :
0,22 MPa Pf 2,10 MPa 0,34 MPa P 3,20 MPa 3,30 MPa E M 40,00 MPa
Le substratum marneux à partir de 188,00 IGN. Les marnes, qui constituaient le niveau
d’ancrage du pied du rideau, présentaient la particularité d’être légèrement schisteuses et finement
litées suivant un plan sensiblement horizontal. Cette hétérogénéité a été mise à jour au cours des
terrassements et non pas au cours des essais in-situ. L’expérience montre, pour ce type de matériau,
que les résultats obtenus à l’aide d’essais comme le pressiomètre ou le pénétromètre conduisent à
des caractéristiques apparentes généralement bonnes alors que ces matériaux sont très sensibles aux
variations hydriques et aux phénomènes de gonflement accentués par la présence d’un litage
extrêmement défavorable à la reprise des efforts de butée. Afin d’optimiser le module des
palplanches, nous avons mené des essais de battage qui ont permis de confirmer l’ordre de grandeur
du module et de la résistance à court terme de ce type de marne. Les caractéristiques
pressiométriques étaient les suivantes :
0,10 MPa Pf 2,50 MPa 1,60 MPa P 3,90 MPa 49 MPa E M 560,00 MPa
Des essais de cisaillement direct non drainé ont permis d’obtenir un encadrement des paramètres
suivants :
35 kPa c u 70 kPa 21q M u 23q
En conclusion, quel que soit le sol considéré, les résultats obtenus ont mis en évidence une grande
dispersion des résultats avec, pour les remblais récents constitués de matériaux alluvionnaires fins,
des caractéristiques faibles et pour les niveaux alluvionnaire et marneux des caractéristiques
moyennes à bonnes.
3. PRINCIPES DE DIMENSIONNEMENT
7 7 A n a ly tiq u e
J 20 kN m 3
6.50 m
L4S
6 6
E 40 MPa L2S
H a u te u r (m )
H a u te u r (m )
Q 0.30 5 PU8 5
' A n aly tiq u e
c 0 kPa 4 4
'
M 35q 3 3
\ 5q
2 2
2.50 m
1 1
0 0
-4 0
-2 0
0
20
40
60
80
100
120
-7 5
-5 0
-2 5
0
25
50
75
100
125
150
175
200
M o m e n t (k N m ) C o n train te n o rm a le e ffec tiv e (k P a )
Les deux cas précédents montrent que la distribution des pressions de part et d’autre d’un rideau
peut être assez différente de celle proposée par le modèle rigide-plastique et plus favorable quant
aux efforts subis par l’écran. La modélisation de ce type de problème n’est cependant pas triviale
car si la rigidité du rideau et des ancrages est facilement accessible, il n’en va pas de même pour le
massif à soutenir. En effet, quels que soient les matériaux rencontrés, le module est fonction, entre
autres choses, de l’état de contrainte, et, pour les matériaux fins, des variations hydriques induites
par les modifications du réseau d’écoulement liées à la présence du rideau.
Pour l’ensemble de ces raisons et lorsque la hauteur du rideau le justifie nous pensons qu’il est
nécessaire de recourir, en complément aux méthodes usuelles, à des simulations plus élaborées à
l’aide de la MEF. En outre, à partir d’une première modélisation, on peut procéder à des études
paramétriques qui intègrent l’ensemble des facteurs évoqués précédemment. Dans de pareil cas la
logique voudrait que les investigations géotechniques soient à la hauteur du problème !
4. DIMENSIONNEMENT
Concernant la justification de ce type d’ouvrage vis à vis de sollicitations ELS ou ELU, on peut
s’interroger sur la pratique qui consiste à dimensionner le rideau à l’aide d’un diagramme rigide
plastique (massif à l’état ELU ) mais avec des charges non pondérées (charges permanentes et
surcharges d’exploitation ELS). L’effort dans l’ancrage, obtenu par cette manipulation, est alors
pondéré pour cadrer avec les règles de dimensionnement proposées soit dans les recommandations
TA95, soit dans le fascicule 62 titre V.
A notre avis, la justification de résistance du rideau en tant que structure relève d’un état limite
de service car les déplacements en tout point, et notamment en tête, doivent rester limités afin de ne
pas induire des déformations trop importantes et irréversibles à l’arrière du soutènement
susceptibles d’occasionner des désordres immédiats ou différés sur les structures avoisinantes. On
notera à ce propos que la MEF donne accès à des critères plus pertinents que le déplacement
horizontal de l’écran qui sont l’élongation ou la variation de pente imposée aux ouvrages voisins du
rideau (et dans certains cas d’apprécier le rôle de k 0 ). Le diagramme à prendre en compte ne
résulte donc pas d’un modèle rigide plastique mais bien plus de l’interaction entre le sol et la
structure sous charge de service. En ce sens il est toujours possible de multiplier les niveaux
d’ancrages ou d’augmenter de façon significative le module du rideau, mais dans une optique
d’optimisation, il y a lieu de trouver le meilleur compromis entre section minimale et taux de travail
admissible tout en respectant un champ de déplacement compatible avec l’environnement. On
vérifie donc sous charge de service que le taux de travail du rideau reste voisin de 2V e 3 et que les
déplacements restent admissibles. Taux de travail admissible et déplacements limités ne signifient
pas pour autant que l’on ne puisse pas admettre une plastification locale du sol pour permettre le
transfert des charges des zones les plus sollicitées vers les zones moins chargées par le biais de
l’interaction sol-structure. En revanche lorsqu’il s’agit de l’ouvrage géotechnique à part entière dont
la stabilité relève à la fois de schémas d’équilibre locaux et globaux, une approche ELU nous paraît
utile mais non suffisante. En effet P. Vezole [Vezole, 2000] a montré récemment, en s’inscrivant
dans un processus de justification aux ELU, que les efforts ultimes de flexion qui se développaient
dans un écran butonné à plusieurs niveaux pouvaient être inférieurs à ceux obtenus sous charge de
service. Cet exemple n’est certainement pas un cas isolé compte tenu de l’incidence des adaptations
plastiques qui peuvent se produire tant au niveau de la structure que du massif soutenu sur la
redistribution des charges.
Le choix du module de la palplanche résulte donc de deux principaux critères : le premier lié au
comportement du rideau sous charge de service (moment de flexion admissible tel que
2 3 f e V max 3 4 f e , déplacement admissible pour les structures avoisinantes), le second lié au
mode de mise en place du rideau.
Le dimensionnement de la fiche et des ancrages éventuels résultent donc d’une approche ELU
car il s’agit cette fois d’évaluer la marge de sécurité dont on dispose par rapport à un mécanisme de
rupture donné. A ce propos, il faut bien garder à l’esprit que pour la plupart des outils basés sur la
méthodes des états limites qui utilisent par exemple la méthode des tranches (Bishop simplifiée ou
modifiée, méthode des perturbations, etc.) le coefficient de sécurité obtenu correspond à un
mécanisme de rupture que l’on se donne à priori et qui peut très bien s’avérer peu pertinent pour
une approche de la sécurité par l’extérieur. Sous chargement ELU, le coefficient de sécurité proposé
par le code PLAXIS correspond au rapport entre les forces internes résistantes : Fint ³
t
B V dv ou
:
forces résistantes mobilisables et les forces extérieures appliquées au modèle : F ext . Ce coefficient
est obtenu de façon itérative par réduction automatique des paramètres plastiques du modèle
rhéologique mis en œuvre jusqu’à la ruine de la structure. Le système numérique associé à ce type
de manipulation devient alors proche d’un état singulier et l’on peut s’interroger sur l’unicité du
champ de déplacement solution proposé. Nous laisserons ce débat aux spécialistes pour constater
que les schéma de rupture proposés sont généralement cinématiquement admissibles et que les
mécanismes mis en jeu s’apparentent plus, dans le cas de rideaux ancrés, à des mécanismes
multiblocs qu’à de simples surfaces circulaires.
Le tableau I présente, pour les zones 1, 2 et 3 (confère figure 1) les principales caractéristiques
géométriques et mécaniques du rideau suivant l’approche classique du rideau ancré simplement
buté en pied et la modélisation par éléments finis. Les caractéristiques à long terme prises en
compte pour le dimensionnement sont présentées dans le tableau II. La figure 4 présente, pour la
zone 1, le mécanisme de rupture associé à un facteur de sécurité égal à 130.
5. REALISATION ET AUSCULTATION
G alerte
max MAX^1.5 u G calcul , G calcul 1.00 cm`
G arrêt alerte
max 1.50 u G max
Matériau J sat (kN m 3 ) J h (kN m 3 ) E (MPa ) Q c ' (kPa ) M' (q) \ (q)
Figure 4 : Mécanisme de rupture pour la crue annuelle, zone 1, facteur de sécurité égal à 1,30
Tableau III : Comparaison des déplacements entre simulation numérique et mesure in-situ
CONCLUSION
Cette réalisation illustre un des apports de la MEF dans le dimensionnement des ouvrages
géotechniques pour lesquels l’interaction sol-structure joue un rôle déterminant. Si cette technique
permet d’accéder à une distribution des contraintes plus réaliste de part et d’autre du rideau, il n’en
demeure pas moins que l’équilibre global de la structure repose, in fine, sur un choix adéquat des
caractéristiques mécaniques pour évaluer la sécurité de l’ouvrage à court, moyen et long terme,
l’eau ayant comme toujours une rôle déterminant sur les efforts mis en jeu et l’évolution des
caractéristiques mécaniques.
Cet exemple concret montre que tous les détails de la modélisation ont leur importance et qu’une
simulation ne repose pas uniquement sur des critères numériques de convergence mais également
sur une appréciation réaliste du chantier dans sa globalité. Le mode d’exécution de ce blindage
rappelle au combien le choix optimal d’un module n’est pas toujours une opération aisée et que le
succès d’un atelier de palplanches repose avant tout sur les techniques de mise en œuvre retenues.
7. REFERENCES
Delatre L. et al. (1996). Comparaison des méthodes de dimensionnement des écrans de
soutènement. Bull de liaison des LPC, n° 205.
Vezole P. (2000). Quelques réflexions sur les règles de calcul béton armé ELS et justifications de
résistance. Annales du bâtiment et des travaux publics n° 3, juin 2000.