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Horizons et débats
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pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains
Edition française du journal Zeit-Fragen
Allemagne
Autriche
Saviez-vous que • des plantations de soja génétique- duit et ce qui se trouve dans les rayons
• la volaille normale est élevée avec ment modifiés, utilisé pour l’alimen- des supermarchés. C’est pour cela que
de la nourriture contaminée par des tation animale, éradiquent de plus nous devrions, avant tout lors de l’achat
OGM? en plus les forêts équatoriales? de volaille, nous assurer que celle-ci ait
• le poison de ces OGM n’est pas éli- • la volaille nourrie sans OGM ne coû- été nourrie biologiquement ou qu’elle
miné dans l’estomac des animaux terait que quelques centimes de porte le label «garantis sans OGM».
(A. Moser, professeur d’université) plus? Nous boycotterons la «volaille GM», jus-
et termine donc dans votre assiette? Nous, les citoyens, décidons de ce qui qu’à ce que le commerce réagisse!
• d’année en année 550 000 tonnes doit se trouver dans nos rayons! Heu- Nous vous prions de compléter le talon ci-
de soja génétiquement modifié sont reusement, ce sont finalement nous, les dessous et de le déposer lors de vos prochains
importées en Autriche? citoyens, qui déterminons ce qui est pro- achats à la caisse de votre supermarché!
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page 6 Horizons et débats No 42, 1er novembre 2010
L’exposition spéciale remarquable «Die Welt grand-mères (qui sont d’ailleurs toujours très visiteur est incité à se rappeler l’époque de Des milliers ont quand même dû quitter
im Topf – kleine Kulturgeschichte der Küche bien utilisables), des cubes de bouillon his- ses grands-parents et de ses ancêtres dans leur patrie à cause de la faim, «en Europe ont
am Bodensee» [Le monde dans une marmite toriques de Maggi, des paquets de soupe à laquelle la plupart de la population était com- commencé les grands mouvement d’émigra-
– petite histoire culturelle de la cuisine dans l’avoine, des auto-cuiseurs et de vieilles affi- posée de paysans, où il y avait encore plus tions». Il n’y avait pas assez de nourriture et
la région du lac de Constance»] au musée ches de l’«Exposition suisse pour l’agricul- d’exploitations paysannes et pas encore de fri- de possibilités d’existence: «Entre 1750 et
Rosgarten de Constance, présente une thé- ture, l’exploitation forestière et le jardinage» gidaire ni d’entreprises de logistique ni d’ali- 1800, la population du continent européen a
matique actuelle et importante. Elle incite en 1900 à Frauenfeld ou du cépage «Müller- ments du monde entier. passé de 50 millions à 180 millions d’habi-
à la réflexion sur la consommation, la faim Thurgau», le tourisme naissant, les nouveaux Ainsi une représentation montre l’offre tants. Au milieu du XIXe siècle, on en était
et la sécurité alimentaire dans notre monde. moyens de transport et l’hôtellerie avec ses au marché pendant le Concile de Constance déjà à 266 millions. Des cercles scientifiques
Elle attire le regard vers l’importance de cures de petit-lait, ses tables exclusives et les en 1414. Dans un récit du moine saint-gal- ont jugé nécessaire, face à ce développe-
l’agriculture, des économies nationales sai- menus riches sont présentés dans l’exposition lois Ekkehard IV sur les habitudes de table ment, de stabiliser l’agriculture qui ne don-
nes et vers nos habitudes alimentaires. et le catalogue. au monastère de l’an 1000, le lecteur ou le nait alors que peu de rendement, peu variée
Les vieux livres de recettes, écrits par des visiteur apprend: «Les petits oiseaux cap- et vulnérable, par des réformes sur des bases
L’exposition remarquablement bien instal- cuisinières et des ménagères, sont particuliè- turés au collets ne nuisent à personne» et scientifiques.» Ce fut donc une bénédiction
lée pour les familles et les adolescents nous rement intéressants. Un trésor et une culture «pour mille petits poissons cuits» le moine que l’époque des Lumières, de pair avec les
donne des aperçus précieux de l’origine et la riche d’un savoir qui découle de l’expérience demande la bénédiction de Dieu. Le pois- idéaux chrétiens, aient de nouveau mis au
préparation des aliments des alentours du lac pratique. Dans ces vieux livres de cuisine l’on son joue un rôle central dans la région du lac centre la raison, la recherche scientifique et
de Constance et des pays qui l’entourent, la apprend aussi des choses sur le quotidien qu’on de Constance, mais il a aussi une significa- les efforts sociaux pour la liberté, la fraternité
Suisse, l’Allemagne et l’Autriche, mais aussi oublie trop facilement de nos jours. «L’abat- tion symbolique dans la religion chrétienne et l’égalité sans le régime féodal et en direc-
des influences interrégionales. Tobias Engel- tage, le découpage, plumer et préparer, étaient avec le pain, le vin et l’huile. Les moines tion de la démocratie. «A cette époque, des
sing, directeur des musées communaux de la des étapes d’un quotidien dans la cuisine sans de Saint-Gall vivaient sans viande pendant hommes éclairés aux idées de réformes, des
ville de Constance et curateur de l’exposition, frigidaire et sans glace.» Le plus important 140 à 160 jours par an et ils ont développé élites citadines ont fondé des sociétés d’agri-
historien et auteur du catalogue, écrit: «Sur c’était toujours de travailler de façon écono- une riche variété de mets de poissons. Le culture et d’économie. A côté de nombreuses
les voies internationales du commerce par- mique. L’homme des Lumières et théologien jus de fruits thurgovien faisait partie de leur sociétés de formation et de lecture, des acadé-
courant la région du lac de Constance a été réformé J. A. Pupikofer constate: «Le Thur- table ainsi que le vin. La célèbre «Moste- mies et des sociétés de réforme, ces ‹patriotes
importé, depuis les ports européens d’outre- govien a l’habitude d’une nourriture solide.» rei» (pressoir pour le cidre) Möhl d’Arbon économiques› se sont voués tout spéciale-
mer et par les cols alpins, tout ce qui était en Au catalogue s’ajoute aussi un petit livret de montre des bouteilles de cidre historiques et ment à la réforme de l’agriculture. Sans être
vogue ailleurs dans le domaine culinaire: des recettes issues de recettes familiales et de vieux des ustensiles. Elle fait partie des nombreux freinés dans leur ardeur par des seigneurs
épices, du sucre, du chocolat, du café, des livres de cuisine de l’ancien chef-cuisinier du sponsors de l’exposition. Dans le jardin du féodaux, des hauts fonctionnaires, des pas-
fruits exotiques, des nouilles, du riz, des vins Château de Wolfsberg à Ermatingen (CH). monastère on a planté du chou, du poireau, teurs, des commerçants, des médecins et des
et beaucoup d’autres choses. Depuis la Réfor- A part les nombreux textes historiques inté- de l’ail, du melon, des courges, des petits fabricants se sont mis à fonder de telles asso-
mation, la région du lac de Constance est deve- ressants, les illustrations et les ustensiles de cui- pois, des lentilles et de la laitue, la salade ciations dans tout le pays: En 1746 a été créée
nue une terre d’immigration mouvementée à sine, les mets et différentes cultures de table, le de l’époque. Le lait, le fromage, le miel et à Zurich la ‹Physikalische Gesellschaft› qui
partir des pays de la monarchie autrichienne. catalogue et l’exposition bien fréquentée (pro- des gâteaux faisaient aussi partie du menu. s’est changée plus tard en ‹Naturforschende
Des régents prévoyants y ont installé depuis le longée jusqu’au 30 décembre) nous incitent à «Il faut boire du lait de chèvre cru», parce Gesellschaft› avec sa ‹commission économi-
XVIIIe siècle des réfugiés et des migrants tra- la réflexion sur l’agriculture et nos habitudes qu’il est très sain, recommande Ekkehard que›, orientée vers l’agriculture. En 1759, à
vailleurs de la Suisse et de la France révolu- alimentaires. Comment est-ce que cela s’est qui est décédé en 1036 et a laissé un livre Berne, a été fondée, inspirée par le ‹Café lit-
tionnaire. Ainsi sont arrivés au bord du lac de passé chez nous, dans la famille, dans la com- «Casus monasterii Galli» avec beaucoup téraire› du réfugié italien Felice, la ‹Oekono-
Constance des maîtres-cuisiniers de France, mune, au village, en ville dans le canton ou d’anecdotes. Les monastères des Bénédic- mische Gesellschaft›. Au début des années
des cuisinières bohémiennes, des vendeurs de bien dans le Land? Beaucoup d’aspects géo- tins étaient aussi connus pour leurs riches 1760, des groupes semblables se sont formés
marrons de Slovénie, des marchands de sala- graphiques, historiques culturels et humains jardins d’herbes aromatiques et d’épices qui à Fribourg, Bâle, Soleure, Bienne et aux Gri-
mis italiens, et ils ont apporté leurs recettes et ont pu être éclairés. Quelques aspects de la thé- étaient utilisées pour l’alimentation aussi sons. En 1767 est apparue la ‹Reformierte
leurs secrets de cuisine.» matique seront exposés dans cet article. bien que pour la médecine. toggenburgische Moralische Gesllschaft›
Dans cette exposition richement documen- Il vaut la peine, de jeter un regard sur les [Société morale réformée du Toggenbourg].
tée et dans le catalogue, des relations histo- Apprendre à penser historiquement règles simples de l’ordre de Benoît de Nursie Dans ses rangs on trouve le paysan, ouvrier
riques et culinaires multiples se révèlent. A Ce qui est précieux dans l’exposition, c’est sur le Mont Cassin et la vie laborieuse, médi- textile et écrivain Ulrich Bräker, connu par
part des ustensiles de cuisine du temps de nos qu’elle dirige le regard vers l’histoire. Le tative et culturellement très riche de la com- son roman autobiographique ‹Le pauvre
munauté du couvent. Une règle de vie très homme du Toggenbourg›.»
importante: «Etre généreux dans les petites Avec l’influence du philosophe français
choses, mais veiller sévèrement à donner à la Jean-Jaques Rousseau, la vie naturelle à la
vie harmonie et précaution.» Benoît n’aimait campagne a pris plus de valeur face à la vie
pas les sanctions drastiques pour des fau- dans les milieux citadins, ce qui a renforcé
tes qui étaient habituelles alors et non plus la paysannerie. Mais les élites citadines et
la prière excessive et des ruminations exci- les fabricants émergents ont essayé d’élar-
tées derrière les murs du monastère. «Il a gir leurs privilèges et ont propagé l’idée des
proposé un modèle d’harmonie se compo- reformistes de planter davantage de pommes
sant du service spirituel pour la communauté de terre, de céréales et de légumes, cepen-
des moines, de travaux manuels réguliers et dant avec l’intention d’assurer l’ancien ordre
d’une vie matériellement modeste.» des taxes avec la dîme des paysans pour les
En savoir un peu plus de cette conception seigneurs des villes. Mais les «patriotes éco-
de vie, la lecture ou une visite dans l’église nomiques» zurichois ont quand même atteint
d’un monastère serait certainement salu- un succès décisif avec leur engagement pour
taire en nos jours d’indifférence et de sur- la pomme de terre. «Ce tubercule venant du
consommation. Beaucoup de ces mœurs de Pérou, de la Bolivie et du Nord du Chili,
table monastiques ont aussi été la coutume importé dans la deuxième moitié du XVIe
des citoyens des villes moyenâgeuses de la siècle en Espagne, Irlande et Angleterre,
région du lac de Constance. «Les baies de la n’a été connu jusqu’au XVIIIe siècle pres-
région, fraîches ou en confiture et marmelade, que uniquement que comme plante médi-
arrivaient depuis les forêts et les jardins dans cinale ou comme plante de décoration dans
les marchés des villes autour du lac de Cons- les jardins des princes.» En Suisse, en peu
tance.» Mais on y trouvait aussi une grande d’endroits uniquement, des essais de cul-
pauvreté. ture de la pomme de terre furent entrepris.
Ulrich Bräker se rappelle la première culture
Les bienfaits de la paix, dans sa jeunesse à la fin des années 1730 et
des Lumières, des sociétés de lecture plusieurs sources en témoignent: «En 1740,
et de la pomme de terre Johann Ludwig Meyer de Knonau/Weinin-
Une grande partie de l’exposition et du cata- gen dans le canton de Zurich a fait les pre-
logue attire l’attention de manière impres- miers essais de culture et il a propagé, aussi
sionnante sur les grandes famines. 1816 était comme membre de la commission écono-
une année spécialement dure, il a plu pen- mique, la construction de machines à pom-
dant 122 jours et neigé pendant 35 jours. mes de terre, avec laquelle on pouvait faire
La population était affamée par de longues de la farine panifiable à partir de pommes
années de pressions, de destructions, de de terre séchées.» Il comptait parmi les pion-
pillages des guerres napoléoniennes. La niers de la culture bénéfique de la pomme de
renaissance de l’industrie du textile dans la terre, tout comme Hans Blarer de Wartensee
région du lac de Constance, et surtout dans avec son domaine agricole près de Oberengst-
les cantons de Suisse orientale, a donné ringen, le maire Johann Conrad Heidegger
un nouvel espoir. C’est uniquement par les et le paysan modèle Jakob Gujer, connu sous
grands efforts communs de quelques per- le nom de «Kleinjogg». Car dans les années
sonnes responsables, des scientifiques, des terribles de la famine de 1770/71 «les propo-
églises et avant tout des paysans, que la faim sitions des économistes zurichois autour de
a pu être vaincue par la culture de la pomme
Catalogue de l’exposition (ISBN 978-3-929768-25-1) de terre. Suite page 7
No 42, 1er novembre 2010 Horizons et débats page 7