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Laryna

Feresco
Attirance secrète


© Laryna Feresco, 2016
ISBN numérique : 979-10-262-0368-1

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Internet : www.librinova.com


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Chapitre 1

Quand je le vois, je le désire de tout mon être. Pourquoi me fait-il cet effet ? Son regard si intense me
traverse, me renverse. Je pense qu’il ne sait pas ce que je ressens pour lui. Comment pourrait-il le savoir
? Je ne lui ai jamais rien montré. J’ai bien trop peur d’être anéantie, si j’apprenais qu’il n’y a aucune
réciprocité. Dans cette histoire, j’ai tout à perdre, j’en ai bien conscience, c’est pour cette raison que
j’essaie de me raisonner. Oublie-le, c’est de l’ordre du fantasme, c’est humain de rêver de l’inaccessible.
Quand je ferme les yeux et que je pense à lui, je peux le voir, je peux presque le sentir ou le toucher. Mes
sens sont en ébullition rien qu’à l’imaginer. Cet homme me torture depuis tellement longtemps, j’attends
une délivrance.
Hier midi, nous nous sommes croisés par hasard alors que j’étais au volant de ma voiture, il m’a
reconnue, c’est certain, mais il ne m’a fait aucun geste de reconnaissance. D’habitude, il me fait un signe
de tête ou de la main, il m’adresse un sourire et là, rien. Je lui en veux, je regrette de ne pas m’être
arrêtée à sa hauteur un instant, là au moins, il aurait eu le temps de réaliser que c’était moi, il aurait pu me
faire un signe. J’ai beau tourner la situation dans tous les sens, il m’a vue, il m’a fixée quelques secondes,
mais son visage n’a rien laissé paraître. Son regard insistant m’a semblé sévère. Ai-je quelque chose à
me reprocher ? Il me rend malade, je voudrais prendre mon téléphone et l’appeler et lui demander :
Merde, ça t’aurait écorché de me sourire ce midi ? Évidemment, je ne le ferai jamais, je pense qu’il me
prendrait pour une folle. Et puis, si ça se trouve il le dirait à sa femme, bordel c’est vrai qu’il est marié et
père de deux jeunes enfants. Enfin, je suis avec Hugo aussi… Mais je n’ai pas choisi de fantasmer sur
Thomas, et je l’aime mon fiancé.
Hugo est un homme si gentil, il me rend plutôt heureuse et je n’imagine pas ma vie sans lui. J’ai honte
quand j’y pense, s’il pouvait lire dans mes pensées, il me quitterait… J’essaie une fois de plus de chasser
toute cette folie de mon esprit, parfois ça fonctionne plusieurs jours, parfois cinq minutes. Thomas ne
hante mes pensées que lorsque je suis seule ou en sa présence, donc il me suffit de ne pas rester seule, je
ne peux pas l’éviter, pour ça il faudrait que je change de travail.
Cette nuit, j’ai rêvé de lui, j’ai rêvé qu’il m’avouait qu’il ne m’avait pas fait de signe hier en me
voyant parce qu’il voulait mettre une distance entre nous, car il ressentait une attirance pour moi. Il me
l’avouait au travail, dans son bureau… Et voilà, maintenant je vais penser que c’est la vraie raison et je
vais appréhender d’aller au travail.
Je prends mon petit-déjeuner avec Hugo, il est adorable, il a beurré mes biscottes pendant que je me
préparais.
— Chéri, tu te souviens que j’ai une réunion ce soir à l’école ? Me demande Hugo.
— Ah oui, c’est vrai que c’est ce soir. Tu penses rentrer tard ?
— Non, vers vingt heures, mais ne m’attends pas pour manger. Je peux rentrer plus tard.
— Comme tu veux, je pense qu’Aurélie restera manger avec moi, donc je ne serai pas toute seule. Je
file, je dois être en avance, je me suis laissée un peu de travail en attente vendredi soir.
— À ce soir ma belle, bonne journée, je t’aime.
— À toi aussi mon cœur, je t’aime.
Je prends place au bureau un peu plus tôt que d’habitude, j’aime bien être opérationnelle dès huit
heures précises. Cela fait à peine un mois que j’occupe mes nouvelles fonctions, et je n’y suis pas encore
très à l’aise. Tout le monde doit se dire que je manque de formation, que je suis bien trop jeune pour
gérer toute une équipe. Je n’ai rien demandé, c’est une chance pour moi de faire cette expérience, il est
évident que ça pèsera dans la balance lors du prochain concours, si je n’ai pas réussi celui-ci. De toute
façon ce n’est que pour quelques mois, je dois me montrer à la hauteur.
Vers dix heures, le téléphone sonne, c’est Lara, elle m’annonce qu’elle ne peut pas venir travailler cet
après-midi, parce que sa fille est malade. Elle sera absente demain également. Comment vais-je gérer
cette absence ? Je saisis le planning et cherche qui appeler pour la remplacer. Après deux coups de fils,
c’est réglé, Julie viendra cet après-midi et demain se sera Morgane. Quelqu’un frappe à ma porte.
— Oui ?
— Alyssa, Cynthia est là, elle voudrait savoir si tu es disponible.
— Oui, elle peut venir, merci Sandrine.
Il y a quelques temps Cynthia était ma cadre, je la prends un peu comme modèle. C’est une fille
exemplaire, elle est respectée de tous à l’hôpital.
— Alyssa, je peux entrer ? Me demande Cynthia.
— Oui, entrez, je vous en prie.
— Alyssa, tu peux me tutoyer, je te l’ai déjà dit.
— Oui je sais, mais je n’ai pas l’habitude.
— Lara est absente demain ?
— Oui comment le savez-vous ?
— Thomas est passé me voir ce matin, il m’en a parlé, il va passer pour s’assurer que tu as pu
trouver quelqu’un pour la remplacer.
— Ah d’accord, oui Lara m’a appelée ce matin, j’ai pu m’arranger avec les collègues.
— Super, sinon j’aurais pu te proposer une infirmière de mon service qui a l’habitude de bosser aux
urgences quand il y a des arrêts. Mais c’est aussi bien comme ça, elle conservera ses jours de repos. Tu
viens au self ce midi ?
— Oh non, je ne pense pas. J’ai un tas de choses à faire.
— Alyssa, rejoins-nous, tu es à ta place avec nous.
— Je n’ai pas l’impression d’être à ma place, je ne suis là que temporairement, c’est une situation un
peu particulière.
— Tout se passe très bien, Thomas m’a dit qu’il avait évoqué le départ de Valérie hier, lors d’une
réunion à la direction. Il a fait savoir que tu avais pris les bonnes décisions ce mois-ci, que l’on pouvait
compter sur toi. Et puis, tu n’es pas seule, on est là si tu as le moindre souci. Pour les plannings, Thomas
gère ça, il a l’habitude, ça ne le gêne pas. De plus, ce n’est pas une première, les infirmières qui
remplacent les cadres et parfois ça dure assez longtemps.
— Merci d’être passée en tout cas. Je vais devoir vous laisser, j’ai un entretien avec une famille dans
quelques minutes.
— À ce midi j’espère.
— On verra, si je peux me libérer.
Mon entretien se termine vers treize heures, je n’ai pas envie d’aller au self maintenant. Je préfère
être présente lors des transmissions. Je me contente d’un café et d’un yaourt, je mangerai mieux ce soir.
Isolée dans mon bureau, je repense à ce que m’a dit Cynthia. Thomas a parlé de moi à la direction et il
aurait fait des compliments sur moi. Je suis touchée, il a remarqué mon travail, pourtant il passe toujours
très rapidement, nous n’avons pas le temps d’échanger réellement. Il est tellement occupé, je me demande
s’il a une vie en dehors du boulot. D’ailleurs en pensant à lui, il devait passer ce matin, non ?

Chapitre 2

Peut-être qu’il sait déjà que j’ai trouvé quelqu’un pour remplacer Lara ? Oui sans doute, il sait tout,
je ne sais pas comment il fait pour être partout à la fois. Me voilà de nouveau à penser à lui. Soudain,
alors que je tente de me le sortir de la tête, il débarque, je l’aperçois depuis mon bureau, ma porte
ouverte donne sur le couloir, il arrive.
Il est beau à couper le souffle, il est brun, grand, musclé, bronzé… Le stress m’envahit, je jette mon
yaourt vide dans la poubelle, je ne sais pas quoi faire de la cuillère, je la jette aussi sans réfléchir. Il a les
cheveux légèrement repoussés vers l’arrière, ils sont un peu plus longs que d’habitude, je remarque qu’ils
ondulent un peu, je le trouve encore plus sexy comme ça. En revanche, ils paraissent moins foncés quand
ils ont cette longueur. Il me sourit laissant apparaître ses dents d’un blanc étincelant.
— Bonjour Alyssa.
— Thomas, bonjour. Lui Dis-je timidement.
— Tout va bien ?
Un instant il m’a demandé si tout va bien ou si je vais bien ? Répète la question s’il te plaît, voilà ce
que j’ai envie de lui répondre. Oh, ses cheveux parfaits ne m’aident pas à me concentrer, ils font ressortir
ses beaux yeux noisette. Je voudrais que mon rêve se réalise, dis-moi pourquoi tu ne m’as pas fait de
signe hier midi, lorsque l’on s’est croisé ! Je me ressaisis.
— Tout va bien, oui merci.
Je n’arrive pas à le regarder dans les yeux plus d’une demi-seconde, sinon je suis sûre qu’il va se
rendre compte qu’il se passe quelque chose. Je tente à deux reprises de relever la tête, je regarde ses bras
musclés, bronzés. Ils sont tellement sexy, mais comment fait-il pour l’être jusqu’à cet endroit-là ? Il
regarde sa montre.
— Alyssa, je ne vais pas te déranger plus longtemps, je vois que tu es occupée.
— Vous ne me dérangez pas, je relisais juste quelques notes.
— Je pensais passer ce matin, par rapport à Lara mais je n’ai pas eu le temps. Je ne me suis pas
inquiété, s’il y avait eu un problème pour la faire remplacer, tu m’aurais appelé.
— Exactement.
J’ai tout juste fini de lui répondre, qu’il est déjà sur le départ, il décroche son téléphone, prend un air
agacé. Je ne sais pas qui l’appelle, mais il a l’air mécontent : Pouvez-vous essayer de vous débrouiller
une journée sans moi ? Puis il raccroche. J’aimerais trouver le moyen de le retenir, mais il faudrait une
bonne raison, je n’en ai pas. J’attends qu’il disparaisse pour ressortir ma petite cuillère de la poubelle. Je
suis tracassée, pour commencer il me jette un regard noir hier, fait comme s’il ne me connaissait pas,
aujourd’hui, il est froid, distant. C’est à peine s’il me voit. Je crois que je me suis imaginée des choses, il
ne semble rien ressentir pour moi. Probablement qu’il est heureux en mariage et c’est mieux ainsi.
Je vais assister aux transmissions avec une certaine déception. Le reste de l’après-midi, je ne pense
pas à lui. Vers dix-sept heures, je reçois un message d’Hugo :
Je pense à toi, j’espère que ta journée s’est bien passée. Je suis sûr que tu es une super cadre mon
cœur.
Je ne le mérite pas, je me culpabilise tellement d’avoir des pensées pour un autre. Peut-être que c’est
le cas pour beaucoup, le fantasme est de l’ordre de l’imaginaire alors que mon couple est bien réel. Je
retire ma blouse et après un dernier tour d’horizon auprès de l’équipe, je pars.
Lorsque j’arrive sur le parking, j’aperçois Thomas en pleine conversation avec la cadre de pôle de
chirurgie, cette femme est superbe, je ressens de la jalousie en le voyant proche d’elle. Oh, il lui touche
l’épaule, j’en suis malade, je ne veux pas voir ça, je préfère passer par l’autre parking. Musique à fond,
je reçois un message d’Aurélie :
On se voit toujours ce soir ? Es-tu sortie du travail ? 18h30 devant le cinéma ?
Je lui réponds aussitôt :
Je viens de sortir, je vais en ville maintenant, parfait pour 18 h 30. À toute.
Je me gare devant le cinéma pour regarder le programme de la semaine, j’adore y aller, je ne connais
rien de mieux pour se détendre. Rien d’intéressant cette semaine. Je fais quelques boutiques avant de
rejoindre Aurélie. Je rêve de lui raconter ce que je ressens pour Thomas, mais elle ne comprendrait pas.
Je préfère tout garder pour moi. Nous mangeons en ville toutes les deux. Vers vingt-et-une heures, je
rentre pour retrouver Hugo, il est déjà à la maison.
— Coucou Hugo, tu es déjà là.
— Oui en fait, la réunion s’est terminée plus tôt, je suis rentré un peu avant vingt heures.
— Oh, je suis désolée, je suis restée avec Aurélie, tu aurais dû m’envoyer un message.
— Non, tu as bien fait de profiter. Ta journée s’est bien passée ?
— Oui si on veut, je n’ai pas envie d’en parler, je suis crevée. Je vais me doucher puis me coucher.
— Ça ne va pas ?
— Mais si ça va. C’est juste que demain je suis en réunion toute la matinée, ça ne m’enchante pas, je
vais sûrement être la seule infirmière. Je ne me sentirai pas à ma place, je vais avoir peur de prendre la
parole. Enfin, tu me connais.
— Pourquoi as-tu si peur de ne pas être à la hauteur, si on t’a choisie, c’est que tu as les compétences
requises.
— Oh tu ne comprends pas ce que je ressens. Je ne veux plus en parler, puisque ça ne sert à rien.
Je pars m’enfermer à la salle de bain, je fonds en larmes. Mais qu’est-ce qu’il m’arrive ? Je m’en
prends à Hugo alors qu’il est attentionné avec moi et qu’il fait tout ce qu’il peut pour me soutenir. Je suis
sous pression, j’ai peur d’avoir l’air ridicule en tant que faisant fonction de cadre, j’appréhende de
retourner dans mon service par la suite, en tant que simple infirmière, je crains l’attitude de mes
collègues envers moi. Et puis j’ai le poids de toute cette culpabilité avec Thomas.
Cette nuit, je me réveille à plusieurs reprises, je me dégoûte, je pense à lui alors qu’il est marié et
qu’il a des enfants. De plus je suis fiancée, je ne mérite vraiment pas un homme comme Hugo, je devrais
tout lui dire. En même temps, je n’ai rien fait pour attirer l’attention de Thomas, je n’ai fait qu’y penser.
Est-ce si grave ? Je vais me concentrer sur mon travail et je vais tirer un trait sur lui.

Chapitre 3

Ce matin, j’évite Hugo, je pars alors qu’il est sous la douche, je n’ai pas envie de me disputer, ni de
me justifier. À neuf heures, nous sommes tous en salle de réunion quand Thomas fait son entrée. Ah ! Ah
mais ce n’est pas possible d’être aussi beau, il a tellement de prestance, il dégage quelque chose de si
particulier. J’ai l’impression d’avoir le vertige quand il passe près de moi, son parfum m’envoûte. Il
prend la parole et nous expose la révision du budget hospitalier, c’est ennuyeux à mourir, mais pourtant je
bois ses paroles. Je ne le regarde que de temps en temps pour ne pas me faire pincer alors que je suis en
train de le mater.

C’est ce que je fais, merde je le mate. Il porte sa blouse ouverte, je peux observer son tee-shirt
moulant qui laisse apparaître sa silhouette musclée. Il doit avoir le torse parfait, il met une main dans la
poche de son jean, ce qui m’amène à regarder un peu plus bas. Dommage qu’il porte sa blouse, car son
jean moulant doit lui faire de très belles fesses. Je me sens rougir à cette idée. Soudain, il pose les yeux
sur moi, je ne sais plus où regarder, il a dû remarquer que je le dévorais du regard.
— N’est-ce pas Alyssa ? Lance-t-il au milieu de tout.
Mais de quoi parle-t-il ? Je n’écoutais pas. Je me sens mal, je suis au bord du malaise. Quelqu’un
peut-il venir à mon secours ? J’ai envie de disparaître à cet instant. Cynthia répond à ma place.
— Ce n’est pas évident pour Alyssa de se rendre compte de l’augmentation de la fréquentation des
urgences, elle n’a probablement pas assez de recul.
— Oui, merci. Confirmé-je. J’ai lu évidemment les statistiques des mois précédents, ainsi que ceux
de l’année dernière à cette époque-ci. Il n’y a pas de comparaison possible au niveau des dépenses,
puisque nous explosons actuellement le nombre de passages aux urgences, de même que le nombre
d’hospitalisations. Et qu’en est-il de la DMS (durée moyenne de séjour)?
— La DMS a été divisée par deux dans quatre services, ce qui explique les transferts improvisés des
week-ends vers les soins de suite. En revanche, la charge de travail a doublé dans ces services, mais
l’effectif du personnel est identique.
Je l’écoute plus attentivement cette fois-ci, mais je tremble encore d’avoir parlé devant autant de
personnes. Je réussis pourtant à échanger à diverses reprises par la suite, je me sens moins tendue. La
réunion se termine à treize heures. Thomas me fait signe d’aller le voir. Va-t-il me réprimander car j’étais
distraite ? A-t-il remarqué que je le regardais ? J’attends que la salle se vide pour me rapprocher de lui.
Je vais lui dire de me virer se sera plus simple, tout ce stress à cause de ma faiblesse pour lui me rend
dingue.
— Alyssa approche si tu veux bien.
Je m’approche, le cœur serré dans la poitrine, j’ai l’impression que bientôt, je ne pourrai plus
respirer tellement je suis crispée.
— Oui ?
— On avait parlé d’un contrat de trois mois pour le poste de faisant fonction cadre aux urgences,
c’est bien ça ?
— Oui.
— Hier nous avons proposé un autre contrat à la DRH d’une durée de six mois, si tu es d’accord.
— Ah ! Six mois, mais il ne devait pas y avoir un remplaçant en mai ?
— Il ira au bloc pour le départ de Nicolas. Carole sort de l’école cet été, elle prendra possession du
poste à la rentrée de septembre. Est-ce un problème ?
— Non, j’ai juste peur de ne pas faire ce qu’il faut. Il y avait sans doute des personnes plus qualifiées
que moi pour occuper ce poste.
— Non je pense que tu en es tout à fait capable. Tu sembles consciencieuse et compétente. Il faut juste
apprendre à te faire confiance. Ça viendra avec le temps.
— Je ne sais pas quoi dire.
— Dis que tu acceptes, de toute façon tu ne seras pas seule et puis je vais être plus présent pour
t’accompagner dans cette mission.
J’entends les arguments nécessaires pour me convaincre, il va m’accompagner, il va m’obséder
encore plus qu’aujourd’hui. Je ne sais pas si je peux accepter.
— Est-ce que je peux y penser ?
— Tu viens me voir ce soir pour en reparler ?
— Ah j’y pense jusqu’à ce soir seulement. C’est court. Ajouté-je hésitante.
— Ce soir à dix-huit heures, viens me voir, j’aurai plus de temps à te consacrer.
— Je suis en rendez-vous à l’extérieur à dix-sept heures, j’espère être à l’heure.
— Disons plus tard, si ça peut t’arranger. Même à vingt heures. Je viens régulièrement le soir pour
rencontrer les équipes de nuit.
— Comme ça vous arrange. Mais ne vous dérangez pas pour moi. Je peux venir vous en parler
demain après y avoir pensé.
— J’aimerais bien qu’on en parle ensemble ce soir, et qu’on évoque les projets après le
remplacement. Nous disons vingt heures ?
— Oui vingt heures, c’est très bien.
Je pense à cette proposition de contrat toute l’après-midi, je devrais accepter, c’est un tremplin pour
la suite. Ce qui m’embête, c’est l’idée de retrouver mon poste d’infirmière ensuite si j’ai échoué au
concours et de ne plus me sentir bien avec mes collègues. Je suis angoissée à l’idée d’être sans cesse en
train de penser à Thomas, je vais tellement culpabiliser que cela va détruire mon couple. Pourtant, je sais
bien que rien n’est possible avec lui, il est marié, je dois garder cette idée-là en tête.
Je viens de me rappeler que je n’ai pas adressé la parole à Hugo depuis hier soir, il n’a pas dû
comprendre mon comportement. Ce matin, je suis partie sans lui parler et ce soir je ne serai pas là. Il faut
que je lui parle de cet entretien et que je m’excuse pour hier soir.
Dix-huit heures je rentre à la maison, Hugo travaille dans son bureau, je frappe à la porte, il se
retourne, il a l’air soucieux.

Chapitre 4

— Mon cœur tu m’as manqué aujourd’hui, j’étais inquiet, tu sais hier soir, je voulais te rassurer,
apparemment j’ai dit quelque chose qu’il ne fallait pas, excuse-moi. Me dit Hugo.
— Ne t’excuse pas, c’est moi, je suis désolée. Je me suis très mal comportée avec toi, il n’y avait
aucune raison. Je suis complètement stressée par ce poste que j’occupe temporairement, sans y avoir été
formée. À ce propos, on me demande de reconduire mon contrat jusqu’en septembre, je dois retourner
vers vingt heures au bureau par rapport à cette proposition. Il faut que je donne ma réponse.
— À vingt heures ? M’interrompt Hugo mécontent.
— Oui, je sais que ça ne te plaît pas beaucoup, mais en temps il faut te faire à cette idée. Tu sais que
je veux évoluer, les réunions le soir, ça n’a rien d’exceptionnel.
— Tu as envie de poursuivre six mois, quand tu vois comment tu es au bout d’un seul mois ? Tu ne
manges presque rien, tu dors mal. Tu es ailleurs lorsque tu es à la maison.
— Laisse-moi un peu de temps, c’est nouveau pour moi et puis c’est ce que je veux faire. Là, ce que
je trouve dur, c’est que j’ai l’impression de ne pas le mériter vis-à-vis de mes collègues. Je sais que je
me répète, mais c’est la vérité.
— C’est ta décision, mais ça m’inquiète.
— Pourtant tu étais emballé au début, et tu m’as encouragé à passer le concours des cadres.
— Oui je sais, mais c’était avant de voir dans quel état tu serais.
— Tu n’en rajoutes pas un peu ? Je suis la même qu’avant mais un peu plus stressée. Et toi quand tu
as commencé, tu ne te souviens pas avoir passé quelques nuits blanches ?
— Excuse-moi, je ne m’oppose pas à tes choix, c’est ta carrière en même temps.
— Ta journée s’est bien passée ? Lui demandé-je pour changer de conversation.
— Oui, mise à part que j’ai dû renvoyer quelques enfants malades chez eux, ce n’est pas toujours
évident de joindre les parents, les grands-parents pour venir les chercher. En plus, on avait un collègue
absent, donc il a fallu répartir les enfants de CM2 dans nos classes. Et ta journée ?
— Moyenne, j’étais en réunion toute la matinée, c’est passé vite. Je vais préparer le repas, je
mangerai un morceau avant de partir, je ne sais pas du tout combien de temps je vais m’absenter. Ne
m’attends pas si tu es fatigué.
— J’ai du travail, j’ai des copies à corriger. Précise Hugo.
Je m’apprête pour mon rendez-vous professionnel, je veux être jolie simplement, je ne suis pas une
aguicheuse. Pas question de mettre une jupe ou un décolleté parce que j’ai rendez-vous un soir avec lui, et
que l’on sera seuls tous les deux. Bien que l’idée est tentante, j’aimerais voir si je lui fais le moindre
petit effet, est-ce qu’il m’a simplement remarqué ? Je veux dire autrement que professionnellement ? Et
dire que depuis des mois, je fantasme sur lui, je m’étais fait tellement d’idées sur lui, sur nous.
J’ai réussi à me persuader que je l’embarrassais, que son sourire était différent lorsqu’il m’était
adressé. Dix-neuf heures trente, j’embrasse Hugo et je monte en voiture. Tout le long du trajet, je me
répète que Thomas est marié, que j’aime Hugo, que rien ne se passera jamais avec lui.
Je me sens plus décontractée en arrivant sur le parking de l’hôpital. Je regarde ma montre, il est tout
juste dix-neuf heures quarante-cinq, c’est un peu trop tôt, je patiente dans les allées des jardins qui
bordent de l’hôpital. J’aperçois sa voiture arriver, c’est lui, je connais sa plaque d’immatriculation mieux
que la mienne. Il m’a vue je crois, il regarde dans ma direction, que dois-je faire ? Je lui fais un signe de
tête, il y répond de la même façon. Il descend de sa belle voiture, il a une Audi, un Q5 noir. Lorsqu’il est
debout, je découvre son corps sublime sans blouse, putain il est sexy ! Ne le regarde pas, ne le regarde
pas !

Je marche tête baissée dans sa direction, il me rejoint. Je peux sentir les palpitations qui me
trahissent. Il porte un jean et un tee-shirt moulant que j’aperçois sous sa veste en cuir qu’il porte ouverte.
Respire, respire Alyssa.
— Bonsoir Thomas,
— Alyssa. Changement de style.
— De style ?
— Oui, sans la tenue professionnelle.
— Oui, en effet.
— Nous allons dans mon bureau ? Ou bien nous papotons dehors ?
Dehors ? Une balade ? Il me fait une proposition ? Ressaisis-toi bordel!
— Dans votre bureau, ce sera très bien. Acquiescé-je.
— Allons-y. Dit-il froidement.
Est-ce que je l’ai froissé ? Enfin, un rendez-vous professionnel ne peut pas se passer dehors, si ?
Nous marchons dans les couloirs, pas un bruit si ce n’est celui de mes talons sur le sol qui résonne,
d’ailleurs il l’a remarqué car il a baissé les yeux sur mes pieds. J’ai bien fait de mettre ces chaussures-là,
ce sont mes préférées. Il sort la clé de sa poche et ouvre la porte de son bureau.
— Après toi. Ajoute-il poliment.
— Merci.
— Installe-toi, veux-tu un café ? Me demande-t-il en saisissant deux tasses.
— Oui, je veux bien, merci.
— J’espère que ça ne dérangeait pas ton mari que tu reviennes si tard ?
— Non, je.., je lui ai expliqué et il a compris. Et je ne suis pas. Dis-je en me raclant la gorge.
— Oui, tu n’es pas ?
Non, je ne vais pas finir ma phrase, je ne vais pas préciser que je ne suis pas mariée, ça n’a aucune
importance.
— Je ne suis pas si tard que ça, il est habitué à me voir rentrer à plus de vingt-deux heures, quand je
travaille du soir.
— Il est évident que ce ne sont pas les mêmes horaires lorsque l’on est cadre.
— Je ne suis pas cadre, mais si je le deviens, j’apprécierai les horaires. Ajouté-je hésitante en
évitant son regard.
— Tu vas bien ?
— Oui.
— Tu as l’air tendue.
— Non, pas du tout, enfin si un peu, peut-être.
— Pourquoi ?
— C’est…
Vous, vous... vous me faites perdre tous mes moyens, j’ai envie de vous embrasser. Cette bouche qui
semble si délicate, je me retiens d’humidifier mes lèvres en dévorant sa bouche du regard. J’aimerais
juste y goûter une seule fois, peut-être qu’après le désir s’atténuerait, mais peut-être que ce serait pire ?
— C’est la situation. Affirmé-je.
— Je vois. Tu sais quand j’ai accepté, il y a deux ans, de prendre le poste de cadre de pôle, j’ai
hésité, car j’aime beaucoup le contact avec les équipes, les familles et là je suis éloigné de tout ça. Tu as
toujours des avantages et des inconvénients dans un changement de fonction. Mais tu souhaites devenir
cadre, donc tu vas occuper ce poste dans un avenir plus ou moins proche, ça ne peut être que positif pour
toi. Tu t’en sors très bien. Ajoute-t-il en effleurant mon bras.
Je suis troublée, je ne sais pas quoi ajouter, je sens les larmes monter. Cet homme qui a tellement de
responsabilités m’inspire le respect depuis le début et là il me complimente et m’encourage à évoluer.
Je bois une gorgée de café, lorsqu’il effleure à nouveau mon bras, je manque de m’étouffer et je retire
immédiatement celui-ci.

Chapitre 5

— Excuse-moi, je ne voulais pas te mettre mal à l’aise. Je voulais simplement te rassurer.


— Non vous ne…, vous…
J’ai à nouveau le souffle coupé, je ne peux plus parler, si je le pouvais, les mots qui sortiraient de ma
bouche seraient incontrôlés. Il se lève rapidement de sa chaise, fait quelques pas, s’arrête et me lance
d’un ton agacé :
— Si c’est trop de pression à supporter, si je me suis trompé, dites-le-moi, je trouverai quelqu’un
d’autre pour ce poste !
Comment ? Il m’a dit vous, il doit être fâché, je suis donc facilement remplaçable, c’est qu’il veut me
faire comprendre. Je le savais déjà, merci de le préciser. Trop de pression ? Évidemment, mais qu’est-ce
qu’il croit, je n’ai pas trente ans, je suis au beau milieu d’une équipe plus âgée que moi pour la plupart,
des médecins urgentistes qui ne me prennent pas au sérieux et je devrais faire comme si j’avais la
situation bien en main. C’est la première fois qu’il me parle comme ça, il paraît si autoritaire. J’ai
l’impression d’être paralysée, je ne peux rien faire. Quelques minutes passent, sans un bruit, sans un
regard. Dois-je partir ? Thomas reprend d’un ton plus calme :
— Votre café va être froid Alyssa.
Son téléphone sonne, il s’éloigne pour répondre et sort de son bureau. Je n’entends pas ce qu’il dit. Je
finis mon café rapidement, ensuite je partirai. Il se rapproche toujours au téléphone.
« Je ne sais pas dans combien de temps je rentre, dis bonne nuit aux enfants pour moi, je veux régler
certaines choses avant de partir. »
Il referme la porte derrière lui et s’assied à nouveau, mais face à moi cette fois-ci. J’ose le regarder,
je sens que je rougis, je ne sais pas pourquoi, car je suis toujours en colère après lui. Il m’a fait de la
peine et pourtant j’ai envie qu’il me prenne dans ses bras, je donnerais n’importe quoi pour qu’il me
serre contre lui. Je laisse échapper un sourire timide. Il sourit à son tour, le sentiment de colère que
j’éprouvais est passé.
— Si tu me disais plutôt ce qui te retient d’accepter cette offre Alyssa?
Ah, nous sommes revenus à tu…
— Je ne sais pas exactement. J’ai très envie d’accepter, j’ai juste peur de ne pas assurer.
— Je te l’ai dit, on ne va pas te laisser seule, je ne vais pas te laisser seule. Tout se passera bien.
— D’accord j’accepte, merci beaucoup pour cette preuve de confiance.
— Super, le contrat est prêt, je vais le chercher pour que tu le signes.
Il sort du bureau à nouveau rapidement. Je repense à ce qu’il m’a dit, il me tutoie à nouveau, c’est
étrange ce changement de comportement. Enfin, je sais que c’est la bonne décision à présent, je vais tout
faire pour vivre l’expérience à fond. L’entretien touche à sa fin, Thomas se lève et enfile sa veste et me
tend la mienne.
—Une bonne chose de faite, demain matin, je viendrai te voir, nous travaillerons sur les congés d’été.
— Très bien.
Nous marchons jusqu’au parking, il s’arrête à hauteur de ma voiture. Tiens il connaît ma voiture !
— Bonsoir Alyssa.
— Bonsoir Thomas.
Je rentre à la maison, Hugo travaille toujours dans le bureau. Je vais le voir et lui explique que j’ai
accepté le contrat, il semble content pour moi et me félicite. J’ai le sentiment d’avoir fait quelque chose
de mal en acceptant, mais je n’y pense pas trop ce soir. Je suis fatiguée, j’ai juste envie de dormir dans
les bras d’Hugo et de ne penser qu’à lui. Il aimerait faire plus que m’enlacer, mais je n’en ai pas envie, je
ne peux pas en ce moment, je m’endors contre lui.
Au réveil, Hugo m’apporte le petit déjeuner au lit.
— Chéri, ce soir, je t’invite au restaurant.
— Pourquoi cette invitation ? Demandé-je surprise.
— Faut-il une raison pour t’inviter ? De plus, nous pourrons fêter ta promotion.
— Tu es trop adorable avec moi.
— Enfin, Alyssa, tu me rends si heureux, tu mérites tout le bonheur que je peux t’apporter. Je t’aime.
— Je t’aime aussi.
Ce matin, je ne suis pas pressée de partir au travail, comme si, toute la pression que je m’étais mise
s’était dissipée. J’enfile un tailleur, c’est la première fois que je serai en jupe au travail. Forcément en
tant qu’infirmière, j’avais le droit à la tenue professionnelle uniquement qui n’est pas franchement aussi
sexy que certains le pensent. Maintenant, je peux m’habiller comme je le veux, il me suffit de passer la
blouse par-dessus et c’est franchement plus classe.

Au bureau, j’enchaîne les coups de téléphone, je m’occupe de la commande de pharmacie, puisque la


personne qui s’en charge est en congé et que les infirmières sont débordées. Je fais le maximum pour
alléger leur charge de travail. Vers onze heures, Thomas arrive dans le service.
— Bonjour Alyssa, tu vas bien ?
— Oui, très bien et vous ?
— Tu as un moment pour que l’on se penche sur les congés d’été ?
— Je voudrais terminer la commande avant.
— Pas de problème, je vais commencer et tu me rejoindras quand tu auras fini.
— J’ai laissé la grille prévisionnelle dans le classeur.
— Très bien, je vais trouver ça.
Je termine la commande, il est onze heures et demie. J’avais presque oublié que Thomas était dans
mon bureau en y entrant.
— Il y a deux périodes où il y a plus d’un tiers des effectifs en congés en même temps chez les aides-
soignantes et une période chez les infirmières.
— Oui, j’ai vu ça. Il va falloir faire bouger les congés de plusieurs d’entre elles, ça risque d’être
problématique.
— Je vois, qu’est-ce que tu proposes ?
— Je vais relever dans un premier temps les périodes qui posent soucis, les transmettre à l’équipe,
afin de voir si les personnes concernées peuvent déplacer leurs souhaits en fonction de leurs impératifs.
— C’est une bonne idée, tu peux l’imprimer et l’afficher cet après-midi. Il faut que je détermine le
nombre de saisonniers assez rapidement. Tu viens manger au self ce midi ?
— Oui, pourquoi pas.
— Je t’attends, allons-y. Je dois être à treize heures à la DRH, donc je ne dois pas m’attarder.
J’ôte ma blouse et réalise que je suis en jupe et sans ma blouse, ça va forcément se voir davantage.
J’informe l’équipe que je m’absente pour aller manger. Thomas attend un peu plus loin, il discute avec un
médecin, il se retourne et me regarde. Il me demande si je suis prête, j’acquiesce et nous prenons la
direction du self sans se dire un mot. En chemin, nous croisons Aurélie, elle nous salue et ajoute :
— Prête pour le resto Alyssa ?
— Le resto ? Répliqué-je étonnée.
— Oui, ce soir avec Hugo.
— Ah, je n’y étais pas. Dis-je en souriant. À plus tard Aurélie.
Comment se fait-il qu’elle soit au courant que je vais au restaurant avec Hugo ? Je ne lui ai pas dit,
puisque je le sais seulement depuis ce matin.
— Une soirée en perspective ? Reprend Thomas.
— Oui, si on veut. Enfin un repas avec mon fiancé.
— Il faut bien de temps en temps, j’y emmène ma femme aussi ce soir. On fait garder les enfants pour
s’offrir un moment à nous.

Chapitre 6

Je l’écoute, je ne réponds rien, je ne vois pas ce que je pourrais ajouter. C’est bien qu’il emmène son
épouse au restaurant, c’est un mari attentionné. C’est étrange, ça ne m’a pas dérangée qu’il me parle de sa
femme. Suis-je guérie ? Aujourd’hui, nous avons passé un peu plus de temps ensemble, je n’ai rien
éprouvé. Je le trouve toujours séduisant, mais je suis devenue raisonnable.
Nous arrivons au self, j’aperçois Cynthia et d’autres cadres. Nous les rejoignons à table, je m’installe
face à Thomas. Nous bavardons un peu, le repas se passe bien jusqu’à ce que la cadre de chirurgie,
madame Kerrien fasse son apparition. Elle se joint à nous, s’assied à côté de Thomas, en prenant soin
d’ôter le seul bouton fermé de son gilet, elle porte toujours des décolletés plongeants. Je me sens bouillir
à l’idée qu’il puisse en profiter.
— Thomas, tu vas bien, je ne t’ai pas vu ce matin.
— Oui Sandy, je n’ai pas eu l’occasion d’aller en chirurgie ce matin.
Je les écoute parler tous les deux, elle s’appelle Sandy, rien que son prénom m’agace. Non mais
regardez-la, elle se trémousse devant lui, c’est tout juste si elle ne mange pas au-dessus de son assiette.
Thomas plonge ses yeux dans les siens quand il lui parle, je suis certaine qu’ils aiment ses yeux bleus,
même moi je les aimerais si je ne la détestais pas. C’est une fausse blonde, ça se voit tout de suite. Je
parie qu’il couche avec elle. Je le pensais fidèle, pas elle, merde.
— Alors tu trouves ça comment de jouer au cadre miss euh, c’est comment ton prénom ? Me lance-t-
elle, alors que je ne m’y attends pas. J’ai l’impression qu’il y a une pointe d’ironie dans sa façon de
s’adresser à moi. Je joue à la cadre selon elle… Je vais la baffer cette pétasse.
— Moi, c’est Alyssa. Veuillez m’excuser, je dois y aller. Dis-je en regardant le reste de la table. Je
me lève et prends mon plateau, je vais le déposer sur un chariot plus loin avant de sortir du self
contrariée.
— Un problème Alyssa ? Lance Thomas du haut de l’escalier.
— Non. Répliqué-je surprise de le voir ici.
— Tu n’as pas mangé ton dessert, tu es partie rapidement.
— Je n’ai plus faim et j’ai du travail en attente.

Je referme la porte qui se trouve en bas des escaliers, oui je dois aller jouer à la cadre. Toi, Thomas
retourne jouer avec ta pétasse. N’oublie pas d’en parler à ta femme ce soir. C’est dingue, j’étais bien,
sereine, il a fallu qu’elle débarque pour que je sois irritée et que je repense à lui.
Je vais lui montrer que je ne joue pas, mais que j’assure dans ce rôle J’espère tellement avoir réussi
mon entretien lors du concours. Il est dix-sept heures, je vais rentrer, je n’ai pas envie d’entamer quelque
chose à cette heure-ci.

J’arrive à la maison, Hugo n’est pas là, mais un mot se trouve sur la table.
« Alyssa, Je ne rentrerai pas avant 19 heures 30 je pense, prépare-toi. En sortant, je passe te prendre
et te conduis au restaurant. Je t’aime. Hugo. »

Je ne savais pas qu’il rentrerait tard aujourd’hui, j’ai quitté tôt le travail pour profiter de lui… Je
mets de la musique, je fais un peu de ménage avant d’aller prendre ma douche. J’ouvre le placard de
l’entrée pour y sortir ma veste, je trouve notre album photo, qu’est-ce qu’il fait là ? Hugo l’a déplacé, ce
n’est pas sa place. J’en profite pour le regarder, je connais toutes nos photos par cœur, mais j’adore les
contempler. Nos toutes premières, nous étions si jeunes…
Nous nous sommes rencontrés l’année de nos vingt ans, un vrai un coup de foudre nous deux. Nous ne
nous sommes jamais passé l’un de l’autre.
Quand je vois nos photos de vacances, je me dis que nous avons bien profité. C’est une belle histoire
d’amour, pas vraiment de dispute, nous sommes d’accord sur tout… Dit comme ça, ça paraît presque
ennuyeux… L’heure tourne, je vais me presser un peu, sinon Hugo va me trouver en peignoir. J’enfile une
jolie robe rouge, je sais qu’il adore me voir dans cette tenue. Les chaussures et le rouge à lèvres assortis,
je suis prête.

Dix minutes plus tard, sa voiture arrive dans l’allée, je sors le retrouver. Oh il est élégant ! Il porte un
costume, comme pour les grandes occasions. Quand je le vois comme ça, je réalise que j’ai de la chance,
Hugo est tellement beau. Il a toujours été mon type d’homme, il est brun, il a des yeux bleus intenses, il a
des fossettes au coin de la bouche qui me font craquer. Il ne s’est pas rasé depuis trois ou quatre jours,
car il sait que je l’adore comme ça, il fait plus viril. Quand il est rasé de près, son visage paraît si doux,
il semble plus jeune.
— Tu es beau Hugo, mais dis-moi, tu n’es pas allé travailler comme ça ?
— Tu es magnifique mon amour, j’adore cette robe, elle te va si bien. Tu es prête ?
— Oui, je le suis. Tu m’intrigues. Je n’ai pas l’habitude que tu me surprennes.
— Je suis capable de te surprendre, tu vois bien. Ta promotion se fête, je te l’ai dit. Attache-toi bébé.
Nous arrivons au restaurant, il a choisi le meilleur de la ville, enfin nous n’y sommes jamais allés,
mais c’est ce qu’on dit Du parfum du délice, on dit aussi qu’il est très cher.
Nous poussons la porte et je découvre un cadre très romantique, chaque détail est travaillé, il y a un
doux parfum, je n’arrive pas à l’identifier. Le serveur nous indique une table isolée par un rideau en
velours rouge, on aperçoit le reste de la salle tout de même, mais c’est beaucoup plus intime. Hugo écarte
la chaise de la table comme un gentleman, il me prie de m’y installer. Je rougis devant tant de délicatesse.
Le serveur revient avec un vase rempli de roses, il le dépose devant moi, une carte l’accompagne. Je
regarde Hugo, je suis intriguée, voire émerveillée.
— C’est de toi Hugo ?
— Lis la carte, tu verras bien.
« Mon amour, Tu sais combien je t’aime depuis toujours, tu me combles de bonheur et j’espère te
combler en retour. L’année prochaine cela fera 10 ans que nous sommes en couple… »

Hugo se lève, il met un genou à terre, il sort un écrin de sa poche, il a les larmes aux yeux.
— Que dirais-tu de devenir ma femme ? Veux-tu m’épouser Alyssa ?

Je ne m’y attendais pas, je suis sous le CHOC, c’est si soudain. Bien sûr, je suis émue, j’attends cette
demande depuis plus de cinq ans, en fait, je crois que je ne l’attendais plus réellement. Hugo semble
s’impatienter.
— Dis quelque chose Alyssa.
— Je ne m’y attendais pas, je suis émue. Tu es surprenant.

En réalité, je suis perdue, j’ai souhaité me marier pendant des années, mais il n’était pas prêt. Je
m’étais fait une raison, il y a un an peut-être. À présent, j’étais persuadée de ne jamais connaître le
mariage. Déçue, résignée, j’ai éloigné cette idée de mon esprit pour les prochaines années, tout comme
les enfants.

Chapitre 7

Son regard scrute la moindre de mes réactions. Je l’enlace et le remercie, les larmes coulent sur mon
visage.
— Chéri, réponds-moi, veux-tu devenir ma femme ?
Bien sûr, je le voulais depuis si longtemps, mais est-ce que je peux maintenant ? Ne dois-je pas lui
parler de Thomas avant ? Je ne sais plus où j’en suis, mais je ne vais pas gâcher notre soirée. Et puis, je
ne l’ai pas trompé, je ne vais pas nous faire du mal maintenant… à présent, je n’y penserai plus, enfin je
l’espère.
— Oui, je le veux depuis si longtemps Hugo.
— Pardonne-moi d’avoir mis autant de temps. J’ai toujours su que je voulais passer ma vie avec toi
et tu le sais. Maintenant je veux tout, je veux aussi des enfants de toi. Je sais que tu es prête pour ça
depuis longtemps.
— Des enfants ? Tu ne fais pas les choses à moitié, il t’a fallu une décennie pour vouloir te marier et
avoir des enfants… je suis ravie de te l’entendre dire. Mais…
Je me retiens de pleurer.
— Qu’est-ce qu’il y a Alyssa ?
— Je ne sais pas quand se sera possible, je ne peux plus actuellement. Tu sais bien, j’espère entrer à
l’école, enfin tu te décides maintenant et je ne vois plus ça possible avant au moins deux ou trois ans.
— C’est dommage, mais s’il faut, j’attendrai que tu sois prête.
— Que je sois prête ? Mais je le suis depuis des années. Tu attends que j’évolue professionnellement
pour…
— Ne te fâche pas, je comprends.
— Ca me fait tellement de peine d’avoir autant attendu pour pouvoir espérer devenir mère et là tu me
dis que s’il le faut tu attendras que je sois prête. Tu ne pouvais pas te décider un an ou deux plus tôt ?
— Alyssa, ne pleure pas, je t’aime. Excuse-moi, je n’étais pas prêt, ne m’en veux pas.
— Ne t’excuse pas, je ne t’en veux pas. On peut commander si tu veux, je suis affamée. Ajouté-je
pour nous faire taire, car je ne veux pas le blesser.
Je porte sa bague sur l’annulaire de la main gauche, car je porte ma bague de fiançailles de l’autre
côté. Nous passons une soirée très romantique en tête-à-tête, le repas est délicieux. En rentrant, je
découvre un autre bouquet de roses dans l’entrée, et puis un dans la chambre avec une boîte cadeau.
— Mais quand as-tu eu le temps de déposer ça ?
— Je sais être quelqu’un de très secret, tu vois bien. Répond-il.
— Oh je vois. Tu es fou, c’est magnifique. Dis-je en ouvrant le paquet, découvrant une nuisette sexy
que j’avais repéré en vitrine de ma boutique de lingerie préférée.
Je l’embrasse amoureusement avant d’aller l’essayer. Elle me va parfaitement bien, je me sens
différente en me regardant dans le miroir, dans cette superbe nuisette. Madame Alyssa Rousseau, ça sonne
super bien ! Il m’a enfin fait sa demande, je n’en reviens pas. Il faut que j’appelle ma mère, il faut que
j’appelle Emma et Aurélie.
Oh Aurélie était au courant pour le restaurant, elle est dans le coup, c’est certain. Je lui demanderai.
Je sors de la salle de bain, Hugo m’attend, bougies allumées, fond musical romantique. Tout est parfait.
Oh je l’aime mon Hugo. Il me dévore du regard, je crois que ce qu’il voit lui plaît. Nous dansons un slow
et l’étreinte se poursuit dans notre lit.

Je me réveille en retard, nous n’avons pas mis nos réveils hier soir. Il est huit heures, d’habitude je
suis au bureau à cette heure-ci, même si je peux me permettre d’arriver plus tard, ce n’est pas une raison.
Nous nous pressons de nous préparer, Hugo part à toute allure, l’école commence à huit heures trente, il
devrait arriver juste à temps. Moi, j’avale juste un café rapidement.
J’arrive au travail il est presque neuf heures, évidemment je croise Thomas, il regarde sa montre.
— Bonjour Alyssa.
— Bonjour Thomas, j’ai loupé le réveil, je suis désolée.
— Ça peut arriver. Ajoute-il d’un air suspicieux.
Je ne relève pas plus que ça, je vais me marier, je suis sur mon petit nuage. La journée se passe bien,
demain vendredi dernier jour de la semaine, ensuite week-end avec mon futur mari.
Samedi, nous buvons une coupe de champagne avec nos parents et nos frangins. Les annonces faites
dans l’entourage, nous réfléchissons à une date. Hugo est pressé, il veut se marier cet été, mais je
m’inquiète du peu de temps qu’il va nous rester pour toute la préparation. Après quelques coups de
téléphone au presbytère, à la mairie, nous fixons la date au vingt-sept septembre deux milles quinze.
J’occuperai de nouveau mon poste d’infirmière, ce sera plus facile pour moi de poser mes congés.
Plus d’une semaine s’est écoulée depuis la demande d’Hugo, j’ai presque fini la présentation du
faire-part de mariage ce week-end. Il faut vraiment que je pose mes congés sinon je vais être embêtée
pour notre voyage de noces. Nous aimerions les poser lors des vacances de la Toussaint, de cette façon,
si je suis admise à l’école des cadres, nous ne serons pas bloqués.

Lundi 30 mars, je commence par me pencher sur les congés d’été de mon service, quand je réalise
que je ne sais pas où je serai en septembre.
Dans quel service vais-je devoir poser mes congés ? Il faut que je me renseigne quand je verrai
monsieur Simon. En pensant à lui, justement je l’entends parler avec un médecin. Encore cette histoire
d’intérimaire qui a refusé de partir en SMUR. Je ne vais pas m’incruster dans leur conversation. Je suis
interpellée par Morgane, qui n’arrive pas à perfuser une patiente en urgence et sa collègue non plus. Je
vais tenter le coup, si je n’y parviens pas, on appellera un IADE (infirmer anesthésiste diplômé d’état). Je
n’ai pas perfusé depuis un mois et demi, j’espère ne pas avoir perdu la main. Du premier coup, ça fait un
bien fou d’être dans les soins.
J’ai loupé Thomas, je l’appellerai peut-être plus tard. Une heure après, il est à nouveau dans le
service, alors que je m’apprête à lui parler, le téléphone du SMUR retentit, tout le monde est occupé, je
prends l’appel. Le départ de l’équipe passé, je retourne voir monsieur Simon, mais nous sommes une fois
de plus interrompus par Morgane qui me demande de l’aide pour organiser le transfert d’une patiente en
urgence sur un autre centre hospitalier. Je dis à Thomas que je le verrai plus tard et je me rends
disponible pour l’équipe. Dix-huit heures, eh bien, ce fût une journée bien remplie. Je n’ai pas arrêté, je
n’ai rien mangé ce midi. En partant du bureau, le chef vient me parler.

Chapitre 8

— Tu voulais me parler Alyssa ?


— Euh oui, ce n’est pas urgent, nous verrons ça plus tard. Là, je vais aller manger quelque chose
avant d’être en hypoglycémie.
— Je n’ai rien avalé non plus. On va prendre un morceau ensemble, si tu veux ?
— Oui. Dis-je en me dirigeant vers la cafétéria dans le hall de l’hôpital.
Il n’y a plus rien à cette heure-ci.
— On peut aller rapidement au salon de thé un peu plus bas, il y a de très bons gâteaux. Tu pourras
me dire ce dont tu souhaitais me parler en même temps.
— Pourquoi pas, je n’y suis jamais allée.
— On peut y aller à pied, il y a deux-cents mètres à peine.

J’acquiesce et nous nous rendons tranquillement en direction du salon de thé. En arrivant, la serveuse
nous indique une place où nous installer. Nous prenons place et nous commandons un café gourmand, il
est accompagné de trois pâtisseries du jour.

— Tu sembles plus détendue depuis quelques temps. Tu as pris tes habitudes, je pensais bien que
c’était le temps que tu prennes tes marques. Me dit Thomas.
— Oui, sans doute. Disons que je me suis libérée l’esprit.
— Ah oui ? Tu veux m’en parler ?
— Non, non. Rétorqué-je timidement.
— Ah ça ne concerne pas le travail. Ajoute-il en mettant sa main sur mon avant-bras.
Instinctivement, je ne peux pas m’empêcher de reculer, je pense que c’est une façon de me protéger, je
ne veux plus ressentir ce que j’ai éprouvé pour lui. Je regarde ma tasse, je sens que je rougis.
— Tu n’aimes pas le contact, j’aurais dû m’en souvenir.
— Non, ce n’est pas ça, c’est par réflexe. Excusez-moi.
— Ne t’excuse pas, j’ai envahi ton espace. Remarque-t-il en souriant.
J’ai de nouveau la tête qui tourne en sa présence, je dois me raisonner. Je sais que je rougis encore.
Le silence s’installe quelques minutes, Thomas me regarde dans les yeux, il me met mal à l’aise. Il rompt
le silence.
— De quoi voulais-tu me parler Alyssa tout à l’heure ?
— Ah oui, je voulais savoir si vous pouviez me dire dans quel service il est prévu que je sois au
mois de septembre ?
— Je t’avoue que je n’en ai pas la moindre idée, mais ne t’inquiète pas pour ça, tu as le temps. Et
puis, la direction va respecter tes choix.
— Comment puis-je poser des vacances, si je ne sais pas où je serai ? J’ai vraiment besoin d’être
sûre que je les aurai.
— Tu veux poser des vacances dans cette période, eh bien, tu me donnes tes souhaits, on s’arrangera.
Tu es rassurée ? Me glisse Thomas près de l’oreille.

Un frisson me parcourt, je me sens sous son emprise à nouveau. Il a un pouvoir exceptionnel, il le


sait, il en joue je pense. Mais qu’est-ce qui me plaît chez lui ? Il est beau mais Hugo l’est aussi. Est-ce
l’autorité? Ou bien, le fait qu’il a des connaissances illimitées dans de nombreux domaine, j’adore savoir
qu’il en a…

— Un voyage ? Demande Thomas.


Il a de la prestance, de l’assurance, il a un charisme exceptionnel, il a tout… enfin il a une femme
aussi et des enfants.
— Tu rêves ?
— Pardon. Dis-je embarrassée.
— Je t’ennuie ? Tu es ailleurs ?
Non, je suis avec toi, je peux difficilement être plus là, je suis presque dans tes bras, enfin dans ma
tête.
— Je vous écoute Thomas. Dis-je en goûtant un morceau de ma tarte.
Il regarde son téléphone et lâche un long soupir. Merde, je l’ennuie.
— Il est dix-neuf heures, je ne vais pas vous retenir plus longtemps. Lui dis-je.
— Tu n’as pas fini tes gâteaux ! Je ne suis pas pressé. Je me disais juste que le temps passe vite.
J’ai bien entendu ? Le temps passe vite en ma présence ? Il ne l’a pas précisé comme ça, mais est-ce
que c’est ce que je dois comprendre ?
— Un voyage de prévu ? Relance-t-il.
— Un voyage ?
— Oui au mois de septembre, tes congés ?
— Oui, si on veut. Disons que je…
La serveuse nous interrompt pour savoir si tout se passe bien, si nous avons besoin de quelque chose.
Puis elle s’éloigne voyant qu’elle semble déranger, n’ayant pas vraiment de réponse.
— Oui ? Interroge Thomas en saisissant sa tasse dans les mains. Il me semble impatient.
— Je me marie.

À cet instant, il repose sa tasse, sans y avoir posé les lèvres. Le regard inquisiteur, il m’observe
surpris. Mais pourquoi est-ce que ça l’étonne ?
— Tu vas te marier ! Des félicitations s’imposent.
J’ai eu le sentiment de… mais une seconde plus tard, il me félicite. Putain, je suis encore sur le point
de me faire des films.
— Oui, je me marie au mois de septembre.
— Tu as terminé ? Me demande Thomas.
— Comment ?
— Ton café ? Si tu n’as plus faim, il est dix-neuf heures, je vais rentrer. Précise Thomas sans me
regarder.
— Oui, oui, j’ai terminé.
— Je vais régler. Dit-il alors qu’il est déjà debout.
— Non, je vais payer ma consommation.
— Non, j’insiste Alyssa. Lâche froidement Thomas, en me lançant un regard noir.

Je sens que ce n’est pas le moment d’insister. Je ne comprends pas ce changement de comportement.
Il était détendu, il avait tout son temps. Je lui annonce que je vais me marier, il ramasse ses affaires et se
presse. Ça je ne l’invente pas, si ? Nous sortons sans un mot, et nous remontons en direction de l’hôpital.
J’hésite à dire quelque chose sur le trajet, mais j’ai bien trop peur de me lancer. Comment changer de
conversation ? Aucune idée, rien ne sort de ma bouche.
Thomas prend le raccourci, le petit chemin boisé, je le suis, pas même un regard. Il marche à vive
allure, je peux à peine suivre son pas avec mes talons, j’ai l’impression de courir. Je ralentis, je veux
voir s’il le remarque. Non, il conserve la même cadence. Je décide de m’arrêter, j’attends une
explication.
Oh Merde, il s’arrête. Que vais-je prétexter maintenant, je me sens bien bête. Il se retourne et me
lance un regard insistant en ajoutant sèchement.
— Un problème ?
Prise de court, je mets un moment à observer son visage, son regard qui me parcourt. Bordel qu’est-
ce qui se passe ? Qu’est-ce que j’ai fait pour qu’il me dévisage aussi sévèrement.

Décidément ce n’était pas une bonne idée ce café. Je ne sais pas combien de temps il se passe sans se
dire un mot, mais nos regards ne se lâchent pas. Il semblerait que personne n’ait envie de rompre ce
silence. Nous sommes à l’abri des regards indiscrets, s’il a quelque chose à me dire qu’il le fasse, merde.
Soudain, je sens ses yeux descendre sur mes lèvres. Je ne m’étais pas rendue compte que je mordillais ma
lèvre. Je cesse immédiatement et ses yeux reviennent se poser sur les miens. Il ne peut pas nier qu’il se
passe quelque chose, sinon pourquoi resterait-il face à moi si longtemps ?

— Non, pas de problème. Murmuré-je avant de le rejoindre.


Il semble étonné de ma réponse, mais n’ajoute rien. Il avance et j’emboîte son pas. Nous marchons
côte à côte, il ralentit la cadence. Il tourne la tête dans ma direction après quelques pas et laisse échapper
un petit sourire en coin. Je jurerais qu’il me fait des excuses…

Chapitre 9

Il reste à peine dix mètres avant de sortir de ce chemin et de se trouver sur le parking de l’hôpital. Si
nous avons quoique ce soit à nous dire, c’est maintenant, c’est ici, après il sera trop tard et je n’aurai
probablement jamais d’explications sur ce qui vient de se passer. N’est-ce pas la meilleure chose
interroge ma conscience ? Je sens le courage monter en moi. Je m’arrête à nouveau, il en fait de même,
j’en profite.
— J’ai fait ou dit quelque chose de mal ?
— Absolument pas, pourquoi cette question Alyssa ?
— Je ne sais pas, j’ai senti comme un malaise au café. Vous vous êtes levés rapidement et ensuite…
j’ai presque dû me mettre à courir pour vous rattraper.
Il semble embarrassé par ma remarque. Ai-je tapé dans le mile ? Alors j’ose ajouter plus doucement.
— C’est vrai alors que nous passions un bon moment et que vous ne sembliez pas pressé quelques
minutes auparavant avant que je…
Je m’interdis de finis ma phrase… que je ne parle de me marier… ça laisse sous-entendre trop de
chose. Il s’approche de moi, je tremble…Va-t-il m’embrasser ? Il me tapote l’épaule et d’un rire qui me
semble forcé, il ajoute.
— Non, pas du tout. Il n’y a aucun malaise. Je me suis souvenu que j’avais des tas de choses à faire et
je me suis pressé. Question d’habitude je suppose.

Les bras m’en tombent, il m’a mis une tape sur l’épaule. Et pourquoi avoir fait cela ? Il me prend
pour un pote ou quoi ? Non mais sérieux, ça ne se fait pas ça ! Là, je n’ai plus du doute, il ne peut pas,
enfin, il ne ferait pas ce geste que seuls deux mecs peuvent s’échanger. J’ai envie de lui dire que c’est un
connard, mais je ne le ferai pas. Pourquoi est-ce que je pense cela de lui ? Parce que je me suis imaginée
tout un scénario. Il va me prendre pour une gamine, c’est certain.
Je regarde mes pieds et à ce moment-là, je sens le dos de sa main effleurer ma joue. Je frissonne. Sa
main s’attarde du haut de ma joue à la naissance de mon cou, je frissonne encore. C’est comme si un
courant électrique traversait mon corps depuis ma joue jusqu’à mes pieds. Il le remarque je pense. Il ôte
rapidement sa main et fait un pas en arrière. Je relève la tête étonnée. C’est trop court, je veux un peu plus
de toi Thomas !
— Excuse-moi. Murmure-t-il gêné. Ce Thomas je ne le connais pas. Je ne connais que l’autoritaire, le
chef, celui qui est à l’aise en toute circonstance. Je ne sais pas quoi dire. Il entrouvre les lèvres et me
demande hésitant si je vais bien.
— Oui, euh… ça va.
J’ai envie de lui rendre son geste, j’ai envie qu’il prenne dans ses bras. Putain, fais-le Thomas, moi je
n’en ai pas la force. J’essaie d’arrêter de penser un instant, trop de pensées, de questions. Merde la
ferme, me dis-je à moi-même. Il attend devant moi, il est près de moi. Il n’y a qu’un pas qui nous sépare,
mais il est encore bien trop loin. Embrasse-moi. Je le supplie au fond de moi de m’embrasser et de mettre
fin à cette torture. Il se rapproche d’un demi pas et approche sa main de la mienne, je ne bouge pas, je
l’attends. Il fait durer l’attente, il l’effleure simplement du bout des doigts, puis s’écarte.
— On y va Alyssa ?
Où ça ? Bien sûr que je sais ce qu’il veut dire. Non, je ne veux pas partir. Pouvons-nous rester ici
jusque quelques minutes ? Même quelques heures ?
— Oui, allons-y. Acquiescé-je déçue, essayant de ne pas le montrer.
Il s’écarte de moi et nous reprenons la direction du parking. J’arrive à hauteur de ma voiture, il
semble inquiet mais je ne sais pas pourquoi. Je parle la première.
— Merci pour le café, bonne soirée.
— Bonne soirée Alyssa. À demain.

Oh c’est tellement bon, d’entendre mon prénom dans sa bouche depuis qu’il a touché ma joue et ma
main. Il s’éloigne lorsque je démarre, je ne regarde pas dans sa direction, je ne veux pas qu’il me pense
accro. Je suis troublée, je suis excitée je crois. Il me fait tellement d’effet. Je me sens mal à présent de
ressentir tout ça pour autre homme que le mien. Ce n’est pas possible, je suis une mauvaise fille, je ne le
mérite pas. Je ne peux pas me marier si je pense à quelqu’un d’autre. S’il avait voulu m’embrasser, je
l’aurais laissé faire et même je lui aurais rendu son baiser. Oh, mon dieu, imaginer ses lèvres sur les
miennes me consume. Je ne peux pas rentrer dans cet état-là…
J’arrive à la maison, il est presque vingt heures. Hugo agacé me questionne.
— Pourquoi tu rentres si tard ?
— J’avais du travail.
— Oui mais normalement tu finis vers dix-sept heures et là je trouve que ça fait beaucoup d’arriver
trois heures plus tard sans me prévenir.
— Je finis souvent à dix-huit heures, voire même un peu plus.
— Oui mais d’habitude tu me préviens.
— Je ne peux pas deviner le travail que j’aurai à l’avance. Ne sois pas chiant s’il te plaît.
— Je suis chiant ? Attends, tu as un téléphone, ça serait trop te demander de m’envoyer un message ou
de me passer un coup de fil.
— Oh mais je rêve, c’est quoi cette scène Hugo ? Qu’est-ce qu’il te prend ? Tu es habitué à me voir
rentrer très tard et tu ne ronchonnes jamais.
— Oui quand tu travaillais le soir en tant qu’infirmière, je pouvais concevoir que tu restes auprès de
tes patients instables ou que tu finisses tes transmissions, mais là tu es dans un bureau, le travail non fait
aujourd’hui, tu peux le faire demain.
— Mais qu’est-ce que tu en sais ? Certaines choses ne peuvent pas être reportées.
— Pourquoi tu ne me parles plus de ton travail depuis que tu occupes ce poste, tu ne me parles plus
de tes journées… Tu fuis même les conversations.

Est-ce que je fais ça ? Je ne m’en étais pas rendue compte jusqu’à présent… Je sais que je ne devrais
pas me montrer si fâchée de sa réaction, car j’étais partie boire un verre avec Thomas. Mais je ne veux
pas lui dire où j’étais car c’est Lui…

— Je ne fais pas ça Hugo, tu te fais des films. Dis-je plus calmement.


— Alors très bien, en quoi consistait ton travail ce soir après dix-huit heures ?
— Je te demande pardon ? Là, il m’énerve vraiment.
— Oui, explique-moi ce qui ne pouvait pas attendre demain ?
— Je n’ai pas à justifier mon travail. Si je le faisais, tu ne comprendrais pas de toute façon.
— Ce que je comprends c’est que tu as quitté ton bureau aux alentours de dix-huit heures et que tu n’y
es pas retournée avant de rentrer.
— Quoi ? Mais de quoi tu parles ?
— J’étais inquiet que tu ne sois pas rentrée, et comme je n’arrive pas à te joindre sur ton portable,
j’ai appelé dans ton service. J’ai eu l’infirmière Morgane qui m’a dit que tu étais partie vers dix-huit
heures.
Alors quoi je suis démasquée ? Je n’ai rien fait de mal, pas réellement, je devrais lui dire où j’étais.
Non, parce qu’il ne va pas comprendre que je ne lui ai pas dit tout de suite.

Chapitre 10

— Oh. Et donc qu’est-ce que tu en as déduit ?


— Je ne sais pas, j’attends une explication. Dit-il en tapant du pied sur le sol.
— J’ai eu des choses pas évidentes à gérer, j’ai dû me faire aider par des collègues cadres, et pour
finir je suis allée au bâtiment administratif pour remplir des papiers. Mais je ne vois vraiment pas
pourquoi je me justifie. Si tu n’as pas confiance en moi, pourquoi vouloir te marier Hugo ?
Je suis contrariée, je ne lui laisse pas le temps de réagir et je pars en claquant la porte. Nous ne nous
sommes jamais disputés comme ça. Je ne dois pas me servir de ça pour m’éloigner de lui car je sais que
j’ai tort dans cette histoire… Plus que je n’ai envie de l’admettre. Mais il n’est pas dans ma tête, il n’a
pas à savoir, personne ne doit découvrir ce que je ressens quand je suis face à Thomas.
Je déambule dans la rue sans but précis, j’ai juste besoin de temps pour respirer, pour ne pas
m’emporter et dire des choses que je pourrais regretter.

Ma vue se trouble, mes larmes se retiennent d’inonder mon visage. Seulement quelques minutes après
ma sortie, Karen sort sa poubelle et fait en sorte que je l’entende. C’est vraiment une commère cette
bonne femme. Quand nous avons emménagé ici, il y a deux ans, dès lors que nous sortions tous les deux
nous balader, nous la trouvions sur le pas de sa porte à notre retour. Elle s’arrangeait pour nous parler.
C’était systématique, si bien qu’on prenait parfois notre voiture juste pour la garer un peu plus loin.
Elle est curieuse et à priori le voisinage sait tout ce qu’il se passe dans le coin grâce à elle. Je sais
qu’elle va s’attarder devant chez elle pour me voir repasser, je sors mon téléphone et fais comme si
j’étais en pleine conversation. Au moins, elle ne me parlera pas. Elle ne manque pas de me faire un signe
de la main en s’approchant pour me saluer. Je lui lâche un bonsoir par politesse, mais vraiment elle me
gonfle. Faudrait qu’elle se trouve une occupation autre que l’espionnage du voisinage.

Je rentre plus vite que je ne l’aurais souhaité, mais je n’ai pas envie d’être la bête curieuse de Karen
surtout en ce moment. Hugo fait mine de ne pas me voir rentrer, je ne relève même pas. Je vais me faire
couler un bain, je pourrai me détendre de cette façon. Je choisis un cd à mettre en fond dans la pièce,
j’adore les musiques de films d’amour… J’allume juste une bougie que je pose sur le lavabo à côté de la
baignoire et prends soin de fermer la porte à clé, chose qu’on ne fait jamais habituellement. En général,
Hugo vient me retrouver, il me savonne le dos, je sais qu’il en profite mais j’adore cette idée.

Ce soir, je suis trop contrariée, mince, qu’est-ce qui lui a pris d’appeler au bureau. Il ne me fait pas
confiance ? En même temps, ce soir... Est-ce qu’il sent qu’il se passe quelque chose ? J’aimerais me
persuader qu’il ne se passe rien, que tout est dans ma tête, mais ce soir Thomas a eu ce geste sur ma joue,
j’en frissonne encore. Et quand ses doigts ont effleuré les miens, j’aurais pu m’évanouir sur le champ. Il
faut que je fasse le point sur ma relation avec Hugo, pourquoi si je l’aime tant que ça, j’arrive à me
laisser troubler à ce point-là par mon supérieur ? Est-ce qu’il manque du piment à vie ? Ma vie est-elle si
ennuyeuse ?

Après des années à attendre que notre couple évolue, j’avais perdu l’envie. Je pensais que les choses
allaient rentrer dans l’ordre avec sa demande en mariage, mais n’est-il pas trop tard ? Je dois y réfléchir
sans penser à Thomas, car de toute façon, il ne se passera jamais rien avec lui. Il est marié, je ne tenterai
jamais rien qui puisse faire du mal à sa famille, même si j’étais célibataire et il ne serait sûrement pas
intéressé. J’immerge ma tête sous l’eau, et reste en apnée quelques secondes, lorsque je refais surface,
j’entends Hugo monter dans les escaliers. Je ne suis pas prête à lui parler… Il frappe à la porte sans dire
un mot. Je ne réagis pas, il attend quelques instants devant la porte et puis je l’entends s’éloigner et
redescendre.
Lorsque je redescends, il est vingt et une heure trente, Hugo est couché. J’hésite à dormir dans la
chambre d’amis, mais je me raisonne, il n’a rien fait de mal après tout. Je ne vais pas lui imposer ça.
Je me couche auprès de lui, il enroule immédiatement son bras autour de moi et dépose des baisers
dans mon dos et sur ma nuque. Il est si doux.
— Qu’est-ce qui nous arrive ? Me glisse-t-il à l’oreille. Je ne réponds pas, consciente que je suis à
l’origine de tout ce malaise. Je m’endors rapidement, je rêve de sa demande en mariage. Au réveil, Hugo
a l’air plus détendu, je le suis aussi. Nous échangeons quelques mots, des banalités. Il m’embrasse sur le
pas de la porte avant que je parte.

En arrivant dans le hall de l’hôpital, je me remémore ce qui s’est passé avec Thomas hier soir,
j’angoisse à l’idée de le croiser. J’emprunte un couloir différent de celui de d’habitude, je fais en sorte de
ne pas passer devant son bureau. Je me mets au travail sans réfléchir jusqu’à près de treize heures. Je
vais me prendre un sandwich à la cafétéria dans le hall et vais le manger dehors. Je préfère rester seule
un moment. Je ne sais pas pourquoi, mais je ressens l’envie d’aller dans ce petit chemin où nous étions
hier soir tous les deux. Alors que je m’apprête à emprunter le passage, je décide de faire demi-tour. Ce
n’est pas de cette façon que je vais me le sortir de la tête. Mon portable vibre, je le sors de ma poche,
c’est un message.
Un souci ? Pas de signature, je ne connais pas le numéro. Je réponds.
Qui est-ce ? La réponse ne se fait pas attendre.
Thomas.
Oh ! C’est Mon Thomas ? Mais de quoi parle-t-il ? Il a mon numéro de téléphone, c’est normal, mais
pourquoi me demande-t-il s’il y a un souci ? Est-ce le travail ? Est-ce en lien avec hier soir ?
Moi : Non ?
J’appuie sur envoyer, je regrette immédiatement, j’aurais dû formuler une phrase. J’aurais dû signer
ce message. Je reçois dans la minute suivante :
Me voilà rassuré.
J’ai de nouveau cette sensation étrange, une impression qui prend naissance au plus profond de mon
ventre, c’est comme une vague de chaleur. J’ai envie de poursuivre cet échange.
Moi : Pourquoi devrait-il y avoir un souci ? J’ai l’impression de dépasser les bornes.
Thomas: Parce que tu manges seule…
Il est vrai que j’ai mangé au self plus souvent ces derniers temps, mais il a remarqué mon absence. Et
ses points de suspension, il y a tellement de possibilités derrière cette ponctuation. Je réponds sans
tarder : Je mange régulièrement toute seule…
Je me permets cette fantaisie, ce culot peut-être même d’ajouter les points de suspension, et ça
m’excite un peu d’imaginer sa réaction. Est-ce qu’il va relever ?
Mon portable vibre à nouveau, je crois que ce son est le plus beau à mon oreille en ce moment : Oui,
tu manges seule dans ton bureau, mais peut-être pas dehors…

Chapitre 11

Comment sait-il que je suis dehors ? Il a dû passer à mon bureau ou bien il m’a aperçue dehors. Il a
conservé les fameux points !
Moi : Tout va bien, même quand je mange seule dehors…
C’est devenu un jeu. Il répond toujours rapidement : Ne crois pas que je te surveille…
Oh, mon ventre brûle, c’est comme s’il avait allumé un feu, je vais me consumer sur place. Soudain,
mon portable vivre à nouveau : … Juste ça ? Il veut que je lui réagisse, c’est ça ? Je le fais aussitôt : Je
ne le pense pas…
À chaque vibration, je crois que mon cœur s’arrête de battre avant de se remettre à frapper plus fort :
Je passe te voir tout à l’heure… ?
On dirait qu’il me demande la permission, mais pourquoi ferait-il cela ? Je ne sais pas quoi répondre,
je ne trouve rien. Je ne vais pas lui mettre un simple « ok » . Je choisis sa méthode : …
Quelques minutes se passent, suffisamment pour que je pense cet échange terminé et enfin : A tout à
l’heure, je passerai en fin d’après-midi, si tu es toujours là …
Oh mon dieu, à quoi joue-t-il ? Je me surprends toujours à jouer avec lui : Vous verrez bien… Je n’ai
pas fait ça.
Mince, si ça se trouve quelqu’un a pris son téléphone à sa place, si ça se trouve quelqu’un pourrait
voir nos messages. Je regarde l’heure, il est treize heures quarante-cinq déjà ! Je me dépêche de rejoindre
le service, les transmissions sont déjà terminées. Je me glisse dans mon bureau discrètement, je n’ai
pourtant rien à me reprocher.

L’après-midi passe assez vite, trop vite même. Je ne sais pas à quoi m’attendre avec Thomas, il va
venir alors que nous avons eu ces petits échanges… J’ai un peu peur, je dois me l’avouer. Je relis nos
messages, je me trouve drôlement insolente dans le dernier, lui avoir répondu, qu’il verrait bien si j’étais
là, non mais qu’est-ce qui cloche chez moi ? Du travail, il me faut du travail, il faut que je m’occupe
l’esprit autrement. Vers seize heures mon portable vibre, j’ose à peine le prendre.
C’est Hugo : Je t’aime bébé, à ce soir.
Voilà de quoi me faire culpabiliser à nouveau. Je lui envoie un texto en réponse : Je t’aime aussi.

Dix-sept heures, je surveille l’horloge. Passage rapide aux toilettes, je m’arrange un peu. J’ai
toujours un rouge à lèvres sur moi et un crayon noir, voilà c’est mieux. Je reste face au miroir, j’ai la
sensation de me redécouvrir. Est-ce que je me trouve belle ? J’ai l’impression de me trouver plus jolie,
j’arrange quelques mèches rebelles de mes cheveux derrière mon oreille. Je souligne mon regard d’un
trait noir, ce qui fait ressortir le vert de mes yeux.

Dix-huit heures, il n’est toujours pas passé… Si ça se trouve, il ne va pas venir, il doit être trop
occupé. J’envoie un texto à Hugo pour lui dire que je termine un travail en cours, ce qui n’est pas un
mensonge, mais je pourrais aussi bien le finir demain. Dix-huit heures trente, je ne vais pas rester
l’attendre comme une conne. C’est bon, à tous les coups il est parti. Je ramasse mes affaires et salue
l’équipe. J’avoue que je suis déçue mais il est temps de rentrer. En arrivant, Hugo s’étonne presque.
— Je pensais que tu arriverais plus tard, vu ton message.
— Non, j’ai eu le temps de finir. Tu vas bien ?
— Oui, oui. On va se balader ?
— Quoi maintenant ?
— Oui.
Nous allons en ville, main dans la main, quand nous sommes tous les deux comme ça, je suis bien.
J’arrive à oublier le reste. Nous préparons le repas ensemble, nous passons une agréable soirée. Lorsque
nous allons nous coucher, Hugo passe une jambe au-dessus de moi, il s’agenouille, une jambe de chaque
côté. Il me caresse tendrement, remontant le long de mes bras, puis descends sur mes seins.
— Tu es si belle. J’ai tellement de chance de t’avoir. Tu seras bientôt ma femme.
En entendant ces mots, je suis terrifiée, terrifiée à l’idée qu’il découvre ce qui se passe... Pétrifiée à
l’idée de l’anéantir. Je ne peux retenir mes larmes de couler. Hugo s’inquiète immédiatement.
— Chérie, qu’est-ce qui t’arrive ? Parle-moi je t’en prie.
— Non, ça va. Je suis fatiguée, je voudrais dormir.
— Non, il se passe quelque chose, dis-moi ce qui ne va pas. J’ai le droit de savoir ce qui te rend si
triste.
Voyant que j’évite son regard, Hugo insiste, me forçant à le regarder en relevant mon menton de son
index.
— C’est le mariage ? Tu ne veux pas ?
— C’est…
— C’est ça, tu ne veux pas te marier avec moi ! Hurle-t-il.
— Ne crie pas, je n’ai pas dit ça.
— Alors quoi ? Ne me demande pas de ne pas crier, tu ne veux pas me dire ce qui se passe !
— Je ne peux pas t’expliquer. Je ne comprends pas moi-même Hugo.
Je ne sais même pas quoi lui dire, j’ai peur de le perdre définitivement. Je sais que je l’aime.
— Comment ça tu ne peux pas m’expliquer ? Qu’est-ce que tu ne comprends pas ? Est-ce que tu
m’aimes ?
— Évidemment que je t’aime Hugo ! Je n’en ai jamais douté, je te le jure !
— Alors c’est quoi ?
— C’est ta demande… c’est vrai. Je l’ai tellement attendue, j’ai l’impression d’être passée à côté de
tellement de choses en t’attendant.
— Ah bon, tu as perdu ton temps avec moi ?
— Mais non pas du tout, mais j’aurais tellement aimé être déjà mère, j’aurais voulu que tout soit plus
simple. Maintenant, je sais que je vais devoir attendre et ça m’attriste.
— Ne pense pas au passé, pense à l’avenir, à ce que l’on va construire ensemble.
— Oui, mais pourquoi il a fallu presque dix ans pour que tu ressentes l’envie de t’engager ? Moi
j’étais prête pour tout il y a des années. Tu t’étais éloigné de moi…
— Je ne sais pas, je ne m’étais pas vraiment éloigné et j’ai toujours su que je voulais passer ma vie
avec toi. Mais Je n’étais pas prêt. Tu ne peux pas m’en vouloir quand même ?
— Je ne crois pas, mais toi, tu ne peux pas m’en vouloir, d’avoir abandonné l’idée après tant
d’années ?
— Donc, tu ne veux pas te marier ! Dit-il furieusement.
— Je dis qu’à présent je dois me faire à cette idée, que je ne m’y attendais plus.
Il se tourne dans le lit, je le déçois. J’attends qu’il s’endorme pour mettre ma main sur son torse.
J’aimerais pouvoir tout lui dire. Je crois que Thomas est une excuse, je pense qu’il est devenu séduisant à
mes yeux lorsque j’ai été fatigué d’attendre Hugo. Je crois vraiment que si les choses s’étaient passées
autrement avec Hugo, je n’aurais jamais douté de nous. Il ne voulait pas s’engager avec moi, il m’a fait
souffrir, il m’a fait douter. Je sais que je l’aime toujours, mais je crois que je l’aime différemment, pas
moins, mais je l’aime par habitude, vivre avec lui c’est sécurisant…

Chapitre 12

Il est dix heures quand un représentant arrive, je lui montre la salle de pause où s’installer. Il y
dépose son matériel, il a apporté des pâtisseries, des jus de fruits. L’équipe est ravie de la visite des
représentants, c’est toujours l’occasion d’en profiter à la pause. Après y avoir participé je retourne dans
mon bureau, je n’ai pas le cœur à rester au milieu de toute cette agitation.
Je saisis mon téléphone, j’ai un message de ma sœur Émilie : Quand est-ce que tu passes ? On ne se
voit plus, bisous.
C’est vrai qu’on ne se voit plus depuis un moment. Je lui réponds : Oui, je suis pas mal occupée ces
temps-ci. Je ne vois pas non plus lucie.
Lucie et moi sommes assez proches, nous avons tendance à tout nous dire, elle a deux ans de moins
que moi, elle a déjà deux petits bouts, Théo et Rose, qui sont absolument adorables. Il est vrai, que je
confie moins de choses à Émilie, sans doute parce qu’elle est plus jeune et n’a pas la même maturité.
À midi et demi, je mange une salade, je reste dans mon bureau, je ferme la porte pour être tranquille.
Mon portable vibre, c’est sûrement Émilie qui doit me répondre :
Tu manges encore seule… ?
C’est Thomas ! Il reprend son petit jeu d’hier midi… N’empêche qu’il n’est pas venu hier soir. Je
constate qu’il a mis les trois points.
J’hésite à lui envoyer un message, quand je vois la situation dans laquelle je me trouve. Finalement,
je ne doute pas longtemps : C’est une question ?
Je ne mets pas les points de suspension, il n’est pas question que je me jette aussi facilement dans son
jeu.
Thomas : C’est possible…
Moi : Vous verrez bien si vous me voyez au self… Voilà je n’ai pas tenu très longtemps.
Il répond immédiatement : Je ne vais pas au self…
Ah tiens, il ne doit pas avoir le temps de manger, mais alors pourquoi s’intéresse-t-il à mon repas ?
Je trouve notre échange très distrayant, je souris pour la première fois de la journée.
Moi : Alors vous ne saurez pas… J’ai hâte de savoir comment il va à réagir.
Thomas : On dirait bien… sauf si tu me réponds…
À mon tour : Je mange seule…
Il me relance : J’en étais sûr…
Moi : Pourquoi… ?
Réponds mince. Ah enfin: Je ne sais pas…
Oh il ne se mouille pas beaucoup, j’ose en revanche : Et pourquoi ça vous intéresse…
Thomas : Je n’ai pas dit que ça m’intéressait…
Non, mais voilà le retour du boomerang en pleine figure, ça m’apprendra à être comme je suis.
Moi : Pourquoi me poser la question si la réponse ne vous intéresse pas ? ? ? Voilà les seuls points
qu’il aura !
Thomas : Je ne sais pas !!! Oh il joue au con.
Laisse tomber Alyssa, ne cède pas. Il a répondu avant moi : Un souci ?
Voilà, nous en sommes revenus au même point qu’hier, c’est comme ça que les messages avaient
commencé. Ensuite, il m’a posé un lapin. Ça suffit, je vais être claire : Je le répète, aucun souci, vous
devez sûrement être très occupé, alors je ne vais pas vous faire perdre plus de temps ! ! ! Suis-je en
train de faire ça ?
Thomas: Tu sembles contrariée… ? Tu ne me fais pas perdre mon temps… Mais pourquoi insiste-t-il
? Il sait que je suis contrariée.
Moi : Je ne le suis pas…
Je m’abstiens de faire un commentaire sur le fait que je ne lui fasse pas perdre son temps, même si ça
me fait très plaisir. Notre relation a changé, elle n’est plus uniquement professionnelle. Mon portable
vibre, je suis comme une gamine qui s’apprête à déballer un cadeau à noël à chaque nouveau message:
Me voilà rassuré…
Oh il est pénible : Encore rassuré…? Le fait est qu’il n’y a pas de raison de vous inquiéter…
Quelqu’un frappe à la porte, j’ouvre le tiroir et y cache mon portable.
— Alyssa, tu voulais assister aux transmissions, je crois. On commence. Me précise Morgane.
— Je sais l’heure qu’il est, merci Morgane. J’ai des choses à faire, je ne viendrai pas.
— Désolée de t’avoir dérangée. Dit-elle embarrassée.
— Non, pas de problème. Ferme la porte derrière-toi, je te remercie.
J’ai été désagréable avec elle… Elle m’agace depuis qu’Hugo a appelé l’autre soir et qu’elle lui a dit
l’heure à laquelle j’étais partie. Nous en étions où dans nos messages ? Alors qu’a-t-il répondu ?
Tant mieux, tu n’étais pas là hier soir…
Ah nous y voilà, il croit que je suis fâchée, que je ne l’ai pas attendu. Je n’allais pas attendre qu’il se
décide à se pointer, au moins je sais qu’il est passé, qu’il ne m’a pas oubliée.
Moi : J’avais fini mon travail, je n’allais pas rester attendre… et je suis partie à 18h30… Je
n’aurais pas dû préciser l’heure, on sent le reproche.
Thomas : Je comprends, je n’ai pas eu le temps de passer avant…
Une minute plus tard je reçois encore un message : Réunion à seize heures au sujet des contractuels
pour les congés d’été, tu seras présente ? Je constate qu’il n’a pas ponctué ce message de la même
manière que les autres, nous sommes donc repassés à une conversation professionnelle.
Moi : Dois-je l’être ? Voilà, pas de message évasif.
La réunion n’est pas obligatoire, mais ta présence est souhaitable. Je lève les yeux au ciel en lisant
ses réponses.
Moi : Je suis étonnée de l’apprendre seulement maintenant. Je n’étais pas au courant de cette
réunion.
Il répond rapidement : C’était l’objet de ma visite hier soir. Nous ne nous sommes pas croisés
depuis lundi soir…
Le téléphone, les mails existent… je n’ai rien préparé moi.
Moi : Vous auriez pu m’envoyer un mail ou m’appeler sur le téléphone du bureau… Il faut que je
fasse rapidement le point sur les effectifs pour cet été.
Thomas : Excuse-moi, je n’utiliserai plus ce numéro !
Mince, je ne voulais pas dire ça : Non ça ne me dérange pas du tout. J’aurais bien aimé être au
courant pour la réunion un peu plus tôt...
Il est quatorze heures, j’ai encore deux heures. Il ne me répond plus, je ne vais pas le relancer. Après
l’entretien d’évaluation avec Sandrine, une aide-soignante, je ramasse mes affaires, il va être temps
d’aller à cette fameuse réunion. Je regarde ma boîte mail. J’ai un message électronique de sa part.

Objet : réunion
Réunion en salle de conférence A du bâtiment administratif à 16h00 ce jour. Présence de la DRH.
Ordre du jour : effectif nécessaire pour les contractuels remplaçants d’été
Thomas Simon.
Cadre de pôle médecine.
Je jette un coup d’œil aux destinataires, il y a toute une liste de cadres. Voilà une invitation plus
officielle. Il faut que j’envoie un texto à Thomas, j’ai peur qu’il soit en salle de réunion et que quelqu’un
s’en aperçoive, mais je dois le faire.
Merci pour le mail. Vous pouvez continuer à utiliser ce numéro...
Voilà, dix minutes se sont écoulées, je n’ai pas eu de réponse. Il est seize heures moins dix, je dois y
aller. Maintenant, j’ai l’air de quoi ?

Chapitre 13

Je n’aurais pas dû lui reparler de mon numéro. En arrivant devant la salle de conférence, je cherche
un visage familier pour entrer. Cynthia arrive, je rentre à ses côtés. Je trouve une excuse pour lui parler
pour ne pas regarder autour de moi en entrant, pour ne pas croiser son regard. Nous nous asseyons côte à
côte, j’aperçois Thomas il est à l’opposé de nous. Ce qui me rassure énormément. Je prends de quoi noter
dans mon sac, en ouvrant celui-ci, je vois mon portable clignoter, oh il faut que je regarde discrètement
s’il s’agit d’un message de lui :
De rien pour le mail, je n’ai fait que mon travail. Pour ce numéro, je ne vois pas pourquoi je
pourrais en avoir besoin.

Oh punaise, je me sens encore plus mal. Il n’a pas osé marquer ça ! Mon portable vibre à nouveau. Je
lève discrètement la tête, il a son portable en main.
On boit un verre ce soir ? Je dois te parler… ? Quand je relève la tête, il regarde dans ma direction,
je dois être rouge pivoine. Cynthia me demande même si j’ai chaud, j’acquiesce. Je tente de lui écrire la
main dans le sac à main :
Je ne sais pas…où ça ? L’heure ? Je ne peux pas formuler de phrase comme ça.
Thomas : Même endroit, même heure ou ailleurs et plus tard… comme tu le souhaites.

Je ne réponds pas, je n’arrive toujours pas à réaliser ce qui se passe, il m’écrit alors qu’il se trouve
dans la même pièce que moi. Nous n’avons pas eu de face à face depuis lundi soir, depuis qu’il a touché
ma main et ma joue... Si ça se trouve, il va me reprocher nos échanges… Je ne relève plus la tête dans sa
direction pendant la réunion. Il prend régulièrement la parole, il a toujours autant d’assurance.
Vers dix-sept heures trente, la réunion se termine. Je sors en même temps que Cynthia, nous papotons
un moment sur le parking. Je monte dans ma voiture, et j’en profite pour regarder mon portable. J’ai deux
messages, un qui me vient d’Hugo : Tu rentres tard ? Et un de Thomas : Pas de réponse…
Qu’est-ce que je dois faire ? Je veux bien mettre les choses au clair avec lui :
Je ne pouvais pas, j’étais en réunion…je n’ai pas de préférence… J’attends de voir ce qu’il me va
me dire pour envoyer un message à Hugo.
Thomas : On pourrait boire un verre après le dîner … ?
Je vais accepter, je vais rentrer dîner avec Hugo et ensuite nous éclaircirons cette situation avec
Thomas.
Quel endroit ? Je n’ai pas tellement envie de tomber sur mes collègues…
Le téléphone vibre : Pourquoi, as-tu quelque chose à cacher…
Pourquoi me demande-t-il ça ? Il m’énerve quand il fait ce genre de réflexions.
Non, je ne pense pas avoir quelque chose à cacher…quel endroit ?
Je démarre pour rentrer à la maison, tout en guettant mon téléphone.
Thomas : 21 heures, sur le parking de la place du centre, côté pharmacie …
Mais il est fou, place du centre, je suis sûre qu’il connaît tout le monde et moi je connais du monde
aussi. Pourquoi devrions-nous nous cacher en même temps ? Nous allons simplement boire un verre. Que
vais-je dire à Hugo ? Que je vais boire un verre avec des collègues… Non, je vais lui dire que je vais
chez Aurélie. Dans ce cas, il faut que j’appelle Aurélie. Je ne devrais pas la mêler à tout ça. Non, je ne le
ferai pas. Je suis incapable de réfléchir correctement.
Lorsque j’arrive chez nous, Hugo n’est pas rentré. J’en profite pour me changer maintenant. J’enfile
une robe élégante, elle est noire, avec un lacet qui sert de ceinture, le nœud retombe juste sous la hanche.
Elle est légèrement décolletée, elle m’arrive à mi-cuisses. Je mets des bas et des escarpins noirs avec
une boucle argentée. Je change de collier, j’en mets un qui tombe plus bas. Pour finir je réfléchis à ma
coiffure, attachée, ou détachée ? Lisse ou bouclée ? J’opte pour une coiffure plus naturelle, je mets une
partie sur le côté, que je fais légèrement gonfler.
Il est dix-neuf heures, Hugo n’est toujours pas rentré. C’est étonnant. Une demi-heure plus tard,
j’entends sa voiture. J’enfile un gilet pour couvrir ma tenue et ne pas paraître trop apprêtée. Hugo ouvre
la porte et me demande précipitamment :
— Tu sors ?
— Bonsoir Hugo.
— Bonsoir, tu sors ? Relance Hugo plus fermement.
Soudain, je réalise que ce n’est pas une bonne idée de sortir, je n’ose pas lui dire oui.
— Tu rentres tard.
— Oui, comme toi en ce moment.
La situation est tendue, il n’est jamais comme ça. Soit je sors au risque de tout foutre en l’air avec lui,
soit je reste et on essaie d’arranger les choses. Hugo insiste :
— Tu ne m’as pas répondu. Est-ce que tu sors ?
— Pourquoi utilises-tu ce ton avec moi ?
— Quel ton Alyssa ? Je viens de te demander en mariage, tu me fuis, tu me laisses à peine te toucher.
Je rentre, je te crois sur le point de sortir, donc pour la dernière fois, est-ce que tu sors ? C’est oui ou
non, ce n’est pas si compliqué.
— Non, je ne sors pas.
— Tant mieux, je ne l’aurais pas supporté. Il est temps qu’on discute.
— Je n’ai pas envie de parler pour le moment. J’ai envie d’être tranquille.
— Oui tu veux être tranquille tout le temps en ce moment, au lit je ne dois plus te toucher non plus.
— Mais non, je ne veux pas qu’on se prenne la tête.
— On ne se prenait jamais la tête avant, mais depuis un mois, on ne fait que ça. Sois comme avant, et
il n’y aura pas de raison de se disputer.
— Putain Hugo, j’en ai marre! Tu ne te rends pas compte. Je sais que je suis plus distante, mais c’est
toi qui m’as rendue comme ça.
— C’est trop facile de dire que c’est de ma faute. C’est ton boulot ! Tu ne penses qu’à ça maintenant.
Je ne souhaite plus que tu deviennes cadre. Je voudrais fonder une famille avec toi et je ne sais pas
comment on le pourrait si tu n’es jamais là.
— Nous y revoilà, tu veux fonder une famille maintenant, et je dois te suivre quand tu le décides !
— Ne crie pas. Tu voulais des enfants, qu’est-ce qui t’en empêche maintenant ? Ton boulot ? C’est
pathétique.
— Je suis pathétique ?
— Non cette situation l’est.
— Je veux devenir cadre, tu n’as pas à décider pour moi. C’est ma carrière.
— Tu veux dire pour nous ? Il s’agit de notre avenir Alyssa.
— Non, tu as bien entendu, je décide de ce que je veux professionnellement. Je ne l’ai jamais fait
pour toi. Tu ne le feras pas pour moi.
— Alors nous avons un problème si tu persistes avec cette idée.
— Oui, ce n’est pas le seul problème que nous avons Hugo !
— C’est-à-dire ?
— Des enfants, j’en voulais plus que tout, j’étais prête vraiment prête, mais maintenant, je ne sais
plus si j’en veux encore avec toi ! Dis-je avant d’éclater en sanglot devant lui.
Il saisit le vase qui est posé la table et le lance contre le mur, celui-ci explose en morceaux. Il passe
son bras sur le meuble de l’entrée et balaie tout ce qui s’y trouve d’un seul geste. Il part en claquant la
porte, je l’entends démarrer sa voiture. Je ne cherche pas à le retenir, je ne vois pas pourquoi je le ferais.
Je pense que nous avons besoin de temps tous les deux.

Chapitre 14

Je rassemble mes affaires de toilette, je prends des vêtements pour une semaine au moins. Je prends
quelques accessoires indispensables, mon mp4, mon ordinateur, mon chargeur de téléphone, des affaires
pour le boulot… Je fais ma valise en vidant mon corps de toutes ses larmes. Dans l’entrée, je ramasse le
cadre qu’il a cassé, une de nos premières photos et je le repose sur le meuble. J’hésite un instant, puis me
décide à lui laisser quelques mots.
« Nous avons besoin de temps chacun de notre côté pour réfléchir à tout ça. Alyssa. »
Je me calme et quand j’arrive à m’arrêter de pleurer, je sors de la maison. Il est presque vingt heures
trente, je vais aller me trouver une chambre d’hôtel, je n’ai aucune envie d’aller chez mes parents ou chez
mes sœurs. Je me dirige vers le centre-ville, à la recherche d’un hôtel convenable. Je me souviens de cet
hôtel « L’escale » qui est légèrement en retrait du centre et qui a très bonne réputation. Je me gare devant,
je patiente un moment avant d’y aller, je n’en reviens pas d’en être arrivée là. En regardant l’heure, je
réalise que je devais retrouver Thomas dans dix minutes. Oh, j’aurais dû l’avertir avant, il est
probablement sorti déjà. Je lui envoie un texto rapidement :
J’ai un souci pour ce soir, je ne peux pas venir.
Je reçois une réponse : Pas de problème. À demain.
Lorsque j’entre dans le hall de l’hôtel, je suis très surprise du décor, c’est très élégant, très lumineux,
un grand comptoir en demi-cercle se trouve face à moi. Je m’en approche, un jeune homme m’accueille
immédiatement et prend ma réservation, lorsqu’il me demande la durée, je reste évasive et précise que
j’ai besoin d’une nuit dans un premier temps. Il regarde mes valises et doit se demander ce que je
trimballe. Les escaliers sont immenses, un tapis rouge descend le long des marches, il y a des lustres
partout, je n’ai jamais vu de pareil décor.

Je ne dois rien régler ce soir, ma carte ne sera débitée qu’à mon départ, mais elle a été enregistrée. Je
jette un œil sur la tarification, je ne sais pas quel type de chambre m’a été attribué, mais les prix vont de
cinquante à quatre-vingts euros pour une chambre simple.
Le réceptionniste me tend la clé, ma chambre porte le numéro vingt et un, il m’indique l’ascenseur, je le
suis. Ma chambre est au premier étage, lorsqu’il ouvre la porte, je découvre une pièce magnifique. Les
couleurs me frappent, en bas tout était lumineux, ici tout est plus sombre.
Les murs sont marron glacé avec quelques nuances crème, comme le parquet. Le mobilier est assorti, les
rideaux sont rouges, ce qui rappelle les coussins rouges disposés sur le lit. Il y a un espace salon avec
télé, petit canapé crème recouvert de coussins rouges, une petite table basse en verre. L’espace lit est
superbe, il y a deux tables de nuit en verre sur chacune repose une lampe de chevet, ce sont de belles
sphères blanches imposantes.

La salle de bain contraste avec le reste, elle est très lumineuse, elle comporte une douche ainsi qu’une
baignoire encastrée dans le sol, le sol est recouvert d’un parquet très clair, il y a juste un meuble où deux
vasques sont posées au-dessous des miroirs. La décoration est douce, il y a deux échelles en bois sur
lesquelles sont disposées les serviettes. Il précise que la baignoire fait jacuzzi. Cette fois c’est certain,
c’est une suite ! Je vais me ruiner, je n’ai pas dû voir les bons prix. La visite se termine par les toilettes.

Je ne me retiens plus et lui demande combien coûte une nuit dans cette chambre. Il me répond quatre-
vingts euros, j’ai un peu de mal à le croire. En temps normal, j’aurais trouvé ça trop cher, mais là, je
m’attendais à tellement plus, que je la trouve abordable. Après remise des clés, je me retrouve seule.
Mon portable vibre, je le sors de ma poche et voit le nom d’Hugo s’afficher sur l’écran. Je ne décroche
pas, je peux lire sept appels en absence. Je jette pour téléphone sur le lit, il n’est pas question que je
cède. Le téléphone vibre à nouveau… Je craque :
Hugo cesse de m’appeler, je ne vais pas te répondre. J’ai besoin de temps, je dors chez une amie.
Alyssa.
Hugo : Je veux savoir où tu es ? Rentre à la maison, je te laisserai la chambre. Reviens je t’en prie.
Je regrette ce que je t’ai dit, je t’aime.
Il me fait mal au cœur, je sais qu’il doit être très mal. Je lui envoie : j’éteins mon téléphone, je vais
dormir. Alyssa.
Je mets mon téléphone en veille avant de changer d’avis et de rentrer à la maison. J’éteins la lumière
et me jette sur le lit.
Je suis réveillée par l’alarme de mon téléphone, il est sept heures. Heureusement que je ne l’avais
pas désactivée, car hier soir je ne me souviens pas m’être endormie. Je suis toute habillée sous les draps,
il me faut un certain temps pour réaliser où je suis et surtout pourquoi je suis là. Je prends une tenue et
vais me glisser dans cette fameuse baignoire encastrée, c’est la première fois que j’en vois une de mes
propres yeux. Je passerais bien plus de temps ici, mais il faut que je me dépêche si je ne veux pas être en
retard au travail.
Je me maquille un peu plus que d’habitude pour essayer de cacher mes yeux gonflés. J’hésite à rallumer
mon portable, je le fais quand même. J’ai des messages et des appels manqués.
Hugo ce matin : Chérie, j’ai passé une très mauvaise nuit sans toi, j’espère que tu rentres ce soir,
pour que l’on puisse reparler de tout ça. Je voudrais m’excuser pour hier soir. Hugo.
Je n’ai pas envie de répondre, mais son message me touche beaucoup. J’arrive un peu plus tôt au
travail, je ne souhaite pas croiser mes collègues cadres à huit heures. En arrivant au bureau, je me prends
un café pour commencer la journée, j’ai un mal de tête qui ne cède pas malgré les cachets. Ce matin, nous
avons un médecin intérimaire dans le service, je lui présente le service, l’équipe et lui explique le
fonctionnement. L’équipe ne semble pas en confiance avec lui, il ne communique pas beaucoup. Je reste
auprès d’eux toute la matinée.

Ce midi, je ne mange pas, je n’ai pas d’appétit, je vais juste prendre un cappuccino et je vais faire un
tour dehors. Vers midi et demi, je me surprends à surveiller mon portable. Treize heures, il n’a toujours
pas envoyé de message, c’est probablement à cause d’hier soir. Je vais peut-être en envoyer un dans ce
cas :
Je suis désolée pour hier soir.
Dix minutes s’écoulent avant que j’obtienne une réponse, j’étais persuadée qu’il ne répondrait plus :
Pas de problème, je te l’ai dit.
Je pense qu’il est fâché. C’est sûrement mieux ainsi. Je sèche mes larmes encore une fois. En
retournant vers l’hôpital, je l’aperçois, j’appréhende de le croiser, car depuis lundi soir, il n’y a pas eu
de face à face, seulement la réunion et nos messages…
Il avance droit vers moi, je ne vais pas pouvoir l’éviter. Je lève à peine les yeux et lui fais un signe
de tête accompagné d’un bonjour discret. Il marque une pause à ma hauteur.
— Bonjour Alyssa.

Chapitre 15

Je ne m’arrête pas devant lui, je suis au bord des larmes. Je m’enferme directement dans mon bureau.
Mon portable vibre, c’est encore lui : Un souci ?
Il doit faire allusion à hier soir. Je lui écris: Non.
Trente secondes plus tard. Thomas : Tu as mangé seule ?
Je n’avais pas d’appétit. Je n’ai pas mangé.
Thomas rédige vite ses textos : Pourquoi, qu’est-ce qui ne va pas ? Il est drôlement curieux.
Je n’avais pas faim. Voilà, pas besoin d’en dire plus.
Thomas : Je passe te voir ce soir.
Oui bien sûr, comme l’autre soir. Je vais lui préciser : Comme mardi soir… Ça va l’agacer je pense.
Thomas : Non, pas comme mardi. Sois prête à 17 heures, je passe te chercher.
Me chercher, mais pour aller où ? Me chercher ?
C’est quoi ce cirque ? Un autre rendez-vous ?
Dans l’après-midi, je guette mon portable, j’ai espoir d’une réponse, mais rien. Seize heures, un
message d’Hugo : As-tu eu mon message ? Je t’aime. Hugo.
Je ne vais pas le laisser se torturer l’esprit : J’ai eu ton message, je ne rentre pas ce soir, je veux
plus de temps. Prends soin de toi. Alyssa.
Il est presque dix-sept heures, je vais aux toilettes, m’arranger un peu. Remettre une touche de rouge à
lèvres, un léger trait de crayon noir. Je tire un peu sur ma jupe, pour qu’elle ne paraisse pas trop courte.
Elle a tendance à remonter cette jupe-là. En sortant des toilettes, Thomas est là, dos à moi, il est assis
dans mon bureau. Un peu de courage Aly, sois naturelle.
— Bonjour. Dis-je la première.
— Alyssa, je t’attendais. Tu es prête ?
— Pour ?
— Tu poses trop de questions. Tu verras bien.
Nous sortons sans un mot, nous empruntons le chemin de lundi soir, avant d’arriver devant le salon de
thé.
— Un verre ? Demande-t-il, avec sourire délicieux.
— Oui.
— Ne t’en fais pas, je ne te ferai pas courir ce soir pour repartir.
Un instant nous rions, ce qui détend un peu l’atmosphère. Nous prenons place à la même table que
lundi, nous commandons la même chose.
— Vous vouliez me parler hier soir ?
— Tu peux retourner en pneumologie en septembre, j’ai vu avec la direction, donc pour tes congés
pas de soucis.
— Ah c’était pour ça.
— Oui ? Tu as l’air étonnée ?
— Non, non, je… c’est très bien.
Comment dire, je ne vais probablement pas avoir besoin de congés en septembre, puisqu’il n’y aura
sûrement aucun mariage, donc pas de lune de miel.
— Et je voulais m’assurer qu’il n’y avait aucun malentendu par rapport à lundi soir, car tu n’es pas
revenue au self depuis.
— Ah non, ça n’a rien à voir avec ce qui s’est passé, enfin je veux dire avec notre rendez-vous, enfin
vous avez compris…
Il se racle la gorge et reprend plus froidement.
— Ce n’était pas un rendez-vous Alyssa, il n’y a pas de problème.
Et voilà, il faut que j’apprenne à me taire, il pense que j’imagine que nous avons eu un rendez-vous,
genre comme un rencard. Je n’aurais pas dû accepter de venir avec lui ce soir.
Je continue de penser qu’il s’agit plus ou moins d’un rendez-vous. Je ne vais pas me gêner pour le
mettre mal à l’aise comme il le fait avec moi.
— Vous venez souvent avec vos collègues boire un verre ici ?
Il semble étonné de ma question, mais ne se laisse pas déstabiliser.
— Non absolument pas.
— Ah.
Donc j’ai raison, s’il le faisait avec tout le monde… Il interrompt ma réflexion.
— En revanche, nous allons dans d’autres endroits.
— Je vois, je vais y aller Thomas. Dis-je avec déception.
Mince, mais qu’est-ce que je fais là ?
— Ce soir, ce n’est pas moi qui mets fin à notre rendez-vous.
Notre rendez-vous ? Il m’agace, chef ou pas chef, je vais lui demander ce qu’il me veut.
— Notre rendez-vous ? Finalement il s’agit de ça ? Lui dis-je d’un ton provocateur.
— Oui ce soir, mais lundi ce n’était pas un rendez-vous. Affirme-t-il en plongeant ses yeux
magnifiques dans les miens.
— Ah bon ? Qu’elle est la différence avec lundi ?
— Lundi soir, nous sommes venus ici, faute d’avoir pris quelque chose à la cafétéria. C’était
improvisé, alors que ce soir, c’était planifié.
— Oh, je vois. Vous analysez vraiment tout. Lui dis-je en riant de façon incontrôlée.
— Qu’est-ce qui vous amuse Alyssa ?
— J’analyse tout moi-même. Par exemple, je me demande pourquoi vous me dites « vous » seulement
quand je pense vous avoir contrarié.
Il fallait que je le dise ! Au sourire de Thomas, j’entrevois enfin une faille dans son jeu. Il se contente
de m’adresser un sourire auquel je réponds. Après quelques secondes, ses dents blanches apparaissent
derrière son sourire grandissant. Oh, son sourire est si beau, c’est à lui qu’il doit son pouvoir de
séduction. Je profite de cet instant, je n’ajoute plus rien, je ne veux pas qu’il arrête de me sourire. Je sens
mon pouls s’accélérer, ma respiration devient plus profonde. Thomas tapote des doigts sur la table, je
n’ai qu’une envie, toucher ses doigts. J’aimerais approcher ma main de la sienne, j’aimerais la caresser,
la rapprocher de moi.
— Qu’est-ce qui n’allait pas ce midi Alyssa ?
— Ce midi, je n’avais pas faim simplement.
— Tu es sûre ?
— Oui, j’en suis certaine.
Nous bavardons un moment sur le travail, je regarde ma montre, il est presque dix-neuf heures, le
temps passe trop vite quand je suis avec lui, il va vouloir rentrer. Il a remarqué mon geste.
— Il est tard, on t’attend Alyssa.
— Non, personne ne m’attend. Dis-je sans réfléchir.
— Personne ?
— Enfin pas vraiment, non pas ce soir… Je suis à l’hôtel pour quelques jours.
Thomas se fige quand je lui parle de l’hôtel. Pourvu qu’il ne me pose pas de question, la situation est
suffisamment embarrassante.
— C’est pour cette raison que ça n’allait pas ce midi Alyssa ?
— Oui, on peut dire ça. Enfin, je n’aurais pas dû vous parler de ça. Je ne veux pas vous embêter avec
mes histoires.
— Tu ne m’embêtes pas du tout, je suis désolé que tu…
— Que je sois sur le point de me séparer, alors que l’on parlait de mariage ?
— Parfois le mariage vient bouleverser les choses, mais je suis sûr que tout va s’arranger.
— Je n’en suis pas si sûre, je m’en rends compte seulement aujourd’hui…
Les mots me manquent, je ne suis pas certaine de pouvoir en aligner plus sans m’effondrer. Thomas
semble s’en apercevoir, il se lève et vient se placer plus près de moi. Il s’assoit à quelques centimètres
de moi, sa cuisse frôle la mienne. Je sais que ce que je ressens est malsain, mais ça me procure un
sentiment de réconfort de le savoir si près. Il approche sa main au-dessus de la mienne qui se trouve sur
la table et me demande la permission d’un simple regard. J’acquiesce. Il dépose ses doigts lentement sur
les miens. Il superpose sa main à la mienne, le contact est prudent, timide. Nos mains s’effleurent à peine,
mais c’est un contact délicieux.

Chapitre 16

Je détourne légèrement la tête dans sa direction, en croisant son regard, il interrompt aussitôt le
contact et ôte sa main de la mienne, laissant ma main tremblante. Je joins mes deux mains sur mes cuisses,
j’enveloppe d’une main la main qu’il a touchée, comme pour retenir le souvenir de son geste. Thomas me
regarde et entrouvre les lèvres :
— Ça va ?
— Oui, merci. Je pense que je vais rentrer à présent.
— Tu rentres à l’hôtel ?
— Oui.
— Tu es à quel hôtel ?
— Je suis à L’escale.
— Très bon choix.
J’ai dû insister pour pouvoir payer nos consommations ce soir, mais j’y suis parvenue. Nous papotons
plus détendus en rejoignant nos voitures, nous échangeons quelques mots et nous nous souhaitons une
bonne soirée.
En arrivant sur le parking de l’hôtel, je me sens désespérément seule, je n’ai pas envie de monter dans ma
chambre. J’hésite un court moment à envoyer un message à Hugo, mais je me ravise. En arrivant dans la
chambre, je constate que le ménage a été fait. C’est embarrassant de savoir que quelqu’un est venu et
aurait pu fouiller dans mes affaires personnelles. Je me décide à appeler Lucie et à tout lui raconter, enfin
juste la partie concernant Hugo.

Elle ne comprend pas pourquoi je suis partie de la maison, pourquoi je m’éloigne, elle ne réalise pas
que mes sentiments ont changés pour lui, malgré ce que je lui ai expliqué, sur le fait d’avoir attendu pour
que notre relation de couple évolue. Elle reste persuadée que tout va s’arranger, c’est ce qu’elle
m’affirme avant que je raccroche. Je suis soulagée d’avoir pu parler de cette situation à ma sœur, même
si je savais bien qu’elle ne comprendrait pas.
J’ai un message d’Hugo :
Chérie, je m’inquiète. Je t’aime. Rentre à la maison, je t’en prie.
Je voudrais lui dire de ne pas s’inquiéter mais je ne peux pas lui dire ça. Moi : je ne rentre pas, je
dois réfléchir.
Mon téléphone sonne dans la minute qui suit l’envoie de mon message, je décroche après avoir pris
une inspiration profonde.
— Oui ?
— Chérie, mais où es-tu ? J’ai besoin de te voir.
— Hugo, je ne vais pas rentrer maintenant… Nous n’avons pas eu le temps de réfléchir…
— Mais réfléchir à quoi ? Je t’aime bordel, si tu m’aimes, tu dois rentrer.
— Je veux devenir cadre et tu ne le souhaites pas.
— Mais je ne t’en empêcherai pas si tu le souhaites vraiment.
— Laisse-moi un peu de temps Hugo.
— Dis-moi ce qui ne va pas, qu’est-ce qu’il y a ? Tu ne m’aimes plus ?
— Je…
— C’est ça ?
— J’ai douté de mes sentiments ces derniers temps, mais je sais que je t’aime.
— Je ne comprends pas, tu doutes, tu ne m’aimes plus comme avant ?

Nous pleurons tous les deux à présent, je m’en veux de le faire souffrir, mais je ne peux pas revenir
tant que je n’aurai pas les idées claires. Après quelques minutes sans pouvoir parler, je lui demande
pardon.
— Pardon ? Réplique Hugo.
— Pour tout ça, j’ai des torts dans ce qui nous arrive.
— Ne me dis pas ça ! Ne fais pas comme si nous deux… Ça n’est pas terminé Alyssa !
— Je ne sais pas, je ne sais plus…
— On peut arranger les choses, on va se marier mon amour.
— Hugo, je vais aller me coucher.
— Où es-tu ? Dis-le-moi s’il te plaît.
— Je suis à l’hôtel.
— Tu rentres demain ?
— Non, je ne pense pas. On en reparle demain. Bonne nuit.
— Bonne nuit Alyssa.
Il est anéanti et le pire c’est que j’ai envie de rentrer de le savoir comme ça. Je devrais tout oublier, vivre
l’instant présent et me marier avec lui. Il me rendra heureuse. Est-ce que je l’étais vraiment ? Je veux dire
épanouie… j’avais le confort de la vie à deux, mais pas d’engagement, je craignais qu’il me quitte un
jour, maintenant qu’il m’offre la sécurité, je le fuis. Qu’est-ce qui déconne chez moi ?
Je n’ai pas tellement envie de passer le week-end ici, pourtant il n’est pas question d’aller chez une de
mes sœurs ou chez mes parents. Dois-je rentrer chez nous ? J’y réfléchirai demain, là je suis trop épuisée.
Mon portable vibre, un nouveau message :
J’aurais dû proposer de vous accompagner. Ça va ? Bonne nuit alyssa. Thomas.
Il s’inquiète, je regrette de lui avoir fait part de la situation avec Hugo, je ne dois pas mélanger vie
privée et vie professionnelle. Je doute que la manière dont il a posé sa main sur la mienne ce soir était
professionnelle… Sa main était si délicate, si douce, j’en frissonne encore. Mais si j’étais sa femme et
qu’il se comportait comme cela avec une autre femme, je ne lui pardonnerai pas.
Moi : Je vais bien. Il n’était pas nécessaire de me raccompagner. Bonne nuit thomas.
C’est tellement surprenant de le voir agir de la sorte, je n’aurais jamais pensé qu’il puisse être un
confident ?
Thomas : Je suis sûr que ça ne va pas… si je peux faire quelque chose…
Euh... oui, j’aimerais que tu sois près de moi toute la nuit.
Je réponds : non. Vous êtes mon chef. Je n’aurais pas dû partager les détails de ma vie privée.
Thomas : Seulement ton chef ? C’est comme ça que tu me vois…
Non, c’est une blague ! Il n’a pas écrit ça ? Je relis dix fois de suite son texto. Je vais me réveiller, ce
n’est pas réel. Je ne me réveille pas, même en me pinçant très fort. Je vais lui demander ce qu’il entend
par son message. Non, j’ai compris, sa femme a dû lire nos échanges. Que dois-je faire ? Je n’ai personne
à qui parler de Thomas. Il faut que j’en parle à quelqu’un, mais pas à une collègue, c’est bien trop risqué.
Je devrais en parler à Emma, c’est ma meilleure amie, mais je sais qu’elle tient beaucoup à Hugo aussi,
elle va peut-être me juger. Mon portable m’alerte à nouveau, un message vient d’arriver, je vacille sur
mes jambes à l’idée de lire ce qu’il m’envoie. Réponds-moi.
Je ne sais pas quoi faire, je dirai que je dormais quand il a envoyé ses messages. Non, je lui parlais
deux minutes plutôt. Je suis sûre que c’est sa femme, jamais il ne m’aurait demandé cela. Mon portable
m’avertit encore par le petit point rouge lumineux qui clignote, il ressemble à un avertissement « attention
danger ». Je cours après un homme marié, pourtant c’est lui qui me relance : Je suis un collègue avant
tout. Une personne qui peut aussi être là, si tu as besoin avant d’être ton chef comme tu le dis.
D’accord, il parle d’amitié en fait, il ne fait pas du tout référence à autre chose. Je trouve ça très
gênant tout de même.
Moi : Quel genre de chef êtes-vous ? Vous emmenez régulièrement vos collègues boire un verre
après le travail et vous êtes un parfait confident pour elles, c’est ça ?
Il va me tomber dessus demain au travail, j’y suis allée un peu fort là.
Thomas : Je n’ai jamais prétendu emmener régulièrement mes collègues « femmes » boire un verre,
j’ai précisé le faire ailleurs que, là où nous étions au moment où vous me l’avez demandé. Je n’étais le
confident de personne au travail jusqu’à ce soir où je pensais le devenir parce que vous en aviez
besoin. Et oui, j’ai utilisé le « vous », sans doute parce que comme le dit votre analyse, je dois être
contrarié. Bonne soirée.

Chapitre 17

Je déglutis difficilement. J’ai la vue brouillée par mes larmes, d’abord je me fâche avec Hugo et
maintenant Thomas. Le véritable problème c’est moi, j’ai flashé sur lui, donc je fais comme s’il
s’intéressait à moi, je suis jalouse quand il s’adresse à d’autres filles et je me permets de penser qu’il est
infidèle à sa femme. Alors que je suis la seule infidèle dans cette histoire. Je refuse de le croiser au
travail après ce malentendu, si je m’écoutais, j’écrirais ma démission.
Incapable de penser normalement, j’ouvre la porte du minibar qui se trouve sous la télévision et
j’agis pour une fois, sans réfléchir en saisissant la bouteille de vodka. Je bois d’abord une première
gorgée, le passage brûle le fond de ma gorge, m’arrachant une grimace. Puis après quelques gorgées, la
brûlure en devient presque délicieuse. J’ai la sensation désagréable de vivre dans le pêché.
La bouteille de soixante-dix centilitres est à présent vidée de moitié. Je n’ai pas l’habitude boire,
j’espère que je ne vais pas être malade. Je relis les messages de Thomas, il est presque minuit, je ne
devrais pas lui répondre, mais je n’ai pas les idées claires et je n’ai pas envie d’essayer de me raisonner.
Moi : Je suis sincèrement désolée. Je comprends que vous soyez contrarié. Je regrette ce que j’ai
dit, mais je regrette surtout de vous avoir rencontré…….
J’envoie le message, puis je le relis et réalise que j’ai envoyé le texto à minuit ! Je dois m’excuser.
Moi : Excusez-moi chef d’avoir envoyé ce message à minuit. Vous remarquerez que j’ai mis
« vous » aussi car je suis contrariée.
Je n’aurais pas dû préciser que j’étais contrariée, de plus je le vouvoie tout le temps, il faut que je lui
précise.
Moi : Inutile de vous dire que j’emploie le « vous » car je suis contrariée, puisque je ne vous dis
pas « tu ». « tu »suivi de chef ce serait bizarre ? Vous ne répondez pas, vous devez dormir. Pas moi, je
sens que je vais le regretter demain, en fait je le regrette déjà … oui j’ai la nausée…
Une sensation de chaleur me monte au visage, je sens comme des vagues me retourner l’estomac,
c’est pire que la grande marée… Je vais vomir. Où sont les toilettes ? Neuf heures trente, quand j’ouvre
les yeux. Ce n’est pas possible. J’ai dormi toute habillée sur le lit, en fait je crois avoir passé la moitié
de la nuit sur le sol des toilettes et de la salle de bain. Je sais que j’ai vomi une bonne partie de la nuit. Je
vais appeler aux urgences, pour prévenir que je serai en retard. Je n’ai même pas de raison valable à
donner. Je prends mon portable, j’ai trois appels en absence, je regarderai après avoir appelé.
— Bonjour c’est Alyssa. Je voulais juste prévenir que j’arriverai dans une heure, j’ai eu un imprévu.
Sandra ne m’a pas posé de questions. Après ma douche, j’espère pouvoir retrouver forme humaine.
Le ruissellement de l’eau fraîche sur ma peau me fait du bien. J’essaie de remettre mes idées en ordre,
pourquoi est-ce que j’ai picolé hier soir ? Ça ne me ressemble pas, je ne bois jamais.
D’abord Hugo, je lui ai avoué avoir des doutes sur mes sentiments et puis Thomas, qu’est-ce qu’il
m’a dit déjà ? Ah oui, je me souviens qu’il n’était pas content, je lui ai fait des remarques déplacées. Tout
à coup, en y repensant, je sais qu’il faut que je relise mes messages, mais je sais que j’ai des raisons
d’avoir peur de le faire. Putain ! Je m’enveloppe d’une serviette et me précipite dans la chambre pour
relire mes messages. Oh mon dieu, je n’ai pas fait ça ?
Mais comment vais-je justifier mon attitude auprès de lui ? Non, non, je suis la dernière des connes.
À minuit, harceler mon chef et si sa femme avait vu ça ! Je ne peux pas aller au travail, en plus j’ai la
gueule de bois.
J’entends frapper à la porte, c’est la femme de ménage, elle doit penser que je suis partie. Je vais lui
demander de revenir plus tard. Je me lève et me prends les pieds dans mes chaussures, je ne parviens pas
à me rattraper et me retrouve à plat ventre sur le sol dans un fracas perceptible à l’étage du dessous. La
porte s’ouvre rapidement, je relève la tête et découvre Thomas face à moi. Qu’est-ce qu’il fait là ?
— Ça va Alyssa ? Lance Thomas affolé en se précipitant vers moi pour m’aider à me relever.
— Oui, mais qu’est-ce que vous faites là ?
Oh mais je suis à poils bordel ! Je ne peux pas être plus humiliée je crois. Je me relève essayant de
couvrir le maximum de ma nudité devant lui. Je remercie le ciel d’avoir gardé ma serviette sur moi dans
ma chute.
— Thomas, je sors de la douche, je ne suis pas habillée. Puis-je vous demander deux minutes ?
— Oui, je vais attendre dans le couloir.
— Non, ce n’est pas nécessaire. Je vais dans la salle de bain.
Je prends la première chose que je trouve, des sous-vêtements, un jean noir et un chemisier rouge et
je cours me réfugier dans la salle de bain. Je ne réalise pas ce qui est en train de se passer… Thomas que
j’ai harcelé cette nuit alors que j’étais saoule est là, il m’a trouvée presque nue sur le sol. J’ai honte,
tellement honte. Je m’habille expressément, puis j’attrape ma trousse de maquillage, je dois cacher un peu
l’horreur.
Je prends une grande inspiration avant d’ouvrir la porte de la salle de bain. Je trouve Thomas en train
de faire de l’ordre dans la chambre. Il ramasse la bouteille de vodka pour la poser sur la table, il s’arrête
en me voyant. Je balaie du regard le sol à la recherche de mes chaussures, mais ne les localise pas. Il se
baisse et les ramasse à côté du lit.
— C’est ça que tu cherches ? Je les ai déplacées pour éviter que tu te prennes les pieds dedans.
— Oui, merci. Dis-je confuse. J’ai appelé au travail, j’ai prévenu que j’avais du retard. Je suis
sincèrement désolée, il ne fallait pas vous déplacer.
— Je me suis déplacé en voyant que tu n’étais pas là à plus de neuf heures alors que tu es toujours là
vers huit heures, je me suis inquiété vu les messages…
— Oh non, les messages, j’ai tellement honte. Je suis impardonnable, j’étais comment dire, pas dans
mon état normal.
— Est-ce à cause de cette bouteille ? Ajoute-il en pointant du doigt la bouteille qu’il vient de
ramasser.
— Oui, je ne bois jamais, je ne sais pas ce qui m’a pris et j’ai perdu le contrôle de la soirée ensuite.
— Je vois. Tu te sens comment maintenant ?
— Mal, vraiment j’ai honte. J’ai relu les messages et je sais l’heure qu’il était.
— Non, je voulais demander comment tu te sentais par rapport à…
— À ma cuite ?
— Oui, on va dire ça.
— J’ai un mal de tête pas possible, j’ai l’impression d’avoir trois grammes dans le sang, j’ai la
nausée. Visiblement je ne suis pas encore très stable sur mes jambes, comme vous avez pu le constater en
entrant.
— Excuse-moi d’être entré comme ça, mais j’ai entendu le vacarme et tu ne répondais pas.
— C’est de ma faute, je n’ai pas verrouillé hier soir et puis après mes messages, vous n’avez pas à
vous excuser. C’est moi qui suis désolée.

Chapitre 18

— Disons qu’après les premiers échanges, j’étais agacé, j’ai éteins mon portable, donc l’heure ne
m’a pas dérangé. En revanche, en l’allumant ce matin et en voyant ce que tu avais écrit, j’ai compris que
tu avais bu et je m’en suis voulu de l’avoir éteint.
— Non, ce n’est pas de votre faute. J’ai déconné, je ne sais pas comment justifier mon comportement.
— Tu as dit ce que tu pensais.
— Non, je me suis trompée, j’ai mal interprété notre conversation.
— Alyssa, je ne suis pas du genre à aller boire un verre le soir avec d’autres femmes de l’hôpital, si
c’est ce que tu as cru.
— Non, ne vous justifiez pas. J’étais…
J’étais jalouse, c’est ça, j’ai voulu me venger. Il est venu voir si j’allais bien après tout ce que j’ai
fait. Il avait l’air vraiment inquiet en entrant.
Il porte une chemise bleu clair avec des carreaux à peine perceptible, ça lui va bien, pourtant ce n’est
pas le genre de chemise que j’aimerais sur un portant. Je crois que tout lui va bien.
— Tu ne vas pas venir travailler comme ça.
— Non, je veux venir. J’ai déjà appelé en plus.
— Non, tu n’es pas en forme, en plus tu ne peux pas conduire.
— J’ai un rendez-vous à onze heures et demie avec un médecin intérimaire qui n’est jamais venu. Je
veux vraiment être présente.
— Très bien, je vais te conduire. Mais après ton rendez-vous, je te ramène pour que tu dormes. Ce
n’est pas négociable.
— Merci. Excusez-moi pour tout ça.
— Tu as des soucis, on a tous le droit de craquer. J’espère que tu vas te ressaisir.
— Je vous promets de ne plus vous importuner. Je vais même supprimer votre numéro pour être sûre
de ne jamais recommencer.
— Ne le supprime pas, ce n’est pas nécessaire.
Il a dit ça sur un ton si sérieux, presque grave que je n’insiste pas. Je prends ma veste et suis Thomas.
Je n’en reviens pas, je vais monter dans sa putain de voiture ! Même en rêve, je n’aurais pas imaginé ça.
J’ai tellement bu hier soir, que mes émotions sont bloquées. Je crois que c’est une bonne chose, j’aurais
été incontrôlable sinon tellement je suis excitée.
Il m’ouvre la portière, je monte sur le siège avant et alors qu’il fait le tour pour s’installer, je réalise
que je suis à la place de sa femme. L’idée ne m’excite absolument plus. Je ne sais pas où poser mes
mains, où posent-elles les siennes ?
Je me retiens presque de sentir le siège en cuir, pour tenter de connaître son odeur. Si seulement les
circonstances pouvaient être différentes, s’il n’avait pas dû me conduire parce que j’étais l’ivrogne d’un
soir. Quand j’y repense, la seule occasion que je n’aurais jamais de monter dans sa voiture en sa
compagnie…
— Elle est superbe votre voiture.
— Merci.
— Je suis vraiment embarrassée Thomas, j’ai même pensé que je devrais vous donner ma démission
après ce que j’ai fait.
— Tu n’as rien fait de mal, tu n’as pas à te sentir coupable comme ça. Je te l’ai dit mon téléphone
était éteint et le contenu des messages n’est pas important, tu étais ivre.
— Vous êtes compréhensif, je ne pense pas le mériter.
— Tout va bien. Tu as des circonstances atténuantes, n’en parlons plus.
J’acquiesce. J’ai mal à la tête, je cherche mes lunettes de soleil dans mon sac à main, la lumière
aveuglante me donne la migraine. Je regarde mon téléphone, les appels en absence sont de Thomas. Il a
essayé de me joindre à sept heures et demie et puis deux fois à une heure d’intervalle. Je range mon
téléphone en arrivant sur le parking de l’hôpital. Je devrais descendre ici, je ne veux pas qu’on me voit
sortir de sa voiture.
— Je devrais descendre ici ?
— Non, si quelqu’un te demande quelque chose, tu n’auras qu’à dire que ta voiture est en panne, et
que je suis venu te chercher.
Je peux faire ça, je peux mentir si on me demande ce que je faisais avec le chef. Nous nous garons
près de l’entrée des urgences, je le remercie une fois de plus.
— Je t’accompagne au bureau !
— Ah, d’accord.
Nous marchons côte à côte, il marche doucement, je sais que c’est un effort pour lui, il le fait parce
qu’il sait que je ne suis pas en forme. En arrivant devant ma porte, il m’adresse un sourire gêné :
— Préviens-moi quand ton rendez-vous est terminé, je passerai te chercher pour te raccompagner.
— Non, ce n’est pas la peine.
— Je t’ai dit que ce n’était pas négociable. Ajoute Thomas avant de s’éloigner.
Je rejoins l’équipe pour les saluer et voir s’il n’y a rien de particulier. Sandra me regarde
étrangement et me demande si je vais bien. Je pince un peu les lèvres sans dire un mot. Je lui demande un
antalgique avant que ma tête n’explose. Onze heures et demie arrive vite, la secrétaire me prévient que le
médecin est arrivé. Je vais le rejoindre à l’accueil des urgences.
En entrant dans le hall, je découvre un jeune homme très séduisant. C’est lui l’intérimaire ? Ce jeune
homme est médecin urgentiste ?
— Bonjour Madame Steunou. Je suis Xavier Donis, médecin remplaçant. Enchanté.
— Monsieur Donis, enchantée également. Je vous en prie, suivez-moi, je vais vous faire visiter.
— Vous pouvez me tutoyer.
— Il en va de même pour moi.
Ce garçon me plaît, il a un visage charmant, une voix douce. Je pense que l’équipe va être ravie que
ce soit un jeune médecin pour une fois. Je fais les présentations, force est de constater qu’il fait le même
effet à toutes les filles. Je remarque des clins d’œil qu’elles se font entres elles, elles ne sont pas
discrètes. Pour terminer, je le conduis à mon bureau pour lui donner le planning des gardes prévues ce
mois-ci.
— Il est prévu une garde mardi prochain et une autre le mardi de la semaine suivante.
— Oui, c’est ce que l’on m’avait précisé.
— Est-ce que tu as d’autres questions ?
— Oui, je vais reprendre la route après manger, où est-ce que je peux me restaurer ?
— Il y a une cafétéria à l’entrée de l’hôpital, mais ils ne proposent pas grand-chose, sinon il y a le
self.
— Tu m’accompagnes à la cafétéria ? Tu vas manger aussi ?
— Je ne pensais pas aller manger ce midi en fait.
— Tu peux faire une exception, pour ne pas laisser un jeune médecin perdu dans cet hôpital manger
tout seul.
— Je vais t’accompagner.
Je retire ma blouse et le conduis à l’entrée de l’hôpital. Finalement arrivée devant la vitrine, j’ai
faim.
Les sandwichs me font envie, mais j’ai peur d’être malade si je mange quelque chose. J’ai chaud, je
ne me sens pas très bien.
— Je vais prendre l’air pendant que tu prends ton sandwich.
— Ça ne va pas ? Demande Xavier.
— J’ai juste besoin de prendre l’air une minute.
Je finis à peine ma phrase avant de sentir mes jambes flancher, ma vue devient floue, je vais tomber.
Je cherche un endroit où m’appuyer, mais tout me paraît trop loin. Soudain, la main de Xavier vient me
saisir le bras et c’est à ce moment-là que je me sens partir.

Chapitre 19

Quelques instants plus tard, je réalise que je suis dans ses bras, il me porte, je l’entends demander de
l’aide :
— Un brancard, dépêchez-vous.
— Non, ça va mieux. Je n’en ai pas besoin. Repose-moi.
Il me dépose sur un brancard dans la minute qui suit. Je cherche à me relever, mais je suis vidée de
toutes mes forces. Je perds connaissance à cet instant. Lorsque j’ouvre à nouveau les yeux, je suis
installée dans un box des urgences. Oh non, je n’ai pas fait un malaise au boulot, s’ils apprennent que
j’étais ivre hier soir, je vais perdre le peu de crédibilité qu’il me reste. Le rideau s’ouvre, Sandra entre
avec un verre d’eau, elle est suivie de Xavier.
— C’était pour tester mes réflexes. Demande Xavier sur le ton de la plaisanterie.
— Je vais bien, je suis désolée. Je n’ai pas mangé ce matin, ce doit être ça.
— Nous allons prendre le temps de vérifier tout ça, j’ai demandé un bilan juste pour se rassurer.
Sandra sort prendre ce qu’il faut pour me faire une prise de sang, mais je refuse de rester ici.
— Non, je ne veux pas de prise de sang, ce n’est rien qu’un malaise vagal.
— Un risque de grossesse ? Demande Xavier.
Je m’apprête à répondre, lorsque le rideau s’ouvre, Sandra revient accompagnée de Thomas cette
fois-ci. Oh non, pas lui.
— Monsieur Simon s’inquiétait Alyssa, il voulait prendre de tes nouvelles.
Cette journée est merdique, elle est catastrophique. Xavier relance sa question sur la grossesse, je
deviens écarlate.
— Je ne suis pas enceinte et je ne veux pas de prise de sang Xavier s’il te plaît.
Thomas semble contrarié, il ressort du box sans même m’adresser la parole. Je sais ce qu’il pense, je
n’aurais pas dû venir travailler, maintenant je me donne en spectacle.
Je saisis ma veste avant de me lever du brancard. Je sors du box, ils ont tous les yeux rivés sur moi,
je voudrais ne jamais être venue travailler aujourd’hui. Thomas s’approche de moi.
— Je te raccompagne Alyssa.
Sandra prend un air désolée et nous interrompt :
— Alyssa, Hugo est en chemin.
— Pardon ? Tu as appelé Hugo ? Mais tu aurais dû me demander.
— Oui, mais tu étais inconsciente tout à l’heure.
— Ce n’est pas grave, je te remercie.
Je vais l’appeler et lui dire de ne pas venir, enfin je retrouve mon téléphone. Il a dû rester dans ma
blouse dans mon bureau. Thomas me suit.
— Je savais que tu ne devais pas venir travailler aujourd’hui. Pourquoi tu ne m’as pas appelé comme
convenu ?
— Je ne sais pas. Xavier voulait manger, il a insisté pour que je l’accompagne.
— Xavier ? Le nouvel intérimaire ? Tu l’appelles par son prénom ?
— Oui, comme les autres médecins.
— Les autres médecins, tu les connais depuis plus de cinq minutes.
— Pardon ? Dis-je surprise de sa réaction.
— Rien, qu’est-ce que tu fais ?
— Je cherche mon téléphone, je voudrais prévenir Hugo de ne pas venir, je ne veux pas le voir, je
n’en supporterai pas davantage aujourd’hui.
J’essaie de l’appeler mais il ne décroche pas. Je ramasse mes affaires et accepte de rentrer avec
Thomas, je ne servirai à rien en restant ici, et je ne veux surtout pas voir Hugo débarquer. J’envoie un
texto à Hugo : Je vais bien, ne viens pas.
Nous arrivons devant le hall quand j’aperçois Hugo qui se précipite vers nous. C’est génial,
maintenant Hugo est là…
— Chérie, mais que s’est-il passé ? J’ai fait aussi vite que j’ai pu.
Thomas semble déconcerté, il s’écarte de nous. Hugo se jette presque dans mes bras, me bousculant
en même temps.
— Hugo, je t’ai envoyé un message, je t’ai dit que tout allait bien et je te demandais de ne pas venir.
— Tu ne vas pas bien, tu es pâle bébé. Je te ramène à la maison.
— Non, je ne veux pas rentrer.
— Arrête tout cela a assez duré. Tu as vu dans quel état tu es, je ne te laisserai pas seule une seconde
de plus.
Il me prend la main pour m’attirer vers lui, mais je résiste.
— Alyssa, viens s’il te plaît.
— Je te l’ai dit, je ne rentre pas.
— Je m’en fous, même si tu n’as pas envie, je te ramène.
Cette fois-ci, il me tire sur la main plus brutalement. Je n’ai pas la force pour rester sur place, il
m’attire vers lui. Il ne veut rien entendre. Je jette un regard résigné à Thomas, il s’avance brusquement et
retire la main d’Hugo de la mienne. Il élève la voix sévèrement :
— Elle a été claire je pense, elle ne veut pas rentrer avec vous.
— Excuse-moi, t’es qui ? Lance Hugo.
Oh non, Hugo ne parle pas comme ça à mon chef, pas ici, pas sur mon lieu de travail… Je ne l’ai
jamais vu aussi énervé, je devrais rentrer avec lui pour ne pas le laisser faire un scandale ici.
— Hugo, ne lui parle pas comme ça.
— Pourquoi tu le défends ?
— C’est mon chef Hugo, ne fais pas ça, je t’en prie, pas ici.
— Ca m’est égal qu’il s’agisse de ton chef, si tu veux que je me calme, tu rentres avec moi.
— Très bien, laisse-moi une minute, je vais venir dans ce cas.
— Non Alyssa, tu n’iras pas avec lui, tu n’en as pas envie, il n’a pas à te faire de chantage. Je te
ramène comme c’était convenu.
— En quoi ça te concerne ? Demande Hugo à Thomas avant de se tourner vers moi et d’ajouter…Tu
es venue avec lui ? Tu as passé la nuit avec lui, c’est ça ? Tu me déçois, je ne te pensais pas capable de...
Je suis incapable de parler, les mots ne sortent pas, je n’arrive qu’à pleurer. Je ne peux pas croire
qu’Hugo me parle comme ça, je ne le reconnais pas. Thomas l’interrompt :
— Ça suffit, tu vois bien que tu lui fais du mal. Tais-toi avant de dire des choses que tu pourrais
regretter.
— Mais pourquoi tu parles à sa place ? Tu ne la connais pas, ok ? Je vis avec elle depuis dix ans, je
lui parle comme je veux. Alyssa, putain, tu as couché avec lui ? Réponds-moi. Si tu as fait ça, je ne veux
plus te voir, tu m’entends ?
— Je n’ai pas…
Thomas me colle sa main devant la bouche avant que je puisse finir ma phrase. Il ouvre sa voiture à
distance.
— Alyssa monte dans ma voiture, je ne vais pas le laisser t’humilier de la sorte.
— Non, ce n’est rien, je …
— Je vais foutre mon poing dans la gueule de ce connard Alyssa si tu montes dans sa voiture. Pour la
dernière fois, rentre avec moi chez nous. Merde !
Hugo hurle, si bien que les secrétaires sortent du hall. Thomas leur fait signe de rentrer, mais elles
restent collées à la vitre. Je ne sais plus où me mettre, ni ce que je dois faire. Hugo fait de grandes gestes,
il est effrayant comme ça. Thomas ne va pas pouvoir le raisonner, j’ai peur de l’issue de cette dispute.
— Tu te tapes ma meuf connard ? Tu vas goûter à mon poing si c’est le cas.
— Ta meuf ? C’est comme ça que tu la traites ? Pas étonnant qu’elle soit partie.
Thomas n’a pas dit ça ? Il a tout juste fini sa phrase que le poing d’Hugo part dans sa direction, mais
son poing va cogner la main de Thomas, qui a tout juste eu le temps de se protéger pour éviter le coup. Je
leur crie d’arrêter, mais ils ne m’entendent pas. Xavier sort des urgences à ce moment et leur demande ce
qui se passe.

Chapitre 20

— Et les mecs qu’est-ce qui vous arrive ? Vous êtes adultes, non ? Dit-il en se mettant entre eux deux.
Dieu merci, il est arrivé à temps, il a évité le pire. Je me rapproche d’eux, Xavier me regarde étonné.
— Tu sais ce qui se passe Alyssa ? Ils se battent pour toi, pour savoir qui va te ramener? Si c’est le
cas, je vais me battre avec eux. Lance Xavier sur le ton de la plaisanterie.
— Dégage si tu ne veux pas t’en ramasser une. Lui lance Hugo.
— Oh mec, tu as deux solutions, la première tu te barres et je laisse couler. La deuxième tu restes et
crois-mo, tu regretteras.
Hugo semble hésiter, il me regarde, je le supplie de laisser tomber, il passe sa main dans ses cheveux
et tourne les talons. Il ne se retourne pas et monte dans sa voiture avant de disparaître. Xavier me regarde
à nouveau et me demande si ça va aller avant de s’éloigner.
Je monte dans la voiture de Thomas et m’effondre sans la moindre retenue. Il ne dit rien, je ne le
regarde même pas, j’ai trop de honte.
En arrivant sur le parking de l’hôtel, j’ouvre la portière sans dire un mot. Thomas me rejoint et me
suit jusqu’à ma chambre d’hôtel. J’entre et laisse la porte ouverte derrière moi je me dirige vers le
canapé, je saisis un coussin et plonge la tête dedans. Quelques minutes s’écoulent peut-être avant que la
sonnerie d’un téléphone retentisse, il ne s’agit pas du mien. Il prend l’appel :
« Oui, oui, je sais. Je l’ai raccompagnée. Tout va bien. Autre chose ? Adressez-vous à Cynthia si
vous avez besoin, je n’aurai pas le temps de repasser vous voir, j’ai trop de choses à gérer et je suis sans
cesse dérangé. »
La colère que je perçois dans son intonation me glace, il est furieux après moi. Je le comprends entre
ma folie de la nuit, mon harcèlement et puis la dispute avec Hugo, il a évité une bagarre de peu.
— Je sais que vous êtes furieux contre moi, je ne sais pas ce que je pourrais dire ou faire pour
arranger la situation. Il est normal que je perde mon travail…
Je tente de résister, pour ne pas me remettre à pleurer, mais je sens mon menton trembler, je garde la
tête baissée, les yeux sur le sol. Il s’assoit près de moi et me tend un mouchoir.
— Alyssa. Regarde-moi.
Je ne peux pas lever les yeux, je suis trop humiliée. Il saisit mon menton du bout des doigts et me
relève doucement la tête, je ferme les yeux plus fermement.
— Alyssa, regarde-moi. Oublie une minute qui je suis.
Est-ce que je peux oublier qu’il s’agit de mon supérieur ? J’entrouvre les yeux. Il me regarde avec
tant de délicatesse, de compassion.
— Tu ne vas pas perdre ton travail ! Est-ce que tu veux en parler ?
— Pourquoi êtes-vous si gentil, je n’ai rien fait qui mérite votre compassion. Je ne vous ai causé que
des ennuis depuis hier soir.
— D’une certaine manière, je me sens en partie responsable, car je t’ai laissée seule hier soir, alors
que je savais pertinemment que tu n’étais pas bien. Je ne peux pas faire grand-chose pour t’aider dans
cette épreuve, mais je sais qu’un peu de présence peut rendre les choses moins difficiles. Je vais te
laisser te reposer et pendant ce temps-là, je vais te chercher quelque chose à manger.
— Non, vraiment ce n’est pas la peine. Et vous avez du travail.
— Je n’ai pas envie que tu refasses un malaise si tu ne manges pas et tu as besoin de te reposer. Je
m’absente deux heures et je reviens si tu es d’accord ?
Il me demande la permission de revenir après tout ce que j’ai fait, je ne comprends vraiment pas,
mais j’hoche les épaules pour lui signifier que c’est à lui de décider. Il sourit et prend la clé de ma
chambre dans la main en me la montrant avec insistance, pour me faire comprendre qu’il l’a prend avec
lui. J’attends qu’il sorte pour me mettre sous les draps.

Il est presque quatorze heures, je me mets un réveil dans une heure, comme ça j’aurai le temps de me
préparer avant qu’il ne revienne. Allongée j’ai la tête qui tourne, je me promets de ne plus jamais boire.
Je revis cette scène délirante devant les urgences, Thomas, Hugo et Xavier, lorsque l’alarme de mon
téléphone me réveille, je ne suis plus sûre de ce qui s’est réellement passé. Lorsque j’ouvre les yeux, il
est sept heures. Ai-je tout imaginé ? Ce n’était qu’un mauvais rêve ? Mais vu mon mal de tête et la
bouteille de vodka, je sais que j’ai picolé, vite mes messages. Et merde, j’ai vraiment envoyé tous ces
messages à Thomas. Il n’a pas répondu, avait sûrement éteint son portable, je prie pour que ce soit le cas.

Je prends rapidement ma douche, il faut que je sois à l’heure au travail, je ne dois pas me faire
remarquer. Je n’ai pas grand-chose à me mettre dans ce que j’ai pris. J’enfile une robe noire moulante qui
m’arrive juste au-dessus du genou, j’ajuste la ceinture, avant de relever mes cheveux dans un chignon
improvisé.
Huit heures précises, je suis au bureau, j’ai salué l’équipe mais chaque mot prononcé raisonne dans
ma tête, c’est insupportable. Je me suis forcée à prendre un café, pour éviter le malaise mais j’ai déjà
envie de courir aux toilettes après deux gorgées. On est vendredi, un peu de courage, ce week-end, je le
passerai à dormir et à pleurer. Je me déteste pour avoir envoyé ces messages cette nuit, je devrais
m’excuser mais je n’y parviens pas. Je devrais faire celle qui n’est pas au courant, quelqu’un aurait pu
prendre mon portable ?

Neuf heures, mon portable vibre, est-ce lui ? Il va me réprimander ou me virer. Je jette un œil, quel
soulagement, c’est Hugo : Tu as dit qu’on en reparlait aujourd’hui. Tu peux m’appeler ce midi ? Je
t’aime.
Je vais le rappeler, mais je ne suis toujours pas convaincue de devoir rentrer ce week-end.
Moi : Je te téléphone ce midi. Alyssa

Onze heures et demie, Nadine, la secrétaire me dit que Docteur Donis est là. Ah oui, c’est vrai, le
fameux Xavier de mon rêve et le vrai ne doivent sûrement pas se ressembler. Il pénètre dans mon bureau,
très sûr de lui, il est grand, maigre, blond aux yeux bleus, il est pas mal, mais je n’aime pas les blonds en
général, de plus il fait très sûr de lui.
— Madame Steunou, je suis Xavier Donis, urgentiste.
— Enchantée, je vous en prie, entrez. Je vous laisse déposer vos affaires, je vais vous faire visiter.
Je lui montre les locaux, j’ai juste envie de dormir, il me soule trop avec ses questions, il se la
raconte depuis la première seconde où il est arrivé. S’il me dit encore une fois qu’il vient d’un grand
CHU, je lui dis d’y retourner. Midi et quart, je vais lui clouer le bec s’il continue à débiter autant de
choses dans mes oreilles, putain, j’ai la migraine.
Je m’arrange pour le laisser poursuivre avec le médecin chef du service. Je vais prendre l’air
pendant l’heure de midi, je vais me trouver un banc isolé derrière l’hôpital, je mets mes lunettes de soleil
et ferme les yeux un moment. Mon portable me ramène toujours à la réalité, c’est Hugo qui m’appelle :

Chapitre 21

— Oui Hugo.
— Je suis content de t’avoir au téléphone. J’ai repensé à ce que tu m’as dit hier soir, je comprends les
raisons qui t’ont fait douter de moi.
— Hugo, je n’ai pas envie d’avoir ce genre de conversation par téléphone, encore moins pendant ma
pause déjeuner.
— Excuse-moi. On peut se voir ce soir ? Tu es partie depuis mercredi soir, c’est une éternité sans toi.
— Oui, je veux bien passer ce soir après le travail.
— Passer ? Mais reste Alyssa, je veux bien te laisser la chambre si tu préfères, mais rentre, je t’en
prie. Tu me manques trop.
— Entendu, je rentre. À ce soir.
— Oh merci ma puce, à ce soir, je t’aime.
Je ne sais pas si j’ai bien fait de dire que j’acceptais de revenir à la maison. On verra bien comment
ça va se passer, mais il me manque, ses bras me manquent. Les transmissions vont bientôt débuter, je dois
y retourner, je me traîne jusqu’aux urgences. Alors que l’équipe d’après-midi arrive, Nadine vient
m’informer qu’elle ne pourra pas être présente à la réunion tout à l’heure, car elle s’est arrangée avec sa
collègue pour partir à seize heures.
— Une réunion ?
— La réunion annoncée ce matin par mail sur les changements d’horaires des IAO (infirmiers
d’accueil et d’orientation).
Je me décompose littéralement sur place. Je ne savais pas pour cette réunion, je n’ai pas ouvert ma
boîte mail. Je cours dans mon bureau, pour vérifier si j’ai reçu un mail. Et oui, bordel. La réunion débute
à quinze heures trente, le mail est identique à chaque destinataire… Je vais devoir affronter Thomas, je
n’ai pas eu de contact avec lui depuis cette nuit. Je ne me suis même pas excusée. Pourvu que son
portable soit perdu.

Quinze heures vingt, toujours aucune nouvelle, c’est à moi de faire le premier pas ? Je ne le ferai pas,
j’ai décidé d’arrêter mes conneries. Je me rends à la salle de réunion avec la boule au ventre. En entrant,
je cherche sa présence, je ne le trouve pas. Dans un sens, ça m’arrange de ne pas le voir aujourd’hui.
Quinze heures quarante-cinq, le chef fait son entrée. Il porte un jean noir et une chemise grise sous sa
blouse. Il referme violemment la porte derrière-lui avant de s’excuser pour le retard.
— Inutile de perdre du temps à faire le tour de table pour évoquer la situation, tout le monde a
connaissance des problèmes. J’ai passé la matinée avec la direction, on me demande de trancher, c’est ce
que j’ai fait. Vous trouverez sur les différents documents que je vous fais passer, les nouveaux horaires
concernant l’accueil aux urgences, ainsi que les nouvelles fiches de postes. Les secrétaires bénéficieront
d’une nouvelle formation courant du mois prochain. Je vous laisse prendre connaissance du premier
document.

Je pensais qu’il m’aurait consultée pour trancher comme il le dit si bien, je suis quand même la «
cadre » actuelle de ce service. J’ai sûrement trop répété que je ne l’étais pas, que je n’étais pas à la
hauteur. Il m’a entendue, maintenant il me met à l’écart. Ce ne sont pas mes messages de cette nuit qui sont
en causes, il a sans doute déjà préparé tous ces documents depuis un petit moment. Il est autoritaire, il
montre qu’il a tout le pouvoir décisionnel, après tout ce n’est pas mon service.
Les infirmières formées au poste d’IAO protestent, elles ne veulent pas finir à vingt heures, elles ont
comme argument que la fréquentation des urgences se calment en début de soirée. Thomas ne les laisse
pas s’exprimer, il leur fait bien comprendre que la décision est prise. J’assiste à cette scène comme
simple spectatrice...
J’ai hâte d’être à ce soir, de m’expliquer avec Hugo, je vais tout lui dire, je ne veux plus de secret,
sinon, je ne sauverai jamais mon couple. Si après ça, il veut toujours de moi, alors nous aurons une
chance, et si ce n’est pas le cas…

J’appréhende énormément, je regarde l’horloge, il est dix-sept heures. Je sens que mes paupières sont
de plus en plus lourdes, mes yeux me brûlent à force d’insister pour les garder ouverts. Je m’adosse
davantage sur le dossier de ma chaise, je croise les bras sur ma poitrine, j’allonge mes jambes sous la
table pour les dégourdir…
Je me surprends à fermer les yeux quelques secondes, mais à chaque fois un peu plus, je sursaute
même à un moment. Personne ne semble le constater, mais ma lutte devient impossible. Je ramasse mes
affaires, c’est la chose à faire et me lève le plus discrètement possible. La discussion cesse, les regards
se tournent vers moi, me voilà prise en flagrant délit. Je m’adresse à l’assemblée, pas question de
regarder Monsieur Simon :
— Excusez-moi, je dois y aller.
Mon regard se porte sur lui comme instinctivement pour évaluer sa réaction, il est debout, tourner
vers moi, mais ne me regarde pas dans les yeux. Lorsqu’il sent mon regard sur lui, il tourne la tête et
replonge dans ses feuilles. Les filles des urgences me dévisagent, elles attendent une explication, alors
j’ajoute :
— Je ne me sens pas très bien. Vous m’expliquerez ce que j’ai loupé.
— Tu veux que je t’accompagne Alyssa ? Me demande Lara.
— Non, ce n’est pas nécessaire, je te remercie Lara. Bonsoir.
Je retourne à l’hôtel, rassembler mes affaires, juste avant de sortir de la chambre, je m’allonge un
moment, je suis épuisée et je sais qu’en retrouvant Hugo, nous allons nous disputer. Je ne peux pas
m’empêcher de repenser à mon rêve, Hugo n’était pas l’homme que je connais si bien, ça ne pouvait pas
être réel, il n’est pas du genre violent, même pas verbalement. Pourtant certaines choses qui se sont
déroulées dans mon rêve me semblent si réelles, comme le fait d’être montée dans la voiture du chef.

Je ne suis pas guérie de mon fantasme, je n’ai rien cherché, il m’est apparue un jour comme une
évidence. C’est vrai depuis qu’il est cadre de pôle, je le vois régulièrement, la première année, je le
trouvais séduisant, il m’intimidait, ça s’arrêtait là. Maintenant, je pense à lui trop souvent, et depuis que
je suis « cadre » nos rapports ont changé et j’en deviens obsédée secrètement.
Je ne suis même pas sûre de vouloir construire quelque chose avec lui si j’en avais la possibilité, il
est plus âgé que moi. Je crois qu’il s’agit plus d’un « fantasme sexuel » , j’ai envie d’un contact purement
physique avec lui, sa bouche m’attire, ses yeux m’hypnotisent, le simple contact de ses mains sur ma peau
me laisse pantelante. Je désire tout son corps de façon presque animale. La seule pensée qu’il pourrait me
toucher me fait frémir…
Je suis arrachée à mes pensées érotiques par quelqu’un qui frappe à ma porte. Il est dix-huit heures
trente, je n’ai pas vu l’heure passer, je me lève pour ouvrir et reste hébétée en découvrant Thomas sur le
pas de ma porte.
— Thomas ? Mais qu’est-ce que vous faites ici ?
— Je peux entrer ?
— Oui, ne faites pas attention au bazar, j’étais en train de rassembler mes affaires.
— Tu as dit que tu ne te sentais pas bien, je voulais m’assurer que ça allait. J’ai demandé à l’accueil
ta chambre sans savoir si tu étais encore là.

Chapitre 22

— Je vais bien, je me suis reposée un peu. Excusez-moi d’être partie avant la fin de la réunion.
— Non, ce n’est pas un souci. L’essentiel est que tu ailles mieux. Je ne voulais pas te déranger, mais
j’étais préoccupé. Je suis désolé de ne pas avoir répondu à tes messages, pour être honnête, je ne savais
pas quoi t’écrire.
— Oh, vous les avez lus. Lui dis-je en prenant l’air étonné. C’est à moi d’être désolée, j’ai été
stupide la nuit dernière. Je ne pensais pas un mot de ce que j’ai écrit et je vous assure que j’avais honte
ce matin, quand j’ai vu l’heure de ces messages.
— Je peux m’asseoir ? Ajoute Thomas en désignant le canapé.
— Oui, je vous en prie.
Il sort le téléphone de sa poche, me regarde et me dit :
— On va reprendre ensemble ?
— Quoi ? Ah non ! Je m’en veux assez comme ça.
— Je ne veux pas qu’il y ait de malentendu. On va clarifier les choses qui nécessitent de l’être.
— Thomas, je ne veux pas, c’est trop embarrassant, humiliant de relire ces messages.
Il m’écoute attentivement, semble hésiter, le portable toujours en main. Je lâche un long soupir avant
d’ajouter :
— J’avais bu hier soir, je n’aurais jamais écrit ces message sinon.
— Je comprends mieux. Toi qui sembles si discrète d’habitude, ça ne te ressemblait pas. Par contre tu
n’avais pas bu lors des premiers messages. Alors tu regrettes de m’avoir parlé de tes soucis car je suis
ton chef ?
Il promène ses doigts sur son menton, puis précise :
— Tu ne m’as pas vraiment parlé Alyssa, tu as simplement évoqué que tu dormais à l’hôtel. Donc tu
peux te rassurer, je ne connais rien de ta vie privé.
Il cherche à dédramatiser la situation.
— Je t’ai répondu que je n’étais pas QUE ton chef si tu vois ce que je veux dire, je peux être une
personne à l’écoute d’une autre avant tout. Et puis, je dois l’avouer tu m’as contrarié, en me demandant
quel genre de chef j’étais.
Je ne sais plus où me mettre, je pourrais me coller des baffes. J’ajoute timidement que j’étais fâchée.
— Et donc, tu as supposé que je me comportais avec les femmes comme je me comporte avec toi en
utilisant mon étiquette de chef pour que ce soit plus facile ? Est-ce que je résume bien ?
— Oui, plutôt bien mais ce n’est pas …
— Comme je te l’ai dit, je ne fais pas ça. Je ne vais pas boire un verre avec d’autres collègues si
facilement.
Pourquoi me précise-t-il si facilement ? Suis-je une fille facile selon lui ?
— J’entends par là que je ne profite pas de mon titre à l’extérieur.
— Je ne le pense pas.
— Tu n’es pas comme les autres, enfin je parle de tes collègues, avec toi c’est différent.
— Dans quel sens ?
— Je sais que nous pouvons boire un verre sans que tu attendes quelque chose en retour. Tu sais, la
plupart de mes collègues cadres étaient comme des « amis » . J’ai passé de bons moments avec la
plupart, mais quand tu évolues, les relations changent, les personnes ne sont plus naturelles avec toi.
Rares sont celles qui ont gardé le même comportement avec moi, je pourrais t’en citer quelques-unes.
Sandy est la seule collègue femme. Enfin, je ne sais pas pourquoi je te raconte tout ça.
Il a évoqué cette Sandy, je comprends à présent qu’il la considère comme une amie, elle n’est peut-
être pas comme je l’imagine. Est-ce qu’il veut faire de moi, une amie, une confidente ? Je suis attentive à
ce qu’il me raconte.
— Je suis navrée de vous avoir froissé hier soir, mais je ne pensais pas ce que je disais.
— N’en parlons plus. En revanche, est-ce que tu pensais ce que tu as dit dans le message suivant, le
fait que tu regrettais de m’avoir rencontré ?
— Non, à ce moment-là, je n’étais plus moi-même.
— Mais alors pourquoi avoir dit cela ? Tu dois bien avoir une idée ?
— Non, absolument aucune. Répliqué-je sans le regarder.
— Tant mieux, parce que j’apprécie ta compagnie. Tu es quelqu’un d’authentique.
Il a dit qu’il appréciait ma compagnie ! Je ne rêve pas. Je ne veux pas devenir son amie, je ne peux
pas être amie avec quelqu’un qui me fait fantasmer.
— Je ne vais pas te retarder, tu allais partir je crois.
— Je ne sais plus trop, mais je ne peux pas continuer à me cacher ici.
Je lui réponds naturellement, comme si une barrière était tombée. Il me regarde fixement.
— Tu penses vraiment te cacher en restant ici ? De qui, de ton fiancé ?
— Non pas vraiment, disons que je suis venue à l’origine m’isoler pour réfléchir.
— Et tu as finis de réfléchir ?
— Non, mais je viens de réaliser que j’étais venue ici pour éviter une confrontation, pour retarder
l’inévitable.
— Oh je vois. Ce n’est jamais bon de repousser, mais parfois c’est nécessaire pour être préparé à
faire face et crois-moi je sais de quoi je parle.
Il est l’oreille dont j’avais besoin en ce moment, il ne pose aucune question indiscrète, ne me juge
pas. Sa présence me réconforte. Ce serait tellement plus simple si je lui disais qu’il est une des causes de
la situation avec Hugo. Je suis assise à côté de lui, il se resserre et m’invite à poser ma tête sur son
épaule en tapotant celle-ci. Sans réfléchir, je laisse ma tête se poser sur son épaule un instant.
Trop d’émotions retenues jusque-là, je ne peux en contenir davantage, je laisse des larmes
s’échapper. Le temps semble se suspendre, il n’y a pas le moindre bruit, je suis concentrée sur les
mouvements de sa poitrine, à chaque inspiration profonde, elle se gonfle avant de reprendre sa place. Il
passe un bras derrière mon dos, et sa main vient enlacer mon épaule, il appuie délicatement pour me
serrer plus près de lui. C’est un geste amical, mais pour moi, cela représente bien plus. J’étouffe des
sanglots contre sa poitrine, chaque contraction de mon diaphragme m’inflige une douleur intense.
Lorsque la douleur se calme, que mes larmes se tarissent, ma respiration reprend un rythme normal.
Je prends conscience que je suis dans ses bras, que je n’éprouve aucune gêne. Je peux m’enivrer de son
odeur délicieuse, je voudrais que ce parfum ne me quitte jamais. J’ai peur qu’il s’éloigne et de ne plus me
souvenir de son odeur. Je finis par m’écarter de lui, estimant avoir sans doute trop profité :
— Merci pour ce moment Thomas, merci pour votre écoute.
— Tu peux me tutoyer Alyssa. Ajoute-il en me souriant.
Non, je n’oserai jamais. J’essuie les larmes sur mes joues du revers de ma main.
— Alyssa, ça me ferait plaisir tu sais.
— Je vais essayer.
— Ça va mieux ?
— Oui, merci beaucoup mieux. Je ne vais pas vous retenir plus longtemps. Pardon, te retenir.
Finalement ça n’est pas si difficile, mais je ressens une décharge au moment où je prononce le « tu » à
voix haute.
— Ne t’en fais pas, tu ne me retiens pas. En revanche, je vais te laisser si tu es prête à partir.
— Je pense que je le suis à présent.
— Très bien. Tu as mon numéro si ça ne va pas.
— Oh non, je ne l’utiliserai plus, je devrais même le supprimer.
Oh, tiens ça me rappelle mon rêve. Là, il est censé me dire de ne surtout pas le supprimer.

Chapitre 23

— Utilise-le à chaque fois que tu en as besoin, n’hésite pas. J’ai un code pour accéder à mes
messages, si c’est ce qui t’inquiète.
Un code ? Tiens je peux en mettre un sur le mien ?
— Ah bon, je ne m’inquiète pas d’être lue… Je peux en mettre un sur le mien ?
— Oui c’est très simple, il faut télécharger une application, ça ne prend que quelques minutes. Avec
le travail, je suis obligé de faire ça. Dès que l’écran n’est pas touché durant trente secondes, il se bloque.
— Oh, je vois.
— Tu veux que je m’occupe de ton téléphone ?
— Quoi maintenant ?
— Oui, pourquoi pas ?
Je lui tends mon mobile. Je vais à la salle de bain pendant ce temps-là, je dois avoir une tête affreuse
après avoir tant pleurer. Mon mascara n’a presque pas bavé, je me recoiffe rapidement.
Lorsque je sors de la salle de bain, Thomas attend debout les mains enfoncées dans les poches de son
jean. Mon portable est posé sur la table.
— J’ai terminé, tu n’as plus qu’à saisir ton mot de passe.
— Déjà, je vais faire ça tout de suite.
Je ne pense qu’à son prénom en mot de passe, je ne peux pas mettre ça. Vite il me faut une idée.
— Il te faut quatre chiffres ! Précise Thomas.
Bon le prénom, on laisse tomber, tant mieux. Je ne vais pas mettre ma date de naissance, c’est la
première chose que qu’essaierait Hugo. Machinalement, je mets « 2235 » ce sont les chiffres de sa plaque
d’immatriculation. Il ne le saura pas de toute façon. Il me demande des validations, je ne comprends pas.
— Ça n’a pas dû fonctionner. Il écrit demande de validation. Lui dis-je.
— Montre-moi, tu as retapé ton code en-dessous ?
— Non, il ne veut pas prendre en compte le premier.
Il saisit mon téléphone.
— Je sais, tu n’as pas coché la petite case à côté. Je te le retranscris en-dessous. 2 2 3 5, voilà c’est
fait. Tu pourras le changer facilement si tu veux, maintenant que je le connais. En plus, je ne risque pas de
l’oublier.
— Pourquoi ça ? Dis-je tremblante de honte, je suis grillée.
— Ce sont les numéros de ma plaque d’immatriculation.
— Sérieusement ? Si j’oublie, je saurai à qui demander.
Oh non, je ne sais pas mentir, ça doit se voir comme le nez au milieu de la figure. Je sens mes joues
bouillir.
— Ne t’inquiète pas, je n’irai pas fouiller dans ton portable, et puis tu peux le changer si ça te
rassure. Attends, je vais t’aider à porter tes sacs.
—Merci.
Nous chargeons ma voiture et je règle les nuits passées ici, celle-ci est comptée aussi, car je n’ai pas
libérée la chambre avant quinze heures. Si j’avais su, je serais restée cette nuit. Il est près de vingt
heures, Hugo doit s’impatienter ou penser que je ne viendrai plus. Je dis bonsoir à Thomas en le
remerciant une fois de plus. Il insiste sur le fait de ne pas hésiter à le contacter si ça n’allait pas.
En arrivant devant chez moi, je me sens terrifiée à l’idée d’affronter Hugo, surtout à l’idée de le faire
souffrir. Je frappe avant d’ouvrir la porte.
— Chérie, bonsoir, je me demandais si tu allais venir.
— Oui, j’ai fait une sieste avant de ramasser mes affaires.
— Tu ne fais jamais de sieste, ça n’allait pas ?
— Non, j’ai peu dormi la nuit dernière.
— Pourquoi ?
— Parce que je… j’ai bu.
— Tu as bu avec qui? Insiste Hugo très étonné.
— Oh, toute seule dans ma chambre. Je n’ai pas envie d’en parler, j’ai été suffisamment mal toute la
journée. Je vais ranger mes affaires, on parle après si tu veux bien.
Je mets mon linge sale dans la machine, je range quelques affaires sous le regard inquiet d’Hugo.
— J’ai préparé le repas, j’ai fait des lasagnes. Tu as faim ?
— Oui, merci.
Nous nous installons à table tous les deux, en face l’un de l’autre. L’ambiance est pesante, je suis
partagée entre lui dire que je regrette tout ce que j’ai dit et le prendre dans mes bras, et lui dire que j’ai
trop de doutes sur mes sentiments et lui dire que c’est fini. Nous mangeons sans aborder le sujet, il me
raconte sa journée de travail, je ne l’interromps pas.

Quand il me demande de lui raconter ma journée, je réalise que je n’en ai pas du tout envie. Après
tout, j’ai survécu à cette journée de merde, enfin de merde jusqu’à ce que Thomas me rejoigne ce soir.
— Je n’ai pas envie de te parler de ma journée Hugo.
— Au risque de te contrarier à nouveau, tu ne veux plus me les raconter depuis ton changement de
poste, tu comprends ma réticence lorsque l’on parle de ton projet.
— Très bien, tu veux que je te raconte que je suis allée au boulot avec la gueule de bois, après avoir
passé la moitié de la nuit à vomir, que j’ai passé une journée de merde. J’ai accueilli un nouvel
intérimaire, un con prétentieux qui m’a soulée. Cet après-midi, j’étais encore à une de ces putains de
réunion, j’avais un mal de crâne terrible, je me suis cassée avant la fin de la réunion. Je suis allée faire
une sieste et j’ai ressassé nos problèmes et je me suis demandée si je devais rentrer ou pas. Voilà, tu es
content d’avoir les détails de ma vie qui part en couille.
— Je ne te reconnais pas Alyssa, cette façon de me parler et cette vulgarité dans ta bouche ne te
ressemblent pas. Je suis désolé que tu aies ressenti le besoin de boire à ce point-là et que tu aies dû en
subir les conséquences toute la journée, mais assume ton choix et ne me le fais pas payer alors que
j’essaie d’être courtois avec toi.
— Oh ne me parle pas de courtoisie s’il te plaît ! Pour une fois laisse tomber ta politesse et tes
bonnes manières et dis-moi le fond de ta pensée !
— C’est quoi ton problème ? Qu’est-ce que j’ai fait de si impardonnable ?
— Rien, tu n’as rien fait pendant si longtemps.
— Oui, mais je suis prêt à faire avancer les choses maintenant.
— Le problème, c’est qu’il est trop tard !
Merde, je l’ai lâché, j’attends le retour… Hugo se lève et jette son assiette dans l’évier.
— Si c’est trop tard pourquoi es-tu revenue ? Pourquoi ne me l’as-tu pas dit tout de suite ? Pourquoi
avoir accepté ma demande en mariage ?
— Parce que ce n’est pas si simple et que je t’aime, je ne veux pas nous faire souffrir.
— Tu m’aimes et je t’aime, je ne comprends pas pourquoi ce serait trop tard ?
— Parce que j’ai douté de nous, j’ai peur de douter encore.
— Il m’est arrivé de douter aussi et je suis toujours là ! Lance Hugo.
— Tu as douté de nous ?
Oh, ça fait mal d’apprendre ça. Quand ça ?
— Oui, plusieurs fois Alyssa. La dernière fois que j’ai douté remonte à l’année dernière. Je me suis
demandé si je te traitais bien comme un mari, et non pas comme un ami. J’étais devenu plus distant avec
toi, tu me l’avais fait remarquer à juste titre.
La vérité c’est que j’avais le sentiment de ne plus te faire briller. Hélène, la remplaçante venait
d’arriver à l’école, elle riait gênée à toutes mes blagues et j’ai réalisé que ça me manquait avec toi. Ne
crois pas que cette femme me faisait de l’effet, ce serait une erreur. Ce qui me plaisait, c’était qu’elle me
remarque. Je te raconte ça pour te montrer, que malgré les doutes, nous sommes toujours ensemble.

Chapitre 24

— Je n’en reviens pas. Tu as douté à plusieurs reprises de nous et tu ne me l’avais pas dit.
— Tu doutes bien toi aussi et puis je te le dis là.
— Ne compare pas. Je doute depuis peu et je suis honnête.
— Je ne vois pas pourquoi j’aurais dû risquer de te blesser à l’époque.
— Tu aurais dû, je ne comprenais pas cette distance que tu mettais entre nous, j’avais le sentiment que
tu voulais me quitter. J’avais peur que tu me quittes car tu ne voulais ni m’épouser, ni me faire d’enfants.
Alors, je me suis éloignée de toi, sans doute pour me protéger d’une éventuelle rupture et j’ai aussi fait le
constat que tu me faisais plus briller autant qu’avant lorsque j’ai…
— Et ? Je sais qu’il y a autre chose, quelqu’un d’autre t’a remarquée ?
— Non, pas vraiment, j’ai remarqué quelqu’un d’autre…
Je l’ai dit, ça me fend le cœur, mais c’était maintenant ou jamais les révélations…
— J’ai bien entendu ? Et lui ? Qui est-ce ? C’était quand ? Est-ce qu’il s’est passé quelque chose
entre vous ?
— Non, je te le promets. Il ne s’est rien passé.
— Tu l’as remarqué ces temps-ci ?
— Il y a quelques mois…
— Qui est-ce ?
— Tu ne le connais pas.
— Son nom ? Il bosse avec toi ?
— Oui, il travaille à l’hôpital.
— C’est pour ça que tu rentres tard ?
— Non, ça n’a rien à voir.
— Quand tu dis que tu l’as remarqué depuis quelques mois, je veux en savoir plus, comment ça se
traduit ?
— Je ne suis pas sûre de devoir te dire tout ça…
— Je pense que tu me dois au moins ça.
— C’est quelqu’un de gentil, je le trouve séduisant voilà.
— Voilà ? Non, je suis sûr que c’est plus que ça.
— Non, je le trouve séduisant et il m’arrive de penser à lui. Il n’y a rien d’autre.
— Je ne sais pas si je peux te croire, tu es partie de la maison ces derniers jours. Tu étais très
distante, tu ne me parlais plus de ton travail, tu as changé.
— Ne me crois pas si tu veux, je te dis qu’il ne s’est rien passé. Il ne sait même pas que je le
trouve…
— Oui, je t’écoute comment le trouves-tu ?
— Ça suffit, je vais me coucher.
Je claque la porte de ma chambre derrière moi, je m’adosse contre la porte. Je fais le bilan de la
situation, j’ai enfin avoué que je pensais à un autre homme depuis quelques mois. Je sais qu’il a douté
plusieurs fois de nous, et cette histoire avec Hélène ne me plaît pas du tout. Je prends ma douche
rapidement en bas tant que je l’entends sous la douche à l’étage. Vingt-deux heures, j’ai un message. C’est
lui ! J’espère que tout va bien aly. Thomas.
Il s’inquiète, je rédige une courte réponse : Ça aurait pu être pire… je « te » remercie. « aly » .
Thomas : J’avais ce surnom en tête, mais je ne pensais pas l’avoir mis. Ça aurait pu être pire, mais
ça va quand même ?
J’aime trop qu’il me surnomme Aly, on ne m’a pas appelée comme ça depuis le lycée.
Moi : J’aime beaucoup aly. Oui ça va, je suis mieux seule dans ma chambre que seule dans une
chambre d’hôtel.
C’est vrai, c’est plus confortable d’être chez soi. Seule ? Me demande-t-il aussitôt.
Oui je suis seule, je lui ai avoué que je pensais à toi. Seule dans ma chambre pas dans la maison…
c’est mieux ainsi enfin pour le moment. J’éteins la lumière et me glisse sous la couette.
Bonne nuit aly. Il est adorable.
Bonne nuit thomas.
Je m’endors rapidement, mais me réveille sans cesse tourmentée par nos révélations de ce soir. Je lui
en veux de ne pas m’avoir dit auparavant qu’il avait des doutes à propose de nous, putain, j’avais des
raisons de m’éloigner, je sentais qu’il se passait quelque chose. Quelque part, il est fautif de mon
éloignement. Je vais me faire une tisane, puis lire un peu, je n’arrive plus à dormir pourtant il est deux
heures du matin et j’ai du sommeil en retard.

Je m’installe avec ma tisane toute seule dans mon lit, c’est si étrange de le savoir en haut seul aussi
dans la chambre d’amis. J’entends les marches grincer, c’est lui qui descend, je m’empresse d’éteindre la
lumière et de poser ma tasse sur la table de nuit. Ma porte s’ouvre, il ne prend pas la peine de frapper
avant. Je fais semblant de dormir.
— Je sais que tu ne dors pas Alyssa, je t’ai entendue te lever et je viens de voir la lumière s’éteindre
sous la porte.
— Qu’est-ce que tu veux ?
— Tu ne dors pas non plus, alors je viens me mettre à côté de toi, si tu me le permets.
— Hugo !
— Je suis chez moi, je peux encore me coucher auprès de ma fiancée !
J’hésite entre me lever ou rester, pour une fois qu’il a envie d’être auprès de moi et qu’il me le fait
savoir. Je ne dis rien et me tourne dos à lui.
Il passe sa main le long de mon dos et vient la placer contre ma nuque. Je sais ce qu’il fait, mais je
suis trop en colère contre lui, contre moi pour en être capable.
— Tu crois que ça peut se finir comme ça nous deux ? Demande Hugo.
— Comment ?
— Après dix ans ensemble, tu crois que l’on est capable de se passer l’un de l’autre ?
— Je ne sais pas.
— Tu vas me quitter Alyssa ?
— Je ne sais pas. Tu me pardonnerais si je restais ?
— Je ne sais pas. Cette entaille faite par ton aveu est encore trop ouverte.
Aïe ! Je savais que ça finirait par arriver, mais je ne peux retenir mes larmes. Je ne fais que pleurer
ces derniers temps. Hugo m’enlace.
— Je ne veux pas que tu partes, mais si tu dois partir, laisse-moi te faire une dernière fois l’amour.
Hugo marque des pauses entre chacun de ses mots, il se retient de pleurer.
— Ne dis pas ça. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée pour nous.
Il bascule ma tête sur le côté avec sa main, je suis allongée sur le dos. Il pose ses lèvres contre les
miennes « chut bébé » et puis il appuie fermement sur ma bouche, il entrouvre les lèvres entraînant les
miennes avec lui. Sa langue vient caresser la mienne une première fois timidement avant de revenir plus
sauvagement dans ma bouche.
Hugo s’allonge au-dessus de moi, il glisse ses mains derrière ma tête, ramassant mes cheveux et
m’embrasse comme si c’était la dernière fois qu’il pouvait le faire. Nos larmes se mélangent.
Il passe sa main sous ma nuisette, il l’a fait remonter pour me la retirer, je n’ai pas la force de
l’empêcher. Nous sommes adultes, nous savons ce que nous faisons. Il est passionné, il ne l’a jamais
autant été, il dépose des baisers sur mes seins, sur mes hanches.
— Bébé, je veux me rappeler de ton corps tout entier, de chaque détail, du contact de ta peau sous
mes doigts. Tu es si douce.
Il aspire ma peau entre ses dents dans mon cou, sur mes seins, je gémis à chaque fois qu’il
recommence. Il fait descendre ma petite culotte, avant de se redresser et ôte son caleçon d’un geste
rapide, il revient sur moi, laissant son érection se presser contre ma cuisse. Il n’est pas si directif
d’habitude, j’en suis presque déstabilisée.
Il écarte ma jambe avec la sienne pour venir se positionner entre mes jambes et il m’arrache un cri en
me pénétrant brusquement. Il marque une pause sans bouger :
— Tu ne peux pas le désirer comme tu me désires en ce moment! Me chuchote Hugo à l’oreille.
— Pardon ?
Il n’a pas dit ça ? Oh mon dieu !

Chapitre 25

— Cet homme ne peut pas t’exciter aussi fort que moi en ce moment!
Je lui ordonne d’arrêter, en le repoussant de toutes mes forces, mais il ne bouge pas. Je l’implore à
nouveau, c’est plus fort que moi, je le gifle. Il s’arrête immédiatement.
— Pourquoi tu as fait ça ? Lui tu ne l’aurais jamais arrêté ! Ajoute Hugo en serrant fermement son
poing.
— Je t’ai demandé de te pousser, tu ne m’écoutes pas. Il ne se passe rien avec lui, ne parle pas de lui
sans le connaître.
J’ai à peine le temps de finir ma phrase, que sa main vient s’écraser avec force contre ma joue et ma
tempe droite. Son geste a été rapide et violent, je sens encore sa main sur moi.
— Tu es fâchée ? Moi, j’ai toutes les raisons de l’être, alors que tu m’as dit que tu pensais à
quelqu’un d’autre depuis des mois. Je n’ai pas réfléchi, ma main est partie toute seule.
— Laisse-moi maintenant s’il te plaît. Dis-je en pleurant.
— Qui est-ce ?
— Ce n’est pas le moment, laisse-moi et je te le dirai.
— Très bien. Ajoute-t-il en se retirant à côté de moi.
Je me lève et attrape ma nuisette que j’enfile immédiatement, je prends mon portable au passage. Je
fais le tour du lit pour sortir de la chambre, il saisit mon bras et me tire près du lit.
— Tu dois me dire qui c’est.
— Je ne le ferai pas.
— Pourquoi tu refuses de me le dire ?
— Parce que ça ne changera rien, tu ne le connais pas, il ne s’est rien passé, je te l’ai dit. Il n’est
même pas au courant, il est marié, je ne lui dirai jamais.
— Ah super, il est marié en plus. Je veux savoir qui c’est Alyssa.
— Non.
— Tu m’as dit que si je te laissais tu me le dirais.
— Toi tu as douté de nous, tu me l’as caché.
— Certainement pas, je ne vais pas te laisser t’en sortir comme ça, viens ici. Je t’ai giflée parce que
tu venais de le faire ! Crie Hugo.
J’enfile des chaussures, attrape la première veste, mon sac à main et sors de la maison en courant. Il
se presse de me rejoindre en caleçon dehors.
— Tu vas où ? Tu me trompes et c’est toi qui pars au beau milieu de la nuit !
Hugo hurle, tout le quartier peut l’entendre. Je cours à ma voiture, et réalise que je n’ai pas les clés.
— C’est ça que tu cherches ? Dit-il en secouant mon trousseau de clé. Il va falloir que tu rentres et
que tu t’expliques si tu veux les récupérer, te connaissant, tu n’iras pas bien loin dans le noir à pied. Je
t’attends à l’intérieur.
Putain, j’ai laissé mes clés sur la porte en sortant. Il me connait bien, je suis une froussarde en pleine
nuit, en plus je suis à moitié nue, je ne porte même pas de sous-vêtements. Il est hors
de question que j’aille chez un voisin.

Sans réfléchir, je fais quelque chose de stupide en sortant mon portable de mon sac à main.
Peux-tu venir me chercher maintenant ? Aly. Je sais que ça a l’air dingue, mais je ne sais pas qui
appeler. Mes parents vont halluciner et m’ordonner de rentrer.
Te chercher ? Où es-tu ? M’envoie Thomas. Oh il a déjà répondu.
Je suis dehors, près du bar « l’essentiel » à moitié nue… si tu viens, ne me pose pas de question
stp.
Je lui précise ma tenue, parce que je suis terrifiée à l’idée de rester dehors comme ça, il est trois
heures du matin. Thomas : Quoi ? Ne bouge pas, je suis là dans une minute.
Je n’en reviens pas qu’Hugo me laisse dehors comme ça… Il sait qu’il est allé trop loin, je ne pourrai
pas lui pardonner, la gifle qu’il m’a donné n’est pas comparable à la mienne, il y a mis tellement
d’intensité. Je marche un peu pour me réchauffer, j’ai saisis la veste la plus courte et la plus fine que
j’avais, j’ai attrapé la première qui venait. Elle n’a même pas de bouton, elle se porte ouverte. Ma
nuisette est très courte, elle est décolletée, transparente et dos nue. La situation a basculé d’un seul
coup…
La voiture de Thomas arrive enfin, il se gare sur le parking du bar et sort rapidement de sa voiture. En
me voyant si peu vêtue, il enlève sa veste en cuir et me la pose sur les épaules. Il m’ouvre la portière et
me fait signe de monter, ce que je fais sans tarder.

— Je suis désolée Thomas de vous avoir dérangé en plein milieu de la nuit, mais je ne savais pas où
aller, je n’ai pas mes clés de voiture et je ne veux surtout pas retourner chez moi… chez lui.
— Ne t’excuse pas Alyssa pour une fois. Tu veux que j’aille prendre tes clés ?
— Oh non, surtout pas. Il va devenir fou.
— Si tu as besoin de tes clés, je vais les chercher. Tu n’as pas de vêtements non plus, tu ne peux pas
rester comme ça.
— Non, je vous en prie, pas ce soir. Il n’est pas dans son état normal là.
— D’accord, si tu préfères, on peut attendre demain. Arrête de me vouvoyer Alyssa.
— Pardon, je n’ai pas fait attention. Tu peux me déposer dans un hôtel ?
— Un hôtel avec un réceptionniste à cette heure-ci ? Ou bien il faut sortir de la ville…
— Je peux rester dans ta voiture pour la nuit sinon ?
— Certainement pas. Je sais, je vais t’emmener à l’internat. Y a plusieurs chambres inoccupées, j’ai
les clés de l’internat dans mon bureau.
— Merci.

Il se dirige vers l’hôpital, il ne parle plus, mais je sens qu’il est fâché. Il me demande de ne pas sortir
de la voiture pendant qu’il va récupérer les clés. Je n’avais pas l’intention de sortir de toute façon…
j’attends patiemment. Ma joue me fait mal, je me regarde dans le miroir du pare-soleil. Je suis légèrement
enflée au niveau de la joue et dans le coin de l’arcade sourcilière. Je ne réalise pas qu’il a posé la main
sur moi, je sais qu’il était furieux, mais ça ne l’excuse pas. Thomas revient en courant à la voiture et
s’excuse pour l’attente. Il nous conduit jusqu’au parking de l’internat.

— Alyssa, tu connais la plupart des médecins qui sont à l’internat, je vais d’abord monter tout seul et
ensuite je viendrai te chercher.
— D’accord.
Quelques minutes après, il vient m’ouvrir la portière.
— C’est bon la voie est libre. Ne fais pas de bruit surtout, je ne tiens pas à ce qu’on nous voit au
milieu de la nuit tous les deux.
— Oui, je comprends.
Le bâtiment est très ancien d’extérieur, mais l’intérieur a été rénové, les murs sont blancs, ce n’est pas
très chaleureux, l’escalier principale est en pierre. Nous nous rendons au premier étage. Il ouvre la porte
et me laisse entrer. C’est une chambre d’environ dix mètres carré à peine, il y a un bureau, une télé et un
lit.
— Où sont les toilettes ? Demandé-je.
— Sur le pallier, comme les salles de bain.
— Ok.
Il ferme à clés derrière nous. Je m’assois sur le bord du lit en tirant sur le peu de tissu qui me
recouvre. Sa veste est deux fois trop large pour moi, mais je me sens bien dedans. Je soulève la
couverture du lit pour me glisser dessous et pouvoir lui rendre sa veste, je remonte la couverture jusqu’à
mes épaules.
— Merci pour la veste.
— C’est normal.
— Votre femme va s’inquiéter, vous devriez rentrer à présent.
— Ma femme ne s’inquiétera pas, c’est arrangé. Il est impensable que je te laisse dans cet état-là, à
l’internat. Et comment comptes-tu faire demain matin pour sortir d’ici dans cette tenue avec autant de
jeune hommes ?

Chapitre 26

— Ce sont des adultes et des médecins. Et pour demain matin, je ne sais pas, mais je vous ai assez
mêlé à mes histoires.
— Tu me vouvoies à nouveau. Ne discute pas, ma décision est prise je reste là pour la nuit. Je sais
que tu ne veux pas que je te pose des questions, mais as-tu envie d’en parler ?
— Non, pas vraiment.
— Pourtant j’aimerais comprendre comment tu t’es retrouvée au milieu de la nuit dehors dans cette
tenue.
Il s’approche et s’assoit sur le lit face à moi. Je relève la tête pour lui parler.
— Rien, on s’est disputé.
— Mais pourquoi tu n’as pas pris le temps de te changer alors ? Qu’est-ce que ? Est-ce qu’il t’a
touchée ?
Je le vois me dévisager, je comprends qu’il a vu mon visage. Il approche sa main de mon visage et
effleure ma tempe gonflée, il fronce les sourcils.
— Alyssa, il t’a fait du mal ?
— Non, ça va. Je sais me défendre.
— Il t’a frappée cet enfoiré ! Je vais aller le voir…
— Non Thomas. Je l’ai cherché… Je l’ai giflé la première.
— Je ne veux pas le savoir ! Tu es une femme, il n’aurait pas dû te toucher et puis il n’a pas fait que
te flanquer une gifle vu ton visage meurtri.
— Ça va vraiment, demain on ne verra plus rien.
— Si je l’avais en face de moi, je ne pourrais pas me retenir de lui coller mon poing en travers de la
figure, je te le jure.
— Il était furieux, il n’a pas réfléchi, c’est parti tout seule. Et je l’ai giflé la première, c’est de ma
faute.
— Je refuse de t’entendre dire que tu es responsable de ça. Je suis sérieux. Pourquoi tu l’as giflé, il
n’a pas été correct ?
— Je n’ai pas envie d’en parler. C’est passé maintenant.
— Tu peux te confier Alyssa. Tu as compris que tu pouvais me faire confiance. Raconte-moi, je sais
que tu étais seule dans ta chambre, ça tu me l’as dit dans tes messages.
— Il est venu me retrouver vers deux heures du matin. Il n’arrivait pas à dormir à cause de la
confrontation que nous avions eue plus tôt dans la soirée. Il m’a demandé si j’allais le quitter, je lui ai
répondu que je ne savais pas. Ensuite, il est devenue très attentionné, il disait qu’il voulait … Ma voix a
de plus en plus de mal à se faire entendre, les mots se coincent dans ma gorge. Je me retiens de pleurer.
— Tu n’as pas à me donner de détails.
— Il disait que si je devais le quitter, il voulait m’étreindre une dernière fois, il était si délicat. Mais,
il a dit quelque chose qui m’était insupportable. J’ai essayé de le repousser, il n’était pas d’accord. Je
l’ai giflé, il me l’a rendue. Pour pouvoir me dégager de lui, je lui ai dit que j’accepterai de répondre à sa
question, s’il se poussait. Il s’est écarté, j’ai refusé de lui dire, il s’est fâché, je me suis enfuie.
— Il a essayé de te forcer ?
— Non, pas vraiment. Je te l’ai dit, j’étais d’accord jusqu’à…
— Il aurait dû te laisser quand tu lui as demandé. Je comprends mieux pourquoi tu es partie sans tes
affaires.
— Je me suis rendue compte que je n’avais pas mes clés. Il m’a dit que si je les voulais, je devais
d’abord m’expliquer avec lui et lui dire ce qu’il voulait entendre.
— Comment ça ce qu’il veut entendre ! Il te force à dire ou à faire quelque chose ?
— Non, il veut que je réponde à une question et je refuse de le faire.
— Il faudra que tu récupères ta voiture de toute façon et des habits demain.
— Je sais.
Mon téléphone sonne, c’est lui. je ne décroche pas. Il m’a envoyé des messages. Où es-tu ?
Second message : Si je n’ai pas de nouvelles dans quinze minutes je préviens la gendarmerie. Oh
non, le message remonte à plus de dix minutes.
— Je vais lui répondre, il menace de prévenir les gendarmes si je ne lui donne pas de nouvelles.
— Qu’il le fasse, il n’aura qu’à expliquer que tu es partie à cause de sa violence.
— Je ne veux pas que ma famille soit au courant de ça. Je ne veux pas que ça aille si loin. Il doit
s’inquiéter là.
— Il aurait dû s’inquiéter bien avant.
— Je vais lui marquer que je ne rentre pas, pour qu’il me laisse tranquille.
Je ne rentre pas. Inutile de prévenir les gendarmes. Thomas est mécontent que je lui réponde, mais
je ne peux pas le laisser appeler les gendarmes.
Hugo : Où es-tu ? Tu es avec lui ? Qui est-ce ?
— Qu’est-ce qu’il te dit ?
— Il veut savoir où je suis.
— C’est un connard, laisse-moi lui dire.
— Non, je ne veux pas.
— Alyssa, ça ne me regarde pas, mais il te manipule.
Moi : Je vais mieux loin de toi.
Hugo : Excuse-moi alyssa, j’ai pété les plombs de savoir que tu pensais à un autre que moi, ça ne
se reproduira plus. Rentre.

Comment peut-il me demander de rentrer après ce qui s’est passé ?

Moi : Je ne rentrerai pas ! Je ne pensais qu’à toi au moment où tu as pété les plombs. À demain.
J’éteins mon téléphone après m’être assurée qu’il n’alerterait personne. Il est presque cinq heures du
matin.
— Tu peux t’allonger à côté de moi si tu veux Thomas.
— Je ne suis pas contre dormir une heure ou deux. Je vais me mettre au-dessus de la couverture,
comme ça tu pourras rester dessous.

Il retire ses chaussures, éteint la lumière et s’allonge de l’autre côté du lit. Il me faut un moment pour
réaliser ce qui vient de se passer ce soir. Quand j’arrive à la partie où Thomas dort dans le même lit que
moi, je crois rêver… D’ailleurs je ne tarde pas à rêver de lui.
La lumière du soleil traverse la chambre et parvient jusqu’à moi, me chauffant le visage, je me
retourne pour pouvoir ouvrir les yeux sans être éblouie et je tombe nez-à-nez avec Thomas ! Oh merde ! Il
est encore là, il dort bien, par contre il est sous les draps, je soulève délicatement ceux-ci.

Ouf il est entièrement habillé. Il est si paisible, il est encore plus beau quand il dort. J’ai envie de le
toucher, j’aimerais caresser son visage… Mes paupières sont encore lourdes, elles se referment
rapidement. C’est la main de Thomas qui me réveille, elle repose sur mon ventre, au contact de ma main.
Je suis très surprise qu’il ait fait ce geste, mais en le regardant je vois qu’il dort encore. Je vais saisir sa
main et la reposer près de lui.
Lorsque je touche sa main, un frisson me parcourt et alors que je tente de l’éloigner, il resserre ses
doigts autour des miens. Je suis paralysée. Je ne bouge pas et choisis de faire comme si je ne savais pas
et me rendors avec sa main dans la mienne.

Chapitre 27

Lorsque je m’éveille, je suis à plat ventre, visage orienté vers Thomas, il me regarde, les yeux grands
écarquillés. Je réalise que la surface dure sur laquelle se trouve mon ventre est sa main dans la mienne,
terriblement confuse, je me soulève et ouvre la main pour laisser échapper la sienne. Il la retire
délicatement, laissant promener ses doigts dans la paume de ma main chaude. Il effleure ma joue.
— Son geste a laissé des traces, tu as bien fait de m’appeler. Précise Thomas les mâchoires serrées.
— Je ne sais pas, je m’en veux vis-à-vis de votre femme, de ta femme. Lui avoué-je embarrassée.
— Ma femme ne s’inquiètera pas, elle sait que je ne serai pas là ce matin.
J’aimerais bien savoir ce qui lui a dit, sait-elle qu’il est avec moi ?
— Ah bon. Dis-je perplexe.
— Je ne lui ai pas parlé de toi, ne t’inquiète pas. On va aller récupérer tes clés et tes affaires ce
matin.
— Le problème c’est qu’il faut qu’Hugo soit présent, comme je n’ai pas les clés.
— Comme tu veux, sinon je casse un carreau s’il le faut.
Je ris en entendant sa proposition. Mais il voit à ma tête que je ne suis pas d’accord et se ravise.
— Je plaisante, mais s’il le faut vraiment, je peux le faire.
— Non, je pense qu’il va avoir retrouvé ses esprits ce matin. Mais je ne suis pas sûre qu’il reste
calme s’il me voit arriver avec toi.
— Et pourquoi ça ? Tu devais bien appeler quelqu’un.
— Oui mais je pense qu’un homme sera forcément moins bien accueilli qu’une de mes sœurs par
exemple.
— Tu as des sœurs dans le coin.
— Oui, j’en ai deux. Mais elles ne veulent pas comprendre ce qui se passe. Ça fait dix ans que je vis
avec Hugo, pour elles c’est juste un passage et je dois rentrer.
— Dix ans que tu vis avec lui ! Ajoute Thomas surpris.
— Oui mais il n’a jamais été comme ça avant ces jours-ci. Je ne sais pas expliquer comment nous en
sommes arrivés là, mais nous sommes au bout de notre histoire. Je viens de découvrir que j’avais ma part
de responsabilité.
— Tu vas me trouver dur, mais un homme qui ose te frapper ne te mérite pas de toute façon.
— Je suis sûre qu’il s’en veut, il a perdu les pédales.
—Tu l’excuses ?
— Non, mais j’essaie de me mettre à sa place, ce que je lui ai dit était dur à encaisser. S’il m’avait
avoué voir quelqu’un d’autre, j’aurais probablement mal réagi.
Thomas reste sans voix, il est comme décontenancé. Je corrige aussitôt mes propos :
— Je ne veux pas dire que je vois quelqu’un d’autre, ce n’est pas le cas. C’est juste plus compliqué.
— Je ne te juge pas, ça ne me regarde pas.
— Non, j’insiste. Je ne l’aurais jamais trompé. Il en doute, mais je n’ai absolument rien fait.
— Pourquoi est-ce qu’il le pense alors ?
— Je lui ai laissé sous-entendre quelque chose du genre… Il m’a fait cet aveu concernant cette
institutrice qui s’intéressait à lui, en m’assurant qu’il ne se passait rien. J’ai profité de l’occasion pour lui
dire que j’avais remarqué quelqu’un, mais je lui ai assuré qu’il ne s’était rien passé. Il ne me croit pas, je
ne lui ai pas menti, je n’ai même jamais rien dit à cette personne. Rajouté-je avant de devenir écarlate.
— Je vois.
— Il était jaloux hier soir, comme je l’étais quand il parlait de cette instit. Peu importe, je pense que
si nous avons été distraits par d’autres personnes, c’est qu’il y avait déjà un malaise entre nous.
Thomas semble gêné, un court silence s’installe avant qu’il se décide à parler :
— Excuse-moi de m’être retrouvé sous les draps.
— Ce n’est rien. Je n’étais pas très à l’aise, car euh… je ne porte même pas de sous-vêtements…
Thomas rougit, il se lève brusquement du lit en prenant soin de ne pas soulever les draps et ajoute :
— Excuse-moi encore… On va prendre un café ?
Je sens bien qu’il est gêné de savoir qu’il était dans le lit avec moi, alors que je n’avais rien sous ma
nuisette et qu’il avait sa main posée sur moi… Je sais de quoi ça a l’air, mais il dormait.
— Je ne pourrai pas aller bien loin dans ma tenue…
— Ah oui, j’oubliais. Je vais aller nous chercher un café en bas si tu veux.
— Si tu veux.
— Ok, tu ne sors pas d’ici !
— Je n’en ai pas l’intention.
Thomas sort de la chambre, j’en profite pour sortir du lit. Cette nuisette est vraiment trop courte, je ne
vais jamais sortir d’ici en plein jour. Comment puis-je me procurer des vêtements ? Je m’enveloppe dans
un drap, car je ne peux pas rester debout à moitié à nue quand il va revenir.

Après quelques minutes d’hésitation, je décide d’envoyer un texto à Hugo : Puis-je passer ce matin ?
J’appréhende vraiment de rentrer après la scène d’hier soir.
Tu es chez toi.
Je ne considère plus être chez moi là-bas…
Moi : Je n’ai pas mes clés pour entrer.
Il le sait déjà.
Hugo : Je ne bouge pas.
J’aurais préféré qu’il me dise qu’il ne serait pas là, mais qu’il laisserait ouvert.
Moi : Ok.

— Oh Thomas, je ne t’ai pas entendu entrer. Dis-je surprise en me retournant face à lui.
— Il y a du monde dans les couloirs. Tu ne pourras pas sortir sans te faire voir.
— Si je sors avec un drap sur moi, c’est plus discret ?
Nous rions tous les deux. Thomas me dépose un café sur le bureau.
— Fais attention, c’est très chaud.
— Merci.
— J’ai une idée, j’ai croisé Marjorie, l’interne de cardio en bas, j’ai pensé qu’on pourrait lui
demander de te dépanner.
— Mais elle ne va pas comprendre pourquoi. Je ne sais pas quoi trouver comme excuse.
— Ok, attends une minute.
Il pose son café à côté du mien et retire son pull devant moi. Oh la vache, il est trop sexy, je détourne
les yeux rapidement, mais c’est trop tard. Il a un torse magnifique, mieux que dans mon imagination. Il est
carré, musclé, sa peau est mate, et ses poils dessinent une ligne verticale en dessous son nombril…Hum !
Je fonds !
— Tiens, enfile-le. Me dit Thomas en me tendant son pull.
— Comment ? Et vous ?
— Le pull te couvrira plus que ma veste, il sera plus ajusté et moi, je vais mettre ma veste fermée.
— Je te remercie.

Je saisis le pull de Thomas et reste figée sur place à l’idée de devoir l’enfiler. Il se met dos à moi,
j’ôte le drap enroulé autour de moi et enfile son chandail, au moment où il passe devant mon visage, le
parfum de Thomas éveille mes sens. Il descend jusqu’en dessous de mes fesses. C’est comme si je portais
une mini-jupe, c’est plus acceptable.
J’émets un bruit de gorge pour lui signifier que j’ai terminé. J’observe les courbures de son dos, ses
omoplates ressortent, son corps est envoûtant. Il se retourne et fait un pas vers la chaise pour prendre sa
veste. Il tourne la tête vers moi, il a dû sentir que je l’étudiais, peut-être que je le désirais…


Chapitre 28

Thomas se rapproche davantage, il tend la main et effleure mon avant-bras du bout des doigts. Je
ferme les yeux et apprécie son souffle sur ma peau, mon cœur s’emballe, il bat à tout rompre, il est au
bord de l’asystolie. Mes mains tremblent, je ne peux les retenir jusqu’à ce que Thomas passe son autre
main dans mes cheveux, emmêlant et serrant légèrement mes cheveux dans ses doigts. À ce moment
précis, je sens que je perds le contrôle c’est la chute libre !
Il exerce une légère pression sur ma tête pour me rapprocher de lui, je devrais l’arrêter, mais je n’en
ai pas la force. C’est une sensation intense et inconnue. J’ai le sentiment que sous ses doigts, chaque
partie de mon corps est une zone érogène. Une vague de chaleur m’envahit à chaque fois qu’il déplace sa
main le long de mon bras. Puis, sa bouche vient frôler la mienne, avant de s’écraser sur celle-ci. Ce
contact inattendu me fait frémir, il met fin à ma torture par ce baiser tant espéré.
De façon impulsive et incontrôlée, je passe ma main sur sa nuque pour l’attirer plus près de moi et lui
rendre son baiser ardent. Sa bouche s’ouvre légèrement, la mienne épouse parfaitement ses mouvements.
Spontanément, je passe mes doigts dans ses cheveux, ce que je rêvais de faire depuis des mois, pourtant
cela me semble encore irréel. Je n’ai plus la capacité de résister à le toucher. Il quitte ma nuque pour
descendre sur mon dos et me serrer contre lui. Mon ventre se contracte lorsqu’il s’approche du sien, sa
main descend plus bas et remonte légèrement sous son pull pour venir se poser à hauteur de mes reins sur
ma nuisette.

La sensation d’être à lui est exquise, je laisse mes mains se balader sur ses épaules, le haut de son
torse, il semble apprécier, je l’entends et le sens respirer de plus en plus fort. Il avance, me faisant
reculer jusqu’à ce que mes jambes touchent le lit. Il me renverse dessus, quittant mes lèvres une seconde.
J’ouvre les yeux, le découvrant torse nu au-dessus de moi et la situation semble nous surprendre tous
les deux. Je retire mes mains de son dos, instantanément il s’écarte de moi. Je me mords la lèvre
timidement, baissant les yeux. Il se relève, je remarque que ma nuisette ne couvre à peine que le haut de
mes cuisses, je tire dessus et me relève aussitôt.
— Aly…ssa je ne sais pas ce qui m’a pris, je suis désolé.
— Je le suis aussi.
Thomas s’éloigne pour enfiler sa veste et boire son café. J’essaie de rassembler mes idées, mais mes
lèvres presque endolories de ce contact fougueux m’en empêchent.
Nous nous sommes embrassés, je n’ai jamais été embrassée de la sorte auparavant. Je bois mon café
qui a eu le temps de refroidir, pour éviter de rester inoccupée.
— On peut y aller ? Me demande Thomas sans me regarder.
— Oui, je vous rejoins dans quelques minutes.
Il sort de la pièce sans même se retourner. J’ai peur que notre relation ne soit brisée par ce baiser
torride. Je pense à sa femme, il doit y penser aussi. J’ai les poils hérissés à cette idée. J’avais
suffisamment de problèmes à résoudre avec Hugo…
Je descends les escaliers, sans faire de bruit. En arrivant, dans le hall, je croise deux internes de
médecine, ils me saluent d’un geste de la tête, je leur rends pour ne pas attirer l’attention et sort
précipitamment. Je monte dans la voiture de Thomas, qui attend moteur allumé.
— Je peux me débrouiller pour rentrer Thomas. Dis-je confuse.
— Je t’avais dit que je te ramènerais, ça n’a pas changé. Dit-il sur un ton froid et distant. Presque
glacial.
J’ai la crainte d’avoir tout gâché…
— J’habite à deux rues du bar où j’étais hier soir.
— D’accord.
Le trajet se fait en silence, je prends le temps d’observer sa voiture parfaitement rangée et astiquée.
Lorsque nous nous approchons, je lui indique où tourner.
— Il vaut mieux arrêter la voiture ici. Je vais y aller toute seule, merci pour votre aide.
— Non, tu ne peux pas y aller seule, s’il recommençait à…
Je l’interromps aussitôt.
— Il ne lèvera plus la main sur moi, j’en suis certaine. Si nous entrons tous les deux, ça se passera
forcément mal.
— Ok, je ne vais pas te forcer. S’il se passe quoique ce soit, tu me préviens ! Tu gardes mon pull sur
toi pour sortir.
— Merci, je vous le rendrai lundi matin.
— Alyssa, arrête de me vouvoyer.
— Bonne journée, merci encore pour tout.
— Je t’en prie. Je n’ai pas fait grand-chose.
Je quitte sa voiture et me dépêche d’aller à la maison. Je frappe.
Hugo ouvre la porte, la peur me gagne quand il apparaît. Il reste immobile en me regardant. Il
parcourt mon visage du regard et s’attarde sur ce qu’il m’a fait. Je vois son visage crispé, il est pétrifié.
— Alyssa, je regrette tellement mon geste, je ne pensais pas avoir été si…
Il ne termine pas sa phrase, j’avance et il s’écarte pour me laisser passer. Je me dirige directement
dans ma chambre pour prendre une tenue décente et surtout des sous-vêtements. Je m’enferme à la salle
de bain pour me doucher et m’habiller.

Je maquille un peu mon teint blafard essayant de camoufler la naissance de l’hématome. Je vais dans
le placard dans l’entrée, et je prends une valise, j’y mets tout ce que je peux dedans, des vêtements, des
affaires de toilette. Je prends une autre valise pour rassembler le maximum d’effets personnels dont je
pourrais avoir besoin, sous le regard contrit d’Hugo.
— Tu me quittes Alyssa ? Putain Alyssa, je m’en veux vraiment ! Laisse-nous une chance, je ne peux
pas vivre sans toi. Je te crois quand tu dis qu’il ne s’est rien passé.
En entendant ses mots, je réalise que même s’il me fait de la peine, il est trop tard, je ne renoncerai
pas à le quitter. Je n’ai plus aucun doute depuis hier soir, ce qui s’est passé avec Thomas n’a fait que
renforcer cette certitude.
La séparation va nous faire souffrir, je ne vais pas tourner la page facilement après tant d’années
communes, mais je sais que mon avenir n’est pas à ses côtés.
— Aly, s’il te plaît. Ajoute Hugo.
— Ne m’appelle pas comme ça.
Je ne veux plus jamais que quelqu’un d’autre que Thomas me surnomme comme ça !
— Tu as pris ta décision, j’ai le droit de savoir ?
— Oui, je pars. Je ne resterai pas une nuit de plus ici, je ne me sens plus chez moi.
Je sais que je suis un peu brutale avec lui, mais il l’a été suffisamment avec moi hier soir, et je ne
veux pas le laisser croire que quelque chose est encore possible entre nous.
— Ta décision est définitive ? Tu ne vas même pas prendre le temps d’y penser ? Tu vas tirer un trait
sur toute notre histoire pour quelques doutes et une altercation ?


Chapitre 29

— Hugo, tu plaisantes quand tu dis quelques doutes ? Tu n’en es pas à tes premiers doutes à priori, et
c’est à mon tour. Je t’ai presque imploré de m’épouser, tu ne voulais pas. Le jour où tu es prêt, je ne le
suis plus. Ce n’est pas un simple malentendu, tu as vu où ça nous a menés hier soir ? Je ne parle pas
seulement de nos gestes. Je me suis retrouvée quasiment nue dans la rue en plein milieu de la nuit, tu n’as
rien fait pour que je rentre sur l’instant. Je ne tire pas du tout un trait sur ce que l’on a vécu, c’est évident
que je vais continuer de penser à toi, tu as été mon premier grand amour, j’aurais pu te donner ma vie…
Je t’aimerai sûrement toute ma vie, mais différemment avec le temps.
Hugo reste aphasique devant moi, j’ai le sentiment d’être destructrice pour lui. Je sais qu’il
parviendra à se reconstruire, il le faut, c’est un homme bien.
— Tu rencontreras quelqu’un de bien, car tu le mérites et là tu sauras… Tu n’auras pas besoin
d’attendre dix ans.
— Alyssa, en dépit de tout ce que tu crois, c’est de toi dont j’ai besoin, c’est toi que je veux comme
épouse. J’en suis certain aujourd’hui.
— Je ne veux plus devenir ta femme Hugo, même si ça me fait mal de te le dire, je me dois d’être
franche avec toi. Je vais contacter le propriétaire. Dis-moi ce que tu préfères, je peux me retirer du bail
et dans ce cas, toi tu peux rester ici ou bien nous pouvons donner notre préavis tous les deux ?
— Ça ne peut pas attendre un peu ?
— Non.
— Je vais rester ici pour le moment, mais tu n’es pas obligée de retirer ton nom du bail. Laissons
passer quelques jours Alyssa.
— Si, j’y tiens. Je le contacte dès cet après-midi.
— Mais tu vas aller où ?
— Je vais trouver, ne t’inquiète pas pour moi. Je viendrai récupérer le reste de mes affaires plus tard,
je garde le double de la clé en attendant si ça ne t’embête pas.

Je sors charger ma voiture, j’ai du mal à déglutir ma salive, j’ai la gorge serrée. Je ne réalise pas ce
qui se passe. C’est juste impossible. Je ne peux pas être en train de me séparer d’Hugo, sans en avoir
parlé à ma famille, à Emma… Je me retrouve seule, à la rue, je ne sais même pas où aller. Je lance un
dernier regard à Hugo avant de monter dans ma voiture. Je me rends chez mes parents, sans les avertir de
ma visite. J’appréhende leurs réactions, ils adorent tous les deux Hugo, je ne veux pas que ça change pour
autant. Je veux juste qu’ils acceptent ma décision.
Lorsque ma mère ouvre la porte, les questions s’enchainent. Elle demande une explication aux
marques sur mon visage, je lui dis que je me suis cognée, elle ne semble pas y croire. J’évoque les doutes
sur ma relation, je lui passe les détails concernant Thomas. Elle pleure dès lors qu’elle comprend que
nous avons rompu, je m’effondre avec elle.
— Tu étais pourtant si heureuse avec lui. J’ai peur que tu le regrettes Alyssa.
— Non, maman. Je n’ai connu que lui, j’ai toujours cru que c’était l’homme de ma vie, mais non, je
me suis trompée. Il n’a pas su répondre à mes besoins, à mes attentes. Je réalise que mes sentiments ont
changé. Je ne vous demande pas de comprendre, juste de l’accepter. Ne rends pas les choses plus
compliquées.
— Nous respectons ta décision, nous sommes sous le choc quand même. Hugo est comme un fils pour
nous. Tes sœurs le savent ?
— Non, elles ne le savent pas vraiment. Hugo m’a avoué avoir douté plus d’une fois aussi sur nous.

Un peu plus tard dans l’après-midi, j’appelle le propriétaire qui propose un avenant de contrat, il faut
définir un rendez-vous, afin que l’on se voit tous les trois pour le signer et je serai libérée de tout
engagement. Ma mère me propose de m’installer chez eux dans l’attente de trouver un logement. J’accepte
à contre cœur.
Mes sœurs passent dans l’après-midi, je dois leur resservir le même discours qu’à mes parents, c’est
épuisant. En soirée, j’arrive à joindre Emma et là je réalise l’ampleur de la situation. Je suffoque, je
m’étrangle en essayant de lui raconter les véritables raisons. Elle pleure à chaudes larmes aussi. Je ne lui
épargne pas de détails sur ce qui s’est passé avec Hugo ces dernières vingt-quatre heures. La seule chose
que je garde sous silence c’est l’identité de Thomas… Je reste évasive quand elle me questionne sur cet
homme qui travaille avec moi.
J’aimerais qu’elle comprenne que c’est aussi ce qui m’a permis de réaliser que je doutais de mon
couple. Emma ne me juge pas, elle ne l’a jamais fait d’ailleurs. Je sais qu’elle peut tout entendre mais je
la préserve vis-à-vis d’Hugo. Tous les deux sont amis aussi. Emma m’assure qu’elle va faire tout son
possible pour venir me voir rapidement.
Je suis libérée d’un poids en raccrochant, Emma est au courant. Je sais qu’elle est une des rares
personnes à pouvoir assimiler que je suis partie, mais que j’en souffre.
Le reste de notre entourage l’apprendra bien assez tôt, je n’ai pas le cœur à avertir plus de personnes
pour aujourd’hui. Mon téléphone sonne, c’est monsieur Morin, le propriétaire, il m’informe que le
rendez-vous est fixé à mercredi prochain à dix-huit heures, il me précise qu’Hugo a donné son accord. Je
suis soulagée de savoir que ce sera vite réglé.

Nous n’avons pas de crédit en commun, nous ne sommes pas mariés, nous n’avons pas d’enfants.
Nous avons uniquement un compte commun sur lequel nous faisons des virements de nos salaires
respectifs pour payer le loyer et les charges. Ça m’a toujours dérangée de vivre comme ça, mais
aujourd’hui j’apprécie le fait que ça nous simplifie les procédures.

Il est dix-neuf quand je décide d’aller faire un tour en ville pour me changer les idées. J’envoie un
texto à Aurélie : Tu es dispo demain ? Je dois te parler.
Elle ne travaille pas normalement ce week-end, car nous avions le même roulement avant que je
change de fonction. Elle ne tarde pas à me donner une réponse : Tu veux que je vienne maintenant ? Ça
va ?

Aujourd’hui ? Je ne suis pas sûre d’avoir la force de tout reprendre.
Moi : Je pense que demain est une meilleure idée, je suis à bout.
Je sais qu’elle va s’inquiéter, elle est comme ça Aurélie, c’est une fille géniale, je l’adore. J’ai peur
qu’Hugo cafarde à propos de cet homme marié avec qui je travaille. Elle va me questionner, mais je ne
pourrais jamais lui confier l’identité de Thomas car c’est son chef à elle aussi.
Aurel : Si ça ne va pas, je peux venir te voir ce soir ? Ça a un rapport avec le fait que tu étais à
l’internat cette nuit ?
Oh, non elle est déjà au courant de ça, mais comment ? Elle doit savoir que Thomas y était, peut-être
qu’elle sait que nous nous sommes embrassés ? Mais non, Alyssa, calme-toi, elle ne peut pas le savoir…
Moi : Oui en effet. Je suis en ville, tu peux venir ?
Il faut que je lui parle vite. Un message de nouveau : Oui dans dix minutes. Rdv au pmu.
Moi: OK. Je réfléchis à un plan en me rendant au PMU. Dix minutes plus tard Aurélie arrive me
rejoindre.

Chapitre 30

Elle est soucieuse, sans attendre elle me questionne en faisant de grands gestes:
— Dois-je m’inquiéter ? Qu’est-ce qu’il t’arrive Alyssa ? Tu as mauvaise mine. Et c’est quoi cette
bosse ?
— Assieds-toi Aurélie ! J’ai passé une mauvaise nuit.
— Alors, explique-moi, tu as dormi à l’internat ?
— Qui te l’a dit ? Demandé-je intriguée.
— Aline, l’interne de mon service, je l’ai croisée en ville ce matin. Tu la connais, elle aime bien les
potins. Elle a dit que tu étais sortie tôt ce matin de l’internat, étrangement habillée. J’ai pensé qu’elle se
trompait, que ce n’était pas toi.
— Si, c’était moi. Je te fais la version courte. Avec Hugo, c’est terminé !
— Tu déconnes, arrête ! Il t’a demandée en mariage. M’interrompt Aurélie.
— Écoute-moi, je n’ai pas le cœur à plaisanter. J’ai dormi à l’hôtel mercredi et jeudi soir. Ne sachant
pas combien de temps ça allait durer, j’ai demandé vendredi la clé d’une chambre à l’internat au cas où.
J’avais décidé de rentrer vendredi, mais dans la nuit, nous avons eu une altercation et j’ai atterri à
l’internat. Je suis partie tôt ce matin, et j’ai rompu avec Hugo.
Aurélie est attristée en m’écoutant. Elle me pose plein de questions, pourquoi ? Comment est-ce
arrivé ? Comment ont réagi mes parents ? Je ne réponds que vaguement à la moitié des questions.
— Je suis atterrée de l’apprendre aussi brutalement. Pourquoi est-ce que tu ne m’en as pas parlé plus
tôt Alyssa ?
— Parce que tout est arrivé très vite, je ne pensais pas que nous allions rompre. Je n’ai pas mesuré la
gravité de la situation immédiatement. Je ne suis pas encore certaine de réaliser…
— Et Hugo comment va-t-il ?
— Je ne sais pas trop. Il croit que je vais revenir, mais il se trompe.
— Vous formiez un couple parfait à mes yeux. Je n’arrive pas à croire que ça puisse vous arriver à
vous.
— Il y a autre chose Aurélie. Il va peut-être te questionner.
— Ah bon, à quel sujet ? S’étonne-t-elle.
— J’ai été franche avec lui concernant mes sentiments... Je ne voulais pas te le dire pour le moment,
mais je pense qu’il va-t’en parler et tu vas te poser des questions. Autant que tu le saches maintenant. Je
lui ai parlé d’un autre homme qui attire mon attention et qui travaille à l’hôpital.
— Quoi Alyssa ? De qui parles-tu ?
— Je pense que tu ne le connais pas et je ne veux pas m’étendre sur le sujet. Il ne s’est rien passé, j’ai
juste trouvé qu’il était bel homme et il m’est arrivé de penser à lui.
— Pourquoi tant de mystère si tu ne fais que le trouver charmant ? Je ne comprends pas, ce n’est pas
interdit. Pourquoi tu as parlé de ça à Hugo ?
— C’est plus compliqué Aurélie, j’y pense depuis quelques temps à cet homme-là, ça signifie que
mes sentiments ont changé pour Hugo.
— Et cet homme, est-ce que tu as des sentiments pour lui ?
— Non, aucun. Je le connais à peine tu sais.
— Et lui, il t’a remarquée ?
— Non, pas du tout.
— Pourquoi tu ne veux pas me dire qui c’est ?
— Parce que ça te forcerait à mentir à Hugo s’il te posait la question et que ça n’a aucune importance,
puisqu’il ne se passe rien. Je n’ai pas envie d’avoir à me justifier sans cesse à propos de lui.
Nous bavardons un moment avant de se quitter. Sur le chemin du retour, je me remémore le baiser que
nous avons échangé ce matin, Thomas me manque. Je n’aurais jamais imaginé que quelque chose avec lui
puisse réellement arriver. Si les choses étaient différentes entre nous à présent, s’il m’évitait ? S’il
avouait tout à sa femme ? STOP, je n’ai aucun avenir possible avec lui. Je trouverai la personne qu’il me
faut et j’oublierai Thomas.

En sortant mon téléphone de la poche, je remarque le voyant rouge, j’ai un message ! Pourvu que ce
soit lui ! Oui, c’est lui : Tout va bien aly ?
Non, ça ne va pas, parce que je pense à toi et que tu n’es pas là, mais ça va mieux, parce que tu
penses à moi. Oh c’est tordu comme réflexion…
Moi : Ça va mieux ce soir et « toi » ça va ?
Il aura suffi d’un seul message venant de lui pour que je me sente mieux.
Thomas : Tu dors chez toi ce soir ?
Moi : Non, je n’y dormirai plus…
Thomas : Oh ! Tu es sûre que ça va ? Tu es retournée à l’hôtel ?
Oui ça va et toi ?? Non je ne dors pas à l’hôtel. Je vais rester chez mes parents le temps de
retrouver un logement…
En arrivant chez mes parents, ma mère est au téléphone, elle reste muette, surprise par mon entrée.
J’ose lui poser la question, mais je suis sûre de connaître la réponse.
— C’est lui maman ?
— Oui, il s’inquiétait. Précise-t-elle honteuse.
Je pars m’enfermer dans la chambre. Ça va être comme ça tous les jours ? Je l’entends d’ici, elle
essaie de parler doucement, mais c’est peine perdue. Elle lui dit qu’elle est persuadée que ça va
s’arranger. J’ai envie de hurler au monde entier d’arrêter de se mêler de ma vie. Merde !
Je ne tiendrai jamais plus d’une semaine ici. Thomas m’a répondu : Je vais bien merci. Content que
tu ne sois pas de nouveau à l’hôtel. J’ai des contacts si tu veux te loger rapidement. N’hésite pas à me
demander. Oui, je vais bien.

Qu’est-ce que j’entends ? Quoi je rêve ? Ma mère lui a dit de passer s’il voulait, elle lui a dit que
j’étais là. Certainement pas, je refuse de le voir ce soir. Je sors de ma chambre furieuse :
— Pourquoi tu lui as dit de venir maman ?
— Je veux juste arranger les choses, tu es impulsive, tu risques de regretter…
— Ça suffit, je n’ai plus quinze ans, MERDE! Je t’ai simplement demandé de l’accepter. Je ne veux
pas que tu essaies d’arranger les choses. C’est ma vie, tu entends ? Ne m’attends pas, je ne rentrerai pas
ce soir, ce n’était pas une bonne idée de venir ici ! Merci de ton soutien MAMAN !
Je ne traîne pas une minute de plus ici, il va débarquer d’un instant à l’autre. J’envoie un message à
Thomas : Oui je veux bien des numéros, ça risque d’être plus urgent que je ne le pensais !!!
S’il faut que je déménage loin d’ici, je le ferai.
Thomas : Un problème ?
Moi : Oui ma mère l’a invité à passer… je viens de partir, finalement ce sera hôtel cette nuit.
Je me fiche du côté financier, je suis mieux toute seule.
Thomas : Je vois. Tu retournes à l’escale ? Sinon je peux te passer une clé de l’internat ?
Je ne vais pas lui dire qu’Aline m’a vue ce matin, mais je ne peux pas accepter, il n’y a même pas de
toilettes dans la chambre. Je le remercie de sa proposition : Non merci. Je serai plus libre à l’hôtel, oui
à l’escale. Je pensais que ça allait mieux, mais en fait non…
Le réceptionniste se souvient de moi, il me donne la même chambre, puisqu’elle est disponible. Cette
fois-ci, je n’ai pas de valise. Thomas :Puis-je passer te voir ? Je suis un peu deconcerté par … tu sais
ce matin…
C’est peut-être une bonne idée, on va se mettre d’accord sur ce malentendu et nous retrouverons des
rapports strictement professionnels.
Moi : Oui, je le suis aussi. Mais est-ce une bonne idée de vous absenter à nouveau ce soir ?
Je ne tiens pas à ce que sa femme découvre qu’il me retrouve à l’hôtel.
Thomas : Je suis seul jusqu’ à demain soir, ça ne posera pas de soucis. Je peux venir maintenant…

Chapitre 31

J’accepte sa proposition : Entendu, chambre 21…


Je m’allonge sur le lit en attendant qu’il vienne me retrouver pour me dire qu’il faut oublier ce qui
s’est passé… mais je n’oublierai jamais ! Je suis montée dans sa voiture à deux reprises, j’ai porté son
pull hier matin, nous nous sommes embrassés, j’ai passé ma main dans ses cheveux, sur le haut de son dos
et sur une partie de son torse. Lui aussi a posé ses mains sur moi...
Chaque instant, chaque image est gravée. J’aimerais tellement recommencer, si je pouvais revivre
cette scène, je ne changerais rien, peut-être que j’ajouterais quelques baisers dans son cou, sur ses
épaules et ses bras si musclés. On frappe à la porte, je me relève du lit pour aller ouvrir.
— Bonsoir Thomas. Dis-je d’une voix incertaine.
Il est élégant comme à son habitude, j’aperçois sous sa veste, la chemine grise qu’il porte souvent,
c’est de loin ma préférée !
— Bonsoir Alyssa. J’espère ne pas te déranger.
— Absolument pas. Je viens d’arriver.
— Tu as mangé ?
— Non. Qu’elle heure est-il ?
— Vingt heures trente passé. On peut aller manger si tu n’as rien prévu.
— Non, en effet, c’est une bonne idée.
Nous nous rendons sur le parking de l’hôtel, Thomas se dirige vers sa voiture et moi vers la mienne.
Il s’arrête étonné :
— Tu ne montes pas avec moi ?
— J’ai récupéré mes clés et ma voiture !
— C’est ridicule, on ne va pas prendre deux voitures. Lance-t-il.
— Très bien. Où allons-nous ?
— Choisis si tu veux, ça m’est égal.
— Oh, je ne suis pas difficile.
— On peut aller à pied dans ce cas, au restaurant « L’influence » un peu plus bas. Me propose
Thomas.
— Parfait, j’y suis déjà allée avec des amis, c’est sympa comme endroit.
Nous quittons le parking en conservant une large distance entre nous. C’est une distance de sécurité ?
Il a peur que je lui saute dessus ou quoi ? C’est lui qui m’a embrassée ce matin, je devrais lui rappeler. Il
porte sa veste en cuir, celle que je portais cette nuit. J’adore savoir qu’il la porte après moi…
— Ton pull est dans ma voiture, mais je n’ai pas encore lavé.
— Tu plaisantes, tu n’as pas besoin de le laver, tu l’as porté cinq minutes. Je le prendrai tout à
l’heure.
— Je suis gênée d’avoir déballé ma vie comme ça, sérieusement, j’ai honte Thomas. On se connaît à
peine.
— Ne sois pas gênée pour ça, moi je le suis pour une autre raison… Ajoute-t-il en rougissant.
J'adore le voir rougir, il essaie de se retenir, il esquisse un sourire pincé. Il est trop craquant ! Je ne
dois pas sembler sereine non plus, parce que je sais à quoi il fait référence.
— Tu me connais un minima quand même maintenant.
— Non, je ne sais rien du tout de toi. Mise à part les grandes lignes du parcours professionnel. Alors
que tu sais presque tout de ma vie privée aujourd’hui.
Nous entrons dans le restaurant, il y a du monde, mais c’est très calme. Le serveur nous installe au
fond de la salle, dans un espace un peu plus sombre, mais qui a l’avantage d’être plus confiné. Nous
regardons le menu en silence, une fois que notre commande est prise, nous reprenons notre conversation.
— Tu en étais où Alyssa ? Me demande Thomas.
— J’avais fini.
— Je ne sais pas grand-chose sur toi, je te rassure.
— Vous en savez plus que n’importe qui au travail, et que la plupart de ma famille sur le déroulement
de cette rupture.
— J’imagine que ce n’est qu’une toute petite partie de ta vie Alyssa. Il doit y avoir tant de choses à
découvrir…
— Enfin, vous m’avez vue dans une tenue totalement indécente, au beau milieu de la nuit. Je vous ai
harcelé de messages inadaptés un soir où j’avais trop bu et j’en passe.
— Vous, vous, vous… Tu n’es décidément pas à l’aise avec le tutoiement avec moi !
— Désolée, c’est votre côté hiérarchique qui prend le dessus parfois. Je peux faire l’effort de temps
en temps de vous tutoyer, mais je ne le ferai jamais au travail.
— Je comprends. Concernant les messages, on a pu en parler tous les deux, pour ma part, c’est
oublié. Et pour ta tenue la nuit dernière, j’étais tellement inquiet que je n’ai pas vraiment fait attention à
ce que tu portais.
— Bon, je vais la remettre tout à l’heure pour que vous puissiez vous rendre compte.
Il rit sans retenue, son rire est communicatif.
— Tu ne le ferais pas. Rétorque Thomas, avant de me faire un clin d’œil.
— En effet, mais uniquement parce que je n’ai même pas de quoi me changer ce soir. Plaisanté-je.
— Quel dommage, il va falloir que je t’emmène chercher ta nuisette ?
— Ce n’est pas drôle.
— Alors pour éviter le déséquilibre de la situation, je vais te parler un peu de moi. J’ai trente-six
ans, je suis marié depuis dix ans, j’ai deux enfants, Émeline qui vient d’avoir onze ans et Yanis qui en a
tout juste neuf. Ma femme est responsable d’une agence immobilière, nous sommes très pris
professionnellement. J’adore la lecture et la musique, j’aime jouer de la guitare le soir pour me détendre.
Et j’ajouterais que tu m’as vu torse-nu ce matin. Est-ce que tu me connais mieux maintenant ?
Il faut que j’encaisse les informations, que je les analyse… putain, il a trente-six ans, nous avons donc
sept ans d’écart ! Il est marié depuis dix ans et ses enfants sont déjà grands. Des loisirs ! J’imaginais qu’il
n’avait jamais de temps libre vu son emploi du temps.
Eh oui, je l’ai vu torse-nu ! Si je le connais mieux ? Hum, j’en voudrais bien davantage sur lui.
— Oui, effectivement, mais ce n’était pas nécessaire.
Nous mangeons en parlant du travail et nous abordons des banalités. Nous divisons la note car je
refuse catégoriquement de me faire inviter. Thomas cède mécontent. Nous marchons jusqu’à l’hôtel, la
gêne semble avoir disparue, car la distance de sécurité s’est amoindrie. Nous papotons un peu sur le
parking, je frissonne, car la température a nettement baissée. Thomas retire sa veste et me la pose sur les
épaules, on dirait que cela devient une habitude. Je pense immédiatement à son pull que je vais chercher
dans ma voiture pour lui rendre.
— Il fait froid, tu veux monter cinq minutes ? Demandé-je à Thomas sans aucune arrière-pensée.
— Ok, pas longtemps alors, tu as besoin de dormir, tu as quelques heures de sommeil en retard.
— Toi aussi par ma faute.
Nous montons et lorsque j’introduis la clé dans la serrure, Thomas ajoute :
— Ma nuit était très correcte.
Essaie-t-il de me faire passer un message ou suis-je en plein scénario imaginaire ? Peu importe, j’en
déduis qu’il était content d’être avec moi.
Je retire la veste de Thomas et la pose sur le canapé, je l’invite à s’assoir d’un geste.
— Aly, pour ce matin.
Il marque une pause, scrutant la moindre de mes réactions, j’évite son regard. Je savais que nous
allions en reparler, mais je ne m’attendais pas à me sentir aussi mal. Je peux difficilement expliquer ce
que je ressens, c’est un mélange d’excitation et de peur, j’ai peur car l’idée qu’il me dise ses regrets me
provoque une brûlure intense et profonde. Au fond de moi, tant que ce n’est pas exprimé par des mots, je
garde l’espoir que malgré la culpabilité, il a pu aimer.

Chapitre 32

— Oui ? Dis-je d’une façon presque imperceptible.


— Je ne veux pas de malentendu Alyssa, je n’aurais jamais dû... t’embrasser ce matin.
— Et moi je n’aurais jamais dû vous rendre ce… baiser.
— Je ne veux pas que tu t’imagines que j’ai profité d’un moment de faiblesse.
— Non, pas du tout, je ne le pense pas. Affirmé-je.
— Je ne sais pas ce qui s’est passé. Mais ça ne se reproduira pas. M’assure-t-il avec conviction.
— Jamais, évidemment.
— C’était… Lâche-t-il sans donner suite.
— C’était mauvais ? Lui demandé-je sur un ton à la fois affirmatif et interrogatif. J’ai besoin de
savoir ce qu’il en a pensé !
— Non, ce n’était pas mauvais, tu as trouvé ça mauvais ?
— Non, c’était…inattendu ! Répliqué-je confuse.
— J’y ai beaucoup repensé aujourd’hui, je me sens coupable. Avoue-t-il.
— Pareil pour moi.
— Peut-on faire comme si rien ne s’était produit ? Suggère-t-il.
— Oui, c’est ce que je souhaite. Dis-je en me levant.
Je parcours la pièce du regard à la recherche d’une distraction, je ne dois pas lui montrer que je
désire recommencer.
— Le problème c’est que … plus je me dis qu’il ne s’est rien passé et plus j’y repense Aly. Ajoute
Thomas en se levant à son tour.
— C’est la culpabilité qui fait ça. Affirmé-je tout en lui tendant sa veste d’une main tremblante, il est
temps qu’il parte.
Je me sens toute émoustillée, fébrile et je crains d’être incontrôlable dans quelques minutes s’il reste
devant moi à parler de ce baiser. Il se rapproche dangereusement de moi, je ne peux plus reculer ou bien
je vais tomber sur le lit comme ce matin…
— La culpabilité ? Ou le désir de recommencer ? Demande Thomas intéressé.
— La culpabilité. Lui confirmé-je indécise.
— Aly, je vais t’embrasser, parce que j’ai envie de le faire, si tu veux m’arrêter, fais-le maintenant.
Suite à sa déclaration, mes battements cardiaques pulsent dans mes oreilles, c’est assourdissant, ça
m’empêche de réagir. Putain, j’ai envie de lui maintenant. Il ne faut pas, je dois lui résister, mais sa voix
est sensuelle, sa bouche m’appelle. Il s’approche et place ses mains de chaque côté de mon visage.
— Aly, qu’est-ce que tu me fais ?
— Rien. Dis-je tentant de lui résister.
— Tu me fais perdre la tête ! Ajoute-il avant de porter ses lèvres sur les miennes.

Il m’embrasse éperdument, il me fait perdre tout contact avec la réalité. Il n’y a plus que lui et moi, ce
baiser est puissant, il est sauvage et sans limite. Nos langues affolées se mêlent l’une à l’autre. Sa langue
est agréable et généreuse. Thomas me fait basculer sur le lit avec lui, je suis allongée à ses côtés. Il ne
quitte pas mes lèvres, je laisse tomber sa veste sur le sol pour mieux l’enlacer. Il mordille ma lèvre,
l’aspire par moment, c’est un supplice de ne pas gémir, c’est tellement érotique. Il se serre contre moi,
nos corps se touchent, ses mains enlacent ma taille et m’attirent fermement vers lui.

J’ouvre les yeux au risque de tout interrompre comme ce matin, mais j’ai besoin de le voir pour y
croire. Je ne rêve pas, c’est lui ! Ses mains reviennent sur mon visage, puis descendent délicatement sur
mon chemisier, il déboutonne lentement les premiers boutons, laissant apparaître la naissance de mon
décolleté. Il m’aide à retirer mon chemisier sans quitter ma bouche. Je suis en débardeur contre lui. Il
effleure du revers de la main les courbes de ma poitrine. Il se redresse et s’allonge au-dessus de moi, il
n’appuie pas le poids de son corps sur le mien, j’aimerais pourtant qu’il le fasse, je veux le sentir contre
moi.

Il promène sa bouche dans mon cou, faisant basculer ma tête sur le côté. Je lâche un long soupir quand
il passe sa main sous mon débardeur et la pose enfin sur mon sein.
Je suis dans un état d’excitation impossible à décrire, il ne fait qu’attiser le désir, mon corps est en
feu. Je tente de faire remonter mes mains jusqu’aux boutons de sa chemise, mais mes gestes sont peu
coordonnés.
Quand je parviens à placer mes doigts sur le premier bouton, il observe mon geste. Il interrompt ses
caresses et se redresse pour ôter entièrement sa chemise d’un mouvement rapide.
Il place ses mains sur mon ventre, les glissent sous mon débardeur et le fait remonter doucement.
Dans sa façon de me regarder, il cherche mon autorisation, j’accompagne son geste en me le soulevant du
lit pour lui faciliter le retrait de ce tissu qui m’encombre.
Je me retrouve en soutien-gorge face à lui, j’en porte un noir en dentelle, il promène ses yeux
gourmands sur moi et je peux sentir que je lui plais. Je pose mes mains sur son torse d’athlète, sa peau est
douce et parfumée, j’ai l’impression d’être sous l’effet d’une drogue.

Il s’allonge enfin sur moi de tout son poids et m’embrasse avec ardeur. Je sens son corps bouger sur
le mien, je peux deviner son érection, il a envie de moi comme j’ai envie de lui. Sa bouche descend sur
ma poitrine, d’abord sur mon soutien-gorge et puis d’une main, il écarte la dentelle avant de déposer ses
lèvres sur la pointe de mon sein.
Ses gestes me procurent un plaisir intense, je sens que je vais exploser s’il ne s’arrête pas. Tandis
qu’il s’attarde sur mon sein, suçotant sa pointe, son autre main parcourt mon ventre et s’arrête sur mes
cuisses. Mes doigts parcourent son dos et s’attardent sur ses reins, je sens son dos se cambrer sous mes
doigts. Sa respiration est saccadée, il caresse mon entrejambe par-dessus mon jean, je me tortille à la
rencontre de son geste, mon corps se contracte à plusieurs reprises, je mets mon bras sur ma bouche pour
étouffer mon orgasme incontrôlé. Il ôte sa bouche de mon sein et vient souffler dans mon cou, me faisant
frissonner.

Je mets quelques secondes pour retrouver une respiration plus calme. Il continue à se promener sur
mon cou, ses caresses sont plus délicates. Je retire mes mains de son corps, il s’éloigne un instant de mon
cou pour me regarder. Je me sens confuse, honteuse d’avoir …
— Ça va ? Murmure-t-il.
— Je ne sais pas, nous n’aurions pas dû. Je n’ai même pas essayé de t’arrêter. Lui dis-je honteuse.
— Tu aurais voulu ?
— Oui ! Enfin non. Mais il aurait été préférable que je le fasse.
— Excuse-moi, je perds le contrôle quand je suis avec toi.
— Moi aussi. Je vais à la salle de bain, je reviens.
J’enfile mon débardeur et me lève du lit, je lui tends sa chemise, je ramasse mon chemisier au
passage. Mes jambes me portent à peine, je me regarde dans le miroir, j’ai une tête qui ne trompe pas,
décoiffée, joues rougies…On dirait que je viens de faire l’amour avec lui. C’est un peu ce que je ressens
en même temps. Je sens encore ses mains partout sur moi et cet orgasme… Si je n’avais pas repris mes
esprits, nous aurions probablement étaient plus loin. Je fais couler un peu d’eau fraîche et m’en passe sur
le visage pour faire redescendre ma température corporelle. J’arrange mes cheveux avant de sortir de là.
— Aly, je n’aurais pas dû venir. Excuse-moi encore une fois. Je ne pensais pas que nous aurions… Je
comprendrais que tu m’en veuilles.
— Non, je suis autant responsable. Merci pour la soirée Thomas. À lundi. Dis-je en ouvrant la porte
de ma chambre.
Thomas sort tête baissée sans se retourner, je referme derrière lui.

Chapitre 33

Il m’a fait jouir dans ses bras alors qu’il est marié ! J’ai vraiment honte de moi, il n’y a pas de mot
pour qualifier ce que j’ai fait, je me dégoûte. Si ça se trouve, sans m’en rendre compte je l’ai séduit vu
qu’il me faisait fantasmer. Quand je pense à ses enfants et à sa femme, si j’étais à la place de son épouse
et que je l’apprenais, j’en souffrirais tellement. D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours été
inflexible sur le sujet de l’infidélité. Pour moi, les personnes infidèles étaient des lâches, des faibles et ça
ne pouvait en aucun cas m’arriver. Mais aujourd’hui, je suis concernée et je me rends compte que tout
n’est pas blanc ou noir. Je ne vais pas me poser en victime, mais il existe entre Thomas et moi une
alchimie, une attirance évidente.
C’est décidé, je ne me laisserai plus approcher par lui, je ne veux plus risquer de déraper. Je suis tout
juste séparée d’Hugo et je me jette dans les bras d’un autre homme. Qu’est-ce qu’il m’arrive ?
Impossible de me retenir j’enfile son pull pour aller me coucher. Je sais que c’est malsain, mais il ne
le saura pas. Je me sens en sécurité, comme si j’étais dans ses bras pour dormir.
Mon téléphone me réveille, je réponds sans prendre le temps de regarder qui appelle.
— Oui. Dis-jeje d’une voix endormie.
— Alyssa, c’est maman, je m’inquiétais. Où es-tu ?
— Maman, mais qu’elle heure est-il ?
— Il est huit heures. Tu dormais ?
— Oui, je dormais. Qu’est-ce que tu veux ?
— Je suis désolée d’avoir dit à Hugo de venir à la maison, je ne le ferai plus. Tu rentres tout à
l’heure ?
— Je ne sais pas, est-ce que tu vas sans cesse me poser des questions ou continuer à t’emmêler dans
cette histoire ?
— Non, je te le promets. J’ai compris, tu es assez grande pour gérer ta vie comme tu l’entends.
— D’accord. Je rentre tout à l’heure.
J’ai bien dormi malgré les évènements de la veille… Est-ce le pull de Thomas ? Il a son parfum,
c’est très agréable de le sentir. J’aimerais lui envoyer un texto, mais on doit reprendre une relation
strictement professionnelle.
En fin de matinée, je rentre chez mes parents. Nous passons l’après-midi en balade avec mes sœurs et
mes neveux. J’apprécie que l’on parle d’autre chose que de moi. Émilie est moins bavarde que
d’habitude, elle paraît soucieuse.
— Émilie, quelque chose ne va pas ? Lui demandé-je.
— Non tout va bien Alyssa. Je suis un peu fatiguée car je suis sortie hier soir.
— Tu as été en boîte ?
— Oui comme souvent avec mes potes. Toi ça va ? Est-ce que tu penses que ta rupture est définitive
avec Hugo ?
— Je vais bien, oui je le pense. C’était une belle histoire, mais c’est terminé. Nous sommes allés au
bout de notre relation. Je vais me consacrer à mon travail et toi le boulot ça va ?
— Oui je m’entends très bien avec mon patron, on peut tout se dire, il ne prend pas la mouche, pas
comme avec Patrick.
— Super, mais attention à ne pas mélanger vie privée et vie professionnelle.
Au fond de moi je me dis, Aly tu es mal placée pour dire ça, garde tes précieux conseils pour toi-
même.
— Je m’en fiche, tu sais je n’attends rien de lui. Le jour où il me prend la tête, je claque la porte. Tu
me connais.
— Tu es impulsive !
— Je dirais plutôt spontanée. Je n’aime pas perdre mon temps.
Nous rentrons vers dix-huit heures, Émilie reste manger avec moi chez les parents. Je ne fais que
ressasser ma rupture avec Hugo et ce qui s’est passé avec Thomas. Hugo m’a envoyé un message cet
après-midi : J’ai trouvé tes bagues sur la commode. Tu me manqueS.
Je n’y ai pas répondu et je me suis encore couchée avec le pull interdit…
Ce soir je regarde un film que j’ai déjà vu plusieurs fois « Sur la route de Madison » . Je n’ai jamais
tant pleuré devant un film, la scène où elle voit Robert s’apprêter à quitter la ville après leur romance
passionnée, lorsqu’elle a la main sur la portière, prête à ouvrir et qu’elle se retient pour son mari et ses
enfants… J’inonde mon oreiller, je renifle encore une demi-heure après la fin du film. Lorsque je suis
certaine que mes parents sont couchés, je me relève discrètement et je vais chercher deux ou trois albums
photos dans le salon.

Je tourne les pages et vois défiler tant de souvenirs avec Hugo. Jeunes et insouciants, nous étions fous
l’un de l’autre. Je suis certaine qu’il a cessé de me considérer comme l’amour de sa vie avant que je
doute de nous. Je sais que c’est pour ça que j’avais le sentiment d’être malheureuse, je devais sentir qu’il
se passait quelque chose. J’ai été presque étonnée lorsqu’il m’a dit qu’il ne s’était rien passé avec cette
Hélène, parce que ça n’explique pas la distance qu’il avait mise entre nous.
Je ne cherche pas à me convaincre que c’est de sa faute, mais je le connaissais par cœur, je savais ce
qu’il ressentait pour moi pendant toutes ces années et un jour je n’ai plus réussi à être sûre de ses
sentiments. J’avais la sensation douloureuse qu’il me cachait quelque chose et ça me rendait folle
d’attendre qu’il me quitte. Lorsqu’il m’a demandé en mariage, j’ai été très surprise, je ne pensais plus
qu’il le ferait un jour. Je finis par m’endormir vers minuit.

Lundi matin, j’ai survécu au week-end, il faut maintenant que je surmonte ma crainte de retourner au
travail et de croiser Thomas. Il ne faut pas que je me laisse déstabiliser si on me parle de ma venue à
l’internat, ni que je me mette à pleurer si on me parle d’Hugo. J’ai trop de pression ce matin, je ne peux
rien avaler avant de partir. Ils annoncent plutôt chaud, je mets une jupe et un chemisier noir. Il me faut
quitter le pull de Thomas, mais pas question de lui rapporter pour le moment, je le cache sous mon
oreiller pour ce soir.
Ce matin, il y a des tensions dans l’équipe, Christian l’aide-soignant prévu à l’UHCD aujourd’hui
n’est pas venu travailler. Il a appelé ce matin les collègues, seulement un quart d’heure avant la prise de
son poste pour prévenir qu’il avait le dos bloqué. Nous avons eu un départ pour le SMUR occasionnant
l’absence d’un AS et d’un médecin rattaché au service. Ces absences se font rapidement ressentir.

Chaque box est occupé, les salles de déchoquage le sont aussi et les patients s’accumulent dans la
salle d’attente. Les médecins sont tendus, ils demandent plus d’efficience à l’équipe, qui a le sentiment de
ne pas être entendue. Il y a des sorties à faire côté UHCD ce matin,, il faut donc faire le nettoyage de ces
chambres pour libérer de la place aux urgences et personne n’est disponible.
Les pompiers continuent d’envoyer des patients, les brancards se multiplient dans les couloirs. Un
patient s’agite box trois, il est violent et refuse d’être maîtrisé, il est sous l’effet de ce qu’il a consommé.
Heureusement, les gendarmes sont là. Ils tombent bien, ils vont pouvoir intervenir. Je me joins à Julie,
l’infirmière pour maintenir le patient qui essaie de mordre Hervé, alors que ce dernier tente de lui sangler
les poignets à la demande du médecin. Les gendarmes sont obligés d’user de leur force pour le contenir.

Chapitre 34

Les patients suivis par le médecin sorti en SMUR s’impatientent. C’est de la folie ce matin, je
participe autant que je le peux. Il faut maintenant prélever le patient déchaîné.
Malgré les sangles aux poignets, aux chevilles et la sangle abdominale, il parvient encore à s’agiter.
Il bouge tellement qu’il déplace le brancard. Un gendarme essaie de l’immobiliser pour que je puisse
poser un cathéter veineux et réaliser un prélèvement sanguin. C’est mission impossible, le médecin
demande d’injecter un tranquillisant, il faut lui faire une injection intra musculaire de LOXAPAC.
Thomas arrive dans le box alors que les insultes fusent, il évalue d’un coup d’œil la situation et
voyant que nous essayons de le maîtriser, il réussit avec Julie à lui défaire son pantalon et à le tourner en
décubitus latéral afin que je puisse pratiquer l’injection dans les fesses. Le patient se calme après
quelques minutes, je peux lui poser une perfusion plus aisément.
Thomas nous a trouvé du renfort pour réaliser les sorties à l’UHCD, pendant ce temps-là, il fait le
nécessaire pour que les services accueillants les malades puissent recevoir maintenant leurs patients
respectifs. Au bout d’une heure, la situation est plus calme. L’équipe de SMUR est de retour.
Thomas est toujours dans le service, nous n’avons pas eu le temps de nous parler. Je l’ai juste aperçu
une fois depuis qu’il nous a aidés avec notre toxicomane. Les mouvements des patients sont plus fluides,
les grosses urgences ont été gérées. Lorsque j’occupais mes fonctions d’infirmière, je ne mesurais pas
l’importance du rôle de chacun pour le bon fonctionnement du service. Là, j’ai une vue d’ensemble, les
différents membres de l’équipe ont tous un rôle important à jouer. Lorsqu’un maillon est manquant ou
même incompétent, ça peut très vite se ressentir. Je dois dire que nous avons de la chance, le personnel
est tout de même très expérimenté aux urgences.

Morgane me sollicite pour aller à la pharmacie récupérer la commande de stupéfiants, car ils ont
utilisé la fin du stock d’ampoules de morphines ce matin. Thomas intercepte la demande et s’empare du
cahier des stups pour s’en charger. Midi le service fonctionne normalement, je vais dans mon bureau pour
souffler cinq minutes. Thomas se présente sur le seuil de ma porte et frappe avant d’entrer.
— Bonjour Thomas.
— Bonjour Alyssa, nous n’avons pas eu le temps de se saluer. Je t’ai rapporté les stups.
— Je vous remercie Thomas. Dis-je en évitant son regard.
— Alyssa, tu as très bien géré la situation ce matin. Tu as réussi à guider ton équipe et à prioriser les
actions.
— C’est l’équipe qui a assuré, je les ai aidés comme j’ai pu, mais nous avons dû demander du
renfort.
— C’est très bien, il faut penser à le demander quand c’est nécessaire. C’est le contraire qui aurait
été surprenant.
— Vous voulez autre chose monsieur Simon ? Parce que j’ai des choses à faire. Ajouté-je en gardant
les yeux fixés sur mon écran d’ordinateur.
— Non. Répond-il avant de sortir de mon bureau.
Je sais qu’il doit me trouver froide, mais je ne veux plus jouer au jeu du chat et de la souris avec lui.
Je me sens déjà trop coupable pour samedi. Sa présence m’incommode, j’ai la boule au ventre quand il
est dans les parages. De quoi ai-je peur ? Je crains que mes pensées ne se lisent sur mon visage. Si je le
regarde dans les yeux, je n’aurai qu’une envie, celle de l’embrasser, de l’enlacer, de le posséder… Stop
Alyssa !

En fin d’après-midi, je reçois un message, c’est Thomas : Aly, je comprends que tu m’en veuilles…
Il faut qu’il m’oublie, qu’il m’aide à ne plus penser à lui.
Moi : Pas du tout. Je ne vais pas revenir sur le sujet.
Thomas : Tu es passée de « thomas » et « tu » à « vous » et « monsieur simon. » C’est son nom et il
m’arrive souvent de l’appeler comme ça.
Moi : Nous sommes sur notre lieu de travail, c’est adapté. Je n’ai pas l’intention de le tutoyer au
boulot, il le sait.
Thomas : Très bien. Puis-je te poser une seule question ?
Moi : Oui ? Je m’impatiente de recevoir son message.
Thomas : Cet homme que tu as remarqué, est-ce qu’il travaille ici ? Je ne peux pas lui dire que c’est
lui, il va penser que j’ai prémédité tout ça, que j’ai quitté Hugo pour lui. Si je lui dis qu’il travaille ici, ça
ne veut pas forcément dire que c’est lui.
Moi : Oui, il travaille ici. Mais pourquoi cette question ? Pourquoi ça l’intéresse ?
Thomas : Je ne sais pas vraiment, je me demande juste qui est cette personne…
Est-ce que je peux lui mentir ? On est déjà dans la merde…
Moi : Ça changerait quelque chose que vous le sachiez ?
J’éteins l’ordinateur et ramasse mes affaires, il est dix-huit heures, je vais rentrer. J’hésite entre partir
tout de suite ou attendre sa réponse, mais cela fait vingt minutes que je n’ai pas de nouvelles. Je quitte
mon bureau, lorsque j’arrive sur le parking, je l’aperçois près de ma voiture… Mon cœur s’emballe à
l’idée de le rejoindre. J’hésite un moment à aller dans sa direction, je cherche s’il y a des témoins autour
de nous. Mon téléphone vibre, je regarde, c’est lui : Je t’attends !
Merci, j’avais compris que tu n’étais pas là par hasard à côté de ma voiture… Sans plus attendre, je
le rejoins d’un pas plus décidé.
— Thomas !
— Aly !
— Vous vouliez me voir ? Demandé-je perplexe.
— Oui, j’ai pensé que ce serait plus simple pour te répondre.
Oh, non je ne pense pas que ce soit plus simple. Moi si j’étais lui, je préférerais me cacher derrière
mon téléphone, plutôt qu’un face à face.
— D’accord, donc en quoi cette information peut-elle vous intéresser ?
— La curiosité j’imagine. Je n’y ai pas réfléchi, je me suis surpris à me demander si c’était quelqu’un
de l’hôpital. Alors j’ai eu envie de te poser la question. Excuse-moi de t’embarrasser.
— D’accord, très bien voilà question posée et réponse donnée.
— Tu ne vas pas m’en dire plus ? Reprend-il étonné.
— Vous ne m’avez posé qu’une seule question, j’y ai répondu. De plus, vous m’avez précisé n’en
avoir qu’une MONSIEUR SIMON. Insisté-je sur le monsieur, pour qu’il garde ses distances.
— Je vois. Si j’en ai une deuxième, est-il trop tard ?
Je sens l’excitation monter… Il est fort à ce jeu, il ne paraît même pas gêné par sa question. Je rougis
simplement à l’idée de lui répondre.
— Dites toujours.
La question est sans surprise.
— Qui est-ce ?
Je deviens probablement écarlate. Je sors mes clés de voiture.
— Je dois y aller.
— Tu ne souhaites pas répondre Alyssa ? S’inquiète Thomas.
— Je n’en ai pas envie. La vérité, c’est que je ne compte pas le dire à Hugo, alors pourquoi est-ce
que je prendrais le risque de vous le confier à vous ?
— Je n’ai pas l’intention de lui dire non plus. Ajoute-t-il avec une pointe d’humour.
— Je n’aurais pas dû vous parler de ça… c’était déjà cette question pour laquelle insistait Hugo…
Rétorqué-je contrariée.
— Je suis désolé, je ne voulais pas t’embêter.
— Bonsoir Thomas. Ajouté-je avant de monter dans ma voiture sous le regard contrit de mon « chef »
.

Chapitre 35

Vingt heures, une fois douchée, je me glisse sous les draps de mon lit tout frais. Je démarre le film
« Contre Toi » . Ce film traite des sentiments ambivalents de la victime envers son kidnappeur, le fameux
syndrome de Stockholm. Alors que je trouve incompréhensible le fait de tomber amoureuse de
« l’agresseur » , à la fin du film quand Kristin le dénonce, je pleure comme une madeleine.
J’avoue qu’Hugo me manque, je me demande ce qu’il aurait pensé du film, est-ce qu’on aurait
échangé nos opinions ? Certainement. Qu’est-ce qu’il fait à cette heure-ci ? Est-ce qu’il pense à moi ?
Nous sommes séparés depuis deux jours, et j’ai l’impression que cela fait une éternité. Je regarde la trace
de ma bague sur mon doigt. Mes mains sont vides sans ce petit bijou.

J’aurais tellement aimé que les choses soient différentes, qu’il ait accepté bien avant de m’épouser…
Aujourd’hui nous serions parents, et même de formidables parents. Je lui écris des dizaines de messages,
mais je ne les envoie pas. Au lieu de ça, je pleure la tête enfouie dans mon oreiller. Cette nuit, je
m’endors en pensant à Hugo, mais je rêve de Thomas, de nos baisers torrides échangés…
Au réveil, je suis perdue, c’est bel et bien fini avec Hugo, mais il me manque terriblement, et il y a
toujours Thomas qui me trotte dans la tête. En pensant à lui, j’ai un message : Aly, je regrette de t’avoir
posé cette question hier. Je sais que la situation n’est pas évidente pour toi avec ce qui s’est passé
entre nous… je n’ai pas d’excuse, mais je dois être sincère avec toi, comme tu l’as été avec moi. La
vérité c’est que je voulais savoir si tu m’as remarqué comme je t’ai remarquée … cette question était
déplacée… j’y ai réfléchi cette nuit, je vais demander à changer de poste, je vais proposer un échange
avec le pôle de chirurgie. De cette manière on ne se croisera que rarement et tu seras plus sereine au
travail. Je voulais juste t’en informer. Thomas.

Mais il est complètement fou, il ne va pas s’exiler côté chirurgie pour m’éviter ! Il m’a
remarquée bordel, mais depuis quand ? Je ne peux pas le laisser faire ça et je n’en ai pas envie, même si
ça me faciliterait la vie, je ne suis pas prête à ne plus le voir chaque jour…
Moi : Non thomas, ne faites pas ça ! Je ne serai guère plus sereine, je me sentirai coupable au
contraire.
La vérité, c’est que je me sens déjà coupable, mais vis-à-vis de sa famille pour le moment.
Thomas : Aly, c’est plus raisonnable, on ne peut pas nier l’attirance que l’on éprouve.
Je lui plais, il est attiré par moi, je vais garder ces messages jusqu’à la fin de mes jours.
Moi : Oui, je l’avoue, je suis attirée et c’est toi l’homme en question… mais garde ton poste ! C’est
avoué, est-ce que je me sens différente ?

Encore plus honteuse. Quel genre de femme peut faire ça à une autre femme ? Une personne qui n’a
pas de cœur ? Alors maintenant, je suis de ce genre-là…

Thomas : Je suis cet homme-là ! Alors nous avons un problème à résoudre… je suis impuissant face
à toi, je perds ma capacité de raisonnement, de jugement… Ses mots sont intenses, ils terrassent ma
raison.
Moi : J’aime quand tu perds la tête à cause de moi, même si ça te conduit à m’embrasser et que
c’est une mauvaise chose… Je sais que je n’aurais pas dû écrire ça, mais là, je ne peux plus me
raisonner.
Thomas : Je ne le ferai plus aly…
Putain, je sais ça, mais le fait de savoir qu’il en a envie me suffit.
Moi : Je sais… Je me convaincs de laisser mon portable le temps de me préparer.

Ce matin, je porte un jean moulant avec un chemisier noir et des chaussures compensées assorties. Ma
tenue est très simple, je me trouve jolie, désirable, attirante. Je pense que ce sont les aveux de Thomas
qui me font cet effet-là.
Je dois vraiment parler de lui à Emma, il occupe une place plus importante que ce à quoi je
m’attendais. Je lui envoie un message en lui précisant que j’ai besoin de lui parler, et lui demande si elle
est disponible ce soir. Elle me répond par message et m’indique de l’appeler après dix-neuf heures.
La matinée se passe calmement, il y a peu de passages ce matin aux urgences. Thomas débarque en fin
de matinée dans le service, il se dirige vers Sandra et Julie, il parle fort, il s’agite devant elles. Je les
rejoins constatant qu’il y a un problème.
— Que se passe-t-il ? Demandé-je curieuse.
— Alyssa nous sommes vraiment désolées. Précise Sandra en jetant un regard accusateur à Julie.
— Mais vous êtes désolées par rapport à quoi ?
— Nous allons en parler dans mon bureau Alyssa. Vous deux, je vous attends dans mon bureau à la fin
de votre service. Lance Thomas en les foudroyant du regard.
J’emboîte son pas sans poser de question, la situation semble relativement sérieuse, il s’est déplacé
et avait l’air furieux.
J’entre dans son bureau, il s’empresse de refermer la porte derrière moi. Il fait de la place autour de
la table. J’essaie de chasser l’idée que je lui fais perdre la tête, qu’il a envie de m’embrasser quand il me
voit… Il m’invite à m’assoir.
— Thomas que se passe-t-il enfin ?
— J’ai appris ce matin que certaines filles des urgences colportaient des rumeurs sur Facebook.
— Oui, ce n’est sûrement pas d’aujourd’hui… Dis-je étonnée du sujet de la conversation.
— Ces rumeurs concernent ta venue à l’internat Alyssa. Sandy m’a alerté ce matin, elle l’a appris par
des collègues de chirurgie.

Quoi ? Putain, je n’en reviens pas, je suis confuse. Je suis une idiote, tout le monde parle sur mon dos,
je suis la dernière au courant. Je n’ai même pas de compte Facebook, comment puis-je m’informer de ce
qui se dit réellement sur moi ? La seule question que je me pose c’est : est-ce que les rumeurs me
concernent seulement ou « nous » concernent.
— Alyssa, je ne sais pas précisément ce qui est mis, mais à priori, les filles se demandent avec quel
interne tu étais.
— Oh, je vois. Elles ne font pas référence à toi ! Dis-je en rougissant.
— Je ne crois pas. Ajoute Thomas visiblement gêné.
— Aurélie m’a dit qu’elle avait su avec l’interne de cardio que j’y avais passé la nuit. Je lui ai dit
que j’avais demandé une clé de l’internat quelques jours avant. Elle n’a pas posé de questions. Elle
semblait satisfaite de ma réponse. Je devrais tenir le même discours avec…
— Tu n’as pas à te justifier, ce que tu fais ne les regarde pas. Tu es leur cadre, elles n’ont pas le droit
de faire ça. Je vais demander une mesure disciplinaire.
— Non Thomas. Elles vont penser que j’ai quelque chose à cacher. Qu’elles retirent leurs
commentaires et ne recommencent plus.
— Je ne tolère pas ce genre de comportement. Je ne dois pas laisser passer ça, sinon ça se
reproduira. Précise-t-il.
— Je comprends.
Je regarde les traits de son visage crispés, il est très irrité de la situation. Je devrais l’être aussi, mais
je ne pense qu’aux messages de ce matin, il a envie de m’embrasser… Soudain, je visualise notre étreinte
à l’hôtel et sa bouche sur mes seins. Je m’empourpre. Je mordille ma lèvre. Progressivement, je vois son
visage se détendre, il porte les yeux sur ma bouche, la sienne s’entrouvre légèrement.

Chapitre 36

Il parcourt mon décolleté, ma poitrine se soulève au rythme de ma respiration. J’ai envie de sentir ses
mains me toucher encore une fois. Il se lève de sa chaise, s’éloigne du bureau, abaisse le store, pour nous
offrir plus d’intimité, puis il se retourne, l’excitation doit se lire sur mon visage.
Je sursaute lorsque son téléphone sonne. Il décroche mais ne s’assied pas. Il parle de contrat
saisonnier, il marche dans la pièce, se déplace derrière moi. Je devrais sortir du bureau, pour ne pas le
déranger, mais je suis immobile, incapable de lever mes fesses de la chaise. J’entends le bruit du
verrouillage de la porte.

Un frisson me gagne, lorsque je sens ses doigts effleurer mon épaule et se diriger vers ma nuque.
J’incline doucement la tête en avant, sa main prend possession de ma nuque. Il appuie plus fermement,
j’attrape sa main dans la mienne pour être certaine qu’il ne se retirera pas. Il devient plus distant dans sa
conversation, les mots se font plus rares. Je le sens se rapprocher plus près de moi, il colle son corps au
dossier de ma chaise, j’attire sa main vers mon cou en penchant la tête sur le côté. Ses doigts glissent sur
ma peau, je l’entraîne un peu plus bas à l’ouverture de mon chemisier.

Il s’excuse au téléphone avant de raccrocher et pose celui-ci sur la table. Sa main est hésitante, elle
s’arrête un instant. Il murmure « Aly » près de mon oreille, je succombe et bascule la tête en arrière. Sa
main descend franchement dans mon chemiser et se pose sur ma poitrine. Je soupire. Il caresse mes seins
plus fermement. Son nez vient timidement frôler le mien, ses lèvres viennent à la rencontre des miennes
brûlantes d’envie.

Nous échangeons notre troisième baiser, toujours aussi intense et renversant. Je me lève de la chaise
sans quitter sa bouche délicieuse. Il serre son corps contre moi, il m’enlace de son autre bras. Je
l’embrasse fougueusement, il n’y a plus aucune retenue, je laisse mes mains se balader sur lui. Je l’attrape
par la nuque et l’attire fortement contre moi.
Il s’assoit et m’entraîne sur lui. Je passe une jambe de chaque côté de la chaise et m’installe sur lui. Il
place ses mains avec vigueur sur mes fesses. Il guide mes mouvements sur lui, un léger balancement sur
ses cuisses.

Je perçois le renflement sous son jean provoqué par son érection, j’apprécie le frottement de celui-ci
contre mon entrejambe. Il m’enflamme. Je déboutonne sa chemise, son torse me semble encore plus sexy
que la dernière fois. Est-ce le lieu insolite qui me provoque cet état d’excitation ? Il me déshabille à son
tour, laissant mon chemisier tomber à terre. À nouveau son téléphone portable nous surprend tous les
deux. Il est trop occupé à embrasser mes seins pour y répondre.
Quelques minutes après, c’est la sonnerie du téléphone du bureau qui retentit avec insistance. Thomas
s’excuse, je m’écarte de lui. Il va couper la sonnerie du téléphone et me précise qu’il effectue le transfert
de la ligne. Il décroche à l’appel dans la foulée et précise qu’il est en entretien et qu’il ne veut pas être
dérangé. Je le rejoins près de son bureau, il me dévore du regard avant de m’attraper par les hanches,
puis me soulève sur son bureau, laissant tomber quelques affaires au sol.
Il se positionne entre mes jambes, il est engageant, excitant. Il déplace ses doigts sur mon jean, en
exerçant une pression au niveau de ma braguette. Il défait le bouton de mon pantalon avant de descendre
la fermeture éclair, il me soulève du bureau pour faire glisser mon jean. Je sais que je devrais l’arrêter,
mais j’ai trop envie de lui. Je défais sa ceinture et lui retire son pantalon. Je me retrouve en sous-
vêtement devant lui. Je porte un ensemble blanc, qui ne couvre pas grand-chose de ma nudité. Il porte un
boxer noir, il ne peut plus cacher son érection qui attire ma curiosité. Il saisit ma main et l’approche de
lui.

D’abord hésitante, je l’effleure au niveau du bas ventre et quand il me caresse plus fermement les
seins, je laisse mes mains agripper ses fesses musclées. Ce qui plaque son corps contre moi, le peu de
tissu qui nous sépare nous permet d’apprécier nos parties les plus intimes. Alors qu’il dégrafe mon
soutien-gorge, la peur me gagne. Immédiatement, je recule d’un pas et place mes bras croisés devant ma
poitrine. Je suis terriblement confuse, mais je ne peux pas, je ne dois pas ! Il n’est pas libre !
— Ça ne va pas Aly ? S’inquiète Thomas.
— Non, je suis désolée, nous n’aurions pas dû.
— Excuse-moi, je me suis laissé emporter, tu me rends fou, je pensais que tu le voulais aussi.
— Non, c’est impossible. Nous ne pouvons plus nous voir. Tu es marié.
— Aly.
— Non, je suis désolée si je t’ai provoqué.
— Laisse-moi te parler Aly ! Ma femme et moi sommes séparés.
Quoi ? Il est séparé ? Mais depuis quand ? Est-ce une raison suffisante ?
— Vous êtes séparés ? Mais je croyais que tu…
— Aly, il fallait que tu le saches. Je ne suis pas un salaud. Je vis toujours avec elle, parce que c’est
récent, mais c’est fini, nous ne partageons plus la même chambre depuis des semaines.
Thomas se rapproche de moi, espérant reprendre son étreinte, je l’interromps :
— Thomas, nous sommes dans ton bureau et tu restes mon supérieur. Même si tu es séparé, tu vis
toujours sous son toit. Tu avais raison ce matin, on ne peut plus travailler ensemble si nous n’arrivons pas
à nous contrôler.
Je m’éloigne de lui, ramasse mon jean et mon chemisier éparpillés sur sol. Thomas s’avance devant
moi m’obligeant à lui faire face.
— Merde. Aly ?
— Oui ?
Il ouvre ma main qui est serrée contre ma poitrine et laisse échapper mes vêtements avant de
m’embrasser.
— Qu’est-ce que tu comptes faire Aly ? Nous sommes adultes et séparés tous les deux. Nous n’avons
rien fait de mal.
Il pose ses lèvres délicatement sur ma bouche afin que je ne puisse pas répondre. Je ne lui rends pas
son baiser, je m’écarte de lui gardant les bras croisés. Il comprend ma gêne et me tend mon chemisier,
que je plaque devant moi.
— Thomas, même si j’en ai très envie, c’est hors de question. Pas ici, pas comme ça. Tourne-toi une
minute s’il te plaît le temps que je m’habille.
J’enfile rapidement mes vêtements. Quelque part je regrette de ne pas l’avoir laissé poursuivre, mais
nous sommes au bureau, n’importe qui peut venir frapper à la porte.
— Je vais y aller, je ne veux pas attiser les rumeurs. Ajouté-je sans me retourner vers lui, tout en
déverrouillant la porte. Je quitte son bureau sans un échanger un regard avec lui.
Je reste dans mon bureau pendant plus d’une heure, j’essaie de me calmer, de faire le point sur la
situation. Il me dit qu’il est séparé, mais depuis quand ? Est-ce que c’est définitif ? Pourquoi ne pas me
l’avoir dit plus tôt ? Je ne me fais pas d’illusions, nous n’allons pas avoir une relation pour autant. Il reste
le CHEF ! Sexy comme un dieu, pourquoi me choisirait-il, alors que toutes les filles bavent devant lui ?

Chapitre 37

Quand je pense à cette histoire de rumeurs, je suis tellement déçue par mon équipe. Je n’assiste pas
aux transmissions, je n’ai pas envie de parler avec elles. Je suis tout de même soulagée de savoir qu’elles
se posent des questions concernant ma venue à l’internat par rapport aux internes… Si elles apprenaient
que le chef était venu cette nuit-là…
Vers dix-sept heures, mon téléphone sonne, c’est Thomas. Il me rapporte l’entrevue. Il les a menacés
de changer de service au prochain faux pas. Pour le reste, il a suivi mon idée et leur a précisé que j’avais
une clé de l’internat pour des soucis personnels. Il profite de cet appel pour me demander de sortir :
— Aly, ça te dirait que l’on se voit ce soir ?
— Dans quel but ? Je joue l’innocente…
— J’aimerais te parler sans que l’on soit dérangé et j’ai très envie de te voir à l’extérieur…
— Tu n’as pas peur de ce qui pourrait se passer ?
— Non, Aly. Dis-moi que tu acceptes.
— Je ne sais pas si c’est une bonne idée. Nous nous sommes vus trois fois tous les deux et nous
savons comment ça s’est terminé.
— Aly, je sais que tu en as envie au moins autant que moi. Nous disons dix-neuf heures trente au
restaurant de l’Escale et tu me laisses t’inviter.
— À l’Escale. Tiens ça me rappelle des souvenirs. C’est un vrai rendez-vous ?
— Oui Aly, c’est un rendez-vous officiel.
— D’accord je viendrai. À ce soir Thomas.
— À ce soir Aly.
Je suis trop emballée à l’idée d’aller au restaurant avec lui ce soir. Pourtant, je sais à quoi
m’attendre, j’étais presque nue dans son bureau ce midi, quand j’y repense…
Je quitte le bureau à dix-sept heures trente. J’appelle Emma pour lui laisser un message sur son
répondeur, pour lui dire que je ne pourrai pas l’appeler ce soir finalement.
Demain, j’ai rendez-vous avec Monsieur Morin, j’en profiterai pour récupérer mes affaires, puisque
mon père prendra la camionnette du boulot. Ma mère a promis de finir plus tôt pour m’aider à faire les
cartons.
J’avertis mon père que je ne serai pas là ce soir, que je sors chez une amie et que je risque de rentrer
tard, j’ajoute que s’il est trop tard je dormirai chez elle. Il ne me pose pas de questions, il sait que j’ai
besoin de sortir et de voir du monde en ce moment.
Je prends ma douche et prends soin de m’épiler toutes zones susceptibles d’être vues. Je mets une
heure à choisir ma tenue, mon maquillage, ma coiffure, si bien que mon père me demande chez qui je sors.
— Tu ne connais pas papa, c’est Lara une collègue.
— Il y aura du monde chez elle ? Demande-t-il perplexe, il n’est pas dupe.
— Oui quelques collègues, pourquoi ?
— Parce que tu te pouponnes comme si tu avais un rendez-vous galant.
— Oh non, j’aime bien être apprêtée quand je sors.

Je porte une robe rouge, elle est très sexy. Ce n’est pas la même que celle que je portais le soir où
Hugo m’a fait sa demande, non cette robe, je ne la remettrai plus... Celle-ci est plus décolletée, plus
courte, plus moulante. Je boucle un peu mes cheveux, je les laisse détachés, ils retombent sous mes
épaules. Je n’ai pas mes chaussures rouges avec moi, je mets les noires avec la boucle, je porterai une
petite veste noire pour assortir. Il est plus de dix-neuf heures, je pars pour éviter de croiser ma mère, qui
ne pourrait pas s’empêcher de me poser des tas de questions.
Je me gare sur le parking près de la voiture de Thomas. Je suis trop stressée d’imaginer ce qui
pourrait se passer entre nous. Ce qui m’angoisse le plus, c’est de savoir que j’ai envie qu’il se passe
quelque chose avec lui. Je suis trop tordue comme nana.
Il doit m’attendre, mais je n’arrive pas à sortir de la voiture, je culpabilise vis-à-vis d’Hugo. S’il
venait à l’apprendre, il serait blessé voire brisé ? Je ne sais même pas comment il va. Je vais lui envoyer
un message : Bonsoir hugo, je viendrai demain vers 16h pour récupérer mes affaires avant le rdv avec
le proprio. J’espère que tu vas bien.
Je ne veux pas qu’il pense que je l’ai oublié ou que je me fiche de savoir comment il va. Hugo :
Bonsoir alyssa. Entendu pour demain.
Il ne me précise pas s’il va bien, sans doute que j’ai perdu le droit de savoir ce genre de chose en le
quittant. Je n’insiste pas de toute façon je le vois demain.
Merci.
Je rentre dans le hall, l’hôtesse d’accueil m’indique la table où je suis attendue. Je le rejoins,
lorsqu’il me voit arriver, il semble surpris.
— Aly, tu es… Tu es superbe.
— Merci. Dis-je timidement.
Il se lève pour écarter ma chaise de la table et m’invite à m’installer. La salle est assez grande, mais
les tables sont suffisamment espacées et il n’y a pas foule ce soir. Le cadre est agréable, d’allure plutôt
romantique, nous avons vu sur le parc de l’hôtel. J’aperçois au centre du jardin une fontaine d’une
imposante envergure. Mon regard se pose un instant sur cette vue magnifique.
— À la tombée de la nuit, elle s’illumine. Je suis certain que ça va te plaire.
— Un connaisseur, tu es déjà venu manger ici ?
— Non, jamais. Mais j’y ai dormi la nuit dernière et je me suis baladé dans le parc.
— Tu as dormi ici ! Relevé-je très surprise.
A-t-il quitté son domicile par ma faute ?
— Oui, j’ai besoin d’espace. Et puis tu sais pour les enfants, ce n’est pas évident d’assimiler une
séparation quand papa et maman sont sous le même toit. Nous avons fait le choix pour eux de ne pas aller
trop vite.
— Je comprends. Et pour eux, la situation n’est pas trop difficile ?
— Si elle l’est, il va leur falloir du temps pour accepter. Yanis n’en parle pas trop mais Émeline reste
persuadée que l’on va se remettre ensemble.
— C’est peut-être ce qui arrivera…
J’espère l’amener discrètement à m’en dire plus à ce sujet.
— Non, ça n’arrivera pas. Ce n’est pas comme si nous n’avions pas essayé d’arranger les choses,
nous nous sommes faits plus de mal. Ce n’est pas de ma rupture dont j’ai envie de parler ce soir.
— Excuse-moi, je ne voulais pas être indiscrète.
— Non, tu ne l’es pas. Qu’est-ce que tu as envie de manger ?
— Je vois qu’ils font des tagliatelles au saumon, je n’en ai pas mangé depuis une éternité.
— Super, ça me tente bien aussi.
Je n’ai pas l’habitude de boire du vin à table, mais j’accepte deux verres de blanc. En dessert, nous
prenons une coupe de glace. Je me sens détendue mais j’ai chaud, le kir et le vin y sont pour quelque
chose.
— Tu as chaud Aly ?
— Oui, je ne bois pas souvent d’alcool, ce doit être ça.
— En effet, la sensation de chaleur est due à l’alcool qui dilate les vaisseaux sous la peau.
— Merci monsieur le professeur. Dis-je en riant.

Nous parlons de l’école des cadres, de musique, de lecture mais aucun sujet vraiment sérieux ou
embarrassant. La serveuse nous demande si nous souhaitons un café, je refuse, je ne peux pas avaler de
boisson chaude.
— J’ai besoin de prendre l’air ! Dis-je en me levant rapidement.
— Viens, je t’emmène faire un tour dehors si tu veux.
— Je vais me rafraîchir et je te rejoins.
Lorsque je reviens, Thomas a réglé, il tient ma veste à la main, il me la dépose sur les épaules.

Chapitre 38

Nous nous baladons dans le jardin de l’hôtel. Effectivement, la nuit le décor est splendide, le bruit de
l’eau qui s’écoule de la fontaine et l’éclairage créent une ambiance apaisante et romantique. Thomas
passe sa main dans mon dos, il repousse mes cheveux en arrière, il caresse ma joue. J’apprécie toutes les
attentions qu’il me porte lorsque nous sommes ensemble. Il est prévenant, attentif et j’aime l’idée qu’il se
consacre à moi.
— Aly, nous n’avons pas parlé du sujet qui nous intéresse.
— Je le sais, mais au restaurant ce n’était pas évident.
— Viens dans ma chambre, nous pourrons prendre le temps.
— Oh si je monte, je pense que nous ne ferons pas que parler.
— Peut-être… Est-ce un problème Aly ?
— Certainement, mais j’ai quand même envie de monter.
— Très bon choix et tu ne seras pas perdue, j’ai la chambre vingt et une.
— Tu as ma chambre !
— Pour le moment c’est la mienne. J’ai demandé si elle était libre.
C’est trop mignon, le grand Thomas qui demande ma chambre particulièrement pour penser à moi.
Lorsque nous arrivons dans la chambre, je me sens tout de suite plus à l’aise. Je retire ma veste
et vais m’installer sur le canapé sans y avoir été invitée. Il enlève sa veste, il porte une chemise blanche.
— Je préfère quand tu portes des chemises de couleur.
— Ah bon, dois-je en déduire que tu n’aimes pas celle-ci ? Dit-il en plaisantant.
— Si elle est jolie, mais le blanc ne fait pas ressortir ton teint. En revanche, quand tu portes ta
chemise grise, c’est tout de suite plus captivant.
— Je vois, je vais peut-être la retirer si elle ne te plaît pas.
— Tu devrais certainement. Ajouté-je en rougissant.
Thomas déboutonne immédiatement sa chemise en me regardant droit dans les yeux, pour me
provoquer.
— Je plaisantais Thomas, ne l’enlève pas.
— J’étais très sérieux. J’aime ta sincérité et ta spontanéité. Si j’étais honnête envers toi, je te dirais
que tu es trop sexy habillée comme ça, que ta robe et la couleur rouge te vont à merveille, mais que tu es
encore plus belle sans tes vêtements.
Je deviens probablement de la même teinte que ma robe lorsqu’il me dit ça. Il me faut d’ailleurs
quelques instants pour pouvoir retrouver l’usage de la parole.
— Si tu étais honnête tu le dirais probablement, mais tu ne le feras pas.
— Ça dépend de la réaction que tu aurais Aly.
— Je pense que je ferais comme toi, je me rendrais plus attirante à tes yeux. Enfin j’imagine…
— Donc, je suis plus attirant torse nu ? Me demande Thomas avec un air coquin.
— Oui, beaucoup plus.
— Aly, je suis désolée, ta robe est très jolie mais je te préfère sans.
Je suis totalement envoûtée par ses mots, sa bouche et ses yeux qui plongent dans les mieux avec tant
de désir. Sans hésiter, je me lève et ôte ma robe, je suis contente de ne pas avoir mis de collants ce soir.
Je la dépose sur le bord du canapé et me tourne vers Thomas.
— C’est mieux comme ça ? Lui demandé-je sans éprouver la moindre gêne.
— Tu es… je ne peux pas le dire, c’est bien trop vulgaire.
— Je suis ?
Il déboutonne son pantalon avant de le faire descendre. Je suis surprise et amusée par son geste, il
porte un boxer gris qui laisse apparaître son érection.
— Disons que mon corps exprime mieux l’effet que tu me fais que mes mots.
— Je vois. Donc je te fais de l’effet ?
— Tu en doutais encore Aly ?
— J’avais ma petite idée, mais aucune certitude...
— Aly, tu es magnifique, j’ai très envie de toi. Si tu n’en as pas envie, il faut me le dire maintenant.
Thomas s’avance tout en promenant son regard sur moi.
— Je ne peux pas te dire ça, parce que…
— Parce que ?
— Ce serait mentir.
— Tu as envie de moi ? Demande Thomas en s’approchant à quelques centimètres de ma bouche.
Il m’embrasse doucement, il prend ma tête entre ses mains. Je frissonne.
— Aly, dis-moi que tu as envie de moi, je veux l’entendre avant de te toucher, avant que tu ne puisses
plus m’arrêter.
Je meurs d’envie de lui dire OUI, mais une petite voix dans ma tête vient s’immiscer.
— Thomas, tu as ce qu’il faut pour ça ? Le questionné-je gênée.
Il semble légèrement étonné par ma question, puis désemparé…
— J’imagine que non vu ta tête… Ajouté-je rapidement pour rompre le silence.
— En réalité, je n’avais pas songé réellement à cette éventualité. C’est embêtant en effet.
Thomas retire ses mains de ma nuque et recule d’un pas. Moi non plus je n’avais pas prévu ça. Ça
m’énerve de foutre en l’air ce moment.
— Je casse l’ambiance, mais je n’ai jamais fait « ça comme ça » …
— Moi non plus Aly.
— En même temps, j’ai…euh… une contraception, j’ai toujours été fidèle. Je n’en reviens pas de
devoir te demander ça… Mais toi est-ce que tu l’étais ? Enfin est-ce que je dois m’inquiéter?
— Je n’ai connu personne d’autre que ma femme au cours des douze dernières années tout comme
toi… Maintenant, je comprendrais que tu veuilles te protéger, ta réaction est responsable.
— Ne dis pas ça, je ne suis pas assez responsable, car je m’apprête à te dire que j’ai envie de toi
maintenant et que je ne vais pas pouvoir attendre de trouver une solution.
Thomas se rapproche, il place ses mains sur mes hanches.
— Tu t’apprêtes à me le dire Aly…
Il parcourt mon cou de baisers, mordille mon oreille, il souffle sur ma peau. Je gémis.
— Tu me rends fou. Dis-le Aly !
— J’ai envie de toi Thomas.
Il lâche un long soupir de soulagement, il agrippe mes fesses et me plaque contre lui. Ma poitrine
s’écrase contre son torse, ses gestes sont précis. Il me fait reculer jusqu’au lit où nous nous allongeons.
Nos langues se caressent, il dégrafe mon soutien-gorge, je ne me cache pas cette fois-ci. Il embrasse
passionnément mes seins.
— Tu es si belle Aly.
Je glisse ma main sous son caleçon, ses fesses sont douces et fermes. Je me déhanche sous ses
caresses sensuelles. Il effleure ma peau du bout des doigts jusqu’à ma culotte, là il promène ses doigts
lentement le long de mon entrejambe. Alors qu’il baise à nouveau ma bouche, il appuie plus fermement sa
main sur moi. Il saisit ma lèvre inférieure entre ses dents et tire légèrement dessus, tout en glissant un
doigt sous ma culotte, il le laisse s’insinuer en moi, m’arrachant un nouveau gémissement de surprise. Il
fait quelques va-et-vient avant d’ôter sa main de là.
Sa bouche descend le long de mon cou, passe sur mes seins en direction de mon ventre, il balade le
bout de sa langue sur moi, c’est excitant. Il joue avec l’élastique de ma culotte avant de la maintenir de
chaque côté et la faire descendre le long de mes cuisses. Une fois qu’il me la retirée, il embrasse mes
pieds tendrement et remonte en déposant des baisers le long de mes jambes.
Il remonte doucement, je m’impatiente à l’idée d’imaginer ses lèvres à cet endroit de mon corps. Il
écarte légèrement mes cuisses, juste pour y passer la main. Lorsqu’il arrive à la hauteur désirée, il
s’arrête. J’ouvre les yeux, il me contemple, lorsqu’il s’assure que je le regarde, il descend son caleçon.
Son sexe apparaît devant moi pour la première fois. Putain de merde !

Chapitre 39

Il a un corps parfait jusqu’à cet endroit-là, j’ajouterais même surtout là.


— Euh, si j’étais honnête Thomas, je te dirais que je te préfère sans ton caleçon.
— Hum et moi Aly sans ta petite culotte !
Il me cloue sur place, je suis en feu, il faut faire quelque chose. Je suis crispée jusqu’aux orteils, j’en
ai presque des crampes. Je grimace un peu sous le regard amusé de Thomas.
— Ça ne va pas ? Demande-t-il d’un air intéressé.
— Si ça va, j’attends juste que tu reprennes où tu en étais.
— Tu t’impatientes ma belle !
Oh ma belle ! Putain Thomas, je n’en peux plus de t’attendre. Je passe ma main sur son sexe, je le
touche à peine, comme si je lui demandais la permission. Il presse sa main sur la mienne pour que mon
geste soit moins hésitant. Je m’exécute observant ses mouvements de hanches qui accompagnent mes
gestes. Sa main vient enfin à la rencontre de mon intimité, ses gestes sont doux et agréables. Je l’attire
plus près, il vient s’allonger au-dessus de moi, amenant son sexe au contact du mien.
Nos respirations s’accélèrent, nous sommes en harmonie, je presse d’avantage ses fesses, il trouve
position entre mes jambes et s’avance lentement. Il me pénètre lentement tandis que j’apprécie chaque
centimètre de son corps qui m’envahit. J’ondule le bassin pour être plus près de lui, lorsque j’accélère
mes mouvements, il en fait de même. Je place mes mains sur ses bras, je les serre fermement à chaque va-
et-vient. Il attrape mes mains et les serre au-dessus de ma tête, il redresse son corps pour revenir de plus
en plus fort. Je suis au bord de l’explosion, lorsqu’il m’embrasse, je jouis au contact de sa bouche sur la
mienne. J’enfonce mes doigts sur ses mains à chaque sursaut de mon corps. Je me retiens de crier, il me
rejoint presque instantanément.

Il m’embrasse tendrement dans le cou avant de s’allonger à mes côtés. Nos corps sont moites après ce
câlin si intense. Il dessine des cercles sur mon ventre, il s’attarde sur ma peau et j’adore ce contact.
— Ça va Aly ? M’interroge Thomas en m’embrassant sur le front.
— Oui, beaucoup mieux. Ça t’embête si je prends une douche ?
— Pas du tout, tu me laisses la prendre avec toi ?
— Euh, oui si tu en as envie.
— J’adorerais cette idée.
Je pensais m’isoler pour analyser la situation…Suis-je devenue folle ou quoi ? Je fais l’amour avec
lui dans une chambre d’hôtel sans me protéger, maintenant je m’apprête à prendre ma douche en sa
présence… Je sais que c’est de la folie, mais ce qui est fait est fait, autant profiter de l’instant présent.
Je relève mes cheveux pour aller sous la douche, je n’ai pas l’intention de les mouiller. Il fait
glisser ses doigts sous le ruissellement de l’eau sur ma peau, il me savonne le dos, dépose des baisers sur
ma peau. J’en fais de même avec son corps sexy, nu sous la douche ! Il me rend dingue. En sortant de la
douche, il me tend un drap de bain dans lequel je m’enveloppe.
Je remarque un petit suçon sur ma poitrine, il semble le voir aussi, car il pince les lèvres en me
regardant. Je n’ai pas de vêtement de rechange avec moi, même pas de sous-vêtements propres.
— Puis-je t’emprunter un vêtement ?
Il cherche dans son sac et me tend un tee-shirt noir que j’enfile, il m’arrive juste sous les fesses.
J’adore porter ses fringues, avoir son odeur sur moi. D’ailleurs, je ne lui ai pas rendu son pull, il est
toujours sous mon oreiller. Je devrais embarquer son tee-shirt aussi.
— Tu restes avec moi cette nuit Aly ?
— Je ne sais pas. Je n’ai aucun vêtement pour demain. Mes parents vont s’inquiéter.
— Aly, tu peux passer te changer demain matin, et tes parents te croient où ?
— Chez une amie, je leur ai dit que je rentrerai sûrement très tard.
— Eh bien, tu vois ils ne vont pas s’inquiéter. Reste avec moi pour la nuit. Je n’ai pas envie de te
voir partir maintenant.
— À vrai dire, je n’ai pas envie de partir non plus.
Nous nous embrassons encore et encore, nous pourrions le faire toute la nuit. Il m’enlace sous les
draps, je me sens tellement en sécurité, je m’endors contre son corps.
Au milieu de la nuit, je me lève pour aller aux toilettes, je réalise que je suis avec lui à l’hôtel, que je
ne rêve pas… Lorsque je reviens à ses côtés, il effleure mes lèvres.
— Aly, retire ce tee-shirt, j’ai envie de sentir ton corps nu contre moi.
— Pardon, je t’ai réveillé.
— J’en suis ravi. Enlève-le ! Ajoute-t-il en pointant son tee-shirt du bout du doigt.

Je retire son maillot sans plus attendre, il m’attire contre lui, je m’installe au-dessus de lui cette fois-
ci. Après quelques caresses, je sens son sexe durci entrer en moi. Il mène la cadence en pressant mes
hanches contre lui. Il accélère et agrippe mes fesses, j’entends les sons sortir de ma bouche, je ne peux
pas les retenir. Je suis partagée entre lui demander d’aller plus doucement ou plus vite.
Il dépose ses mains sur mes seins et les presse avec intensité. C’est un peu douloureux, mais
terriblement excitant. Je me laisse aller complètement, sans réserve, je crie son nom au milieu d’un
orgasme violent. Il me rattrape dans des secousses saccadées. Je me laisse retomber sur son torse dans un
dernier effort, il déplace délicatement ses mains le long de mon dos. Après quelques minutes de
tendresse, je m’allonge à ses côtés. Il m’a épuisée, il est si performant… J’ai bien peur de ne plus
pouvoir m’en passer.
— Tom ?
— Aly ?
— Qu’est-ce qu’on va faire après ça ?
— Nous allons dormir le peu qu’il nous reste avant le réveil.
— Non, je voulais dire…
— Oui, je sais ce que tu voulais dire Aly. Je n’ai pas envie de me poser trop de questions, laissons
les choses se faire d’elles-mêmes.
— Tu penses vraiment que l’on peut continuer à se voir alors que nos situations personnelles sont
compliquées et que tu es mon supérieur…
— Je te l’ai dit, je ne veux pas me poser de questions.

Je ne sais pas quoi répondre, sur le principe je suis d’accord mais sur le fond, est-ce qu’il va quitter
sa femme, je veux dire son domicile, est-ce qu’il va divorcer ? Est-ce que tout n’est pas voué à l’échec
par rapport au travail et à ses enfants ? Tout semble si compliqué, il a raison, le mieux est de laisser les
choses se faire naturellement. Nous gérerons les problèmes quand ils se présenteront. J’essaie de me
rendormir dans ses bras, mais mon esprit est occupé. J’ai l’impression de penser comme si nous étions
déjà un couple, alors que pour le moment, nous avons juste eu une aventure… Et si en se réveillant, il se
ravisait ?

Chapitre 40

— Coucou ma belle, bien dormi ?


Ses mots me réconfortent dès le matin, il ne s’est pas enfui au réveil comme je le craignais hier soir.
— J’ai passé une très bonne nuit dans tes bras.
— Moi aussi, ravi que tu sois restée.
— Tu as l’heure s’il te plaît ?
— Il est à peine sept heures, nous avons le temps.
— Oh, non déjà, il faut que je passe chez moi prendre des affaires avant d’aller à l’hôpital.
— J’ai commandé le petit-déjeuner en chambre, ça ne va plus tarder.
— C’est très gentil à toi, je vais enfiler quelque chose.
— Tu peux rester dévêtue pour prendre ton café, ça ne me gêne pas. Au contraire, te voir nue me
donnera de l’appétit. Ajoute Thomas en se mordillant la lèvre.
— Arrête tu me fais rougir Tom.
— Toi aussi quand tu m’appelles Tom.
— Tout le monde doit t’appeler comme ça ?
— Non personne, on ne me donne plus vraiment de surnom.
On frappe à la porte, je m’empresse de me cacher sous les draps. « Service d’étage » . Thomas ouvre
la porte, je les entends échanger quelques mots avant que la porte ne se referme.
— Pourquoi tu te caches Aly ?
Euh, je ne sais pas… Je n’ai pas forcément envie qu’on me voit dans ta chambre en ta compagnie. Et
je suis à poil !
— Je n’ai pas eu le temps de m’habiller.

Il me tend ma robe rouge de la veille, je l’enfile rapidement. Nous prenons notre petit déjeuner sur le
lit comme un « couple normal » . J’aimerais rester ici toute la journée ou même toute la semaine pour
profiter de chaque instant en sa compagnie. Il me fait totalement craquer, il est torse nu devant moi, je ne
cesse de le dévorer. Il attend que je termine mon repas pour s’approcher de moi, il écarte mon plateau et
m’embrasse tendrement.

Sa bouche est délicieuse, il glisse sa langue pour la mêler à la mienne. Ses mains se baladent sur moi,
elles vont et viennent sous ma robe.
— Aly, tu n’as rien sous ta robe !
— Non, je n’ai pas eu le temps tout à l’heure.
— J’en suis très heureux.
— Non Tom, il faut que je parte maintenant. Le temps de rentrer me préparer, je vais être en retard. Et
je ne t’ai pas dit, mais je dois partir plus tôt ce soir.
— Pas de souci.
— J’ai rendez-vous avec Hugo et mon propriétaire pour mon déménagement.
— Tu y vas seule ?
— Non, mes parents m’accompagnent pour m’aider et je ne voulais pas me retrouver toute seule avec
lui.
— C’est mieux qu’ils t’accompagnent. Grogne-t-il.
— Je passe à la salle de bain et ensuite je file.
— Très bien, je te laisse tranquille.
Je m’habille puis le rejoins dans la chambre. Nous sommes gênés tous les deux, ne sachant pas trop
quoi nous dire avant de nous séparer. Nous échangeons un dernier baiser. Une petite voix me dit que c’est
peut-être la dernière fois que mes lèvres se posent sur les siennes.

Sur le trajet, je repense à notre nuit, à ce que nous avons partagé lui et moi. Cela fait des mois que je
pense à lui, que je rêve de son corps parfait et voilà que nous passons la nuit ensemble et que nous
faisons l’amour. J’ai conscience que nous avons précipité les choses, mais l’attirance physique entre nous
est trop forte.

En arrivant chez mes parents, ils me regardent étonnés, me demandent comment était ma soirée, je
reste évasive, prétextant que nous avons parlé boulot et que ce n’est pas intéressant pour eux.
— Alyssa, j’ai mis de côté quelques annonces d’appartements ou maisons qui pourraient te convenir,
si tu veux y jeter un œil.
— Merci papa, ce matin je n’ai pas le temps. Je ne veux pas être en retard au travail, mais promis je
regarde ce soir après notre rendez-vous.
— Seize heures là-bas ?
— Oui, je ferai tout mon possible pour ne pas être en retard. Au cas où, je te laisse la clé si tu ne
veux pas attendre dehors.
Je prends rapidement une douche et choisis une tenue moins sexy que celle d’hier. Je mets une jupe
noire avec un haut corail. Je suis déjà en retard, mais je prends deux minutes de plus pour me maquiller
un peu, je veux plaire à mon chef !
J’arrive un peu avant neuf heures à l’hôpital, je m’attarde un peu dans le couloir qui mène au bureau
de Tom. J’aimerais bien le croiser, pour qu’il me demande d’entrer un moment dans son bureau. Ça ne
fait pas deux heures que nous nous sommes séparés, ses mains me manquent, je suis une obsédée !
Midi et demi, le service est calme, je passe un coup de fil à Cynthia pour savoir dans combien de
temps elle ira manger.
— Oui dans dix minutes, parfait je vous rejoins dans le hall. Acquiescé-je.
J’hésite à envoyer un texto à Thomas pour lui dire que je viens au self, mais je préfère lui faire la
surprise. J’espère qu’il ira ce midi. Je dois résister à l’envie de lui écrire, je vais attendre qu’il m’envoie
un message en premier.
Lorsque nous arrivons au self, je constate qu’il n’est pas là. Déçue, je n’ai plus vraiment d’appétit,
mais je suis là, alors autant manger avec mes collègues. Je suis absente des conversations, je n’arrive pas
à m’y intéresser. Je garde un œil sur la porte, attendant désespérément qu’il fasse son apparition. Treize
heures, je regarde mon téléphone, pas de message. Putain, mais qu’est-ce qu’il fout ? Je sais que nous
n’avions pas prévu de nous retrouver, mais d’habitude à cette heure-ci, nous échangeons des messages…
J’ai peur qu’il regrette.
La porte s’ouvre, Thomas apparaît enfin, il est accompagné de Sandy ! Non, pas elle ! Il met un
certain temps avant de lever la tête, quand il me remarque, il semble surpris et reprend immédiatement sa
conversation avec Sandy. Je suis là, merde ! On dirait qu’il fait comme s’il ne me voyait pas ! Sandy vient
se joindre à nous suivie de Thomas, qui nous adresse un simple « bonjour » . Il s’assied juste à côté de
Cynthia, face à sa pouf ! J’attends un regard, un sourire, mais il ne me calcule même pas. Je me sens trop
mal, mes mains tremblent, je me retiens de partir pour ne pas éveiller de soupçon.
Sandy s’adresse à lui comme s’il lui appartenait, et lui n’en a que pour elle. Faut vraiment que je lui
demande s’il a déjà couché avec elle. Comment lui demander sans paraître jalouse ? Mon attention se
porte sur ce que lui dit Sandy :
— J’ai vu ta femme la semaine dernière Thomas, elle m’a dit que vous partiez quelques jours en
Allemagne le mois prochain.
Il détourne un instant les yeux vers moi, il semble gêné que je sois là, que je puisse entendre ce qu’il
va lui répondre. Raison de plus pour attendre avant de quitter la table. Après un court silence, il dit :
— Oui c’est ce qui est prévu, nous allons chez des amis.
— Super, vous y allez avec les enfants ?
— Oui, nous prenons les enfants avec nous.
Ça suffit, j’en ai assez entendu, il s’est foutu de moi ou quoi ? Il me dit qu’il est séparé de sa femme
depuis peu, mais pour autant, ils partent en vacances en famille… J’enfile ma veste, Cynthia en fait de
même et nous sortons du self.
Je regagne mon bureau, je ferme la porte et m’effondre. Suis-je trop stupide ? Je me souviens de ce
qu’il m’a dit le soir où Hugo m’a demandé en mariage. Il m’a dit qu’il emmenait sa femme au restaurant !
On ne fait pas ça quand on a rompu ! Mais pourquoi me le faire croire ?

Chapitre 41

Seize heures, je quitte le bureau comme prévu, je n’ai aucune nouvelles de Thomas. Il ne m’a pas
adressé la parole au self, ni même envoyé un message pour évoquer ce fameux voyage. J’ai passé la
plupart de l’après-midi à me reprocher de m’être jetée aussi vite dans ses bras. Je ne comprends pas, ce
matin encore, tout allait bien entre nous, il n’avait pas envie de me voir quitter sa chambre. J’étais
certaine qu’il m’enverrait des messages aujourd’hui…
Je retrouve mon père « chez Hugo » et non plus « chez nous », ma mère est déjà arrivée. Les cartons
se font rapidement. Ce n’est pourtant pas simple, il me faut ouvrir tous les placards de la maison pour y
trouver mes affaires, sachant que la plupart des choses que nous avons étaient communes. Que faire de
nos photos ? Qui les conservera ? La vaisselle, les meubles… nous avons tout acheté ensemble.
Dix-sept heures, Hugo rentre à la maison. Il sert la main de mon père et fait la bise à ma mère. Il me
regarde à peine et me dit simplement bonsoir. Il semble choqué de voir tous les cartons, il reste là, figé
dans l’entrée, semblant décontenancé. J’ai conscience de la brutalité que ça représente pour lui, cela ne
fait que trois jours que nous sommes séparés.
— Je n’ai pris que mes affaires Hugo, tout ce que nous avions en commun, je n’y ai pas touché. Lui
dis-je d’emblée pour le rassurer.
— Prends ce que tu veux, je m’en fiche.
— Non, je pensais que nous aurions pu voir ça ensemble ? Ajouté-je en espérant obtenir une réponse
de sa part.
— Tu prends ce dont tu as besoin, tu n’as pas à me demander ! Réplique-t-il sèchement.
— Je vois, tu ne veux pas qu’on en parle ?
— Non Alyssa, je voulais parler avant d’en arriver là.
Je ne sais pas quoi répondre à ces propos, parce que je n’évoque pas du tout la séparation.
— Nos photos, tu vas les conserver ? Demandé-je embarrassée.
— Pourquoi elles t’intéressent ? Tu n’en as pas besoin pour tirer un trait sur notre histoire.
— Hugo je te l’ai déjà dit, je ne veux pas tirer un trait sur nous. Oui elles m’intéressent. Nous
pourrions les partager si tu es d’accord ?
— Ce n’est pas l’impression que tu me donnes. C’est irréel de te voir partir... Bref entendu pour le
partage des photos. Précise-t-il froidement.
Même débat autour de la vaisselle, du linge de maison, de la plupart des choses qui se trouvent ici.
L’ambiance est pesante. Mes parents décident de sortir prendre un peu l’air pour nous laisser régler la
répartition de nos biens.
— Si je pouvais revenir en arrière, je te jure que je le ferais. Je me comporterais mieux avec toi. Tu
es la femme de ma vie, tu ne peux pas me quitter. Alyssa, je regrette vraiment mon geste cette nuit-là !
— Je le sais Hugo, je ne t’en veux plus.
— Je t’en prie, accorde-nous une dernière chance ! Me supplie-t-il les larmes aux yeux.
Je suis tellement désolée de le faire souffrir, mais il est impossible que je revienne sur ma décision
maintenant, encore moins après ce qui s’est passé avec Thomas. Hugo s’assoit sur le bord de la table et
plonge la tête entre ses mains. Il me fait tant de peine.
— Non Hugo, je ne peux pas.
— Pourquoi Alyssa ? Qu’est-ce qui te retient ? Tu ne peux plus me faire confiance ?
— Notre dispute est allée très loin et nous avons eu des moments de doutes récurrents.
— Alyssa, mes doutes à moi, ils appartiennent au passé ! Ajoute-t-il avec insistance.
— Pas les miens Hugo. Ne rends pas la situation plus difficile s’il te plaît. Nous nous sommes faits
assez de mal je pense.
— Est-ce que nous allons continuer à nous voir ?
— Comment ça ? Tu veux dire en tant qu’ami ? Lui Demandé-je étonnée.
— C’est impensable de ne plus te voir du jour au lendemain, mais je ne veux pas devenir ton ami.
— Laissons-nous un peu de temps avant de décider.
Mon père charge la camionnette avec Hugo, pendant ce temps, ma mère et moi faisons un brin de
ménage, derrière les meubles que nous avons déplacés. Hugo a insisté pour que je prenne l’ensemble du
mobilier de la chambre d’amis, pour le reste j’ai pris seulement de quoi me dépanner. Je jette un œil
autour de moi, j’ai le sentiment de le dépouiller. Il ne conserve que « notre chambre » à l’identique.
Monsieur Morin arrive comme prévu pour le rendez-vous, il ne pose aucune question sur la situation,
il semble d’ailleurs inquiet. Après quelques signatures, je rends mon trousseau de clé. Lorsque le
propriétaire sort de la maison, Hugo me donne le courrier que j’ai reçu lors de mon absence.
— Ma mère est allée faire le nécessaire pour mon changement d’adresse à la poste. Tu ne devrais
plus en recevoir, mais ça peut prendre encore quelques jours. Précisé-je
— Je te le déposerai chez tes parents. Tiens, voilà les papiers pour la fermeture de notre compte
commun, tu dois les signer.
Mes parents rentrent chez eux, pendant que nous en finissons avec la paperasse tous les deux.
— Tu n’as rien pris Alyssa, l’électroménager, les meubles du salon, salle à manger, tu ne peux pas
tout me laisser.
— Je te remercie, j’ai pris bien assez pour moi toute seule. En plus, pour le moment, je vis chez mes
parents…
— Si tu regrettes par la suite, tu pourras toujours revenir te servir.
— Je ne ferai jamais ça ! Il est vingt heures, je vais y aller. Je te remercie de nous avoir aidés, tu
n’étais pas obligé.
— Je t’aime Alyssa. J’ai essayé de me retenir de te le dire, mais je n’y arrive pas. Pardonne-moi de
ne pas avoir su t’aimer comme tu le méritais.
Les larmes coulent sur mes joues sans que je puisse les retenir. Hugo pleure à son tour. J’ai l’affreuse
sensation de commettre une erreur en le quittant, mais je ne serais pas honnête avec lui, si je restais.
Mince, on a vécu presque une décennie ensemble, c’est dur de partir définitivement.
— Alyssa, il y a une chose que je veux que tu emportes, je ne veux pas les conserver. Tu en fais ce
que tu veux. Prends les bagues que je t’ai offertes, elles t’appartiennent. Je sais que tu les porteras pas,
mais garde-les !
— Si c’est ce que tu souhaites. Dis-je ouvrant la main vers lui.
En sortant, je constate que Karen est installée sur sa terrasse pour être sûre de ne rien manquer de la
scène qui se déroule devant chez elle. Elle aime savoir ce qui se passe dans son voisinage, peut-être
même qu’elle en prend des notes... Karen ne changera jamais !

Chapitre 42

Je suis obligée de m’arrêter sur le bord de la route, je ne peux pas conduire dans cet état-là. Ma vue
est complètement brouillée par mes larmes. Je l’ai quitté ! C’est vraiment fini ! Mais pourquoi ? Je ne
suis pas sûre de l’avoir fait pour les bonnes raisons… Ce n’est pas possible. Je sais que je l’aime ! Est-
ce que je dois faire demi-tour et lui demander pardon ? Dois-je lui avouer que j’ai eu une aventure avec
mon chef ? J’ai du mal à respirer calmement, j’ai l’impression de manquer d’oxygène. Qu’est-ce qui
m’arrive ? Je suis oppressée, j’halète. Je sors de la voiture un instant et essaie de me calmer. Je n’ai
jamais fait de crise d’angoisse, mais ça y ressemble. Après quelques minutes, j’ai les idées plus claires,
je suis plus calme. Je m’assieds de nouveau dans ma voiture, j’essaie de faire le point sur la situation.
Hugo et moi sommes séparés alors que nous nous aimons. Pourquoi ? Il a douté de nous à plusieurs
reprises, n’était pas prêt à s’engager. Je ne suis certainement pas la femme de sa vie comme il le pense.
Puis, il y a eu Thomas et là, je me suis égarée. Thomas est-il vraiment séparé de sa femme ? Je n’en sais
rien, mais il ne m’a jamais rien promis…

Lorsque j’arrive chez mes parents, ils ont déjà terminé de tout décharger, les meubles sont dans le
fond du garage et dans une des chambre d’amis. Les cartons sont un peu partout, quel bazar. Je grignote
avec eux, tout en feuilletant les petites annonces immobilières. Je note trois références, je prends les
coordonnées téléphoniques pour appeler demain.
— Vous allez trouver ça dingue, mais je me demande si je ne devrais pas acheter une maison plutôt
que de louer encore pendant des années. Déclaré-je.
— Alyssa, avec un seul salaire, tu vas te restreindre. Tu ne penses pas que tu devrais attendre.
Répond ma mère très étonnée.
— Attendre quoi maman? Que je rencontre quelqu’un qui m’avouera au bout de dix ans de vie
commune qu’il doutait de nous et que c’est pour cette raison qu’il n’arrivait pas à s’engager ? Non, je
pense que je vais devoir investir seule, si je veux avancer.
— Alyssa, tu oublies qu’il était prêt à se marier avec toi ! Lâche-t-elle.
— Oui, une décennie à attendre pour ça… Je vais me coucher, merci beaucoup pour votre aide.
Désolée, je ne suis pas d’humeur à bavarder.
Quand je pose ma tête sur l’oreiller, je ne cesse de me questionner. Si Hugo ne doutait plus de nous et
qu’il était prêt à se marier, peut-être que nous nous serions réellement rapprochés, alors j’aurais sans
doute pu écarter mes doutes et oublier mon obsession avec Thomas…
Ce mec est un connard, il passe la nuit avec moi puis ne me donne plus de nouvelles. Il se pavane
avec sa pétasse devant moi et évoque ses prochaines vacances avec sa pseudo ex-femme !
Pourtant ça ne colle pas avec lui, il est venu à mon secours au beau milieu de la nuit, il n’a pas profité
de la situation à ce moment-là, il était si attentionné. Qu’est-ce qui s’est passé ? Je regarde pour la
centième fois de la journée mon téléphone qui n’indique toujours aucun message, aucun appel en absence.
Je pourrais le jeter contre le mur pour ça ! Cette nuit, je dors avec le pull de Tom, mais il n’a presque
plus son odeur même si je ne l’ai pas lavé. Je garde mon téléphone dans la main, mais je ne pense plus
recevoir de nouvelles de lui.
Nous sommes jeudi neuf avril, je n’arrive pas à me souvenir d’un rendez-vous qui était prévu
aujourd’hui. Je suis sûre que ça va me revenir, mais j’ai peur qu’il soit trop tard à ce moment-là. Je quitte
mon pull adoré pour aller travailler. Je porte une robe noire avec des collants et des chaussures noirs.
J’ai l’impression d’être en deuil.
Je suis d’une humeur exécrable ce matin. Je suis ou j’ai été la maîtresse d’un homme marié qui ne m’a
pas donné de nouvelles depuis que nous avons fait l’amour tous les deux sans nous protéger. Cet amant est
en plus mon supérieur et je dois l’affronter chaque jour au travail. Je prends vraiment de bonnes
décisions dans la vie. Je vais avoir trente ans, et je suis revenue vivre chez mes parents. Mes collègues
lancent des rumeurs sur moi. Ma vie est juste parfaite ! Mise à part une maladie qui pourrait me tomber
dessus, je pense que je touche le fond.
En ouvrant ma boîte mail, je découvre un mail de Thomas, je l’ouvre précipitamment sans prendre le
temps de regarder l’objet. La déception est grande quand je lis qu’il s’agit d’une convocation à une
nouvelle réunion cet après-midi. Il me gonfle avec ces réunions, je n’irai pas. S’il n’est pas content, il
pourra toujours me le dire, enfin pour ça, il faudrait qu’il daigne m’approcher. Après avoir longtemps
hésité à me rendre au self ce midi, je décide d’y aller, je ne vais pas le laisser me pourrir la vie.
J’y vais avec Mathieu, mon collègue infirmier anesthésiste, c’est lui qui est de garde aujourd’hui, il
m’a proposé de l’accompagner. C’est un mec super, je m’entends bien avec lui depuis des années. Nous
n’avons pas vraiment eu l’occasion de travailler directement ensemble, mais nous collaborons souvent. Il
m’est arrivé de faire appel à lui plus d’une fois dans les services, lorsqu’un patient était difficile à
perfuser. Nous arrivons au self à treize heures, il n’y a presque plus de place. Nous trouvons une table
isolée, nous nous y installons.
— Alors Alyssa, qu’est-ce que tu deviens ? J’ai appris avec Aurélie que tu allais te marier.
Merde, ça commence bien. J’aurais dû lui préciser de ne pas évoquer ma vie privée vu mon humeur
épouvantable. Je vais essayer de rester sereine.
— Peut-on éviter ce genre de sujet Mathieu ?
— Pardon, je ne pensais pas être indiscret. Reprend-il honteux.
— Non, ça va, ce n’est pas indiscret… Disons que ce n’est plus d’actualité, je suis un peu irritable
sur le sujet !
— Oh Alyssa, excuse-moi.
— Et toi Mathieu, comment ça va ?
Il ne trouve plus ses mots pour me répondre, on dirait bien qu’il se sent encore plus mal que moi. Je
ne peux pas me retenir de pouffer de rire.
— Alyssa je me sens tellement con, qu’est-ce qui te fait rire ?
— C’est ta réaction… Merci je n’ai pas ri depuis des jours !
Il éclate de rire à son tour, je continue nerveusement mais ça me soulage tout de même. Les yeux se
tournent vers nous. Nous sommes sans doute trop bruyants. Le reste du repas se passe plus calmement.
Nous papotons de travail principalement. Nous traînons une heure à table, nous sommes les derniers à
quitter le self. Lorsque je rejoins le service, les transmissions sont finies.
Nadine vient devant ma porte et me demande si je suis prête pour la réunion.
— Je ne viens pas Nadine. Lui annoncé-je.
— Ah bon ? Dit-elle très étonnée de ma réponse.
— Non, je trouve que nous sommes informés trop tard des réunions, le matin pour le jour-même c’est
un peu court pour s’organiser. J’ai déjà prévu un rendez-vous.
— Tu ne pourras pas nous rejoindre non plus ?
— Non, mon entrevue risque de s’éterniser et je ne peux pas décommander. Tu m’excuseras auprès
des collègues.

Évidemment, je n’ai aucun rendez-vous cet après-midi. En même temps, personne ne me demandera
de me justifier et au pire qu’est-ce que je risque ? Jamais je n’aurais pu imaginer en arriver là, mélanger
ma vie privée avec le travail. Je suis incapable de faire la part de choses, en ce moment, je me fous de sa
convocation, je veux une explication sur son attitude avec moi !

Chapitre 43

Dix-sept heures, je m’empresse de quitter le bureau, je n’ai plus qu’une journée à tenir avant le week-
end. Voilà à quoi vont se résumer mes prochaines semaines, attendre le vendredi soir pour espérer
souffler. Il y a peu de temps, j’étais excitée par mes nouvelles fonctions, même si ça m’angoissait.
Maintenant que j’ai le sentiment d’avoir gâché toutes mes chances, je ne vois plus vraiment l’intérêt de
poursuivre.
Mon téléphone sonne, je retourne presque mon sac à main sur le parking pour le trouver. C’est un
appel de l’hôpital, mais je ne peux pas voir le numéro de poste s’afficher. Les appels sortants
apparaissent avec le numéro de l’accueil. C’est peut-être important, un souci aux urgences ? Je sais que je
devrais répondre, mais si c’est lui, je ne veux pas lui parler au téléphone. Inutile de me torturer
davantage, j’ai loupé l’appel. J’attends de voir si j’ai un message sur le répondeur. Ce n’est pas correct
de ma part, de ne pas avoir répondu. S’il y a un nouvel appel, j’y répondrai.
Je monte dans ma voiture, la sonnerie retentit de nouveau dans tout l’habitacle. J’inspire
profondément avant de répondre.
— Oui ?
— Bonjour Madame Steunou, secrétariat de gynécologie. Je me permets de vous appeler car vous
aviez rendez-vous à dix-sept heures avec docteur Guillot.
Aïe !
— Oh, je suis désolée, je suis sur le parking, j’arrive tout de suite.
— À tout de suite Madame Steunou.

Voilà mon fameux rendez-vous dont je n’arrivais pas à me souvenir. J’ai bien fait de répondre, les
délais d’attente sont en moyenne d’un an pour une simple consultation avec elle.
Je me dépêche de passer au bureau des entrées pour récupérer une fiche de circulation. Les
secrétaires me rassurent, le médecin a un peu de retard, je vais aller m’installer en salle d’attente. J’en
profite pour passer aux toilettes avant d’être appelée.

Dix minutes plus tard, c’est à mon tour. La gynécologue procède a un rapide examen avant de
pratiquer le retrait de mon implant. Elle procède au remplacement de celui-ci, cette contraception est
parfaite pour moi, je n’ai presque plus de règles, je n’ai pas pris de poids et pas de risque d’oubli.
En sortant de la consultation, je suis obligée d’emprunter le couloir qui passe près du bureau de
Thomas. Je ne souhaite pas m’attarder mais je croise Antoine, un brancardier avec qui je reste échanger
quelques mots. Mes yeux se posent sur la porte du bureau de Tom, quand celle-ci s’ouvre et que je vois
Aurélie en sortir. Qu’est-ce qu’elle fait là ? Ça me panique sur l’instant. Est-elle au courant de quelque
chose ?
— Alyssa, contente de te voir enfin ! Lance-t-elle aussitôt.
De toute évidence, elle ne sait rien. Elle n’aurait pas employé ce ton joyeux avec moi. J’aperçois
Thomas derrière elle, il regarde dans ma direction à son tour, je rougis. Toute ma colère s’est envolée dès
qu’il a posé ses yeux magnifiques sur moi.
— Le téléphone ça existe, tu ne me donnes plus de nouvelles ! Reprend Aurélie.
— Je suis contente de te voir aussi. Ajouté-je en fixant Thomas qui reste immobile devant son bureau.
— Tu as le temps d’aller boire un café avec moi j’espère.
— Oui Aurélie, allons-y maintenant si tu veux, j’allais partir.

Je jette un œil vers lui, mais il ne réagit pas. Nous convenons de nous retrouver en ville, au PMU. Sur
le trajet, je me surprends à l’insulter de nouveau, il fait comme si je n’existais plus. Et pourtant, il a suffi
qu’il me regarde pour que j’aie envie de me jeter dans ses bras.
En arrivant au bar, Aurélie me demande de lui raconter les détails des derniers jours, je lui parle de
mon déménagement, de la séparation, de mon envie d’acheter un appartement ou une maison, mais hors de
question d’aborder Thomas. Elle trouve l’idée intéressante contrairement à mes parents.
Lorsqu’elle me parle de sa dispute avec Julien, mon portable vibre, tout en essayant de suivre ce
qu’elle me dit, je le sors de ma poche. Je découvre enfin un message de Thomas ! Merci mon Dieu !
Merci mon Dieu ! J’essaie de cacher mon excitation passagère et discrètement je lis le contenu :
Comment s’est passé ton rendez-vous avec ton proprio aly ?
C’est une blague ? Il me demande ça l’air de rien, comme si j’allais oublier son attitude des deux
derniers jours. J’essaie de me concentrer sur ce que me dit Aurélie, je lui répondrai plus tard.
— Tu m’écoutes Alyssa ?
— Oui, évidemment.
— Tu as l’air distraite, ailleurs.
— Non, pas du tout. Continue ! Oh, j’ai honte de lui mentir.
Je range mon téléphone pour me rendre plus disponible pour elle. Je peux attendre une heure de plus,
bon j’avoue, une heure peut-être pas.
Dès que nous regagnons nos voitures respectives, je bondis sur mon portable. Je ne peux pas être
désagréable d’emblée sans avoir eu l’explication.
Je réponds simplement : Ça s’est passé.
Il répond immédiatement : Ça va ?
Non, ça ne peut pas aller et je suis sûre que tu sais pourquoi… Je me retiens de toutes mes forces : Je
ne sais pas. Et toi ?
Il ose se comporter normalement ? Il me rend folle !
Thomas : Pourquoi tu ne sais pas ? Oui ça va, je suis toujours à l’escale.
Ravie de l’apprendre, mais pour combien de temps y est-il ? Le temps d’un break avant la petite virée
en famille en Allemagne ?
Moi : Toujours à l’escale, mais ça ne va pas être évident pour organiser tes vacances avec ta
femme…
Je n’ai pas résisté à lui balancer son voyage, je sais maintenant qu’il me mène en bateau depuis le
début.
Thomas : Je vois…tu veux qu’on en parle ?
Ben voyons, comme ça si j’accepte, je passe pour la maîtresse jalouse, c’est une plaisanterie ? Si je
le vois, je ne pourrais pas m’empêcher de lui faire une scène.
Moi : De quoi pourrais-je avoir envie de parler ?
Il les cumule entre Sandy, sa femme, son voyage et son comportement avec moi.
Thomas : Aly, il y a un souci ? Si c’est le cas, viens me voir, nous pourrons en discuter…

Un souci ? Un souci ? C’est la seule chose qu’il sait me demander. Aller le voir, oh oui, bonne idée,
nous pourrions commencer par faire l’amour, puis demain nous ignorer. Il se fout de moi, il ose me
demander s’il y a un souci…
Moi : Un souci ? Ai-je des raisons d’en avoir avec toi ?
Thomas répond : Je n’espère pas…
Je suis trop contrariée du fait qu’il fasse l’ignorant, je choisis de ne pas répondre. Après quelques
minutes, Tom me relance : Aly, je t’attends.
Je meurs d’envie d’aller le retrouver. Je réponds : Je ne pense pas que ce soit une bonne idée.
S’il insiste, j’y vais, sinon je rentre et je continue à le détester. Cinq minutes plus tard : Ca me ferait
très plaisir de te voir, mais je ne veux pas te forcer…
C’est décidé, j’y vais, je ne peux pas attendre une journée supplémentaire sans le voir.
Ok, je veux bien passer. Tu es dispo maintenant ?
Réponds Tom, je ne sais plus ce que signifie le mot patience dès qu’il s’agit de toi.
Tom : Oui, je t’attends Aly. Merci, merci !
C’est tout juste si je prends le temps de regarder dans mon rétroviseur pour faire ma marche arrière,
je manque presque de l’arracher en rasant l’arbre de près.

Chapitre 44

Je suis fébrile à l’idée de le retrouver dans sa chambre d’hôtel, personne ne pourra nous voir et je
n’arrive pas à savoir s’il joue un rôle quand il est seul avec moi ou bien lorsqu’il est au travail, mais il
est différent. Une chose est sûre, j’attends des excuses de sa part ! N’importe quel homme normalement
constitué sait qu’il faut rappeler après avoir eu des relations intimes avec sa « petite amie » ou avec « sa
maîtresse »…
S’il ne le fait pas, c’est qu’il ne veut pas donner suite par déduction. Je risque d’être déçue, il va me
dire qu’il regrette, qu’il part en vacances avec sa femme pour arranger les choses entre eux… Oh non,
pas ça. Je n’y survivrai pas !

Même en cherchant dans mes souvenirs avec Hugo, je ne me rappelle pas avoir ressenti autant de
stress pour nos premiers rendez-vous. Je me souviens quand je l’ai rencontré pour la première fois
comme si c’était hier. Cela faisait une semaine que j’étais arrivée sur le campus, je cherchais comment
me rendre au bâtiment des langues étrangères quand il a croisé mon chemin. Je m’étais tout de suite fait la
remarque qu’il était craquant. J’en avais profité pour lui demander de m’orienter, il m’avait accompagnée
et nous avions échangé quelques mots. Il m’avait dit qu’il préparait une licence de psychologie, il était en
seconde année. Nous nous sommes recroisés régulièrement par la suite jusqu’à ce qu’il m’invite à boire
un verre après les cours. Une semaine après, nous étions devenus inséparables. Il avait réussi à patienter
une autre semaine entière avant de m’embrasser, la plus longue de mon existence à l’époque.
Évidemment, j’avais senti mon cœur s’emballer, j’étais sous le charme…

En arrivant sur le parking de L’Escale, j’envoie un texto à mes parents pour les prévenir que je ne
mangerai pas à la maison. En sortant de la voiture, je me regarde dans la vitre, je regrette d’être en noir
de la tête au pied, j’hésite presque à rentrer me changer… Non, ça prendrait trop de temps, dans l’état
que je suis, je pourrais griller tous les feux rouges et toutes les interdictions, peut-être même renverser
quelqu’un. Je chasse cette idée en secouant vivement la tête, de toute façon, il m’a aperçue dans cette
tenue tout à l’heure.
Je monte les escaliers, en me tenant à la rampe, la main crispée. J’inspire profondément en fermant
les yeux devant sa porte avant de frapper doucement. Il ouvre sans attendre et m’accueille avec un large
sourire. Je suis déconcertée par son attitude. Il m’invite d’un geste à entrer, je pénètre dans la chambre.
— Aly, content de te voir. Me dit Thomas d’une voix calme et douce.
— Bonsoir Thomas. Répliqué-je plus froidement.
— Qu’est-ce qui ne va pas ? Demande-t-il pressement.
— Tu es direct !
— Excuse-moi, donne-moi ta veste si tu veux. Ajoute-t-il en me tendant la main.

J’ôte celle-ci et lui donne, ma main effleure la sienne, provoquant une décharge dans tout mon corps.
Il me fait toujours le même effet. Lorsqu’il est face à moi, je suis obsédée par sa bouche, ses lèvres qui
sont parfaitement dessinées, elles appellent sans cesse les miennes. Il est beau, je pourrais le regarder
des heures, il n’a aucune imperfection. J’aime quand ses cheveux sont légèrement relevés, j’adore passer
ma main dedans et j’aime caresser sa nuque lorsque l’on s’embrasse… J’en oublie presque pourquoi je
suis venue, mais Thomas me sort de mes rêveries.

— Assieds-toi Aly.
Nous nous installons sur le canapé que nous connaissons si bien maintenant. Je prends ma place
habituelle et lui la sienne. Je suis trop contractée, crispée, comme si j’allais passer un entretien
d’embauche… C’est ça, un entretien pour une relation avec lui.
— Alors, tu es décidée à me dire ce qui ne va pas ?
— Je ne sais pas vraiment, nous ne nous sommes pas parlé depuis mercredi matin.
— Oui depuis hier.

Pourquoi juge-t-il nécessaire de préciser que c’était hier, comme si j’avais l’impression que cela
faisait une éternité, alors que ce n’était qu’HIER ! Je sais que nous sommes jeudi, mais toute la journée
d’hier s’est passée sans le moindre contact, et celle-ci est sur le point de se terminer, donc techniquement
cela fait presque deux jours. Est-ce que je dois lui préciser ? Non, pas de scène Aly, ne fais pas ça ! Pour
lui deux jours sans nouvelles, ce n’est rien…
— Oui, tu as raison depuis hier. Mais nous avons eu diverses occasions pourtant.
— Au travail tu veux dire ? Devant les collègues ? Tu aurais voulu que je te parle comme je le faisais
avant, alors que nous venions de passer la nuit ensemble ? Me demande Thomas tout à fait calmement.
— Peut-être que j’aurais préféré plutôt que l’ignorance. Précisé-je.
— L’ignorance ? Mais je ne t’ai pas ignorée Alyssa ! Je me retiens de t’embrasser quand je te vois.
Fallait me sauter dessus Thomas, je n’attendais que ça. C’est rassurant, mais ça n’explique pas
pourquoi il ne m’a pas envoyé de messages.
— Je pensais que tu m’aurais envoyé un message dans la journée.
— J’espérais aussi que tu le fasses. En fait j’ai voulu t’en envoyer un avant d’aller manger et puis
Sandy est arrivée. Je pensais t’écrire l’après-midi, mais nous nous sommes vus au self et après cette
histoire de voyage dont tu avais dû entendre parler, je me suis ravisé, ne sachant pas trop comment tu
allais le prendre. Je pensais attendre qu’on se retrouve seuls tous les deux.
Sandy doit-elle faire partie de toutes nos conversations ? Son discours semble plausible, mais je me
suis sentie si seule après ce que nous avions partagé que je lui en veux encore. Ce n’était pas à moi de
reprendre contact avec lui.
— Hier soir, j’avais très envie de t’appeler, mais tu avais ton déménagement, et je ne voulais pas te
déranger. J’ai pensé que tu avais besoin de respirer, j’imagine que ce n’était pas simple. Et ce midi, tu
avais l’air d’aller bien, je t’ai vue en charmante compagnie, tu riais avec Mathieu.

Est-il jaloux ? On dirait bien dans la façon qu’il évoque la compagnie de Mathieu. Depuis deux jours,
je me rends folle à imaginer qu’il regrette de son côté alors qu’en fait, il pensait à moi…
— D’accord. Dis-je simplement.
Je sens mon visage se détendre, toute ma tension commence à s’évaporer. Il faudra qu’on discute de
ce voyage en Allemagne, mais je vais attendre un peu.
— Tu t’inquiétais ? Demande Thomas soucieux.
— Un peu, j’avoue. Ces derniers temps, on s’envoyait pas mal de textos.
— Tu as cru… Enfin nous avions passé la nuit ensemble et j’ai été maladroit. Pardonne-moi, je n’ai
pas réfléchi à ce que tu ressentirais si je ne t’écrivais pas. J’attendais juste qu’on se voit tous les deux.
Précise-t-il gêné.
— Je comprends Thomas, ne soit pas désolé.
— Si, je le suis. Tu étais contrariée par ma faute, c’est la dernière chose que je souhaitais.
— Mais non, je suis devenue un peu susceptible depuis quelques temps.
— On apprécie de se retrouver tous les deux, je ne veux pas qu’on se mette la pression ou que l’on
complique les choses.
— Non, moi non plus Tom.
— Je dois être honnête avec toi, même si je pense te l’avoir déjà dit.

Chapitre 45

Il marque un temps de silence, comme s’il appréhendait ma réaction.


— Je ne peux rien te promettre Aly. Lance-t-il sérieusement.
— Oui Thomas je sais et je ne te demande rien.
— Débuter une « relation de couple » n’est pas envisageable, ma situation est compliquée, sans oublier
mes enfants. Et je ne tiens pas à paraître pour un salaud avec toi !
— Je ne me sens pas prête pour quelque chose de sérieux dès à présent non plus. Je viens tout juste de me
séparer alors que je pensais me marier dans quelques mois.
La conversation prend une tournure à laquelle je ne m’attendais pas, ayant un côté presque dramatique.
Nous sommes attirés l’un envers l’autre, mais retenus par notre passé. Nous vivons une aventure purement
sexuelle et il n’en sera peut-être jamais autrement. En d’autres termes, il faudra y mettre fin un jour
prochain…
— Maintenant que les choses sont claires, j’ai envie de t’embrasser Aly…

Thomas s’approche et passe subtilement ses doigts sur ma bouche, je ferme les yeux et savoure la
douceur de son contact sur ma peau. Son souffle chaud me fait frémir. Délicatement, il dépose ses lèvres
sur les miennes qui brûlent d’impatience, avant de m’enlacer contre lui. Je ne résiste pas à promener mes
doigts dans ses cheveux, comme à chaque fois que j’en ai la possibilité. Il m’attire vers le lit et s’allonge
sur moi tout en poursuivant son baiser. Son corps épouse parfaitement le mien. Nos langues s’emmêlent,
s’affolent lorsqu’elles se retrouvent après ces deux jours de séparation. Je suis transportée dans un autre
monde, quand soudain la sonnerie du téléphone de Thomas nous interrompt. Il s’excuse, s’écarte de moi
pour saisir son portable.
— C’est ma fille, je lui ai promis d’être disponible tout à l’heure.
— Pas de souci, je vais aller faire un tour dehors.
— Non tu peux rester Aly.
— Non, je préfère descendre. Dis-je en sortant de la chambre.
J’ai déjà honte de voler cet homme à sa femme, même s’ils sont séparés, alors voler « le père de famille
» à ses enfants… Je me balade dans le jardin de l’hôtel, reste un moment près de la fontaine comme nous
l’avons fait mardi soir avant de passer la nuit ensemble.
Notre conversation fait écho, il ne peut rien me promettre ! Soudain, je prends conscience de la
signification de ses mots. Qu’est-ce que ça veut dire ? Est-ce qu’il n’est pas certain de pouvoir donner
suite à notre aventure, ou est-ce qu’il en est sûr ? Et ce voyage en Allemagne, il le fait dans quel but ? Je
ne veux pas qu’il y parte, j’ai peur qu’il se réconcilie avec elle. Je devrais me culpabiliser de ne pas
souhaiter qu’il reste auprès de sa famille, surtout que nous ne sommes rien l’un pour l’autre. Mais
égoïstement, je ne pense qu’à moi, je veux poursuivre notre « aventure ».
Quinze minutes plus tard, je reçois des nouvelles de Tom : TU ME REJOINS ?
Je frappe à la porte, il m’ouvre rapidement avec un regard de séducteur alors qu’il est torse nu, il ne
porte qu’un pantalon de survêtement. Je suis scotchée sur place de le voir dans une tenue décontractée
mais je le suis aussi de voir son torse viril et sexy, alors que je ne m’y attendais pas. Je me force à
détourner les yeux en passant à côté de lui, il referme derrière moi.
— Tu as quitté ta chemise ! Précisé-je.
— Oui elle n’allait pas avec mon pantalon. Dit-il en riant. Merci de m’avoir laissé prendre un moment
avec Émeline, mais tu n’étais pas obligée de sortir.
— Tu plaisantes, c’est normal. Elle va bien ?
— Pas vraiment, elle est dans une phase de provocation avec sa mère depuis notre séparation. Elle
n’arrive plus à communiquer avec elle sans crier.
— Et avec toi, elle peut ?
— Oui, heureusement elle y parvient plus facilement. Je parviens encore à la raisonner.
— Tant mieux. Je pense que je vais y aller Tom.
— Non, j’aimerais savoir comme tu vas, comment s’est passé ton déménagement ?
— Je vais bien.
—J’avais très envie de t’appeler hier soir pour savoir si tu allais bien.
— Tu aurais dû le faire.
— Je ne savais pas combien de temps tu resterais là-bas…
— Je suis restée quelques heures pour rassembler mes affaires, sur le moment ce n’était pas réel de faire
ce partage de nos biens communs. C’est en rentrant que j’ai commencé à réaliser que nous avions rompu.
J’ai un peu de mal à trouver mes mots, à garder la voix claire pour décrire ce que j’ai ressenti hier soir.
Thomas est à l’écoute, lorsqu’il se rend compte que la tristesse me gagne, il pose sa main sur mon épaule.
— Je peux faire quelque chose pour toi?
— Ta compagnie me fait du bien.
Il sourit. Je termine ma phrase dans ma tête, elle me fait du bien mais comme tu ne peux rien me
promettre, je ne sais pas si c’est une bonne chose, je n’ai pas envie de me ramasser à nouveau. Il doit
avoir besoin de faire le point sur sa situation familiale.
— Je vais y aller Thomas.
— Pourquoi si tôt?
— Parce que j’étais venue pour parler et nous l’avons fait. Maintenant je vais te laisser vaquer à tes
occupations.
— Je préfèrerais m’occuper de toi, enfin avec toi. Ajoute Thomas.
Je deviens écarlate en entendant sa proposition. Est-ce une proposition ? Je meurs d’envie de rester
évidemment. Mais je veux lui laisser du temps pour qu’il soit sûr de sa rupture.
— Je préfère te laisser réfléchir à ta situation, peut-être que tu as besoin de temps pour te rendre compte
de ce que tu as perdu et pour avoir envie de le retrouver.
— Je sais parfaitement où j’en suis aujourd’hui, je sais ce que j’ai perdu, j’en suis le premier
malheureux. J’ai essayé d’arranger les choses, je n’y suis pas parvenu. C’est terminé. Reste cette nuit Aly.
J’aime passer du temps avec toi sans que l’on se pose des questions.

Rester cette nuit ? Il ne cesse de me répéter qu’il ne peut rien me promettre, qu’il ne veut pas se poser
de questions. Je suis quoi pour lui ? Un plan cul ? Non je ne reste pas, je ne veux pas être sa distraction
du moment, j’ai tout de même un peu d’estime pour moi. Ou bien… Oui, je reste alors qu’il n’a rien à
m’offrir et quand ça ne me suffira plus, il pourra se trouver une autre distraction. Je suis prête à accepter
l’idée d’être son plan cul… J’ai honte, je déteste l’effet qu’il a sur moi. Oui ou non ? Je n’arrive pas à
décider, qu’il le fasse pour moi.
— Je devrais peut-être t’embrasser pour te convaincre de rester ?
— Tu penses pouvoir me faire changer d’avis par un baiser ?
— Oui, j’en suis même certain.
— Tu es bien trop sûr de toi Thomas.
Je mens évidemment, si ses lèvres touchent les miennes, j’en perdrai la raison. Il s’avance sûr de lui, je
tente de ne pas regarder sa bouche, ni son regard provocateur qui est troublant et renversant. Je pose mes
yeux sur sa poitrine, c’est pire encore, la douceur de sa peau m’attire. Je recule lentement près du lit. À
chaque fois que j’ai approché ce bord de lit, j’ai fini allongée dessus et Thomas au-dessus de moi. Je fais
un écart pour le contourner, je ramasse mon sac bien décidée cette fois-ci.
— Bonsoir Thomas. Lui dis-je convaincue.
— Embrasse-moi au moins pour me dire bonsoir.

Chapitre 46

J’hésite, c’est probablement un piège de séduction.


— Demain, nous ne serons pas seuls au travail et ta bouche ne pourra pas approcher la mienne avant
plusieurs jours peut-être.
Il marque un point, d’autant plus que nous avions commencé un baiser lorsque nous avons été
interrompus par sa fille. Je dormirai mieux ce soir s’il m’embrasse correctement avant mon départ.
J’acquiesce timidement.
— Approche ma belle.
Encore ce petit surnom, hum j’adore. Il caresse mon visage, il le fait toujours avec tant de précaution.
Il écrase ses lèvres sur ma bouche, il glisse rapidement sa langue pour y trouver la mienne.
Sa paume de main vient effleurer mon sein par-dessus ma robe avant de plonger dans mon décolleté.
— Tu voulais partir alors que ton corps ne demande qu’à rester !
Il jette mon sac au sol avant de m’attirer sur le canapé. Lorsqu’il reprend son étreinte, il m’enlace un
peu plus fortement. Aïe ! D’un geste réflexe, j’éloigne mon bras de sa main.
— Aly, je t’ai fait mal ? S’inquiète Thomas.
— Non, ce n’est rien.
Je lui réponds tout en regardant mon bras, je remonte légèrement la manche de ma robe. Je constate
une légère inflammation. Je vais sans doute avoir une ecchymose comme la dernière fois. Thomas
s’interroge.
— Ne t’inquiète pas, j’ai vu le médecin tout à l’heure.
— Tu as vu le médecin pour ça ?
— Non, tu n’y es pas du tout. J’ai vu le gynécologue, il a juste remis en place mon implant. C’est une
petite réaction locale.
Il semble surpris par ce que je lui dis. Il n’ose plus me toucher le bras à présent.
— Non mais sérieux, ça va ! C’est un peu sensible si on appuie dessus, c’est normal.
— Ok, mais je vais éviter de te toucher par ici. Cette fois-ci, laisse-moi t’embrasser convenablement.
Il bascule ma tête sur le côté et dépose des bisous dans mon cou avant de revenir sur ma bouche. Il
s’appuie d’avantage sur moi, j’attrape ses cheveux entre mes doigts et lui rends son baiser. Je lui mordille
la lèvre quand il passe sa main sur mes seins, il les presse davantage. Il glisse sa main sous ma robe et
remonte doucement jusqu’à ma taille, il balade ses doigts sur le bas de mon ventre me donnant envie de
tellement plus à chaque mouvement. Ma main rejoint la sienne pour le guider à l’endroit souhaité.
Lorsque mes doigts atteignent les siens, je sens quelque chose de dur, de rebondi. Rapidement je
cherche son petit doigt, il est juste à côté, déduction faite, il s’agit de son alliance. Pourquoi est-ce qu’il
la porte toujours s’il est séparé définitivement ? Je repense à son voyage prévu le mois prochain… Mais
qu’est-ce que je fais dans son lit ? J’immobilise mes lèvres, je laisse ma main s’échapper de la sienne, il
la rattrape et entremêle ses doigts avec les miens. Il quitte ma bouche pour se redresser au-dessus de moi.
— Aly ? S’étonne Thomas une fois de plus.
Je dois lui dire, je sais que si je ne le fais pas, je vais me poser dix milles questions, mais si je le
fais, il risque d’être agacé car il ne veut pas qu’on se prenne la tête…
— Aly ? Regarde-moi. Insiste Tom.
Allez dis-lui, un peu de cran.
— Je suis étonnée que tu portes ton alliance. Dis-je d’une voix basse sans oser le regarder dans les
yeux.
Il a un mouvement de recul, son visage exprime de l’étonnement. Je l’ai froissé, j’ai tout fait foirer…
— Aly, si je porte mon alliance, c’est parce que personne ne sait autour de nous que ma femme et moi
nous séparons. Je ne voudrais pas éveiller les soupçons. Je t’ai expliqué que nous voulions prendre le
temps par rapport aux enfants. Ça ne signifie rien d’autre.
— Peut-être, mais pour moi cet objet symbolise votre union et je ne peux pas faire l’impasse dessus.
Je suis désolée, je préfère rentrer chez moi.
— Aly, ne sois pas si…
— Oui Tom ? Je t’écoute.
— Si déductive ! Tu en conclus immédiatement que ce n’était pas une bonne idée de rester, alors que
tu pourrais juste me dire que le fait de porter mon alliance te met mal à l’aise. Je peux le comprendre et je
peux la retirer quand nous sommes tous les deux.
— Je te sens fâché alors je vais continuer sur ma lancée. Je sais que tu ne veux pas te poser de
question, tu me l’as répété, mais je ne peux pas m’empêcher de m’en poser. C’est plus fort que moi. Je
pense à ta femme et à tes enfants et aux projets que vous aviez. J’ai peur de leur faire du mal.
— Aly, tu ne fais de mal à personne. Mon couple n’existe plus, les enfants ont besoin de temps pour
l’intégrer. Il n’y a plus de projet avec ma femme et au cas où tu ferais référence à ce voyage, il ne se fera
pas comme on le prévoyait. La seule chose qui compte à présent c’est de s’entendre au sujet des enfants
pour qu’ils ne souffrent pas de notre séparation. Je t’assure que passer du temps avec toi n’est pas à
l’origine de nos problèmes. Est-ce que tu as d’autres questions ?
— Non aucune.
— Alors écoute-moi bien maintenant, je vais retirer mon alliance devant toi et je vais te faire l’amour
Aly, sinon tu ne te tairas jamais !
J’en reste bouche bée, le souffle coupé, je ne peux rien répondre ! Il m’a rassurée de toutes les façons
possibles ce soir, je ne le repousserai plus. Je saisis ses fesses fermement, une dans chaque main afin de
coller son corps contre moi et l’embrasse presque brutalement. Mes habits finissent rapidement sur le sol
et nous faisons l’amour pour la troisième fois. C’est toujours aussi intense, comme si je le découvrais
pour la première fois.

Chapitre 47

Lorsque j’ouvre les yeux, Tom est face à moi, il fait jour dans la chambre. Je me demande depuis
combien de temps il est éveillé à me regarder dormir. Je n’ai pas la moindre idée de l’heure qu’il est, je
ne me soucie jamais de mettre mon réveil lorsque je suis avec lui.
— Bonjour ma beauté, tu as passé une bonne nuit?
— Oui très bien.
— J’ai commandé le petit-déjeuner.
— Tu es réveillé depuis longtemps, qu’elle heure est-il ?
— Il est sept heures. Ça fait à peine une demi-heure, je voulais te laisser dormir encore un peu.
J’allais te réveiller, parce que tu vas vouloir passer chez toi avant d’aller à l’hôpital.
— Oui, c’est évident. Je n’ai rien pour me changer. Je suis sûre que mes parents vont me questionner,
ils ne vont pas comprendre toutes mes absences…
J’attrape mon téléphone, j’avais raison, j’ai plusieurs appels en absence et des messages. Mes
parents qui voulaient savoir si je rentrais hier soir, ma sœur Julie qui m’invite à l’anniversaire de Théo
demain et qui précise vouloir me parler. Je répondrai plus tard, je vais d’abord prendre mon repas avec
Thomas et surtout profiter de sa présence. J’appréhende de le quitter tout à l’heure, je crains de revivre
mon début de semaine. Une fois mon café avalé, il est presque sept heures trente, je dois me dépêcher de
partir. Thomas essaie de me retenir davantage dans ses bras, il m’embrasse tendrement.
— Aly, je n’ai pas envie de te laisser sortir de cette chambre.
— Je préférerais rester avec toi aussi, surtout qu’une fois sortie d’ici, tu vas m’ignorer toute la
journée. Ajouté-je pour le taquiner.
— Aly, je ne veux pas que tu penses que je t’ignore ! Je ne peux pas être différent avec toi au travail
du jour au lendemain. Tu le comprends ? Tu sais à quel point les rumeurs circulent vite à l’hôpital.
— Oui, j’ai bien compris. Je ne te demande pas d’être différent… C’est juste que je préfère ton
attitude lorsque nous sommes tous les deux.
Un dernier baiser avant de nous dire « au revoir » et je quitte l’hôtel. En arrivant à la maison, ma
mère me questionne. Elle est contrariée car je ne lui ai pas répondu hier soir, je lui explique que je
n’avais pas de réseau et que je suis restée dormir chez une collègue. Elle ne croit pas un mot de ce que je
lui raconte, mais elle n’est pas prête à entendre la vérité.
— Maman, je ne vais pas me justifier à chaque fois que je sors ! Je ne le faisais pas avant, si ça te
pose un problème, dis-le-moi, je ramasserai mes affaires ! Lui dis-je en guise d’avertissement.
Elle cherche ses mots pour me répondre, elle acquiesce et s’excuse. Je vois bien que mes mots l’ont
blessée, ce n’est pas ce que je souhaitais. Je veux juste qu’elle me laisse vivre ma vie sans me poser des
tas de questions. Je file sous la douche, il est l’heure que je sois au bureau. Je mets un jean bleu et un
chemisier blanc. Je fais rapidement un chignon et ajoute un brin de rouge à lèvres avant de partir au
travail.

Lorsque j’entre dans le service, Julie me saute dessus l’air affolée :
— Bonjour Alyssa, est-ce que tu as les coordonnées du médecin intérimaire qui doit venir
aujourd’hui ?
— Bonjour Julie, attends une minute, je regarde.
— C’est docteur Donis aujourd’hui.
— Ah c’est lui ! Il n’est pas arrivé ?
— Non il a presque une heure de retard déjà ! Ajoute Julie.
— Qui est avec lui aujourd’hui ?
— C’est docteur Le Corre Roger, il s’impatiente d’ailleurs. Heureusement que c’était Baptiste de
garde hier soir, il a accepté de rester l’attendre sans difficulté.
— Écoute, j’appelle immédiatement Docteur Donis et je vous tiens au courant.
Julie sort de mon bureau, je compose tout de suite le numéro de Xavier, en espérant qu’il a une bonne
raison pour ne pas être là ce matin, mais surtout j’espère qu’il va arriver. Répondeur à trois reprises, je
lui laisse un message en lui demandant de me rappeler le plus vite possible. Baptiste semble ne pas
vouloir montrer son mécontentement contrairement à Roger qui rumine depuis dix minutes. Après deux
nouvelles tentatives pour joindre l’intérimaire sans succès, je décide de prévenir Thomas. Il répond dès
la première sonnerie.
— Thomas, bonjour c’est Alyssa.
— Alyssa ?
Il dit simplement mon prénom, mais j’entends de l’étonnement dans sa voix. De plus, il m’appelle
rarement Alyssa, enfin si quand nous sommes au travail…
— Un souci ? Demande-t-il rapidement.
— Oui en effet. Le médecin intérimaire prévu aujourd’hui n’est pas arrivé et n’est pas joignable.
Baptiste est resté pour le moment, mais je me demandais quoi faire si le remplaçant ne vient pas.
— Qui est l’intérimaire ? Il est déjà venu chez nous ?
— Non, c’était sa première garde ce matin, c’est Donis Xavier.
— J’arrive tout de suite Alyssa.
— Merci, à tout de suite.
Quelques minutes plus tard, Thomas pénètre dans mon bureau.
— Tu t’es changée Aly ! Précise-t-il à voix basse.
Je lui souris, légèrement gênée mais reconnaissante de sa remarque.
— Je vais m’entretenir avec Baptiste dans un premier temps. Votre interne est là aujourd’hui ?
— Oui Alexandre est là. Acquiescé-je.
Thomas rejoint les médecins pour tenter de trouver une solution. J’attends dans mon bureau tout en
essayant de joindre l’intérimaire. Dix heures, Xavier débarque dans mon bureau !
— Bonjour Madame Steunou. Dit-il sans se presser.
— Bonjour Monsieur Donis, j’essaie de vous joindre depuis plus d’une heure.
— J’étais dans le train, ça ne devait pas capter. Je suis désolé du retard, j’ai loupé le premier départ.
— Pourquoi ne pas avoir appelé ?
— Je suis là, tout va bien. Je vais aller m’excuser auprès de mon confrère.
— Oui et auprès du médecin qui était de garde hier, qui attend pour rentrer chez lui. Ajouté-je
sèchement.
Il semble ne pas mesurer l’inquiétude que nous avons eue ici. Je ne suis même pas certaine qu’il soit
vraiment désolé. Heureusement, il n’a plus qu’une seule garde à faire ce mois-ci. Je regarde le planning
pour m’en assurer, c’est bon. Oh Mince ! Je viens de réaliser que nous sommes vendredi dix avril, c’est
aujourd’hui ! Oh il faut que j’appelle chez mes parents tout de suite.
— Allô maman, c’est Alyssa. Tu es à la maison ?
— Non, je suis au marché, pourquoi ? Demande-t-elle inquiète.
— J’ai besoin de savoir si j’ai du courrier rapidement !
— Je n’ai reçu aucun courrier à ton nom jusque-là. C’est Hugo qui te l’a déposé hier.
— Oh, je vois. Tant pis j’attendrai quinze heures.
— C’est aujourd’hui tes résultats ? Demande maman.
— Oui, ça m’était complètement sorti de la tête. Vivement tout à l’heure que je sois fixée.
— Tu me tiens au courant Alyssa, dès que tu as la réponse. Je serai au travail jusqu’à la fermeture du
salon, mais envoie-moi un message.
— Oui, je le ferai. Je te laisse, je dois travailler.
Je n’en reviens pas d’avoir mis de côté cet évènement de la plus haute importance. Il s’est passé
tellement de choses depuis mon oral. Thomas fait irruption dans mon bureau.

Chapitre 48

Quel homme, quand je pense que j’ai passé la nuit avec lui.
— Le médecin intérimaire est arrivé, mais s’il y a le moindre souci, tu me préviens, je m’arrangerai
pour lui faire sauter sa prochaine garde chez nous. Précise Thomas exaspéré.
— Oui, je ne suis pas franchement en confiance non plus.
— Qu’est-ce qui se passe ? Tu sembles nerveuse ?
— Oui, j’ai réalisé que mes résultats étaient aujourd’hui ! J’avais zappé ça.
— Il faut dire que ces derniers temps tu étais très occupée.
— Oui, c’est certain. Dis-je en soupirant.
— Je faisais référence à nos rendez-vous secrets. Ajoute-il avec un petit sourire pincé.
— Je croyais que nous ne devions pas aborder notre rapprochement sur notre lieu de travail Monsieur
Simon ?
— Nous devrions reparler de ces différents points dans mon bureau, si tu as un moment dans la
journée, n’hésite pas à passer.
— Un rendez-vous Thomas dans votre bureau ? Lui demandé-je pour le provoquer.
— Finalement, j’aime assez que tu me vouvoies au travail, ça me fait de l’effet.
— Oh, je vois. C’est tellement commun de tomber sous le charme de son supérieur. Je pense que
VOUS devriez y aller. Il faut que je sois présente auprès de mon équipe aujourd’hui. Lui dis-je en
insistant volontairement sur le « vous ».
— Aly, je suis sérieux s’il se passe quoique ce soit avec Docteur Donis, tu me préviens.
— Oui chef !
— C’est à quinze heures tes résultats, c’est ça ? Tu manges au self ce midi ?
— Non, je ne pense pas. Je vais essayer d’appeler Hugo pour savoir s’il a reçu mes résultats par
courrier, sinon oui, il me faudra attendre quinze heures.
— Je suis sûre que tu as fait une excellente impression. Tu me tiens au courant dès que tu as tes
résultats ?
— Oui, je le ferai. Merci.
Contre toute attente, la matinée se déroule très bien. L’équipe est même satisfaite du médecin qui est
disponible et accessible. J’envoie un petit message à Thomas : TOUT SE PASSE BIEN. ALY. Il est midi,
j’appelle Hugo après quelques hésitations :
— Bonjour Hugo, c’est Alyssa.
— Alyssa ? Tout va bien ?
Curieusement, il ne semble pas si surpris par mon appel.
— Oui ça va, je te remercie. Je t’appelle parce que j’ai un service à te demander.
— Est-ce en rapport avec un certain courrier que tu attends ? M’interrompt Hugo.
— Oui, comment le sais-tu ?
— Eh bien, nous sommes le dix avril et je n’ai pas oublié que c’est aujourd’hui que tu dois recevoir
tes résultats.
— En effet, je me demandais s’il était possible que je vienne te voir à l’école pour t’emprunter ta clé
de la boîte aux lettres et que je te la rapporte ensuite ? Ma mère m’a dit que mon courrier ne suivait pas
encore et j’avoue être pressée de connaître la réponse.
— Tu n’as pas besoin de venir me voir ! Je me doutais que tu aurais envie de passer, je ne savais pas
si tu allais me le demander. J’ai laissé la clé sous le paillasson de la porte de service à l’arrière du
garage.
— Merci Hugo. Je ne te dérange pas plus longtemps.
— Si ça ne t’embête pas, je veux bien un message pour me tenir informé du résultat.
— Je le ferai. Merci. À bientôt.
— Au revoir Alyssa.
Il est incroyable, il a pensé à moi malgré la situation. Ça me touche beaucoup. Je préviens mon
équipe que je prends ma pause et que je suis joignable sur mon téléphone personnel.
J’ai reçu un message de Thomas : Tant mieux, je m’attendais au pire. Tu as eu des nouvelles de ton
courrier ?
Je suis contente qu’il s’en inquiète.
Moi : Je m’absente quinze minutes le temps d’aller voir, enfin si j’ai l’autorisation ?
Je sais qu’il ne me dira pas non, mais c’est une façon de le prévenir que je quitte l’établissement.
Tom : Oui, à condition que tu me donnes vite ta réponse !!!

Je trouve immédiatement la clé à l’endroit convenu avec Hugo. Je me retiens de courir jusqu’à la
boîte aux lettres. En ouvrant celle-ci, je découvre la fameuse lettre tant attendue ! Je suis nerveuse,
j’aimerais tellement rentrer à l’école en septembre. Cela tomberait juste à la fin de mon remplacement
aux urgences…
J’ouvre pressement l’enveloppe et cherche les mots espérés quelque part au milieu de la feuille. «
Vous êtes admise » Je crois rêver, j’ai réussi ! J’en pleure de joie. J’envoie un message à ma mère et à
mes sœurs, je le transfère immédiatement à mes amis les plus proches, sans oublier Hugo ! Je dépose la
clé à sa place, mon portable se met rapidement à vibrer, je reçois des félicitations. J’en profite pour
confirmer à Julie ma présence à l’anniversaire de Théo demain.
En revenant devant la maison, je découvre Karen qui attend près de ma voiture. Aujourd’hui, sa
présence ne me dérange pas, sans doute parce que je n’ai plus à la supporter quotidiennement.
— Bonjour Karen. Lui dis-je en souriant.
— Bonjour Alyssa, contente de vous voir depuis le temps. Lâche-t-elle.
— Oui, j’ai déménagé.
— C’est bien ce que je pensais, quel dommage, vous formiez un si beau couple tous les deux.
— Merci Karen.
— On ne vous verra plus du tout ici ?
— Je ne sais pas, peut-être occasionnellement si Hugo le souhaite.
— Il doit être malheureux, mais bon il a régulièrement de la compagnie le soir. Ajoute-t-elle en levant
les yeux au ciel.
Je sais que je ne devrais pas poser de questions, mais elle ne me dit pas cela sans raison. Elle veut
que je la questionne et j’avoue que j’ai très envie d’en savoir un peu plus. Est-ce qu’il m’a déjà
remplacée ? Lui qui me demandait une seconde chance, il y a quelques jours à peine. Je ne le juge pas,
mais ça me pose questions.
— Tant mieux s’il a de la compagnie de temps en temps, je ne souhaite pas qu’il soit seul.
— Oui, c’est évident, mais bon…
Karen ne finit pas sa phrase, ça ne lui ressemble pas. D’habitude, elle ne se retient pas. Elle est
parvenue à attiser ma curiosité.
— Qu’est-ce qu’il y a Karen ? Vous avez quelque chose à me dire ?
— Non pas du tout Alyssa, ce n’est pas à moi de vous parler de ça. C’est à eux deux.
— Mais de qui parlez-vous enfin Karen ?
— Je parle d’Hugo et de sa nouvelle compagne… Précise Karen en rougissant.
Sa nouvelle compagne ? Mais non, elle se fout de moi, Hugo ne fréquenterait pas quelqu’un si
rapidement. Je sais bien que je ne fais pas mieux, mais c’est différent… Et Hugo semblait sûr de ses
sentiments pour moi puisqu’il venait de me demander en mariage. Putain, il faut que je me raisonne,
Karen n’est qu’une commère. Elle se fait des films.

Chapitre 49

— Hugo est libre de fréquenter quelqu’un, même si je ne pense pas que ce soit déjà le cas. Lui dis-je
agacée.
— Écoutez Alyssa, ça ne me regarde pas, je ne sais pas s’ils sont réellement ensemble mais depuis le
temps qu’ils se tournent autour.
— Depuis le temps ? Mais qu’est-ce que vous en savez ?
— Tout ce que je sais, c’est que lorsque vous rentriez tard du travail, elle était parfois là en fin de
journée et partait avant votre arrivée.
Non, mais elle délire complètement. Hugo m’aurait trompée selon elle…
— Peut-être que la personne dont vous parlez est son amie tout simplement.
— Je ne sais pas, vous devriez lui demander. Relance Karen.
— Mais pourquoi est-ce que je ferai cela ? Je lui ai toujours fait confiance.
— Parce que si vous saviez de qui nous sommes en train de parler, vous voudriez en savoir plus.
—Ah bon, parce que vous savez qui est cette fille ? Lui demandé-je contrariée.
— Oui, je le sais.
Est-ce que j’ai envie de le savoir ? Est-ce qu’il s’agit de la fameuse Hélène dont il a osé me parler
récemment ? Quelqu’un d’autre que je connais ? Je n’ai pas beaucoup de temps, il faut que je retourne au
travail. Je ne vais pas résister à lui demander.
— Pourquoi pensez-vous qu’ils sont ensemble Karen ?
— Elle est restée dormir ces derniers jours. Enfin dormir je n’en ai pas la certitude, mais elle repart
le matin.
— Et cette même femme venait déjà avant que je déménage ?
— Oui par un moment elle venait régulièrement le soir quand vous n’étiez pas là. Mais ces derniers
temps, elle ne venait plus jusqu’à que vous et monsieur Rousseau….
— Très bien, vous avez mon attention Karen. De qui s’agit-il ?
Cette fois, j’ai très envie d’en savoir plus. Est-ce qu’il m’a trompée ? Non, il n’aurait pas pu me faire
ça et me demander en mariage ensuite… Karen marque un temps de silence, comme si elle voulait que je
me prépare à entendre la vérité. C’est insupportable, si elle ne parle pas tout de suite, je vais lui faire
cracher le morceau !
— Karen ! Crié-je tout en me retenant de la bousculer.
— C’est votre sœur Alyssa !
Ma sœur ? Je manque de m’étrangler. Ce n’est pas possible ? On monde s’écroule. Laquelle ? Pas
Julie, elle est mariée et a des enfants. Pas Émilie ? Elle ne me ferait jamais ça non plus.

— Ma sœur ? Le son peut à peine sortir de ma bouche. Mes mains tremblent, je les enfonce dans les
poches de mon jean pour ne pas que Karen le remarque.
— Oui Alyssa, votre plus jeune sœur Émilie venait souvent avant. À présent elle reste la nuit. Ajoute
Karen.
Je n’en crois pas un mot, elle doit venir pour lui tenir compagnie ou le consoler. Mais pourquoi est-ce
qu’elle reste dormir ? Qu’est-ce que c’est ce bordel ? Je veux une explication. Est-ce que j’ai encore le
droit d’en avoir une ? Je vais lui demander, j’ai besoin d’en avoir le cœur net.
— Karen, je pense que vous vous trompez. Elle doit venir lui tenir compagnie, car la séparation a été
brutale. Je dois retourner au travail. Je vous remercie de m’en avoir parlé.
— Au revoir Alyssa, bon courage pour la suite.

Je reprends la direction de l’hôpital, je suis en état choc, comme si j’avais été victime d’un accident
de la route. Je ne sais plus ce que je dois croire, ce que je dois faire. Nous ne sommes plus en couple,
mais si… s’il s’est passé quelque chose entre eux, je ne pourrais jamais leur pardonner. Je dois me
calmer, je dois y réfléchir au calme et surtout parler à Émilie.
Elle sera là, demain à l’anniversaire de Théo. Vais-je pouvoir attendre jusqu’à demain ? Je dois le
faire, j’en suis capable, je lui parlerai quand je serai face à elle, elle ne pourra pas se dérober de cette
façon.

Lorsque j’arrive sur le parking de l’hôpital, je me rends compte que je pleure, je ne sais pas depuis
combien de temps. Je suis déboussolée par ce que Karen m’a dit et en même je me culpabilise de douter
de ma sœur et d’Hugo. Je patiente quelques minutes avant de sortir de ma voiture et regagner mon bureau.
Toute la joie que j’éprouvais en découvrant que j’étais reçue à l’école des cadres s’est évaporée.
Peu avant quinze heures, mon portable vibre. Aly, je n’ai pas de nouvelles…as-tu ta réponse ? Tom.
Mince, je devais le tenir informer. Oui, je suis admise. Le téléphone du bureau sonne.
— Alyssa ? C’est Thomas.
— Oui.
— Félicitations pour ton concours, tu peux être fière de toi !
— Merci Thomas.
— Ça n’a pas l’air d’aller? Demande-t-il inquiet.
Je ne peux pas lui dire ce qui me trouble…
— Si tout va bien. Je suis juste un peu débordée.
— À cause de l’intérimaire ?
— Pas du tout, il est très bien.
— Aly, tu veux que je vienne te voir ? Je sens que quelque chose ne va pas.
— Non vraiment ce n’est pas utile. Insisté-je en tentant d’être le plus convaincante possible.
— D’accord. On se voit ce soir ?
— Je ne sais pas. Je dois raccrocher.
— À plus tard Alyssa.

Je ne serai pas de bonne compagnie si je le vois ce soir, je ne pense qu’à ce que Karen m’a dit. Vers
dix-sept heures, texto de Tom : Aly, on boit un verre ensemble ? Tom.
Cynthia débarque dans mon bureau accompagnée d’Aurélie et de plusieurs de mes collègues de
pneumologie. Elles me félicitent à tour de rôle et m’offrent un bouquet de fleurs. Je suis très touchée de
leur attention. Toute l’équipe des urgences se joint à eux. Je suis émue et laisse échapper quelques
larmes, que tout le monde croit à tort être des larmes de joie.
À dix-huit heures, je réponds à Thomas : Ok pour boire un verre.
Je ramasse mes affaires et quitte le bureau. N’ayant pas de réponse, je rentre chez mes parents qui
m’attendent pour arroser la bonne nouvelle. Je m’efforce de sourire et de paraître heureuse. Dix-neuf
heures, je n’ai toujours pas de réponse. Nous parlons de l’anniversaire de Théo, j’en profite pour
emballer le cadeau de mon neveu. Ma mère me dit que Lucie a essayé de me joindre tout à l’heure,
qu’elle avait quelque chose à me demander. Je la rappelle :

— Salut Lucie, tu vas bien ? Tu as essayé de me joindre.


— Salut Alyssa, félicitations encore ! Je suis trop contente pour toi, c’est vraiment génial, tu le
mérites. Tu l’auras travaillé ce concours. Voilà, je voulais ta permission pour inviter Hugo demain. En
fait il était déjà invité, mais je pense qu’il ne viendra pas sans ton approbation. Je sais que ce n’est pas
évident pour toi, mais c’est le parrain de mon neveu.
— Je n’avais pas du tout pensé à l’éventualité de sa présence, mais c’est normal qu’il vienne. Il ne
me dérange pas.
— Tu es certaine Alyssa ?
— Oui, je t’assure.
— Très bien, je suis soulagée. Ajoute Lucie.
J’avoue que je ne suis pas très l’aise à l’idée de savoir qu’il sera présent demain lors de
l’anniversaire. Cependant, je comprends qu’elle l’invite, même si nous sommes séparés, il reste le
parrain de Théo. Ça risque d’être embarrassant, d’autant plus que je pensais parler à Émilie. En même
temps, je verrai comment il se comporte tous les deux en ma présence. S’ils se voient aussi souvent que
cela, ils devraient être assez proches…

Chapitre 50

Il faut que j’occupe ma soirée autrement qu’en pensant à demain, je serai bientôt fixée sur cette soit
disant « liaison » entre ma sœur et Hugo.
Je me décide enfin à appeler Emma et lui raconte tout ce qui s’est passé avec Thomas sans lui
communiquer son identité ni sa fonction à l’hôpital. Elle m’écoute tout déballer sans m’interrompre, elle
émet seulement quelques sons de gorge pour me rappeler qu’elle est au bout du téléphone. Lorsque tout
est avoué, je lui demande ce qu’elle en pense. Le verdict est sans surprise, elle pense que je n’ai
probablement aucun avenir avec lui et que je dois faire attention à ne pas tomber amoureuse de lui. Je la
rassure car je n’ai pas de sentiments pour lui, c’est sincère, je suis bien avec lui, il fait attention à moi et
c’est tout ce dont j’ai besoin en ce moment.
Elle s’inquiète tout de même du fait qu’il est marié et père et précise à plusieurs reprises, qu’elle n’a
pas confiance en lui. Mais comment peut-elle être aussi catégorique, elle ne le connaît pas. J’ai envie de
prendre sa défense, mais elle ne comprendrait pas. Si elle savait que Thomas est délicat avec moi,
attentionné, prévenant et tellement encore… Oh oui il est tellement plus. J’aimerais passer la soirée avec
lui, je voudrais être dans ses bras pour sentir la douceur de sa peau contre la mienne, m’enivrer de son
odeur, plonger mes yeux dans les siens.
— Alyssa, tu es toujours là ?
— Oui, je t’écoute Emma.
Concernant la séparation, elle semble avoir compris ce que je ressens. J’ose lui confier ce que Karen
m’a dit cet après-midi. Emma est abasourdie.
— Alyssa, tu ne peux pas croire ça ! Je connais Hugo depuis plus de dix ans, il n’aurait jamais été
capable de te trahir avec ta propre sœur. Parle-lui, essaie de savoir s’il voit souvent Émilie. Enfin, c’est
à toi de voir, mais si j’étais à ta place, je lui dirai ce que la voisine a eu le culot de sous-entendre.
— Oui Emma, c’est ce que je vais faire dès demain. Je vais leur poser la question. De toute façon, je
ne peux pas faire autrement. Si tu savais à quel point ça me contrarie.
— Admettons que ce soit le cas ! Est-ce que ça remettrait en cause la situation actuelle ?
— Je l’ai quitté donc ça ne pourrait rien changer de ce côté-là mais si... J’en ai la nausée à
l’imaginer ! Si c’était vrai, je ne pourrais jamais leur pardonner, je ne voudrais plus jamais les voir.
Emma m’assure qu’elle sera là le week-end prochain, elle viendra seule pour passer du temps avec
moi.
Vingt-heures, je reçois enfin un message de Thomas, je ne l’attendais plus.
Aly, je suis desolé de ne pas avoir pu de répondre avant. Je suis disponible… ça te dit toujours ?
J’ai mangé avec mes parents et là j’étais sur le point d’aller me coucher, car la soirée me déprime.
On peut remettre ça à plus tard… je suis fatiguée.
Il ne tarde pas à me répondre : On ne pourra pas se voir ce week-end… tu es sûre ?
Moi à 20h05 : Je vais me coucher tôt. En plus j’ai bu quelques verres à l’apéro, je ne préfère pas
conduire.
Tom : Je peux venir te chercher… et tu peux te coucher tôt à mes cotés si tu veux ma belle… tu
n’as qu’un seul mot à dire et je serai là.
Il ne sait même pas où habitent mes parents, si ? Il est vraiment prêt à venir me chercher ?
Moi à 20h07 : Non, ne te dérange pas tom. En plus tu ne sais pas où habitent mes parents.
Tom : Aly, tu m’as déjà plus au moins indiqué le lieu et je m’en souviens, ça ne me dérange pas…
bien au contraire. Donne-moi le numéro et la rue, j’arrive.
Je serai forcément mieux avec lui, que seule dans mon lit à déprimer et à ressasser.
Moi : 27 rue Kennedy. Je t’attends… Aly.

Je suis un peu gênée d’annoncer à mes parents que je ne passerai pas la nuit chez eux une fois de plus.
Mais personne ne me pose de questions, je pense avoir blessé ma mère ce matin. Je me douche
rapidement et enfile une jolie robe blanche. Je prévois des vêtements de rechange pour une fois. Lorsque
je sors de la maison, j’aperçois la voiture de Thomas dans l’allée. Je vais rapidement le rejoindre, je ne
veux pas qu’on nous voit ensemble.

Il est trop élégant ce soir, il porte sa veste en cuir, celle que j’avais portée le soir où il a volé à mon
secours, j’aperçois en-dessous sa chemise grise qui dépasse, ma préférée et il le sait depuis peu. Lorsque
je monte dans sa voiture, son parfum m’envahit immédiatement.

— Bonsoir Thomas. Merci d’être venu me chercher.


— Bonsoir tu es magnifique comme toujours.
Je rougis. Je suis impressionnée de me retrouver à nouveau dans sa voiture, cette fois-ci les
circonstances sont différentes. Je ne suis ni à moitié nue ni ivre de la veille. J’ai les idées claires, et je
peux apprécier ce moment. Il est tellement beau, j’ai envie de l’embrasser mais je me retiens car les
voisins me connaissent.
— Je t’ai répondu tard, parce que j’étais avec mes enfants. Ce n’était pas prévu, mais leur mère
n’étaient pas disponible pour les récupérer à la piscine, j’ai profité pour passer un peu de temps avec
eux.
— Super, mais tu ne voulais pas passer la soirée avec eux ?
— Non, ma femme est rentrée, j’ai préféré partir.
— Tu ne trouves pas dur de passer tes soirées à l’hôtel loin de tes enfants ?
— Si évidemment. Je pourrais rester chez moi, mais la situation est assez compliquée.
Lorsqu’il a prononcé ces deux mots « sa femme », j’ai senti comme une décharge au plus profond de
mon être, ils m’ont rappelé que Thomas n’était pas « mien » et qu’il ne le serait jamais !
Sans doute a-t-il remarqué que je n’avais pas envie de parler pendant le trajet, il a respecté mon
silence et a mis de la musique.
En arrivant, Tom me propose de mettre un film, nous nous allongeons côte à côte sur le lit, nous
passons un moment très agréable. Sa présence me réconforte plus que je ne l’aurais imaginé.
La douceur de ses doigts sur ma joue m’éveille, je réalise que je m’étais assoupie contre son épaule.
— Tu dormais Aly ? S’étonne Thomas.
— Oui, je crois bien. Excuse-moi.
— Ne sois pas désolée. Tu veux peut-être te changer et te mettre sous la couette ?
— Oui, en effet.
Je prends mon sac et vais me changer dans la salle de bain. Lorsque je le rejoins, il s’est glissé sous
les draps et m’attend l’air inquiet.

Chapitre 51

— Le film était bien ? Désolée de m’être endormie.


— Ce n’est pas grave, comment se fait-il que tu n’aies pas évoqué ton concours. Je suis vraiment très
content pour toi, j’étais très confiant en tes capacités.
— Merci, je suis ravie d’être reçue.
— Aly, tu me le dirais si j’avais fait quelque chose ?
— Non, tu n’as rien fait Thomas ! Je suis contrariée mais rien à voir avec toi.
— Ok, je ne voulais pas être indiscret. Répond Thomas embarrassé.
— Non, pas du tout, mais je ne préfère pas t’ennuyer avec ça et je voudrais me changer les idées, car
je n’ai plus envie d’y penser.
— Je n’insiste pas. Mais si tu as envie d’en parler, tu sais que je suis là.
— Merci Tom. Pourquoi tu ne me parles jamais de toi ? Si je ne te pose pas de questions, tu ne me
racontes rien.
— Que veux-tu savoir Aly ?
— Je peux te demander tout ce que je veux ? Demandé-je curieuse.
— Je n’ai pas de grand secret inavoué, si c’est que ce que t’intéresse.
D’accord, par quoi commencer ? Qu’est-ce qu’il ressent pour sa collègue Sandy, j’aimerais savoir
s’ils ont déjà flirté ensemble. En même temps je sais qu’il est avec sa femme depuis plus de dix ans, je ne
devrais pas lui poser cette question.
— Comment s’appelle ta femme ?
— C’est tout ce qui t’intéresse ? Savoir le prénom de ma femme ? Elle s’appelle Estelle.
Estelle, inattendu mais c’est joli.
— Laisse-moi réfléchir, je pourrais te poser des tas de questions. Ajouté-je en riant.
— Très bien, je répondrai en toute honnêteté à tes questions mais est-ce que tu répondras aux
miennes ?
— Oui, je le ferai sans problème. Chacun son tour dans ce cas, mais si ça devient trop indiscret, nous
arrêterons tous les deux.
Je suis excitée à l’idée de nous dévoiler l’un à l’autre au travers de ce petit jeu. Thomas se lance le
premier :
— On va commencer par des questions faciles. Avais-tu envie de venir ce soir ou il a fallu que
j’arrive à te convaincre ?
— J’avais très envie de venir, j’ai plutôt essayé de me persuader de rester chez moi, mais je n’ai pas
résisté bien longtemps avec tes messages.
Je me rapproche de lui pour déposer mes lèvres contre les siennes, nous échangeons notre premier
baiser de la soirée. Après quelques minutes, je reprends le jeu.
— Depuis que tu as rencontré ta femme, est-ce que tu avais déjà flirté avec une autre femme ?
— Absolument pas Aly. Jamais je n’aurais pu la tromper. Elle était l’amour de ma vie, la mère de
mes enfants, je lui aurais tout donné, mais l’amour ça ne marche pas que dans un seul sens.
Ces propos me troublent, je regrette d’avoir posé cette question. Il répond avec tant de sincérité. Sa
femme ne l’aimait plus ? Je n’ose pas lui demander, il semble déjà blessé et encore tellement amoureux.
— Aly, tu veux continuer ?
— C’est à toi de me dire.
— Je vais te poser la même question, est-ce que tu as déjà flirté avec quelqu’un d’autre depuis que tu
as rencontré Hugo?
— Avec toi seulement. Mais à ce moment-là, mon couple battait de l’aile. As-tu parlé de « nous » à
quelqu’un ?
— Non à personne ! Il aurait fallu que j’évoque ma séparation dans un premier temps, ce que je n’ai
pas fait. Je n’ai pas encore trouvé le courage d’affronter les réactions, les interrogations et je ne suis pas
prêt à l’imposer aux enfants. Est-ce que tu te souviens de notre premier baiser ?
— Oui, c’était à l’internat. Je me souviens surtout de ce que j’ai ressenti après ce baiser. J’étais
honteuse, embarrassée et toi qu’est-ce que tu en as retenu ?
— J’étais honteux aussi, mais j’avais envie de recommencer. Tes lèvres m’obsédaient de façon
presque incontrôlable.
— J’ai l’impression que nous évoquons un souvenir remontant à plusieurs semaines. Et pourtant ça ne
fait qu’une semaine que nous avons échangé notre premier baiser.
— Oui Aly, une semaine demain.
Je réalise à peine que je suis séparée depuis autant de temps. Comment ai-je pu me jeter si vite dans
les bras d’un autre homme après dix ans de vie commune avec Hugo ?
— Je suis séparée depuis autant de temps. Je n’ai même pas pris le temps d’intégrer cette rupture. Tu
te rends compte que le jour même…
— Aly, tu m’as dit que tu doutais depuis des mois, c’est à ce moment-là que le cheminement vers la
rupture a dû débuter. Tu ne crois pas ?
— Je n’ai jamais cru que l’on se séparerait réellement. Je craignais que ça se produise, je pensais
que c’est lui qui me quitterait.
— Tu as peur de regretter Aly ? C’est ce qui te contrarie aujourd’hui ?
— Non, je n’ai pas peur de regretter. Je me demande comment nous en sommes arrivés là. Comment
a-t-il pu s’éloigner de moi pendant deux ans, comment a-t-il pu croire qu’après tout ça, j’accepterai de
l’épouser. Pourquoi est-ce qu’il ne m’a jamais parlé de ses doutes ?
— C’est à lui qu’il faut le demander Aly, si tu souhaites connaître les réponses à tes interrogations.
— Je te demande pardon, tu n’as sûrement pas envie d’entendre ça.
— Non, ça ne me dérange pas. Je comprends que tu sois déboussolée.
Pourquoi ça le dérangerait, puisqu’il ne veut aucune relation sérieuse avec moi. Il ne serait pas
perturbé non plus si je lui disais que je regrette ou que je vais essayer de tirer toute cette histoire au
claire…
— Tom, j’ai une autre question à te poser, comment tu me considères ?
— Comment ça ?
— Comment qualifies-tu nos « échanges » ? Est-ce que je suis un plan cul ? Un flirt ? Une aventure ?
— Je suis très surpris de ta question, à vrai dire, je ne nomme pas notre relation. Je la vis au jour le
jour.
— Oui je le sais ça… sans te poser la moindre question. Tu me l’as dit et répété, mais si tu devais
l’identifier?
— De toute évidence, tu me reproches quelque chose. Tu penses que je ne te respecte pas, parce que
je t’ai dit que je ne cherchais pas de relation sérieuse ? Tu n’es absolument pas un plan cul ! Je ne peux
pas chercher à construire une relation sérieuse alors que je ne suis pas divorcé. C’est ce que tu
recherches avec moi ?
— Non, pas du tout.
— Quand mon couple a basculé, j’ai commencé à être attiré par toi, il se trouve que tu l’étais aussi.
Je ne peux pas nier que j’ai toujours des sentiments pour ma femme, comme toi j’imagine…
Évidemment, mais à quoi est-ce que je m’attendais ? Merde, je n’avais pas prévu que ça me ferait
mal d’entendre qu’il aime toujours sa femme…
—Tu es séparé depuis combien de temps ?
— Depuis trois mois environ, enfin au bout d’un mois, elle m’a convaincu d’essayer d’arranger les
choses, nous avons essayé durant quelques jours, ça ne fonctionnait plus…
— Eh bien, cette conversation a pris une tournure plus sérieuse que je ne le pensais.
— Tu te sens mieux ?
— Oui. J’ai une journée qui s’annonce difficile demain, c’est l’anniversaire de mon neveu, Hugo est
son parrain, il sera présent.
— Vous êtes des adultes, vous allez surmonter ça. Et moi, demain je rencontre l’avocat.
— Oh !
— Heureusement nous avons la nuit pour nous y préparer. Réplique Tom avant de m’enlacer
affectueusement. Il parvient à me faire oublier toutes mes contrariétés, je m’abandonne à lui comme à
chaque fois.

Chapitre 52

Ce matin en ouvrant les yeux, je constate que Thomas dort toujours. C’est la première fois que je peux
le regarder endormi. Je prends le temps de détailler chaque trait de son doux visage.
Ses lèvres rosées sont joliment ourlées et légèrement pulpeuses, elles me donnent envie de les
mordiller chaque fois qu’il les entrouvre. J’adore la petite forme de cœur dessinée au centre de ses
lèvres et par-dessus tout, j’aime les fossettes qui se creusent de chaque côté de sa bouche lorsqu’il sourit.
J’apprécie le contraste de ses sourcils épais nettement plus foncés que ses cheveux, ils sont bien
structurés. Ses yeux fermés ne me permettent pas d’en faire une description précise sur le moment, leurs
couleurs marron claires rendent son regard profond et captivant. D’ailleurs, c’est son sourire et son
regard qui en font un parfait séducteur. Ses cheveux ont une longueur impeccable, juste ce qu’il faut pour
que je puisse y faire glisser mes doigts. Il est irrésistible !
Sa main est posée sur ma poitrine, je n’ose pas la retirer pour me lever. Je ne veux pas le déranger, je
vais attendre qu’il ouvre les yeux patiemment. Une dizaine de minutes s’écoulent peut-être avant qu’il ne
commence à remuer, lorsqu’il ouvre les yeux, il esquisse un sourire.
— Tu me regardais dormir ?
— Oui je suis démasquée. Lui dis-je en riant.
— Tu es réveillée depuis longtemps ?
— Non, ça ne fait que quelques minutes.
— Je vois et donc tu me reluquais, c’est bien ça ?
Je m’empourpre et n’essaie même pas de nier.
— Est-ce embêtant si c’est le cas ?
— Non, au contraire, quel plaisir te de découvrir en ouvrant les yeux, je vais m’habituer à toi.
— Moi aussi.
Est-ce qu’il a dit ça sérieusement ? Il reste immobile, les yeux plongés dans les miens. Je sens mon
sourire se pincer de plus en plus et l’espace d’une seconde, peut-être moins, une pensée me traverse
l’esprit… Je ne veux pas m’y résoudre. J’interromps notre échange.
— À quelle heure est-ce que tu as rendez-vous Thomas ?
— Je vois l’avocat cet après-midi, mais je retrouve mes enfants à dix heures.
— Il nous reste deux heures, tu veux aller te balader ?.
— Non, je ne préfère pas. On pourrait nous voir ensemble.
Ah, voilà ce que c’est de fréquenter un homme marié… il faut se cacher des autres.
— Oui, tu as raison. Dis-je avec une pointe de déception.
— En même temps, nous sommes tranquilles ici. Réplique Tom.
Immédiatement, il soulève le drap, écarquille grand les yeux et ajoute :
— On pourrait s’occuper pendant ces deux heures…

Peu avant dix heures, nous sommes prêts à partir, chacun de notre côté, nous allons affronter notre
journée. Thomas promet de m’envoyer un message dans l’après-midi. Quelques baisers d’encouragements
suffisent pour les prochaines heures.
Je passe rapidement récupérer le cadeau de Théo chez mes parents et me rends chez ma sœur comme
convenu pour le repas. Je porte une robe blanche cintrée avec une ceinture noire, cette robe est très
habillée voire trop pour cette occasion. Lorsque Lucie ouvre la porte, elle s’exclame :
— Alyssa, tu es superbe ! Tu as la classe. Quelque chose de changé ?
— Non, rien du tout. Ce doit être ma robe que tu n’as jamais vue.
Je cherche du regard la présence d’Hugo en parcourant le salon puis le vaste séjour. Je ne l’aperçois
pas. Peut-être qu’il ne viendra pas finalement… En revanche, Émilie est là ! Je sens une certaine
amertume en l’apercevant. Je dois lui laisser le bénéfice du doute, il ne s’est sûrement rien passé entre
eux. Émilie se lève et vient me faire la bise immédiatement, elle est très à l’aise avec moi.
— Tu es très élégante Alyssa, comme toujours. Me dit-elle.
— Toi aussi Émilie.
Théo me saute dans les bras et s’écrie :
— Tata, tata tu n’as pas oublié mon cadeau ? Je ne le vois pas !
— Il est dans l’entrée, mais attends que ta maman te donne la permission pour l’ouvrir.
— Cool. Tata, il est où tonton Hugo ? Demande Théo.
Je suis prise de panique. Théo n’est pas au courant de ma séparation ? Je ne peux pas lui annoncer
comme ça. J’aimerais trouver une raison valable, mais rien ne me vient à l’esprit. Lucie revient
accompagnée d’Hugo. Juste à ce moment-là Théo tourne la tête et court vers lui. Hugo regarde dans ma
direction, il ébauche un sourire qui m’apparaît forcé et baisse les yeux. Je regrette d’avoir dit que sa
présence ne me dérangeait pas et l’idée qu’il se passe quelque chose entre lui et ma sœur me donne la
nausée. J’ai envie de lui sauter dessus pour lui poser la question sans plus attendre, mais je réussis à me
convaincre de rester simple spectatrice pour le moment, je ne dois pas éveiller de soupçon pour observer
leur comportement.
Émilie traverse le salon pour aller saluer Hugo, rapidement ils se mettent à rire. Qu’est-ce qui peut
les amuser de la sorte ?
Ma mère secoue la tête pour me faire signe d’aller lui dire bonjour. Oh maman, ça va, je n’ai pas
deux ans, je sais ce que j’ai à faire. Je me décide enfin à les rejoindre, interrompant leur conversation.
Pas question de lui faire la bise, se serait inapproprié. Je me tiens debout face à lui, attendant qu’il me
salue. Émilie semble embarrassée et s’éloigne en prétextant qu’elle va donner un coup de main en
cuisine.
— Bonjour Hugo.
— Bonjour Alyssa. Tu vas bien ?
— Oui ça va.
— J’ai essayé de t’appeler hier chez tes parents pour te demander si tu étais d’accord pour que je
vienne aujourd’hui.
— Ah. J’ai eu Lucie au téléphone, je lui avais dit que ce n’était pas un souci.
— Oui ta mère m’a dit. Elle m’a dit que tu ne dormais pas chez eux.
Pourquoi est-ce qu’elle a eu besoin de lui raconter ça ? A-t-elle dit autre chose ?
— C’est vrai oui, je n’y étais pas hier soir.
— Ça ne me regarde pas, mais elle m’a dit que tu ne dormais pas souvent chez eux.
Je vais la tuer ! De quoi elle se mêle ? Je ne réponds rien… J’ai tellement honte.
— Alyssa, tu fais ce que tu veux, tu n’as pas à te justifier.
— Je n’ai rien à cacher. Lui dis-je en espérant qu’il ne me pose aucune question. Je ne veux pas lui
mentir, mais je ne peux pas lui dire que je passe mes nuits avec un autre homme.

Chapitre 53

Nous passons à table, je suis assise à côté de Lucie. Face à moi se trouvent Hugo et Émilie, je
commence sérieusement à m’interroger, si Karen avait dit vrai ? Tant bien que mal, j’essaie de ne pas
rester les fixer. Tout se bouscule dans ma tête, impossible de trier les émotions qui me submergent.
Lorsque les voir ensemble devient insupportable, je me lève précipitamment pour me diriger vers la
porte de sortie. Pourquoi m’imposent-ils ça ? Je me retiens de hurler, d’exploser dans une crise de
larmes. Appuyée contre la façade de la maison, je m’effondre tout en me laissant glisser contre le mur.
Assise au sol, je laisse reposer ma tête sur mes genoux serrés près de ma poitrine. Une main délicate se
pose sur mon épaule, je ne relève pas la tête en entendant la douce voix de mon neveu.

— Tata qu’est-ce que tu fais dehors ? Tu es fâchée après tonton ?


J’étouffe quelques sanglots avant d’être capable de redresser la tête.
— Non mon cœur, je ne suis pas fâchée, je prends l’air parce que j’ai mal à la tête. Lui dis-je en
reniflant.
— Tiens tata. Me dit Théo tout en me tendant un mouchoir. Maman a dit que tu avais besoin de
mouchoirs.
— Merci mon grand. Va retrouver maman, j’arrive vite.
Je finis par les rejoindre, en attendant avec hâte que le repas se termine, je veux rentrer…Non, je
préfèrerais retrouver Thomas, me blottir dans ses bras…
Lorsque les cadeaux de Théo sont déballés et que l’euphorie est passée, nous décidons d’aller nous
balader. Je reste en retrait avec Lucie, nous papotons toutes les deux.
— Emma arrive le week-end prochain, je suis contente de la voir, elle n’est pas venue depuis noël,
mais ça me saoule d’être chez les parents, je pense que j’irais à l’hôtel pour le week-end.
— Maman m’a dit que tu n’étais presque jamais à la maison. Tu vas bien ?
— Oui, je vais bien, j’ai beaucoup de mal à rester chez eux. Ils ont pitié de moi, ils veulent que je me
réconcilie avec Hugo, maman n’arrête pas de s’emmêler. Ils n’ont rien compris, je suis partie, je ne
reviendrai pas.
— J’ai compris Alyssa. Au risque de te contrarier aussi, je t’avoue que j’ai peur que tu regrettes plus
tard, s’il passe à autre chose…
— En parlant de ça, tu me le dirais si tu savais quelque chose ?
— De quoi tu parles Alyssa ?
— Si tu savais qu’il voit quelqu’un, tu me le dirais ?
— Euh, oui, j’imagine que oui, pourquoi ?
— J’ai peur qu’il m’ait caché des choses et d’apprendre de quoi il s’agit.
— Tu doutes de sa sincérité? Me demande Lucie soucieuse.
— Je peux te dire que si je suis partie ce n’est pas sans raison. Il avait pris ses distances avec moi et
je n’ai pas su pourquoi. Certes il m’a demandée en mariage, mais il a longtemps hésité, et je commence à
avoir ma petite idée sur le sujet. Je veux juste m’assurer que tu ne sais rien, car si j’apprenais que tu étais
au courant…
— Tu pleures ?
— Non, ce n’est rien.
— Écoute Alyssa, je ne vois pas de quoi tu parles! Ce que je sais en revanche, c’est que tu ne
semblais plus si heureuse avec Hugo. Je ne m’attendais pas à cette rupture, mais je ne suis pas non plus
surprise. Tu as exprimé tes projets avec lui depuis des années, la maison, les enfants, le mariage et je
pense que tu avais cessée d’y croire. En tout cas, c’est ce qui ressortait de ton discours depuis des mois.
Dis-moi plutôt ce qui te fait croire qu’il a menti ?
— Tu ne sais vraiment rien ? Pour toi, il ne flirtait pas avec quelqu’un lorsqu’il était avec moi ?
— Non tu es folle ! Est-ce que nous parlons du même homme ? Pourquoi est-ce que tu penses une
chose pareille ? C’est insensé ! Demande-lui Alyssa ! Je suis sûre que tu peux avoir confiance en lui.
— Je vais le faire. J’attends le moment opportun.
Mes parents mettent fin à notre échange en nous rejoignant.
Lorsque nous sommes de retour chez Lucie, il est près de dix-sept heures. Soudain, je réalise que je
n’avais pas pris mon téléphone avec moi pendant la promenade. Immédiatement je me jette dessus à la
recherche d’un message de Tom. Justement, il y en a un :
Comment se passe ton après-midi ? Tom.
Je prends le temps de lui répondre. Tout va bien et toi ?
De nouveau, je constate qu’Émilie est avec Hugo, je me demande bien ce qu’ils se racontent.
J’aimerais me retrouver seule avec elle pour la questionner sur le sujet. Discrètement, je me rapproche
d’eux en utilisant Rose comme prétexte. Quand j’arrive assez près pour entendre ce qu’ils se disent, ils se
taisent. C’est évident qu’ils cachent quelque chose, mais depuis quand ? Pourquoi est-ce que je n’ai rien
vu avant. Je me dirige droit vers Émilie.
— Émilie, je peux te parler un moment ? Lancé-je d’un ton ferme et décidé.
— Oui Alyssa. Tu veux qu’on sorte ?
— Oui Émilie, je préfèrerai.
Nous sortons par la baie vitrée et nous nous installons sur la terrasse. Lucie semble tracassée, je me
demande bien pourquoi…
— Je t’écoute, de quoi veux-tu me parler ? Demande-t-elle pressée.
— Voilà, j’ai eu des échos ces derniers temps au sujet d’Hugo. Je voulais savoir si tu étais au courant
de quelque chose.
— Des échos à quel propos ?
— Il semblerait qu’il fréquente une autre fille… rien d’officiel.
— Mais enfin qui a bien pu te dire ça ?
— Ce n’est pas l’important, ce qui l’est en revanche, c’est de savoir si tu sais quoique ce soit à ce
sujet !
— Absolument pas Alyssa. Je ne suis pas certaine que tes sources soient fiables. Hugo n’est pas
encore remis de votre séparation, je l’imagine mal avec une autre fille.
— Tu ne le vois plus depuis que je suis partie de chez moi ?
— Si, je ne vais pas te mentir. Je le considère comme un membre de la famille, je suis allée le voir
plusieurs fois pour lui remonter le moral.
— Ah bon et quand tu y vas, tu restes tard avec lui ?
— Je ne comprends pas où tu veux en venir Alyssa ? Reprend Émilie perplexe.
— Je voudrais juste savoir si tu t’attardes chez lui.
— Oui, je suis restée tard deux soirs, j’ai même dormi sur le canapé.
Karen n’a donc pas menti, elle a bien passé la nuit chez lui. Putain, mais pourquoi elle a besoin
d’aller le voir ?
— Pourquoi tu es restée ?
— Parce que tu me connais, j’avais bu. Enfin c’est quoi toutes ces questions, tu ne veux pas qu’on
cesse de le voir tout de même ?
— Non, absolument pas.
— Ça ne me regarde pas, mais du jour au lendemain, il se retrouve seul, après t’avoir demandée en
mariage. Je lui tiens compagnie, rien de plus.
— Ok Émilie, je te fais confiance.

Nous cessons immédiatement de parler d’Hugo. Je suis convaincue que Karen s’est inventée toute
cette histoire. Effectivement, elle passe du temps avec lui, elle est même restée passer la nuit chez lui sur
le canapé. Mais elle ne l’a pas nié, donc elle est sincère. Comment ai-je pu douter de ma propre sœur ?
Je regarde mon téléphone, je n’ai pas de réponse de Thomas. Il faut que j’arrête de penser à lui. Cela
fait une semaine qu’on « sort ensemble », mais il m’obsède. Je sais qu’il passe du temps avec ses enfants
ce week-end donc avec sa femme aussi…

Chapitre 54

Dix-huit heures, je décide qu’il est temps de rentrer, je récupère ma veste dans l’entrée, Hugo en
profite pour me rejoindre.
— Alyssa, tu veux venir prendre un verre à la maison ?
— Hugo, tu ne penses pas qu’il est trop tôt pour ça ?
— Peu importe, tu me manques et je voudrais juste passer un peu de temps avec toi.
— Je ne peux pas accepter, je ne veux pas que tu te fasses de fausses idées.
— J’espérais vraiment que tu acceptes.
— Non Hugo, crois-moi, c’est mieux que je ne vienne pas.

Ça me fait de la peine de refuser, mais ce ne serait pas honnête de ma part d’accepter. Mes parents
restent pour l’apéro chez ma sœur, ça me permettra d’être un moment toute seule. Je passe la soirée au
téléphone avec Emma, elle me met de nouveau en garde vis-à-vis des intentions de Thomas, mince elle ne
se rend pas compte que ça m’enrage ! À cette heure-ci, je n’ai qu’une envie, c’est d’être avec lui, il est
ma bouffée d’oxygène. Je dois me l’avouer, il me manque terriblement. Cette nuit, il a été si affectueux, il
m’a couvert de baiser, de caresses et de mots tendres. Pourrais-je m’en passer quand il décidera qu’il
faut cesser de se voir ?

Dimanche matin, nous faisons une heure de jogging avec Aurélie, elle n’a pas le moral non plus car la
situation avec Julien est toujours tendue. Nous nous retrouvons nez à nez avec mon ex belle-mère ! Elle
s’immobilise devant nous. Aurélie s’écarte pour nous permettre d’échanger quelques mots.
— Bonjour Annie. Lui dis-je.
— Bonjour Alyssa. Tu as vu Hugo hier ?
— Oui, il était à l’anniversaire de Théo.
— Dis-moi que vous vous êtes réconciliés pour l’amour du ciel !
— Non Annie, nous n’y arriveront pas. Je dois vous laisser. Lui dis-je pour lui échapper.
— Je t’ai toujours considérée comme ma propre fille, alors permets-moi de te dire que tu commets
une erreur. Hugo est malheureux Alyssa, il t’aime et sans toi… Ajoute-t-elle alors qu’une larme s’écoule
sur sa joue.
— Je n’ai jamais voulu le faire souffrir ! Ajouté-je avant de m’éloigner.

Je n’avais jamais vu ma belle-mère pleurer, je suis un peu chamboulée. Je passe la plupart de


l’après-midi dans les annonces immobilières, c’est décidé demain j’appelle l’agence pour me reloger.
Aucune nouvelle de Thomas de toute la journée, je parviens à me raisonner et n’envoie aucun message. Je
dois le laisser respirer et je dois surtout me détacher de lui, je me répète qu’aucun avenir n’est possible
avec lui. Il est évident que devenir belle-mère avant même d’être mère ne m’enchanterait pas. S’il
m’écrit, je lui réponds, sinon je ne ferai plus le premier pas. S’il se rapproche de sa femme, c’est que
cela devait arriver et il vaut mieux que cela se produise rapidement. Je ne tiens pas à m’attacher à lui et
découvrir dans quelques temps qu’il souhaite rester vivre avec elle.

Vers dix-huit heures, mes parents reçoivent de la visite, je décide d’aller me balader, je ne suis pas
une solitaire habituellement mais en ce moment je n’ai envie de voir personne. Rares sont les personnes
avec qui j’ai envie d’être, en dehors d’Emma et d’Aurélie et évidemment de Tom. Je ne sais pas pourquoi
il m’obsède à ce point, j’attends désespérément qu’il m’envoie un message. J’observe mon portable qui
n’a pas quitté mes mains depuis des heures, la pochette de celui-ci est légèrement humide, mes mains sont
moites. Peut-être qu’il est à l’hôtel, si je passais par hasard devant et qu’il m’apercevait, nous
pourrions… s’il pouvait me donner juste un baiser pour me faire patienter, pour me rassurer !
Une fois de plus, je me couche avec son pull. J’ai conscience que je vais l’abîmer, mais si je le porte
pas, je ne dormirai pas.

Lundi matin, je me rends au travail avec l’idée que Thomas ne veut plus me voir, il ne m’a pas donné
de nouvelles, le week-end a dû les rapprocher. Assise à mon bureau, je reste figée dans l’attente qu’il
passe la porte ou qu’il me téléphone. J’ai attrapé des crampes dans les doigts à force de réactualiser ma
boîte mail. Putain, mais qu’est-ce qu’il a fait de moi ? Je n’ai pas souvenir d’avoir été dans cet état-là
avec Hugo, pas une seule fois !
Neuf heures, j’accueille Magalie, élève infirmière en troisième année, je lui présente le service et
l’équipe présente ce matin. Elle me fait oublier mes tracas pendant quelques minutes avant de retourner
dans mon bureau.
Dix heures et demie, j’abandonne mon portable dans mon sac à main et je rejoins l’équipe dans
l’unité. Ce matin, il y a une forte affluence, mais il s’agit principalement de traumatologie, le circuit est
rapide. Le délai d’attente est tout à fait acceptable, les patients ne semblent pas se plaindre, ce qui est
assez inhabituel. Je me sens légèrement plus à ma place maintenant que je sais que je suis admise à
l’école des cadres. C’est incroyable, je vais être cadre de santé !
— Madame Steunou ?
— Oui Magalie. Tu peux m’appeler Alyssa.
— L’infirmière Julie m’a dit de voir avec vous pour avoir mon planning.
— Oui, tu es disponible maintenant ?
— Oui, je n’ai pas de patient en charge.
— Suis-moi dans mon bureau, nous allons voir ça ensemble.
C’est la première fois que je suis vouvoyée dans l’unité, c’est une sensation étrange mais agréable.
Nous échangeons sur les objectifs de Magalie, je lui propose une trame pour ses dix semaines de stage.
Elle a compris que ce dernier stage était très important pour débuter sa future carrière en tant que
professionnelle. Si tout se passe bien dans le service, elle aura des chances d’être embauchée comme
remplaçante d’été. Mes premières impressions sur elle sont très positives, elle semble motivée, curieuse
et discrète. Elle m’a proposé de jeter un œil à son porte folio, ce classeur qui contient son parcours de
stage ainsi que toutes ses appréciations de stage. Je le parcours rapidement et lui explique ce que nous
attendons d’elle dans le service, de l’implication, de la curiosité professionnelle. Lorsque je lève les
yeux, la pendule indique midi. Finalement la matinée sera passée vite.

— J’espère que tu vas profiter au mieux de ce stage. Il est midi, si tu veux aller au self, vas-y
maintenant.
— D’accord et merci beaucoup pour l’accueil et le temps que vous m’avez accordé ce matin.
— C’est normal.
Magalie se lève de sa chaise quand Thomas s’introduit dans mon bureau. Je ne dois pas paraître
surprise ou même excitée par sa présence. Pourtant l’angoisse monte, le dernier message date de samedi
après-midi, nous sommes lundi midi, il a pu se remettre avec sa femme. Le pouls filant, les mains
tremblantes, je tente de me calmer avant d’ouvrir la bouche. Il salue Magalie, je suis obligée de lui
présenter.
— Bonjour monsieur Simon, je vous présente Magalie, élève infirmière de troisième année qui
entame son dernier stage aux urgences.
— Enchanté. Je suis le cadre de pôle. Répond Tom.
— D’accord, enchantée également. Ajoute Magalie.
Les présentations sont faites, Magalie quitte la pièce, la couleur de ses joues témoignent d’une gêne.
Serait-ce l’effet de Tom sur elle ? C’est le mien, pensé-je aussitôt.

Chapitre 55

Enfin seuls dans le bureau, Thomas me demande à voix basse :


— Tu vas bien Aly ?
— Ça va. Dis-je indifférente.
— Tu as passé un bon week-end ? Demande-t-il en fermant la porte derrière lui.
Qu’est-ce qu’il est séduisant dans son polo blanc, son corps d’Apollon m’avait manqué.
— Oui et toi ?
— Comme un lundi. J’ai réussi à passer du temps avec mes enfants, mais le week-end a été
compliqué et m’a semblé très long. Et je… non, rien. Je voulais m’assurer que tu allais bien, maintenant
je vais y aller.
Qu’est-ce que tu ne me dis pas ? Merde Thomas ! Tu t’es remis avec elle, c’est ça ? Il a un air trop
sérieux aujourd’hui.
— Tu n’étais pas obligé de te déplacer pour ça.
— Il le fallait. J’avais envie de te voir et j’avais envie de t’appeler dimanche tu sais.
— Non, je ne le sais pas.
— Je n’avais plus de téléphone, mais le problème est résolu, je suis allé ce matin à la boutique le
remplacer et j’ai demandé à récupérer mon ancien numéro.
Donc, il ne m’a pas contacté depuis samedi parce qu’il n’avait plus de téléphone…
— D’accord.
— Je ne vais pas pouvoir rester bavarder avec toi, car on m’attend mais si tu es d’accord, nous nous
retrouvons ce soir.
— Où ça ?
— Tu sais très bien où me trouver Aly. Je serai disponible à partir de dix-huit heures trente je pense,
viens dès que tu le peux. Approche-toi de moi une minute s’il te plaît ?
— Oui. Lui dis-je intriguée en le rejoignant.
Il s’appuie dos contre la porte, attrape mes deux mains et m’attire d’un geste brusque vers lui.
— J’ai besoin de goûter à tes lèvres pour pouvoir quitter cette pièce. Ajoute-t-il en plaçant ses mains
autour de mon visage.
Mon cœur s’accélère, je ferme les yeux lorsque ses lèvres entre en contact avec les miennes. Il aspire
doucement ma lèvre inférieure dans sa bouche, un gémissement s’échappe de moi. Sa main glisse dans
mon dos et vient me plaquer contre lui. Mon téléphone se met à sonner stoppant notre échange. Je
m’écarte de lui et m’excuse de devoir répondre. Après un clin d’œil, il quitte mon bureau. Une fois mon
coup de fil terminé, j’écris un message à Thomas :
Merci pour ce moment. Contente que tu aies de nouveau un téléphone. Aly.
Il ne tarde pas à me répondre :
Tout le plaisir est pour moi. À ce soir ma belle ! Tom.

J’affiche un sourire idiot devant son message tellement soulagée, mais pour combien de temps ?
Quelqu’un frappe à ma porte.
— Oui.
— Salut Alyssa.
— Tiens Mathieu, tu es dans le coin !
— Oui, Sandra m’a appelé pour perfuser un patient au déchoc. J’en profite pour te proposer de venir
manger avec moi.
— Avec plaisir, justement j’allais partir au self.
— Je tombe à pic.
Nous n’avons pas le temps de nous installer à table que Mathieu est appelé par la maternité.
— Je t’abandonne contre ma volonté !
— Ne t’inquiète pas je comprends très bien Mathieu.
— Nous pourrions aller boire un verre à l’extérieur dans la semaine ?
— Oui pourquoi pas. On se tient au courant.
— À plus tard.
Je me joins à d’autres collègues pour le repas. L’après-midi passe très vite, quand je rentre à la
maison, je prends mon téléphone et contacte l’agence immobilière la plus réputée de Kerrilis. Nous
convenons d’un rendez-vous pour le lendemain à dix-sept heures. À priori, il y aurait divers biens
pouvant correspondre à ce que je recherche.
Dix-neuf heures, je termine de me préparer et envoie un texto à Tom pour savoir s’il est toujours
d’accord pour ce soir. Dès que je reçois sa confirmation, je prends la route en direction de l’hôtel, qui est
devenu ma seconde maison depuis peu. Thomas m’ouvre vêtu uniquement d’une serviette de bain autour
de la taille.
— Je t’aurais bien invitée à manger Aly mais j’ai d’autres projets avec toi, nous verrons pour le reste
un peu plus tard. Qu’est-ce que tu en dis ?
Évidemment je comprends ses intentions et je suis terriblement excitée par son engouement.
— Je suis impatiente de connaître tes projets Thomas ! Déclaré-je emballée.
Les mains de Tom chassent rapidement mes vêtements, il dégrafe mon soutien-gorge, puis dessine
l'aréole de mes seins du bout de doigts.
— Ils m’ont manqué ces deux-là !

Sa bouche emprisonne la pointe de mon sein durci de plaisir. Il ouvre maladroitement mon jean, mon
corps commence déjà à onduler de plaisir. À hauteur de ma bouche, ses larges épaules que j'embrasse,
j’ôte sa serviette et m’empresse de caresser son sexe solidement dressé dans ma direction. Les sursauts
de Tom ne font qu’accroître mon excitation.
Une fois nos retrouvailles passées, nous filons sous la douche.
— J’aimerais t’emmener dîner, dépêche-toi ma… belle !
J’aimerais savoir ce qu’il était sur le point de me dire, mais il semble embarrassé, alors je ne vais
pas l’embêter.
— Fallait y penser avant. Répliqué-je.
Nous nous rendons à pied au restaurant alors que la nuit est en train de tomber. Malheureusement,
même dans l’obscurité, nous restons éloignés l’un de l’autre lorsque nous sommes dans des lieux publics.
Après quelques instants, je remarque que le portable de Tom ne cesse de vibrer, il semble agacé mais ne
répond pas. D’ailleurs, il ne lit pas ses messages, ce qui m’interpelle :
— Tu ne réponds pas Thomas ?
— Non, je suis avec toi, donc indisponible.
— C’est peut-être très important.
— Ça ne l’est pas, c’est ma femme !
Qu’est-ce qu’elle lui veut ? Pourquoi insiste-t-elle ?
— Et si ça concerne tes enfants ? Lui dis-je.
— Non, ce n’est pas ça.
— Comment le sais-tu si tu ne prends pas la peine de regarder.
— Elle a essayé de me contacter une bonne dizaine de fois cet après-midi et j’ai fini par lui répondre.
De quoi peut-il s’agir pour qu’elle persiste ? Ai-je le droit de lui poser la question ?
Alors que nous arrivons sur le parking du restau, Tom s’arrête.
— Aly, je suis désolé d’avoir à te dire ça… mais il faut qu’on parle.
Nous y voilà, ma main à couper qu’il y a un rapport avec ce week-end. Je sens que ça ne va pas me
plaire. Si jamais nous avons fait l’amour alors qu’il s’est remis avec elle…

Chapitre 56

— Je t’écoute Thomas !
— Voilà samedi après-midi, je suis allé parler avec ma femme de mon entretien avec l’avocat. Tout
se déroulait bien, nous étions tombés d’accord sur l’essentiel. Émeline voulait appeler une amie, je lui ai
prêté mon téléphone. J’ai été prendre rapidement quelques fringues dans ma chambre et c’est là que tu
m’as envoyé un message… Lorsque je suis revenu au salon, ma femme avait mon téléphone dans la main.
Elle ne voulait pas me le rendre et attendait une explication. Elle a pété les plombs et a jeté mon
téléphone par la fenêtre.
— Je suis désolée ! Lui dis-je choquée d’apprendre que sa femme a tout découvert.
— Le problème Aly, c’est qu’elle m’a dit qu’elle avait transféré nos conversations sur sa boîte mail,
pour avoir des preuves !
— Mais des preuves pour faire quoi ?
— Pour les utiliser contre moi dans notre procédure de divorce et pour me menacer…
— Elle te menace ?
— Oui, elle utilise les enfants. Elle a été très explicite, si je persiste à te fréquenter et à demander le
divorce, elle fera en sorte que je ne profite pas pleinement de mes enfants.
— Elle peut faire ça ?
— Elle peut demander un divorce pour faute et ajouter un abandon du domicile conjugal. Le temps de
la procédure, elle peut se voir attribuer la garde exclusive de nos enfants.
— Qu’est-ce que tu vas faire ?
— Il n’est pas question de céder à son chantage, je vais attendre qu’elle se calme.
— Tu préfères que nous arrêtions de nous voir ? Lui demandé-je inquiète, retenant mes larmes de
couler.
Tom semble incertain, il conserve une distance entre nous, il ne dit rien. Le temps semble se
suspendre jusqu’à ce qu’il s’approche de moi.
— Aly, il n’est pas question que j’arrête de te voir parce que j’en suis incapable et que je tiens
vraiment à toi. En revanche, nous allons devoir être encore plus prudents dans les lieux publics pendant
quelques temps.
— J’aurais compris que tu me dises ne plus…
— Non, je t’arrête tout de suite ! Tu sais, j’ai réfléchi à ce que tu m’as demandé l’autre soir... Il ne
s’agit pas simplement d’une aventure !
Les lampadaires du restaurant me permettent de voir son regard intense, des larmes naissent dans ses
yeux, je l'attire contre moi et l'enlace. J’essaie de toutes mes forces de lutter contre mes sentiments, mais
je le sens au plus profond de moi, je suis en train de tomber amoureuse de lui ! Je n’ai fait que douter de
lui, je n’ai pas arrêté de me questionner sur ses intentions, je me suis torturée quand il ne me donnait pas
de nouvelles. Je ne voulais pas y croire, je ne pouvais pas lui accorder ma confiance, il fallait que je me
préserve. À présent, il m’annonce qu’il tient à moi et qu’il n’est pas prêt à renoncer à moi malgré les
risques qu’il encourt avec sa femme.
— Merci Tom. Lui dis-je émue.
Nous finissons par aller manger avant que le service ne soit terminé. Pendant le repas, je sens que la
tension des jours précédents a disparue. Nous papotons librement, nous apprenons réellement à nous
connaître et plus j’en apprends sur lui et plus je l’affectionne.

Mardi matin, nous partons chacun de notre côté pour le travail, quelque part, le fait de se cacher est
assez excitant. Par exemple, lorsqu’il débarque dans mon service en tant que chef, c’est assez troublant,
ça m’émoustille. Il m’a même avoué qu’il me trouve aguichante quand je m’adresse à lui par le
vouvoiement devant les collègues, évidemment, je vais en abuser…
Dix heures, j’assiste à une réunion soporifique, si elle avait été animée par Tom, elle aurait été plus
intéressante. Vivement midi, j’ai le ventre qui gargouille de plus en plus en fort. La deuxième fois qu’il a
crié famine, ma voisine s’est tournée vers moi. Midi, je ne me fais pas prier pour aller manger. En
sortant, je prends cinq minutes pour appeler ma mère, je tombe sur le répondeur et lui laisse un message.
« Maman, c’est Alyssa. Je ne sais pas si tu te souviens que j’ai rendez-vous à l’agence ce soir à dix-sept
heures. Je passerai à la maison mais je ne pense pas rester. Bisou. »
Je reçois un texto de sa part une heure après : Je fais la fermeture du salon, sinon je t’aurais
accompagnée avec plaisir. Tu as du courrier sur la table. Bisous
Dix-sept heures, j’arrive à l’agence. Je suis accueillie par la secrétaire qui prend mes coordonnées et
me fait patienter quelques instants dans la salle d’attente. Je consulte des offres de location. C’est une
femme d’une trentaine d’années qui me reçoit.
— Bonjour madame Steunou, je suis la responsable de l’agence, si vous voulez bien me suivre dans
mon bureau.
J’emboîte son pas, elle est plutôt directive, elle ne doit pas être le genre de femme à perdre son
temps. Tant mieux se sera vite réglé, pensé-je. Toutes les femmes que je croise sont blondes, est-ce un
critère de recrutement ?

Elle m’invite à m’asseoir et me propose un café que j’accepte volontiers. Après avoir répondu à ses
questions sur le type de biens que je cherche, elle me montre les annonces en cours. Très vite, je renonce
à acheter une maison toute seule. D’ailleurs la conseillère m’oriente plutôt vers une location pour prendre
le temps de réfléchir sans me précipiter si je veux investir. J’ai un coup de cœur sur une maison située à
quelques centaines de mètres de l’hôpital.

— D’après ce que je vois, cette habitation réunit tous mes critères. Lui dis-je enthousiaste.
— Nous pouvons organiser une visite rapidement, il est libre donc aucune contrainte avec les
locataires. Ce genre de biens ne restera pas longtemps à louer.
— J’imagine, je suis très pressée, dites-moi quand c’est possible pour vous.
— Demain vers seize heures ?
— Plutôt dix-sept heures, si c’est envisageable pour vous.
— Oui mais à dix-huit heures, j’ai un autre rendez-vous.
— Pas de soucis, je travaille juste à côté à l’hôpital, donc je serai sur place à l’heure.
— Ah très bien.

Je quitte l’agence, satisfaite de ce premier contact. J’imagine déjà que je vais emménager dans
quelques jours, ce serait parfait.
Je trouve la lettre sur la table, comme me l’a indiquée ma mère, je reconnais immédiatement
l’écriture, c’est Hugo, ça ne fait aucun doute. Je la prends et m’installe sur mon lit pour la déballer :

« Alyssa,
Je t’écris cette lettre, en espérant que tu la lises jusqu’au bout.
Je sais que tu m’as dit que tout était terminé entre nous et que tu ne reviendrais pas, mais je ne peux
pas vivre sans toi. Je te vois chaque nuit dans mes rêves, ton image me hante !
Je ne peux que te supplier de me revenir, je saurai être à la hauteur de tes attentes. Je sais que tu es
passée à autre chose ou devrais-je dire à quelqu’un d’autre ? Mais ouvre les yeux, personne n’a besoin de
toi autant que moi ! M’as-tu oublié ? Pardonne-moi si je t’ai fait souffrir. Je suis prêt à tout pour te
reconquérir, je dois commencer par te donner des explications mais de vive voix. Je n’utilise jamais de
citation mais celle-ci semble être écrite pour moi : « J’ai besoin de toi comme un cœur à besoin de
battre ».
Appelle-moi. Je t’aime. Hugo. »

Sans réfléchir, je l’appelle.



Chapitre 57

— Hugo, je viens de découvrir ta lettre, qu’est-ce que tu veux ajouter ?


— Viens s’il te plaît, je te promets que je ne retiendrai pas. Il faut vraiment que je te parle.
— Je viens mais ne crois pas que ça changera quelque chose entre nous.
— Je te remercie, à tout de suite.
Les explications ne changeront pas la situation actuelle, c’est trop tard, j’ai des sentiments pour
Thomas et je ne veux pas m’en éloigner ! Si Hugo me pose la question, je ne lui mentirai pas, je lui dirai
que je vois quelqu’un, même si ça doit lui faire mal, nous avons toujours préféré l’honnêteté.
Mon téléphone vibre, c’est un appel de Tom.
— Oui Tom.
— Tu vas me trouver insistant, mais est-ce que tu veux passer la soirée avec moi ?
— J’espérais que tu me le proposes. Je ne te donne pas d’heure, car je me rends chez Hugo. J’ai
accepté de passer car il dit avoir besoin de me parler, mais ça ne changera rien entre nous.
— Très bien, fais ce que tu as à faire, mais si tu as le moindre problème, tu m’appelles ma puce.
— Ma puce, c’est nouveau. Répliqué-je.
— Faudra t’y faire, y a plein de surnoms que je me retiens de te donner.
— J’ai hâte d’entendre tout ça. Je te rejoins un peu plus tard.
— Fais attention à toi ma puce. À tout à l’heure.
J’arrive devant la maison, j’appréhende tout de même, parce que je me suis promis d’être honnête
avec lui s’il me pose des questions et j’ai peur de le blesser, il va penser que j’ai tourné la page, que je
ne l’aimais plus avant de le quitter.
Je frappe à la porte, Hugo ouvre brusquement, il se tient debout devant moi, il semble nerveux, agité ?
— Bonjour Hugo.
— Bonjour Alyssa, merci d’être venue.
Je remarque des photos de « nous » dans l’entrée, il ne les a pas retirées. C’est étrange de revenir
dans notre maison et de ne plus y habiter. Hugo m’invite à m’installer sur le canapé, il me propose de
boire un verre, je refuse.
— Dis-moi pourquoi tu m’as fait venir ?
— Je ne vais pas y aller par quatre chemins Alyssa. Sache que c’est très dur pour moi de faire ça
aujourd’hui.
— De faire quoi ?
— De t’expliquer pourquoi la situation est ce qu’elle est.
— Hugo, je ne comprends rien.
— Je dois te faire part de quelque chose et ça ne va pas être évident pour moi de te le dire et cela
risque d’être difficile à entendre pour toi.
Mince, de quoi parle-t-il ? Il me fait peur, je ne l’ai jamais vu aussi paniqué.
— Si je fais ça, ce n’est pas pour te faire souffrir, mais pour que tu comprennes et que tu acceptes de
nous donner une seconde chance.
— Je t’ai dit que…
— Non laisse-moi parler s’il te plaît, je n’y parviendrai pas sinon.
— Je t’écoute, mais tu m’inquiètes.
— Voilà, tu n’avais pas tort, je me suis éloigné de toi depuis des mois et je ne m’en étais pas rendu
compte jusqu’à ce que tu me quittes. Si je l’ai fait, c’est parce que j’avais l’impression de ne plus te
mériter, je culpabilisais trop. Je t’ai avoué avoir eu des doutes.
— Ne parlons plus de tout ça, cette remplaçante appartient au passé et puis tu me l’as dit, il ne s’est
rien passé.
— Bon sang, écoute-moi, je ne t’ai pas tout dit.
Comment ? Il a couché avec cette fille ? Non, je ne veux pas le savoir si c’est le cas, je ne veux pas
qu’il détruise les souvenirs de notre relation.
— Cette Hélène dont je t’ai parlé, c’était l’année dernière. En fait, j’avais déjà mis de la distance
avec toi depuis quelques mois avant de la rencontrer donc elle n’était pas la cause de mon éloignement.
Je suis glacée par la peur, j’appréhende ce qu’il va me dire, chaque mot qu’il prononce met une
seconde à monter à mon cerveau puis une de plus pour atteindre le niveau de compréhension. Jusque-là
j’encaisse, mais quelque chose me dit que ça ne va pas durer vu le ton grave que prend sa voix.
— Voilà, il y a bientôt deux ans maintenant que je te cache quelque chose. Ça a détruit notre relation à
petit feu, car je suis rongé par le remord et je savais que tôt ou tard, tu l’apprendrais.
— Mais de quoi tu parles putain Hugo ?
— Tu te souviens que tu bossais de nuit pour mon anniversaire à cette époque-là ? Eh bien, nous
avions fait une petite fête avec quelques amis et notre famille ce soir-là. J’avais bu plus que j’aurais dû.
Le matin en rentrant du travail, tu m’as trouvé endormi sur le sol de la salle de bain, j’étais malade.
— Oui, je sais tout ça !
— Ce soir-là, j’ai commis une faute impardonnable.
Hugo marque une pause, il bégaie, tremble, évite mon regard et ajoute :
— Les invités sont partis à l’exception d’Émilie qui avait trop bu aussi.
Oh mon dieu, ce n’est pas ce que je crois ! Tout s’éclaire, les propos de Karen me reviennent. J’ai la
nausée. Les yeux grands écarquillés, je m’efforce de le regarder, je veux connaître la suite.
— Elle m’a aidé à ranger et je ne sais pas pourquoi ni comment, nous nous sommes embrassés.
Je plaque ma main sur ma bouche, je ne retiens pas mes larmes qui coulent à flot. Je me décompose
littéralement.
— Je n’ai pas d’explications sur ce qui s’est passé ensuite, je ne peux que plaider coupable sous
l’effet de l’alcool. Nous avons…
— Dis-le !
— Nous avons passé la nuit ensemble. Lâche-t-il comme si sa vie en dépendait.
— Tu as fini ? Lui demandé-je.
— Non, malheureusement. Au lever du jour, nous avons réalisé ce qui s’était passé. Ta sœur est
partie peu de temps avant que tu rentres. Ta sœur et moi avions décidé de ne jamais t’en parler. Crois-
moi c’était terrible de garder ce secret, je me suis culpabilisé chaque jour après ça. Ta sœur a découvert
un mois plus tard, qu’elle était enceinte. C’était un drame !
Ma sœur était enceinte d’Hugo ? Non, non, non, c’est impossible.
— Elle était très mal, elle ne s’alimentait plus… Elle ne voulait pas poursuivre cette grossesse, mais
la nature a fait les choses elle-même, elle a fait une fausse couche quelques jours après l’avoir su. Je suis
désolé de ne pas avoir réussi à t’en parler avant, je ne pouvais pas te détruire !
— Aujourd’hui, tu le peux ?
— Non, je veux tout reconstruire, plus de secret.
— Ensuite ? Quels ont été vos rapports ? Demandé-je difficilement.
— Nous avons réussi à reparler de tout ça, il y a quelques mois seulement. Elle est venue quelques
fois à la maison pour évoquer sa culpabilité, les remords et l’envie de te parler. Je l’ai dissuadée. Tu me
parlais de bébé, de mariage et je n’avais qu’une idée en tête, te dévoiler tout ça pour pouvoir avancer,
mais je ne savais pas comment sans te perdre.
— Elle vient toujours te voir ?
— Oui, elle est venue plusieurs fois depuis que tu es partie, pour me dire combien elle s’en veut et
souhaite réparer les choses entre toi et moi. Alyssa, je sais que c’est le choc pour toi, mais je veux que tu
comprennes qu’il ne se passe pas une minute depuis cette nuit, sans que je regrette d’avoir bu et d’avoir
dérapé. Il n’y a jamais eu que toi dans mon cœur, je n’ai jamais voulu te trahir. Je t’aime tellement.
— Tu oses dire que tu m’aimes après m’avoir annoncé que tu avais couché avec ma sœur ! Je me
lève, le gifle avant de prendre la fuite.

Chapitre 58

Je cours jusqu’à ma voiture et démarre sur-le-champ, je ne peux pas rester une seconde de plus ici. Je
viens d’être écorchée vive, la douleur est trop intense, ma poitrine va exploser. Je suis dans un état
second, je conduis dangereusement, je ne perçois plus les panneaux, je gémis et pleure sans cesse jusqu’à
ce que j’arrive sur le parking de l’hôtel.
Lorsque Thomas ouvre la porte, il reste interdit en me découvrant ainsi, à bout de forces, je me laisse
tomber le long du mur. Il me soulève dans ses bras et me porte jusqu’au lit où il s’assoit. Il m’embrasse
sur le front, ramasse mes cheveux qui traversent mon visage.
— Aly, il faut que tu me dises ce qui s’est passé.
Voyant que je suis incapable de lui répondre, il m’enlace plus fort et me murmure près de l’oreille :
— Ma puce je suis là, regarde-moi, parle-moi.
L’impuissance se lit dans ses yeux, il est démuni.
— C’est à cause d’Hugo ?
J’acquiesce d’un mouvement de tête. Thomas se raidit :
— Aly, si tu ne me dis pas ce qu’il a fait, je vais aller le voir. Est-ce qu’il t’a touchée ?
J’agite vivement la tête de gauche à droite.
— Il t’a dit quelque chose qui t’a fait du mal ?
Je me blottis contre le torse de Tom, mon corps est alors vivement secoué par des sanglots
incontrôlables. Je me sens comme une mutilée de guerre, des parties de mon corps sont comme mortes
sous le poids des mots d’Hugo et non pas sous les bombes.
— Laisse-toi aller ma belle.
— Ne pars pas. Chuchoté-je.
— Je te garderai dans les bras toute la nuit s’il le faut, tu me parleras quand tu seras prête.
Plus tard dans la soirée, quand mes larmes se tarissent, Thomas me propose de prendre un bain pour
me détendre, je refuse. Il m’allonge sur le lit et m’aide à retirer mes vêtements, il ôte rapidement ses
habits et s’allonge à mes côtés avant de m’encercler de ses bras réconfortants et protecteurs. Épuisée au
milieu de la nuit, je finis par m’endormir.

L’alarme du réveil me réveille en sursaut. Tom est là, il me regarde inquiet. Je me demande s’il a
dormi, il a mauvaise mine. Les aveux d’Hugo sont encore très présents dans ma tête, je ne suis pas sûre
d’être capable de surmonter cette trahison. Ma sœur a détruit mon couple de la pire des façons.
— Excuse-moi Aly, j’aurais dû couper la sonnerie de l’alarme hier soir.
— Mais non, il faut bien se lever. Le rassuré-je.
— Oh non, tu ne vas pas aller travailler aujourd’hui ! Affirme Tom.
— Il n’y a pas de raison que je n’y aille pas. Lui dis-je avec insistance.
— Tu peux dire tout ce que tu veux, c’est hors de question ! Tu n’y mettras pas les pieds, sinon je te
mettrai dehors moi-même.
— Mais arrête, j’ai besoin de me changer les idées et je n’ai pas envie de rester toute seule.
— Ne discute pas, tu ne seras pas seule, je reste avec toi. Je vais passer un coup de fil pour prévenir
que je ne serai pas sur l’établissement mais que je reste joignable et je vais demander à Cynthia de passer
voir l’équipe aux urgences car tu es en repos aujourd’hui.
Je ne cherche ni à le convaincre ni à le retenir lorsqu’il sort de la chambre avec son téléphone à la
main. Je balaie la pièce du regard et ne trouve pas mon sac à main, je l’ai certainement laissé dans la
voiture, je voulais m’assurer que ma mère n’avait pas cherché à me joindre. J’attrape ma robe quand
Thomas revient dans la chambre.
— Tu as tout ton temps, reste au lit Aly.
— J’ai besoin d’aller chercher mon sac dans ma voiture.
— Donne-moi tes clés si tu veux, je vais aller le récupérer.
— Merci, tu en fais trop pour moi.
Il revient rapidement avec mon sac, je m’empare de mon portable et constate vingt-six appels en
absence, Hugo, ma mère, Lucie et Émilie ! Aucun doute possible, Hugo a alerté tout le monde. J’envoie
un message à ma mère :
J’ai passé la nuit chez une amie. Ne t’en fais pas, on se voit ce soir. Alyssa
Elle me répond immédiatement :
Réponds-moi la prochaine fois, j’étais tracassée. Hugo m’a dit que vous aviez parlé tous les deux
et que tu n’allais pas bien mais il n’a pas voulu me dire pourquoi ??
Elle n’a pas la moindre idée de ce que j’ai appris visiblement :
On en parle plus tard. Sinon appelle Émilie !
Thomas semble s’impatienter, il fait les cents pas dans la chambre, je relève la tête dans sa direction.
— Tu veux bien me parler maintenant ? Demande-t-il préoccupé.
— Oui, excuse-moi pour hier soir et merci pour ton réconfort. Lui dis-je reconnaissante.
— Tu n’as pas à me remercier, je n’ai pas fait grand-chose. Le plus dur était de me retenir de ne pas
aller chez ton ex ! Crois-moi, je n’ai fermé pas l’œil de la nuit, je n’avais qu’une envie, aller lui casser la
gueule !
— Thomas, promets-moi que tu n’iras pas le voir.
— Je ne peux pas, je ne sais même pas ce qui s’est passé !
— Je ne suis pas sûre de pouvoir te raconter sans m’effondrer.
— C’est si grave ma puce ?
Je me lance et lui relate les faits, je lui explique qu’Hugo m’a avoué s’être éloigné de moi après avoir
couché avec ma propre sœur qui est tombée enceinte de lui… Il est abasourdi !
À mon grand étonnement, aucune larme de s’échappe de moi. Est-ce qu’il m’en reste ?
— Je ne sais pas quoi faire pour soulager ta peine ! Aucun mot ne pourra panser tes blessures ! Il faut
que je te dise que j’ai encore plus envie d’aller lui foutre mon poing dans la figure !
— Il n’en vaut pas la peine ! Je ne veux plus jamais le voir, ni elle d’ailleurs.
— Aly, je ne veux surtout pas te froisser, mais est-ce que tu ne crois pas que tu devrais t’accorder un
peu de temps avant de prendre une décision comme ça vis-à-vis de ta sœur.
— Cette fille n’est pas ma sœur, désormais c’est une étrangère !
— Aly, ne dis pas ça. Tu es trop affectée, tu ne le penses pas.
— Pourquoi est-ce que tu ne veux pas comprendre ? C’est impardonnable ce qu’ils ont fait ! Elle m’a
poignardée dans le dos ! Avant qu’ils passent la nuit ensemble, Hugo était le parfait fiancé ! Elle me l’a
volé emportant les rêves et les projets que j’avais avec lui, elle a gâché ma vie ! Hurlé-je.
Thomas recule d’un pas, s’appuie contre le mur et me regarde surpris. Aïe. Il semble avoir été heurté
par mes mots !
Après quelques minutes de silence, Thomas me lance :
— Je comprends.

Chapitre 59

Merde, je n’ai pas voulu le blesser, je me suis emportée parce qu’il ne semblait pas comprendre que
je ne voulais plus entendre parler d’Émilie. Je me rends compte de ce que je lui ai dit. Je m’enveloppe
avec le drap et me précipite en dehors de la chambre, je manque de dévaler les escaliers en me prenant
les pieds dans le tissu qui traîne par terre.
— Aly, tu n’as rien oublié ? Me demande Thomas qui se tient sur le palier derrière moi.
Je souris soulagée de savoir qu’il ne s’est pas enfuit à toutes jambes.
— Tom, excuse-moi, j’ai été très maladroite dans mes propos. Reviens s’il te plaît.
— J’ai bien fait de rester là, tu serais sortie dans cette tenue !
Je ris de sa remarque qui détend peu à peu l’atmosphère. Nous entrons tous les deux dans la chambre,
je plaque Thomas contre le mur pour l’embrasser. Ses épaules se relâchent, ses pupilles se dilatent et un
sourire discret apparaît.
— Je suis tellement désolée Thomas pour ce que j’ai dit.
— Ce n’est rien. Tu es bouleversée et malheureusement tu as toutes les raison de l’être, je n’aurais
pas dû chercher à te donner des conseils.
— Non Thomas, même si je suis bouleversée, je n’avais pas à m’en prendre à toi. Je ne mentais pas
quand je disais qu’avant cette nuit-là, Hugo était un parfait fiancé. Mais c’était il y a deux ans et depuis il
s’est passé des tas de choses, il n’était plus l’homme que j’avais connu et puis il y a eu notre rencontre. Je
ne la remets pas en cause, c’est seulement que je suis très en colère et j’ai pris un raccourci. J’espère que
tu peux pardonner ma réaction.
— Assurément Aly. S’il n’y avait pas eu … enfin ta vie serait différente aujourd’hui.
Après un bain chaud, je parviens à me détendre un peu. J’essaie de me rassurer comme je peux,
j’étais séparée d’Hugo au moment de l’annonce et Thomas est présent à mes côtés, ce qui devrait m’aider
à surmonter cette épreuve.
En pensant à lui, justement il frappe à la porte de la salle de bain.
— Oui Tom.
— Je peux entrer ?
— Oui oui.
— Est-ce que tout va bien ? Tu veux que je te lave le dos ?
— Je pensais que tu voulais me rejoindre pour un jacuzzi. Lui dis-je tout en lui faisant de la place.
— Je n’en demandais pas tant, mais c’est avec plaisir que je te rejoins ma belle.
Il ferme la porte avant de prendre son portable, après quelques manipulations j’entends Sia en fond
musical, puis il se déshabille sous mon regard attentif, je ne me lasserai jamais de son corps délicieux. À
chaque fois qu’il se découvre un peu plus, la sensation de papillonnement dans mon ventre s’intensifie,
pourtant je commence à connaître les moindres détails de son anatomie.
— Tu fais exprès de prendre ton temps ? Lui demandé-je impatiente qu’il me rejoigne.
— Oui pour que tu profites de la vue ! Je pense que je te fais encore de l’effet ! Dit-il spontanément et
avec assurance.
— Tu crois ? Répliqué-je pour le défier.
— Laisse-moi vérifier de plus près. Ajoute-t-il tout en retirant son boxer.
Il entre dans l’eau et vient se placer derrière moi, j’allonge ma tête contre son torse frais. Il vient
placer délicatement le plat de la main sur ma poitrine.
— Ton corps te trahit Aly. Ton cœur bat plus vite, ton souffle s’accélère… On dirait bien que tu as
une montée d’adrénaline ! Selon toi qu’est-ce qui provoque ça ?
— Je vais laisser l’expert faire son analyse.
— Très bien, c’est moi qui te provoque un sentiment de stress et d’excitation, d’où la libération
d’hormones dans ton organisme.
— Tu es bien sûr de toi. Répliqué-je tout en observant les mouvements de ma poitrine s’amplifier
sous sa main.
— Dis-moi que je me trompe si ce n’est pas le cas.
— Tu as oublié de parler de cette impression de papillons que j’ai ressentie par ici. Lui dis-je en lui
indiquant mon ventre.
— Je vois, je n’ai pas fini de lire l’étude qui décrit ces symptômes corporels. Si tu me disais ce que
j’ai oublié encore ? Suggère Thomas.
— La sensation de chaleur qui m’envahit, mon ventre qui se contracte, l’impression de perdre le
contrôle… Avoué-je timidement mais terriblement excitée par mes aveux.
— Eh bien, tu es sous mon emprise ! Rassure-toi, tu me fais le même effet. Précise-t-il avant de
m’embrasser.
Après une douce étreinte dans ses bras, je peux affirmer que je me sens mieux, j’ai le sentiment d’être
en sécurité avec lui. Tom m’invite à manger ce midi, nous nous rendons sur la côte pour éviter de croiser
des personnes que nous connaissons.
C’est la première fois que nous sommes réellement ensemble à l’extérieur, c’est agréable de ne pas se
cacher. Nous restons tout de même prudents, pas question de se donner la main en public. Je lui parle de
mon rendez-vous avec l’agent immobilier ce soir pour visiter une maison près de l’hôpital, il ne
m’accompagnera pas, il y a trop de risque pour nous deux. Cependant, il n’est pas contre venir passer
quelques nuits si j’y emménage, cette idée me plaît beaucoup. Après deux heures de promenade le long de
la côte de granit rose, nous reprenons la route pour Kerrilis.
Sur le trajet du retour, Tom me convainc d’aller voir mes parents pour les rassurer après la visite. Il a
raison, je ne suis pas fuyante habituellement, je vais leur dévoiler la trahison d’Hugo et d’Émilie et je
passerai la nuit à la maison car j’ai été trop absente ces derniers temps.
Je récupère ma voiture pour me rendre à l’adresse indiquée par l’agence, j’espère que l’annonce
correspond à ce que je vais voir. Lorsque je me gare, j’aperçois une jeune femme blonde devant la porte
d’entrée, elle a un porte document à la main ainsi qu’un trousseau de clé. Ce doit être une conseillère,
mais ce n’est pas celle que j’ai rencontré à hier me dis-je avec une légère déception, car j’avais eu un
bon feeling avec la chef d’agence.
— Bonjour, Madame Steunou ?
— Oui c’est moi, bonjour.
— Enchantée, je suis Sarah Grasset, conseillère en immobilier. Ma chef m’a informée qu’elle allait
avoir du retard, elle m’a demandé de commencer la visite avec vous. Elle nous rejoindra un peu plus
tard.
— D’accord, allons-y.
Nous commençons par les extérieurs, un jardin clôturé de six cents mètres carrés, qui est parfaitement
entretenu. Il va me falloir une tondeuse, pensé-je immédiatement. Il y a une petite terrasse exposé sud-
ouest, l’avantage est que cette partie du jardin est cachée du voisinage par une palissade en bois. Plus
d’intimité pour recevoir Tom, c’est un élément à prendre en considération.
La maison a une surface habitable de quatre-vingt-dix mètres carré, le rez-de-chaussée comprend une
grande pièce pour le salon et le séjour, une cuisine aménagée, une salle de bain et une chambre. À l’étage,
il y a deux autres chambres ainsi qu’une salle de bain. Le logement a été construit en 2010, il possède de
nombreuses ouvertures, ce qui le rend très lumineux, d’autant plus que tous les murs ont été repeints en
blanc.

Chapitre 60

Elle nous rejoint dans son tailleur noir moulant, elle est très élégante et marche avec assurance, elle
porte des escarpins noirs en cuir à hauts talons. C’est une véritable femme d’affaire, je l’envie de paraître
si confiante.
— Madame Steunou, veuillez excuser mon retard. Me lance-t-elle tout en échangeant une poignée de
main ferme et franche avec moi.
— Je vous en prie, j’ai été très bien accueillie avec madame Grasset.
— Comment s’est passé la visite ?
— Parfaitement, je suis séduite.
— Séduite ! Réplique-t-elle. Ça ne m’étonne pas !
Serait-ce de l’ironie ?
— J’ai transmis votre dossier au propriétaire, tout est en ordre. Vous pouvez signer dès aujourd’hui et
disposer de cette maison immédiatement.
— J’accepte. Pouvons-nous faire l’état de lieux ce soir ?
— Il est prêt, il n’y a plus qu’à le vérifier ensemble.
Je fais le chèque de caution ainsi que le premier mois de loyer et je prends possession de mon
nouveau trousseau de clés. J’envoie un message à Tom pour l’informer de l’évènement :
J’ai les clés de mon nouveau logement. J’emménagerai vendredi soir je pense. Aly
En arrivant chez mes parents, je leur annonce la bonne nouvelle, mais bizarrement ils ne semblent pas
se réjouir pour moi.
— Qu’est-ce qui vous arrive ? Leur demandé-je étonnée.
— Assieds-toi, il faut qu’on parle.
— Quoi encore ? Quelqu’un d’autre a couché avec Hugo sous mon toit ?
C’est plus fort que moi, je n’ai pas pu me retenir, il fallait que ça sorte ! Ce qui me surprend c’est
l’absence de réaction de mes parents.
— Ne me dites pas que vous étiez au courant et que vous me l’avez caché ?
— Non ma chérie, nous venons de l’apprendre par ta sœur, il y a à peine une heure. Répond ma mère
les larmes aux yeux.
— Parfait, ça m’évitera d’avoir à vous le raconter.
— Alyssa, elle vient de démissionner et veut s’éloigner quelques temps pour te laisser respirer.
— Je m’en fiche, elle peut faire ce qu’elle veut, ça ne m’intéresse pas. J’espère que vous n’allez pas
prendre sa défense, sinon vous risqueriez de faire une croix sur moi par la même occasion.
— Nous ne prenons pas sa défense, mais ça reste notre fille et nous n’avons pas envie de vous voir
vous déchirer toutes les deux. Rétorque mon père.
— Il n’y a plus rien qui nous lie elle et moi, je ne veux même plus entendre son nom !
— Accepte de la voir une fois, laisse-lui la possibilité de s’expliquer. Si tu ne le fais pas pour elle,
fais-le pour nous Alyssa, je t’en supplie. Implore ma mère en pleurs.
— Je n’arrive pas à croire que vous osiez me demander ça ! J’ai besoin de temps avant de pouvoir la
voir ou de l’entendre.
— Merci de ne pas refuser, si tu savais comme je suis malheureuse pour toi, nous avons été très
choqués ton père et moi en apprenant cela. Comment tu vas ?
— Je vais mieux, hier soir, j’ai pris un coup de masse sur la tête mais j’ai eu la chance d’être bien
entourée.
— Tu étais avec qui ? S’interroge ma mère.
— Avec un ami, un collègue de travail. Tu ne le connais pas.
— Comment s’appelle-t-il cet ami ?
J’hésite un court instant à lui dire son prénom, l’appréhende de le dire à voix haute…
— Il s’appelle Thomas maman.
— Eh bien, on dirait qu’il ne te laisse pas insensible cet homme-là ! Précise ma mère curieuse d’en
savoir un peu plus.
— Pourquoi est-ce que tu dis ça ?
— Parce que tu as rougi et pris un air gêné, je te connais bien. C’est avec lui que tu passes tout
temps ?
Merde, ce n’est pas le moment de m’enfoncer davantage.
— Non, je le vois de temps en temps, mais ce n’est rien de plus qu’un ami.
Je change rapidement de conversation et évoque mon déménagement. Nous convenons d’aller demain
soir à la recherche de mobilier pour pouvoir meubler cette grande maison.
Juste avant de me coucher, mon portable m’indique un message.
Bonne nouvelle. Je participerai bien vendredi, mais j’imagine que tu ne seras pas seule… Tom
Je m’empresse de lui répondre : Non, ce n’est pas nécessaire, je te remercie. Tu passeras peut-être
quand je serai installée…
Tom : Si tu m’invites, je ne résisterai pas. Mon lit est bien vide sans toi…
Moi : Je te manque ?
Tom : Oui. Je ne te manque pas ?
Moi : Si peut-être même un peu trop…
Tom : Pourquoi ?
Moi : Tu sais bien… les papillons… j’ai peur de leur brûler les ailes.
Tom : J’ai adoré t’entendre me dire ce que tu ressentais ce matin… serais-tu en train de tomber
amoureuse de moi aly ?
Il n’est pas sérieux de me demander ça ? Il va flipper s’il pense que j’ai des sentiments pour lui.
Moi :Jje sais que tu te crois irrésistible, mais ne rêve pas !
Tom : Merci.
Moi : Je t’ai vexé ? Cela fait 10 jours que nous avons échangé notre premier baiser… c’est un peu
tôt non ?
Tom : 11 jours aly ! Dors bien ma princesse.
Onze jours… Il me rend dingue ! Je suis « sa princesse », merde je crois que je l’aime.
Moi : Bonne nuit. À demain. Ta princesse.
Tom : Je savais que ce surnom te plairait. Bonne nuit.
Oh Thomas ! Je m’endors en serrant fort mon oreiller et en imaginant être dans les bras de mon adoré.
Je m’apprête à partir au travail, je suis un peu chamboulée parce que contrairement à ce que
j’espérais, je n’ai pas rêvé que de Tom. J’ai revécu la nuit de l’anniversaire d’Hugo, dans mon
cauchemar, je rentrais du boulot et les découvrais au lit ensemble.

Malgré toute la haine que j’éprouve envers ma sœur, je n’arrive pas à la détester et je ne peux pas
m’empêcher de penser qu’elle a dû souffrir durant ces deux dernières années. Elle a dû être rongée par le
remord, peut-être même qu’elle a voulu m’en parler de nombreuses fois.
Putain, mais qu’est-ce qu’il lui ai passé par la tête ce soir-là ? Alcool ou pas les faits sont là… C’est
trop facile, ma mère veut que j’aille lui parler et puis quoi ? Je dois lui pardonner aussi ? Toute cette
histoire va me rendre cinglée, je sais ce qui se passe, je suis préoccupée par l’avenir d’Émilie, du fait
qu’elle veuille partir et par les tracas que ça causent à mes parents. C’est le monde à l’envers, c’est à elle
de se soucier de moi.
Je me demande si Lucie a été informée, parce qu’elle n’a pas cherché à me contacter. Je passerai la
voir ce soir si j’ai le temps après avoir fait les magasins avec mon père.
En arrivant au travail, j’enfile ma blouse quand Lara accourt dans mon bureau.
— Lara ?
— Alyssa, je suis désolée, j’ai quelque chose à te dire.

Chapitre 61

— Dis-moi Lara !
— Je dois partir au plus vite, j’ai appris que ma mère venait de faire un infarctus, elle a été
héliportée à Pontchaillou. M’annonce-t-elle paniquée.
— On va gérer Lara, rentre chez toi prudemment. Tiens-nous au courant, j’espère que ça va aller pour
ta maman.
— Merci beaucoup. J’ai pris l’initiative d’appeler Julie, elle est en route pour me remplacer.
— C’est gentil à toi.
Comme prévu, Julie arrive quinze minutes plus tard. Dans l’après-midi, Lara a appelé pour nous
informer que sa mère avait bénéficié d’une intervention et que depuis son état était stable, j’en ai profité
pour lui donner le reste de la semaine, comme nous avons pu nous arranger avec les collègues.
J’ai réussi à trouver cinq minutes pour appeler Emma après avoir accusé réception du mail que je lui
envoyé ce midi pour évoquer la tromperie d’Hugo. J’ai ensuite répondu à Tom qui me demandait de le
rejoindre ce soir, je lui ai dit que je ne serai pas disponible parce que je suis invitée chez Lucie pour le
dîner.
Dix-sept heures mon père m’attend devant le magasin, il a pris la camionnette du boulot. Je ressors
une heure et demie plus tard avec un canapé, une table et des chaises. Heureusement que la cuisine est
toute équipée, parce que le montant des achats est déjà phénoménal. Nous allons décharger dans ma
nouvelle maison, mon père en profite pour faire son état des lieux.
Dix-neuf heures trente, Lucie et Sébastien m’accueillent chaleureusement, nous évitons le sujet qui
fâche pendant le repas. J’apprécie de passer du temps avec eux entourés de leurs enfants. Quand
Sébastien monte coucher les petits, Lucie craque.
— Pourquoi est-ce que tu pleures Lucie ?
— Je suis tellement déçue, nous formions une famille unie et ce ne sera plus jamais comme avant.
Est-ce que tu vas accepter d’aller la voir ?
— Je ne suis pas encore prête, elle m’a fait trop de mal.
— Je ne la défendrai jamais pour ce qu’elle a fait, car c’est inexcusable ! Mais bon sang, je me sens
coupable, je l’ai vue ce soir-là, elle avait vraiment trop bu… personne ne pouvait imaginer ce qui allait
se passer, même pas elle ! Nous avons poussé Hugo à boire, j’ai honte si tu savais.
— Lucie, je ne t’en veux pas, tu n’es pas responsable.
— Je voudrais que tout redevienne comme avant. Émilie est au plus mal aussi et je ne peux rien faire
pour vous.
— Tu lui as parlé ?
— Oui, elle m’a appelé, elle parlait d’une voix étranglée, elle répétait que tout était de sa faute,
qu’elle comprendrait que je ne lui parle plus. Elle m’a fait beaucoup de peine.
— Personne ne te demande de changer ta relation avec elle. Je ne lui souhaite aucun mal, elle reste
ma sœur, même si hier quand je l’ai appris, j’ai pensé qu’elle n’était plus rien à mes yeux. Ce matin, je le
regrettais déjà, mais ça ne veut pas dire que je peux lui pardonner.
— Je te trouve très courageuse Alyssa malgré les circonstances.
— Au fond de moi, cela fait très longtemps que je sentais que quelque chose ne tournait pas rond avec
Hugo, maintenant j’en ai l’explication, tout s’éclaire. Je vais être honnête avec toi, mais je te demande de
garder confidentiel ce que je vais te dire. Je vois un autre homme depuis peu, il me fait beaucoup de bien
et c’est en partie grâce à lui que je tiens le choc.

Lucie reste bouche bée. Sébastien nous rejoint contraignant ma sœur à ne pas faire de commentaire
sur cet homme mystérieux dont elle ignorait totalement l’existence.
Vers vingt et une heure, je reçois un message : Est-ce que tu penses pouvoir te libérer pour me
rejoindre ? Tom.
Je souris bêtement, ce qui attise la curiosité de Lucie, elle me met un coup de coude discret.
— Il est temps pour moi de rentrer, merci pour le repas.
— Bonne soirée Alyssa ! Ajoute-t-elle en me lançant un clin d’œil.
J’appelle Tom en m’installant au volant de ma voiture, il répond à la seconde sonnerie.
— Oui Aly.
— Je suis disponible.
— Alors dépêche-toi de venir !
— À tout de suite.
Il y a un juste un petit détail que j’ai omis de lui préciser, je n’ai pas tellement envie de lui donner ce
genre de précision, mais s’il cherche à me déshabiller, il faudra que je l’arrête. Ça m’énerve de savoir
que pendant quelques jours, nous ne pourrons pas avoir de relations intimes.
Lorsque j’entre dans la chambre, je suis très mal à l’aise, je sais à quoi il s’attend, il est torse nu,
hyper séduisant et me fait rapidement comprendre que je lui ai manqué.
— Aly, on ne s’est pas vu de la journée, nous avons des choses à rattraper. Et tu m’as énormément
manqué la nuit dernière.
— J’étais très attendue à ce que je vois.
— En effet, je vais te montrer à quel point…
Tom m’arrache un cri de surprise en me soulevant dans ses bras, une jambe de chaque côté de ses
hanches, il me transporte jusqu’au centre du lit. Impossible de l’arrêter, il est comme possédé par mon
corps. En quelques minutes seulement, je me retrouve en petite culotte contre lui et alors qu’il cherche à y
plonger la main, je me fais violence et l’interromps :
— S’il te plaît Tom, pas ce soir.
Il se redresse, visiblement il ne s’attendait pas à ce que je le repousse, il reste intrigué.
— Tu en meurs d’envie Aly !
— Oui, mais nous allons devoir patienter quelques jours. Chuchoté-je morte de honte.
— Oh, je vois. Écoute, dans ce cas, il vaut peut-être mieux que tu rentres chez toi.
Hein ? Les bras m’en tombent. Il est gonflé ! Je reste sans voix.
— Je plaisante ma puce ! Ajoute-t-il en riant. Je t’ai bien eue !
— Oui, tu semblais très sérieux.
— Allez détends-toi un peu, il y a d’autres façons pour s’amuser tous les deux.
À quoi pense-t-il ? Je me raidis, il s’en aperçoit.
— Ay, je ne toucherai pas à ta petite culotte si c’est ce qui t’inquiète !

J’avoue que je me sens rassurée mais fais mine de plaisanter.


Au milieu de la nuit, je suis réveillée par la sonnerie de mon portable. Le temps que je parvienne à
l’attraper, je manque l’appel. Je vois qu’il s’agit d’Émilie ! Pourquoi cherche-t-elle à me joindre à cette
heure-ci ? Je fais défiler les messages :
Reçu à 23h47 : Si tu savais comme je regrette. Émilie.
Reçu à 23h57 : Pardonne-moi pour tout le mal que je t’ai fait. Je t’aime. Émilie.
Putain, c’est quoi ça ? Mais qu’est-ce qu’il lui prend de me dire qu’elle m’aime à minuit ! Une pensée
atroce me traverse l’esprit, j’essaie de la rappeler immédiatement, elle ne répond pas. Merde, quelque
chose ne va pas, j’en suis certaine.
— Thomas, lève-toi s’il te plaît !
— Qu’est-ce qui se passe ?
— C’est ma sœur, vite il faut aller chez elle, j’ai peur qu’elle fasse une connerie.
Thomas saute dans ses fringues, en moins de deux minutes, nous sommes sur la route.
— Est-ce que je dois prévenir quelqu’un ? Ma sœur, mes parents, les pompiers ? Tom dis-moi !
— Nous ne savons pas ce qui se passe, nous y serons dans deux minutes, n’alerte pas tes parents sans
savoir !
Je claque des dents, je suis morte de trouille ! Nous serons bientôt fixés…

Chapitre 62

En arrivant devant chez elle, j’aperçois de la lumière dans le salon, je me dirige rapidement devant la
fenêtre mais ne la vois pas. Thomas frappe à la porte avec insistance, pas de réponse, celle-ci est fermée
à clé. Je crie de toutes mes forces « Ouvre-moi Émilie ! C’est Alyssa » Pas le moindre mouvement dans
la maison.
— Alyssa, je vais péter un carreau si tu penses qu’elle est en danger !
— Oui dépêche-toi je t’en prie.
— Éloigne-toi Aly !
Tom saisit une des grosses pierres qui bordent un parterre de fleurs et la jette en plein milieu de la
vitre, des morceaux de verre s’abattent sur le sol dans un fracas terrible. Je pénètre immédiatement dans
la pièce à la recherche de ma sœur et finis par la découvrir avec horreur, son corps est étendu sur le
canapé, elle est allongée sur le dos, un bras pendant sur le carrelage.
J’accours vers elle, la secoue vivement, elle ne réagit pas. Je n’observe aucune amplitude au niveau
de sa poitrine, pas le moindre souffle sortir de son corps. Oh mon dieu, est-ce qu’elle est morte ? Ce n’est
pas possible !
— Fais quelque chose Thomas, elle ne respire pas !
— Est-ce qu’elle a un pouls ? Demande-t-il alors qu’il se trouve au téléphone avec les pompiers.
Je suis incapable de percevoir le moindre battement cardiaque. Tom se précipite vers moi et
l’installe à plat dos sur le sol, il approche son oreille du visage de ma sœur, part à la recherche d’un
signe vital.
— Aly ta sœur est en arrêt cardiorespiratoire, je suis désolée, tu vas devoir m’aider !
J’essaie de retrouver mon sang froid et me laisse guider par les consignes de Tom, il masse ma sœur
sous mes yeux impuissants et je réalise les insufflations lorsqu’il cesse de compter. Quelques minutes
s’écoulent avant que les pompiers n’arrivent sur les lieux, ils prennent rapidement les choses en main. Il
place le défibrillateur automatique sur sa poitrine et après une analyse, il décide de choquer ma sœur. La
scène est effroyable mais dès le premier choc, elle a de nouveau un rythme cardiaque. Un pompier décide
de m’éloigner pendant que le médecin intube Émilie.
Thomas me rejoint un peu plus tard dans la cuisine et m’apprend qu’ils ont découvert une boîte
d’anxiolytiques vide sur sa table de nuit associée à une bouteille de vin. Le médecin devrait rapidement
la mettre sous seringue électrique d’anexate afin de voir si elle reprend conscience.
Nous suivons le SMUR pour nous rendre à l’hôpital, j’appelle mes parents et Lucie, qui décident de
nous rejoindre sans attendre. Ma mère est bouleversée, j’espère que c’est mon père qui va conduire.
— Alyssa, je suis sincèrement désolée pour ta sœur, mais je ne peux pas venir avec toi aux urgences,
sauf si tu me le demandes.
— Je sais Tom, je ne t’en veux pas, personne ne comprendrait ta présence sur les lieux. Je ne te
remercierai jamais assez pour ce que tu as fait ce soir pour elle. J’ai perdu tous mes moyens,
heureusement que tu étais là.
— C’est normal. Allez va auprès d’elle et appelle-moi quand je peux venir te rechercher.
Elle est installée en salle de déchocage, son corps presque nu est dévoilé aux yeux de me collègues,
qui semblent étonnés de me voir ici en pleine nuit. Inutile de leur préciser qu’il s’agit de ma sœur, au vu
de leur tête, je pense qu’ils ont compris par eux-mêmes. Je suis obligée de sortir, je ne peux pas assister à
cette scène comme simple spectatrice, elle est devenue un corps à sauver, la fille qui a tenté de se
suicider aux yeux du personnel. Mais pour moi elle reste ma sœur et j’ai la désagréable sensation qu’on
viole son intimité, qu’elle va être source de jugements, de critiques... C’est étrange, je n’avais jamais vu
les choses sous cet angle jusqu’à maintenant.

Quand Lucie et mes parents arrivent, nous sommes reçus par le médecin en charge du dossier. Il nous
explique les faits mais nous rassure quant à sa réaction face à l’antidote. Émilie vient d’être extubée, elle
va passer la nuit sous surveillance aux soins continus. Nous ne pourrons la voir que demain matin.
Effondrés mais rassurés de savoir que le pire est derrière nous, nous quittons les urgences à trois
heures du matin. Lucie me dépose devant l’hôtel sans me poser de questions, elle sait que l’homme avec
qui j’étais ce soir à participer à sauver la vie de notre sœur, elle m’a précisé que c’était une raison
suffisante pour l’apprécier.
Thomas est habillé lorsque j’entre dans la chambre.
— Tu ne dormais pas ? Lui demandé-je.
— Non, j’aurais préféré être auprès de toi. Comment va ta sœur ?
— Elle récupère, elle est soins continus et a repris connaissance.
— Putain, je suis rassuré. Viens-là ma puce, tu as besoin de te reposer. Dit-il en m’enlaçant contre
lui.
— Je ne te cause que des soucis… Tu passes ton temps à me réconforter ou à me sortir de situations
impossibles. Pourtant ma vie n’était pas comme ça avant.
— Ne pleure pas ma belle, je t’apprécie comme tu es et s’il me faut prendre l’ensemble pour pouvoir
te garder, j’accepte volontiers.
Nous nous allongeons serrés l’un contre l’autre, j’aime sentir la chaleur de son corps contre moi
quand ça ne va pas. Toutes mes pensées vont à Émilie. Je décide d’envoyer un message à Hugo alors que
TOM est endormi. : Émilie a tenté de mettre fin à ses jours ce soir. Elle est maintenant hors de danger
aux soins continus. Personne ne peut la voir avant demain matin. Ne me réponds pas stp. Alyssa
Je pense qu’il ira la voir demain, elle a besoin d’être entourée, d’ailleurs il va falloir que j’y aille
aussi. J’ai cru la perdre ce soir, je n’y aurais pas survécu.
Tom dort profondément, je place ma main au niveau de son cœur, dépose un baiser sur ton torse, il ne
bouge pas d’un cil, j’en profite pour lui chuchoter « je t’aime » avant de m’endormir.
Le lendemain matin, nous prenons notre petit déjeuner en silence. Les événements de la veille m’ont
donné matière à réfléchir, je dois aller rendre visite à ma sœur peu importe ma rancune… Mon
déménagement attendra ce week-end finalement, Emma dormira à la maison le samedi soir avec moi.
— Tu appréhendes d’aller la voir ? Me questionne Tom.
— Oui évidemment et pas seulement… J’imagine que tout l’hôpital va parler de moi.
— Certainement, mais tu es courageuse. J’ai confiance en toi, tu en ressortiras plus forte.
— Je l’espère. Ma meilleure amie arrive ce soir, elle dormira chez mes parents et demain soir dans
ma nouvelle maison, donc nous n’allons pas pouvoir nous voir avant dimanche soir, si toutefois tu es
disponible.
— Ça va être long mais les retrouvailles seront d’autant plus attendues. Précise-t-il.
Je pars plus tôt que d’habitude, parce que j’ai du retard au travail, en effet ces temps-ci ma vie
personnelle impacte trop sur mon travail. Je dois me concentrer, ne pas gâcher l’opportunité qui m’a été
offerte.

Chapitre 63

Je ne prends pas le temps de m’installer à mon bureau, j’appelle aux soins continus pour prendre des
nouvelles d’Émilie. La nuit s’est bien passée, elle est consciente et réactive. Je demande à l’infirmière de
transmettre à ma sœur que je passerai la voir ce midi. Je salue mes collègues qui me demandent comment
se porte ma sœur, leur réponds qu’elle va mieux et retourne à mes occupations.
Il est temps que cette fichue semaine se finisse, j’ai peur de ce qui pourrait encore se passer. Après
mon entrevue avec Hugo, Émilie… Vivement ce soir, que je retrouve Emma !
Je regarde l’heure tourner, il est onze heures, dans une heure je vais monter la voir et ça m’angoisse.
J’ai peur de ce que je pourrais lui dire, elle est encore très fragile, il va falloir que je pèse mes mots. De
toute façon, ce n’est pas le moment pour aborder le sujet qui fâche, nous aurons d’autres occasions quand
elle sera sortie de l’hôpital et qu’elle aura récupéré. Je lui en veux tellement, comment vais-je pouvoir lui
dire après ce qu’elle a fait sans avoir peur qu’elle replonge ?
Juste avant midi, Thomas fait irruption dans mon bureau, il referme vivement la porte, me faisant
sursautant lorsque cette dernière claque.
— Lève-toi ma puce. Lance-t-il à voix basse.
— Tom, que fais-tu là ?
— Viens, je ne peux pas m’écarter de cette porte !
Je sais qu’il a envie de m’embrasser tout en s’assurant que personne ne pourra nous surprendre. Je le
fais languir en avancer doucement dans sa direction, je croise mes bras devant ma poitrine et m’arrête à
mi-chemin.
— Mince Aly, qu’est-ce que tu fais ? Nous n’avons que peu de temps. Gronde Tom.
— Je me fais désirer, est-ce que ça marche ?
— Oui, mais dépêche-toi sauf si tu veux qu’on se fasse pincer ?
— Je ne sais pas, est-ce que tu es prêt à prendre ce risque ?
— Tu me mets au défi ? Tu l’auras voulu ! Réplique-t-il à ma provocation.
Il s’écarte de la porte et me rejoint avec son regard pénétrant de séducteur accompagné d’un léger
haussement de sourcils, ses pupilles sont dilatées, un sourire coquin accentue son expression qui ferait
tomber n’importe qui à ses pieds. Il bascule ma tête en arrière et dépose ses lèvres sur ma bouche. Je
ressens des picotements de désir des pieds à la tête, sa langue humide vient caresser passionnément la
mienne. J’halète dans sa bouche quand il s’écarte de moi… Non pas si vite.
— Tu es frustrée princesse ?
J’approuve d’un hochement de tête.
— Libre à toi de me retrouver ce soir…
— Tu sais que je ne peux pas.
— Alors tu devras te contenter de ça pour le week-end ! Ajoute-t-il avant de sortir de la pièce.
Quel provocateur ! Ces quelques secondes délicieuses ont suffi pour me déposséder de toutes mes
capacités réflexives. Je reste plantée là au milieu de mon bureau avec le souvenir de l’empreinte qu’il a
laissée sur ma bouche. Je suis vite rattrapée par le présent lorsque Sandra apparaît devant moi pour me
signaler que je dois aller récupérer les stupéfiants à la pharmacie.
De retour dans le service avec la commande, je ma change pour aller aux soins continus. J’ai
plusieurs messages sur mon téléphone. Ma mère qui s’inquiète de savoir si je suis allée voir Émilie ce
matin, Lucie qui me demande sensiblement la même chose et enfin mon chef : Comment gères-tu la
frustration ? Tom
Moi : J’ai trouvé un charmant jeune homme pour me distraire durant ton absence…
Tom : Est-ce que tu es train de me dire que je ne suis qu’un plan cul et que je suis facilement
remplaçable ?
Moi : Tu m’as provoquée…
Tom : Je ne m’inquiète pas, tu n’es pas dans ta bonne période pour t’offrir ce genre de loisir !
Moi : C’est peut-être ce que j’ai voulu te faire croire…
Tom : Fais attention si je te prends au mot, je pourrais revenir pour vérifier moi-même cette
information !!
Moi : Laisse ma petite culotte tranquille et laisse-moi travailler, tu me déconcentres.
Tom : Je vois que ma menace t’a remis les idées en place. Tu vas voir ta sœur ?
Moi : Décidément, c’est-ce que tout le monde veut savoir… oui je vais la voir maintenant.
Tom : Bon courage ma puce. Si tu as besoin de moi, n’hésite pas.
Quand les portes de l’ascenseur se referment, le stress s’empare de moi, dans quelques minutes, je
serai auprès d’elle… Machinalement, j’arrange mes cheveux en me voyant dans le miroir et je constate le
tremblement de mes mains. Je prends de grandes inspirations profondes avant d’arriver au troisième
étage.
Je suis la flèche qui indique le service, comme si je m’y rendais pour la première fois. Tout est
nouveau, je n’ai jamais rendu visite à quelqu’un dans ce service, ma sœur elle-même n’avait jamais été
hospitalisée. En me faisant cette remarque, je réalise qu’elle a peut-être été sans que je le sache,
inévitablement je ne peux pas m’empêcher de faire le lien avec sa fausse couche. Je m’efforce de chasser
ce genre de pensées, ce n’est pas le moment.

Désormais, il ne reste plus que les portes battantes qui me séparent du service, je regarde autour de
moi, les couloirs sont déserts. J’appuie sur l’interrupteur annonçant mon arrivée, car dans cette unité, il
faut attendre une autorisation pour pouvoir y accéder. Béatrice, une infirmière que je connais de longue
date m’accueille avec un large sourire. Elle m’indique la chambre d’Émilie et me dresse un topo rapide
de la situation, cet après-midi, elle sera transférée en médecine interne car son état de santé ne nécessite
plus une surveillance aigue.

Je frappe doucement à la porte de sa chambre, lorsque j’entre, je découvre Hugo assis auprès d’elle,
lui tenant la main. Il est surpris de me voir et s’écarte instinctivement du lit, il me regarde d’un air
coupable, implorant mon pardon. Je ne m’attendais pas à le trouver ici en rentrant, Béatrice ne m’a pas
averti qu’elle avait de la compagnie. Confuse d’assister à cette scène, je préfère quitter la chambre.
— Je repasserai. Annoncé-je embarrassée.
— Non, reste Alyssa. J’allais partir. Lance Hugo pour me retenir.
Il adresse un sourire discret à ma sœur, qui ne me laisse pas indifférente avant de sortir.
Émilie se confond en excuses entre deux sanglots. Son désarroi semble si intense qu’elle peine à
s’exprimer, elle prend de brusques et vives inspirations pour poursuivre ses explications. J’essaie de la
stopper, je lui dis que ce n’est pas le moment pour parler de tout ça, mais rien ne peut l’arrêter. Elle
s’agite avec frénésie sous mes yeux, je m’approche d’elle pour tenter de la calmer, mais elle se débat et
tandis que je place mes mains sur les siennes, elle lâche dans long soupir qu’elle ne mérite pas de vivre
après ce qu’elle m’a fait. Je laisse alors tomber mes barrières et nous nous étreignons dans un torrent de
larmes communicatif.

Chapitre 64

Peu à peu nous parvenons à nous détacher l’une de l’autre, elle me regarde fixement dans les yeux,
son regard emplit de tristesse est une torture. Au plus profond de moi, je sais que je lui ai pardonné à la
minute où j’ai cru la perdre… Elle a déjà trop souffert, je ne peux pas lui en faire supporter davantage,
c’est pourquoi je me décide à lui parler à cœur ouvert.
— Émilie, j’ai eu la peur de ma vie hier, je n’arrive toujours pas à comprendre comment tu as pu en
arriver là. Sache que je n’imagine pas vivre sans toi à mes côtés peu importe ce qui s’est passé, tu es ma
sœur.
— Oui mais je t’ai trahie de la pire des manières et je ne peux pas me le pardonner. Ça fait deux ans
que j’ai ce poids sur la poitrine et c’est trop dur à porter.
— Écoute-moi bien, je suis au courant maintenant, ça m’a fait mal d’apprendre que toi et Hugo aviez
passé la nuit ensemble. J’aurais aimé te détester jusqu’à la fin de mes jours mais ça m’est impossible
parce que je sais que tu ne l’a pas fait consciemment et que tu as souhaité m’en parler plus d’une fois. Tu
n’as pas le droit de décider de nous priver de toi du jour au lendemain. Il va falloir que tu te pardonnes à
toi-même parce que je t’ai déjà accordé mon pardon !
— Tu peux faire ça Alyssa alors que j’ai détruit ton couple ?
— Oui, je t’aime et je ne supporterai pas de te perdre. Promets-moi qu’il n’y aura plus jamais de
secret entre nous.
— Je te le promets. Je t’aime aussi.
Après ces intenses retrouvailles, je suis obligée de redescendre dans mon service. Je me sens
vraiment mieux, nous avions besoin de nous retrouver toutes les deux. J’envoie un message à ma mère
pour la rassurer, elle ne tarde pas à me remercier, comme si je l’avais fait pour elle…
Beaucoup de passages aux urgences avant le week-end, l’après-midi passe très vite. Dix-sept heures
quand je quitte le bureau, je ne passe pas voir Émilie car je sais que Lucie est avec elle. En arrivant
devant chez mes parents, j’aperçois la voiture d’Emma, je suis toute excitée à l’idée de la retrouver. Elle
m’attend devant la porte, je lui saute dans les bras en sortant de mon véhicule.
Nous n’avons pas assez d’heures devant nous pour pouvoir rattraper notre retard ce soir. Nous
passons la soirée enfermée dans ma chambre, des heures à parler sans se lasser de s’écouter l’une l’autre.
Elle et Anthony ont décidé de lancer le projet bébé sans plus attendre, je ne lui cache pas que je l’envie.
Elle me questionne sur l’homme mystérieux qui partage mon lit, je réponds sans détour à ses
interrogations. Elle me dévisage attentivement et décide d’être franche en toute circonstance…
— Merde Alyssa, on dirait que tu es amoureuse à ta façon de parler lui !
— Je crois bien que je le suis, mais je n’ai rien fait pour ça.
— Mais est-ce qu’il va vraiment quitter sa femme ? Je ne veux pas te faire peur mais il a des gosses !
Comment comptes-tu gérer tes études avec un mec marié qui a des enfants, qui risquent de t’en faire baver
et de te voir comme la femme qui a volé leur père.
— Merci de ta franchise Emma, je n’en demandais pas tant. Tu crois que je n’ai pas conscience de
tout ça ? Il a volé à mon secours à chaque fois qu’il a pu, il sauvé ma sœur sous mes yeux impuissants. Je
suis obligée de lui faire confiance. Je suis la première étonnée d’avoir des sentiments si tôt, mais ça ne se
commande pas.
— Si je te dis ça Alyssa, c’est parce que j’ai peur que tu tombes de haut, après tout, je ne le connais
pas ton Thomas.
— Je sais, je sais.
Le lendemain matin, Sébastien arrive de bonne heure pour aider mon père a déménager mes affaires.
Emma et moi faisons les boutiques pour acheter de la vaisselle et surtout de la nourriture, parce que les
placards sont vides. Ce soir ce sera pizzas, pas question de cuisiner, nous avons des invités, Aurélie et
Emmanuelle.
Vers seize heures mon emménagement terminé, nous prenons un café tous ensemble. Cette maison me
semble encore bien vide, elle manque de déco, ça va se faire petit à petit. Je vais faire un tour à l’hôpital
pour voir ma sœur pendant qu’Emma va rendre visite à sa famille.

Lorsque j’arrive dans la chambre, mes parents sont déjà auprès d’elle, nous restons un moment
bavarder. Émilie regrette vraiment son geste, ce qui semble rassurer tout le monde. Elle a demandé à
sortir aujourd’hui, mais le médecin préfère la garder jusqu’à lundi. Heureusement, elle a accepté,
personnellement, je trouve ça prématuré de sortir si vite.
Mes parents voudraient en savoir un peu plus sur l’homme qui est intervenu la nuit dernière avec moi
chez ma sœur. Je leur donne le minimum d’informations sur lui, ils en sauront plus prochainement, du
moins je l’espère.

Notre petite soirée entre fille se déroulent bien, Manu est encore sous le choc d’apprendre que je suis
séparée d’Hugo, elle ne manque pas de me le rappeler dès qu’elle le peut.
— Alyssa, tu es vraiment secrète comme fille, tu as fait ta vie dans ton petit coin ces dernières
semaines, les amies ça sert à quoi ?
— Vous êtes là ce soir, non ?
— Oui, mais on arrive après le séisme…
— Tu ne me dis pas toujours tout non plus, tiens d’ailleurs depuis quand es-tu redevenue brune ?
— Ah, je m’y attendais. Ça fait longtemps que j’en avais marre d’être blonde, j’ai juste tardé à me
décider.
— Et qu’est-ce qu’il en pense ton homme ?
— Il adore, mais je te rappelle qu’il m’a connue brune. Réplique Manu en passant sa main dans ses
cheveux parfaitement lissés.
Je m’accorde un petit moment pour envoyer un texto à Tom :
Tu passes une bonne soirée ? Aly
Tom : Oui, je suis avec mes enfants au cinéma. Et toi ?
Moi : Oui soirée pizza entre copines.
Vers vingt-trois heures, Aurélie et Manu décident de rentrer. Nous ne tardons pas à aller nous
coucher.
Dimanche matin, Emma et Aurélie m’accompagnent pour une séance de jogging. C’est Aurélie qui a
tracé notre itinéraire, un parcours de huit kilomètres qui devraient nous prendre une petite heure. Alors
que nous courrons depuis un peu moins d’un quart d’heure, Emma s’élance dans une descente abrupte et
se retrouve allongée au sol après une chute brutale.

Nous nous précipitons à son secours, elle se relève avec notre aide et fait le constat de ses blessures.
Il s’agit principalement d’égratignures, le pire a été évité car elle a eu le temps de mettre les mains en
avant pour amortir la chute. Nous repartons en marchant et écourtons notre parcours en passant par le
centre-ville. Après quelques minutes Emma semble allait mieux, Aurélie et moi éclatons de rire en
repensant à sa gamelle sous nos yeux. Emma s’arrête prétextant être vexée mais finit par rire de bon cœur
avec nous. Alors que nous arrivons à hauteur de la boulangerie, Aurélie s’arrête devant la vitrine.
— Tiens voilà le chef. Lance-t-elle en me regardant.
— Ah bon. Dis-je naturellement.
En réalité, je suis morte de trouille. Si Emma découvre que mon chef s’appelle Thomas, elle pourrait
gaffer devant Aurélie.

Chapitre 65

— On y va ? Demandé-je en espérant que les filles bougent rapidement de là!


— Non Alyssa, nous allons saluer monsieur Simon, il a dû nous voir. Réplique Aurélie.
— Aurel tu exagères, pense à Emma qui est blessée et qui est pressée de rentrer, alors que tu ne
penses qu’à discuter. Ajouté-je sèchement.
Emma me regarde perplexe et ajoute que rien ne presse, qu’elle va bien. Je suis foutue. Pensé-je
immédiatement. Sympa le soutien des copines…
Je me décompose en observant la file d’attente diminuer, dans deux minutes Thomas sera dehors et
notre relation sera découverte avec les conséquences qui s’en suivent.
J’essaie de me convaincre que si nous sommes capables de nous cacher au boulot, ça devrait le faire
ici, il me suffit de ne pas prononcer son prénom, de ne pas le regarder dans les yeux, de ne pas lui sourire
et de ne pas l’embrasser. Il s’agit d’une simple mise à l’épreuve.
Thomas vient de se retourner, il m’a vue, il a eu ce petit sourire pincé qui me fait tant craquer. Il sort
de la boulangerie et prend un air étonné.
— Bonjours mesdames, vous allez bien ?
— Oui, ça va bien et vous ? Répond Aurélie de façon très entreprenante.
— Très bien. Vous faites du sport ? Demande-t-il en jetant un coup d’œil à nos tenues de sportives.
— Nous en faisions avant un petit incident avec notre amie Emma, qui est infirmière aussi d’ailleurs,
mais elle n’est pas du secteur. Précise Aurel en désignant du doigt les blessures de notre handicapée.
— Aïe, je vois. Grimace Tom compatissant.
— Ah au fait Emma, je te présente Thomas Simon, cadre de pôle de notre centre hospitalier. Balance-
t-elle naturellement.
Et merde, elle l’a fait ! Est-ce une impression ou la terre s’ouvre réellement sous mes pieds en ce
moment-même ? Emma tourne la tête dans ma direction, me dévisage les yeux grands écarquillés. Je prie
de toutes mes forces pour qu’elle n’ajoute rien, qu’elle ne laisse rien paraître de ce qu’elle a compris. Je
l’implore du regard de se taire.
— Thomas, c’est ça ? Enchantée. Dit-elle simplement.
Visiblement, celui-ci constate mon mal à l’aise et reste mutique. Aurélie fronce les sourcils, ne
sachant pas ce qui se passe.
— Bonne journée à vous Thomas. Glissé-je pour rompre le silence.
— Merci Alyssa à vous aussi.
Je traverse la route et les filles emboîtent mon pas sans attendre. Personne ne dit un mot sur la
situation embarrassante. Je cherche une explication plausible à vendre si on me questionne.
Aurélie travaille cet après-midi, elle ne tarde pas à repartir. Emma va prendre sa douche, pendant ce
temps j’envoie des messages à Tom, nous essayons de nous rassurer mutuellement.
Lorsqu’Emma me rejoint, elle s’installe dans le canapé et me demande droit dans les yeux :
— Alors, j’attends !
— Quoi ?
— C’était lui, n’est-ce pas ?
— Lui ?
— Pas à moi Alyssa, s’il te plaît. Ajoute-t-elle déçue.
— Que veux-tu que je te dise ? Oui, c’est lui.
— Ok, j’ai deux choses à te dire Alyssa !
— J’écoute. Soupiré-je, je sais qu’elle va me sermonner.
— La première, tu m’avais caché qu’il s’agissait de ton cadre de pôle, tu as perdu la tête ! Tu
imagines les conséquences pour toi si tes collègues l’apprennent et que votre relation ne dure pas. Elles
te diront que tu l’as séduit pour les avantages qu’il pouvait t’apporter… Je ne donne pas cher de ta peau !
— Tu sais que je ne cherche pas à en retirer un quelconque intérêt !
— Oui, moi je le sais.
— Et la seconde chose ?
— Putain, il est canon !
— Merci, tu ne m’apprends rien. Acquiescé-je en passant au rouge pivoine. Tu vas garder ça pour toi
Emma !!
— Évidemment. Tu veux que j’en parle à qui ?
Je suis soulagée qu’aucun secret ne subsiste entre nous. L’heure de la séparation arrive, Emma doit
reprendre la route. Ce petit week-end nous aura fait beaucoup de bien.
Comme convenu avec Thomas, je l’informe que je suis entièrement disponible par message et lui
indique mon adresse. Il doit déposer ses enfants à dix-neuf heures avant de me rejoindre. J’ai un peu de
temps devant moi, j’en profite pour me faire couler un bain.
Après divers essayages, j’opte pour une tenue sexy, une robe corail au décolleté plongeant qui
m’arrive à mi-cuisses. Un maquillage discret, une coiffure légèrement relevée sur le côté pour dégager
mes épaules et une touche de parfum, me voilà prête.
Dix-neuf heures trente, lorsque j’entends une voiture devant chez moi. Je me précipite à la fenêtre,
c’est lui ! Je le fais patienter une minute à la porte avant de lui ouvrir.
— Tu as sorti le grand jeu ce soir Aly. Constate Tom en m’examinant des pieds à la tête.
— Et ça te plaît ?
— Tu es sublime, la vue est vertigineuse.
— Tu n’es pas mal non plus.
Il est vêtu d’un polo noir qui épouse parfaitement sa silhouette et d’un jean moulant.
— Je te fais visiter ? Lui proposé-je.
— Avec plaisir. Dit-il en saisissant ma main dans la sienne.
Son geste me procure un intense et agréable frisson. Alors que je lui fais découvrir l’étage, il balade
ses doigts dans le creux de ma main, j’entremêle mes doigts aux siens.
— Où est ta chambre Alyssa ? Demande-t-il fébrilement.
— Elle est juste à côté, pourquoi ?
— Parce que ça va faire une semaine demain que nous n’avons pas…
— Une semaine ? Repris-je étonnée, je ne pensais pas.
— Tu m’as provoqué à diverses occasions ces derniers jours, et ce soir tu oses te balader comme ça
devant moi, je n’arrive plus à écouter ce que tu me dis, je ne pense qu’à t’enlever cette robe !
— Euh le problème c’est que je ne peux toujours pas.
— Ah, ne me dis pas ça, tu veux m’achever !
— Peut-être que je le peux, peut-être pas…
— Ça suffit ce petit jeu ! J’ai envie de toi, je ne vais pas te laisser le choix !
— Comment ça ?
— Je vais te prendre ici et maintenant dans ton bureau. Me glisse-t-il dans le cou en défaisant la
ceinture de son jean.
— Tu ne veux plus aller dans ma chambre ? Lui demandé-je impatiente.
Tom balance sa tête de droite à gauche avant d’ôter son tee-shirt, il continue son streap tease et retire
le dernier vêtement qui le recouvre. Son sexe témoigne de son désir ardent pour moi.
— Je vais m’occuper de toi ma belle.
Il place ses mains sous ma robe et fait descendre ma petite culotte le long de mes jambes.
— Nous allons tester la solidité de ton bureau ! Dit-il avant de m’y asseoir sur le bord.
Il s’installe debout entre mes jambes avant de plonger en moi. Je m’agrippe à ses fesses pour
accompagner ses mouvements lents et réguliers. Alors qu’il me caresse voluptueusement les seins, il lève
son visage vers moi et observe mon sublime abandon et me rejoint dans des secousses saccadées.

Chapitre 66

C’est toujours aussi merveilleux ce corps à corps avec lui, le plaisir me semble chaque fois plus
intense, l’orgasme est un véritable feu d’artifice, l’épanouissement est total. Thomas est une drogue dont
je ne peux pas me passer, quand il est là je succombe inévitablement à son charme, à ses mots. Je me
demande ce qu’il ressent face à moi, je sais qu’il me désire, mais au-delà de ça, pourrait-il résister ?
Nous passons un moment serrés l’un contre l’autre, nous ne formons plus qu’un dans ces moments,
c’est comme une nécessité après avoir fait l’amour. Ça me procure un sentiment de sécurité et de
plénitude.
Lorsque la position devient inconfortable sur le bureau, je tortille mes fesses endolories par cette
surface dure. Immédiatement, Thomas m’aide à descendre, il me tend ma culotte qu’il vient de ramasser
au sol et ajoute :
— Tu peux la remettre si tu es plus à l’aise, mais il y a de grandes chances pour que je doive te la
retirer tout à l’heure.
— Tu es bien trop gourmand ! Je ne vais pas prendre le risque de promener sans. Lui dis-je tout en
me rhabillant sous son regard intéressé.
Je finis de lui faire découvrir l’étage puis nous nous installons au salon pour prendre un apéritif. Il
évoque son week-end avec ses enfants, il me rassure sur le fait que sa femme est plus calme et précise
qu’ils ont pu communiquer. De mon côté, je lui parle de ma visite auprès d’Émilie et de la réaction
d’Emma ce matin après l’avoir rencontré en ville. Il avoue son embarras devant Aurélie et espère qu’elle
n’a rien remarqué d’étrange dans nos comportements.
Après le dîner, Thomas se lève et balaie la pièce du regard.
— Tu cherches quelque chose Tom ?
— Oui mes clés.
— Tu les as peut-être égarées dans mon bureau à l’étage tout à l’heure.
— Oui, je vais aller voir ça, tu veux bien ?
— Oui, je t’en prie.
Tom monte et soudain je réalise que s’il cherche ses clés, c’est parce qu’il a certainement l’intention
de partir. Je ne veux pas qu’il me laisse seule dans ma grande maison. Lorsqu’il redescend, il saisit sa
veste en cuir.
— Tom tu pars ? Lui demandé-je inquiète.
— Oui ma puce, je ne vais pas te déranger, tu as eu un week-end difficile et je ne veux pas m’imposer
chez toi. Déclare-t-il.
— Non, mais tu ne t’imposes pas ! Euh moi c’est ce que j’ai fait à l’hôtel ?
— Non pas du tout, c’est différent, tu viens d’emménager…
— Reste s’il te plaît. Le supplié-je.
— Si je ne t’embête pas, j’accepte Aly.
Naturellement, je l’embrasse pour le remercier, il me rend mon baiser sur le front. Un peu plus tard
dans la soirée, nous montons nous coucher. Tom s’installe dans le lit en premier pendant que je passe à la
salle de bain me démaquiller. Sans comprendre pourquoi, en me voyant dans le miroir, je m’effondre. Des
tas de pensées me traversent l’esprit… Si Thomas ne quitte pas sa femme, je vais me retrouver seule. J’ai
déménagé et je vis seule ! Si quelqu’un découvre notre relation au travail, je vais finir seule ! Seule et le
dénominateur commun !
J’ai trente ans et à tout moment je peux tout perdre, car le semblant d’équilibre sur lequel repose ma
vie est fragile, précaire et incertain et j’y accorde énormément d’importance. J’étouffe le bruit de mes
gémissements entre chaque sanglot dans mon peignoir, car je ne veux pas alerter Thomas qui se trouve
juste à côté. S’il me voit pleurer, il va finir par se dire que je suis dépressive et va croire que toutes les
soirées avec moi ressembleront à ça.
Quand je parviens à me calmer, mes yeux légèrement gonflés me trahissent dans le miroir. Je décide
d’éteindre la lumière en entrant dans ma chambre et me sers du peu de luminosité que crée mon portable
pour me déplacer. Je me prends le pied du lit dans les orteils et ne peux retenir un petit cri aigu ! Aïe ça
fait mal !
— Tu t’es fait mal Aly ? Attends J’allume si tu veux.
— Non, non c’est bon, ma voilà. Dis-je pour le stopper dans son élan.
Je me colle à lui tel un aimant et enfouis ma tête dans son cou pour m’enivrer de son odeur délicieuse.
Il passe sa main le long de mon dos délicatement.
— Tout va bien Aly ?
— Oui.
— Est-ce que tu aurais attrapé froid en cinq minutes pour renifler de la sorte ?
— Serre-moi contre toi. Lui demandé-je.
— Ma belle, je sais quand tu ne vas pas bien. Tu n’as pas besoin d’éteindre la lumière pour te cacher
de moi. Si tu ne veux pas m’en parler, il te suffit de me le dire.
— Y a rien de particulier, c’est juste une période difficile et je craque souvent, malheureusement pour
toi, tu es présent à chaque fois.
— Tant mieux car j’aime être celui qui te console. Répond Tom en s’installant au-dessus de moi.
— Qu’est-ce que tu fais ?
— Je cherche l’interrupteur pour éclairer cette pièce. Précise-t-il en allumant.
Il prend mon visage entre ses mains délicates et alors qu’il le parsème de baisers, de petites perles
salées roulent sur mes joues et rencontrent ses lèvres. Pleurer dans ses bras me semble désormais
romantique.
— Tu es troublante comme fille Aly ! J’aurais aimé t’avoir rencontrée des années plus tôt, mais la vie
est ainsi si faite et je ne peux pas le regretter, car elle m’a apporté deux merveilleux enfants.
— Toi aussi tu es quelqu’un de troublant Tom. Je ne te connais que depuis peu, mais je te découvre de
nouvelles qualités à chacune de nos rencontres. As-tu seulement en défaut ?
— Oui j’en ai.
— Lesquels ?
— Je suis du genre jaloux et rancunier.
— Y a pire comme défaut, tu ne trouves pas ?
— Et dis-moi quels sont tes défauts à toi ma puce ?
— Je fais trop confiance aux autres alors que je manque cruellement de confiance en moi.
— Tu en as conscience, tu vas apprendre avec le temps et quand tu seras cadre, tu auras plus
d’assurance, car c’est l’image que tu devras renvoyer.
— Ça me semble loin l’école des cadres pour le moment.
— Plus que quatre mois. Tu comptes loger sur place ?
— Non, j’envisage de prendre le train tous les jours, mais ça peut encore changer.
— Tu pourras travailler pendant les trajets et puis une semaine sans se voir…
— Tu arrives à te projeter dans quelques mois avec moi ?
— Pourquoi pas !

Chapitre 67

Il me laisse sans voix, l’idée qu’il imagine pouvoir se projeter avec moi me réconforte.
— Je pourrais même t’aider pour tes cours si tu le souhaites.
— Tu es sorti de l’école des cadres depuis combien de temps ?
— Depuis 2008, j’ai travaillé sept ans comme infirmier.
— Tu sais que c’est ma septième année en tant qu’infirmière ?
— Que de coïncidences !
— Je peux te poser une question Tom ?
— Oui Aly.
— Comment est-ce que tu as rencontré ta femme ?
Bien qu’il semble étonné de ma question, il se lance dans des explications :
— C’était il y a douze ans, j’ai été invité à une soirée étudiante par un copain, c’est à cette occasion
qu’il m’a présenté Estelle, nous sommes sortis ensemble le jour-même.
— Et ta fille a onze ans, vous n’avez pas perdu de temps !
— Oui, Estelle est tombée enceinte six mois après notre rencontre. Sur le moment, nous avons
paniqué, ce n’était pas prévu. Elle a eu le temps de finir ses études avant la naissance d’Émeline. Nous
nous sommes mariés en 2005, nous avons eu Yanis en 2006 et en 2008 nous avons acheté notre maison à
Kerrilis. Voilà les grandes lignes de mon parcours. Tu veux me raconter le tiens ?
— Il n’y a rien à en dire que tu ne saches pas déjà ! Rétorqué-je contrariée.
En dix ans, je n’ai pas fait un quart de ce qu’il a fait en quatre ans ! Quand je l’entends parler de son
passé, je me rends compte que tout le rattache à sa femme. Je ne serai jamais celle qui lui a fait découvrir
toutes ces étapes magnifiques qu’un couple peut rencontrer. Non pas que je projette d’avoir des enfants ou
de marier avec lui, mais si un jour j’en avais envie, il a déjà tout ça ! Il n’aura probablement pas besoin
de revivre tout ça…
— Pourquoi est-ce que tu dis ça Aly ?
— C’est vrai, je n’ai ni enfants, ni maison, ni mari…
— Tu es jalouse de mon divorce peut-être ?
— Ah non, pas de ça ! Dis-je en riant.
— Alyssa, tu es encore très jeune !
— La trentaine approche à grands pas.
— Je ne connais pas ta date de naissance ! Réplique-t-il.
— Tu dois bien avoir ça d’inscrit quelque part au travail.
— Oui, en effet, donc tu peux me le dire.
— Je suis du trois juin.
— J’irai compléter les informations personnelles te concernant. Maintenant que j’ai ma petite idée
sur tes mensurations, tes goûts en matière de préliminaires, les positions que tu préfères…
— Tu penses tout connaître de moi, tu es loin de tout savoir.
— Il me manque des précisions indispensables, je dois l’avouer.
— Quel genre ?
Alors que Tom fixe ma bouche avec insistance, il se mordille les lèvres tout en saisissant ma main
qu’il pose sur son boxer. Mes yeux se portent sur le renflement qui étire son caleçon.
— Est-ce que tu vois mieux le genre d’infos qu’ils me manquent ?
— Non, absolument pas.
—Ne t’en fais pas ma belle, je vais t’aider à y voir plus clair.
Il s’empare de ma main et la plonge sous son boxer directement au contact de son sexe durci. Je
caresse lentement celui-ci prenant soin d’ôter son vêtement encombrant. Tom s’allonge sur le dos à mes
côtés, les mains derrière la tête.
— Qu’est-ce que tu fais ? Lui demandé-je en l’observant décontracté.
— Je sens que le moment est propice pour explorer de nouveaux horizons, expérimenter des pratiques
inconnues ensemble. S’exclame Tom fier de lui.
— Je vois que tu as des projets bien définis pour nous ce soir.
— En effet, je suis ton chef et j’ai besoin d’apprécier ta prestation pour en savoir davantage sur tes
compétences dans tous les domaines.
— Vous allez me mettre la pression chef !
— C’est une bonne chose.
— J’ai peur d’être déstabilisée au travail, quand vous serez face à moi alors que j’aurai à l’esprit
l’image de votre sexe dans ma bouche !
— Tais-toi Aly ! Tu risques de me faire jouir avant d’avoir eu le temps de poser tes lèvres sur moi !
Cet échange nous a émoustillés, je parcours son ventre et dispose des baisers humides sur sa peau qui
frissonne à mon contact. Mes lèvres font connaissance dans un premier temps avec son intimité, d’une
main je découvre la peau qui recouvre son gland, il gémit. Je le caresse du bout de la langue, et lorsqu’il
pénètre progressivement dans ma bouche, Tom m’empoigne délicatement les cheveux pour accompagner
mes mouvements. « Oh bébé » lâche-t-il dans une respiration saccadée.
Alors que Tom installé au-dessus de moi m’embrasse dans le cou, il me glisse à l’oreille : « Tu es si
douce bébé » avant de s’abandonner dans mes bras. Comme à chaque fois que nous avons fait l’amour,
nous restons serrés l’un contre l’autre pour nous endormir.
En me levant ce matin, les images de la veille sont encore très présentes et lorsque Tom prend son
café devant moi, je rougis en y repensant.
— Il va falloir te contrôler au bureau tout à l’heure ma belle !
— J’y parviendrai. Tiens nous sommes repassés à ma belle !
—Tu préférais ma puce ? Demande-il en haussant les sourcils.
— Non, à vrai dire, j’ai particulièrement apprécié « le bébé ».
— Ok bébé. Nous avons la réunion de pôle aujourd’hui.
— Oui, je me souviens.
— Il faudra être très sage Aly et ne pas me troubler en public.
— Je le suis toujours.
— Oui, mais si tu passes ton temps à me mater comme lors d’une précédente réunion…
— Quoi, je n’ai jamais, je…
— Si bébé tu l’as fait et ça m’avait beaucoup plu. Le problème c’est qu’avec ce que tu m’as fait cette
nuit, tu risques de me provoquer une érection et là ce serait gênant.
— Je ne te regarderai pas dans ce cas ! Lui dis-je pour plaisanter.
Le prochain rendez-vous étant prévu ce soir, j’ai dit à Tom de récupérer ses affaires à l’hôtel, c’est
ridicule de payer une chambre alors qu’il n’y dort pas. Il a accepté mais a tenu à préciser que ce serait
occasionnel.
Il part à sept heures et demie pour avoir le temps de passer à l’hôtel. Je prends le temps de me
préparer convenablement. Alors que je m’apprête à démarrer, je reçois un texto d’Hugo :
Ta sœur sort aujourd’hui, je lui ai proposé de venir passer quelques jours à la maison pour ne pas
rester seule. Est-ce que tu es d’accord avec ça ? Hugo.
J’hallucine ? Il ose me demander ça ! Putain, je suis censée répondre quoi ? Ça me pose un problème
alors que nous sommes séparés. Je veux bien qu’Émilie soit dans une phase difficile mais elle peut aller
chez les parents ! À ce rythme-là dans une semaine ils me demanderont ma bénédiction pour sortir
ensemble !

Chapitre 68

Je finis par répondre : Tu n’as eu besoin de me consulter il y a 2 ans… pourquoi le fais-tu


aujourd’hui ?
Hugo : Ce n’est pas ce que tu crois aly, ta sœur ne souhaite pas rester chez tes parents, car elle se
sent coupable et je me sens en partie responsable. Tu aurais préféré qu’elle vienne sans que tu le
saches ?
Il marque un point, si j’avais découvert par moi-même que ma sœur était hébergée chez lui, j’aurais
très mal réagi. Je suis aussi plus rassurée de savoir qu’elle ne sera pas seule, mais bon elle va dormir
chez mon ex, qui est aussi son ex d’une nuit. Et s’ils finissaient par se rapprocher tous les deux ?
Moi : Ne m’appelles pas aly ! Fais ce que tu veux, je m’en fiche. Si ma sœur a besoin de moi, elle
peut venir ici.
Hugo : Content de voir que tu lui as pardonné… faut-il que je finisse aux urgences pour que tu me
pardonnes ?
Moi : Tu oses me dire ça !
Hugo : Excuse-moi.
Cette journée s’annonçait pourtant merveilleuse au réveil, il a fallu qu’il vienne tout gâcher. Je
ronchonne jusqu’à mon arrivée sur le parking de l’hôpital.
En passant près des portes automatiques du sas des urgences, celles-ci s’ouvrent laissant apparaître
une femme allongée sur le sol. Je me précipite vers elle, effrayée lorsque je découvre qu’il s’agit de
Nadine. J’appuie sur la sonnette d’alarme, mes collègues accourent, je leur demande un brancard et un
médecin rapidement. Nadine a une respiration régulière, elle répond peu à peu aux stimulations. Elle
semble avoir été victime d’un malaise. Une fois installée dans un box, elle est prise en charge par
l’équipe et est rapidement acheminée en cardiologie sous surveillance.
Je m’installe au secrétariat, en attendant que Cindy, la remplaçante qui travaille aux archives
habituellement vienne nous dépanner. Il est bientôt dix heures, la réunion ne va pas tarder à débuter,
lorsqu’une femme d’une trentaine d’années se présente aux urgences.
— Bonjour madame, je viens aux urgences parce que j’ai fait un malaise ce matin à la maison.
— Vous êtes venue seule madame ?
— Oui, je ne savais pas trop quoi faire, mais je ne me sentais pas capable d’aller travailler.
Elle a une façon très étrange de me dévisager, elle a le visage fin, les traits tirés, elle paraît très
sévère aux premiers abords. Lorsque je lui demande ses papiers d’identité, elle semble se crisper et me
répond sur la défensive :
— J’ai fait un malaise madame, je n’ai pas eu le temps de penser à prendre mes papiers.
— Je comprends, mais avez-vous un quelconque papier ? Un permis de voiture, une carte de sécurité
sociale ?
— Non, je n’ai rien. Donc je ne peux pas me faire soigner ?
— Pas du tout, je vais faire votre admission et nous ferons en sorte de régulariser la situation dès que
cela sera possible. Quel est votre nom ?
— Je suis madame Cadron, ça s’écrit C A D R O N Christelle.
— Avez-vous déjà été hospitalisée chez nous ?
— Non, jamais.
Je prends les renseignements nécessaires pour constituer un dossier, je ne suis pas du tout à l’aise
devant cette patiente qui scrute le moindre de mes faits et gestes. J’ai l’impression d’être évaluée en
permanence. Est-ce que nous nous sommes déjà vus quelque part et que je ne m’en souviendrais pas ? Je
lui indique la salle d’attente et communique le dossier à mes collègues, leur expliquant qu’il va falloir
contacter quelqu’un de sa famille pour avoir des papiers d’identité. Deux minutes plus tard, elle est
installée sur un brancard.
Lorsque Cindy arrive, je lui cède ma place sans tarder et vais rassembler mes affaires pour la
réunion. Alors que je m’apprête à sortir de mon bureau, je me trouve nez à nez avec la fameuse patiente.
Mais que fait-elle ici ?
— Je peux vous aider madame Cadron ? Lui demandé-je intriguée.
— Madame Steunou c’est bien ça ? Vérifie-t-elle.
— Oui, c’est moi.
— Qui êtes-vous ? Quelle fonction occupez-vous ici ?
— Je suis infirmière faisant fonction cadre de l’unité.
— Très bien, conduisez-moi immédiatement auprès de monsieur Simon je vous prie.
— Pardon ?
— Je vous demande de me conduire auprès de monsieur Simon.
— Excusez-moi, de quoi s’agit-il ? Je peux l’appeler si vous le souhaitez madame Cadron.
— Non, je ne vous ai pas demandé de l’appeler mais de m’y conduire. Je ne suis pas madame Cadron
et je pense qu’il s’attend à ma visite, donc allons-y maintenant, je suis relativement pressée.
— Mais il n’est pas dans son bureau, nous avons une réunion prévue ce matin.
— Parfait ! Je vous suis. Ajoute-t-elle de façon très autoritaire en secouant la tête pour remettre ses
cheveux en place.
À présent, je me construis toute sorte de scénario sur la présence de cette femme à l’allure
impeccable et au physique irréprochable. Je la regarde attentivement, elle est blonde aux cheveux lisses
mi- longs, elle a des yeux bleu en forme d’amandes. Alors que je m’interroge sur ce qui pourrait
expliquer le fait que je me sente en danger, l’étrangère me lance froidement :
— Vous n’allez pas tarder à comprendre !
Elle me cloue le bec, elle me fiche carrément la trouille cette bonne femme ! Mince, qu’est-ce qu’elle
me veut ? Je n’ai même pas pu informer Thomas que nous arrivions. Il va se retrouver confronté à elle
devant tout le monde en salle de réunion.
Soudain, mes connexions neuronales se font et je pense saisir la situation qui m’échappe.

Cette Christelle est là pour dénoncer notre relation, je ne sais ni comment ni pourquoi, mais j’ai une
vague idée des conséquences que cela va avoir sur nous. Puis-je l’égarer dans les couloirs ? L’emmener
dans le mauvais endroit ? Elle fait claquer ses talons sur le sol, si bien qu’elle m’empêche de réfléchir
correctement. Est-ce qu’il va me quitter pour conserver son poste ? Évidemment, pourquoi hésiterait-il ?
J’aimerais lui rappeler avant combien nous étions bien ensemble ces quinze derniers jours.
Nous sommes à quelques mètres de la porte de la salle en question, je suis prise de vertige, je ralentis
la cadence, mais madame « Cadron » accélère, rien ne pourra l’arrêter. La pitié, elle ne doit pas
connaitre ! Elle jette un coup d’œil furtif dans ma direction avant de pénétrer dans la pièce. Je regrette,
car je n’ai même pas essayé de la corrompre, j’aurais dû essayer pour lui.
Contrainte de les rejoindre, je rentre dans la salle, quand les regards se portent sur moi
instantanément. Ça suffit de me juger, pensé-je très fort. Je cherche un regard compatissant, mais n’en
trouve pas, ils sont tous accusateurs, les traitres ! Cynthia se lève et se tourne dans ma direction :

Chapitre 69

— Qu’est-ce que vous ne saviez pas ? Demandé-je d’un air innocent en espérant qu’il reste un mince
espoir pour que nous ne soyons pas découverts.
— Que l’inspectrice passait aujourd’hui ! Répond Thomas pour mettre fin à ce suspens insupportable.
— L’inspectrice ? Rétorqué-je égarée.
Celle-ci m’invite à m’asseoir et se présente devant l’assemblée. Elle fait partie d’une cellule de
qualité et intervient sur l’ensemble de la région, elle mène des inspections ponctuellement à la demande
des directeurs d’établissements. Sa mission est d’évaluer les grands critères tels que la sécurité, la
qualité et s’assure que les recommandations de l’HAS sont respectées. Le hasard a fait que je me suis
retrouvée à l’accueil et donc au cœur de l’enquête !
Elle présente les points essentiels de sa démarche et pour finir relate son accueil aux urgences dont
elle dit être satisfaite. Je me décontracte peu à peu.

Vers onze heures, « l’espionne » laisse la place au chef afin de pouvoir débuter la véritable réunion
initialement annoncée. Le thème porte sur les dysfonctionnements rencontrés sur le pôle de médecine-
urgences. Les pages défilent au vidéoprojecteur, Thomas est parfaitement explicite. Il mène la séance
avec une aisance innée, ses déplacements sont calculés, son discours est fluide, les arguments sont
convaincants. Bon, je ne suis certainement pas la plus objective autour de cette table, mais n’est-il pas un
leader parfait ?

L’espace d’une seconde, j’ai le sentiment que Tom est hésitant en regardant vers la porte. Je suis
forcée de tourner la tête et aperçoit Mathieu, ce dernier me fait signe de la main et vient s’asseoir à mes
côtés. Il m’explique rapidement, qu’il est là pour représenter les infirmiers anesthésistes. Quand je
redresse la tête, je constate que Thomas nous examine avec ce qui semble être de la méfiance vu d’ici.
J’esquisse un sourire discret et remarque que les traits de crispation sur son visage disparaissent. Je me
souviens de ce qu’il m’a dit hier soir, il est du genre jaloux. La présence de Mathieu près de moi
l’incommode peut-être.

Alors que Cynthia prend la parole, Tom sort son téléphone de sa poche, pianote dessus un instant.
Lorsqu’il le remet dans sa poche, une vibration contre ma cuisse m’informe que j’ai un message.
Discrètement, je tente de regarder le contenu du message sous la table, c’est lui : Reste concentrée bébé.
Je rédige une réponse : C’est vous qui me déconcentrez en m’appelant bébé, des images me
reviennent…

Il regarde son téléphone désormais posé à plat sur la table, ses joues se teintent d’une couleur rose
délicieuse. Un petit coup d’œil dans ma direction me fait rougir et me donne des palpitations. De nouveau
debout, il reprend la parole sans se laisser troubler par nos échanges.

En sortant de la réunion, Mathieu me propose de m’accompagner au self, j’accepte sachant que Tom
et moi devons éviter de nous montrer ensemble. Kévin, un infirmier de soins de suite avec qui j’ai bossé
de nuit à une époque nous rejoint. Nous évoquons quelques souvenirs ensemble, notamment une nuit où
les patients n’avaient pas lâché la sonnette durant plus de deux minutes, des patins à roulettes nous
auraient été très utiles. Ou encore cette fameuse nuit aux urgences où nous avions été rongés par le stress,
car les cas étaient difficiles et le médecin de garde flippant. Kévin avait dû prendre un somnifère en
quittant le service et moi je m’étais remise en question sur mes capacités à poursuivre dans la profession.

L’équipe des cadres arrive au grand complet, Thomas est avec Sandy une fois de plus. Elle m’énerve
cette fille, malgré ce qu’il m’a dit sur les relations qu’il entretient avec ses collègues. Elle porte des
tenues trop moulantes, c’est une aguicheuse pour moi. Il est évident que Tom ne doit pas être insensible à
son charme.
— Elle est canon madame Kerrien. Indique Kévin en s’adressant à Mathieu.
— Oui faudrait être aveugle pour penser le contraire.
— Aveugle ou gay ! Surenchérit Kévin en s’esclaffant.
Ils ne m’aident pas ces deux-là, maintenant je suis certaine que Thomas la trouve sexy et attirante et je
déteste encore plus cette cadre prétentieuse!
— Eh bien les gars vous êtes en manque ! Leur dis-je pour les interrompre.
— Ne sois pas jalouse Alyssa, tu n’as rien à lui envier. M’affirme Mathieu.
Pourquoi est-ce qu’il me dit ça ? C’est un compliment évident, mais je ne sais pas quoi en faire. Et je
ne suis pas jalouse de cette femme, enfin seulement du temps qu’elle passe avec mon homme au travail.
— Je ne suis pas jalouse Mathieu. Riposté-je embarrassée par sa remarque.
— Je disais comme ça, sans arrière-pensée Alyssa. Pourquoi le serais-tu ?
— De toute façon, elle a le béguin pour le chef depuis toujours, ça crève les yeux. S’il n’était pas
marié, elle jetterait son grappin dessus. Lance Kévin assuré.
— Elle est célibataire, va savoir s’ils n’ont pas déjà…
Je me retiens de les faire taire, j’aimerais leur dire que c’est avec moi que Tom passe ses nuits et
combien elles sont exceptionnelles. Soudain, mon cœur semble sur le point d’exploser quand j’aperçois
la main de mon adoré sur les épaules de cette tentatrice ! Le repas est terminé pour moi, je débarrasse
mon plateau avant de quitter la salle. Mathieu me rattrape dehors.
— Alyssa, est-ce que je t’ai contrarié ? Demande-t-il à bout de souffle.
— Pas du tout, j’avais fini de manger, j’ai préféré vous laisser à vos suppositions perverses.
— On plaisantait !
— Oui, c’était hilarant ! Je te laisse, j’ai un rendez-vous.
C’est décidé, je vais interroger Tom ce soir.
Je passe un coup de fil à ma mère pour savoir si Émilie est bien sortie de l’hôpital comme convenu.
Elle me confirme son retour à la maison, enfin elle ne me cache pas qu’elle va passer quelques jours chez
Hugo. Voilà de quoi m’occuper toute l’après-midi entre Hugo et Émilie, Thomas et Sandy !

Pour me changer les idées, je décide de passer au centre culturel après le travail pour me trouver des
bouquins sur l’école des cadres. Je choisis un livre sur l’art du management. Je profite pour faire
quelques courses dans le magasin. Ce soir, nous mangerons des galettes.
Dix-huit heures trente, je me presse de rentrer, j’ai peur de trouver Tom à la porte vu qu’il a rendu sa
chambre d’hôtel. Non, il n’est pas là. Je lui envoie un message pour lui indiquer que je suis rentrée.
Tom : Je dépose mon fils au judo avant de venir. Tu veux que je rapporte le dîner ?
Moi : Non c’est gentil, j’ai ce qu’il faut.

Chapitre 70

Je suis tirée de ma lecture lorsque quelqu’un frappe à la porte, j’ouvre et découvre un magnifique
bouquet de roses blanches. Tom se presse d’entrer, il n’est pas très à l’aise devant la porte, le fait que
j’habite près de l’hôpital majore le risque d’être vu. Il me tend les fleurs en m’adressant un large sourire.
— Pour toi bébé, parce que tu as eu une journée mouvementée mais aussi pour te féliciter parce que
l’inspectrice était très contente de ton accueil.
— Je te remercie, mais dis-moi, étais-tu au courant de sa visite ?
— Non, enfin je me doutais que ça n’allait plus tarder mais de toute façon, je n’aurais pas pu t’en
parler et puis elle se présente chaque fois dans des services différents sans nous avertir à l’avance.
— Donc sortir avec le chef n’a aucun avantage ?
— Euh, excuse-moi, je suis l’avantage ! Réplique Tom en riant.
Lorsque nous passons à table, je ne résiste plus à le questionner :
— Tom, il faut que je sache quelque chose.
— Une journée sans question, c’est comme journée sans toi.
— Excuse-moi.
— Mais non, j’aime cette facette qui fait de toi ce que tu es.
— Très bien. Depuis quand est-ce que tu connais Sandy ? Demandé-je les mâchoires crispées.
— Je la connais depuis mes débuts à l’hôpital, nous avons débuté nos carrières respectives de cadres
la même année. Qu’est-ce qui t’intéresse réellement Aly ?
— Elle te plaît ?
— Je ne vois pas où tu veux en venir ?
— Réponds-moi, est-ce qu’elle te plaît ? Insisté-je.
— Eh bien, je ne vais pas nier que c’est une belle femme.
Fatalement, il a confirmé qu’elle lui plaisait ! Maintenant, je serai encore plus flippée.
— Pourquoi tu me demandes ça Aly ? M’interroge Tom perplexe.
— Parce que je te vois souvent avec elle, que tu l’apprécies et que tu la trouves belle.
— Aly, je ne m’intéresse absolument pas à Sandy !
— Les collègues disent qu’elle craque pour toi.
— Ce n’est pas nouveau !
— Pardon ?
— Oui, ça fait des années qu’on entend ça tous les deux. Affirme-t-il.
— C’est vrai ?
— Je ne sais pas, il faudrait que je pense à lui demander.
Ma réaction est immédiate, je baisse la tête, lèvres serrées, bras croisés.
— Aly tu boudes ?
— Oui.
— Pourquoi veux-tu que j’aille lui demander alors que je suis avec toi ?
— Et si tu n’étais pas avec moi, est-ce que tu pourrais être avec elle ?
— C’est dingue ce que les femmes peuvent être tordues ! Enfin Aly, en théorie oui avec elle ou avec
quelqu’un d’autre. Est-ce que tu vas encore me bouder pour ça ?
— Je ne suis pas tordue mais réaliste, quand vous vous êtes rencontrés, tu étais marié alors peut-être
qu’aujourd’hui, tu pourrais reconsidérer votre relation.
— Bébé, que les choses soient claires, actuellement je suis bien avec toi et je n’envisage pas d’autres
alternatives. Et pour ton information et sans vouloir te comparer mais pour te rassurer, sache que Sandy
ne t’arrive pas à la cheville !
— Tu es adorable !
Je vais peut-être bien réussir à positiver en toutes circonstances comme le demande mon bouquin
avec Thomas qui passe son temps à me complimenter.
— À mon tour Aly ! Est-ce que Mathieu a des vues sur toi ? Demande-t-il sérieusement.
— Non je ne pense pas. Dis-je ne pouffant de rire.
— Je suis sérieux, je n’aime pas qu’il s’approche de toi avec sa façon de te regarder, il te drague !
— Mais non, c’est un collègue avec qui je m’entends bien, rien de plus.
— Aly, fais-moi confiance, ce mec en pince pour toi !
— Serais-tu jaloux Tom ? Écoute, je lui poserai la question demain.
— Ce n’est pas drôle ! Évite de traîner avec lui devant moi.
— Oh, mais je te dirai bien la même chose concernant Sandy !
— Je vois que nous marquons nos territoires ! Sinon pour en revenir à la réunion, je t’avais demandée
de rester sage.
— Je te promets que je ne t’ai pas reluqué ! Proclamé-je sans détour.
— Ah non, mais le SMS concernant les images de la veille, aurais-tu oublié ?
— Je n’ai fait que te répondre à ce moment-là. Lui dis-je timidement.
— J’ai dû lutter plusieurs minutes contre mon érection grandissante. Je me suis mordu la langue, j’ai
pensé à ma mère, j’ai évité te poser les yeux sur toi pour calmer cette excitation que tu avais provoquée !
J’éclate de rire lorsqu’il m’avoue ses techniques stratégiques de désamorçage de la « bombe ».
— Crois-moi, je ne trouvais pas ça amusant ce matin.
Après le repas, nous regardons un film blottis l’un contre l’autre. Tom passe ses doigts dans mes
cheveux et me masse la nuque, il a des mains en or.
Nous agissons comme un vieux couple sauf qu’il n’y a rien de routinier dans ce que nous faisons.
Au milieu de la nuit, je me réveille en plein cauchemar dans lequel ma sœur vient de s’ouvrir les
veines devant moi avec le long couteau de cuisine et son sang se répand sur le sol à grande vitesse et je
suis incapable d’agir paralysée par l’effroi. J’enroule le bras de Tom autour de moi et me serre contre lui
et garde les yeux ouverts jusqu’à ce que mon rythme cardiaque se normalise.
La journée de mardi se passe sans encombre, en fin d’après-midi, je bois un café avec mes parents.
Maman se lance d’un interrogatoire comme à l’époque du lycée :
— Alyssa, tu vois toujours ton ami Thomas ?
— Oui maman, pourquoi ?
— C’est lui qui est intervenu chez ta sœur ?
— Oui, c’est lui.
— Donc il dort avec toi ?
— Je dormais chez lui cette nuit-là, je lui ai demandé de m’accompagner.
— C’est ton petit copain ?
— On peut dire ça.
— Est-ce que tu veux bien nous le présenter ?
— C’est trop tôt maman. Laissons-nous quelques mois avant d’officialiser.
— Quelques mois, mais nous ne savons rien de lui.
— Nous avons envie de prendre notre temps. Rien ne presse.
— C’est vous qui voyez mais j’espère qu’il est correct avec toi.
— Il est bien plus que correct, ne t’en fais pas.

Je rejoins Tom qui est déjà chez moi vers dix-neuf heures, j’ai bien fait de lui laisser le double des
clés ce matin. Il est en train de préparer un repas surprise et ne veut pas que je l’aide.
Je reprends la lecture de mon livre, la seconde règle porte sur le fait qu’il faut toujours être capable
de porter un regard sur l’avenir. Si j’avais lu cette partie, il y a quinze jours, j’aurais probablement jeté le
livre à la poubelle. Aujourd’hui, j’entrevois des possibilités donc il y a de l’espoir.

Chapitre 71

Pendant la soirée, j’évoque le fait que mes parents souhaiteraient le rencontrer, Thomas lève ses
sourcils interrogateurs mais ne répond rien. Je le rassure immédiatement et lui précise que je leur ai dit
qu'on allait se laisser du temps pour envisager une rencontre. Force est de constater que j’ai cassé
l’ambiance pour la soirée. Il saisit le magazine qui se trouve devant lui et le feuillette. Je débarrasse la
table tout en observant son attitude du coin de l’œil, il ne lit pas du tout ce qu’il a entre les mains, il feinte
d’être occupé. Je me répète de ne pas lui faire de scène, mais je me connais, c’est peine perdue. Je
prends place en face de lui et me racle la gorge pour qu’il daigne lever la tête dans ma direction, lorsque
c’est chose faite, je me lance à coup sûr dans une dispute :
— C’est quoi le problème Thomas ? Lui demandé-je agacée.
— Il n’y a pas de problème Aly, je ne me sens pas prêt à rencontrer tes parents, voilà tout.
— Je sais bien, c’est pour ça que je leur ai dit d’attendre.
— Aly, l’idée de les rencontrer même dans deux mois ne m’enchante pas.
— Qu’est-ce que je dois comprendre ?
— Seulement ce que je te dis. Je ne veux pas qu’on se dispute, mais je me dois d’être franc avec toi.
Rencontrer tes parents pour qu’on me colle l’étiquette de « gendre », non je refuse. Nous nous fréquentons
depuis peu et je ne suis pas divorcé, j’ai des enfants et je n’ai pas envie d’avoir à me justifier auprès
d’eux pour tout ça.

Une part de moi entend ce qu’il dit sur le fait que la situation est trop compliquée mais je n’accepte
pas qu’il refuse catégoriquement l’idée de faire la connaissance de mes parents même dans quelques
mois. Si j’ouvre la bouche, je pourrais le regretter, j’opte pour un regard dénonciateur et monte me
coucher.
Trente minutes plus tard, alors que je n’entends toujours aucun bruit, j’hésite à descendre pour
vérifier qu’il n’est pas parti. Heureusement mon portable m’avertit d’un message de sa part : Puis-je
monter te retrouver Alyssa ?
Moi : Alyssa et pourquoi pas madame steunou ? Oui tu peux monter…
Tom entre dans la chambre, il avance incertain vers le lit, je découvre son côté pour l’y inviter. Il se
glisse sous les draps et me regarde avec compassion.
— Aly, je ne voulais pas te blesser.
— Je ne le suis pas Thomas.
— Pourquoi est-ce que tu m’appelles Thomas alors ?
— Parce que c’est ton prénom et que tu m’as appelée Alyssa juste avant. Rétorqué-je.
Il saisit mon menton du bout des doigts et pose ses lèvres en douceur contre les miennes, je me retiens
de toutes mes forces de ne pas laisser échapper une larme.
— Tu veux qu’on en parle bébé ?
— Tu peux me dire que je ne compte pas pour toi et l’instant d’après m’appeler bébé.
— Aly, quand est-ce que je t’ai dit une chose pareille ? Tu fais des suppositions parce que je t’ai dit
que je n’étais pas enchanté à l’idée de rencontrer tes parents.
— Non, même dans plusieurs mois tu as ajouté…
— Aly, aujourd’hui ça ne m’enchante pas d’en parler, même si on programmait le rendez-vous dans
six mois. J’ai déjà des beaux parents et ils ne savent même pas que je me sépare de leur fille. La situation
actuelle ne me donne pas envie de faire cette démarche simplement. Ça n’a rien à voir avec toi ou avec le
fait que je ne ressente rien pour toi. Est-ce que tu comprends mieux ?
— Je crois, tu ne veux pas trop t’impliquer dans ma vie.
— Pour ça c’est trop tard ! Je dors chez toi et je tiens à toi alors arrête de bouder.
Je finis par baisser ma garde, il a sans doute raison.
Le reste de la semaine passe très vite et nous menons une vie de couple très agréable, Tom a dormi
chez moi tous les soirs.

Samedi matin, alors que je me réveille tranquillement, j’aperçois Tom qui ramasse ses affaires dans
la chambre.
— Tu t’en vas ?
— J’espère que je ne t’ai pas réveillée. Je passe le week-end avec mes enfants Aly, je t’en ai parlé.
— Oui mais j’avais cru comprendre que tu passerais les soirées avec moi.
— J’ai dormi chez toi toute la semaine, tu as besoin de passer du temps avec ta famille et tes amis
aussi. Je ne veux pas que tu coupes du monde juste parce que nous entretenons une relation secrète. Je
prends mon petit-déjeuner avec toi et puis j’y vais.
Pendant qu’il prépare la table, je sors prendre mon courrier, en arrivant à la boîte aux lettres, je me
retrouve devant mes parents.
— Papa, maman, je ne savais pas que vous aviez prévu de venir ce matin. Leur dis-je à voix haute en
espérant que Tom nous entende.
— Nous avions envie de te faire la surprise et nous avons apporté les croissants.
— C’est gentil, il ne fallait pas.
La situation m’échappe, je ne peux pas les laisser dehors, je n’ai aucune raison valable pour le faire.
J’appréhende la réaction de Thomas qui avait été clair début de semaine sur le fait de faire leur
connaissance.
J’ouvre la porte progressivement, il est installé à table face à nous, il repose sa tasse de café,
manquant de s’étrangler. Très embarrassé, il se lève rapidement de sa chaise et me fusille du regard. Ma
mère reste étonnée sur le pas de la porte, alors que mon père se dirige vers lui et lui tend la main.
— Enchanté, je suis Alain, le père d’Alyssa.
— De même, je suis Thomas. Lâche-t-il forcé.
Maman s’avance vers lui hésitante et lui tend la main, Thomas l’embrasse sur la joue.
— Bonjour madame, vous devez-être la mère d’Aly.
— Oui, c’est ça, moi c’est Marie. Ajoute-t-elle confondue alors que Thomas lui a fait la bise.
— On ne veut pas vous déranger tous les deux, nous ne savions pas qu’Alyssa avait de la visite.
Affirme mon père.
— Asseyez-vous, vous allez prendre un café avec nous. Répond Thomas à mes parents, me laissant
estomaquée.
Je m’installe à côté de Tom avec un sourire franc que je ne peux ôter de mon visage. Il agit
naturellement devant eux et demande à mes parents ce qu’ils font de la vie, comme si c’était à lui de
mener son interrogatoire.
— Je suis photographe et Marie tient un salon de coiffure.
Ma mère le dévisage depuis dix minutes, elle me met mal à l’aise, je lui fais de grands yeux pour
qu’elle s’en rende compte.
— Excusez-moi Thomas, j’ai cru comprendre que vous travaillez avec Alyssa, c’est bien ça ?
Interroge ma mère.
— Oui je suis cadre à l’hôpital.
— Vous pourrez aider Alyssa pour ses études.
— J’y compte bien madame.
— Nous avons su que vous étiez présent le soir où Émilie… enfin nous voulions vous remercier
sincèrement.
— Je vous en prie, je n’ai fait que mon devoir.
Mes parents décident de nous laisser après le café. Je les raccompagne à leur voiture.

Chapitre 72

— C’est un très bel homme Alyssa, mais il doit être plus âgé que toi ? Questionne maman.
— Merci maman. Oui il a 36 ans. Tu trouves qu’il fait vieux ?
— Non, mais c’est dans sa façon de parler. Faudra que tu nous en dises un peu plus sur lui la
prochaine qu’on se verra.
— Oui maman !
Je me demande ce que Tom a pensé de cette rencontre inopinée, il doit être chiffonné d’avoir été
forcé. J’entre et le trouve installé dans le canapé, je le rejoins.
— Ça va Tom ?
— Oui, tes parents sont charmants.
— Je suis désolée de cette visite à l’improviste, je ne m’y attendais pas.
— T’inquiète pas, c’était sympa. Au moins, nous n’avons plus à programmer une rencontre.
Je suis soulagée qu’il réagisse comme ça, je l’embrasse tendrement dans le cou, place une main
derrière sa nuque et dépose des baisers jusqu’à son menton. Je passe mon index sur ses lèvres, puis le
taquine avec le bout de ma langue jusqu’à ce qu’il entrouvre la bouche permettant à ma langue de s’y
glisser afin qu’elle caresse la sienne.
Dix heures, Thomas part retrouver ses enfants. Après une heure de ménage, j’envoie un message à
Aurélie : Tu es dispo pour faire les boutiques cet aprem ?
Aurel : Oui avec plaisir, ça tombe bien, julien est au foot. Je te retrouve vers 14h chez toi ?
Moi : Super. Ça marche. Bisou.

Quand Aurélie arrive, nous prenons un café avant d’aller dévaliser les magasins.
— Ça va mieux avec Julien ?
— Oui, d’ailleurs il envisage de me demander en mariage prochainement. Enfin c’est ce qu’il m’a fait
comprendre.
— C’est génial, je suis vraiment trop contente pour vous.
— Merci et toi alors cet homme mystérieux de l’hôpital, tu es décidée à m’en dire un peu plus ?
— Non, il n’y a rien de plus à dire.
— Ne te fous pas de moi Alyssa ! Tu ne donnes presque plus de nouvelles, tu es fuyante à l’hôpital.
Ne va pas me faire croire qu’il n’y a pas un mec là-dessous !
— Mais non, c’est les derniers évènements qui m’ont rendue un peu plus solitaire mais ça va passer.
— Très bien, si c’est le cas, dis-moi le nom du mec en question, sinon je vais t’exposer ma théorie
qui risque fort de te déplaire !
— Mais pourquoi tu t’acharnes, je n’avais pas envie de t’en parler parce qu’il ne se passe rien avec
lui.
— Ok, tu veux jouer avec moi mais tu vas perdre à ce jeu Alyssa, je te connais trop bien. Je t’ai
laissée la semaine pour m’en parler mais visiblement tu ne le feras pas.
Elle a l’air décidée et convaincue de ce qu’elle avance, elle me fait peur.
— Dimanche dernier, je t’ai trouvée drôlement troublée lorsque nous sommes tombées sur monsieur
Simon. Y avait-il une raison ?
Et merde, merde, je regrette de l’avoir contactée aujourd’hui.
— Pas du tout, tu délires ma pauvre !
— Oh non, je sais très bien ce que j’ai vu, il m’a semblée qu’Emma avait l’air aussi étonnée que moi.
Pour ne pas majorer ton embarras, je n’ai rien dit mais sois honnête maintenant. Avoue que c’est lui
l’homme qui te plaît !
— D’accord, je ne vais pas te mentir Aurélie. Tu as deviné, tu es satisfaite ?
— Non, je veux en savoir plus. Est-ce que tu lui as dit quelque chose parce qu’il paraissait gêné
aussi ?
— Non, jamais de la vie ! Il est marié, je ne veux pas qu’il soit au courant de ça !
— Ok. Mais qui aurait cru qu’Alyssa tomberait sous le charme du chef ?
— Allez on passe à autre chose !
— Oui il faut qu’on te trouve un homme plus abordable ! J’en fais mon affaire. M’assure-t-elle.
— Non, je te préviens, je ne veux pas que tu t’emmêles ! Pas d’homme pour le moment, ça me
convient parfaitement.

Elle semble avoir été satisfaite de ma réponse, elle pense Thomas inaccessible, si elle savait à quel
point il est facile d’accès pour moi. Nous faisons le tour des boutiques du centre-ville, je dépense une
somme faramineuse dans la lingerie et les chaussures. Je n’ai aucune limite car je ne dois rendre de
compte à personne. Aurélie se contente d’acheter une robe et des ballerines.
Nous nous accordons une pause vers dix-sept heures dans un café, histoire de soulager mes pieds, je
ne mettrai plus jamais de talons aussi hauts pour piétiner des heures dans les rues pavées du centre.
Discrètement, j’envoie un message à Tom : As-tu décidé pour ce soir ?
Tom : Ca dépend de tes invités pour le petit-déj.
Moi : Je fermerai à double tours…
Tom : Dans ce cas, je te rejoins vers 21h, j’ai promis mac do aux enfants.
Moi : Super, vivement ce soir.
Opération machine à laver quand je rentre, je dois porter un de mes nouveaux ensembles pour lui. Je
dispose quelques bougies dans la chambre, je télécharge des musiques à mettre tout à l’heure.
Je suis interrompue par la sonnette, je me presse d’aller ouvrir, ce n’est pas mon homme, il n’est que
dix-neuf heures. C’est Émilie qui se trouve devant ma porte, mon cœur a des ratés.
— Salut Émilie. Bégayé-je.
— Salut Alyssa, est-ce que je peux entrer ? Me demande-t-elle à voix basse.
— Oui, je t’en prie. Tout va bien ?
— Ça va, je voulais voir si tu étais bien installée et je voulais prendre un moment pour parler avec
toi, j’espère que ça ne t’embête pas.
— Ok, non tu as bien fait. Mais où es ta voiture ?
— Hugo m’a déposée. Lâche-t-elle sans ménagement.

Cette question, j’aurais dû la garder pour moi. Donc, elle dort toujours chez mon ex-fiancé ! J’ai la
nausée de savoir qu’elle partage son domicile. La boule au ventre, je lui fais visiter la maison et puis
nous prenons un verre à la cuisine. J’essaie de cacher mon amertume.

— Alyssa, est-ce que tu penses que j’ai détruit notre relation ? Me demande ma sœur au bord des
larmes.
— Non, c’est derrière nous, je commence à m’y faire, ne parlons plus de ça.
— Mais tu ne pardonneras pas à Hugo ?
— C’est pour lui que tu es là ? Est-ce qu’il t’envoie me convaincre ?
— Je peux t’assurer que ce n’est pas le cas.
— D’accord, je refuse de lui pardonner, il aurait dû m’en parler il y a bien longtemps. Peu importe
les raisons qui l’ont poussé à se taire.
— Alyssa, lorsque tu m’as accordé ton pardon, tu as précisé que tu ne voulais plus de secret entre
nous, alors je vais tout te dire, au risque de m’enfoncer un peu plus.
— Vous m’avez caché d’autres choses Émilie ? Lui demandé-je angoissée.

Chapitre 73

— Non pas vraiment, comment dire, je voudrais être sûre que tu ne retourneras jamais avec lui !
— Pourquoi ? Demandé-je alors que j’ai ma petite idée sur la réponse.
— Parce qu’il s’est occupé de moi pendant une semaine entière alors que j’avais le moral au plus bas
et qu’il l’avait déjà fait après ma fausse couche. Je suis désolée, je n’imagine pas à quel point ce doit être
dur à entendre pour toi. Mais si je veux être sincère, il faut que je te dise que j’ai des sentiments pour lui.
— C’était déjà le cas y a deux ans ? Rétorqué-je sans pouvoir me retenir.
Ça fait mal mais je m’y attendais, depuis le jour où j’ai su qu’ils avaient couché ensemble, je me suis
préparée à l’éventualité d’une relation entre eux.
— Je te jure que non Alyssa, je n’ai jamais pensé à lui de cette façon quand vous étiez ensemble !
— Et lui ?
— Je ne sais pas, j’imagine que non, puisqu’il veut te reconquérir. Mais si je suis sûre que tout est
terminé entre vous et que tu es d’accord avec ça, alors je lui parlerai de mes sentiments.
— Est-ce que j’ai vraiment mon mot à dire dans cette histoire ? Vous avez déjà partagé tant de choses.
— J’ai conscience que c’est soudain pour toi, tu n’as qu’un seul mot à dire pour que je ne lui parle
jamais de ce que je ressens et je le respecterai. Je ne veux pas te causer d’autres souffrances.
— Il ne m’appartient plus, je n’ai pas le droit de m’opposer à un rapprochement entre vous, mais ne
t’attends pas à ce que je me réjouisse pour vous avant longtemps voire même jamais…
— J’ai les boules quand je vois qu’un putain de dérapage de ma part a bousillé votre couple et t’a
conduit à emménager seule ici. Dit-elle la gorge nouée.
— Je vais rebondir ! Mais tu ne t’approcheras pas de mon prochain fiancé ! Lui dis-je pour détendre
l’atmosphère.
— Merde Alyssa, j’ai tellement déconné. J’ai toujours pensé que tu étais plus fragile que moi mais je
me rends compte aujourd’hui que tu es bien plus forte. Je ne suis pas certaine que j’aurais été capable de
pardonner comme toi.
Je décide de raccompagner ma sœur chez Hugo, je m’arrête au bout de l’allée, j’aperçois Hugo sortir
de la maison. Je fais rapidement demi-tour et m’éloigne en les fixant dans le rétroviseur. Cette vision
d’eux deux est insupportable, mon cœur voudrait sortir de ma poitrine, il hurle sa peine. Les larmes
roulent sur mes joues en silence, mes mains crispées sur le volant, je m’efforce de rentrer chez moi.

Pourquoi me fait-il autant souffrir ? Je ne souhaite plus l’aimer, je l’ai quitté il y a trois semaines
mais tant de choses me rattachent encore à lui. La douleur présente s’amplifie lorsque je pense à eux.
Est-ce que je vais avoir le droit au bonheur ? Est-ce que Thomas va quitter sa femme pour moi ? S’il
ne le fait pas, s’il reste avec elle et qu’il m’abandonne, je n’aurais pas la force de tout reconstruire… Je
ne ferai pas comme Émilie, non, moi je ne me louperai pas ! Je n’en reviens d’avoir des pensées
suicidaires, ça ne me ressemble pas ! On ne peut pas vouloir mourir à cause d’un homme…

Je me jette sur mon lit toute habillée et fonds en larmes, la réserve semble ne pas pouvoir se tarir.
Une demie heure plus tard environ, je me lève et ferme mes volets, je passe à la salle de bain et me glisse
sous les draps. Dans un dernier effort, je parviens à rédiger un message à Tom vers vingt heures trente :
Ne viens pas ce soir. Excuse-moi, je voudrais rester seule. Alyssa.

Je souhaiterais m’endormir sur le champ, mais c’est impossible, mon esprit lutte contre les images
qui défilent… Hugo et moi faisons l’amour le lendemain de sa tromperie… ses mains sur moi alors qu’il
les avait posées sur ma sœur quelques heures auparavant. Hugo me répétant qu’il n’était pas prêt pour
avoir des enfants alors qu’il avait mis ma sœur enceinte ! Quel salaud.
Pour m’apaiser, j’essaie de penser à Thomas, mais je sais qu’il est avec ses enfants et donc avec sa
femme ! Est-ce qu’il l’a déjà touchée ou embrassée depuis que nous sommes ensemble ? J’enfouis ma tête
dans mon oreiller, me recroqueville sur moi-même et me laisse bercer par mes battements cardiaques qui
résonnent en moi.
Je sursaute lorsque je sens une main se poser sur mon épaule, je me redresse effrayée dans un
mouvement rapide. Thomas se trouve penché au-dessus de mon lit.
— Tu m’as fait peur Thomas ! Dis-je affolée.
— J’ai vu ça.
Tom allume la lampe de chevet.
— Qu’est-ce qui t’arrive bébé ?
— J’étais fatiguée, je me suis couchée, je t’ai envoyé un message tout à l’heure.
— J’ai vu ton SMS et je t’ai répondu.
— Je n’ai pas fait attention.
— Il s’est passé quelque chose aujourd’hui ?
— Tom, je suis épuisée, j’ai juste envie de dormir s’il te plaît.
— Je ne pars pas tant que je ne sais pas ce qui ne va pas. Tu as deux possibilités, tu me parles
maintenant ou bien je m’allonge à tes côtés et j’attendrai que tu sois prête.
— Tu es tenace, tu peux rester si tu veux.
— Oui, quand il s’agit de toi, je suis obstiné.
Tom se déshabille et s’installe à côté de moi.
— Est-ce que j’ai le droit de te prendre dans mes bras bébé ? Chuchote-t-il prêt de mon oreille.
Je me place contre son torse frais, ses bras m’enlacent, je le remercie.
— J’aimerais savoir qui t’a chagrinée ce soir au point de ne plus vouloir passer la soirée avec moi,
alors que tu en avais très envie. Est-ce qu’il s’agit de ton ex ?
— Oui. Soupiré-je.
— J’en étais sûr. Est-ce que tu l’as vu aujourd’hui ? Interroge-t-il sévèrement.
— Je l’ai aperçu seulement devant chez lui.
— Qu’est-ce que tu faisais là-bas Aly ? Il te manque ?
Il prend une voix grave, je me tourne face à lui, je dois le rassurer, ce n’est pas ce qu’il croit.
— J’ai raccompagné ma sœur chez lui, c’est uniquement pour ça que j’y suis allée. Elle est venue ce
soir et m’a demandé si…
Les mots se coincent dans ma gorge, ma voix est plus étouffée, je marque une pause.
— Si j’étais d’accord qu’elle dévoile ses sentiments à Hugo.
Thomas reste sidéré. Il me caresse la joue du revers de la main.
— Ma pauvre, je comprends que tu sois bouleversée. Qu’est-ce que tu lui as dit ?
— J’ai répondu que je n’avais pas mon mot à dire. En rentrant, j’étais un peu remuée et j’ai
commencé à ressasser et puis le torrent de larmes a fait son apparition et c’est là que je t’ai écrit pour ne
pas t’imposer la scène désastreuse.
— Aly, je suis humain et je peux concevoir que tu le pleures encore mais ça ne doit pas nous éloigner.
— Je ne me vois pas pleurer mon ex dans tes bras !
— Ça ne durera pas, en revanche si dans quelques mois c’est toujours le cas, je m’inquiéterai.
— Je ne tiendrai pas si longtemps dans cet état-là et puis tu ne seras probablement pas là pour voir
ça.
— Comment ça ? Relève Tom.
— Je m’interroge sur nous, ta situation n’est pas simple et je me demande si tu ne vas pas
m’abandonner tel un fardeau qui t’empêche de te réconcilier avec ta femme.
Les mots sont sortis de ma bouche sans que j’y réfléchisse et j’ignore comment il va réagir.

Chapitre 74

— Putain Aly, comment peux-tu penser être un fardeau pour moi. Je sais qu’on ne se connait intiment
que depuis peu, mais ne t’ai-je pas suffisamment démontré que tu pouvais me faire confiance ? Merde, je
m’emporte, mais je suis sincère depuis le départ et je prends des risques en venant chez toi. Je ne peux
absolument pas garantir un avenir avec toi, ni le fait que mon divorce va se régler rapidement, mais il y a
une chose dont je suis certain c’est que je tiens à toi et je ne veux pas te faire de mal ! Qu’est-ce que je
dois faire de plus ?
Ses mots raisonnent en moi, j’ai honte de lui avoir avoué mes craintes.
— Excuse-moi, mais j’appréhende que tu te réconcilies avec ta femme, j’ai peur de le découvrir par
la suite et d’être trop impliquée dans notre relation…
— Aly, je ne suis pas ton EX, tu m’entends ! Je ne ferai rien dans ton dos et si quelque chose devait
se produire, je t’en parlerai. !
— J’espère que tu n’auras pas besoin de me parler alors.
— Bébé, on est bien tous les deux alors cesse de te poser dix milles questions ! Ajoute-t-il en me
serrant contre lui.
— Je vais essayer, mais c’est facile pour toi, tu n’as pas été trompé par ta femme avec ton frère !
— Qu’est-ce que tu en sais Aly ? Lâche Tom froidement en se levant brusquement du lit et avant que
j’aie le temps de dire quoique ce soit, il quitte la chambre.
Aïe ! J’ai mis les deux pieds dans le plat, c’est ça ? Sa femme l’a trompé avec son frère ? Je ne
savais même pas qu’il avait un frère. Pourquoi est-ce qu’il ne m’en a jamais parlé ? Alors que je me
décide à le rejoindre, il réapparaît devant moi. Il ne semble pas fâché, mais je lis de la tristesse et de
l’impuissance dans ses yeux noisette qui me considèrent.
— Tom, je suis désolée
— Tu ne pouvais pas savoir Aly.
— Mais pourquoi tu ne m’as rien dit ?
— Parce que tu étais très tourmentée, ça n’aurait rien changé de toute façon et je n’aime pas m’étaler
sur ma vie.

— Toi tu peux me consoler et moi non ? Est-ce que tu vois toujours ton frère ?
— Je n’ai pas de frère Aly. Ajoute Tom penaud.
— Mais je croyais que…
— Pas avec mon frère ! M’interrompt-il. Je les ai surpris en plein ébats sexuels, elle et son associé,
qui était aussi mon ami. Elle m’a dit que ce n’était arrivé qu’une seule fois, il a fallu que je tombe dessus
comme par hasard ! J’ai beaucoup de mal à la croire.
Je reste interdite, ne sachant que répondre à ses révélations. Son doux visage est profondément
marqué par l’émotion. J’essuie une larme qui perle au coin de son œil et enfouis ma tête dans son cou, il
m’enserre par la taille.
Alors que je suis sur le point de m’endormir, je m’assure que Tom est déjà dans un profond sommeil
« Tu m’entends ? », il ne répond pas alors j’en profite pour lui glisser à nouveau « je t’aime ».
Je peux à présent fermer les yeux sereinement, mon homme est près de moi, sa main repose sur ma
poitrine. Je me souviens de la première fois qu’il m’a vraiment touchée, c’était à l’internat et ce n’était
pas volontaire de sa part, j’en frissonne encore aujourd’hui. Je suis parfaitement détendue jusqu’à ce que
sa voix provienne à mes oreilles « Moi aussi bébé ».
Il m’a entendue ! Il m’a répondu « moi aussi bébé ».

Mon pouls s’accélère, mon cœur cogne très fort contre ma poitrine, une brûlure intense et agréable me
traverse le corps, je peux sentir les papillons prendre leurs envols un à un. Je sais enfin ce que signifie
l’expression avoir des étoiles plein les yeux. J’ai la sensation que mes récepteurs sensitifs sont décuplés
lorsqu’il effleure mon bras, je n’ai jamais rien connu d’aussi fort que maintenant. Oh mon dieu, je l’aime !
Je me retourne face à lui, malgré la pénombre, je trouve immédiatement sa bouche, l’embrassant
comme s’il n’y avait pas de lendemain. L’attraction physique qui existe entre nous est intense, son corps
irrésistible est un puissant aimant qui m’attire constamment. Je ne pourrais jamais être rassasiée de lui.

— Fais-moi l’amour Tom. L’imploré-je en ébullition.


— J’en ai l’intention bébé, mais laisse-moi d’abord te couvrir de baisers, je veux goûter chaque
parcelle de ta peau. Je veux t’offrir une nuit dont tu souviendras à jamais…
Sur ces mots, il débute l’exploration de mon anatomie, ses caresses sont douces et précises, ses
lèvres sont chaudes et délicates, sa langue est curieuse et gourmande, mon corps ondule et s’enflamme
sous ses gestes. Je le supplie de mettre fin à cette torture délicieuse, il accède enfin à ma requête pour
notre plus grand plaisir. Il m’emmène dans des endroits inconnus, sans doute suis-je sur une autre planète
et je ne voudrais jamais revenir sur la Terre.
Quand Thomas s’allonge à mes côtés, il lâche un long soupir de soulagement tout en prononçant les
mots magiques « je t’aime Aly ». C’est encore plus doux que je l’aurais imaginé, c’est mille fois mieux
que « moi aussi ». Je me love dans ses bras pour le restant de ce qui est la plus belle nuit de ma vie.

Dimanche matin, c’est avec surprise que je découvre que Tom nous a préparé un petit-déjeuner au lit,
il a même été à la boulangerie. Cet homme est trop parfait, je dois rêver ! Nous sommes plus timides
qu’habituellement, sans doute que l’aveu de nos sentiments y est pour quelque chose. Je suis plus
maladroite lorsque je m’approche de lui, je me surprends même à bégayer. Nous rions de notre embarras
sans oser en évoquer la cause.
Dix heures, il est l’heure de se séparer, c’est difficile de devoir le partager. Il dépose un bisou sur
mon front.
— À ce soir ma belle, ne fais pas de bêtises en mon absence et je veux te retrouver avec le sourire !
— Ça devait aller, sois bien sage toi aussi.
Je le regarde se diriger vers sa voiture, j’ai le sourire aux lèvres, je suis sereine, il m’aime, il me l’a
dit et je le crois.
Et voilà comme nous avons passé le cap des trois semaines de relation, nous nous sommes dits je
t’aime et nous avons faits l’amour comme si c’était la première et la dernière fois que nous le pouvions.
Personne ne pourra m’ôter ça, ni ma sœur, ni Hugo…
Le bonheur semble avoir fait son grand retour dans ma vie.

Chapitre 75

Après plus deux heures au téléphone avec Emma, tous les détails de nos semaines respectives y sont
passés. Je retrouve mes parents où je passe la majorité de la journée. Ils ont compris que je ne souhaitais
pas d’interrogatoire et le respectent. J’ai entendu mon père sermonner ma mère à la cuisine, il lui a dit
« ta fille est heureuse c’est tout ce qui compte ».
Lorsque Tom me rejoint dans la soirée, nous agissons comme deux ados qui se retrouvent à la sortie
du lycée. Ça se traduit par des embrassades interminables alors que nous sommes affalés dans mon
canapé. J’ai l’impression d’avoir de nouveau dix-huit ans, à cet instant, plus rien n’a d’importance.
Lundi matin, il faut reprendre nos distances pour la journée, qu’importe nous rattraperons tout le
temps perdu lorsque nous nous retrouverons après le travail. Je suis de plus en plus à l’aise dans mes
fonctions et j’adore occuper ce poste à présent. Je n’ai plus de doutes sur mes capacités à exercer en tant
que cadre, c’est très enrichissant sur le plan relationnel. J’ai tout de même un léger pincement à l’idée
d’abandonner mon métier d’infirmière qui m’a tant apporté humainement et émotionnellement.
Durant ces sept années, j’ai appris continuellement sur les pathologies, les traitements, les avancées
médicales, les accompagnements de fin de vie. Il m’est impossible de faire une liste exhaustive, je
regretterai la relation soignant/soigné, l’échange avec les collègues après les coups durs. J’espère que je
pourrai rester au contact des patients et de leurs familles, je ferai tout en ce sens.
Après avoir un dressé ce bilan, je suis encore plus motivée à m’impliquer auprès de l’équipe. Cette
semaine, j’irai m’acheter des nouveaux livres et je vais même souscrire à un abonnement avec la revue
cadre de santé.
Quand le week-end arrive, je réalise que la semaine est passée trop vite. Je l’aborde différemment
cette fois-ci parce que Tom m’a prévenue qu’il dormirait chez lui pour passer plus de temps auprès de
ses enfants. Pour ne pas cogiter pendant son absence, j’ai été invitée chez Emma à Nantes, ce qui me
réjouit.

Samedi, j’ai reçu un message de mon cher et tendre mais le dimanche aucune nouvelle, pour une fois
je ne me suis pas torturée avec mes questionnements incessants.

Lundi 3 mai à dix heures, la secrétaire du directeur demande à me parler, je prends la communication
dans mon bureau, cette dernière m’apprend que nous sommes plusieurs à demander un financement pour
l’école des cadres, nous convenons d’un rendez-vous pour le mercredi cinq mai, pour un entretien avec la
direction. Elle ne me précise pas combien nous sommes, mais si je ne suis pas retenue, j’ai l’intention de
demander une dispo et de faire un crédit, reste à savoir comment je tiendrai l’année sans salaire.
Midi, mon portable sonne, c’est Thomas.
— Oui ?
— Bonjour Aly, c’est Tom. Tu veux qu’on aille mange un morceau à l’extérieur ?
— Euh oui, pourquoi pas.
— On se retrouve sur le parking derrière l’hôpital dans cinq minutes ?
— Très bien, à tout de suite.
Je passe les portes automatiques, il m’attend garé devant, je m’empresse de monter dans sa voiture.
— Salut Tom. Où allons-nous ?
— Une crêperie à l’entrée de la ville, ça te dit ?
— Évidemment c’est mieux que le self. Tu m’as manqué. Lui dis-je en posant ma main sur la sienne
lorsqu’il passe les vitesses.
Il ébauche un sourire avant de poser furtivement sa main sur ma cuisse.
Nous commandons nos galettes et sommes servis rapidement malgré l’affluence dans le restaurant.
Lorsque nous arrivons au dessert, je sens que quelque chose ne va pas. Bizarrement nous n’avons pas
évoqué notre week-end, nous n’avons parlé que du travail, ce que nous faisons très rarement. Je me
demande pourquoi il m’a invitée à manger s’il n’avait rien à me dire.
Il m’ouvre la portière de sa voiture, je m’installe et sans plus attendre, je lui demande :
— Tout va bien ?
— Oui très bien.
— Dans ce cas, pourquoi est-ce que tu ne m’as pas embrassée ? M’inquiété-je.
— Aly, nous n’avons pas vraiment eu l’occasion et c’était risqué au restaurant.
— Et ici, est-ce que ça l’est ? Insisté-je.
— Moins. Viens-là, je vais rectifier la situation.
Ses lèvres caressent les miennes avec délicatesse mais ne restent qu’un court instant, provoquant en
moi sentiment de frustration.
— Aly, il faut que je t’avoue que ce week-end a été très compliqué avec ma femme, elle est dans une
colère noire et je ne serai pas étonné qu’elle surveille mes déplacements. Les enfants nous ont donné du
fil à retordre. Ce soir, je vais dormir chez moi.
— Ah je vois. C’est pour ça que tu es distant ?
— On m’a fait remarquer que j’étais moins présent au travail, j’avais l’habitude passer régulièrement
assez tardivement, je vais devoir m’impliquer davantage si on ne veut pas éveiller de soupçons. Et
d’autre part, je serai en déplacement professionnel à Rennes demain et ne rentrerai que mercredi après-
midi.
— Mince, tu vas avoir des soucis ?
— Non, mais je dois reprendre les choses en main.
— Donc on ne se voit plus d’ici mercredi soir ?
— C’est ça. Je n’avais pas le courage de te l’annoncer après mon absence ces derniers jours.
— T’inquiète pas, je comprends. La priorité c’est tes enfants et ton boulot.

Nous regagnons l’hôpital et partons chacun de notre côté. J’ai pris un coup de masse sur la tête quand
il m’a dit que ça avait été compliqué avec sa femme. Qu’est-ce que cela signifie ? Est-ce qu’elle va
réussir à l’éloigner de moi ? Je sentais bien qu’il se passait quelque chose. Cela fait une semaine que
nous nous sommes dits « je t’aime », une semaine que j’étais sur un petit nuage et que j’avais retiré mes
protections. C’était trop beau pour être vrai !
Je ne baisse pas les bras, il sera de retour mercredi et nous pourrons nous rapprocher. Quel culot elle
a sa femme quand j’y pense Elle le trompe, se fait surprendre et elle ose lui faire une crise alors qu’ils
sont séparés parce qu’il fréquente une autre femme.

Ce soir, je gamberge de nouveau, il est chez lui, je me demande où il dort, j’espère qu’il est loin
d’elle, qu’il pense à moi, que je lui manque. Mon lit est froid sans lui, il me rappelle les instants de
bonheur que nous avons eu ces dernières semaines.
La journée de mardi est moralement plus difficile, aucun message avant son départ, je décide de ne
pas lui envoyer non plus. Je passe la soirée avec Aurélie et Manu, ce qui me permet de ne pas rester
focaliser sur son absence.

Enfin mercredi trois mai, journée des retrouvailles pour nous. Il ne m’a toujours pas envoyé de
messages. J’attends qu’il se manifeste, je désespère tout au long de la journée. Quinze heures l’heure de
mon rendez-vous avec le directeur approche, le stress s’empare de moi. Je me suis apprêtée pour
l’occasion, j’ai préparé mes objectifs toute la nuit.

Lorsque la secrétaire m’appelle, je me lève et lisse ma jupe avant de pénétrer dans le bureau et reste
abasourdie en découvrant Thomas assis aux côtés du directeur. C’est impossible de passer un entretien
dans ces conditions sans y avoir été préparée…

Chapitre 76

Alors que je perds tous mes moyens, monsieur Guillemin m’invite à m’asseoir. Je suis face à eux, si
je regarde Thomas dans les yeux, je vais craquer. Comment a-t-il pu me cacher qu’il me ferait passer
l’entretien ? Je ne savais même pas qu’il était revenu de Rennes.
— Mademoiselle Steunou, vous avez été reçue à l’école des cadres pour la rentrée prochaine,
félicitations à vous. Vous êtes quatre à avoir passé brillamment les épreuves, mais nous n’accordons que
deux financements, c’est pourquoi vous êtes là aujourd’hui. Présentez-vous brièvement je vous prie.
— Merci monsieur le directeur. Dis-je en cachant mes mains tremblantes sous le bureau. J’entortille
mes doigts dans tous les sens et réfléchis par où commencer. Je détaille rapidement les différents postes
que j’ai pu occuper jusqu’à présent.
— Comment envisagez-vous l’année de formation ? Quels moyens de transports prévoyez-vous ?
Quels seront vos priorités ? Reprend monsieur Guillemin.
— J’ai l’intention de m’y rendre en train chaque jour, l’accès est direct avec le métro et je pourrai
profiter du trajet pour travailler. Ma priorité c’est de tout donner pour valider le diplôme naturellement.
— Comment votre compagnon soutient-il votre projet ? Ne sera-t-il pas un frein dans la reprise de
vos études ? M’interroge-t-il froidement.
Devrais-je lui dire que mon compagnon se trouve assis à ses côtés, il pourrait lui demander ce qu’il
en pense… De toute manière tout l’hôpital sait que je ne suis plus avec Hugo.
— Je suis célibataire sans enfants et ma famille m’encourage vraiment, il n’y a aucun obstacle à mon
projet. Dis-je en essayant de ne pas penser à Tom.
— Monsieur Simon a pu vous observer et vous guider dans la prise de vos récentes fonctions, il
paraîtrait que vous vous montrez à la hauteur et que vous avez fait preuve de discernement. N’est-ce pas ?
Ajoute-t-il en s’adressant à Thomas.
— En effet, mademoiselle Steunou s’est très bien adaptée et a su d’emblée se faire respecter de ses
collègues. D’après toi Alyssa, qu’est-ce qui fait que nous devrions te choisir plus qu’un autre candidat ?
Demande-t-il posément en me dévisageant.

Il s’adresse à moi, je vais être obligée de le regarder pour lui répondre, je n’explique pas pourquoi
mais cette situation m’humilie. Je me sens rabaissée d’avoir à me justifier devant mon « petit ami » secret
en présence du directeur. Une partie de moi refuse de le faire, jouer à ce petit jeu ne m’amuse guère.
— Contrairement à ce que vous pensez, je ne vais pas chercher à me vendre devant vous pour être
choisie, si vous trouvez que je conviens à ce poste, vous ferez votre choix en conséquence. Ce que je
peux vous dire, c’est que si je ne suis pas retenue, je me débrouillerai pour payer cette formation
onéreuse. Je serai obligée de prendre un studio à Rennes pour diminuer mes charges, ce qui nécessitera
obligatoirement une mise en disponibilité ou une démission de ma part sur l’hôpital. Affirmé-je.

Tom est déconcerté, va-t-il encore oser me cuisiner ?


— Eh bien, c’est une première lors d’un entretien, vous ne manquez pas d’audace madame Steunou !
Réplique monsieur Guillemin étonné par ma réponse.

J’avoue être moi-même très surprise de ma réaction, mais Tom m’a provoquée.
— Du tempérament mademoiselle Steunou ? Reprend le directeur.
— Disons qu’après quelques coups bas dans la vie, on apprend à ne plus faire se faire marcher sur
les pieds.
— Elle a du caractère Thomas, vous ne trouvez pas ?
— C’est exactement ce que je me disais. Ajoute-t-il les traits plissés.

La fin de l’entretien arrive, je me retire en les remerciant. Finalement, je suis parvenue à m’exprimer
sans bégayer mais certainement pas de la même façon que je l’envisageais.
Dix-sept heures, je quitte le bureau, ma contrariété est encore plus grande car il ne m’a pas contactée
à la suite de cet entretien. Qu’est-ce qu’il va prétexter ? Qu’il ne voulait pas faire de différence avec mes
collègues ? Ah non, pas ce genre de conneries ! Il est capable de me sortir qu’il avait prévu de m’appeler
mais que sa chère Sandy a débarqué…

Dix-huit heures trente, mon portable clignote, enfin un message de lui : Aly, puis-je passer ?

Seulement ces quatre mots, pas de bébé ni de mots doux…


Moi : Avant de rentrer chez toi ?


S’il a l’intention de passer la nuit chez lui, je refuse de le voir. Je ne suis pas qu’un passe-temps !
Tom : Je ne sais pas encore.
Moi : Dans ce cas, moi non plus.
Tom : ?
Moi : Dis-moi quand tu sauras.
Tom : Ça changera ta réponse ?
Moi : Tout à fait.
Tom : Étant disponible toute la soirée, puis-je passer maintenant ?
Moi : Oui.

La situation est tendue, je sens qu’il m’échappe et je ne peux rien faire pour le retenir, je ne peux
qu’essayer de me préserver pour limiter la casse. Pourtant il y a une semaine, nous étions en plein
bonheur, que s’est-il passé ? J’ai la ferme intention de le découvrir.
Quelques minutes plus tard, sa belle voiture est devant chez moi, je remarque qu’il s’est changé donc
il a dû passer chez lui, ça m’énerve !

J’attends une minute pour lui ouvrir, je sais qu’il n’aime pas traîner devant ma porte mais moi je
n’aime pas ne pas avoir de nouvelles…

— Salut. Lance-t-il naturellement.


— Salut, quoi de neuf ? L’imité-je.
— C’est à ce point Aly ?
— Peut-être bien, ça dépend de toi et des raisons qui expliquent l’absence de nouvelles et le manque
d’informations concernant notre entretien du jour.
— On prend un verre pour en parler ? Demande-t-il.
— Je n’ai pas soif, tu veux boire quelque chose ?
— Non, pas si tu ne prends rien.
— Je suis agacée de devoir sans cesse attendre que tu m’expliques pourquoi tu ne me donnes pas de
nouvelles. Si tu as des doutes, ne viens plus me voir !
— Putain Aly, tout est toujours blanc ou noir avec toi ! Accepte les nuances pour une fois.
— Non, c’est à moi de décider ce qui est bon pour moi.
— Très bien, dis-moi ce que tu as sur le cœur ! Dit-il en haussant le ton.
— Il y a une semaine encore nous étions très proches, tu m’as dit que tu m’aimais et depuis silence
radio. C’est à peine si nous nous sommes embrassés lundi midi alors que nous étions seuls dans ta
voiture. Tu étais en déplacement et tu n’as pas trouvé une minute pour m’envoyer un petit message et là je
découvre que tu me fais passer mon entretien devant le fait accompli, tu n’as pas pensé que j’allais être
déstabilisée ?

Chapitre 77

Il reste là figé devant moi, les deux mains enfoncées profondément dans les poches de son jean.
L’incompréhension se lit sur son visage, ses yeux plongés dans les miens, il attend. J’observe un
mouvement répété de son pied droit sur le sol, est-ce de l’impatience ?
— Tu n’as rien à répondre Tom ?
— Non. Lâche-t-il uniquement.
C’est quoi ce délire ? Il n’a rien à me dire ? Je vais l’étrangler s’il ne parle pas sur le champ !
J’essaie de rester calme mais il me rend complètement dingue à ne pas réagir.
— Non, tu n’as rien à me dire. Ok, pourquoi es-tu venu alors ?
— Je ne m’attendais pas à cet accueil.
— C’est un reproche ?
— Une constatation Aly. Je ferai peut-être mieux d’y aller, tu as raison.
— Je ne te retiens pas, prends la fuite si c’est ce que tu veux mais je te préviens si tu passes cette
porte, ne reviens jamais !
— Et merde, tu ne me laisse pas le choix ! Tu veux qu’on se dispute ? Allons-y ! Tu as essayé de me
faire passer un message pendant l’entretien au sujet des coups bas ? Demande-t-il sévèrement.
— Pourquoi tu t’es senti visé ?
— J’essaie de te comprendre Aly, mais je n’y arrive pas. Je ne connais pas ce mode de
fonctionnement, tu remets tout en cause continuellement. Peu importe ce que je fais ou ce que je dis, ce
n’est jamais suffisant pour te convaincre d’avoir confiance. Alors pourquoi est-ce que je devrais encore
essayer ce soir ?
— Peut-être parce que tu m’as dit que tu m’aimais et que tu ne voulais pas me faire souffrir.
— Oui je te l’ai dit Aly et je le pensais mais ça n’a pas suffi à te rassurer.
— Pourquoi est-ce que tu as mis de la distance entre nous ?
— Je n’ai pas cherché à mettre de la distance entre nous. J’ai été passé quelques jours chez moi parce
que la situation est difficile. Ma femme me menace d’utiliser nos messages contre moi pour le divorce,
elle me fait du chantage avec les enfants. Elle va demander le divorce pour faute et souhaite des
dommages et intérêts et la garde des enfants. Elle a même dit que si je continuais à te voir, elle
déménagerait pour me compliquer la tâche. J’ai essayé de la raisonner mais c’est mission impossible.
— Mais elle ne peut pas faire ça ! C’est elle qui t’a trompé ! M’emporté-je outrée.
— Je n’ai aucune preuve de mon côté. Ces deux jours à Rennes m’ont permis de faire le point et de
réfléchir aux différentes possibilités pour me défendre. Je sais que je ne t’ai pas donné de nouvelles, ce
n’est pas pour les raisons que tu imagines. J’avais besoin de ce recul pour me rendre compte à quel point
j’étais impliqué avec toi et lorsque je suis arrivé à l’hôpital, la secrétaire du directeur m’a demandé de
prendre la place de la directrice des soins pour faire passer des entretiens et j’ai découvert que tu en
faisais partie cinq minutes avant toi. Si je l’avais su avant, sois certaine que je te l’aurais dit, je n’étais
pas très à l’aise avec ma liste de questions plus ou moins imposées que je n’ai d’ailleurs pas pu te poser.
Je sais que tu en demandes plus, mais si tu me demandes de choisir entre toi et mes enfants Aly … je
choisirai mes enfants.
— Je ne te demanderai jamais une chose pareille Thomas ! Je suis désolée que ta femme se serve de
tes enfants pour te faire chanter, mais il va falloir que tu décides ce que tu veux faire.
— Je ne vais pas la laisser me mener par le bout du nez, certainement pas après ce qu’elle m’a fait.
Je suis en train de monter ma défense pour remettre les choses à égalité. Par contre, nous devons
continuer à nous montrer très discret.
— Est-ce que cela signifie que tu vas continuer à passer tes nuits chez toi ?
— De temps en temps, mais ça ne va pas durer. Ce soir, je suis passé prendre quelques affaires, j’ai
laissé entendre que je dormirai à l’hôtel. Elle doit probablement mener son enquête à l’heure qu’il est.
— Je suis confuse de t’avoir fait une scène alors que tu es en plein conflit avec ta femme mais si tu ne
me parles pas, je ne peux pas deviner. Depuis qu’Hugo m’a brisée, comme tu l’as dit, je remets tout en
cause…
— Tu m’as contrarié ce soir ! Je t’aime Aly, n’en doute plus.
— Je t’aime aussi et ça m’a manqué de l’entendre.
— Et pour ton information, sache que tu as fait très bonne impression devant le directeur aujourd’hui.
— Ah bon, pourtant je me suis trouvée drôlement culottée en y repensant.
— Il t’a trouvée authentique et a fait d’autres compliments que je tairai. Ajoute Tom en riant.

Nous passons une agréable soirée, j’ai conscience d’avoir été excessive avec lui, ses explications ont
réussi à apaiser mes angoisses. Dommage qu’il faille lui tirer les vers du nez pour qu’il se confie, il est
trop secret pour la bavarde que je suis. Quand je pense qu’il a attendu trois semaines pour me dire que sa
femme l’avait trahi.
Elle ne manque pas d’air, oser le menacer de le priver des enfants, lui demander de ne plus me
fréquenter, c’est une garce ! Si par le plus grand des hasards elle venait à croiser mon chemin, je lui dirai
ma façon de penser et à la moindre remarque, je ne pourrai pas retenir ma main de se plaquer contre sa
joue ! Je sais qu’un jour la confrontation arrivera, c’est inévitable.
Tom passe les jours suivants chez moi, je découvre des facettes que j’ignorais totalement, comme sa
passion pour la musique, il joue merveilleusement bien de la guitare. Il ne résiste pas aux chocolats, c’est
son péché mignon ! Il aime le sport, il pratiquait de la natation et la course à pied à un très bon niveau
mais a cessé lorsqu’il est devenu cadre de pôle par manque de temps. Tout ceci explique son corps
d’athlète.

Dimanche après-midi, nous prenons la route pour la piscine, nous sommes obligés de parcourir une
cinquantaine de kilomètres afin de diminuer le risque d’y trouver des personnes que nous connaissons.
Thomas est trop sexy en maillot de bain. Lorsque j’aperçois les regards se poser sur lui, la jalousie me
gagne. Une nana s’exhibe franchement devant lui, elle passe et repasse devant lui en insistant bien sur ses
mouvements de jambes, puis se redresse et laisse tomber volontairement une bretelle de son haut de
maillot juste sous le nez de Tom. La pétasse ! Je scrute sa réaction, je m’assure qu’il ne se rince pas
l’œil. Quand ses yeux me trouvent, il me rejoint aussitôt. Immédiatement, je l’embrasse sous le regard
offusqué de la blondasse.
— Tu as vu cette nana qui se trémousse devant toi bébé ! Lui dis-je agacée.
— Bébé ? Reprend Tom.
C’est la première fois que je le surnomme autrement que Tom, du moins à voix haute.
— Bébé marque son territoire, bébé serait-elle jalouse ? S’en amuse-t-il.
— Oh ça va Thomas ! Ajouté-je légèrement vexée de sa remarque.
— J’aime beaucoup te voir comme ça bébé !
La piscine avec lui, ce n’est pas de tout repos !

Chapitre 78

La semaine suivante Tom et moi avons convenu qu’il dormirait chez lui, ce qui m’arrange quelque
part, car je suis dans ma période désagréable du mois. Il m’a parlé de son plan pour rétablir l’équilibre
sur les preuves à apporter au tribunal, j’approuve totalement, après tout sa femme ne lui fait pas de
cadeau. J’espère que son projet va aboutir sans que les enfants se retrouvent tiraillés au milieu du conflit.
Nous faisons en sorte de nous retrouver quelques minutes par jour dans le bureau de l’un ou de l’autre
pour échanger quelques baisers langoureux et pour patienter jusqu’au week-end. Mes parents et mes
sœurs viennent manger le jeudi soir à la maison, nous ne parlons pas d’Hugo pour une fois. Tom m’a
envoyé des petits mots doux chaque soir avant de dormir, j’ai tellement hâte à demain soir pour le garder
rien qu’à moi toute seule pendant deux jours.

Vendredi matin, Julie a été bousculée par un patient agité, elle s’en sort avec une entorse du poignet
gauche. Après la déclaration d’accident de travail et les solutions envisagées pour son remplacement, je
me rends dans le bureau de Thomas avec les plannings à la main pour lui en faire part. Au moment où je
frappe à sa porte, Sandy sort de son bureau avec un sourire forcé. Qu’est-ce qu’elle me veut cette fille ?
Qu’elle se trouve un mec et qu’elle laisse mon homme en paix.
— Je suis venue vous présenter le planning provisoire en attendant votre approbation monsieur
Simon. Dis-je en refermant la porte.
— Ah super Alyssa, viens t’asseoir.
— Je ne te dérange pas. Dis-je d’une voix plus basse.
— Absolument pas, nous avions terminé.
— Quel plaisir de tomber sur elle en venant te voir.
— Aly !
— Quoi ? Je dis juste ça comme ça…. Tiens au fait ce midi, je vais manger avec Mathieu.
— Vilaine petite peste, j’ai compris le message, mais nous devions nous voir en vue de la réunion sur
la création d’un pool de remplacement. Ajoute Thomas pour se défendre.
— Ok. Ok. Bon et pour ces prévisions, ça te va ? Dis-je en pointant mes documents de l’index.
— C’est super, si tu parviens à faire de l’auto-remplacement, je ne peux rien ajouter.
— Je te remercie, je te dis à ce soir. Ça tient toujours ? Demandé-je pour m’en assurer.
— Non seulement ça tient toujours, mais en plus de ça, j’ai deux bonnes nouvelles à t’apprendre.
— Je t’écoute !
— Non, tu es trop curieuse. Je t’en parlerais quand nous serons tous les deux. En revanche, j’ai
besoin de ta permission.
— Ma permission mais pourquoi ?
— Est-ce que je peux passer chez toi ce midi et puis-je me permettre d’aller dans tes affaires pour
prendre quelque chose sans que tu me demandes quoi ?
— Oh tu es mystérieux, tu éveilles ma curiosité Tom. Oui, tu n’as pas besoin de me demander, tu as le
double de la clé et tu connais chaque recoin de la maison.
— Je n’y serai pas allé sans ton accord bébé. Ah j’oubliais, sois prête à dix-sept heures trente tapante
chez toi.
— Prête genre nous allons quelque part ?
— Je ne t’en dis pas plus bébé. À ce soir.
Je quitte la pièce avec une certaine excitation ne sachant pas à quoi m’attendre. L’après-midi va être
extrêmement longue.
Ce midi, je mange avec Kévin, le ton est à la plaisanterie, j’aime le taquiner parce que je sais qu’il ne
prendra pas mal ce que je lui dis. Je lui indique qu’il y a très peu d’infirmiers à manger au self le midi,
c’est presque impossible de quitter le service le temps du repas. La plupart du temps quand j’étais en
cardiologie, en pneumologie ou en médecine interne, nous avions à peine le temps de grignoter avant les
transmissions mais dans les services de soins de suite, la charge de travail est répartie différemment et la
plupart du temps, les collègues arrivent à se libérer à tour de rôle pour aller au self.
— Dis que je suis payé à rien faire Alyssa ! Rétorque-t-il.
— Tu sais très bien que je ne permettrais pas de dire ça et puis je ne le pense pas.
— Mais oui, je le sais très bien et pour avoir été dans les autres services, je le confirme c’est une
chance que nous avons.
— Et sinon quoi de neuf pour toi ?
— Je sors avec une fille, elle s’appelle Carine, c’est une aide-soignante de l’hôpital.
— Ah oui, Carine ? Je connais ? De quel service ?
— Elle est en médecine interne, c’est une jeune diplômée. Elle est arrivée depuis peu dans l’unité.
— D’accord. Comment as-tu fait sa connaissance ? Comment elle est ? Donne-moi plus de détails.
— C’est Rozenn, l’interne de mon service qui nous a présentés, elles étaient au lycée ensemble. Elle
est très jolie.
— Très jolie, c’est tout ?
— Ok, j’avoue c’est une bombe. J’espère que je ne vais pas tout faire foirer, je te la présenterai si
j’arrive à la garder.
— Que de bonnes nouvelles, je suis contente pour toi.
— Et toi, quoi de neuf Alyssa ?
— J’ai passé mon entretien pour obtenir le financement pour l’école des cadres, j’aurai la réponse la
semaine prochaine normalement. Ça me stresse un peu.
— Te connaissant, tu as dû assurer. Me réconforte Kévin.

Quinze heures, j’envoie un message à mon chef adoré : Puis-je avoir un indice ?
Tom : Je t’aime bébé.
Moi : Je t’aime aussi. Mais un indice stp ?
Tom : Plus que 2h30, sois patiente.

Rien à faire, il ne parlera pas. Plongée dans le travail pour le restant de l’après-midi, je remarque
presque trop tard qu’il est plus de dix-sept heures, je me dépêche de ramasser mes affaires et de me
rendre chez moi. Je ne sais pas comment m’habiller, puisque je n’ai aucune idée de ce que nous allons
faire. J’enfile rapidement une jolie robe et retouche à ma coiffure lorsque j’entends sonner. Je descends
les escaliers deux par deux et me précipite à la porte.
Putain de merde, il est canon dans son costume! Wahou, je me retiens de lui sauter dessus.

— Tom, tu es élégant, je me sens ridicule à côté de toi, je vais aller me changer.


— Tu es magnifique bébé, ne change rien.
Il ne se rend pas compte de toute évidence du charme qu’il dégage, sinon il ne serait pas avec moi.
— Allez ma belle, monte en voiture, nous sommes pressés.
— Nous partons ? Dis-je avec une pointe de déception.
— Oui mais tu as l’air déçue.
— J’espérais qu’on passe un peu de temps tous les deux pour nos retrouvailles, au lieu de ça, nous
allons devoir être discrets.
— Ne sois pas inquiète, ça va te plaire. Allez dépêche-toi sinon nous allons finir par être en retard.

Chapitre 79

Je finis par le suivre sans poser de questions, il m’ouvre la portière tel un gentleman.
— Le timing est serré Aly, c’est pour cette raison que je te presse un peu.
— Tu ne veux toujours pas m’en dire un peu plus sur la destination ?
— Non, mais je veux bien te donner la seconde bonne nouvelle.
— C’est déjà ça ! Je t’écoute. Dis-je impatiente.
— Terminer le chantage de ma femme, elle ne se servira plus de notre relation à présent.
— Tu as réussi ce que tu prévoyais ?
— Oui, j’ai même décidé que la version audio n’était pas suffisante, je l’ai filmée à son insu, tout y
est, le chantage qu’elle me faisait au sujet des enfants et sa tromperie qu’elle avoue. J’ai attendu d’avoir
mis cette vidéo en sécurité, pour pouvoir lui en parler. Désormais, nous sommes à égalité, elle a adopté
un autre comportement, s’est excusée en me jurant que jamais elle ne m’aurait privé des enfants. Hier
nous avons longuement discuté, elle a compris que je n’avais pas l’intention de renoncer à toi, nous avons
annoncé notre séparation à la famille. Nous envisageons un divorce à l’amiable.
Quel soulagement, j’envisage notre avenir plus sereinement, nous allons bientôt pouvoir nous montrer
aux yeux de tous.
— Je suis sincèrement heureuse pour toi, ce n’était pas gagné d’avance.
— Tu as raison, c’est pour cette raison que j’ai pensé qu’il fallait fêter ça.
Après une heure de route, nous nous approchons de Rennes, Tom lâche enfin que c’est là notre
destination.
— Pourquoi étions-nous pressés Tom ? L’interrogé-je curieuse.
— Nous avons rendez-vous à vingt heures, tu auras le temps de te changer.
— Me changer ? Mais je n’ai rien prévu. M’emporté-je.
— J’ai pensé à ce petit détail, ne t’en fais pas.

Nous nous garons le long de l’avenue Jean Janvier à environ deux cents mètres de la gare. Thomas
sort de la voiture, m’ouvre la portière et m’invite à descendre. Nous nous arrêtons devant un grand
bâtiment, nous pénétrons dans le hall de cet hôtel quatre étoiles. Les bureaux d’accueil sont immenses,
Tom me fait patienter dans le petit salon attenant, il règle les formalités avec l’hôtesse. Il vient ensuite me
chercher et nous prenons l’ascenseur pour aller au quatrième étage. Il a refusé la présence de la
réceptionniste pour la présentation de la chambre.
— Nous allons découvrir notre suite pour le week-end bébé.
— Notre suite ? Pour le week-end ? Mais tu es fou !
— Suis-moi ma belle. Ajoute-t-il en me prenant par la main.
Lorsque le pass déclenche l’ouverture automatique de la porte, je suis estomaquée par ce que je vois.
La pièce principale est spacieuse, très lumineuse, une mezzanine est accessible par un escalier en
colimaçon design. La pièce est très peu meublée, mais la déco est originale et travaillée. Un canapé en
cuir blanc imposant se trouve au milieu de la pièce, il est en demi-cercle, face à un grand écran plat. Tom
me demande de le rejoindre à l’étage, nous empruntons le fameux escalier spiral en acier.
Nous découvrons l’espace chambre qui me laisse sans voix, le lit est au ras du sol, c’est un immense
lit rond en cuir blanc, recouvert en son centre d’un matelas, il est bordé deux chevets intégrés en bois.
— Aly, tu as perdu ta langue ?
— C’est magnifique, je n’ai jamais fréquenté ce genre d’endroit !
— Ravi que ça te plaise, maintenant je te laisse aller te déshabiller à la salle de bain, le bagagiste est
parti chercher nos affaires.

La salle de bain est carrelée du sol au plafond, un marron glacé nuancé par endroit, mise à part le bac
de douche, la baignoire et la vasque de couleur blanche, il n’y a qu’une seule couleur. Tom frappe à la
porte, il entre et attend que je sois en sous-vêtements pour me bander les yeux. Il m’accompagne jusqu’au
lit où il me demande de m’asseoir. J’exécute sans réfléchir, tellement impatiente et excitée de découvrir
pourquoi nous sommes là.

— Je vais dégrafer ton soutien-gorge ma puce, tu n’en auras pas besoin. Précise Tom près de mon
oreille.
Ses doigts glissent le long de ma colonne avant de s’arrêter à l’endroit désiré, me faisant frissonner.
— Tu es magnifique. Lève les bras ma puce.
Je sens un tissu léger m’effleurer, puis quelque chose de plus contenant me recouvre le buste.
— Est-ce que c’est confortable ?
— J’en ai l’impression.
Délicatement, Tom promène sa main sur mes épaules dénudées et ajuste le bustier de ce qui me
semble être une robe ?
— Relève-toi maintenant.
Je sens un voile descendre sur mes jambes.
— Parfait, j’en étais sûr. Je vais ôter ce bandeau bébé.
Lorsqu’il retire le bandeau, j’entrouvre les yeux et me découvre dans le miroir face à moi. Je dois
rêver, car ce n’est pas moi que je vois dans cette glace, c’est une princesse ! Je porte une longue robe en
mousseline rouge, celle-ci a un col en v avec des bretelles qui passent derrière ma nuque. Cette encolure
est embellie de bijoux argentés. Le haut est un bustier avec soutien-gorge intégré et me fait des seins
superbes.
Je suis émue aux larmes, aucun mot ne peut sortir de ma bouche.
— Elle te plaît ? Me chuchote mon bien-aimé.
— Évidemment, mais je ne comprends pas.
— Je veux juste te montrer à quel point je suis heureux d’être avec toi ce soir, tu es tellement belle, je
t’aime.
— Tu ne sais pas à quel point tu es fou ! Mais je t’aime.
— Allez ma puce, il faut y aller.

Nous redescendons, Tom a pensé à prendre deux paires de chaussures qui m’appartiennent. Mon
choix est vite fait, je mettrai les grises argentées à talons aiguilles. Je prends ma veste avant de sortir de
cet endroit merveilleux qu’il me tarde déjà de retrouver tout à l’heure.
Apparemment, nous n’allons pas loin, car Tom souhaite que nous nous y rendions à pied, je l’espère
car je n’ai pas les chaussures adéquates pour faire de la marche.

Effectivement nous ne parcourons pas plus de deux cents mètres avant d’arriver sur la place du
Liberté. Je comprends immédiatement ce que nous faisons ici, il s’est souvenu de la conversation que
nous avions eue. Je lui ai dit que je rêverais d’aller voir le ballet du Lac des cygnes et nous y sommes
tous les deux ce soir ! C’est un rêve de petite fille, cette soirée est magique.
Tom sort les billets de sa poche et me les présente.

— Deux heures trente aux premières loges !


— Non ! Oh mais je ne mérite pas tout ce que tu fais pour moi.
— J’aimerais te convaincre que si, mais c’est peine perdue te connaissant.
Je l’embrasse amoureusement pour le remercier, main dans la main nous prenons place à quelques
pas de la scène.

Chapitre 80

Des performances éblouissantes et spectaculaires pendant près de deux heures trente. Des décors qui
enchantent, des danseurs qui transmettent des émotions, des interprétations fascinantes de leur rôle. J’ai
été transportée tout au long de ce spectacle. Nous sortons en silence du Liberté, Thomas me tient
fermement la main.
— Tu as aimé ? Demande-t-il.
— J’ai adoré, c’était magique. Les costumes, les décors, la musique, les danseurs tout était
absolument parfait. Merci pour cette soirée riche en surprise.
— Est-ce que tu as faim ?
— Non l’entracte m’a suffi, je suis pressée de rentrer pour te remercier convenablement. Lui dis-je
pour lui donner envie.
— Nous y allons de ce pas bébé. Mais avant je voudrais qu’on immortalise cet instant.
Thomas sort son téléphone et réalise notre premier selfie sur la grande place.
— Tu peux me l’envoyer s’il te plaît sur mon téléphone ?
Il acquiesce et transfère immédiatement la photo que je contemple, quel beau couple nous formons !
Lorsque nous entrons dans notre suite, je suis toujours aussi émerveillée par la beauté du lieu, nous ne
perdons pas de temps et montons pressement à la mezzanine.
— Tu sais qu’il y a une piscine en bas accessible toute la nuit ?
— Ça ne me dit rien Tom, je préfère que nous restions seuls. Ajouté-je tout en me déshabillant sous
son regard amusé.

Tom se dévêt à son tour, lorsque nous sommes entièrement nu, il s’approche et m’attrape par la taille
et me serre contre lui. Son membre se raidit brutalement contre ma peau traduisant son excitation
instantanée. J’enlace ses épaules collant ma poitrine contre son torse bouillant. Il plonge alors ses yeux
dans les miens, ses pupilles se dilatent, son sourire s’agrandit alors qu’il agrippe fermement mes fesses.

Je passe une nuit au paradis avec lui, le bonheur emplit mon esprit, j’ai le sentiment que ma vie a pris
un sens quand il est entré dans mon existence. La rencontre de nos corps est explosive comme à chaque
retrouvaille. Je découvre une palette de couleurs, de sentiments d’une intensité remarquable, l’orgasme
s’empare de moi dans un violent tourbillon.

Soudain je réalise l’amour que je lui porte, j’en ai le souffle coupé. Je l’aime au point de vouloir lier
ma vie à la sienne à tout jamais mais il ne doit pas le savoir, pas pour le moment.
Samedi matin, nous partageons notre petit déjeuner au lit, nous dégustons les délicieuses pâtisseries
servies.
— Bébé, que dirais-tu d’une balade dans le jardin du Thabor ce matin, un petit restaurant savoyard
rue Melaine juste à la sortie du parc et enfin pour le programme de l’après-midi, je pensais te proposer
une sortie patinoire.
— Tu as tout planifié, tu es incroyable Tom ! Tu es l’homme parfait, tu le sais ?
— J’y travaille pour toi bébé.
Il fait un temps superbe, nous profitons de notre journée et suivons le programme de Tom. Je ne suis
pas très à l’aise sur les patins comparé à lui. Il se déplace rapidement au centre de la piste, tandis que je
reste près du bord où je peux m’accrocher chaque fois que je sens que la chute n’est pas loin. Après
quelques gamelles, mes fesses endolories demandent un peu de répit, Tom cède et nous finissons par
quitter la patinoire.
Nous décidons d’aller au cinéma ce soir, nous nous mettons rapidement d’accord sur le choix du film,
il s’agit d’un thriller avec Liam Neeson à l’affiche.

Dimanche, dernier jour de ce week-end de rêve, nous traînassons à l’hôtel dans le jacuzzi et dans le
spa. Vers quatorze heures nous rendons notre pass, contraints de repartir.
Pendant le trajet, je découvre que Tom a sa guitare à l’arrière de la voiture !
— Tu as ta guitare avec toi ?
— Oui.
— Tu jouerais pour moi ?
— Si tu veux et toi tu chanterais pour m’accompagner ?
— Crois-moi, il ne vaut mieux pas. Ricané-je.

Lorsque nous arrivons un peu avant seize heures à la maison, nous apercevons la voiture de mes
parents garées devant chez moi. Trop tard pour faire demi-tour, ils nous ont repérés. Je jette un regard
navré à Tom qui soupire.
— Je suis désolée, je vais leur demander de partir si tu veux.
— Non, ne fais pas ça ! Ils ne me dérangent pas, c’est juste que j’aurais préféré qu’on termine notre
week-end en tête-à-tête.
— Ils ne vont pas rester longtemps ! Le rassuré-je.
Nous sommes accueillis par mes parents sur le pas de la porte.
— Je suis passée deux fois hier, je me demandais où tu étais Alyssa ! S’exclame ma mère.
— Nous étions en week-end maman. Annoncé-je fièrement.
Elle paraît surprise, elle a ce petit regard inquisiteur accroché au visage.
— Qu’est-ce qu’il y a ? Lui demandé-je agacée, car elle met mal à l’aise Tom.
— Rien, je ne savais pas.
— Moi non plus, Thomas avait organisé ça secrètement.
Nous nous installons autour d’un café, j’évoque le ballet du Lac des cygnes.
— Vous lui avez fait une très belle surprise Thomas. Félicite ma mère.
— Vous pouvez me tutoyer madame.
Mon père se lève soudainement.
— Alyssa, j’ai pris ce qu’il faut pour te faire tes étagères dans le garage. Annonce-t-il.
— Tu voulais des étagères. Me demande Tom.
— Oui, j’avais demandé à mon père il y a un moment.
— Tu aurais dû me demander Aly, je m’en serais occupé. Ajoute-t-il contrarié.
— Je ne savais pas que… désolée.
— Allons-y ensemble Thomas. Propose mon père.
Mon père et Tom vont bricoler ensemble ! C’est trop bizarre, je suis à la fois contente et inquiète.
S’ils ne s’entendaient pas ?
Ma mère remarque mon inquiétude et tente de me rassurer.
— Ton père ne va pas le manger !
— Je sais, mais je devrais peut-être y aller, s’ils ne savent pas quoi se dire ?
— Laisse-les faire connaissance, ils sont grands, ça va aller. Et raconte-moi comment ça se passe
avec lui.
— C’est merveilleux, il est génial et je tiens à lui. Avoué-je.
— Tu ne trouves pas que c’est un peu rapide ?
— Peu importe, les sentiments ne se commandent pas et je sais qu’il tient à moi aussi.
— Tu as rencontré ses parents ?
— Euh non, c’est un peu compliqué parce qu’il... Bégayé-je sans être capable de finir ma phrase.
— Il quoi Alyssa ? Tu me fais peur !
— J’appréhende ta réaction justement. Il est marié. Murmuré-je pour atténuer l’annonce.
— Mince, marié mais… tu le savais ? Demande-t-elle désemparée.
— Oui, il ne m’a rien caché, il est séparé, mais la procédure de divorce est à peine entamée donc
pour le moment, personne n’est au courant de notre relation. Expliqué-je difficilement.
— Je ne m’attendais pas à ça. Sa femme sait-elle qu’il te fréquente ?
— Oui, maman, mais pas ses parents ni ses… enfants ! Lâché-je après un moment d’hésitation.
Au choc de l’annonce, ma mère se décompose littéralement sous mes yeux, affligée de cette nouvelle,
elle se lève et tourne en rond dans la pièce.

Chapitre 81

— Je suis consternée et déçue. Tu ne peux pas rester avec lui, ce n’est pas envisageable ! Enfin à quoi
est-ce que tu penses, il a des enfants ! Lance-t-elle affolée en faisant de grands gestes désordonnés.
— Et alors ? Il a eu une vie avant moi, est-ce interdit ? J’en ai eu une aussi avant lui.
— Mais tu n’as pas d’enfants, tu n’es pas mariée. Est-ce que tu as pensé qu’un beau jour, si vous avez
des enfants tous les deux, il pourrait vous abandonner comme il l’a déjà fait avec sa famille ! Se fâche-t-
elle au même moment où Tom fait irruption dans la pièce.

Prise de panique en le voyant surgir, je suis paralysée, incapable de réagir. Honteuse, ma mère sort de
la maison. Mon père désireux de comprendre ce qui se passe, me dévisage inquiet.
Je finis par ouvrir la bouche et lui demande de rejoindre maman dehors. Je me lève, flageolante et
parviens à faire quelques pas vers lui. Tom tend brusquement son bras dans ma direction, il ouvre la main
face à moi, je m’arrête.
— Aly, je n’ai pas abandonné mes enfants, je n’admets pas d’entendre une accusation aussi grave.
— Je le sais Tom ! Mais ma mère ne connaît pas ton histoire !
— Justement, de quel droit me juge-t-elle ? Rétorque-t-il mécontent.
— Elle s’inquiète pour moi, elle vient d’apprendre que tu étais marié et père, elle réagit comme mère
protectrice. Je vais lui expliquer et elle s’excusera.
— Non Aly, elle n’approuvera jamais cette relation. Admet Tom sévèrement.
— Mais si, fais-moi confiance. Ne m’en veux pas, je ne pense pas comme elle.
— Je ne t’en veux pas, je prends juste conscience du fait, que ce n’est que le début des jugements me
concernant. Aly, je vais aller faire un tour, j’ai besoin de prendre l’air et toi de passer un peu de temps
avec tes parents sans ma présence.
— Non Tom, je ne veux pas que tu partes. Le supplié-je.
Il saisit sa veste malgré mes supplications. Je me jette dans ses bras.
— Tom, dis-moi que tu ne me quittes pas, que tu vas revenir tout à l’heure ! L’imploré-je au bord des
larmes.
— Chut bébé, calme-toi. Préviens-moi quand tes parents seront partis.

Je m’effondre après son départ précipité, j’ai tellement peur de le perdre. Quand mes parents me
découvrent anéantie, mon père s’en prend à ma mère, lui reprochant d’avoir eu des propos blessants
envers Thomas. Pour la première fois de mon existence, mon père m’enlace chaleureusement alors que je
pleure. Habituellement, il laisse la place à ma mère qui est plus à l’aise pour gérer ce genre d’émotions.
Je décide de leur dévoiler comment Tom et moi sommes tombés dans les bras l’un de l’autre.
J’insiste bien sur le fait qu’il était séparé de sa femme avant d’entreprendre une relation avec moi. Mon
père prend plutôt bien les choses, mais ma mère ne se laisse pas convaincre si facilement. Selon elle, je
suis trop naïve, je me serais jetée dans ses bras sans réfléchir car je venais de perdre Hugo. Elle
s’exprime avec assurance malgré ses yeux humides qui la trahissent. L’irritation monte, quand je sens mon
sang bouillir dans mes veines, j’explose et crache tout ce que j’ai sur le cœur :
— Je te trouve injuste ! Après ce que j’ai traversé, tu n’as pas pris ma défense une seule fois par
rapport à Émilie et Hugo, d’ailleurs si Émilie n’était pas amoureuse de lui, tu essaierais de me
réconcilier avec lui ! Avoue-le ! C’est si difficile à comprendre, il a été à mes côtés à chaque fois que ça
n’allait pas, aussi professionnellement que personnellement ! C’est quelqu’un de bien et je l’aime, si tu ne
veux pas l’accepter alors ne viens plus chez moi. Je ne te laisserai pas détruire ce que nous essayons de
construire.
— Tu es dur avec ta mère Alyssa, elle s’inquiète pour toi. Précise mon père en essayant de
temporiser.

Maman glacée d’effroi reste mutique. C’est à ce moment que je leur indique que je préfère rester
seule.
Lorsqu’ils partent, je me précipite sur mon téléphone et envoie un message à Tom : Je suis seule. Tu
rentres ?
J’attends impatiemment sa réponse. Je viens de me brouiller avec ma mère, j’espère que ce n’est pas
pour rien. En même temps, elle m’a cherchée, j’avais besoin de lui dire le fond de ma pensée. Émilie est
tellement fragile qu’on lui laisse tout passer, mais elle s’est permise de juger mon petit ami et devant lui
pour le coup. Quelques minutes plus tard, je reçois une réponse de lui : OK.
Il est blessé, j’en suis certaine. Nous avons passé deux jours merveilleux et voilà comment ça se
termine…
Lucie m’appelle catastrophée par ce que ma mère lui a raconté, je ne rentre pas les détails mais je lui
en dis suffisamment pour la rassurer. Je raccroche lorsque j’aperçois la voiture de Tom devant chez moi.
Je le rejoins dans l’allée, ses yeux brillants cherchent du réconfort dans les miens.
Installés confortablement dans le canapé, je ne quitte pas ses prunelles. Il est assis, je suis allongée,
la tête reposant sur ses cuisses, il passe sa main délicatement sur mon visage et dans ma cheveux. Le
silence nous apaise, nous rapproche, après quelques longues minutes, notre complicité du week-end est
retrouvée. Nous mettons de côté le conflit avec mes parents et profitons de notre dernière soirée avant la
reprise de la semaine.

Lundi matin, en fin de matinée, la directrice des soins passe dans le service des urgences, elle
s’entretient rapidement avec moi dans mon bureau, afin de m’annoncer que j’ai été retenue pour
bénéficier du financement de mes études. Je contiens mon excitation devant elle, mais la remercie pour
cette excellente nouvelle. Je suis folle de joie, j’envoie un message pour prévenir ma famille et mes amis
les plus proches. Je garde la nouvelle pour Tom, je préfère lui annoncer de vive voix, à moins qu’il ne
soit déjà au courant.
Je reçois un message d’Aurélie dans la foulée : Félicitations alyssa ! Tu le mérites. Autre chose à
me dire ?

Pourquoi est-ce qu’elle me demande ça ?

Moi : Non, pourquoi ?


Aurel : Je pensais être ton amie…
Mince, mais de quoi parle-t-elle ? J’espère que ça ne concerne pas Tom.
Moi : À quoi fais-tu référence ? Je ne vois pas. Évidemment tu es mon amie.
Aurel : Ton nouveau petit ami par exemple…
Que sait-elle ? Comment peut-elle avoir deviné ? Elle avait juste compris que j’avais craqué sur lui.
Moi : Viens à dix-sept heures trente chez moi, on en parlera…
Aurel : Je ne voudrais pas te forcer la main.
Moi ; Viens stp. Bisous.
Aurel : Ok.
Si elle a découvert notre relation, elle n’est probablement pas la seule, une multitude de questions
surgit. Je préviens Thomas de ne pas venir chez moi trop tôt ce soir, je lui explique que je reçois Aurélie.

Chapitre 82

Toute l’après-midi, j’angoisse de retrouver Aurel, je ne sais pas précisément ce qu’elle sait, en
conséquence, il est difficile d’imaginer ma défense. Ma mère m’a félicitée pour le financement, je me
demandais si elle allait me répondre après notre échange animé de la veille.
Seize heures, Magalie me rejoint comme convenu pour faire un bilan de mi- stage, elle est
accompagnée d’une infirmière qui est l’une de ses deux tutrices. Après avoir évoqué son ressenti
personnel, Nadège lui transmet le retour de l’équipe la concernant. Les avis sont très positifs, elle s’est
bien intégrée et a su se positionner en tant qu’élève tout en étant capable de prendre des initiatives et
parvient à tenir les objectifs fixés. Nous l’encourageons à poursuivre dans ce sens.
Nadège s’attarde un peu dans mon bureau, j’en profite pour discuter avec elle. J’aimerais connaître
son opinion sur ma façon d’occuper le poste actuel. Elle est considérée comme la personne ressource du
service tant au niveau des aides-soignants que des infirmiers, elle ne l’a pas choisie, mais elle influence
le comportement des autres. Elle me conforte dans l’idée que je suis à ma place, que l’on peut compter
sur moi. Dix-sept heures, je quitte le bureau, c’est une autre histoire qui m’attend à la maison…
Aurélie est à l’heure, je l’invite à entrer, il fait beau, nous choisissons de nous installer sur la
terrasse, comme je n’ai pas encore de salon de jardin, nous transportons nos chaises dehors.
— Alors tu es décidée à tout me révéler ou tu vas encore me faire avaler tes mensonges Alyssa.
— Dis-moi ce que tu sais Aurélie. Lui demandé-je gênée.
— J’ai grillé que tu craquais pour le chef, mais je ne pensais pas qu’il se passait réellement quelque
chose entre vous. Dit-elle dénonciatrice.
— Pourquoi est-ce que tu penses…
Elle m’interrompt avant même que je termine ma phrase.
— Tu veux me balader encore ? Non, je ne suis pas venue pour ça. Sois franche avec moi !
— D’accord, tout d’abord excuse-moi si je t’ai menti mais les risques étaient trop grands et je ne suis
pas toute seule dans cette histoire. En effet, je sors avec Thomas, mais je t’assure que je t’en aurais parlé,
mais pas tout de suite, c’est trop récent.
— J’en étais sûre ! Mince mais comment as-tu pu mettre le grand Monsieur Simon dans ton lit ?
— Non, ce n’est pas qu’une histoire ...
— Arrête Alyssa, c’est quoi si ce n’est pas une histoire de cul ? Désolée d’être vulgaire, mais il faut
appeler les choses par leur nom ! Il est marié, tu ne crois pas qu’il va divorcer pour tes beaux yeux ! Me
jette-t-elle froidement sans aucun tact.
Je mets un certain temps à accepter ce qu’elle vient de me dire, je ne suis pas en position pour lui
répondre aussi sévèrement qu’elle l’a fait avec moi. Ces propos me font l’effet d’une gifle en pleine
figure.
— Alyssa, tu te rends compte que tu risques ta carrière ! Qu’est-ce qu’il va t’apporter ? Tu espères un
traitement de faveur. Suggère-t-elle avec son regard accusateur insistant.
— Aurélie, tu n’y es pas du tout, ce n’est pas ce genre de relation. Je ne devrais pas te raconter tout
ça, mais il était séparé avant qu’on sorte ensemble. Il n’y a aucun traitement de faveur, tu me connais
quand même ? Lui dis-je déconcertée.
— Je t’avoue que je suis larguée, pourquoi est-ce que vous vous cachez alors si vous assumez ?
— Parce qu’il n’est pas encore divorcé, parce qu’on ne veut pas faire parler de nous. Comment est-ce
que tu as su ?
— Je suis venue dimanche soir, il y avait sa voiture devant chez toi et ce n’était pas la première fois
que je la voyais. Imagine la réaction des collègues quand ils vont découvrir ça ! Tu n’as pas peur qu’on te
reproche d’avoir été favorisée pour le financement ou pour ton poste de cadre ? Soulève-t-elle.
— Je ne veux pas qu’ils l’apprennent pour le moment. Aurélie dis-moi sincèrement, est-ce que c’est
ce que tu penses ?
— Non, mais si tu veux un conseil, plus vous vous cachez, plus vous vous exposez à ce genre de
réactions. Dit-elle plus calmement.
— J’ai conscience que les rumeurs peuvent circuler très vite, j’en ai fait l’objet récemment, mais
nous ne pouvons pas nous dévoiler maintenant. Je peux compter sur ton soutien ?
— Évidemment, j’aurais aimé que tu me fasses confiance dès le début. Ça va être trop bizarre de
venir te voir en présence du chef, je vais devoir lui taper la bise tu crois ?
— Euh… je pense que nous allons éviter dans les premiers temps.
— Je te taquine Alyssa !

Lorsqu’Aurélie s’apprête à partir, j’envoie un texto à Tom pour l’informer qu’il peut rentrer en toute
sécurité. Il va falloir que je lui dise que nous avons été démasqués, pas sûr qu’il prenne bien la nouvelle.
Je nous prépare des lasagnes pour le dîner.
— Coucou bébé. Me salue Tom en m’embrassant.
— Tu vas bien ?
— Oui et toi, qu’est-ce que tu nous fais de bon à manger ?
— Des lasagnes.
— J’adore les lasagnes !
— Je m’en souviens.
— Félicitations pour ton financement Aly ! Ajoute Thomas avec fierté.
— Tu étais au courant !
— J’ai eu confirmation ce matin, mais ce n’était pas à moi de te l’annoncer.
— Est-ce que j’ai été favorisée par notre relation, dis-moi franchement ? Demandé-je tracassée.
— Non, pas du tout ma puce. Nous sommes deux à juger lors de l’entretien et puis ton dossier était
béton. Alors tu peux te rassurer, je ne fais pas de favoritisme à ton égard, je le réserve pour nos tête-à-
tête. Tu as vu Aurélie ?
— Oui, justement à ce propos, il faut que je te parle et je crois que ça ne va pas te plaire.
— Elle sait pour nous ? S’inquiète Tom immédiatement.
— Oui, mais je ne lui ai rien dit, elle a vu ta voiture plusieurs fois devant chez moi et avait déjà
relevé quelque chose le jour où nous t’avions croisé à la boulangerie.
— Super, on devrait faire passer un communiqué dans tout l’hôpital ! Dit-il en haussant le ton.
— Elle va garder ça pour elle.
— Espérons, mais il va falloir être plus vigilants ! Je ne peux plus me garer devant chez toi chaque
jour.
— Très bien, mets ta voiture dans le garage, la mienne restera dehors.
Je n’entends pas ce qu’il répond, il s’éloigne de la cuisine en marmonnant. Il s’est raidit dès qu’il a
compris de quoi il s’agissait. Je me retiens de lui dire que tôt ou tard tout le monde le saura…

Chapitre 83

Mardi soir, je me rends chez mes parents, à la demande de mon père qui veut nous réconcilier ma
mère et moi. Nous revenons sur nos propos l’une comme l’autre, j’admets avoir été trop dur envers elle.
Ma mère reconnaît s’être emportée et avoir été injuste vis-à-vis de Thomas, mais reste très méfiante par
rapport à sa situation familiale. Elle souhaite apprendre à le connaître, quant à mon père, il l’a trouvé
plutôt sympathique.
Soudain, la porte d’entrée s’ouvre, Émilie accompagnée d’Hugo pénètrent dans le hall d’entrée. Mes
parents semblent aussi surpris que moi de les voir débarquer.
— J’ai vu ta voiture Alyssa, ça ne t’embête pas qu’on rentre ? Demande ma sœur embarrassée.
— Non, j’allais y aller. Ajouté-je sans les regarder.
— Attends cinq minutes s’il te plaît, nous voudrions vous parler. Réclame-t-elle.
Quel culot elle a cette fille, nous seulement elle m’impose leur visite, mais en plus elle me demande de
supporter ça plus longtemps. J’accepte de faire un effort à contre cœur. Ils s’installent face à moi autour
de la table, ma mère gesticule d’impatience, elle appréhende la suite autant que moi je pense.
— Papa, maman, Alyssa, nous avons quelque chose à vous annoncer Hugo et moi. Déclare-t-elle en
marquant des pauses entre chacun de ses mots.
C’est une lente torture, j’ai deviné ce qu’elle s’apprête à nous dire, elle va vivre avec lui ou pire elle est
enceinte à nouveau ! Je lève les yeux au ciel à cette pensée.
— Voilà je tiens à vous remercier pour votre soutien depuis mon … enfin depuis un mois. Hugo a été
aussi très présent pour moi et nous avons décidé de sortir ensemble. Je t’en avais parlé Alyssa, il y a
quelques semaines…

Voilà c’est fait, elle est officiellement dans la vie d’Hugo, dans mon ancien lit, ma maison, mon
ancienne vie quoi… Pour ne pas sombrer dans la déprime, je me concentre sur mon Thomas qui m’attend
à la maison, il est raison suffisante pour garder la tête haute en toutes circonstances. Étrangement tout le
monde me dévisage, ils attendent quoi mon approbation ?

— Ce n’est pas moi qui vous ai annoncé quelque chose, cessez de me regarder comme ça. Leur dis-
je.
— Alyssa, tu es d’accord avec ça ? Demande ma mère.
— Je m’en fiche, il ne m’appartient pas. Je vous laisse, mon homme va trouver le temps long ! Ajouté-je
pour informer Hugo de mon statut ou bien pour me venger en espérant que ça l’atteigne encore un peu ?
Thomas s’inquiète de savoir comment j’ai accueilli cette annonce, je peux le rassurer, je vais bien grâce à
lui.
Le reste de la semaine se déroule parfaitement bien. Samedi et dimanche, il est resté avec ses enfants,
mais est venu dormir à la maison. Je me surprends à ressasser par moment l’annonce d’Émilie, mais
parvient à la chasser rapidement de ma tête…

La semaine suivante Tom est en déplacement pour le travail, nous échangeons régulièrement des
messages, mais je trouve le temps très long jusqu’au vendredi soir. J’occupe mes soirées avec Aurélie et
Lucie principalement. Nos intenses retrouvailles se prolongent toute la nuit.
À la demande de mes parents, nous décidons d’organiser un petit repas avec eux ce samedi soir. Thomas
n’était pas très emballé par l’idée, mais a accepté pour me faire plaisir. Il n’a pas revu mes parents
depuis que ma mère s’est emportée à notre retour de Rennes, il y a quinze jours maintenant.

J’ai fait les courses ce matin pendant que Tom emmenait ses enfants à la piscine, j’avais très envie de
l’accompagner pour les rencontrer mais je n’ai pas osé lui en parler. Je ne demande pas qu’il me présente
comme étant sa compagne, mais si je pouvais faire la connaissance de ses merveilleux enfants, autrement
qu’en photo…
Je me rends dans librairie préférée pour commander un livre que l’on m’a conseillé sur l’école des
cadres. Il n’y a pas trop de monde, ça tombe bien parce que je suis pressée. Je salue Alexandre, c’est
avec lui que je vois en général, il est de très bons conseils pour les romans étrangers. Il fait très timide
aux premiers abords, mais dès qu’il parle de livre, on ne peut plus l’arrêter. Il est occupé avec la jeune
libraire, je les soupçonne de flirter ensemble. En même temps, ils vont bien ensemble, elle doit avoir
vingt-cinq ans à tout casser, mais elle est très calée dans de nombreux genre. Je vais au comptoir passer
ma commande, sans attendre Alexandre qui le remarque et me fait un petit signe de la main. La vendeuse
m’informe que mon livre devrait être là mardi ou mercredi au plus tard. Je lui laisse mon numéro de
portable afin qu’elle me prévienne dès la réception de celui-ci.
Je rentre préparer mon bœuf bourguignon pour ce soir, Tom ne tarde pas à me rejoindre en cuisine.
— C’était comment la piscine ?
— Bien, les enfants s’éclatent toujours autant. Émeline a un super niveau, elle va bientôt me rattraper
en termes de rapidité.
— J’aurais aimé voir ça. Répliqué-je sans retenue.
Thomas arrête la découpe des carottes, redresse la tête dans ma direction :
— Dois-je en déduire que tu souhaites nous accompagner la prochaine fois ?
— Si tu es d’accord, ça me ferait très plaisir. Avoué-je.
— Leur mère leur a dit que je voyais une autre femme, mais ils n’en savent pas plus… Ils n’imaginent
pas que je vis chez toi !
C’est vrai que nous pouvons dire que nous vivons ensemble, ça sonne drôlement bien dans ma tête.
Dix-neuf heures, je monte m’habiller avant de recevoir mes invités. Je reste un moment devant le
miroir à réfléchir à notre conversation, je vais peut-être bientôt rencontrer ses enfants, j’espère que je
leur ferai bonne impression, je pourrais devenir leur belle-mère ! Cette idée me fait peur, j’ai
l’impression qu’elle m’éloigne de la possibilité de porter un jour un enfant. Je sais qu’il est trop tôt pour
que je me pose ce genre de question, mais je ne tiens pas à apprendre dans deux ou trois ans, qu’il y était
opposé dès le départ… Alors que je rêvasse sur le bord de mon lit, j’entends des voix provenir du rez-
de-chaussée, mes parents sont arrivés et Tom est seul avec eux ! J’enfile rapidement la première robe que
j’attrape et descends les rejoindre.
— Ah vous êtes là ! M’exclamé-je devant eux.
Nous prenons l’apéritif dans le salon, j’en profite pour dresser la table dans la salle à manger, je suis
tellement nerveuse, que je laisse un verre m’échapper. Tom se précipite pour m’aider à ramasser et me
chuchote « détends-toi, ça va aller ». Ces petits mots me réconfortent, je finis par me poser dans le
canapé. Tom se serre plus près de moi et saisit ma main dans la sienne avant de la poser sur sa cuisse et
d’y entremêler ses doigts avec les miens sous le regard curieux de ma mère.

Chapitre 84

— Je suis confuse Thomas pour la dernière fois, je me suis emportée sans vous connaître. S’excuse
ma mère.
— Je peux comprendre que vous vous inquiétiez pour votre fille madame, mais sachez que je n’ai pas
abandonné mes enfants et que je ne trompe pas ma femme !
Il parle calmement en regardant ma mère droit dans les yeux, elle ne réplique rien semblant
légèrement vexée. Mon père change de conversation afin de détendre l’atmosphère.
Le repas se passe bien jusqu’à ce que maman réponde à un appel « Oui, nous sommes chez ta sœur,
entendu nous passerons vous voir demain. »
— C’était Lucie ? Lui demandé-je lorsqu’elle a raccroché.
— Non, Émilie. Elle voulait nous inviter à manger demain soir ton père et moi.
— Un autre repas en famille ! Mince, elle ne manque pas d’air quand même. M’offusqué-je.

Je constate que Tom est surpris par ma remarque, il pose sa fourchette sur la table et prétexte qu’il va
chercher du vin pour sortir de table.
— Alyssa, ta sœur nous a dit que tu étais d’accord sur le fait qu’ils entretiennent une relation.
— Maman, tu n’es pas stupide tout de même ! Ma chère sœur a tenté de se suicider, tu penses que
fragile comme elle, je peux lui dire le fond de ma pensée ? Crois-moi tu ne préfèrerais pas !
— Mais tu t’étais réconciliée avec elle… Dit-elle en paniquée.
— Je lui ai pardonné cet « acte isolé » car c’est ma sœur et qu’elle en souffrait vraiment. Mais je ne
m’attendais pas à ce qu’elle se jette dans ses bras aussi vite. Je ne peux pas leur interdire, mais ça me
pose questions… Tout à coup elle se découvre des sentiments pour lui parce que je viens de le quitter ?
Non je pense qu’elle en nourrissait secrètement depuis cette fameuse nuit. Et que dire d’Hugo qui insistait
pour que je lui laisse une seconde chance, il venait de me demander en mariage et maintenant il sort avec
ma propre sœur ! Toute cette histoire me dégoûte.
Tom dépose la bouteille au milieu de la table en la faisant cogner adroitement, provoquant le sursaut
général autour de lui.
— Aly, je peux te parler une minute ?
Ceci ressemble plus un ordre qu’à une invitation, aurais-je froissé son ego en parlant de mon ex ? Il
me prend la main sans la moindre délicatesse et nous conduit dans ma chambre à l’étage.
Il ferme la porte et me dévisage durement, je déteste quand il fait cette tête-là, j’envisage toujours le
pire.
— Aly, tu fais quoi là ? Gronde-t-il.
— Je n’ai pas le droit d’avoir une conversation avec mes parents ?
Thomas hausse le ton si fort que mes parents doivent l’entendre et débite d’une traite :
— Je pensais que tu voulais que le dîner se passe bien, que je fasse connaissance avec eux ce soir et
au lieu de ça tu entres en conflit avec ta mère au sujet de ton ex et devant moi à la première occasion. Je
ne devrais pas réagir ?
— Je suis désolée de t’emporter dans cette galère, mais mince Thomas, tu ne comprends pas le fin
mot de l’histoire ! M’emporté-je désemparée.
— De quoi est-ce que tu parles Aly ?
— D’Hugo et Émilie, ça ne laisse aucun doute, ils ont prémédité tout ça ! Je ne peux pas les laisser se
comporter comme ça, m’humilier de la sorte devant ma famille qui ne voit rien. C’est à moi de leur ouvrir
les yeux…
— Qu’est-ce que ça va changer ? M’interrompt-il contrarié.
— Je voudrais juste rétablir la vérité sur cette haute trahison.
— Que fais-tu de nous ce soir ? Tu n’étais pas prête, sinon tu me ferais passer au second plan. Admet
Tom avec une certitude déconcertante.
— Je …je…

Je suis bien incapable de justifier mon attitude auprès de lui, je l’aime mais ma rancune envers Hugo
me fait bondir à chaque fois. J’aimerais l’implorer de m’excuser, mais les mots ne sortent pas de ma
bouche…
Le visage de Tom pâlit, ses yeux rougissent et s’emplissent de larmes, je peine à le regarder car je
comprends à cet instant, qu’il décide de renoncer à moi ! Il n’a pas besoin de le verbaliser, c’est une
certitude que j’ai au fond de moi et ça me brise le cœur.

— Tom, dis quelque chose. Marmonné-je alors que ma vue se brouille.


Je retiens difficilement mes larmes de couler, je veux garder espoir.
— Tom, ne me quitte pas, je vais m’améliorer, je te le promets ! Le supplié-je entre deux sanglots
étouffés.
Il s’approche de moi, m’entoure de ses bras et murmure « je t’aime » avant d’effleurer ma bouche
avec ses lèvres salées, son visage est couvert de chagrin. Mon corps se contracte sous les spasmes, des
gémissements incontrôlables s’échappent malgré moi.
— Aly, je pense que nous nous sommes lancés trop tôt dans cette belle aventure. Bégaie-t-il.
Non ! Non ! Mon cœur hurle sa douleur en silence.
— Je t’aime ma belle, mais tu n’as pas fait le deuil de ta séparation, tu as besoin de plus de temps. Je
n’ai pas envie de te quitter mais…
Je plaque ma main contre sa bouche pour qu’il se taise.
— Non, je t’en prie, tais-toi ! Je t’aime et je ne veux pas plus de temps ! Tu es mon présent et lui mon
passé ! Lui affirmé-je en l’embrassant dans le cou.
— Aly, je suis désolé mais si je ne suffis pas à te combler pour te permettre de l’oublier alors notre
histoire doit prendre fin. Dit-il tremblant.

Sa déclaration m’achève, ses mots me frappent comme des coups de poignard en plein cœur, je
m’écarte de lui et recule jusqu’à m’effondrer sur mon lit, je lui crie dans un dernier effort « Va-t’en » et
entends la porte claquer…

Je sanglote dans mes mains et me recroqueville en position fœtale. Quelques minutes plus tard,
quelqu’un frappe … « Alyssa, c’est maman, je peux entrer ? » Demande-t-elle sans oser entrer. « Non, je
veux rester seule. Rentrez chez vous. »

La porte s’ouvre malgré mes réticences, des pas rapides se rapprochent de moi, alors que je redresse
la tête, Tom m’apparaît le visage en larmes. Il s’allonge sur le lit et me serre contre lui, j’essaie de me
retirer de son étreinte, mais il me garde prisonnière contre lui. Plus j’essaie de me débattre et de le
repousser, plus il resserre ses bras autour de moi. Lorsque ma lutte cesse, il approche son visage du mien
et me couvre de baisers, nos regards s’accrochent l’un à l’autre, puis se soudent. Tom place ses mains
autour de mon cou, je suis partagée entre le désir et la douleur jusqu’à ce que ses lèvres embrassent les
miennes dans un excès de passion, j’enroule mes jambes autour de sa taille, nos larmes se mélangent.

— Pardonne-moi bébé, j’ai essayé de te quitter, mais j’en suis incapable. Lâche Tom attristé avant
d’enfouir sa tête contre ma poitrine.
J’ai l’impression de renaître quand il admet ne pas pouvoir me quitter, j’ai vraiment cru le perdre ce
soir, j’étais anéantie.

Chapitre 85

Nous restons blottis l’un contre l’autre sans échanger un seul mot, seul les regards suffisent à nous
apaiser. Après quelques minutes, je me fais violence pour me détacher de lui.
— Tom, je dois aller voir mes parents.
— Je reste là, prends ton temps. Acquiesce-t-il.
Mes parents sont en train de débarrasser, je me confonds en excuses et leur demande de me laisser
m’en occuper.
— Alyssa, retourne auprès de lui, on va y aller. Suggère mon père.
— Je suis désolée, nous devions passer une bonne soirée et j’ai tout gâché.
— La situation n’est pas simple pour toi, mais la réaction de Thomas montre qu’il tient à toi.
Concernant Hugo et ta sœur, je pense qu’il va falloir que tu prennes ton courage à deux mains et que tu
aies une conversation avec eux deux ensemble ! Il est temps de crever l’abcès, sinon tu n’avanceras pas
de ton côté. Précise maman en prenant ma main.
Elle n’a pas tort, je risque de ressasser continuellement sans une explication franche de leur part.
Lorsqu’ils partent, je monte retrouver Tom, qui n’a pas bougé sur mon lit.
— Loin de moi l’idée d’avoir voulu écouter vos conversations, mais j’ai pu entendre ce que ta mère a
suggéré, je pense qu’elle a raison Aly. Il faut que tu affrontes Hugo, que tu lui dises ce que tu as sur le
cœur et que tu lui poses tes questions pour pouvoir te libérer.
— Peut-être, mais je ne veux plus que ça interfère entre nous. Précisé-je.
— Allez viens près de moi, je t’ai blessée tout à l’heure, je voudrais me faire pardonner.
— Je t’ai froissée la première, mais je ne pensais pas que tu aurais eu envie de me quitter Tom. Lui
dis-je encore secouée, tout en m’asseyant sur le lit.
C’est irréel ce qui s’est déroulé ce soir en présence de mes parents, notre première grande dispute,
nous étions sur le point de nous séparer et pourtant il est encore là.
— Aly, je regrette mes propos ! Regarde-moi bébé.
Je m’installe assise en tailleur face à lui, Tom saisit mes deux mains dans les siennes.
— Je voudrais t’expliquer ce que j’ai ressenti, mais j’ai peur de mal m’exprimer pourtant avec mes
fonctions, j’ai l’habitude de faire grands discours avec une certaine aisance devant une foule de personne,
mais devant toi, je ne suis que Thomas, toutes les autres étiquettes tombent. Quand je t’ai entendue parler
de ton ex, que j’ai vu ton visage, ta façon de t’emporter, j’ai pensé que je ne te suffisais toujours pas…
J’ai supposé que j’étais assez fort pour te quitter, mais ma faiblesse a pris le dessus quand je suis monté
dans ma voiture, j’ai été incapable de démarrer, je t’imaginais telle que je t’avais laissée, seule dans ta
chambre en pleurs par ma faute.
J’écoute attentivement ce qu’il me confie, il m’émeut par sa sincérité.
— Je te remercie Tom, rassure-toi tu me suffis !
— On dirait que ton besoin de réassurance est contagieux. Plaisante-t-il.
— Je sais que je manque de confiance en moi depuis toute petite. Y a besoin d’avoir fait des études
de psychologie pour savoir pourquoi…
— Raconte-moi, j’ai envie de tout savoir de toi.
— Je passe à la salle de bain me changer avant si tu veux bien. Prétexté-je car j’ai une envie
pressante après tout ce que j’ai bu ce soir.
Tom en profite pour aller se changer dans la salle de bain du bas pour nous faire gagner du temps. Ma
tête est affreuse, mes yeux sont gonflés et rougis, mon mascara a coulé, mes cheveux ne ressemblent plus à
rien. Je me démaquille et dépose un peau d’eau fraîche sur mes yeux.
Je suis la première à me glisser sous les draps, ce qui m’étonne car j’ai pris du temps… Que fait-il ?
C’est plus fort que moi, il faut que j’aille voir, je descends les escaliers sur la pointe des pieds, en
prenant soin d’éviter l’avant dernière marche qui grincerait comme à chaque passage. La lumière de la
salle de bain est éteinte. Mince. « Tom ? » Pas de suppositions Aly, non il n’est pas parti ! « Tom ? » Je
remonte les marches à toute vitesse pour voir s’il a laissé ses affaires. En entrant dans la chambre, je le
trouve allongé dans le lit ! Quel soulagement !
— Tu es là ! Lui dis-je essoufflée.
— Où veux-tu que je sois ? Tu n’es pas possible ! Je t’ai fait une déclaration cinq minutes plus tôt et
tu as cru que j’étais parti ? Ricane Tom.
Je fais mine de bouder, à quoi bon me défendre, il a tapé dans le mile. Je suis irrécupérable. Je rentre
dans les draps sans le découvrir, il me colle à lui, immédiatement, je constate qu’il est entièrement nu.
— Ça te plaît bébé ? Me chuchote Tom.
— Oui beaucoup. Lui dis-je en me débarrassant de ma nuisette.
— Attends une minute, ne crois pas que tu vas t’en sortir si facilement. Pas touche avant que tu ne
racontes l’origine de ce manque de confiance en toi.
Ah non, je suis frustrée, je n’ai pas du tout envie de parler maintenant.
— Je te parlerai après !
— Non, nous ferons l’amour après. Annonce Tom avec autorité.

Je commence par le fait qu’être la cadette d’une fratrie de trois n’a pas aidé. Lucie a toujours été
celle qui montrait l’exemple, celle qui fallait imiter, Émilie était la chouchoute, comme le sont tous les
derniers d’une tribu. J’ai toujours eu le sentiment de devoir en faire plus pour me démarquer d’elles.
Concernant mon instinct, je ne l’écoute plus, il m’a toujours fait défaut ! J’ai tellement d’exemple que
lorsque Tom me demande de lui en citer un, j’ai l’embarras du choix.
Les sujets de bac, les seuls que je ne pressentais pas du tout en sciences, en français et en histoire
étaient tombés. Le coup du permis de conduire, oh ça c’était pas mal ! J’étais avec Stéphanie, une autre
fille de l’auto-école, nous attendions l’examinateur, j’essayais de la déstresser. J’étais plutôt à l’aise au
volant, je ne m’en faisais pas trop ! Stéphanie m’avait dit le truc classique comme quoi, il fallait imaginer
le moniteur à poil et le stress passerait, je lui avais répondu que ça dépendait si nous avions à faire à un
gros poilu en pouffant de rire. C’est à ce moment-là que l’homme derrière nous avait manqué de me
bousculer en pénétrant dans l’auto-école. Il était ressorti peu de temps après et m’avait demandé de
monter dans le véhicule. C’est en m’attachant que j’avais pivoté la tête vers lui, j’avais pu constater qu’il
était rondouillard et que ses poils sortaient du haut de sa chemise, j’avais cru mourir de honte.
Coïncidence ou pas ce jour-là, je n’ai pas eu mon permis mais Stéphanie l’avait obtenu. Je remarque un
petit rictus sur le visage de Tom, cette histoire l’amuse.

J’ai des tas d’anecdotes dans le genre jusqu’à ce que je rencontre Hugo et que j’accepte de lui faire
entièrement confiance. Je m’étais convaincue que la roue avait tournée, maintenant je pense que j’étais
stupide de fermer les yeux sur son éloignement. À aucun moment mon instinct m’a dit qu’il avait couché
avec ma sœur !
Aujourd’hui, je ne veux plus être cette personne qui se laissera salir sans avoir pressenti ce qui se
passait.

Chapitre 86

— Voilà pour les confidences Tom. Dis-je pour conclure en jouant les victimes.
— J’ai compris ma puce… La seule fois où tu as accordé ta confiance, tu as été trahie. Je vais
continuer à te convaincre chaque jour s’il le faut. On va s’y mettre toute de suite et je vais commencer par
m’occuper de tes jolis seins qui me rendent fou depuis que tu as ôté ta nuisette. Ajoute Tom tout en se
penchant au-dessus de moi pour les embrasser. Il capture la pointe de mon sein entre ses lèvres, il tire
délicatement dessus avant de s’attaquer à son jumeau. Son souffle chaud parvient sur ma peau qu’il vient
d’humidifier, ça me fait frémir. Sa langue descend jusqu’à mon nombril, je commence à me cambrer.
Lorsqu’il atteint mon entrejambe, qu’il écarte mes cuisses pour s’installer, je sais à quoi m’attendre, je
retiens mon souffle jusqu’à ce que sa bouche entre en contact avec mon intimité.
— Tu as un goût délicieux bébé. Précise-t-il en redressant la tête pour s’assurer que je suis réceptive
à ses caresses.
Aussitôt, je tortille mon bassin pour qu’il reprenne son exploration, mon impatience semble l’amuser.
J’attrape sa tête entre mes mains et le plaque contre mon sexe brûlant de désir. Il promène ses doigts le
long de ma fente, effleure mon clitoris, dessine de petits cercles avec le bout de sa langue, provocant des
vagues de chaleur dans tout mon corps. Quand il s’aperçoit que l’excitation est à la limite de
l’intolérable, il reprend sa place au-dessus de moi et fixe son regard au mien. Je prends appui sur mes
pieds pour plier mes jambes et les écarter suffisamment pour qu’il se place au milieu.
Lorsqu’il prend enfin possession de mon corps, j’enfonce mes doigts dans ses fesses pour qu’il se
rapproche encore plus près de moi. Il effectue des mouvements rapides faisant frapper ses hanches contre
les miennes, m’arrachant des cris de plaisir. Je relève le bassin pour l’accompagner, lorsque ses
mouvements deviennent plus vigoureux, je me crispe et gémis à chaque rapprochement.
Pour me faire taire, Tom mordille mes lèvres douloureusement avant d’enfouir sauvagement sa langue
dans ma bouche. Mes ongles s’enfoncent dans ses omoplates au moment où je bascule, étouffant un
dernier cri dans son cou, il me rejoint sans attendre.
Tom s’allonge à côté de moi, je mets quelques instants à retrouver mes esprits puis me tourne pour lui
faire face. Il colle son nez au mien, sa respiration est encore rapide, il m’embrasse, je remarque que ses
lèvres ont le goût de sa sueur.
— Tu es renversante Aly ! Me susurre-t-il près de l’oreille.
— C’est toi qui l’es ! Répliqué-je essoufflée.
— Tu es une déesse au lit, tu le sais ?
— Arrête tu vas me faire jouir, euh rougir pardon. Bafouillé-je.
— Encore Aly ! Plaisante-t-il.
On peut considérer que nos réconciliations sont un succès, quel bonheur d’être dans ses bras et de se
sentir à ce point désirer. Nous ne tardons pas à nous endormir épuisés par nos ébats musclés.
Lorsque je me réveille, Tom termine de s’habiller, il a encore les cheveux mouillés.
— Tu as pris une douché bébé ? Lui demandé-je.
— Oui.
— Tu aurais dû m’attendre, je serais venue avec toi.
— Tu dormais bien, je ne voulais pas te réveiller et j’étais trempé de sueur après avoir été courir.
— Ah bon, mais il n’est que neuf heures.
— Je suis matinal, je vais nous préparer le petit-déjeuner pendant que tu prépares ma puce.
Je me traîne seule sous la douche, c’est moins tentant qu’avec lui. Je ressasse le repas d’hier soir, je dois
appeler mes parents ce matin pour m’excuser et je dois préparer ma visite chez Hugo ! Tom m’a dit qu’il
irait passer la journée chez lui, donc autant en profiter.
— Je pense être de retour vers dix-huit heures, ça ira ?
— Parfait Tom. Dis-moi, est-ce que ça t’embête si je me rends dans la journée chez Hugo pour cette
fameuse conversation ?
— Euh non, mais tu te sens prête pour ça ? Promets-moi de me prévenir si ça ne va pas !
— Oui papa ! Pas la peine de me faire les grands yeux. Précisé-je en levant les yeux au ciel.
— Aly, je ne plaisante pas. Je serai fâché si je rentre et que tu es en pleurs. Gronde-t-il.
— Promis je te préviendrai, d’ailleurs même si ça va, je te dirai que ça ne va pas, comme ça tu rentreras
plus tôt.
— Ma puce, tu sais que j’aimerais rester avec toi, mais…
— Je sais Tom, ne te justifie pas au sujet de tes enfants, ils sont ta priorité, c’est bien normal !
— Je t’aime Aly.
— Je t’aime Tom.
Midi, je me rends chez mes parents suite à l’invitation de ma mère ce matin, Lucie et là avec Sébastien et
les enfants. Nous parlons de la relation Émilie-Hugo qui soulève beaucoup de questions. Je me sens enfin
comprise, quand j’entends les interrogations de ma sœur sur les pseudos nouveaux sentiments d’Émilie.

Après quelques encouragements de leur part, je décide d’envoyer un texto à Hugo dans lequel je lui
demande si nous pouvons nous voir tous les deux cet après-midi. Il me demande de le rejoindre à quinze
heures chez lui.
Lucie est parvenue à rassurer ma mère sur le fait que Tom soit marié et père, elle lui a présenté les choses
différemment de moi. Je leur montre la photo de Tom et moi devant le Liberté.
— Wahou Aly, vous êtes superbes, vous formez un très joli couple. Il est très bel homme ce Thomas !
S’exclame Lucie.
— Merci, c’est vrai qu’il est canon, j’ai beaucoup de chance. Avoué-je en rougissant.
— Tu vas faire des présentations officielles à toute la famille pour tes trente ans la semaine prochaine ?
Demande-t-elle.
— Non, ce n’est pas prévu. D’ailleurs, je n’ai pas envie de les fêter.
— Tu feras au moins un gâteau en famille ? Interroge maman étonnée.
— Pourquoi pas, mais faut que je vois avec Thomas.
Quinze heures, je prends mon courage à deux mains et pars rejoindre mon ex dans mon ancienne demeure.
J’envoie un message à mon adoré pour l’en informer.

Moi : J’arrive chez « judas ». Je t’aime. Aly.
Tom : Courage ma belle, je pense à toi. Tiens-moi au courant. Je t’aime .tom.
Je m’attarde devant la porte d’entrée, le temps pour moi de me rappeler les véritables raisons qui me
poussent à venir ici. Rétablir la vérité pour mieux avancer !

Chapitre 87

Quand je pense être prête, je frappe vigoureusement à la porte, lorsqu’il ouvre et m’adresse son
sourire angélique, j’oublie ma colère. Je remarque immédiatement les photos de nous dans l’entrée, elles
sont restées à leur place malgré mon départ. L’odeur familière de cette maison éveille certains souvenirs
en moi, me coupant l’usage de la parole. Hugo n’est visiblement pas très à l’aise, je dirai même qu’il est
plus gêné que moi. Nous nous installons autour d’un café qu’il a soigneusement préparé à la cuisine.
Naturellement, je prends la place qui était la mienne et lui la sienne comme au bon vieux temps. L’espace
d’un instant, la situation semble presque normale. Hugo me regarde droit dans les yeux comme s’il me
défiait de pouvoir maintenir ce regard direct et franc. Ses prunelles d’un bleu si intense me troublent,
elles me rappellent qu’il n’y a pas si longtemps, j’appréciais ce contact visuel prolongé.

Sa main repose sur le bord de la table, elle n’est qu’à quelques centimètres de la mienne, j’observe le
mouvement répétitif de ses doigts, il est nerveux. Je me souviens de ses mains que je trouvais délicates et
attentionnées, les regarder me donnent la sensation de faire quelque chose de mal vis-à-vis de Thomas. Je
m’efforce de remettre les choses dans leur contexte, Hugo est désormais avec ma sœur. Cette piqûre de
rappel était nécessaire, parce que maintenant quand j’observe ses doigts, j’imagine qu’il les a posés sur
Émilie et cette idée me répugne.

Une dizaine de minutes s’est écoulée sans que nous échangions un mot, quand j’interromps cette
communication non verbale en lui demandant une petite cuillère.
— Émilie sait que je suis ici ? Demandé-je intriguée.
— Oui, elle est allée chez elle pour ne pas nous déranger.
— Je ne vais t’embêter très longtemps.
— Tu sais très bien que tu es la bienvenue ici Alyssa. Réplique Hugo.
— Je voudrais juste éclaircir quelques points avec toi pour…
J’aimerais lui dire que c’est une nécessité pour avancer, mais j’ai peur qu’il en déduise que je pense
toujours à lui.
— Juste pour savoir.
— Je répondrais à toutes tes questions, mais est-ce que tu prendras le temps de m’écouter, j’ai des choses
à te dire aussi.

— Oui je le ferai, mais tu dois être honnête avec moi


— Je te jure que je le serai, tu le sauras car tu as toujours su lire en moi. M’affirme Hugo.
— Non j’ai su à une époque, il y a bientôt deux ans que j’ai perdu cette capacité lorsque tu as commencé
à me mentir. Rétorqué-je contrariée.
— Maintenant que tu sais, je n’ai plus rien à te cacher, si tu te concentres, tu y parviendras.
C’est très embarrassant de devoir lui demander de rendre des comptes alors que nous sommes séparés,
j’aurai de la chance s’il accepte de répondre. Je bois une gorgée de café et me lance dans mon
interrogatoire sans fin…
— Avant cette fameuse nuit, avais-tu déjà porté ton attention sur ma sœur ? Est-ce qu’elle t’avait déjà
attiré ? Demandé-je en essayant de cacher mon inquiétude.
— Alyssa, lorsque je t’ai rencontrée, ta sœur était une gamine, jamais je n’aurais posé les yeux sur elle
de cette façon ! Au cours des dix années passées à tes côtés, pas une seule fois, je n’ai été attiré par ta
sœur, je te le promets. Répond-il rapidement.
— Et après que vous ayez couché ensemble, tu la voyais différemment ? Est-ce que tu y repensais ?
— Non, mais j’avais tellement bu que je ne me souviens de presque rien. J’y repensais dans le sens où la
culpabilité était permanente, je regrettais chaque jour de ne pas avoir les couilles pour tout t’avouer.
J’étais sûr de te perdre alors je me taisais comme un lâche.
Ses réponses sont spontanées, les mots qu’il prononce semblent le blesser.
— J’entends ce que tu me dis, mais comment as-tu osé, j’avais le droit de savoir ! Quand je pense que tu
m’as demandée en mariage alors que vous aviez ce secret en commun. Tu m’aurais laissée t’épouser sans
que je le sache ?
— Pour ne rien te cacher, je crois que pour te garder, je l’aurais fait. Déclare Hugo sereinement.
— Tu te poses en victime devant moi ? Tu veux me faire croire que tu étais prêt à tout pour me garder,
mais tu étais distant. Tu m’as laissée te quitter Hugo !
— Tu n’as pas besoin de me le rappeler, je le regretterais jusqu’à la fin de mes jours. Je n’arrivais plus à
être cet homme qui te faisait vibrer, parce que je savais ce qui c’était passé et que je ne pensais plus te
mériter.

Hugo a les larmes aux yeux mais continue de répondre face à moi. La question qui me taraude depuis
des jours est sur le point de sortir, j’appréhende énormément sa réponse, à tel point que je décide de ne
pas la formuler sous forme d’une interrogation.

— J’ai beaucoup de mal à croire que vous ne nourrissiez pas de sentiments l’un pour l’autre alors que
vous vous êtes retrouvés dès que nous nous sommes séparés toi et moi.
— Alyssa, qui te parle de retrouvailles ? Jamais il n’en a été question avec ta sœur, en tout cas pas pour
moi. Ce jour-là, il y a eu des dommages collatéraux, ta sœur par le biais de sa fausse couche et il est
possible… possible je dis bien, qu’elle se soit sentie depuis liée à moi mais jamais elle n’en a parlé. Je
n’ai pas le sentiment d’avoir un passé avec elle, c’est encore presque surnaturel de penser que j’ai pu…
— Et pourtant aujourd’hui tu es bel et bien avec elle et ne va pas croire que c’est de la jalousie ! De mon
point de vue, il n’y a que de l’incompréhension et du dégoût face à votre couple. J’en veux à Émilie
d’avoir eu le culot de me demander ma permission après ce que vous aviez fait ! Je sais que tu ne
m’appartiens pas et que vous étiez libres, mais sache que vous gâchez les belles années que nous avons
eues. Le fait que tu te balades fièrement devant moi avec elle au bras me ferait vomir ! M’emporté-je
exaspérée.
— Alyssa, je ne ressens rien pour ta sœur ! Je me suis laissé embarquer pour diverses raisons : la
première c’est que ça me rapprochait de toi, la seconde, ça lui permettait d’aller mieux. Je compte lui
dire que je ne ressens rien, mais je ne suis pas certain qu’elle l’entende et j’ai peur de sa réaction, car
nous savons qu’elle est fragile. Alyssa, c’est toi que j’aime et depuis dix ans.

Chapitre 88

— Non Hugo, ne me fais pas croire que tu es avec ma sœur pour être plus proche de moi !
— Évidemment je ne me suis jamais dit, oui j’accepte de sortir avec elle pour me rapprocher de toi,
mais je n’ai pas su gérer ses sentiments, j’ai été très surpris. J’ai eu peur de la blesser en la repoussant.
— Encore des mensonges, donc tu vas la faire souffrir.
— Dès le départ, je ne lui ai pas caché que je ne partageais pas ses sentiments, je lui ai même
expliqué qu’elle devait être perdue dans ses sentiments car je l’avais aidée à remonter la pente. Elle n’a
rien voulu savoir, elle m’a demandé d’essayer de t’oublier. Elle a attendu d’être certaine que tu ne
reviendrais pas et quand j’ai su que tu voyais quelqu’un d’autre, j’ai craqué. Lâche-t-il en étouffant un
gémissement contre son poing serré.
— Donc tu as voulu te venger de moi en apprenant que je fréquentais quelqu’un. Répliqué-je sans
chercher à le ménager.
— Mais non pas du tout, ça m’a fait mal de l’apprendre, tu n’as pas idée du coup de poignard que j’ai
reçu. Ce coup porté en plein cœur est une vive douleur chaque jour. J’ai compris que tu étais passée à
autre chose, tournant la page sur notre histoire et j’ai voulu survivre plutôt que de devenir fou en me
demandant sans cesse ce qu’il a que je n’ai pas. Tu veux que je dise à quel point ça me rend malade, je
m’interroge sur ce qui te plaît en lui, j’imagine d’autres mains que les miennes sur toi ! Putain Alyssa,
j’en crèverai de le voir te toucher, ce corps qui était le mien, j’espère chaque jour que dieu fait que tu vas
me revenir, mais plus le temps passe et plus l’espoir s’amenuise. Pourtant mes sentiments pour toi ne
faiblissent pas, j’essaie de me persuader que c’est une épreuve et que nous serons plus forts ensuite.
Impuissant devant moi, ses larmes coulent à flot. Il m’émeut mais ses propos me mettent hors de moi,
comment peut-il espérer que je revienne vers lui alors qu’il sort à présent avec ma sœur.
— Tu penses vraiment ce que tu dis Hugo ?
— Chaque mot.
— Tu te fous de moi, tu couches avec ma frangine avec laquelle tu m’as trompée et tu oses me dire
que tu voudrais que je revienne.
Il me dévisage stupéfait par ma réaction brutale.
— Je ne l’aime pas, je vais la quitter ! Je te jure que physiquement il ne s’est rien passé avec elle.
M’affirme-t-il avec fermeté.
— Depuis deux semaines que vous êtes ensemble, tu ne l’as pas touchée, tu penses que je vais gober
ça ?
— Demande-lui si tu ne me crois pas. Elle partage mon lit parce qu’elle a besoin de ma présence
depuis son accident, mais je ne pose pas les mains sur elle. Nous nous sommes embrassés plusieurs fois,
mais je ne ressens rien, je ne pense qu’à toi. Nous sommes séparés depuis deux mois, je ne vois pas
comment je pourrais…
— Tu sais que je me suis sentie humiliée par l’annonce de votre relation devant mes parents ?
Demandé-je abruptement.
Hugo pose sa main sur la mienne.
— Je n’ai pas d’excuses, j’ai agis comme un con ! J’ai su que tu n’étais plus célibataire, ta sœur était
là, elle était effondrée par la situation, j’ai laissé faire… Je remuerai ciel et terre pour te récupérer. Au
fond de toi Alyssa, tu as compris que toute la situation nous avait échappé à cause d’un dramatique
dérapage. Penses-tu que nous avons une chance même infime de réparer ce que j’ai provoqué ?
Retirant ma main, j’essaie de prendre du recul sur ce qu’il me dit. Il n’a pas tort quand il dit que la
situation nous a échappée depuis cette nuit. Sans ce dérapage, il ne se serait pas éloigné, je n’aurais pas
porté attention à Thomas et nous continuerions à filer le parfait amour.

Il y a cette petite voix qui me dit qu’il était ivre, qu’il n’était pas en possession de tous ses moyens…
moi aussi sous l’effet de l’alcool, j’ai pu avoir un comportement inadapté. Je ne veux pas l’en excuser,
car il m’a menti, mais je comprends pourquoi il l’a fait et pour la première fois, je me dis qu’à sa place,
j’aurais agis de la même façon. Concernant sa relation avec Émilie, ses arguments sont plutôt
convaincants. J’ai l’impression d’être face à une victime, sa vie a été entièrement chamboulée à cause
d’un seul incident…
— Si seulement tu avais pu me dire tout ça il y a deux ans, j’aurais sûrement été capable d’encaisser
après quelques semaines, tu nous as privés de cette chance. Lui dis-je les larmes aux yeux.
— Et pourquoi aujourd’hui tu ne le pourrais pas ?
— Parce qu’il y a eu trop de mensonges, trop de souffrances Hugo ! Pendant ces longs mois où je ne
comprenais pas ton attitude avec moi, j’ai tellement douté de nous. Tout serait différent si… enfin je ne
suis pas seule aujourd’hui.
— Non, ce n’est pas ton flirt qui te retient, qu’est-ce qu’il représente pour toi à côté de moi ? Je sais
que tu m’aimes encore sinon tu ne serais pas ici. Admets-le Alyssa !
— Je tiens encore à toi, mais tu te trompes Hugo. Il ne s’agit pas d’un flirt, c’est bien plus que ça. Il a
été ma bouée de sauvetage quand j’ai cru couler.
— Mais tu n’auras plus besoin de cette bouée si tu reviens à mes côtés. Précise Hugo en cognant ses
mains l’une contre l’autre.
— Mais je ne veux pas m’en séparer. Protesté-je.
À cet instant Hugo reste interdit, il ferme les yeux un moment, je remarque que sa respiration est plus
rapide, il déglutit plus difficilement. Je m’attends à toute sorte de question de sa part et je sais que les
réponses le feront souffrir. J’essuie mes larmes et avec le peu de courage qu’il me reste, je décide de
mettre un terme à ses espoirs.
— Hugo, tu dois tourner la page car tout est vraiment fini entre nous. Je dois t’avouer que je suis
tombée amoureuse de lui.
Bruyamment il recule sa chaise, se lève et s’éloigne dans le salon. D’ici, je l’entends pleurer. Les
coudes reposant sur la table, je prends ma tête entre les mains et m’effondre à mon tour.

Lorsqu’il revient auprès de moi, il a les yeux rougis, je peine à le regarder. Il pose sa main sur mon
épaule et me demande d’une voix calme :
— Comment il s’appelle ?
— Thomas.
— Est-ce cet homme marié dont tu m’avais parlé quand nous nous sommes séparés ? Demande Hugo
contraint.
— Oui, c’est lui. Je suis désolée.
— Putain, c’est moi qui t’ai poussée dans ses bras, je ne me le pardonnerai jamais. Il te rend
heureuse ?
— Oui, mais ce n’était pas prémédité Hugo.
— Moi non plus, je n’avais rien prémédité avec ta sœur, je m’étais promis de ne jamais de faire
souffrir et j’ai tout gâché. Je t’aime comme un fou Alyssa et si je ne peux pas t’avoir, je ne supporterai
pas de te voir au bras d’un autre. Je garderai contact avec mon filleul mais je vais partir loin d’ici sauf si
tu me donnes une raison de rester.
Lui donner une raison de rester ? Je quitte la table et me dirige vacillante vers la porte d’entrée,
suivie d’Hugo qui m’attrape la main. Je me retourne pour lui faire face, ses yeux sont remplis de
désespoir, il approche son visage du mien. Je recule.

Chapitre 89

Je reste derrière la porte, j’ai envie de partir en courant mais étrangement mes jambes sont lourdes
comme du plomb, mettre un pied devant l’autre en est presque douloureux. Je sais que je dois fuir avant
de faiblir, mais quelque chose me retient ici. Je suis tiraillée entre mon avenir et mon passé, l’envie de
rejoindre Thomas et la peur de ne plus jamais voir Hugo.
Je sais qu’il souffre réellement, je ne sais pas comment apaiser sa peine, je ne peux plus rien lui
apporter. Hésitante, je patiente encore quelques minutes quand la porte s’ouvre. Le visage couvert de
larmes, Hugo se précipite vers moi. Il saisit ma tête entre ses mains, agrippe mes cheveux entre ses doigts
et m’embrasse. Je retiens un cri de surprise en m’écartant de lui immédiatement.
— Pourquoi est-ce que tu as fait ça Hugo ? Lui demandé-je à la fois décontenancée et soulagée.
— Pourquoi es-tu encore là ? Surenchérit-il.
— Je m’apprêtais à partir, tu n’aurais pas dû…
— Je vais recommencer si tu restes là, je te l’ai dit je suis prêt à tout. Ajoute-t-il en faisant un pas
vers moi.
— Je préfère partir dans ce cas. Au revoir Hugo.
— Au revoir mon amour.

En arrivant chez moi, je m’allonge dans le canapé et repense à cet après-midi, à ses explications, à
son désarroi et au fait qu’il s’est jeté sur moi pour me voler un baiser. Il a changé, jamais l’homme que je
connaissais n’aurait fait une chose pareille, lui qui a toujours été pour les bonnes convenances. Émilie va
tomber de haut quand elle va découvrir qu’il ne veut plus d’elle, en même temps s’il a été clair comme il
le dit, elle doit s’y attendre. J’espère qu’elle ne s’imaginera pas que je suis responsable de leur
séparation.

Dix-huit heures, la sonnerie de mon téléphone retentit, j’ai un message de Thomas.


Tu es rentrée bébé ? Tout va bien ? Tom.
Je ne lui ai même pas envoyé de texto pour lui dire que j’étais à la maison.
Moi : Oui, je suis chez moi. Ça va ? Tu rentres ? Aly.
Tom : J’arrive dans ce cas.

Je prépare le dîner quand Tom me rejoint dans la cuisine. Il me fixe sourire pincé tentant d’évaluer la
situation. Est-ce de la compassion ? A-t-il seulement une vague idée de ce qui a pu se passer avec Hugo ?
Je n’ai pas envie de lui raconter, je sais que je vais mettre à pleurer sinon.
— Tu vas bien Aly ? Je m’inquiétais de ne pas avoir de tes nouvelles.
— Ça va, je n’ai pas eu le temps de t’écrire, tu l’as fait en premier.
— Tu venais d’arriver, donc vous avez pu vous parler un moment. Relève Tom.
— Oui en effet. Répliqué-je en évitant son regard.

Je suis embarrassée parce que mes lèvres et celles d’Hugo se sont rencontrées aujourd’hui, parce
qu’après les confidences qu’il m’avait fait, au fond de moi, j’en avais envie une dernière fois. Pourtant
quand il l’a fait, je l’ai repoussé mais j’ai dû me retenir de le remercier. Je crois que j’avais besoin de ça
pour clôturer notre histoire et pour me dire que ma sœur ne comptait vraiment pas pour lui.
Tom se place derrière moi et dépose un bisou sur mes épaules, un délicieux frisson me parcourt des
pieds à la tête, il me fait toujours le même effet.

— Aly, est-ce que tu cherches à fuir mon regard ? S’inquiète Tom.


— Non, non… non Tom.
— Ne t’en fais pas, je ne vais pas te demander de me raconter ce qui s’est passé si c’est ce qui te
tracasse, c’est votre histoire, ça ne me regarde pas. Moi ce qui m’importe ce que tu ailles mieux.
— Pourquoi faut-il toujours que tu sois aussi parfait Tom ? Demandé-je tout en passant mes mains
autour de son cou.
— Parce que tu as une chance inouïe ma puce. Plaisante-t-il.
— Je vais mieux, je crois que je viens de réaliser que je lui avais pardonné. Il va quitter ma sœur, il
ne ressent rien pour elle. Il m’a dit que si je ne cherchais pas à la retenir, il allait partir.
— Et tu as envie de le retenir ? M’interroge Tom sereinement.
— Je n’ai pas envie qu’il parte, mais je ne veux pas être celle qui le retiendra. Il m’a embrassée, je
l’ai repoussé aussitôt. Je voulais que tu le saches.
— D’accord. Ajoute-t-il en passant sa main dans mes cheveux.
— Tu n’es pas fâché ?
— Non, même si ça ne me fait pas plaisir. Vous avez vécu des années ensemble, votre histoire avait
besoin d’être mise à plat pour pouvoir être bouclée. Tu l’as repoussé et tu es avec moi maintenant.
— Merci Tom, je t’aime tellement.
— Je t’aime Aly. Dit-il en me serrant contre lui.
Ce soir ma vie prend une nouvelle direction, je ne me sens plus trahie par Hugo et Émilie. Fini de
dépenser de l’énergie chaque jour à haïr celui qui je chérissais, je ne me sens plus humiliée. Thomas
avait raison, c’était nécessaire de le rencontrer, communiquer m’a fait le plus grand bien. Aujourd’hui, je
reprends ma vie en main avec lui, il m’a aidée à me relever et il me donne envie de découvrir de
nouveaux horizons. Je ne douterai plus de lui, je l’aime tel qu’il est, c’est-à-dire marié et père.
Je suis à l’aube de mes trente ans et ma vie n’a jamais été aussi belle. Si je fais le bilan, même si
Hugo et moi sommes séparés, nous avons vécu une belle histoire. Depuis Cupidon a encore frappé, il ne
rate jamais sa cible, Thomas a été un véritable un coup de foudre. Je vais devenir cadre de santé et ce
projet me tient vraiment à cœur. La vie me sourit et je suis bien décidée à en profiter.

Chapitre 90

Les semaines suivantes passent très vite, j’ai de plus en plus de responsabilités, j’apprends à gérer
des tensions au sein de l’équipe. Je suis maintenant à ce poste depuis quatre mois et je n’ai pas envie que
ça se termine, pourtant l’école approche. Dans moins de deux mois, je ferai ma rentrée à l’école des
cadres à Rennes. Je suis tellement excitée par tout ce changement, Tom m’a promis qu’une fois les cours
débutés, nous ne cacherons plus notre relation au travail. Depuis peu, c’est devenu plus difficile de rester
discrets, nous avons nos petites habitudes, nos surnoms et en public, il faut tout oublier et je dois me
forcer à le vouvoyez pour n’éveiller aucun soupçon.
Demain cela fera trois mois que nous sommes ensemble, pour l’occasion nous allons au restaurant ce
soir à l’initiative de Tom. Depuis que j’ai parlé à Hugo, il y a un mois, je n’ai pas cherché à avoir de ses
nouvelles, mais j’ai su avec Lucie, qu’Émilie et lui avaient rompu le soir même de notre échange. Selon
Sébastien, Hugo aurait demandé une dispo d’un an pour partir en Corse, le départ serait dans les
prochains jours. Émilie a décidé de se laisser du temps avant d’entreprendre une nouvelle relation et
semble plus stable au travail. Nous nous sommes vues quelques fois au cours du mois, nous n’étions pas
très à l’aise toutes les deux.

Thomas a eu l’occasion de manger chez mes parents la semaine dernière et le repas s’est déroulé sans
drame, c’est une première ! Il semble bien s’entendre avec mon père, ils ont toujours des tas de choses à
se raconter. Avec maman, c’est différent, elle est plus réservée et Tom se souvient probablement de
l’accueil qu’elle lui avait réservé. Je ne m’inquiète pas, dans quelques temps, ça ira mieux.

Emma est venue passer le week-end dernier à la maison avec Anthony, elle a rencontré Tom, elle l’a
tout de suite apprécié. C’était important pour moi qu’elle approuve ma relation avec lui. Aurel a su tenir
sa langue depuis qu’elle a tout découvert, je dois avouer que depuis qu’elle et Emma sont au courant de
notre histoire, c’est plus facile à vivre pour moi.

Encore deux heures de réunion avant de rentrer me préparer pour notre soirée, le thème de cette
rencontre « améliorer la répartition du taux d’occupation des lits sur le pôle de médecine ». Le service
des urgences joue un rôle essentiel dans l’admission des patients au sein des différents services, la
médecine interne arrive en tête, suivie de la pneumologie, la médecine gériatrique, puis viennent les
services de cardiologie et de gastrologie. Thomas nous expose des statistiques défavorables pour les
derniers mois en comparaison avec l’année précédente. Selon lui certains services font preuve de trop
critères pour les admissions, pour améliorer les chiffres, il va falloir élargir la sélection. En sortant de la
salle de conférence, je regarde mon portable, j’ai un message :J’ai une surprise pour toi ce soir. Tom.
Moi : Un indice stp ? Aly.
Je ne m’attends pas à ce qu’il me réponde dans l’immédiat, il n’a pas quitté la salle. Je retourne dans
l’unité régler deux ou trois choses avant le week-end.
Moi : Je ne serai pas seul ce soir… tom.
Ses parents ? Ses enfants ? Ah non, j’aurais préféré n’avoir aucun indice, c’est l’angoisse de ne pas
savoir.
Sois plus précis, je sens que je vais me sentir mal sinon… aly.
Tom : Ce soir est une étape importante… une étape qui officialise notre couple…
Moi : Tes enfants ? Tes parents ?
Tom : Deux personnes m’accompagneront, je ne te dirai rien de plus. Je passe te prendre vers 19h
comme convenu ma belle. Ne t’en fais pas, tu seras parfaite.
Moi : Tu es cruel, tu sais que tu me mets la pression !

Il est malin, deux personnes, ça ne répond pas à ma question. Comment vais-je m’habiller si je dois
faire bonne impression ?
Après une heure d’hésitation, j’opte pour un pantalon noir et un chemisier blanc mais quand je passe
devant le miroir avant de descendre, je ne peux m’empêcher de penser qu’on va me prendre pour une
serveuse. J’ôte mon chemisier manquant d’arracher les boutons, car je prends trop de temps à le
déboutonner et que l’heure tourne. Finalement j’enfile une robe corail et choisis une veste bleu marine
pour trancher.

Enfin prête, j’attends la boule au ventre que Tom me rejoigne. Sa voiture arrive devant chez moi, j’ai
la nausée, la tête qui tourne, je ne suis pas certaine d’en avoir envie. Si je n’étais pas à la hauteur ?
Tom frappe et entre, je regarde derrière lui, il n’y a personne.
— Ils sont dans la voiture Aly. Annonce-t-il.
— Mais qui ? Demandais-je anxieuse.
— Tout va bien Aly, viens par là. Ajoute-t-il en pointant son index en direction de ses pieds.
Pourquoi tu t’inquiètes mon ange ? Ils sont pressés de faire ta connaissance.
— Arrête de jouer avec mon stress, j’ai peur de ne pas être à la hauteur et tu ne m’aides pas.
— Tu es magnifique Aly, donne-moi la main, nous y allons maintenant.
Je soupire et lui tends la main, il dépose un baiser sur celle-ci avant de m’attirer contre lui et
m’embrasse tendrement, ce qui me redonne le sourire instantanément.
Il m’ouvre la portière avant, je découvre ses enfants à l’arrière de la voiture.
— Bonjour. Dis-je simplement.
— Bonjour. Répondent-ils en souriant.
Je m’installe et jette un coup d’œil vers Tom, il me fait un clin d’œil.
Nous nous rendons dans un restaurant très chic à l’entrée de la ville, ce qui me surprend car Thomas a
toujours peur que nous soyons vus ensemble. Les enfants prennent place face à nous et restent me
dévisager. Émeline est une très belle jeune fille qui fait plus que son âge. Elle a les cheveux châtains, les
yeux verts. Et Yanis a la bouille de son père, les mêmes yeux noisette.
— C’est elle ta copine papa ? Interroge Yanis.
— Oui c’est elle, c’est Alyssa. Répond-il.
— Tu dois être Yanis et toi Émeline, je suis enchantée de vous rencontrer. Précisais-je.
— Papa avait raison, il a dit que tu étais belle. Révèle Yanis.
— Je te remercie.
Émeline lance un regard noir à son frère et lui lance un coup de coude avant de marmonner quelque
chose que je ne comprends pas. La soirée se passe bien, nous essayons de faire connaissance, Yanis parle
facilement, en revanche Émeline est plus renfermée et reste sur ses gardes. Elle me surprend quand elle
me lance en plein milieu du repas :
— Pourquoi tu n’as pas d’enfants, tu n’en voulais pas ?
Tom regarde sévèrement sa fille.
— Je n’ai pas eu cette chance jusqu’à présent.
— Ah. Maman dit que nous sommes ce qu’elle a de plus précieux. Ajoute-t-elle pour me provoquer.
— Elle a bien raison de vous dire ça. J’espère un jour avoir des enfants moi aussi. Dis-je
naturellement sans réfléchir au fait que ça puisse engendrer des questionnements autour de moi.
Comprenant que je viens de faire ma première gaffe, je tourne la tête vers Tom qui garde la tête
lourdement baissée dans son assiette. Émeline se retient de réagir, elle tortille nerveusement une mèche
de cheveux. Je m’excuse et quitte la table sous les yeux interrogateurs de Tom.

Chapitre 91

Je sors prendre l’air deux minutes, j’ai besoin de souffler. Tom a préféré ne pas relever ce que j’ai dit
concernant les enfants, sans doute parce que nous ne sommes pas seuls… Peut-être qu’il n’en veut plus
tout simplement ? Ce n’est pas le moment de me prendre la tête avec ça…
Je voulais les rencontrer, c’est chose faite, je savais que je n’allais pas être accueillie à bras ouverts.
Pourquoi est-ce que je me sens coupable face à ses enfants ? Ai-je quelque chose à me reprocher ? Non,
pas que je sache, ils étaient séparés…
Je remarque que je ne suis pas seule sur la terrasse. Un jeune homme est assis derrière moi, il fume sa
cigarette, il m’adresse un signe de tête.
— Bonsoir mademoiselle.
— Bonsoir, excusez-moi, je pensais être seule.
— Vous voulez une cigarette ? Me propose-t-il en tendant son paquet vers moi.
Alors que je m’apprête à décliner son offre, Thomas nous surprend :
— Aly ? M’interpelle-t-il intrigué.
Je refuse la proposition en le remerciant poliment.
— Aly, tu fais quoi ?
— Je prenais l’air, je viens.
Pas un mot pour me détendre, pour me réconforter avant de retourner à table, affronter sa fille qui n’a
pas sa langue dans sa poche. Je reprends ma place sous le regard amusé d’Émeline.
— Tu te sens mieux. Lance-t-elle avec une pointe d’ironie.
Je lui réponds par un large sourire mais préfère garder le silence. Un peu plus tard, alors que nous
passons au dessert, Émeline me fait passer un interrogatoire.
— Où est-ce que tu as connu mon père ?
— Au travail.
— Maman dit que papa est ton chef, c’est vrai ?
— Oui, c’est la vérité. Ta maman sait beaucoup de choses. Affirmé-je en cherchant le soutien de Tom
qui ne se sent pas concerné.
— Oui, elle a trouvé les messages que tu envoyais à mon père, ils se sont disputés après ça.
— J’en suis désolée. Ajoutais-je honteuse.
Tom se racle bruyamment la gorge et rappelle sa fille à l’ordre. Je n’ouvre plus la bouche pour le
reste de la soirée. Face à ses enfants, j’ai l’impression d’être un monstre, une voleuse d’homme sans
cœur. J’aimerais tellement que Tom leur dise que je suis arrivée bien après que leur mère ait provoqué
leur séparation. Il ne fera pas ça, il s’agit de leur maman, quel père essaierait de détruire les relations
familiales pour améliorer les relations avec sa nouvelle copine ?
En sortant du resto, nous prenons la direction du centre, pour aller déposer les enfants chez eux.
Quand nous nous garons devant sa maison, je me retourne vers la banquette arrière et leur dit bonsoir, ils
me répondent et sortent de la voiture. J’attends patiemment que Tom les raccompagne, lorsque je suis
seule, je lâche un long soupir de soulagement. Mes mains sont moites et tremblantes, cette soirée fut un
désastre.
Thomas remonte en voiture après quelques minutes et démarre sur le champ, nous roulons jusqu’à
chez moi sans nous parler. Il a dû se rendre compte que cette rencontre était prématurée, et doit le
regretter tout comme moi. J’ouvre le portail de garage, pendant qu’il rentre la voiture, je pars directement
me mettre en tenue pour la nuit à la salle de bain. Dès que j’entends les marches grincer, je cours me
mettre sous les draps. Au lieu de me rejoindre, Tom se rend à la salle de bain. C’est pire que ce que je
croyais, je pensais qu’en boudant, il viendrait me rassurer. L’attente se prolonge, je me remets en
question, peut-être que je l’ai déçu. Je n’ai pas beaucoup parler ce soir, j’ai gardé mes distances, car
j’avais l’impression d’être de trop. Pour Émeline, je suis l’intruse, celle qu’il faut chasser de leur vie
pour que ses parents se réconcilient.

Thomas avance lentement dans la pièce, sourire en coin, il attend ma réaction.


— Ils me détestent ! Dis-je la première avec désolation.
— Mais pas du tout, il leur faut du temps pour apprendre à te connaître.
— Inutile d’essayer de me rassurer, tu étais là ce soir, tu as bien vu que ta fille me hait.
— Elle ne te connaît pas Aly.
— C’était trop tôt !
— C’est eux qui ont demandé à te rencontrer, Estelle leur en a dit que je fréquentais quelqu’un et
depuis ils n’attendaient que ça. M’explique-t-il.
— Pourquoi leur a-t-elle parlé de nous ?
— Je t’ai dit que nous avions abordé le divorce avec eux le mois dernier, que nous avions beaucoup
discuté de la garde des enfants. C’est à ce moment-là qu’elle leur a appris que papa avait une nouvelle
copine.
— Alors c’est officiel, je suis la vilaine copine. Rétorquais-je.
— Ça ne s’est pas si mal passé je trouve. Émeline réagit comme ça, parce qu’elle a peur, elle prend
conscience que ses parents se séparent réellement. En revanche, Yanis avait les yeux pétillants, il est sous
le charme.
— Il est ton portrait craché ton fils, enfin ils sont très beaux tous les deux. Merci pour cette soirée, je
suis quand même contente que ce soit fini.
— Laissons leur du temps, ne remets pas notre relation en cause.
Samedi je passe la journée toute seule, Tom est avec ses enfants et l’objectif de ma journée, me
trouver une tenue pour la soirée d’Aurélie. Je suis en plein essayage quand mon téléphone sonne.
— Oui Aurélie ?
— Alyssa, Je t’appelle pour te dire qu’Hugo sera présent ce soir, je viens de l’apprendre par Julien.
Il a précisé qu’il partait lundi, qu’il en profiterait pour dire au revoir à toute la bande.
— Ah, ça m’étonne qu’il vienne sachant que je serai présente.
— Tu ne me lâches pas ce soir ! Je compte sur toi quand même ! Insiste-t-elle.
— Oui, je serai là pour t’aider à passer le cap de la trentaine ! Je t’avoue que ça me tracasse que Tom
passe la nuit chez lui.
— Pourquoi il ne dort pas chez toi ?
— Il ne préfère pas car je ne suis pas là.
— Si tu lui dis qu’Hugo est présent, il voudra sans doute venir, tu ne crois pas ?
— Non, il ne viendra jamais, pas avec autant de personnel de l’hôpital.
— Emma est avec toi ? Tu as trouvé ta tenue ?
— Non elle arrive en fin d’après-midi. Je suis justement dans la cabine d’essayage, je pense avoir
trouvé.
— Je te laisse le traiteur essaie de m’appeler. Bises à tout à l’heure.
Je sens que cette soirée s’annonce compliquée, nous avons beaucoup d’amis en commun, et pour la
plupart, nous ne nous sommes pas vus depuis des mois… Personnellement, je n’ai pas pris mon téléphone
pour annoncer notre séparation, donc si Hugo ne l’a pas fait, certains d’entre eux vont le découvrir ce
soir.
Une fois la tenue choisie, je rentre me préparer, j’en profite pour envoyer un message à Tom.
Tu ne veux vraiment pas venir ce soir ? Hugo sera présent…
Tom : Ah… non aly, c’est trop risqué.
Moi : Trop risqué pour qui ?
Tom : Tu sais bien…
Sa femme et ses enfants sont au courant de la situation, pourquoi continuer à se cacher ?

Chapitre 92

Emma me retrouve comme convenu à la maison vers dix-huit heures, après nos séances de
maquillage, nous sommes fin prêtes. Nous prenons un moment à nous observer dans le miroir, nous nous
félicitons du résultat !
— Nous sommes canons ! Atteste Emma.
— Tu es sublime Emma, on va immortaliser avec une photo, on va l’envoyer à Anthony, il va être fou de
savoir que tu sors comme ça sans lui !
— Ok, alors on l’envoie à Thomas aussi.
— Si tu veux, mais bon… il a choisi de ne pas venir lui, ce n’est pas comme Antho qui ne peut pas. Tu
sais bien que Tom flippe à l’idée d’être vu avec moi…
— Ah non Alyssa, ce soir pas de déprime ! On a rarement l’occasion de faire la fête ensemble, ce soir on
va fêter la trentaine d’Aurélie, mais aussi ton admission et ton financement pour l’école des cadres. Tu
me connais, je ne bois pas souvent, mais c’est peut-être une des dernières occasions avant que je me
lance dans les essais bébé ! Aurélie a loué un manoir, il va y avoir tous nos potes, crois-moi, tu n’es pas
prête d’aller te coucher ! Dit-elle décidée.
— Bien message reçu. Bon, on l’a fait cette photo ?
Nous prenons la pose et après une séance photo en mode crâneuse, nous en sélectionnons une pour
envoyer à nos hommes. Je choisis une photo d’Emma et moi, nous sommes dos à dos, mais sur les
hanches, nous jouons la provocation ! Ma robe bustier sans bretelle épouse parfaitement ma silhouette, sa
couleur bleu roi fait ressortir mon teint halé acquis au cours du mois de juin qui a été très ensoleillé. Je
l’envoie à Tom accompagnée d’un petit message :
J’aurais aimé que tu m’accompagnes… mais tu ne souhaites pas être vu en public avec moi…
Tom me répond dix minutes plus tard : Tu es irrésistible ! Aly, tu sais que j’aimerais être avec toi ce
soir. Sans parler de notre relation qui serait découverte, en tant que cadre sup, je ne me vois pas dans
ce genre de fête alors qu’il y aura du personnel de l’hôpital.
Qu’est-ce que ça veut dire ? Personne lui demande de se familiariser avec les collègues… ou bien il
a peur d’être moins respecté parce qu’il se montre aux bras d’une infirmière à une soirée…
Moi : Excuse-moi, j’avais oublié que tu tenais à ce point à ton image de chef inaccessible même
auprès de mes amis. Bonne soirée en famille !
Je range mon téléphone dans mon sac, je suis trop déjà trop contrariée, je ne veux pas savoir ce qu’il
va répondre. Nous partons avec la voiture d’Emma, nous nous arrêtons au bureau de tabac, c’est notre
truc depuis le lycée, nous apprécions quelques cigarettes lors d’une bonne soirée.
Vingt heures, nous arrivons au manoir, il y a des dizaines de voitures déjà sur place. Aurélie a dit que
nous étions une soixantaine ce soir et la plupart des personnes restent dormir ici. Elle a prévu diverses
animations, des jeux, de quoi nous occuper toute la nuit à l’entendre…
Aurélie nous rejoint sur le parking, elle est surexcitée, elle nous saute dessus et s’exclame « vous êtes
trop belles les filles. » Elle porte une longue robe de soirée noire fendue des deux côtés, elle est sublime
!
— Aurélie, tu es divine, où est le tapis rouge ? C’est le festival de Cannes ce soir ? Plaisantais-je.
— Tout le monde s’est mis sur son trente-un, ça fait plaisir. Suivez-moi, l’apéro se passe dans le jardin.
— Il est superbe ce manoir, tu as trouvé comment ? Lui demandais-je.
— En fait, il est à vendre et le propriétaire le propose à la location depuis peu pour des réceptions pour
le faire connaître davantage. Du coup l’offre était super intéressante. Nous avons juste un souci en cuisine
avec les fours, mais j’ai appelé quelqu’un qui est sur le coup.
Nous découvrons le vaste jardin privatif qui entoure le château, il y a de belles et longues allées
arborées, dans lesquelles s’érigent des statues en pierre de styles différents. Le parc est très bien
entretenu, le cadre est superbe. Nous rejoignons les invités, après quelques salutations, quelques
retrouvailles de longues dates, nous acceptons un verre de punch.
Quand Adrien et Adélaïde m’aperçoivent, ils m’interpellent. Nous ne nous sommes pas vus depuis
l’année dernière, depuis qu’ils sont partis vivre à Bordeaux, excepté quelques messages après leur
départ, nous n’avons pas vraiment eu de nouvelles.
— Salut Alyssa, qu’est-ce que tu deviens ? Ça me fait trop plaisir de te revoir. Me dit Adélaïde en me
serrant dans les bras.
— Wahou, je suis ravie de vous voir ici ce soir, je ne savais même pas que veniez. Ça va bien et vous
cette nouvelle vie ?
— Adrien commence à avoir sa patientèle régulière et je n’ai pas à me plaindre de mon patron !
Bordeaux est une ville super, c’est dynamique. Nous n’avons aucun regret.
— Tu m’étonnes, tu n’as pas à te plaindre de lui. Déjà quand il était interne dans notre service, il t’offrait
des fleurs, alors maintenant que tu es sa fiancée…
— J’ai appris que tu étais montée en grade aux urgences Alyssa ! C’est extra pour toi, je te félicite.
— Merci, bon c’est temporaire, je rentre à l’école en septembre, stressant mais c’est chouette comme
expérience.
— Et Hugo ? Demande Adrien.
— Il doit être là par-là, quelque part j’imagine. Dis-je en restant évasive. Je n’ai pas le courage
d’aborder le sujet.
— Tu n’as toujours pas la bague au doigt Alyssa ! Faut que je lui botte le cul ! Lance Adélaïde.
J’écourte la discussion et m’éloigne de la foule, je m’installe sur un banc où j’allume une cigarette. Emma
remarquant que je me suis isolée vient dans ma direction avec deux verres.
— Ça va ? Demande-t-elle inquiète, en me tendant un verre de punch.
J’acquiesce d’un simple hochement de tête, Emma pose sa tête sur mon épaule.
— Ça manque de ne plus te voir comme avant tu sais Alyssa. Me confie-t-elle.
— Moi aussi, tu es la personne qui me connaît le mieux. Pas besoin de mot avec toi.
Est-ce l’alcool ou la cigarette qui me donne la nausée ? J’ai comme des étourdissements.
— Emma, j’ai la nausée, faut que j’aille aux toilettes !
— Mince, tu ne vas pas être malade quand même !
— Non, non, c’est peut-être la cigarette, je n’ai pas fumé depuis des mois. Je te rejoins.
Je me dirige dans l’entrée du manoir, espérant trouver les toilettes rapidement. Prise d’un nouveau
vertige, je suis obligée de m’asseoir sur une marche de l’escalier. Aurélie est surprise de me trouver ici.
Elle est accompagnée d’une personne qui tient un trousseau de clé imposant.
— Qu’est-ce que tu fais là ? Ça ne va pas ?
— Si, je cherchais les toilettes, j’étais vaseuse.
— Ah mince. C’est au fond du couloir, sur la gauche. Je vais régler mon problème en cuisine et j’arrive.
Je garde la tête baissée, les yeux fermés une minute, la sensation de malaise s’estompe lorsqu’une voix
familière résonne dans le hall.
— Bonsoir Alyssa, tu vas bien ?
Je relève la tête, Hugo se tient debout devant moi. Aurélie revient précipitamment en me demandant si ça
va mieux.
— Oui, c’est passé.
Hugo me tend la main délicatement pour m’aider à me relever, je la relâche rapidement en le remerciant.

Chapitre 93

— Alyssa, tu veux t’allonger ? Demande Aurélie.


— Non, c’est passé, je me sens bien. La rassurais-je.
— Ok, je vous laisse tous les deux, n’hésite pas si tu as besoin.
Non, mais je ne veux pas rester seule avec lui !
— Je suis content de te voir ce soir même si c’est douloureux. T’es avec lui ?
— Je suis venue avec Emma.
— Tu es très … sexy, il est fou de te laisser sortir comme ça sans lui.
Faisant comme si je n’avais pas entendu sa remarque, j’évoque son départ.
— J’ai appris que tu partais lundi en Corse.
— Bien renseignée. Ajoute-t-il. Tu sais que tu peux encore m’en empêcher.
— Arrête Hugo, je ne le ferai pas.
— Ouvre les yeux Alyssa ! Ton Thomas n’est même pas là ce soir, où est-il ? Avec sa femme et ses
enfants ? C’est ce genre de vie que tu veux ?
Je n’en reviens pas de ce qu’il ose me dire, j’en reste bouche bée. Nous sommes interrompus par la
femme qui accompagnait Aurel tout à l’heure.
— Excusez-moi, je ne veux pas vous déranger mais pourriez-vous faire venir Aurélie ? Demande-t-
elle en fixant Hugo.
Hugo me jette un regard coupable et sort appeler Aurélie.
— Alyssa, c’est bien ça ?
— Oui. Dis-je étonnée.
— Si on m’avait dit que j’allais tomber sur la maîtresse de mon mari ce soir, je ne l’aurais pas cru.
Lâche-t-elle brutalement.
— Je vous demande pardon ? Dis-je en état de choc.
— Vous avez bien compris. Je suis Estelle Simon, la femme de Thomas, votre amant ! Articule-t-elle
avec insistance.
J’ai toujours eu le don pour me trouver dans des situations embarrassantes, mais celle-ci bat tous les
records. Aucun mot ne parvient à sortir de ma bouche, je reste paralysée devant cette femme !
L’information remonte mes circuits neuronaux, mon cerveau doit l’analyser avant de pouvoir donner une
quelconque réponse adaptée ou non. Je profite de ce laps de temps pour étudier cette mystérieuse femme
qui ne manque pas d’audace. Je peux enfin mettre un visage sur un prénom, elle est blonde, les cheveux
mi- longs, elle a les yeux bleus et le regard perçant. Les traits de son visage me semblent sévères, j’en
suis sans aucun doute la cause.
— Vous avez perdu votre langue dans la bouche de mon mari ou vous êtes simplement stupide ?
— Qu’est-ce que vous me voulez ? Repris-je offusquée.
— Cessez de jouer la vierge effarouchée, est-ce que tout ce petit monde sait que vous vous tapez mon
mari, qui est votre chef dans l’espoir d’avoir une promotion et peu importe qu’il ait des enfants.
— Vous voulez me culpabiliser ? Il m’a assuré qu’il était séparé avant que nous entamions une
relation et je ne bénéficie d’aucun traitement de faveur quoique vous en pensiez. M’emportais-je.
Aurélie intervient à ce moment-là, il ne lui faut pas plus de trente secondes pour comprendre ce qui se
passe.
— Alyssa ne l’écoute pas, viens avec moi. M’implore-t-elle.
— Non, elle peut dire ce qu’elle veut, ça m’est égal, elle ne m’atteindra pas.
Voyant que la situation lui échappe, Aurélie s’empresse de ressortir.
— Écoutez-moi bien, nous avons traversé une mauvaise passe, mais les choses s’arrangeaient pour
nous avant que vous…
— Non, vous l’avez trompé et il refuse de vous pardonner. Je suis au courant de tout, n’essayez pas
de…
— Vous êtes au courant de ce qu’il a bien voulu vous dire, je l’ai trompé une seule fois en effet. Nous
avons marqué une pause, mais les sentiments étaient plus forts et ont eu raison de nous. Qu’est-ce que
vous croyez qu’il se passe lorsqu’il dort à la maison ?
— Je sais que vous mentez.
— Thomas vous a parlé de notre petit séjour à l’hôtel à Rennes au mois de mai ?
— Il est allé à Rennes dans le cadre de son travail mais il y est allé seul. Dis-je en sentant l’angoisse
monter.
C’est impossible, il n’aurait jamais fait ça. Pas mon Thomas, il a dit qu’il m’aimait.
— Vous croyez, que je me souvienne bien, il était embarrassé à l’idée de revenir et de devoir vous
faire passer cet entretien pour le financement de votre formation. Il avait peur d’un faux pas de votre part,
car il n’a pas envie que votre aventure soit découverte à l’hôpital. J’ai supporté cette aventure, car c’était
le prix à payer pour l’avoir trahi, il avait été très clair en m’accordant une seconde chance, il se
vengerait. Maintenant, il ne va pas tarder à vous quitter.
Oh mon dieu !
Je me retourne alertée par le bruit qu’il y a derrière nous. Je découvre une dizaine d’invités assistant
à la scène. Secouée par le choc de cette révélation, je manque d’air, je suffoque, puis m’évanouis.
Lorsque je reprends connaissance, Hugo et Emma sont auprès de moi. Emma est en pleurs. Que s’est-
il passé ? Ai-je imaginé que Thomas m’avait trahi ? En regardant autour de moi et en constatant la
présence d’Estelle, j’en déduis que tout est réel. Hugo entre dans une colère noire et vire Estelle sur le
champ. Pendant ce temps, je m’assois, j’ai la tête qui tourne. Hugo se jette sur moi et me prend dans ses
bras et me soulève du sol. Il se dirige vers l’espace chambre et m’allonge sur le premier lit qu’il trouve.
Emma et Aurélie sont dans tous leurs états.
— Je te jure que je ne savais pas qui était cette femme Alyssa ! S’excuse Aurélie. C’est elle qui m’a
remis les clés pour la location du manoir car le propriétaire vit en Angleterre. Si j’avais pu imaginer…
Je reste mutique, je suis trop bouleversée. D’abord Hugo, puis Émilie et maintenant Thomas… Je ne
peux l’accepter, c’est trop, c’est au-dessus de mes forces. Mais merde, je l’aime. Il ne voulait pas se
montrer avec moi, pourquoi est-ce que je n’ai pas compris ? Pourquoi avoir présenté ses enfants, ça n’a
aucun sens. Pourtant sa femme a dit des choses que personne ne savaient à par lui et moi…

Je suis en état de choc, les personnes qui m’entourent me parlent mais je ne comprends plus ce
qu’elles me disent. Je vois des lèvres bouger, mais je suis incapable de déchiffrer le sens de leurs
propos. J’étais dans une bulle, la vie était merveilleuse depuis quelques semaines et voilà que tout
s’écroule. Ma mère m’avait mise en garde, je n’ai rien voulu savoir…
Quand je pense que Thomas a volé à mon secours la nuit où Hugo et moi nous nous étions violemment
disputés… ironie du sort, ce soir c’est lui est là pour me soutenir.
— Aurélie ?
— Oui Alyssa.
— Excuse-moi de gâcher ta fête.
— J’m’en fous de cette fête pourrie, c’est toi qui m’importe. Réplique-t-elle.
— Non, tu as plein d’invités, ils ont fait la route pour toi. Je vais rentrer, j’ai besoin de digérer tout
ça et demain ça ira mieux. Je veux que tu t’amuses. Ce n’est pas la fin du monde, je m’en remettrai. Dis-je
pour la rassurer.
— Alyssa, tu es sûre ? Insiste-t-elle.
— Oui, promis. Thomas et moi ce n’était qu’une aventure… ça fait mal mais voilà c’est fini.
M’efforcé-je de lui dire calmement.
Emma répète qu’elle veut m’accompagner, mais je refuse, je veux juste rentrer me coucher et je
préfère qu’elle profite de la soirée pour laquelle elle a fait le déplacement. J’accepte qu’Hugo me ramène
chez moi.

Chapitre 94

Aurélie fait diversion pour que je puisse sortir à l’abri des regards curieux. Hugo glisse son bras
dans mon dos pour me soutenir jusqu’à la voiture, je le laisse faire, car mes jambes flageolent. Emma
nous accompagne jusqu’à la voiture, Hugo m’ouvre la portière, j’enlace Emma une dernière fois.
— Laisse-moi t’accompagner Alyssa ! Propose-t-elle à nouveau.
— Non Emma, je ne veux pas. Aurélie tient à cette soirée, je vais me coucher et demain quand j’y
verrai plus clair, je vous rejoindrai mais en attendant amuse-toi ma belle. Lui dis-je.
— Je t’adore Alyssa. Si tu as besoin, appelle-moi !
Hugo ne dit pas un mot pendant le trajet, je n’ai pas envie de parler non plus. Je ne réalise pas ce qui
vient de se passer, les larmes ne sont pas montées. Il doit y avoir une explication plausible, Thomas n’a
pas pu jouer avec moi de cette façon. Je le croyais quand il disait qu’il m’aimait, je le ressentais même
dans sa façon de me regarder, de me désirer, de me toucher, de me parler… Cela faisait trois mois jour
pour jour que nous étions ensemble, que nous sommes ensemble ? Est-ce que notre histoire est finie ?
Je dois lui parler, il faut qu’il me dise sa femme a craché son venin par méchanceté et que tout est
inventé. Je ne peux pas m’empêcher de chercher des raisons qui expliquent ce qu’elle a précisé, comment
pouvait-elle savoir pour mon entretien… Je me souviens que le jour où il m’a annoncé son départ pour
Rennes, il était distant, il avait précisé s’être disputé avec sa femme, il n’a jamais dit qu’il partait avec
elle, je suis sûr qu’il ne l’a pas fait et le week-end qui a suivi, il m’avait sorti le grand jeu avec le
spectacle…

Arrivés devant chez moi, je remercie Hugo, espérant qu’il ne va pas vouloir entrer.
— J’aimerais rester avec toi ce soir, je prendrai ton canapé. Demande-t-il sans surprise.
— Non, ce n’est pas une bonne idée. C’est vraiment très gentil à toi de m’avoir raccompagnée malgré
les circonstances, mais je voudrais rester seule à présent.
La déception sur son visage se lit immédiatement, il accepte ma décision à contre cœur. Il passe sa
main dans ses cheveux comme à chaque fois qu’il est dépassé, il n’a pas perdu cette habitude. Il
s’approche de moi et dépose un long baiser sur mon front avant de partir. J’apprécie son geste
réconfortant.
C’est en refermant ma porte d’entrée, que je réalise à quel point la soirée a été catastrophique. Je sors
mon téléphone de mon sac à main et découvre un grand nombre d’appels en absence, ils sont tous de Tom.
Il a passé ses appels dans la dernière demi-heure, j’en déduis qu’il sait...

Lorsque j’envisage de monter me coucher, je suis interpellée par des bruits provenant de l’extérieur.
Je me précipite près de la porte et entends des voix s’élever de plus en plus fort, j’ouvre et reste horrifiée
en constatant que Tom et Hugo se battent devant chez moi, Thomas reçoit un coup de poing au visage,
alors qu’il s’apprête à le rendre, j’accours pour m’interposer entre eux deux. Il m’esquive et finit par
rendre le coup à Hugo. Je leur crie d’arrêter, mais ils ne m’écoutent pas, ils se déchaînent l’un sur l’autre.
Bientôt la bagarre se poursuit au sol, quand Thomas empoigne le col d’Hugo, il place son poing serré
à quelques centimètres de sa tempe :

— Dégage d’ici, tu n’as rien à foutre là. Lui hurle Thomas.


— Va te faire foutre, c’est toi le connard aujourd’hui. Répond Hugo en essayant de se libérer.

Les coups échangés sont violents, je ne sais pas comment les séparer, je les supplie en pleurs
d’arrêter et me laisse tomber à genoux sur le sol. Ils s’interrompent enfin et me regardent figés sur place.
Tom s’avance lentement près de moi et pose sa main sur mon épaule.
— Ne me touche pas ! M’écriais-je.
Thomas très surpris par ma réaction ôte sa main.
— Aly. Lâche-t-il désemparé.
Il me dévisage avec incompréhension, n’arrivant pas à soutenir son regard, je baisse la tête. Hugo
intervient, il tend la main et m’aide à me relever sous les yeux impuissants de Tom.

— Tu n’es pas obligée de lui parler Alyssa ! Suggère-t-il en essuyant le sang qui s’écoule de son
arcade sourcilière.
— Hugo tu es blessé ! Constatais-je avec effroi.
— Ce n’est rien, je n’ai pas mal. Dit-il pour me rassurer.
— Pourquoi est-ce que vous vous êtes battus ?
— Je ne voulais pas le laisser rentrer chez toi, pas après ce qu’il t’a fait. Ajoute-t-il écœuré.
— Hugo, j’ai besoin de lui parler. Je te remercie pour ce soir, mais il faut que tu partes maintenant.
— Si c’est ce que tu veux…
Il remonte dans sa voiture sans se retourner, j’ai le cœur serré dans un étau au moment de son départ.
Il ne s’était jamais battu pour moi.
— Tu acceptes de me parler ? Demande Tom lorsque je lui fais face.
— J’aimerais surtout que tu m’expliques, parce que j’ai la sensation d’avoir été menée en bateau
depuis trois mois.
— Merde Aly, tu ne vas pas la laisser nous manipuler ! Se fâche-t-il.
— Tu n’étais pas là ce soir, quand elle m’a humiliée en public devant mes amis et mes collègues de
travail ! Crois-moi ses propos étaient très réalistes. Rentrons, nous nous sommes assez donnés en
spectacle.
Lorsque Tom entre dans la salle à manger, la lumière met en évidence ses blessures, témoignant de
l’intensité de leur bagarre. Son visage est tuméfié, il a la lèvre inférieure fendue, une paupière enflée. Je
me retiens de le serrer contre moi, j’ai envie d’embrasser son visage pour le réconforter.
— Est-ce que tu veux de la glace pour ton œil ?
— Je m’en fous de mon œil Aly ! Qu’est-ce qu’Estelle t’a dit ce soir ?
— Non c’est à toi de répondre à mes questions !
— Je vais le faire, comme je l’ai toujours fait jusque-là ! M’assure-t-il.
J’ai besoin d’une minute pour ne pas m’effondrer, je cherche par où commencer.
— Est-ce qu’au cours de ces trois derniers mois, tu as touché ou embrassé ta femme ?
— Jamais ! Putain tu le sais Aly que je ne l’ai pas fait ! S’énerve-t-il.
— Non, je n’ai plus aucune certitude. Est-ce que tu lui avais dit que tu te vengerais d’elle parce
qu’elle t’avait trompé ? Dis-je haletante.
— J’ai... oui, mais je ne l’ai pas fait !
— Quoi ?

Mince, il s’est vengé, elle avait raison…


— Je lui avais dit ça sur le coup de la colère quelques jours après avoir découvert sa tromperie.
Mais je te jure que je n’ai jamais eu l’intention de le faire, quand je me suis rapproché de toi c’était
sincère ! Se défend-t-il.
— Mais pourquoi lui avoir dit ça ? Comment puis-je te croire maintenant ?
— Je ne t’ai jamais menti Aly !
— Ah oui, tu en es sûr ? Tu n’étais donc pas avec elle à Rennes lors de ton déplacement pour le
travail au mois de mai ? Regarde-moi dans les yeux pour me répondre !
J’ai la gorge nouée depuis qu’il m’a avoué avoir dit qu’il se vengerait. Tom frappé d’étonnement se
décompose devant moi.
— Pardon ?
— Tu as très bien compris ma question. Oui ou non tu étais avec elle à l’hôtel à Rennes ?
— Aly, ne prends pas de raccourci, je t’en supplie.
— Réponds-moi ! J’ai le droit de savoir.
— Oui elle était là. Lâche-t-il froidement.

Chapitre 95

Je n’arrive pas à y croire, il vient d’admettre qu’il était avec elle à l’hôtel.
— Sors de chez moi Thomas !
— Non Aly, écoute-moi. Je comprends que tu sois fâchée, mais il ne s’est rien passé !
— Je ne veux plus rien savoir ! Tu m’as menti sur ça et sur d’autres choses, tu t’es bien foutu de moi à
ce moment-là ! Ma voix s’étrangle, je suis à deux doigts de craquer.
— Aly, je suis fou de toi, laisse-moi t’expliquer. Supplie Tom désespéré.
Je n’entends plus ce qu’il essaie de me dire, je me mets à hurler à plein poumon tout en le repoussant
brutalement, lorsqu’il essaie de me toucher le bras :
— C’est terminé, il n’y a plus d’Aly, va-t’en, sors de ma vie !
Ma poitrine se soulève au rythme saccadée de ma respiration accélérée face aux larmes qui
ruissellent sur son visage écarlate. Tom s’effondre, ses épaules sont secouées par les sanglots, il est
anéanti tout autant que moi. C’est insupportable de le voir dans cet état-là, j’évite son regard. Tom sort
précipitamment en claquant la porte derrière lui.

Terrassée par cet aveu mortel, je m’écroule sur le sol en pleurant toutes les larmes de mon corps.
Comment cela a-t-il pu m’arriver encore ? Il était tellement parfait, il m’a laissée tomber amoureuse de
lui, alors qu’il avait soif de vengeance. Lui manipulateur, jamais je n’aurais pu l’imaginer. Je souffre
comme je n’ai jamais souffert, pleurer ne me soulage pas, l’entaille est profonde. Je suis incapable de
bouger, le simple fait de respirer me fait mal.
Les heures passent, la douleur reste la même, quand je commence à frissonner sur le carrelage froid,
je me relève pour aller au lit. J’ôte ma robe et enfile un tee-shirt de Tom, je me glisse sous les draps avec
mon portable. Inévitablement, je regarde l’unique photo de Tom et moi, je place l’écran contre ma
poitrine et laisse mes souvenirs m’envahir. Je pose ma tête sur l’oreiller qu’il utilisait jusqu’à ce matin et
son odeur m’apaise enfin. Je m’endors au milieu de la nuit en me berçant d’illusions.

Réveillée par la sonnerie de mon téléphone, j’entrouvre les yeux pour répondre, il est neuf heures.
C’est Emma.
— Oui ? Dis-je à moitié endormie.
— Je te réveille Alyssa ? Excuse-moi, je voulais savoir comment tu allais. Est-ce que tu veux que je
passe ?
— Je dormais. Non ne viens pas, je vais glander dans mon lit ce matin. La soirée s’est bien passée ?
— Oui ça s’est bien passé. Mais tu sais Aurélie se culpabilise, elle se sent responsable pour hier
soir.
— N’importe quoi, tu peux la rassurer, ça n’a rien à voir avec elle. Et puis, je préfère l’avoir appris
maintenant que dans quelques mois.
— Tu lui as parlé ? Est-ce que tu es sûre qu’elle n’a pas tout inventé ?
— Il est venu à la maison hier soir, il s’est battu avec Hugo… C’était affreux. Nous avons
communiqué et je sais qu’il m’a menti, je ne veux plus rien savoir à présent. Je suis tellement dégoutée,
enfin je ne veux plus en parler. Excuse-moi auprès d’Aurélie, je ne viendrai pas aujourd’hui. Je passerai
l’après-midi chez mes parents, je ne suis pas d’humeur à voir les potes. Quand je pense qu’ils ont assisté
à cette scène…
— Alyssa, personne ne sait ce qui s’est passé en dehors d’Aurélie, Julien et moi. Ils ne savent pas de
qui vous parliez, ils ont compris que tu n’étais plus avec Hugo. Bon, je t’appelle quand je serai rentrée
chez moi ce soir si tu préfères rester seule. Bisous ma belle.
— Merci Emma. Bonne journée.
Je raccroche. Je regarde ma chambre, je la trouve bien triste tout à coup. Je n’ai pas envie de me
lever, personne ne m’attend… La dépression me guette, je sens bien que j’ai perdu la foi en même temps
que je l’ai perdu. Je ne sais pas comment je vais pouvoir aller travailler, si je dois le croiser, si je dois
lui parler, je ne peux pas ignorer ce que je ressens pour lui. Je l’aime autant que je le déteste !
Je passe la journée entre mon lit et mon canapé sans quitter les fringues de Tom, les films dramatiques
défilent, les paquets de mouchoirs vont vite s’épuiser à ce rythme-là. J’échange quelques messages avec
les filles, mais je n’ai aucune nouvelle de lui.
Vers dix-huit heures, j’entends frapper, je me lève étourdie du canapé. Je n’attends personne et je ne
suis pas présentable. J’hésite à demander au travers de la porte qui est là, mais avant de me décider à le
faire, la voix d’Hugo retentit.
— Alyssa, c’est Hugo. Ouvre-moi s’il te plaît, je sais que tu es là.
Hugo, mais pourquoi est-il ici ? Je déverrouille la porte et le laisse entrer.
— Qu’est-ce que tu fais là ? Demandais-je honteuse.
— Comment vas-tu ? S’inquiète-t-il.
— Je fais aller… tu vois bien.
— Je n’avais pas mesuré à quel point tu étais attachée à lui. Précise-t-il avec désolation. Alyssa, je
suis désolée de t’embêter, mais comme tu le sais, mon avion décolle demain matin…est-ce que les
évènements d’hier peuvent avoir une conséquence sur nous même dans quelques mois? S’il y a la moindre
chance pour nous, je ne pars plus. Je sais que tu dois avoir besoin de temps, mais mon départ étant
imminent, il fallait que je te parle.
— Hugo, tu ne dois pas rester pour moi. J’ai déjà du mal à me projeter à demain alors imaginer ma
vie dans les mois à venir, c’est impossible. Je vais me concentrer sur mon année d’étude uniquement, j’ai
eu mon lot de déception.
— Je suis prêt à t’attendre longtemps. Je t’ai fait souffrir alors que je t’aime comme au premier jour,
je ne pourrais jamais me le pardonner.
— Hugo, je t’ai pardonné, maintenant nous devons nous reconstruire mais nous devons le faire
séparément.
Nous nous enlaçons tendrement avant de se dire au revoir une dernière fois.
Je ne peux rien avaler ce soir, je me couche sans dîner après avoir reçu l’appel d’Emma. Je suis
épuisée physiquement et moralement, j’ai versé une quantité inimaginable de larmes aujourd’hui. Si
seulement Tom pouvait être là ce soir, il me tiendrait la main, je poserais ma tête sur son torse pour
entendre les battements de son cœur. Sa présence me manque, je suis une enveloppe vide sans lui. Il
représentait tout pour moi depuis trois mois, d’ailleurs, je m’étais presque coupée du reste du monde…
La vie est trop injuste, n’ai-je pas le droit au bonheur ?

Lundi matin, je sors de mon lit encore sonnée de la veille. Ma tête est lourde, malgré les heures de
sommeil, les céphalées sont toujours présentes. J’avale un antalgique, mais dix minutes plus tard, il finit
au fond des toilettes. Nous sommes le cinq juillet ! Y a réunion de pôle, elle est animée par lui. Cette
journée s’annonce insurmontable à tous points de vue. Après une nouvelle crise de larmes, je me regarde
dans le miroir, je suis méconnaissable, je suis livide, cernée avec des énormes poches sous les yeux. Le
maquillage n’y changera pas grand-chose, je mets rapidement une touche de mascara pour agrandir mon
regard et une pointe de rouge à lèvres pour donner un peu de couleurs à mon visage blafard.
Je me garde derrière l’hôpital pour éviter le maximum de personnes, j’appréhende des échos de la
soirée d’Aurélie… j’ai un mauvais pressentiment.

Chapitre 96

J’arrive à mon bureau sans avoir croisé de collègues, premier exploit. J’enfile ma blouse, pour la
première fois depuis quatre mois, je regrette vraiment mon poste d’infirmière. Je n’ai pas envie
d’endosser ce rôle aujourd’hui, entendre les remarques de l’équipe qui subissent la mauvaise humeur des
médecins, m’occuper des soucis de chacun, égoïstement j’ai envie de rester dans ma bulle. Je ne veux
surtout pas de plaintes au sujet des plannings qui posent soucis à l’un ou l’autre parce qu’avec ma
migraine, je crois que je pourrais envoyer balader facilement.
Je consulte mes derniers mails quand Lara me salue énergiquement.
— Bonjour Alyssa.
— Bonjour Lara.
— Sandra a appelé il y a une heure, elle est arrêtée, elle doit se faire opérer du genou suite à une rupture
des ligaments je crois.
— Mince, en plus elle devait bosser cet après-midi. Les plannings d’été sont déjà serrés.
— Monsieur Simon a été averti par Sandra, il va revenir, il est déjà passé mais tu n’étais pas arrivée.
— Je te remercie Lara.
Non, j’avais espoir de ne pas le voir avant la réunion cet après-midi. Est-ce que je peux fuir maintenant ?
L’angoisse est oppressante, il me faut un plan B. Trop tard, j’ai reconnu sa voix à l’instant. Il n’est plus
qu’à quelques mètres de moi, les larmes montent. Plus j’essaie de me raisonner, plus je suis sur le point
d’exploser en sanglot. Lorsque sa main cogne contre ma porte, je suis affolée. Mon cœur est sur le point
de sortir de ma poitrine.
Lentement, je redresse la tête dans sa direction, je croise son regard un dixième de seconde, c’est une
torture. J’ai aperçu son visage meurtri par les coups qu’il a reçus samedi soir, les hématomes sont
violacés. Il est plus abîmé qu’Hugo. Je me demande comment il va justifier ça au travail…
— Bonjour Alyssa.
J’ai rêvé toute la nuit de l’entendre prononcer mon prénom, maintenant qu’il l’a fait, je me retiens de lui
sauter au cou.
— Puis-je entrer ? Demande-t-il gêné.
— Puis-je refuser ?
— Je n’en ai pas pour longtemps, il faut que je regarde les plannings par rapport à Sandra. Précise-t-
il d’une voix calme.
Je saisis le classeur et le dépose brusquement sur le bord de mon bureau.
— Je vois. Ajoute-t-il.
Thomas s’avance dans la pièce et s’empare du porte document, puis s’assoit face à moi. Je ne sais pas
s’il me regarde car je prends soin de garder la tête parfaitement baissée. Incommodée par sa présence, ne
pouvant contenir davantage mes larmes, je me lève rapidement et sors du bureau. Je pleure à nouveau de
longues minutes dans les toilettes avant de pouvoir me calmer. Dans l’éventualité qu’il n’est pas terminé,
je reste dans le secrétariat, ouvrant mon courrier. Nadine me dévisage avec étonnement, elle a remarqué
quelque chose.
— Un problème Alyssa ?
— Non tout va bien.
Je n’ai nulle part où me cacher, donc je retourne dans mon bureau, Thomas est toujours là. Il semble
concentré, il prend des notes au crayon à papier.
— Vous pourriez photocopier les pages en question afin de ne pas rester bloquer ici. Proposais-je.
— Écoute Aly…Alyssa pardon, la situation ne m’amuse pas, mais il va falloir faire un effort pour
travailler ensemble. Suggère-t-il en m’observant.
Sentant son regard sur moi, je finis par lever les yeux dans sa direction et lui réponds :
— C’est impossible !
Tom se lève brusquement et ferme la porte avant de revenir à sa place initiale.
— J’ai compris, tu ne veux plus me voir personnellement, mais professionnellement, nous n’allons pas
avoir le choix.
— Tu as tout fait pour que je tombe amoureuse de toi, tu m’as brisée le cœur ensuite et je devrais ignorer
ce que nous avons vécu sous prétexte que tu es mon supérieur ! Je m’en fiche que l’hôpital tout entier
l’apprenne, mais toi non ! Alors je te conseille de sortir d’ici rapidement et de me rendre mes fonctions
d’infirmière afin de limiter nos échanges.
— Tu n’es pas sérieuse ! Tu occupes ce poste jusqu’à ton entrée à l’école, c’est le contrat, tu ne vas pas
gâcher tes chances à cause de notre histoire.
— Je me fous du contrat !
— Non, ce n’est pas négociable. Si tu ne veux plus de ton poste, tu n’as qu’à démissionner ! Répond Tom
avec fermeté.
— Je vais y réfléchir !
Il jette le classeur sur mon bureau avant de quitter la pièce en claquant la porte. Il ne m’en faut pas plus
pour fondre en larmes. Si je m’écoutais, je partirais sur le champ ! Au fond, les épreuves que j’ai
surmontées m’ont peut-être rendue plus forte, je me raisonne afin de garder la tête hors de l’eau sur mon
lieu de travail. Je parviens à rester isoler le reste de la matinée. Ma messagerie m’informe d’un nouveau
mail, les destinataires sont multiples. Il s’agit d’un message commun :
« Pour rappel, la réunion de pôle est obligatoire à tous les représentants des unités sur le pôle médecine-
urgence. Bâtiment administratif, salle de conférence à 14h00. Je compte sur votre participation active cet
après-midi.
Cordialement.
Monsieur Simon. Cadre supérieur de santé. »

C’est bien la première fois que nous avons le droit à un rappel de cet ordre, il a sûrement peur que je ne
vienne pas tout à l’heure.
Deuxième message reçu à l’instant :
« Tu vas enfin me dire ce qui se passe ? Qu’est-ce qui t’arrive Thomas ? Si tu veux on peut se voir ce
soir. Kiss »
Immédiatement, je regarde le nom de l’expéditeur, c’est Sandy !
« Erreur de manipulation, le message n’était adressé qu’à Thomas. Veuillez m’en excuser. Madame
Kerrien. Cadre supérieur de santé. »
Comment sait-elle qu’il se passe quelque chose, a-t-elle croisé Thomas ? Elle lui propose de le voir ce
soir, j’espère qu’il va refuser. Elle pourrait très bien profiter de la situation pour lui mettre le grappin
dessus. Je sais de source sûre que Tom n’est pas insensible à son charme. Même si ça ne me concerne
plus, l’idée qu’il puisse flirter avec elle…me rend malade.
Alors que j’assiste aux transmissions, Cynthia se présente dans l’unité.
— Bonjour Alyssa. Tu es prête ?
— Oui, je viens.
Nous partons ensemble à la réunion. Lorsque nous arrivons devant la salle de conférence, nous nous
trouvons nez à nez avec madame Kerrien. Qu’est-ce qu’elle fout là ? Ça ne concerne pas le pôle de
chirurgie… Nous échangeons un simple bonjour, elle a le regard très insistant voire même interrogateur,
ce qui ne présage rien de bon.
Je m’installe à l’opposé de l’écran pour mettre le plus de distance possible entre Thomas et moi.

Chapitre 97

Je m’installe à l’opposé de l’écran pour mettre le plus de distance possible entre Thomas et moi,
Cynthia est assise à ma gauche. Thomas entre d’un pas décidé et invite le reste de l’équipe à s’installer
près du projecteur qu’il n’utilisera pas aujourd’hui. Contre toute attente, il prend place à côté de moi,
directement à ma droite. Tout le monde le dévisage avec stupéfaction, j’entends leur questionnent sur
l’origine de ses blessures. Étant précisément la cause, je ne me sens pas à l’aise, encore plus en étant
assise si près de lui. Qu’est-ce qui lui a pris de se mettre ici ? Il a certainement voulu me provoquer pour
me montrer qu’il peut encore décider.
Quand tout le monde est installé, Thomas prend la parole sans tarder.
— Bonjour à tous, nous allons commencer. Tout d’abord pour mettre fin aux diverses interrogations qui
subsistent, mon visage est le résultat d’une bagarre. Il n’y a rien d’extraordinaire.
Tout le monde semble surpris.
— Je ne suis qu’un homme après tout, il m’arrive de commettre des erreurs comme tout le monde et
parfois nous devons payer le prix fort. Pour éviter de folles rumeurs et pour clôturer cet aparté, je tenais à
vous signaler que je vais divorcer. Annonce-t-il sans ménagement.
Je suis sidérée, scotchée, sciée et bien plus encore que je ne pourrais le décrire. Il vient de dire qu’il
allait divorcer en public ! Pourquoi les hommes agissent-ils toujours trop tard ? Il essaie de se racheter
une conduite, je ne puis pas niaise, ni une fille facile, il ne suffit qu’ils prononcent de belles paroles pour
me remettre dans son lit …
— Très bien, maintenant que le sujet est clos, revenons-en à notre affaire. Ajoute-t-il avec sang-froid.
Après un briefing concernant le taux d’occupation des lits, nous abordons les prévisions budgétaires et
tous les problèmes s’y rapportant. J’écoute attentivement mais n’intervient pas une seule fois, je ne suis
pas dans mon élément. Je garde les yeux rivés sur les avant-bras musclés de Tom qui m’ont toujours
provoqué un effet aphrodisiaque. Je ne l’explique pas, mais à cet endroit ses veines sont apparentes, elles
sont rebondies et ça m’excitent ! Ça lui donne un côté viril et puissant. Parfois il frôle mon bras avec le
sien en manipulant ses documents. Je ne montre aucune réaction, mais au fond de moi, je trépigne
d’impatience à l’idée qu’il recommence. J’ai honte mais lorsqu’il bouge les doigts, je me mets à les
imaginer pénétrant mon intimité comme il le faisait si bien. J’en oublierai presque mon chagrin et mes
maux de tête, tellement mes souvenirs sont précis. Je décroche totalement de ce qui se raconte pendant
quelques minutes.
Un peu plus tard quand Sandy prend la parole, je sors de mes pensées érotiques et m’immobilise. Elle
évoque l’absence de remplacement des chirurgiens au cours de la période estivale, il est question de
fermer des lits pendant les congés de ces derniers. Elle est préoccupée par le nombre d’actes
chirurgicaux qui seront enregistrés au cours de l’été. Thomas et elle se lance dans un débat animé, ils ne
sont pas du même avis concernant la répartition du personnel pendant cette période.

Vers dix-sept heures la réunion touche à sa fin, j’ai survécu sans le regarder directement dans les
yeux. J’ai mis en place quelques stratégies pour les jours à venir. En rassemblant mes affaires, je réalise
avec amertume qu’Hugo est parti, il l’a fait pour me fuir. À priori, il ne compte rester exilé qu’un an, mais
c’est tout de même très long…

Je fais un tour dans le service, m’assure qu’il n’y a pas de problème avant de partir. Mon portable
vibre, je jette un œil c’est Thomas.
Puis-je récupérer mes affaires qui sont restées chez toi ?
Moi : Oui, tu as la clé, mets-la dans la boîte aux lettres en sortant.
Tom : Ok. Je passerai vers 19h si ça te convient.
Moi : Très bien, je ferai en sorte d’être partie.
Tom : J’aimerais tant que tu sois là…
Même si ça me réconforte de lire ce dernier message, je ne dois pas craquer.
Je rentre chez moi, Tom sera là dans un peu moins de deux heures. Je ramasse les mouchoirs qui
recouvrent le sol autour de mon lit, puis j’ouvre l’armoire de ma chambre et contemple une dernière fois
les vêtements s’y trouvent. Je m’enivre de son odeur telle une droguée en manque. La tentation est trop
grande, j’enfile son pull, celui que j’ai porté toutes les nuits où il n’était pas là. Je ne résiste pas non plus
à son polo préféré, le gris anthracite au col boutonné, je le cache sous mon oreiller. Je vais garder son
pull sur moi encore une petite heure avant le de remettre sur sa pile de linge, comme ça, il emportera mon
odeur avec lui. Je mets un peu de musique et m’assois sur le bord de mon lit. Épuisée de lutter contre mes
sentiments, je finis par me demander si je n’aurais pas dû le laisser s’expliquer. Il a tout de même déclaré
qu’il allait divorcer et m’a présenté ses enfants, tout ça est incompréhensible. Somnolente par
intermittence, je m’allonge et finis par m’assoupir en rêvant de nos retrouvailles.

Je m’éveille peu à peu dans la chaleur de ses bras, sous l’humidité qui s’écoule de son visage sur le
mien qui se trouvé niché dans son cou. Suis-je en train de rêver ? Son corps est blotti contre moi, je suis
au paradis, je ne veux jamais me réveiller. Lentement ses lèvres effleurent ma joue, puis viennent
rencontrer furtivement les miennes, des frissons mes parcourent, il recule pour observer ma réaction. Je
réalise que je ne rêve pas, que Tom est bien là dans mon lit. Je m’écarte de lui dans un mouvement de
réflexe défensif.
— Qu’est-ce que tu fais là ? Dis-je surprise.
— Il est dix-neuf heures, je passais pour prendre mes affaires et je t’ai trouvée endormie, te voir ainsi
vêtue de mon pull…
Embarrassée de n’avoir pu l’ôter avant son arrivée, je le retire rapidement face à lui et lui jette sur le lit.
— Je te le rends, excuse-moi. Dis-je honteuse.
— Non Aly, ne t’excuse pas. Tu peux le garder si tu veux.
— C’était une erreur de le porter. Ramasse tes affaires, je vais patienter en bas.
— Non Aly, Reste ! M’ordonne-t-il.
—Pourquoi est-ce que tu me rends les choses aussi difficiles ? Au travail, en t’imposant à moi… Tu ne
comprends pas que j’essaie de survivre sans toi !
— Alors baisse les armes, reviens-moi ! Reprend-t-il.
— Tu as brisé la confiance que j’t’avais accordée.
— Je ne t’ai pas trahie ! Estelle est venue pour son travail, elle a insisté pour qu’on partage la même
chambre, elle voulait parler du divorce, des enfants… elle n’a pas partagé mon lit. Je t’en prie, tu dois
me croire. Supplie-t-il.
— Alors pourquoi tu me l’as caché ? Pourquoi avoir choisi de me faire croire que tu y étais seul ?
— Parce que j’ai manqué de courage, je ne te pensais pas assez forte pour supporter ça. J’avais
uniquement peur de te blesser. Avoue-t-il d’un air abattu.
Je suis perdue, j’aimerais tellement le croire, mais elle n’a pas menti sur le désir de vengeance, sur le
séjour à l’hôtel… pourquoi aurait-elle menti sur le reste ?

Chapitre 98

Je m’efforce de lui répondre calmement :


— Thomas, je suis fatiguée, je n’ai pas envie de me battre avec toi. Tes propos sont convaincants
mais tu aurais dû me dire tout ça bien avant.
— Aly, ne me rejette pas, je t’aime, embrasse-moi. M’implore-t-il en s’approchant de moi.
Je relève la tête et croise son regard intense, un mélange de tristesse et de tendresse, plus ses yeux
pénètrent les miens, plus le désir s’empare de moi.
— Aly, regarde-toi, tu le désires autant que moi. Ne résiste pas.
— Tu utilises la séduction pour me troubler.
— Pas du tout, je ne suis pas le manipulateur que tu imagines ! répond-il
— Je n’ai pas les idées claires, j’ai besoin de temps ! Je n’aurais jamais dû me jeter si vite dans tes
bras alors que je me séparais. La rencontre avec ta femme m’a ouvert les yeux. Peu importe les raisons
qui ont fait que tu as passé la nuit avec elle, tu as fait le choix de te taire, tu m’as menti aussi sur cet
entretien concernant mon financement. Elle a précisé que tu étais au courant et que tu craignais que notre
relation ne soit découverte.
— Mais c’est impossible, nous n’avons jamais abordé ça ensemble, je te l’ai dit, je l’ai découvert
cinq minutes avant toi.
— Comment l’a-t-elle su dans ce cas ?
— Je ne sais pas du tout. Quand je lui ai annoncé que je devais m’absenter deux jours sur Rennes,
elle m’a dit qu’elle avait une prospection à faire sur le secteur. Elle a été très convaincante, j’ai accepté
car elle devait passer la plupart de son temps avec ses collaborateurs. Le seul tort que j’ai eu c’est de te
l’avoir caché. Est-ce que tu peux me reprocher d’autres choses Aly ?
— Le fait que tu ne sois pas divorcé complique les choses pour nous, tu refuses d’être vu en public
avec moi…
— Je t’ai dit que nous pourrions nous montrer lorsque tu seras rentrée à l’école.
— Mais pourquoi, qu’est-ce que ça changera ?
— Tu ne comprends donc pas que c’est pour te protéger ! S’exclame-t-il.
— Me protéger de quoi ?
— Des rumeurs, des jalousies... quand tes collègues vont découvrir notre relation, comment crois-tu
qu’elles vont réagir ? Elles vont penser que tu as été favorisée pour le poste de cadre que tu occupes
ainsi que pour ton financement. Nous savons que ce n’est pas le cas, mais je crains que ton financement ne
soit remis en cause.
Pendant tout ce temps où je m’interrogeais sur les raisons qui le poussaient à garder notre relation
secrète, il agissait pour me protéger…
— D’accord. Pourquoi ne pas m’avoir expliqué tout ça ? J’aurais pu comprendre… Dis-je
impuissante.
— Tu aurais refusé de passer l’entretien, j’avais peur que tu gâches tes chances. Répond-il en
haussant les épaules.
Tom s’avance, puis saisit ma main, il entrelace ses doigts aux miens. Je pose ma tête sur son épaule et
laisse quelques larmes m’échapper. Ses mains remontent le long de mes bras jusqu’à mon cou, il redresse
ma tête face à lui et effleure mes lèvres du bout des doigts.
— Je t’aime. Murmure-t-il. Ses yeux grands écarquillés parcourent mon visage.
— Moi aussi Tom mais tu es marié et je crois que je suis encore trop fragile… tes enfants, ta femme,
le travail… c’est trop à gérer pour moi pour le moment. Je…
Tom écrase la pulpe de son index sur ma bouche pour me faire taire. Je me pince les lèvres
tremblantes pour me retenir de pleurer. Sa délicatesse et sa franchise me désarment. Tom semble dévasté
autant que je le suis depuis deux jours. Il sait qu’il est trop tard !

Le regard fixe, les yeux brûlant de larmes, je dépose un baiser sur ses lèvres au goût bien trop salées.
Tom presse davantage sa bouche, entrouvre les lèvres et laisse glisser la pointe de sa langue contre la
mienne. Ce contact provoque en moi une vague de chaleur intense accompagnée d’émotions impossibles à
contenir.

Ce long baiser est notre baiser d’adieu, nous le savons tous les deux. Il n’a jamais été aussi intense, si
puissant, il transpire le regret et la peur de ne plus jamais pouvoir recommencer. Je voudrais qu’il se
prolonge toute la nuit. Plusieurs minutes s’écoulent avant que Tom m’attire sur mon lit sans interrompre
son étreinte. J’aime sentir le poids de son corps contre moi, j’en ai besoin, à cet instant, c’est même vital.
Notre baiser se poursuit malgré le torrent de larmes qui se déversent sur nos joues. La passion qui nous
lie rend nos derniers instants à la fois tragiques et érotiques. J’ai envie qu’il me touche, je veux pouvoir
m’abandonner une dernière fois dans ses bras. Je ressens son désir ardent, il ne m’a jamais touchée
comme cela auparavant. Sa main remonte sous mon débardeur, il presse sauvagement mon sein,
m’arrachant des râles de plaisir étouffés dans sa bouche. Mon corps tout entier se cambre sous l’ardeur
de ses caresses.

Il déboutonne mon jean avec précision et glisse sa main sous celui-ci afin de le faire descendre.
Soudain, il quitte ma bouche pour terminer d’ôter rapidement mon pantalon et pour se mettre entièrement
nu. Il me lève les bras pour passer mon débardeur au-dessus de ma tête et dégrafe mon soutien-gorge avec
habileté.

Nous sommes complètement nus l’un en face de l’autre, nos visages sont couverts de larmes, nos yeux
emplis d’amour et de tristesse. Cet instant restera gravé à jamais.
— Tom. Dis-je à voix basse.
— Tu es sûre que c’est ce que tu veux Aly ? Chuchote Tom.
— Oui, mais ça ne changera rien pour nous.
— J’ai compris. Ajoute-t-il tête baissée.

Lentement, il prend possession de moi, nos corps se confondent. Le temps semble se suspendre. Il n’y
a plus que lui et moi, le reste n’a plus d’importance. Nous nous laissons aller dans une dernière explosion
de plaisir.

Chapitre 99

Épuisés comme si nous avions parcouru un marathon, nous prenons quelques minutes pour savourer
cet instant l’un contre l’autre. Nous avons conscience de la chance que nous avons, le fait de savoir que
cette étreinte est la dernière nous permet d’en apprécier chaque seconde.
Constatant que je frissonne contre lui, Tom s’empare de son polo et m’aide à l’enfiler.
— Merci. Dis-je reconnaissante.
— Merci pour ce moment Aly. Reprend-il. Aujourd’hui, nos relations ont été particulièrement
difficiles au travail… j’ai été anéanti ce matin face à ton agressivité et ton rejet légitime, l’idée que tu
éprouvais de la haine à mon égard me rendait fou.
— Ce sont tes mensonges qui m’ont rendues folle, c’est vrai que ces deux derniers jours, je t’ai
détesté pour m’avoir laissée t’aimer. À Présent, malgré les interrogations qui persistent, je comprends
pourquoi tu as voulu me préserver.
— Tu ne me détestes plus ? Me demande-t-il avec un petit rictus forcé.
— Non Tom, je t’aime encore bien plus. C’est bien ce qui m’inquiète. Ajouté-je attristée.
— Tu ne tiendras pas longtemps éloignée de moi ma belle.
— Tom, je ne suis pas prête pour poursuivre cette histoire avec toutes les complications qu’elle
implique. Nous devons mettre de l’ordre dans nos vies respectives.
— Pour pouvoir vivre une relation au grand jour ? Interroge Tom.
— Peut-être, l’avenir nous le dira… mais comme tu l’as soulevé, ça risque de poser problème au
travail.
— Tu dois te concentrer sur ta formation avant tout.
— Nous allons devoir reprendre des relations strictement professionnelles malgré nos sentiments.
— Fini les rendez-vous dans mon bureau, les échanges de messages au beau milieu d’une réunion…
Déclare-t-il avec déception.
— En effet, c’est terminé. Heureusement, je suis bientôt en vacances. Tu devrais y aller Tom, il est
tard. Lui dis-je en apercevant mon réveil qui indique près de vingt-deux heures.
Il revêt ses habits, puis range ses effets personnels dans son sac. Je le raccompagne jusqu’à la porte,
vêtue uniquement de son polo qu’il a refusé de récupérer. Au moment de se dire au revoir, je suis
beaucoup plus sereine, la douleur est supportable comparée à celle que je ressentais encore ce matin. Je
sais que sans cette séparation, nous relation serait vouée à l’échec. Peut-être qu’en nous sacrifiant, nous
la sauverons…
Tom prend délicatement mon visage entre ses mains et dépose un long baiser sonore sur mon front. Il
ouvre ma main et y place la clé que je lui avais donnée. Je garde péniblement les yeux ouverts, il recule
et d’une voix éraillée me dit :
— Quel gâchis ! Je t’aime.
Je reprends mon souffle et lui répond :
— Pardonne-moi. Je t’aime.
— Bonne nuit mon ange. Murmure-t-il avant de sortir.
Je reste là, plantée comme une idiote dans l’entrée à regarder l’homme dont je suis éperdument
amoureuse partir parce que je lui ai demandé. C’est insensé, mais je ne regrette pas ma décision.

Je m’enroule dans les draps et lorsque j’éteins la lumière, j’ai la sensation que ses mains sont encore
sur moi, ce qui soulage en partie la peine que j’éprouve et m’aide à trouver rapidement le sommeil.

Mardi matin, le réveil est moins douloureux que la veille, mais les céphalées persistent. J’arrive à
avaler un petit-déjeuner, puis m’apprête pour le travail. J’échange quelques textos avec Emma, je lui
raconte les derniers événements avec Tom. Elle est rassurée de savoir que je me sens mieux et approuve
cette décision de mettre de la distance entre nous.
En arrivant dans l’unité, je suis obligée de prendre un antalgique, j’ai l’impression d‘avoir la tête
dans un étau, de plus les nausées sont de retour. Il faut que je pense à consulter, c’est devenu récurent ces
derniers temps.
Roger, un des urgentistes de garde remarque que je prends des cachets à l’office.
— Ça ne va pas Alyssa ? Demande-t-il inquiet.
— Si, mais j’ai céphalées depuis quelques jours.
— Oui, j’ai cru remarqué ça. Tu as vu ton médecin ?
— Non, j’envisage de prendre rendez-vous si ça ne passe pas.
— As-tu pris ta tension ?
— Non, je n’y ai même pensé. Ajouté-je naturellement.
— Je vais te la prendre. Propose-t-il.
Il s’empare d’un dinamap et me passe le brassard autour du bras. La tension s’affiche « 109-56
mmHg ».
— Elle n’est pas haute, l’hypertension artérielle n’est pas l’origine de tes céphalées.
— D’accord, j’ai remarqué qu’elles sont systématiquement associées à des nausées.
— Tu as quel moyen de contraception ?
— L’implant, je l’ai changé récemment. Expliqué-je.
— Je pense que tu devrais aller voir ton gynécologue. Suggère Roger.
— Non, je ne suis pas enceinte ! Mes cycles sont réguliers. Dis-je pour me justifier.
— Je n’ai pas dit que tu l’étais. Mais tu viens de changer ton implant, il pourrait s’agir d’un problème
hormonal. Et puis les grossesses sous implants même si elles sont exceptionnelles, elles existent.
— Si le but c’est de m’affoler, ça fonctionne plutôt bien !
— Je suis certain que ce n’est pas grand-chose, mais essaie de voir rapidement ton gynécologue.
Je m’enferme dans mon bureau immédiatement, je suis persuadée de ne pas être enceinte, je le saurais
quand même ? Inquiète j’appelle le secrétariat du Dr Guillot et explique ma situation. Virginie la
secrétaire me propose un rendez-vous à la fin des consultations, à dix-huit heures trente. Je reprends mes
activités en essayant de laisser de côté cette hypothèse improbable.

Bientôt les urgences se remplissent suite à un accident de la voie publique, un carambolage sur la
quatre voies impliquant huit véhicules. Heureusement, les victimes semblent être légèrement blessées.
L’automobiliste en cause est entendu par les gendarmes, il se serait assoupi au volant peu avant onze
heures du matin. Le test d’alcoolémie est revenu négatif. Roger est inquiet, cet homme de quarante-cinq
ans présente une ataxie, il pense à un syndrome cérébelleux et demande en urgence un scanner cérébral
pour éliminer un saignement.
Je parviens à obtenir les coordonnées de son épouse avec les gendarmes, car le patient est en état de
choc. Je la contacte pour l’informer que son mari est pris en charge suite à un accident de la voie
publique. Je lui conseille de venir tout en et lui recommandant la prudence au volant.
Le résultat du scanner est sans appel, il s’agit d’un AVC hémorragique massif. Le médecin négocie
son transfert sur un CHU. Lorsque l’épouse arrive aux urgences, le médecin la reçoit et lui explique le
diagnostic, le neurochirurgien ayant vu les images envisage une intervention chirurgicale. Le patient est
héliporté dans les trente minutes suivantes.
Les urgences retrouvent leur calme en fin d’après-midi. Nous prenons une pause bien méritée vers
dix-sept heures. La journée s’est bien passée, tellement occupée, je n’ai pas eu le temps de penser à
Thomas.

Chapitre 100

Je travaille un peu sur le remaniement à envisager pour le planning du mois d’août, pour anticiper une
probable prolongation d’arrêt avec Sandra. Je serai en vacances, je veux que les choses soient réglées
avant mon départ.
Je passe prendre une fiche de circulation au bureau des entrées et me rends aux consultations de
gynécologie. Dans la salle d’attente, je croise une femme enceinte, son magnifique ventre rebondi attire
mon regard. Le bonheur se lit sur son visage. Porter un enfant, c’est mon rêve, j’ai hâte de découvrir les
joies de la maternité, mais quand ce sera le bon moment… Là, je flippe vraiment en imaginant que je
pourrais être enceinte d’un homme qui n’est pas encore divorcé.
Dr Guillot m’appelle, je me lève avec un nœud à l’estomac.
— Bonjour madame Steunou, prenez place, je vous en prie.
— Merci.
— Qu’est-ce qui vous arrive ?
— J’ai des céphalées et des nausées depuis quelques temps. Je ne pensais venir vous voir en
première intention, mais en discutant avec un des urgentistes ce matin, il m’a orientée vers vous.
— D’accord. Comment sont vos cycles ?
— Régulier, rien à signaler de côté-là.
— Vous en êtes où actuellement de votre dernier cycle ?
— Je vais être indisposée d’ici un à deux jours au plus.
— Pas de douleurs abdominales ? Pas de tension mammaire ? Demande-t-elle.
— Non, pas du tout.
Elle feuillette mon dossier et constate que mon implant a été changé, il y a tout juste trois mois.
— Nous allons faire une échographie madame Steunou. M’annonce-t-elle.
— Vous pensez que je pourrais être enceinte Dr Guillot ?
— Ce n’est pas totalement impossible, inutile de vous inquiéter, nous allons vérifier tout ça. Suivez-
moi. Ajoute-t-elle en contournant ma chaise.
Je la suis jusque dans la salle d’échographie, je stresse tellement que j’en tremble et que j’ai envie de
vomir.
— Enlevez le bas et allongez-vous.
Je reste figée quelques secondes, étonnée de devoir me déshabiller. Le médecin le remarque.
— Madame Steunou, à ce stade s’il y a quelque chose à voir, c’est par voie vaginale que je le verrai.
Précise-t-elle.
Je m’exécute satisfaite par ses explications.
— Détendez-vous, ça va être froid.
Elle insère l’échographe tout en fixant son écran, elle appuie légèrement sur le bas de mon ventre.
J’essaie de décoder ce que je vois, mais je ne comprends rien, je vois des tâches nuancées mais je
remarque comme une poche ? Puis après quelques manipulations sur son clavier, elle m’invite à me
rhabiller. Pourquoi ne dit-elle rien sur ce qu’elle a vu ? Si jamais je suis enceinte…
— Asseyez-vous madame Steunou. Depuis combien de temps êtes-vous régulièrement nauséeuse et
avez-vous des maux de tête ?

— Depuis un mois ou deux, mais ces derniers temps davantage. J’avais mis ça sur le compte du
stress… Dr Guillot, suis-je enceinte ? Bafouillé-je.
— Non madame Steunou, je ne vois aucun élément en faveur d’une grossesse, tout du moins pas
évoluant depuis plus d’un mois. Nous ne pouvons pas toujours déceler une grossesse à moins de sept
semaines d’aménorrhées.
— D’accord. Ouh, vous m’ôtez d’un poids. Je voyais des formes sur vos images…
— Oui c’est un kyste ovarien, il mesure quatre centimètres par trois. Ne vous inquiétez c’est la
plupart du temps bénin, mais ajouté à vos symptômes, il serait peut-être préférable d’envisager de retirer
l’implant quelques mois et de voir l’évolution.

J’accepte sa proposition, si je peux voir mes symptômes disparaître, je ne vois pas de raison de
refuser. Je suis tellement soulagée de ne pas être enceinte, que cette histoire de kyste ne m’inquiète pas
plus que ça. La gynécologue procède au retrait de l’implant et nous convenons d’un rendez-vous dans
trois mois pour un contrôle échographique. Elle me suggère d’utiliser un moyen de contraception non
hormonal pendant ce laps de temps. Étant célibataire, je ne vois pas cela comme un souci.

Je sors de son bureau avec des ordonnances, une pour des antalgiques et une pour réaliser une prise
de sang. Je lis les documents quand je me trouve nez à nez avec Tom. Je me sens rougir en repensant à la
nuit dernière.
— Bonjour Thomas. Dis-je la première.
— Bonjour Alyssa. Répond-il d’une voix douce. Tu es encore là à cette heure-ci ?
— Oui, j’avais un rendez-vous.
Thomas étant dans le pavillon gynécologie-maternité s’interroge en voyant que je tiens des
ordonnances dans la main. Ses yeux se posent naturellement sur les papiers que je tiens.
— Tout va bien ? Demande-t-il.
— Oui, merci.
— Aly, tu es sûre ? Insiste-t-il.
— Oui Thomas, c’était une visite de routine. Lui dis-je pour le rassurer. Je dois y aller. Bonne soirée.
Il ne semble pas convaincu par mes propos et garde cet air mystérieux. Je ne m’attarde pas, j’ai tenu
une journée sans pleurer, je veux continuer dans ce sens. Je passe chez mes parents avant de rentrer, ils
m’invitent à manger avec eux. Ils ont bien compris les raisons de notre séparation et ma mère ne s’en
cache pas, elle se réjouit. Elle est persuadée que si notre couple est solide, nous nous retrouverons et
nous serons plus forts. Je partage son avis, mais au fond, je crois que ce qu’elle espère c’est que sa fille
recouvre la raison… elle n’hésite pas à me demander si j’ai des nouvelles d’Hugo.
— Non maman ! Hugo vient de partir pour s’éloigner de moi, qu’est-ce que tu crois, je ne vais pas
l’appeler !
— Tu pourrais de temps en temps, il apprécierait. Persiste-t-elle.
— Maman, arrête !
— Mais je dis ça pour toi !
— Tu as entendu quand je t’ai dit que j’étais amoureuse de Thomas ? M’emporté-je.
— Oui, excuse-moi.
— Changeons de sujet. J’envisage de partir en vacances cet été, j’ai trois semaines au mois d’août.
Du trois au vingt-deux, je reprendrai une semaine à l’hôpital avant ma rentrée.
— Bonne idée, ça ne te fera pas de mal de changer d’air. Tu sais que ta sœur a prévu d’aller une
semaine en Corse ? Me demande-t-elle.
— Émilie ?
— Non Lucie, Sébastien et les enfants. Hugo se chargera de les héberger.
— Tu ne suggères pas que j’aille aussi passer mes vacances là-bas ? Lui demandé-je suspicieuse.
— Non, non. Répond-elle amusée.
Même si ma mère est casse pied avec Hugo, nous passons une soirée très agréable. En arrivant chez
moi, mon portable vibre. J’ai un message de Tom :
J’ai essayé de ne pas te contacter toute la soirée… ça me tracasse de savoir que tu étais chez le
gynécologue. Tom.
Il a peut-être peur que je sois enceinte.
Moi : Il n’y a pas de raison. Je ne suis pas enceinte ! Alyssa.
Tom : Tu avais peur de l’être ?
Moi : Pas vraiment…enfin si, mais il n’y avait pas tellement de risques.
Tom : J’aurais aimé te rassurer, t’accompagner…
Moi : Je suis une grande fille.
Tom : La chambre 21 est bien vide sans toi.
Moi : Je ne savais pas que tu étais à l’escale…
Tom : Je mets de l’ordre dans ma vie… bonne nuit mon amour.
Moi : Tu es cruel de m’appeler comme ça… bonne nuit.
Nous n’y arriverons pas si nous échangeons sans cesse des messages, des mots d’amour… nous
allons replonger. Je me glisse dans mon lit et enfile le polo de Tom.

Chapitre 101

Ce matin, en me levant, je me sens plutôt en forme, j’ai passé une bonne nuit, ma tête semble plus
légère. Je me surprends même à chantonner sous la douche. C’est une belle journée qui s’annonce, il fait
déjà dix-huit degrés. J’enfile une jolie robe noire estivale, je l’assortis de mes escarpins en cuir noir
avec brides croisées sur la cheville.

Je suis en avance, je décide de partir à pied au travail. Je prends mes écouteurs et écoute la musique
pendant le trajet. Je garde un œil attentif sur la rue, je pourrais le croiser à tout moment en étant près de
l’hôpital. J’arrive parfaitement à l’imaginer devant moi, il marcherait d’un air pensif, le pas très assuré,
les deux mains profondément enfoncées dans les poches de sa veste en cuir. Je l’observerais en espérant
qu’il me remarque, ce qu’il ferait évidemment, et là il me décrocherait son plus beau sourire. Je
m’efforce de chasser mes pensées en secouant la tête de gauche à droite, sinon la journée risque d’être
une torture.

En arrivant sur le parking de l’hôpital, je suis interpellée d’une voix lointaine mais que je reconnais
très bien. C’est Aurélie qui s’empresse de me rejoindre.
— Salut Alyssa. Tu es à pied ! Dit-elle essoufflée.
— Salut Aurélie, oui il fait beau. Tu vas bien ?
— Oui mais je me faisais du souci pour toi. Dimanche tu es restée très évasive dans tes messages. Tu
as pu parler avec lui ?
— Nous avons pu discuter et c’est bel et bien fini entre nous.
— Non, ne me dis pas que c’est un connard, sinon je veux bien venir lui casser la gueule avec toi !
Ajoute-t-elle énergiquement.
— Non pas du tout. Mais tu vois cette relation secrète au travail, ses enfants, sa femme… c’était trop
pour moi.
— Vous allez y réfléchir ?
— Il est marié, ça suffit comme argument !
— J’ai entendu dire qu’il avait annoncé lundi à la réunion des cadres qu’il allait divorcer !
— Merci Aurélie, j’y étais à cette réunion ! Mais un divorce demande de l’énergie et du temps, c’est
son combat, pas le mien… Et toi qu’est-ce que tu fais là à cette heure-ci ?
— Je suis de technique aujourd’hui donc horaire de journée, je déteste ça.
— Donc tu manges au self ce midi ?
— Oui je peux. Tu veux qu’on y aille ensemble ?
— Carrément. Passe me chercher quand tu seras prête dans ce cas.
— Ok. À tout à l’heure.

Les problèmes s’enchaînent ce matin, des familles agressives, des patients agités, le scanner est en
panne, je suis demandée de tous les côtés. Le côté positif, c’est que la matinée passe très vite. Nadège
réalise mon prélèvement sanguin peu avant midi, je lui prépare les tubes sans lui montrer l’ordonnance.
Les résultats seront prêts en fin de journée.
Aurélie me rejoint dans le service comme convenu, nous nous rendons au self pour notre pause
déjeuné. Ce midi au menu, c’est gratin de pomme de terre avec jambon à l’os. Le menu me convient
parfaitement, pourtant je n’ai pas faim. Je regarde mon assiette mais n’y touche pas.
— Alyssa, pourquoi tu ne manges pas ?
— Je n’ai pas faim. Dis-je en apercevant Tom rentrer.
Pourquoi faut-il toujours qu’il soit accompagné de cette pétasse ? Je détourne les yeux rapidement.
— Alyssa ça va aller. Ne le regarde pas. Me conseille Aurélie.
— Il est avec Sandy, y a rien à faire, je ne la sens pas cette fille ! Lui dis-je.
Je repense à cette conversation que nous avions eue, nous avions décidé de marquer nos territoires, il
m’avait mise en garde contre Mathieu et moi j’en avais fait autant avec elle. Il sait ce que j’éprouve
quand ils sont ensemble…

Ils prennent place autour d’une table à quelques mètres de nous, Tom ne m’a pas vue. Sandy rit à
gorge déployée, elle pose sa main sur l’épaule de Tom et s’appuie contre lui. Elle rit si fort que tout le
monde les regarde. Elle amplifie tous ses mouvements, quand elle se penche pour mettre sa veste sur le
dossier de la chaise, elle offre une vue plongeante sur sa poitrine imposante à Thomas. Je suis certaine
qu’elle agit consciemment, elle s’exhibe pour le provoquer. Je regrette d’être venue ici ce midi.
Aurélie essaie de me remonter le moral, mais aucun mot n’effacera les paroles de Tom ce soir-là…
« Je ne vais pas nier que c’est une belle femme ». Je me sens en danger, elle va tenter ta chance, c’est une
certitude ! Si j’avais des couilles, je me lèverais et j’irais l’embrasser pour lui montrer que son cœur est
pris, qu’il m’appartient. Au lieu de ça, quand j’estime que le spectacle a assez duré, je me lève pour
ramasser mon plateau.
Je reste contrariée toute l’après-midi, non seulement elle lui tenait compagnie, mais en plus, il n’a pas
remarqué ma présence.
Je vérifie sur le serveur que mes résultats biologiques sont prêts. Lorsque tout est validé, j’imprime
la feuille. À priori tout semble être dans la norme et les béta HCG sont négatifs. J’en déduis que c’est
notre relation toxique qui s’exprime par des maux physiques.

Je rentre tranquillement à pied, la caresse du vent d’été sur ma peau me fait beaucoup de bien,
d’agréables sensations m’envahissent, je me sens vivante. Cette impression ne dure pas longtemps, dès
que je passe ma porte d’entrée, je m’effondre. Il me manque et…je ne suis pas enceinte ! Je n’en reviens
pas de penser ça, jamais cette idée ne m’aurait traversé l’esprit si on ne me l’avait pas suggérée.
Maintenant, je réalise que j’aurais aimé porter son enfant, je l’aurais fait avec fierté, avec amour…
certes, ça n’aurait pas été une solution car nous sommes séparés et qu’il y a mes études, mais nous
aurions été liés à tout jamais. Je m’en veux d’avoir ce genre de réflexions… mais je ne peux pas
m’empêcher de penser qu’il aurait quitté sa femme définitivement.
Après une énième crise larmes, je prépare mon sac pour une séance de piscine, il faut que je me
change les idées avant de craquer et de lui envoyer un SMS. Je nage une bonne heure avant d’aller
prendre une douche bien méritée. En sortant, je fais un petit tour en ville, c’est en voyant des cartes
postales que je réalise que demain nous serons le neuf juillet, Hugo aura trente ans, il va falloir que je
l’appelle.

Chapitre 102

Hier, la journée a été difficile, je n’ai eu aucun échange avec Tom, ni de vive voix, ni par message, je
l’ai seulement aperçu au self en compagnie de Sandy. C’était le premier jour sans mots doux et ça m’a
semblé être éternité. Comment vais-je tenir sans lui ? Personne ne pourrait comprendre ce que je ressens.
Je sais bien ce qu’on me répondrait, « s’il te manque, retourne avec lui… » Mais je ne peux pas continuer
à m’enfermer dans la relation qu’il peut m’offrir. Je veux tout de lui, les journées, les soirées et les week-
ends. Je veux que l’on vive notre amour au grand jour, je veux faire des projets. Je sais que tant qu’il est
marié, tout ça est impossible. Entre sa femme et les réactions probables des collègues, ma douloureuse
décision est la bonne.
Mon réveil indique plus de sept heures, je me fais violence pour sortir de mon lit. Dès que je suis
habillée, je m’installe dans le canapé avec mon café et compose le numéro d’Hugo. Il décroche dès la
seconde sonnerie.
— Alyssa ?
— Bonjour Hugo.
— Tu vas bien ? M’interroge-t-il avec inquiétude.
— Oui, je t’appelle pour te souhaiter bon anniversaire.
— Ah. Je te remercie d’y avoir pensé.
— C’est normal. Tout va bien pour toi ?
— Je vais bien.
— Où es-tu exactement ?
— Je suis à Bastia, je suis arrivé en taxi depuis l’aéroport de Lucciana. Là, je me balade sur la rade,
c’est impressionnant le nombre de bateaux.
— Tu es déjà en balade, tu es bien matinal.
— Disons que je dois m’occuper, tu me manques. Ajoute Hugo.
— Je dois te laisser, il est l’heure que je parte bosser. Lui dis-je pour mettre fin à notre conversation.
— Merci d’avoir appelé Alyssa.
— Bonne journée Hugo.
J’ai raccroché un peu rapidement, mais j’ai pris peur quand il a dit que je lui manquais. J’ai de la
peine pour lui, quand je pense qu’il est seul pour son anniversaire, ses trente ans qu’il devait fêter entouré
de nos amis.
Il est presque huit heures et je suis toujours affalée dans mon canapé, je n’ai aucune motivation pour
aller travailler. Si je m’écoutais, j’appellerais pour dire que ne viens pas. Je contemple notre selfie pour
la centième fois au moins depuis ce week-end. Nous avions passé un moment si merveilleux ensemble à
cette occasion. Le cœur lourd, j’enfile ma veste et sors de chez moi. En arrivant dans le service, Nadine
m’interpelle.
— Bonjour Alyssa. Madame Moreno a demandé à te voir.
— Elle a précisé la raison ? Demandé-je étonnée.
— Non pas du tout. Elle voulait savoir si tu étais arrivée et aimerait que tu la rappelles.
— Je te remercie Nadine.
Pourquoi la directrice des soins souhaite-t-elle me parler ? Est-ce en rapport avec ma formation ? Je
vais saluer l’équipe avant de la contacter. Il n’y a pas de problème à signaler ce matin. Je prends cinq
minutes pour passer mon coup de fil dans mon bureau. La secrétaire me passe aussitôt madame Moreno.
— Bonjour madame Moreno, c’est madame Steunou.
— Ah madame Steunou, je dois impérativement vous voir aujourd’hui. C’est très urgent.
— Ah. Je peux venir maintenant si vous le souhaitez ? Lui proposé-je.
— Non j’ai un entretien. Venez pour onze heures, je devrais être disponible.
— D’accord, je serai là.
— Parfait. À tout à l’heure. Dit-elle avant de raccrocher.
Je n’ai même pas eu le temps de lui demander de quoi il s’agissait, mais de toute évidence, ce doit
être important, puisqu’elle a précisé que c’était urgent. Je le saurai bien assez tôt, en attendant, j’ai du
boulot. Je mets le programme des formations à l’affichage ainsi que les divers plannings de gardes des
urgentistes, des anesthésistes, des cadres, des administrateurs, des ambulanciers… la liste est longue.
J’appelle les différents services pour mettre à jour les lits disponibles au tableau. Je consulte mes mails
avant de me rendre dans le bâtiment administratif pour mon entrevue. J’ai quelques minutes d’avance, la
porte de la directrice n’est pas fermée, dès qu’elle m’aperçoit, elle m’invite à rentrer. Ses longs cheveux
noirs et raides la rendent sévère.
— Madame Steunou, je ne vais pas tourner autour du pot. J’ai un problème majeur avec vous.
— Je vous demande pardon ?
Je reste hébétée par son annonce.
— Je ne vous ai pas fait passer l’entretien avec monsieur le directeur pour votre financement. Comme
vous le savez, c’est monsieur Simon qui a m’a remplacée, comme c’est souvent le cas d’ailleurs.
J’ai peur de comprendre où elle veut en venir. Je me crispe de plus en plus. Je ne bouge plus, ne dis
plus un mot.
— J’ai toute confiance en son jugement habituellement, mais cette fois-ci je dois dire que les
circonstances sont assez exceptionnelles. Vous en conviendrez, n’est-ce pas ? Me demande-t-elle en
prenant son air supérieur.
Nous y voilà… toujours incapable de réagir, j’attends la suite de son monologue.
— Répondez-moi. Ajoute-t-elle méfiante.
— J’en conviens effectivement. Que répondre mise à part qu’elle a raison.
Je pèse mes mots ne sachant pas précisément ce qu’elle sait, je ne veux pas causer de torts à Tom.
— Vous faites ce que vous voulez de votre privée, mais elle ne doit pas interférer sur votre lieu de
travail !
— Absolument. Acquiescé-je.
— C’est tout à fait regrettable comme situation. Je m’attendais à minimum de bon sens venant de vous
comme de lui. En toute connaissance de cause, nous aurions pu agir différemment pour cet entretien
notamment. Je vais être obligée de faire un signalement.
— Un signalement ? Demandé-je angoissée.
— Oui, les entretiens n’ont aucune valeur dans ces conditions.

Les ennuis ne font que commencer. Tout le monde va être mis au courant de notre relation, alors que
nous ne sommes plus ensemble. Thomas va avoir des comptes à rendre… Mais comment a-t-elle su ?
Qu’est-ce que je peux faire pour arranger les choses ?

— Madame Moreno, je ne suis pas la mieux placée pour faire une proposition, mais seriez-vous
obligée de faire ce signalement si je refusais le financement ?
— Comment ? Non probablement que non. Mais vous pourriez repasser avec moi et avoir une chance
de l’obtenir dans des réelles conditions d’entretien.
— Soyons réalistes, personne n’aura envie de me l’accorder alors que par ma faute… Je ne veux pas
défendre monsieur Simon, mais il ne s’attendait pas à me faire passer en entretien, il m’a assuré que je
n’avais bénéficié d’aucun traitement de faveur. Ça vaut ce que ça vaut. Mais sachez que nous avons
choisis de rester discrets par rapport à sa famille et si cette histoire avait dû se poursuivre, vous auriez
été informée. Concernant le poste que j’occupe actuellement, c’est arrivé avant que nous nous
rapprochions, mais je comprendrais que vous...
— Il n’est pas question de remettre en cause vos compétences pour ce poste madame Steunou.
M’interrompt-elle.
— D’accord. Je vais négocier un report de formation et je vais vous envoyer dès aujourd’hui un
courrier pour refuser l’offre de financement.
— C’est très honnête de votre part.
— Que va-t-il se passer ?
— La personne derrière vous va bénéficier du financement et nous allons en rester là.
— Merci. Dis-je en quittant la pièce.

Chapitre 103

Je fais quelques pas dans le couloir avant d’être rappelée par madame Moreno.
— Madame Steunou, je vais rédiger un courrier pour notifier le refus de financement de la formation, de
cette manière votre report sera accordé et vous retenterez votre chance l’année prochaine. Me propose-t-
elle.
— Je vous remercie, je ne pense pas mériter cet arrangement.
— Vous n’avez pas commis de réelle faute. C’est plutôt votre supérieur qui est en faute en ayant accepté
de vous faire passer l’entretien. Ajoute-t-elle en fronçant les sourcils.
— Et concernant mon poste, dois-je m’inquiéter ?
— Non, vous semblez vous en sortir dans vos nouvelles fonctions. Nous verrons en septembre.
Je la remercie sincèrement pour cette offre, je viens de me sacrifier pour nous éviter des ennuis, de toute
façon, je doute que le prochain entretien se serait bien passé. Il me faut quelques minutes pour réaliser
que mes projets ne se réaliseront pas comme prévu… Je vais devoir recommencer l’année prochaine ou
bien je pourrais demander une disponibilité mais l’école coûte très chère et je ne sais pas trop comment
je m’en sortirai financièrement avec mon loyer mensuel.
J’essaie de voir le côté positif de la situation, la directrice des soins a plutôt bien réagi. Elle aurait pu me
retirer mon poste actuel, me changer de service, après tout, je ne suis qu’un malheureux pion dans cet
hôpital.
Thomas sait-il que la direction est au courant à propos de nous ? Est-ce lui qui en a parlé ? Non, je ne
pense pas qu’il aurait pris ce risque pour nous deux, sauf s’il voulait me prouver qu’il était prêt à
assumer notre relation… Mise à part Aurélie, en qui j’ai toute confiance, personne ne savait pour nous
deux au sein de l’établissement. À moins que ce soit quelqu’un présent à l’anniversaire d’Aurel qui a
compris ce qui s’était passé avec Estelle ? Thomas de son côté m’avait assuré qu’il ne l’avait dit à
personne. J’espère qu’il n’en a pas parlé avec Sandy, parce que je lui en voudrais vraiment…
Je me dirige vers mon service réfléchissant à un plan, comment vais-je annoncer que je ne vais plus à
l’école en septembre et surtout pour quel motif ? La nouvelle se saura assez vite quand la candidate qui
va prendre ma place va l’apprendre. J’expliquerai que j’ai demandé un report de formation pour des
raisons personnelles en espérant ne pas être questionnée. Où vais-je atterrir après l’été ? Quel service ?
Quel poste ? Je suis dégoûtée. Quand est-ce que la roue va tourner ?
J’ai l’impression d’être un zombie ces jours-ci, je me ferai peur si je me croisais dans un couloir. Je suis
ici mais mon esprit est ailleurs. J’ai besoin de me déconnecter quelques temps de toute cette vie,
vivement les vacances.
J’aperçois Cynthia à l’entrée des urgences. Je n’ai envie de voir personne, si elle vient pour me
demander des explications, je l’enverrai balader. Je m’efforce de lui sourire et la salue.
— Bonjour Alyssa, je venais aux nouvelles. Comment ça se passe ?
— Ça va, je te remercie.
— Je vois que tu me tutoies enfin.
— Je commence à m’habituer à côtoyer toute l’équipe des cadres.
C’est le moins que l’on puisse dire pensé-je.
— Très bien. Je voulais faire le point avec toi par rapport à tes jours de repos que tu avais cumulés avant
de prendre tes nouvelles fonctions, il t’en reste un certain nombre à prendre avant d’entrer à l’école.
J’abaisse la tête, je n’ai pas le courage de lui dire aujourd’hui…
— Tu sais quoi tu as une petite mine, pourquoi tu ne prends pas un jour ou deux pour patienter jusqu’au
mois d’août.
— Non, je ne vais pas m’absenter en semaine. Lui dis-je étonnée de sa proposition.
— Tu peux, on fonctionnera comme on le fait quand un cadre est absent ou en vacances.
— J’avoue que je ne serais pas contre un jour… Avoué-je au bord de les larmes.
— Tu es sûre que ça va Alyssa ? Demande Cynthia en remarquant mon air abattu.
— Oui, oui, je suis un peu fatiguée.
— Allez, prends ton après-midi et ton vendredi. Tu reviendras lundi matin en forme ! Je pense que tu en
as besoin.
— Non, je ne vais partir sans prévenir !
— Tu as cet avantage de pouvoir organiser ton planning maintenant. Tu informes le service et tu files.
C’est moi qui assure le relais quand tu n’es pas là, envoie juste un mail à monsieur Simon. Il sait que tu as
des jours à prendre, parce que c’est lui qui me l’a dit.
— D’accord, je vais me laisser tenter. Merci.
Je rédige rapidement un mail à l’attention de Thomas :
« Monsieur Simon,

Par ce mail, je vous informe que je serai absente cet après-midi ainsi que le vendredi 10 juillet. Cynthia
assurera le relais pendant mes repos. Cordialement. Madame Steunou. »

L’équipe informée, je pars après les transmissions de treize heures trente. J’appelle Emma en sortant
du travail, je m’effondre en lui annonçant que je ne rentre plus à l’école au mois de septembre. Elle
parvient à me convaincre de venir la rejoindre jusqu’à dimanche, elle est de repos demain mais bosse du
matin le week-end. J’accepte car si je reste seule ici, je vais déprimer. Je passe un coup de fil à ma mère
pour prévenir que je serai absente. Elle est très attristée d’apprendre que mes projets ne se réaliseront
pas cette année. Je ne m’attarde pas sur le sujet, ça ne sert à rien. Je prépare ma valise et prends la route
avant seize heures.

En arrivant à Nantes, j’ai de nombreux appels en absence et un message de Tom…
Aly, j’ai reçu ton mail, tu vas bien ? Tom.
Je lui réponds : Cesse de m’écrire et de m’appeler stp. Je m’éloigne quelques jours pour prendre
du recul… si tu m’envoies des sms, je ne les lirai pas, je les effacerai aussitôt.
Tom : Ne fuis pas aly. Je t’aime.
Moi : Tu ne comprends pas que tu me fais du mal ? Que nos actions ont des conséquences ? Je t’ai
dit que je voulais des relations professionnelles. Alyssa.
Tom : Excuse-moi.
S’il est aussi amoureux qu’il le prétend, il n’a qu’à me le prouver et divorcer. J’ai conscience d’avoir
été un peu dur avec lui, mais il ne se rend pas compte de ce que j’endure chaque jour, chaque heure,
minute sans lui…
Les retrouvailles avec Emma sont émouvantes, presqu’autant que notre séparation dimanche dernier à
la fête. Nous passons la soirée toutes les deux. Anthony est allé chez un copain à lui pour nous laisser
papoter. Nous nous couchons vers deux heures du matin. Lorsque je suis seule, j’enfile le pull de Tom et
m’empare de notre photo que j’ai enfin fait imprimer et je m’endors avec celle-ci entre les mains.

Chapitre 104

Force est de constater que ce petit séjour entourée de ma meilleure amie m’a fait le plus grand bien.
J’ai réussi à sortir du fond de mon lit, nous sommes allées au cinéma et au restaurant. Emma a même
réussi à me convaincre de m’apprêter comme j’aime le faire habituellement. J’ai mes règles depuis ce
matin, après une semaine de retard, je pense que c’est le fait d’avoir pu me détendre quelques jours.
Seul regret du week-end, l’absence de message de Thomas. Je sais que je lui ai explicitement
demandé de ne pas me contacter, mais dès le deuxième jour sans nouvelles, je regrettais mes propos.
C’est tordu, mais j’espérais qu’il transgresse ma demande et m’envoie un ou deux messages pour me dire
que je lui manquais. Il ne l’a pas fait et je ne lui en veux pas. De mon côté, j’ai résisté à l’envie de lui
écrire. J’ai compris que nous avions besoin d’une réelle séparation, pas seulement physique mais aussi
psychologique.

De retour chez moi après trois jours d’absence, je constate que je n’avais pas fermé la porte du
garage à clé. Mais où avais-je la tête ? N’importe qui aurait pu pénétrer chez moi… Cette idée me fait
froid dans le dos, je vais être obligée d’inspecter chaque pièce et placard pour pouvoir me coucher
sereinement. Je n’ai jamais été rassurée seule le soir, je le serai encore moins tant que je n’aurai pas tout
examiné.

Mon inspection se termine, il n’y a rien à signaler. Je vérifie tout de même que le polo de Tom se
trouve toujours sous mon oreiller, car je n’avais emmené que son pull avec moi. Il est bien là, je me
dépêche de l’enfiler. J’adore porter ses fringues, je sais que ça n’a rien d’original… la plupart des
héroïnes dans les romans que j’ai pu lire le font, mais je m’en fous, ça me procure tellement de
sensations… Sentir le tissu sur ma peau nue et savoir qu’il a reposé sur la sienne avant me rapproche de
lui d’une certaine façon. Je ressens comme une connexion qui se crée, j’imagine qu’en fermant les yeux et
en pensant très fort à lui, il pense à moi. Si je me concentre, j’arrive presque à sentir ses mains sur moi.
J’ai peur qu’avec le temps l’effet s’amenuise. Il faudrait que je m’empare d’un autre vêtement lui
appartenant. Au travail, je pourrais avoir accès à ses blouses, mais bon pour aller au lit, c’est moins
pratique. La route m’a épuisée, je trouve rapidement le sommeil.

Lundi matin, je suis au bureau avant huit heures. J’ai un tas de paperasse à trier, de quoi m’occuper
quelques heures. Je suis accablée en découvrant une note de service informant du changement de dates
des congés du cadre de pôle, de mon Tom ! Il a modifié la période, il sera absent du treize juillet, c’est-à-
dire aujourd’hui, jusqu’au trois août, quand je pars en vacances ! Ce qui signifie que nous allons passer
six semaines sans nous voir ! Pourquoi a-t-il fait ça ? Il veut ma mort ? Que va-t-il faire pendant les trois
prochaines semaines ? Sera-t-il seule à l’hôtel ou avec ses enfants ? Il va falloir que je sois forte.
À midi Nadège frappe à la porte de mon bureau.
— Alyssa, je peux te déranger cinq minutes ? Demande-t-elle d’une voix douce.
— Oui Nadège.
— Voilà, nous avons appris vendredi que tu reportais d’un an ta formation, nous nous demandions si
tu allais rester dans le service ?
Je ne pensais pas que l’information serait déjà circulante sur l’hôpital.
— Oui, j’ai dû reporter mon entrée. Je ne sais pas où je serai Nadège. Peut-être que je vais retrouver
mon poste d’infirmière. Luis dis-je en toute sincérité.
— Ce serait dommage, parce que cette expérience est forcément bénéfique pour tes études et nous
apprécions tous de travailler avec toi.
— Ça me fait très plaisir. Je ne suis sûrement pas à la hauteur de vos espérances en toutes
circonstances, mais j’apprends le métier avec vous petit à petit. J’essaie de faire face lorsqu’une
nouvelle situation se présente.
— Ça semble fonctionner.
— Ma meilleure amie m’a dit récemment que pour elle une bonne cadre, c’est une personne qui est à
l’écoute de son équipe, qui entend et agit en conséquence quand elle le peut. Elle doit être juste et peu
importe qu’elle soit ou non appréciée, ce qui compte pour elle, c’est d’être bénéfique au service. J’ai
trouvé ça d’une telle justesse, elle a tout compris et je ne doute pas qu’elle fera une excellent cadre !
— Si tout le monde pouvait penser comme elle ! Ajoute naturellement Nadège.
Je mange dans la salle de pause avec l’équipe, nous avons rarement l’occasion de le faire. C’est au
jour le jour selon le flux des patients. Les soignants ne s’en plaignent pas, ils ont l’habitude.

Combien de fois ont-ils passé huit heures d’affilées sans prendre le temps de faire une pause pour
aller aux toilettes ou même pour boire un verre ? C’est en rentrant chez eux qu’ils se rendent compte que
leur vessie est sur le point d’éclater, qu’ils se sentent déshydratés. Sans compter que beaucoup de
personne ne peuvent rien avaler au réveil à cinq heures du matin… parfois la première collation n’arrive
qu’aux alentours de quinze heures quand ils débauchent. Drôle de rythme quand on y pense, entre ça et les
horaires décalées, le fait de bosser un week-end sur deux… Dans certains centres hospitaliers, il faut
alterner des semaines de jours avec des semaines de nuits. Des gardes de douze heures avec des gardes
de huit heures… malgré tout, la plupart des soignants trouvent qu’ils ont un beau métier et ne voudraient
en changer pour rien au monde. Je fais partie de ces soignants, mon métier m’enrichit chaque jour !
Devenir cadre, ce n’est pas prendre la fuite, c’est évoluer, c’est exercer différemment. Il s’agit de
soutenir son équipe, proposer des pistes, la guider, l’encourager, trouver une organisation qui améliore
leur quotidien… Il y a tellement de possibilités.

Aujourd’hui, je ne doute plus de mes capacités, je prends confiance chaque jour, j’ai l’ambition pour
réussir mais il va falloir que je patiente encore un an au minimum.

L’après-midi est très calme, Cynthia me rend visite, elle évoque mon report pour l’école, elle ne
comprend pas… Je ne peux pas lui donner les réelles raisons, je lui dis qu’il s’agit de raisons
personnelles, Cynthia n’insiste pas mais reste perplexe.

Chapitre 105

La semaine se termine, toujours aucune nouvelle de lui. Il n’a pas cherché à me voir, ni à me parler…
Je suis persuadée qu’il est au courant de mon entrevue avec madame Moreno, je suis très étonnée qu’il ne
m’ait pas contactée par rapport à ça. Bilan de cette première semaine pendant ses congés, je pense sans
cesse à lui, je l’aime autant qu’il est possible d’aimer quelqu’un. Plus les jours passent, plus j’ai peur de
regretter ma décision. Je suis incapable d’expliquer ce qui m’a fait tomber amoureuse de lui, j’ai essayé
de me protéger mais c’était une évidence, je n’ai pas pu lutter contre mes sentiments. Il me manque
tellement que s’il revenait vers moi dans les prochains jours, je lui sauterai dans les bras sans me poser
de questions, j’agirais de manière déraisonnable. Seulement je ne suis pas certaine qu’il ait envie de
revenir…

La semaine suivante est un véritable parcours du combattant pour moi, me lever après des heures
d’insomnies, c’est déjà difficile, mais alors supporter les commérages sur Tom et sa femme… Aux
dernières rumeurs, Tom regretterait d’avoir annoncé son divorce et serait parti en vacances avec sa
femme pour se rapprocher d’elle ! D’où ils tiennent ça ? Ici les rumeurs ne sont jamais fondées, je ne
devrais pas m’inquiéter, mais alors comment se fait-il qu’il ne donne pas signe de vie ? Toutes les nuits,
je rêve de lui, de nos retrouvailles, c’est une torture et j’en suis responsable…

La troisième semaine, je repasse en mode zombie, les rumeurs ne m’atteignent plus, comment le
pourraient-elles alors que je ne me sens plus vivante ? Mes sœurs sont passées plusieurs fois me rendre
visite à la maison, je n’avais rien à leur raconter et ce qu’elles avaient à me dire n’étaient pas intéressant.
Tout est différent, les sorties entre amis ne m’enchantent plus, j’ai refusé toute les propositions d’Aurélie,
je ne cuisine plus, le plaisir que j’éprouvais à réaliser des bons plats s’est envolé, je crois que la vie a
perdu tout son sens et je m’enfonce dans la dépression de jours en jours…

J’applique mes petits rituels, comme tous les soirs précédents, je passe la porte de chez moi, j’enfile
le polo et le pull de Tom et je m’installe dans le canapé avec une couverture et je n’en bouge plus avant
de monter me coucher. J’ai l’intention de renouveler ce programme pendant mes trois semaines de
vacances qui débutent ce soir. Je zappe avec la télécommande quand quelqu’un frappe à la porte. Eh
mince, on ne peut pas être tranquille chez soi ! Je n’espère même plus que ce soit lui, non je suis devenue
réaliste, tout est bien fini entre nous. J’hésite à ouvrir, j’attends, avec un peu de chance, la personne
abandonnera. Au lieu de ça, la sonnette retentit. C’est bon, je me lève, je me traîne jusqu’à la porte.
« Surprise » s’exclament-elles en chœur ! Aurélie et Emma sont devant chez moi. Je ne m’attendais pas à
les voir ici !

— Emma, mais qu’est-ce que tu fais là ? Je ne savais pas que tu venais en Bretagne ce week-end ! Lui
dis-je étonnée.
— Je l’ai appelée à la rescousse ! Déclare Aurélie !
— Quoi ? Mais arrête tes bêtises, tu n’avais pas besoin de faire ça.
— Il faut qu’on te bouge le cul ma vieille ! Tu ne nous laisses pas le choix. Tu t’es enfermée dans ta
bulle, tu t’isoles, tu passes ton temps dans ces fringues puantes ! Me balance-t-elle en me pointant du
doigt.
— Alyssa, elle a raison et tu le sais. Nous allons te remonter le moral ! J’ai avancé mes vacances
d’une semaine et Aurélie a encore quinze jours devant elle. M’annonce Emma.
— Je ne vois pas pourquoi tu as avancé tes vacances ! Répliqué-je.
— Parce que nous partons dès demain toutes les trois. Une semaine entre filles ! Julien et Anthony
nous rejoindront la deuxième semaine. Répond Aurélie toute excitée.
— Pour aller où ? Demandé-je.
— Nous allons passer une semaine en Normandie dans la maison de vacances de ma tante. Tous les
ans on se dit qu’il faudrait qu’on y aille ensemble pour visiter les musées et les sites historiques ! Nous
passerons la seconde semaine à La Rochelle chez les parents de Julien. Tu vois tout est organisé, tu n’as
pas d’excuses ! M’explique Emma.
— Vous êtes complètement folles ! Dis-je émue.
Mes amies sont exceptionnelles, j’ai une chance inouïe de les avoir dans ma vie.
— Juste une précision Alyssa ! Ajoute Aurel.
— Oui laquelle ?
— Il est hors de question que tu emportes avec toi les habits de ton ex ! Plaisante-t-elle.

Sa remarque provoque un petit rictus forcé de ma part mais fait aussi vibrer ma corde sensible. Elle
l’a appelé « mon ex », il appartient au passé désormais. Emma constate immédiatement mon mal être.
— Alyssa, si tu as envie de pleurer, laisse-toi aller maintenant ! Parce qu’après les pleurs c’est
terminé ! Nous allons te redonner le sourire ! Suggère-t-elle en m’enlaçant. Je m’effondre.
Un peu plus tard dans la soirée, je prépare mes valises, je n’en reviens pas de me laisser embarquer
dans ses vacances totalement improvisées. Aurélie me force à retirer mes fringues fétiches et me laisse le
choix entre les mettre à laver ou les jeter. Je n’hésite pas une seconde et lance la machine à laver.

Aurélie rentre passer la nuit chez elle, nous passerons la prendre demain matin à la première heure.
Emma partage mon lit comme autrefois quand nous passions des nuits blanches à discuter.
— Alyssa, je comprends que ce soit dur pour toi. Je te trouve très courageuse, parce que ces derniers
temps, tu n’as pas été épargnée. Me confie Emma.
— Merci. J’ai essayé de garder la tête haute, mais ça n’a fonctionné que quelques jours. Aujourd’hui,
j’ai l’impression d’être au fond d’un gouffre. Il me manque et je voudrais pouvoir l’oublier, je n’y arrive
pas.
— Ça ne fait qu’un mois, laisse-toi du temps ! Je pense que tu n’avais pas réellement assimilé ta
séparation avec Hugo, peut-être qu’au travers de cette rupture, tu dois faire le deuil de ces deux
relations… Fais-moi confiance, tu vas y arriver et même si aujourd’hui, tu n’y crois pas, tu rencontreras
quelqu’un et tu auras le droit au bonheur !

En effet, elle a raison, rencontrer quelqu’un d’autre… je n’y crois pas ! En revanche, elle n’a
sûrement pas tort quand elle suggère que je fais le deuil de Tom et d’Hugo en même temps.

Chapitre 106

Samedi matin, nous prenons la route, direction la Normandie ! La météo annonce une belle semaine,
j’espère car ma garde-robe se compose uniquement de : robes, jupes, maillots de bain. Les filles sont
parvenues à me convaincre de laisser les fringues de Thomas à la maison.
Emma conduit, Aurélie choisit la musique et moi j’essaie de me détendre à l’arrière, je regarde les
paysages défiler, j’ai conscience de m’éloigner de lui… Je ne sais même pas où il était ces trois
dernières semaines. Pourquoi je ne parviens pas à lui envoyer un message, pas même un seul sur les
centaines que je rédige chaque semaine ? Comment il réagirait si je le relançais alors que je lui ai
demandé de ne plus me contacter ? Je suis trop stupide, je l’ai peut-être jeté dans les bras de sa femme…

Aurélie me sort de mes rêveries, elle veut que je joue à son jeu débile. Le jeu consiste à trouver des
mots le plus vite possible commençant par la lettre qu’elle choisit, mais seulement des mots en lien avec
ce qui nous entoure… P : panneau, A : arbre… Ça fait marrer personne ! Après deux ou trois lettres, nous
refusons de poursuivre au risque de la vexer.
Nous arrivons à Bayeux, pour notre première journée de visite, cimetière et musée, nous réalisons
quelques photos devant les chars avant de poursuivre. Nous prenons le temps de nous documenter sur
place, les scènes reconstituées sont impressionnantes par leur réalisme.

En fin d’après-midi, nous arrivons dans la maison de vacances de la tante d’Emma. Elle est située à
deux minutes de Colleville-Sur-Mer, nous pouvons accéder facilement aux plages d’Omaha, au célèbre
cimetière américain. Nous avons plein de projets pour les jours prochains. Nous mangeons au restaurant
dans le calme, cette journée a été particulièrement émouvante.

La semaine file à une vitesse folle, rien n’est laissé de côté, nous sommes calées sur le sujet, la
seconde guerre mondiale, l’occupation, le débarquement, les camps de concentration, les pertes militaires
et civiles… Voilà, une semaine de plus s’est écoulée sans nouvelles de lui, ma position a changé. Peu
importe que j’en aie été l’initiatrice, désormais je lui en veux, s’il m’aimait vraiment, il aurait tenté
quelque chose…

Comme convenu samedi huit août, nous retrouvons les garçons à Nantes chez Emma avant de nous
rendre à La Rochelle. Il y a bonne ambiance durée le trajet, il fait très chaud, nous roulons fenêtres
ouvertes. Cette ville est magnifique, c’est très touristique, il y a des animations tous les jours sur le port
et de nombreuses activités sont possibles pendant le séjour, pêche, voile, plage... Nous profitons
pleinement de chaque journée, nous organisons des barbecues presque tous les soirs près de la plage.
C’est presque le paradis, s’il était avec moi, ça le serait !
Samedi quinze août, il est temps de rentrer. Je dois avouer que ces deux semaines éloignée de
l’hôpital et surtout de lui ont été bénéfiques pour moi. Mise à part quelques nuits où j’ai eu besoin de
craquer, dans l’ensemble je vis mieux la séparation. La présence de mes amis y participe sans aucun
doute. Il me reste une semaine à passer à la maison avant la reprise, avant la confrontation.
Je suis invitée chez mes parents dimanche midi, mes frangines sont là aussi pour le repas. En arrivant,
elles constatent que j’ai bonne mine et que j’ai pris des couleurs !
— Wahou Alyssa, tu as le teint halé, tu es superbe ! Me complimente Lucie.
— Merci, c’est l’air de La Rochelle ! Mais toi tu es carrément noire ! Répliqué-je.
— Oui, moi c’est l’air de Corse !
— Ah oui, c’est vrai que vous êtes partis là-bas ! C’était bien ?
— Les meilleures vacances ! Nous avons fait beaucoup de bateau avec les enfants, ils ont adoré !
Répond-elle tout en m’aidant à mettre la table.
— Comment va-t-il ? Demandé-je embarrassé.
— Il était content de nous voir, il semblait mieux avant qu’on reparte. Il a demandé de tes nouvelles.
Me dit-elle.
— Ah oui, et qu’est-ce que tu lui as raconté de beau ? M’inquiété-je.
— Pas grand-chose. Je lui ai dit que tu passais quelques jours de vacances avec vos amis. Il m’a
questionnée au sujet de Thomas. Avoue-t-elle.
Je m’en doutais…
— Je ne me suis pas attardée, j’ai confirmé que tu étais toujours séparée de lui. Il avait de la peine
pour toi mais je ne te cache pas qu’il a exprimé son soulagement. Il garde espoir pour vous.
— Il devrait m’oublier. J’en ai marre des hommes en général. Remarqué-je.
Ma mère interrompt notre échange en nous invitant à faire une photo.
— Mes trois filles réunies ! Se réjouit-elle l’appareil photo dans les mains.

Pendant le repas, Émilie et moi discutons, elle me confie avoir un petit ami depuis une dizaine de
jours, il s’appelle Alexandre, il est kiné. Nous avons retrouvé une certaine complicité toutes les deux,
notre relation est différente de celle que nous avions dans le passé. Nous nous sentons peut-être un peu
plus proche qu’avant. Il n’y a plus de secret entre nous et Émilie se comporte plus comme une adulte à
présent.

Quand j’arrive à la maison, je réalise qu’hier je me suis couchée seule dans mon grand lit sans avoir
eu besoin de porter « ses habits ». Je vais les prendre dans mon armoire et les toise un moment avant de
les reposer à leur place. Cette époque est résolue, je ne les mettrai plus. D’ailleurs c’est décidé, quand je
retourne au travail lundi, je les lui rapporte.
Vingt heures, mon portable m’avertit d’un SMS : Bonjour Alyssa, je voulais m’assurer que tu avais
passé de bonnes vacances. Je t’embrasse. Hugo.
C’est une délicate attention, je ne pensais pas recevoir de ses nouvelles. Je prends la peine de lui
répondre : Oui, elles m’ont fait beaucoup de bien. Lucie m’a dit qu’elle avait adoré ses vacances en
corse. Elle a dit que tu allais bien, tu confirmes ? Bisou. Alyssa.

Hugo : Je vais bien. J’ai hâte que les vacances se terminent pour découvrir ce qui m’attend. Je suis
ravi de savoir que tu te portes mieux. Je ne t’embête pas plus longtemps. Bonne soirée.
Moi : Tu ne m’embêtes pas. Merci d’avoir pris de mes nouvelles, ça m’a fait plaisir.
Hugo :
Quand j’y repense la dernière fois que nous nous sommes vus, il m’avait raccompagnée au beau
milieu de la soirée, j’étais tellement mal… et le pauvre, il s’est battu pour moi ce soir-là ! Il ne s’était
pas laissé faire avec Thomas. Stop, je ne veux pas ressasser cette soirée !

Chapitre 107

En me réveillant ce matin, je suis encore un peu chamboulée par la nuit dernière. Hugo a fait son
grand retour dans mes rêves, sans que je l’y aie invité. Nous étions dans notre ancienne maison et nous
étions à la veille de notre mariage. Tout semblait si naturel entre nous comme si nous ne nous étions
jamais séparés, cela est très perturbant. C’est la première fois en quatre mois que je rêve de lui de cette
manière, que je nous vois en couple. S’il ne m’avait pas contactée hier soir, je pense que je n’aurais pas
rêvé de lui. Je n’ai pas l’intention de me prendre la tête avec tout ça, ça ne signifie rien, enfin je crois…

Au programme, journée ménage et pour me récompenser une petite soirée au cinéma avec Manu et sa
sœur Lya. C’est Manu qui a choisi la séance, un film d’horreur, on va flipper comme d’habitude. Rien que
la bande annonce est stressante ! Je vais prendre mon foulard, comme ça j’aurais de quoi me cacher.
De retour du ciné, nous prenons un verre et nous évoquons nos ressentis. L’intrigue était bien menée,
les acteurs ont très bien joués, le gros bémol c’est la fin et les effets spéciaux loupés ! La bête fait peur
tant qu’on ne la voit pas, mais alors une fois qu’elle apparaît, il y a de quoi en rire.

De mardi à samedi, j’ai mes neveux en vacances à la maison. Même s’ils sont adorables, c’est du
boulot deux enfants en bas âge ! Il faut une surveillance constante autour de Rose parce qu’à chaque fois
que je quitte la pièce une poignée de secondes, je la retrouve sur les premières marches de l’escalier.
Elle est même parvenue à mettre des jouets dans les toilettes pendant que je faisais la vaisselle la chipie.
Théo est plus posé, il est très solitaire, il passe son temps soit à dessiner, soit à faire rouler ses petites
voitures sur toutes les surfaces de la maison, y compris les fenêtres, les barreaux de chaises... Lucie m’a
fait comprendre que je lui sauvais la vie en acceptant de les garder, mais je pense qu’en fait, elle me les a
confiés pour éviter que je reste seule à ruminer.

Dimanche 22 août, c’est mon dernier jour avant la reprise. Je m’accorde une grasse matinée. Je songe
à mes vacances, j’ai réussi à sortir de mon gouffre grâce à mes amies, j’ai tenu le coup la dernière
semaine sans verser une seule larme ! Dans quelques jours, cela fera deux mois que nous sommes
séparés. Six semaines et quatre jours se sont écoulés depuis la dernière fois que je l’ai vu. La douleur n’a
pas complètement disparue, mais elle s’est estompée et est supportable au quotidien. Il suffit que je
m’occupe pour éviter de penser à lui.
J’appréhende énormément de retourner au travail, j’ai reçu une convocation de madame Moreno, je la
vois demain à seize heures. C’est mon devenir qui va être évoqué. Je sais que je dois quitter le service
des urgences vendredi prochain, mais pour aller où ? Je suis presque certaine que je vais retrouver mes
fonctions d’infirmières, au fond, ce n’est peut-être pas plus mal.

Je prépare les habits de Thomas dans un sac pour les lui rapporter, mais avant de pouvoir relâcher le
sac, dans une seconde d’inattention, de relâchement, je me surprends à respirer ses fringues ! La guérison
n’est pas atteinte et le chemin qui m’y conduit est parsemé d’obstacles, tout d’abord ses vêtements, puis
notre photo et demain ce sera lui en chair et en os ! Des frissons me parcourent à l’idée de le revoir. Ses
beaux yeux noisette, son sourire angélique, son corps parfait vont faire de moi une proie facile ! Le pire
c’est que j’aimerais être encore une cible à atteindre pour lui…

Allongée dans mon lit, je fixe l’oreiller à côté de moi, il est recouvert de son polo soigneusement
plié. J’ai réussi à ne pas l’enfiler, mais je me suis dit que pour la dernière nuit, il serait mieux dans le lit
avec moi… Oui, je suis cinglée !
Mon sommeil est léger, je vois les heures défiler au réveil et toujours les mêmes questions qui
m’obsèdent. Pourquoi a-t-il changé la date de ses vacances ? Est-ce que les rumeurs disaient vraies à
propos de sa femme et lui ? Pourquoi ne m’avoir donné de nouvelles ? Est-ce que je lui ai manqué ? A-t-
il souvent pensé à moi ? Est-ce qu’il a toujours des sentiments pour moi ? Est-ce qu’il m’en veut… ?

Six heures, je saute hors de mon lit dès le premier bip de mon alarme ! Je fonce sous la douche, puis
me lisse les cheveux, me maquille avant de m’habiller. La tenue préparée hier soir ne me convient plus ce
matin. Je sors la moitié de mon armoire sur mon lit et finis par opter pour ma robe turquoise. Celle que
nous avions trouvée simultanément Adélaïde et moi quelques mois avant qu’elle parte pour Bordeaux.
Elle portait cette robe le jour où Adrien est tombé sous son charme selon elle. Elle ne s’était pas rendue
compte qu’il en pinçait pour elle depuis quelques temps déjà. Elle avait voulu lui soumettre son petit
interrogatoire comme elle avait l’habitude de le faire avec sa collègue pour tous les nouveaux internes du
service, mais il l’avait devancé ! J’ai toujours pensé que ces deux-là finiraient ensemble, comme quoi
mon instinct a parfois vu juste.
Sept heures quarante-cinq, enfin prête, je monte dans ma voiture avec mon petit sac à la main. Arrivée
sur le parking, j’ai changé d’avis ! Hors de question de me balader avec ses affaires au travail, et puis je
ne vais pas chercher à le voir. Ça peut attendre quelques jours de plus après tout.
Et si pendant mon absence, les collègues avaient appris pour Tom et moi ? Y a bien quelqu’un qui a
été en parlé à la direction, donc cette même personne a pu faire circuler le message… Si c’est le cas, je
serai vite fixée ! Je me rassure en me disant qu’Aurélie a repris le travail depuis une semaine, elle
m’aurait dit si elle avait entendu quelque chose sur moi.

J’essaie de donner l’impression d’avoir une démarche assurée dans les couloirs de l’établissement.
Je croise Guillaume avec qui j’échange quelques mots rapidement dans le couloir. C’est le psychologue
qui intervient en pneumologie et en médecine interne. Il assiste à une formation sur les soins palliatifs, ce
qui explique qu’il soit présent si tôt. Je devrais penser à lui demander une séance personnelle à
l’occasion, si la vie continue à vouloir me donner des leçons…

Chapitre 108

En arrivant dans le bureau, je remarque un bouquet de roses blanches sur mon bureau. Il n’y a pas de
message, pas de carte. Est-ce que je peux espérer qu’elles viennent de lui ? Elles paraissent toutes
fraiches et parfument agréablement la pièce. Je m’installe devant l’ordinateur et fais défiler les mails
reçus en mon absence. Il y en a un de lui mais l’objet indique un rappel sur les déclarations d’évènements
indésirables. Il a été envoyé vendredi dernier à tous les services.
Ce matin, je dois me pencher sur un dossier, une famille a déposé une plainte à la direction
concernant une prise en charge jugée de mauvaise qualité. Ce n’est pas évident de retracer les faits lors
de son passage, d’autant plus que je n’étais pas présente. Je les contacte en fin de matinée et leur propose
une rencontre prochainement. Nous fixons le rendez-vous à demain matin neuf heures. Il serait peut-être
plus judicieux de demander à un cadre qualifié d’être présent lors de cet entretien, il y a tout de même des
risques de poursuites pour l’hôpital. Je passe un coup de fil à Cynthia et lui explique la situation, elle
m’oriente vers Thomas. Avant de raccrocher, elle évoque ma formation.
— J’ai appris avec madame Moreno que tu ne rentrais pas à l’école cette année, je suis désolée pour
toi.
— Je ferai le nécessaire pour que l’année prochaine soit la bonne. Lui dis-je.
— Elle n’est pas rentrée dans les détails, a évoqué un motif personnel, j’espère que tu vas bien ?
Demande-t-elle.
— Oui, je te remercie Cynthia.
— Tu sais que Carole a été diplômée, qu’elle doit prendre ses fonctions aux urgences lundi ?
— Oui, oui je le sais. Je ne sais pas ce que je vais devenir, mais je vais à la direction cet après-midi,
j’en saurai plus.
— Tiens-moi informée, nous n’avons eu aucune info. Précise-t-elle.

J’ai un peu de mal à croire qu’en tant que cadre, elle ne sache pas où je vais atterrir. Soit il y a un
poste de cadre, soit je suis affectée en tant qu’infirmière dans un service, mais à une semaine près, c’est
forcément annoncé. Je compose le numéro de Thomas mais je raccroche avant de parvenir à terminer mon
action. Je ne me sens pas prête à lui parler, je ne souhaite pas être la première. J’opte pour l’envoi d’un
mail :

« Monsieur Simon,
Je vous informe que j’ai pris connaissance de la plainte déposée par la famille de monsieur Le Bon.
Cette plainte a été déposée jeudi dernier. Je les ai contactés ce matin, ils souhaitent me rencontrer. Nous
avons convenu d’un rendez-vous demain matin, mardi 24 août à 9h00. Je me suis adressée à Cynthia qui
m’a orientée vers vous. Est-il préférable que vous soyez présent lors de cette entrevue ?
Dans l’absence d’une réponse de votre part, je considérai que votre présence n’est pas nécessaire.
Cordialement. Madame Steunou. »

Je reste grignoter dans le service. Le self est une épreuve qu’il est préférable de repousser pendant
quelques jours. L’équipe n’a pas changé de comportement avec moi, j’en déduis que les rumeurs me
concernant n’ont pas dû circuler en mon absence.
Après les transmissions, je vais vérifier ma messagerie professionnelle et découvre une réponse à
mon mail. Je clique fébrilement sur la petite enveloppe afin d’en découvrir le contenu.
« Madame Steunou,
J’ai été informé de cette plainte lorsqu’elle a été déposée. En effet, je pense qu’il est souhaitable que
j’assiste à cet entretien. Je prendrai mes dispositions pour être présent au rendez-vous demain. Je te
remercie de m’en avoir informé.
Je passerai vers quinze heures dans ton service, je dois m’entretenir avec les médecins. Ils sont
prévenus de ma visite.
Monsieur Simon. Cadre supérieur de santé. »

Il n’y a aucune ambiguïté dans sa réponse, elle est strictement professionnelle. Il va passer d’ici
trente minutes, nous allons nous revoir ! Mince, j’ai envie de pleurer de joie, d’excitation, de peur… Je
vais voir à quoi je ressemble devant le miroir, je m’arrange un peu et retouche à mon rouge à lèvres.

Quinze heures passée, il n’est pas encore là ! L’attente me rend nerveuse, j’ai rongé mes ongles à sang
ces dernières minutes. Nadine me demande de la rejoindre au secrétariat pour l’aider à remplir des
formalités.

Je lui indique ce qu’il faut remplir, quand j’entends la voix de Tom, il est enfin là ! Je sens que tous
les efforts que je fournis depuis deux mois sont en train d’être réduits à néant. Juste le son de sa voix me
fait vibrer, mon cœur s’accélère, une boule se forme au creux de mon ventre. Je n’arrive pas à quitter le
secrétariat, j’ai très envie de le voir mais mes jambes ne m’obéissent plus ! Ce n’est pourtant pas sorcier
de mettre un pied devant l’autre, rien à faire, ma jambe est lourde comme du plomb ! Nadine me tend un
dossier à déposer dans la bannette des médecins, je finis par le prendre et retrouve l’usage de la marche.

D’un pas hésitant, je longe les box des patients. Quand mes yeux se posent lui, je m’arrête. Je sens le
feu me monter aux joues, mes doigts s’engourdissent à force de les tordre. Lorsqu’il tourne la tête dans
ma direction, je détourne le regard vers l’interne et lui donne le dossier. Je fais volte-face immédiatement
et m’éloigne.
— Alyssa ? M’interpelle Tom.
J’inspire profondément avant de pivoter sur moi-même pour être face à lui. J’essaie de ne pas le fixer
dans les yeux pour le saluer.
— Bonjour monsieur Simon. Dis-je naturellement.
— Bonjour Alyssa. Tu as un moment ? Demande-t-il posément.
— Non, je suis attendue à la direction. Rétorqué-je.
— Oui, je sais. Je t’accompagne. Lâche-t-il sans me demander si je suis d’accord avec sa
proposition.
— Je reviens, je vais chercher mes affaires.
Je m’enferme rapidement dans mon bureau et m’appuie contre la porte. Inspire, expire, sois forte, ce
n’est pas le moment de craquer ! Il sait pour mon rendez-vous, bien sûr, il sait sûrement ce qu’il va
advenir de moi dans l’établissement. Même si j’ai à peine posé les yeux sur lui, j’ai pu observer son teint
halé et j’ai aperçu le col de sa chemise, ma préférée et il le sait ! Mince, il est trop canon… Je sors de la
pièce et le rejoins.
— Tu es prête ? Demande-t-il.
— Oui, mais je peux m’y rendre seule. Ajouté-je gênée.
— Je suis également convié à ce rendez-vous, donc je m’y rends Alyssa. Précise-t-il contrit.

Je me décompose intérieurement. C’est quoi cette blague ? Quel est l’intérêt ? Allons-nous nous
devoir nous justifier ? Génial ce retour de vacances ! Thomas emboîte mon pas et nous marchons en
silence dans les couloirs de l’hôpital. Lorsque nous passons les portes automatiques, Thomas s’arrête.
Constant qu’il regarde autour de nous, j’en fais de même. Il n’y a personne.
— Je voudrais te dire un mot avant que nous y allions. M’avoue-t-il en enfonçant les mains dans les
poches de sa blouse.
— Oui, mais il est presque seize heures. Lui indiqué-je.

Chapitre 109

— Je suis désolé que tu subisses professionnellement les conséquences de notre relation. Sache que
je n’ai rien pu faire, peu importe ma position dans la mesure où j’étais concerné.
— D’accord. Dis-je simplement avant de m’écarter de lui et me dirige vers le bâtiment administratif,
Tom marche à quelques mètres derrière moi. J’ai entendu le fait qu’il n’avait rien pu faire et je ne lui en
veux pas. J’aurais aimé qu’il me dise que je lui ai manqué, qu’il avait envie de me contacter, qu’il ne
s’était pas remis avec sa femme. Ce qui m’intéresse vraiment c’est de savoir ce qu’il ressent pour moi
aujourd’hui.
Nous montons au premier étage, Thomas s’adresse à la secrétaire de madame Moreno, celle-ci nous
informe qu’elle a un peu de retard et nous invite à patienter quelques instants. Nous prenons place sur une
chaise dans le couloir, nous sommes assis l’un en face de l’autre. Je garde la tête baissée n’osant pas
affronter son regard que je sens posé sur moi. Je positionne mes deux mains à plat sur mes cuisses et me
concentre sur ma respiration. Il n’est pas question de lui montrer ce que je ressens face à lui. Des
personnes défilent régulièrement devant nous. Je parviens progressivement à relever la tête dans sa
direction quand Sandy fait son apparition.
— Tiens Tom tu es là ! Lance-t-elle.
Elle l’a appelé TOM ? Je rêve, il m’avait assuré que personne ne le surnommait comme ça.
— Salut Sandy. Répond-il.
— Tu as rendez-vous par rapport à ce dont on parlait hier chez toi ? Demande-t-elle en insistant bien
sur la fin de sa phrase.
Elle était chez lui hier soir ! De quoi ont-ils parlé ?
— Je ne sais pas ce qu’il est prévu. Reprend-il.
— On se voit ce soir si tu veux en parler ? Sauf si tu as autre chose de prévu, si tu vois ce que je veux
dire…
Il est certain que notre relation n’est plus un secret pour elle, je pense même qu’elle cherche à me
provoquer. J’assiste impuissante, telle une simple spectatrice à cette scène qui me donne envie de bondir.
Thomas se lève de la chaise et fait quelques pas pour s’éloigner afin de parler avec Sandy. La pin-up use
de ses charmes pour parvenir à ses fins. Merde Tom réveille-toi, elle te mène parle du bout de nez ! Mon
self contrôle me surprend, parce que là, je bouillonne et je n’ai qu’une envie, me lever et la gifler, lui
refaire le portrait surtout s’il s’avère que c’est elle qui nous a balancés !
Si nous n’étions pas sur notre lieu de travail, si elle n’était pas ma supérieure, dans une autre vie
quoi… je lui ferai cracher le morceau en l’attrapant par les cheveux ! Elle découvrirait ce dont je suis
capable, la revanche d’une brune ! Thomas revient s’asseoir, Sandy lui fait un clin d’œil et ajoute :
— On s’appelle tout à l’heure Tom.
J’enfonce douloureusement me doigts dans la chair de mes cuisses jusqu’à ce qu’elle disparaisse. À
ce moment-là, madame Moreno ouvre la porte.
— Bonjour, vous pouvez entrer.
L’ambiance est pesante, elle nous toise de son œil interrogateur.
— Je vous ai fait venir aujourd’hui pour faire le point sur la situation. Carole Taton prend ses
fonctions de cadre normalement aux urgences dès lundi prochain.
J’acquiesce d’un signe de tête.
— Je me suis retrouvée dans l’embarras après avoir découvert que vous entreteniez secrètement une
relation. Je tiens à vous rappeler que les relations entre collègues sont possibles, mais dans votre cas, il y
a une différence hiérarchique et dans ces circonstances, il aurait judicieux de m’en informer pour que je
prenne certaines mesures… Je ne vais pas vous rappeler les conséquences désastreuses… Je ne sais pas
où vous en êtes aujourd’hui, mais êtes-vous capable de travailler ensembles ?
— Oui, je peux vous répondre sans réfléchir. Nous sommes adultes, cette histoire appartient au passé.
J’assume l’entière responsabilité de nos actes, j’avais fermement demandé à madame Steunou de garder
le silence sur notre rapprochement. Annonce Thomas avec une assurance déconcertante !
Je suis ravie d’apprendre qu’il peut travailler avec moi car notre histoire se conjugue au passé !
— Et vous concernant madame Steunou, pouvez-vous en dire autant ? Me questionne-t-elle.
— Absolument. Cette histoire est regrettable et il n’y a plus lieu d’en parler. Répliqué-je le cœur
comprimé dans un étau qui se resserre.
— Entendu, je suis prête à vous accorder une seconde chance, mais s’il se passait quoique ce soit, je
dois en être informée.
— Évidemment. Répond Thomas.
Mon cœur va finir en miette à cette allure.
— Je peux donc vous proposer ce présent contrat d’un an en tant que faisant fonction de cadre au sein
des urgences. J’ai contacté personnellement Carole, elle est intéressée par la récente création de l’unité
de soins palliatifs.
— Merci beaucoup, je ne m’attendais pas à une offre pareille. Lui dis-je avant de signer le contrat.
L’entrevue se termine, je quitte le bureau la première. Thomas avait d’autres points à voir avec elle.
Je suis très contente de pouvoir conserver mon poste, quel soulagement ! En revanche, Thomas… il ne
faut plus m’en parler, notre histoire appartient au passé ! Ce sont ses propos !
J’ai beaucoup de mal à m’endormir ce soir, ses mots raisonnent encore en moi. J’ai essayé de me
changer les idées en travaillant sur la prise en charge de monsieur Le Bon qui a posé souci récemment en
vue du rendez-vous demain. Le problème c’est qu’il sera présent et à partir de cette information, je
n’arrive pas à me concentrer.

Demain matin, je vais éclaircir la situation avec lui. Nous ne pourrons pas travailler ensemble tant
que nous n’évoquerons pas certains détails ! Pour commencer, je vais lui demander clairement s’il a fait
des confidences sur nous à Sandy le soir sur l’oreiller !
Je le jure, si j’apprends que c’est elle qui a cafardé à la direction, je me vengerai quitte à perdre mon
emploi ! Elle est le dénominateur commun entre la direction des soins et la femme de Tom. Non Thomas,
pensé-je immédiatement. Cette pétasse s’est approprié le diminutif que j’utilisais en plus de mon homme !
Elle doit payer !

Chapitre 110

Ce matin, je me suis réveillée de mauvaise humeur, mes règles ont débarquées sans que je m’y
attende. La nuit a été interminable, j’ai vu toutes les heures s’afficher sur mon réveil. Tout a été de
travers, je me suis cogner le petit orteil dans le pied de mon lit, j’ai juré pendant cinq bonnes minutes,
quand je me suis calmée, j’ai renversé mon café dans le micro-ondes. J’ai mis beaucoup plus de temps à
arrêter de ronchonner, car je m’étais éclaboussée et qu’il a fallu que je me change. J’ai enfilé ma robe
taupe en mousseline, son encolure en V croisée lui donne un côté chic.
Je suis au bureau un peu avant huit heures, je prépare mon rendez-vous de neuf heures, celui qui m’a
en partie empêchée de dormir. Après réflexion, j’ai décidé de ne plus rien dire à Thomas, enfin ma
décision n’est pas catégorique. Nous verrons comment ça se passe, s’il aborde le sujet Sandy comme
chaque fois qu’il en l’occasion.
L’équipe m’a félicitée quand je leur ai appris que je restais avec eux un an à compter d’aujourd’hui.
Je les ai informés de ne pas me déranger pendant que je recevais la famille de monsieur Le Bon.
Neuf heures moins dix, Thomas frappe à ma porte qui est grande ouverte.
— Bonjour. Dis-je la première.
— Bonjour Alyssa.
Il s’avance et referme la porte derrière lui. Hésitant, il se rapproche davantage du bureau.
— Je sais que je n’ai plus la permission de te dire ce genre de choses, mais tu es très belle ! Précise-
t-il en esquissant un sourire discret.
Bien sûr, je suis touchée mais encore tellement encore agacée de la veille ! Je devrais lui dire de
garder ses complimenter pour Sandy !
— Merci.
— Tu as dû bien profiter de tes vacances vu ton joli teint bronzé ! Ajoute-t-il sans doute pour faire la
conversation.
Ah oui, j’ai profité, j’ai passé les vacances les plus heureuses de mon existence sans nouvelles de
toi ! Il se fout de moi ! Il n’y a pas eu une seule journée sans que je pense à lui, que je rêve de lui, il a
bien failli me faire perdre la tête en plus de me rendre dépressive.

— Exceptionnelles ! Répliqué-je avec ironie. J’ai même rencontré un homme, nous avons flirté, mais
il ne m’a fait aucune promesse, il savait qu’il ne pourrait pas les tenir… Tu connais ça !
Thomas se décompose littéralement quand je lui raconte que j’ai flirté avec quelqu’un. Tant mieux si
ça l’atteint, j’ai assez souffert seule de mon côté. Je pousse mes mensonges un peu plus loin pour lui
mettre la puce à l’oreille… pour lui faire comprendre que j’espérais des nouvelles de lui malgré mes
recommandations.
— Enfin bref, après avoir couché ensemble, il s’est conduit comme un homme, plus de nouvelles, un
parfait salaud quoi ! Mais ce n’est pas grave, je n’avais pas de raison de le pleurer, il ne m’avait rien
promis ! Ajouté-je avec une pointe de sarcasme.
— Si tu veux me faire passer un message Aly, fais-le directement. S’exclame Tom avec sévérité.
— Pourquoi tu t’es senti visé ? Oh mille excuses, ce n’était pas mon attention.
Tom me toise, ses sourcils se rapprochent, ses yeux se plissent, je lis du mécontentement sur son
visage. Le chef est contrarié !
— Puis-je te demander ce que j’ai fait qui ne t’a pas plu ? T’ai-je manqué de respect une seule fois ?
Me questionne-t-il en haussant le ton.

Il se lève et place ses deux poings fermés sur mon bureau puis se penche pour être face à moi. Ses
yeux plongés dans les miens, il attend ma réponse. Il me déstabilise, je ne parviens à formuler ce que je
voudrais lui dire. La seule chose que j’arrive à faire, c’est me dire qu’il est beau même en colère, que ses
lèvres m’attirent à cette distance. Plus il semble irrité, plus j’ai envie qu’il m’embrasse sauvagement. J’ai
envie que dans un excès de colère, il me plaque contre le mur, qu’il me bloque contre lui, qu’il me
domine et m’arrache un baiser violent ! Je ne pourrais pas me défendre contre son étreinte puissante, il
soulèverait ma robe, descendrait mon string, puis libérerait son sexe. Sans réfléchir, sans m’avertir, il me
prendrait contre ce mur alors que ma porte n’est pas verrouillée. Oh mon dieu que ça m’excite.

Tom constate que je n’ai pas l’intention de lui répondre, il tape du poing sur les documents qui
recouvrent la surface de mon bureau.
— Je voudrais quand même te rappeler que c’est toi qui m’as demandé de partir, c’est toi qui as
rompu. Je n’étais pas d’accord, mais ça ne comptait pas. Lâche-t-il sévèrement.
— Je venais de rencontrer ta femme, nous avions eu une altercation et elle m’avait révélé tes
mensonges.
— Mes mensonges ? Nous n’allons pas revenir sur cette histoire de séjour à Rennes ! Je ne t’ai pas
contactée parce que …
Quelqu’un frappe interrompant Tom dans ses explications qui devenaient intéressantes.
— Oui. Dis-je.
Nadine nous informe que mon rendez-vous est arrivé.
— Tu peux les faire entrer Nadine. Merci.
Thomas déplace une chaise pour venir se mettre à côté de moi.
— Je vais m’installer à côté de toi. M’informe-t-il.
Lorsqu’il s’assoit, je reconnais instantanément son parfum délicieux, celui que son pull a longtemps
conservé. Des images me reviennent en mémoire, notre première et notre dernière nuit ensemble, notre
premier baiser à l’internat. Ses lèvres si délicates, la douceur de sa peau contre la mienne, l’excitation
qu’il me provoquait… Je suis en train de replonger.

Nous débutons l’entretien par une description des faits qui se sont déroulés le jour où monsieur Le
Bon s’est présenté aux urgences. Tom et moi sommes sur la même longueur d’ondes, il prend la défense
du service, son argumentation est irréprochable. Il fait de grands gestes et quand sa main effleure ma
cuisse… je ressens des picotements dans le ventre. En décroisant mes jambes, mon pied se positionne à
quelques centimètres du sien, je me surprends à vouloir que nous pieds se touchent.

Après une longue discussion sur les circonstances exceptionnelles du fait de l’encombrement au
service des urgences et des urgences vitales qu’ils y avaient à gérer ce jour-là, la famille se calme
progressivement. À la fin de l’entretien, Tom parvient à inverser la situation, contre toute attente, la
famille s’excuse et décide de retirer sa plainte.
Il raccompagne la famille, au moment de quitter la pièce, il se retourne et me dit :
— Nous n’en avons pas fini tous les deux !

Surprise par cette remarque, je me demande ce qu’il entend par là. Parle-t-il de notre histoire ? Des
explications ? Est-ce qu’il m’avertit qu’il va revenir me voir ?

Chapitre 111

Quelques minutes se passent avant que Thomas ne revienne. Cette fois, il semble bien décidé et
claque la porte me faisant sursauter. Il traverse rapidement la pièce et se dirige droit sur moi. Je me
redresse pour lui faire face, voyant qu’il se rapproche de moi, je recule jusqu’à coller mon dos au mur.
Tom me dévisage avec une intensité hors du commun. Son regard est sombre contrairement à la douceur
qu’il renvoie d’habitude, ses yeux explorent mon visage dans les moindres détails. Son attitude est
déconcertante, il se resserre davantage jusqu’à ce que nos blouses soient en contact. Son souffle chaud et
familier parvient sur mon visage. Tom n’est plus qu’à quelques centimètres de moi, il effectue avec
lenteur quelques mouvements de gauche à droite jusqu’à ce que son souffle glisse sur mes lèvres en feu.

Dans un geste rapide et calculé, Thomas déboutonne sa chemise, me permettant d’entrevoir ses
formes musclées sous son polo noir moulant. Il saisit du bout des doigts ma blouse et l’ouvre avec la
même habileté. J’en ai le souffle coupé. Il promène ses yeux de haut en bas sur ma silhouette qu’il semble
apprécier. Son regard s’est adoucit, il est à présent profond et pénétrant, sa respiration est saccadée, il
pose ses mains sur mes hanches avant de coller son corps contre le mien. Mince c’est tellement bon,
comment ai-je pu m’en passer si longtemps ?
Son nez vient se frotter contre ma joue, j’humidifie mes lèvres pour les préparer à accueillir son
baiser. Il presse ses mains autour de ma taille et vient écraser son sexe que je devine durci au travers de
son jean contre moi. J’halète, je me mordille les lèvres. Son baiser devient vital. Tom s’écarte de moi
brutalement.
— Dommage que je ne sois qu’un homme, un salaud quoi ! Lâche-t-il soudainement.
Je reste interdite, tremblante devant lui. Il referme sa blouse lentement tout en m’observant, attendant
une réaction de ma part puis finit par me laisser en plan avant de quitter mon bureau.
Je m’assois immédiatement avant de m’écrouler sur le sol. La frustration est à son comble. Pourquoi
m’avoir attirée pour me repousser ? Il s’est vengé de ce que je lui ai dit deux heures plus tôt. Il est fort
pour inverser les situations, aussi bien professionnellement que personnellement. Il a entendu mon
message et y a réagi. Puis-je lui en vouloir après l’avoir rejeté ?
Nous voilà bien avancés tous les deux. Visiblement, il me désire toujours, j’ai senti son érection se
presser contre moi tout à l’heure, mais qu’en est-il de sa vie ? Est-ce qu’il est toujours séparé de sa
femme ? Ont-ils entrepris réellement les démarches de divorce ? Est-ce qu’il flirte avec Sandy ? Car
c’est l’impression que j’ai eue hier matin. Malgré l’excitation, les sentiments que j’éprouve pour lui, je
suis toujours dans l’attente de ses réponses. Il a peut-être agi pour me préserver, mais il m’a déçue ! Je le
serai d’autant plus si j’apprends qu’il a parlé de nous à Sandy alors qu’elle nous a dénoncés.
J’essaie de me concentrer sur mon travail, ce qui n’est pas aisé après cet épisode. À la fin de journée,
je reçois un mail de confirmation de la direction, m’informant que la plainte de Madame Le Bon a été
retirée. Au moins un point positif dans cette journée, non je suis pessimiste, il y a eu d’autres choses
quand même. En sortant de l’hôpital, je reçois un message de Thomas : Excuse-moi pour ce matin. Tu
m’as provoqué. Tom.
Encore vexée de ne pas avoir été embrassée, je réponds : « Tom » n’était plus approprié depuis
quelques temps, mais depuis hier, il l’est encore moins ! Je ne te provoquerai plus ! Alyssa.

Tom : Je m’attendais à ce genre de réponse…


Moi : Dans ce cas, inutile de m’écrire !
Tom : Tu es compliquée comme fille… si je ne t’écris pas, tu me le reproches, si je t’écris, tu me le
reproches aussi… je ne sais plus quoi faire…
Il cherche à me rendre dingue !
Moi : Merci du compliment. C’est sûr qu’en comparaison à certaines des tes relations…
superficielle ne fait pas partie des adjectifs pouvant me qualifier.
Tom : Sandy est une collègue de travail. Nous entretenons des relations professionnellement
uniquement ! ! !
Moi : Je ne l’ai pas citée… oui j’ai ma petite idée sur tes relations professionnelles ! ! !
Tom : Tu me considères vraiment comme un salaud, ce n’était pas juste de la provocation ce
matin… tom déçu…
Oh ça va de jouer les susceptibles. Je ne le considère vraiment comme un salaud, j’ai peur qu’il en
soit un seulement. Y a une nuance ? Bon, ok, je me tais parce que je m’enfonce. Pourtant, il y avait comme
un rapprochement visible hier entre ceux deux-là. Je suis légèrement rassurée de sa remarque, mais je
pense que je suis en train de diminuer mes chances de pouvoir le retrouver. Je ne peux pas changer mon
caractère ! J’ai toujours douté de moi, ça ne va pas changer. Récemment, alors que j’étais sereine avec
lui, sa femme m’est tombée dessus. Voilà ce que c’est de baisser sa garde.
Le reste de la semaine, nous avons eu très peu de contact visuel, nous nous sommes croisés
rapidement dans les couloirs. J’ai eu envie de m’excuser des dizaines de fois, mais je ne l’ai pas fait. Au
lieu de ça, j’ai repris l’habitude de me coucher avec les fringues de Tom. Dieu merci, je ne suis pas
retombée dans la déprime. Je suis loin d’être heureuse, mais mon boulot me plaît tellement qu’il
m’occupe à plein temps.

Ce week-end, je reçois des amis à la maison ainsi quelques collègues pour fêter mon renouvellement
aux urgences. Dimanche soir, à ma grande surprise, j’ai un appel d’Hugo, que je prends rapidement. Nous
restons discuter près de deux heures, il me décrit sa nouvelle vie en Corse et m’invite à lui rendre visite.
Je ne suis plus opposée à cette idée mais garde quelques réticences. Je lui promets d’y réfléchir. Il
m’informe de son retour pour les vacances de noël, nous envisageons de nous voir à son retour autour
d’un repas.
Nos relations se sont améliorées, les tensions ont disparu et j’apprécie d’avoir de ses nouvelles. Tout
le monde me dit qu’il essaie de me reconquérir, c’est pourquoi j’essaie d’être claire avec lui. Je ne veux
pas le laisser espérer quoique ce soit.

Tout le mois de septembre est un vrai défi pour moi, j’ai dû travailler avec l’ensemble de l’équipe
sur une nouvelle organisation, parce que nous allons créer prochainement différents secteurs aux
urgences : Urgences médicales, urgences traumatologiques, les urgences pédiatriques, les urgences
vitales... Nous en sommes seulement à l’élaboration d’idées, mais l’équipe est volontaire et mon rôle est
de les amener à participer à ce projet.

Nous avons eu quelques réunions de pôle, j’ai dû échanger avec monsieur Simon en présence de
l’équipe des cadres au grand complet et je dois avouer que cela c’est bien passé. J’arrive à mettre de
côté ce que je ressens face à lui. Depuis nos échanges de SMS il y a un mois, nous sommes restés
professionnels.

Chapitre 112

Ce matin, j’ai rendez-vous chez le gynécologue à huit heures, je passe en première, pour ne pas être
en retard, car ma réunion débute à neuf heures. Docteur Guillot pratique l’examen échographique. À la
suite de quoi, elle m’annonce que le kyste a entièrement disparu, il n’y a plus d’inquiétude à avoir. Nos
évoquons un moyen de contraception, mais après réflexion, cela va faire quatre mois bientôt que je n’ai
aucune relation sexuelle, je ne vois pas l’utilité de prendre une pilule. Je décide de ne rien prendre, si
toutefois la situation venait à changer, j’aviserai et prendrai rendez-vous.
Je me rends à la réunion avec mes notes, elle se déroule dans une salle accolée au service des
urgences. À ma grande surprise Thomas ne porte pas sa blouse. L’effet provoqué est immédiat, la distance
professionnelle imposée dans mon esprit est réduite. Il porte ma chemise préférée avec son jean moulant.
Cette chemise m’évoque tellement de souvenirs, à commencer par cette soirée à l’Escale où nous nous
étions amusés à nous poser des questions l’un sur l’autre. Pourquoi est-il aussi beau ?

Il prend la parole mais je ne parviens pas à me concentrer sur ses propos. Je suis envoûtée,
complètement parasitée par mes pensées envahissantes. J’observe ses mouvements, ses déplacements, ses
mimiques, il m’hypnotise, je suis en extase devant cet homme dont je suis éperdument amoureuse.
J’aimerais me lever et l’interrompre, lui déclarer ma flamme devant l’assemblée et lui dire que ma vie
n’a plus de sens depuis qu’il n’en fait plus partie. J’aimerais que tout le monde soit témoin de mes
sentiments pour lui pour que nous ne puissions plus revenir en arrière.
Si Thomas était vraiment l’homme de ma vie comme je le pense aujourd’hui et que par mon manque
de confiance en moi, je l’avais laissé filer…
Je prends mon courage à deux mains et je me lance dans la rédaction d’un message pour lui au beau
milieu de la réunion. Il y a quelques mois, nous étions forts à ce petit jeu tous les deux. Discrètement sous
la table, je rédige : Vous devriez porter votre blouse monsieur simon. Aly.
J’espère qu’il va relever que je le vouvoie volontairement parce que je sais qu’autrefois ça l’excitait
au travail… Je clique sur envoyer d’une main tremblante. Un bip retentit dans toute la salle ! Oups, il n’a
pas mis son portable sur silencieux. Il ne s’arrête pas mais jette immédiatement un regard dans ma
direction. Je crois qu’il a remarqué mon rougissement et mes mains cachées sous la table.

Quelques instants plus tard, quand le responsable qualité prend le relai, Tom s’assoit et regarde son
téléphone. Je suis probablement écarlate à cet instant, je ne sais plus où me mettre. Deux possibilités soit
il me répond soit il m’ignore et je fais un arrêt cardiaque sur le champ ! Les urgences étant à côté, il ne
faudra pas longtemps pour s’emparer d’un défibrillateur. Je n’ose pas relever la tête, j’attends les yeux
rivés sur mon portable. Quand le voyant se met à clignoter, mon cœur a des ratés. J’ouvre la petite
enveloppe pour lire le contenu : Pourquoi « Aly » ma tenue ne te plaît pas ? Tom.

Ça y est je viens de prendre un vol direct pour le paradis, je ne vais pas pouvoir en redescendre
avant la fin de la réunion. Je lui réponds les larmes aux yeux : C’est tout le contraire, votre chemise me
plaît particulièrement chef. Aly.
Tom : J’espère que ça ne te déconcentre pas.
Aly : Si je vous dis que c’est bien pire que ça…
Tom : Je répondrai qu’il était temps…

Les papillons que je n’avais pas ressentis depuis des mois sont de retour, ils sont là par centaines au
fond de moi et ne demandent qu’à prendre leurs envols… mais pour ça, il me faut un peu plus que des
messages de lui !
Aly : Dois-je penser que malgré mon attitude, ma jalousie et mes réactions puériles ces derniers
mois, vous pourriez me pardonner ?

Il se passe dix longues minutes avant qu’il ne puisse reprendre son téléphone en mains. Je me languis
de lire sa réponse.
Tom : Cela pourrait s’envisager, mais il faudrait me convaincre…
Aly : Vous savez que je vous aime monsieur simon…
Impossible d’être plus franche, plus directe… Lorsqu’il découvre le dernier message que je viens de
lui envoyer, il sourit face à l’écran. Heureusement le responsable qualité capte l’attention du personnel
grâce à son monologue, sinon les collègues pourraient s’interroger sur l’origine de ce sourire que Tom
affiche depuis quelques minutes.

Tom : Tu sais aussi que je t’aime pourtant ça ne nous a pas empêché de nous séparer…
Aly : En effet et j’ai toujours besoin de sécurité, de promesse, d’exclusivité…
Tom : Justement, il faut que je te parle et rapidement !
Aly : Termine ta réunion dans ce cas, je brûle d’impatience !
Tom : Si je dois te voir tout de suite… je ne ferai pas que te parler…
Aly : Que feras-tu ?
Tom : Je ne peux pas l’écrire…
Aly : Finis cette réunion par pitié ! L’imploré-je avant de me consumer sur place.
Thomas arrive à la conclusion et devient très synthétique. Lorsque les collègues commencent à se
lever, je ramasse mes affaires à vive allure. Mon portable m’avertit d’un nouveau message. Rdv dans
mon bureau dans cinq minutes. Tom.

Il est midi, je vais prétexter que je m’absente pour ma pause déjeuner. Je retire ma blouse et traverse
les couloirs au pas de course. La porte de Thomas est entrouverte, je la pousse doucement sans frapper. Il
retire sa blouse lorsqu’il me voit entrer. Je verrouille derrière moi.
— Bonjour monsieur Simon, vous vouliez me parler ? Dis-je timidement.
— Bon.jour Aly.ssa. Décompose-t-il lentement en déboutonnant les manches de sa chemise.
Mon corps se contracte d’excitation.
— Mon statut d’homme marié est-il toujours un problème pour toi ? Demande-t-il.
— Oui, ça n’a pas changé. Désolée.
— Je vois, je m’en doutais. C’est pour cette raison que je voulais te parler.
— Pourquoi ? Demandé-je étonnée.

Chapitre 113

— À ton avis pourquoi est-ce que je te pose cette question ? S’amuse tom.
— Tu as avancé dans la procédure de divorce ? Le questionné-je impatiente.
— Mieux que ça, je suis divorcé ! Répond-il en traversant la pièce.
— C’est vrai mais depuis quand ? Dis-je très surprise de cette nouvelle.
— Nous sommes parvenus à un divorce à l’amiable. Il a été prononcé il y a quinze jours mais
officiellement la décision est valable depuis vendredi dernier.
— Je suis très surprise, je ne m’y attendais pas. Donc tu es libre ?
— Pas vraiment, en fait mon cœur est déjà pris mais elle ne cesse de me repousser. Toi et moi avons
encore bien d’autres points à aborder. Ajoute-t-il en se serrant près de moi.
Je frissonne lorsqu’il m’effleure, il le remarque.
— Je vais m’approcher de toi, parce que je veux te sentir frissonner contre moi Aly.
— D’accord. Acquiescé-je d’une voix suppliante.

Tom me lève les mains au-dessus de la tête puis les plaque contre le mur. D’une seule main, il essaie
de les maintenir dans cette position.
— Tu m’as tellement excité pendant la réunion, je pourrais te faire l’amour maintenant contre cette
porte ! Me chuchote-t-il au creux de l’oreille.
— J’aimerais tant que tu le fasses Tom. Avoué-je à bout de souffle.
J’ai à peine le temps de finir ma phrase, qu’il écrase ses lèvres contre les miennes. Sa langue glisse
généreusement dans ma bouche pour aller caresser la mienne, il aspire mes lèvres délicatement. Des
larmes incontrôlables roulent sur mes joues jusqu’à atteindre mes lèvres. Tom s’écarte aussitôt.
— Aly ? S’inquiète-t-il.
— Tout va bien, je… je pensais t’avoir perdu. Dis-je difficilement entre deux sanglots.
— Oh Aly ! Pour moi aussi, c’était un enfer de ne pas pouvoir te contacter mais tu me l’avais
demandé et je te devais bien ça. Tu venais de perdre ton financement par ma faute et je m’en voulais
tellement. Sache que je n’avais pas l’intention d’abandonner. Déclare-il le visage de mouillé par les
larmes qui s’échappent.

La sincérité de sa déclaration me bouleverse. Secouées par les spasmes, je m’effondre dans ses bras.
Tom m’enlace avec force, je laisse ma tête contre son torse un long moment. J’écoute les battements de
son cœur, ils m’ont tellement manqué. Je savoure le confort provoqué par ce contact.
— Excuse-moi Tom, j’ai gâché notre moment.
— Tu n’as rien gâché ma puce. Nous méritons mieux qu’un bureau pour nos retrouvailles, tu ne crois
pas ?
— N’importe où du moment que tu es là… Lui dis-je.
— Je veux pouvoir te faire l’amour sans être contraint par le lieu, par le temps… je veux pouvoir
t’embrasser des heures après t’avoir entendue jouir dans mes bras. Je veux t’offrir tout ce dont nous
avons été privés ces longues semaines. Si nous reprenions depuis le début ? Ce soir, tu es disponible ?
Me demande-t-il en me tenant les mains.
— Oui je le suis.
— Ça te dirait de dormir à la maison ? M’interroge-t-il.
— Dormir chez toi ? Répliqué-je étonnée.
— J’ai pris une maison pour recevoir mes enfants c’est mieux que l’hôtel. Se justifie Tom.
— Il s’est passé des tas de choses apparemment cet été. Cela dit, j’aurais adoré te retrouver à
l’Escale chambre 21.
— Je passe te prendre chez toi à dix-neuf heures ? Propose-t-il.
— Entendu mais ce sera une éternité jusqu’à ce soir.
— Nous pourrons toujours échanger des textos pour nous aider à patienter. Suggère Tom en me faisant
un clin d’œil.

Nous nous embrassons passionnément une dernière fois avant que je ne quitte son bureau. Je suis sur
mon petit nuage en sortant. Tom et moi ce soir, ça va être une explosion de bonheur ! Je retourne dans le
service avec un sourire impossible à effacer. Hugo essaie de m’appeler, je ne réponds pas, je me suis
déjà absentée trop longtemps ce midi. Je le rappellerai plus tard.
Trente minutes plus tard, Hugo essaie à nouveau de me joindre, mais j’assiste aux transmissions des
équipes. Il sait pourtant que je suis au travail, pourquoi insiste-t-il ? Ça m’inquiète un peu. La prochaine
fois, je répondrai. Aurélie surgit essoufflée.
— Aurélie tout va bien ? Lui demandé-je apeurée.
— Non c’est Annie.
— Quoi Annie ? La mère d’Hugo ?
— Oui, il faut que tu viennes en cardio. Dépêche-toi.
Sans discuter, j’emboîte son pas et nous nous rendons dans son service. Annie se trouve sur un
brancard poussé au milieu du couloir, elle est scopée et équipée d’un masque à oxygène.
—Annie, mais qu’est-ce qui vous arrive ? Qu’est-ce qui s’est passé ? Demandé-je en perdant mon
sang-froid habituel.
— Elle était en train de réaliser une épreuve d’effort avec le cardiologue quand ça s’est produit.
Explique Aurélie.
— Quoi Aurélie ?
— Elle fait un infarctus, l’hélico arrive. Elle a demandé à te voir. Hugo a été prévenu, il est parti
immédiatement à l’aéroport.
Un infarctus a-t-elle dit ! Je me précipite auprès d’Annie.
— Annie, c’est Alyssa. Tout va bien se passer, vous êtes entre de bonnes mains et Hugo est en route.
Rassurez-vous, je suis là. Lui dis-je pour essayer de l’apaiser.
Elle a l’air épuisée et terrifiée. Le cardiologue me demande si je fais partie de la famille, je lui
spécifie qu’il s’agit de mon ex-belle-mère. Il m’informe de la gravité de l’infarctus du fait de sa
localisation. Je retourne lui prendre la main avant son départ.
— Alyssa, il faut pardonner à Hugo ! Me dit-elle à but de force.
— Chutt Annie, c’est déjà fait.
— Il t’aime, ne le laisse pas, je t’en prie. Promets-moi Alyssa. M’implore-t-elle les yeux remplis
d’angoisse.
— Non Annie, je ne peux pas.
— Promets-moi. Répète-t-elle avant de perdre connaissance.
Le médecin s’agite autour d’elle, le chariot d’urgence est apporté. Des paravents sont installés. Un
massage cardiaque est débuté. Je reste légèrement en retrait à la demande de l’équipe. Le défibrillateur
est sorti, il délivre deux chocs. Le massage reprend. Pourvu qu’elle s’en sorte, prié-je en silence. Après
de longues minutes d’asystolie, l’heure du décès est brutalement annoncée ! Je suis en état de choc ! Elle
est décédée quasiment sous mes yeux en me suppliant de retourner avec Hugo… Qui va devoir lui dire
pour sa maman ? Il va être anéanti.

Chapitre 114

Aurélie m’accompagne dans le salon des familles. Je ne réalise pas qu’elle est morte, elle n’avait
aucun souci de santé jusqu’à maintenant. J’ai côtoyée la mort presque quotidiennement au travail.
L’accompagnement de fin de vie, les décès inattendus, j’ai rencontré des situations si différentes les unes
des autres mais jamais je n’ai pris conscience que ça pouvait arriver aussi brutalement dans mon
entourage. Ça va être un choc terrible pour Hugo.
— Ça va Alyssa ? Demande-t-elle en posant une main sur mon épaule.
— Je pense à Hugo. Il a vécu déjà tellement de choses difficiles dans la vie. C’est trop pour une seule
personne. Il a perdu son frère très jeune et a eu beaucoup de difficulté à se construire, il avait
l’impression de vivre dans son ombre. Il a très peu de contact avec son père depuis que ses parents se
sont séparés. À part sa mère, il a toujours considéré ma famille comme la sienne. Aujourd’hui, il va se
retrouver seul !
— Il est courageux, il trouvera la force et je suis sûre que tu ne vas pas le laisser tomber.
— Qu’est-ce qu’il sait au juste pour sa maman ? Demandé-je.
— Le cardiologue lui a dit que c’était très grave, il a parlé d’infarctus. Dans le cas où il a pu attraper
un vol rapidement, il ne va pas arriver avant probablement deux ou trois bonnes heures.
— Vous n’allez pas la descendre à la morgue de l’hôpital quand même ?
— Je vais en parler à la cadre, nous avons quelques chambres disponibles, nous devrions pouvoir
l’installer dans l’une d’elles. Suggère Aurélie.
— D’accord. Je te remercie. Je vais aller informer les collègues que je prends mon après-midi, puis
je reviendrai l’attendre ici.
— Alyssa, tu n’es pas obligée de faire ça.
— Je lui dois au moins ça. Je m’en veux de ne pas avoir pris ses appels tout à l’heure.

Une heure plus tard, je suis de retour auprès d’Annie. J’ai eu le temps de prévenir mes parents qui ont
été bouleversés en apprenant ce drame. Aurélie m’annonce qu’Hugo vient d’avoir le médecin au
téléphone. Il sera là dans une heure environ, il vient de monter dans le train à Rennes. Le médecin est
resté évasif et lui a dit de venir sans tarder. Il n’était pas question de lui annoncer le décès par téléphone.
Annie est étendue sur le lit, le visage détendu… elle semble endormie. J’approche ma chaise près
d’elle et lui prends la main, elle est si froide… Mes yeux sont attirés par le collier cervical, ce n’est
qu’un détail, mais il me gêne. Je m’empare de mon foulard au fond de mon sac et décide de lui passer
autour du cou. Je le noue délicatement afin de cacher cet objet mortuaire qui me trouble.
Aurélie me propose de prendre un café avec elle en milieu d’après-midi avant l’arrivée d’Hugo.
— Merci Aurélie, mais je crois que je ne pourrai rien avaler.
—Tu vas avoir besoin de force si tu veux être présente pour lui. Allez prends cinq minutes avec moi.
Insiste-t-elle.
J’acquiesce et la rejoins, elle a toujours les bons arguments. Heureusement que le service de
cardiologie est calme cet après-midi, sa présence est d’un grand réconfort pour moi.
— Il ne va plus tarder ! Dis-je.
— En effet, le cardio a fini ses consultations mais il va attendre son arrivée pour quitter le service. Il
y a des jours comme ça, on se demande pourquoi on est venu travailler. Je demanderai à Anaïs
d’accompagner Hugo, parce que le connaissant personnellement, je ne m’en sens pas capable ! Je ne suis
pas certaine de pouvoir contenir mes larmes quand il va arriver. M’explique Aurélie.
— Comment veux-tu faire ? Nous sommes bien trop impliqués. Je tenais à ma belle-mère, c’était une
femme adorable, mais je n’ai pas versé une larme, pourquoi selon toi ? M’inquiété-je.
— Tout est allé si vite. Un mécanisme de défense, tu t’interdis peut-être de craquer…
J’envoie un message à Tom : J’ai quitté le service, la maman d’Hugo est décédée brutalement, je
suis en cardiologie, j’attends Hugo. Nous ne pourrons pas nous voir ce soir. Aly.
Il ne tarde pas à me répondre : Je suis désolé. C’est terrible. Tu vas bien ?
Moi : Je ne réalise pas vraiment. Je me fais beaucoup de souci pour hugo.
Tom : Je comprends. Une maman c’est vital… ne t’en fais pas pour ce soir. Quand tu seras prête ce
sera parfait.
Moi : Merci tom.

Les portes battantes du service se poussent bruyamment, laissant apparaître Hugo livide au bout du
couloir. Immédiatement, je baisse la tête. Je ne peux pas le regarder, je ne veux pas être celle qui lui
annoncera cette tragédie. Anaïs, l’infirmière de l’autre secteur l’interpelle. Il entre dans la salle de soins,
j’en profite pour m’isoler dans l’office quelques instants. Je réalise que je me cache de lui alors qu’il a
besoin de moi, je me force à sortir de ma cachette et vais le rejoindre.
Lorsque j’entre dans la salle de soins, le cardiologue vient d’arriver. J’avance doucement vers Hugo
qui se trouve dos à moi et alors que le cardiologue commence à lui parler, je glisse ma main dans la
sienne. Hugo resserre immédiatement sa main autour de la mienne.
— Monsieur Rousseau, votre maman a présenté un infarctus massif pendant l’épreuve d’effort. Elle a
été mise immédiatement sous morphine pour ne pas souffrir. Nous avons prodigué tous les soins dans
l’urgence, nous n’avons rien pu faire, les dégâts causés étaient bien trop importants. Votre maman est
décédée, je suis désolé.
Hugo lâche ma main, s’écarte brutalement de moi et tape du poing contre le mur. À cet instant, je
prends conscience du décès d’Annie, l’émotion me submerge et les sanglots se déchaînent. J’enlace Hugo
qui tente de se débattre de mon étreinte jusqu’à ce qu’il s’écroule dans mes bras.

Nous restons tous deux dans le salon de famille jusqu’à ce qu’il se sente prêt à aller auprès d’elle.
— Merci d’être là Alyssa, c’est important pour moi. Est-ce que tu veux bien m’accompagner dans la
chambre ?
— Évidemment Hugo. Excuse-moi de ne pas t’avoir répondu tout à l’heure. Je suis venue dès que j’ai
su. J’étais là quand … elle s’inquiétait pour toi. Murmuré-je.
— Elle t’appréciait vraiment, ça me réconforte de savoir qu’elle n’était pas seule.
Main dans la main nous rendons dans la chambre d’Annie.

Chapitre 115

Hugo est profondément bouleversé en découvrant sa maman. « Maman ! Non maman ! Pourquoi ? »
Hurle-t-il. Je plaque ma main contre ma bouche pour étouffer mes sanglots face à cette scène déchirante.
Je préfère rester en retrait à l’entrée de la chambre. Hugo s’approche péniblement du lit, ses mains sont
hésitantes, il n’ose pas toucher le corps de sa mère.
« C’est un cauchemar, tu vas te réveiller ». Dit-il en lui secouant vivement les épaules. Il finit par
s’asseoir sur le bord du lit et colle sa joue contre son visage et lui glisse près de l’oreille : « Pardon de
ne pas avoir été là ! Je t’aime ! »
Nous quittons le service vers dix-neuf heures, Hugo n’a pas dit un mot depuis plus d’une heure. Il n’y
a rien à faire pour le réconforter, je suis impuissante face à sa détresse. C’est insupportable.
— Hugo où vas-tu aller ce soir ? Lui demandé-je.
— J’ai les clés de sa maison, je pense que je vais aller chez elle. Bredouille-t-il.
— Non, viens chez moi. Tu ne vas pas rester seul chez elle, pas ce soir. Lui proposé-je.
— Ce n’est pas grave, je ne veux pas t’embêter.
— Non, tu ne m’embêtes pas ! Viens s’il te plaît sinon je ne pourrais pas fermer l’œil de la nuit.
— Comme tu veux. Répond-il en haussant les épaules.

Hugo est arrivé en taxi de la gare à l’hôpital et a immédiatement repéré la voiture de sa mère sur le
parking, il décide de prendre son véhicule pour rentrer. En arrivant à la maison, je lui montre la chambre
d’amis et lui propose de prendre une douche. Il s’assoit sur le lit et reste mutique, les yeux dans le vide. Il
a sûrement besoin d’être seul, s’il a besoin de moi, il saura où me trouver. Je descends pour préparer le
dîner, quelque chose de léger, en espérant qu’il mange un peu.

Lorsqu’il me rejoint, ses cheveux sont mouillés et mal peignés m’indiquent qu’il a pris une douche.
— Tu as faim Hugo ?
— Non.
— J’ai fait de la soupe, prends une tasse s’il te plaît. Insisté-je.

Il accepte pour me faire plaisir mais n’en boit que quelques gorgées. Son téléphone ne cesse de
sonner, il ne répond à personne. Il a juste contacté son père tout à l’heure, j’ai cru comprendre qu’il serait
présent pour l’enterrement. Lorsque je lui suggère de voir le médecin demain pour avoir un arrêt de
travail, Hugo s’emporte et me dit qu’il n’a pas besoin d’en demander un, qu’il a l’intention de
démissionner. Je choisis de ne pas relever ses propos, il n’est pas dans son état normal.
Vingt-et-une heures, Hugo monte se coucher. Je lui précise que je travaille demain, mais qu’en fin de
journée, je veux bien l’accompagner s’il a besoin d’aides pour certaines démarches, bien que je n’y
connaisse absolument rien.

Ma première pensée au réveil va à Hugo. A-t-il bien dormi ? Je me lève sur la pointe des pieds pour
me rendre sur le palier. Je découvre la porte de sa chambre ouverte, je jette un œil par curiosité. Les
draps ne sont pas défaits, il n’est pas là. Je descends à la cuisine et le trouve assis dans le canapé.
— Bonjour Hugo. Tu as dormi un peu ?
— Oui, je te remercie. Excuse-moi pour hier soir.
— Tu n’as pas à t’excuser de quoique ce soit. Lucie et Sébastien ont demandé de tes nouvelles. Ils
aimeraient passer du temps avec toi. Lui dis-je.
— Non, je n’ai pas besoin de la pitié des uns ou des autres. Rétorque-t-il froidement.
— Ce n’est pas de la pitié. Nous souhaitons te soutenir.
— Je vais m’occuper de trouver des pompes funèbres aujourd’hui. Je préfère être seul.

Peu avant huit heures, Hugo quitte la maison mais nous convenons de nous retrouver à dix-huit heures
chez moi. Ma matinée me paraît très longue, je m’inquiète pour lui. Vers dix heures, je reçois un appel de
Thomas.
— Oui ? Dis-je en décrochant.
— C’est Tom, je ne te dérange pas ?
— Non pas du tout. Excuse-moi pour hier soir, j’avais vraiment envie de te voir.
— C’est normal. Comment vas-tu ? Et Hugo ?
— Je vais bien mais je suis encore un peu choquée. Elle est quasiment décédée sous mes yeux. Dis-je
d’une voix étranglée. Je marque une pause avant de poursuivre. Et concernant Hugo, il est abattu, je me
fais beaucoup de souci pour lui. Il a dormi à la maison et revient ce soir, parce que je ne veux pas qu’il
reste seul.
— Il n’a pas de famille ici ? Il a bien des amis ! Il est obligé de rester chez toi ? Reprend Tom
légèrement agacé.
— Je suis en quelque sorte sa plus proche famille tu sais.
— Peut-être mais j’ai peur que tu te culpabilises de le savoir seul. Et j’ai besoin de te retrouver.
— Laisse-moi juste quelques jours pour pouvoir être entièrement à toi.
— D’accord.

Ce soir, Hugo est plus communiquant. Nous parlons de l’enterrement, toutes les formalités ont été
remplies. Il a finalement accepté de voir le médecin, il a un traitement temporaire à base de somnifères et
d’anxiolytiques pour l’aider à passer le cap.

Hugo passe la semaine entière à la maison, plus les jours passent, plus il arrive à diminuer son
traitement. L’enterrement a été très difficile pour nous tous, Hugo a compris que malgré notre séparation,
il pouvait compter sur moi et sur ma famille.

Thomas ne voit pas d’un très bon œil le fait que je l’héberge malgré mes arguments. Il a peur que la
situation s’installe. Il était en déplacement ces deux derniers jours, nous avons échangé par message
principalement. Ce soir je suis en week-end, il me tarde d’y être, cette semaine a été éreintante. Enfin une
bonne nouvelle, un texto de lui : Je serai de retour pour 17h, je passe t’embrasser avant que tu quittes
le bureau ! Tom.
Moi : Avec plaisir ! Vivement 17h ! Aly.
Tom : Ce soir je passe te prendre et tu dors chez moi ! Ce n’est pas négociable !
Moi : Entendu.
Tom : Même s’il y a un tremblement de terre, un attentat… cette soirée est la nôtre. Promets-le-moi
stp.
Moi : Je te le promets.

Nos retrouvailles tant attendues vont enfin avoir lieu… Je réalise que je n’ai plus de contraceptif, ce
qui m’embête le plus c’est de devoir gâcher ce moment magique avec « un préservatif ». Lui et moi n’en
avons jamais utilisé, d’ailleurs il faut que je m’en procure pour ce soir. Je vais en acheter deux boîtes au
minimum… nous allons certainement passer tout le week-end ensemble !

Chapitre 116

Madame Kerrien débarque dans mon bureau sans prévenir, je déteste la façon qu’elle a de s’adresser
à moi, son air supérieur m’exaspère. Elle n’a aucune considération à mon égard, quelque chose la
dérange, je mettrais ma main à couper qu’il s’agit de ma relation avec Tom.
— Je suis venue t’apporter mes notes, j’ai retravaillé quelques points avec les praticiens concernant
le futur secteur des urgences chirurgicales. L’alternance des gardes pose soucis, il va falloir envisager
d’autres possibilités.
— Oui j’ai déjà fait une nouvelle proposition à monsieur Simon. Répliqué-je avec assurance.
— Je n’en doute pas, mais n’oublie pas que je suis cadre du pôle de chirurgie et que la validation
passera entre mes mains également.
— Je le sais, je me suis adressée à mon supérieur direct en premier lieu. Dis-je pour me justifier.
— Évidemment c’est la seule raison ! S’exclame-t-elle avec ironie.
— Je vous demande pardon ?
Je vois bien son petit jeu, Sandy essaie de m’intimider en me rappelant sa supériorité. Elle se tient
droite, le menton bien haut et me toise avec mépris.
— Ne te fatigue pas à mettre les formes quand tu parles de lui, il m’a parlé de votre aventure. Je lui ai
dit que je n’approuvais pas le fait qu’il couche avec une infirmière. La différence de hiérarchie peut créer
des conflits au sein de l’établissement, nous n’allons pas revenir sur les conséquences de ton financement.
— S’il entretenait une relation avec quelqu’un d’un même niveau hiérarchique, ça ne poserait pas de
problème, c’est bien ça ? Je sais être professionnelle quand il le faut, monsieur Simon est uniquement
mon supérieur ici.
— Je suis aussi votre supérieur et je n’aime pas votre arrogance ! Dois-je vous rappeler que sa
femme est mon amie ?
— Vos propos sont inadaptés, on dirait bien que je ne suis pas la seule à défendre mes intérêts
personnels. Sachez que monsieur Simon est divorcé !
— Tu ne manques pas de culot ! Tu séduis un homme marié, tu essaies de profiter des avantages que
tu peux en tirer et tu manques de respect à ta hiérarchie. Je ne donne pas cher de ta carrière ! Reprend-
elle en haussant fortement le ton.

Soudain, je remarque Tom à l’entrée de la pièce. Il claque la porte brutalement.


— Que se passe-t-il ici ? Gronde-t-il. Son regard interrogateur passe d’elle à moi.
— Ton ex copine ne respecte pas les codes de bonnes convenances, je t’avais averti que ça risquait
de se produire. Répond-elle à Thomas.
— Sandy s’il te plaît, n’en rajoute pas, je ne pense pas qu’Alyssa t’aies manqué de respect.
— Non, en effet. Elle est venue pour me provoquer ! Elle veut me faire passer pour une
manipulatrice. Dis-je pour me défendre en la fusillant du regard.
— Aly, calme-toi. Elle n’avait pas à te dire ça, mais elle agit comme ça pour défendre son amie.
M’explique-t-il.
— Ah non ! Tu ne vas pas prendre sa défense alors qu’elle nous a dénoncés auprès de la direction !
Rétorqué-je outrée.
— Ça suffit ! Je ne la défends pas et ce n’est pas elle qui nous a dénoncés.
— Mais si, elle a parlé de l’entretien pour le financement…
— Aly, c’était ma femme ! Je l’ai su peu de temps après et c’est elle qui a appris notre relation à
Sandy. C’est comme ça qu’Estelle a su que je t’avais fait passer un entretien. Sandy ne cautionnait pas
notre rapprochement mais a gardé notre relation pour elle. Je te rappelle que c’est elle qui m’a averti
quand des rumeurs sur toi circulaient sur Facebook. Je ne veux pas lui donner raison, seulement que tu
aies les bonnes informations. M’explique Tom calmement.
— Mais pourquoi tu ne m’en as pas parlé ? Lui demandé-je honteuse de m’être emportée contre la
mauvaise personne.
Ce n’était pas elle ! Il n’empêche que je reste persuadée qu’elle a des vues sur Tom et qu’elle ne
m’aime pas…
— Nous n’avons pas eu l’occasion de parler posément tous les deux. Ajoute-t-il désolé.

Sandy demande à parler à Thomas en privé, ils quittent mon bureau ensemble. Je suis très contrariée
de cette altercation, j’espère que personne n’a entendu nos échanges. Lorsque j’arrive sur le parking, je
reçois un message : Je sais que tu dois être contrariée, mais encore une fois je ne la défendais pas ma
puce ! Ça ne remet pas en cause notre soirée. Sois prête pour 19h. Tom.
Son message apaise mes tensions, je me dis qu’avec tout ce que nous avons traversé, si nous arrivons
à poursuivre cette relation, c’est qu’elle en vaut vraiment la peine ! Il m’a tellement manqué, ce n’est pas
cette fille qui va nous mettre des bâtons dans les roues alors que nous sommes si près de fêter nos
retrouvailles.
Moi : Merci. Je serai prête et je brûle d’impatience de te retrouver pour un tête-à-tête. Aly.
En arrivant à la maison, je découvre les valises d’Hugo dans l’entrée. Il m’attend assis sur le canapé.
— Viens près de moi Alyssa s’il te plaît. Me demande-t-il sérieusement.
— Tu as fait tes valises ! Tu repars en Corse ? L’interrogé-je en m’asseyant à ses côtés.
— Alyssa, cette semaine j’ai perdu ma mère, c’est arrivé sans que j’y sois préparé. Elle m’a été
arrachée, elle était tout pour moi, je suis en deuil, pourtant je survis même si mon cœur saigne. C’est toi
qui me permets de rester vivant, ta présence, tes mots, tes sourires me redonnent de l’espoir, tu es ma
raison de vivre.
— Hugo…
Il ne me laisse pas la possibilité de m’exprimer, il reprend :
— Non Alyssa, laisse-moi finir. Je sais que tu ne veux pas me faire souffrir, tu es quelqu’un
d’authentique et jamais tu ne tricheras avec tes sentiments. Ce Thomas compte toujours beaucoup pour toi,
je ne peux pas l’accepter car je t’ai poussée dans ses bras… Aujourd’hui je te supplie de reconsidérer
ma demande en mariage. Tu sais tout, il n’y a plus de secret entre nous mais je ne veux pas de réponse
aujourd’hui. Je vais rester ce week-end chez ma mère, soit tu viens me retrouver parce que tu acceptes
l’idée d’une nouvelle vie à deux, soit tu ne viens pas et je repartirai. Je ne supporterai pas de rester ici,
parce que t’aimer et ne pas pouvoir consommer cet amour me fait souffrir ! JE T’AIMERAI TOUJOURS !
Ajoute-t-il les larmes aux yeux avant de se lever et de ramasser ses affaires. Il me jette un dernier regard
et sort…

Sa magnifique déclaration m’a prise par surprise ! Pendant près d’une heure, je suis chamboulée,
alors que je me prépare pour ma soirée, je me culpabilise à l’idée de ruiner les espoirs d’Hugo, ses mots
résonnent en boucle dans ma tête… Mon portable sonne, je décroche :
— Oui Aurélie ?
— J’ai appris quelque chose qui ne vas pas te plaire mais je ne peux pas te le cacher !
— Quoi encore ? Dis-je blasée.
— Tu avais raison à propose de madame Kerrien !
— À quel propos ?
— Elle avait bien des vues sur Thomas ! Anaïs vient de me dire qu’elle les avait croisés sur le
parking du personnel. Elle a dit qu’il n’y avait aucun doute possible, ils s’embrassaient ! Je suis désolée.
Tu as bien fait de ne pas le laisser reprendre contact avec toi… Alyssa tu es là ?
Sur ces mots, je laisse tomber mon portable sur le sol…

Chapitre 117

Tom n’a pas pu me faire ça, je ne peux pas m’y résoudre ! C’est un homme prévenant, il a accéléré
son divorce et a attendu patiemment que je lui revienne. Je me suis fait une promesse, je ne douterai plus
de lui. Désormais, je lui fais confiance, donc je vais lui en parler. Il y a une explication, j’en suis sûre.
Je ramasse mon téléphone et vérifie que nous sommes toujours en ligne :
— Tu es sérieuse ?
— Oui, Tom et moi sommes célibataires et crois-moi, nous n’allons pas laisser filer notre chance,
encore pour moins pour cette Sandy ! Je ne vais pas lui dire comment je le sais, mais je vais lui demander
ce qui s’est passé avec elle ! Bon je vais devoir raccrocher, car il ne va plus tarder.
— J’espère que tu ne vas pas être déçue Alyssa ! Et Hugo ?
— Hugo m’a fait une déclaration ce soir… Il espère que je vais revenir sur ma décision et que je vais
accepter de l’épouser. Il veut que j’y réfléchisse ce week-end.
— Mince, qu’est-ce que tu lui as dit ?
— Il ne m’a pas laissé parler. Je n’ai rien dit, mais il sait que je suis amoureuse de Tom.
— Tiens-moi au courant ! S’il s’est foutu de toi, j’irai lui casser la gueule, c’est d’accord ?
— Non, tu n’auras pas à le faire.
— Je ne te reconnais plus ma belle ! Toi qui es de nature à douter facilement, là on t’apporte les
preuves sur un plateau et tu restes zen et confiante !
— Je sais mais Thomas m’a rendue plus confiante et j’ai décidé de lui laisser la possibilité de
s’exprimer avant de douter de lui !
Je monte rapidement me préparer, j’enfile ma tunique tricolore que je n’ai jamais portée car je la
trouvais trop moulante. Elle me va parfaitement bien, les kilos perdus ces derniers mois y sont pour
quelque chose. Je me maquille légèrement et lisse mes cheveux. Je ne peux m’empêcher de penser à ce
qu’Anaïs a cru voir, j’espère tellement qu’elle s’est trompée. Si je devais perdre Thomas après ce que
nous avons traversé, je ne le supporterai pas. Tout comme Hugo qui décide de partir car son amour pour
moi le fait souffrir, je pense que je voudrais partir aussi….
Lorsque j’entends frapper à la porte, l’excitation de le retrouver est tellement grande que j’en oublie
cette histoire avec Sandy et descends les marches à vive allure. J’ouvre la porte et il apparaît ! Il est trop
sexy dans son pantalon noir et son polo gris près du corps. Il plonge immédiatement ses yeux dans les
miens et un sourire se dessine sur son visage, je lui souris à mon tour.
Le regard est un atout dans la séduction, tout comme la voix, le sourire, la gestuelle et Tom l’a très
bien compris. Il utilise toutes ses armes quand il est face à moi et moi je craque inévitablement !
— Salut, je peux entrer ? Demande-t-il d’une voix qui ne me laisse pas insensible.
— Évidemment, je t’en prie. Lui dis-je en m’écartant pour le laisser entrer.
— Tu es prête ?
— Euh non, enfin je pensais que nous aurions pu rester chez moi, si tu es d’accord.
— Mais tu m’as dit qu’Hugo était chez toi, alors je pensais que…
— Il est parti tout à l’heure. Nous sommes seuls. Ajouté-je en l’interrompant.
— Je dois t’avouer que je suis soulagé de l’apprendre. Tu es très belle Aly, ça te va bien de lisser tes
cheveux. Dit-il en saisissant ma main.
— Merci. Tu es très beau toi aussi.
— Aly, avant que nous allions plus loin, j’aimerais te parler. Reprend-il sérieusement.
— Est-ce que c’est au sujet de Sandy ? Demandé-je fébrilement.
— Oui, mais pas seulement. On peut s’asseoir ?
Nous prenons place dans mon canapé, Tom garde ses distances avec moi.
— Aly, lorsque nous nous sommes séparés ce six juillet après avoir fait l’amour, je n’ai pas
réellement cru que tu me quittais. Ensuite, tu as perdu ta chance de rentrer à l’école et tu m’as demandé de
te laisser, de ne plus te contacter, je l’ai fait mais crois-moi, c’était une torture. Pour tenir le coup, je me
suis battu avec Estelle pour obtenir un divorce à l’amiable. C’était pour moi, la seule façon de te
reconquérir. Là j’ai appris qu’elle nous avait dénoncés, que Sandy était au courant de notre relation. J’ai
dû batailler pour qu’elle garde le secret alors quand je vous ai vu tout à l’heure, j’ai voulu temporiser
parce que je ne tiens pas à ce qu’elle annonce notre relation à tout l’hôpital. C’est à nous de le faire, tu
comprends ?

— Oui, je comprends, mais sur le moment, j’ai pensé que tu prenais sa défense.
— Non, pas du tout. Tu m’as reproché la semaine dernière le fait que je ne t’ai pas donné de
nouvelles… Aly, je l’ai fait pour t’éviter de souffrir davantage. Je ne pouvais pas revenir dans ta vie tant
que j’étais marié. Je te devais au moins ça !
— Excuse-moi, je n’ai pas été très sympa avec toi. Je me demandais si tu t’étais réconcilié avec ta
femme ou pire, je me suis imaginée que tu flirtais avec Sandy et j’ai réagi en t’attaquant.
— Je n’ai jamais flirté avec elle. Depuis que tu es entrée dans ma vie, tu as tout bouleversé, je ne
vois plus que toi, je te l’ai déjà dit mais tu ne me fais perdre le contrôle.
J’écoute attentivement tout ce qu’il me dit, je suis très touchée de l’entendre verbaliser à quel point je
compte pour lui. C’est incroyable l’effet que ses mots ont sur moi ! Il me possédait déjà par son regard,
ses mots ne font qu’accroître ma certitude, je veux cet homme dans ma vie ! J’ai hâte qu’il m’embrasse.
— Tu m’écoutes Aly ?
— Oui, je me demandais dans combien de temps tu allais m’embrasser. Répliqué-je fièrement.
— J’ai presque terminé, je préfère te parler de quelque chose avant de poser mes lèvres sur les
tiennes et de ne plus pouvoir les retirer.
— C’est au sujet du baiser avec elle ?
— Quoi ? Comment le sais-tu ? M’interroge-t-il surpris.
C’est vrai alors ! Il vient de me le confirmer implicitement. Il a embrassé cette pétasse…
— Pourquoi Tom ? Je sais qu’elle te plaît mais…
— Arrête Aly ! Je me fous de Sandy et tu le sais !
— Alors quoi, elle te fait chanter ? M’emporté-je.
— Tu regardes trop la télé ! Non, elle m’a demandé de lui laisser sa chance vu que j’étais divorcé.
Elle m’a expliqué qu’elle avait respecté mon mariage par amitié mais qu’aujourd’hui, elle voulait savoir
si nous pouvions envisager quelque chose tous les deux !
— Et c’est à ce moment, que tu l’as embrassée ?

Chapitre 118

— Non, je ne l’ai pas embrassée Aly ! C’est elle qui m’a embrassé par surprise et je l’ai repoussée
aussitôt. Comment le savais-tu ?
— Aurélie m’a appelée pour me dire que quelqu’un vous avez surpris sur le parking en train
d’échanger un baiser.
— Les nouvelles circulent vite. Je suis surpris que tu sois si calme alors que sachant ceci, je
m’attendais à ce que tu me mettes à la porte.
— Tu es honnête avec moi, je n’ai aucune raison de le faire. J’apprécie que tu aies voulu m’en
informer. Donc elle va continuer à te tourner autour et à te surnommer Tom ?
— Non, je ne pense pas, j’ai été très clair avec elle.
— Tu ne regretteras pas de laisser partir ta chance avec elle ?
— C’est toi et toi seule qui m’intéresse Aly ! Maintenant, j’aimerais que nous montions dans ta
chambre, j’ai très envie de t’ôter cette rober étroite qui laisse apparaitre tes formes délicieuses. Cela fait
plus de trois mois que je n’ai pas touché ton corps, admiré ta peau nue au contact de mes doigts. Te voir
assise si près de moi dans cette tenue moulante, c’est inhumain de résister.
— Intéressant. Juste une petite question, cet été, il ne s’est rien passé d’important dont je devrais être
mise au courant ?
— J’ai divorcé, je loue une maison pour recevoir mes enfants une semaine sur deux, car nous avons
fait le choix d’une garde alternée. Vu les salaires d’Estelle, vu que nous partageons la garde des enfants,
les frais d’école… et que je lui ai laissé notre maison, je n’ai pas de pension alimentaire à lui payer.
— Il ne manquerait plus que ça ! Tu lui as laissé votre maison !
— Je voulais juste que l’on parvienne à un arrangement le plus rapidement possible. Crois-moi, la
situation est au mieux pour tout le monde. Je n’irai plus dormir chez elle pour voir les enfants. D’ailleurs
dès lundi, ils passent la semaine chez moi. Si tu veux me voir, il faudra venir à la maison.
— Oh je me rappelle de ma rencontre avec tes enfants, ta fille ne m’appréciait pas, alors on va lui
laisser du temps.
— Aly, c’était nouveau pour elle. Maintenant, elle sait que ses parents sont définitivement séparés. Tu
serais très étonnée, d’ailleurs, elle m’a demandé récemment si je te fréquentais toujours.
— Tu lui as répondu quoi ?
— Je lui ai expliqué sur le moment que c’était compliqué, car nous voulions attendre que le divorce
soit prononcé. Elle a ajouté que tu étais très jolie.
— Elle a dit ça ? Merci Tom. Dis-je embarrassée.
— Maintenant, si tu veux bien de moi dans ta vie, il faudra assumer le reste.
— Par le reste, tu entends tes enfants ?
— Je veux dire qu’il faudra qu’une semaine sur deux, tu dormes chez moi si tu veux que nous
passions du temps ensemble. Il faudra que tu sois prête à entendre les remarques au travail, les jalousies,
les critiques de tes collègues.
Au travail ? Il veut révéler notre histoire !
— Serais-tu en train de me proposer une vraie relation au grand jour avec toi ? Du genre où on peut
se poser des questions, se prendre la tête et pourquoi pas se faire des promesses ?
— Oui, tu as tout compris. Se prendre la tête je n’espère pas, mais se faire des promesses que l’on
peut tenir oui. Et la première que je te fais, c’est d’être honnête et fidèle à toi.
— Je ne sais pas quoi te dire Tom. Tu me fais perdre mes mots. J’attends ça depuis des mois. Je
t’aime et je te promets d’être honnête et fidèle à mon tour. Tu m’as manqué. Lui dis-je émue.
— Je t’aime Aly. Tu m’as beaucoup manqué aussi.
Je me rapproche de lui et frotte mon nez contre le sien. Tom appuie son front sur le mien avant de
m’écarter délicatement, puis se lève. Il ne m’a pas laissé l’embrasser. Il se dirige vers la porte d’entrée,
la verrouille. Il sort son téléphone de sa poche et le pose sur la table.
— Qu’est-ce que tu fais Tom ?
— Je fais en sorte que personne ne vienne nous déranger. Donne-moi ton téléphone Aly.
Je lui tends accompagné d’un rire réflexe.
— Ne ris pas ! On nous a volé 3 mois, ainsi que notre soirée de retrouvailles… ce soir, je tuerai
quiconque qui tentera de nous déranger. Déclare-t-il.
— Tu n’exagères pas un peu ?
— J’ai une autre promesse à te faire ma belle.
Tom me soulève dans ses bras avant de poursuivre.
— Je te promets que tu te souviendras de nos retrouvailles ! Ajoute-t-il en montant les escaliers qui
conduisent à ma chambre.
Il traverse la pièce et me dépose sur mon lit. Ma poitrine se soulève dans des mouvements amples
alors que Tom se déshabille devant moi. Il déboutonne son pantalon et le fait descendre lentement,
dévoilant ses cuisses musclées dans un premier temps. Il porte un slip noir contrairement à ses boxers
habituel. Il retire à présent son polo et m’expose son torse délicieux. Ses abdos me semblent plus
dessinés qu’auparavant. Son corps d’Apollon m’a trop manqué !
Alors qu’il s’agenouille au-dessus de moi, je réalise que je ne suis pas allée acheter les préservatifs
comme je le devais. À cause de la visite de Sandy, de la déclaration d’Hugo et de l’annonce d’Aurélie…
comment aurais-je pu y penser ? N’est-il pas trop tard pour s’en procurer ? Faut-il que je l’interromps ?
Après tout il a dit qu’il tuerait….
— Tom, ça ne va pas te pas te plaire, mais nous ne pouvons pas…
— Pardon ? Je ne t’entends plus !
— Arrête je ne plaisante pas et crois-moi, j’ai entendu tes menaces de meurtres…
— Très bien, je t’écoute, tu as six secondes avant que je mette mon plan à exécution. Lâche-t-il
contraint.
— Je n’ai plus d’implant, je n’ai aucun contraceptif. Je pensais avoir le temps d’aller chercher ce
qu’il faut mais…
— Mais comment ça se fait ? Tu aurais dû me le dire.
— J’ai eu quelques soucis mais c’est réglé, mais voilà… Si tu me laisses dix minutes…
— Aly, il est plus de vingt heures, où vas-tu aller ? Tu veux appeler la gendarmerie pour avoir la
pharmacie de garde ? Tu ne sors pas de cette chambre, je te l’interdis ! Si tu sors, notre soirée va tomber
à l’eau, c’est une certitude !
— Mais ?
— Je vais te faire l’amour maintenant, sauf si tu n’en as pas envie ! Dit-il d’une voix douce et
séductrice.
— Pense aux conséquences Tom !
— Je ne suis pas un irresponsable. J’y pense mais je ne veux pas que tu partes. Lundi tu demanderas
un rendez-vous en urgences pour que le médecin trouve une alternative pour l’avenir…
— Donc on s’abstient ce week-end ?
Allongé au-dessus de moi, les mains de part et d’autre de ma tête, il sourit et ajoute :
— Non, je viens de te dire que j’allais te faire l’amour Aly ! Laisse-moi te déshabiller et cesse de
parler. Nous agissons en connaissant les risques. Est-ce que ça te convient ?
— Tu es fou, enfin, nous sommes fous, mais oui fais-moi l’amour.

Chapitre 119

J’en ne reviens pas de lui avoir dit que ça me convenait, et si je tombais enceinte, que ferions-nous ?
Mes questions deviennent lointaines lorsque Tom resserre son étreinte et que nos yeux s’accrochent l’un à
l’autre, je suis hypnotisée par ses prunelles qui scintillent. Sa bouche approche la mienne lentement, il
humidifie ses lèvres avant d’entrer en contact. Elles sont douces et chaudes comme dans mon souvenir. Il
embrasse divinement bien, j’en ai la tête qui tourne, des frissons dans le creux des reins.
Je sens poindre le désir, l’obligeant à me toucher en saisissant sa main et en la déposant sur ma
poitrine. Il ôte ma robe et dégrafe mon soutien-gorge, fixe mes seins en se mordillant les lèvres. Sa
bouche vient généreusement emprisonner mon téton, après quelques instants, il trace un chemin brûlant du
bout de la langue jusqu’à mon nombril. Mon cœur s’affole alors qu’il descend ma petite culotte le long de
mes jambes. Une vague de chaleur me submerge, c’est tellement excitant d’être nue contre lui. Sa bouche
vient retrouver la mienne, cette fois nos langues se rencontrent pleinement et passionnément.
Sa main glisse sur ma peau et descends effleurer mon pubis. Alors qu’il aspire ma langue dans sa
bouche, il insinue son index en moi, je laisse échapper des râles de plaisir. Après un premier tourbillon
de plaisir, Tom retire le seul vêtement qu’il lui reste, bascule à côté de moi et m’invite à m’installer au-
dessus de lui. Au départ, il semble impossible à rassasier, mais quand sa respiration devient plus forte et
plus rapide, il accélère ses mouvements de va-et-vient, referme ses bras puissants autour de mon bassin
et nous explosons dans orgasme violent simultané.
Je m’écroule sur lui, complètement vidée de toute mon énergie. Tom m’enlace, ma tête repose sur sa
poitrine, j’écoute les battements de son cœur et réalise enfin, que je l’ai retrouvé après ces longs mois de
séparation qui m’ont semblé être une éternité. Le temps n’a fait que renforcer mes sentiments, je n’ai pas
réussi à l’oublier. Je suis émue.
— Est-ce que ça va Aly ? Murmure-t-il.
— Oui, je ne veux plus être éloignée de toi !
— J’y compte bien ! Ajoute-t-il en déposant de tendres baisers sur mon front.
Nous passons des heures serrés l’un contre l’autre, à se regarder dans les yeux, à se chuchoter des
mots doux, à faire l’amour encore et encore. Cette nuit est la plus belle de ma vie !
Nous profitons de notre dimanche en tête à tête, nous prenons un petit déjeuner au lit, nous trainons
toute la matinée au lit et l’après-midi, Tom décide de me faire visiter sa maison. Nous nous rendons chez
lui à pied, j’ai le plaisir de découvrir qu’il habite à proximité de chez moi, il y a deux lotissements qui
nous séparent. En moins de dix minutes, nous y sommes. Nous entrons dans cette grande propriété,
l’endroit est très accueillant. Je suis surprise par cette belle et grande maison moderne banche au toit
cintré avec des avancés anthracite en toit plat gris. Un toit terrasse se situe au premier étage, l’originalité
me séduit immédiatement.

Tom m’invite à entrer, je découvre dans un premier temps, un spacieux hall d’entrée très lumineux
grâce à sa porte vitrée. Il fait glisser une cloison coulissante, nous permettant d’accéder aux pièces
principales de la maison. Je suis fascinée par l’architecture de cette maison. La cuisine fait rêver avec
son ilot central, le mobilier est blanc recouvert d’un plan de travail en marbre noir ! C’est juste la cuisine
idéale !

La visite continue, une salle à manger, un salon, quatre chambres, dont celle de Tom avec dressing, un
bureau, deux salles de bain, un cellier…
— Quel est la surface de cette maison et comment se fait-il qu’elle soit en location Tom ?
— Elle fait cent-quatre-vingt mètres carré. Je connais le propriétaire, il a fait construire cette maison
pour lui, mais son travail l’a conduit à s’installer à l’étranger peu de temps après. Il va la mettre en vente
et je suis intéressé pour la lui racheter.
— Tu plaisantes ? Tu vas vraiment acheter cette demeure ?
— J’y songe, elle me plaît beaucoup et elle n’a été habitée que quelques mois. Qu’est-ce que tu en
penses ?
— Si j’avais les moyens, je l’achèterais ! Elle est parfaite. Dis-je spontanément.
— Je suis content qu’elle te plaise. Tu accepterais de dormir ici ce soir ?
— Tes enfants arrivent demain ?
— Oui, nous serons seuls.
— C’est d’accord.
— Aly, j’espère que tu viendras me voir quand mes enfants seront là.
— Oui, mais je ne veux pas les brusquer. J’appréhende quand même de me retrouver avec toi face à
eux.
— Je comprends mais ça va aller, ils vont s’y faire et ils ne pourront que t’apprécier. Et les collègues
tu appréhendes ?
— Évidemment, quand ils vont le découvrir, je vais avoir le droit à toutes les critiques…
— Ils l’apprendront dès demain, j’ai prévu de l’annoncer à madame Moreno.
— Tu es vraiment décidé, tu seras officiellement mon petit ami ? Le taquiné-je.
— Oui, je te l’ai dit. D’ailleurs, nous irons au travail ensemble demain.
Je suis excitée et terrifiée à l’idée d’être à demain. Tom parvient à me rassurer, les réactions
n’interfèreront pas dans notre relation ni dans notre travail.
— Tu es convaincue Aly ?
— Oui, tu es fort pour l’argumentation. Plaisanté-je.
— Pas seulement pour ça. Ajoute-t-il avec son regard de braise.
— Non, tu as tellement de qualité, je ne pourrais pas toutes les citer, tu es endurant, performant et tu
es très attirant quand tu fais ce regard.
— Lequel ? Demande-t-il en renouvelant son expression.
Nous ne résistons pas à la puissante attraction physique qui existe entre nous et nous faisons l’amour
sur son canapé.
— Ai-je été comment tu as dit tout à l’heure ? Performant ? M’interroge Tom.
— Tu en doutes ?
— Si j’en crois tes gémissements…
— Arrête, tu vas me faire rougir !
— J’adore te faire rougir.
En fin d’après-midi, nous allons prendre des affaires chez moi. Pendant que Tom passe un appel à sa
fille, j’échange quelques textos avec Emma et Aurélie pour leur raconter nos retrouvailles. Aurélie est
pressée de connaître la réaction de nos collègues. Emma partage mon bonheur.
La soirée est tout aussi magique que la précédente, notre passe-temps favori, être nu blottis l’un
contre l’autre des heures durant. J’adore sentir les doigts de Tom glisser sur ma peau pour dessiner les
contours de ma silhouette.
— J’ai beau connaître chaque centimètre de ton corps Aly, je ne me lasse pas de te caresser, de te
regarder. Tu es magnifique !
— Ne t’arrête jamais dans ce cas, mais souviens-toi, que j’en pense autant de toi. Lui dis-je très
sincèrement.

Chapitre 120

Sept heures du matin, le réveil nous rappelle à la réalité et à nos devoirs. Notre week-end
retrouvailles touche à sa fin et nous allons affronter cette journée côte à côté, tel un couple qui s’assume.
Nous agissons naturellement chacun de notre côté avec nos automatismes quotidien à la salle de bain,
mais dès que nous en avons la possibilité, nous échangeons des petits bisous, des regards coquins. Ce
matin, je suis sûre de ma tenue, je porte un jean avec un chemisier rouge. La petite touche de rouge a son
importance aujourd’hui, car elle renforce mon assurance, mes convictions.
Pour la première fois, je me rends au travail dans la voiture de Thomas sans avoir à être discrète ! Je
me ronge les ongles tout le trajet.
— Bébé, ne t’inquiète pas, tout va bien se passer. Dit Tom pour me rassurer.
— Ce sera plus facile pour toi que pour moi. C’est moi qui vais devenir la petite infirmière
privilégiée aux yeux des autres, la destructrice d’une famille… Dis-je avec ironie.
— Tu peux encore choisir de me quitter maintenant…
— Très drôle monsieur Simon ! Faites attention je pourrais vous prendre au sérieux !
— Ne t’avise même pas d’essayer, ma vengeance n’aurait pas de répit ! Tu l’as vu ce week-end non ?
— Si vous me faites ce genre de menaces, j’envisage de vous quitter toutes les semaines !
— Aly, tu sais l’effet que tu me fais quand tu me vouvoies, ce n’est pas le moment, je dois aller voir
madame Moreno en arrivant !
— Pardon Chef, je ne voudrais pas vous déstabiliser et vous donner des envies sur votre lieu de
travail. Je saurai être sage, je vous le promets.
— Tu es incorrigible Aly ! Embrasse-moi avant de sortir de la voiture !
Tom se rend au bâtiment administratif de son côté et moi je me dirige vers les urgences en affichant un
grand sourire.
Nadège m’interpelle dès mon arrivée dans l’unité, le code de la pharmacie d’urgence ne fonctionne
pas. Le technicien ne répond pas et nous ne connaissons pas la manipulation qui permet de remettre le
système à zéro. Je demande à Antoine, le brancardier de se rendre dans l’atelier de Pierre. Dix minutes
plus tard, le problème est résolu.
Je finalise le planning des fêtes de fin d’année quand Thomas débarque dans mon bureau.
— Tout va bien ? Lui demandé-je inquiète, sachant qu’il a dû s’entretenir avec madame Moreno.
— Oui, c’est une visite de courtoisie. Je voulais juste te tenir informée de mon entrevue.
— Ah très bien.
— Elle n’a pas exprimé d’avis sur le sujet, ce qui l’importe c’est d’être informée et que nous restions
professionnels. Elle m’a déjà précisé que l’année prochaine, tu ne passerais pas ton entretien avec moi.
— Tant que je ne le passe avec Sandy, ça m’ira. Ajouté-je en riant.
— Je te laisse bosser, on mange ensemble ce midi ?
— Tu veux ?
— Oui. Je passe te prendre.
Il y a de grandes chances pour que nous voyions Sandy au self ce midi, après notre altercation
vendredi soir, nous risquons d’être mal à l’aise l’une comme l’autre.

Midi et demi, Tom et moi quittons les urgences. Nous prenons place aux côtés de Cynthia et Carole.
Le repas se déroule dans la tranquillité, nous échangeons sur l’école des cadres avec Carole qui vient
tout juste d’en sortir. J’apprends énormément de détails que j’ignorais jusqu’à présent, tout comme le fait
qu’un stage en dehors du domaine hospitalier est à réaliser. L’idée est intéressante, la gestion de la
relation avec les clients est différente de celle avec les patients et leur famille.

Lorsque Sandy nous rejoint à table, je ne peux pas m’empêcher de me sentir en danger. Elle a tout de
même volé un baiser à Tom. Dieu merci, il l’a repoussée. Quand je pense à son discours sur le
professionnalisme, c’est une manipulatrice ! J’échange régulièrement des petits regards avec Tom qui se
trouve en face de moi.
— Tom, j’ai vu madame Moreno ce matin. Tu te doutes bien à quel sujet. Lâche Sandy.
Nous y sommes, je me doutais qu’elle ne garderait pas sa langue dans sa poche cette pétasse !
— Où veux-tu en venir Sandy ? Lui demande-t-il froidement.
Soudain, les yeux se dirigent vers eux, le silence règne autour de la table. Dois-je fuir maintenant ?
— Nulle part Tom ! Je suis au courant c’est tout. Reprend-elle fièrement.
— Ça ne change rien. Ajoute-t-il.
— Oh si et tu le sais Tom. Y a des choses à éviter désormais, comme le fait de lui faire passer ses
entretiens.
Cette fois, elle va trop loin. Je suis sûrement écarlate, c’est une certitude, dans quelques secondes,
mes collègues auront eu l’information. Je me fais violence pour fermer ma bouche, mais son petit jeu ne
m’amuse guère.
— À quoi est-ce que tu joues Sandy ? L’interroge Tom en déposant ses couverts fermement.
— Je ne joue pas, j’ai une conversation professionnelle avec toi Tom ! Depuis quand est-ce un
problème ? C’est parce qu’elle est là ? Dit-elle en me regardant fixement.
Cynthia manque de s’étouffer avec son morceau de pain.
— Si ma présence vous gêne, je peux quitter la table ! Dis-je le plus calmement possible.
— Mais que se passe-t-il ? S’interroge Cynthia.
— Aly, tu n’as pas à quitter cette table. Ajoute Tom en me souriant.
Il m’a appelée Aly devant tout le monde ! Cynthia me dévisage le front plissé.
— Sandy, tu n’intimideras pas Aly avec tes propos ! Elle est parfaitement à sa place que ce soit au
travail comme dans ma vie quoique tu en penses ! Fais-moi plaisir, cesse de m’appeler Tom !
Les yeux de la blondasse sont exorbités ! Les miens le sont peut-être aussi d’ailleurs ! Tom vient
d’officialiser notre relation devant tout le monde et il a remis Sandy à sa place ! Wahou, c’est mon
homme ! Il m’a clouée sur place !
— Comme tu voudras Thomas ! Répond-elle avant de se lever et de disparaître honteuse.
— Veuillez m’excusez pour l’ambiance. J’espère que vous comprendrez que notre vie privée ne
regarde que nous ! Bien que je n’aie pas à me justifier, je le fais pour protéger Aly des folles rumeurs
dont cet hôpital est capable. Je suis divorcé et en couple avec Alyssa et ça ne doit pas changer nos
relations professionnelles !

L’annonce passée, le repas se termine dans le calme. Nous regagnons chacun nos services respectifs
sans évoquer ce qui s’est déroulé ce midi. Aucun écho durant l’après-midi, ce qui est très surprenant mais
je ne doute pas que les rumeurs circulent sur mon compte.

Chapitre 121

Comme convenu, je rejoins Tom chez lui vers dix-huit neuf heures trente. C’est Émeline qui m’ouvre
la porte, vêtue d’un tablier de cuisine, elle ne me semble pas surprise de ma visite.
— Bonjour madame. Me dit-elle avec un petit sourire.
— Bonsoir Émeline.
— Papa ta copine est là. Crie-t-elle en s’éloignant.
Je me faufile dans l’entrée, Tom me rejoint et m’invite à entrer. Il est en train de préparer le dîner
avec sa fille et Yanis joue dans sa chambre. Je les observe tout en restant en retrait, je ne veux pas
m’imposer. Cette vie de famille, je ne connais pas encore. C’est Émeline qui me propose de leur donner
un coup de main pour le repas. J’avoue que cette demande me prend par surprise, je suis très contente de
pouvoir participer.
Nous parvenons même à échanger quelques mots au cours du repas. Je suppose qu’il s’agit plus de
courtoisie que de sympathie mais je ne ressens pas d’ironie ni de mépris comme j’avais pu avoir le
sentiment lors de notre première rencontre au restaurant. Vers vingt-et-une heures, les enfants montent se
coucher, nous nous installons devant un film dans le canapé. Une demi-heure plus tard, Tom semble
désintéressé du film.
— Tu aimes ou pas ? Me demande-t-il.
— Oui ça va, pas toi ?
— Sans plus et j’ai plus intéressant à te proposer. Précise-t-il avec son regard de séducteur.
— Je ne sais pas si je vais oser sachant tes enfants dans la maison. Répliqué-je timidement.
— Aly, ils dorment à l’étage et nous au rez-de-chaussée ! Je ne te propose pas de faire l’amour sur la
table de la cuisine non plus, ce genre de plan, je le réserve quand nous sommes seuls. Je sais que tu m’as
déjà dit que j’étais très performant, mais ils ne vont pas nous entendre, ne t’inquiète pas.
— Et s’ils descendaient ? Rétorqué-je.
— Ils frapperaient à la porte si vraiment ils avaient besoin. De toute façon, tu es incapable de me
résister. Ajoute-t-il tout en m’attirant dans sa chambre.
Il se tient face à moi, les épaules en arrière, le torse bombé, il est vrai que son corps d’athlète est
irrésistible.
Mardi matin, je me lève plus tôt pour aider Tom à préparer le petit-déjeuner. Il me propose de monter
dans sa voiture ce matin pour aller au travail, nous passerons par le collège avant de déposer Yanis. En
sortant de la voiture, Émeline me souhaite une bonne journée et me dit à ce soir ! Je n’en reviens pas du
changement d’attitude. Seuls en direction de l’hôpital, j’en profite pour m’exprimer.
— Tom je suis sincèrement très contente de la soirée avec tes enfants, mais ce soir je vous rejoindrai
après le dîner.
— Pourquoi Aly ?
— Parce qu’ils ont besoin de passer du temps avec toi sans que je sois là ! Je ne veux pas être tout le
temps présente, pas d’emblée… enfin, tu le sais bien, s’ils ont besoin de te parler, ils ne le feront pas en
ma présence.
— Je compte leur réserver du temps, mais je comprends ta position. Promets-moi de venir après le
dîner.
— Évidemment je viendrai.
Ce matin, j’entends quelques échos au sujet de ma relation avec Thomas en arrivant, Lara me pose
d’ailleurs franchement la question devant toute l’équipe en salle de pause, pour faire taire les rumeurs, ce
qui ne me déplait pas. L’équipe informée, mise à part quelques regards hébétés, je ne constate pas de
changement dans leur façon de se comporter avec moi. Le service des urgences est en plein travaux en
vue de la nouvelle sectorisation, le fonctionnement est légèrement perturbé, nous journées défilent à une
vitesse folle.

Les jours suivants se déroulent selon ce même schéma, j’arrive après le dîner et passe les nuits dans
les bras de mon homme, le matin, nous déposons Émeline et Yanis à l’école. Durant le week-end, Tom
prévoit des activités avec ses parents et ses enfants. De mon côté, nous organisons un repas avec mes
frangines et mes parents. Tout notre entourage est maintenant au courant de notre relation. Nous
envisageons prochainement une rencontre avec nos parents à la même table.

La semaine suivante, nous profitons de notre intimité à la maison, les enfants étant chez leur mère.
Vendredi soir, Tom m’invite à L’Escale. C’est la seconde fois que nous y mangeons ensemble, nous
commandons le même menu que la première fois. Pendant le repas, alors que je cherche un paquet de
mouchoir, je sors par inadvertance ma pilule contraceptive de mon sac à main.
— Tu as commencé ? M’interroge Tom qui a remarqué mon erreur.
— Non, je te l’ai dit, je dois attendre le premier jour de mon prochain cycle, ce qui ne devrait plus
tarder, du moins je l’espère.
— Tu es inquiète ?
— Un peu, nous n’avons pas été prudents et je ne pense pas que tu sois prêt à assumer un enfant avec
moi. Lui dis-je sans détour.
— Ce serait un peu brutal pour les enfants et pour tes études… mais si ça arrivait, j’assumerai ! Nous
sommes adultes et nous connaissions les risques.
— Nous serons bientôt fixés !
— Tu ne ressens rien de particulier ?
— Je ne sais pas ce que je suis censée ressentir, je n’ai jamais été enceinte. Mais je n’ai pas de
nausées, ni mal aux seins ou ce genre de symptômes classiques ! Si mes seins avaient grossi, tu l’aurais
sans doute remarqué. Dis-je en plaisantant.
— Aly, tu vas trouver ça précipité, mais j’ai apprécié ces deux dernières semaines, passer mes nuits
à tes côtés… j’aimerais que tu t’installes davantage à la maison. Prends le temps d’y réfléchir si tu le
souhaites.
— Davantage c’est-à-dire ?
— Laisser quelques affaires à toi, accepter une clé.
Il semble très sérieux quand il me parle de m’installer chez lui… Je sens un sourire se dessiner
lentement sur mon visage. Je ne me reconnais pas, moi qui me pose toujours des tas de questions. Je ne
suis pas terrifiée à cette idée, bien au contraire, je suis excitée. Je ne vois aucun nuage dans mon ciel
serein….

Chapitre 122

Dimanche soir, nous avons rapporté quelques affaires comme convenu chez Tom. J’ai désormais
quelques espaces qui me sont attribués pour y ranger mes vêtements et ce soir il a ajouté une clé à mon
trousseau.
Je suis songeuse cette nuit, je ne trouve pas le sommeil. Alors que Tom dort paisiblement, tout me
passe par la tête. J’ai hâte d’avoir mes règles, de pouvoir prendre la pilule et de ne plus utiliser de
préservatif… demain, nous repassons à quatre à la maison, j’espère que la semaine se passera au moins
aussi bien qu’il y a quinze jours. L’année prochaine, je dois aller à l’école des cadres mais est-ce que
notre relation va y survivre ? Hugo va-t-il refaire sa vie rapidement…
Deux heures du matin, je suis toujours en plein questionnements pourtant je suis fatiguée. J’hésite à
me lever pour regarder la télé, pour bouquiner, pour écouter la musique, pour faire quelque chose d’autre
que cogiter ! Cela fait quelques temps que je n’avais pas été dans cet état-là ! Si j’étais chez moi, je me
lèverais pour faire du ménage, mais je ne me permettrais jamais de le faire ici. Je change de position des
dizaines de fois, je remarque que je perturbe le sommeil de Tom. Il finit par se réveiller.
— Tu ne dors pas Aly ?
— Non, excuse-moi si je t’empêche de dormir. Je vais aller sur le canapé si tu veux.
— Certainement pas, il n’en est pas question. Pourquoi tu ne dors pas ?
— Je ne sais pas, mon cerveau ne veut pas se mettre off quelques heures !
— Tu veux en parler ? S’inquiète Tom.
— Non, il n’y a rien de précis, juste une insomnie. Déjà la nuit dernière j’ai mal dormi, je pensais
que la fatigue m’aurait emportée rapidement ce soir.
— Un petit câlin pourrait t’aider ?
— Je ne sais pas, mais ça ne peut pas faire de mal ! Dis-je en me lovant contre lui.
Après une longue étreinte, je finis par m’endormir et lorsque l’alarme sonne, le réveil est difficile.
— Tu as des cernes par ma faute ! Constaté-je.
— J’ai mieux dormi que toi pourtant. C’est le fait de dormir dans mon lit ?
— Non, pas du tout !
— Quelque chose te tracasse ?
— Non plus. Si je ne dors pas la nuit prochaine, je prends ma voiture et je rentre chez moi !
— Comment je dois le prendre Aly ?
— Ce n’est pas contre toi, mais je ne peux pas rester des heures à rien faire, c’est interminable.
— Qu’est-ce que tu feras de plus chez toi ?
— Je lirai, je mettrai un film… je trouverai toujours à m’occuper.
— Pourquoi tu le fais ici ?
— Parce que je n’ose pas. Je ne vais pas me lever en pleine nuit et venir seule au salon…
— Tu ne te sens pas à l’aise ici ?
— Si ça peut aller, mais c’est différent, ce n’est pas chez moi !
Thomas affiche une mine contrariée, je l’embrasse pour m’excuser.
La matinée est une accumulation d’erreurs, de malentendus… force est de constater que je suis plus
efficace après une bonne nuit de sommeil. Je m’empare d’un hypnotique que je mets dans ma poche, il
n’est pas question que je repasse une nuit identique !

Vers midi, un homme victime d’un accident de la route est amené par les pompiers. Ce dernier
déambulait sur la voie publique alors qu’il était en état d’ébriété, il s’est fait renversé par un véhicule. Il
est très agité et souffre de multiples fractures. La douleur et l’alcool ne permettent pas des échanges aisés,
il est impossible de le raisonner. Il a arraché son cathéter, j’apporte mon aide afin de le contenir pour le
perfuser et parvenir à lui administrer des antalgiques et un sédatif.
Les gendarmes sont aux urgences pour obtenir un prélèvement sanguin afin de confirmer l’alcoolémie
élevée du patient. Constatant qu’il est difficile de prendre en charge la victime, il se propose de nous
apporter de l’aide. Alors que j’assiste Lara qui effectue le prélèvement, le patient se met à s’agiter de
nouveau envoyant tout valser autour de lui. Recevant un coup de genou dans la poitrine, ma respiration se
coupe…

Lorsque je reprends mon souffle, je suis sonnée, j’ai la tête qui tourne, je vacille sur mes jambes et ne
parviens pas à me rattraper et m’écroule sur le sol. Aïe ma tête ! Elle est lourde, je me tiens la tête
lorsque je reprends mes esprits. Un gendarme m’installe rapidement sur un brancard, je ne proteste pas et
demande une bassine. Je suis prise de nausées soudainement, je ne sais pas si c’est le choc ou la vue du
sang mais je me sens très vaseuse. La sensation s’atténue après quelques minutes.
Sylvain, l’urgentiste de garde m’examine rapidement. Il remarque une tâche de sang sur ma blouse, il
me demande de l’ôter pour regarder s’il s’agit de mon sang. En mobilisant le bras gauche, je ressens une
gêne au niveau de l’épaule. J’enlève mon pull, je suis embarrassée de me retrouver en soutien-gorge
devant le médecin. Il me tend une chemise que j’enfile partiellement. Sylvain constate une plaie qui
continue de saigner, il procède à la désinfection et m’informe qu’il va réaliser deux points de suture.
— Je peux y aller Alyssa ?
— Oui vous pouvez. Lui dis-je tout en observant son geste.
Alors qu’il insère l’aiguille sans me provoquer de douleur, je sens une vague de chaleur déferler sur
moi. J’ai assisté des médecins des centaines de fois pour la réalisation de suture, jamais je ne m’étais
sentie mal auparavant…
— Sylvain ?
— Oui ? Tout va bien ?
— Non, je crois que je vais m’évanouir…
— Aly ?
La voix de Tom me parvient aux oreilles. En effet, quand j’ouvre les yeux, Tom est là, il me tient la
main et demande des explications.
— Aly, tu vas bien ? Demande-t-il les traits plissés.
— Oui tu n’aurais pas dû venir, ce n’est rien. C’est une égratignure.
— Tu plaisantes, tu as reçu un choc, tu as eu traumatisme crânien et perdu connaissance à deux
reprises !
— Tu es bien renseigné ! Je t’assure que ça va. Le patient va bien ? Lara n’a pas été bousculée ?
— Oui, il est calme et va partir au bloc. Lara va bien. Repose-toi. Je vais chercher tes affaires et je te
ramène ensuite.
— Non, je n’ai pas envie de rentrer.
Tout ça me rappelle un rêve étrange que j’avais fait il y a plusieurs mois, dans lequel Hugo nous
rejoignait à l’extérieur.
— Aly, ne discute pas les ordres du chef! Je prends le reste de ma journée et je reste auprès de toi !
— Excusez-moi monsieur Simon, je me plierai à vos exigences.

Chapitre 123

Mercredi onze novembre, nous nous rendons avec Tom et les enfants au centre-ville, Yanis ainsi que
quelques-uns de ses camarades ont une lecture à faire sur l’armistice. En arrivant sur place, je remarque
une tête qui ne m’est pas inconnue, Estelle ! Instinctivement, je m’écarte de Tom et de Yanis qui se
trouvaient proches de moi. J’ai peur du jugement, peur d’une confrontation en public. La seule fois où
nous nous sommes vues c’était au manoir pour l’anniversaire d’Aurélie et ça c’était très mal passé.

Tom remarque immédiatement mon embarras et pour me soutenir, il saisit ma main dans la sienne et la
serre fermement. J’hésite un court instant à la retirer, mais voyant le regard désapprobateur de Tom, je me
résigne et accepte sa main dans la mienne. Nous avançons progressivement près du groupe. Estelle me
fixe durement, ses yeux sont de véritables mitraillettes. Je sais qu’elle essaie de me déstabiliser et bien
qu’elle y parvienne, je ne dois pas le lui montrer. Après tout, je ne lui ai rien fait à cette femme, c’est elle
qui a trompé Tom et c’est pour cette raison qu’elle l’a perdu.
Yanis et Émeline vont aussitôt embrasser leur mère, celle-ci vient dans notre direction.

— Ne t’en fais pas bébé, je suis là. Je dois entretenir des relations correctes avec elle pour les petits.
— Thomas je peux te parler une minute. Demande Estelle en évitant mon regard.
— Ça ne peut pas attendre Estelle ?
— Non.
— Je t’écoute.
— Seul à seul c’est possible ? Précise-t-elle.
Thomas resserre ses doigts autour de mes miens pour s’assurer que ma main ne va pas lui échapper.
— Non, ce n’est pas possible maintenant. Répond-il.
— Je vois. Tu aurais quand même pu éviter d’amener ta maîtresse aujourd’hui ! Lâche-t-elle
suffisamment fort pour que les personnes autour de nous puissent entendre.
— Tu aurais pu y penser avant de coucher avec mon ami, ça nous aurait évité ce genre de situation. Et
ce n’est pas ma maîtresse mais ma fiancée. Maintenant, je te prie de nous laisser.
Ai-je bien entendu, il m’a présentée comme étant sa fiancée à son ex-femme ? Elle ne semble pas
prête à en rester là. Elle plisse les yeux dans ma direction avant de lâcher :
— Si ça ne la dérange pas d’être la cinquième roue du carrosse !
Par correction pour Tom et ses enfants et afin d’éviter un drame, je choisis de ne pas relever. Il y a
parfois dans le silence bien de choses que l’on ne saurait exprimer…
Estelle s’éloigne pour reprendre sa place initiale sans ajouter quoique ce soit. Nous avons évité
l’incident diplomatique de peu. Lorsque les lectures sont terminées, nous chantons tous l’hymne national.

Sur le chemin du retour, personne ne parle, il semblerait qu’Estelle soit parvenue à ses fins, les
enfants vont me détester alors que tout se passait bien avec eux. Yanis et Émeline regagnent leurs
chambres respectives en rentrant, Thomas décide de s’entretenir avec eux. Pendant ce temps, je vais
rendre visite à Aurélie.
Julien est chez des amis, nous sommes donc toutes seules. Nous discutons autour d’un café, lorsque la
nausée me reprend. Je suis sans doute contrariée par les propos d’Estelle, mais Aurélie soulève une
question essentielle.
— Tu vas avoir tes règles ?
— Je suis sur le point de les avoir normalement. Dis-je coupable.
— Alyssa ? Tu pourrais être enceinte ?
— Disons que ce n’est pas impossible, mais je ne pense pas. Tu sais ces derniers temps, y a eu
tellement de bouleversements…
— Tu en as parlé à Emma ? Me demande-t-elle naturellement.
— Non, je lui en parlerai si nécessaire. Il y a juste un week-end où nous n’avons pas été prudents.
— Alyssa, tes malaises au boulot, tes nausées, tes insomnies... fais le lien ! Tu es peut-être enceinte !
Suggère-t-elle sérieusement.
— Si tu cherches à me faire flipper, je t’assure que ça fonctionne.
— Il le sait monsieur Simon qu’il va peut-être avoir un bébé ?
— Mais oui qu’est-ce que tu crois ? Je ne lui ai pas caché les risques.
— Alors tout va bien, mais tu devrais faire un test !
— Je vais y penser. Je crois bien que j’avais noté que c’était pour vendredi, donc ça ne fait que
quelques jours de retard.
— Cinq jours et tu attends ?
— Tu as raison. Si je ne les ai pas demain, j’irai acheter un test après le boulot. Déclaré-je.
— Oh moi, je ne pourrais pas attendre si j’étais à ta place. Et alors comment tu le vivrais ?
— Je t’avoue que je n’y ai pas réellement songé, pour moi c’est impossible. Notre couple est trop
frais.
— Ça fait des mois que ça dure Alyssa, même quand vous étiez séparés, vous ne l’étiez pas
vraiment ! Je pense que le plus dur ce serait pour ses enfants !
— Arrête m’en parle pas ! Et l’école des cadres alors ? Non, je ne préfère pas me rendre malade sans
savoir.
Nous faisons un jeu de société avant le dîner, l’ambiance s’est peu à peu détendue. Je refuse de
prendre un verre de vin à table, tant que je ne suis pas fixée sur une potentielle grossesse, je ne veux rien
risquer. Émeline semble irritée dans sa façon de répondre à son père, elle finit par monter dans sa
chambre en claquant la porte.

Bien sûr, j’aimerai proposer de lui parler, mais je ne suis pas la personne avec laquelle, elle doit
avoir envie de se confier. Thomas me rassure sur les échanges qu’ils ont plus tôt dans l’après-midi. Yanis
me demande de monter voir sa construction de château dans sa chambre, j’accepte avec plaisir. Je le
félicite pour les nombreux détails réalistes. Alors qu’il va chercher son père, je me retrouve seule dans la
chambre et entends les pleurs d’Émeline. Malgré mes hésitations, je décide d’aller frapper doucement à
sa porte. « C’est qui ? » Crie-t-elle derrière la porte.
— C’est Alyssa, est-ce que je peux entrer ?
Après un court silence, elle accepte. Je pousse la porte et la découvre allongée sur son lit, la tête
enfouie dans l’oreiller. Je suis très surprise qu’elle ait accepté ma venue dans ce contexte. Je m’approche
de son lit et m’assois sur la chaise qui se trouve juste à côté. Ne souhaitant pas être intrusive, j’attends
qu’elle choisisse de parler ou de lever la tête pour m’adresser à elle.
— Qu’est-ce que tu veux ? Marmonne-t-elle sans se redresser.
— Savoir comment tu vas et surtout savoir si je peux faire quelque chose pour toi ?
À mon grand étonnement, Émeline s’assoit, sèche ses larmes et me regarde droit dans les yeux.

Chapitre 124

— Je ne peux pas te promettre de ne rien dire sans savoir de quoi est-ce qu’il s’agit. Ce ne serait pas
honnête de ma part. En revanche, si tu as des problèmes, il faut que tu te confies à quelqu’un, à ta maman
par exemple, si tu es gênée d’en parler à ton papa ?
— Maman ne répond pas et je ne veux pas en parler à papa, pas ce soir. Répond-elle.
— D’accord, ça a l’air sérieux.
— Oui et embarrassant. En plus, je ne te connais pas vraiment.
—Tu as raison, nous en sommes au stade où nous apprenons à nous connaître toutes les deux. Dans
quelques temps, tu verras que tu peux me faire confiance. Luis dis-je.
— Est-ce que tu pourrais m’aider en attendant que maman le fasse.
— Si je peux, je le ferai. Je t’écoute.
— Je n’en reviens pas que ça se passe comme ça, avec la copine de mon père ! C’est vrai, ça aurait
pu arriver n’importe quand, il a fallu que ce soit une semaine où je suis chez lui. annonce-t-elle.
— De quoi est-ce que tu parles, je ne comprends pas Émeline.
— Tu ne devines pas ?
— J’ai peut-être une idée, mais je ne voudrais pas t’embarrasser en étant à côté de la plaque.
— Je ne peux pas l’être plus qu’en ce moment. Ajoute-t-elle.
— Est-ce que tu as tes règles pour la première fois ? Lui demandé-je à voix basse.
Elle acquiesce d’un signe de tête avant d’éclater en sanglot. Délicatement je passe ma main par-
dessus son épaule, elle se jette sans retenue dans mes bras. Je ne m’attendais pas du tout à ça, je me sens
émue.
— Ne pleure pas Émeline, ce n’est rien. Je comprends que tu aurais préféré avoir ta maman près de
toi plutôt qu’une inconnue dans un moment comme celui-ci.
— Tu n’es pas complètement une inconnue, mais c’est difficile de partager ce qu’il y a de plus
embarrassant et de plus intime même si c’est banal pour toi.
— Si ça peut te réconforter, je vais te raconter comment ça m’est arrivé. J’avais ton âge et j’étais en
classe verte. J’ai passé trois jours à me taire, à me débrouiller comme j’ai pu car je n’ai pas eu le
courage d’en parler à mes professeurs. Alors je te trouve vraiment très courageuse, parce que c’est loin
d’être banal dans mon souvenir.
— Merci beaucoup Alyssa. Je suis désolée d’avoir été désagréable avec toi la première fois, j’étais
en colère contre tout le monde parce que mes parents se séparaient.
— Je comprends, je ne t’en veux pas. Je vais aller chercher ce qu’il te faut et demain soir, si tu le
souhaites, nous pourrons aller au magasin toutes les deux, si tu n’arrives pas à joindre ta maman. Qu’est-
ce que tu en dis ?
— Je te remercie, d’accord mais j’essaierai d’y aller avec maman, parce que sinon elle va se vexer.
Je remonte quelques minutes plus tard et lui tends quelques serviettes hygiéniques avec discrétion.
— Je pense que je vais pouvoir me débrouiller maintenant. Alyssa, finalement, je veux bien que tu le
dises à papa.
— Te ne veux pas lui dire toi-même ?
— Ah non, la honte ! Tu l’avais dit à ton père ?
— Non, c’est vrai. Allez bonne nuit et n’hésite pas si tu as besoin.
Thomas est installé dans le canapé, il lit le journal. Je m’installe près de lui.
— Tu étais avec Émeline ?
— Oui. Dis-je avec un grand sourire.
— Tout va bien ?
— Oui, elle est très intelligente ta fille !
— Ah bon. De quoi est-ce que vous avez parlé si ce n’est pas indiscret ?
— Elle avait une confidence à me faire, elle avait besoin de mon aide. Elle m’a demandé de t’en
parler.
— Est-ce que je dois m’inquiéter ? Aller la voir ? S’inquiète Tom.
— Non ta fille va bien. Elle a vécu un bouleversement ce soir et elle ne savait pas trop comment
gérer ça loin de sa mère. Elle a spontanément voulu m’en parler.
— Elle… elle...
— Oui Tom, ta fille est une demoiselle.
— Mince, merci d’avoir été là ce soir pour elle. Même si je n’y connais rien, je l’aurai soutenue,
mais elle n’aurait peut-être pas voulu m’en parler.
— Tu es son papa, c’est un peu gênant pour une ado. Je l’ai dépannée, ne t’en fais pas. J’ai été très
touchée qu’elle se confie à moi.
— Je t’avais dit qu’elle t’apprécierait.
— Tom, j’ai peur. Avoué-je.
— Tu as peur d’être enceinte ? Suggère-t-il immédiatement.
— Oui. Je ne le souhaite vraiment pas. Je ne veux pas briser la confiance avec tes enfants, c’est trop
tôt.
— Pourquoi tu parles de briser la confiance. Il ne s’agit pas de ça !
— Je ferai un test demain pour m’ôter le doute.
— D’accord, tu auras plus vite fait de faire une prise de sang, tu ne crois pas ?
— Oui et c’est plus fiable. Si tu veux bien, tu me feras le prélèvement demain matin, comme je n’ai
pas d’ordonnance, je règlerai le montant, ça évitera que d’autres personnes l’apprennent.
— D’accord. Tu précises que tu ne veux pas les résultats sur le serveur, comme ça, tu les auras
uniquement en main propre. En revanche, je vais avoir la pression à l’idée de te faire une prise de sang.
— Mais non ! Tu dois déjà me retirer mes points la semaine prochaine, tu aimes jouer l’infirmier
avec moi.
— Et toi quand est-ce que tu joues l’infirmière avec moi ?
— Maintenant si vous le voulez chef. Ordonnez-moi ce que bon vous semblera !
— J’ai quelques idées, par ici. Ajoute-t-il en murmurant à mon oreille.

Jeudi matin, Tom m’accompagne à mon bureau et réalise mon prélèvement. Voilà, dans deux heures
environ, nous serons fixés ! J’espère que ce sera prêt avant dix heures, parce que de dix heures à midi,
nous sommes en réunion. Nous allons décider des nouvelles consignes lors de la mise en place de la
nouvelle organisation de l’unité.

Tom lui débute sa réunion à neuf heures avec la direction des soins et les services qualités et notre
chère madame Kerrien. Et les cadres du pôle médecine/urgences les rejoignent à dix heures. J’espère que
je n’aurais pas trop à prendre la parole, parce que même si j’ai plus d’assurance qu’au début, le fait que
notre relation soit connue me déstabilise devant mes supérieurs.
De mon côté, je prépare au mieux l’argumentation des besoins en terme d’effectif de personnel et de
matériel. J’imprime le tableau prévisionnel des gardes pour le prochain trimestre au niveau des
médecins/chirurgiens. Quelques minutes avant de me rendre au bâtiment administratif, je me rends au
laboratoire de l’hôpital qui se trouve à quelques mètres des urgences. Aline, la secrétaire me remet
l’enveloppe fermée sans que j’aie besoin de lui demander. Je ne sais pas si elle est au courant que
j’entretiens une relation avec monsieur Simon, mais elle est de toute façon tenue au secret professionnel.

J’attends d’être dehors pour ouvrir l’enveloppe, mes mains tremblent de façon impressionnante. La
dernière fois qu’un courrier m’a fait cet effet-là, il s’agissait de ma réponse pour l’école des cadres.
J’aime Tom, j’aime ma vie telle qu’est actuellement, si nous devons avoir un enfant, il faut ce soit parce
que nous l’avons projeté ensemble.

Chapitre 125

Tout en marchant, je sors la feuille du labo, je la déplie et mes yeux cherchent rapidement la réponse.
« Dosage plasmastique des beta HCG……. 1568 UI/l », oh mon dieu ! Je me réfère rapidement au tableau
situé en-dessous, je serai enceinte de deux à trois semaines ! Je m’arrête au beau milieu du parking ! Je
porte l’enfant de Thomas !
Je me rends dans la salle de réunion sans réaliser ce qui m’arrive. J’attends un bébé, je vais être
maman, même en me le répétant, ça ne semble pas réel ! Je crois que je suis choquée, j’ai peur qu’il me
quitte, si j’étais sûre qu’il prenne bien la nouvelle, je crois que je pourrais être contente !
Je prends place aux côtés de Carole et Cynthia qui sont mes repères en réunion. Tom se retourne et
me sourit, je lui rends mais sans doute a-t-il remarqué que quelque chose n’allait pas, car il a eu cet air
interrogateur, celui qu’il prend quand il suspecte que je ne vais pas bien. Je ne peux tout de même lui
envoyer un SMS pour l’informer de cette nouvelle, je vais attendre qu’on soit seuls pour lui annoncer.
Madame Kerrien prend la parole dans un premier temps, elle explique le déroulement et les objectifs
de la réunion du jour, puis m’invite par surprise à présenter les enjeux de cette nouvelle organisation. Je
ne suis pas préparer pour développer ce genre de choses et surtout je ne suis pas dans mon état normal
pour faire un long discours ! Puis-je passer mon tour ? Je ne me laisse pas démonter et essaie d’articuler
deux ou trois mots, mais Sandy m’interrompt :
— Alyssa, viens donc ici pour exposer tout ça ! N’aies pas peur de t’adresser à toute l’assemblée.
Je suis obligée de me plier à ses volontés car je sais qu’elle peut faire de cette réunion en enfer si je
ne vais pas dans son sens. Une fois debout face à mes collègues, j’essaie de formuler au mieux les idées
générales. Thomas me dévisage inquiet, il a compris je pense que les résultats tant attendus sont soit
arrivés ou bien ils sont la cause de mon stress. Il vole à mon secours après quelques minutes en
rebondissant sur mes propos. Il reprend la parole et m’invite à m’asseoir à ses côtés.
Peu à peu, j’arrive à mettre de côté cette grossesse et me concentre essentiellement sur la réunion qui
est très importante aujourd’hui. Midi, la cession de se termine, nous quittons la salle les uns après les
autres. Je patiente à l’entrée du bâtiment en espérant que Sandy ne retienne pas Tom trop longtemps.
Quand celui-ci descend, il n’est pas seul.
— Sandy, je dois te laisser, nous en reparlerons cet après-midi. Précise-t-il.
Elle passe près de moi sans même me regarder et continue son chemin. Tom me fait signe de le suivre
et nous empruntons le chemin derrière l’hôpital, là où le contact physique avait eu lieu entre nous ! Il
avait pris ma main et avait caressé ma joue, mon corps s’était électrisé sur place !
— Aly, tu as eu tes résultats ? Demande Tom dès lors que nous sommes à l’abri des regards.
— Oui, deux minutes avant la réunion.
— Dis-moi Aly, tu es enceinte ?
— Oui Tom. Je suis désolée ! Avoué-je avec désolation.
— Ne sois pas désolée ma puce. Regarde-moi s’il te plaît.
Je plonge mes yeux dans les siens, je ne lis aucune déception dans ses prunelles. Tom saisit ma main,
puis du revers de l’autre, il effleure ma joue comme la première fois qu’il l’avait fait ici-même.
— Aly, ne vois-tu pas à quel point je t’aime ? Je t’aime depuis le premier jour où j’ai réellement posé
les yeux sur toi, je suis fou de toi depuis ce jour où tu m’as laissé caresser ta joue. Nous avons essayé de
lutter contre nos sentiments, mais l’amour nous a rapprochés. Cet enfant arrive un peu vite dans nos vies,
mais c’est un cadeau, c’est une bonne nouvelle et je ne veux pas que tu doutes ou que tu t’excuses. Nous y
arriverons ensemble, tu verras tu feras une maman et cadre formidable, je n’en ai jamais douté ! Je
t’aime.
Sa déclaration me laisse sans voix, je suis émue aux larmes. Tom place ses mains autour de mon
visage et dépose un baiser sur mes lèvres.
— Je t’aime aussi.
— Nous nous sommes battus pour notre couple, il y avait quelques obstacles à franchir mais nous y
sommes parvenus.
Thomas pose un genou au sol, ses yeux sont brillants, il prend ma main dans la sienne :
— Aly, depuis peu je crois à la seconde chance ! Que ce soit celle que tu m’as donnée ou bien celle
que j’aie de refaire ma vie avec toi ! Aujourd’hui, j’ai la certitude que c’est toi la femme de ma vie et je
veux t’épouser. Aly accepterais-tu de devenir ma femme et de faire de moi le plus heureux des hommes ?

Submergée par l’émotion, je ne retiens pas mes sanglots entremêlés de rires et d’une voix étranglée,
j’essaie de laisser sortir un « oui » suffisamment audible. Tom se relève immédiatement et me soulève du
sol en me serrant très fort contre lui.
— Nous allons vraiment nous marier ! Dis-je encore sous le choc !
— Oui Aly et nous allons avoir un bébé ! Ajoute Tom satisfait.

Chapitre 126

Lundi 3 juillet 2017, Maëlys souffle sa première bougie et nous en profitons pour fêter mon diplôme
de cadre de santé ! Toute notre famille et amis sont réunis à cette occasion. Emma a prévu une petite
surprise pour sa filleule. Elle lui a écrit une chanson, nous sommes tous émus par la sincérité de ses
propos. Quant à son parrain, il a fait réaliser son portrait par un peintre sur tableau ! Je prends la parole
pour les remercier :
— Merci à vous tous pour votre présence pour ce grand jour. Notre princesse fête son premier
anniversaire et tous nos proches ont répondu présents ! Je n’ai pas de mots pour décrire ce que je ressens
aujourd’hui, nous avons conscience de la chance que nous avons. Cette année a été très intense, il a fallu
jongler avec l’arrivée de Maëlys et mes études. Un grand merci à mon mari Thomas qui m’a permis de
réaliser ce projet. Merci à Émeline et Yanis qui remplissent leurs rôles de frères et sœurs à merveille.
Merci Emma pour ta magnifique chanson qui nous a tous émus. Merci Sébastien, ce tableau est superbe,
notre fille est une œuvre d’art ! Encore merci à vous tous.
La fête continue, Maëlys surprend tout le monde en essayant de faire quelques pas pour atteindre la
pile de cadeaux.
— Aly, j’ai quelqu’un au téléphone pour toi. M’annonce Émeline.
— Je te remercie, qui est-ce ?
— Un certain Hugo, je crois.
Hugo ! Je n’ai pas eu d’échanges avec lui depuis son départ il y a près de deux ans. J’ai eu
occasionnellement des nouvelles par ma sœur Lucie. Je me dirige dans le salon et ferme la baie vitrée
pour prendre l’appel.
— Allo ?
— Alyssa. Bonjour c’est Hugo.
— Bonjour Hugo, c’est une surprise !
— Je suis désolé, je n’ai pas donné de nouvelles pendant très longtemps… Je t’appelle pour te
féliciter pour ton diplôme et souhaiter un joyeux anniversaire à Maëlys. J’ai pu voir une photo avec
Lucie, elle est très belle, le portrait de sa maman !
— Merci Hugo et toi qu’est-ce que tu deviens ?
— Ça va, j’ai fini par tourner la page, j’ai accepté l’idée que je n’aurai pas de seconde chance.
Répond Hugo.
Un silence s’installe, la seconde chance dont il parle fait écho avec la déclaration que m’avait fait
Thomas, le jour où il m’a demandée en mariage. Au fond le problème, ce n’était pas de lui pardonner sa
trahison avec ma sœur ou ses mensonges, le véritable problème c’est qu’il ne m’avait jamais vraiment
fait vibrer, il n’était pas TOM !
Nous écourtons la communication car je suis attendue pour déballer les cadeaux. Tom rentre dans le
salon quand je repose le combiné.
— Ça va mon amour ? Me demande-t-il.
— Oui.
— C’était qui ?
— Est-ce que vous savez que je vous aime monsieur Simon ?
— Oui madame Simon, je le sais, mais j’adore quand tu me le dis.
— J’ai hâte de revenir au travail avec mes toutes nouvelles fonctions, je vais pouvoir séduire le chef.
— C’est vrai que pendant ces dix mois, je n’ai pas eu l’occasion d’avoir de rendez-vous privé aussi
intéressant que lorsque tu étais là !
— Ça risque de changer chef, il faudra que je vous montre mes toutes nouvelles compétences en
privé.
— Je sais que je ne serai pas déçu. Cesse de me provoquer sinon nous risquons de disparaître
quelques heures, tu ne voudrais pas que nos invités s’impatientent !
— Tom, les invités je m’en fiche, mais il y a notre fille qui ne mérite pas d’attendre. Rejoignons-les,
nous avons toute la vie devant nous pour céder à nos pulsions puisque désormais il ne s’agit plus d’une
« attirance secrète. »
FIN.

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