Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Rivon Krygier
Les lignes qui suivent ne constituent pas un article
soigneusement peaufiné mais le fragments d'une
correspondance. Elles rapportent une discussion erratique
et inachevée entre Charles et moi, par courriel, sur un
sujet évoqué dans la presse, et qui nous tenait à cœur.(1)
Je n’aurais sans doute jamais cherché à la divulguer si la
disparition prématurée de Charles et le besoin de faire
encore entendre sa voix ne m’y avaient poussé et si je
n’étais convaincu de l’intérêt de faire connaître cette
facette si fascinante et méconnue de l’homme. Charles
n’était pas simplement le grand savant traquant la pensée
« théologique » des grands d’Israël. Ceint de sa puissante
armada critique, de son scepticisme espiègle et caustique,
il savait au demeurant se faire plongeur, explorateur,
chercheur éperdu de sens, mettre en jeu sa foi intime, ses
sentiments et ses valeurs. Il considérait la Cabale non
comme une relique curieuse, mais comme une grille de
lecture audacieuse – bien plus pertinente que la
philosophie classique – susceptible de bouleverser notre
regard trop convenu sur les questions actuelles et
existentielles. Que la mémoire de mon ami et maître soit
bénie à jamais.
*
Extrait d’une lettre ouverte du rabbin Daniel Farhi pour Tribune
juive (31 janvier 2000) :
http://www.charles-mopsik.com/Texte44.html 1/13
31/12/2017 Association Charles Mopsik
*
Message de Charles Mopsik à Rivon Krygier :
Cher Ami,
J'ai lu avec attention la lettre du rabbin D. Farhi que tu as
eu la gentillesse de me faire parvenir. Il me semble réagir
avec raison aux propos du rabbin Sitruk. Sur le fond de la
question, je crois qu'il y a justement, dans le Zohar sur les
Lamentations, des éléments qui pourraient enrichir le débat,
si débat il y a. À la question des souffrances endurées par
Israël, il répond finalement : Elles sont sans raison ! Au
lieu de rechercher une explication justificative et d'insister
sur la culpabilité, il ouvre une autre perspective en parlant
du retrait du « Père » (sefira Tifèrèt) et de l'impuissance de
la « Mère » (sefira Malkhout). Celle-ci ne souffre plus à la
place de ses enfants, comme avant la destruction du
Temple, mais avec eux. Si l'on suit encore le Zohar, le «
Serpent » joue un rôle majeur : il représente non pas tant
le mal absolu que le « rien » (ce qui n'a pas de sens,
l'insignifiant). Et c'est cela qu'introduit l'exil (la ruine du
Temple qui remonte elle-même à un désastre
métaphysique primordial assez complexe et obscur) : la
possibilité de souffrir sans cause, sans que les fautes (qui
existent toujours évidemment) ne suffisent à expliquer
cette souffrance. Celle-ci est sans raison (ou n'a que des «
raisons » historiques, économiques, politiques, tel est le
déterminisme symbolisé par le discours du Serpent et la
logique implacable qu'il représente...), et le drame le plus
grand, le plus insupportable, réside dans ce « sans raison ».
Le Zohar le dit quelque part en toutes lettres : les Israélites
souffrent « sans raison ». Parler de « culpabilité » pour
expliquer la Shoa, c'est entrer dans le jeu du Serpent,
adopter comme lui une logique déterministe et une
http://www.charles-mopsik.com/Texte44.html 3/13
31/12/2017 Association Charles Mopsik
http://www.charles-mopsik.com/Texte44.html 4/13
31/12/2017 Association Charles Mopsik
http://www.charles-mopsik.com/Texte44.html 5/13
31/12/2017 Association Charles Mopsik
http://www.charles-mopsik.com/Texte44.html 8/13
31/12/2017 Association Charles Mopsik
http://www.charles-mopsik.com/Texte44.html 9/13
31/12/2017 Association Charles Mopsik
http://www.charles-mopsik.com/Texte44.html 12/13
31/12/2017 Association Charles Mopsik
http://www.charles-mopsik.com/Texte44.html 13/13