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Le graphique ci-dessous représente l’évolution des quatre critères CQFD du projet, et l’évolution de deux d’entre
eux, la qualité, qui intègre la disponibilité, et le coût, qui passe de l’acquisition au cycle de vie, représenté par l’in-
dice de coût d’usage.
2. LE PROJET GLOBAL
L’exigence continuelle de disposer de produits toujours plus performants, favorisée notamment par l’amélioration
croissante des NTIC, conduit à la segmentation d’un projet en nombreux sous-projets répartis sur le cycle de vie du
produit. Les exemples sont nombreux dans l’automobile avec ses médiatiques sorties de nouvelles versions, issues
soit d’un restylage soit d’une modification importante du modèle, dans le logiciel où l’on égrène les nombreuses
versions du notre tableur préféré, où dans la défense où les systèmes d’armes se voient régulièrement dotés de fonc-
tionnalités supplémentaires ou améliorées.
(1) La phase de développement initial du produit de base comprenant les modifications d’aléas de développement,
c’est à dire celles qui apparaissent de façon normale dans tout développement, qu’elles soient dues à de la non-
qualité, des actions d’Analyse de la Valeur, des résultats de tests non conformes impliquant une reconception, ou
l’obsolescence de composants.
(2) La phase de développement de la version A, qui comporte par exemple des fonctionnalités supplémentaires ou
de meilleures performances par rapport à la version initiale. Cette tâche inclut également ses propres modifications
d’aléas de développement, et pourra conduire soit à un arrêt de la production précédente (matériel grand public),
soit à une production en parallèle des deux versions (automobile, aéronautique, etc.), soit à une production unique
avec remise à niveau des équipements précédemment fabriqués. Dans ce cas la planification devra couvrir non seu-
lement le produit correspondant, mais également les modifications des produits existants, qu’ils soient des prototy-
pes, des équipements de série en cours de fabrication ou déployés chez les clients. Elle devra également couvrir les
moyens de soutien complémentaires et leurs modifications éventuelles (bancs de test, rechanges, documentation).
(3) La phase de production au cours de laquelle apparaissent des demandes de modifications qui peuvent être dues
à des demandes client (à ne pas planifier), des obsolescences de composants, des défaillances de fournisseurs, etc.
Ces demandes donnent lieu directement à une mise en oeuvre si elles sont urgentes, ou peuvent être accumulées et
appliquées en un lot constituant une version.
(4) La phase de développement d’une version du produit qui est constituée des modifications accumulées et regrou-
pées dans un lot. La difficulté réside dans l’estimation et la planification d’un projet dont le contenu est inconnu.
Elles pourront être basées sur des hypothèses ou des scénarios, supportés par des analyses de risque et d’incertitude.
L’enjeu est d’importance puisqu’il s’agit du budget que devra préparer le client, ou de charges qui devront être
amorties sur le prix de série du produit. L’analyse du passé peut constituer une aide précieuse dans la mesure où l’on
peut émettre l’hypothèse que le volume de modifications sera dans des proportions identiques à celles observées
sur les projets passés. L’objectif est toujours de préparer les budgets et de faire en sorte que les ressources soient
disponibles pour réaliser ces modifications. On pourra, pour estimer leurs coûts, raisonner en terme de pourcentage
de modification par rapport à la configuration de référence.
(5) La phase exploitation où des demandes de modifications apparaissent alors que la production est arrêtée, ces
modifications peuvent être combinées à une nouvelle version (v.B) prévue initialement mais dont le contenu n’était
pas clairement défini (c’est typiquement le cas des équipements qui vont bénéficier d’améliorations technologiques
rapides, et pour lesquels on prévoit une mise à niveau, sans savoir exactement quelle sera son amplitude et à quelle
date elle aura lieu. On réalise alors une analyse de tendance pour tenter d’appréhender ces informations). Il est
ensuite nécessaire de relancer une production, soit partielle (un sous-ensemble à échanger), soit complète, ce qui
signifie un remplacement du produit (à éviter).
(6) Vont également constituer des sous-projets les versions dérivées des versions de base, qui de par leurs fortes
communalités avec celles-ci, en font plus des sous-projets que de vrais nouveaux projets. Les exemples sont le ca-
briolet ou le break dans l’automobile, la version pro d’un logiciel, la version allongée ou à plus grand rayon d’action
d’un avion de ligne, ou la version Air d’un Rafale. Ils contiennent comme pour le projet de base les modifications
d’aléas de développement, les versions prévues et les non prévues. Une bonne anticipation est très importante dans
la mesure où elle permet de limiter l’impact des retours en arrière (qu’on appelle aussi rappels) sur les produits en
service, coûteux aussi bien en termes financiers que d’image. Les impacts de modifications peuvent varier considé-
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rablement selon leur amplitude et la date de leur mise en oeuvre. Cela peut aller de la simple modification d’une
nomenclature, à la mise au rebut de matériels, en passant par une annulation de commandes, une reconception,
une fabrication de nouveaux outillages et bancs de test, tout ceci pouvant conduire à des dépassements de délais
et budgets, et à leurs pénalités associées. L’intégration de ces projets et sous-projets en mode multi-projet permet
néanmoins de limiter les risques.
1. L’estimation du gourou, employant la méthode appelée « jugement d’expert ». Avantages: très rapide, éventuel-
lement précise. Inconvénients: Repose sur de l’inpalpable, est donc injustifiable, est étroitement liée au gourou, et
disparaît donc avec lui.
2. L’estimation « chapeau de magicien » (d’une qualité telle qu’elle ne vaut guère plus qu’un nombre sorti au hasard).
Avantage: On dispose de chiffres. Inconvénients: Très dangereux.
3. Modélisation des coûts. Principe: Jeu d’équations reliant des paramètres descripteurs (Facteurs de Coûts) aux
coûts ou aux délais. Avantages: Repose sur des données valides, ce qui rend l’estimation traçable et justifiable et
rapide. Elle est donc efficace en analyse fonctionnelle et sur toutes les phases du cycle de vie, précise selon la qua-
lité des données de référence et du modèle. Inconvénients: nécessite un effort initial de collecte et de construction.
L’estimation « budgétaire » des coûts de modifications peut se faire à partir d’une configuration de base et d’une
métrique quantitative pour le matériel (nombre de plans, de procédures, de composants) ou le logiciel (lignes de
code, points de fonction, cas d’utilisation), et qualitative (complexité, degré de nouveauté, expérience de l’équipe).
On estime ensuite un pourcentage de modification (Ajout de X% de composants, modification de Y% des plans, etc.)
correspondant à ce qui permet d’aboutir au produit final. Ces pourcentages de modifications pourront être basés sur
le retour d’expérience.
5.1. Matériel
1. Ajout (ex: nouvel équipement): Estimation suivant une méthode classique telle qu’appliquée pour tout
nouveau produit.
2. Modification
- Mécanique (ex: interface): On estime le nombre de pièces à modifier et à ajouter, on en déduit le
nombre de plans correspondant, auquel on applique un barème (X hrs / plan), conduisant au coût d’étude. Pour la
fabrication, on décrit le produit tel qu’il sera après la modification, en appliquant la méthode permise par le niveau
de détail disponible. Exemple: Version allongée d’un avion de ligne par ajout d’une section de fuselage et modifica-
tion d’éléments d’interface tels que câblages, tuyauteries, remplacement du moteur, du train d’atterrissage, etc.
- Electronique: On part de l’estimation de la version de base et on estime la proportion du schéma
original qui sera modifié (ex: 40%), et on multiplie ce pourcentage par le coût d’étude initial (ex: 3000 hrs * 40%=1200
hrs). Ceci peut être appliqué aussi bien au niveau d’une carte que d’un coffret. Pour la fabrication (série et proto)
on pourra estimer en semi-analytique ou en paramétrique, comme pour toute estimation d’un produit nouveau.
5.2. Logiciel
Comme pour le matériel on détermine ce que sera le produit après la modification, et l’effort de développement
sera fonction de l’écart avec la version de base (avant la modification). Le produit est décrit à l’aide de son Arbre
Produit (diagramme des classes en Orienté Objet) en version de base, puis on estime ce qui doit être réalisé (ajout,
suppression, modification de code) pour aboutir au produit final, en nombre de lignes de code équivalent, auquel
on peut ensuite appliquer un facteur de productivité conduisant à l’effort de développement. Dans tous les cas on
veillera à ne pas oublier les postes tels que la qualification ou la certification, qui par le caractère incompressible de
leurs coûts, peuvent constituer une part importante du coût de la modification.
Cette estimation et planification détaillées permettront de consolider le planning directeur et, le cas échéant, si
cette consolidation fait apparaître des dérives soit de coût, soit de délai, de prendre les actions correctives appro-
priées.
6. LE COUT D’EXPLOITATION
6.1. Le contexte
La tâche d’estimation du coût d’exploitation commence par la description de son contexte, avec la définition de la
politique de maintenance qui pourra être sélectionnée parmi les options suivantes (exemples parmi les nombreuses
combinaisons possibles):
1. Envoi de l’équipement (ou URL=Unité remplaçable en ligne) au 1er niveau pour détection du module (ou
URA=Unité remplaçable en atelier) et envoi de celui-ci au 2ème niveau pour réparation par échange de composant.
2. Envoi de l’équipement (ou URL=Unité remplaçable en ligne) au 1er niveau pour détection du module (ou
URA=Unité remplaçable en atelier) et mise au rebut de celui-ci.
3. Envoi de l’équipement (ou URL=Unité remplaçable en ligne) au 3è niveau chez le fabricant pour répara-
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tion par échange d’URA. On doit ensuite déterminer le nombre d’équipements en service, et leur taux d’utilisation,
le nombre d’ateliers et de magasins aux différents niveaux de maintenance ainsi que les délais d’obtention (TAT).
La phase suivante consiste en la détermination des caractéristiques logistiques des équipements, principalement le
MTBF (ou TMEP=Temps Moyen Entre Pannes), le MTTR (temps moyen de réparation), le taux de fausses pannes, le
coût des URL, des URA et des composants, le coût des bancs de test, la consommation (en énergie et consommables),
etc.
La disponibilité, critère important de la performance (ou de la qualité), voire fondamental en cas de fonctionnement
24h/24, se calcule selon le principe du ratio (temps de fonctionnement)/(temps de fonctionnement + temps d’ar-
rêt).
Pour un équipement devant fonctionner 24h/24, la solution est de mettre en place de la surcapacité ou redondance.
Exemple, le parc nucléaire français est constitué d’un certain nombre de tranches qui sont mises en service pendant
l’arrêt de certaines autres, que ce soit pour rechargement de combustible, ou pour révision.
9. CONCLUSION
• Pas de politique de l’autruche !
• Pas de cloisonnement entre acquisition et exploitation
• Vision globale dès le début du projet, incluant les versions et modifications
• Les outils et méthodes sont là
• Large domaine d’application:
• “J’ai acheté un 4x4, mais quand il a fallu l’assurer et en changer les pneus, je l’ai revendu…”
• “La mairie a installé un joli rond-point fleuri à 300K€.
Combien aura-til coûté au bout de 30 ans ? nul ne le saura jamais !”
En conclusion, comme il est toujours souhaitable de savoir où m’on va, il est souhaitable pour un client de savoir
combien il va dépenser, et pour un fournisseur d’informer son client sur ce qu’il aura à dépenser, c’est à dire sur ce
que son acte d’acquisition va engager comme dépenses futures. La politique de l’autruche est alors fortement décon-
seillée, même si, à court terme, des intérêts contradictoires peuvent inciter à sa pratique.
L’approche du coût d’usage est applicable aussi bien au domaine des affaires que dans notre vie quotidienne, et il
sera plus facile d’en citer les exceptions, telles que l’ameublement, même si de temps en temps il faut bien faire
la poussière, ou, si l’on se place du côté client uniquement, tout ce qui en consommation unique (repas, livre,
concert,etc.)
Les deux exemples ci-dessous de projets gérés en coût d’acquisition uniquement, en prise directe avec notre vie
quotidienne, montrent malgré tout le chemin qu’il reste à parcourir.
- Le premier cas est symptomatique d’une mauvaise prise en compte du fait que les postes pneumatiques ou
assurances (sans parler de la consommation) peuvent représenter , par rapport à l’acquisition, une part plus ou moins
importante selon le type de véhicule, et notamment s’il est acheté d’occasion.
- Dans le deuxième cas, un gestionnaire avisé des deniers publics aurait procédé au chiffrage de l’entretien
de l’espace vert que constitue le rond-point. Il aurait pris en compte les activités telles que l’arrosage (eau et main
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d’oeuvre), le désherbage, le remplacement des périodique des fleurs, et aurait comparé différentes options (fleurs
en plastique, surface pavée, etc.) avant de décider de celle apportant la meilleure valeur à l’automobiliste-contri-
buable : le rapport fluidité-sécurité sur coût.
On le voit sur ces deux exemples, le concept de maîtrise du coût d’usage en gestion de projet est applicable à un
grand nombre de domaines. En l’appliquant avec discernement, c’est à dire en y consacrant un effort proportionnel
à la part que prend la part exploitation dans le coût global, on pourra en retirer un retour sur investissement signifi-
catif, même s’il faudra toujours un peu de patience pour le mesurer !