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Microbiologie Appliquée à l’Environnement ARIF Master II

‫بسم هللا الرحمن الرحيم‬


CHAP 6 : Contribution microbienne aux cycles biogéochimiques
Au cours de leur croissance et leur métabolisme, les µo interagissent entre eux
dans le recyclage des nutriments dont le carbone, le soufre, l’azote, le phosphore, le
fer et le manganèse. Ce recyclage est appelé recyclage biogéochimique, il fait
intervenir des processus biologiques et des processus chimiques (réactions
d’oxydoréduction).

6-1 Cycle du carbone (C)


Le carbone est recyclé dans tous les réservoirs majeurs de la terre,
l’atmosphère, la terre, les océans et les autres milieux aquatiques, les sédiments et les
roches ainsi que la biomasse. Malgré sa très faible concentration dans la croûte
terrestre (~ 0,27%), le C est présents chez tous les organismes vivants et il est à la
base de la chimie organique.

6-1-1- Cycle du carbone dans le sol


Le plus grand réservoir de C est situé dans les sédiments (lithosphère) et les
roches de la croûte terrestre. Les combustibles fossiles représentent un important
réservoir de C constitué sur de longues périodes de temps. Gaz, pétrole et charbon
sont les résidus de la matière organique (M. O) accumulée à l’échelle géologique: ils
ont échappé à l’oxydation et ont été transformés dans une forme fossile et enfouis
dans des couches sédimentaires. Une grande quantité de C organique se trouve dans
les plantes terrestres. D’avantage de C est présent dans le matériel organique mort
(l’humus) que dans les organismes vivants.

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A- Importance de la photosynthèse dans le cycle du carbone


Les seules principales voies par lesquelles du carbone organique nouveau est
synthétisé sur terre sont la photosynthèse et la chimiosynthèse (fixation du CO 2 par
les chimiolithotrophes). Les organismes phototrophes vivent dans la nature, presque
exclusivement dans les habitats où la lumière est disponible.
Les phototrophes oxygéniques peuvent être divisés en deux principaux
groupes:
- Plantes supérieures sont les organismes photototrophes dominant dans les
environnements terrestres
- µo phototrophes sont les organismes photosynthétiques les plus abondants des
environnements aquatiques.
Le cycle redox du carbone commence par la photosynthèse. Dans cette
réaction, (CH2O) représente la matière organique au niveau d'oxydation du matériel
cellulaire, tel que les polysaccharides.

B- La décomposition
La matière organique atteint le sol à partir des plantes supérieures (feuilles
mortes, racines et tiges: la litière) ou à partir des exsudats des racines. Elle peut être
divisée en 3 principaux pools.
- Insoluble : constitué de cellulose, de lignine, de chitine et d’autres substances
nécessitant une dégradation enzymatique avant leur métabolisation. L’humus est une
partie de ce matériel insoluble, il existe dans pratiquement tous les sols. Il résulte
principalement de la décomposition de la lignine. Certaines parties de l’humus
peuvent être synthétisées par les µo :
* bactéries : Azotobacter spp,
* actinomycètes : Streptomyces spp,
* champignons : Aspergillus spp.
L'humus est le produit de la collaboration entre les µo hydrolysant la lignine et ceux
produisant les polymères phénoliques. Le "temps de séjour" de l'humus varie de 250 à
1500 années selon le type de sol.
- soluble : C’est la forme de carbone immédiatement disponible aux différents
organismes. Il est relargué par des organismes vivants (racines) ou suite à la
dégradation des producteurs primaires, des consommateurs ou des microbes de
décomposition.
- Le pool microbien : Ce pool est petit (inférieur à 10% de la biomasse des racines et
de la litière et égal à 1% du carbone total du sol). Il se régénère très vite quand les µo
sont actifs.

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L'humus est présent dans l'horizon le plus proche de la surface (horizon


O). Lorsque l'on descend dans les strates, les matières organiques se font
plus rares (horizon A : matières organiques mêlées à des matières
minérales), puis disparaissent au profit d'éléments minéraux (horizon B),
puis de la roche mère peu altérée (horizon C).

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Dans les habitats anoxiques, CH4 est produit à la fois par la réduction de CO2
par H2, et à partir de certains composés organiques comme l’acétate. Cependant,
pratiquement n'importe quel composé organique peut être converti en CH4 suite aux
activités combinées des bactéries syntrophes et des méthanogènes : H2 généré au
cours de la dégradation des composés organiques par la fermentation, est consommé
par les méthanogènes et converti en CH4. Le méthane produit dans les
environnements anoxiques est insoluble et migre vers les environnements oxygéné où
il est oxydé en CO2 par les méthanotrophes. Ainsi, tout le carbone organique retourne
finalement en CO2 et le cycle du carbone est achevé.

6-1-2 Cycle du carbone dans l’eau


Le cycle dans l’eau montre des similarités dans les inter-relations de ses pools
avec le cycle du carbone dans le sol quoique des différences existent. Les
environnements aquatiques sont en général plus homogènes que les environnements
telluriques. L'absence de formes gazeuses de CO2 et d’O2 a un effet sur le cycle du
carbone des environnements aquatiques. Le CO2 du sol est remplacé par les HCO3-
dissous. La décomposition du carbone organique est plus lente et suivra plusieurs
voies. Le potentiel rédox diminue avec la profondeur du sédiment et ceci affecte les
accepteurs d'électrons utilisés par les anaérobies dans leurs oxydations. A la surface,
l'oxygène est utilisé et est réduit en H2O. Plus bas, l'accepteur d'électrons est NO3-,
réduits en N2. Plus bas encore, l'accepteur d'électrons est SO42- réduits en S ou H2S.
La quantité de carbone oxydée par les réducteurs de SO42- est plus importante que
celle oxydée par les réducteurs de NO3-. Les µo produisent du CO2 et des produits de
fermentation (propionate, l'acétate) utilisés dans la production de méthane.

6-1-3 Syntrophie et Méthanogénèse


Les capacités bioénergétiques plus restreintes des µo anaérobies les
contraignent à établir entre eux d’étroites relations de coopération. La réalisation des
différentes fonctions métaboliques dans les environnements anaérobies est la
résultante de l’action concertée d’un assemblage d’organismes établissant entre eux
un tissu d’interactions : coopération, syntrophie, compétition (Figures ).
Les polymères (polysaccharides, protéines et graisses) sont convertis en CO2
et CH4 par les interactions coopératives de plusieurs groupes physiologiques de
procaryotes. Lors de la dégradation d'un polysaccharide: la cellulose, le processus
débute avec des bactéries cellulolytiques, qui clivent la molécule en cellobiose
(glucose-glucose), puis en glucose simple.
Le glucose est fermenté par des fermenteurs primaires pour donner divers produits
(acétate, propionate, butyrate, succinate, alcools, H2, et CO2). L’H2 ainsi produit lors
des fermentations primaires, est employé par les consommateurs d’H2 qui sont les
méthanogènes, les homoacétogènes, les sulfato-réducteurs. L'acétate peut être
transformé en méthane par certains méthanogènes.

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a- Rôle des syntrophes


Les organismes clés dans la conversion des composés organiques complexes
en méthane sont les syntrophes. Ces organismes sont en fait des fermenteurs
secondaires. Ils fermentent les produits « de fermentation des fermenteurs primaires »,
produisant H2 et autres composés.

Fig.: Flux de carbone et d’énergie dans la dégradation de la matière organique. Groupes de procaryotes
impliqués : 1-Fermentatives primaires, 2- méthanogènes (ou autres hydrogénotrophes), 3-
méthanogènes acétoclastes, 4- Fermentatives réductrices de protons (fermentatives secondaires), 5-
Bactéries homoacétogènes

Les producteurs d’H2 (les syntrophes) sont incapables d'effectuer leurs


réactions de syntrophie en culture pure. Leur croissance n'est possible qu'en présence
d'un partenaire consommateur d'H2, compte tenu de l’énergétique du processus.
La consommation d'H2 par l'organisme partenaire est absolument essentielle pour la
croissance des syntrophes. La consommation d’ H2 par le partenaire change
énormément le tableau énergétique, donnant une énergie suffisante pour la croissance
des syntrophes.

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b- Oxydation anaérobie du méthane


Dans les écosystèmes d'eau douce, le méthane, produit dans les sédiments
anoxiques, est oxydé en CO2 par les méthanotrophes lorsqu' il atteint les zones
oxygénées. Ces procaryotes méthano-oxydants nécessitent de l’O2 pour cataboliser le
méthane, car la première étape de l'oxydation du méthane fait intervenir une enzyme,
la mono-oxygénase.

Cependant, le méthane peut être oxydé en conditions anaérobies dans les


sédiments marins par des agrégats cellulaires contenant certaines bactéries sulfato-
réductrices et des méthanogènes (Figure ).
Les bactéries sulfato-réductrices présentent une plus forte versatilité physiologique
que les méthanogènes et sont capables d’assimiler l’ensemble des composés carbonés
issus de la fermentation primaire en les oxydant en CO2 et en réduisant simultanément
les sulfates en sulfites.
La façon dont le méthane peut être oxydé par ces agrégats n'est pas encore
connue avec précision, deux hypothèses ont été suggérées. Les méthanogènes oxydent
le méthane en CO2 en inversant les étapes de la méthanogénèse. L’H2 produit est
consommé par un second organisme, syntrophe: les sulfatoréducteurs, qui

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consomment H2 et produisent H2S. Les méthanogènes convertissent CH4 en acétate,


qui serait alors oxydé en CO2 par les sulfato-réducteurs.
Quelle que soit la façon dont fonctionne ce partenariat, l'oxydation anaérobie
du méthane est indiscutablement un mécanisme de syntrophie dans lequel deux
organismes coopèrent pour réaliser une réaction qu'aucun des deux ne peut réaliser
seul.

Une équipe germano-autrichienne dirigée par le Max Planck Institute a


récemment ébranlé cette théorie. Elle a révélé les mystères des processus de réaction.
Cette étude montre que l'archée n'oxyde pas uniquement le méthane. Ce µo fait tout le
travail : il oxyde le gaz à effet de serre et respire le sulfate. L'archée n'utiliserait pas
les outils enzymatiques communs qu'emploient d'autres µo respirateurs de sulfate. Il
ferait appel à un moyen encore inconnu.

ANME oxyde le méthane en réduisant simultanément le sulfate en soufre de


valence zéro (SO, soufre élémentaire) partiellement déposé ou lié par voie
intracellulaire. Le SO produit est exporté ou diffuse en dehors de la cellule où il réagit
avec les sulfures pour former des polysulfures (disulfure, entre autres).
Le disulfure est absorbé par les deltaprotéobactéries associées et est
disproportionné en sulfate et en sulfure. Les sulfates produits lors de la dismutation

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pourraient être réutilisés par l'ANME et celle-ci pourrait également réduire une partie
du sulfate jusqu'au sulfure.
Une protéobactérie nouvellement découverte couple l’oxydation du méthane avec la
dénitrification. Il s’agit: Candiadtus Methylomirabilis oxyfera qui inverse la voie de
Méthanogénèse:
3CH4 + 8NO2- + 8H+ 3CO2 + 4N2 + 10H2O

d- Habitats des méthanogènes


Bien que les méthanogènes effectuent un métabolisme très spécialisé, en
conditions strictement anaérobies, ils sont très répandus sur Terre. De fortes activités
de méthanogènes existent dans les environnements anoxiques, tels que les marais et
zones humides, ou dans le rumen et ce processus se rencontre aussi dans des habitats
considérés habituellement comme oxygénés, comme les forêts et les prairies. Dans
ces habitats, Il se produit seulement dans des microenvironnements anoxiques comme
au milieu de grains de sol. La production biogénique de méthane excède la production
de gaz naturels et autres sources biogéniques. L'eructation des ruminants ainsi que le
CH4 libéré par les termites, les tourbières et les zones humides naturelles représentent
les plus importantes sources de méthane biogénique.

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6-2 Cycle de l’azote

L’azote est un élément essentiel pour la synthèse des protéines (18%), des
acides nucléiques, de certains polysaccharides (chitine), de peptidoglycane (paroi des
bactéries). Il existe 3 principaux processus de transformation microbienne de l’azote:

1- La fixation
L'atmosphère terrestre contient près de 79% d'azote principalement sous forme
de diazote (N2) et, à divers degrés, sous les formes de N2O, de NH3, de NH4 et autres.
Seuls les organismes procaryotes sont capables de fixer l’azote: diazotrophes. Ils
peuvent appartenir à des groupes différents : protéobactéries, bactéries à Gram+, les
cyanobactéries et les achées. Certaines Bacteria et Archaea produisent une
nitrogénase responsable du processus de fixation.
* Bactéries fixatrices d'azote vivant à l’état libre
Ces bactéries se trouvent surtout dans les prairies elles sont en forte
concentration dans la rhizosphère.
Les bactéries fixatrices d'azote comprennent des espèces aérobies, comme
Azotobacter, Beijerinckia. Elles ont développé plusieurs mécanismes pour protéger
leur nitrogénase contre le dioxygène.
Des bactéries anaérobies, dont quelques espèces de Clostridium, possèdent la même
aptitude : C. pasteurianum.
II existe de nombreuses cyanobactéries aérobies photosynthétiques qui fixent l'azote.

Leur nitrogénase est enfermée dans un hétérocyste. Le rôle de ces bactéries dans la
fixation biologique de l'azote dans les océans, prairies, les forêts est considérable.
N2 + 8H 2NH3 + H2

* Bactéries fixatrices d'azote vivant en association symbiotique


Les bactéries de ce type jouent un rôle prépondérant dans la croissance des
plantes agricoles. Les membres des genres Rhizobium et Bradyrhizobium ont la
capacité d'infecter les racines des légumineuses (soja, haricot, pois, arachide….) sur
lesquelles elles produisent des nodules. La plante fournit les conditions anaérobies et
les éléments nutritifs nécessaires à la bactérie qui fixe l'azote qu'intégreront les
protéines végétales.
1- L'ammonification
Le processus d’ammonification est double :
- D’une part, les composés azotés organiques d’origine végétale ou animale libérés à
la mort de ces organismes sont immédiatement décomposés en ammoniac par les µo.
- D’autre part, les animaux excrètent au cours de leur vie une quantité non négligeable
de composés azotés (ammoniaque ou acide urique et urée).
Lors de la décomposition d'un organisme végétal mort, les protéines sont hydrolysées
en acides aminés. Ces derniers perdent leurs groupements amines (—NH2) qui sont

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convertis en ammoniac (NH3) au cours d'un processus appelé désamination. De


nombreuses bactéries et de nombreux mycètes participent à la libération d'ammoniac.

La croissance microbienne s'accompagne de la libération d'exoenzymes


protéolytiques, qui dégradent les protéines. Les acides aminés produits sont
transportés dans les cellules microbiennes, où l’ammonification a lieu. L'ammoniac
s’échappe rapidement d'un sol sec mais, si le sol est humide, il se dissout dans l’eau et
il y a formation d'ions ammonium (NH4+). Les bactéries et les plantes utilisent les ions
ammonium provenant de cette série de réactions pour la synthèse d'acides aminés.

2- La nitrification
La nitrification est le processus aérobie d’oxydation de l’ion ammonium (NH4+)
en nitrite (NO2-) et l’oxydation subséquente du nitrite en nitrate (NO3-) Elle est
entièrement effectuée par des µo chimiolithotrophes. Les bactéries des genres
Nitrosomonas et Nitrosococcus, par exemple, jouent des rôles importants dans la
première étape.

Nitrobacter et les organismes chimiolitho-autotrophes apparentés oxydent les


nitrites en nitrate.

Les mycètes contribuent beaucoup à ce processus par la nitrification


hétérotrophe dans les milieux les plus acides (Aspergillus, Cephalosporum,
Penicillium). La nitrification contribue à la fertilité du sol. Le nitrate est plus
rapidement lessivé dans les sols que ne l'est l'ammoniac. Lorsque la concentration
dépasse un certain seuil, l'eau est impropre à la consommation humaine.

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4- La dénitrification
De nombreuses bactéries réalisent la respiration des nitrates. Dans ce processus,
qui se déroule préférentiellement en anaérobiose, le nitrate est transformé en azote
gazeux.

Du point de vue agricole, ce processus est défavorable car il correspond à une


perte d'azote fixé vers l'atmosphère.
Parmi les bactéries réalisant cette transformation: Pseudomonas denitrificans,
Thiobacillus denitrificans et Paracoccus denitrificans. Ce processus existe dans les
sols détrempés, les eaux profondes, les sédiments et les microhabitats anaérobies. Un
faible pourcentage de nitrates est dégradé jusqu’au stade final d’N2 reconstituant ainsi
une partie de la réserve atmosphérique.

5- Oxydation anaérobie de l’ammoniac


L’ammoniac peut être aussi catabolisé en anaérobiose par Brocadia et des
organismes proches au cours d’un processus nommé annamox. Au cours de cette
réaction, l’ammoniac est oxydé par les nitrites (NO2) qui jouent le rôle d’accepteur
d’électrons, donnant N2 comme produit terminal. Une faible quantité de monoxyde
d’azote N2O est produite au cours de ces réactions. Ce gaz peut réagir
photochimiquement avec l’ozone :
NO2 + hγ N2 + O
N2O + O NO
NO + O3 NO2 + O2

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