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Editorial

QUEL EST LE BON NIVEAU DE DETTE PUBLIQUE ?

Christian Chavagneux

Altern. économiques | « L'Économie politique »

2012/3 n° 55 | pages 5 à 6
ISSN 1293-6146
ISBN 9782352400691
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-l-economie-politique-2012-3-page-5.htm
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Editorial
par Christian Chavagneux

p. 5 rédacteur en chef
de L'Economie politique

Quel est le bon niveau


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de dette publique ?

A
lors que les pays européens viennent de décider le [1] « Is high public
debt always harmful
chemin que va prendre leur future intégration, aucun to economic growth ?
n’a remis en cause l’idée que l’objectif d’une bonne Reinhart and Rogoff
and some complex
gestion des finances publiques devait être de ramener nonlinearities »,
la dette publique vers les 60 % du produit intérieur brut (PIB). Association française
de cliométrie (AFC),
Or, ce niveau est loin de faire consensus chez les écono- working paper n° 8,
fév. 2012 (disponible
mistes. Plusieurs études de Carmen M. Reinhart et Kenneth sur www.cliometrie.org).
Rogoff ont montré que ce n’est que lorsque la dette publique
dépasse 90 % du PIB que les effets sur la croissance deviennent
négatifs, et même fortement négatifs. Très critiqué (peu de pays
justifiant la démonstration, confusion entre corrélation et causa-
lité, etc.), leur travail vient de faire l’objet d’une remise en cause
importante par Alexandru Minea et Antoine Parent [1].
En s’appuyant sur une autre série historique de dette
publique qui leur permet d’aller plus loin dans le temps, Minea
et Parent commencent d’abord par confirmer les résultats de
leurs confrères américains : quand le ratio de dette sur PIB d’un
pays passe de la tranche 60-90 % à plus de 90 %, ils notent
corrélativement une baisse de la croissance moyenne pour les
pays concernés. Cependant, là où les pays perdaient plus de
3 points de PIB de croissance chez les chercheurs américains,
eux ne trouvent plus qu’un effet négatif de l’ordre d’un demi-
point de pourcentage. Pas de quoi fouetter un chat…

Juillet-août-septembre 2012
L’Economie politique

Quel est le bon niveau


Trimestriel-juillet 2012

de dette publique ?

p. 6 Mais ce n’est pas tout. Leur étude démontre surtout que la


relation entre le niveau de dette publique et la croissance d’une
économie offre la particularité que, à certains moments, un
surcroît de dette publique est associé à moins de croissance,
mais que, à d’autres moments, encore plus de dette publique
est associé à plus de croissance.
Ainsi, leur analyse montre que les pays qui dépassent un
ratio de 115 % de dette publique sur PIB présentent en moyenne
un taux de croissance supérieur à ceux qui sont entre 90 et
115 %. De plus, ce taux de croissance est peu inférieur à celui
que connaissent les pays dont le ratio de dette publique est
dans la fourchette 60-90 %.
Ces résultats étant établis sur la période 1945-2009, les
deux économistes ont cherché à savoir dans quelle mesure ils
tenaient la route sur une période plus longue incluant 1880-
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1945. Résultats confirmés : sur plus d’un siècle, la Belgique, la
Canada, la France, l’Italie, la Nouvelle Zélande et le Royaume-
Uni ont connu des périodes associant une dette publique
supérieure à 115 % du PIB et une croissance rapide.
Bien entendu, soulignent à juste titre les auteurs, il ne s’agit
pas de dire que les Etats du monde entier doivent laisser filer
leur déficit et leur dette sans contrôle. Mais ce travail montre
que revenir rapidement vers un ratio de 60 % comme signe de
bonne gestion publique est bien trop restrictif. Plusieurs pays
ont pu gérer, dans la durée, des niveaux de dette bien plus
élevés sans que cela ne soit associé à une croissance en berne.
Les dirigeants européens feraient bien d’en tirer quelques
leçons pour l’avenir s’ils veulent soigner leur phobie de la dette
publique et l’austérité mortifère qui l’accompagne. ■

L’Economie politique n° 55

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