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23-9-48

N. 121. TOUS LES J EUDIS

FILM c oNp 4 FRANC

( Imprima en France. J
Eh, Ment Gervais ne se tua pas. Il ne
se tua pas, non parce qu'il flancha au
dernier n'ornent, mais simplement pour
cette raison qu'après trois tentatives
ratées notre homme, exténué, entendit
une voix lui crier :
— Vous n'y arriverez pas
Debout sur la table de bois blanc,
qui lui permettait de se suspendre au
plafond, Gervais ouvrit de grands yeux.
Cette voix ?... Un voisin 9... Halluci-
nation ?
Il allait recommencer à se passer la
corde au cou quand la voix, venant de
gauche, alors que la première fois notre
homme l'entendit de droite, répéta :
— Puisque je vous dis que vous n'y
arriverez pas !
Gervais haussa les épaules, se passa
— pour la cinquième fois -- la corde
au cou, envoya la table rouler à un
mètre, se balança dans l'espace et...
s'écroula, à son tour, sur le plancher.
Non seulement la corde était cassée,
mais le crochet-point d'interrogation
arraché avait disparu.
Et la voix mystérieuse gronda
encore, étrange, satanique :
— N'essayez donc pas de vous sui-
Production Georges LEGRAND cider puisque je vous dis que c'est inutile. Vous n'êtes
pas inscrit sur mon registre (t).
Film de Yvan NOE et A. LINOU Gervais fit un tour sur lui-même, regarda en haut ;
puis en bas et demanda :
raconté par MORENCY — Où êtes-vous donc ?
La voix répondit :
— Où je me trouve. Partout et nulle part.
DISTRIBUTION : — Mais qui êtes-vous ?
— La Mort !
Duvernay JEAN TISSIER. Ami lecteur, n'allez pas crier à l'invraisemblance.
L'oncle Arthur TESIERSON. C'est bien ainsi que cela s'est passé. Si vous rencontriez
Maurice JEAN VINET. Gervais — qui est redevenu un bon vivant, après avoir
Gervais KERIEN. été un mauvais mort — il vous le dirait comme moi.
L'abbé . JEAN KOLB. Voilà donc (car je ne pense pas-que vous doutiez
Le docteur CHARLES LEMONTIER. maintenant de mes dires) quelle conversation s'engagea,
.Suit' SUZY CARRIER. par la suite, entre la Mort et le sieur Gervais, qui venait
Tante Agathe MARCELLE GÉNIAT. de rater sa mort, comme il avait raté sa vie.
Suzanne PIERRETTE CAD LOI.. — Donc, vous êtes la Mort?
Joséphine Futuna-Gin. — En personne... en personne invisible, évidemment.
tinette ANDRÉE DEBAR. — La Mort Elle existe donc sans chair et sans
Limette.. GENEVIEME IVIAURY. os ?
— Oui... En faut-il plus ?... Je suis l'invisible Mort...
Marley tuas dead lo begin,with. pour vous servir... mais pas aujourd'hui.
— Pourtant, comprenez donc, je suis malade, sans
INSI commence le. Christmas Carol', de un sou, désespéré... Pourquoi ne pas vouloir de moi 9
Dickens. — J'exécute des Ordres... Vous n'êtes pas sur mon
Nous ne dirons pa's.que . pour grand registre bordé de noir. C'est tout ce que je puis
commencer Gervais était mort, mais vous dire... Et puis, que me chantez-vous ?... Malade ?...
il s'en fallait de bien peu. Qu'est-ce que cela veut dire'?... Je ne connais que les
Malade, à la charge de très rares gens qui vivent et ceux qui meurent... Il n'y a pas de
amis, quelque peu neurasthénique malades... C'est un mot que les hommes ont inventé
aussi, Gervais avait décidé d'en finir pour se faire plaindre... Les hommes aiment à faire
avec une existence trop péniblement parler d'eux...
quotidienne. — die mort... matérialisée, sans matière, je ne me
Il venait, dans sa demeure, une tais aucune idée de ce que vous...
lamentable chambre de bonne humitle et froide, de L'invisible visiteur s'expliqua, interrompant la
choisir la façon dont il se supprimerait : la pendaison. phrase de Gervais :
Certes. on est laid pendu, mais celui qui s'accroche — Je suis un ange déchu. Oui, j'ai été recalé à
à une corde ne se voit pas, à moins d'opérer devant l'examen d'archange... Alors, on m'a collé à ce poste
vos grand miroir. Et ce n'était pas le cas de Gervais. macabre... et ce n'est pas une mince besogne... Je dois.
Notre désespéré accrocha donc ladite corde « défi- être ici et là, à toute heure du jour et de la nuit... Et il
nitive à ail solide crochet vissé au plafond, un cro- n'y a pas même de repos hebdomadaire pour la Mort..,
chet qui -- dernière constéeation humoristique d'un — Puisque vous êtes immatérielle, vous n'avez pas
être demeuré observateur — ressemblait assez à un besoin de sommeil... Et puis, votre besogne estsimple...
point d'interrogation placé la 'tête en bas, un point On vous dit : Celui-là va rendre le dernier soupir à
d'interrogation quelque peu ironique, vous allez voir telle heure et vous l'embarquez au moment dit.
pourquoi. — Vous croyez ?... Et quand on me charge de choisir?
Ce point d'interrogation retourné paraissait, en effet, — Choisir ?
compléter ces quelques mots : . Te tues-tu ?... ou ne te — Parfaitement.., Ainsi, tenez... Il y a une certaine
tues-tu pas ? qu un esprit malicieux faisait courir famille Duvernay, domiciliée à Paris... Ils sont sept...
dans les méninges fatiguées du désespéré. Eh bien! l'ordre suivant m'a été transmis : Famille

i France : un an
Abonnements : i .. 20, fr. — Six mois Ife fr.
etranger : un an 224 fr. — Six mois III h.
Direetion.Adminietration : 43, rue de Dunkerque. Parle (X').
En cas de changement de prix du numéro, les abonnés sema servis Men% concurrence de la somme figurant à leur crédit.
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Duvernay, telle rue, tel numéro,.. 'Un enlevé le 2v. . commanderait, si l'on trouvait de la logique chez de
C'est-à-dire après-demain. tels personnages — n'allez pas croire, dis-je, que le
— Un enlevé > ?... Ah ! oui. je comprends : au beau Maurice était insensible aux oeillades perverses
mort. Et pourquoi vous faire choisir ? et perfides de la jolie Lucette.
— Une entourloupette... Dans l'au-delà aussi on Non, au contraire. Et même... Oh I mais ce n'est pas
vous crée des complications... Au fond, ça évite la nu Io- possible... Avons-nous bien regardé 1_ Il nous semble
tonie... Mais ça complique rudement ma maca ire qu'à l'instant même, se trouvant seuls au bas de l'esca-
besogne... Certes, je n'en mourrai pas... Non, vo> lier du living-room, Lucette et Maurice viennent de
vous mourir la Mort ?... Ce serait à mourir de rire. collaborer à un baiser sur la bouche très prononcé.
Un rire satanique éclata dans la chambre de bonde. très cinéma américain.
Un silence suivit ; puis, de nouveau, la voix mysté- Enfin, nous verrons plus tard sfeet incident technique
rieuse se fit entendre : mérite qu'on y srévienne.
— La Mort ne ment pas... Elle n'a pas le temps... Toujours est-il que l'agitation continue dans cette
Et tenez, puisque je ne vous emporte pas aujourd'hui. maison.
je vals vous demander de me rendre un service... OUI, Ginette traverse en courant le coquet jardinet de la
vous allez choisir à ma place. propriété.
— Choisir quoi ? Ginette court et, comme elle est fort grande, ce pauvre
— Le mort à prendre dans la famille Duvernay... . monsieur le Curé » rond, àgé, de courte taille, a peine
Acceptez-vous ? à la suivre.
Gervais ne répondit pas immédiatement. Comme la Sur la dernière marche du perron. un non moins
plupart des désespérés, qui ont raté leur coup fatal, il curieux homme est apparu. Agrémenté d'une toque et
reprenait, peu à peu, goût à la vie. d'une blouse de laboratoire, c'est M. Duvernay. le
— Soit, finit-il pas répondre... Mais.., quand mon maitre de céans, le savant qui n'a jamais rien inventé
tour viendra... vous retarderez le moment... pénible... et qui injecte le typhus à des lapins non consentants,
— Tiens, tiens, ricana la Mort, vous voici revenu à car ces bêtes stupides et égoistes n'entendent point
de meilleurs sentiments quant à cette garce de vie... aider à l'amélioration de la science.
Bon, j'accepte le marché... Vous verrez que ce que je Comme Ginette. M. Duvernay est perpétuellement
vous demande n'est pas si commode... Je vais donc dans la lune. Aussi regarde-t-il arriver, avec un éton-
vous introduire dans cette famille Duvernay qu'il faut nement naît, ce « bon monsieur le Curé > qui tente de
alléger d'une unité avant le 28... battre le record du cent mètres pédestre.
— M'y introduire ? Pas commode ça... — Quel bon vent vous amène, monsieur le Curé ?
— Laissez-moi faire, riposta la voix... J'ignore ce demande M. Duvernay.
m'est la difficulté... Ginette expliqua :
Et, plus grave, l'invisible dit encore : — C'est pour le grand-père... Tu sais bien qu'il est
— Monsieur Gervais, écoutez-moi bien... Voici ce très mal... M. l'abbé vient lui donner l'extrême-onction.
rue nous allez (aire... — C'est vrai, croit se souvenir M. Duvernay, j'ai
entendu dire que le grand-père avait encore eu une
attaque.
Une folle agitation régnait dans la villa-habitée par Mais ce souvenir tardif inquiète quelque peu le prètre,
es Duvernay. qui a repris, en partie, son souffle et qui intervient :
Aussi bien était-on dans une véritable maison de — Mademoiselle, ne croyez-vous pas que, si votre
:upermerveux qui se contrariaient, se disputaient et grand-père vient d'avoir une alerte, il vaudrait mieux
;'opposaient à longueur de journée. le laisser reposer ?... Après cette attaque, son coeur peut
Aujourd'hui, cette effervescence était quelque peu demander des ménagements.
justifiée : le grand-père agonisait.. Ginette a bondi, suffoquée :
Et, par l'escalier qui conduisait du living-room à sa -- Son coeur ?... Mais sun Arne. ?... Son Anie !...
chambre, des allées et venues se succédaient, ponctuées Grand-père n'est pas en état de gram.. et ma mère,
des mêmes interrogations et réponses : dans sa candeur, a introduit ici le diable.
— Comment est-il ? Le diable !... Ce mot a eu pour effet de faire rire
— Mal, très mal... M. Duvernay et sursauter M. le Curé. •
— Il vre y passer ? — Mais oui, précise Ginette, le diable en personne.
— Peut-être... Mais c'est ainsi tous les deux jours sous les traits de 'Lurette, la femme de chambre... Cette
depuis un mois. Lucette, qui a des jupes tellement courtes qu'on voit
La cuisinière Joséphine assurait qu'à ce jeu (si ses jambes.
c'en était uni son asthme la terrasserait. — Qu'elle a tortjolies, d'ailleurs.
Montant, descendant, remontant et redescendant, il Qui a prononcé ces mots terrorisant Ginette ?
fallait l'entendre égrener ses plaintes : M. Duvernay, naturellement ?... Non, cc bon M. le Curé
— Je crois qu'il va passer... Il faudrait tout
de même lui faire une piqûre... mals on ne
la lui fait pas... Et cette maudite bouillotte
qui me brille... J'y laisserai ma peau... Je «mil
suis cuisinière et non bonne à tout faire... C'est encore en une altngyr.
une maison de détraqués, de fous... La vie
y devient épouvantable t...
Ginette, la fille atnée des Duvernay, jolie,
niais sèche, distante, les yeux perdus dans tous
les plafonds, s'affairait aussi, mais, bien pen-
sante, elle n'avait que ces mots à la bouche :
— L'extrême-onct ion t.,, I ' e xt r ê m e-onc-
tion t... Le prêtre !...
Pour un peu, elle eût appelé Sa Saititeté le
Me.
Lucette, la troublante femme de chambre,
prenait, par contre, la situation avec philoso-
phie.
Certes, elle aidait les uns et les autres dans
leur précipitation, mais avec.un sourire iro-
nique et narquois qui en , disait long sur sa
mentalité de poule domestique.-
Ce sourire devenait pourtant plus sincère et
plus sentimental quand apparaissait Maurice,
le beau Maurice, fiancé à tii.plus jeune des
deux demoiselles Duvernay, la blonde et pure
Suzy.
N'allez pas croire -- comme la logique le
3
-- Moitié nerwine.
moitié rhum.

qui, maintenant, en rougit jusqu'aux oreilles, bafoidlle


à qui mieux mieux et ne parvient pas à effacer la mau-
vaise impression produite par sa constatation impure.
Mais il ne s'agit pas de l'Anie de M. le Curé. C'est celle
du grand-père qu'il faut sauver, et Ginette reprend,
impérative :
— Monsieur le Curé, l'extrême-onction!
L'alliée des demoiselles Duvernay et le saint homme
sont entrés dans la villa, et c'est de nouveau une course
folle dans l'escalier. Cette fois, pourtant, l'abbé ne
cherche plus à suivre le mouvement, et il faut bien
que, tapant du pied, agitant les mains, pinçant les
lèvres, Ginette l'attende là-haut, sur le palier.

—. Si c'est mal,
recommençons... ce sera
Calme, l'cell vague derrière d'énormes lunettes, les peut-être mieux.
bras chargés de livres, Mm• Duvernay est entrée à son -- Oh I non... a fait la jeune fille en repoussant ce
tour, mats pour s'arrêter dans le living-room. Elle fiancé trop ardent... Oh ! non...
arrive de la bibliothèque municipale. Mais, malicieuse, faisant une petite mine exquise de
Lucette, qu'elle a appelée d'une voix lointaine, s'est vierge pas si effarouchée que cela au fond, elle a ajouté :
présentée. — Pourtant, ça me ferait plaisir.
— Comment va-t-on ici ? Mais, n'est-ce pas ? il faut être raisonnable. Maurice
— Le grand-père est au plus mal. y consent, et c'est l'éternel dialogue des fiancés, un
Mm• Duvernay a fait : • Ah ! comme en apprenant dialogue fait de tous ces projets roses dont bien peu se
une nouvelle sans importance, et a continué froide et réalisent.
absente : Laissons la blonde Suzy les exposer, cela la rend si
— C'est tout ? heureuse :
Oh I Mm• Duvernay n'est pas la seule Ici à prendre les — Quand vous aurez terminé vos examens, j'espère
choses les plus graves avec philosophie. qu'on vous nommera dans le Midi... Nous aurons là
Deux êtres jeunes viennent de traverser le living- des fenêtres ouvertes avec du soleil qui vous flanque
room en courant l'un après l'autre. des claques par toutes les ouvertures... Ce sera chaud, ce
Des enfants ? Non, plus si enfants. Il s-agit, en effet, sera bon...
du beau Maurice et de sa blonde fiancée Suzy. Et de conclure :
Ils ont poussé de tels cris en courant l'un après — Oui, Maurice, nous serons heureux, très heureux,
l'autre, que Mm• Duvernay a pris la fuite, les laissant et nous aurons beaucoup d'enfants...
seuls dans le salon. — Suzy, ne te vautre donc pas sur le fauteuil !...
Suey n'a même pas vu que sa mère venait de rentrer. Ce reproche est tombé du ciel. Il a été lancé en effet.
Est-elle, elle aussi, à ce point indifférente et égoiste ? comme un verre d'eau glacée, du haut de la galerie où
Point. Suey a un petit coeur en or... comme ses che- Ginette vient de passer.
veux et le reflet excessivement doux de ses yeux d'une Suzy a haussé les épaules.
candeur d'ange. — Moi aussi, dit-elle à Maurice, je crois en Dieu,
Mais, quand un homme agonise tous les deux ou mais sans prier une grande partie de la journée, comme
trois jours, depuis tant de semaines, on en prend l'habi- ma sœur. Je ne sais pas si c'est cet excès de piété qui la
tude et l'on retourne aux plaisirs de son àge. rend aussi désagréable, mais vous avez vu, à l'instant -
D'ailleurs, en ce moment, Suzy a d'autres préoc- même encore, elle ne cherche qu'à vous dire des choses
cupations. blessantes.
La course folle avec Maurice s'est mal terminée... Mais notre couple cesse vite de discuter du carac-
ou bien terminée... Suzy ne sait plus. Oui, Maurice a tère et des habitudes de la soeur alnée. Les projets
pris sa fiancée à pleins bras et l'a embrassée sur la reviennent en foule, irréalisables pour la plupart; mais
bouche, comme il a fait tout à l'heure avec Lurette. comme c'est-si doux de rêver I
C'est décidément une manie, mais, avouons-le, une Maurice et Suzy font maintenant les cent pas dans
manie bien agréable... pour une jeune fille amoureuse. le jardin, marivaudant, voguant dans le bleu et le rose
Suzy croit bon, néanmoins, de taire de vifs reproches tendres...
à son fiancé.
— Oh t c'est mal ce que nous avons fait._
Riant de ce reproche, Maurice a le toupet de — Il est mort ?
iposter
r : Les fiancés s'arrêtèrent et se retournèrent.
4
intérieur en traînant derrière lui au moins dix boîtes
de conserves vides attachées à une longue ficelle.
Tandis que tante Agathe se bouchait les oreilles en
lançant un regard de feu à l'enfant, Suzy se précipitait
vers le tout petit :
— Tu n'es pas fou, Jackie... En voilà un vacarme.
Le garçonnet, qui était le petit-fils de la cuisinière
Joséphine, expliqua, effronté :
— C'est à cause de la fête.
— Quelle fête ?
— La fête des ballots.
Il sortit, claqua la porte, mais revint presque aussitôt
et, faisant une gracieuse révérence, dit encore :
--- Bonne fête à tous !
Puis il disparut définitivement.
Cet enfant terrible ajoutait encore sa personnalité
bruyante, voire cruelle (n'avait-il pas fait tomber le
dateur et essayé de crever les yeux du chat !) à cet
ensemble de gens peu normaux, en
raison de leur nervosisme
aigu.
La t ante

Une vieille dame, toute vêtue de noir, un voile


de crêpe mal relevé sur l'épaule et qui cachait une
partie de son visage ridé, une valise à la main,
était plantée au milieu de l'allée et les regar-
dait.
— Oui, reprit la visiteuse, je vous demande
s'il est mort.
— Mais... qui ? demanda Suzy.
— Eh bien ! mais le grand-père.
— Oh ! non, il se repose.
La vieille bondit et grogna :
— Il n'est pas mort, et l'on me dérange de Biarritz...
C'est insensé !... Je m'en vais... Agathe
Elle lit quelques pas vers la grille, mais se ravisa et s'était pourtant
revint vers les jeunes gens. calmée et prenait main-
— Enfin, puisque j'y suis... Eh bien! Suzy, tu ne me tenant des nouvelles .de son frère
reconnais pas ?... Non ?... Cela prouve que mes photos moribond.
ne doivent pas encombrer l'appartement. — Oui, grommela-t-elle, il meurt, il ne meurt pas...
Enfin, la petite Duvernay comprit : En somme, il ne sait pas ce qu'il veut... D'ailleurs, je
— La tante Agathe !... Vous êtes la tante Agathe ! n'en suis pas surprise, Mon frère a toujours été un emm...
La visiteuse de noir vêtue, déjàiprête à suivre l'enter- Et, soudain, ce fut un léger bruit de porte timidement
rement du moribond, était en effet la tante à héritage ouverte et refermée avec les mêmes précautions.
qui habitait Biarritz depuis de nombreuses années. La tante Agathe se retourna la première et regarda
— Enfin, tu me reconnais, dit-elle d'un ton toujours l'homme qui venait d'entrer.
bougon. Et celui-là ? — Qu'est-ce que c'est que ça ? demanda-t-elle.
Elle avait désigné Maurice. Ça... c'était notre ami Gervais, le désespéré qui,
— Ah oui, je comprends, ton fiancé... car Lu es au début de ce récit, avait conclu un étrange pacte
fiancée, il y a encore ça... Il me faudra revenir pour ton avec la Mort.
mariage... Comme si vous ne pouviez pas vous arran- Gervais venait, dans cette famille de fous, remplir
ger pour faire les deux cérémonies en même temps... Pas les fonctions de garde-malade-infirmier. Ainsi pourrait-
le même jour, bien sûr, mais... Et alors, Suzy, tu ne il faire le choix que le sinistre et invisible exécuteur
m'embrasses pas ? des Hautes Œuvres de l'étage supérieur attendait de
Suzy sauta au cou de sa tante. lui : choisir, parmi tous ces personnages plus ou moins
— Et tu ne me tais pas entrer dans la maison ? déséquilibrés, le corps et l'âme à livrer le 28.
Ah ! ça, il faut donc tout te dire ? Quelle éducation ! Quand Gervais vit où la Mort avait dirigé ses pas,
Tante Agathe se dirigeait déjà vers le perron quand il eut un sourire de suffisance.
elle se souvint : Vraiment cette vieille Mort me prend pour un
— Ah ! ma valise... imbécile, pensa-L-11. Choisir têt?... Mais il n'y a pas
Maurice essayait de soulever, sans y parvenir faci- choisir, c'est tout simple... L'être à embarquer le 28,
lement, la valise en question. c'est le vieux grand-père qui agonise... Un enfant
La vieille eut un haussement d'épaules, repoussa la trouverait ça tout seul.
main du jeune homme, saisit la poignéé de la valise et Gervais avait à peine eu cette pensée, que la voix
lança à Maurice quelque peu ahuri : dela Mort chuchota à son oreille, caverneuse et impres-
— Petite nature ! sionnante :
Le premier soin de tante Agathe, quand elle se trouva — Ce n'est pas aussi simple que cela, monsieur Ger-
dans le living-room, tut de faire appeler la femme de vais... Vous verrez... Vous verrez...
chambre et de lui commander une infusion alcoolisée. Le visiteur ayant exhibé ses papiers et autres certi-
— Moitié verveine, moitié rhum, précisa-t-elle. ficats, personne ne s'occupa plus de lui. On lui désigna
Peu après, toute la famille défilait devant la tante la chambre du mourant, et Lucette, qui devait l'accom-
de Biarritz : Ginette, qui venait de redescendre avec pagner, le fit d'un simple geste du doigt dirigé vers une •
le bon curé ; 81.s. Duvernay, toujours affairée, et Duver- porte du premier étage.
nay qui, avant de s'inquiéter de la santé de la riche Il ne fallut guère plus d'une heure à Gervais pour
parente, lui demanda sj elle pouvait lui prêter un million. comprendre que la situation n'était pas aussi simple
La conversation devint générale, mais fut brusque- qu'il l'avait cru tout d'abord.
ment interrompue par un bruit infernal. Un garçonnet Dans cette agitation affolante de tous à propos de
d'une demi-douzaine d'années descendait l'escalier tout et de rien, notre délégué de la Mort vit aisément
5
- Comme détective ?
Arthur s'expliqua. Il habitait l'Amérique, le Colorado.
La planchette s'était et dirigeait là-bas une agence de police privée : , -Parker
de nouveau levée.
and Parker
Il donna les titres d'une dizaine d'affaires qui, assura
t-il, l'avaient rendu célèbre dans toute l'Amérique.
Pourquoi était-il venu en France .? Pour sauver son
frère 'd'un crime odieux.
Arthur tira de son portefeuille une dépêche qu'il mil
sous les yeux de Gervais. Ce télégramme était ainsi
rédigé :
• On m'assassine. Viens. •
Et c'était signé : • Ernest le prénom du grand-père.
Gervais eut un sourire sceptique,
— Monsieur, dit-il à son tour, j'ai l'impression que
vous avez été victime d'un mystificateur. Le grand-
père, votre frère, est bien en train de mourir, mais d'une
attaque reconnue par la Faculté.
Arthur haussa les épaules.
— Non, monsieur, riposta-t-il... D'abord le détective
privé que je suis n'a jamais été et ne sera jamais • mys-
tifié._ Ensuite... il se peut que mon frère soit terrassé
qu'il avait affaire à des étre personnels que le bonheur par une attaque, mais, la mort se faisant souvent
des autres intéressait peu. attendre après de tels accidents, il est plus que pro-
Seule, la ravissante petite Suzy faisait except' bable qu'on fait appel au poison pour précipiter les
à vette bien pénible règle. choses. Je vals plus loin. L'assassin est dans celte maison !
Les soins à -donner au moribond ne prirent guère de Gervais. sans trop savoir pourquoi, voulut défendre
temps à Gervais. I.e vieux docteur était passé. se conten- les Duvernay.
tant (te renouveler la formule de la potion, niais recoin- Personne, ici, n'est capable d'un crime, s'écria-t-il.
Mandant toutefois : Par exemple, le...
- Cinq gouttes tous les soirs, cinq gouttes seule- L'oncle d'Amérique lui coupa la parole :
nient. .attention, c'est du poison ! - - Qu'en savez-vous ?... La famille Duvernay est
Gervais était allé lui-même chez le pharmacien et, comme toutes les familles qui comprennent au moins
revenu avec le médicament avait immédiatement Sin voleur, un fou ou un assassin.
préparé la potion en faisant tomber cinq gouttes, mais — Eh bien! ricana Gervais, si vous trouvez un assas-
cinq gouttes seulement, dans le verre apporté par la sin dans votre famille...
troublante Lucette. —• Je le trouverai, riposta gravement Arthur... Jr
Ensuite, Il s'informa : le trouverai parce qu'il g est.
— Le grand-père dort-il toujours ? Gervais ne protesta plus. L oncle Arthur paraissait -
— Oui, monsieur, répondit la femme de chambre. si sin- de lui.
Le médecin préfère qu'il se réveille de lui-même. ' Notre infirmier se leva, consulta sa montre et
Gervais déposa le verre contenant la potion sur la annonça :
tablette d'un passe-plats, tablette qui, par une assez -- Le grand-père ne tardera fias à se réveiller, s'il
lorge ouverture, donnait. d'un côté, sur le couloir ne l'est déjà. Je vais lui monter sa potion.
continuant le living-rouie et, de l'autre, dans la salle Et, déjà, Gervais tendait la main pour saisir le verre
manger. posé sur la tablette du passe-plats.
Lurette les regarda faire et lui demanda : Toutefois, auparavant, Il proposa :
--- Vous ne vous mettez pas à table avec les autres, - - Voulez-vous que je vous annonce ?
monsieur Gervais ? Inutile. répondli Arthur... Ils me verront assez a
- - Non. répondit l'infirmier d'occasion... J'ai voulu temps... Je préfère commencer mon enquête sans eux...
!t- faire, mais, à la réflexion, je préfère en finir avec mon Voyons, où ai-je fourré nia pipe ?... Iton, dans mon par-
malade... D'ailleurs, je n'ai pas très faim... Et puis, dessus, que j'ai accroché dans l'entrée en arrivant...
ois patrons m'agacent... Je déjeunerai seul quand ils Drôle de maison, entre parenthèses... On y - pénètre
.oiront terminé. comme dans un moulin... Mais. apreeout, j'aime mieux
• ---- Comme je vous comprends, fit Lurette dans un cela... Vous permettez. je vais chercher de quoi fumer.
aspic que prolongea le plus engageant des sourires. Quand je ne fume pas. mes idées sont moins nettes.
l.a femme de chambre rentrée à l'ofli(.e, Gervais se Arthur sortit par la porte donnant sur l'antichambre.
"!cla dans un fauteuil profond et attendit. Comme, de nouveau. Gervais allait saisir le verre
Soudain, la porte donnant sur l'antichambre, puis sur contenant la potion. Joséphine parut au haut de lesta -
le jardin, s'ouvrit et, dans son encadrement, un homme lier qu'elle descendit en disant :
de forte corpulence, un sexagénaire bien conservé, — I.e vieux dort toujours comme une souche...
apparut. Reposez donc la potion... On le drogue beaucoup trop.
Le nouvel arrivant questionna en avançant dou- ce pauvre homme...
cement : Et la cuisinière disparu) vers l'office et la cuisine.
. — Vous n'êtes pas de la famille DuVernay, n'est-ce Gervais fut également d'avis d'attendre et s'éloigna
pas ? de la tablette.
— Non, répondit le macabre délégué, je suis l'infir- Arthur réapparaissait à ce moment-là. Il n'avait dC
mier du grand-père Duvernay et je m'appelle Gervais. pipe ni au bec, ni à la main.
— Très bien, reprit le visiteur... Et, sans doute, — Vous n'avez pas trouvé. votre pipe ? s'étonna
vous voulez savoir qui je suis, moi ? Gervais.
Gervais eut un geste vague signifiant : L'oncle dédaigna de répondre. Il s'approcha de la
— Si cela vous fait plaisir de me le dire... cheminée et s'y accouda.
I.e sexagénaire n'avait d'ailleurs pas attendu cette Gervais insista :
réponse. - - Je vous demandais si vous aviez trouvé votre
— Je suis le frère du mourant, déclarait-il... Oui, pipe.
son cadet, celui que tout le monde ici appelle : l'oncle La réponse vint cette fois, mais, chose étrange. elle
Arthur. ne sortit pas des 'tores du détective accoudé à la cheminée.
L'oncle regarda Gervais des pieds à la tète et donna La réponse fut fade dans le dos de Geroais :
l'impression que l'infirmier de son frère lui paraissait — Je l'ai trouvée.
sympathique. Notre infirmier se retourna brusquement et faillit
— Monsieur, continua-t-il en se laissant tomber s'écrouler de saisissement.
dans un fauteuil, il se peut queje vous demande de Un autre oncle Arthur. en tous points semblable au
m'aider... Oui, j'ai besoin dç quelqu'un dans la place premier, un oncle Arthur de même corpulence, du même
et tout porte à croire qu'en vous choisissant je ne serai âge, aux mêmes traits et vêtu d'un costume identique,
pas déçu... C'est comme détective que je viens ici. lui souriait, répétant :

o
encore repris leur dialogue que la petite Suzy sortait
de la salle a manger.
Elle aperçut Arthur et ne le reconnut pas tout de suite.
— Oh ! pardon, monsieur, vous demandez papa'?
Mais elle ne laissa pas le vieux détective lui répondre.
— Oh ! continua-t-elle, niais je vous reconnais,
maintenant... Caus étes l'oncle Arthur !...
— En effet... Qui te fait croire ?
— Votre grand portrait qui est dans la salle à manger.
Vous n'avez pas 'beaucoup changé depdis.
— Sais-tu que tu es très jolie. Bron enfant... Suzy
ou Ginette ?
— Suzy... Ginette est là aussi... Et mes parents. je'
vais lés appeler.
— Non, tout à l'heure... D'autant, je l'ai vu, que
ma sœur „Agathe est aussi des vôtres... Or, elle, j'ai
tout le temps de la revoir et de l'entendre débiter se,
rosseries...
L'oncle Arthur rallumait maintenant sa pipe et Ger-
vais en profilait Pour demander à voix basse, itla jeune
Tille :
- 'ne question, mademoiselle... Pendant tout le
repas. êtes-vous restée assise tout le temps à table 7
— Mais non.

— Oui, cher monsieur, j'ai trouvé ma pipe... Voie: Suzy se mit à rire. Quelle drôle de question on lui
voyez bien que je la bourre. posait liV! Mais Maurice l'appelait au dehors et elle
Gervais sautilla sur place, regardant tantôt à droite, s'en fut sans plus s'occuper de l'oncle Arthur puisque
tantôt à gauche. celui-ci n'était pas pressé de revoir les autres membres
Il était bien entre deux oncles Arthur, dont l'un avait de la famille.
l'air d'être reflété par un immense miroir. L'a miroir L'émotion du précédent incident n'était pas encore
qui n'existait pas. calmée (en ce qui concernait Gervais surtout) qu'un
Le détective yankee ne voulut pas s'amuser top autre lui succédait, en tous points semblable.
longuement de la surprise de Gervais. Il la fit cesser Oui, la planchette du passe-plats s'était de nouveau
par cette explication : levée et une autre main tune main d'homme, cette foi,.
— Ce monsieur qui se trouve près de la cheminée. alors que la première était une main de femme) versait
ce sosie parfait, est Arthur II, mon associé... Inutile derechef quelques gouttes de liquide dans la potion
que je vous le présente avec plus de correction, car - - Jamais deux sans trois. Vous allez voir• ricana
j'ai horreur du temps perdu... D'ailleurs, il a autre Arthur.
chose à taire ici que de converse. avec vous... Et puis, Cette fois, l'oncle-détective avait cru plaisanter.
il ne le pourrait pas : il est sourd-muet... Je ne corres- Point • et ce fut à lui d'être surpris à son tour.
ponds avec lui que par signes. .4 deux minutes d'intervalle, l'incident du verre et des
Arthur sourit et son double l'iniita. gouttes versées dans la potion se renouvelait pour In
— Vous comprenez tout l'intérêt qu'il y. a. pour troisième lois !
mes enquêtes, à étre deuk ? poursuivit le rée:l Arthur...
Ainsi, on me voit à deux endroits en même temps...
Rien n'affole plus les coupables... Sur te, n'interrompons L'oncle Arthur, les mains derrière le dos, se promenait
pas le travail de mon collaborateur qui, j'en suis certain, de long en large dans le living-room.
a déjà pris d'utiles repères et de précieuses indications Le repas terminé, les- membres de la famille Duvernay
dans la maison. Ayant fait, en outre, des études en étaient revenus dans cette pièce, retrouvant avec plu,
médecine, il va, savoir très vite avec quel poison on ou moins de phiisir le fameux oncle d'Amérique.
assassine mon frère. Celui-ci d'ailleurs avait coupé court à toute effusion.
Les deux Arthur échangèrent quelques signes à la fût-elle sincère nu feinte.
façon des sourds-muets et le double de l'oncle grimpa Sans tarder, il commençait une enquête à l'esbroufe,
d'un pas tranquille l'escalier du living-room pour dis- méthode qui lui avait souvent réussi.
paraître dans le couloir du premier étage. - - Il y a un assassin dans la maison• venait-il de
L'oncle Arthur. de son côté. s'était approché de la déclarer. C'est pour le trouver que je suis venu. J'attends
porte donnant sur la salle à manger et avait regardé vos explications, car je soupçonne tout le lllll ode._ et
par le trou de la serrure. personne.
lion, fit-il, en revenant, ils déjeunent toujours. Les Duvernay s'étaient regardés, ahuris et inquiets.
Grand bien leur fasse... Je vais m'installer ici, et, quand Seule Suzy la petite jeune fille a l'âme pure. cette
ils auront fini, ils inc trouveront dans ce salon. blonde innocente, qui vivait dans la lumière et ignorait
— Et moi, fit à son tour Gervais, je vais monter la
potion à votre pauvre frère.
Notre pseudo-infirmier allait de nouveau saisir le
verre, quand il poussa un cri étouffé. disant à mi-
voix :
—. Oh ! monsieur Arthur. regardez...
La planchette qui fermait le passe-plate s'était levée
el une main, venant de la salle à manger, une main armée
d'un flacon minuscule, laissait tomber quelques gouttes
d'un liquide brun dans le verre..
— Quand je vous assurais qu'on l'assassine, fit
tranquillement l'oncle d'Amérique... Mais, dites-moi,
- se passe-plats donne-t-il directement sur la salle à
manger ?... Je ne voudrais pas encore me montrer,
donner l'éveil...
— Non, répondit Gervais, il donne sur une toute
petite pièce précédant ladite salle à manger.
Gervais, disant ces mots, avait ouvert la porte la plus
rapprochée de l'ouverture, maintenant refermée, du
passe-plats. - I 'n lexhirnent
Arthur, qui se trouvait déjà auprès de lui, regarda : en (soeur dr Seedl
la petite pièce en question était vide.
Les deux hommes. devenus songeurs, n'avaient pas
Le Dirretem,Chfeelet Edmond Orumnonmyr. 7
le mal, s'était tout d'abord amusée des grandes phrases Duvernay et la soeur de Suzy s'accusaient, à leur
mélodramatiques de l'oncle, phrases qu'elle prenait, tour, d'avoir versé le terrible poison dans la potion.
sans doute; pour une plaisanterie yankee d'une genre La première pour vivre sa vie, aimer, être aimée..
inconnu en France. Elle n'ignorait pas, d'ailleurs, que pouvoir fuir son mari déséquilibré... Et Ginette pour
le jeu du • détective • était en faveur au Colorado. que le grand-père mourût en état de grâce sans avoir
Finalement, elle rejoignit le cher Maurice pour aller été souillé par des idées malsaines, nées de la présence
passer, en sa compagnie, quelques heures au cinéma. de Lucette.
l.a tante Agathe, qui ne pouvait logiquement être U est vrai qu'à propos de Ginette ladite Lucette
soupçonnée, tVait suivi de peu Suzy pour aller refaire intervenait pour se venger de la soeur bien pensante
ses bagages dans sa chambre et fuir, vers Biarritz, et remettre quelque peu les choses au point :
cette bande de toqués •. — Oui, Ginette a voulu se débarrasser du grand-
Elle était sortie en lançant à son frère : père, mais tout simplement parce qu'elle est amoureuse
— Si tu peux démasquer l'assassin, tu m'enverras de Maurice et qu'avec l'héritage elle pensait supplanter
un faire-part... Bonsoir Ah I j'étais si tranquille à sa soeur dans le coeur de mon aman1,1
Biarritz ! Ginette était touchée, bien toucha... Elle ne niait
Gervais, qui assistait à cette pénible scène, crut, un plus, mais accusait à son tour Maurice d'avoir voulu
moment, que le coupable se dénonçait. En effet, ce l'héritage grâce à son mariage avec Suzy, non pour
taqué de Duvernay déclarait soudain : rendre cette dernière heureuse, mais faire le bonheur
-- Eh bien ! oui, quoi, je l'al tué... Et j'en tuerai de sa mattresse Lucette.
d'autres encore de la même façon... Le poison, c'est Gervais écoutait, regardait, horrifié...
moins dégoûtant que le couteau ou l'arme à feu... Voilà donc ce qu'était cette famille Duvernay...
Mais Duvernay n'entendait parler que de ses vic- Rien que de la boue... Seule, une fleur émergeait de
times à quatre pattes, les lapins qui servaient à ses cette boue, la candide, la pure Suzy.
expériences et qu'il achevait quand il les voyait à moitié La pauvre enfant, que deviendrait-elle quand elle
morts. saurait que Maurice était un ignoble individu ?...
L'oncle Arthur souriait à présent, entrevoyant un •Mais elle en mourrait, la malheureuse enfant I Mou-
prochain triomphe. rir ?... Mais oui, c'était une solution... Mourir... Ainsi
— L'assassin, ou les assassins, commença-t-il... elle disparattrait dans son rêve, avec ses grandes illu-
Un cri l'empêcha de continuer. sions. Et, sans songer à la conséquence du cri qu'Il
La cuisinière Joséphine venait d'entrer et de s'écrou- poussait, Gervais lança d'une voix forte :
ler sur les premières marches de l'escalier en éclatant en — Je veux que... I
sanglots. Il n'acheva pas. Un cri lui coupa la parole. Un cri
Quand elle eut repris son souffle, on l'entendit dire angoissé, terrifiant, un cri poussé par Suzy qui venait
angoissée : de rouler sous un camion I
— C'est moi qui ai voulu tuer Monsieur ! . . . . . . . ............ .
' Elle ? La cuisinière Joséphine ?... Mais, pourquoi ?
Par amour pour la petite Suzy, qu'elle avait élevée Assis au milieu du salon vide, les coudes sur les
et qu'elle voulait heureuse. Hériterait-elle du grand- genoux, la tête dans les mains, les yeux fixes, Gervais
père ?... Oui, mais si le vieillard rendait rapidement son écoutait la Mort, qui lui disait de sa voix lugubre :
âme à Dieu, car il y avait d'autres convoitises autour du — Vous avez eu raison, monsieur Gervais. Vous
moribond... Grâce à Joséphine, le mourant venait de n'auriez pas pu supporter sa souffrance. Grâce à vous,
faire un testament en faveur de Suzy... Suzy est partie sans rien savoir.
• Un testament en faveur de Suzy ? Mais tous les autres Et la Mort conclut, tandis que Gervais approhvalt
personnages en avaient un également et le montraient doucement de la tête :
maintenant : Duvernay, Ginette... — Elle' était trop claire pour vivre !
Et c'était à présent comme une folie collective d'aveux
spontanés. FIN

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