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Avril 2015 // N°78

Un monde fragile
PAR DIDIER SAINT-GEORGES
Membre du comité d'investissement
Managing director

Dès l’annonce par Ben Bernanke, alors soutenus tant que la foi demeurera, tan- l’année, de taux d’intérêt historiquement
Président de la Fed, du premier assou- dis que leur fragilité ira en augmentant. bas, de banques recapitalisées, et du filet
plissement quantitatif (« quantitative de sécurité apporté par la BCE, la crois-
easing ») le 19 mars 2009, la question L’illusion monétaire sance de la zone euro atteindra pénible-
de fond était clairement posée : jusqu’à ment 1,5% cette année. Et Mario Draghi
quel point la nécessité pour une Banque Aux Etats-Unis, le débat sur l’efficacité lui-même reconnaissait récemment que
centrale de traiter le risque économique du quantitative easing n’est toujours pas le taux de chômage en zone euro n’aura
par une politique de reflation monétaire tranché. Le pire, qui était possible début probablement guère baissé dans 18 mois.
non-conventionnelle justifie de mettre 2009, a incontestablement été
en risque, en contrepartie, la stabilité évité, et par le truchement de
du système financier par la création de la baisse des taux hypothé-
bulles dans certaines classes d’actifs. caires, les prix immobiliers se
Probablement rassuré par l’expérience sont redressés. Mais après
américaine, jusqu’à présent plutôt réus- 4000 milliards d’obligations
sie, la Banque centrale européenne ré- achetés par la Fed, l’indice
pond aujourd’hui sans ambiguïté à cette S&P a gagné 170% tandis
question : la priorité absolue est donnée que le rythme de la crois-
au traitement du risque économique et sance économique ne dé-
le risque pour le système financier sera passe toujours pas 2,5% l’an,
traité plus tard, si besoin. Le comporte- et le revenu annuel médian
ment enthousiaste des marchés depuis des ménages américains est
le début de l’année confirme que les in- aujourd’hui toujours 9% plus
bas qu’il n’était en 1999. Le
« rendement économique » du
« L’apport massif quantitative easing est faible
© Thinkstock
parce que l’effet richesse po-
de liquidités sitif pour les banques et les épargnants Un monde inondé de liquidités
supplémentaires place les plus fortunés ne suffit pas à compen-
ser la contrainte du désendettement sur Le paradoxe, à l’origine à la fois de la
les marchés dans la la consommation et l’investissement. Vi- hausse des marchés et d’une fragilité
position d’une piscine siblement, comme au Japon à partir des
années 1990, la crise financière a non
croissante du système financier, est que
l’absence de résultat justifie pour les
à débordement. » seulement détruit de la production mais Banques centrales de poursuivre autant
aussi de la croissance potentielle. En que de besoin le soutien monétaire, sous
zone euro, où l’exposition des consomma- toutes ses formes. Mario Draghi s’est
vestisseurs ont dans leur grande majorité teurs aux marchés financiers est encore engagé sur l’achat de 60 milliards d’eu-
fait le choix d’un pari pascalien : dans le bien plus faible qu’aux Etats-Unis, on voit ros d’actifs par mois jusqu’en septembre
doute, autant avoir foi dans l’efficacité de mal comment le quantitative easing pour- 2016, et Janet Yellen reconnait que la
l’action de Mario Draghi, puisque qu’elle rait avoir un impact majeur sur l’économie. menace déflationniste et la fragilité de
est au moins dans l’immédiat favorable Ainsi, avec la conjonction inespérée d’un l’économie américaine ne permettent
aux marchés. Ce pari augure de marchés euro en baisse de 25% depuis le début de pas une normalisation rapide de la po-
litique monétaire de la Fed. La Banque en empêchant de réagir efficacement à un surtout indiens, nourrit l’optimisme des
du Japon va devoir continuer de lutter évènement adverse, est un facteur décisif investisseurs en actions. Et l’attitude des
contre un taux d’inflation dans l’archipel de fragilité. Or cette faiblesse caractérise banquiers centraux, au premier rang des-
retombé à -0,2% en février, et la Banque à maints égards la situation actuelle. Ainsi, quels Mario Draghi, leur assure que les
populaire de Chine va devoir accélérer les politiques monétaires extra-accommo- taux d’intérêt resteront néanmoins très
son assouplissement monétaire pour ten- dantes pratiquées par les grandes Banques bas dans ce contexte. Souhaiter profiter
ter de stabiliser le rythme de croissance centrales ne leur laisseront plus guère de de ce meilleur des mondes est légitime,
de l’économie chinoise. Les marchés, marge de manœuvre supplémentaire pour et nous ne nous en privons pas. Mais
inondés de liquidités, vont donc continuer amortir le prochain ralentissement cycli- c’est à la condition de conserver d’au-
de profiter de cette aubaine. Quand plus que. De même, le niveau d’endettement tant plus de flexibilité dans sa gestion
de 2000 milliards de dollars d’obligations des gouvernements retire à ces derniers que le système financier en a beaucoup
dans le monde offrent aujourd’hui un ren- toute flexibilité budgétaire. Par ailleurs, la perdu. Comme nous l’indiquions dans
dement négatif, dont 80% provenant de confiance accordée à l’efficacité de la BCE notre Note de janvier (« Etre prêt plutôt
la zone euro, l’apport massif de liquidités atteint des sommets qui rendraient une que prédire »), il est vital dans un monde
supplémentaires place les marchés dans éventuelle erreur de communication ou de fragilisé d’être en position de faire varier
politique monétaire très coûteuse pour les très rapidement son niveau d’exposition
marchés (en attendant cette confiance est aux actions, aux taux d’intérêt et aux de-
« Il est essentiel de autoréalisatrice en ce sens qu’elle nourrit vises, ainsi que de faire la part belle aux
la hausse des marchés, qui elle-même est investissements dans des entreprises
conserver d’autant interprétée comme la preuve que le quan- elles-mêmes flexibles, c’est à dire peu
plus de flexibilité titative easing « marche »). La politique de
reflation monétaire menée par la BCE est
endettées et génératrices de trésorerie.

dans sa gestion que le de plus en plus inadaptée à la situation de


système financier en surplus croissants de l’Allemagne. Enfin,
la baisse des anticipations d’inflation qui
Achevé de rédiger le 31/03/2015

a beaucoup perdu. » a permis aux banques centrales une po-


litique de taux zéro relativement sereine
sera bientôt limitée par l’affermissement
la position d’une piscine à débordement : cyclique du prix de l’énergie. En accumu-
par effet d’éviction des investisseurs, le lant les déséquilibres, le système financier
prix très élevé atteint par les obligations a ainsi beaucoup perdu de sa flexibilité. Si
« sans risque » se propage progressive- cette perte n’est en soi nullement annon-
ment à l’ensemble des classes d’actifs. ciatrice d’un accident à venir, elle en aug-
Le gonflement de la prime de risque (sur- mente considérablement les enjeux.
croit de « rendement bénéficiaire » offert
par les actions au-dessus des emprunts L’impératif de flexibilité
d’Etat) que provoque l’écrasement des
rendements obligataires permet ainsi de L’embellie économique globale qu’on
justifier des valorisations élevées des mar- pressent depuis quelques mois, alimen-
chés actions. A titre d’exemple, en zone tée par les redressements européens et
euro les multiples de résultats atteignent
aujourd’hui 16x les résultats de l’année en Multiple des résultats de l'indice Eurostoxx sur 10 ans
cours. C’est non seulement un doublement
par rapport aux multiples qui prévalaient il
y a trois ans, mais c’est aussi un niveau
qui se situe 4 écarts-types au-dessus de
la moyenne des dix dernières années
(autrement dit près de 40% au-dessus de
cette moyenne). Au final, en s’engageant
à effectuer des achats d’obligations mas-
sifs (2,5 fois les émissions nettes d’obli-
gations souveraines, quand les QE1 et
QE2 de Ben Bernanke ne représentaient
en moyenne que la moitié des émissions
nettes du Trésor américain) et tardifs (les
taux d’intérêt obligataires sont déjà très
bas), la BCE génère des distorsions sans
précédent dans le prix des actifs financiers.

Une situation fragile

Dans son ouvrage Antifragile, Nassim Taleb


souligne combien le manque de flexibilité,

Carmignac's Note - Avril 2015


STRATéGIE D'INVESTISSEMENT

LES DEVISES LES ACTIONS FONDS de


fonds
Forte volatilité sur Les marchés ac-
les marchés de tions ont connu une Nos fonds de fonds
devises au cours correction en mars ont enregistré une
du mois avec un accompagnée par performance posi-
euro oscillant entre une remontée de la tive sur le mois.
1,12 et 1,05 contre le dollar américain. volatilité. Seuls les marchés de la zone Nous avons légèrement réduit nos taux
L’ampleur de ces mouvements a été mise euro et du Japon ont terminé le mois en d’exposition par rapport à leur maximum
à profit pour rééquilibrer notre allocation territoire solidement positif, sur fond de pour accompagner la correction interve-
devises en réduisant notre pondération soutien continu de la part de leurs nue sur les marchés actions avant de les
sur le dollar pour la porter à un niveau banques centrales respectives. Notre po- remonter proches des maximums autori-
intermédiaire. Les devises émergentes sitionnement continue de faire la part sés en fin de mois. Nous maintenons, par
les plus fragiles continuent quant à elles belle aux valeurs dont les perspectives ailleurs, un positionnement constructif
de se déprécier. C’est notamment le cas bénéficiaires reposent sur leurs qualités dans nos choix sectoriels et géogra-
du real brésilien sur lequel notre couver- intrinsèques plus que sur une améliora- phiques.
ture de change a pleinement profité de la tion de l’environnement économique.
dépréciation de la monnaie brésilienne de Cette approche traduit notre prudence
près de 10% sur le mois. quant à la montée des déséquilibres éco-
nomiques à moyen terme. Nous avons,
ainsi, participé à l’introduction en bourse
LES TAUX de l’opérateur aéroportuaire espagnol Ae-
na dont le solide positionnement concur-
rentiel et le potentiel d’optimisation de la
La mise en œuvre base de coûts devraient délivrer une belle
du programme croissance des résultats indépendam-
d’assouplissement ment du cycle économique.
quantitatif de la
BCE s’est fait sen-
tir de façon plus prononcée sur les taux LES matières
longs allemands compte tenu de la rare-
té du sous-jacent. Avec des taux à 10
premières
ans autour des 0,20%, nous avons initié
une position vendeuse sur ce segment Carmignac Portfo-
dont la valorisation est désormais ex- lio Commodities a
trême. Si les flux peuvent expliquer ce sensiblement sur-
comportement des taux allemands à performé son indi-
court terme, ni l’état de l’économie alle- cateur de référence en mars malgré les
mande - qui bénéficie au premier chef de fortes variations du prix du baril sur le
l’affaiblissement de l’euro -, ni les pers- mois. Notre positionnement équilibré sur
pectives d’inflation - soutenues par l’en- des valeurs capables d’offrir un couple
gagement sans faille de la BCE -, ne rendement-risque dans différents scéna-
permettent de justifier ce niveau à moyen rios de prix sur les matières premières
terme. En parallèle nous continuons de continue ainsi de porter ses fruits. Notre
prendre nos profits de façon disciplinée recherche de sociétés énergétiques dé-
sur les taux périphériques européens. cotées pouvant bénéficier d’une remon-
Ces derniers sont restés relativement tée graduelle des prix du pétrole nous a
stables sur le mois. Nous avons, enfin, conduit à initier une position sur la socié-
initié une petite position sur des produits té de services pétroliers Halliburton.
de titrisation offrant des rendements at- Nous restons plus circonspects sur les
tractifs et bénéficiant d’une liquidité grandes sociétés pétrolières intégrées
améliorée par le programme d’achats de dans leur ensemble car leur valorisation
la BCE. intègre déjà un niveau de prix du pétrole
sensiblement au-dessus des niveaux ac-
tuels.
PERFORMANCES DES FONDS

Valeur liquidative YTD 1 an 3 ans 5 ans

Carmignac Investissement A EUR acc 1 297,40 16,55% 33,32% 50,13% 61,29%


MSCI AC World NR (Eur) 15,27% 35,28% 65,40% 82,22%
Carmignac Portfolio Grande Europe A EUR acc 190,78 10,04% 19,58% 40,52% 45,67%
Stoxx 600 NR (Eur) 16,67% 22,08% 60,45% 60,30%
Carmignac Euro-Entrepreneurs A EUR acc 304,61 15,79% 23,23% 67,76% 87,81%
Stoxx 200 Small NR NR (Eur) 16,54% 16,02% 65,42% 72,80%
Carmignac Emergents A EUR acc 878,63 17,16% 26,64% 20,85% 46,80%
MSCI Emerging Markets NR (Eur) 15,19% 28,89% 22,37% 28,16%
Carmignac Portfolio Emerging Discovery A EUR acc 1 340,53 10,21% 22,99% 27,45% 39,38%
50% MSCI EM SmallCaps NR (Eur) + 50% MSCI EM MidCaps NR (Eur) 16,27% 28,69% 28,70% 31,07%
Carmignac Portfolio Commodities A EUR acc 308,84 7,70% 14,01% -4,43% -3,84%
Indicateur Carmignac Commodities* 9,22% 6,93% 1,54% 2,94%
Carmignac Patrimoine A EUR acc 698,89 12,63% 23,51% 31,50% 39,78%
50% MSCI AC World NR (Eur) + 50% Citigroup WGBI (Eur) 12,55% 28,15% 40,57% 59,00%
Carmignac Portfolio Emerging Patrimoine A EUR acc 114,91 12,59% 19,80% 10,49% -
50% MSCI EM NR (Eur) + 50% JP Morgan GBI EM Global diversified 11,70% 21,31% 16,23% -
Carmignac Euro-Patrimoine A EUR acc 319,50 2,54% 6,46% 8,61% 21,24%
50% EuroStoxx 50 NR (Eur) + 50% Eonia Capitalisé 8,91% 10,02% 27,32% 18,51%
Carmignac Investissement Latitude A EUR acc 292,31 10,39% 22,50% 35,26% 42,76%
MSCI AC World NR (Eur) 15,27% 35,28% 65,40% 82,22%
Carmignac Profil Réactif 100 A EUR acc 215,22 12,94% 25,46% 34,02% 42,44%
MSCI AC World NR (Eur) 15,27% 35,28% 65,40% 82,22%
Carmignac Profil Réactif 75 A EUR acc 234,50 11,21% 21,69% 27,86% 34,98%
75% MSCI AC World NR (Eur) + 25% Citigroup WGBI (Eur) 13,91% 31,68% 52,89% 70,73%
Carmignac Profil Réactif 50 A EUR acc 189,58 8,65% 16,44% 18,69% 25,73%
50% MSCI AC World NR (Eur) + 50% Citigroup WGBI (Eur) 12,55% 28,15% 40,82% 59,00%
Carmignac Portfolio Global Bond A EUR acc 1 385,62 11,91% 22,99% 32,19% 47,29%
JP Morgan Global Government Bond (Eur) 10,66% 23,54% 19,69% 38,99%
Carmignac Securité A EUR acc 1 725,10 1,70% 2,31% 9,25% 14,31%
Euro MTS 1-3 ans 0,52% 1,59% 7,23% 9,10%
Carmignac Portfolio Capital Plus A EUR acc 1 201,89 3,27% 4,04% 12,28% 17,72%
Eonia Capitalisé -0,01% 0,04% 0,32% 1,66%
Carmignac Court Terme A EUR acc 3 767,87 0,01% 0,14% 0,58% 2,08%
Eonia Capitalisé -0,01% 0,04% 0,32% 1,66%
* 45% MSCI ACWF Oil and Gaz NR (Eur), 5% MSCI ACWF Energy Equipment NR (Eur), 40% MSCI ACWF Metal and Mining NR (Eur), 5% MSCI ACWF Paper and
Forest NR (Eur) et 5% MSCI ACWI Chemicals NR (Eur) depuis le 01/07/2013. Rebalancé annuellement depuis le 01/01/2012.

Source : Carmignac Gestion au 31/03/2015.


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