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Étudiante 

: TRAN Ha Linh

LA SÉPARATION DES ÉGLISES ET DE L’ÉTAT

La France a été le premier État moderne à inscrire la séparation de l’église et de l’État


dans le marbre de sa constitution. La laïcité à la française reste encore de nos jours
un exemple quasi unique dans le monde. Promulguée le 9 décembre 1905, la loi
concernant la séparation des Églises et de l’État est l’aboutissement d’un long
processus de laïcisation et de sécularisation engagé depuis la Révolution française.
Elle proclame la liberté de conscience, garantit le libre exercice des cultes et met en
place un nouveau régime des cultes. Comment la loi de la séparation des Églises et
de l’État a-t-elle été élaborée ?

Premièrement, avant parler de cette loi, je voudrais vous présenter deux événements
historiques qui l’ont influencée : la Convention du 21 février 1795 et le Concordat de
1801. Deuxièmement, je vous donnerai des informations sur l’élaboration de la loi de
1905. Ensuite, vous pourrez découvrir des conséquences du régime de séparation.
Enfin, j’aimerais vous présenter quelques brèves informations sur un des symboles de
la baille pour la laïcité : Émile Combes.

1. Deux événements historiques

21 février 1795: une première séparation des Églises et de l’État:


Dès le début de la Révolution, l’Assemblée constituante décrète la nationalisation des
biens du clergé et adopte la « Constitution civile du Clergé ». Celle-ci abroge le
Concordat conclu en 1516 entre le roi François 1 er et la papauté. En 1792, le
mouvement de « déchristianisation » est pleinement enclenché. Et le calendrier
républicain est décrété : la France ne prend plus comme point de départ la naissance
du Christ, mais celle de la République, le 22 septembre 1792, dite de « l’An I de la
République ». Après la chute de Robespierre et dans l’espoir de réconcilier les
Français entre eux, un décret de la Convention du 21 février 1795 rétablit la liberté
des cultes, et entérine la séparation des Églises et de l’État, stipulant : « La
République ne salarie aucun culte. »
Concordat de 1801: le début de l’ère moderne
La paix civile et religieuse ne survient véritablement que sous le Consulat, avec la
signature du Concordat, le 15 juillet 1801. Conclu entre Napoléon Bonaparte, Premier
consul de la République français, et le pape Pie VII, le Concordat de 1801 restaure le
lien entre le Saint-Siège et la France. Mais le catholicisme n’est pas la religion
officielle de l’État napoléonien, fondé sur la neutralité et la pluralité des cultes. Aussi le
Concordat de 1801 rompt-il le lien séculaire de l’Église et le la Monarchie, et marque-t-
il le début de l’ère moderne, caractérisée par le fait que le Saint-Siège est désormais
amené à signer des traités avec des États non catholiques.
Sous le Concordat de 1801, l’État reconnaissait quatre cultes (catholique, réformé,
luthérien, israélite) qui étaient organisés dans le cadre du droit public. En A ce
moment-là, l’État payait les ministres du culte et participait à leur désignation, ainsi
qu’à la détermination des circonscriptions religieuses.

2. L'élaboration de la loi
La première proposition de loi de séparation des Églises et de l’État remonte à 1902.
Chez les protestants, l’unanimité ne règne pas sur la séparation : les luthériens sont
plutôt hostiles ainsi que les réformés libéraux tandis que les réformés orthodoxes, plus
proches du « bloc des gauches », sont plutôt favorables ou en tout cas résignés.

En 1903, sous le ministère d’Émile Combes, il est constitué une commission « relative
à la séparation des Églises et de l’État et à la dénonciation du Concordat ». Elle est
présidée par un protestant ancien pasteur, Ferdinand Buisson. Aristide Briand en est
le rapporteur.

D’autres protestants contribuent activement à l’élaboration de la loi : Eugène


Réveillaud, député radical, Raoul Allier, Francis de Pressensé et surtout Louis Méjan
qui participe à la rédaction de l’avant-projet aux côtés d’Aristide Briand.

Cela leur permet d’influencer la rédaction pour qu’elle autorise les unions
d’associations cultuelles au niveau national, ce qui était interdit dans le projet présenté
par Émile Combes en 1904. Après la chute du ministère Combes au début 1905,
Maurice Rouvier, président du Conseil des ministres, présente un nouveau projet qui
rejoint celui de la commission.

Les débats sur la loi sont particulièrement longs et passionnés (48 séances entre
mars et juillet 1905) : les députés opposés à la séparation et ceux en faveur d’une
séparation très contraignante envers les Églises s’affrontent. Au Sénat, les débats
prennent 21 séances entre novembre et début décembre 1905.
-> En 1905: La République devient laïque
Le vote de la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation de l’église et de l’État constitue
alors un tournant majeur, puisqu’elle met fin au régime concordataire en vigueur
depuis un peu plus d’un siècle.

Si la politique de la laïcisation est amorcée depuis la « guerre scolaire » des années


1880, la loi de 1905 en est le point d’orgue. Le 3 juillet, le député républicain-socialiste
Aristide Briand, rapporteur de la loi et orateur hors pair, réussit à la faire adopter à la
Chambre des députés par 341 voix contre 233 ; et le 6 décembre 1905 par 181 voix
pour contre 102 au Sénat.
Promulguée le 9 décembre 1905, la loi considérée comme un des grands textes de la
IIIe République, tient pour l’essentiel dans ses deux premiers articles :
 Article 1 : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre
exercice des cultes »
 Article 2 : « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun
culte. »
Bref, avec la loi du 9 décembre 1905, la France devient un État laïc.
Des exceptions à la laïcité  :

Sous domination allemande lors de l’adoption de la loi de 1905, l’Alsace et la Moselle


vivent encore aujourd’hui sous le régime concordataire de 1801. Les prêtres, pasteurs
et rabbins y sont rémunérés par l’État.
Outre-mer, en Guyane, Polynésie française, Wallis et Futuna, Saint Pierre et
Miquelon, Nouvelle Calédonie et Mayotte, s’appliquent les décrets Mandel de 1939,
qui permettent à toutes les sensibilités religieuses, en raison de la non-application de
la loi de 1905, de bénéficier d’une aide publique.

3. Les conséquences du régime de séparation :

Le régime de séparation a plusieurs conséquences, prévues par la loi :

 Le budget des cultes est supprimé, à l’exception de ceux relatifs


aux aumôneries des lycées, des écoles, des hospices, des prisons, etc. Les
aumôneries sont autorisées pour permettre le libre exercice des cultes dans les
lieux publics fermés ;
 Les établissements publics du culte, jusque-là chargés de la gestion des cultes,
sont remplacés par des associations cultuelles, créées par loi. Ces
associations doivent avoir pour unique objet l’exercice d’un culte. Elles ne
peuvent pas recevoir de subventions publiques. Leurs ressources doivent
provenir de l’argent des cotisations d’adhésion, des quêtes et des collectes pour
l’exercice du culte. L’Église catholique refuse toutefois de constituer ces
associations, qui ne reconnaissent pas l’autorité de l’évêque. En 1923 un
compromis est trouvé et des associations diocésaines, placées sous la
présidence des évêques, sont constituées ;

 Les règles concernant le régime de propriété des édifices cultuels sont


redéfinies. Restent propriétés de l’État, des départements ou des communes,
les édifices religieux qu’ils possédaient avant la loi (notamment ceux
nationalisés en 1789). Les édifices religieux qui appartiennent aux
établissements publics du culte sont, pour leur part, attribués aux associations
cultuelles. Toutefois, devant le refus de l’Église catholique de créer de telles
associations, une loi de 1907 prévoit que tous les édifices catholiques
deviennent propriété publique. Ils sont mis à la disposition des fidèles et des
ministres du culte. Quant aux édifices postérieurs à la loi de 1905, ils sont la
propriété des associations cultuelles ou diocésaines qui les ont construits.

La loi traite également de la police des cultes. Elle proscrit notamment la tenue de
réunions politiques dans les locaux cultuels. Elle interdit, par ailleurs, "d’élever ou
d’apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en
quelque emplacement public que ce soit", sauf dans les cimetières et les musées. Il
s’agit d’affirmer la neutralité idéologique de l’État.

Avec la loi de 1905, un nouvel équilibre est institué entre l’État, la société et les
religions. La laïcité, dont il n’est pas fait explicitement référence dans la loi, a été
depuis confortée. Elle est devenue un principe à valeur constitutionnelle avec les
Constitutions du 27 octobre 1946 (IVe République) et du 4 octobre 1958 (Ve
République).

Depuis 2011, le 9 décembre, jour anniversaire de la promulgation de la loi, est


consacré "journée nationale de la laïcité".

Encore aujourd’hui, au sein de l’Union européenne, la loi de 1905 constitue une


particularité française. Dans les autres pays, les Églises, même si elles ne peuvent
intervenir dans le domaine de l’État, ne sont pas strictement confinées dans le
domaine cultuel : elles peuvent exercer des activités sociales.

4. En savoir plus
C’est Émile Combes (1835-1921) qui sera un des symboles de la bataille pour la
laïcité. Né dans une famille modeste du Tarn, médecin installé en Charente, radical-
socialiste, Franc-maçon, il est le président du groupe de la « Gauche
Démocratique » au Sénat et ministre de l’instruction publique et des cultes en 1895.
En tant que Président du conseil (Premier ministre) de juin 1902 à janvier 1905, il va
lancer une vaste campagne anticléricale : fermeture de 3000 écoles
congrégationnistes en juillet 1902, rupture des relations diplomatiques avec le Vatican
en mai 1904 et interdiction totale d’enseigner aux congrégations en juillet 1904.

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