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Pierre Cochat
Département de pédiatrie & Inserm U499, hôpital Edouard-Herriot & université Claude-Bernard, Lyon
pierre.cochat@chu-lyon.fr
Limites de la question
INTRODUCTION
L’infection urinaire (IU) affecte 1% des enfants de moins de 2 ans, avec une prédominance masculine durant les
L’urine et l’arbre urinaire sont normalement stériles et la colonisation microbienne suit le chemin inverse de
l’écoulement normal de l’urine : périnée – urètre – vessie – uretère – bassinet - rein. Les trois premières étapes
donnent lieu à une IU basse (cystite), les trois dernières à une IU haute (pyélonéphrite).
o Chez le nourrisson (propreté non acquise) : couches, immaturité vésicale, prépuce étroit,
exonérations fréquentes ;
o Chez l’enfant (propreté acquise) : trouble mictionnel, vulvite, rétention stercorale, oxyurose,
hygiène.
- Toute pyélonéphrite aiguë (PNA) est a priori le fait d’un reflux vésico-urétéro-rénal (RVU), permanent
ou intermittent ; ainsi, le RVU ne crée pas la PNA, mais véhicule l’urine infectée jusqu’au rein.
- La PNA correspond à une infection du bassinet (« pyélo- ») et du parenchyme rénal (« -néphrite »),
répondant ainsi à une contamination ascendante qui exclut les exceptionnelles infections
L’infection peut être favorisée par un sondage vésical, un terrain immunodéprimé, une dérivation urinaire.
FAQ
Le recueil d’urines s’effectue après toilette locale, soit par recueil du milieu de jet chez l’enfant qui contrôle sa
miction, soit par recueil d’urines dans un collecteur stérile changé toutes les 30 min chez le nourrisson et le jeune
enfant (voire par ponction sus-pubienne). Les conditions de réalisation de l’examen doivent être connues lors de
La positivité de l’examen à la bandelette réactive confirme théoriquement le diagnostic clinique, mais la valeur
prédictive positive de « leucocytes » et « nitrites » n’est que de 70%. La notion de 2 bandelettes positives justifie
la mise en route de l’antibiothérapie probabiliste. La négativité autorise à se passer d’ECBU (valeur prédictive
Chaque fois qu’un traitement est entrepris, l’ECBU est indispensable pour confirmer le diagnostic et adapter
Le contrôle de l’ECBU sous traitement et après arrêt du traitement n’est pas justifié.
Autres examens
Une échographie de l’appareil urinaire, vessie pleine, doit toujours être réalisée lors d’une première IU (cystite ou
Les marqueurs de l’inflammation sont augmentés en cas de PNA et contribuent à l’argumentation diagnostique.
En pratique, c’est le dosage de la protéine C réactive (CRP) qui est le plus répandu ; si ce dosage est normal ou
bas, il faut savoir remettre en question la fiabilité de l’examen d’urine et donc le diagnostic de PNA. Une
NIVEAU DE L’INFECTION
Le passage de l’infection au-delà de la jonction vésico-urétérale est un peu théorique mais répond bien aux deux
présentations cliniques que sont la PNA et la cystite. Le diagnostic repose sur des informations simples (Tableau
I).
Cystite
La cystite est relativement rare chez l’enfant. Généralement, elle révèle ou complique un trouble mictionnel, et est
Quel que soit l’âge et le sexe, il convient de pratiquer une échographie urinaire, car cet épisode peut révéler une
L’antibiothérapie doit être entreprise sans tarder, par exemple avec cotrimoxazole (Bactrim®, 1 mesure pour 5
kg, en 2 prises), à adapter secondairement selon l’antibiogramme ; la durée du traitement est de 8 jours.
Cystites récidivantes
Il n’y aucune raison pour qu’une cystite récidive chez un enfant indemne de malformation. Cela incite à
rechercher des éléments en faveur d’un trouble mictionnel, qui peut générer ultérieurement un RVU et exposer
au risque de PNA. L’interrogatoire recherche alors des fuites diurnes d’urine, un jet anormal, une encoprésie.
Leur présence justifie souvent d’associer un laxatif osmotique et un anticholinergique (oxybutinine). Une
antibioprophylaxie (cotrimoxazole par exemple) est proposée chaque fois qu’un cercle vicieux s’est installé entre
trouble mictionnel, rétention stercorale et infection. Ce traitement est institué au moins pour 3 mois.
Cystites virales
La plupart des cystites sont bactériennes, mais une cystite interstitielle d’origine virale est possible (adénovirus,
diagnostic repose sur la notion d’une leucocyturie aseptique et d’un épaississement de la paroi vésicale.
L’évolution est spontanément favorable en quelques jours, mais l’échographie doit être contrôlée à distance pour
Pyélonéphrite aiguë
Toute PNA comporte à divers degrés un œdème interstitiel et un infiltrat de polynucléaires, ce qui explique la
variété des aspects en échographie : augmentation globale du volume rénal, aspect de néphrite focale. En outre,
la PNA comporte deux enjeux : la révélation possible d’une malformation et le risque de séquelles.
Présentation (Tableau I)
Nouveau-né
La PNA du nouveau-né est une infection sévère, comportant parfois une insuffisance rénale (IR) du fait d’une
Il existe souvent un syndrome infectieux grave, des troubles digestifs (vomissements, diarrhée), une
déshydratation, des perturbations ioniques et parfois un ictère. La recherche d’une IU (pouvant justifier une
Nourrisson
Il s’agit alors volontiers d’une hyperthermie isolée, plus ou moins bien supportée, parfois responsable de
convulsions.
La symptomatologie digestive (vomissements, douleurs abdominales, diarrhée) peut être au premier plan et ainsi
retarder le diagnostic.
La notion d’une douleur à la palpation rénale chez un enfant calme a une grande valeur sémiologique.
En présence d’une uropathie, l’atteinte tubulaire associée à la PNA peut entraîner d’importantes perturbations
Enfant
Les signes vésicaux sont au second plan derrière les douleurs abdominales (projection ombilicale fréquente) ou
Pyélonéphrite décapitée
Cette situation n’est pas exceptionnelle lorsque la PNA se présente comme une fièvre isolée et que l’examen des
urines à la bandelette n’a pas été réalisé. La PNA est alors évoquée devant la persistance d’une leucocyturie
L’échographie n’a de valeur que si elle montre un volume rénal augmenté ou un épaississement des parois
pyéliques. Dans ce contexte, l’examen le plus performant est actuellement la scintigraphie au 99mTc-DMSA (acide
Le traitement probabiliste associe une céphalosporine de 3ème génération et un aminoside pendant 48h : une
injection quotidienne unique de ceftriaxone (Rocéphine® 50 mg/kg) et de nétilmicine (Nétromycine® 7 mg/kg) est
efficace, bien toléré et réalisable en ambulatoire. Passé les 48 premières heures, le relais est assuré par une
monothérapie adaptée à l’antibiogramme, soit par voie parentérale pendant encore 24 à 48 heures avec relais
per os, soit d’emblée par voie orale. La durée totale de l’antibiothérapie est de 10 à 15 jours.
L’hospitalisation s’impose chez les enfants de moins de 3 mois en raison du risque de méningite associée, et elle
reste recommandée jusqu’à l’âge de 6 mois ; au-delà, c’est la tolérance clinique qui oriente.
La stratégie antibiotique actuelle permet d’obtenir rapidement la stérilisation des urines et l’apyrexie, elle limite
Elle est justifiée chez le jeune enfant qui garde des couches et qui a présenté au moins deux épisodes de PNA ;
il est alors logique de la maintenir jusqu’à ce que les couches ne recueillent plus de selles. Elle peut aussi être
proposée chaque fois qu’un cercle vicieux s’est installé entre trouble mictionnel, rétention stercorale et IU.
Dans tous les cas, l’antibioprophylaxie (céfaclor chez les enfants de moins de 2 mois, cotrimoxazole ensuite ;
prise unique le soir, un tiers de la posologie curative) se heurte au risque de non-observance et au caractère
empirique de sa prescription.
Pyélonéphrites récidivantes
La récidive d’une PNA n’est pas exceptionnelle et incite à rechercher scrupuleusement un trouble mictionnel.
La cystographie est habituellement proposée même si l’échographie ne montre pas d’anomalie : elle est
généralement normale ou n’objective qu'un RVU de bas grade, souvent fonctionnel ; si le RVU est important et
de type malformatif (ce que laisse souvent supposer l’échographie), sa correction pourra être proposée.
Force est d’admettre que la PNA est pratiquement toujours le fait d’un RVU, permanent ou intermittent, qui n’est
d’ailleurs visualisé par la cystographie que dans un tiers des cas. La classification des RVU en 5 grades ne
présage pas du mécanisme du reflux, et on peut donc proposer une classification en deux catégories selon le
allongeant le trajet intra-mural de l’uretère (RVU malformatifs), permet d’améliorer ou de faire disparaître bon
nombre de RVU.
La chirurgie du RVU est controversée ; elle est habituellement destinée aux RVU malformatifs sévères. Cette
correction n’influence pas le risque de cicatrices parenchymateuses, ni celui d’hypertension artérielle ou d’IR à