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Une famille atypique

De

Maya
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ISBN : 979-8592015557
Dépôt légal : Février 2021
Achevé d’imprimer en France
Prix : 16,99€
Livre publié par Bookelis

L’autisme, c’est notre norme. Élever un enfant avec autisme, c’est la seule chose que je
connaisse et j’ai les mêmes rêves et attentes que n’importe quelle autre mère. Lisa Quinones-
Fontanez).

L’autisme, ce n’est pas la pire chose qui soit arrivée à mon fils. La pire chose, c’est le manque
de ressources pour lui venir en aide et l’incompréhension des autres. (Lisa Quinones-
Fontanez).

L’autisme, ce n’est ni la faute des parents, ni de l’enfant. Ce n’est pas mal, ce n’est pas le
résultat d’une mauvaise éducation ou d’une surprotection de l’enfant. Ce que vous voyez, ce
sont des parents et leurs enfants essayant de faire tout leur possible dans un monde qui peut
s’avérer être chaotique. (Flo Halter).
Introduction

Nous vivons à six dans notre maison en Normandie, ma belle-mère dans son duplex accolé à
notre habitation, et nous cinq, le papa, moi et nos trois garçons. Nous sommes une famille
atypique.

Ce tome fait suite à deux autres livres que j’ai déjà écrits où je traitais du trouble bipolaire et de
l’autisme.

Si vous avez suivi : ma belle-mère se dit certainement souffrir de trouble bipolaire, mais jamais
diagnostiquée, mon mari est une personne anxieuse un peu portée sur la bière, et dont les tests
sur l’autisme le montrent à la limite (peut-être peut-on parler de quelques caractéristiques
autistiques sans parler de trouble même pour son cas), l’avenir nous le dira.

Mon fils aîné souffrant de trouble bipolaire juvénile (cyclothymique) et d’autisme asperger,
mon second d’autisme asperger, de dysgraphie et dyspraxie et mon dernier a un fort caractère
que j’ai toujours cru légèrement hyperactif…

Et moi, bipolaire de type 1 à caractéristiques psychotiques et cyclothymiques, autiste de haut


niveau, ayant été abusée sexuellement, et maltraitée dans l’enfance, souffrant toujours de cela.

Entre les besoins de chacun, les troubles alimentaires, les problèmes de sommeil, les crises de
colère, et le caractère de chacun, la maison prend des airs assez explosifs. Mon petit dernier,
qu’on a, ou que j’ai suspecté à un moment donné hyperactif, ayant une forte personnalité, prend
toute la place chez nous. Nous savons qu’il est là, il a une forte présence, il fait du bruit, et la
maison est vivante… souvent trop bruyante. Entre mon troisième enfant bien vivant, mon
premier irritable et colérique, mon second lui se laisse oublier, peut-être un peu trop parfois. Le
diagnostic d’asperger pour lui a été une surprise et une révélation. Peu à peu, se dessine, quatre
profils atypiques de formes d’autisme, cinq si l’on compte mon mari suspecté : le réservé,
l’hyperactif, l’anxieux, les deux cyclothymiques.

On définit plusieurs types de profils d’autistes :

Le distant ou en retrait : ces enfants paraissent indifférents aux autres, ne s’intéressent pas à
leurs congénères, néanmoins acceptent le rapprochement des personnes familières. Ils sont le
plus souvent absorbés par leurs propres occupations stéréotypées. En grandissant, certains
apprécient la présence d’autrui, mais ils sont rarement à l’initiative du contact.

Le type passif ou docile : ils prennent rarement l’initiative du contact, mais acceptent le
rapprochement d’autrui. Ils suivent les autres lorsque ces derniers le souhaitent. Ils sont prêts à
faire ce qui leur est demandé.

Le type actif, mais bizarre : prend activement l’initiative du contact, mais ont du mal à
comprendre les interactions, ce qui crée une dimension étrange, inadaptée. Ils communiquent
de manière unilatérale et égocentrique, pour parler de leurs intérêts restreints, ne prennent pas
en compte les autres et leur sentiment. Ils sont considérés comme envahissants et dérangeants,
étiquetés caractériels ou asociaux.

Comment définir mes enfants ? J’apprends à les découvrir peu à peu. Je ne les vois pas lorsqu’ils
sont dehors, en interaction sociale au collège ou en primaire, et je vois parfois chez eux, un
autre enfant que celui que j’ai à la maison. Ce fut le cas pour Clément. Joyeux, hyperactif,
enjoué, je me l’imaginais crier, hurler et s’amuser avec des tas d’amis dans la cour de l’école.
Il en est tout autre et on me décrit un enfant solitaire. Je me suis dit « non, ce n’est pas mon
enfant ! il n’est pas comme cela ! » et peu à peu je découvre un visage différent d’un enfant en
retrait, solitaire, plus préoccupé à ses intérêts restreints qu’à jouer avec ses pairs… et j’ai des
exemples à la pelle dans ma mémoire, lors de sorties en famille, chez des amis où il se retrouvait
seul, dans une chambre à s'amuser, isolé plutôt qu’à s’amuser avec les enfants des autres.

À travers l’autisme et ses particularités, je découvre peu à peu un autre visage de ma famille,
mes enfants que j’apprends à mieux connaître et à appréhender. Puisque gérer des rigidités, des
manques de flexibilité d’un enfant et se confronter à ses blocages n’est pas forcément simple à
vivre tous les jours.
Décembre 2019

Comment résumer la découverte de mon autisme et de ma bipolarité ?

Aussi loin que remontent mes souvenirs, j’ai de tout temps été une enfant hypersensible, très
attachée aux personnes, voire fusionnelle, parce que j’ai toujours vécu avec ce sentiment
d’insécurité, la peur de l’abandon, la peur de ne pas être remarquée, qu’on m’oublie. J’étais une
enfant qu’on pouvait oublier, car j’étais très timide et je ne me faisais remarquer que par mes
actes serviables dans le but de faire plaisir et être aimée.

Être aimée, être regardée, être sans cesse dans l’insatisfaction…

Je suis d’une nature très angoissée, très anxieuse. Cela s’est traduit par la trichotillomanie dès
mes deux ans et demi. Ma mère me disait colérique, au point que ma sœur m’a un jour rappelé
la fois où elle a failli recevoir une chaise.

Ces débordements étaient plutôt rares au fil des années, dus au fait que j’ai vite appris à me
taire, à me faire toute petite, car je n’avais pas le droit de dire non, parce que je vivais sous la
terreur des coups de mon père.

Je suis devenue quelqu’un qui a vite intériorisé les choses, j’étais une enfant seule, pas solitaire,
mais seule, car les filles me trouvaient bizarre. J’avais bien plus souvent une amie attitrée que
je « bouffais ». J’avais besoin de ces relations fusionnelles.

Mes amours étaient de ce mode là aussi si bien qu’à la moindre rupture, la moindre querelle
finissait en autodestruction, en envie suicidaire, parfois mis en acte.

J’ai vécu l’enfer de la violence paternelle, mais aussi l’inceste de mes cousins, leurs viols
buccaux et anaux de 8 à 13 ans.

À l’école, j’étais scotchée aux professeurs, toujours à l’affût de tendresse, et d’attention. Les
autres ne m’intéressaient pas et ils me trouvaient bizarre. Je restais la plupart du temps collée à
un mur du couloir à lire ou à écrire plutôt qu’à m'amuser. Je ne savais pas quoi leur dire, et leurs
jeux ne m’intéressaient pas, les discussions de mode et de garçons non plus. J’étais hors de leur
monde, rêveuse et différente d’eux.
C’est à partir de mes 14 ans que tout s’est emballé, à l’annonce du divorce de mes parents ;
dépression, automutilation, abus de bière en cachette, anorexie/boulimie, tentatives de suicide
passées sous silence, car je ne maîtrisais pas les doses de médicaments, crises d’angoisses à
répétitions…

Ma mère rencontrant mon beau-père, j’ai vu en lui un nouveau père tendre. Il l’a été au début.
Il était attentionné, m’aidait dans mes devoirs contrairement à mon propre père, on discutait…
il était câlin, un peu trop d’ailleurs. Il a commencé à me toucher, à me caresser, sous mes habits,
le soir devant la télévision, pendant que ma mère travaillait de nuit… puis les seins, les
cuisses… m’a proposé un soir de dormir avec lui sous forme de blague, le lendemain je parlais
à l’assistante sociale. Il y eut plainte, il m’a fait du chantage au suicide, et malgré le fait que je
lui ai fait comprendre mon besoin de distance, il a recommencé à m’allonger contre lui dans le
canapé. Il jouera d’ailleurs le voyeur lors de ma vie de couple, ne respectera jamais ma vie
intime, jouera les exhibitionnistes et se fera remarquer à plusieurs reprises par ses actes suspects
par ma famille…

A 14 ans, je rencontre aussi un petit ami qui me partage avec ses camarades qui abusent de moi,
m’agressent devant lui alors qu’il rit…

L’un d’eux me violera.

Jusqu’à ma première crise maniaque franche à 18 ans : une belle crise mystique avec délires,
hallucinations visuelles, visions, la certitude d’être envoyée par Dieu pour sauver les âmes, avec
hyperactivité, multiplication des investissements associatifs, allant vers le projet de devenir
nonne.

Autour de moi, on me traite de folle, on dit que j’ai changé, on ne me reconnait plus, moi la
timide, souffrant d’anxiété, l’introvertie, je parle, j’ai une voix, je deviens hyperactive, moi la
lymphatique de naissance, je vis enfin, je suis heureuse.

À 19 ans, je quitte l’enfer de ma vie pour me mettre avec le premier venu, un Algérien qui
voudra me plier à la coutume d’une femme algérienne, me voudra soumise, et me fera vivre
l’enfer de la violence conjugale.

Les humeurs font le yoyo, je commence vraiment mes phases d’automutilations, et d’anorexie.
Je travaille dans un IME auprès d’adolescents handicapés mentaux où je mets plus d’un an et
demi pour m’intégrer. Travailler est un long combat pour moi. Il faut toujours que je sois
derrière une personne qui me porte.
Je ne quitte mon ex-mari qu’après cinq ans d’enfer.

Deux mois plus tard, je rencontre mon mari actuel, père de mes enfants. Je vis le bonheur, mais
je vis sur un fil en équilibre précaire, avec cette terreur que tout tombe, que tout s’écroule. Mes
humeurs vont et viennent, je fais plusieurs tentatives de suicide, des épisodes d’anorexie, de
dépressions post-partum à chaque grossesse. Et la venue de mon beau-père en 2011 me précipite
vers une nouvelle dépression lors de ma dernière grossesse.

9 mois plus tard, après avoir lutté autant de temps pour ne pas faire de bêtises, je suis
diagnostiquée bipolaire.

Ce n’est que le début de cette maladie que l’on m’a diagnostiqué à 31 ans seulement. Dans cette
attente, j’ai vécu l’enfer toutes ces années-là.

Le combat ne fait que commencer.

Quelques mois plus tard, mon fils aîné est diagnostiqué cyclothymique, entreprend une thérapie
avec la psychologue du centre et moi je commence mon traitement.

Je recommence trop tôt mon travail, je n’arrive pas à m’intégrer, je ne sais pas ce qu’on attend
de moi, je fais des épisodes de déréalisation et je sombre encore plus en dépression, puis dans
l’alcool.

Puis peu à peu, je tombe dans l’anorexie. Je suis férue de végétarisme.

Mon dernier fils ne mange rien aussi et sent mon mal être.

À ses deux ans, en 2014, je fais une tentative de suicide et là tout devient flou.
Je sombre en dépression et n’en ressortirai que quatre ans plus tard, que lorsque mon fils aîné
commencera à aller mal, fera une grave dépression, avec crise de colère, automutilation et
tentative de défenestrations à plusieurs reprises…

La psychologue qu’il commencera de voir en 2018 lui fait passer des tests et le suspecte autiste
asperger. Elle me croit aussi autiste.

Je serai diagnostiquée en novembre 2018. Puis viendra Tristan en avril 2019. Aurélien, mon
second fils, se faisant harceler en primaire du coup voit notre psychologue. Elle lui passe des
tests, car il y a un terrain familial. Les résultats sont inquiétants.

Bipolaire à 31 ans

Autiste à 38 ans
2020
Janvier 2020

Traits TSA : Maya

Interaction sociale

Peu d’amis en primaire, timide, réservée. J’ai souffert de mutisme sélectif. L’oral était une
sinécure et je me souviens d’un exposé de groupe où je n’ai pas décroché un mot.

J’ai invité un jour des camarades à mon anniversaire, personne n’est venu.

Les années collège, je les ai traversées, collée à un mur du couloir, traitée de bizarre, et scotchée
à un professeur qui suspectait des secrets autour de moi (abus sexuels et maltraitances, elle a eu
l’ouïe fine)

Je me sentais différente et n’avais pas les mêmes centres d’intérêt que les filles de mon âge
(moi c’était et c’est toujours l’écriture, les puzzles, la psychologie. Pour les autres, c’était le
maquillage, les garçons, la mode)

J’étouffais de trop de demande d’affection une professeur qui m’a rejeté pour avoir fait du
forcing

Au lycée, j’ai eu un petit ami qui m’a pris et jeté à son gré, et traité comme son jouet, il était
immature. J’ai eu des amies qui sont venues vers moi, on formait un groupe, elles m’ont
soutenue lors des plaintes de mes abus sexuels. (J’ai commencé à être dépressive au collège et
j’ai continué mon autodestruction au lycée, avec des abus de bière en cachette et un épisode
d’anorexie boulimie

J’ai tendance à être exclusive dans les relations, à en être étouffante, à avoir un ou une amie
paravent)

Je n’ai jamais su décoder les intentions des gens. Ce qui a eu pour conséquences les viols de
mes cousins qui ont abusé de mes faiblesses et mes demandes d’attention d’une enfant de 8 ans,
les viols des copains d’un petit ami qui me partageait à 14 ans et que j’ai fui seulement au bout
d’un an, ni les intentions de mon beau-père incestueux, le fait que je n’ai rien vu venir dans ma
vie de couple avec mon ex-mari violent alors qu’il m’avait dès le départ violé le premier soir et
que je n’y ai vu que du feu, le fait que je suis tombée sur des pervers parce que je parlais
sincèrement et qu’ils ont profité de moi et de ma naïveté (88 % des femmes autistes ont subi
des violences sexuelles ; https://comprendrelautisme.com/une-infographie-sur-les-femmes-
autistes-principales-specificites/)

Lors des discussions, j’ai toujours un temps de retard, car le temps que j’intègre la parole de
l’interlocuteur, je réfléchis à la réponse adéquate à donner et quand je trouve une réponse,
généralement, le sujet est sur autre chose alors soit je sors une ânerie en décalage soit la plupart
du temps je me tais.
Travail

L’entrée dans la vie active s’est faite avec un premier emploi d’été parce que le patron avait
des vues sur moi. Je l’avais croisé un jour alors que je faisais mes virées sur Paris en phase
maniaque et qu’il tenait un magasin d’arts et de reproduction. Il m’a invité à sortir et c’est vers
lui que je suis allée pour avoir mon premier emploi, car j’étais reléguée de partout.

Par la suite, mes autres emplois se sont faits par piston, le travail de mon ex-mari dans une
boulangerie a enchaîné un autre où j’ai été virée parce que trop lente et à cause de mon
impossibilité de prendre les commandes des clients, à cause de mes problèmes
d’hypersensibilités auditives.

J’ai été pistonnée par ma mère en travaillant 6 mois de nuit dans le traitement de chèque

J’ai eu tant bien que mal mon BAFA, mais on m’a un peu secoué, car j’étais à l’écart et ne
participais pas.

Après mon BAFA, j’ai eu des postes d’animation où j’ai bien compris qu’ils ne voulaient plus
de moi.

C’est grâce à mes expériences passées, mon investissement dans des associations, et ma
formation artistique que j’ai pu obtenir mon premier vrai emploi qui a duré presque 4 ans en
tant qu’animatrice d’un atelier d’arts plastiques auprès d’adolescents handicapés. J’ai mis plus
d’un an et demi à m’intégrer, mais j'y suis parvenue que grâce à l’arrivée d’un collègue, devenu
un ami paravent qui m’a aidé à m’intégrer et à faire ma place. Sans lui, je n’y serais pas arrivée.

Travail

· Difficultés à généraliser (impossibilité à utiliser une compétence apprise dans un


contexte au sein d’un autre environnement)

· Difficulté d’adaptation à travailler dans un établissement nouveau dans lequel les règles
et routines changent à chaque entreprise, je suis statique, ne sais pas m’intégrer, j’ai besoin
qu’on me dise chaque minute ce qu’il faut que je fasse, je ne suis pas autonome ni
indépendante et je me retrouve perdue alors que des gens moins bien diplômés que moi
travaillent comme s’ils avaient fait cet emploi toute leur vie bien qu’ils y soient depuis peu
comme moi. Je n’ai aucune prise d’initiative, plantée comme une statue.

· Impossibilité pour moi de m’intégrer à l’équipe déjà toute faite.

· Ne parle pas en réunion

· État de stress tellement fort que je tombe en état de déréalisation ou en dépression

· Crise de panique lors de mes emplois

· Trop lente et pas assez réactive pour mes employeurs


· Je ne sais pas parler ni répondre lors de débat, car pour ma part pour donner un avis, il
me faut réfléchir longtemps, avoir tous les éléments, connaître mon sujet, faire des
recherches sur le pour et le contre, et pouvoir ainsi à mon tour donner mon opinion, mais
en réunion, je n’ai pas le temps de faire tout cela, alors je me tais ou dis sans arrêt que je ne
sais pas

· Lorsqu’il y a plusieurs personnes qui parlent en même temps, des discussions et débats
où chacun donne son opinion, c’est pour moi invivable, il y a un télescopage de toutes ces
phrases qui n’ont ni queue ni tête et que je n’arrive pas à comprendre ni à intégrer pour
pouvoir à mon tour émettre un avis.

· J’ai eu un ami paravent à mon travail à l’IME où je me suis sentie bien et n’ai réussi à
m’intégrer qu’à partir du moment où il est là, à m’intégrer.

· Crise de panique lors des entretiens d’embauche dès lors que cela sort de mon schéma
de pensées préparées. Je bloque et mon esprit n’écoute plus. J’ai la tête vide et je ne peux
plus penser à rien. Je ne supporte pas l’imprévisibilité des entretiens d’embauches.

· Je me suis exclue du monde et de la société en emménageant dans l’Eure lors de ma


deuxième grossesse qui pour moi a été une aubaine, car je ne me sentais pas capable de
travailler après mon diplôme d’éducatrice. Je me suis enfermée chez moi avec ma famille,
mes enfants, mon mari et ma belle-mère et je me suis coupée de toute vie sociale. Le peu
de fois où j’ai été confronté à la société, en travaillant quelques mois, j’ai sombré dans la
dépression, quand je rencontrais les gens, je ne leur parlais pas, je ne leur disais rien, j’étais
une personne bizarre et asociale pour l’entourage et pour ceux qui me rencontraient. Une
femme muette. Je ne décrochais pas un mot à part un bonjour et au revoir.

· J’ai fait ma formation de 2006 à 2009. Je me suis occupée de mes enfants et de mes
différentes grossesses jusqu’à un travail en 2012-2013 de 4 mois. Mais en gros depuis 2009,
donc bientôt 11 ans, je ne vois plus personne. Et je n’ai plus de vie sociale, plus de travail.

Comorbidités

· Troubles bipolaires

· Anxiété, phobie sociale

· Problème d’alcool

· Migraine

· Troubles du comportement alimentaire, anorexie

· Sélectivité alimentaire, végétarienne, ne supporte pas la viande

· Peur de m’étouffer

· Trouble du sommeil (sous Tercian depuis 8 ans, et épisode maniaque et d’insomnie)


· Trichotillomanie

· Mycoses à répétitions, eczéma

· Maladie de la sphère ORL avec des toux persistantes nécessitant des cures en centre

· Par le passé : constipation

· Automutilation

Sensorialité

· Hypersensible à la vue, vite éblouie, plisse des yeux constamment

· Hypersensible auditive, entend le moindre bruit

· Incapacité à séparer les sons et à occulter les fonds sonores, donc je ne peux suivre une
conversation s’il y en a d’autres autour. Je me ferme et je me mets en mode off, et je
n’entends et ne comprends plus rien. J’ai fait un essai en boulangerie sandwicherie en
restauration rapide à plusieurs, je n’en pouvais plus, je n’entendais pas les commandes des
clients !

· Ne supporte pas les bruits trop fort (cinéma, enfants…) trop brutaux (aboiement de
chien, moto…)

· Ne supporte pas les transports en commun, la promiscuité des gens, et le bruit de


grincement des trains qui freinent

· Odeurs : aime les odeurs fortes : fumier, odeurs de ferme…

· Goût : hypo sensible : besoin de saveurs prononcées, nouvelles et pimentées, à forte


chaleur. J’aime les soupes asiatiques pimentées, les gaspachos frais avec une tonne de
Tabasco… j’aime goûter les plats nouveaux,

· Hypo sensible à la douleur, sauf aux migraines. Automutilation fréquente, brûlures au


second degré ans, aucune réaction, scarification au scalpel, rasoir, couteau et cutter en état
de déréalisation, je me suis ouverte pour retirer mon implant contraceptif moi-même pour
ne pas attendre un délai trop long chez le gynécologue, j’ai dû aller aux urgences après, non
pas parce que je saignais, mais parce que l’implant était trop profond et que je n’arrivais pas
à l’atteindre… tout cela sans rien ressentir,

· Hypo sensible à la douleur si bien que je sentais à peine les contractions de mes
accouchements. J’ai suivi mon instinct plutôt que ma douleur sinon, j’aurai accouché sans
le vouloir à la maison. Un peu plus et j’accouchais dans la voiture pour Aurélien !

· Certaines parties de mon corps sont insensibles ou désagréables à toucher alors que
pour les femmes en général, c’est le contraire !
· Ne supporte pas certaines textures de vêtements, comme les pull-overs, qui font de
l’électricité statique ou des tissus froids. Je ne supporte pas les robes et jupes, et j'en mets
très rarement, je me sens nue et mal à l’aise.

· Je m’habille généralement pour être à l’aise, non pas pour plaire ni être féminine,
raffinée et à la mode. La mode est le cadet de mes soucis. J’achète des vêtements par
nécessité, non pas par plaisir, ne supporte pas les soutien-gorge.

· Ne supporte pas les bijoux. Ne supporte pas les bracelets, ni d’avoir une tonne de
colliers, ni les montres, et les bagues qui serrent les doigts quand ils gonflent.

· Vestibulaire : j’aime être tournée et retournée dans tous les sens dans les manèges à
sensation

· J’aime me balancer, me stimuler, m’automutiler…

· Je ne sais pas tenir statique sur une jambe, je manque d’équilibre. Je me balance d’une
jambe à une autre, je balance mon corps d’avant en arrière, sur le côté, selon les périodes…

· J’ai besoin d’être comme un cocon en pâte, enveloppée par diverses épaisseurs de
couette, qui se rabattent jusqu’en haut de mes oreilles et me couvrent de bas en haut. Mes
pieds ne doivent pas dépasser du lit ni de la couette. Je préfère avoir trop chaud que trop
froid. Je ne supporte pas le froid, je ne supporte pas l’hiver.

· J’aime avoir l’eau bouillante sur ma peau et me couler un bain si chaud que je suis rouge
écrevisse !

· Je ne supporte pas quand quelqu’un marche derrière moi.

J’ai peur du noir.

Des déficits persistants de la communication et des interactions sociales

· Avant qu’on me le fasse remarquer, je ne hochais pas la tête en signe d’approbation ou


d’écoute lorsqu’un interlocuteur me parle. Je le fais maintenant, mais ce n’est pas naturel.

· Aucune réciprocité dans le regard, dans les gestes, le mouvement, la parole, je ne parle
pas avec les mains, je suis statique et on m’a souvent demandé si j’étais dépressive quand
on me parlait

· J’ai une intonation de voix monotone, soit trop faible, soit trop forte.

· Je réponds par oui ou non, il n’y a pas d’échange, je réponds à la question donnée et
c’est tout, je n’initie pas la conversation.

· Aucun humour ne prend tout au premier degré

· Je ne sais pas mentir, j’ai tendance à être franche et sincère quand on me pose une
question
Caractère restreint et répétitif des comportements, des intérêts ou des activités

· Stéréotypies, maniérisme et balancement de corps

· Routine journalière : endroit pour faire les courses, trajet, heure du repas, type de repas,
horaires inflexibles pour l’organisation de la journée et du coucher des enfants à moins
d’être prise dans une activité qui occulte tout comme l’écriture, résistance au changement,
et rigidité cognitive et manque de flexibilité au niveau de mes horaires, les yeux fixés sur
l’horloge en permanence.

· Comportements assez obsessionnels à certains cas, alignement des objets, ne pas


marcher sur les lignes, placement des meubles, épisode de grand ménage et de grands
rangements avec envie de déménagement de toute la maison, besoin de vide et de clarté et
de pureté, de propreté, obsession du manger sain, du fait maison, obsessions sur certains
sujets comme le budget…

· Intérêt restreint sur beaucoup de thèmes : le maternage, la psychologie, la généalogie,


l’alimentation, l’écologie, les minéraux, la décoration, le puzzle, l’art, la peinture et la
sculpture, l’écriture…

Divers

· Rêveuse, je fuyais mes soucis dans l’imaginaire, me créait de nouveaux héros pour me
soutenir dans les séries télévision que je regardais.

· Je m’imaginais des histoires, j’ai eu beaucoup de projets d’écriture tirés de ces rêves et
de ma vie, j’écris beaucoup, des romans ébauchés, des manuscrits autobiographiques, des
recueils de poésie.

· Réagis de manière totalement décalée par rapport à la situation : une personne qui pleure
ou menace de se suicider et je me mets à rire nerveusement, je ne sais pas quoi dire pour
consoler les gens même si cela me touche profondément, et quand l’émotion me submerge,
je me bloque et parfois je sombre dans des états de déréalisation

· Je suis quelqu’un de totalement introverti, qui paraît timide, voire froide, d’apparence,
on m’a déjà traitée de prétentieuse, on me croit supérieure à l’autre et de quelqu’un de
condescendant.

· Ne fuis pas forcément les conflits, mais je ne sais pas réagir lorsqu’on m’agresse et j’ai
tendance à faire profil bas, à être tétanisée, et à encaisser l’agression pas justifiée en général,
et je rumine dans mon coin à ce que j’aurais pu dire
Les rigidités alimentaires

Pourquoi ai-je voulu devenir végétarienne ? Pourquoi n’ai-je jamais aimé la viande ? Pourquoi
mon fils Aurélien réduit-il au fur et à mesure son alimentation à peau de chagrin ?

Plus que par conviction idéologique, sur la condition animale, sur la santé de la planète, le
réchauffement de la planète, et en dernier ressort ma propre santé, c’est surtout par dégoût de
certains aliments et par focalisation sur certains aliments que je me suis mise au végétarisme,
et sûrement liée à mon autisme.

Ne manger que du vert et des légumes parce que j’ai décidé que c’était bon pour la santé et bon
au goût et à mon palais.

Ne plus manger de viande, parce que cela a un goût de moisi, d’avarié dès que j’en avale et
aussi parce que je n’arrive pas à la mâcher, à l’avaler depuis que je suis toute petite, et que je
tourne la viande dans ma bouche dans tous les sens sans pouvoir l’avaler… et que je me suis
assez bagarrée avec. Maintenant, je n’en prends plus. La seule viande que j’arrivais à manger,
c’est le steak haché ou le carpaccio de bœuf.

J’ai remarqué que j’aimais particulièrement la viande et le poisson cru : en carpaccio, en


tartare…

Mais maintenant, je fais un blocage dessus. Depuis que j’ai décidé que je ne mangerais plus de
viande, je bloque dessus. Je ne m’autorise plus. Je m’interdis l’aliment. Comme si je n’avais
plus le droit de me faire plaisir.

Peu à peu, j’ai réduit mon alimentation : le poulet, sitôt que je trouvais du gras, de la peau, un
morceau de cartilage, d’os, j’ai éradiqué le poulet. Le bœuf, même pas la peine, immangeable.
Les autres viandes, un peu de nerf, du rôti avec du gras… immangeable… du nerf…

Les œufs que j’adorais : j’ai vite eu la nausée avec, avec des maux de ventre. J’en mange à
reculons. Et pas en ce moment.

Le petit déjeuner : je buvais du lait chocolaté : de la peau sur le dessus et je jetais tout dans
l’évier, les haut-le-cœur avec. J’ai pris du cappuccino pendant des années, et cela a fini par me
détraquer le ventre…

J’aime les plats épicés, les plats nouveaux, les plats qui sortent de l’ordinaire, les plats venus
d’ailleurs… je ne suis pas du tout néophobique, au contraire, même capable de goûter d’insectes
grillés venue de Colombie proposée par un ancien de mes collègues quand j’ai travaillé par le
passé !

J’ai réduit mon alimentation de poisson, trop cher, et trop pourvu de poison, de mercure.

Mais je ne me nourrirais que de salade et de légumes, de soupe… et mes deux aliments phares
: la tomate et le fromage

J’aime beaucoup les aliments crus ou bouillants et épicés, les gaspachos, les soupes froides, les
salades… et soupes bouillantes épicées asiatiques avec une tonne de piment !
Je ne supporte pas de manger avec un certain type de couverts, en plastique ou des couverts
trop fins, comme j’ai à la maison qui vous coupe les mains, je ne les supporte pas, je ne peux
pas manger avec… ou que je n’aime pas les couverts en plastique

Il y a une chose sur l’esprit compartimenté, le fait qu’une personne autiste n’est pas multi
tâches, Et qu’on ne peut pas poser de questions à un enfant autiste qui mange comme on peut
le faire à un enfant neurotypique. Je me suis toujours interrogée pourquoi j’étais totalement
focalisée sur ma nourriture et mon repas et que je n’arrivais pas à converser avec les autres.
Je suis obligée de m’arrêter dans mon occupation pour devoir répondre quand on me parle. Je
suis obligée de faire répéter la question, sinon cela me demande un effort considérable de faire
deux choses à la fois que de me concentrer sur mon repas et être à l’écoute des autres. Je me
focalise sur mes aliments, ma mastication, avaler, les couleurs des aliments, le goût, si je réussis
à les avaler sans m’étouffer… je suis dans une activité qui me demande une extrême
concentration qui n’est pas du tout naturelle comme l’est pour les autres et je m’en rends
compte maintenant que je réalise les problèmes potentiels d’Aurélien sur son alimentation. Je
me rends compte que c’est peut-être pour cela que je suis la dernière à sortir de table et que
l’on me reproche d’être toujours aussi lente pour manger.

J’ai remarqué cet esprit compartimenté dans le fait que je n’arrive pas à faire plusieurs choses
à la fois : manger et parler, conduire et parler, écrire et parler, répondre et parler, faire une
activité et parler… je suis en général très concentrée sur une chose et cela me demande
beaucoup d’effort et de fatigabilité que de faire plusieurs choses à la fois.

Aurélien, c’est un autre problème. Mon mari dit qu’il a eu à la suite de sa gastroentérite à ses 4
ans été dans l’impossibilité de reprendre un biberon de lait. Je ne m’en souviens pas, ne me
souvenant plus de ma période de dépression à partir de 2014. Il a arrêté les produits laitiers à
partir de là, et a encore mangé un peu de fromage type Coulommiers jusqu’à il y a deux ans de
manière très éparse, mais a arrêté tout produit laitier depuis. Or il ne compense pas le calcium
par des légumes verts. Il ne mange pas de légumes. Il n’aime que les petits pois carotte et les
crudités. Il ne mange pas de fruit non plus. Pas de salade ni de soupe.

Il aime un bon rôti de bœuf et les petits pilons de poulet aromatisé dans les sachets tout prêts
en supermarché, plutôt que des vrais pilons de poulet de chez le boucher que je ferais moi-
même au four ! (Bonjour les additifs !)

Il déteste certaines odeurs notamment celle du chocolat. Sentir le bol de chocolat de ses frères
l’incommode tout comme moi je déteste l’odeur du café.

Il s’en tient à ses petits rituels : petits déjeuners et goûter avec son assiette de quatre pancakes
et gare s’il est resté quelques coquilles d’œufs dans la préparation !

Il peut manger pendant plusieurs jours voire plus d’une semaine le même plat midi et soir.

Il faut en général que ses aliments soient bien séparés ou visibles distinctement, les légumes
séparés de la viande, les carottes orange bien visibles face à la semoule et les boulettes. Il met
précautionneusement chaque aliment sur sa fourchette, une part de carotte, une part de viande
et une part de semoule, tout doit tenir dans sa fourchette et il enfourne dans sa bouche. Il ne
mange pas de semoule sans viande.

Il n’aime pas les plats mijotés !


Il faut que ses pommes de terre sautées soient faites avec la variété pour pomme de terre faite
pour ce genre de cuisson. Si j’en mets trop dans la poêle, cela a l’aspect un peu plus sablonneux,
il n’en mange pas.

Ses goûts diffèrent en fonction des personnes qui préparent le plat. Si c’est sa grand-mère qui
prépare les crudités, c’est meilleur.

Il ne supporte pas d’être sali, que ses couverts le soient. Il s’assoit et me demande de couper
son plat, je prends donc sa fourchette et son couteau ! Il va automatiquement les changer parce
que je les ai touchés.

Il mange tout avec ses couverts : ses pancakes le matin et au goûter, ses frites, tout ce qu’il peut
manger avec sa fourchette, il le fait ! Il a peur de se salir les doigts et ne supporte même pas une
goutte d’eau sur son doigt ou ses chaussettes qu’il change parfois trois fois par jour.

La psychologue a fait passer des tests à mon mari et il était dans la limite. Il a aussi des rigidités
alimentaires.

Il a toujours été buté enfant, restant toute la journée s’il le fallait devant son assiette sans en
démordre, il ne mangeait rien de ce qu’on lui présentait. Il ne supportait pas les légumes, ne les
aimait pas. Il a même eu du mal avec les tomates à un moment donné petit !

Il a toujours eu les intestins fragiles comme dans sa famille et pendant longtemps même les
tomates lui détraquaient le ventre. Plus maintenant.

Mais il fait une fixation sur tout ce qui est légumes, légumes verts, légumes en général et ne
donne pas le bon exemple aux enfants. Je suis la seule dans la famille à manger mon quota de
fruits et légumes par jour ! Plus c’est vert, plus il recule, plus c’est vert, plus j’adore !

J’ai envoyé un message d’aide sur Facebook sur un groupe pour parents d’enfant autiste. J’ai
demandé de l’aide et conseil à mon enfant Aurélien au sujet de son problème d’alimentation et
sa rigidité alimentaire de plus en plus pesante sur la famille et sur sa santé. Sitôt le message
approuvé, on m’a demandé si j’avais dans un premier temps fait un bilan orthophonique pour
une suspicion de troubles de l’oralité. Non, on ne m’a jamais proposé cela.

Le lendemain, je regarde sur internet ce qu’est ce trouble et je me dis que cela peut être le cas
pour mon fils. Les causes pourraient être autant sensorielles (hyper ou hypo sensibilité),
neurologiques dues à son handicap qu’est l’autisme, que familiales vues mes antécédents
d’anorexie, de troubles alimentaires…

Sur internet, on y note des signes par exemple de personnes qui restreignent leur alimentation
qu’a une marque ou une couleur d’aliment ou qui présentent des défenses sensorielles (ne
supportent pas avoir les mains sales par exemple, ce qui est le cas pour Aurélien qui est très
sensible des mains et des pieds, qui ne supporte pas d’avoir la moindre goutte de salissure sur
les extrémités.)
Je suis sur liste d’attente.

En cherchant sur le site de la sécurité sociale, AMELI sur les pathologies soignées par
l’orthophoniste, je vois un schéma qui finalement, démontre que ce thérapeute prend en compte
non seulement des troubles de l’oralité, mais aussi de la dysgraphie et de l’autisme. Lorsque
j'aurai rendez-vous, je parlerai de tous les problèmes d’Aurélien et voir en quoi elle peut l’aider
pour progresser non seulement dans ses problèmes alimentaires, mais aussi dans son trouble
autistique.

J’ai déjà eu affaire à une orthophoniste pour mon fils aîné Tristan autiste, mais qui avait un
retard de langage, ne disant qu’un mot à ses trois ans en rentrant en maternelle et faisant de
l’écholalie.

Clément a fait un bilan orthophonique, car il a une déformation du langage pas trop grave, il a
un schlintement, une déglutition immature et dysfonctionnelle demandant un avis orthodontiste.

Finalement, ils vont peut-être tous passer par la case orthophoniste.

Sur internet, on peut trouver aussi le trouble de l’alimentation sélective (SED en anglais), qui
est assez fréquent chez les autistes pour qui il peut y avoir un souci d’intégration sensorielle.
Cela consiste à manger une gamme limitée d’aliments associée à une forme de néophobie.
Commun chez le jeune enfant, il peut persister à l’adolescence voire au-delà pour un petit
nombre, majoritairement des garçons. Cela peut pour certains conduire à de la malnutrition, des
retards de développement, des problèmes de croissance et de prise de poids, et des problèmes
de santé connexes. Il peut être associé à des tocs, et à la peur de la saleté, et de la contamination.

On peut corriger ce mode de comportement par une thérapie comportementale.

En 2012, en pleine période de dépression à la naissance de mon dernier fils tout juste après le
diagnostic de mon trouble bipolaire, ma belle-mère s’installe chez nous pour nous aider, étant
elle-même en situation précaire. Une pierre deux coups, chacun y trouve son compte.

Mais la cohabitation est difficile, et en 2013 je sombre peu à peu dans l’anorexie, tandis que
mon fils Clément, allergique au lait, picore et est petit mangeur, ne finit pas ses pots et on
suspecte une anorexie du nourrisson.

Je prépare tant bien que mal les repas, sachant que pour Florent, les légumes sont bannis alors
je fais essentiellement des choses pour lui. Quand je me fais des légumes, c’est très rare. Les
repas tournent autour du régime alimentaire de Florent a qui je tente de faire plaisir au grand
désarroi de ma belle-mère qui pour peu dit que je ne sais faire que de la « merde ».

Elle a toujours été soucieuse de son alimentation, quasiment végétarienne, cuisinant


principalement du « tout maison » et des légumes de saison. Ma mère ne m’a jamais appris à
cuisiner et je fais des plats cuisinés au grand désarroi de ma belle-mère qui dit que j’empoisonne
sa famille.

De temps à autre, je cuisine des recettes, mais c’est toujours la soupe à la grimace, chacun ayant
toujours un reproche à faire « j’aime pas le riz », « il faut décortiquer le poulet », « j’aime pas
ceci »

Une fois sortie de ma dépression en 2018, je commence un régime, un recadrage alimentaire et


réapprends à manger équilibré, des légumes que j’aime tant, à manger comme j’aime plutôt que
de me plier au « régime » imposé par mon mari pour lui faire plaisir. Je reprends plaisir à
cuisiner.

Puis au détour d’une phase maniaque et d’une prise de conscience en mars-avril 2019 à la suite
de maux de ventre de Tristan, je vire le « tout industriel » et je commence à faire du « tout
maison ». J’avais commencé à ressortir mes livres de recettes, à réactualiser mes recettes, et les
commentaires « tu fais de la merde et du poison » sont devenus des compliments.

Les adultes se régalent, les enfants moins.

Les cordons-bleus maison ne passent pas, ils préfèrent la purée en sachet que la purée avec de
vraies pommes de terre.

Mais je me suis mise au végétarisme et finalement les conseils de ma belle-mère ont eu raison
de moi, ils ont trouvé écho en moi malgré moi. Les conseils et raisons de santé autour de la
diététique ont fait leur chemin et j’ai été même au-delà de ses espérances. Elle est dans la
mouvance végétarienne, on peut la qualifier de flexitarienne, mange de temps à autre du
jambon, ou lors de repas familiaux de la viande, mais évite en dehors… moi j’ai éradiqué la
viande et tends à bannir le poisson.

Elle achète parfois des plats surgelés chez Picard, moi je fais de plus en plus de plats maisons.
Je passe ma vie au fourneau.

Mes repas festifs en cas d’invitations sont dignes d’un festin, comme je n’ai jamais fait. Je me
surpasse. Je passe beaucoup de temps à la cuisine.

Et j’ai encore des têtes de déterrés face à mes plats : mes enfants

Un soir, le flegme. Je ne sais pas quoi faire à manger. J’en ai assez depuis un mois où je n’ai
pas trop d’argent pour faire des pâtes à longueur de temps. Je questionne la famille. Personne
ne répond. Florent ne répond pas. Alors je m’attelle. Je prépare du poisson en papillote et
décongèle un restant de poulet à la crème au cas où il ne veuille pas de poisson.

Tristan veut bien de la purée jambon mouliné. Je le cuisine avec de la vraie pomme de terre.

Clément finit ses saucisses knackis. Et Aurélien finit ses pilons de poulet.

Moi, j’attends la cuisson du poisson.

Mais monsieur est pressé, il a faim et veut manger avant la fin de la cuisson du repas alors cela
va être « chauffage au micro-onde » avec les restes.

Une fois à table, Tristan goûte et demande quel type de pomme de terre il s'agit. De la vraie,
pas de la purée mousseline. Il trouve cela « moyen ». Il sort de table.

Aurélien mange les trois quarts de son assiette vite expédiée comme d’habitude comme s’il ne
supportait pas d’être à table. 5 minutes chrono.

Clément mange la moitié de sa saucisse avec un peu de restants de pâtes


Et le papa regarde le poulet en faisant la grimace, il n’a pas envie de poulet, cela ne lui dit rien,
et le poisson n’est pas prêt. Alors il mange le restant de pâtes de la veille. Et moi je reste comme
une idiote à attendre que le poisson cuise.

Il m’arrive d’en manger encore maximum une fois par semaine.

Je me retrouve toute seule du coup à les regarder et finalement, je me rabats sur des tomates
mozzarella. Et finis mon repas toute seule comme d’habitude. Il y a quelques mois, j’étais toute
seule à table par moment !

Ce type de repas hélas ne fait pas exception, il y en a des listes, moi mangeant du vert et des
légumes, la salade ou ma soupe, mon mari exécrant le vert et les légumes, se rabattant sur les
pâtes et pomme de terre et pizza. Aurélien ne supportant pas les produits laitiers, et sélectifs de
point de vue alimentaire au plus haut point. Aurélien aimait les tomates œufs durs et crudités,
mais Tristan n'aimait pas les tomates, toute la famille aimait le fromage, mais Aurélien n'aimait
pas les produits laitiers. Il lui est impossible de manger tout ce qui en contient, c’est à bannir,
les pizzas aussi, les quiches… quiches que Clément adore et Tristan et le papa aussi. Le moins
mauvais de tous c’est Tristan, car il peut manger de la salade verte, des choux-fleurs en
béchamel, de la ratatouille…

Je peux vous dire que faire à manger dans cette famille relève du casse-tête chinois. Il faut un
plat à la carte pour chacun. Ou sinon, c’est plat de pâtes tous les jours. Ou faire une pizza maison
avec une part sans gruyère râpé, une autre sans tomate… et moi toujours avec mon menu
végétarien. Avec mes légumes, ma salade et ma part de féculents. La seule à manger, je pense,
le plus sainement possible tous mes fruits et légumes avec sa part de protéines.

Je suis désespérée de voir le régime alimentaire carencé de ma famille qui ne mange ni fruits,
ni légumes, ne se nourrit que de féculents, de sucre, de pizza…
La lenteur

Nous les autistes, nous sommes lents. Pas tous. Aurélien et moi. Et je le saurai plus tard, Tristan
a le même souci de décalage. Mais certains autistes ont un décodage très lent des informations.
Il faut décoder le sens d’une question avant de réfléchir à formuler une réponse. Si bien que
pour la plupart du temps, il y a un blanc. Je n’ai pas de repartie du tout. Je ne sais pas comment
réagir. Et je rumine bien des heures plus tard en me disant que j’aurais dû dire ceci ou cela.
C’est bien pour cela d’ailleurs lorsque l’on m’agresse, je ne sais que répondre. Le temps que
l’agression fasse son chemin dans mon esprit et que je trouve une réponse adéquate, la personne
est déjà partie. Je ne sais réagir qu’après avoir réfléchi à la situation et seulement si elle se
reproduit une nouvelle fois et que je m’y suis préparée, et encore parfois, je ne sais pas
forcément réagir à une agression.

Dans les discussions, en réunion, de travail ou de famille, c’est pareil. La question est posée
mais le temps que je réfléchisse, que je me dise quelle réponse donner le sujet est déjà fini. Si
bien que je suis muette lors des réunions.

Si l’on doit disserter ou donner son opinion, un point de vue, je ne sais pas, car pour ma part, il
me faut faire d’abord la liste « des pour et des contre », connaître mon sujet, faire des recherches
dessus, avant de me lancer sur un sujet aussi difficile que la politique par exemple…

Donner une opinion est au-dessus de mes forces si cela ne relève pas de ce que j’ai vécu, comme
la maltraitance, de mes intérêts… donner une opinion sur la vie en société, les actualités que je
ne comprends pas, vu que je ne suis pas comme je ne regarde pas la télévision ni ne lis les
magazines et journaux… cela relève de l’exploit.

Cela énerve au plus haut point mon mari lorsqu’il me pose des questions et ne me voit pas
répondre, se demandant si j’entendais ou si je me moquais de lui. Non, je réfléchissais à ma
réponse. Je réfléchissais déjà à la compréhension de l’intégralité de sa phrase, son sens, la
complexité de ses mots, puis j’ordonnais mes mots pour ne pas dire de bêtises. Pour moi cela
durait une seconde, lui vingt.

Je peux vous dire que dans ce cas-là, passer un entretien d’embauche relève de l’exploit pour
moi. M’y préparer soit, mais il suffit que je me retrouve avec des questions auxquelles je ne
m’attendais pas, avec des réponses qu’il faut que je trouve à la seconde près et c’est la
catastrophe. Réfléchir à une réponse adéquate, parfaite, représentant mon expérience et ma
formation et ce que j’en ai retenu en une seconde du tac au tac, alors qu’il me faut bien plus de
temps… je panique automatiquement, c’est le blanc, mon esprit se bloque, je bafouille, je
n’arrive plus à penser et c’est la crise… un entretien d’embauche, c’est le summum de
l’imprévu, je ne supporte plus. Je voudrais tout prévoir, tout calculer. Mais là, devoir répondre
à des questions tout en étant jugée à une réponse qui doit être instantanée, je ne peux pas. Je
n’ai pas l’esprit vif.

Savoir par exemple ce que je ferais si un jeune faisait une telle situation. Comment réagirais-je
face à une confrontation ? Je ne réagis que sur le moment, et me demander comment je réagirais
sur une situation qui ne s’est jamais présentée est impossible pour moi. C’est chou blanc assuré.
Je n’arrive pas à me mettre en situation, à m’imaginer être en action ni comment je réagirais,
comment je l'anticiperais ?
Voilà pourquoi je rate tous mes entretiens d’embauches, à cause de ces situations impossibles
pour moi.

Je suis lente pour beaucoup de choses, pour penser, pour manger, pour vivre… j’aime le calme
et je ne supporte pas de voir les gens courir autour de moi, les gens gesticuler, les gens en retard,
les gens stresser, les gens bruyants, toujours en mouvement… Tristan qui bouge de sa chaise,
Clément qui se lève trente-six mille fois de sa chaise au moment des repas, Clément limite
hyperactif, des enfants qui m’étouffent parfois à sauter dans tous les sens.

La société est folle, elle veut toujours plus de vitesse, plus de productivité, toujours plus
d’argent, de personnel actif, qui s’épuise au bord du Burn out…

Ma belle-mère me trouve Aurélien et moi trop lents. Mais qui a raison ? Est-ce elle qui est trop
active et nous trop lymphatiques ? Ou est-ce à nous de nous faire violence pour nous
accommoder à une société qui nous rejette ?

Trop lent pour travailler !

J’ai eu plusieurs emplois ! En boulangerie, un mois : viré, car je n’étais pas assez rapide. J’ai
travaillé six mois dans la saisie de chèque : on me demandait de les saisir le plus vite possible,
du coup, plus je les tapais vite, plus je faisais des erreurs, non seulement je faisais trop d’erreurs,
mais en plus je n'étais pas encore assez rapide pour eux. Virée aussi.

J’ai travaillé au foyer d’aide sociale à l’enfance : on m’a demandé pourquoi je ne parlais pas en
réunion. De plus, j’étais tellement lente (et j’étais dépressive) qu’on me demandait si j’étais
shootée, car j’étais à deux de tension.

Aurélien est lent en tout : pour manger, pour apprendre à nager. Lors des cours de natation, il
était toujours à la traîne, avec toujours une longueur en retard. Ma belle-mère a remarqué sa
lenteur depuis tout petit. Pour ma part, je ne me suis pas posé de question, je suis de nature
lente, ma mère aussi. Nous ne sommes pas des rapides dans notre famille, pas des hyperactifs
comme dans la famille à ma belle-mère, qui, je le découvre par ailleurs souffrent aussi
d’hypertension (est-ce que cela a un lien ?). Au contraire, les gens trop rapides m’énervent,
m’épuisent. J’ai toujours pris le temps de manger, je ne vois pas pourquoi il faut toujours se
presser pour risquer de s’étouffer, pourquoi les gens sont si pressés pour tout, au risque d’un
accident. Je prends le temps de vivre, je patiente, je suis patiente, je sais attendre. La lenteur est
propre à la dyspraxie d’Aurélien. Il prend son temps pour éviter de faire tomber ses aliments de
sa fourchette, pour éviter de tomber lui-même, il est lent pour marcher. Il est lent à coordonner
ses mouvements, car tout lui semble difficile. Je suis lente à manger non seulement, car je
réfléchis à tout ce que j’avale et décode chaque sensation, chaque aliment, chaque couleur, mais
aussi parce que je décode la sensation qu’à l’aliment de passer dans ma gorge pour éviter
d’étouffer. Chez un être humain neurotypique, tout est naturel, chez un autiste toute perception
est analysée… donc cela prend du temps.
Je n’arrivais pas à m’intégrer à l’équipe. Des personnes qui étaient embauchées presque au
même moment que moi, moins diplômées que moi, se débrouillent mieux que moi comme s’ils
avaient fait cela toute leur vie. Je restais plantée comme une statue à me demander ce qu’il
fallait faire, n’ayant pas le manuel, ni les codes pour savoir comment me comporter, comment
parler avec les autres, comment était organisé une journée type avec les jeunes à encadrer… il
fallait quasiment tout faire au feeling, connaître les règles comme si on avait travaillé depuis
dix ans dans le foyer, une semaine à peine arrivée j’ai fait une grosse bévue parce qu’on ne
m’avait pas expliqué qu’on ne devait pas faire telle ou telle chose…

Je ne prends pas d’initiative, il me faut connaître le fonctionnement de l’entreprise sans fiche


et règle, savoir ce que je dois faire chaque heure, chaque seconde. Être plongée dans l’inconnu
sans savoir ce que je dois faire. Sans guide. J’ai été plongée dans l’inconnu. Et j’ai sombré dans
la dépression. Les collègues ne m’ont pas intégré, j’ai été mise à l’écart. J’ai tenu quatre mois.
Quatre mois de stress où peu à peu je me suis retrouvée dans des états de déréalisation au
moment des réunions, ce qui me coupait des autres collègues et conversations, j’étais dans ma
bulle dans l’impossibilité de refaire surface pour discuter ou donner un avis que de toute
manière je n’avais pas.

J’ai un côté inexpressif quand les gens me regardent, et parfois on me demande si je me drogue
ou si je suis triste. Je suis statique et ne fais aucun mouvement, à part mes stéréotypies des
mains, mais pas d'agitation de bras pour accentuer mes paroles, pas de dodelinement de tête
pour prouver que je suis à l’écoute de mon interlocuteur… ce manque d’interaction sociale est
typique de l’autisme et on m’a fait remarquer un jour mon immobilisme dans les conversations,
et depuis je fais semblant, je secoue la tête à intervalle régulier pour dire que j’écoute même si
ce n’est pas naturel, mais je ne sais toujours pas joindre mes mouvements à ma parole.

J’ai une tendance aussi à ne répondre qu’aux questions qu’on me pose, par oui ou non, ou ne
détailler que si l’on m’incite à le faire. Je n’initie pas la conversation, je suis passive dans les
conversations et échanges, donnant l’impression d’un manque de réciprocité sociale.

Les autistes ont parfois un côté inexpressif. Ils ne laissent rien paraître de leurs émotions.

Lorsqu’il faut exprimer une émotion, je réfléchis à ce que je dois dire, ce que je dois faire,
comment consoler une personne, ce qui parfois me met dans des situations où je traduis le
contraire de ce qu’il faut faire. Soit on me trouve froide, distante… soit comme lorsque mon
fils aîné se scarifiait devant moi ou menaçait de se suicider, j’étais tellement en panique et cela
me renvoyait tellement à moi-même et à mes pratiques suicidaires que je me suis mise à rire,
un rire de détresse, car j’étais perdue, face à ce miroir qui me renvoyait ma propre souffrance.

Soit je suis muette, statique, ne disant rien. Et à l’opposé, on me dit que je suis bonne entendante,
car j’écoute les gens, je suis attentive à eux, ils se livrent à ma personne, sans forcément que
j’ouvre la bouche, sans que je leur livre de conseils, ce que je ne saurais faire d’ailleurs, par
peur de dire une bêtise. Non pas que ce qu’ils disent ne m’émeut, au contraire, pour certains, je
suis en plein dedans, dans l’émotion, je les comprends trop, mais voilà, je ne sais déjà pas
comment me consoler, me sortir de mes problèmes, alors faire de même pour les autres ?

Cela me donne un côté inerte et lymphatique, triste et inexpressif . Passive et molle, loin d’une
personne qu’on voudrait active.
Les hyper et hypo sensibilités

Aurélien est hypersensible à bien des moments.

Je pense que tant que l’on n’a pas pu faire des tests chez l’orthophoniste, nous ne saurons pas
tout à ce stade, mais il est déjà clair qu’il est sensible à certains goûts, ne supporte ni l’odeur du
chocolat ni celle du poisson…

Il est de point de vue tactile très sensible, ne supporte pas d’être sali, ne serait-ce qu'une goutte
de tache ou d’eau sur ses mains ou sur ses pieds, il est capable de changer de chaussettes chaque
fois qu’elles sont mouillées d’une de ces taches !

Bébé, j’étais terrorisée par la peur d’avoir un enfant maniaque !

Pour le moment, cela passe, mais qu’en sera-t-il sur le long terme si cela se dégrade ?

Au niveau du toucher, il a toujours aimé les câlins et être serré, se sentir câliner… la
psychologue m’a parlé d’un défaut de proprioception. Il ressent très bien la moindre douleur
sur son corps. Il est hypersensible au niveau tactile, au point que sa grand-mère a tendance à le
prendre pour une mijaurée dès qu’il pleurniche pour le moindre mal.

Elle le prend aussi pour un pleurnichard aussi lorsque je lui dis qu’il ne peut pas aller au cinéma
avec nous, car il ne supporte pas les bruits forts comme je l’ai remarqué la fois le jour où nous
sommes allés à la fête de noël du village pour voir un spectacle et qu’il l’a passé les doigts dans
les oreilles, car le son était trop fort, et malheureusement, le cinéma c’est dix fois pire que
cela… il lui a dit qu’il n’ira jamais en boîte de nuit de toute manière ! Je le comprends !

Il a un défaut au niveau de la motricité ce qui fait qu’il se fait mal, tombe souvent, se cogne, a
des bleus sur les jambes en permanence, rate souvent les marches des escaliers, les dévale, ou
les rate en montant. Il ne sait pas faire du vélo, ni ses lacets, ni n’importe quels nœuds, il
demande souvent de l’aide pour couper ses aliments… et nous fait du coup changer ses couverts
à chaque fois qu’on les touche !

Pour ma part, j’ai de hyper et hypo sensibilités.

Hypersensible à la lumière et au bruit. Je suis vite éblouie si bien que lorsque je conduis, c’est
au ralenti. Car une fois, même à 50 km/h, j’ai failli foncer sur un piéton que je n’avais pas vu,
qui traversait un passage piéton car le soleil m’éblouissait. Je l’ai vu au dernier moment, ai pilé
et l’ai juste accroché avec le rétroviseur droit alors qu’il arrivait sur le trottoir !
Je suis éblouie par le soleil, même lorsqu’il fait gris et qu'un nuage traverse le ciel, je passe ma
vie les sourcils froncés par la lumière ! J’éternue sans arrêt à cause de la lumière. Je suis éblouie
par les lumières des phares, même des feux rouges, et des feux-stops des voitures

Un bruit trop brutal, je sursaute, comme un chien, une moto, un train, je me cache les oreilles,
les grincements, je ne supporte pas, les bruits trop forts comme ceux du cinéma, aussi, entendre
les musiques trop fortes qui résonnent dans ma poitrine, je ne supporte pas, j’ai l’impression
que c’est mon cœur qui va exploser. Les cris des enfants, surtout le soir en cas de fatigue, de
plus en plus souvent, et plus je vieillis plus c’est le cas plus j’ai du mal !

Je perçois les sifflements d’une télévision en veille.

Je ne peux pas suivre plusieurs conversations à la fois, j’ai du mal à dissocier les différents sons
à la fois, ce qui fait que je ne peux pas du tout travailler dans un endroit où il y a trop de monde,
trop d’ordres à la fois. J’ai travaillé en boulangerie, et je n’entendais pas les commandes de mon
client quand d’autres clients commandaient à côté avec la serveuse à côté ! J’ai du mal à
entendre une conversation au téléphone quand il y a trop de bruits autour. Lorsque je lis, il me
faut un silence total pour pouvoir lire, car le moindre bruit me dérange.

Je suis gênée même en temps gris et couvert s’il y a de la luminosité.

Je ne supporte pas le bruit quand je dois dormir, comme le tic-tac d’une montre, comme lorsque
mon mari regarde une vidéo sur son portable au lit. Lui s’endort facilement devant la télévision
allumée, moi non, il me faut du calme et du silence.

Odorat : j’aime les odeurs fortes, comme le fumier, les odeurs de ferme. Je déteste l’odeur de
l’usine à sucre de betterave de mon secteur quand j’y passe, les odeurs de vanille, et monoï.

Goût : c’est pareil, hypo sensible, j’aime les goûts prononcés, riches en saveur, épicés, et
bouillants… je sale très peu.

J’ai tendance à mettre les doigts dans la bouche en permanence, à toujours me frotter les dents
avec mes ongles.

Douleur : je suis hypo sensible à la douleur. J’ai pratiqué pendant longtemps l’automutilation
avec des cutters, rasoirs puis scalpel, j’ai un jour où je ne voulais pas attendre des mois avant
un rendez-vous du gynécologue pour retirer mon implant contraceptif, j’ai voulu le retirer moi-
même, m’ouvrir mon bras pour le récupérer. Je me suis ouverte, mais l’implant était trop
profond, j’ai dû aller aux urgences même si le sang coulait peu. Les urgentistes m’ont prise
sûrement pour une folle, ont eu du mal à extirper l’implant avant de me recoudre.
Mais à chaque fois que je me suis ouverte, je n’ai pas eu mal. C’était comme si, je me coupais
de mes sensations. Je me sentais comme déconnectée de mon corps, comme si je me voyais au-
dessus de lui… en état de dépersonnalisation.

Une autre fois, lors d’un repas de noël chez moi, j’ai sorti la viande du four, le couvercle m’a
échappé des mains et est tombé bouillant sur mon bras. Je l’ai retiré aussitôt, mais il m’avait
brûlé au second degré. Je n’ai pas hurlé, juste constaté la brûlure et n’ai rien fait pour soulager
la douleur que je n’ai quasiment pas ressenti.

Les jours suivants, je n’ai pu que constater les cloques gonflées et suinter, s’écouler puis
disparaître.

Toucher : je suis hypo sensible, on peut appuyer, me faire des pressions à des points douloureux,
je ne réagis que très peu ! Lors d’un salon sur le bien-être, il y avait une séance d’essai de
massage pression, où selon le masseur, les autres clients réagissent au point sensible. Je ne
sentais rien, au contraire, pour moi, cela me relaxait.

La seule douleur à laquelle je réagisse, c’est la migraine ! Ma mère me berçait des minutes et
des minutes le temps que je me calme étant petite. Je suis allée plusieurs fois à l’hôpital aux
urgences parce que cela ne passait pas adulte et que j’en avais avec aura, que je ne pouvais plus
parler, que je vomissais mes tripes, et que je ne tenais plus debout.

À côté de cela, les douleurs de l’accouchement, je les ai à peine ressentis, pas même les
contractions ! je les prenais tellement à la légère que j’aurais très bien pu rester à la maison et
sans le vouloir accoucher à la maison sans avoir écouter ces douleurs qui pour moi n’en étaient
pas. On m’avait tellement parlé des souffrances de l’enfantement comme quelque chose de
terrible, de pires douleurs qu’une femme pouvait avoir, que je n’ai pas cru que j’accouchais à
un moment donné. Je me fiais seulement à la régularité de ces pseudo petites douleurs ! Et à
mon instinct.

Et lorsque je suis en phase maniaque, je suis insensible aussi au froid. J’ai découvert une photo
de classe de mes 18 ans où j’étais juste en chemise légère qui m’arrivait au-dessus du nombril
alors que les autres élèves étaient tous en manteaux. Mais je ne suis pas forcément hypo sensible
qu’en phase maniaque, mais tout le temps, que cela soit en phase maniaque, dépressive ou
normale.

Je ne suis pas du tout chatouilleuse, je reste de marbre.

Je ne supporte pas les vêtements serrés et moulants, je ne supporte pas les talons hauts, je suis
toujours en basket, il n’y a qu’avec cela que je me sens confortable

Je m’habille toujours avec des vêtements amples et peu féminins. Je déteste les collants et les
robes, car je me sens nue. Je ne supporte pas le maquillage et je n’aime pas la mode. Je ne
supporte pas les pulls qui grattent ou ceux qui font de l’électricité statique en hiver, j’aime
difficilement les pull-overs. Je n’aime pas les jupes ni les robes, j’ai l’impression de me sentir
nue.
J’ai toujours aimé comme Aurélien être caressée et serrée dans les bras, bercée. En revanche,
je suis insensible là où une femme devrait réagir, aux zones érogènes comme les seins et je ne
supporte pas que l’on touche mon sexe. J’aime que mon mari me caresse les fesses et le dos,
cela me relaxe. Comme si tout ce qui se situait sur le devant était devenu insensible. Peut-être
est-ce qu’il y a un lien avec les attouchements de mon beau-père qui me touchait le ventre, les
seins et le haut du pubis ? Et tous ces viols subis par mon ex-mari ?

J’ai besoin d’être emmitouflée comme une camisole protectrice, de couette, de draps, jusqu’au
niveau de mes oreilles, jusqu’au pied. Mes pieds ne doivent pas dépasser du lit ni des draps…

Cela a sûrement un lien avec un défaut au du touché et proprioceptif !

Et je suis hypo aussi côté vestibulaire, car je passe mon temps à me balancer en permanence
d’une jambe à une autre, comme cherchant mon équilibre, tournoyant mon corps d’un côté à
un autre, me balançant parfois d’arrière en avant quand je suis assise ou en période de stress,

J’ai toujours beaucoup aimé les attractions à sensations fortes où l’on tournoie, où l’on a la tête
à l’envers et le corps dans tous les sens, et l’estomac prêt à renvoyer.

Une nouvelle année commence.

Ma psychologue a de plus en plus de doute tout comme moi sur un possible TSA chez mon
mari, ou du moins des caractéristiques.
Traits TSA : Florent

Surcharges sensorielles

· Hypersensibilité auditive, hyperacousie

· Grande fatigabilité quand il y a trop de bruits en même temps

· Hypersensible : a toujours trop chaud, a horreur d’avoir trop chaud en été ou sous un
drap alors que je meurs de froid avec deux couettes !

· N’aime pas les espaces bondés : horreur des transports en commun qu’il doit prendre
tous les jours, n’aime pas les magasins… besoin de prendre de médicaments pour palier à
cela et aux angoisses des transports

· Attiré par les bruits discrets

Problématique de sommeil

· Trouble du sommeil depuis l’enfance

· Problèmes dans la gestion de son sommeil : capable de jouer tard la nuit ou de regarder
la télévision tard alors qu’il travaille le lendemain et se réveille à 4 h du matin tout en se
plaignant que c’est lui qui dort le moins ! N’écoute pas son corps ! Sa mère m’a dit que
lorsqu’il était petit, elle était obligée de rester à ses côtés à lui tenir la main jusqu’à ce qu’il
s’endorme sinon, il n’y arrivait pas, et sitôt qu’il se réveillait si elle s’en allait tout était à
refaire (cela me rappelle Tristan au même âge !).

Anxiété

· Anxiété cachée derrière des problèmes d’alcool

· État dépressif par moment, grande fatigue (fait parfois sa baleine échouée d’après sa
mère)

· Peu sûr de lui

Difficultés dans les relations avec les autres/interaction sociales

· Alcool qui cache un mal être en société (l’alcool à partir de l’adolescence et début de
l’âge adulte permet de faciliter la socialisation et on boit comme tout le monde, donc si on
boit on s’intègre puisque tout le monde le fait, c’est comme la cigarette)

· Influençable
· Pas doué pour le bavardage en société

· N’apprécie pas le bavardage en société

· Difficile de se faire des amis

· N’aime pas les événements sociaux : mariage, anniversaire…

· Se complait à être seul et à travailler seul à son travail derrière son ordinateur (dit avoir
travaillé seul pendant 4 ans sans collègue à son bureau et est maintenant en binôme)

· Ne sait pas comment entretenir une conversation, voire mutique.

· Les situations de la vie sont difficiles pour lui

· Trouve difficile de décoder les intentions des autres

· Par moment : manque de conventions sociales qu’il faut rappeler (oublie d’appeler pour
remercier d’avoir donné de l’argent, oublie d’appeler pour les anniversaires,

· Oublie de m’appeler pour prévenir qu’il sort et qu’il rentre tard donc que je n’ai pas à
m’inquiéter ! Manque de convention ? Ou manque d’empathie ? Ou impossibilité pour lui
de se mettre à la place d’autrui ?)

· Sa mère dit que par moment il manque de savoir vivre !

· Assez fuyant pour certains de ma famille, ne fixait pas le regard, ne discutait pas, se
levait et semblait occupé ou s’occupait de ses enfants… Pour certains de ma famille, il n’est
pas sociable. Regard fuyant même avec moi. Quand on est face à face, il fixe un point sur
mon visage sans fixer mon regard.

· Impression par moment de regard fuyant, ne me regarde pas quand je lui parle, peut-
être avec d’autres aussi

· Entrer en relation avec une personne est difficile surtout avec la gent féminine. Les
relations avec l’autre sexe sont difficiles. Je suis sa première vraie femme et je suis autiste !
entre autistes on se comprend !

· Petit, il refusait d’être avec les autres enfants, par exemple lorsqu’il allait au centre aéré,
même s’il a toujours eu a posteriori des camarades.

· Ne sait pas parler de ses émotions ni réconforter. Problèmes de démonstration


d’empathie, ne sait pas comment exprimer les choses alors rester bloqué et ne dit rien. C’est
un mur, on ne sait pas ce qu’il pense. Ce n’est pas par manque d’empathie, c’est par
surcharge émotionnelle qui le bloque et qu’il ne comprend pas et ne sait pas quoi dire ni
faire. Florent fait des blocages. Si je lui parle de mes soucis, il ne saura pas me réconforter
ni dire quel mot pour le faire. Alors j’ai droit à du silence et je parle généralement toute
seule.

Particularités
· Alexithymie : il ne sait pas exprimer ni reconnaître ses émotions, ne sait pas consoler
les autres non plus. C’est un vrai bloc, un mur.

· Ne sait pas s’imaginer dans la peau d’un autre

· Fuite du conflit, incapacité de se mettre en situation d’autorité ou ne sait pas comment


réagir face à certaines situations lorsqu’il n’a pas été confronté lui-même à l’acte
(impossible de se fâcher et imposer son autorité de père quand c’est moi-même qui me suis
fait agresser à l’étage au-dessus et qu’il n’a rien vu s’il n’y a pas été confronté lui-même),
incapacité de visualiser, d’imaginer, d’anticiper, de s’imaginer en situation…

· Ne sait pas inventer des histoires

· Trop sincère, ne sait pas mentir, ne sait pas quémander ni pleurnicher pour obtenir
quelque chose

· Ne sait pas mentir, ou quand il le fait, cela se voit sur le bout du nez

· Calme d’apparence avec rare explosion de colère en cas de grosse fatigue. Dans ce cas-
là, c’est impressionnant (a balancé une commode).

· Enfant, ne savait pas jouer tout seul, il fallait qu’on s’occupe de lui contrairement à son
frère plus indépendant, de nature

· Introverti, même s’il aime rencontrer des gens, il aime sa solitude, casanier, aime être
tranquille et peu bavard

Routine

· N’aime pas quand ses habitudes sont bousculées

· N’aime pas la nouveauté,

· A des autostimulations, mouvements de jambes continuels (même en salle d’attente !)

· Rigidités alimentaires : allergique aux légumes surtout aux verts, ne supporte pas le
goût et la couleur des légumes

· Néophobie

· Aime faire les choses toujours de la même façon

· Aime planifier les choses

Santé

· Problèmes gastro-intestinaux fréquents chez les autistes

· Migraines, otites (étude qui parle de maladies fréquentes chez les autistes)
· Peur des examens sanguins (aiguille. Tourne de l’œil facilement)

Compétences particulières

· Remarque les détails, les plaques d’immatriculation

· Retient les chiffres, doué en maths, retient les dates

· Intérêt pour les chiffres, l’astronomie, le jeu d’échecs, les jeux vidéo, le cinéma, la TV ;
histoire

· A des facilités pour apprendre, a fait des études supérieures, est cultivé

· Capacité d’apprentissage impressionnante (a fait les travaux du garage, en a fait un


duplex alors qu’il n’y connaissait rien, juste en se documentant et en demandant à ses
copains des conseils ! il a hormis appeler une fois le plombier et demander le raccord de
l’électricité sur le boîtier à son voisin électricien, tout fait de A à Z, il a aménagé 60 m 2 au
sol !)
Le 16 janvier 2020

Nous nous réveillons tôt, vers 6 h. Nous nous préparons. C’est le jour J. Aurélien va prendre
les transports en commun pour la première fois, le RER lorsqu'on est en pleine période de grève.
On angoisse d’avance. Mon mari est déjà phobique en temps normal, se payant des diarrhées
d’angoisse tous les matins en allant au travail, car il ne supporte pas de prendre les transports
en commun. Aurélien ne connaît pas cette expérience-là.

Je mange un petit déjeuner moi qui grignote à peine en temps normal. Je ne sais plus quoi
manger le matin en ce moment, car je ne digère plus rien.

Nous prenons enfin le train. Nous sommes assis, car nous prenons le RER en fin de ligne. Les
gens montent au fur et à mesure, je me sens de moins en moins bien. Je ne sais pas si je suis
nauséeuse à cause du petit déjeuner que je ne digère pas ou si c’est mon angoisse de voir du
monde tout autour de moi.

Nous arrivons sur Paris pour le changement de train. Nous devons attendre quatre trains avant
de pouvoir avoir la place de monter dans la correspondance. Nous sommes debout, serrés. Je
me sens au bord du malaise, les fourmis dans les doigts, toujours nauséeuse. Je respire
calmement, et essaie de me calmer.

Et je suis mieux une fois arrivée à destination.

Je cours presque à l’arrivée du cabinet des psychologues qui vont tester Aurélien.

Nous entrons. Nous attendons quelques minutes seulement.

Et la psychologue que je connais déjà pour m’être déjà testé auparavant en novembre 2018
lorsque j’ai été diagnostiquée nous fait rentrer dans son bureau.

Nous allons faire l’ADI-R

Aurélien se met un peu à part, éloigné, sur un siège. Il répondra aux quelques questions qu’on
lui posera avant de se réfugier quand ce sera à notre tour de répondre sur sa console.

Nous faisons l’anamnèse, elle nous questionne sur des détails de son enfance dont nous ne nous
souvenons pas forcément. Nous nous souvenons cependant qu’il ne jouait pas à ses jeux, et
petit, collé à moi. Je lui avais acheté une dînette, une cuisine comme il avait à la crèche pendant
qu’il y jouait comme les enfants le font à la crèche. Il n’y a jamais joué. Il a très peu joué à des
jouets, voitures, Playmobil, jeux d’imaginations, faisant semblant… ma belle-mère se souvient
qu’il était collé à moi.

Nous ne nous sommes pas souvenus de stéréotypies ni de maniérismes, mais l’ADOS de


l’après-midi confirmera qu’il en a de nombreux.

J’avais l’impression, au fil des questions, que mon fils n’avait rien d’un autiste, car on répondait
toujours par la négative ou par des je ne sais pas. On a parlé des problèmes alimentaires et ses
hypersensibilités.
De ses contacts sociaux difficiles, du fait qu’il se fasse ennuyer, et qu’il est un peu peureux à
aller vers les autres, qu’il n’ira pas de lui-même demander de l’aide non plus…

J’avais l’impression que nous faisions fausse route et qu’il n’était pas si autiste que cela, car à
chaque question mon mari disait « ah oui cela c’est mon aîné, mais pour Aurélien je ne sais
pas » … tout faisait sens pour Tristan, mais était difficile à cerner pour Aurélien.

Mais au bout du compte, à la fin des tests, elle nous annonça que le résultat était positif d’entrée
de jeu, et que ce sont les interactions sociales qui faisaient défaut. Elle nous dit que les tests de
l’ADOS augmenteraient peut-être d’autres résultats que nous n’avions pas forcément
remarqués (comme les stéréotypies) et que l’ADOS confirmera l’autisme d’Aurélien.

À midi, nous sommes partis manger au restaurant avec Aurélien, un tête-à-tête très agréable en
famille, malgré l’ignorance d’Aurélien qui disait qu’il s’en moquait. Puis nous sommes allés
nous promener au parc des sceaux après, malgré les grognements d’Aurélien qui râlait parce
qu’il avait mal aux pieds.

L’après-midi, Aurélien se retrouvait tout seul avec une autre psychologue à faire les tests de
l’ADOS. À travers la porte, on pouvait parfois entendre la conversation. Quand j’entendais
parler de la liste de ses copains, je me suis dit qu’avec autant de camarades, elle va penser qu’on
ne peut pas être autiste. J’entendais Aurélien dire sans cesse « je ne sais pas », je l’ai senti
résistant au début et j’ai espéré qu’il soit coopérant, car je sais que le contact est difficile avec
lui.

Lorsque les tests furent finis au bout d’un peu plus d’une heure, la psychologue nous a confirmé
le diagnostic d’autisme aussi. Elle nous a dit qu’Aurélien avait beaucoup de maniérismes en
nous montrant quelques-uns, dont un qu’Aurélien fit devant nos yeux alors qu’il était derrière
nous au sol sans se douter qu’on le regardait. Elle nous a dit qu’il se frappait la tête quand il
réfléchissait et qu’il fallait qu’il cesse cela au risque de se faire du mal. J’ai pensé aussitôt aux
annotations de la psychomotricienne qui avait remarqué une fois Aurélien se frapper la tête
contre le mur. Elle nous a dit qu’il parlait parfois en lui tournant le dos et qu’il y avait un manque
de réciprocité flagrant dans les échanges. Elle m’a interrogé et m’a demandé si c’était moi qui
m’étais fait tester et m’a donné un exemple de manque de réciprocité dans les conversations
d’une personne qui parle de ses vacances et l’autre ne réagit pas ou seulement quand on le
secoue. Dans l’autisme, le manque de réciprocité se traduit dans le fait que l’autiste ne parle
que quand on lui pose des questions. Ce qui est mon cas et ne va pas d’emblée initier une
discussion, s’intéresser à l’autre, lui poser des questions…

Elle m’a dit qu’il avait des postures d’assise inconfortables pour un être humain, elle a essayé
de nous montrer comment il s’était assis, elle n’a pas réussi. Cela m’a fait penser aux positions
de mon mari lorsqu’il s’assoit, il est pareil. Elle nous a parlé d’autostimulation. Elle nous a dit
qu’il s’était plusieurs fois mis à se balancer frénétiquement.

Lorsqu’il ne voulait pas faire quelque chose et était dans le refus, il se prostrait dans un coin et
se bouchait les oreilles. Il n’a jamais voulu s’asseoir en face de la psychologue sur une chaise
devant le bureau, mais il s’est mis sur des coussins un peu plus éloignés dans un coin.
Tant de choses qu’elle a vu lors des tests typiques de l’autisme que nous n’avions pas vu. Nous
voyons Aurélien tous les jours. Je pense que oui, il a tendance à se frapper la tête par moment,
mais je n’ai pas fait attention au côté inhabituel de l’acte, et que cela venait de son autisme…

J’avais envie de fondre en larme

J’espérais la confirmation du diagnostic, car tout le monde nous disait que Aurélien était
sûrement autiste. Mais entre se douter d’une chose et d’entendre après des tests la confirmation
du diagnostic c’est autre chose. Bien sûr que j’aurais espéré que mon fils ne soit pas handicapé.
Maintenant, cela a un nom. Il est atteint de TSA et on va pouvoir l’aider grâce à des
professionnels, en plus d’être dyspraxique.

Nous sommes rentrés en RER, j’ai eu un peu moins d’angoisses que le matin. J’ai envoyé
pendant le voyage des messages à ma psychologue pour lui dire que le diagnostic était confirmé.
Elle va devoir aller parler à l’école d’Aurélien pour expliquer l’autisme, en espérant ainsi que
des « harceleurs » arrêteront de le prendre pour bouc émissaire.

À peine sur le quai, et dans le train, les bruits des freins du RER ont été pénibles pour Aurélien
et moi-même et au même moment, nous nous sommes tous deux bouché les oreilles. Les
crissements des freins et les vrombissements qui traversaient notre corps m’étaient autant
insupportables qu’à Aurélien.

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