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Cahiers d’études du

religieux. Recherches
interdisciplinaires
3  (2008)
Transmission, traduction, propagande (II)

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Danièle Vazeilles
Connexions entre le néo-chamanisme
et le néo-druidisme contemporains.
Étude en anthropologie/ethnologie
comparée
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Référence électronique
Danièle Vazeilles, « Connexions entre le néo-chamanisme et le néo-druidisme contemporains. Étude en
anthropologie/ethnologie comparée », Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires [En ligne],
3 | 2008, mis en ligne le 04 juillet 2008, consulté le 04 mai 2013. URL : http://cerri.revues.org/161 ; DOI : 10.4000/
cerri.161

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Connexions entre le néo-chamanisme et le néo-druidisme contemporains. Étude en anthropolo (...) 2

Danièle Vazeilles

Connexions entre le néo-chamanisme et


le néo-druidisme contemporains. Étude en
anthropologie/ethnologie comparée
1 L’Anthropologie « vise à une connaissance globale de l’homme embrassant son sujet dans
toute son extension historique et géographique  ; aspirant à une connaissance applicable à
l’ensemble du développement humain depuis les hominidés jusqu’aux races modernes, tendant
à des conclusions valables pour toutes les sociétés humaines… depuis la grande ville jusqu’à
la toute petite tribu mélanésienne » (C. Lévi-Strauss, Anthropologie structurale, 1958, p. 388).
2 Les chamanes traditionnels disent œuvrer pour le bien être et la continuité de leur communauté
au moyen de dialogues avec les entités «  surnaturelles  », qu’ils obligeraient parfois à leur
obéir. Le monde « chamanique » est conçu comme formant un continuum espace-temps aux
frontières floues entre les espèces et les «  différentes réalités  ». Depuis les années 19701,
j’étudie les Indiens des Plaines, tout particulièrement les Sioux Lakotas des réserves, avec des
terrains plus courts auprès d’autres Amérindiens dans les réserves et chez les « Indiens des
villes ». De précédentes enquêtes (1984 à 1996) portaient en particulier sur les transformations
du chamanisme dit traditionnel pour l’adapter quelque peu au monde contemporain. Des
spécialistes du chamanisme, dont l’anthropologue Roberte Hamayon2, ont souligné les facultés
adaptatives du chamanisme qui lui ont permis de survivre à travers les siècles tout en gardant
une structure relativement semblable et de nombreux thèmes communs d’une culture à l’autre,
de l’Europe du Nord, à l’Asie centrale, à la Sibérie et au continent américain. Certains
spécialistes préfèrent d’ailleurs parler de « chamanismes » au pluriel pour souligner son unité
et la diversité de ses manifestations culturelles. N’en est-il pas de même pour le christianisme ?
3 À l’opposé, dans les pays occidentaux, les pratiques dites «  chamaniques  » des adeptes
occidentaux sont centrées sur le mieux-être de l’individu et prétendent que chaque être humain
peut apprendre à « chamaniser ». Depuis une quinzaine d’années, chez des Amérindiens et chez
les New Agers étasuniens, j’étudie ces pratiques devenues une mode entraînant un « tourisme
chamanique  ». J’ai montré que «  New Age  » et néo-paganisme reprennent à leur compte
maintes idées et notions des sociétés de type chamanique et animiste3.
4 Par ailleurs, des auteurs Sioux Lakotas ont adopté les croyances holistiques et universalisantes
de la mouvance magico-ésotérique, ici appelée New Age à la suite de spécialistes anglo-
saxons. Dans les écrits de ces Indiens, on remarque d’importants passages traitant «  des
connaissances spirituelles des anciens Celtes et de leurs druides ». Pourquoi les « Celtes » ?
Des néo-chamanes amérindiens rencontrent des « druides contemporains » lors de conférences
et de cérémonies. La musique celtique accompagne beaucoup de films contemporains, de la
dernière version du Dernier des Mohicans, aux Seigneurs des Anneaux et à Braveheart. Ces
films ont connu un certain succès chez les Sioux, dont certains possèdent un nombre important
de CD de musique celtique, qu’ils entendent aussi sur les ondes.
5 Dans les villes, des observations de terrain portant sur boutiques et objets variés, arts, festivals
et conférences inspirés par la mouvance ésotérique-mystique, sont aussi importantes que les
enquêtes orales. Une large part de travail a aussi été consacrée à l’analyse d’ouvrages écrits
par des néo-chamanes, des New Agers et des néo-païens (néo-druides et wiccans4) ; ainsi qu’à
la lecture de traductions, en langues anglaise et française, de textes médiévaux, des mythes,
légendes et contes des populations celtiques5, et aussi des travaux de recherches scientifiques
de linguistes6, médiévistes, historiens et archéologues spécialistes des mondes celtiques7.
6 Mon propos montrera ces connexions entre chamanisme amérindien, néo-chamanisme et néo-
druidisme, et que certaines formes du druidisme contemporain sont inspirées par des néo-
chamanes et par de véritables chamanes amérindiens. Nous essaierons de montrer que ce
« renouveau du chamanisme » en Occident, que nous qualifierons de néo-chamanisme à la suite
de plusieurs spécialistes, ainsi que le « chamanisme celtique » et d’autres formes symboliques

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« druidiques » inspirées par le néo-chamanisme s’inscrivent aujourd’hui dans la mouvance


ésotérico-mystique et du renouveau du paganisme, deux aspects d’un phénomène devenu quasi
planétaire. Ces « quêteurs de vie » (c’est un de leurs qualificatifs) s’efforcent de « récupérer »
pour les transmettre des croyances oubliées, de traduire en termes modernes des concepts
et notions «  étrangères  ». Ils innovent en «  recontextualisant  » les connaissances de type
chamanique et druidique pour se construire des recompositions identitaires alternatives et aussi
pour en utiliser les aspects et les techniques « psychothérapeutiques » et écologistes pour guérir
les humains et « sauver la planète», sauver la diversité culturelle et la biodiversité.

I. Chamanismes et néo-chamanismes « amérindiens »


A. « Revification » des rituels chamaniques traditionnels chez les
Amérindiens : Réponse à l’acculturation et à la perte d’identité
culturelle
7 En Amérique du Nord, depuis une cinquantaine d’années, on constate une revivification des
pratiques et croyances chamaniques des peuples autochtones amérindiens. Après la Seconde
Guerre mondiale, la médecine moderne n’a pas su guérir les soldats indiens déboussolés par
le choc culturel dû à la guerre, mais aussi par la rencontre avec le reste du monde. Ils se sont
alors adressés aux chamanes et autres guérisseurs de leurs peuples8. Dans les années « 1970 »,
les Indiens Sioux refusaient de parler ouvertement des anciennes traditions, dont certains
soulignaient le caractère « archaïque ». Seule la « Danse du Soleil », la grande cérémonie
annuelle des Indiens des Plaines, était officiellement pratiquée. Aujourd’hui, les pratiques
rituelles et les croyances de type traditionnel sont encore importantes pour de nombreux
Amérindiens même s’ils sont christianisés.
8 Il s’agit pour les Indiens traditionalistes des réserves et des villes de répondre au
désordre psychique et social résultant des politiques d’assimilation et d’intégration forcées
pratiquées par les divers gouvernements des Etats-Unis et du Canada. Par ailleurs, les crises
internationales, et les guerres (Corée, Vietnam, Golfe), confirment les traditionalistes dans
leurs efforts pour résoudre les problèmes socio-économiques, politiques et psychologiques en
cherchant des solutions dans leurs traditions ancestrales toujours pratiquées dans les réserves
indiennes de l’Ouest américain.
9 Dirigés par des chamanes reconnus par les Indiens, les rituels collectifs (Danse du Soleil /
Sundance, « purification par la vapeur d’eau » ou sweatlodge, séances de guérison yuwipi, par
les pierres sacrées) connaissent un regain important depuis les années « 1950 ». J’ai montré
qu’il est plus facile, pour des hommes et des femmes des XXe et XXIe siècles, de se laisser
emporter dans un état de conscience altérée en compagnie des autres, l’émotion collective
s’ajoutant à l’autosuggestion individuelle, que d’affronter par une ascèse personnelle les
« Esprits de l’Autre Réalité». Seuls les candidats chamanes s’engagent individuellement dans
les rituels « d’implorations pour une vision » (vision quest, hanbelacya). Selon les Indiens, les
pratiques chamaniques (spirit meetings, shaking tent) permettent de « maintenir ouvertes les
portes de communication avec l’Autre Réalité » (Vazeilles, 1984, 1996).

B. Du chamanisme au néo-chamanisme et au New Age


Métissage culturel dans les réserves, mode néo-chamanique et « new agers »
blancs
10 Dès l’arrivée des Européens en Amérique du Nord, il y a toujours eu des « Blancs » (Whites)
vivant avec les Indiens, et les métis représentent plus de la moitié des Indiens. En Amérique
du Nord et en Europe, des passionnés des Amérindiens, des «  indianistes  » (Indian
hobbyists) cherchent à reconstruire la vie matérielle des Indiens, «  à vivre en Indiens  »
de manière périodique pendant les vacances. Au long de ces quelque trente années,
j’ai constaté l’engouement de nombreux Blancs qui veulent participer à des rituels
« traditionnels » (Sweatlodge, Danse du Soleil, etc.).
11 Dans les années « 1970/80 », on parlait beaucoup dans les plaines des premiers ouvrages de
Carlos Castaneda et de l’œuvre de J. R. Tolkien. Dans les villes, on commençait à trouver

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des boutiques et autres lieux de rencontres (librairies, restaurants végétariens, nourritures


écologiques) présentant des objets, ouvrages, bijoux portant sur des thèmes ésotériques et
occultistes, sur le mouvement dit du « développement du potentiel humain ou DPH » typique
du New Age9 ainsi que des objets d’inspiration amérindienne.
12 Dès les années « 1990 », les influences du « New Age » ont commencé à se faire sentir dans
les réserves, qui connaissent toujours un certain décalage par rapport au reste des USA. On
a commencé à rencontrer, dans des lieux de cultes indiens situés dans des parcs régionaux,
tel le parc de la montagne Bear Butte au South Dakota, des groupes de New Agers non-
indiens, « Blancs » pour la plupart. Ces personnes venaient pratiquer des rituels mélangeant
des pratiques New Age, néo-païennes et d’inspiration amérindienne au moment même où se
déroulaient quelques mètres plus loin des rituels chamaniques des Indiens des Plaines. Au
début discrète, leur présence est de plus en plus difficilement tolérée. Dans plusieurs réserves,
certaines cérémonies, dont la Danse du Soleil, ont été à nouveau fermées à ces envahisseurs
d’un autre genre que les colons et les pionniers du XIXe siècle.

L’écriture et les Indiens : confrontations identitaires et culturelles


13 Des Indiens d’Amérique du Nord ont pris la plume depuis plus de deux cents ans. Les
romanciers contemporains, comme leurs précurseurs, dénoncent la colonisation brutale, le
génocide et l’ethnocide, dont les Amérindiens ont été victimes depuis plus de quatre cents
ans. Depuis la fin du XIXe siècle, des ethnologues ont écrit de nombreux ouvrages sur les
Amérindiens, dont des biographies de chamanes10 ; certains chercheurs ont fait participer assez
directement les chamanes à l’élaboration de ces biographies.
14 Et aujourd’hui, on trouve de nombreux ouvrages « autobiographiques » et des essais discutant
de la spiritualité des Amérindiens. De quoi s’agit-il ? D’une mode ethnique et chamanique ?
Le chamanisme de ces «  chamanes amérindiens  » contemporains est-il toujours de type
« traditionnel » ? Pour certains des ouvrages proposés, on peut se demander qui parle ou qui
écrit, et sur qui et de quoi ? Dans des travaux précédents, j’ai étudié des ouvrages décrivant
des expériences « chamaniques nouvelle vague » dont quelques exemples seront brièvement
donnés11.

C. Exemples de néo-chamanes et new agers « amérindiens »


15 Depuis plus d’une vingtaine d’années, on assiste, dans plusieurs pays européens, à la
venue d’Indiens nord-américains qui se présentent comme étant des medicine men, des
voyants-guérisseurs ou des chamanes. Ces medicine men travaillent avec des équipes de
psychothérapeutes américains et européens12. Nous en donnerons deux exemples.

Archie Fire Lame Deer, « medicine man sioux »


16 Archie Fire Lame Deer13 se présente comme étant le fils du chamane sioux John Fire Lame
Deer, Tahca Ushte14 de son nom indien, un chamane reconnu par les Sioux. Venu pour la
première fois en France en 1982, Archie Fire s’explique volontiers sur sa démarche que nous
résumons ainsi :
17 - Les sociétés amérindiennes sont des sociétés ouvertes, dont les valeurs primordiales sont
le respect, l’amour-propre, l’humilité et la compréhension des Autres, conçus comme des
personnes dignes de participer aux échanges intercommunautaires.
18 - La conception du monde des Amérindiens est positive et active : nous sommes dans un cycle
de vie, il n’y a pas de mort, seulement un changement de monde, un autre lieu, un autre cercle.
19 - Les Indiens ne se sont jamais écartés de la voie traditionnelle et n’ont jamais adopté le système
dominant.
20 - Les Indiens savent qu’il a existé en Occident une ancienne tradition similaire à la leur, celle
des Celtes ; ils essayent de nous en faire ressouvenir…,
21 des principes et croyances que l’on retrouve chez beaucoup de néo-chamanes amérindiens, et
de New Agers. Archie Fire est connu surtout des non-Indiens dans les villes américaines et
européennes. Il est contesté par les Sioux des réserves.
22 Nous allons donner un exemple d’un Sioux inspiré par le New Age, moins contesté qu’Archie
Fire, mais dont les « innovations » étonnent les rares Lakotas qui l’ont lu.

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Ed Mc Gaa, auteur « New Age »


23 Ed McGaa dit Eagle Man, écrivain Sioux Oglala et ceremonial leader, ne se présente ni comme
medicine man, ni comme chamane (holy man). Il a participé à de nombreuses cérémonies
de type chamanique, dontplusieurs «  Danses du Soleil  ». Deux ouvrages, Mother Earth
Spirituality (1990) et Rainbow Tribe (1992),se situent dans la mouvance « New Age » (dite
aussi Rainbow people) plutôt que néo-chamanique, avec un discours résolument écologique
et spirituel, plus que mystique et ésotérique.
24 Ses ouvrages font référence aux biographies de « véritables » chamanes sioux (Nicolas Black
Elk et Frank Fools Crow), à des ouvrages d’anthropologues spécialistes des Sioux, ainsi
qu’à de nombreux auteurs de la mouvance New Age, dont des auteurs s’autoproclament
« Amérindiens et chamanes15 ». Par exemple, il mentionne une « soeur adoptive Jamie Sams,
de descendance iroquoise et choctaw », qui aurait reçu une « formation en médecine dans les
traditions sénèque, maya, aztèque et choctaw ». Un mélange culturel cher aux New Agers.
Avec un « Indien d’origine choctaw», David Carson, elle a conçu un « jeu amérindien de cartes
divinatoires  ». Or, une telle pratique divinatoire était inconnue des Amérindiens du Nord.
Ce jeu de cartes s’inspire des tarots égyptiens, tout en étant décoré de soi-disant « animaux
chamaniques, animaux totems des Indiens d’Amérique du Nord».
25 Mc Gaa est un des Amérindiens qui se réfèrent « à la sagesse des Celtes » : il cite, par exemple,
Philip Carr-Gomm, un druide contemporain, dont nous parlerons plus loin. Contrairement à
d’autres essayistes ésotériques, McGaa s’efforce de ne pas trop simplifier la spiritualité des
Sioux, et de rendre compte de la complexité des rituels et de la pensée symbolique qui les sous-
tendent. Pour que le grand public apprenne à aimer et comprenne les pratiques, croyances et
cérémonies des Sioux, il explique qu’il les a transcrites en « langage moderne». Je rajouterai
dans les styles « New Age » et néo-chamanique, agrémentés de nombreuses comparaisons
avec des ésotérismes d’ailleurs, dont les « anciens Celtes ».

D. Le « chamanisme amérindien » à la mode


Succès de ce « chamanisme amérindien »
26 En Amérique du Nord comme en Europe et en France, on « découvre » des personnes qui
s’autoproclament « chamanes » et pratiquent, disent-ils, un « chamanisme à l’amérindienne16 ».
Certains se donnent des surnoms indiens et affirment avoir été les élèves de tel ou tels
« chamanes amérindiens». Les enseignements de ces « spécialistes », indiens ou non-indiens,
touchent un large public pour la plupart non-indien, tant euro-américain qu’européen, toujours
prêt à dépenser de l’argent pour bénéficier de ces enseignements exotiques perçus comme
étant salvateurs (Perrin, 1991 ; Vazeilles, 1990, 2003).
27 La mode de ce « chamanisme amérindien » se retrouve dans des boutiques spécialisées dans
ce marché du magico-religieux (ésotérisme, occultisme, magie wicca, astrologie, vaudou…).
Il s’agit de «  stages de chamanisme  » et d’ateliers proposant des rituels empruntés aux
Indiens : « séances de prières » dans la hutte à sudation, voire même « danses du soleil »,
« quêtes de visions », etc. Textes et stages présentent des rituels souvent assez dénaturés car
résumés de manière assez simpliste. Ces soi-disant rituels amérindiens peuvent être adaptés à
« d’anciennes connaissances locales » si, par exemple, les stages se déroulent aux alentours
d’un dolmen, en Bretagne ou dans l’Hérault17.
28 Des boutiques proposent des objets présentés comme étant empruntés aux chamanismes
amérindiens : calumets en catlinite18, « tabacs amérindiens kinnikinnik », etc., des « cartes-
médecine  » ou «  jeux de tarot amérindien» représentant les «  boucliers de médecine  » et
les « animaux-pouvoirs » et permettant de découvrir son « animal-totem ». Les Amérindiens
vendent des objets inspirés par leurs traditions, mais très rarement des objets considérés comme
« sacrés ».
Dénonciations du néo-chamanisme à l’amérindienne
29 Cette exploitation commerciale des pratiques religieuses amérindiennes, à travers ouvrages,
stages de néo-chamanisme, vente d’«  objets de pouvoirs divinatoires  », a été dénoncée à
plusieurs reprises par de nombreuses tribus et organisations indiennes et des anthropologues.
Des anthropologues ont fait remarquer que ces « néo-chamanes » agissent quelque peu en

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« vampires » face aux cultures et traditions anciennes, dont ils nient l’originalité et les valeurs,
puisqu’ils les expliquent en empruntant les valeurs et croyances ésotériques occidentales.
S’emparer de manière aussi réductrice des pratiques chamaniques des peuples indigènes
pourrait être une nouvelle preuve de non-respect face à ces populations toujours opprimées,
dont beaucoup vivent encore dans la misère face à l’indifférence du reste du monde. Ces
peuples sont eux aussi engagés dans la modernité ; dès qu’ils le peuvent, ils adoptent les biens
matériels et les techniques du monde moderne. Va-t-on leur prendre leur religion, la seule
chose qui leur reste pour lutter efficacement contre l’ethnocide19 ?
30 Des représentants de certaines tribus, des associations et des journalistes amérindiens ont
dénoncé cette exploitation commerciale des différentes religions amérindiennes à travers ces
ouvrages, ces stages de néo-chamanisme, ces «  objets de pouvoirs divinatoires  » en vente
dans les boutiques. Des problèmes20 peuvent se poser et se passer quand on exporte en terre
étrangère des pratiques cérémonielles appartenant à des ethnies et des cultures localisées dans
un espace géographique déterminé. Ces problèmes ont été perçus, dès les années 1980, par de
nombreux chamanes reconnus des Réserves indiennes de l’Amérique du Nord et en particulier
par l’association dite « Cercle des Anciens » (Elders Circle). Des guides spirituels des Réserves
ont exposé leurs préoccupations dans plusieurs articles parus dans des journaux indiens21. Ils
ont émis de sérieuses réserves en ce qui concerne, par exemple : A. Fire Lame Deer « qui n’est
en aucun cas mandaté, ni par l’AIM (American Indian Movement), ni par la Nation Sioux» ;
« l’enseignement de la Roue de la Médecine », dont nous parlerons plus loin ... Le journal
des Sioux Lakotas, le Lakota Times, a publié, depuis 1991, une série d’articles dénonçant
ces pratiques qui dénaturent les croyances et pratiques des Indiens d’Amérique du Nord. En
1993, des Indiens Sioux réunis au Parliament of the World’s Religions à Chicago ont lancé
une Declaration of War Against Exploiters of Lakota Spirituality22. Leurs conclusions sont
sévères : après avoir volé leurs terres, avoir nié les croyances, voilà que les « Blancs » veulent
en déposséder les Indiens, une nouvelle forme perverse de colonialisme(Vazeilles, 1996, 2001,
2003).
31 Ainsi, l’indianité et la légitimité de néo-chamanes s’autoproclamant « chamanes amérindiens »
sont contestées par les Amérindiens eux-mêmes. Des auteurs amérindiens néo-chamanes et
New Agers (A. Fire, McGaa) présentent leurs théories en proclamant qu’elles sont conformes
aux croyances traditionnelles de leurs ancêtres. Les rares indiens qui les ont lues, s’étonnent
de leurs nombreuses innovations. De notre côté, j’ai montré (2002, 2003) que ces auteurs
«  néo-chamanes  » empruntent, à doses massives, aux ésotérismes européens. Plusieurs
expliquent, par exemple, que les Amérindiens du Nord sont originaires de l’Atlantide et ceux
de l’Amérique du Sud du continent Mu, ces deux « continents perdus » légendaires chers aux
ésotéristes et occultistes. L’idéologie chamanique de type traditionnel ne se retrouve plus dans
ces travaux qui, en fait, illustrent et se fondent dans la mouvance mystique et ésotérique de
notre époque.

E. Interprétation comparative des chamanismes et néo-chamanismes


Revivalisme du chamanisme des autochtones et transmission culturelle
32 D’une part, dans des études précédentes (1996), j’ai souligné que le renouveau du chamanisme
organisé par les peuples autochtones, à la fois dans les réserves et dans les centres indiens
(Indian Centers) des grandes villes américaines, relance la transmission intergénérationnelle
et réaffirme leur identité culturelle. Il a pour principale raison d’être au service de la santé
mentale et de la survie culturelle des peuples indiens et de bien d’autres minorités culturelles
des États-nations.
33 En ce qui concerne les biographies de chamanes amérindiens et autres ouvrages écrits par
des anthropologues spécialistes de ces peuples, on peut parler de traduction et d’interprétation
anthropologique du chamanisme. Le chamane Nicolas Black Elk a consenti à répondre aux
questions des anthropologues parce qu’il voulait que son savoir soit transmis aux générations
futures de la meilleure manière, à travers des descriptions de ses expériences « sacrées » et des
explications fournies par ses soins et transcrites par les anthropologues.

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Succès des ouvrages New Age auprès des Amérindiens


34 Par ailleurs, des ouvrages néo-chamaniques et New Age connaissent un certain succès auprès
des rares lecteurs amérindiens que j’ai pu interroger. Ceux qui ont aimé ces livres sont
unanimes. Mes informateurs m’ont expliqué que ces « témoignages » ont changé leur vie, car
ils présentent une vision optimiste d’un monde dans lequel coexiste l’harmonie du physique
et du spirituel. Un monde où, malgré l’existence de différentes langues, coutumes, histoire,
croyances, statuts économiques et sociaux, on peut se comprendre et réaliser que l’on forme
un ensemble cohérent d’hommes et de femmes partageant des savoirs et des connaissances
essentielles au développement du bien être des êtres humains. Les lecteurs sioux pensent
que ces écrits participent à la transmission des croyances de leurs ancêtres. Ils ont été fiers
«  d’apprendre  » que les Amérindiens et les Aborigènes australiens se souviendraient des
techniques pour rétablir cette « harmonie cosmique», alors que les Occidentaux les auraient
oubliées23. Ils voient mal qu’il s’agit aussi d’une sorte de propagande, à travers les réseaux de
la mouvance New Age (Internet, conférences, boutiques, festivals néo-païens), pour convertir
des lecteurs (indiens et surtout non-indiens) à un nouveau système de croyance.

Attrait du néo-chamanisme et du New Age


35 Les néo-chamanes et les New Agers sont optimistes. Ils affirment que « la solution est simple…
partageons les connaissances de l’humanité, même les plus secrètes, et tous ensemble, devenus
des hommes nouveaux, les Enfants du Verseau, sauvons la Planète24 ».
Certes, certains des néo-chamanes et New Agers veulent sans doute se faire connaître
pour gagner de l’argent en exploitant, d’une part les savoirs traditionnels et religieux des
« véritables » Indiens et, d’autre part, l’engouement et la crédulité de leurs « patients » non-
indiens pour des pratiques mystérieuses, présentées comme étant typiquement « chamaniques
et issues de la Sagesse des Anciens, des fils de la Terre-Mère». Mais pour d’autres auteurs
et praticiens, il s’agit de partager sincèrement des expériences émotionnelles fortes avec le
maximum de personnes. Les ouvrages des néo-chamanes inspirés par les Amérindiens sont
quelque peu des œuvres de propagande qui visent à ramener des Indiens chrétiens vers les
croyances chamaniques de leurs ancêtres. Ils expriment aussi un désir certain de transmettre
et de transcrire des versions simplifiées et « modernisées » de la spiritualité des Amérindiens.
Face à un public de non-Indiens, il s’agit aussi d’attirer de nouveaux adeptes. La circulation des
informations sur les stages et séances New Age et « néo-chamaniques » se fait à travers le réseau
tentaculaire de la mouvance mystique-ésotérique, New age et néo-païenne (voie orale, petits
magazines d’information distribués gratuitement dans quasiment toutes les grandes librairies,
sites Internet).
36 Le néo-chamanisme et New Age proposent des systèmes dynamiques de type holiste. Ils disent
participer à la sauvegarde et à la transmission des croyances et pratiques rituelles et culturelles
de nombreux peuples «  premiers  ». Ces ouvrages proposent une problématique moderne  :
« développer le potentiel humain et sauver la planète» annoncée clairement (1980) par Marilyn
Ferguson, une des fondatrices du New Age. Les aspects religieux deviennent du magico-
religieux, l’écologie est en fait une écologie des profondeurs, centrée autour de la Terre-Mère
et de ses cohortes d’esprits des espaces terrestres et célestes. Tout pivote autour de l’individu
et de son bien-être. Chacun fait appel aux formes symboliques et aux récits mythologiques,
empruntés à maints systèmes culturels contemporains ou du passé, qu’il récupère pour en faire
une présentation pour des usages qui lui conviennent.

Envergure internationale et contextualisation des mythes


37 Les « travaux » des néo-chamanes amérindiens et non-indiens (c’est ainsi qu’ils parlent de
leurs œuvres et de leurs applications psychothérapeutiques et écologiques) démontrent une
volonté certaine de faire vivre les « traditions chamaniques». Ils s’efforcent de rénover des
thèmes et des figures mythiques et de les retranscrire en style moderne pour qu’ils soient
compris par les Indiens d’aujourd’hui et par des non-Indiens, tous « citoyens de la planète
Terre ». On assiste sur une scène quasi internationale, à des recompositions innovantes des
pratiques et croyances chamaniques.

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38 Ainsi, on pourrait adopter une autre perspective anthropologique moins critique que celle
du notre paragraphe «  Dénonciations…  », et dire que ce nouveau ressourcement religieux
et identitaire de type chamanique pourrait être compris comme une nouvelle preuve du
dynamisme duChamanisme, de la grande variété des chamanismes25, qui ont su s’adapter
aux changements survenus au cours des siècles, voir des millénaires, et se transmettre en se
modifiant quelque peu d’une génération à l’autre. Les chamanismes s’internationalisent, en
continuant à se transmettre sous des formes variées qui doivent beaucoup aux contextes locaux.
39 Par ailleurs, face aux critiques sévères émises par des représentants des peuples autochtones
sur ces nouvelles formes de chamanisme, des penseurs ésotérico-mystiques non-indiens ont
fait des démarches pour retrouver dans les mythes et pratiques païennes de leurs ancêtres des
pratiques et rituels de type chamanique. Et aujourd’hui, on découvre en France et ailleurs dans
le monde occidental des personnes s’affirmant être des « chamanes celtiques, des chamanes
néolithiques et néandertaliens».

II. Un « néo-chamanisme celtique »


40 Certains de ces nouveaux chamanes amérindiens et non-indiens disent faire appel à la
« sagesse des druides du passé». D’autres s’autoproclament « chamanes celtiques » et affirment
sans preuve que les « traditions chamaniques celtiques ne se seraient jamais complètement
éteintes », du moins en Angleterre, en Irlande, en Écosse et au pays de Galles. Des « chamanes
celtiques26  », en France et ailleurs, ont écrit des ouvrages expliquant leurs croyances et
pratiques et prodiguant leurs conseils. Il s’agit de souligner ici certains détails, formes
symboliques et comportements que certains d’entre eux croient communs aux chamanismes
d’hier et d’aujourd’hui et aux pratiques des anciens Celtes.

A. Merlin l’Enchanteur, Taliesin, des « chamanes » ?


41 D’après des spécialistes des anciens Celtes, l’enchanteur Merlin peut être vu comme un avatar
du dieu Cernunos. Ce dieu cornu des Celtes, voire des proto-Celtes, est censé vivre auprès d’un
bois de pommiers ou sur une montagne au fond de la forêt (comme le chamane lors de la quête
des visions). On peut associer Merlin à un autre druide et barde, Taliesin, et les relier tous
les deux aux connaissances astronomiques des druides mentionnées par Jules César et par des
historiens romains et grecs. De même, l’utilisation de poèmes et de mots magiques par Merlin,
dans la littérature médiévale, se retrouve chez les druides décrits dans La Guerre des Gaules.
Les comportements extravagants et fous de Merlin, grand magicien, maître des bêtes sauvages
et chef de la « chasse sauvage », seraient des vestiges des exploits cynégétiques des héros
celtiques, germains et scandinaves27. Dans ces récits et ceux de Taliesin et d’autres anciens
Celtes, de type « J’ai été… », dans lesquels ils annoncent avoir vécu sous des formes animales,
végétales, humaines, à des âges différents, on pourrait reconnaître le comportement magique
du chamane imitant les esprits de la nature lors de ses « voyages dans les autres réalités ».
Merlin, fils d’une femme et d’une créature de l’au-delà (un diable, ont dit les chrétiens), est un
psychopompe. C’est donc facile, pour certains, de voir en Merlin, en Taliesin et en d’autres
druides des «  sagas  » celtiques, des chamanes. Je pourrais rajouter qu’on peut reconnaître
en Merlin des aspects chamaniques de type trickster, le fripon divin des Amérindiens28, un
transgresseur prêt à tout pour arriver à faire plier le destin. Un exemple, Merlin donne à Uther
Pendragon l’apparence du mari d’Ygraine, la « châtelaine » de Tintagel, pour qu’elle couche
avec Uther et engendre Arthur.

B. John Matthews, « chamane celtique » contemporain


42 John Matthews et sa femme Caitlin ont lu des textes médiévaux dans les langues d’origine,
auxquels ils font souvent référence. Dans Le chaman celtique (1996)29, Matthews se concentre
sur Taliesin, «  l’archétype du druide/poète/barde». On peut repérer dans les ouvrages de
Matthews de nombreuses influences du néo-chamanisme. Matthews utilise le vocabulaire des
néo-chamanes amérindiens ou non-indiens, par exemple Carlos Castaneda, lorsqu’il parle des
« auxiliaires du pouvoir», ces « animaux totémiques» qui vont jouer le rôle de gardien et de
guide. Matthews trouve des « totems » dans l’histoire de Kullwch parti chercher le dieu Mabon

Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, 3 | 2008


Connexions entre le néo-chamanisme et le néo-druidisme contemporains. Étude en anthropolo (...) 9

avec l’aide des animaux30. La vision chamanique, le « voyage chamanique », devient un moyen
de « recouvrer nos sens», grâce à des exercices de méditation pour modifier notre « conscience
dévoyée». Certains lieux seraient propices à ces méditations (sites archéologiques celtiques,
dolmen, cavernes…). Il s’agirait d’aiguiser nos sens par des techniques de visualisation,
chaque jour si possible, d’utiliser « les temps et les espaces sacrés », pour accomplir le « voyage
dans d’autres mondes», où nous pourrions « acquérir l’immense savoir des anciens Celtes qui
peut toujours être en notre possession». Pour ce « voyage », il faudrait adopter une posture
rituelle : assis en tailleurs, yeux clos, qui serait, d’après lui, la posture du dieu Cernunos tel
qu’il est représenté sur le chaudron dit de Grunderstrup31. Pour Matthews, ce personnage du
chaudron est sans aucun doute un « dieu chamane» qui tient le serpent, ou plutôt « l’anguille
porteuse de sagesse». Matthews propose d’autres postures rituelles, en empruntant à l’Afrique,
aux Aborigènes australiens et même à la préhistoire européenne.
43 Matthews résume « le » folklore celtique d’une manière telle que toutes les époques et les lieux
géographiques et imaginaires se télescopent. Pour lui, le « cosmos chamanique celtique » est
centré autour de différents symboles. Il donne souvent les noms de personnages, animaux et
humains celtiques, en essayant de les replacer dans la « roue du temps »,dite aussi « croix dans
le cercle», qui divise le temps et l’année en quatre périodes en fonction des équinoxes et des
solstices. Pour les Celtes, il s’agirait selon lui d’une « rouelle du temps à huit rayons », ces
huit directions renvoyant aux divisions de l’espace et aux quatre fêtes de l’année celtique qui
prenaient place entre ces événements solaires.
44 Ces « roues du temps » ou « roues de la médecine» sont une influence des Indiens d’Amérique
du Nord32 et de la Méso-Amérique, en passant par les Toltèques (un autre peuple mythique
souvent cité par les mystiques-ésotériques) mais aussi des romans de Carlos Castaneda… Des
roues similaires appartiennent à d’autres systèmes symboliques33, les penseurs ésotériques les
ont, eux aussi, utilisées à travers les siècles.
45 Dans les textes de Matthews, on reconnaît aussi le discours typique du New Age. Dans le
chapitre «  La rencontre avec les êtres de lumière», il s’agirait de partir à la rencontre de
notre « guide chamanique», du « chamane intérieur», ce « maître de l’autre monde» qui sera
notre guide sur le chemin de la découverte de soi. Ce voyage permettrait « l’éveil de l’âme»,
«  de la mémoire enfouie dans les profondeurs de nous-mêmes», de «  la mémoire de nos
ancêtres » (Matthews, 1996, p. 105-106). On reconnaît là le discours typique du New Age et
des réseaux magico-religieux. Ce moi caché, nous l’atteindrions par le « silence intérieur»,
en une communion sensuelle en harmonie avec la Nature. Ce «  chamane intérieur  », nous
le posséderions tous  : il nous permettrait d’effectuer une union avec la «  nature profonde
des entités avec lesquelles nous communiquons», qui seraient « des êtres hautement évolués,
dont l’unique dessein est de nous enseigner» et qui seraient en fait des « facettes de notre
personnalité » qu’il nous faudrait découvrir.
46 Pour le New Age et le néo-chamanisme, le chamanisme est « une tradition sacrée». Matthews
(1996, p. 112) explique qu’il « n’est pas une religion, mais une discipline spirituelle visant
à libérer tout le potentiel humain, et à lui permettre d’évoluer dans d’autres sphères  » et
de rencontrer des «  êtres d’essence divine». Matthews leur donne des noms celtiques et
les organise en fonction de leurs principaux symbolismes et de leurs connexions avec les
« directions sacrées ». Il cherche à prouver que, dans la littérature médiévale sur les anciens
Celtes, on retrouve la technique de classification des « choses de l’Univers » préconisée par les
Amérindiens, à partir de la « Roue de la Médecine ». Par exemple, au « centre du monde » selon
Matthews, on trouve Rigantona ou Rhiannon, « la Grande Reine» qui est liée aux chevaux
(c’est une des cavalières surnaturelles des textes médiévaux) et à la terre.
47 Contrairement aux enseignements des Amérindiens, il n’y aurait pas d’ordre véritable pour
suivre ces « sentiers de la connaissance» : on pourrait les suivre en fonction de ses besoins.
C’est là une attitude typiquement New Age. Les peuples autochtones amérindiens et sibériens
préconisent toujours un ordre rituel rigoureux même lorsqu’il est inversé.

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Connexions entre le néo-chamanisme et le néo-druidisme contemporains. Étude en anthropolo (...) 10

C. « Chamanisme » et le site Internet du Order of Bards, Ovates and


Druids - OBOD
48 Le site Internet du Order of Bards, Ovates and Druids34 démontre les changements à l’œuvre
dans le néo-druidisme affiché par l’OBOD. Ce site explique qu’il y aurait «  7 dons des
druides » (on se souvient des « 7 rituels sacrés » des Sioux expliqués par le chamane sioux
Black Elk35) :

1. « une philosophie qui développe le caractère sacré de toute vie, située au centre d’une
toile d’araignée reliant le vivant, sans séparer la matière de l’esprit(pensée des peuples
animistes ; la « toile » du trickster des Sioux, Iktomi « araignée »).
2. Des liens avec la nature affirment notre appartenance à la communauté de tous les êtres
vivants.
3. Des possibilités de guérison et de longévité, en utilisant des méthodes de type holiste
(ne séparant pas le physique du spirituel).
4. La vie comme un voyage, avec de nombreux rites de passage (naissance, mariage, mort,
et les rites d’initiation spirituelle).
5. Des techniques pour voyager, et explorer les «  états modifiés de conscience  », les
« autres réalités », l’autre monde. Ces techniques sont utilisées par d’autres traditions
spirituelles  : méditation, visualisation, voyage chamanique, par l’intermédiaire de
cérémonies, musiques, chants et sweathouses36, toutes ces techniques étant revues et
corrigées par la tradition et le symbolisme druidiques.
6. Développer le potentiel humain (DPH du New Age).
7. «  Don de la magie  »… «  qui nous enseigne l’art pour nous ouvrir à la magie d’être
vivant, l’art pour savoir comment amener nos vies à se manifester, et l’art de voyager,
d’entreprendre une quête pour obtenir la sagesse, la guérison et l’inspiration. »
49 Ce site montre la volonté des néo-druides, depuis les années 1990, pour renouveler leurs études
de la « sagesse des anciens Druides ». Ce texte est une synthèse réfléchie, issue d’une certaine
volonté d’analyser de manière comparative des écrits portant sur les religions, spiritualités
et philosophies d’autres cultures. Des références sont données, que l’on retrouve dans des
livres écrits par des néo-druides contemporains et dans d’autres ouvrages ésotériques. Donnons
quelques exemples : la doctrine Ahimsa (non-violence) tirée des Upanishads37 (- 800 av. J.-
C.), telle qu’elle a été développée et connue grâce au Mahatma Gandhi, ou à Martin Luther
King, et encore par le Parehaka Maori Movement de Nouvelle-Zélande. Des références à Jules
César et autres auteurs de l’Antiquité classique, qui parlent des druides et des Celtes  ; au
Livre des Morts des anciens Égyptiens. Plus souvent que dans le passé, des récits symboliques
sont empruntés aux textes médiévaux, ainsi que des références aux travaux d’archéologues et
linguistes spécialistes des peuples de langues celtiques.
50 Une autre partie du site de l’OBOD explique l’importance des animaux38 dans cette spiritualité
druidique contemporaine. Je pense y repérer l’influence du néo-chamanisme amérindien, qui
permet aux néo-druides d’aujourd’hui de «  récupérer  » ce qu’ils appellent les «  animaux
celtiques». Les chamanes amérindiens expliquent qu’ils font appel à la «  sagesse des
animaux», lors des pratiques de guérison, de leurs voyages dans l’autre réalité, dans le « monde
des esprits». Dans les récits celtiques du Moyen Âge, on trouve des histoires qui suggèrent
un comportement similaire. Pour en donner deux exemples  : l’histoire du roi Cormac qui,
cherchant ses enfants enlevés par un guerrier mystérieux (le dieu de la mer Manannan Mac
Lir), découvre le puits où nage le « saumon de la sagesse». Ou encore, le corbeau, messager
entre les mondes et associé au roi prophète, Bran Le Bénis, dont la tête avec sa couronne ornée
de corbeaux a été enterrée, à sa demande, sur le Mont Blanc de Londres, là où se dresse la Tour
de Londres qui, on le sait, abrite les fameux grands corbeaux de la capitale du Royaume-Uni.

D. « Chamanisme » et « Le Tarot de l’Art des Druides »


51 Cependant aujourd’hui, une des plus grandes influences sur les druides contemporains passe
par la mouvance mystique-ésotérique, dite dans cet article «  New Age  ». Par exemple, en
conformité avec les techniques et pratiques de cette mouvance tentaculaire, l’actuel grand-
druide de l’OBOD, Philip Carr-Gomm et sa femme Stéphanie ont élaboré un jeu de cartes39

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Connexions entre le néo-chamanisme et le néo-druidisme contemporains. Étude en anthropolo (...) 11

en accord avec le mouvement néo-païen wicca. Les wiccans et les druides contemporains,
deux mouvements néo-païens structurés en associations hiérarchisées, sont des écoles de type
«  traditions à mystères  », avec un système d’initiation de plus en plus complexe. Le site
de l’OBOD explique que « l’étude des cartes dites le Tarot de l’Art des Druides» pourrait
aider à «  accomplir notre voyage vers la connaissance et le développement spirituel». Ces
cartes représentent quatre tribus ou familles, dont les membres s’efforcent de converger vers le
« Grand Hall des anciens rois celtiques irlandais situé à Tara » (au centre de l’Irlande celtique),
ou vers le grand cercle de pierres levées de Stonehenge, où a lieu la réunion annuelle des néo-
druides (coven) pour le solstice d’été. Dans ce jeu de tarot « celtique », les princesses seraient
« les pucelles de la forêt», les rois, les Uther Pendragon. La carte de l’arcane majeur, dite
Fool’s Journey, renverrait au voyage du héros à la recherche du Saint Graal, ou de la pierre
philosophale de l’alchimiste… Les «  amants  » renvoient aux «  paires  » lors du grand rite
wicca, pour commémorer l’union entre le Dieu et la Déesse, ou encore les « deux aspects du
soi» (la part féminine et la part masculine), l’union elle-même étant symbolisée par la « biche
blanche40 » à l’arrière-plan.

E. Le « chamanisme celtique » : emprunts, réinterprétation


« contextualisée », innovation syncrétique
52 Ce « chamanisme celtique» voit « la vie en rose », comme l’écrit la médiéviste Leslie Jones.
Pour ce néo-chamanisme, les «  créatures de l’au-delà  » sont toutes gentilles. Où sont les
horribles Fomores des Celtes, ces monstrueux premiers habitants de l’Irlande, dont descendrait
le dieu Lug ? Où sont les convulsions terrifiantes de Cuchulain, dit le contorsionniste, avec
son œil pendant lorsqu’il est en proie à la fureur divine  ? Où sont passées les puissances
paradoxales et ambiguës que rencontrent les chamanes sibériens et amérindiens ?
53 Ce «  chamanisme celtique  », comme bien d’autres formes de néo-chamanisme, dénote
une certaine incapacité à comprendre les au-delàs ambivalents et paradoxaux des sociétés
chamaniques et animistes.Les lecteurs de textes scientifiques sur les anciens Celtes et
d’ouvrages scientifiques sur les chamanes authentiques, comprennent vite que les au-delàs
tels qu’ils sont présentés par les sociétés traditionnelles, ne peuvent être que difficilement
compris par la plus part de nos contemporains. Les visions de type traditionnel, rapportées
par les anthropologues et les voyageurs, voudraient montrer que nous sommes cernés par ces
autres réalités, situées tout derrière notre épaule et pas à des années lumières, et que les êtres
surnaturels cherchent les failles pour nous sauter dessus à tout moment. Les au-delà dans ces
textes visionnaires ne sont ni des paradis, ni des enfers post-mortem, mais plutôt des mondes
parallèles où tout est possible, car leurs frontières avec le monde de la vie quotidienne sont
poreuses.
54 Déjà, les chevaliers de la Table Ronde ne rencontraient plus les fées, ces inquiétantes et
trompeuses créatures de l’autre monde médiéval, que sous l’apparence de « gentes pucelles»
selon Chrétien de Troyes, au détour des chemins dans la forêt profonde. Seule Morgane La
Fée demeure ambiguë… Et pourtant, dans des légendes galloises, irlandaises, écossaises,
les humains (druides, bardes et héros) se transforment, comme les chamanes amérindiens,
en animaux, ou en créatures composites mi-homme mi-animal. Les animaux parlent, les
têtes coupées aussi. Les êtres surnaturels découpent et éviscèrent le futur chamane. Dans ces
sociétés, les dieux sont presque tous de type trickster, des transgresseurs divins qui fascinent
et enthousiasment les visionnaires, pour ensuite les emporter et leur briser le crâne avant
de recomposer éventuellement leur cerveau et leur corps. Les chamanes amérindiens disent
rencontrer des esprits ambigus qui peuvent se révéler malfaisants comme bienfaisants, en
fonction de la force de caractère du visionnaire.
55 Toutes ces choses et tous ces êtres de l’au-delà sont présentés comme étant dangereux
dans les chamanismes amérindiens et sibériens, et dans les sagas des anciens Celtes. Il
semble que le New Age, certaines tendances du néo-paganisme, le néo-chamanisme et les
druides contemporains ont transformé ces dangereux êtres et choses de l’au-delà en gentils
personnages de contes de fées pour un monde revu et corrigé par Walt Disney. Par exemple,
pour Matthews, la terrible déesse Arianrhod, dont un des avatars est Morgane la fée-sorcière

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qui, avec son fils Mordred, causera la chute du royaume de Camalot, Arianrhod, cette mère
des Enfers, est pour lui « une beauté délicate et transparente».
56 Ainsi, il semble bien que plusieurs néo-druides aient accepté l’idée à la mode que le druidisme
serait « l’ancienne religion chamanique de la Grande-Bretagne41 ».

III. » Druidisme », transmissions au cours des siècles


A. Les Celtes : histoire, mythes et légendes
Origines selon les druides contemporains
57 Les néo-druides du XXe siècle expliquent que leur mouvement date du début du XVIIIe siècle.
Les pères fondateurs en seraient les « Antiquaires », membres de la bourgeoisie protestante
pour la plupart qui, avec quelques libres-penseurs, voulaient accorder les cosmogonies de leurs
ancêtres « celtes » avec les croyances locales. Á cette époque, les croyances locales reposaient
sur les explications de la création du monde et de l’histoire des peuples, de Dieu, des anges
et archanges et des Saints, selon la Bible et autres textes sacrés des Hébreux et des premiers
chrétiens. En conséquence, pour affirmer avec force « les valeurs de leurs ancêtres celtes»
les penseurs des XVIIIe et XIXe siècles les ont alignées sur celles de la Bible, et parfois de
l’ancienne Égypte. Certains druides contemporains se disent aussi originaires de l’Atlantide
(Carr-Gomm, 1991, p. 642).
Et les anciens Celtes : quelles transmissions culturelles ?
58 Les druides savaient écrire. Ils utilisaient volontiers les alphabets grec et ogam43. Ils ont laissé
de rares et très courts textes. Un grand nombre d’ouvrages et d’articles ont été écrits par des
archéologues44 et des spécialistes des langues des peuples celtiques. Les musées proposent de
nombreux objets des populations de langues celtiques réparties de la Mer noire à l’ouest de
l’Europe.
59 Les croyances religieuses des Celtes furent souvent combattues par l’empire romain, et
les druides persécutés à plusieurs reprises dès l’empereur Auguste. Son successeur Tibère
promulgua, en l’an 29, un édit prohibant simplement la culture druidique. L’empereur Claude
déclencha de sauvages persécutions, et organisa le début de la conquête de l’Angleterre. Sous
le règne de Néron, la reine des Celtes, Boudicca, organisa une insurrection générale, s’empara
de plusieurs villes et fit massacrer plusieurs dizaines de milliers d’occupants. La réplique fut
sanglante. Le gouverneur romain Suetonius Paulinus fit attaquer l’île de Mona (Anglesey),
le principal centre druidique de (Grande) Bretagne. Tous les druides furent massacrés. Avec
l’empereur Théodose le Grand (379-395), le christianisme devint officiellement la seule
religion de l’empire.
60 Fin du IVe siècle, les spécialistes pensent que le druidisme a disparu du continent. Il ne subsiste
plus qu’en Irlande, où les Romains n’étaient pas encore allés, et en Écosse, les Romains n’ayant
pas dépassé le mur d’Hadrien, conçu pour faire barrage aux Pictes. Saint Patrick évangélisa
l’Irlande vers 385-461. Il aurait été au service d’un druide irlandais, dont la fille spirituelle
deviendra la Sainte Brigitte (un des noms de la grande déesse des Celtes) et fonda la célèbre
abbaye féminine de Kildare. Par la suite, le moine Columba poursuivit l’œuvre de Patrick
jusqu’en Écosse.
Littérature médiévale
61 En Irlande, les druides et les filidh, souvent devenus moines chrétiens, sauvèrent une part
importante de la tradition celtique irlandaise en mettant par écrit les vieux récits mythologiques
et les légendes, dont la transmission orale devenait de plus en plus difficile. Certains
spécialistes pensent que maintes traditions celtiques, devenues folkloriques, perdurèrent dans
les campagnes jusqu’à l’arrivée de Cromwell et de ses hordes puritaines qui balayèrent les
anciennes traditions.
62 Au pays de Galles, les druides auraient disparu fin Ve et début VIe siècles. Les bardes, un
ordre de druides, devenus poètes de cours, bénéficiaient d’une grande considération, mais on
ne voyait plus en eux que des lettrés. La tradition orale perdura lors d’assemblées annuelles
pour des concours entre les bardes, et dans les sociétés savantes locales.

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63 Dans Mythology of the British Isles (1990), Geoffrey Ashe présente les sources de l’histoire
légendaire des îles britanniques et de l’Irlande, de la préhistoire au IXe siècle, en prenant
en compte la diversité culturelle et ethnique, des pré-Celtes, aux Celtes, aux Romains et aux
Anglo-Saxons. Peter Beresford Ellis, écrivain et spécialiste des Celtes, dans The Mammoth
Book of Celtic Myths and Legends (1999), commente les grandes sagas des Celtes et en
présente une importante sélection. Ses textes sont retranscrits en langue moderne, et réinsérés
dans les contextes culturels contemporains des différents auteurs qui les ont rapportés chacun
à leur tour.
64 Pour ces spécialistes, dès le début du XVIe siècle dans les contrées «  celtiques  » (pays
de Galles, Cornouailles, Écosse, Bretagne armoricaine), des érudits dits Antiquarians
commencèrent à découvrir la littérature classique gréco-romaine. Ils s’enflammèrent pour les
mystérieux Celtes que certains écrivains et historiens de l’Antiquité présentaient comme des
sauvages assoiffés de sang, ou au contraire comme de sages philosophes. Ils s’intéressèrent
alors à la littérature médiévale et en discuteront au sein des sociétés savantes pour y chercher
des arguments et affirmer leurs identités culturelles face aux Anglo-saxons.

B. Organisation des associations druidiques avec les Antiquaires


65 Notre courte démonstration voudrait souligner la complexité de cette mise en place à travers
les siècles. Les écrits des druides contemporains parlent de « restructuration » du druidisme
au XVIIIe siècle45.
John Toland, libre-penseur, et la « première lignée druidique »
66 Un des antiquaires très souvent cité46 est John Toland47 auteur en 1726 de A Critical History
of the Celtic Religion. Ross Nichols48, chef de l’OBOD de 1964 à 1975, le présente comme
quelqu’un qui admirait les Celtes et leurs druides, mais qui aurait caché cette appréciation
derrière des critiques voulues par l’époque. Pour Leslie Ellen Jones, spécialiste de la littérature
médiévale en Grande-Bretagne, Toland, un Irlandais, fils illégitime d’un prêtre catholique,
était un libre-penseur déiste, qui considérait que tous les prêtres et les druides étaient
corrompus. Toland a une très grande connaissance des sources médiévales pour la plupart
écrites en langues celtiques car il a été élevé dans un environnement où presque tout le monde
parlait le gaélique et comprenait l’alphabet ogam. Toland condamnait Saint Patrick pour avoir
fait détruire quelque 300 manuscrits. Fortement inspiré par Pline et Lucain, il décrit les druides
comme ayant des cheveux courts et de longues barbes, revêtus de braies à six couleurs,
recouvertes par de longues robes. Pour lui, les druides enseignaient dans des grottes et les bois,
et voulaient démontrer que tout avait une explication rationnelle et naturelle. Toland décrit des
cérémonies, qu’il aurait vues à Londonderry dans sa jeunesse, autour d’un feu en haut d’une
colline pour la fête celtique de Beltaine49 pour honorer le dieu solaire Belenos. La période de
Samain était, selon lui, caractérisée par des comportements extrémistes et violents ; les druides
pratiquaient des excommunications et sacrifiaient des animaux. Selon Toland, les druides
avaient fait construire les monuments mégalithiques, en les alignant sur les mouvements du
soleil et de la lune, les signes du zodiac, et les «  quatre vents», le dix-neuvième menhir
indiquant la conjonction de la lune et du soleil50. R. Nichols s’inspirera de ces données dans
son ouvrage.
67 Toland est à l’origine de la première organisation plénière des « cercles druidiques » et de la
« première lignée des druides contemporains ». Il convoqua le 22 septembre 1717, à la taverne
The Apple Tree à Covent Garden (Londres)51, l’ensemble de tous les membres des « bosquets
druidiques et bardiques». Il y eut des délégués d’Irlande, d’Écosse, de l’île de Man, du pays de
Galles, de la Bretagne armoricaine, de Cornouailles et des Anglais d’Oxford, de Londres et de
York. Il décida d’unir les divers « cercles » en une confédération, Druidic Order, et se fit élire
sous le nom « druidique » de Janus Junius Eoganesius52. Toland semble avoir eu des positions
antichrétiennes et avoir été favorable à une certaine continuité de pratiques païennes.
Henri Hurle et la « deuxième lignée druidique »
68 Plusieurs antiquaires sont souvent cités. Henry Rowland (1723) rechercha des racines
juives aux Celtes. Le médecin William Stuckeley53 dit Chynonax rompit avec la position

Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, 3 | 2008


Connexions entre le néo-chamanisme et le néo-druidisme contemporains. Étude en anthropolo (...) 14

antichrétienne de Toland. William Blake, archevêque de Canterbury, essaya de montrer les


correspondances entre les druides et la religion anglicane. En novembre1781, Henri Hurle,
artisan charpentier, fonda l’Ancient Order of Druids, une société secrète organisée à la
manière de la franc-maçonnerie, avec des membres exclusivement masculins et de la « bonne
société ». En 1783, des dissidents créèrent The United Ancient Order of Druids, une société
de secours mutuel, la « deuxième lignée des druides contemporains ». John Smith inventa la
première hiérarchie complexe du druidisme. Dans Gaelic Antiquaries (1780) d’abord écrit en
gaélique, il mélangea les folklores écossais et hébraïques. D’après M. Raoult54, les associations
druidiques issues de la lignée de H. Hurle sont plus franc-maçonnes que druidiques.

Un « barde » écossais, James Macpherson / Ossian


69 Entre 1760 et 1763, James Macpherson, un poète écossais, publia en trois tomes The Poems of
Ossian qu’il présenta comme ayant été écrits par un barde du IIIe siècle appelé Ossian55 et qu’il
aurait traduits du gaélique écossais. Ces poèmes primitifs et romantiques connurent un grand
succès en Europe, même si certains les dénoncèrent immédiatement car jamais Macpherson
ne fut capable de présenter ces textes dans la version originale.

Iolo Morganwg, le « dernier barde » gallois, et la « troisième lignée druidique »


70 Un autre auteur central dans l’organisation du druidisme romantique et à l’origine de la
«  troisième lignée  », fut Iolo Morganwg (né Edwards William)56 un poète asthmatique
qui se soignait au laudanum. Né en 1747, il parlait anglais et gallois, et appartenait à
la Gwyneddigion Society, une société savante du pays de Galles. Le pays de Galles était
pauvre, les propriétaires terriens anglais et riches. Des sociétés savantes, Cymnorodorion et
Gwyneddigion, se réunissaient à Londres dans des tavernes et déployaient tous leurs efforts
pour défendre l’identité galloise face aux Anglais et à l’Église d’Angleterre. Tous lisaient
Geoffrey de Monmouth et pensaient qu’Arthur, « le héros gallois», avait été détourné par les
Anglais.
71 En 1791, Iolo annonça aux Gwyneddigion que, étant le «  dernier barde du Siège de
Glamorgan», il devait rétablir la Glamorgan Gorsedd, la grande fête des bardes, pour défendre
la littérature galloise. Il convoqua les bardes à Londres le jour du solstice d’été, le 21 juin 1792,
pour une réunion en plein air. Il annonça alors que le druidisme avait toujours continué sous
l’appellation de bardisme, et cela sans changement depuis 2000 ans et sans « contamination
étrangère », en particulier anglaise. Iolo pensait que les druides étaient les constructeurs des
mégalithes, et des descendants des patriarches juifs et chrétiens, et qu’ils pratiquaient des
sacrifices animaux et humains. Les trois ouvrages de Iolo affirment l’importance des solstices,
des équinoxes, de la nouvelle et de la pleine lune. Les réunions druidiques devaient se tenir
le jour, en plein air. Les officiants brandissaient une épée dans son fourreau. Son troisième
ouvrage reprend des textes « plus anciens» qu’il prétendit « avoir traduits » et qu’il regroupa en
« triades », un procédé mnémonique à l’époque souvent rencontré dans les contes et légendes
« celtiques ». Sa cosmovision s’organise en trois niveaux : Amwfn le royaume des morts, le
royaume des mortels et celui des cieux. Elle développe l’idée de réincarnation pour arriver
au plus haut niveau, y compris au prix de sacrifices humains et d’animaux, dont la mort
permettrait de franchir un niveau. Le poète médiéval Taliesin (VIIe siècle) est pris en exemple
pour montrer que celui qui a subi la métempsychose peut se souvenir de toutes ses vies passées
et donc ainsi accumuler les connaissances57. Iolo a publié des poèmes qu’il attribua au poète
du XIVe siècle Dafydd ap Gwyilym. Ce n’est qu’au XXe siècle que l’on découvrit la fraude :
Iolo en est l’auteur.

En France
72 Pour être bref, on pourrait citer le Breton Hersart de la Villemarqué avec son œuvre Barsaz
Breiz (patrimoine poétique de la Bretagne), parue en 1839 qui avait suscité l’admiration
enthousiaste de l’Europe entière58. On sait que George Sand et Lamartine (marié à une Galloise
rencontrée lors d’une ersteaddfod d’Abergavenny et nommé barde par les Gallois en 1838)
s’enflammèrent pour cette œuvre poétique. L’ouvrage de la Villemarqué fut décrété frauduleux
comme les contes de Macpherson. En 1989, Donatien Laurent, chercheur au CNRS, retrouva

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un carnet manuscrit de collecte de contes et de poèmes, écrit par la mère de cet auteur. En 1855,
des Bretons créèrent l’association Breuriez Breiz (fraternité de Bretagne), dont La Villemarqué
fut président59. En 1898, le mouvement druidique devint plus social en Bretagne, avec la
création de l’association Union régionaliste bretonne (URB).
73 La même année, sous la présidence de l’archi-druide gallois Hwfa Mon, la première conférence
inter celtique réunit à Dublin des délégations irlandaises, galloises, écossaises, manxoises,
bretonnes et américaines60.

IV. Néo-paganisme celtique et néo-druidisme :


contextualisation d’anciens thèmes mythiques
A. Les ouvrages des « Antiquaires » : traduction, transmission, fraude
Alliances inter-celtiques ou indépendance farouche
74 Les auteurs consultés, néo-druides et chercheurs scientifiques, notent une double tendance qui
caractérise ces associations néo-celtiques. D’une part, elles veulent faire des alliances inter-
celtiques pour retrouver une certaine cohérence pan celtique, et, d’autre part, elles se trouvent
soumises à diverses pressions qui les poussent vers des scissions en groupes concurrents. Une
tendance à l’indépendance, très « celtique » paraît-il, mais qui démontre parfois une fâcheuse
tendance à considérer les autres illégitimes. Ce dernier comportement serait, par contre, peu
celtique.

Influences des libres-penseurs et des églises protestantes


75 Les néo-druides contemporains pensent que ces auteurs « néo-celtiques » du XVIIIe siècle
sont en continuité avec les bardes de la littérature médiévale. Ce n’est pas l’avis de certains
scientifiques. Leslie E. Jones, dans Druid/Shaman/Priest. Metaphors of Celtic Paganism, veut
démontrer que ce sont ces libres-penseurs Antiquarians, plutôt que les textes médiévaux, qui
ont forgé le druidisme contemporain. Elle retrouve aussi dans les ouvrages du XVIIIe siècle
les influences de l’église unitarienne61 et des Quakers62.

Ignorance et quête identitaire


76 Selon les spécialistes consultés, les Antiquaires, ces libres-penseurs, n’ont pas su, ou pas
pu, comprendre les récits médiévaux des bardes gallois. Mais ils ont réalisé leurs rêves
nostalgiques, et celui du public, en modernisant les druides, en leur donnant une identité
galloise, ce qui permit aux Gallois de réclamer une certaine autonomie face aux Anglo-Saxons.

Le roman, nouveau genre littéraire


77 Au XVIIIe siècle en Angleterre, apparaît un nouveau genre de littérature, le roman. Il
s’appuie sur la création d’un seul auteur clairement identifiable. C’est aussi à cette époque
qu’on s’interrogea sur Homère. S’agissait-il d’une ou de plusieurs personnes ? Et on assista
au retour de la culture populaire, d’où le succès des chants et poèmes des bardes. Des
académies littéraires furent organisées pour défendre la littérature et l’histoire locales, grâce
au regroupement des bardes locaux jusqu’alors éparpillés dans les territoires gallois.
78 En Macpherson et en Iolo, Leslie E. Jones voit des précurseurs des romans historiques,
romantiques et gothiques. Elle compare ces deux auteurs, entre autres, à Horace Walpole,
auteur du roman gothique The Castle of Otranto (1765). Celui-ci expliqua dans la préface
de son ouvrage, qu’il s’agissait d’un texte ancien retrouvé en Italie et qu’il aurait traduit. Or,
l’histoire n’a rien d’italien et décrit des épisodes horribles. Dans une deuxième édition de son
roman, Walpole avoua être l’auteur, et demanda pardon à ses lecteurs (Jones, 1998, p. 186).
Walpole avait ainsi créé une technique littéraire utilisée depuis par maints auteurs.
79 Les Antiquaires ont-ils écrit des œuvres romancées ? Si les textes de Macpherson et de Iolo
avaient été écrits au XVIe siècle ou avant, on aurait dit qu’ils étaient le développement normal
et la transmission des « cultures traditionnelles », et démontraient la capacité de la « culture
celtique » à amalgamer des traits empruntés à la philosophie et au mode de vie de leur temps.
Mais, au XVIIIe siècle, Gallois et Anglais veulent être « les enfants des Hébreux de la Bible ».
Pour eux, les druides sont devenus des étrangers. Ils ne peuvent les comprendre qu’en les

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rattachant aux Patriarches. Cette démarche leur a permis d’affirmer que l’héritage britannique
provenait directement de la Terre Sainte des judéo-chrétiens.

Des œuvres plus chrétiennes que païennes


80 Les historiens britanniques soulignent que ces Antiquaires appartiennent à des églises
protestantes, et que le druidisme a été associé au catholicisme (en particulier l’Église
catholique celtique d’Irlande). Il paraît donc ironique que les « druides » des XXe et XXIe
siècles voudraient présenter la « religion druidique » comme une alternative à l’héritage judéo-
chrétien, en insistant sur des aspects qu’ils affirment «  païens  ». Les néo-druides se sont
inspirés des travaux de ces celtomanes du XVIIIe, dont les auteurs étaient tous membres du
clergé. En conséquence, derrière les reconstructions du druidisme du XXe siècle, on peut se
demander où sont donc les druides et le druidisme, ce culte païen ? En lisant des ouvrages
écrits par des néo-druides jusqu’il y a une vingtaine d’années (au moins pour les « druides »
du Royaume-Uni), on comprend, sans avoir une grande connaissance des anciens Celtes et de
leurs druides, que ces textes parlent de pratiques religieuses plus chrétiennes que celtiques.

B. Positions aujourd’hui du druidisme contemporain, du


« chamanisme celtique » et des réseaux ésotérico-mystiques
81 Depuis la deuxième partie du XXe siècle, les néo-druides se sont mis à lire de plus en plus les
travaux de scientifiques spécialistes des Celtes et de textes médiévaux dans des traductions et
présentations en anglais moderne, ce qui les rend plus accessibles à un plus grand nombre de
non-spécialistes. En France, on trouve des traductions en français moderne (voir F. Leroux et
C. Guyonvarc’h) et des adaptations (J. Markale et ses récits arthuriens, par exemple).

Des approches spirituelles et romantiques


82 Dans les épopées anciennes, les prophéties de Taliesin, les sagas islandaises ou le Popol Vuh
des anciens Mayas, héros, chamanes et druides doivent combattre les esprits dans des joutes
orales à la dialectique symbolique dense. Dans les prières et les incantations contemporaines
proposées par les « nouveaux chamanes et druides » en Occident, on reconnaît rarement le
souffle des imprécations des druides anciens, les questions angoissées de la reine Boddicée63
à sa druidesse. Ces « fables contemporaines », comme l’écrivent plusieurs spécialistes, même
si elles utilisent un vocabulaire pseudo-tribal, sont quelque peu fades. Tout le monde ne peut
pas s’improviser auteurs à succès au même titre que Macpherson / Ossian, Tolkien, J.R.
Rawling auteur de Harry Potter ou encore Carlos Castaneda, qui sont des romanciers de talent.
Cependant, qui lit Macpherson aujourd’hui ?
83 Représentations symboliques « celtiques » et messages universels
84 Chaque âge a essayé de reconstruire le monde des druides et des anciens Celtes, à sa propre
image. Rabelais n’avait-il pas retranscrit, dans le contexte de son époque, de vieilles légendes
peut-être proto-celtiques mettant en scène le géant Gargantua, dans son ouvrage Les Grandes
et Inestimables chroniques du grand et énorme géant Gargantua (…) et qu’il fit pour le Roy
Artur64 ?
85 On pourrait appliquer cette approche comparative à d’autres œuvres artistiques. L.E. Jones
propose une lecture analytique de films empruntant aux « mondes celtiques », ancien, médiéval
et contemporain. On pourrait appliquer une analyse semblable au roman de Marion Zimmer
Bradley, Les dames d’Avalon, ou à ceux d’autres auteurs de romans fantastiques qui mettent
en scène, dans un style moderne, les héros arthuriens.

Un certain « retour aux sources celtiques »


86 Aujourd’hui, les connaissances scientifiques sont plus grandes, mais beaucoup de chercheurs
français continuent à dire qu’il est impossible de se faire une juste idée des anciens Celtes,
les textes médiévaux étant trop «  corrompus  ». De leur côté, les druides contemporains
s’intéressent de plus en plus aux découvertes récentes. Comment vont-ils les utiliser dans leurs
reconstructions d’un druidisme remis au goût du jour ? On peut en donner quelques aperçus
avec les deux exemples suivants.

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Une réécriture du Cycle du Graal par Jean Markale


87 Dans sa «  ré-écriture» du mythe du Graal, Le Cycle du Graal, en huit volumes, Markale
explique clairement ce qu’il se propose de faire :
88 «  Avertissement  : Les chapitres qui suivent ne sont pas des traductions, ni même des
adaptations des textes médiévaux, mais une ré-écriture, dans un style contemporain, d’épisodes
relatifs à la grande épopée arthurienne telle qu’elle apparaît dans les manuscrits du XIe au XVe
siècle. Ces épisodes appartiennent aussi bien aux versions les plus connues qu’à des textes
trop souvent restés dans l’ombre. Ils ont été choisis délibérément en fonction de leurs intérêts
dans le déroulement du schéma épique qui se dessine à travers la plupart des récits dits de la
Table Ronde, et par souci d’honnêteté, pour chacun de ces épisodes, référence précise sera
faite aux œuvres dont ils sont inspirés, de façon que le lecteur puisse, s’il le désire, compléter
son information sur les originaux. Une œuvre d’art est éternelle et un auteur n’en est que le
dépositaire temporaire. » (Markale 1992, La naissance du roi Arthur, p. 2365).

Les « secrets des Druides » selon Yann Brekilien


89 Yann Brekilien se présente comme un barde contemporain qui, depuis 1957, fait partie de
l’association Gorsedd de Bretagne. En s’inspirant des auteurs classiques et médiévaux, il a
écrit des romans et des essais sur l’histoire européenne, l’histoire de la Bretagne et celle des
Celtes anciens, des druides et de leurs connaissances ésotériques. Dans Les secrets des Druides
(2002), il poursuit une réflexion philosophique et religieuse, et inclut des développements
historiques du néo-druidisme depuis le XVIIIe siècle jusqu’à nos jours. Il présente une série
d’hypothèses sur ces fameuses connaissances philosophiques des druides anciens. Pour lui,
« le syncrétisme n’est pas répréhensible, il n’est pas une faiblesse mais un refus du nivellement
simpliste que voudraient imposer les esprits obtus » (Brekilien, 2002, p. 204). Il veut démontrer
l’esprit de tolérance des druides et leur respect devant le savoir des autres peuples. Selon lui, les
druides ont su emprunter aux savoirs des pythagoriciens, des « Scythes » et autres populations
à magiciens, avec qui ils semblent avoir eu des contacts66. Les peuples de langues celtiques
se retrouvaient de la Turquie à l’Europe de l’Ouest, du Nord et dans la péninsule ibérique. Ce
qui permettrait, selon Brekilien, de comprendre comment certains druides auraient choisi de
devenir des religieux chrétiens. Ils auraient reconnu, dans les enseignements des saints Patrick
et Colomban, des éléments de sagesse similaires aux leurs.
90 Vouloir, comme certains groupements néo-druidiques contemporains l’affirment, restaurer
« l’ancienne religion des Celtes», est selon Brekilien (2002, p. 196), « très louable, mais c’est
une utopie » qui n’a guère de sens. Selon lui, il n’existait pas de religion celtique, seulement
des conceptions philosophico-religieuses, qui proclamaient la nécessité fondamentale de la
liberté de pensée et de la tolérance.
91 Pour Brekilien, on peut parler, au sens moderne du terme, d’une « spiritualité druidique ».
Brekilien développe l’hypothèse d’un druidisme comme philosophie universelle. Son étude
et sa méditation, «  dans la fidélité à l’esprit des druides  », permettraient aux hommes
d’aujourd’hui de penser plus librement. Cela nous permettrait d’exercer une compassion réelle
envers les êtres animés avec lesquels nous sommes tous reliés : les autres humains, mais aussi
les animaux et les végétaux, car nous avons tous une origine commune. (On retrouve là des
accents appartenant aux sociétés animistes et chamaniques, et au New Age).
92 Pour Brekilien (2002, p. 203), la doctrine de la transmigration des âmes, enseignée par les
Druides, ne l’était pas en tant que « religion révélée », mais comme la doctrine philosophique
la plus vraisemblable. (On sait que la « croyance à la réincarnation » est devenue un concept
à la mode, aux contours très flous, dans lequel chacun met ce qu’il veut. Les techniques
de régression dans les vies antérieures et futures67 en apporteraient, selon les adeptes, des
preuves).
93 Selon Brekilien, pour les druides, il aurait existé deux conceptions distinctes de la religion :
celle, sommaire et superficielle, des gens du peuple ; et celle des « initiés », ceux qui se sont
instruits pendant de longues années et dont les plus savants devenaient druides. « Ce qui pour
les initiés était allégorique, était pris au pied de la lettre pour les gens du peuple ». L’auteur
prend le parti, dans cet ouvrage, de comparer les druides avec les « initiés » bouddhistes et

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hindouistes. (Il aurait pu rappeler les connexions historiques entre les associations druidiques
et celles des francs-maçons, issues pour ces dernières, des guildes des artisans68).

Conclusion
Pour une interprétation anthropologique du néo-chamanisme et du
néo-druidisme contemporains
94 Ces développements contemporains du chamanisme et du paganisme fonctionnent dans
une approche «  holiste et vitaliste  ». Ils se présentent comme des modèles d’une nouvelle
compréhension de la nature, et des relations des hommes avec la nature. Ils affirment les
« capacités des Occidentaux» à accéder à des « niveaux spirituels de la réalité », à mener une
vie respectueuse envers l’Univers. Les déplacements dans les temps et les espaces réels ou
virtuels sont en continuité avec les conceptions des « voyages » chamaniques et de ceux des
héros celtiques à Tir na Nog.
95 Chamanisme et paganisme sont des religions cosmiques, holistes, panthéistes et polythéistes.
Ils accordent une place centrale à la magie. L’expérience magique est une expérience de
pouvoir qui cherche à attirer et manipuler le sacré pour le mettre au service des buts des
«  magiciens  ». Des buts «  nobles  » qui permettront d’aider et de guérir les membres de
son groupe, en accédantà des dimensions supérieures de conscience(des états modifiés de
conscience – EMC) ; ou des buts matériels : recherche du gain, d’une liaison sentimentale,
d’une vengeance, d’un raid guerrier, contre les ennemis du clan ou de la « tribu ». Il s’agit là du
fonctionnement de la pensée magique, de la « pensée sauvage » analysée par Cl. Lévi-Strauss.
Le développement aujourd’hui des néo-chamanismes et des néo-paganismes montre que de
nombreux citoyens de notre planète envahie par le réalisme technologique et économique
ont besoin de merveilleux pour s’évader de la société moderne consumériste, égocentrique et
sauvage.

Influences et transmission
96 Le développement récent d’un néo-chamanisme celtique montre que les associations
druidiques contemporaines ont subi plusieurs influences : celles de « scientifiques » devenus
néo-chamanes, comme Michael Harner et Carlos Castaneda69, mais aussi celles des travaux de
scientifiques spécialistes des anciens Celtes, et de la littérature médiévale « celtique ».
97 Les druides contemporains et les «  chamanes celtiques  » ont rapidement noté que les
spécialistes, surtout britanniques et américains, de la littérature médiévale, ont pu montrer,
grâce aux travaux d’archéologues dès les années 1970-80, que les textes médiévaux des
peuples de langues celtiques démontraient des « archaïsmes » qui les apparentaient aux mythes
des Indo-européens (Grecs et Indiens de l’Inde). En conséquence, ces récits ne pouvaient donc
pas avoir été entièrement « concoctés » par les auteurs ou les copieurs chrétiens du Moyen
Âge. Les néo-druides d’aujourd’hui ont compris que, au-delà des interprétations chrétiennes
d’Arthur et des chevaliers de la Table ronde (par Chrétien de Troyes entre autres), si on lit
les versions galloises et irlandaises, on peut apprécier plus facilement des bribes des anciens
mythes et les aventures des héros / avatars des anciens dieux celtiques. La fascination pour les
druides perdure, car ces savants de l’époque, philosophes, naturalistes, astronomes, sont aussi
des magiciens et des voyants-guérisseurs, tout comme les chamanes.
98 Dans les années 1960, les adeptes de la contre-culture découvrent les expériences
émotionnelles profondes à la recherche de son moi intérieur et d’extases divines. On s’initie
aux transes et «  projections astrales  », à la liberté sexuelle, sous l’influence ou non de
substances psychotropes. Des anthropologues influencèrent les hippies : Weston La Barre et
le « culte du peyotl » (1950), Gordon Wasson et les champignons de Maria Sabina, la sage
mazatèque, Aldous Huxley et Les Portes de la perception (1956), Anaïs Nin et ses théories
exaltées sur la fiction comme rêve éveillé. L’ouvrage mondialement connu de l’historien des
religions Mircea Eliade, Le chamanisme et les techniques archaïques de l’extase (1951), a
une influence qui perdure aujourd’hui. Il en est de même pour Carlos Castaneda qui créa
en 1960 le personnage de Don Juan, un « sage indien » utilisant le datura. L’anthropologue
Michael Harner, qui collabora avec Castaneda, rejette les psychotropes. En 1975, il fonde le

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« Centre pour les Études chamaniques» qui œuvre pour la préservation des cultures et de la
sagesse chamanique à travers le monde. Dès I983, Harner organisa en Europe des « journées
d’apprentissage au chamanisme ».
99 Ces auteurs reprennent à leur compte la théorie d’Eliade dite du mythe de l’éternel retour qui
propose que, par la répétition, le primitif et l’homme religieux retrouveraient le « paradis des
origines et des archétypes », et chercheraient à annuler le temps historique pour vivre dans le
présent. Ces auteurs, chacun à leur manière, rejètent implicitement les méthodes de l’histoire
et de l’anthropologie, et mélangent les religions sans en montrer vraiment les différences, les
changements et la continuité. Il s’agit là d’un comportement de type ésotérique et occultiste.

Transmission, innovation, recompositions identitaires


100 Le néo-paganisme contemporain peut offrir à certaines personnes l’illusion du pouvoir, la
connaissance spirituelle en tant que pouvoir. Les pratiques et croyances néo-chamaniques, et
magico-ésotériques, persuadent l’individu qui « chamanise », qu’il a des pouvoirs, puisqu’il
pense pouvoir naviguer entre deux mondes, et guérir sa « maladie initiatique », les maladies
de ses concitoyens, ou des problèmes de tout ordre.
101 Les « druides » du XVIIIe siècle, gallois, cornouaillais et écossais, avaient cherché à récupérer
une identité « celtique » forte, différente mais aussi prestigieuse que celle des Anglo-Saxons.
Ces affirmations identitaires, «  inscrites dans la nuit des Temps bibliques  », devaient leur
permettre, lors de leurs luttes littéraires, politiques et identitaires locales contre les Anglais, de
retrouver un meilleur niveau de vie et un plus grand respect face à leurs identités culturelles.
Ils s’étaient organisés en sociétés quasi secrètes, basées sur des systèmes hiérarchiques, dans
lesquels chacun peut progresser, en maintenant des liens avec les sociétés des francs-maçons
et des rosicruciens (qui ont vu le jour à peu près en même temps, souvent dans les mêmes
cafés littéraires de Londres).

Ambivalence du néo-chamanisme. Danger et dérapages


102 Certains auteurs contemporains qui disent pratiquer le « chamanisme celtique », préviennent
le lecteur que le «  chamanisme  » et autres techniques magico-ésotériques ne peuvent
remplacer une psychothérapie encadrée par un psychologue diplômé. En effet, des
personnes marginalisées et fragiles peuvent être attirées par ces promesses d’acquérir un
«  pouvoir surnaturel  » en compensation pour leur impuissance dans leur vie quotidienne
et professionnelle. Les textes «  néo-chamaniques  » et leurs auteurs jouent quelque peu
un jeu ambivalent. Il ressort de leurs affirmations, que le «  chamanisme contemporain  »,
« celtique » ou de toute autre couleur locale, est selon eux « réel», c’est-à-dire efficace. Lévi-
Strauss et d’autres anthropologues ont démontré l’efficacité symbolique des pratiques magico-
religieuses. Des lecteurs prendront ces descriptions au pied de la lettre, et s’imagineront
acquérir réellement des pouvoirs magiques. Alors si on bricole avec ces pratiques, à la
poursuite de buts pervers ou même en toute bonne foi, le danger pour l’utilisateur qui y
croit peut devenir «  réel de recevoir des coups, physiques et psychiques  ». Les chamanes
amérindiens préviennent les participants euro-américains qui viendraient assister aux rituels
pour se moquer de leurs pratiques ancestrales, de ces conséquences fâcheuses éventuelles.
Un autre danger peut se situer aussi du côté de l’utilisation de substances hallucinogènes par
certains groupes de néo-chamanes et néo-druides. En France, des néo-chamanes inspirés par le
chamanisme amazonien proposent la prise d’ayahusca. Certes, lors des séances chamaniques,
ils affirment à leurs patients et adeptes que la quantité de drogue donnée aux « Européens » est
infime comparée aux doses ingurgitées par les Amérindiens. Mais il y a parfois des réactions
très vives et dangereuses de certaines personnes face à ces produits. Il y a eu mort d’homme
à la suite d’une prise d’iboga, une substance hallucinogène empruntée aux devins africains,
lors d’une telle séance en France. Les enquêtes orales70 montrent que certaines personnes qui
viennent à ces séances avec prise d’hallucinogènes ne viennent que pour le « voyage » qu’elles
procurent parfois.
103 Si ce «  chamanisme contemporain  » est, ainsi que d’autres néo-chamanes l’expliquent,
«  non réel» et veut se présenter comme un ensemble de techniques de «  méditation
transcendantale », de« techniques archaïques de l’extase »(à la suite de Mircea Eliade), alors

Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, 3 | 2008


Connexions entre le néo-chamanisme et le néo-druidisme contemporains. Étude en anthropolo (...) 20

leurs recommandations peuvent induire en erreur un public trop crédule. Et ce d’autant plus
que certains néo-chamanes se cachent derrière la caution de la science en citant les noms de
scientifiques reconnus. On peut se demander aussi si certains néo-chamanes ne cherchent pas
seulement à faire mieux vendre leurs bouquins et leurs recettes.

Des techniques pour lutter contre le stress : visualisation et


méditation
104 Cependant, les techniques et pratiques de type néo-chamanique peuvent avoir une certaine
efficacité psychothérapeutique. Les « chamanes celtiques », les néo-chamanes et des gourous
New Age mélangent, en une synthèse simplificatrice et dirigiste pour certains, des pratiques
et croyances de types néo-païen, néo-druidique et néo-chamanique avec les idéologies
psychothérapeutiques du «  développement du potentiel humain (DPH)  », une des idées
fortes du New Age, formulée à Esalem dans les années 1960-80. Derrière les expressions
«  psychologisantes  » comme «  chamane intérieur  », «  voyage intérieur  », des lecteurs
comprendront qu’il s’agit d’images, de visualisations, pour mieux faire comprendre les
souffrances, physiques et psychiques, et les repousser ailleurs (au-delà, dans le rêve, dans
l’imagination d’une « vie antérieure ou future ») et ainsi améliorer nos facultés pour lutter
contre le stress. Des techniques similaires sont utilisées par des psychothérapeutes et des
psychologues reconnus et diplômés. Les techniques de visualisation préconisées par Michael
Harner, anthropologue enseignant le néo-chamanisme (1990, p.  31-32), sont précises et
simples, et laissent une grande latitude à notre aptitude créatrice : « aller là où vous pensez
pouvoir pénétrer dans l’ailleurs ; allez-y et voyez ce que vous trouvez ».

Renouveau du paganisme et quête du Graal modernisée


105 Des anthropologues commencent à souligner ce développement rapide du néo-chamanisme,
du New Age et du néo-paganisme et l’inscrivent dans leurs études sur la mondialisation du
magico-religieux à tendance psychothérapeutique et écologique. Cet article voudrait suggérer
qu’aujourd’hui, sous l’influence du New Age et du néo-chamanisme, et de certains groupes
néo-païens (asatru et odinistes, wiccan et d’autres adorateurs de la Grande Déesse), les écrits et
les pratiques des néo-druides prennent une coloration païenne. Par exemple, la fête de Beltaine
(fin avril-début mai), sur la colline de Calton Hill à Edimbourg, a pagan ceremony, semble
plutôt être de type wicca que néo-druidique ou celtique écossais71 ; plus de six mille personnes
y ont assisté en 2007.
106 La majorité des « chercheurs de vie et des quêteurs de sagesse» sont des personnes volontaires
et curieuses, attirées par les rencontres avec autrui et par les pratiques mystérieuses. Les
croyances et techniques du New Age et du néo-chamanisme, qui prennent une place de plus en
plus visible sur la scène internationale, se présentent comme quelque chose de plus puissant
que la science, « puisque la science n’arrive toujours pas à expliquer les grands problèmes
existentiels ». Les techniques, moyens rituels et explications spirituelles, dont beaucoup ont
fait leurs preuves chez les peuples traditionnels, peuvent momentanément convaincre, voire
même aider, ou tout simplement passionner certaines personnes.
107 Les New Agers et néo-païens de toutes tendances sont des optimistes et des enthousiastes.
Ils courent sans fin sur les « chemins de la connaissance et de l’amélioration du soi» dans
une quête du Graal modernisée. Grâce à l’Internet et à des conférences aux niveaux local,
national et international, les néo-païens sont en train de s’organiser en réseaux pour se retrouver
avec d’autres penseurs (militants altermondialistes et représentants des peuples autochtones)
et proposer des solutions alternatives pour le devenir de la planète en réinventant des traditions
et des figures mythiques.
108 Les Indiens contemporains de l’Amérique du Nord, reprenant à leur compte aujourd’hui ce
qu’affirment les métaphores des mythes de leurs ancêtres, disent que « les bonnes traditions
sont celles qui changent avec leur temps».

Éléments bibliographiques
109 NB - Les ouvrages précédés d’un astérisque (*) appartiennent à la mouvance ésotérique, néo-
chamanique, néo-druidique et néo-païenne.

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Connexions entre le néo-chamanisme et le néo-druidisme contemporains. Étude en anthropolo (...) 21

110 Ashe, G., Mythology of the British Islands, London, Methuen Pub. Ltd, 2002 (1990).
111 Beresford Ellis, P., The Mammoth Book of Celtic Myths and Legends, (with prefaces for texts
of Ireland, Isle of Man, Scotland, Wales, Cornwall, Britanny), London, Robinson, 2002 (1999).
112 Berger, H. A., Leach, E. A. & Shaffer, L. S., Voices from the Pagan Census. A National Survey
of Witches and Neo-pagans in the United States, Columbia, S.C., University of Carolina Press,
2003.
113 Brekilien, Y, Les secrets des druides, Paris, Editions du Rocher, Brocéliande, 2002.
114 Brown, J. E. (recorder & ed.), The Sacred Pipe : Black Elk’s Account of the Seven Rites of
the Oglala Sioux, Norman, University of Oklahoma Press, 1963 (Les Rites secrets des Indiens
Sioux, Paris, Payot, 1952).
115 Bruneaux, J.-L., Les Druides, des philosophes chez les Barbares, Paris, Seuil, 2006.
116 T. Cahill, How the Irish Saved Civilisations. The Untold Story of Ireland’s Heroic Role from
the Fall of Rome to the Rise of Medieval Europe, New York, Doubleday, 1995.
117 * Carr-Gomm, P. (ed), La renaissance druidique. La voix du druide contemporain, Paris, Guy
Trédaniel Editeur, trad. de l’anglais par Bernard Dubant (The Druid Renaissance, Thorsons
& Harper Collins, 1996).
118 Champion, F. , « La ‘nébuleuse mystique-ésotérique’ : une décomposition du religieux entre
humaniste revisité, magique, psychologique », in J.B. Martin et F. Laplantine (eds), Le défi
magique. Esotérisme, occultisme, spiritisme, vol. I, Lyon, PUL-Presses Universitaires de Lyon
et CREA - Centre de Recherches et d’Etudes Anthropologiques, 1994, p 315-326.
119 Contou-Carrère, B., Régressions dans les vies antérieures. Des usages, des pratiques, Paris,
L’Harmattan, 2004.
120 * Dacquay, P., Renaissance du Chamanisme occidental, « Renard Agile conte le Deo Celte
Soof-Ta », Genève (Suisse), Editions Ambre / Tourmaline, 2003.
121 Doore, G. (ed), La voie des chamanes, Paris, J’ai Lu - New Age, 1989 (Shaman’s Path, 1988).
122 Douglas, G., Scottish Folk and Fairy Tales, Introduction : xi-xxxiii, London, Lomond Books,
2005 (2003).
123 Dumézil, G., Loki, Paris, Editions Flammarion, 1986.
124 Eliade, M.,  Le chamanisme et les techniques archaïques de l’extase (2e éd. revue et
augmentée), Paris, Payothèque, 1974 (1951), (1ère éd. aux USA, 1964).
125 Eluère, C., L’Europe des Celtes, Découvertes Gallimard n°  158 / Réunion des Musées
Nationaux, Histoire, 1992.
126 Erdoes, R., & Fire/Lame Deer (Tahca Ushte), J., John Fire Lame Deer, seeker of Visions,
1977, (trad. française De mémoire indienne. La vie d’un Sioux voyant et guérisseur, Paris,
Payot, l972).
127 * Fergusson, M., Les Enfants du Verseau. Pour un nouveau paradigme, Paris, Calmann-Lévy,
1981 (1980).
128 Fire / Lame Deer, A., avec la collaboration de Erdoes, R., Le Cercle Sacré. Mémoires d’un
homme-médecine sioux, Paris, Albin Michel, Terre Indienne, 1995 (A. Fire Lame Deer & R.
Erdoes, Gift of Power, 1992).
129 Graves, R., La déesse blanche. Un mythe poétique expliqué par l’histoire, traduit de l’anglais
par Guy Trévoux, Paris, Editions du Rocher (coll. Gnose), 1979.
130 Green, M., Les druides, trad. par Claire Sorel, Paris, Editions Errance, 2000 (Exploring the
World of the Druids, Thames & Hudson Ltd, London, 1997).
131 Guyonvarc’h, C.-J., Magie, médecine et divination chez les Celtes, Paris, Bibliothèque
scientifique, Payot, 1997.
132 Hamayon, R. N., «  Introduction à Chamanismes. Réalités autochtones, réinventions
occidentales », in R. N. Hamayon (ed), Chamanismes, Revue Diogène, Paris, Quadrige / PUF,
2003, p. 7-54.
133 Jones, L. E., Druid, Shaman, Priest. Metaphors of Celtic Paganism, Enfield Lock
(Middlessex), Hisarlik Press, 1998.
134 * Harner, M., Chamane. Les secrets d’un sorcier indien d’Amérique du Nord. Paris, Albin
Michel (coll. “Expérience intérieure”), 1982.
135 Hawkins, G. S., Stonehenge decoded, in collaboration with John B. White, illustrated, New
York, Dell Publishing Co., Inc., A Delta Book, 1965.

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136 Konstam, A., Atlas Historique du Monde celte, Frankland Publishing Services Ltd, Maxi
Livre, 2002 (2001).
137 Laplantine, F., «  Présentation  », in J.B. Martin et F. Laplantine (eds), Le défi magique,
Esotérisme, occultisme, spiritisme, vol. I, Lyon, PUL, 1994, p. 9-43.
138 Leroux, F., et Guyonvarc’h, C., Les druides. Rennes, Editions Ouest France – Université (De
mémoire d’hommes : l’histoire), 1986.
139 Leroux, F., et Guyonvarc’h, C., La civilisation celtique, Rennes, Editions Ouest France –
Université (De mémoire d’hommes : l’histoire), 1990.
140 Leroux, F., et Guyonvarc’h, C., Les fêtes celtiques, Rennes, Editions Ouest France - Université,
1995.
141 Martin, J.-B., et Laplantine, F., (eds), Le défi magique. Esotérisme, occultisme, spiritisme,
vol. I, Lyon, PUL-Presses Universitaires de Lyon et CREA - Centre de Recherches et d’Etudes
Anthropologiques, 1994.
142 * Meadows,K., Médecine de la Terre. Une méthode chamanique pour découvrir les
secrets de notre personnalité, traduit de l’anglais par Jacques Gontier, Plazac-Rouffignac,
Editions Amrita/Arista, 1992 (Earth Medicine, A Shamanic Way to Self Discovery, Element
Books,1989).
* Mc Gaa / Eagle Man, E., Mother Earth Spirituality : Native American Paths to Healing
Ourselves and Our World, ill. by M.N. Buchfink, New York & San Francisco, Harper & Row
(Native American Studies / Environnemental Issues), 1990.
143 * Mc Gaa / Eagle Man, E., Rainbow Tribe. Ordinary People Journeying on the Red Road,
New York, HarperCollins Publishers (Native American Studies), 1992.
144 Markale, J., Le Cycle du Graal. Première époque  : La naissance du roi Arthur, Paris,
Pygmalion / Gérard Watelet, 1992.
145 * Markale, J., Druides et Chamanes, Paris, Pygmalion / Editions Flammarion, 2005.
146 * Matthews, J., Le chaman celtique, Paris, Editions du Rocher / Brocéliande, 1996 (The Celtic
Shaman, a Handbook, 1991).
147 * M. Mercier, Chamanisme et chamanes. Le vécu dans l’expérience magique, Paris, Pierre
Belfond (coll. Initiation et connaissance), 1997.
148 Neihardt / Arc-en-Ciel-Flamboyant, J., Elan-Noir ou la vie d’un saint homme des Sioux
Oglalas, Paris, Stock,1977 (Black Elk Speaks, 1932).
149 * Nichols, R., The Book of Druidry, Foreword by P. Carr-Gomm, London, The Aquarian Press,
HarperCollins Publishers, 1990.
150 Perrin, M. Le chamanisme. Paris, PUF, Que sais-je ? n° 2968, 1995.
151 Ralls-Macleod, K., & Robertson, I., The Quest for the Celtic Key, Edinburgh, Luath Press Ltd,
2005 (2002).
152 Raoult, M., Les druides. Les sociétés initiatiques celtiques contemporaines, Paris, Editions du
Rocher, L’Homme et l’Univers, 1992.
153 Riffard, P. A., L’ésotérisme. Qu’est-ce que l’ésotérisme  ? Anthologie de l’ésotérisme
occidental, Paris, Robert Laffont (coll. Bouquins), 1990.
154 * Dr. Ross / Ehanamani, A. C., Mitakuye Oyasin. “Nous sommes tous frères”. Plazac-
Rouffignac (24580), Editions Amrita/Arista, 1993 (Mitakuye Oyasin. “We are all related”
1989, 1990).
155 Vazeilles, D., Le Cercle et le Calumet. Vivre chez les Sioux aujourd’hui, Toulouse, Privat,
1977.
156 Vazeilles, D., Femme Bisonne Blanche et Oiseau-Tonnerre  : dynamisme du chamanisme
des Indiens Sioux Lakotas, thèse pour le Doctorat ès-Lettres et Sciences humaines, Paris V-
Sorbonne, 1984.
157 Vazeilles, D., « Communication avec les Esprits et identité culturelle », in La communication.
Revue Languedocienne de Sociologie-Ethnologie n°  1, Université Montpellier III, 1986,
p. 47-59.
158 Vazeilles, D., Les chamanes, Maîtres de l’Univers. Paris, Ed. Le Cerf (Bref), 1990.
159 Vazeilles, D., Chamanes et visionnaires sioux. Paris, Le Rocher / Le Mail, 1996.

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Connexions entre le néo-chamanisme et le néo-druidisme contemporains. Étude en anthropolo (...) 23

160 Vazeilles, « Relgioni degli Indiani del Nordamerica », in G. Filoramo, Storia delle Religioni.
5. Religioni dell’America precolombiana e dei popoli indigeni, Roma-Bari, Editori Laterza &
Figli, 1997, p. 143-168.
161 Vazeilles, D., « Le Chamanisme des Amérindiens du Nord », in Indian Summer. Les Premières
Nations d’Amériques du Nord, Bruxelles, Musées Royaux d’Art et d’Histoire, Editions
Tempora, 1999, p. 225-237.
162 Vazeilles, D., « Du chamanisme au néo-chamanisme et au ‘Nouvel Age’«  : savoir, magie,
quête spirituelle ? », in A. Moreau et J. -C. Turpin (eds), La Magie. Tome 3 : Du monde latin
au monde contemporain, Université Montpellier III, 2000, p. 195-216.
163 Vazeilles, D., « Shamanism and New Age : Lakota Sioux Connexions” , in H. P. Francfort
& R. N. Hamayon (eds) in coll. with P. G. Bahn, The Concept of Shamanism  : Uses and
Abuses, Bibliotheca Shamanistica vol. 10, Budapest, Akademia Kiado & International Society
for Shamanistic Research, 2001, p. 367-388.
164 Vazeilles, D., «  Revival of Lakota Sioux Shamanism  », in M.  Hoppal & G. Kosa (eds),
Rediscovery of Shamanic Heritage, Bibliotheca Shamanistica vol. 11, Budapest, Akademia
Kiado & International Society for Shamanistic Research, 2003.1, p. 335-353.
165 Vazeilles, D., «  Chamanisme, néo-chamanisme et New Age  », in Chamanismes, Revue
Diogène, R. N. Hamayon (ed), Paris, Quadrige / PUF, 2003, p. 239-280.
166 Vazeilles, D., et Laniel Le François, M., « Les conceptions du monde des Indiens d’Amérique
du Nord  » (50 p manuscrites), in J.–F. Mattéi (ed), Le discours philosophique, Vol 4,
Encyclopédie philosophique universelle, Paris, PUF, 1998.
167 Vernette (père), J., Le Nouvel Age. A l’aube de l’ère du Verseau, Paris, Pierre Tequi (ed), 1989.
Vitebsky, P., The Shaman  : Voyages of the Soul, Trance,
Ecstacy and Healing from Siberia to Amazon. Boston, Little Brown,
1995.
168 1   Enquêtes orales et observation participante chez les Indiens Sioux Lakotas (Sud Dakota,
USA), séjours de deux ans (1969-71), et de nombreux mois d’été jusqu’en 2003.
169 2   R. N. Hamayon, «  Introduction à Chamanismes. Réalités autochtones, réinventions
occidentales », in R. N. Hamayon (ed), Chamanismes, Revue Diogène, 2003, p. 7-54.
170 3  Vazeilles1990, 1999, 2000, 2001, 2003. 1 et 2.
171 4  Les wiccans sont un groupe néo-païen qui s’inspire du folklore celtique et anglo-saxon. Vers
le milieu du XXe siècle, Gerald Gardner porta sur la place publique la « sorcellerie folklorique
européenne » ; il s’inspira des ouvrages de l’égyptologue Margaret Murray (The Witch Cult in
Western Europe, 1921 et The God of the Witches, 1933). On peut reconnaître aussi les influences
de Sir James Frazer et de Robert Graves. Les wiccans sont des adorateurs de la Grande Déesse
et de son Consort.
172 5  Beresford 2002, Douglas 2003, Graves 1979, MacKillop 2006.
173 6  Ouvrages de C. Guyonvarc’h et F. Leroux ; Dumézil 1986.
174 7  Brunaux 2006, Eluere 1992, Green 2000, Konstam 2001, Ralls-Macleod & Robertson 2005…
175 8   C’est le thème, par exemple, du roman Ceremony de Leslie Silko, une Indienne Laguna
métisse du Sud-Ouest des USA.
176 9  Voir l’ouvrage de Marilyn Ferguson, 1980, un des ouvrages fondateurs du New Age.
177 10  La biographie du chamane sioux Nicolas Black Elk, mort en 1952, est un best-seller traduit
en plusieurs langues, voir J. Neihardt et J.E. Brown.
178 11   Vazeilles, 1997, 2000, 2001, 2003.1 et .2 ; voir aussi les travaux de M. Perrin 1991, qui
est très critique ; l’introduction par R. Hamayon à l’ouvrage collectif Chamanismes…op. cit.,
2003, p. 7-54.
179 12   Pour une présentation d’autres medicine men amérindiens qui viennent en Europe et en
Russie, voir Perrin 1991 et Vazeilles 1990, 2001, 2003.
180 13  Archie Fire Lame Deer, avec la collaboration de Richard Erdoes, Le Cercle Sacré. Mémoires
d’un homme-médecine sioux, 1995 (Gift of Power, 1992).
181 14  Biographie de John Fire Lame Deer écrite par R. Erdoes 1972.
182 15 Barbara Means Adams, Rolling Thunder, Allen Ross – Ehanamani, voir Vazeilles 2001 et
2003.
183 16  Néo-chamanes français : P. Dacquay, M. Mercier…

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184 17   Par exemple, lors de la venue plusieurs années de suite d’A. Fire Lame Deer, que certains
de mes étudiants et moi-même sommes allés rencontrer, ou encore de «  chamanes indiens
chamanisant » dans la forêt de Brocéliande.
185 18  Catlinite, pierre dite à savon rouge dont l’origine mythique serait la fossilisation du sang des
ancêtres des Indiens et que l’on retrouve dans une carrière au Minnesota. La vendre ainsi hors
d’un contexte sacré est un véritable scandale pour les Indiens des Plaines traditionalistes.
186 19   Perrin 1991. J’ai développé ces aspects dans deux articles (2001 et 2003) parus dans des
ouvrages construits à partir d’actes de colloque dont plusieurs communications abordaient ces
thèmes à partir de recherches menées tant au Mexique qu’en Russie ou encore en Corée.
187 20   J’ai reçu quelques lettres poignantes, des appels au secours relatant des situations
dramatiques diverses, difficiles à vérifier, du harassement sexuel de la part du medicine man
indien, jusqu’à des accusations de viol, ou des lettres décrivant le désespoir face à la maladie
en phase terminale, le malade ou ses proches pensant trouver une meilleure aide auprès d’un
« véritable » chamane qu’on me demandait de trouver chez les « véritables » Indiens.
188 21  Par exemple, Akwesasne Notes, automne et hiver 1983, publié par la tribu des Mohawks.
189 22  On peut lire cette « déclaration de guerre » sur le site Internet : www.geocities.com/Area5/
Dimension/7670/1lakotaltr.html. Notons que plusieurs sites sur les vampires renvoient à ce
texte.
190 23  Vazeilles enquêtes de terrain, 2001 et 2003.
191 24  M. Ferguson, auteure fondatrice du New Age, Les Enfants du Verseau, 1982.
192 25  Voir R. Hamayon, (ed), Chamanismes…, op. cit.
193 26  K. Meadows (1992) dit pratiquer un « chamanisme amérindien et un chamanisme celtique ».
194 27   Les folklores européens parlent souvent des chasses sauvages, appelées en France, chasse
Arthur, chasse gallière... Ces cavalcades terrifiantes traversaient les forêts et les cieux les soirs
d’orage, ou au moment des tempêtes des équinoxes, ou des nuits d’épouvante (veille de la
Toussaint, Halloween, nuit de Walpurgis - le 30 avril, pour la Saint André, etc.). Arthur et les
déesses Diane ou Hel, sur des chevaux d’ébène entourés de chiens monstrueux et écumants,
entraînaient derrière eux fées, elfes, gobelins, sorciers, morts et revenants, et autres créatures
« surnaturelles », « démoniaques » disaient les chrétiens, en une cavalcade terrifiante.
195 28  Lévi-Strauss traduit trickster par décepteur, voir Anthropologie structurale et L’homme nu.
Voir pour les Sioux et autres amérindiens, Vazeilles, 1996.
196 29  Matthews John, The Celtic Shaman, a Handbook, 1992 ; trad. française : Le chaman celtique,
1996. Il est aussi l’auteur de Taliesin  : Shamanism and the Bardic Mysteries in Britain and
Ireland, 1991, « … une étude en religion et anthropologie comparées ».
197 30   L’histoire de Kullwch et Owen, fille d’Ispadaden Pengwor, dans les contes gallois
Nabinogion. Les héros recherchent les animaux les plus anciens qui doivent être capables
d’expliquer comment joindre le dieu Mabon, retenu prisonnier. Mabon, le plus ancien des Dieux,
est un des intermédiaires entre les humains et les Dieux. Une histoire qui se compare facilement
à des thèmes de type chamanique, en particulier la croyance à l’antériorité de la création des
animaux : une plus grande antériorité est le gage de la plus grande connaissance des créatures
vivant sur terre. Les esprits alliés du chamane sont de formes zoomorphes.
198 31   Le chaudron de Grunderstrup montre, entre autres personnages, un homme ou un dieu
(Cernunos ?), peut-être assis en tailleur (dans la position du « demi-lotus » pour d’autres) qui
brandit de la main droite un torque et de la gauche un serpent (ou une anguille). Un autre
dieu plonge des hommes (morts ?) dans un chaudron, qui pourrait être le Chaudron Annwn, le
« chardon de la renaissance », qui permettait à certains morts de renaître.
199 32  Les Amérindiens du Nord parlent de « roue de la médecine » (medicine wheel), de « cercle
du monde ».
200 33  Par exemple, la roue du cycle des Nartes, héros divins des Ossètes, cf. Loki de Dumézil.
201 34   Site que j’ai consulté à plusieurs reprises, dont le 25 décembre 2005 : www.druidry.org.
Voir aussi P. Carr-Gomm, Druid Mysteries.
202 35   Les sept rituels sacrés des Indiens Sioux Lakotas par J. E. Brown. Les biographies des
chamanes sioux sont très prisées par les néo-chamanes et les New Agers.
203 36  Les Amérindiens disent plutôt sweatlodges, « tente pour les bains de vapeurs ».
204 37 Voir Brekilien 2002, p. 36-41.

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Connexions entre le néo-chamanisme et le néo-druidisme contemporains. Étude en anthropolo (...) 25

205 38 Voir P. & S. Carr-Gomm, The Druid Animal Oracle : working with the sacred animals of
the druidic tradition, 1996.
206 39 Ph. & S. Carr-Gomm & W. Worthington (illustrator), The Druid Card Tarot : Use of Magic
of Wicca and Druidry to Guide your Life,2005, www.druid.org.
207 40   Une biche blanche dans l’iconographie et les légendes européennes représente souvent
la présence d’une fée…Les récits folkloriques disent que les cervidés sont le bétail des êtres
féeriques.
208 41 Ph. Carr-Gomm , Druid Way.
209 42  Ph. Carr-Gomm, La renaissance druidique. La voix du druide contemporain, 2001 ; Brekilien
Yann, La mythologie celtique, 1983 ; et Les secrets des druides, 2002.
210 43   Traits et encoches sur des baguettes de bois gravées et colorées avec vingt symboles
analogues aux runes germaniques, les ogams étaient encore pratiqués au Moyen âge irlandais
dans l’art de la divination.
211 44  Archéologues et historiens consultés pour ce travail : Th. Cahill, Ch. Ejuère, Miranda Greene,
Angus Konstam, Karen Ralls-Macleod…
212 45  Par exemple, M. Raoult, 1992, « Celte et druide » p. 5 et 19-26.
213 46 L. E. Jones, 1998 ; K. Ralls-Macleod & I. Robertson, 2005, M. Raoult, 1992…
214 47 John Toland, A Critical History of the Celtic Religion and Learning : Containing an Account
of the Druids, or, the Priests and Judges ; of the Vaids, or the Diviners and Physicians ; and of
the Bards, or, the Poets and Heralds ; of the Ancient Gauls, Britons, Irish and Scots, London,
1726.
215 48 Ross Nichols, The Book of Druidry, Foreword by Ph. Carr-Gomm, 1990, p. 98.
216 49  Beltaine, 30 avril-1er mai, appelée nuit de Walpurgis par les Germano-Scandinaves, est en
quelque sorte le pendant de Samain (Halloween). Depuis une vingtaine d’années, des feux de
Beltaine sont à nouveau allumés dans plusieurs villes d’Écosse, dont une cérémonie néo-païenne
et wicca sur Calton Hill à Edinburgh, que j’ai pu observer en 2007.
217 50  Voir les travaux de l’archéoastronome G. S. Hawkins, 1965, Stonehenge decoded.
218 51   Des néo-druides et francs-maçons disent que, le 24 juin 1717 eut lieu à Londres, dans la
taverne The Goose and Gridion, la première assemblée générale constitutive de la Grande Loge
spéculative qui réunit des représentants des quatre grandes loges franc-maçonnes de la ville de
Londres.
219 52  Brekilien 2002, p. 186.
220 53  Ouvrages de W. Stuckeley, Stonhenge, 1740 et Avebur, 1743.
221 54  M. Raoult, 1992, p. 219-220.
222 55  Ossian est un poète cité dans les textes médiévaux irlandais (manuscrit du XVIe siècle) dits
« Le cycle des Fenians », des récits indépendants les uns des autres racontant les hauts faits
de guerriers mercenaires organisés en bandes. Les Fenians seraient des milices chevaleresques
célèbres pour leurs exploits cynégétiques et fantastiques dont les chefs Finn et Ossian sont des
bardes. Ces bandes furent vaincues à la bataille de Cabra entre 254 à 330 A.D.
223 56 Williams Edward (Iolo Morganwg), Poems Lyrical and Pastoral. London, 1794.
224 57   D’autres chercheurs, dont Leslie E. Jones, verront dans ces transformations successives
autant d’épisodes de type chamanique, tout particulièrement les récits qui concernent Taliesin
et Cuchulain le héros guerrier du cycle irlandais dit « Le rameau rouge » (IIe siècle ap. J.-C.).
225 58  Brekilien 2002, p.189.
226 59  Brekilien, 2002, p.191.
227 60  Brekilien 2002, p. 192.
228 61  Église protestante unitarienne (Unitarian Church) rejette la doctrine de la Trinité et la divinité
de Jésus, et affirme que Dieu est un. Elle fonctionne en congrégations autonomes, et accorde
beaucoup d’importance au développement de la personnalité individuelle et affiche une grande
tolérance face aux différentes conceptions religieuses.
229 62   Les Quakers, une secte religieuse appelée Society of Friends, fondée par un Anglais,
George Fox, en 1650. Les membres, qui refusent de s’appeler quakers, sont des défenseurs de la
simplicité dans tous les domaines, comportementaux, vestimentaires, ainsi que lors des cultes.
230 63  Boddicée est, selon certains archéologues, une druidesse spécialiste des combats.

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231 64   Rabelais, Les Grandes et Inestimables Cronicqs du grand et énorme géant Gargantua :
contenant généalogies. La grandeur et force de son corps. Aussi les merveilleux faits d’armes
qu’il fit pour le Roy Artur, comme verrez ci-après. Imprimé nouvellement, 1532.
232 65  J. Markale, Le Cycle du Graal, Première époque, La naissance du roi Arthur, 1992 : « Jean
Markale, écrivain, poète, homme de radio et de télévision, comédien et conférencier… ».
233 66  Voir aussi le spécialiste des Gaulois, Brunaux (2006).
234 67  B. Contou-Carrère, 2005.
235 68  Voir K. Ralls-Macleod et I. Robertson., 2005.
236 69  Vazeilles 2003.2.
237 70   Enquêtes menées par plusieurs de mes étudiants, dont le doctorant Tanguy Fraud, dans le
sud de la France sur les trois dernières années.
238 71  Cf. Ouvrage de G. Douglas, 2003.

Pour citer cet article

Référence électronique

Danièle Vazeilles, « Connexions entre le néo-chamanisme et le néo-druidisme contemporains.


Étude en anthropologie/ethnologie comparée », Cahiers d’études du religieux. Recherches
interdisciplinaires [En ligne], 3 | 2008, mis en ligne le 04 juillet 2008, consulté le 04 mai 2013. URL :
http://cerri.revues.org/161 ; DOI : 10.4000/cerri.161

À propos de l'auteur
Danièle Vazeilles
Professeur d’ethnologie/anthropologie sociale à l’Université de Montpellier III (Département
d’Ethnologie), a écrit des ouvrages sur les Indiens d’Amérique du Nord, tout particulièrement les
Indiens des Plaines et les Sioux Lakotas, traitant de la vie quotidienne, du renouveau identitaire
des Indiens et le dynamisme des chamanes, ainsi que de l’engagement des Sioux pour restaurer la
biodiversité dans les grandes plaines. Plusieurs travaux portent sur les personnages transgresseurs
amérindiens (tricksters, clowns rituels, hommes-femmes) et européens dont les vampires. De manière
plus générale, elle s’intéresse aux relations interculturelles, aux minorités et peuples autochtones, aux
ressourcements identitaires, aux pratiques religieuses et aux nouvelles formes du chamanisme et du
paganisme dans les sociétés occidentales.

Droits d'auteur
Tous droits réservés

Résumés
 
Basé sur des recherches de terrain sur le chamanisme des Amérindiens, des analyses d’écrits
de néo-chamanes, «  new agers  » et néo-druides, de textes médiévaux et d’ouvrages de
spécialistes des mondes celtes, cet article montre que New Age et néo-paganisme reprennent
à leur compte maintes idées des sociétés animistes et chamaniques. Des auteurs Sioux
Lakotas ont adopté les croyances holistiques de la mouvance magico-ésotérique, avec des
emprunts à des «  connaissances spirituelles des anciens Celtes et de leurs druides  ».
Chamanes et druides modernes cherchent à traduire en termes modernes des notions
« étrangères » pour les transmettre aux générations futures. Ils innovent en réactualisant les
connaissances ancestrales pour en développer les aspects «  psychothérapeutiques  ». Leurs
activités spirituelles démontrent le dynamisme des traditions chamaniques et païennes dans
le monde moderne.

Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, 3 | 2008


Connexions entre le néo-chamanisme et le néo-druidisme contemporains. Étude en anthropolo (...) 27

Relationships between contemporary neo-shamanism and neo-


druidism : a study in comparative anthropology/ethnology
This article uses field research on native American shamanism and analyses of certain neo-
shamanist, « new age » and neo-druidic writings. It takes into account medieval texts together
with recent scholarship on Celtic culture. It shows that both New Age and neo-paganism use
many ideas from animist and shamanist societies. Lakota Sioux writers adopted the holistic
beliefs of magical and esoteric movements, with borrowings from the « spiritual knowledge
of ancients Celts and their druids ». Modern-day shamans and druids adapt « foreign » notions
to transmit them to future generations. They modernise ancestral beliefs in an original way,
developing their « psycho-therapeutical » aspects. Their spiritual activities testify to the vitality
of the shamanic and pagan traditions in our modern world.

Entrées d'index

Mots-clés :  anthropologie comparative, chamanisme amérindien, dynamisme des


traditions et figures mythiques, néo-chamanisme, néo-druidisme, néo-paganisme,
quêtes spirituelles
Keywords : celtic shamanism, comparative anthropology, importance of traditions and
mythical figures, native-American shamanism, neo-druidism, neo-paganism, neo-
shamanism, spiritual quest

Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, 3 | 2008

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