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IVOIRIENS DE
RECHERCHE
LINGUISTIQUE
INSTITUT DE LINGUISTIQUE APPLIQUÉE
EEDUC
Mit
NUMERO 42 E111 D. PJ , ■ DÉCEMBRE 2017
M
' b. d Int re
Revue Cahiers Ivoiriens de Recherche Linguistique (C.I.R.L.)
Editeur : INSTITUT DE LINGUISTIQUE APPLIQUEE
08 BP 887 ABIDJAN 08 Côte d'Ivoire
ilacirl.ufhb@gmail.com
DIRECTEUR DE PUBLICATION :
AHOUA Firmin (UFHB, Côte d’Ivoire)
COMITE DE REDACTION
Rédacteur en chef :
KRA Kouakou Appoh Enoc (UFHB, Côte d’Ivoire)
Membres :
ADEKPATE Alain Albert (UFHB, Côte d’Ivoire)
KOUADIO Pierre Adou Kouakou (UFHB, Côte d’Ivoire)
ASSANVO Amoikon Dyhié (UFHB, Côte d’Ivoire)
ATSE N’cho Jean Baptiste (UAO, Côte d’Ivoire)
GOPROU Djaki Carlos (UFHB, Côte d’Ivoire)
NIAMIEN oi NIAMIEN (UFHB, Côte d’Ivoire)
TAPE Jean martial (UFHB, Côte d’Ivoire)
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y compris la photographie et le microfilm, réservés pour tous les pays
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ISSN 2520-954X
Sommaire
01 Alain Albert ADEKPATÉ 01
À propos du statut des expressions nominales des constructions prédicatives non-
verbales d’identification, dans les langues kwa
02 Arsène ELONGO 11
Expression de modalités énonciatives comme introductrices des emplois de donc chez
Francis Bebey
Résumé : Le présent article étudie les emplois de donc au sein de l’expression des
modalités énonciatives. Ainsi, nous montrons que ces usages produisent des effets
spécifiques et subjectifs dans les romans de Francis Bebey en raison de la reprise de ces
mêmes techniques stylistiques de l’écriture. Notre objectif sera de les décrire en fonction
de chaque procédé modal. Cela permettra de prouver que cet auteur emploie couramment
la complétive et les modalité injonctive, interrogative et assertive avec le coordonnant «
donc » comme des faits stylistiques de son écriture. Associés à chacune de ces modalités
énonciatives, le coordonnant « donc » crée les usages spécifiques comme interactif,
confirmatif, discursif, illocutoire, perlocutoire et consécutif. Pour les décrire
objectivement, nous servons des approches de la stylistique de la phrase et de la
linguistique pragmatique. Ces doubles approches nous aideront à conclure que les
emplois de donc ont les valeurs énonciatives, stylistiques et pragmatiques au cœur de
l’écriture de Francis Bebey.
Abstract: This article studies the uses of so within the expression of enunciative
modalities. Thus, we show that these uses produce specific and subjective effects in the
novels of Francis Bebey because of the resumption of these same stylistic techniques of
writing. Our aim will be to describe them according to each modal process. This will
make it possible to prove that this author commonly uses the completive and the
injunctive, interrogative and assertive modality with the coordinator "therefore" as
stylistic facts of his writing. Associated with each of these enunciative modalities, the
coordinator "therefore" creates the specific uses as interactive, confirmative, discursive,
illocutionary, perlocutionary and consecutive. To describe them objectively, we use
approaches to the stylistics of the sentence and pragmatic linguistics. These dual
approaches will help us to conclude that the jobs of so have the enunciative, stylistic and
pragmatic values at the heart of Francis Bebey's writing.
Introduction
Le coordonnant « donc » reçoit depuis longtemps les usages traditionnels et modernes et il
est employé par les locuteurs et les écrivains à travers les modalités énonciatives comme
l’injonction, l’interrogation et la subordonnée complétive. Ces procédés apparaissent comme
les marqueurs de la variation stylistique, du fait qu’ils sont les productions énonciatives
valorisée par un genre discursif et qu’ils marquent le choix opéré par l’écrivain parmi les
expressions de la langue. D’où Frédéric Calas (2015, p.61) a écrit : « Tous les mots d’un texte
littéraire sont subjectif, puis qu’ils ont tous été choisis par l’écrivain ». Aussi peut-on
appréhender les emplois de donc comme une production relevant du choix d’un écrivain. Cette
unité discursive est supposée comme une spécificité de la stylistique du mot et de
l’énonciation. Elle nous conduit à examiner ce thème : Expression de modalités énonciatives
comme introductrices des emplois de donc chez Francis Bebey. Ce travail s’inscrit dans le
1
elongoarsene@gmail.com
l’acte directeur, cependant, l’énoncé (B) marque une fonction interactive de la conséquence.
Selon cette analyse, on sait que le coordonnant « donc » peut remplir une double valeur
conditionnée par son usage avec le contexte de cotexte : soit la valeur de l’acte directeur
d’argument soit la valeur interactive de conséquence.
L’analyse de Spengler présente quelques limites, puisqu’elle aborde seulement le
coordonnant « donc » comme marqueur conclusif. Notre travail veut examiner d’autres
valeurs de cette notion analysée à travers les études assez approfondies. L’étude d’Anna
Zenone (1981, p.113-139) a enrichi le coordonnant « donc » des valeurs novatrices : le donc
est désigné comme « un connecteur pragmatique » et comme un « marqueur indicatif d’acte
illocutoire ». Cet auteur (Id, p.114) présente la structure suivante de donc : q donc p pour
justifier que « donc est un marqueur, car il met en relation deux actes » et décrit les cinq
usages de donc : marqueur conclusif ; marqueur de reprise ; marqueur discursif, marqueur
argumentatif et marqueur métadiscursif.
La structure du coordonnant « donc » se focalise sur le raisonnement inférentiel. Une telle
position est analysée dans l’étude de Carinne Rossari (1994, p.275) qui déclare : « L’emploi
de donc signale l’établissement d’une relation d’implicitation basée sur la convocation d’un
raisonnement inférentiel ». Le raisonnement inférentiel de donc est expliqué dans les travaux
d’Anne Ferrari et de Corinne Rossari (1994, p.15). Selon eux, le raisonnement inférentiel est
une technique déductive. De plus, ces auteurs (Id, p.15) avancent : « un mode de
raisonnement qui s’appuie sur A1 pour aboutir à une conclusion A2, laquelle représente la
suite, le résultat, l’effet, bref la conséquence ». Cette analyse a repris une interprétation
donnée par Patrick Charaudeau (1992, p.790) dans laquelle il écrivait : « La conséquence,
cette opération s’inscrit également dans une argumentative de causalité explicative ou
implicative. Elle est exprimée par A1 donc (de sorte que) A2 ».
L’étude du coordonnant « donc » est approfondie dans l’analyse Gemma Delgar Farrès
(2000, p.373-382). Cet auteur présente d’abord les trois orientations linguistiques de donc à
savoir : la conjonction de coordination pour marquer la conséquence ou la conclusion ;
l’adverbe pour traduire le rôle des valeurs déictiques ou anaphoriques ; une particule pour
exprimer une réaction affective ou expressive. Ensuite, il a développé les valeurs discursives
de « donc » comme : « prise de parole », « demande d’information », « relance du
développement argumentatif », « expression du refus », « réplique », opposition » ;
« invitation à l’action », « interdiction » ; « expression d’étonnement », « surprise »,
« indignation » ; « marque de réaffirmation » et valeur de « réprobation ». Enfin, il décrit
statistiquement les valeurs argumentatives de donc : « valeur oppositive », « valeur
conclusive », « valeur explicative-justificative », « valeur hypothétique », « valeur de
reformulation » et « valeur conclusive ». Une autre étude inscrit l’interprétation de donc dans
une perspective communicationnelle et pragmatique dans laquelle ce connecteur représente
les traces construites et encodées par le locuteur et qu’il est aussi un indice du décodage et de
l’interprétation de l’allocutaire. C’est là le fondement de l’hypothèse que propose Catherine
Chanet (2001, pp.45-55) pour analyser le connecteur « donc » :
« Mon hypothèse, que je voudrais maintenant illustrer par des exemples concernant donc et alors,
est que les connecteurs et les particules font partie de ces traces/indices, et constituent donc des
opérateurs qui tendent à construire une représentation cognitive commune pour modifier les
représentations individuelles des interactants ».
Dans ses analyses, Roland Eluerd (2008, p.152.) donne au coordonnant « donc » deux
fonctions sémantiques : « Donc exprime : - une conséquence (...) ou une conclusion ; -
Comme une unité pragmatique du dialogue, donc est un adverbe et souligne le propos ».Par
ailleurs, Martin Riegel et les autres (2009, p.880) considèrent que donc fonctionne comme un
adverbe et non comme un coordonnant : « Par son comportement syntaxique et notamment
par sa mobilité, le coordonnant donc appartient de plein droit à la classe des adverbes de
Lamalle). La fréquence en pourcentage par page est 99, 18 % soit il y a une probabilité de
retrouver une occurrence de donc sur chaque page du roman. Le second roman contient une
population de 62930 mots et 103 occurrences de donc. Sa fréquence est en pourcentage est de
46, 60 %. L’écart entre les deux corpus est de 52,58 %. Il est intéressant de représenter les
emplois de donc et les procédés grammaticaux comme interrogation, injonction, complétive et
assertion dans un histogramme. Pour LAM, les occurrences sont les suivantes : procédé
interrogatif (60/123), procédé injonctif (19/123), procédé de la complétive (19/123) et procédé
assertif (20/123). Dans le corpus de LPA, il y a : procédé interrogatif (58/221), procédé
injonctif (13/221), procédé de la complétive (15/221) et procédé assertif (17/221).
Cette représentation en pourcentage permet de comprendre les emplois de donc chez Francis
Bebey. Elle nous montre qu’il y a la possibilité assez fréquente de retrouver une occurrence
de donc à travers le procédé interrogatif, le procédé injonctif, le procédé de la complétive et le
procédé assertif et d’établir les écarts entre les deux corpus selon ce tableau :
Tableau n°1 : Ecart de donc entre LAM et LPA
Procédés Fréquence % de Fréquence de % de Ecart en %
grammaticaux LAM LPA
Interrogatif 48,8% 26, 24 % 22,54 %
Injonctif 15, 44 % 5,88% 9,56%
Complétive 15,44% 6, 88 % 8,66 %
Assertif 16, 26 % 9,04 % 7, 22 %
E (%)= F(LAM)- F(LPA)
Ce tableau montre que les écarts de donc avec les procédés grammaticaux sont faibles à
travers les deux corpus. Selon ces résultats, on peut conclure que l’usage des procédés
grammaticaux avec le coordonnant « donc » justifie un trait de la subjectivité énonciative
chez Francis Bebey, puisque ces procédés sont employés couramment dans les deux corpus
avec le même connecteur logique.
2.2. Statistique de donc par l’effectif total des mots textuels
Une autre lecture des occurrences de donc peut se réaliser par l’effectif total des mots
employés dans les deux romans de cet auteur. Ainsi, le corpus de LAM nous donne cette
répartition de donc : 122 (donc) /54734 (mots) soit pour un pourcentage de 0, 22 %. Par
ailleurs, le corpus de LPA nous offre cette répartition : 103(donc)/ 62930 (mots) soit pour un
pourcentage de 016 %. L’écart fréquentiel entre les deux romans est de 0,06 %. Aussi la
représentation des procédés permet-elle d’évaluer la valeur pragmatique de l’emploi de donc
chez Francis Bebey selon cet histogramme :
Cette représentation montre que les emplois de donc avec les modalités énonciatives ont une
fréquence jugée faible calculée en fonction du nombre total des mots des deux romans par rapports
à d’autres catégories grammaticales comme les articles et les prépositions. Cette fréquence faible de
donc est analysé comme un fait pertinent, parce qu’il permet d’étudier des usages énonciatifs et
pragmatiques des modalités phrastiques chez Francis Bebey et qu’il aide à calculer les écarts de
fréquence entre ces deux romans à partir de ce tableau :
n’est pas la conclusion, mais une fonction incitative. Ainsi, notre but est d’expliquer que le
discursif « donc » suggère une valeur de renforcement, de confirmation et de validation avec
les verbes déclaratifs, les verbes de mouvement et les verbes visuels au mode injonctif.
(1) Disons-nous donc que demain matin, nous marchons sur le Parlement ? (LPA,)
(2) Pensez donc, leurs pareils n’étaient-ils pas employés dans les bureaux de l’administration
centrale ou dans des entreprises privées ? (LPA, p.125)
(3) dis-moi donc ce qui s’est passé lorsque Spio est venu ici hier soir (LPA, p.183).
(4) Songez donc que [...] ces trois dames n’avaient jamais pu donner d’enfant. (LAM, p.103).
Ces énoncés soulignent la valeur incitative du discursif « donc » dans le procédé injonctif,
du fait que ce connecteur discursif et interactif marque une valeur illocutoire de suggestion et
d’exhortation et qu’il renforce la valeur sémantique du verbe déclaratif. On peut identifier
deux valeurs d’insistance : la confirmation et la validation attendue par le locuteur envers son
allocutaire dans le processus du dialogue. Aussi est-il possible de noter que le marqueur
« donc » peut remplir, dans le procédé injonctif, une valeur réflexive. En conséquence, la
technique injonctive employée avec le marqueur « donc » devient un mode de la motivation et
un indice caractérisant du langage, car, Francis Bebey l’utilise pour marquer une intention
communicationnelle par le choix d’un procédé stylistique, la technique de l’injonction de la
phrase impérative.
Une particularité stylistique vient, dans ces exemples, de l’emploi du coordonnant « donc »
avec les verbes de mouvement à la modalité injonctive. Dans cette modalité, le discursif
« donc » garde toujours la valeur incitative, mais, il produit des nuances stylistiques avec
l’usage des verbes de mouvement comme : une invitation d’insistance, une valeur expressive
et une valeur décisionnelle dans l’exemple (3). En gros, technique caractérisante du style de
Francis Bebey, le coordonnant « donc » reste un marqueur introducteur du procédé injonctif
Le coordonnant « donc » remplit, dans ces énoncés, une valeur actionnelle de renforcement
et il renchérit l’argument du locuteur pour que l’allocutaire modifie son opinion et l’accepte.
En conséquence, le coordonnant « donc » et le procédé injonctif sont considérés comme une
variation stylistique dans le langage de Francis Bebey. Cette variation de donc est structurelle,
parce que ses places syntaxiques forment un symptôme stylistique avec la structure de la
phrase impérative, de la phrase interrogative et de la complétive.
Le marqueur discursif « donc » forme une structure caractérisante avec deux notions : le
coordonnant « mais » et le mot interrogatif « que ». Le premier exprime une valeur
emphatique et le second est introducteur de la question. De plus, la triple relation de « mais »,
de « que interrogatif » et de « donc » peut créer plusieurs effets stylistiques que l’allocutaire
doit décoder pour lire les motivations et les intentions du locuteurs. Ces effets de « mais »
ajoutent une émotion de plainte et d’indignation à la valeur de reprise marquée par le
connecteur « donc ». Ils véhiculent une technique de l’écriture orale par l’emploi antéposé du
coordonnant « mais » et par l’abus des appositions. Ces techniques de style deviennent un
trait discursif du discours écrit chez Francis Bebey , car , elles sont aperçue comme un écarts
stylistique par rapport à la norme parisienne, celle-ci est fondée sur le bon usage et elle
repose , selon Françoise Gadet (2007, 30), sur « le purisme , avec les thèmes de génie de
langue, pureté, logique et esthétique ». Pour Claude Vargas (1996, p.91), Paris est le « siège
de la norme dominante » ou du bon usage par rapport aux usages standards acceptés par les
locuteurs francophones.
La technique dialogique et orale de donc est actualisée chez Francis Bebey, parce qu’il
l’adopte dans l’emploi de l’interrogation : mais+ pourquoi+ donc. Les exemples suivants
soulignent une variété stylistique avec la structure précédente que nous venons d’examiner :
B- Structure de mais+ pourquoi+ donc
(11) « Mais pourquoi donc, avais-je demandé à Maa Médi, (LAM, p.112).
(12) Mais pourquoi donc n’étaient-il pas noirs, eux aussi ? (LAM, p.12)
(13) Mais, pourquoi donc me punis-tu, Seigneur ? (p.50).
(14) « Mais quand donc vivrai-je le présent complet ? » (LAM, p.172).
(15) Fanny ... Fanny... Fanny, mais où est-elle donc ? (LAM, p.112).
La spécificité stylistique de « donc » marque, dans ces énoncés, une fonction discursive de
renforcer un fait évoqué dans une situation antérieure. Dans un tel contexte, le marqueur
discursif « donc » magnifie le style du monologue par lequel le locuteur exprime son émotion
du mécontentement, d’impatience et d’indignation.
Dans une phrase interrogative, le marqueur discursif « donc » peut répondre à une structure
de cause à effet ou une structure d’affirmation à la confirmation. Toutefois, cette affirmation
est exprimée sous forme d’une question et la réponse représente une confirmation. Par
ailleurs, l’usage de deux marqueurs « et /donc » peut traduire une innovation langagière dans
l’écriture de Francis Bebey qui actualise et transpose le style oral dans la langue écrite. Cette
technique stylistique demeure une expression de la caractérisation discursive dans ses romans.
Cet auteur réussit aussi à varier son style par le changement du mot interrogatif selon cette
syntaxe : et + qui+ donc+ verbe ou et+ préposition+ qui+ donc.
(6) Et qui donc va se charger de l'envisager sérieusement pour vous ? (LPA, p.112)
(7) Et qui au monde aurait donc pu la leur faire perdre ? (LAM, p.59).
(8) Le moteur qui est mort ? Et qui donc l'a tué ? (LPA, p.175)
(9) Et à qui appartient-elle donc ? (LAM, p.93).
En examinant ces exemples, on peut étudier l’emploi discursif de donc avec le coordonnant
« et » et le mot interrogatif « qui ». Cette pratique stylistique traduit la valeur emphatique du
marqueur « donc » pour actualiser la modalité interrogative. Par ailleurs, le coordonnant
« donc » ne remplit pas une fonction conclusive de coordonner deux moments d’une
argumentation, mais il marque la fonction emphatique et celle de renforcer le sujet de
dialogue ou de la conversation. Ainsi, le marqueur « donc » subit une évolution sémantique,
du fait qu’il remplit plusieurs nuances sémantiques selon les contextes d’usage.
Ces énoncés montrent que le coordonnant « donc » marque une valeur dialogique, une
fonction de confirmation ou une réplique conclusive face au propos d’un énoncé antérieur et
face à la découverte d’une vérité cachée (dans l’exemple 20). L’emploi de donc permet de
caractériser l’emploi familier de la modalité interrogative comme activateur des valeurs
illocutoires de la méditation et de la fonction conative et il valorise le dialogue et la
conversation entre deux personnages. Ainsi, l’auteur valorise le registre familier de la
structure énonciative de « donc » décomposable du système interro-affirmatif. Cet usage
permet de représenter la variation langagière d’une classe sociale dans laquelle le jeu de la
communication est axé sur la fonction référentielle. Cela prouve que les locuteurs ne
condamnent ni les écarts ni les déviations de la langue et que la norme du bon usage n’est pas
une exigence, ni un devoir, ni une marque distinctive de ce groupe social. Ces locuteurs
ignorent deux normes du langage standard : l’interrogation s’emploie avec la technique de
l’inversion du sujet ; le coordonnant « donc » marque une conclusion ou une conséquence. En
gros, l’absence de l’inversion et la valeur confirmative du coordonnant « donc » constituent
une variété stylistique du registre familier de la modalité interrogative, lorsqu’on lit les
romans de Francis Bebey formant notre corpus. Cet auteur n’inscrit pas son style sur le
respect des canons esthétiques du bon usage. Cela traduit que son style garde toujours une
valeur intransitive, parce qu’il ne l’assujettit pas à une norme fixe. Ce romancier accomplit
sans cesse le travail d’actualiser les usages de l’interrogation condamnés par les puristes de la
langue française. En plus, on retrouve également une valeur emphatique de donc employée
dans une interrogation familière sans verbe ou avec l’infinitif, c’est ce que soulignent ces
phrases interrogatives :
(25) Mais où est donc l'argent qu'il m'aurait donné pour ce peigne ? (LPA, p.14)
(26) où donc irais-je vivre si en plus tu y mettais la science des Blancs ? (LPA, p.27).
(27) où as-tu donc la tête, ma pauvre amie ? (LPA, p.50).
(28) Mais où est donc l'argent qu'il m'aurait donné pour ce peigne ? (LPA, p.14)
Ces interrogations standards et l’emploi de donc engendrent une valeur confirmative et
des effets perlocutoires de l’émotion et des reproches auprès de l’interlocuteur et ils
soulignent une variété du registre courant par rapport au niveau soutenu de la langue, parce
que les formulations du registre soutenu mobilisent souvent plusieurs paramètres énonciatifs
axés sur l’originalité structurale, sémantique et lexicale de la phrase, comme l’indique cet
énoncé :
(29) Croient-ils donc que nous avons tant travaillé pour voir ensuite notre prestige traîné dans la
bouc ignoble d'une sale prison étrangère ? (LPA, p.195).
Par contre, la modalité de l’interrogation standard montre que l’emploi de donc peut
marquer le sentiment de nervosité, de la colère, d’indignation ou celui de la plainte avec
reproche. Toutefois, dans ce contexte, le coordonnant « donc » peut remplir une valeur
d’ironie, parce que le personnage constate le mensonge de son ami et qu’il se sert de
l’interrogatif « où » et de coordonnant « donc » pour le ridiculiser.
Aussi l’interrogatif « qu’est-ce que » est-il sollicité pour créer une variation stylistique
dans l’usage du coordonnant « donc ».
(30) « Qu’est-ce qu’elle a, mais qu’est-ce qu’elle a donc ? » (LAM, p.162)
(31) Qu'est-ce que tu croyais donc ? (LPA, p.42)
(32) Qu'est-ce que c'est donc encore, cette histoire de voiture ? (LPA, p.208).
(33) Qu'est-ce que tu as donc, Edna ? (LPA, p.110)
(34) Qu'est-ce que tu croyais donc ? (LPA, p.42)
Le coordonnant « donc » marque une valeur de la confirmation argumentative, lorsqu’il est
employé dans une variation stylistique du morphème interrogatif « qu’est-ce que » dans le
style de Francis Bebey. Une autre variation stylistique de donc est identifiable dans la
construction de la complétive.
5. Expression assertive de la phrase complexe et emplois de donc
Le coordonnant « donc » est employé dans une phrase complexe faite de la principale et de
la subordonnée complétive. Ainsi, la principale est considérée comme marqueur de la
modalité assertive. Faisant partie de la principale, la valeur de reprise conclusive de donc
modifie la sémantique de la complétive écrite par Francis Bebey. Ainsi, notre but est
d’examiner trois usages de donc avec le verbe de la principale introductrice de la complétive,
il s’agit des structures syntaxiques suivantes : le verbe d’opinion + donc+ complétive ; le
verbe de croyance + donc + complétive ; le verbe de savoir + donc + complétive. Ces
structures mettent en relief les valeurs conclusives, confirmatives et argumentatives.
(35) « Ils n’ont jamais rien fait pour moi, m’avait-elle dit, je pense donc que mon mariage ne les
regarde pas » (LAM, p.7).
Cette assertion déclarative marque une conclusion par l’emploi donc conséquentiel. Celui-
ci relie l’argument précédent avec le second argument. De plus, la valeur assertive peut
introduire un emploi confirmatif de donc, comme le traduit cet exemple :
(36) Je dis donc que tout nous tombe à merveille. (LAM, p.65).
Ici, l’emploi de donc a une valeur confirmative et conséquentielle, du fait que cette
conclusion a un rapport avec le contexte narratif et dialogique de la phrase précédente. Il est
possible que l’usage de donc marquer une reprise conclusive signalant le lien avec
l’information développée par l’énoncé antérieur, utile pour aboutir à une décision conclusive.
Aussi, l’emploi de donc a une valeur de reprise dialogique, comme signale cette phrase :
(37) « Il se contenta donc de poursuivre son histoire : Je disais donc que la nouvelle de
l'emprisonnement des musiciens ghanéens était parvenue à une femme, une Ghanéenne vivant
en Haute-Volta depuis de longues, longues années, semble-t-il, mais qui n'habitait pas à
Ouagadougou même » (LPA, p.198).
Cet emploi de donc marque une valeur de reprise conclusive, car, le locuteur reprend le
dialogue avec son interlocuteur et la narration de son récit. L’usage de donc exprime, dans ce
contexte pragmatique, une fonction phatique pour poursuivre le récit et capter l’attention de
son interlocuteur. Il peut souligner la recherche d’une confirmation envers un allocutaire dans
le processus dialogique :
(38) Je dois donc dire que tu me prenais, toi, pour une esclave ? (LAM, p.146).
Cet énoncé enseigne que l’emploi de donc introduit une valeur illocutoire de confirmation
et une fonction perlocutoire de réaction suscitée par l’interlocuteur. En conséquence, le verbe
d’opinion employé conjointement avec le coordonnant « donc » exprime une technique de
subjectivité, car, l’auteur n’adopte pas, dans son style, le donc argumentatif et narratif. Ce
dernier reste dominé par les procédés du discours dialogique.
(39) Tu crois qu’elle est donc aussi sale que ta figure ? (LAM, p174).
(40) Tu crois donc que j'ai raison, c'est bien ce que tu veux dire ? (LPA, p.145).
Conclusion
Les emplois de donc répondent aux hypothèses de notre études, ils marquent une
subjectivité et une intention communicationnelle fondées sur les modalités énonciatives à
travers l’écriture de Francis Bebey, parce qu’ils conditionnés par les choix opérés par ce
dernier. Celui-ci l’emploie avec ces modalités pour les élire aux techniques stylistiques de son
art langagier. Ainsi, l’interprétation des modalités énonciatives nous a permis d’arriver à trois
résultats sur les emplois de donc chez cet auteur camerounais. Premièrement, l’emploi de
donc constitue un fait de style, lorsqu’il est employé avec la modalité injonctive. Ce procédé
injonctif permet au coordonnant « donc » de remplir la valeur interactive de la confirmation et
des fonctions illocutoires dictées par les verbes d’opinion, des verbes de mouvement et des
verbes visuels. Deuxièmement, l’emploi de donc marque des valeurs illocutoires et
perlocutoires, lié à la modalité interrogative des registres familier et courant. Cette modalité
interrogative nous aide à comprendre que le coordonnant « donc » remplit les valeurs
conclusive, confirmative, méditative et perlocutoire selon le contexte linguistique de la
phrase. Troisièmement, l’emploi de donc est attaché à la structure de la modalité assertive et à
la proposition principale introductrice de la subordonnée complétive et il marque les valeurs
de confirmation et de conclusion. Ces modalités énonciatives nous enseignent que les emplois
de donc sont interactifs de reprise dialogique, confirmatifs, illocutoires, conclusifs et
perlocutoires au sein de l’écriture de Francis Bebey.
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