Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Magloir-Désiré MOUNGANGA
Chargé de recherche
Centre national de la recherche scientifique et technologique (CENAREST)
Gabon
Résumé
L'adaptation de l'aménagement et l'occupation des espaces littoraux deviennent une nécessité, compte tenu
des enjeux et des projets de développement à réaliser dans ces milieux au Gabon. Elle devrait obéir non
seulement aux meilleurs principes d'affectation des terres aux divers usages, mais surtout aux risques littoraux
consécutifs aux événements naturels et/ou aux activités humaines. Cela permettrait d'orienter les choix et
d'assurer une cohérence dans la planification côtière. Trois grands projets de construction de ports en eau
profonde sont en cours, parmi lesquels le port de Mayumba au Sud du pays, qui serait érigé sur le crochet
terminal de la lagune. Connaissant le caractère dynamique de cette partie de la lagune, cet ouvrage ainsi
que les milieux environnants seront menacés par le choix de cette implantation dans cet espace sensible. Ce
projet de construction montre assez l'importance de la prise en compte des processus et risques naturels dans
la réalisation de lourdes infrastructures. Ainsi, l'absence au Gabon d'une évaluation environnementale
stratégique liée au choix des usages, fait courir au pays le risque de voir ces ouvrages fragilisés par les
implantations sur des sites inappropriés. L'objectif de cette contribution est de développer une large réflexion
autour de la problématique des risques littoraux, en lien avec le choix des usages, de manière à minimiser les
effets néfastes des processus naturels sur les infrastructures de développement.
Mots clés : Gabon, diagnostic, risques littoraux, planification côtière, aménagements, développement,
évaluation environnementale
a)
ESTUAIRE
DELTA b)
c)
LAGUNE
Figure 2 : Compartiments d‘un estran sableux (plage)
Ce qui caractérise les plages, c’est la mobilité des sédiments sableux sous l’action des vagues, avec des
échanges et transferts sédimentaires de type longitudinaux et transversaux.
La falaise doit aussi être prise en compte, tant la mobilité de ces unités littorales, surtout lorsqu’elles sont
composées de structures meubles, n’est jamais en équilibre. Il s’agit d’un versant abrupt, dont le caractère
essentiel est d’évoluer principalement en réponse à l’attaque de la base par les déferlements. Deux aspects
caractérisent l’attaque de la base :
le sapement de la structure en place, provoquant à un moment donné le déséquilibre du reste du
versant, et sa chute sur l’estran;
le déblaiement des débris par la mer, qui les entraine ailleurs.
Ce qui fait son originalité par rapport aux autres versants subaériens est le fait que les matériaux entrainés vers
la base sont déblayés au fur et à mesure, interdisant au versant d’atteindre un profil d’équilibre (Photo ci-
dessous).
III.1. Le document de stratégie nationale d’adaptation aux effets des changements climatiques
En octobre 2011, le Gabon a élaboré la stratégie nationale d’adaptation du littoral face aux effets des
changements climatiques. Ce rapport a mis en exergue l’importance de la prise en compte des unités de
gestion spécifiques, pour assurer une plus grande durabilité des systèmes naturels et des systèmes
d’aménagement à intégrer.
Du point de vue des sensibilités et de la vulnérabilité de l’espace côtier, le rapport a identifié quatre éléments à
prendre en compte dans l’occupation du littoral : la hauteur des vagues, le recul du trait de côte, le transport
sédimentaire, et le franchissement des ouvrages littoraux.
a) Du fait des changements climatiques, le rapport montre qu’il y aura une hausse de la hauteur des vagues,
qui sera comprise entre 10 et 13 % de plus, par rapport à la situation actuelle, et ce dans les zones exposées
aux houles du large. Cette hausse sera comprise entre 4 et 5 % dans les zones d’abri.
Les effets de cette hausse de la hauteur des vagues occasionneront une augmentation de la côte
d’inondation, de l’ordre de 10 à 14 % de plus, par rapport à l a situation actuelle, et une occurrence et
persistance de ces événements.
b) Les résultats des calculs réalisés dans ce rapport montrent qu’en l’absence de bermes (dépôts sableux sur la
plage, formant un léger cordon), l’augmentation d’un centimètre de la lame d’eau occasionne un recul de
plage d’environ un mètre. Cela suppose qu’on a affaire à un profil en équilibre dynamique; si ce n’est pas le
cas, en situation de crise sédimentaire, ce recul serait plus important.
c) L’équilibre dynamique d’un profil de plage est toujours lié au volume de transport sédimentaire qui transite;
aussi, le rapport montre qu’il existera des sections positives avec de fortes accrétions sédimentaires, et des
secteurs négatifs consécutifs aux diverses crises des cellules hydrosédimentaires.
d) Enfin, en ce qui concerne les ouvrages de protection, leur franchissement sera supérieur à 20 % sur toutes les
structures verticales situées dans les aires d’influence directe de la houle. Les effets seront relativement moins
importants au niveau des zones d’abri (deltas et estuaires).
Eu égard à la structure du linéaire côtier gabonais en trois grands ensembles morphologiques, l’occupation du
littoral ne représente pas plus de 15 %. Libreville et Port-Gentil constituent les localités littorales où l’emprise
humaine est très forte; les autres localités (Cocobeach, Omboué, Gamba et Mayumba) commencent
malheureusement à subir de plus en plus les effets de cette anthropisation qui a un caractère désordonné. Si
cette occupation continue à être aussi mal structurée, en lien avec le choix des usages, les aléas qui se
manifestent déjà, occasionneront d’importants dégâts sur les infrastructures littorales. D’où la nécessité de la
prise en compte des processus hydrodynamiques et sédimentaires qui régissent le fonctionnement et
l’évolution des systèmes littoraux, avant tout aménagement des rivages.
C’est pourquoi cette emprise humaine sur le littoral ne peut s’effectuer qu’en intégrant l’évaluation
environnementale stratégique, pour toute planification côtière, en rapport avec le développement des
territoires littoraux.
En effet, une fois les principaux risques littoraux connus, on adapte mieux les aménagements à l’évolution des
systèmes spécifiques, et aux aléas qui y sont induits. D’où la place que l’on devrait accorder à une évaluation
qui puisse permettre une adéquation entre le processus de développement, et la préservation des milieux,
dans une optique de durabilité.
Elle renvoie à des transformations structurelles et à des choix collectifs basés sur une démarche adaptative,
s’appuyant toujours sur la connaissance des spécialistes, et à la participation de tous les acteurs,
correspondant aux principes de la gestion intégrée. Le processus de planification est ouvert à tous les acteurs,
les enjeux sont pris en compte. Elle doit toujours se situer bien en amont des propositions stratégiques de type
projets, plans, programmes et politiques.
Conclusion.
Eu égard à la morphologie de la côte Gabonaise en trois grands ensembles (estuaire, delta et lagune),
l’occupation du littoral ne représente pas plus de 15 % du linéaire. Libreville et Port-Gentil constituent les
localités où l’occupation humaine est très forte; les autres localités subissent progressivement les effets de cette
anthropisation galopante. Si cette dernière continue à être mal orientée, en lien avec le choix des usages sur le
littoral, les aléas qui se manifestent déjà naturellement, occasionneront d’importants dégâts sur les
infrastructures littorales. D’où la nécessité de la prise en compte des processus hydrodynamiques et
sédimentaires, qui régissent le fonctionnement et l’évolution des systèmes littoraux, pour toute occupation.
Cette emprise humaine sur le littoral ne peut s’effectuer qu’en intégrant l’évaluation environnementale
stratégique, pour tout aménagement à caractère stratégique au développement des territoires littoraux.
L’aménagement est du ressort de la puissance publique, car c’est elle qui impose l’aménagement global et
rationnel des divers secteurs entre les diverses activités.
Mais cela ne doit se faire qu’en intégrant l’évolution naturelle, et en prévoyant les réactions de la nature aux
diverses interventions humaines sur les territoires littoraux spécifiques.
Mounganga (2006) rappelait déjà que "pour une bonne planification littorale, notamment pour répondre avec
efficacité à certaines expériences manquées d’aménagement de la zone côtière…, des schémas directeurs
d’aménagements et d’utilisation de la mer doivent être proposés. La mise en œuvre de cette planification
passe par l’élaboration d’une loi littorale".
Il précisait ensuite que les termes de la loi permettront d’intégrer tous les aléas et toutes les contraintes, de
même que tous les modes d’utilisation de l’espace littoral, afin de donner une orientation et une vision claires
de ce que le pays souhaite y réaliser.
Pour cela, trois paramètres avaient été proposés pour la mise en œuvre de cette loi, à savoir :
l’unité physique de l’environnement littoral, de façon à circonscrire chaque limite des différents
systèmes spécifiques;
une vision politique clairement définie, partant des nécessités d’aménagement et des modes
d’utilisation, et;
l’unité de surveillance et de suivi, pour assurer le contrôle de l’évolution du système, en rapport avec
les aménagements à réaliser.
Il convient ainsi de mieux adapter l’aménagement des divers types de paysages littoraux, aux différents
systèmes littoraux spécifiques. Car, on aménage mieux ce que l’on connaît bien.
Références bibliographiques
ANONYMES. 1997 : Plans de prévention des risques littoraux. Guide méthodologique. In La Documentation
Française. Lonrai. 54p.
CABANE C., CHAUSSADE J., CORLAY J.-P., MIOSSEC A., MIOSSEC J.-M., PINOT J.-P. 1998 : Géographie humaine
des littoraux maritimes. C.N.E.D.-S.E.D.E.S. Condé sur Noireau. 471p.
F.E.M. (P.N.U.D.). 2011 : Stratégie nationale d’adaptation du littoral Gabonais face aux effets des changements
climatiques. Document 2 : Analyse du diagnostic des unités de gestion. D.G.E. Libreville. 282p +Annexes.
HOEBLICH J.-M. (Sous la direction de). 1998 : La baie de Somme en question. Aspects physiques. Actes de
colloque.U.P.J.V. Amiens. pp 11-48.
MINISTERE DE L’ECONOMIE, DE L’EMPLOI ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE. 2013 : Quatrième rapport national sur
la biodiversité. DGE, Libreville. 199p.
MOUNGANGA M.-D. 2001 : Les systèmes flèches-lagunes des littoraux Gabonais et Congolais. Contribution à
l’élaboration d’une base de données pour une gestion intégrée des milieux lagunaires. Thèse de doctorat NR.
UBO, Institut Universitaire Européen de la Mer, Brest, 340p.
MOUNGANGA M.-D. 2006 : L’enjeu des aménagements littoraux : le cas du boulevard du bord de mer à
Libreville (Gabon). pp 527-537. In : HULBERT F. (Sous la direction de) -Villes du Nord, Villes du Sud. Géopolitique
urbaine, acteurs et enjeux. Eds L-Harmattan. Coll. Villes et Entreprises. Condé-sur-Noireau.602P.
MOMBO J.-B. 1989 : Les lagunes côtières du Gabon méridionales. In Les cahiers pédagogiques de l’E.N.S. n°3.
I.P.N. Libreville. pp 40-53.
O.C.D.E. 2006 : L’évaluation environnementale stratégique. Guide de bonnes pratiques dans le domaine de la
coopération pour le développement. Editions de l’O.C.D.E. Paris. 174p.
VANDE WEGHE J.-P. 2007 : Loango, Mayumba and the lower Ogooué. W.C.S. Libreville. 328p.