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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

À propos de l’ouvrage
Un corps enseignant qualifié et motivé est crucial pour atteindre les buts du
programme Éducation 2030. La structure de carrière des enseignants est un
puissant levier pour renforcer leur motivation.
Quel lien y a-t-il entre l’organisation des carrières et la motivation des
enseignants ? Quels sont les modèles de structure de carrière qui existent
dans le monde ? Quels sont les plus efficaces d’après les études disponibles ?
Surtout, quels enseignements peut-on en tirer pour concevoir et mettre en
œuvre des systèmes d’échelons de carrière ?
S’appuyant sur l’expérience d’un grand nombre de pays, cet ouvrage explore
les liens entre structures de carrière et motivation des enseignants, identifiant
différents modèles d’organisation de carrière et les difficultés de mise en
œuvre qu’ils peuvent poser. Il donne des conseils avisés aux planificateurs de
l’éducation ainsi qu’aux gestionnaires des ressources humaines qui souhaitent
rendre la carrière d’enseignant plus attractive pour les candidats potentiels et
motiver ceux qui sont déjà en poste.

À propos de l’auteure
Lucy Crehan a commencé sa carrière comme professeure de sciences dans
une école secondaire de Londres, avant de s’intéresser à la politique éducative
et d’obtenir un master d’Éducation à l’Université de Cambridge. Elle a ensuite
mené une étude sur les systèmes d’éducation dans six pays répartis sur quatre
continents. Celle-ci a servi de base à son livre Cleverlands (2016). Elle travaille
Lucy Crehan
actuellement au sein de l’Education Development Trust, au Royaume-Uni, qui
conseille les gouvernements sur leurs réformes de l’éducation.

Structurer les carrières


Lucy Crehan

pour motiver les enseignants


ISBN : 978-92-803-2405-1

La gestion des enseignants

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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Institut international de planification de l’éducation www.iiep.unesco.org


Structurer les carrières
pour motiver les enseignants

Lucy Crehan

Institut international de planification de l’éducation www.iiep.unesco.org


Les opinions exprimées dans cette publication sont celles de l’auteur et
ne reflètent pas nécessairement celles de l’UNESCO ou de l’IIPE. Les
appellations employées dans ce volume et la présentation des données qui y
figurent n’impliquent de la part de l’UNESCO ou de l’IIPE aucune prise de
position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de
leurs autorités, ni quant à leurs frontières ou limites.
Titre de l’original :
Exploring the impact of career models on teacher motivation

Publié par
l’Institut international de planification de l’éducation
7-9, rue Eugène Delacroix, 75116 Paris, France
E-mail : info@iiep.unesco.org
Site web de l’IIPE : www.iiep.unesco.org
Maquette de couverture : IIPE
Photo de couverture : © IIPE (Alasora, à Madagascar : la directrice
de l’école primaire de Miadana apprenant l’hymne national aux élèves)
Composition : Linéale Production
Impression et brochage : Atelier d’impression de l’IIPE
ISBN : 978-92-803-2405-1

© UNESCO 2017
Œuvre publiée en libre accès sous la licence Attribution - NonCommercial
- ShareAlike 3.0 IGO (CC-BY-SA 3.0 IGO) (http://creativecommons.org/
licenses/by-sa/3.0/igo/deed.fr). Les utilisateurs du contenu de la présente
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Table des matières

Liste des figures, tableaux et des encadrés 7


Liste des abréviations 8
Résumé analytique 9
Introduction 15
Chapitre 1. Problèmes spécifiques de l’administration
des carrières des enseignants 20
La crise de motivation des enseignants 20
Les limites de la structure de carrière la plus courante 21
Chapitre 2. Fondements psychologiques
de la motivation des enseignants 27
Théories de la satisfaction professionnelle 27
Satisfaction professionnelle des enseignants 31
Théories de la motivation 39
Motivation des enseignants 43
Chapitre 3. Approches fondées sur les incitations 52
Exercer son métier 52
Être payé au résultat 55
Chapitre 4. L’évaluation sommative des enseignants 64
Méthodes d’évaluation des enseignants 64
Différentes approches de l’évaluation sommative
des enseignants 67
Responsabilité des décisions dans les approches
d’évaluation sommative 78
Conséquences de l’évaluation sommative 83
Chapitre 5. Les systèmes d’échelons de carrière 91
Types d’échelons de carrière 91
Preuves d’efficacité 103

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Table des matières

Chapitre 6. Quelles leçons tirer pour concevoir et mettre


en œuvre des structures de carrière ? 110
Des difficultés posées par les normes
et le développement professionnel 112
Anticiper les aspects financiers 116
Appropriation et gestion de la réforme 118
Mise en œuvre 120
Conclusion 123
Annexe : Fiches pays 129
Références 140

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Liste des figures, tableaux


et encadrés

Figure 1. La pyramide des besoins de Maslow 28


Figure 2. Facteurs agissant sur l’attitude au travail,
tels que mis en évidence dans 12 études 30
Figure 3. Structure de carrière à Singapour 99

Tableau 1. Théorie bi-factorielle de Herzberg 31


Tableau 2. Théorie de l’évaluation cognitive selon Deci et
Ryan (1985) 40
Tableau 3. Théorie de l’autodétermination selon Ryan et
Deci (2000) 42
Tableau 4. Contenus pris en compte et privilégiés par les normes
pédagogiques dans différents systèmes éducatifs 71
Tableau 5. Comparaison entre une évaluation sommative
et une évaluation holistique 75
Tableau 6. Comparaison entre une évaluation normative
et une évaluation critériée 78
Tableau 7. Conséquences de l’évaluation sommative 90
Tableau 8. Types d’échelons de carrière 93
Tableau 9. Échelons de carrière des enseignants
dans quelques pays 100

Encadré 1. Les promotions pédagogiques à Cuba 99


Encadré 2. Le danger des structures de carrière
à échelon unique au Mexique 101
Encadré 3. Le statut AST (Advanced Skills Teacher) australien 111

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Liste des abréviations

AST Advanced Skills Teacher


BCA Business Council of Australia
CEPPE Centre of Study for Policies and Practices in Education
EPD Estatuto de Profesionalización Docente
EPT Éducation pour tous
INEE Réseau inter-agences pour l’éducation en situations
d’urgence
ISU Institut de statistique de l’UNESCO
LIDC Pays en développement à faible revenu
NBPTS National Board for Professional Teaching Standards
OCDE Organisation de coopération
et de développement économiques
OECO Organisation des États de la Caraïbe orientale
PBTE Performance-based teacher evaluation instrument
(Outil d’évaluation des enseignants du Missouri,
aux États-Unis)
TALIS Teaching and Learning International Survey (enquête
internationale sur l’enseignement et l’apprentissage)
TAP Teacher Advancement Program (États-Unis)
TTISSA Initiative pour la formation des enseignants
en Afrique subsaharienne
VSO Voluntary Service Overseas

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Résumé analytique

Dans tous les pays en développement, le mouvement de l’Éducation


pour tous (EPT) s’est traduit par une rapide augmentation du nombre
de places dans les écoles primaires. Or, le nombre d’enseignants
qualifiés n’a pas augmenté en proportion. De plus en plus d’enseignants
non qualifiés ont été recrutés, ce qui a eu pour effet d’affaiblir le statut
des enseignants et de dégrader leurs conditions de travail dans bien des
pays. Certains spécialistes ont alors évoqué une crise de motivation
des enseignants.
Cette étude de la littérature analyse la contribution des modèles
de carrière des enseignants à cette crise de motivation. Elle cherche
également en quoi une gestion différente, qui inciterait les enseignants
à s’améliorer et rendrait la profession plus attractive, permettrait
d’améliorer la qualité de l’enseignement dans les écoles. Cette démarche
se situe dans le droit-fil de l’objectif proposé pour l’éducation post-
2015, à savoir : « D’ici à 2030, tous les gouvernements s’assurent que
l’enseignement de tous les apprenants est dispensé par des enseignants
qualifiés, motivés, bénéficiant d’une formation professionnelle et d’un
soutien adapté » (cible 6 de l’accord de Mascate).
Dans les pays développés comme dans les pays en développement,
la structure de carrière la plus courante est la grille salariale unique :
les salaires des enseignants augmentent tous les ans, quelle que soit la
qualité de leur enseignement. Les seuls autres facteurs pris en compte
pour calculer leur rémunération sont l’acquisition de qualifications
supplémentaires et les promotions à des postes administratifs. Ce
système pose plusieurs problèmes, notamment l’absence de lien
entre les facteurs de promotion (qualifications et expérience) et
l’efficacité de l’enseignant, l’absence d’obligation quant à la qualité de
son enseignement, l’effet démotivant des promotions automatiques
accordées à des collègues qui peuvent être moins investis, une structure
salariale uniforme qui rend la profession moins attractive pour les
meilleurs enseignants, le manque de possibilités d’avancement pour
ceux qui ne veulent pas abandonner l’enseignement devant la classe,
sans oublier leur impression d’un certain manque d’autonomie.

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Résumé analytique

À la recherche d’autres structures de carrière possibles, le présent


exposé aborde les questions suivantes en s’appuyant sur des études
psychologiques de la motivation et sur les modèles d’organisation de
carrière des enseignants dans différents pays :
1. Quels sont les problèmes spécifiques que pose l’organisation des
carrières des enseignants dans les pays en développement ?
2. Quels liens existe-t-il entre motivation et organisation des
carrières ?
3. Quels sont les différents modèles d’organisation de la carrière des
enseignants dans le monde ?
4. Quels modèles sont les plus efficaces, d’après les études
disponibles ?
5. Quels enseignements peut-on en tirer pour la conception et la
mise en œuvre de systèmes d’échelons de carrière ?
Selon la théorie des deux facteurs de motivation de Herzberg, les
facteurs d’insatisfaction au travail sont différents de ceux qui motivent
et génèrent de la satisfaction. Les premiers sont généralement liés à
l’environnement de travail (notamment le salaire), tandis que les
seconds sont le plus souvent en relation avec le travail à proprement
parler, comme la reconnaissance, la responsabilité et le développement
personnel. C’est pourquoi, s’il est important d’améliorer le salaire et
les conditions de travail, réduisant ainsi l’insatisfaction au travail, au-
delà d’un certain seuil ce n’est pas l’argent qui motive, mais plutôt des
facteurs en lien avec le travail. Certaines études menées dans des pays
en développement commencent timidement à le démontrer. Cela
mérite de plus amples recherches.
Selon la théorie de l’autodétermination de Deci et Ryan, il
existe plusieurs types de motivation, que l’on peut classer selon un
continuum qui va du contrôle (les actions résultent d’une pression
externe) à l’autonomie (les actions résultent du désir intrinsèque
d’obtenir un certain résultat). Lorsqu’elles sont perçues comme un
moyen de contrôle, les incitations extrinsèques (primes récompensant
des comportements ou des résultats spécifiques, par exemple) peuvent
saper la motivation autonome. Or, cette motivation autonome a
potentiellement des effets positifs sur la persévérance, la créativité et
la capacité à régler les problèmes, mieux vaut donc éviter de l’éroder.
En conséquence, la finalité de toute structure de carrière doit être
de soutenir la motivation autonome en créant un environnement
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Résumé analytique

qui encourage la compétence, l’autonomie et de bonnes relations


interpersonnelles, tout en responsabilisant les enseignants sur la
qualité de leur enseignement. Pour cela il faut mettre en place des
incitations extrinsèques et des facteurs dissuasifs pour ceux qui sont
démotivés, en prenant bien garde que ce ne soit pas perçu comme un
contrôle par ceux qui ont une motivation autonome.
Bien que des études sur la psychologie semblent indiquer que les
incitations extrinsèques sapent la motivation autonome, le principe
du salaire lié à la performance a cependant suscité beaucoup d’intérêt
comme alternative à la grille salariale unique. Si certains programmes
récompensent les enseignants pour des comportements spécifiques
tels que l’assiduité, la plupart utilise les résultats des élèves comme
indicateur de la qualité des enseignants. La rémunération liée à la
performance a pu avoir différentes conséquences. Si on a parfois noté
une amélioration des résultats aux examens, dans la plupart des cas
aucune évolution positive n’a été constatée. La rémunération liée aux
résultats des élèves a elle aussi été sévèrement critiquée pour plusieurs
raisons : elle est injuste à l’égard de ceux qui enseignent dans des
conditions difficiles, c’est un moyen peu fiable pour juger de la qualité
des enseignants, elle décourage la collaboration entre enseignants et
encourage le bachotage comme la tricherie.
L’évaluation sommative des enseignants permet de ne pas utiliser
les résultats des élèves comme indicateur de la qualité de l’enseignant.
Elle vise à déterminer le niveau ou la qualité d’un enseignant en vue
de lui octroyer une prime ou une promotion. Elle n’a pas la même
finalité que l’évaluation formative qui, elle, a un but pédagogique,
celui d’aider les enseignants à s’améliorer. Les méthodes d’évaluation
sommative sont diverses : inspections pédagogiques, entretiens, tests
de connaissance de la matière enseignée et de pédagogie, dossiers
d’observations ou encore sondages auprès des parents et des élèves.
Chacune ayant ses atouts et ses limites, l’approche la plus judicieuse
est de combiner ces méthodes pour évaluer les enseignants.
Le choix du personnel chargé des évaluations sommatives varie
d’un pays à l’autre. Le chef d’établissement y participe dans la plupart
des cas, mais on fait parfois appel à des pairs ou à des experts extérieurs.
L’évaluation doit être confiée à au moins deux personnes ou par une
seule mais validée par une autre. En effet, toute évaluation réalisée
par une seule personne interne à l’établissement peut être sujette à
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Résumé analytique

caution et suspectée de collusion. Lorsque les enjeux sont importants,


notamment pour les nominations à des postes de responsabilité,
l’idéal est de faire appel à un évaluateur extérieur à l’établissement.
On observe principalement deux façons de concevoir les
évaluations sommatives des enseignants. Certains pays attribuent
un coefficient ou des points à différentes composantes du processus
d’évaluation, par exemple une inspection et un test, et les combinent
pour produire un score final (approche sommative). D’autres pays
définissent plutôt des normes décrivant ce que les enseignants sont
censés être capables de faire ou savoir à différentes étapes de leur
carrière. Pour vérifier qu’un enseignant satisfait à ces normes, on
s’appuie sur des données tirées du processus d’évaluation (approche
holistique). Une différence majeure existe entre l’évaluation des
enseignants les uns par rapport aux autres (évaluation normative) ou
par rapport à une référence indépendante (évaluation critériée). Dans
le premier cas, on a pu constater une baisse de la collaboration entre
les enseignants, tandis que dans le second on a observé une baisse du
contrôle central sur le nombre d’enseignants bénéficiant d’une prime
ou d’une promotion.
Les gratifications issues de l’évaluation sommative sont de trois
types : les primes, les augmentations de salaire et les promotions.
Dans la pratique, la plupart des programmes qui octroient des primes
s’appuient sur les résultats des élèves plutôt que sur une évaluation plus
globale. Ceux qui accordent des primes suite à une évaluation le font
dans le cadre d’une structure de carrière plus large incluant également
augmentations de salaire et promotions. Un autre modèle existant est
une variante de la grille salariale unique comportant des augmentations
de salaires progressives (tous les trois ans, par exemple) subordonnées
aux évaluations. Parfois, plus les enseignants ont d’ancienneté dans
la profession, plus les normes selon lesquelles ils sont évalués sont
exigeantes. Le dernier modèle est celui des échelons de carrière. Au
lieu de simplement progresser le long de l’échelle salariale chaque fois
qu’il réussit une évaluation, l’enseignant accède à un nouveau statut
ou à de nouvelles fonctions (par exemple enseignant chef de file)
s’il remplit les conditions requises, et bénéficie d’une augmentation
de salaire correspondant à ses nouvelles fonctions. Naturellement, il
existe au sein de ces trois modèles des différences sur la nature des
normes, qui évalue les enseignants, le caractère obligatoire ou non
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Résumé analytique

du développement professionnel et les éventuelles responsabilités


supplémentaires attachées aux nouvelles fonctions.
D’après la littérature sur le sujet, le modèle des échelons
de carrière est le plus prometteur car il offre la possibilité de lier
indirectement le salaire à la performance et ouvre aux enseignants
une voie de développement professionnel. Autrement dit, ce modèle
permet de surmonter les nombreux problèmes que pose la grille
salariale unique – comme le manque de reconnaissance et l’absence
de responsabilité quant à la mauvaise qualité de l’enseignement – sans
en créer de nouveaux, tels qu’une diminution de collaboration ou une
impression d’un contrôle plus strict qui sont des risques inhérents au
modèle de rémunération lié à la performance.
Cela dit, les résultats dépendent du soin apporté à la conception
du modèle ainsi qu’à la structure des échelons de carrière, laquelle
varie considérablement d’un pays à l’autre. On peut en outre supposer
qu’une administration très rigoureuse est nécessaire pour gérer
efficacement ce modèle, bien que l’on manque de données sur le
sujet. Seuls trois programmes d’échelons de carrière ont été évalués
quantitativement. Le modèle de l’Arizona s’appuie sur des normes,
avec une évaluation critériée et la participation de plusieurs évaluateurs
extérieurs aux décisions de promotion. Il a permis de réduire les taux
de décrochage scolaire et d’améliorer les taux d’obtention de diplômes
ainsi que les résultats des élèves, par rapport aux districts scolaires qui
n’ont pas participé au programme.
Le modèle du Missouri repose sur des normes auxquelles les
enseignants doivent satisfaire. Ce modèle n’applique pas des normes
différentes selon les niveaux de promotion, et les enseignants sont
évalués uniquement par des administrateurs de leur établissement. Les
progrès en mathématiques n’ont été que marginaux et ils étaient nuls
concernant la lecture, ce que les évaluateurs imputent à un manque de
rigueur dans la conduite de l’évaluation en raison de la collusion entre
administrateurs et enseignants.
Le Portugal a quant à lui déployé une structure de carrière à
l’échelle nationale : les enseignants doivent réussir une évaluation
pour accéder à un échelon salarial supérieur. Cette évaluation à la fois
sommative (fondée sur des points) et critériée met les enseignants en
compétition les uns avec les autres. Il se trouve que la mise en place du
programme a été suivie d’une baisse des notes des élèves.
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Résumé analytique

D’après les données disponibles et l’expérience de mise en œuvre


de structures de carrière dans les pays, il semble que les modèles
holistiques (normatifs) critériés soient plus satisfaisants pour les
enseignants et produisent de meilleurs résultats du côté des élèves.
Le fait de ne pas savoir combien d’enseignants satisferont aux normes
pose cependant un problème, qui peut toutefois être surmonté en
apportant un grand soin à la définition du degré de difficulté des
normes et en organisant préalablement une phase d’expérimentation.
Si une grande prudence budgétaire est impérative, on peut fixer les
augmentations de salaire liées aux promotions en fonction du nombre
de personnes promues. On peut également instaurer la promotion
normative aux échelons terminaux, où les enseignants seront mis en
compétition avec ceux d’autres établissements plutôt qu’avec leurs
collègues directs.
Il est important que les enseignants « adhèrent » à la réforme.
Sans le soutien des syndicats, les nouvelles structures de carrière
risquent de ne jamais être mises en œuvre. Des représentants des
enseignants doivent participer à la conception de la structure de
carrière et en particulier à la définition des normes applicables aux
enseignants. Mais cette responsabilité ne doit pas reposer uniquement
sur eux. L’équipe chargée de la mise en œuvre doit inclure des experts
en conception d’évaluations. Parmi les obstacles potentiels à la réforme
on trouve notamment le manque de financement. Même si la mise en
place d’un système d’échelons de carrière ne coûte pas nécessairement
plus cher qu’une grille salariale unique, un investissement initial est
indispensable pour les phases de conception, de formation et de mise
en œuvre. Ces coûts doivent être budgétés par le ministère compétent.
On ne saurait trop recommander aux pays qui envisagent de
modifier l’administration de la carrière de leurs enseignants d’évaluer
de façon approfondie les modèles de structure de carrière existants ainsi
que les comptes rendus relatifs aux progrès accomplis et aux problèmes
rencontrés par les pays lors de la mise en œuvre de nouvelles structures.
Ces comptes rendus peuvent notamment comparer quantitativement
les principaux indicateurs avec les anciennes structures ou encore des
régions similaires, mais aussi comparer qualitativement la motivation
des enseignants et les études de cas nationales.

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Introduction

Pourquoi il est important de s’intéresser aux carrières


des enseignants dans le contexte actuel de développement
Les efforts en faveur de l’accès universel à l’enseignement primaire,
deuxième des Objectifs du millénaire pour le développement, ont
permis à de plus en plus d’enfants d’aller à l’école dans l’ensemble
des pays en développement. Revers de la médaille, la multiplication
rapide du nombre de places à l’école a engendré une demande
d’enseignants qualifiés excédant l’offre, conduisant ainsi à recruter
des enseignants sans formation et d’un niveau d’instruction moins
élevé. On s’est récemment inquiété, à juste titre, de la qualité de
l’enseignement dispensé. Et on a suggéré alors que le recrutement
massif d’enseignants moins qualifiés pourrait être à l’origine d’une
dégradation de la qualité de l’enseignement tout comme des résultats
d’apprentissage (Orr et al., 2013).
Le recrutement d’un nombre croissant d’enseignants peu
qualifiés et moins instruits a eu aussi un impact sur le statut et la
motivation des enseignants. S’ils étaient autrefois respectés pour leur
niveau d’éducation ou de formation, ce n’est aujourd’hui plus vrai de
l’ensemble du corps enseignant. Ils ont dès lors le sentiment que leur
statut régresse (VSO, 2002). De plus, malgré les recrutements en hausse,
de nombreux pays en développement ont encore du mal à maintenir
les ratios élèves/enseignant antérieurs en raison de l’augmentation
du nombre d’enfants scolarisés1. S’ensuivent une augmentation des
effectifs des classes et, faute de fonds supplémentaires suffisants, une
dégradation des conditions de travail pour tous (VSO, 2002).
Cette combinaison de facteurs est à l’origine de ce qui a été
qualifié de « crise de motivation des enseignants » (Bennell et
Akyeampong, 2007), qui se traduit dans de nombreux pays par des taux
élevés de réduction naturelle des effectifs et des « niveaux variables

1. L’Institut de statistique de l’UNESCO estime que, sans nouvelles mesures, la pénurie


d’enseignants continuera à priver des millions d’enfants de leur droit à l’enseignement
primaire. Soixante-quatorze pays sont ainsi confrontés à une grave pénurie d’enseignants
(Fiche n°33 de l’ISU, octobre 2015).

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Introduction

d’investissement professionnel » (VSO, 2002). Il est très important


de s’attaquer à ce problème de motivation car elle joue un rôle clé dans
la qualité de l’enseignement et, partant, dans les résultats des élèves
(Michaelowa, 2002; VSO, 2002). Cette étude de la littérature par
l’IIPE s’intéresse à plusieurs facteurs qui influent sur la motivation des
enseignants. Elle se concentre sur l’administration des carrières des
enseignants en tant que champ d’étude prometteur.
L’administration des carrières des enseignants comprend
la reconnaissance de ceux-ci, leur évaluation et leur progression
de carrière. Des changements dans ces domaines pourraient non
seulement améliorer la motivation des enseignants actuellement en
poste, mais aussi contribuer à réhabiliter la profession en général,
rendant l’enseignement plus attractif et augmentant ainsi le nombre
et la qualité des candidats qui souhaitent embrasser cette carrière.
Plusieurs pays ont expérimenté des modifications de la structure de
carrière des enseignants, certains avec plus de succès que d’autres.
Étudier ces expériences et en tirer des conclusions utiles pourrait
apporter un éclairage précieux à d’autres pays désireux de motiver
leurs enseignants et de reprofessionnaliser ce métier. De fait, l’un des
buts de l’éducation proposés pour l’après 2015 est en rapport avec la
motivation et la qualification des enseignants : « D’ici à 2030, tous les
gouvernements s’assurent que l’enseignement de tous les apprenants
est dispensé par des enseignants qualifiés, motivés, bénéficiant d’une
formation professionnelle et d’un soutien adapté » (Cible 6 de
l’objectif Éducation déterminé par les Accords de Mascate, 2015).
Questions, postulats et hypothèses d’étude
En tant qu’institut pour la planification de l’éducation, l’IIPE a
fait de l’organisation et de la gestion des carrières des enseignants
un domaine d’étude spécifique qui a pour but de répondre aux
questions suivantes :
1. Quels problèmes spécifiques l’organisation des carrières des
enseignants pose-t-elle dans les pays en développement ?
2. Quels sont les liens entre la motivation et l’organisation des
carrières ?
3. Quels sont les différents modèles d’organisation de la carrière des
enseignants dans le monde ?
4. D’après les études disponibles, quels sont les modèles les plus
efficaces ?
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Introduction

5. Quels enseignements tirer de ces informations pour concevoir et


mettre en œuvre des systèmes d’échelons de carrière ?
Cette étude a pour but d’informer, d’exposer différentes stratégies
possibles et de documenter les modalités de promotion ainsi que la
gestion des carrières des enseignants du primaire et du secondaire
dans de nombreux pays.
Les postulats et hypothèses qui sous-tendent cette étude sont les
suivants :
1. Lorsque les salaires des enseignants sont suffisants pour combler
leurs besoins élémentaires, certains modèles d’organisation de
carrière peuvent améliorer leur motivation dans leur pratique
quotidienne. À long terme, cela peut enrichir la qualité de
l’enseignement.
2. Lorsque les salaires des enseignants sont suffisants pour combler
leurs besoins élémentaires, certains modèles d’organisation de
carrière peuvent rendre la profession plus attractive. À long terme,
cela peut améliorer le recrutement de nouveaux enseignants et
mieux les fidéliser.
Champ d’étude et limites
Comme nous l’avons indiqué plus haut, les spécificités des
personnes qui embrassent la carrière d’enseignant dans les pays en
développement se sont diversifiées. Pour les besoins de la présente
étude, le terme « enseignant » désigne toute personne employée
pour une durée définie ou indéfinie afin d’enseigner dans une école
primaire ou secondaire. L’éventail des personnes concernées est
donc très large, allant des fonctionnaires hautement qualifiés aux
bénévoles, dont certains sont peu, voire pas du tout formés. Les
structures de carrière sont, semble-t-il, différentes pour les écoles
primaires et les écoles secondaires. Toutefois, la distinction n’étant
pas précisée dans la littérature, c’est le corps enseignant en général
qu’on va donc étudier. Par ailleurs, si la plupart des structures de
carrière étudiées sont conçues pour des fonctionnaires plutôt que
pour des enseignants sous contrat ou recrutés au niveau local, les
conclusions peuvent être pertinentes pour les pays qui veulent
inclure les enseignants contractuels dans leur structure de carrière.

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Introduction

L’Oxford English Dictionary donne de la carrière la définition


suivante : « profession embrassée par un individu pendant une
grande partie de sa vie, avec des possibilités de progression »
(Oxford Dictionaries, 2015). Elle diffère de celle de l’emploi :
«  travail rétribué permanent  ». Contrairement à la carrière,
l’emploi n’offre pas forcément de possibilités de progression2.
L’administration des carrières des enseignants englobe dès lors les
politiques définissant les modalités de progression des individus
depuis leur premier poste d’enseignant jusqu’au statut d’enseignant
expérimenté. Elle comprend la progression dans plusieurs domaines
– salaire, compétences, qualifications et responsabilités – et les
relations entre ces derniers. Notre étude n’aborde pas la formation
initiale des enseignants et n’entre pas dans le détail des méthodes
de développement professionnel. Bien que ces deux aspects soient
très importants, ils font ailleurs3 l’objet d’analyses approfondies.
Elle n’examine pas non plus les incitations collectives qui, tout en
contribuant à la motivation des enseignants, ne concernent pas
directement les carrières individuelles des enseignants.
La présente étude de la littérature est ambitieuse par son champ
d’application et en raison des pays considérés. Elle a été effectuée sur
la base de mots-clés qui ne sont pas propres à des pays particuliers et
prend en compte tous les résultats de recherche décrivant une structure
de carrière atypique4, quel que soit le pays d’origine. Elle couvre de
ce fait une large fourchette de structures de carrières provenant aussi
bien de pays développés que de pays en développement. Seules les

2. De la même manière, le rapport de l’OCDE (2005) sur le recrutement, la formation et la


fidélisation des enseignants distingue deux modèles de recrutement : les postes basés sur la
carrière et les postes basés sur les fonctions. Selon le modèle basé sur la carrière, les enseignants
font généralement toute leur carrière dans l’enseignement public, le recrutement est fait sur
la base des diplômes universitaires ou sur concours, et les modalités de promotion suivent
l’ancienneté et des règles clairement définies. Dans le cas de l’emploi basé sur les fonctions, les
enseignants ne sont pas fonctionnaires, mais sont engagés à des postes d’enseignant, avec une
progression non prévisible de leurs fonctions et des perspectives de carrière incertaines. Dans
les pays en développement, la nécessité d’embaucher un grand nombre d’enseignants a abouti
à des systèmes hybrides où certains enseignants accèdent au statut de fonctionnaire, tandis que
d’autres sont contractuels, ces derniers représentant dans certains cas un pourcentage important
des effectifs du corps enseignant (Schwille et Dembélé, 2007: 39–41).
3. Voir, par exemple, Caena (2011) sur la formation professionnelle continue et McKenzie et
al.(2005) sur la formation initiale des enseignants.
4. On entend ici par « atypique » toute structure de carrière qui ne suit pas le modèle courant à grille
salariale unique et progression automatique avec l’ancienneté. Celui-ci est décrit au chapitre 1.

18
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Introduction

structures de carrière des pays en situation de crise ont été écartées,


car elles auraient considérablement compliqué notre tâche. Quand
l’étude a révélé des structures de carrière atypiques sur lesquelles
les rapports ne donnaient pas suffisamment de détails, l’auteure s’est
mise en rapport avec des responsables politiques des pays concernés
par courriel ou par téléphone afin de demander des précisions.
L’étendue du champ d’étude en termes de pays considérés ne
doit pas empêcher de prendre en compte le contexte socioculturel
et socioéconomique des pays en développement. Et, bien que des
exemples concernant des pays en développement soient donnés,
une analyse approfondie de l’influence de ces aspects sur le
fonctionnement des carrières des enseignants, en particulier dans le
modèle des échelons de carrière, exigerait de plus amples recherches
et dépasse le cadre de cette étude. Une autre limite est celle de la
rémunération des enseignants. Nous avons délibérément choisi
de ne pas traiter en détail la question du salaire de départ ou du
salaire moyen, même si c’est bien sûr un élément important de la
motivation des enseignants5. L’étude part ainsi du postulat que, dans
les différents contextes considérés, les salaires des enseignants sont
suffisants pour satisfaire leurs besoins élémentaires.
Plan de l’étude
Le chapitre 1 est consacré à l’administration actuelle « typique » des
carrières et aux problèmes qui en découlent. Le chapitre 2 présente des
théories psychologiques sur la motivation et des données factuelles
sur ce qui motive les enseignants et de quelle manière. Le chapitre 3
aborde certaines méthodes courantes pour motiver les enseignants
afin de faire naître des comportements spécifiques, tandis que le
chapitre 4 examine différentes méthodes, approches et utilisations
de l’évaluation sommative des enseignants. Le chapitre 5 est quant
à lui consacré aux programmes d’échelons de carrière et décrit les
approches adoptées dans différents pays, ainsi que les aspects à
prendre en compte pour leur conception. Enfin, le chapitre 6 est une
réflexion sur les enseignements que l’on peut tirer de cette étude afin
de concevoir et mettre en œuvre des systèmes de carrière.

5. Pour plus d’informations sur les salaires des enseignants, voir le Rapport mondial de suivi
sur l’EPT (2014) de l’UNESCO.

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Chapitre 1
Problèmes spécifiques de l’administration
des carrières des enseignants

La crise de motivation des enseignants


Le corps enseignant est démoralisé et démotivé. Des chercheurs ont
soutenu que les changements de statut et les conditions de travail
des enseignants évoqués plus haut étaient la cause d’une crise de la
profession dans de nombreux pays en développement. Déjà, en 2002,
une étude du Voluntary Service Overseas (VSO) fondée sur des
entretiens avec des enseignants du Malawi, de Papouasie-Nouvelle-
Guinée et de Zambie, mettait en garde :
Dans les pays en développement, l’éducation atteint un point
critique : une crise potentielle du métier d’enseignant met en péril
la capacité des gouvernements nationaux d’atteindre les objectifs
d’élargissement et d’amélioration de l’éducation adoptés par la
communauté internationale. Dans beaucoup de ces pays, le corps
enseignant est démoralisé et fracturé… Ce qui se traduit par les
taux élevés de réduction naturelle des effectifs, le renouvellement
constant du personnel, la perte de confiance et les niveaux
variables d’investissement professionnel qui caractérisent la
profession dans les pays en développement (VSO, 2002: 1).
En 2007, une autre étude portant sur 12 pays d’Afrique
subsaharienne et d’Asie du Sud décrit en des termes tout aussi tranchés
la motivation des enseignants :
La conclusion qui s’impose est que la plupart des systèmes
scolaires sont confrontés à une crise de motivation des
enseignants, avec des effets considérables sur les objectifs du
Millénaire pour le développement en matière d’éducation de
base et de développement en général (Bennell et Akyeampong,
2007: 8).
Cette crise de motivation des enseignants a été qualifiée de
« problème colossal » au Pakistan (Pakistan, 2000: 61) et de « facteur
majeur d’appauvrissement abyssal de l’environnement d’apprentissage
des élèves du primaire et du secondaire [dans] la plupart des pays en
20
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Problèmes spécifiques de l’administration des carrières des enseignants

développement à faible revenu » (Bennell et Mukyanuzi, 2005: 34).


Le plus inquiétant est que ce problème ne semble pas se résoudre. Bien
au contraire : « Les données sur l’évolution de la motivation sont plus
mitigées... Mais une proportion importante d’enseignants a déclaré
que les collègues de leur école étaient de plus en plus démotivés »
(Bennell et Akyeampong, 2007: 8).
C’est à juste titre que l’on s’inquiète de cette démotivation des
professeurs, ne serait-ce que pour les enseignants eux-mêmes et
leur bien-être. Mais ce n’est pas tout : des études montrent que la
motivation des enseignants joue pour beaucoup dans les résultats
des élèves (Bennell et Akyeampong, 2007 ; Michaelowa, 2002 ; VSO,
2002). De leurs 12 études de cas dans des pays d’Afrique et d’Asie,
Bennell et Akyeampong (2007) concluent que l’investissement
personnel des enseignants est l’un des déterminants les plus
importants des résultats des élèves, et que le manque de motivation
se traduit par de l’absentéisme, une sous-utilisation du temps de
classe, des fautes professionnelles et une mauvaise préparation des
cours. Michaelowa (2002) a procédé à une analyse de régression
sur des données normalisées de réussite des élèves au Burkina Faso,
au Cameroun, en Côte d’Ivoire, à Madagascar et au Sénégal. Elle a
constaté que la satisfaction professionnelle des enseignants (basée
sur les déclarations des enseignants et le nombre de jours d’absence)
exerçait une influence positive et substantielle sur l’apprentissage des
élèves. Par ailleurs, une étude du VSO (2002) arrive à la conclusion,
à l’instar de Bennell et Akyeampong (2007), que le manque de
motivation des enseignants au Malawi, en Papouasie-Nouvelle-
Guinée et en Zambie se traduit par des taux élevés de réduction
naturelle des effectifs, des niveaux variables d’investissement
professionnel et un sentiment d’impuissance.
Notre examen de la littérature s’intéresse au rôle que joue la gestion
actuelle de la carrière des enseignants dans la crise de motivation des
enseignants ainsi qu’à la possibilité que des changements dans cette
gestion puissent atténuer ce problème.
Les limites de la structure de carrière la plus courante
Le moyen de loin le plus courant d’organiser la carrière des enseignants,
tant dans les pays en développement que dans les pays développés, est
la grille salariale unique. Pour être sélectionné comme enseignant, si
21
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

les candidats sont suffisamment nombreux pour qu’il y ait sélection,


il faut avoir suivi une formation préalable. Quant au salaire de départ,
il dépend du niveau d’études et des diplômes officiels obtenus. Il
augmente ensuite régulièrement d’année en année, quelles que soient
les fonctions et les responsabilités assumées, le nombre d’années de
service étant le seul facteur pris en compte. Le seul moyen pour les
enseignants d’augmenter leur salaire au-delà de la grille salariale fixe
est de suivre une formation plus poussée et d’obtenir des diplômes
de niveau plus élevé (Bennell et Akyeampong, 2007 ; Bruns, Filmer
et Patrinos, 2011), ou d’assumer des responsabilités administratives
supplémentaires, ce qui les oblige souvent à abandonner l’enseignement
devant la classe (Vegas, 2005).
La grille salariale unique pose plusieurs problèmes, bien souvent
décrits dans la littérature consacrée à l’efficacité des enseignants, à leur
carrière et à leur motivation (Bruns et Luque, 2014 ; Heneman III et
al., 2006 ; OCDE, 2013) :
• Manque de corrélation entre les facteurs pris en compte pour
la promotion (diplômes et expérience) et l’efficacité
des enseignants ;
• Enseignants pas assez responsables de la qualité de leur
enseignement ;
• Effet démotivant de la promotion automatique de collègues
parfois moins investis ;
• Structure salariale uniforme qui rend la profession
moins attractive pour les plus compétents ;
• Absence de possibilités de progression de carrière
sans abandonner l’enseignement en classe ;
• Sentiment, chez les enseignants, d’avoir une autodétermination
très limitée.
Les diplômes universitaires et l’expérience,
médiocres indicateurs prévisionnels de qualité
Ce point est important dans la perspective de la conception de la
structure de carrière des enseignants. En effet, si les enseignants
sont incités par la grille salariale unique à entreprendre des études
universitaires qui ne leur permettent pas, en réalité, d’améliorer leur
22
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Problèmes spécifiques de l’administration des carrières des enseignants

enseignement, ils y consacreront du temps, des efforts et des ressources


qu’il serait plus judicieux d’employer auprès des élèves.
Bien que le niveau des diplômes et l’ancienneté des enseignants
soient les critères les plus souvent retenus pour le calcul des salaires,
ces données ne sont pas toujours en rapport avec leur efficacité,
mesurée par leur capacité à faire en sorte que les élèves obtiennent les
résultats d’apprentissage attendus (Bruns et al., 2011).
Dans leur étude sur ce rapport, Wilson, Floden, et Ferrini-
Mundy (2002) concluent qu’un niveau minimal de connaissance de
la discipline est certes nécessaire pour bien enseigner, mais qu’au-
delà d’un certain point des diplômes universitaires supplémentaires
n’améliorent pas véritablement l’efficacité de l’enseignement6.
D’ailleurs, Rivkin et al. (2005), concluent leur étude en expliquant
qu’il n’existe pas de données permettant d’affirmer qu’être titulaire
d’un master améliore les compétences pédagogiques.
Les années de pratique de l’enseignement ne sont pas non plus
un bon indicateur prévisionnel de réussite des élèves. Dans les trois
ou quatre premières années d’école, l’expérience a un impact positif
sur les résultats des élèves. Mais au-delà, les années d’enseignement
ont peu d’effet (OCDE, 2009). L’étude du Latin America Laboratory
menée par Casassus et al. (2002) ne révèle pas d’impact substantiel de
l’expérience de l’enseignant sur les résultats des élèves en Amérique
latine. Cela signifie que les enseignants les mieux payés ne sont pas
forcément plus efficaces que les enseignants du bas de la grille salariale.
Absence de responsabilité quant à la qualité de l’enseignement
La promotion selon la grille salariale – et, dans de nombreux cas
également pour accéder à des postes de direction – étant fonction de
l’ancienneté plutôt que de l’efficacité, les moins bons comme les plus
indolents des enseignants sont promus de la même manière que leurs

6. Woessmann (2001) a analysé les données de l’enquête TIMSS (Trends in international


mathematics and science study) sur les résultats des élèves de 13 ans dans 39 pays et a constaté
qu’il existait un lien positif entre le niveau d’études des enseignants et la performance des élèves
en mathématiques et en sciences. L’étude de Goldhaber et Brewer (2000) sur les enseignants
américains fait apparaître un lien positif entre les résultats des élèves et le fait que les enseignants
soient titulaires d’une licence de mathématiques (mais pas de sciences). Cette même étude
constate une relation négative entre le fait qu’un enseignant soit titulaire d’une licence en
sciences de l’éducation et les résultats des élèves en mathématiques.

23
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

collègues plus consciencieux. Bien souvent, les structures de carrière


des enseignants ou les procédures de progression salariale ne prévoient
pas de responsabilité de la qualité de l’enseignement. Les enseignants
peuvent arriver en retard et être régulièrement absents (Akyeampong
et Asante, 2005), cela n’empêchera pas la progression de leur salaire.
Outre l’effet délétère de ces comportements sur l’éducation des élèves,
il peut être très démotivant pour les enseignants compétents et investis
dans leur travail de voir des collègues qui enseignent peu ou mal être
promu parfois avant eux (Bennell et Akyeampong, 2007).
Même en supposant que tous les enseignants soient régulièrement
présents et ponctuels, bien plus que tout autre facteur éducatif, les
variations de la qualité de l’enseignant ont un impact considérable sur
les résultats individuels des élèves (Bruns et Luque, 2014). Via des tests
donnés aux élèves, Hanushek et Rivkin (2012) ont mesuré la « valeur
ajoutée » de différents enseignants dans des écoles américaines. Ils
ont constaté que les élèves de certains enseignants maîtrisaient moins
de 50 % du programme pour un niveau de scolarité donné, tandis que
les notes de ceux d’autres enseignants avaient progressé de 1,5 point
ou plus. Sanders et Rivers (1996) ont analysé la base de données
consacrée aux élèves du Tennessee et constaté que cet effet était additif
et cumulatif. Par exemple, si un élève de 2e classe (correspondant à la
deuxième année de l’école primaire) a trois professeurs à forte « valeur
ajoutée », tandis qu’un élève du même niveau de scolarité a trois
professeurs à faible « valeur ajoutée », l’écart de performance entre eux
trois ans plus tard peut atteindre 54 %. Dans le résumé de leur étude
sur la qualité des enseignants, Bruns et Luque concluent qu’« à l’école,
aucune autre spécificité n’a autant d’impact sur la réussite des élèves »
(2014:6). L’absence de prise en compte de la qualité des enseignants
dans les structures de carrière est donc une occasion manquée.
Manque d’attractivité de la profession
Pour les jeunes qui quittent l’école ou l’université avec des notes
suffisamment bonnes pour envisager un large choix de métiers,
l’enseignement n’est pas une perspective attractive en regard d’autres
professions, car le salaire progresse lentement, sans qu’il soit possible
de voir ses efforts ou son talent récompensé par des revenus plus
importants. Pour Podgursky et Springer (2007), c’est la raison pour
laquelle les diplômés de l’enseignement supérieur n’embrassent
généralement pas cette profession ou, quand ils le font, l’abandonnent
24
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Problèmes spécifiques de l’administration des carrières des enseignants

rapidement. Dans les pays où on observe un déficit de candidats, ce


phénomène pourrait expliquer que les enseignants soient recrutés
finalement parmi les diplômés les plus faibles du secondaire et de
l’enseignement supérieur (Bruns et al., 2011) et qu’une carrière
dans l’enseignement soit perçue comme un pis-aller par les jeunes
qui sortent de l’école et les diplômés de l’université (Bennell et
Akyeampong, 2007 ; Gannicott, 2009).
Absence de statut professionnel
À cause du manque de possibilités de promotion, les très bons élèves
qui ont fini l’école comme les très bons étudiants diplômés n’ont
aucun moyen de se démarquer de ceux qui sont devenus enseignants
faute de mieux, et donc d’accéder à « l’exclusivité professionnelle »
qu’offrent d’autres métiers tels que médecin, ingénieur ou avocat
(Bennell et Akyeampong, 2007). Cette considération peut elle
aussi dissuader les enseignants potentiels de se tourner en priorité
vers cette profession. Pour des raisons similaires, les enseignants
expérimentés ont vu le statut de leur profession se dégrader depuis
l’engagement massif d’enseignants contractuels sous-qualifiés,
(Ramachandran et al., 2006).
Manque de critères objectifs pour la progression de carrière
Avec très peu de possibilités de promotion à des fonctions autres
que d’encadrement – ce qui suppose de renoncer à enseigner – et
l’ancienneté comme seul moyen d’accéder à ces postes, dans de
nombreux pays les enseignants n’ont pas le sentiment d’avoir la main
sur leur carrière (Bennell et Akyeampong, 2007). Si, pour obtenir
une promotion, il fallait satisfaire à des critères objectifs de qualité de
l’enseignement, leur motivation pour s’efforcer de remplir ces critères
serait plus importante.
Bruns et al. (2011) résument comme suit les problèmes posés
par la grille salariale unique : « Les implications évidentes des études
publiées sont que la plupart des systèmes scolaires recrutent et
récompensent les enseignants sur de mauvais critères, n’encouragent
ni les compétences ni les comportements qui contribuent plus
directement aux bons résultats d’apprentissage des élèves, et sont
incapables de sanctionner l’inefficacité » (Bruns et al. : 261).
25
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Outre les problèmes inhérents à la grille salariale unique, dans


certains pays et en particulier en Asie du Sud, la gestion des carrières
des enseignants est fortement politisée. Les acteurs politiques
locaux interviennent dans le recrutement, les affectations dans les
différentes écoles et la promotion (Bennell et Akyeampong, 2007).
De sorte que les promotions ne dépendent ni des compétences,
ni de la performance ou de l’expérience, mais plutôt des relations.
Au Nigeria, il n’existe aucune structure salariale normalisée ; des
enseignants au même échelon peuvent percevoir des rémunérations
différentes. Là encore, le facteur crucial est la personne influente
connue de l’enseignant, ce qui exaspère ceux qui n’ont pas les
relations nécessaires (Sherry, 2008).
Bennell et Akyeampong (2007) ont également signalé les
difficultés que rencontrent les autres méthodes de promotion. Au
Malawi, la promotion se fonde sur des entretiens dont le manque
de transparence a fait l’objet de vives critiques. S’il existe au Népal
des directives claires pour les promotions, elles sont « rarement
appliquées ». Au Kenya, il est difficile pour les enseignants qui
exercent dans des endroits reculés d’obtenir une promotion car
les inspecteurs s’y rendent rarement. Ces problèmes et quelques
solutions sont abordés plus en détail dans le chapitre 4.
Il faut néanmoins se garder de toute hypothèse abusive sur
ce qui peut ou devrait motiver les enseignants. Le chapitre suivant
présente des théories majeures de la littérature psychologique sur
la motivation. Il passe en revue les études portant sur ce que les
enseignants disent de leurs motivations.

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Chapitre 2
Fondements psychologiques
de la motivation des enseignants

C’est indéniable, il existe une crise de motivation chez les enseignants


des pays en développement et l’organisation traditionnelle de leurs
carrières ne fait qu’alimenter cette crise. Ce chapitre est consacré aux
théories psychologiques de la satisfaction professionnelle et de la
motivation. Il vise à déterminer si elles sont corroborées par les études
sur la satisfaction professionnelle et la motivation des enseignants
dans les pays en développement7.
Théories de la satisfaction professionnelle
La recherche sur la motivation humaine dans le domaine professionnel
est étroitement liée à la recherche sur la satisfaction au travail. Cela
tient au fait que les concepts de satisfaction et de motivation, bien
que distincts, sont intimement liés et parfois employés de manière
interchangeable. Pour les besoins de la présente étude, on entend
par satisfaction l’accomplissement des souhaits, des attentes ou des
besoins, tandis que la motivation est considérée comme le désir ou
la volonté de faire quelque chose. Le lien étroit entre ces concepts
vient de l’idée couramment admise que ce qui nous motive pour
faire quelque chose est un besoin dont l’assouvissement nous
apporte une satisfaction.
Il est toutefois important de souligner que la motivation n’est
pas aisée à mesurer. C’est pourquoi, tout en admettant la différence
entre satisfaction et motivation, plusieurs rapports de recherche
(Bennell, 2007 ; Michaelowa, 2002) préfèrent parler en même temps
de la motivation et de la satisfaction, faisant valoir que la satisfaction
aide à expliquer la motivation et que la satisfaction est plus facile à
interpréter par les enquêtés en ce qu’elle se rapporte à des événements

7. Le cadre théorique de cette analyse s’appuie sur la théorie de la satisfaction professionnelle et


sur la théorie de la motivation. D’autres courants de la psychologie se fondent sur le concept
de travail et d’investissement organisationnel. Ces concepts, qu’il serait également intéressant
d’examiner pour approfondir l’étude de la carrière des enseignants, n’ont pu être inclus dans
le champ de la présente analyse.

27
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

récents. La motivation, en revanche, est liée au futur et reste un concept


général, ouvert à l’interprétation. C’est pourquoi de nombreuses
organisations préfèrent employer le terme « satisfaction » plutôt que
« motivation », au motif que la première est plus facile à mesurer8.
Figure 1. La pyramide des besoins de Maslow

Réalisation
de soi
Moralité
Créativité
Spontanéité
Intégration
Expérience de
la détermination
Sens et potentiel intérieur
Reconnaissance/estime
Confiance, accomplissement
Respect des autres
Besoin d’être un individu unique
Amour et appartenance
Amitié, famille, intimité,
Sentiment de relation
Sécurité
Santé, emploi, biens, famille et stabilité sociale
Physiologie
Respiration, nourriture, eau, abri, vêtements, sommeil, sexualité

Source : 3D Eye, 2012.

La typologie des besoins selon Maslow


Abraham Maslow a exposé clairement cette idée de lien entre
motivation et satisfaction dans son article A Theory of Human
Motivation : « Tout comportement motivé […] doit être compris
comme étant un canal par lequel de nombreux besoins élémentaires
peuvent être simultanément exprimés ou satisfaits. En général, un acte
a plusieurs motivations » (Maslow, 1943: 370). Maslow distingue
différents types de besoins, depuis la physiologie élémentaire, comme
se nourrir et dormir, jusqu’aux besoins de créativité, de respect et
de sens. Il affirme que « les besoins de l’individu s’organisent en

8. Conduite dans 34 pays et représentative de plus de 5 millions d’enseignants, l’enquête TALIS


(Teaching and Learning International Survey) de l’OCDE en est un bon exemple. Les questions
sont délibérément exprimées en termes de satisfaction des enseignants.

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Fondements psychologiques de la motivation des enseignants

hiérarchies de priorités. Autrement dit, l’apparition d’un besoin


repose généralement sur la satisfaction préalable d’un autre besoin
plus prioritaire » (Maslow: 370). En d’autres termes, l’individu n’est
motivé pour satisfaire ses besoins d’ordre supérieur qu’après que ses
besoins plus élémentaires ont été comblés. Maslow a classé les divers
besoins en groupes qu’il a ensuite hiérarchisés selon l’ordre dans
lequel l’individu cherche à les satisfaire. Les plus élémentaires, classés
au bas de cette pyramide, sont les besoins physiologiques (l’air que
l’on respire, la nourriture, l’eau, un abri, le sommeil), suivis du besoin
de sécurité (santé, emploi, biens, famille, stabilité sociale), d’amour
et d’appartenance (amitié, famille, intimité, sentiment de lien),
d’estime (confiance, réussite, respect des autres) et de réalisation de
soi (moralité, créativité, intégration, expérience de la détermination,
sens et potentiel intérieur).
Théorie bi-factorielle
La théorie bi-factorielle de Herzberg (1968) est elle aussi fondée
sur l’idée de différents types de besoins humains. Dans sa première
étude, Herzberg a demandé à un échantillon initial d’ingénieurs et de
comptables de décrire des événements survenus sur leur lieu de travail
qui leur avaient procuré de la satisfaction, ainsi que des événements
ayant généré de l’insatisfaction. Il a constaté que les facteurs les
plus souvent cités comme produisant de la satisfaction au travail
étaient différents de ceux qui étaient le plus souvent cités comme
provoquant de l’insatisfaction au travail. Les facteurs provoquant de
l’insatisfaction étaient liés à l’environnement de travail, notamment la
politique et la gestion de l’entreprise, la hiérarchie, les relations entre
les personnes, les conditions de travail, le salaire, le statut et la sécurité.
Or, ces facteurs ne sont pas apparus aussi souvent dans la description
de ce qui engendrait la satisfaction des individus. Au contraire, ces
derniers concernaient pour l’essentiel la nature du travail, le succès, la
reconnaissance de ce succès, le travail proprement dit, la responsabilité,
les possibilités de développement et la promotion. En d’autres termes,
il est apparu que la satisfaction n’était pas le contraire de l’insatisfaction,
mais que les deux états cohabitaient en fait sur des échelles distinctes.
Dit autrement, les choses qui rendent les gens insatisfaits ne sont pas
simplement le contraire de ce qui les rend satisfaits. Ces conclusions
ont été confirmées à de nombreuses reprises avec différentes
populations d’Amérique et d’Europe (Herzberg, 1968).

29
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Herzberg a qualifié de « facteurs d’hygiène » les facteurs relatifs


aux conditions de travail et à l’évitement de l’insatisfaction. Tout
comme l’hygiène, nécessaire pour prévenir la maladie, ne garantit pas
une bonne santé, des conditions de travail satisfaisantes, nécessaires
pour éviter l’insatisfaction, n’apportent pas une réelle satisfaction.
Il est utile, ici, de faire la distinction entre ce qui est satisfaisant
(ce que peuvent être les conditions de travail) et ce qui procure
de la satisfaction (ce que, selon Herzberg, elles ne peuvent faire).
Herzberg qualifie de « facteurs de motivation » ceux qui procurent
une satisfaction professionnelle réellement « satisfaisante ». Il donne
à cette expression un sens spécifique : au lieu de couvrir tout ce qui
suscite la motivation (le désir de faire quelque chose), elle ne désigne
que les choses qui sont satisfaisantes parce qu’elles répondent à des
besoins supérieurs, comme les possibilités de responsabilité.
Figure 2. Facteurs agissant sur l’attitude au travail,
tels que mis en évidence dans 12 études
Facteurs caractérisant 1 844 événements Facteurs caractérisant 1 753 événements au travail
au travail ayant provoqué une extrême insatisfaction ayant engendré une extrême satisfaction
Pourcentage
de fréquence
Accomplis-
sement
(facteurs de motivation)
Motivation intrinsèque

Reconnaissance

Travail proprement dit

Responsabilité

Avancement

Possibilité de développement
Politique et
administration
de l’entreprise
Supérieur hiérarchique
Total de tous Total de tous
Relations avec le supérieur hiérarchique les facteurs les facteurs
contribuant contribuant
Conditions de travail à l’insatisfaction à la satisfaction
Facteurs d’hygiène

au travail au travail
Salaire Pourcentage de fréquence
Relations avec les pairs
Motivateurs
Vie personnelle
Hygiène
Relations avec les subalternes

Statut

Sécurité

Source : Herzberg, 1968: 90.

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Fondements psychologiques de la motivation des enseignants

Selon la théorie bi-factorielle de Herzberg, les facteurs d’hygiène


et de motivation sont indépendants les uns des autres. En conséquence,
les salariés peuvent faire l’expérience de quatre combinaisons
possibles, qui sont exposées dans le Tableau 1.
Tableau 1. Théorie bi-factorielle de Herzberg
4 situations Mauvaise hygiène Bonne hygiène (bonnes
(mauvaises conditions de conditions de travail et bon
travail et bas salaire) salaire)

Faible motivation C’est la pire condition, Les salariés ont peu de


(le travail ne comble pas où les salariés ne sont pas récriminations, mais ne sont
des « besoins supérieurs ») motivés et ont beaucoup pas très motivés. L’emploi
de récriminations. n’est considéré que pour
le salaire à la fin du mois.
Forte motivation Les salariés sont motivés, Situation idéale où les
(le travail comble des mais ont beaucoup de salariés sont très motivés et
« besoins supérieurs ») récriminations. Situation ont peu de récriminations.
où l’emploi est intéressant
et stimulant, mais les
salaires et les conditions
de travail médiocres.

Satisfaction professionnelle des enseignants


À en juger par la crise de motivation évoquée au premier chapitre,
il semble que les enseignants de nombreux pays en développement
se voient dans la quatrième des catégories d’expérience décrites par
Herzberg, avec de mauvaises conditions de travail et peu de « facteurs
de motivation » (succès, reconnaissance, responsabilité, possibilités
de développement et de promotion) dans leur environnement
professionnel9. Il en découle que les gouvernements ont deux moyens
d’améliorer la situation dans le cadre de cette théorie. D’un côté,
ils peuvent améliorer les conditions de travail, ce qui diminuerait
l’insatisfaction mais sans améliorer la motivation. De l’autre, ils peuvent
changer la nature du travail pour améliorer les « motivateurs » que
sont, par exemple, les possibilités de développement, la responsabilité
et la reconnaissance. Cela accroîtra la motivation des enseignants pour

9. S’agissant de la nature du travail proprement dit, il est généralement admis que constater les
progrès de ses élèves est en soi une motivation pour les enseignants.

31
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

leur travail sans toutefois supprimer les causes d’insatisfaction. Pour


obtenir une bonne hygiène et une forte motivation, les gouvernements
doivent agir sur les deux fronts.
Bien que ce soit les effets de la théorie exposée par Herzberg,
celui-ci ne les a pas testées sur des enseignants. De plus, la majeure
partie de ses recherches portait sur des pays développés (il a toutefois
testé sa théorie dans les pays communistes alors en développement).
Que des personnes qui travaillent dans un contexte de pauvreté
puissent réagir différemment d’autres, exerçant dans des contextes
plus riches tombe sous le sens, notamment en raison des degrés
extrêmes de besoins dans certains pays en développement, même
si les enseignants peuvent avoir de fortes motivations intrinsèques
dans les deux cas. Par exemple, il existe des situations où certaines
conditions d’hygiène, comme un salaire décent, doivent être remplies
avant que les enseignants puissent tirer une quelconque satisfaction ou
motivation de l’assouvissement de « besoins supérieurs », tels que la
reconnaissance et la responsabilité (Garrett, 1999), comme le suggère
la théorie de Maslow. Modifier la structure de carrière pour permettre
la satisfaction de « besoins supérieurs » n’aura ainsi aucun effet sur la
motivation des enseignants s’ils perçoivent un salaire très bas. Dans
ce chapitre, nous examinons les facteurs qui influent le plus sur la
satisfaction et la motivation des enseignants d’après les déclarations
des enseignants eux-mêmes et d’autres sources le cas échéant.
Rémunération
Dans certains pays en développement comme le Ghana, la Sierra
Leone et la Zambie, le salaire des enseignants est à un niveau si bas
qu’il ne permet même pas de satisfaire les besoins élémentaires, ce
qui nuit considérablement à la motivation des enseignants. Dans
beaucoup de pays à faible revenu, les enseignants reçoivent un salaire
de misère, équivalent à 2 à 4 dollars par jour. Sachant qu’en Afrique
ils ont généralement au moins cinq personnes à charge, ce salaire ne
couvre pas leurs besoins élémentaires. C’est la conclusion que Bennell
et Akyeampong (2007) tirent de leurs études de cas sur la motivation
des enseignants dans 12 pays.
Le large consensus qui se dégage chez les psychologues du travail
est que, dans un contexte de pays développé, le salaire ne suffit pas
pour augmenter la motivation. En revanche, les motifs pécuniaires
l’emportent généralement chez les enseignants des pays en
32
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Fondements psychologiques de la motivation des enseignants

développement à faible revenu où les salaires et autres avantages


matériels sont insuffisants pour assurer la survie des individus et des
ménages. C’est seulement quand ces besoins de base sont satisfaits
qu’il est possible de combler les besoins « d’ordre supérieur »,
générateurs d’une réelle satisfaction professionnelle (14).
À l’exception de deux (Inde et Népal), dans tous les pays concernés
par ces études de cas, le consensus qui se dégage des entretiens avec les
parties prenantes, dont les enseignants, est que ceux-ci sont sous-payés ;
c’est le principal facteur de découragement et de démotivation. Un
constat est particulièrement frappant : plus d’un tiers des enseignants
interrogés au Ghana, en Sierra Leone et en Zambie étaient d’accord
avec l’affirmation selon laquelle « les enseignants de leur école viennent
travailler en ayant faim ». Davidson (2007) relève que les enseignants
tanzaniens, tant en milieu urbain que rural, jugent leur salaire trop bas.
Certains d’entre eux estiment qu’il est inférieur au minimum requis
pour mener une vie frugale. Alam et Farid (2011) ont distribué un
questionnaire à 80 enseignants dans dix écoles pakistanaises et se sont
rendu compte que seulement 23 % d’entre eux jugeaient leurs revenus
suffisants pour faire face à leurs besoins financiers de base ; 64 %
estimaient en outre que ce bas salaire affectait leur travail.
Les bas salaires peuvent nuire à la qualité de l’enseignement
dispensé aux élèves, que les enseignants soient présents à l’école (faim,
stress ou démotivation générale) ou bien absents. Ainsi, au Malawi, les
salaires insuffisants sont cause d’absentéisme –  les enseignants sont
contraints de partir à la recherche de nourriture – et il est largement
admis dans tous ces pays que le travail doit être organisé de telle
sorte que les enseignants puissent compléter leurs revenus (Bennell
et Akyeampong, 2007). Autrement dit, les enseignants s’absentent
parfois de l’école pour exercer d’autres emplois afin de compléter leur
salaire, ce qui diminue leur investissement dans l’enseignement.
Il est clair que les bas salaires sont une cause majeure d’insatisfaction
professionnelle dans de nombreux pays en développement. La question
qui se pose alors est de savoir si augmenter les salaires améliorerait la
motivation. Selon les études disponibles il semblerait que ce soit le cas,
mais seulement jusqu’à un certain point.
Bennell et Akyeampong (2007) affirment que des primes
importantes ont permis d’enrayer la chute de motivation chez les
enseignants du Kenya, du Nigéria et de la Zambie. Ils citent l’exemple
33
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

du Kenya où « il y a eu une crise de motivation majeure du corps


enseignant dans les années 1990, mais les améliorations des salaires
et des conditions d’exercice intervenues au cours des cinq dernières
années ont probablement permis de mettre fin à cette crise » (26).
Comme il s’agit de pays à faibles revenus, cet effet corrobore la
théorie de Herzberg (1968) selon laquelle l’amélioration des facteurs
d’hygiène réduit l’insatisfaction, et celle de Maslow (1943) selon
laquelle les besoins élémentaires doivent être satisfaits avant de
chercher à satisfaire les besoins supérieurs. Selon ces deux théories, des
augmentations de salaire au-delà du montant nécessaire pour faire face
à ces besoins élémentaires (et ceux des personnes à charge) que sont
la nourriture, le logement et la santé, peuvent réduire l’insatisfaction
sans pour autant améliorer la motivation. Ceci est apparemment
corroboré par les faits, puisque dans les pays relativement plus riches
les augmentations de salaire ne semblent pas motiver les enseignants.
En Asie du Sud, par exemple, l’enseignement est une
profession relativement bien payée et la compétition pour les postes
d’enseignants est parfois féroce. Pourtant, dans les écoles publiques
beaucoup d’enseignants s’investissent très peu dans leur travail
(Bennell et Akyeampong, 2007). En Égypte, Abd-El-Fattah (2010)
a constaté qu’un programme de hausse des salaires des enseignants
du primaire n’avait pas eu d’effet significatif sur leur satisfaction
professionnelle. Au Brésil, Delannoy et Sedlacek (2001) ont
remarqué que les augmentations de salaires généralisées n’étaient
pas efficaces pour améliorer la performance des enseignants.
Michaelowa (2002) a analysé des données émanant d’enseignants
d’Afrique francophone, lesquels sont relativement bien payés par
rapport à leurs collègues de la plupart des autres pays d’Afrique. Elle
conclut que les variables salariales n’ont pas d’impact sensible sur la
satisfaction professionnelle des enseignants.
En conclusion, d’après les éléments d’appréciation limités dont
on dispose il semblerait qu’augmenter la rémunération des enseignants
ait un effet positif dans les pays où les salaires sont initialement trop bas
pour satisfaire les besoins élémentaires, réduisant ainsi insatisfaction
et démotivation. Cependant, augmenter les salaires dans les pays qui
paient mieux les enseignants ne semble pas accroître la satisfaction ou
la motivation. Bien sûr, l’insatisfaction n’est pas uniquement causée
34
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Fondements psychologiques de la motivation des enseignants

par le manque d’argent : d’autres facteurs d’insatisfaction influent sur


la motivation des enseignants.
Conditions de travail
Conséquence directe de la politique de scolarisation primaire
universelle, dans de nombreux pays la charge de travail des
enseignants et les effectifs des classes ont considérablement
augmenté car le recrutement des enseignants n’a pas suivi
l’augmentation du nombre d’enfants scolarisés. S’appuyant sur
leurs 12 études de cas sur la motivation des enseignants, Bennell et
Akyeampong (2007) affirment que :
Le nombre croissant d’heures de travail, l’augmentation des
effectifs des classes, la multiplication des disciplines et les
changements constants de programme scolaire sont cités dans
beaucoup de pays comme des facteurs majeurs de démotivation.
Ce que l’on attend des enseignants (le « contrat social ») n’est
pas fixé à un niveau réaliste dans de nombreux pays compte tenu
des récompenses matérielles, de la charge de travail, du cadre
d’exercice de la profession et du cadre de vie. Les classes à gros
effectifs et les lourdes charges de travail par rapport au salaire
(le rapport effort/salaire) rendent en outre les enseignants peu
enclins à adopter de nouvelles méthodes pédagogiques et autres
innovations (12).
Les effectifs chargés sont également une cause d’insatisfaction
des enseignants au Ghana, comme l’indique Salifu (2014), au Malawi
et en Papouasie-Nouvelle-Guinée (VSO, 2002). Un autre problème
souvent mentionné par les enseignants dans ces deux rapports est le
manque de ressources pédagogiques ou d’apprentissage, notamment
les manuels. En revanche, le VSO liste plusieurs facteurs peu
souvent évoqués comme cause d’insatisfaction ou de satisfaction :
qualité de la construction des salles de classe, mobilier, centres de
documentation pour les enseignants, bibliothèques, uniformes et
équipements sportifs. Le VSO fait également figurer les effectifs des
classes dans sa liste, bien que ce soit surtout une cause d’insatisfaction
des enseignants, comme nous l’avons dit.
Manque de responsabilité/autonomie des enseignants
Plusieurs études sur les causes de leur insatisfaction font état de
plaintes des enseignants concernant le manque d’autonomie et de
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

participation aux décisions. Salifu (2014) se focalise spécifiquement


sur ce que les enseignants du Ghana perçoivent comme des facteurs
démotivants dans leur pratique professionnelle, et constate que
l’abus d’autorité de certains chefs d’établissement, le manque
de réactivité face aux besoins des enseignants et l’absence de
participation des enseignants à la prise de décision font partie des
facteurs que les participants perçoivent comme démotivants dans
leur pratique professionnelle.
Au Malawi, en Papouasie-Nouvelle-Guinée et en Zambie,
les inquiétudes concernent également la mauvaise gestion des
enseignants et la participation insuffisante de représentants des
enseignants à l’élaboration de la politique (VSO). De même, l’une
des principales doléances formulées par les enseignants de Chypre,
ainsi que le rapportent Zembylas et Papanastasiou (2006), qui
considèrent Chypre comme un pays en développement, est leur
manque d’autonomie professionnelle. Un enseignant s’est ainsi plaint
que « le système éducatif est tellement centralisé et conservateur
que l’enseignant n’a pas le pouvoir de changer quoi que ce soit. Les
inspecteurs et les fonctionnaires du ministère nous demandent des
suggestions, mais ils ne les mettent jamais en œuvre » (Zembylas et
Papanastasiou, 2006: 241).
Ce constat est conforme aux résultats présentés dans le rapport
de l’enquête TALIS 2013 de l’OCDE : « les enseignants qui indiquent
avoir la possibilité de participer à la prise de décision dans les écoles
déclarent des niveaux plus élevés de satisfaction au travail dans tous
les pays de l’enquête (…). Le lien entre satisfaction au travail et
participation des enseignants à la prise de décision à l’école est très
fort dans tous les pays » (TALIS, 2013: 182).
Statut professionnel
Le statut peu valorisant et en déclin des enseignants du primaire est
un facteur majeur de manque de motivation, selon les études de cas
de Bennell et Akyeampong (2007). Le sentiment général partagé par
les enseignants et les autres parties prenantes des pays d’Afrique et
d’Asie du Sud-Est que l’enseignement est une profession sous-évaluée,
en partie à cause du nombre croissant d’enseignants sous-qualifiés
recrutés, nuit à la perception du caractère sélectif de cette profession.
36
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Fondements psychologiques de la motivation des enseignants

Les enseignants interrogés pour l’étude de cas du VSO (2002)


ont quant à eux mentionné une autre cause du statut médiocre des
enseignants : ceux qui souhaitent continuer à enseigner en classe n’ont
presque pas de possibilité de progression de carrière car les promus
accèdent le plus souvent à des fonctions administratives. Ainsi, ceux
qui continuent à enseigner vivent dans le sentiment de médiocrité
de leur statut et le manque de reconnaissance. Des modifications de
la structure de carrière pourraient avoir par exemple un impact sur le
statut professionnel si les enseignants demandaient une certification
ou pouvaient accéder à des fonctions ou échelons différents en se
soumettant à des évaluations.
Absence de possibilités d’évolution de carrière
Les responsables politiques ne sont pas les seuls à qui le principe de grille
salariale unique pose problème. Dans toutes les études mentionnées,
les enseignants citent le manque de possibilités d’évolution de carrière
comme motif d’insatisfaction.
Les enseignants ghanéens se plaignent que les promotions se font
à l’ancienneté (Salifu, 2014), tandis que les enseignants chypriotes
évoquent le manque d’évaluations et de perspectives de promotion
(Zembylas et Papanastasiou, 2006). Les enseignants du Malawi, de
Papouasie-Nouvelle-Guinée et de Zambie insistent, quant à eux, sur
l’insuffisance des possibilités d’évolution et manifestent un « réel désir
de promotion » (VSO, 2002: 29). Bennell et Akyeampong (2007)
indiquent que, dans la plupart des pays des 12 études de cas, « pouvoir
acquérir de nouvelles qualifications est une motivation essentielle car c’est
le seul moyen d’améliorer de façon significative ses revenus [et] malgré
des progrès depuis quelques années, les enseignants interrogés dans les
écoles visées par l’étude sont généralement insatisfaits des possibilités qui
leur sont offertes d’obtenir de nouvelles qualifications » (41).
La seule voie de promotion passe, dans de nombreux pays, par
l’acquisition de nouvelles qualifications, mais dans certains cas, leur
coût prohibitif (VSO, 2002) empêche les enseignants de s’améliorer
en y accédant.
Conclusion
Si une augmentation générale des salaires semble avoir enrayé la
baisse de motivation dans certains pays, dans d’autres cela n’a rien
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

changé à la satisfaction professionnelle telle que rapportée par les


enseignants. Ce résultat en apparence contradictoire peut être
expliqué par la théorie bi-factorielle de Herzberg (1968), selon
laquelle une amélioration des facteurs « d’hygiène », comme
le salaire, peut réduire l’insatisfaction sans générer pour autant
une réelle satisfaction ou motivation. Sachant que les pays où
l’augmentation généralisée des salaires a eu le plus d’effet (Kenya,
Nigeria et Zambie) proposaient des salaires initiaux plus bas que
ceux où elle a été sans effet (Brésil et Égypte), on pourrait dire que,
dans les trois premiers pays, l’augmentation de salaire a permis de
satisfaire les besoins élémentaires (les plus bas dans la hiérarchie
des besoins de Maslow), tandis que dans les deux autres, les besoins
élémentaires étaient déjà comblés ; la hausse des salaires n’a pas suffi
pour satisfaire les besoins d’ordre supérieur de réalisation de soi ou
d’estime de soi, de sorte que la satisfaction professionnelle ne s’est
pas améliorée.
Il n’existe pas de démonstration empirique que les besoins
élémentaires doivent être comblés pour que les enseignants soient
satisfaits ou motivés par des facteurs d’ordre supérieur, comme le
besoin de réalisation de soi, de responsabilité et de développement
personnel. Cependant, s’appuyant sur leurs recherches, Bennell
et Akyeampong (2007) affirment que cela peut être le cas.
L’insatisfaction d’enseignants auxquels seraient offertes des
possibilités de promotion, qui pourraient être interprétées comme
des réponses à un besoin de réalisation de soi, de responsabilité
et de développement personnel, remettrait peut-être cette thèse
en question. Mais les enseignants peuvent aussi n’envisager la
promotion que comme un moyen d’améliorer leur situation
financière. Néanmoins, certains reproches formulés par des
enseignants – perte de statut professionnel, absence d’évolution de
carrière et manque de responsabilité – pourraient potentiellement
disparaître en modifiant la structure des carrières.
Nous avons commencé ce chapitre en soulignant le lien entre
motivation et satisfaction. Nous avons ensuite examiné les effets
des hausses de salaire sur la satisfaction professionnelle, mais sans
prendre en compte le salaire ou d’autres contextes comme facteurs
incitatifs. Nous abordons ce point ci-après et examinons différents
types de motivation.
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Fondements psychologiques de la motivation des enseignants

Théories de la motivation
Comme nous l’avons expliqué plus haut, la motivation ne résulte pas
que de la suppression de l’insatisfaction. Herzberg (1968) affirme
que seuls les « motivateurs », qui satisfont des besoins d’ordre
supérieur, peuvent motiver les gens au-delà de cette suppression. Il
reconnaît aussi que les incitations sont un autre moyen d’obtenir ce
que l’on veut des individus, bien qu’il préfère dans ce cas ne pas parler
de « motivation ». Dérogeant à ses principes, Herzberg qualifie les
incitations telles que les récompenses matérielles et les sanctions
de « coups de pied dans le derrière » (Herzberg, 1968) et estime,
d’après ses propres recherches sur la satisfaction au travail, qu’elles
sont inefficaces pour obtenir une motivation réelle des salariés.
Théorie de l’évaluation cognitive
La théorie de l’évaluation cognitive de Deci et Ryan (1985) présente
à cet égard des similitudes avec la théorie de Herzberg (1968),
mais elle se focalise exclusivement sur la motivation, plutôt que
sur la satisfaction et l’insatisfaction, et emploie une terminologie
différente. De même, elle fait une distinction entre différents types
de motivation en fonction des buts et des raisons qui suscitent
une action. La distinction la plus fondamentale est celle entre
motivation intrinsèque et motivation extrinsèque, qui correspond
à la distinction que fait Herzberg entre les « motivateurs » et les
facteurs « coup de pied dans le derrière ». Selon Deci et Ryan, la
motivation intrinsèque est le fait de s’engager dans une activité pour
le plaisir et la satisfaction inhérents à la pratique de cette activité,
tandis que la motivation extrinsèque est de faire une activité dans le
but de bénéficier de ses conséquences, une récompense par exemple.
Les premières théories sur la motivation intrinsèque et
extrinsèque (par exemple Porter et Lawler, 1968) postulaient que la
motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque se complétaient ;
elles suggéraient de structurer l’environnement de travail afin de
générer une satisfaction intrinsèque et d’accorder des récompenses
externes. Mais les recherches menées par Deci (1971) ont montré qu’en
réalité les récompenses matérielles extrinsèques pouvaient diminuer
la motivation intrinsèque au lieu de l’augmenter, avec un « effet de
sape ». Si la promesse d’une récompense renforce la motivation pour
une courte période, quand les récompenses prennent fin, les individus

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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

sont intrinsèquement moins motivés qu’avant (Deci, 1971). Ce n’est


pas anodin, car le type de motivation qui déclenche l’action a un effet
sur la qualité et la façon d’accomplir cette action. De plus, il semble,
d’après les premières recherches, que la motivation intrinsèque
soit davantage associée à la créativité, à la flexibilité cognitive et à la
résolution de problèmes (Amabile, Goldfarb et Brackfield, 1990;
McGraw, 1978) que la motivation extrinsèque.
Cet « effet de sape » a été très controversé à l’époque, car il
sous-entendait que les récompenses et les incitations extérieures,
couramment employées pour motiver les travailleurs, nuisaient
en fait à la motivation des individus. Cette controverse a suscité de
nombreuses autres études sur le sujet et par la suite. Deci, Koestner
et Ryan (1999) ont mené une méta-analyse de 128 études de
laboratoire qui a confirmé que les récompenses matérielles nuisaient
considérablement à la motivation intrinsèque.
Tableau 2. Théorie de l’évaluation cognitive
selon Deci et Ryan (1985)
Type de motivation Définition Associée à
Motivation intrinsèque On agit parce que l’action Créativité, résolution
est intéressante en soi ou de problèmes, flexibilité
agréable. cognitive, persévérance.
Motivation extrinsèque On agit parce que l’action Augmentation initiale
entraîne un résultat dissocié, de la fréquence de l’action,
comme une récompense. mais engendre une diminution
de la motivation intrinsèque.

Cela semblerait sous-entendre que l’on ne devrait jamais utiliser


de récompenses comme motivation extrinsèque des enseignants
en raison de leur effet négatif sur la motivation intrinsèque et, par
conséquent, sur la créativité, la flexibilité cognitive et la résolution des
problèmes, qui sont essentiels pour enseigner. On doit notamment
à Deci, découvreur de l’« effet de sape », deux autres constats qui
nuancent ce propos. Premièrement, la méta-analyse de Deci, Koestner
et Ryan (1999) a montré qu’il y avait des limites à l’« effet de sape ».
En effet, si les récompenses sont données indépendamment de
l’engagement d’accomplir une tâche spécifique (ce qui peut être le cas
du salaire, par opposition à la prime) ou si elles n’ont pas été anticipées
(primes non programmées), elles ne diminuent pas la motivation
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Fondements psychologiques de la motivation des enseignants

intrinsèque. Tout dépend de si les récompenses sont considérées


comme un moyen de contrôle ou comme une reconnaissance de
compétence. Cette reconnaissance ne diminue pas la motivation
intrinsèque, mais peut même la renforcer. Deuxièmement, Ryan et
Deci (2000) ont poursuivi leurs travaux sur la motivation intrinsèque
et extrinsèque, développant leur théorie au point de lui donner un
autre nom : théorie de l’autodétermination.
Théorie de l’autodétermination
Bien que la motivation extrinsèque ait été initialement considérée
comme une forme « pâle et pauvre » de motivation par rapport à la
motivation intrinsèque, Ryan et Deci (2000) ont affiné leur théorie au
fil de décennies de recherche et ont ainsi postulé qu’il existait différents
types de motivation extrinsèque, dont certains sont effectivement des
formes « pauvres » de motivation, tandis que d’autres représentent
des états « actifs, des états d’agent ». La différence entre ces types de
motivation extrinsèque dépend du degré d’intériorité du « lieu de
contrôle » perçu par la personne, autrement dit du degré d’autonomie
avec lequel elle a l’impression de décider d’une action. Par exemple,
une élève qui fait ses devoirs afin d’obtenir une récompense de ses
parents est extrinsèquement motivée, de même que l’élève qui fait
ses devoirs parce qu’elle sait que cela lui permettra d’avoir de bonnes
notes et, partant, de faire la carrière de médecin dont elle rêve. Dans
les deux cas, il s’agit de motivations extrinsèques, car ni l’une ni l’autre
ne fait ses devoirs parce que cela lui plaît en soi. Mais la première élève
se conforme à la demande de ses parents dans le but de recevoir une
récompense, tandis que la seconde a fait ce choix de son propre chef,
manifestant ainsi davantage d’autonomie. Cette dernière a dès lors
intériorisé certaines valeurs (vouloir faire une carrière de médecin) et
des règles de comportement (faire ses devoirs pour avoir de bonnes
notes et donc accéder à cette carrière).
Ryan et Deci (2000) décrivent une taxinomie de motivations
basée sur le degré d’autonomie des actions, depuis l’amotivation
(l’absence de motivation) jusqu’aux motivations intrinsèques,
en passant par différents types de motivations extrinsèques dans
lesquelles les buts sont plus ou moins intériorisés.
La régulation externe est le type de motivation extrinsèque
précédemment décrit : une personne accomplit une action uniquement
41
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

dans le but d’obtenir une récompense (je prépare mes cours parce
que je suis payé pour cela). L’introjection est un type de motivation
extrinsèque plus autodéterminé, qui résulte du désir d’avoir une bonne
opinion de soi-même ou de susciter cette opinion chez les autres (je
prépare mes cours parce que c’est ce que tout enseignant est censé
faire). L’identification et l’intériorisation sont les types de motivation
extrinsèque les plus autonomes. Les individus reconnaissent la valeur
(identification) des objectifs auxquels contribue leur activité, ou les
intériorisent complètement (intériorisation) (je prépare mes cours
parce que je veux que mes élèves apprennent bien et parce que cela
fait partie de mon identité d’enseignant).
Tableau 3. Théorie de l’autodétermination
selon Ryan et Deci (2000)
Type de motivation Motif de l’action Source
de motivation
Motivation intrinsèque L’action est intéressante Interne
en soi ou agréable. (autonome)
Intégration Les buts de l’action sont Interne
les mêmes que les buts de (autonome)
l’individu
Identification Adhésion consciente Un peu interne
et de son propre chef (un peu autonome)
Motivation aux buts de l’action.
extrinsèque Introjection Recherche l’approbation Un peu externe
des autres (un peu contrôlée)
Régulation Conformité avec Externe
externe les récompenses (contrôlée)
ou sanctions externes.
Amotivation Non-conformité Absence totale
de motivation

Ryan et Deci (2000) emploient une nouvelle terminologie


pour désigner les types de motivation figurant aux extrémités du
tableau, la motivation extrinsèque est à présent comprise comme
englobant différents types de motivation avec des effets différents sur
le comportement. Les motivations qui sont régulées de façon externe
sont appelées « motivations contrôlées », tandis que les motivations
qui viennent d’un contrôle interne sont qualifiées de « motivations
autonomes ».
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Fondements psychologiques de la motivation des enseignants

Dans la mesure où ils adoptent les comportements qui


conviennent, pourquoi est-ce important de savoir ce qui motive
les individus ? Les études de laboratoire et sur le terrain menées au
sein de diverses organisations montrent que les organisations qui
renforcent la motivation intrinsèque de leurs salariés et prônent
l’intériorisation complète des motivations extrinsèques obtiennent
plusieurs effets positifs :
1. Persévérance et changement de comportement durable ;
2. Performance, en particulier pour les tâches exigeant créativité,
flexibilité cognitive et compréhension de concepts ;
3. Satisfaction au travail ;
4. Attitudes positives à l’égard du travail ;
5. Comportements de citoyenneté organisationnelle ;
6. Adaptation et bien-être psychologiques (Gagné et Deci, 2005).
La clé pour renforcer la motivation intrinsèque et la motivation
extrinsèque « intériorisée » – qui, ensemble, peuvent être qualifiées
de « motivation autonome » – est de créer des conditions qui
permettent le besoin de compétence, le besoin d’autonomie et le
besoin de sociabilité de l’individu (Gagné et Deci, 2005). Selon la
théorie de l’autodétermination, les contextes où les enseignants se
sentent bien dans leur travail, ont le sentiment d’être maîtres de leur
carrière et de participer à la communauté scolaire sont ainsi ceux qui
offrent le plus de chances d’intérioriser les buts de l’école ou de s’y
identifier. Par conséquent, ce sont des contextes qui incitent à travailler
d’arrache-pied pour atteindre ces buts. Dans la mesure où il s’agit de
besoins humains, les enseignants doivent en outre être motivés pour
y répondre en s’efforçant de bien faire leur travail, en ayant le contrôle
de leur carrière et en étant intégrés à la communauté scolaire.
Motivation des enseignants
Motivation autonome actuelle
Dans les pays développés, il semble que de nombreux enseignants
aient intériorisé (ou se décrivent comme tels) les buts généraux de
l’école et soient par conséquent motivés pour chercher à les atteindre.
L’OCDE (McKenzie et al., 2005) a étudié les mesures politiques
de 25 pays pour attirer, perfectionner et fidéliser des enseignants
efficaces. Et il tire le constat suivant :
43
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Une conclusion frappante de ce travail est que les enseignants


sont fortement motivés par les avantages intrinsèques de
l’enseignement – travailler avec des enfants et des jeunes, les
aider à se développer et apporter une contribution à la société –
et que les structures du système ainsi que le milieu de travail
scolaire doivent permettre aux enseignants de se concentrer sur
ces tâches (9).
Un exemple de ce type de motivation est donné par Tin, Hean
et Leng (1996) : ils ont interrogé 27 enseignants du primaire et
du secondaire à Singapour pour savoir pourquoi ils étaient aussi
motivés, constatant que :
Le lien entre la motivation des enseignants et les résultats
scolaires des élèves mérite une attention particulière. Les
données rassemblées dans cette étude révèlent que les progrès
ou les résultats scolaires des élèves sont le motivateur numéro
un. Quand les enseignants voient leurs élèves progresser dans
leur travail, ils sont très satisfaits et encouragés à donner encore
plus à leurs élèves (4).
Dans les sondages effectués par le VSO (2002) au Malawi, en
Papouasie-Nouvelle-Guinée et en Zambie, les enseignants ont déclaré
que leur motivation première pour devenir enseignants était le désir
d’être en contact avec des jeunes. Les enseignants des pays pauvres ont-
ils cette motivation autonome quand ils commencent à enseigner et
sont-ils motivés pour satisfaire les besoins d’ordre supérieur que sont
la compétence, l’autonomie et la sociabilité, génératrices de motivation
intrinsèque ? Ou les conditions de travail et la rémunération sont-
elles à ce point insatisfaisantes qu’ils ne peuvent être motivés par ces
besoins supérieurs tant que leurs besoins élémentaires ne seront pas
satisfaits ? Il n’y a pas de réponse simple et unique à cette question, car
la situation est différente dans chaque pays et les motivations varient
d’un enseignant à l’autre. Mais d’après les quelques données dont on
dispose, de nombreux enseignants des pays en développement sont,
selon leurs propres dires, motivés par la satisfaction des besoins de
compétence, d’autonomie et de sociabilité.
Le besoin de compétence
Les études effectuées par Keitheile et Mokubung (2005) pour le
compte du SACMEQ (The Southern and Eastern Africa Consortium
for Monitoring Educational Quality en anglais, ou Consortium
44
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Fondements psychologiques de la motivation des enseignants

de l’Afrique australe et orientale pour le pilotage de la qualité de


l’éducation) ont montré que les possibilités de développement
professionnel figurent parmi les principales préoccupations des
enseignants de nombreux pays. Près de 96 % des enseignants du
Botswana ont déclaré que ces possibilités étaient un facteur « très
important » (86). Dans la mesure où, bien souvent, dans les pays
en développement, faute de certification officielle le développement
professionnel ne génère pas d’augmentation de salaire, on peut penser
que les enseignants sont motivés pour améliorer leurs compétences.
Les observations faites par le VSO (2002) au Malawi corroborent
l’idée que l’intérêt des enseignants pour le développement
professionnel découle au moins en partie de leur volonté d’améliorer
leur enseignement. Dans les trois pays étudiés émergeait un désir
très fort d’avoir des possibilités de perfectionnement : interrogés sur
la raison de ce désir, les enseignants malawites ont répondu qu’ils
n’avaient pas été suffisamment préparés ou formés pour mettre en
œuvre le nouveau programme scolaire (ils n’ont pas mentionné les
possibilités de hausse de salaire ou de promotion). Dans ses notes
d’orientation sur la rémunération des enseignants dans les États
fragiles (2009), le Réseau international pour l’éducation en situations
d’urgence (INEE, pour Inter-Agency Network for Education in
Emergencies), conclut lui aussi que le développement professionnel
est partout un motivateur important.
Cette étude constate que la réussite des élèves est un facteur
de motivation courant dans les différents pays. Quand les élèves
s’améliorent ou changent de comportement, même progressivement,
les enseignants sont motivés pour poursuivre leurs efforts et se crée
ainsi un « cycle de succès » qui a des effets bénéfiques tant pour les
élèves que les enseignants. Dans ce cas, le besoin de compétence est
comblé et la satisfaction de ce besoin recoupe partiellement le but de
l’éducation, qui est d’aider les élèves à réussir dans leurs apprentissages.
Dans les pays étudiés par VSO (2002), les bons résultats des élèves sont
également cités comme source de motivation pour les enseignants et
la réussite des élèves semble avoir un effet positif sur l’estime de soi,
en particulier chez les enseignantes. Cependant, il est à noter que les
enseignants ne prêtent pas toujours attention à l’apprentissage des
élèves et ne sont pas toujours motivés pour être compétents dans
leur travail. En Asie du Sud, par exemple, la médiocrité de certains
45
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

enseignants est pratiquement sans conséquence. Devcota (2005)


constate, à propos du Népal, que « les enseignants des écoles primaires
publiques semblent peu se soucier de l’incidence de leur performance
sur la réussite des élèves… Qu’ils enseignent ou non, ils sont de toute
façon payés » (Devcota, 2005 : 13). Le défi, pour toute structure de
carrière des enseignants, est donc de motiver les enseignants pour
qu’ils redoublent d’efforts sans pour autant amoindrir la motivation
autonome de ceux qui s’investissent déjà beaucoup dans leur travail.
Le besoin d’autonomie
Comme indiqué précédemment, le manque de participation à la
prise de décision au niveau de l’école (VSO, 2002 ; Salifu, 2014) et
le manque d’autonomie professionnelle (Zembylas et Papanastasiou,
2006) sont une cause fréquente d’insatisfaction chez les enseignants,
ce qui prouve qu’ils accordent de la valeur à l’autonomie et aimeraient
en avoir davantage. Dans les trois études de cas du VSO (2002), la
cause d’insatisfaction citée par les enseignants est le mépris des
autorités scolaires pour leurs conseils et leurs aspirations.
Ce manque d’autonomie se fait sentir au niveau de l’école où
les enseignants n’ont aucun moyen de peser sur les décisions. Les
enseignants des pays en développement bénéficient pourtant d’un
degré d’autonomie non négligeable en ce qui concerne la manière
d’enseigner en classe, car la plupart de ces pays n’ont aucun système
régulier ou efficient d’évaluation des enseignants. Cette autonomie
fait le lit de situations comme celle décrite plus haut au Népal, où
certains enseignants se soucient peu de leur performance et où la
mauvaise qualité de l’enseignement n’est jamais mise en cause. L’un
des défis majeurs que pose la conception de tout système d’évaluation
ou de structure de carrière des enseignants est de trouver un moyen
d’encourager les enseignants à améliorer leur enseignement sans qu’ils
se sentent contrôlés ou privés d’autonomie. Le programme guinéen de
primes modestes, dans lequel les enseignants sollicitent une subvention
pour financer des besoins de développement professionnel qu’ils
ont eux-mêmes identifiés, en est un exemple innovant (Dembele et
Schwille, 2006). Les enseignants se sont organisés en équipes mêlant
enseignants chevronnés et novices, auxquelles des membres qualifiés
du ministère viennent régulièrement apporter une aide sur place pour
leurs activités de développement professionnel.
46
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Fondements psychologiques de la motivation des enseignants

Le besoin de sociabilité
Le besoin de sociabilité est le besoin de se sentir accepté par les
autres ; il est satisfait quand les individus tissent des liens étroits et
intimes. Dans le cas des enseignants, cela peut être avec les élèves, les
collègues ou la communauté.
Trois études réalisées aux États-Unis d’Amérique par Klassen,
Perry et Frenzel (2012) sur 1 049  enseignants montrent que la
satisfaction du besoin de relation avec les élèves produit chez les
enseignants plus d’investissement et d’émotions positives, et moins
d’émotions négatives que la satisfaction du besoin de liens avec les
pairs. En fait, les résultats de l’enquête TALIS 2013 font apparaître
une corrélation très forte entre les relations enseignants-élèves et
la satisfaction des enseignants au travail. De même, les relations et
la collaboration avec les pairs semblent avoir un rôle important de
motivateur ; en effet, « les enseignants qui déclarent participer à
une formation professionnelle collaborative cinq fois par an ou plus
disent se sentir nettement plus à la hauteur dans presque tous les
pays et ressentir une plus grande satisfaction au travail dans les deux
tiers des pays » (TALIS, 2014 : 182). C’est important de garder ce
bilan présent à l’esprit, car certaines réformes visant à renforcer la
motivation des enseignants peuvent générer de la compétition et
des dissensions au sein du personnel (Murnane et Cohen, 1986 ;
Martins, 2009).
Il ressort des entretiens et des groupes de discussions du VSO
(2002) que leur statut et la contribution des enseignants à leur
communauté et à la société en général leur donnent une bonne
estime d’eux-mêmes. Toutefois, dans les trois pays étudiés (Malawi,
Papouasie-Nouvelle-Guinée et Zambie) certains ont le sentiment
que leur communauté ne les apprécie plus autant qu’autrefois pour
les raisons exposées au chapitre 1. Bennell et Akyeampong (2007)
remarquent que les enseignants qui exercent dans leur région
d’origine éprouvent davantage de satisfaction professionnelle que
leurs collègues originaires d’autres régions. Ils attribuent ce fait
aux réseaux familiaux et amicaux plus développés des enseignants
recrutés localement, à leur meilleure connaissance de la communauté
et à leur désir plus grand de promouvoir les activités d’éducation et
de développement dans la région.

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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Effet des types de motivation sur les résultats des élèves


Cette théorie et ce travail de recherche seraient d’un intérêt limité
si la motivation autonome et la motivation contrôlée avaient les
mêmes effets sur le comportement des enseignants et les résultats
des élèves. Or, certaines études affirment que la motivation
autonome (encore souvent décrite comme intrinsèque par la
littérature) se traduit par des comportements plus positifs des
enseignants, avec des effets bénéfiques sur les comportements des
élèves, que la motivation contrôlée.
Roth et al. (2007) ont constaté que les enseignants qui ont
une motivation autonome manifestent un plus grand sentiment de
réalisation de soi et un moindre épuisement émotionnel. Une étude
transculturelle menée dans cinq pays d’Europe remarque qu’une
motivation autonome n’a pas pour seul effet d’améliorer le bien-être
de l’enseignant, mais est associée à un style d’enseignement centré
sur l’élève, alors que la motivation non autonome va plus de pair
avec un style d’enseignement plutôt centré sur l’enseignant (Hein et
al., 2012). Lam, Cheng et Choy (2010) ont eux aussi constaté qu’un
environnement scolaire encourageant la compétence, l’autonomie et
l’entraide collégiale (caractéristiques d’une motivation autonome)
était de nature à motiver les enseignants pour une pédagogie innovante.
Ce changement de style d’enseignement a toutes les chances
d’influer sur l’apprentissage des élèves. En outre, un enseignant ayant
une motivation intrinsèque aura davantage tendance à accompagner
les élèves vers l’autonomie dans l’apprentissage, cette autonomie
engendrant la motivation intrinsèque des élèves. Ce n’est pas le cas
d’un enseignant ayant une motivation extrinsèque (Pelletier, Séguin-
Lévesque et Legault, 2002 ; Reeve, Bolt et Cai, 1999 ; Roth et al., 2007).
Enfin, la motivation autonome est importante pour
l’investissement des enseignants dans leur formation professionnelle
et son suivi, en particulier pour s’informer des innovations
pédagogiques (Gorozidis et Papaioannou, 2014 ; Van Eekelen,
Vermunt et Boshuizen, 2006). On le sait, la motivation autonome
pour apprendre favorise cet apprentissage et sa réussite ainsi que
la créativité et la persévérant face aux difficultés rencontrées. Bien
plus que si l’on est motivé par des facteurs externes (Gagné et Deci,
2005), comme dans l’exemple précédemment cité des écolières qui
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Fondements psychologiques de la motivation des enseignants

font leurs devoirs pour des raisons différentes. C’est vrai également
de l’apprentissage des enseignants (Shulman et Shulman, 2004).
Différences individuelles
Il va de soi que les facteurs qui motivent chaque enseignant en
particulier peuvent varier d’un pays à l’autre, à l’intérieur des
pays et entre les différents types d’enseignants. Nous avons déjà
évoqué plus haut des différences de motivation entre pays, bien
que les données actuellement disponibles ne soient pas suffisantes
pour tirer des conclusions définitives. À l’intérieur des pays, la
motivation des enseignants dépend du contexte scolaire (Lam,
Cheng et Choy, 2010) et parfois aussi des fonctions de l’enseignant.
Par exemple, les enseignants bénévoles ou sous contrat peuvent
être motivés à l’idée de devenir des enseignants qualifiés, tandis
que les enseignants qualifiés seront plutôt motivés par l’argent ou
l’altruisme (INEE, 2009).
Dans leur théorie de l’autodétermination, Deci et Ryan
(1985) font valoir que, dans une même situation, des individus
ont tendance à avoir des motivations différentes. Ils décrivent
des individus « orientés vers l’autonomie », qui ont tendance à
considérer qu’ils ont la maîtrise de la situation et donc à être motivés
de façon autonome, par opposition à des individus « orientés vers
le contrôle » qui ont tendance à ressentir les contextes sociaux
comme exerçant un contrôle et, par conséquent, à être animés par
une motivation « contrôlée ». La motivation dépend donc à la
fois du contexte (dans quelle mesure il encourage la compétence,
l’autonomie et la sociabilité) et des caractéristiques individuelles.
Il existe quelques points communs entre ces caractéristiques
et les « schémas de compréhension » de Jessop et Penny (1998)
qui s’appuient sur l’analyse des impressions qu’ont les enseignants
du primaire en Gambie et en Afrique du Sud. Ils ont constaté que
certains enseignants étaient plus enclins à concevoir l’enseignement
comme un processus technique et plus sensible aux incitations
extrinsèques, tandis que d’autres voyaient plutôt l’éducation comme
une activité morale et étaient motivés principalement par le fait
d’avoir de bonnes relations avec les élèves. Ils ont qualifié le premier
schéma d’« instrumental » et le second de « relationnel ».

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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Conclusion
Dans les études sur la motivation des enseignants des pays en
développement, les possibilités de développement professionnel
sont citées comme étant l’une de leurs préoccupations majeures.
Plusieurs d’entre eux le font par désir de développer leurs
compétences et de s’améliorer dans leur pratique professionnelle
plus que seulement pour gagner davantage d’argent. Les enseignants
sont également motivés par l’apprentissage des élèves, beaucoup
choisissant cette profession par désir de travailler avec des jeunes.
Cela dit, comme nous l’avons expliqué dans le chapitre précédent,
beaucoup d’enseignants sont démotivés. Et cette démotivation
peut, faute de responsabilité de la part des enseignants quant au
résultat de leur travail, se traduire par une absence d’effort. Les
études ne permettent pas vraiment de dire si les enseignants aux
besoins de compétence, d’autonomie et de socialisation comblés
peuvent être motivés de façon autonome quand par ailleurs leurs
besoins élémentaires pour vivre ne le sont pas. Si la motivation
autonome est possible malgré de mauvaises conditions de vie, les
États confrontés à des contraintes financières pourraient prendre
des mesures pour renforcer la motivation des enseignants sans
être obligés d’investir massivement dans les salaires. Dans le
cas contraire, aucun changement de la structure de carrière ne
permettra d’améliorer la situation tant que les salaires n’auront
pas augmenté pour combler les besoins élémentaires. Ce domaine
mériterait de plus amples recherches.
Il est important, pour le bien-être des enseignants, leur
persévérance, leur satisfaction au travail et la qualité de leur
enseignement (résolution des problèmes et créativité), qu’ils soient
autant que possible motivés de façon autonome, plutôt que par
des incitations extrinsèques. Cela suppose que les carrières soient
structurées de sorte que les enseignants puissent développer leurs
compétences, être autonomes dans la conduite de leur carrière et
travailler en collaboration et avec le soutien de leurs collègues dans
un contexte de sociabilité. Une structure de carrière instaurant une
compétition entre les enseignants ne sera donc d’aucune aide, ce qui
n’est pas le cas d’une structure où les ressources sont partagées et
où le mentorat est la règle. Deci, Koestner et Ryan (1999) affirment
également que la mise en place d’incitations extrinsèques, par
50
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Fondements psychologiques de la motivation des enseignants

exemple un salaire lié à la performance, peut saper toute motivation


autonome chez les enseignants.
Quoi qu’il en soit, si l’on en croit les études sur les différences
individuelles (et le sens commun), certains enseignants ne seront
jamais motivés de façon autonome, en particulier s’ils ont choisi
ce métier par défaut. Par conséquent, une structure de carrière
bien conçue doit encourager la motivation autonome autant que
possible, mais comporter également des incitations extrinsèques
afin de motiver les enseignants « orientés vers le contrôle » sans
nuire à la motivation autonome des autres. Il faut trouver le juste
équilibre entre encourager la motivation autonome des enseignants
et les rendre comptables de la qualité de leur enseignement. Divers
programmes ont été mis en œuvre dans différents pays pour renforcer
la motivation des enseignants. Certains réussissent à trouver cet
équilibre, d’autres non. Les chapitres qui suivent passent en revue
différents types d’organisation des carrières et leurs résultats quand
les données sont disponibles.
La psychologie de la motivation a également des implications
dans le recrutement des enseignants. D’après les travaux de
Herzberg, les individus sont motivés par des besoins d’ordre
supérieur, comme le besoin de responsabilité, de développement
personnel et de reconnaissance. Actuellement, la structure de
carrière des pays pratiquant la grille salariale unique ne porte pas les
candidats potentiels à croire que ces besoins seront satisfaits. Une
structure de carrière comportant une exigence d’amélioration et la
reconnaissance éventuelle via plusieurs échelons de carrière pourrait
accroître l’attractivité de la profession.
Le chapitre suivant s’intéresse aux approches qui tentent
d’induire certains comportements chez les enseignants par le biais
d’incitations extrinsèques.

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Chapitre 3
Approches fondées sur les incitations

Exercer son métier


Remédier aux problèmes rencontrés pour recruter des enseignants,
les attirer dans les régions peu attractives ou améliorer leur assiduité
est un enjeu majeur pour bien des États. Certains d’entre eux ont mis
en œuvre des programmes destinés à récompenser les enseignants
pour des comportements spécifiques tels que travailler en zone rurale,
acquérir des qualifications et, avant tout, embrasser la profession.
Inciter à devenir enseignant
Quelques pays proposent de financer les diplômes universitaires
d’enseignement afin d’encourager davantage d’étudiants à choisir ce
métier. C’est le cas de l’État de Victoria, en Australie. L’efficacité de
cette mesure est limitée car beaucoup d’étudiants passent le diplôme
sans pour autant entamer une carrière d’enseignant (Sclafani, 2009).
Le Mississippi, l’Oklahoma, Singapour, et le Chili, entre autres,
ont réglé ce problème en accordant la gratuité de la formation
universitaire ou des réductions des droits de scolarité annuels contre
l’obligation, pour les diplômés, d’assurer un certain nombre d’années
d’enseignement. Sinon, ils sont généralement tenus de rembourser
le coût de leurs études universitaires.
Incitations à travailler en zone rurale
Selon Bennell, qui a travaillé sur la question des enseignants en
Afrique subsaharienne et en Asie (2004), « La faible proportion
d’enseignants qualifiés et expérimentés exerçant en zone rurale est
l’un des principaux obstacles à la réalisation de l’EPT et à l’obtention
de résultats d’apprentissage corrects dans la plupart des pays en
développement à faible revenu ». C’est également la conclusion
que tirent Bennell et Akyeampong (2007) de leurs études de cas
en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud : toutes les régions
concernées citent « de meilleures incitations pour les enseignants
ruraux » comme priorité absolue pour remédier au manque de
motivation des enseignants. Les enseignants rechignent à travailler
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Approches fondées sur les incitations

en zone rurale en partie à cause des conditions de vie. Au Ghana par


exemple, les zones rurales n’ont généralement ni routes correctes, ni
électricité, ni eau potable, ni infrastructures sanitaires, ni logements
décents et très peu de nourriture à acheter (Cobbold, 2006).
La plupart des pays accordent diverses indemnités aux
enseignants qui travaillent en zone rurale. Mais dans certains,
comme le Nigéria, ces incitations n’existent que sur le papier car
l’argent est rarement versé (Adelabu, 2005). Au Kenya, la prime de
pénibilité de 20 % en sus du salaire des enseignants ne suffit pas à
compenser les difficultés rencontrées dans ces zones (Hyde, Muito
et Muito, 2005). En Bolivie, les enseignants reçoivent eux aussi une
prime de 20 % pour travailler dans des régions peu accessibles, mais
cela n’empêche pas d’avoir deux fois plus de risque en milieu rural
qu’en milieu urbain de trouver des enseignants n’ayant jamais achevé
leur cursus (Vegas, 2005).
Incitations à l’assiduité
Les programmes qui incitent les enseignants à être assidus ont
été plus souvent conçus et testés par des chercheurs et des ONG
qu’étudiés par les États à l’échelle nationale. D’après les données
disponibles, leur succès est mitigé.
Kremer, Glewwe, Chen et Moulin (2001, cités dans Bruns et
al., 2011) ont évalué un programme destiné aux établissements
préscolaires kenyans qui octroyait aux enseignants une prime en
fonction de leur degré d’assiduité pouvant atteindre 85 % de leur
salaire. Or, ils ont constaté que ce programme n’avait produit
aucun effet sur l’assiduité des enseignants, ni sur les scores des
élèves aux tests, ni sur la pédagogie. L’évaluation a en effet montré
que les chefs d’établissement, chargés d’accorder ces primes aux
enseignants, leur versaient régulièrement l’intégralité de ces
primes alors que l’absentéisme ne diminuait pas.
En revanche, Duflo, Hanna et Ryan (2007, cités dans Bruns
et al., 2011) ont évalué un programme mis en place dans l’État du
Rajasthan, en Inde, où le contrôle de l’assiduité est assuré par des
caméras avec fonctions d’heures et de date inviolables, surveillées
à distance par des ONG. Le salaire des enseignants est fonction de
leur assiduité. Ils perçoivent une prime par journée de présence
au-delà du minimum obligatoire de 20 jours par mois et sont
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

pénalisés pour chaque jour d’absence en dessous de ce minimum.


Ce programme a eu pour effet de réduire de moitié l’absentéisme
des enseignants et d’améliorer les scores de leurs élèves par rapport
à ceux des écoles de référence.
Qualifications incitatives
Le problème des qualifications incitatives a été décrit au chapitre 1
comme étant un problème majeur, tout autant que la grille salariale
unique. Les qualifications n’améliorent pas toujours la performance,
c’est pourquoi inciter les enseignants à acquérir des qualifications en
leur faisant miroiter des diplômes donnant droit à des salaires plus
élevés peut être une façon inefficace d’utiliser des budgets par ailleurs
limités. Cependant, ce n’est pas toujours le cas : tout dépend de la
qualité de la qualification et de sa subordination à une évaluation en
bonne et due forme.
De nombreux gouvernements, notamment en Angleterre, au
Pays de Galles, en République de Corée, en Israël, en Suisse, en Irlande
du Nord et dans certains États des États-Unis d’Amérique, obligent
les enseignants à suivre des cours de développement professionnel
pour renouveler leur certification10 ou obtenir une promotion (nous
aborderons ce point plus loin) (OCDE, 2013). Dans la province de
l’Ontario, au Canada, les enseignants peuvent acquérir de nouvelles
qualifications pour accéder à un niveau de certification supérieur. Ce
niveau sert de base pour déterminer leur salaire. Ces qualifications
ne sont valables que si elles sont acquises auprès d’un organisme
agréé par l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario,
qui impose des règles strictes pour la conduite des cours, s’appuyant
sur des éléments d’appréciation de ce qu’est un développement
professionnel efficace.
Les qualifications n’étant pas toujours synonymes de meilleure
performance des enseignants et de meilleurs résultats des élèves,
certains États et pays ont donc tenté d’améliorer la performance
des enseignants en octroyant des primes en fonction des résultats
des élèves.

10. Le renouvellement de la certification est un processus qui consiste à évaluer les enseignants
pour s’assurer qu’ils continuent d’exercer leur métier conformément au standard requis pour
être un enseignant certifié.

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Approches fondées sur les incitations

Être payé au résultat


Le type le plus courant de réforme mis en place pour améliorer la
motivation des enseignants est ce qu’on appelle la « rémunération au
mérite » ou « rémunération liée à la performance ». Ces expressions
correspondent à un large éventail d’approches, comportant
notamment tout programme dans lequel l’évaluation peut avoir,
même indirectement, une incidence sur la rémunération. Par souci de
clarté, l’expression « rémunération liée à la performance » désigne
dans cette étude les programmes qui accordent des compensations
financières ponctuelles aux enseignants dont la performance
est conforme aux attentes, mesurée soit par les notes des élèves à
des épreuves normalisées, soit par une évaluation plus globale
de l’enseignant. L’expression « rémunération aux résultats » est
employée pour les programmes qui basent les primes exclusivement
sur les résultats des élèves. La plupart des réformes de ce genre
ont été menées dans des pays développés, en particulier aux États-
Unis d’Amérique. Les données qui les étayent sont mitigées : seules
quelques réformes ont un impact sur les résultats des élèves et elles
ont des effets critiquables sur le comportement des enseignants. Dans
un premier temps, on passera en revue les études sur la rémunération
liée à la performance dans le secteur public. Puis on examinera les
études sur la rémunération au mérite pour les enseignants.
La rémunération au résultat dans le secteur public
en général…
En raison du vif intérêt et des controverses que cette question suscite,
plusieurs analyses empiriques sur l’efficacité des programmes de
« rémunération au mérite » dans le secteur public ont été effectuées.
Déjà, en 1986, Perry avait analysé les études sur la rémunération
conditionnelle des responsables publics et n’avait pu trouver une
seule étude démontrant les effets positifs de cette approche. Le
gouvernement américain a demandé au National Research Council
d’analyser les études consacrées aux effets de la rémunération sur
la performance dans les secteurs publics et privés. La conclusion
globale était qu’il existait un gouffre entre la promesse et la réalité
des programmes de rémunération incitative (Milkovich et Wigdor,
1991). Certes, certains de ces programmes parvenaient à motiver
les salariés, mais c’était surtout vrai pour des emplois simples et

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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

structurés, et dans des contextes où des objectifs de performance


raisonnables pouvaient être fixés.
En 1993, Kellough et Lu ont produit une vaste synthèse
analytique de 14 études empiriques sur la rémunération au mérite.
Elle englobait les responsables du secteur public, les administrateurs
d’écoles publiques et les employés des collectivités locales. Ils en ont
conclu que « globalement, les systèmes de rémunération au mérite
ont peu d’impact positif sur la performance du personnel et des
organisations » (48). Plus récemment, Perry, Engbers et Jun (2009)
ont constitué une base de données des recherches sur la rémunération
liée à la performance regroupant 57 études. Ils voulaient voir si les
études menées après 1993 révélaient des effets de ces réformes plus
prometteurs. Ils en ont conclu que, comme pour les recherches
effectuées avant 1993, dans le secteur public la rémunération liée
à la performance « ne réussit jamais à tenir ses promesses » (Perry,
Engbers et Jun, 2009 : 7).
… et chez les enseignants en particulier
Il existe des travaux de recherche sur les effets de la rémunération aux
résultats plus particulièrement axés sur les enseignants. L’étude la plus
récente et la plus exhaustive concerne les programmes américains
attribuant aux enseignants des primes en fonction des résultats
des élèves. Elle est actuellement menée par le National Centre on
Performance Incentives (NCPI) et évalue les programmes qui
accordent des gratifications financières à des enseignants ou groupes
d’enseignants. Elle constate invariablement qu’il y a peu ou pas de
différence entre les résultats des élèves des écoles qui appliquent la
rémunération aux résultats et celles qui ne le font pas.
Par exemple, une expérience pilote menée sur trois ans à
Nashville accordait des primes importantes (jusqu’à 400 % du salaire
mensuel) aux professeurs de mathématiques en fonction des résultats
des élèves aux tests. À l’issue de l’expérience, aucune différence n’a été
constatée entre les scores des élèves dont les enseignants pouvaient
prétendre aux primes et ceux des écoles témoins dont les enseignants
n’étaient pas concernés (Springer et al., 2010). Les auteurs d’un autre
rapport du NCPI sur un programme de rémunération en fonction des
résultats récompensant cette fois des groupes d’enseignants affirment
que de mêmes raisons pourraient expliquer l’échec du projet :
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Approches fondées sur les incitations

Les gratifications financières viennent en supplément du salaire


normal, la performance étant mesurée indépendamment des
évaluations standards obligatoires organisées par les districts (sauf
dans l’un des programmes évalués), et aucun développement
professionnel n’est spécifiquement lié à ces programmes
(Springer et al., 2012 : 21).
Yuan et al. (2013) ont passé au crible les sondages réalisés
auprès d’enseignants dans trois des études évaluées par le NCPI
et concluent que, pour la plupart des enseignants concernés, les
programmes d’incitation ne sont pas motivants et n’ont pas eu
d’incidence sur leur enseignement, leur niveau de stress ou le
nombre d’heures consacrées à leur travail.
En revanche, d’après l’évaluation par Lavy (2004) d’un
programme israélien de primes individuelles pour les enseignants,
les scores des élèves dont les enseignants participaient au programme
avaient progressé par rapport à ceux du groupe témoin. Dans ce
programme, les enseignants étaient classés en fonction des scores de
valeur ajoutée11 de leurs élèves, et les enseignants les plus performants
étaient récompensés par de substantielles primes qui pouvaient
atteindre 30 % de leur salaire de base. Pour étudier le comportement
des enseignants, Lavy a effectué un sondage téléphonique directement
auprès d’eux. Les enseignants participant au programme ont déclaré
consacrer plus de temps à l’enseignement en dehors des heures
d’école, à donner des cours après l’école. Ils étaient plus enclins à
suivre l’évolution de leurs élèves en fonction de leurs aptitudes. Les
professeurs d’anglais participant au programme avaient davantage
tendance que ceux qui n’y participaient pas à concentrer leurs efforts
sur les élèves rencontrant des difficultés, tandis que les professeurs de
mathématiques se concentraient plus sur les élèves moyens et bons.
Un seul programme de rémunération aux résultats appliqué
individuellement aux enseignants a été mis en œuvre et évalué
dans un contexte de pays en développement. Il y a par ailleurs eu
différents programmes récompensant toute une école (par exemple
Glewwe, Ilias, et Kremer, 2003). Muralidharan et Sundararaman
(2009) ont évalué un programme portant sur 100 écoles de l’Andhra
Pradesh, un État du sud de l’Inde. Des primes étaient distribuées à
11. La valeur ajoutée est une mesure qui tient compte des notes antérieures des élèves et calcule
l’impact qu’a eu l’enseignant sur les scores finaux par rapport aux scores initiaux.

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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

tout enseignant qui, par rapport à une valeur de référence, parvenait


à améliorer de 5 % ou plus les notes moyennes des élèves de leur
classe aux épreuves de mathématiques et de langue. Tout nouveau
progrès ultérieur était récompensé de façon progressive, la prime
moyenne s’établissant finalement à 35 % du salaire mensuel de
l’enseignant. Les scores se sont nettement améliorés dans les écoles
appliquant le programme par rapport aux écoles témoins. Par contre,
l’étude du changement de comportement des enseignants a produit
des résultats mitigés. Ces changements ont été étudiés dans le cadre
d’inspections et d’entretiens avec les enseignants. Si ces derniers
ont déclaré avoir donné plus de devoirs à la maison et en classe,
assuré des cours supplémentaires, fait faire des exercices pratiques et
accordé plus d’attention aux enfants en difficulté, aucune différence
dans ces domaines n’a été notée lors des inspections. Pour les
auteurs, ce serait dû au fait que ces comportements interviennent
essentiellement en dehors du temps de classe.
Selon Glewwe, Holla et Kremer (2009), les efforts que
les enseignants peuvent faire sont de deux sortes : un « effort
d’enseignement à proprement parler » qui encourage l’apprentissage
à long terme, et un effort dit « de signalement » qui améliore les
scores à court terme mais a peu d’effet sur l’apprentissage à long
terme. On peut, sans pousser les choses trop loin, faire un lien entre
ces différents types d’effort et les concepts de motivation autonome
et de motivation contrôlée de la littérature psychologique (Gagné
et Deci, 2005). Glewwe, Holla et Kremer affirment qu’il y a trois
façons de distinguer ces deux types d’effort lors de l’évaluation des
programmes d’incitation. Premièrement, l’observation directe du
comportement des enseignants peut fournir des indices. Certaines
attitudes comme une plus grande assiduité ou un changement de
méthode pédagogique, favorisent généralement un apprentissage
à long terme tandis que d’autres, comme une préparation spéciale
aux examens, sont davantage les marqueurs d’un comportement de
« signalement ». Deuxièmement, le temps que durent les effets sur
l’apprentissage une fois le programme achevé donne des indices sur
le type d’effort engagé en amont par les enseignants. Troisièmement,
la façon dont les scores aux épreuves progressent peut être une
indication : s’ils s’améliorent pour les disciplines qui sont plus
faciles à mémoriser ou les genres d’épreuve qui sont plus faciles à
passer, c’est qu’on est face à un effort de signalement. De même, si
58
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Approches fondées sur les incitations

seuls les résultats dans les disciplines directement concernées par le


programme d’incitation s’améliorent, il s’agit également d’un effort
de signalement.
Les signes de changement de comportement des enseignants
du programme de l’Andhra Pradesh sont brouillés par les résultats
contraires issus des observations et des entretiens d’autoévaluation.
Muralidharan et Sundararaman (2009) pensent que les observateurs
ne se sont peut-être pas rendu compte des changements de
comportement des enseignants lors de leurs visites, alors qu’ils
ont constaté que les élèves dont les enseignants avaient déclaré
donner des cours et des devoirs supplémentaires ainsi que des
exercices d’application avaient des scores plus élevés aux épreuves.
Mais Glewwe, Holla et Kremer (2009) invitent à une certaine
prudence. Dans une évaluation similaire de la rémunération liée à
la performance pour des groupes d’enseignants kenyans (2003), ils
ont observé que les enseignants des écoles visées par le programme
avaient déclaré donner plus de devoirs tandis que les élèves avaient
quant à eux déclaré qu’il y avait plus de sessions de préparation, mais
pas plus de devoirs. La multiplication des cours de préparation et
des exercices d’application, si toutefois elle correspond à la réalité,
est un indice d’approche de signalement. Le rapport de Lavy (2004)
sur les changements de comportement des enseignants en Israël doit
également être interprété avec certaines réserves, car il est possible
que les enseignants exagèrent leurs changements de comportement.
Aucune suite n’ayant été donnée aux résultats du programme
de l’Andhra Pradesh sur l’apprentissage à long terme, on ne peut dire
avec certitude si le programme a permis une amélioration constante
de l’apprentissage ou seulement un progrès à court terme. Les scores
dans les disciplines non incluses dans le programme ont en fait
elles aussi progressé, mais dans une moindre mesure. Cela pourrait
signifier qu’il y a eu une répercussion positive des mathématiques
et de la langue (Muralidharan et Sundararaman, 2009), ou que
les élèves ont amélioré leur technique d’examen, l’impact de cette
amélioration rejaillissant sur toutes les disciplines.
Critique des programmes de rémunération aux résultats
En 1986, 29 États des États-Unis d’Amérique avaient lancé une forme
ou une autre de programme de rémunération au mérite. Or, au cours
59
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

des 20 ans qui ont suivi, la plupart de ces programmes ont perdu une
partie de leur substance ou se sont arrêtés (Dee et Keys, 2005). Il
semblerait qu’il y ait des problèmes inhérents à cette approche, dont
certains ont été abordés dans la littérature sur la rémunération liée
à la performance appliquée aux enseignants (Clotfelter et al., 2008 ;
Cullen et Reback, 2006 ; Deere et Strayer, 2001 ; Figlio et Getzler,
2002 ; Glewwe, Holla et Kremer, 2009 ; Jacob, 2002 ; Koretz, 2002 ;
Murnane et Cohen, 1986 ; Podgursky et Springer, 2007).
La critique la plus évidente de la rémunération ou des primes
liées aux résultats des élèves est que les enseignants dont les élèves sont
moins doués sont désavantagés : les scores relativement bas de ces
élèves empêchent leurs enseignants de bénéficier d’une gratification
quand ils réussissent à les faire progresser. La plupart des systèmes
ont tenté de remédier à ce problème en liant la rémunération à
l’amélioration des scores plutôt qu’à des valeurs absolues de score,
et en tenant compte des caractéristiques du contexte, qui peuvent
rendre l’enseignement plus difficile (Podgursky et Springer, 2007).
Néanmoins, cette approche ne prend pas toujours suffisamment
en considération les difficultés relatives rencontrées quand il est
question d’améliorer les résultats de certains élèves. En Caroline du
Nord, la mise en place d’un système de primes en fonction du niveau
des écoles a provoqué chez les enseignants une vague d’abandon des
écoles accueillant des élèves défavorisés (Clotfelter et al., 2008).
La fiabilité et la solidité statistiques de ces estimations de la valeur
ajoutée sont elles aussi des sujets de préoccupation (Podgursky et
Springer, 2007).
De nombreux autres facteurs difficiles à contrôler influent sur les
résultats des élèves. L’environnement familial, l’éducation parentale et
les caractéristiques de chaque élève ont une incidence sur les scores
aux épreuves et restent des facteurs sur lesquels les enseignants n’ont
aucun pouvoir d’agir. Une autre difficulté propre à la rémunération
liée à la performance individuelle est que les élèves ont souvent des
enseignants différents selon les disciplines, ce qui peut jouer sur
leurs résultats dans d’autres disciplines (motivation personnelle
ou impact d’une meilleure maîtrise de l’anglais sur les scores en
histoire, par exemple). Enfin, même si les scores en début d’année
sont pris en compte, les enseignants précédents peuvent avoir un
effet sur la performance des élèves (Koretz, 2002). Tous ces facteurs
60
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Approches fondées sur les incitations

supplémentaires ont une incidence sur la validité de l’utilisation des


résultats des écoliers pour mesurer la performance des enseignants.
Au-delà des difficultés que pose l’utilisation des scores aux
épreuves pour mesurer la qualité ou les efforts des enseignants, la
rémunération liée à la performance a été critiquée pour ses effets sur
leur comportement. Murnane et Cohen (1986) font valoir que la
rémunération liée à la performance est particulièrement préjudiciable
dans le secteur de l’éducation car elle crée une compétition entre
les enseignants, décourageant coopération et collaboration. Pour
Murnane et Cohen (1986), des primes en fonction du niveau du
groupe permettraient d’éviter ce problème. Cependant d’autres (par
exemple Prendergast, 1999) critiquent cette approche, qui peut
amener certains enseignants à resquiller et à toucher des primes en
bénéficiant des efforts des autres.
Un autre sujet de préoccupation à propos de la réponse
comportementale des enseignants à la rémunération aux résultats est
la critique évoquée plus haut et formulée par Glewwe, Holla et Kremer
(2009), qui font une distinction entre différents types d’efforts.
Cette critique de la rémunération aux résultats dans un contexte
multitâches (Podgursky et Springer, 2007) a trait au fait que l’on
attend beaucoup plus du travail de l’enseignant qu’une simple
amélioration des résultats des élèves aux tests. Si ces résultats sont
la seule mesure utilisée pour déterminer le montant des primes, les
enseignants risquent de se focaliser sur cet aspect au détriment des
autres objectifs de l’enseignement. La pratique de « l’entraînement
aux tests » est une illustration de ce rétrécissement de la finalité de
leur métier : les enseignants se focalisent de façon excessive sur les
examens blancs ou le contenu de tests spécifiques, comme le suggère
la multiplication des cours après l’école dans les programmes de
rémunération aux résultats du Kenya (Glewwe, Ilias et Kremer, 2003),
d’Israël (Lavy, 2004) et de l’Inde (Muralidharan et Sundararaman,
2009). Cela peut aussi inciter les enseignants à tricher en falsifiant
les scores aux tests, en aidant les élèves lors des examens ( Jacob et
Levitt, 2003 ; Koretz et al., 1996) ou en excluant des tests les élèves
les plus faibles pour des raisons stratégiques (Deere et Strayer, 2001 ;
Figlio et Getzler, 2002 ; Cullen et Reback, 2006).
61
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Plus fondamentalement, les programmes de rémunération aux


résultats reposent uniquement sur des incitations extrinsèques qui, selon
les psychologues (et, plus récemment, des économistes tels que Bénabou
et Tirole, 2003), favorisent la motivation extrinsèque ou « contrôlée »,
au détriment de la motivation intrinsèque ou « autonome ». C’est dû
au fait que ces incitations traitent généralement les enseignants comme
des travailleurs qu’il faut amener à produire certains résultats pour
l’organisation plutôt que comme des partenaires désireux d’atteindre
les objectifs de l’organisation. Cette sape de la motivation intrinsèque
ou autonome est à l’origine, dans d’autres domaines, d’une baisse de
la persévérance, du bien-être, de la capacité de régler les problèmes
et de la créativité au travail (Gagné et Deci, 2005). Cela dit, il y a une
nuance dans la théorie psychologique : Ryan, Mims, et Koestner (1983)
ont constaté que, lorsqu’une gratification est subordonnée à une
performance exigeante, elle peut être considérée comme une déclaration
de compétence, ce qui nourrit la motivation intrinsèque et peut donc
contrebalancer en partie les effets négatifs du sentiment d’être contrôlé.
L’équilibre entre les deux dépend des relations entre les individus et du
fait que l’enseignant se sente ou non contrôlé dans son travail quotidien.
Malheureusement, parmi les programmes de rémunération liée à la
performance évalués, aucun n’a abordé la question de leurs effets à long
terme sur la motivation ou le comportement des enseignants, la capacité
à régler les problèmes ou la créativité de la pédagogie. On ne peut donc
savoir si cet effet se manifeste chez les enseignants.
On constate que les réformes de la rémunération aux résultats
qui ont permis d’améliorer les résultats des élèves attribuent des
primes substantielles aux enseignants : en moyenne 35 % du salaire
de base dans le programme indien (Muralidharan et Sundararaman,
2009) et 30 % dans celui d’Israël, bien que des primes élevées ne
soient pas une garantie d’amélioration, comme l’a montré l’exemple
de la prime de 400 % offerte à Nashville. Si, comme le suggèrent Ryan
et Deci (2000), créer un environnement favorisant l’autonomie, la
compétence et la sociabilité aide à motiver le personnel, cet argent
peut être utilisé de façon à inciter les enseignants non seulement à
redoubler d’efforts (que ce soit sous la forme d’efforts de signalement
ou d’efforts authentiques), mais aussi à s’améliorer, en leur offrant
par exemple un développement professionnel de qualité.
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Approches fondées sur les incitations

Bennell et Akyeampong (2007) font une distinction entre


motivation d’intention et motivation de capacité. Dans certains
contextes, les initiatives de rémunération aux résultats semblent
amener les enseignants à redoubler d’efforts, sans que cela produise
nécessairement une amélioration substantielle des résultats des
élèves faute, pour l’enseignant, de savoir comment améliorer ses
méthodes d’enseignement. Dans ce cas-là, il peut y avoir « intention
de faire » sans « capacité de faire ».
Les initiatives de rémunération aux résultats utilisent uniquement
les scores des élèves pour juger de l’efficacité des enseignants et
déterminer leur salaire. Le chapitre suivant décrit l’utilisation
possible de mesures plus générales de performance des enseignants,
notamment les programmes qui continuent à encourager une
meilleure performance par l’attribution de primes et les programmes
qui vont au-delà du lien direct entre rémunération et performance.

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Chapitre 4
L’évaluation sommative des enseignants

Méthodes d’évaluation des enseignants


Certains des problèmes posés par les programmes de rémunération
aux résultats décrits dans le chapitre précédent sont liés à l’utilisation
des résultats des élèves comme évaluation indirecte de la qualité des
enseignants. Un autre problème est que les programmes de rémunération
aux résultats ne donnent pas toujours de recommandations sur la façon
d’améliorer l’enseignement. Ainsi, certains enseignants désireux de
s’améliorer ne savent pas comment le faire. Dans ce chapitre, nous
examinerons les approches qui permettent de surmonter ces problèmes en
tentant d’évaluer directement la qualité de l’enseignement et en proposant
des systèmes au sein desquels les enseignants peuvent identifier leurs
besoins de perfectionnement.
Les autres méthodes d’évaluation des enseignants, en dehors de
l’évaluation fondée sur les résultats des élèves dont il a été question
au chapitre 3, sont les inspections, les entretiens, les tests, les dossiers,
l’appréciation par les pairs ou l’administration, ainsi que les sondages
auprès des parents et des élèves.
Inspections
L’inspection est une méthode courante d’évaluation des enseignants.
Des enseignants expérimentés ou des évaluateurs externes assistent à un
cours (souvent, une grille d’évaluation est utilisée pour juger le cours)
et relèvent les points forts et les points faibles de l’enseignement de la
personne. C’est l’une des méthodes d’évaluation les plus employées
(OCDE, 2013). Ces inspections sont parfois effectuées par les chefs
d’établissement, parfois par des inspecteurs externes. C’est le cas à
Zurich, où une équipe de représentants du conseil d’établissement
formés à cet effet évalue le bien-fondé de la promotion de l’enseignant.
Entretiens avec les enseignants
Dans la plupart des cas, les entretiens avec les enseignants sont menés
par un membre de l’équipe de direction. En amont de cette évaluation,
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L’évaluation sommative des enseignants

l’enseignant effectue parfois une auto-évaluation et définit ses objectifs


de perfectionnement. Lors de l’entretien, la discussion porte sur les
progrès de l’enseignant par rapport à ses objectifs. Ces entretiens
font partie du processus d’évaluation en Allemagne, en Australie,
en Belgique, au Canada, au Chili, aux États-Unis d’Amérique, en
Finlande, en France, au Ghana, en Israël, au Japon, au Luxembourg,
en Nouvelle-Zélande, en République tchèque, au Royaume-Uni, à
Singapour et en Slovaquie (OCDE, 2013).
Cette méthode peut toutefois susciter la méfiance des
enseignants, si les entretiens sont le seul mode d’évaluation ou si
les critères de succès manquent de clarté et de transparence. Dans
le programme australien Advanced Skills Teacher (AST)12, la
définition des critères de promotion a été confiée aux collectivités
locales, lesquelles ne disposaient pas de l’expertise ou des ressources
nécessaires pour définir des normes et systèmes fiables d’évaluation.
Ingvarson (2013) rapporte que les décisions de promotion
se fondaient sur un entretien avec un jury composé du chef
d’établissement, d’un collègue, d’un représentant des collectivités
locales et d’un enseignant d’une autre école. Cet entretien étant
la seule méthode d’évaluation sans qu’il soit envisagé d’évaluer
l’enseignement à proprement parler, il était difficile aux jurys
d’accorder le statut AST sans risquer d’être taxés de partialité. C’est
pourquoi ils accordaient une promotion à presque tous les candidats
promouvables, ôtant toute crédibilité au processus comme au statut
AST (Ingvarson, 2013).
Tests pour les enseignants
Dans le programme chilien de prix d’excellence pédagogique,
les enseignants doivent passer un test écrit de connaissance de la
pédagogie et des disciplines qu’ils enseignent (Vegas, 2005). Cette
forme d’évaluation des enseignants est plus courante dans les pays
d’Amérique latine qu’ailleurs, bien que de nombreux pays obligent
les futurs enseignants à réussir un examen pour enseigner. Le Brésil,
la Colombie, l’Équateur, le Mexique et le Pérou font régulièrement
passer des tests d’évaluation à leurs enseignants (Vegas, 2005), tandis

12. L’AST existe dans d’autres pays, sous des formes différentes. Ce statut particulier consacre les
excellents enseignants en fonction de certaines normes. Ceux-ci sont amenés à aider leurs
collègues à améliorer leurs pratiques.

65
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

que le Luxembourg, la Slovénie et la Suède utilisent les tests dans le


cadre d’un processus de probation ou d’agrément des enseignants
(OCDE, 2005). Au Japon, les enseignants doivent passer un test de
connaissances pédagogiques pour se porter candidats à un poste de
chef d’établissement. Comme nous l’avons indiqué au chapitre 1,
Wilson, Floden, et Ferrini-Mundy (2002) en tirent la conclusion
qu’il existe un seuil minimum de connaissance de la discipline
indispensable pour bien enseigner, et selon Goldhaber (2007), il
existe une corrélation entre certains tests préalables à l’autorisation
d’exercer et les résultats des élèves. Néanmoins, il ne faut pas que
ce soit la seule façon de déterminer la qualité des enseignants,
Goldhaber (2007) constatant par ailleurs que certains enseignants
peu efficaces passent ces tests avec succès tandis que d’autres, plus
efficaces, y obtiennent de mauvais résultats.
Dossiers ou rapports
La seconde partie de l’évaluation pour obtenir le prix chilien de
l’excellence pédagogique est la soumission d’un dossier (Vegas, 2005).
De nombreux pays basent les évaluations des enseignants sur un
dossier qui peut inclure des plans de cours et du matériel pédagogique
élaboré par l’enseignant, des questionnaires d’auto-évaluation, des
échantillons de travaux d’élèves, des commentaires sur ces travaux
et des fiches de réflexion. Les points abordés dans le dossier sont
choisis en fonction des critères par rapport auxquels les enseignants
sont évalués, par exemple les normes applicables aux enseignants
nouvellement diplômés. En Arizona (États-Unis d’Amérique), les
dossiers sont une composante majeure du processus d’évaluation des
enseignants (Driscoll, 2015).
L’un des inconvénients des dossiers comme méthode d’évaluation
des enseignants est qu’il faut du temps pour les constituer. Selon le
rapport de l’OCDE Teachers for the 21st Century (2013), les systèmes
devraient encourager les enseignants à élaborer des dossiers basés sur
le travail déjà en cours. Une alternative adoptée à Zurich consiste à
demander aux enseignants de rédiger un rapport sur leurs pratiques
pédagogiques et de le soumettre au jury dans le cadre de leur évaluation
(OCDE, 2013).

66
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L’évaluation sommative des enseignants

Sondages auprès des parents ou des élèves


Dans les pays de l’OCDE, les sondages auprès des parents et des élèves
sont rarement utilisés pour évaluer les enseignants. On note cependant
quelques exceptions. Ainsi, le Mexique procède à des sondages auprès
des élèves, tandis que le Canada, la Nouvelle-Zélande, la Pologne et la
Slovénie font des sondages auprès des parents.
Selon Jacob et Lefgren (2005), les parents ont souvent tendance
à mieux noter les enseignants qui défendent le principe de satisfaction
des élèves que ceux qui permettent seulement aux élèves d’obtenir
de bonnes notes aux tests. La prise en compte de cette dimension
pourrait donc être un complément intéressant pour les approches
qui veulent se faire une idée de l’efficacité des enseignants plus
globale que celle fondée uniquement sur les notes des élèves.
Toutefois, certains parents s’investissent très peu dans l’école, ce
qui a conduit Tekleselassie (2005) à mettre en doute la validité des
sondages auprès des parents.
Différentes approches de l’évaluation sommative
des enseignants
Pour concevoir une réforme visant à rendre les enseignants comptables
des résultats de leurs élèves13, il faut non seulement choisir les méthodes
d’évaluation des enseignants, mais aussi déterminer la façon dont les
résultats de ces méthodes seront utilisés pour produire un bilan global.
Certains pays optent pour une approche sommative qui attribue des
points aux résultats produits par les différentes méthodes ainsi qu’à
d’autres facteurs. D’autres utilisent les résultats de chaque méthode
pour déterminer si l’enseignant remplit globalement un ensemble de
conditions spécifiques. Il faut également déterminer les primes, les
augmentations de salaire ou les promotions qui seront octroyées en
fonction du résultat de l’évaluation et décider si elles seront accordées
à tout enseignant satisfaisant certains critères, ou uniquement à
ceux qui auront été jugés comparativement les meilleurs. Ces choix
peuvent avoir un impact sur le succès des réformes car ils ont des effets
différents sur les comportements des enseignants.

13. Les réformes de responsabilité sont celles qui rendent les enseignants dans une certaine mesure
comptables de la qualité de leur enseignement.

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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Évaluation sommative
Le programme Carrera Magisterial du Mexique est un exemple
d’évaluation sommative basée sur des points (Vegas, 2005). Des
augmentations de salaire peuvent être accordées aux enseignants sur
la base d’un score total de points représentatifs de leurs qualifications,
de leur développement professionnel, de leur expérience, des
résultats de leurs élèves et d’une évaluation par les pairs. Une formule
est utilisée pour fusionner les points obtenus dans ces domaines
et arriver à un score global plafonné à 100, les résultats des élèves
représentant un cinquième des points attribuables. Ce résultat peut
donner droit à une prime.
Un autre système global a été introduit au Portugal en 2007
(Martins, 2009). Désireux d’abandonner le système de grille salariale
unique, le gouvernement a engagé une réforme qui permettait
aux enseignants de progresser le long d’une échelle salariale via
une évaluation. Cette dernière évaluation reposait sur plusieurs
composantes ayant chacune une pondération différente, notamment
l’opinion des parents, la performance scolaire des élèves, l’assiduité
de l’enseignant, les stages de développement professionnel effectués,
l’accomplissement de fonctions de gestion et la participation à des
ateliers de recherche.
L’un des atouts de cette approche est que le résultat global
est objectif et transparent, du fait qu’il consiste simplement à
additionner des points, bien que les méthodes employées puissent
être subjectives. Il y a donc moins de risque de favoritisme ou de
corruption dans l’attribution des primes, salaires ou promotions.
Mais l’inconvénient de ces approches sommatives est que les
enseignants n’ont pas besoin d’être efficaces dans tous les domaines
pour obtenir une bonne évaluation. Par exemple, un enseignant peut
avoir un score correct à l’évaluation par les pairs avec comme seule
critique un manque d’attention pour les élèves les plus faibles de la
classe. Ce même enseignant peut aussi obtenir un score correct à
l’évaluation par les parents, tout en manifestant le même point faible.
Combinés à la participation au développement professionnel et au
nombre d’années d’enseignement, ces deux scores corrects peuvent
valoir à l’enseignant une promotion sans qu’il fasse le moindre effort
pour corriger son point faible.
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L’évaluation sommative des enseignants

Un autre problème posé par cette approche est qu’elle peut


inciter les enseignants à tenter d’obtenir le score le plus élevé par des
moyens incompatibles avec l’amélioration des résultats des élèves.
Par exemple, dans le cas du Portugal, les résultats des élèves se
sont dégradés après l’introduction de la réforme. L’une des raisons
invoquées par Martins (2009) dans son évaluation de cette politique
est que les enseignants mettaient aux élèves des notes supérieures
à ce qu’ils méritaient afin d’améliorer leur propre score. C’est un
exemple du type de comportement dit de « signalement » identifié
par Glewwe, Holla et Kremer (2009), qui suggère que les enseignants
étaient motivés de façon extrinsèque plutôt qu’animés par le désir
d’améliorer leur pratique pour leur propre développement ou le bien
des élèves.
Évaluation holistique
Il existe une approche plus courante pour déterminer le résultat
d’une évaluation : elle consiste notamment à adopter une vision
plus holistique du processus d’évaluation avec, par exemple, un chef
d’établissement qui examine toutes les données pour vérifier qu’un
enseignant est suffisamment efficace pour mériter une augmentation
de salaire ou une promotion. À Chicago, Jacob et Walsh (2011)
ont noté que les évaluations basées sur des inspections étaient un
reflet fidèle de la qualité des enseignants et un bon indicateur de la
performance des élèves. L’OCDE a par ailleurs constaté que 83 % des
enseignants ayant participé à son enquête TALIS 2013 estimaient
que ce type d’évaluation donnait une image fidèle de leur travail.
Cette approche peut toutefois donner lieu à des abus et dépend en
grande partie de la qualité du chef d’établissement.
Afin d’améliorer la fiabilité des évaluations effectuées par les
chefs d’établissement, certains pays dispensent à ces derniers une
formation dans ce domaine. Mais beaucoup adoptent une approche
plus sophistiquée consistant à élaborer un cadre ou une description
de ce que l’on attend des enseignants, par rapport auquel ou à
laquelle ces derniers seront évalués à des fins de développement
professionnel, d’attribution d’une augmentation de salaire, d’une
promotion ou d’un agrément. Dinham, Ingvarson, et Kleinhenz
(2008) font en effet valoir qu’il est essentiel d’établir une corrélation
entre les évaluations et les normes pédagogiques si l’on veut obtenir
un effet positif sur le système éducatif.
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

C’est l’approche couramment adoptée, notamment en


Allemagne (sauf à Berlin), en Australie, en Belgique, au Brésil,
au Canada, au Chili, en Chine, en France, en Israël, au Japon, aux
Pays-Bas, en Nouvelle-Zélande, au Portugal (uniquement pour
les inspections), en Slovaquie, au Royaume-Uni (à l’exception de
l’Irlande du Nord) et aux États-Unis d’Amérique, où les enseignants
sont tous évalués par rapport à des normes nationales ou régionales,
parfois en plus des cadres définis au niveau local et des objectifs de
développement personnel (OCDE, 2013). En République tchèque
et en Hongrie les enseignants sont évalués par rapport à des critères
internes à l’école, tandis qu’en Estonie et en Slovénie les promotions
sont régies par des règlements nationaux. En Finlande, les enseignants
sont évalués par rapport au contenu et aux objectifs des programmes
scolaires nationaux, ainsi que par rapport aux objectifs définis au
niveau de l’école. En République de Corée, au Luxembourg, au
Mexique, en Pologne et à Singapour, ils sont évalués par rapport
à une description des fonctions générales et professionnelles des
enseignants (OCDE, 2013).
Les normes pédagogiques diffèrent d’un pays à l’autre par
leur qualité et par leur définition de ce qui caractérise un bon
enseignement, cette dernière étant fonction du contexte culturel.
Ces normes sont néanmoins des caractéristiques fondamentales
communes qui relèvent des trois domaines suivants : connaissance
de la discipline, pratique pédagogique et valeurs de l’enseignement
(CEPPE, 2013). Le tableau  4 est extrait d’une étude des normes
pédagogiques dans 11 pays et régions, réalisée par le Centre of Study
for Policies and Practices in Education (CEPPE)14.

14. Le CEPPE est un Centre d’études et de pratiques en matière d’éducation. Il mène une recherche
interdisciplinaire sur les politiques et les pratiques en matière d’éducation en tenant compte de la
pluralité des approches existant dans la société et le milieu universitaire.

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Tableau 4. Contenus pris en compte et privilégiés par les normes pédagogiques dans différents systèmes éducatifs
Aus Qn Vc BC Ch USA USA Cl Tx Ang Mx NZ
NBTPS INSTAC
Connaissance de la discipline
– Connaissance et compréhension du sujet x x x x x x x x x x
(exprimées en termes généraux)
– Connaissance et compréhension du sujet x x x
(spécifiées pour chaque sujet et niveau de scolarité)
Pratique pédagogique
– Connaître les caractéristiques des élèves, y prêter attention et x x x x x x x x x x x
enseigner en conséquence (cultures différentes,
expérience passée, besoins éducatifs, etc.)
– Comprendre comment les élèves apprennent et utiliser ce savoir x x x x x x x x x x
(théories d’apprentissage et de développement)
– Avoir de grandes ambitions pour tous les élèves x x x x x x x x x x
– Savoir enseigner le contenu lié aux disciplines x x x x x x x x x x
– Développer à un haut niveau la réflexion critique x x x x x x x x x x x
et les compétences
– Planifier, appliquer et évaluer l’enseignement et l’apprentissage x x x x x x x x x x x x
– Créer et entretenir un environnement qui encourage x
l’apprentissage
– Accorder de l’importance au rôle des familles dans x x x x x x x x x
l’apprentissage et le développement des élèves
– Promouvoir les valeurs sociales et l’éthique auprès des élèves x x x
– Savoir utiliser les TIC pour l’apprentissage x x x x x x x x x

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– Intégrer les valeurs démocratiques dans x
L’évaluation sommative des enseignants

la pratique de l’enseignement en classe

71
72
USA USA
Aus Qn Vc BC Ch Cl Tx Ang Mx NZ
NBTPS INSTAC
Valeurs et pratique professionnelle de l’enseignement
– S’investir dans l’apprentissage et le développement des élèves x x x x
– Réfléchir sur sa pratique pédagogique x x x x x x x x x x x x
– Connaître la raison d’être des politiques éducatives x x x
et les mettre en œuvre
– S’investir dans l’apprentissage professionnel (formation continue) x x x x x x x x x x
– Participer à la vie scolaire et s’y investir x x x x x x x x x
– Contribuer au développement de la profession d’enseignant x x x x x x
– Connaître et appliquer les règles de comportement éthique x x x x x x x
– Être capable d’accomplir des tâches administratives x x x
(inscriptions, etc.)
Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Aus=Australie, Qn=Queensland (Australie), Vc=Victoria (Australie), CB=Colombie-Britannique (Canada), Ch=Chili, USA=États-Unis


d’Amérique, Cl=Californie (États-Unis d’Amérique), Tx=Texas (États-Unis d’Amérique), Ang=Angleterre, Mx=Mexique, NZ=Nouvelle-Zélande
NBPTS : National Board for Professional Teaching Standards
INSTAC : Interstate New Teacher Assessment and Support Consortium

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L’évaluation sommative des enseignants

Les normes pédagogiques varient selon qu’elles sont générales


ou spécifiques. Les normes générales décrivent les bonnes pratiques
pédagogiques pour tous les enseignants, sans préciser comment elles
pourraient s’appliquer dans différentes disciplines et à des niveaux
de scolarité différents (par exemple primaire ou secondaire). Les
normes pédagogiques spécifiques sont plus détaillées et décrivent
ce que devrait être un bon enseignement dans des disciplines
spécifiques, à des niveaux de scolarité spécifiques et à des stades
spécifiques de la carrière de l’enseignant (CEPPE, 2013). On
trouve des exemples de normes faisant des distinctions entre les
disciplines et les niveaux de scolarité au Chili, au Texas et dans
les normes élaborées par le NBPTS aux États-Unis. En Australie,
certaines distinguent différents stades de carrière. Mais les normes
qui font la distinction entre les trois dimensions (discipline, niveau
de scolarité et stade de la carrière) sont rares. Le plus souvent, les
normes nationales sont générales et interprétées au niveau local en
fonction des disciplines et des niveaux de scolarité. Selon l’étude du
CEPPE (2013), l’une des raisons pour lesquelles de nombreux pays
ont préféré adopter des normes générales plutôt que spécifiques est
que les enseignants peuvent obtenir des résultats similaires avec des
approches et stratégies différentes. Mieux vaut, par conséquent, ne
pas être trop prescriptif quant au style d’enseignement.
D’après les données disponibles, il semblerait que l’approche
de l’évaluation des enseignants la plus judicieuse consiste à
utiliser plusieurs méthodes et à comparer les résultats en tenant
compte des variations des normes ou critères pédagogiques. C’est
conforme avec les recommandations d’Ingvarson et Chadbourne
(1994), qui reconnaissent également que, quelle que soit la validité
de l’appréciation finale, l’utilisation de cette approche dépend de
l’authenticité des différentes méthodes. Le projet Measures of Effective
Teaching (MET) conduit par la Bill and Melinda Gates Foundation
(Kane et al., 2013) défend également le principe de mesures multiples
pour évaluer la performance des enseignants. Les auteurs ont en effet
constaté que se fier de façon excessive à une seule mesure augmentait
le risque de passer à côté d’autres comportements qui méritent d’être
pris en compte. Le projet a également constaté qu’une approche
équilibrée, combinant notes des élèves et inspections, présentait
l’avantage d’augmenter les chances de repérer les enseignants qui
obtiennent de meilleurs résultats aux contrôles des connaissances
73
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

(hors examens d’État) et d’éviter que les notes des enseignants


fluctuent trop d’une année sur l’autre.
Évaluation normative
Pour concevoir un système d’évaluation des enseignants à des fins de
gratification ou de promotion il est aussi très important de savoir s’il
faut récompenser tout enseignant qui répond aux critères spécifiés
(évaluation critériée) ou comparer les enseignants entre eux et ne
récompenser que les meilleurs (évaluation normative). La première
proposition s’inscrit dans une approche holistique de l’évaluation car
il est possible de juger globalement si un enseignement répond aux
critères. La seconde s’inscrit dans un système sommatif car il est facile
de comparer les points obtenus par différents enseignants (tableau 5).
Cela dit, ces appariements ne sont pas les seuls et ne s’opposent pas
complètement. Les systèmes sommatifs peuvent être utilisés avec une
approche critériée si tous les enseignants obtenant un score donné
bénéficient d’une gratification ou d’une promotion. Par ailleurs,
certains systèmes qui procèdent à une évaluation holistique fondée sur
des normes imposent un quota au nombre d’enseignants susceptibles
de bénéficier d’une gratification ou d’une promotion, introduisant
ainsi un élément normatif dans le processus de promotion.
Les systèmes de rémunération aux résultats comprennent
généralement des procédures normatives. Le système évalué par
Lavy (2004) en Israël classe les enseignants en fonction des scores de
valeur ajoutée de leurs élèves et n’octroie de gratification qu’aux plus
performants d’entre eux. Une comparaison normative des enseignants
peut également prendre une forme moins évidente. Ainsi, aux premiers
temps de la réforme des salaires du corps enseignant à Houston, une
prime était versée aux enseignants dont les élèves avaient des scores
de valeur ajoutée qui se situaient dans les deux quartiles supérieurs
(Behrstock et Akerstrom, 2008).
Un atout de cette approche de l’attribution de primes ou de
promotions est que la collecte d’informations coûte moins cher. Dans
la mesure où le système fixe à l’avance le nombre ou le pourcentage
d’enseignants qui pourront bénéficier d’une gratification, on sait
dès le début combien coûtera le programme, ce qui permet une
budgétisation précise.

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L’évaluation sommative des enseignants

Tableau 5. Comparaison entre une évaluation sommative


et une évaluation holistique
Approche sommative Approche holistique
Définition Une pondération ou un nombre Le résultat global de l’enseignant
de points est attribué à chaque dépend de la possession
composante du processus des qualifications nécessaires
d’évaluation. Le résultat global ou de la maîtrise des
de l’enseignant est calculé compétences requises. La preuve
en additionnant les résultats de ces compétences peut être
à chacune d’entre elles. déduite de différentes
composantes du processus
d’évaluation.
Avantages Le résultat global étant objectif Les enseignants sont motivés
et transparent (bien que pour améliorer leur
certaines composantes puissent enseignement car ils doivent
être subjectives), il y a moins posséder toutes les compétences
de risques de corruption. requises pour progresser.
Inconvénients Les enseignants n’ont pas besoin Le résultat général reposant sur
de posséder toutes les le jugement d’un supérieur
compétences pour progresser. (chef d’établissement, par
exemple), il existe un risque
Plutôt que de s’attacher de corruption. Cet inconvénient
à améliorer leur enseignement ; peut être surmonté par
ils peuvent être tentés de ne se un énoncé clair des normes
préoccuper que de leurs scores. pédagogiques et en faisant appel
à des évaluateurs externes.

Avec les systèmes basés sur une approche critériée, en revanche, on


ne connaît pas à l’avance le nombre exact d’enseignants qui rempliront
les conditions. On risque donc de dépasser les capacités budgétaires.
Le Chili a trouvé une solution intéressante à ce problème : il utilise un
système à la fois holistique et normatif (Vegas, 2005). Pour obtenir
une « gratification pour excellence pédagogique », les enseignants
doivent présenter un dossier sur leur travail et passer un test. Ils sont
jugés en fonction de normes de performance définies par le ministère
de l’Éducation. Un quota limite le nombre d’enseignants qui pourront
bénéficier de cette gratification. Cela introduit dans le système une
part de comparaison pour sélectionner les bénéficiaires parmi les
enseignants promouvables. Ce quota varie d’une année sur l’autre, en
fonction des contraintes budgétaires. Le nombre généralement limité

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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

de bénéficiaires (une cinquantaine pour tout le pays) réduit le risque


de compétition entre les enseignants d’une même école.
La compétition entre enseignants est en effet le point faible de
l’évaluation normative, celui qui suscite le plus la controverse. Certes,
la compétition n’est pas forcément une mauvaise chose en soi. Mais
la réussite scolaire passant par un travail d’équipe et la collaboration
entre collègues (Bryk et Schneider, 2002), et la motivation autonome
exigeant de solides relations interpersonnelles, ces deux conditions
sont moins faciles à mettre en place dans un contexte de compétition.
À Houston, par exemple, le programme initial récompensant les
enseignants dont les élèves obtenaient des scores de valeur ajoutée se
situant dans les deux quartiles supérieurs les a démoralisés. Ils ont été
révoltés et offusqués par ce qu’ils percevaient comme une politique
injuste, génératrice de divisions (Behrstock et Akerstrom, 2008). Il a
donc été remplacé par le programme ASPIRE (Accelerating Student
Progress Increasing Results and Expectations), qui accorde davantage
d’importance au travail d’équipe et moins aux résultats individuels des
enseignants. En République de Corée, 68 % des enseignants approuvent
le statut de maître enseignant proposé et la Fédération coréenne des
associations d’enseignants soutient cette proposition à condition
qu’il n’y ait pas de limite au nombre d’enseignants promouvables
(un plafond de 10 % des enseignants est suggéré) (Coolahan et al.,
2004). Au Portugal, la mise en place d’un quota limitant le nombre
d’enseignants pouvant être promus à un échelon salarial supérieur a
généré de la compétition et diminué la coopération entre enseignants,
réduisant ainsi leur satisfaction au travail et avec des conséquences
négatives sur l’apprentissage des élèves (Martins, 2009).
Les enseignants de Houston se sont également plaints du
manque de transparence du système (Behrstock et Akerstrom,
2008). Les programmes fondés sur des normes sont plus transparents
que ceux fondés sur la valeur ajoutée, en ce sens que les enseignants
savent exactement à quelles normes ils doivent se conformer. Mais
si ces programmes sont par la suite normatifs pour l’attribution
des gratifications ou des promotions (avec un nombre limité de
bénéficiaires parmi les enseignants remplissant les conditions), on
retombe dans le travers du manque de transparence. Les enseignants
voudront savoir pourquoi des collègues ont été promus et pas eux
alors que tous remplissaient les conditions. Le fait d’accorder une
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L’évaluation sommative des enseignants

prime à quelques enseignants seulement et non à tous ceux qui


répondent aux conditions a été considéré comme la cause de l’échec,
dans les années 1980, de nombreux programmes salariaux fondés
sur la performance (Sclafani, 2009). Cette critique a été également
adressée à la structure de carrière des enseignants en Éthiopie, où
les contraintes budgétaires ont entraîné une sélection plus sévère
des enseignants remplissant les conditions. Cela a accentué la
compétition entre les enseignants (Tekleselassie, 2005). Selon
Sclafani, les comparaisons à fort enjeu pourraient même inciter les
enseignants à faire courir des rumeurs mettant en doute les capacités
professionnelles de leurs collègues afin de saboter leurs chances de
promotion (Sclafani, 2009).
Évaluation critériée
Les approches critériées –  qui accordent une gratification ou
une promotion à tout enseignant qui correspond à une norme ou
obtient un score donné – évitent ces problèmes de compétition et de
manque de transparence. De plus, elles permettent aux enseignants
de se fixer des objectifs accessibles plutôt que de miser sur une
mauvaise performance de leurs collègues. Selon Locke et al. (1981),
se fixer des objectifs aide à guider l’action et l’attention. Cette forme
d’évaluation est cependant moins facile à gérer d’un point de vue
budgétaire. En outre, l’absence de quota peut rendre les enseignants
sceptiques quant à la viabilité des programmes, comme ce fut le cas
en Angleterre et au Pays de Galles lorsqu’une nouvelle grille salariale
a été mise en place (Adnett, 2003).
Une solution ou un compromis possible, permettant de planifier
le budget tout en évitant une compétition néfaste, consisterait à lier
l’augmentation du salaire à la promotion tout en la subordonnant au
budget disponible. Ainsi, au lieu d’être mis en concurrence avec ses
collègues pour obtenir une promotion ou une prime d’un montant fixe,
tout enseignant répondant aux conditions serait promu et obtiendrait
le statut et la reconnaissance correspondants. L’augmentation de
salaire serait dès lors moindre si beaucoup d’enseignants remplissent
les conditions pour une année donnée (ou plus importante s’ils
sont moins nombreux). Les fonds correspondants seraient répartis
au niveau national ou régional plutôt qu’au niveau local, afin que la
promotion des enseignants d’une même école ait un effet négligeable
sur l’augmentation de salaire des autres enseignants.
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Tableau 6. Comparaison entre une évaluation normative


et une évaluation critériée
Évaluation normative Évaluation critériée
Définition Les enseignants sont comparés Les compétences des enseignants
les uns aux autres. Seule sont jugées par rapport à
la fraction supérieure d’entre des critères ou des normes. Tous
eux bénéficie d’une gratification les enseignants qui répondent
ou d’une promotion, s’appuyant à l’ensemble des conditions requises
sur un nombre de points pour bénéficier d’une promotion
ou sur d’autres critères. sont promus, indépendamment
des performances de leurs pairs.

Avantages Frais de collecte d’informations Les enseignants ont la maîtrise


moins élevés : on connaît de leur progression car ils savent
à l’avance le coût que s’ils remplissent certains
du programme en termes critères ils obtiendront une
de gratification ou promotion. Ils peuvent s’entraider
de promotion. sans que cela remette en cause
leur propre avancement.

Inconvénients La compétition engendrée Frais de collecte d’informations


par cette approche décourage plus élevés : on ne sait pas
la collaboration entre à l’avance combien d’enseignants
les enseignants ainsi que rempliront les conditions.
le travail d’équipe. Ce problème peut être réglé en
Elle peut aussi engendrer faisant d’abord un essai pilote
une mauvaise ambiance pour se faire une idée du nombre
entre collègues. de bénéficiaires potentiels et définir
les critères en conséquence.

Responsabilité des décisions dans les approches


d’évaluation sommative
Cette section examine la responsabilité des décisions découlant des
évaluations, notamment en ce qui concerne le choix des enseignants
pouvant prétendre à une prime, une augmentation de salaire ou
une promotion. Dans les systèmes fondés sur la rémunération aux
résultats ou sur une approche sommative, il n’y a pas de choix de ce
type à faire ; tout se fonde sur une formule d’accumulation de points
et un score d’exclusion. En revanche, dans les systèmes qui ont une
approche holistique, quelqu’un doit décider si l’enseignant a obtenu
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L’évaluation sommative des enseignants

le score voulu ou correspond aux critères requis. Les approches pour


sélectionner le personnel qui participera à ces prises de décisions
diffèrent d’un système à l’autre.
Chefs d’établissement
Le plus souvent, le chef d’établissement ou un membre de l’équipe de
direction fait partie du groupe qui décide si un membre du personnel
remplit ou non les critères le rendant éligible à une promotion ou une
prime. Les chefs d’établissement participent à cette prise de décision
mais ne sont pas nécessairement les seuls à en avoir la responsabilité
dans des pays tels qu’Israël, la Pologne, la République de Corée et
la République tchèque. Jacob et Lefgren (2008) se sont intéressés à
la question de la capacité des chefs d’établissement à distinguer les
enseignants en fonction de leur efficacité, mesurée par leurs scores
de valeur ajoutée. Ils ont constaté que les chefs d’établissement
étaient généralement capables de discerner les enseignants qui
produisent les gains de réussite normalisés les plus importants et
ceux qui produisent les plus faibles, mais beaucoup moins de faire des
distinctions concernant les enseignants qui se situent dans la partie
médiane de cette distribution. Pour French, Melo et Rakow (1988),
les chefs d’établissement ne doivent pas être les principaux acteurs
des programmes d’échelons de carrière. En effet, une étude réalisée
à l’échelle des États-Unis montre qu’en fait les chefs d’établissement
donnent toujours des notes plus élevées à leur personnel et font
preuve de peu de discrimination, même s’ils en ont la capacité. De
même Kremer, Glewwe, Chen et Moulin (2001, cités dans Bruns et al.,
2011) remarquent que les chefs d’établissement kenyans accordent
des primes d’assiduité à l’ensemble de leurs personnels, même à ceux
qui ne sont pas plus assidus. De leur côté, Bruns et Luque (2014)
rapportent que les directeurs d’école colombiens donnent toujours de
bonnes notes aux enseignants afin d’éviter tout conflit.
Il existe donc un risque que le jugement, par nature subjectif,
soit influencé par la relation personnelle qu’entretiennent le chef
d’établissement et l’enseignant (pour le meilleur comme pour le
pire), voire soit entaché de corruption. C’est particulièrement
préoccupant dans certains pays en développement qui n’ont pas
d’infrastructures pour faire cesser ces pratiques et où de nombreux
enseignants se plaignent déjà de traitements injustes de la part des
chefs d’établissement.
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Le VSO (2002) s’est ainsi rendu compte, lors de ses entretiens,


que les rapports entre les chefs d’établissement et leurs personnels
étaient un sujet de préoccupation majeur pour les enseignants de
Papouasie-Nouvelle-Guinée et de Zambie, lesquels ont rapporté des
exemples de relations insatisfaisantes, notamment des promotions
injustes. Faire participer d’autres personnes à la décision, soit en tant
que coresponsables du processus, soit pour contrôler la décision,
pourrait être un moyen de régler ce problème.
Pluralité des évaluateurs
Le recours à plusieurs évaluateurs offre l’avantage de rendre le
jugement plus fiable. Le projet MET (Kane et al., 2013) a analysé
les enregistrements vidéo des cours de 3 000 enseignants dans six
États des États-Unis et recueilli pendant deux ans des données
sur les progrès des élèves de 1 600 d’entre eux. Il conclut que la
présence d’un second évaluateur améliore la fiabilité de l’inspection.
En République de Corée, le chef d’établissement partage avec des
pairs la responsabilité de l’évaluation des enseignants à des fins
de promotion (Coolahan et al., 2004), tandis qu’en Australie un
enseignant participe au jury qui conduit les entretiens avec les
enseignants qui postulent au statut AST (Ingvarson, 2013).
Dans le système d’échelons de carrière du Tennessee (Tennessee
Career Ladder), chaque enseignant est évalué par un pair d’un autre
district. Ces évaluateurs sont sélectionnés de façon très rigoureuse et
suivent une formation de trois à quatre semaines avant d’assumer ces
responsabilités. Cette composante du programme du Tennessee a été
jugée comme l’une des plus positives par les enseignants évalués par
des pairs (French, Malo et Rakow, 1988). En Éthiopie, en revanche,
l’évaluation par les pairs est effectuée par des collègues du même
établissement, ce qui crée un malaise quand les enseignants estiment
avoir été jugés avec partialité (Tekleselassie, 2005). Dans d’autres
pays, le chef d’établissement partage la responsabilité de l’évaluation
avec d’autres personnels extérieurs à l’école.
Évaluateurs externes
Pour régler ce problème de subjectivité, certains états ont des
évaluateurs externes qui interviennent conjointement avec les chefs
d’établissement. C’est le cas en Angleterre pour les enseignants
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L’évaluation sommative des enseignants

qui postulent à un échelon salarial supérieur. Il en est de même


au Chili, où les chefs d’établissement partagent la responsabilité
de l’évaluation avec des évaluateurs externes accrédités, un centre
d’évaluation local et des évaluateurs choisis parmi les pairs (OCDE,
2013). Des pays comme l’Autriche et la Pologne, ne font appel au
jugement d’évaluateurs externes qu’en cas de réclamation ou d’appel
(OCDE, 2013). Outre qu’elle permet de surmonter les problèmes
de subjectivité, l’intervention d’évaluateurs externes est également
intéressante quand l’école n’a pas l’expertise suffisante pour effectuer
cette évaluation en interne, et c’est parfois notamment le cas pour les
promotions à des postes de direction.
Une autre approche consiste à confier l’intégralité du processus
à des évaluateurs externes qualifiés. C’est le cas aux États-Unis dans
les États qui ont recours au test Praxis III (Milanowski, 2003). Pour
ce processus de certification, des évaluateurs qualifiés conduisent des
entretiens avec les enseignants et observent leur travail en classe ainsi
que dans d’autres fonctions. Ils jugent les enseignants sur 19 critères
répartis dans quatre catégories : environnement de la classe, plans de
cours, enseignement et professionnalisme.
Des évaluateurs différents selon les niveaux
Faire appel à des évaluateurs externes peut coûter cher. C’est
pourquoi certains systèmes recourent à du personnel interne
quand les promotions concernent les échelons inférieurs de la
structure de carrière (par exemple l’accès au statut d’enseignant
qualifié) et font appel à du personnel externe uniquement pour
les promotions concernant les échelons supérieurs. Les nouvelles
normes professionnelles australiennes (New Australian Professional
Standards) destinées aux enseignants sont en train d’être mises en
place. Elles comportent quatre grades : « diplômé », « compétent »,
« accompli » et « chef de file » (Ingvarson, 2013). L’idée est de laisser
aux universités le pouvoir de décision en matière de délivrance des
diplômes (comme c’était déjà le cas) et aux organismes de certification
des enseignants la responsabilité d’élever les enseignants au grade
« compétent » à l’issue d’une période d’initiation. L’Australian
Institute for Teaching and School Leadership (AITSL) est chargé
d’organiser à l’échelle du pays un système d’évaluation cohérent pour
les grades « accompli » et « chef de file ». En Nouvelle-Zélande, des
responsables politiques ont suggéré une approche similaire pour les
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

nouveaux postes d’enseignants et de chefs d’établissement : les chefs


d’établissement adjoints et les « chefs d’établissement en charge du
changement » seront nommés par un jury externe et auront ensuite
la responsabilité de nommer les enseignants « experts » (Key, 2014).
Cette pratique existe déjà en Estonie, où le processus consistant à
vérifier qu’un enseignant remplit les conditions pour obtenir un nouvel
échelon est appelé « attestation » (EURYDICE, 2010). C’est le chef
d’établissement qui octroie leur échelon aux enseignants débutants et
aux enseignants, tandis qu’une commission d’attestation formée par le
chef d’établissement s’occupe des promotions à l’échelon « confirmé »
et une commission formée par le ministère de l’Éducation des
promotions à l’échelon d’« enseignant méthodologue ».
Des personnels différents pour des finalités
d’évaluation différentes
Si la majeure partie de cette analyse porte sur l’évaluation sommative
et son lien avec les structures de carrière, la pratique de l’évaluation
formative soulève des questions tout aussi importantes, en particulier
celle de savoir qui doit prendre en charge ces deux types d’évaluation.
L’évaluation formative a pour finalité d’améliorer les méthodes
pédagogiques et peut déboucher sur un soutien ou des conseils des
évaluateurs sur les points à améliorer. C’est un aspect essentiel de
tout système éducatif efficace. Elle donne aux personnels les moyens
d’améliorer leur enseignement après avoir suscité la motivation
nécessaire grâce à la structure de carrière.
Carlson (2009) fait valoir qu’il est difficile d’établir un lien entre
ces deux types d’évaluation à cause des résultats différents qu’ils
produisent. Dans l’évaluation formative à des fins de perfectionnement,
les enseignants sont encouragés à faire un travail d’introspection pour
déceler leurs points faibles et en parler avec l’évaluateur afin qu’il
puisse les aider à les améliorer. Dans l’évaluation sommative à des fins
de promotion ou de rémunération liée à la performance, l’enseignant
est plus enclin à cacher ses lacunes qu’à les regarder en face, de
crainte qu’elles remettent en question ses perspectives de promotion
(Mosoge et Pilane, 2014). Dès lors, la combinaison des deux types
d’évaluation risque de réduire les chances que les enseignants tirent
parti de la possibilité de s’améliorer qui leur est offerte.
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L’évaluation sommative des enseignants

L’Afrique du Sud a fait l’expérience de ce problème avec


son système intégré de gestion de la qualité (Integrated Quality
Management System). Le Sommet sur le perfectionnement des
enseignants (Teacher Development Summit) a recommandé de
désolidariser l’évaluation à des fins de perfectionnement de l’évaluation
à des fins de rémunération et de progression salariale (Afrique du Sud,
2011). On peut, pour ce faire, confier les deux types d’évaluation à
deux personnels différents.
Certaines difficultés propres à l’évaluation sommative qui
sont évoquées plus haut sont sans lien avec l’évaluation à des fins de
perfectionnement. Les conséquences de ce type d’évaluation n’étant
pas un enjeu capital, la subjectivité de l’évaluateur risque moins de
poser problème et la fiabilité de l’évaluation est une condition moins
impérative, puisqu’aucune décision à enjeu majeur n’en dépend.
Pour toutes ces raisons et pour d’autres plus concrètes de coût et
de déplacements, l’évaluation formative peut être effectuée par des
collègues et la direction de l’école. Pour éviter de créer une situation
incitant les enseignants à dissimuler leurs points faibles, on peut faire
appel à des personnels différents concernant l’évaluation sommative :
d’autres membres du personnel de l’école ou des évaluateurs externes.
À Shanghai, des mentors et des pairs de l’établissement proposent
aux enseignants des conseils sur la manière d’améliorer leurs cours,
mais pour ce qui est des promotions, ce sont des experts externes qui
effectuent les évaluations. Le district de Cincinnati, dans l’Ohio (États-
Unis), est allé plus loin : il s’en remet au test Praxis pour l’essentiel de
l’évaluation sommative et s’appuie sur ses résultats pour déterminer la
rémunération des enseignants (Odden et Wallace, 2007).
Conséquences de l’évaluation sommative
Primes
La rémunération liée à la performance couvre un domaine plus
large que la rémunération au résultat. Elle inclut les programmes
accordant des primes aux enseignants qui passent avec succès des
évaluations, lesquelles prennent en compte de nombreux aspects
et non les seuls résultats des élèves. Cependant, en pratique ces
programmes sont rares. La plupart des pays qui recourent à des
évaluations plus générales des enseignants le font pour déterminer
si les enseignants remplissent les conditions pour être certifiés ou
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

recertifiés. Ce processus est assorti d’une augmentation constante


du salaire liée au nouveau statut (quand la rémunération est liée au
statut), au lieu du versement d’une prime ponctuelle.
Deux systèmes qui attribuent des primes sur la base d’une
évaluation, celui de Singapour et le TAP (Teacher Advancement
Program) aux États-Unis, s’accompagnent d’une structure de carrière
qui institue une certification à différents niveaux. Les enseignants
des écoles qui participent au TAP peuvent prétendre à une prime de
performance annuelle qui se fonde sur les scores de valeur ajoutée
des élèves et sur des inspections (Glazerman et Seifullah, 2012).
À Singapour, les primes (elles aussi annuelles) sont accordées en
fonction du résultat d’une évaluation exhaustive qui repose sur trois
réunions, un dossier et les avis d’enseignants chevronnés (Sclafani,
2009). Les deux systèmes intégrant une structure de carrière plus
sophistiquée, il n’est pas possible d’apprécier séparément l’impact
de ces primes à la performance sur les résultats des élèves ou la
motivation des enseignants.
En Floride (États-Unis d’Amérique), le programme MAP
(Merit Award Program) accorde des primes ponctuelles en fonction
des résultats d’évaluation. Chaque district de l’État doit verser une
rémunération liée à la performance à au moins 25 % des enseignants et
représentant 5 % ou plus de leur salaire de base (Buddin et al., 2007).
La performance s’appuie sur les résultats des élèves et l’appréciation
d’un enseignant chef de file quasiment à parts égales. L’impact de ce
programme sur le comportement des enseignants ou les résultats des
élèves n’a malheureusement pas été évalué. Cependant, en s’appuyant
sur une analyse des méthodes statistiques employées, Buddin et
al. avancent que « l’utilisation de scores normalisés aux tests pour
mesurer la performance des enseignants pose de sérieuses difficultés
dans le cadre d’un système de rémunération au mérite » (Buddin
et al., 2007 : 49). La question de savoir si les primes accordées à la
suite d’évaluations de performance générale qui ne prennent pas en
compte les résultats des élèves ont un effet positif sur la motivation des
enseignants ou les résultats des élèves, reste ouverte.
Les programmes de rémunération liée à la performance fondés
sur des évaluations générales des enseignants remédient à certaines
des critiques visant les programmes de rémunération au mérite et
évoquées au chapitre 3. En ajoutant une autre mesure aux résultats
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L’évaluation sommative des enseignants

des élèves ou en ne tenant pas compte de ces derniers, on affaiblit


ou supprime la validité discutable du mécanisme d’attribution
des primes. Cela permet également de résoudre dans une certaine
mesure le problème du « multitâche », qui pousse les enseignants
à se focaliser exclusivement sur les résultats aux examens. En effet,
en évaluant aussi la pratique en classe on incite les enseignants à
s’améliorer dans ce domaine.
Cependant, cette approche présente elle aussi des inconvénients.
Comme la rémunération aux résultats, elle peut générer de la
compétition entre les enseignants et décourager la collaboration si les
primes sont réservées aux mieux classés, comme c’est le cas à Singapour
et dans le programme TAP. Elle pose également un autre problème :
son effet potentiellement néfaste sur les rapports entre les enseignants
et le chef d’établissement si l’évaluation repose en majeure partie sur le
jugement de celui-ci. Comme la rémunération aux résultats, elle peut
susciter une motivation « contrôlée », avec pour effet possible de
saper la motivation intrinsèque ou autonome (Deci, 1971), la finalité
d’une prime étant d’inciter les enseignants à redoubler d’efforts pour
gagner de l’argent plutôt qu’à travailler davantage ou différemment
pour leur propre développement ou le bien des élèves.
Progression du salaire
Fonder la progression du salaire sur une évaluation de l’enseignant
est une autre approche possible. Si elle ressemble au système de
primes, sa mise en place emprunte souvent une voie différente. Au
lieu d’être mise en œuvre pour inciter les enseignants à améliorer
leur performance, la subordination de la progression salariale à une
évaluation est souvent la conséquence d’une modification de la grille
salariale unique. Alors que, dans le système de grille salariale unique,
le salaire augmente automatiquement après un certain temps, dans
cette approche soit l’enseignant doit passer une évaluation à un
moment déterminé, soit la régularité avec laquelle il peut gravir les
échelons dépend des résultats de son évaluation.
En Allemagne, par exemple, la Rhénanie-du-Nord-Westphalie est
en train d’évaluer un système dans lequel les augmentations progressives
automatiques ont été remplacées par des augmentations progressives
en fonction de la qualité du travail de l’enseignant (OCDE, 2013).
Les Pays-Bas ont un système similaire. Dans un autre État allemand,
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

le Bade-Wurtemberg, chaque année 10 % des enseignants peuvent


accéder à un échelon supérieur du régime salarial s’ils affichent une
performance remarquable. À l’autre extrémité du spectre, un mauvais
résultat d’évaluation peut retarder la progression sur l’échelle salariale.
La ville de Saint-Gall, en Suisse, combine progression automatique
le long des échelons salariaux et accès à l’échelon supérieur à la suite
d’une évaluation réussie. À Zurich, les enseignants dont l’évaluation
est positive bénéficient d’une augmentation de salaire annuelle de 1 à
3 % pendant quatre années consécutives.
Un autre type de progression salariale existe au Mexique, en
Angleterre et au Pays de Galles. Au Mexique, le programme Carrera
Magisterial accorde une augmentation de salaire à ceux qui réussissent
une évaluation. Mais, contrairement au système européen, où les
augmentations font habituellement partie de toute grille salariale à
augmentation progressive, cette augmentation de salaire commence
à 27 % du salaire de base pour ceux qui sont promus au « niveau A »,
et peut atteindre 217 % du salaire de base pour ceux qui atteignent le
niveau E, le plus élevé (Vegas, 2005). Les enseignants bénéficiaires
perçoivent pour toujours ce salaire plus élevé. De même, en Angleterre
et au Pays de Galles, la plupart des enseignants suivent la grille salariale
unique (bien que des réformes soient en cours), mais au bout d’un
certain temps, les enseignants peuvent postuler à un échelon salarial
plus élevé via une évaluation.
Ces approches règlent les problèmes inhérents à la grille
salariale unique et nuisent généralement moins à la cohésion que les
programmes accordant des primes à certains membres seulement du
personnel, même si les évaluations provoquent une accélération ou un
ralentissement de la progression salariale, ce qui se produirait de toute
façon. Par rapport aux primes, un autre avantage de cette approche est
lié à la psychologie de la motivation. Une augmentation de salaire sera
généralement considérée comme la reconnaissance d’une compétence
plutôt que comme un contrôle du comportement et risque moins de
saper la motivation autonome (Deci, Koestner et Ryan, 1999). Les
augmentations de salaire consécutives à une évaluation font quand
même un lien direct entre évaluation et salaire. Il existe cependant
une autre approche encore plus efficace pour résoudre les problèmes
inhérents à la grille salariale unique et à la rémunération liée à la
performance. Il s’agit de la mise en place de structures de carrière où
86
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L’évaluation sommative des enseignants

les évaluations par rapport à des normes entraînent une progression


du statut qui s’accompagne d’une augmentation de salaire, créant ainsi
un lien indirect entre évaluation et rémunération. La section suivante
est consacrée à cette approche.
Promotion
Dans une certaine mesure, la promotion des enseignants à de nouvelles
fonctions ou à un nouveau statut à la suite d’une évaluation positive est
une pratique courante dans de nombreux pays. Elle est recommandée
par les chercheurs en éducation et par les économistes comme moyen
d’associer responsabilité (vis-à-vis de la qualité de l’enseignement) et
professionnalisme (Benveniste, Marshall et Araujo, 2008 ; Delannoy et
Sedlacek, 2001 ; Fanfani, 2004 ; Ingvarson, 2012 ; Johnson et Paypay,
2009). Si presque tous les pays pratiquent une forme de promotion
– puisqu’ils ont tous des chefs d’établissement –, les recommandations
suggèrent d’opter pour des formes de promotion subordonnées à la
conformité à certaines normes (ce qui n’est pas toujours le cas pour la
promotion aux fonctions de chef d’établissement) et permettant à la
personne de continuer à enseigner en classe. C’est ce que l’on appelle
parfois une « promotion horizontale » (Vegas, 2005), la promotion
étant latérale et non pas verticale. Dans cette étude, nous l’appellerons
« promotion en classe ».
Cette approche se fonde sur l’idée qu’il existe certaines normes
ou certains critères qu’un enseignant doit remplir pour être certifié
ou confirmé. S’il remplit tous ces critères lors de son évaluation, il
est promu au grade d’enseignant certifié ou confirmé et son salaire
augmente en fonction de son nouveau statut. Les critères de promotion
diffèrent selon les modèles d’approche et les responsabilités attachées
aux nouvelles fonctions peuvent varier. Elles seront abordées au
chapitre 5, avec des exemples de mise en œuvre dans différents pays.
Dans la présente section, nous montrerons le large soutien recueilli
par la « promotion de classe » et expliquerons en quoi elle permettrait
de résoudre les problèmes inhérents à la grille salariale unique tout en
évitant les problèmes posés par la rémunération liée à la performance.
Dans sa communication sur l’avenir de la profession d’enseignant
dans l’État de Victoria, en Australie, Ingvarson (2012) déclare : « Il y a
deux façons d’aborder le renforcement des liens entre rémunération et
performance : l’une repose sur les régimes de rémunération au mérite,
87
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

l’autre sur la mise en place d’un système rigoureux de certification


professionnelle. Chacune s’appuie sur des hypothèses assez
différentes concernant le fonctionnement des incitations et leur lien
avec l’amélioration des résultats des élèves » (7). Il reprend, à propos
du système de primes ponctuelles que l’État de Victoria voulait mettre
en place en 2012 dans les écoles, les critiques habituelles adressées
à ce système qui génère de la compétition entre les enseignants.
Il affirme que les enseignants tireront plus de profit d’un retour
d’information sur leur activité professionnelle s’ils exercent dans un
climat de confiance et de soutien, ce qui est facilité par un système
de certification professionnelle basé sur des normes (qui accorde une
promotion aux enseignants qui correspondent à certaines normes), et
pas par des programmes de versement de primes.
Delannoy et Sedlacek (2001) examinent les nombreux problèmes
complexes autour de la question de l’efficacité des enseignants au Brésil
et concluent leur étude en proposant une stratégie globale proche des
recommandations d’Ingvarson pour l’État de Victoria. Ils suggèrent
de définir des normes pédagogiques et de les utiliser comme base pour
élaborer un système de certification qui servira à structurer les carrières
des enseignants. Selon une autre étude de la Banque mondiale sur le
Cambodge (Benveniste, Marshall et Araujo, 2008) :
L’actuelle compression des salaires et l’absence de possibilités
de promotion mettent en lumière la nécessité impérative de
mettre au point pour la profession d’enseignant des plans de
carrière durables à long terme, étayés par une structure salariale
adaptée qui crée un lien entre d’une part les compétences, les
possibilités de développement et la performance, et d’autre part
les incitations financières (ix).
Deux études, celle de Johnson et Papay (2009), du Economic
Policy Institute (Washington), et celle de Fanfani (2004), de
l’Institut international de planification de l’éducation (IIPE Buenos
Aires), développent cette idée. Johnson et Papay (2009) proposent
une « structure à plusieurs niveaux de salaire et de carrière » qui
comporterait quatre échelons de progression des enseignants : Échelon
1 – enseignants stagiaires, Échelon II – enseignants professionnels
titulaires, Échelon III – maîtres enseignants et enseignants chefs de
file et enfin Échelon IV – chefs d’établissement et responsables de
district. Chacun de ces échelons serait associé à un niveau de salaire,
88
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L’évaluation sommative des enseignants

avec des rémunérations complémentaires pour les enseignants des


échelons III ou IV qui occupent des fonctions spécifiques comprenant
le développement du personnel ou l’analyse des données sur les élèves.
Fanfani (2004) suggère également de mettre en place une hiérarchie
de niveaux basée sur les compétences et de concevoir des fonctions
spécifiques qui permettront aux enseignants de progresser dans leur
carrière sans devoir renoncer à enseigner en classe.
Pourquoi cette approche de la structure de carrière est-elle
plébiscitée ? Fondant la promotion aux échelons supérieurs (avec les
augmentations de salaire associées) sur une évaluation globale par
rapport à des normes, elle semble être un moyen de reconnaître les
efforts et le talent des enseignants. Cela permet d’éviter le problème
inhérent à la grille salariale unique, à savoir l’augmentation automatique
des salaires indépendamment des efforts fournis. Ce modèle de
structure de carrière incite au contraire à s’améliorer en permanence.
Si un enseignant n’a pas fait d’efforts ou ne correspond pas à la
norme requise pour la certification, il n’aura pas de promotion. Mais
l’incitation à s’améliorer n’est pas purement financière. La promotion
est intimement liée à l’amélioration personnelle en tant qu’enseignant et
l’obtention d’une promotion est la reconnaissance d’une compétence.
Ainsi, les enseignants peuvent être motivés par le désir d’améliorer
leur enseignement dans l’intérêt des élèves ou par le désir d’acquérir
un statut supérieur. De ce fait, travailler pour obtenir la certification ou
une promotion ne nuit pas nécessairement à la motivation autonome
tant que l’enseignant perçoit l’environnement dans lequel il exerce
comme un soutien (nous sommes là pour vous aider à obtenir cette
certification), plutôt que comme une contrainte (vous devez cocher ces
cases pour obtenir une augmentation de salaire).
À ce propos, il n’est pas inutile de rappeler une fois encore que la
motivation autonome pour améliorer ses compétences ou les résultats
des élèves a peu de chances d’exister si les salaires des enseignants ne
suffisent pas à couvrir leurs besoins élémentaires (Maslow, 1943). Même
avec un système de certification bien conçu basé sur des normes et un
environnement de solidarité entre les individus, il est probable que les
enseignants ne seront pas motivés pour s’améliorer si leur salaire initial
est si bas qu’ils ont du mal à nourrir leurs familles. Dans un tel système,
les enseignants pourraient néanmoins être motivés pour remplir les
critères de certification afin d’obtenir le salaire associé à la promotion, ce
89
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

qui lui confère un avantage sur les grilles salariales uniques. Mais comme
ce serait perçu comme un contrôle, cela risque aussi d’avoir des effets
négatifs sur leur persévérance, leur créativité (Deci, 1987) et leur façon
d’enseigner (Hein et al., 2012 ; Lam et al., 2010).
Un autre avantage potentiel de ce modèle de carrière dépend de
la façon dont il est structuré. Si la promotion s’effectue en fonction
de critères (autrement dit si, pour obtenir une promotion, il faut
satisfaire à des normes), le système n’accroît pas la compétition entre les
enseignants et peut même renforcer la collaboration si le mentorat des
enseignants novices fait partie des responsabilités des enseignants plus
confirmés. En revanche, si la promotion est normative (autrement dit,
est accordée uniquement à un nombre limité d’enseignants en fonction
de leur performance par rapport à celle de leurs pairs), elle s’expose alors
aux mêmes critiques que les programmes de primes, à qui on reproche
de générer de la compétition et de créer un climat délétère.
Il existe de nombreuses autres manières de mettre en place des
programmes de « structure de carrière ». Le chapitre suivant étudie
divers modèles et types de programmes de structure de carrière et
donne des exemples issus de pays où ils ont été mis en œuvre.
Tableau 7. Conséquences de l’évaluation sommative
Description Effet
Primes Les enseignants perçoivent Peuvent jouer un rôle
une prime unique en cas d’incitation extrinsèque pour
d’évaluation positive. les enseignants, mais
Rarement utilisées encouragent la motivation
sans structure de carrière. contrôlée et découragent
la collaboration.
Grille salariale Les enseignants évoluent Cela évite que les mauvais
au sein de la structure enseignants ou les enseignants
salariale à des rythmes paresseux progressent
différents, en fonction automatiquement le long
de leurs évaluations. de l’échelle de salaires.
Promotion Les enseignants sont promus Cela rend indirect le lien entre
à de nouvelles fonctions la performance et le salaire,
et de nouveaux titres selon diminuant le risque
les résultats de leurévaluation, que la proportion de hausse
avec une augmentation encourage la motivation
de salaire associée. contrôlée.

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Chapitre 5
Les systèmes d’échelons de carrière

La plupart des structures de carrière qui ont été mises en œuvre


se fondent sur des systèmes d’échelons de carrière similaires.
En général, les futurs enseignants doivent obtenir une forme de
certification ou d’agrément pour valider leur formation initiale et
devenir des enseignants qualifiés. Certains systèmes comportent
un seul échelon, celui d’enseignant qualifié, et reprennent la grille
salariale unique, tandis que d’autres en font le premier échelon d’une
carrière qui en comporte plusieurs. Les enseignants peuvent ainsi
progresser le long d’une échelle de statuts ou de fonctions de plus en
plus élevés, à condition de remplir les conditions d’accès à chaque
échelon (les critères de promotion varient d’un pays à l’autre). Entre
ces échelons, la rémunération peut augmenter progressivement
chaque année, mais l’accès à un nouvel échelon s’accompagne
généralement d’une hausse substantielle de salaire.
Types d’échelons de carrière
Aux États-Unis, la National Association of State Boards of Education a
publié en 2002 une mise à jour de sa politique en matière de structures
de carrière des enseignants. D’après elle, la plupart des initiatives en
termes de structures de carrière relèvent de l’une des trois catégories
suivantes (ainsi que l’indiquent Plucker, Zapf et McNabb, 2005) :
• Échelons fondés sur la performance : à mesure qu’ils améliorent
leur compétence, les enseignants accèdent à des niveaux
de fonctions différents ou plus complexes. Ils peuvent progresser
le long d’une série d’échelons comprenant par exemple les
grades d’enseignant novice, confirmé et maître enseignant.
• Échelons de développement professionnel : l’avancement
est subordonné aux nouvelles connaissances et compétences
acquises par les enseignants au cours de leur carrière.
Ces compétences peuvent être obtenues par différentes voies :
cours à l’université, activités de développement professionnel,
diplôme de niveau supérieur ou certification NBPTS (National
Board for Professional Teaching Standards. Il s’agit d’un

91
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

organisme indépendant et à but non lucratif américain.


Il a pour but la promotion de l’excellence dans l’éducation
via une certification nationale).
• Échelons d’élargissement des fonctions : les enseignants ont la
possibilité d’assumer plus de responsabilités dans des domaines
autres que l’enseignement en classe. Les possibilités sont
diverses : élaboration des programmes scolaires, supervision
et mentorat des enseignants débutants, intervention comme
formateur dans le cadre du développement professionnel
ou poste de professeur chef de file.
Ces catégories correspondent quasiment à la description que
donnent Conley et Odden (1995) de la rémunération liée à la
performance, de la rémunération basée sur les connaissances et les
compétences et de la rémunération en fonction du poste. Il existe
une certaine ambiguïté concernant la distinction entre les échelons
basés sur la performance et les échelons basés sur le développement
professionnel. Pour les échelons basés sur la performance, la promotion
n’est pas obligatoirement subordonnée aux résultats des élèves (même
si cela peut être le cas), mais plutôt à toute forme d’évaluation de
l’enseignant visant à mesurer son efficacité. Pour les échelons de
développement professionnel en revanche, la participation à une
formation ou l’obtention d’une qualification est impérative, sans que
son impact sur la qualité de l’enseignement soit nécessairement évalué.
Il ressort de la présente analyse de la littérature que, si ces différents
types d’échelons de carrière ont des caractéristiques communes dans
plusieurs pays, il est rare qu’ils relèvent tous d’une catégorie : la plupart
des systèmes présentent des éléments d’au moins deux d’entre elles. Il
est alors peut-être plus judicieux d’envisager ces descriptions comme
des « types » théoriques de structures de carrière avec lesquels les
systèmes peuvent avoir des caractéristiques communes plutôt que
comme des catégories qui s’excluent mutuellement.
Tous les systèmes d’échelons de carrière étudiés dans ce chapitre
ont des composantes de performance, mais beaucoup comprennent
également des composantes de développement professionnel et
d’élargissement des fonctions. En effet, les échelons de carrière sans
composante de performance, et qui sont caractéristiques de la grille
salariale unique, sont à l’origine des problèmes évoqués au chapitre 1.
92
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Les systèmes d’échelons de carrière

Il s’agit du type le plus courant de structure de carrière, où le seul


moyen de progresser est d’acquérir de nouvelles qualifications ou de
prendre en charge des fonctions sans lien direct avec l’enseignement et
d’obtenir une promotion à un poste de responsabilités avec abandon
de l’enseignement en classe.
Tableau 8. Types d’échelons de carrière
Définition Avantages Inconvénients
Éléments de Les échelons Lie le salaire Peut être difficile
performance de carrière incluent à la performance, à mettre en œuvre si
une forme d’évaluation ce qui peut être les enseignants ont un
de l’enseignant motivant pour contrat qui garantit
sur laquelle se base les bons enseignants des augmentations
la promotion et rendre de salaire régulières.
ou l’augmentation la profession Mal conçue,
de salaire. attractive. cette composante
peut générer une
motivation contrôlée
et un certain malaise
au sein du personnel.
Éléments de Les échelons de Oblige le personnel L’utilité de cette
développement carrière obligent les à se former tout au approche dépend
professionnel enseignants à suivre long de sa carrière de la qualité
une formation ou un et permet au de la formation et
stage de développement système d’exiger des de l’existence ou non
professionnel pour connaissances ou d’une évaluation
obtenir une promotion. compétences pour de celle-ci.
exercer certaines Sans suivi,
fonctions. les enseignants
peuvent y voir
un exercice consistant
à cocher des cases.
La formation
ne suffit pas en soi
pour garantir
la qualité.
Certaines formations
permettent d’anticiper
une amélioration
des résultats
des élèves, d’autres
n’ont pas d’effet.

93
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Définition Avantages Inconvénients


Éléments Les échelons Encourage Selon le type de
d’élargissement de carrière associent les meilleurs responsabilité confiée,
des fonctions de nouvelles fonctions enseignants à prendre il peut ne pas y avoir
ou responsabilités la responsabilité suffisamment
aux promotions des de faire progresser de postes disponibles
enseignants, par les moins efficaces pour tous les
exemple le mentorat ou à améliorer enseignants
des enseignants moins le fonctionnement promouvables.
chevronnés ou la de l’école.
direction d’une équipe
de planification.

On trouve des systèmes avec une forme d’échelons de carrière


comprenant des éléments de performance en Angleterre et au Pays
de Galles, en Espagne, en Estonie, aux États-Unis (dans les États
de l’Arizona, de l’Illinois et du Missouri), en Nouvelle-Zélande, en
Pologne, au Portugal, en République de Corée, en République tchèque,
à Shanghai (Chine), à Singapour, en Slovaquie, en Suède et en Suisse.
Conditions de performance à remplir pour être promu
Le chapitre 4 a montré que les évaluations peuvent être basées sur
plusieurs méthodes : inspections pédagogiques, sondage auprès des
parents, résultats des élèves. Il a également mentionné différentes
façons d’utiliser ces méthodes pour produire un résultat final
d’évaluation : l’approche sommative, consistant à additionner les
résultats de différentes méthodes, et l’approche holistique, qui se fonde
sur les résultats de différentes méthodes pour se faire un jugement
global. La plupart des systèmes d’échelons de carrière utilisent une
approche holistique de l’évaluation fondée sur des normes, consistant
à décider si chaque enseignant a atteint les normes nécessaires pour
le niveau de promotion visé. Pour Dinham, Ingvarson et Kleinhenz
(2008) c’est essentiel si l’on veut que le système d’évaluation ait un
effet positif sur l’enseignement à proprement parler.
Ayant tous par définition au moins une possibilité de promotion
au-delà du grade d’enseignant certifié, les systèmes d’échelons de
carrière ont généralement des critères qui diffèrent selon les niveaux
de promotion. Dans les structures de carrière qui comportent un
élément de performance, les enseignants doivent atteindre certains
niveaux de compétences et de connaissances pour être promus
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Les systèmes d’échelons de carrière

au niveau supérieur. Pour évaluer les postulants, certains pays ont


même défini des normes différentes en fonction des échelons. Par
exemple, les Australian Professional Standards for Teachers (AITSL,
2013) sont différentes pour chacun des quatre échelons de carrière
(diplômé de l’enseignement supérieur, confirmé, chevronné et
chef de file). Ces normes disent explicitement les connaissances
et compétences attendues aux différentes étapes des carrières des
enseignants. Les Standards for the Teaching Profession de l’État
de l’Ohio (Ohio, 2015) comprennent des indicateurs qui font
une distinction entre les niveaux standard, confirmé et supérieur
d’accomplissement professionnel des enseignants. Cela permet non
seulement d’avoir l’assurance que les enseignants qui atteignent le
plus haut grade ont plus de connaissances et de compétences que
ceux qui sont aux échelons inférieurs, mais aussi de créer un cadre
donnant aux enseignants une vision claire de l’objectif à atteindre et
avec lequel le perfectionnement professionnel peut s’articuler.
Conditions de développement professionnel
à remplir pour être promu
En plus de l’obligation de se soumettre à une évaluation, certains
systèmes imposent aux enseignants un certain degré de développement
professionnel pour prétendre à une promotion. L’Estonie, le Ghana, le
Portugal, la République de Corée et la République tchèque exigent
la participation à une forme de développement professionnel. Tandis
que d’autres pays comme la Pologne font de la formation continue
une condition nécessaire pour obtenir une promotion, sans toutefois
la rendre obligatoire (OCDE, 2013).
Certains systèmes procèdent différemment et exigent seulement
un certificat de développement professionnel pour accorder une
augmentation de salaire ou une promotion, tout en conservant une
composante de performance liée à l’obligation de développement
professionnel comportant notamment une évaluation de
l’enseignement. Aux États-Unis, les 78 NBPTS sont utilisés à cet effet
par plusieurs États. Pour accéder au statut d’enseignant certifié, il faut
passer un test de connaissance de la discipline enseignée et soumettre
des dossiers sur le travail des élèves et la réflexion de l’enseignant,
ainsi que des enregistrements vidéo des cours (NBPTS, 2015a). Tout
enseignant qui passe avec succès ces deux étapes peut bénéficier d’une

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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

augmentation de salaire ou d’une promotion, la législation en la matière


variant selon les États. Ainsi, dans l’Ohio, obtenir la certification du
National Board est indispensable pour accéder au grade d’enseignant
chef de file. Ce type de système est un moyen pour les enseignants qui
le souhaitent de faire reconnaître la qualité de leur enseignement. Il peut
également, quand il donne droit à une promotion ou à une augmentation
de salaire, les inciter à postuler à ce grade. Cependant, cela ne concerne
qu’une faible proportion d’enseignants car les certificats sont facultatifs
et, dans la plupart des États, ne sont pas indispensables pour obtenir une
augmentation de salaire.
Conséquences des promotions
en termes d’élargissement des fonctions
La plupart des systèmes d’échelons de carrière comportent
notamment une composante d’élargissement des fonctions. Nous
n’avons pas trouvé de système où l’acquisition d’un nouveau statut
ne s’accompagne pas de nouvelles responsabilités. C’est peut-être dû
au fait que les pays qui accordent une augmentation de salaire à un
enseignant à la suite d’une évaluation sans lui confier de nouvelles
responsabilités ne lui octroient pas un nouveau statut. Dans ce cas, le
salaire est fonction de l’évaluation et l’enseignant accède simplement à
un nouvel échelon salarial. Ce genre de système est décrit au chapitre 4
dans la partie « Progression du salaire ».
Dans certains systèmes, toute promotion accordée à la suite
d’une évaluation basée sur des normes s’accompagne de l’obligation
d’assumer des responsabilités supplémentaires : mentorat auprès
d’autres enseignants, cours de développement professionnel au sein
de l’établissement, élaboration des programmes scolaires ou encore
évaluation d’autres enseignants. En Colombie, à Cuba et à Singapour,
les enseignants qui sont à des échelons élevés ont notamment la
responsabilité de travailler avec des enseignants d’autres écoles locales.
En République tchèque, les choses sont un peu différentes : assumer
des fonctions normalement réservées aux enseignants d’échelons
supérieurs peut donner droit à une promotion.
Dans la plupart des pays il existe également des échelons de carrière
administratifs classiques, où une possibilité de promotion à de nouvelles
fonctions donne lieu à la publication d’une annonce de vacance de poste
qui met l’enseignant en concurrence avec ses collègues. Cela permet
96
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Les systèmes d’échelons de carrière

de promouvoir uniquement le nombre de personnes nécessaire pour


certains postes comme celui de responsable de département ou de chef
d’établissement. En Amérique, de nombreuses structures de carrière ont
adopté dans les années 1980 une variante de cette approche (Conley et
Odden, 1995) et proposent, outre les postes de gestion traditionnels,
d’autres fonctions non pédagogiques (responsable des programmes
scolaires, par exemple) pour lesquelles les enseignants sont mis en
concurrence. Conley et Odden (1995) relèvent que dans le domaine de
l’éducation, le salaire en fonction du niveau du poste (où l’on est payé plus
quand on assume plus de responsabilités) est observé surtout pour les
emplois comportant des tâches administratives. D’après eux, cela peut
induire un certain nombre d’effets pervers. Premièrement, cela laisse
entendre que l’enseignement est moins important ou moins difficile
que les postes administratifs auxquels les enseignants sont promus.
Deuxièmement, cela détourne les enseignants de l’enseignement à
proprement parler et, de ce fait, introduit des quotas pour ces fonctions
(car tout le monde ne peut les assumer). Troisièmement, cela crée un
manque d’articulation des compétences si les enseignants sont promus
sur la base de leurs compétences pédagogiques à des fonctions qui
requièrent d’autres aptitudes, notamment en matière de gestion.
Singapour15 a trouvé une solution judicieuse à ces problèmes
tout en conservant le salaire lié au poste dans sa structure de carrière.
Il existe ainsi trois filières de promotion, notamment une pour les
enseignants qui veulent rester dans des fonctions d’enseignement,
et une pour les fonctions de direction. Dans la filière du maintien
de l’activité d’enseignement, les responsabilités supplémentaires
assumées étant par nature pédagogiques (par exemple le mentorat
auprès d’autres enseignants), les enseignants continuent à être
devant leurs classes, sauf à l’échelon le plus haut (maître-enseignant
principal). Dans la filière d’encadrement comme dans la filière
d’expertise, les enseignants sont promus sur la base de compétences
différentes. Par ailleurs, les chefs d’établissement et les fonctionnaires
ministériels recherchent des enseignants possédant des qualités de
leadership ou des compétences spéciales et les développent par des
programmes de formation.

15. Pour plus de détails sur la structure de carrière à Singapour, voir la fiche consacrée à ce pays
page 138.

97
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Postes et filières
Singapour possède la structure la plus sophistiquée en termes de
nombre de postes ou de fonctions et de nombre d’échelons ou de
filières. Cette structure est illustrée par la Figure 3.
Figure 3. Structure de carrière à Singapour
Directeur général de l’éducation
Recteur Spécialiste en chef
Recteur adjoint
Directeur académique Spécialiste principal
Chef d’établissement Spécialiste chef de file
Chef d’établissement adjoint
Responsable de département Spécialiste de niveau 2
Responsable Spécialiste de niveau 1
de niveau/discipline
Filière de l’encadrement Filière de l’expertise

PROFESSEUR ENSEIGNANT EN CLASSE

Source : Ministère de l’Éducation de Singapour : moe.gov.sg/careers/teach/career-information

Les trois filières – enseignement, encadrement et expertise –


offrent aux enseignants plusieurs choix de déroulement de carrière. Le
nombre de postes est impressionnant, avec au minimum quatre dans
chaque filière. La filière « encadrement » donne la possibilité d’évoluer
jusqu’au poste de directeur général de l’éducation. La République de
Corée dispose, elle aussi, de trois filières, mais seulement aux niveaux
administratifs les plus élevés (tous les enseignants doivent passer par
les grades 2 et 1 avant d’opter pour la filière supérieure de directeur
adjoint et directeur d’école, chercheur et chercheur confirmé, ou
superviseur et inspecteur académique).
La plupart des autres échelons de carrière ne comportent quant à
eux que deux filières : la filière traditionnelle qui conduit à des postes
de direction et aux fonctions de chef d’établissement, et la filière
– généralement récente – qui conduit à des échelons plus élevés mais
où l’enseignement reste la composante principale du poste. C’est le cas
des systèmes et propositions de systèmes en Angleterre et au Pays de
Galles, en Australie, en Espagne, en Estonie, aux États-Unis (Arizona
et Illinois), au Ghana, en Nouvelle-Zélande, en Pologne, au Portugal,
en République de Corée, en République tchèque, à Shanghai (Chine),
en Slovaquie, en Suède et dans certains cantons suisses.

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Les systèmes d’échelons de carrière

Le modèle à quatre échelons semble être le plus courant. C’est


celui adopté notamment par l’Australie, l’Estonie et la Pologne. Dans
un discours prononcé en janvier 2014, le Premier ministre néo-
zélandais a présenté quatre nouvelles fonctions (Key, 2014), sans
expliquer vraiment comment elles vont s’intégrer dans des échelons de
carrière. La charte de carrière des enseignants proposée par la Jordanie
prévoit quant à elle sept postes dans la filière « enseignement », et six
dans la filière « gestion de l’éducation » (Ghazleh, non daté).

Encadré 1. Les promotions pédagogiques à Cuba


Il existe à Cuba une filière de promotion fondée sur l’expertise pédagogique et
comportant deux catégories :
• Les responsables pédagogiques (jefe de circulo pedagógico) interviennent au
niveau de l’école. Ils dirigent le travail d’équipe des enseignants et l’échange de
bonnes pratiques au sein de l’école.
• Les responsables méthodologiques (metodologo) exercent au sein de la
municipalité. En collaboration avec les écoles de leur district, ils sont chargés
d’élaborer des stratégies visant à améliorer l’apprentissage des élèves.
(Bruns et Luque, 2014)

Les autres échelons de carrière innovants qui ne figurent pas


dans le tableau 9 sont ceux qui suivent principalement une structure
traditionnelle fondée sur les postes, qui oblige les enseignants à
assumer des fonctions de gestion, mais prévoit seulement un type
de poste permettant aux enseignants d’être promus sans abandonner
l’enseignement en classe. La Colombie a des « maîtres enseignants »
qui sont sélectionnés de façon rigoureuse et inspectés par des pairs
avant de se voir confier la tâche d’intervenir et d’apporter leur soutien
dans les écoles locales (Bruns et Luque, 2014). Ce système semble
efficace : la Colombie est le seul pays d’Amérique latine où les élèves
des écoles rurales réussissent mieux que leurs camarades citadins
(Bruns et Luque, 2014).

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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

Tableau 9. Échelons de carrière des enseignants


dans quelques pays
Système Échelons de carrière*
Australie (proposition) Enseignant diplômé
Enseignant expérimenté
Enseignant de haut niveau
Enseignant chef de file
Cuba Enseignant
Responsable pédagogique
Responsable méthodologique
Estonie Enseignant débutant
Enseignant
Enseignant confirmé
Enseignant méthodologue
Éthiopie Enseignant
Enseignant confirmé
Enseignant assistant chef de file
Enseignant chef de file
Jordanie (proposition) Enseignant novice
Enseignant débutant
Enseignant confirmé
Enseignant expert
Enseignant mentor
Maître enseignant
Enseignant référent
Nouvelle-Zélande (proposition) Enseignant
Enseignant chef de file
Enseignant expert
Pologne Enseignant stagiaire
Enseignant sous contrat
Enseignant titulaire
Enseignant agréé
République de Corée Enseignant de grade 2
Enseignant de grade 1
Maître enseignant
Singapour Enseignant de classe
Enseignant confirmé
Enseignant chef de file
Maître enseignant
Maître enseignant principal
* Sont présentés les échelons prévoyant des promotions sans renoncer totalement à l’enseignement
en classe. Ces pays ont également des structures de carrière traditionnelles avec des fonctions de
gestion qui conduisent à des postes de chef d’établissement, voire au-delà.

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Les systèmes d’échelons de carrière

Encadré 2. Le danger des structures de carrière


à échelon unique au Mexique
Au Mexique, le programme Carrera Magisterial a mis en place, à destination des
enseignants reconnus pour leur excellence, un échelon unique qui correspond
davantage à une augmentation de salaire qu’à un nouveau poste et illustre un
problème que posent les structures à un seul échelon. Selon le Rapport mondial de
suivi sur l’EPT (EPT, 2014), il est peu probable que Carrera Magisterial ait beaucoup
contribué ces dernières années à améliorer les résultats d’apprentissage au Mexique
car, une fois qu’ils ont rempli les conditions pour bénéficier de cette promotion, les
enseignants ne sont plus incités à poursuivre leurs efforts d’amélioration.

Durée des promotions


On peut fixer une date d’expiration aux promotions et demander
aux enseignants de repostuler. Ou bien encore vérifier leur statut
après quelques années. Aux États-Unis, par exemple, le certificat
des NBPTS est délivré pour une durée de 10 ans, après quoi les
enseignants doivent renouveler leur certification pour conserver leur
statut NBPTS (NBPTS, 2015b). Cette exigence de renouvellement de
la certification repose sur l’hypothèse que la pratique des enseignants
peut se dégrader, d’où la nécessité de réévaluer après un certain temps
les qualités et les compétences ayant permis la certification initiale. Les
enseignants peuvent postuler au renouvellement de leur certification
auprès du conseil d’établissement. Il les confirme dans leur statut si
l’évaluation est positive.
En Équateur, la réforme de la carrière des enseignants remédie
au problème de la dégradation des compétences en obligeant
les enseignants à atteindre l’échelon suivant ou à renouveler leur
certification au même échelon tous les quatre ans. S’ils n’obtiennent
pas le renouvellement de leur certification, ils sont rétrogradés d’un
échelon (Bruns et Luque, 2014). Les enseignants néo-zélandais sont
enregistrés à titre temporaire à l’issue de leur formation initiale et
nommés à un poste ; après quoi ils doivent se faire titulariser. Une fois
titularisés, ils ont l’obligation de renouveler leur certificat d’exercice
tous les trois ans. Autrement dit, ils se soumettent à une évaluation au
cours de laquelle ils sont jugés par rapport aux critères des enseignants
titularisés. Cette évaluation est conduite par un responsable
professionnel qui indique ensuite au conseil des enseignants si le
certificat d’exercice de l’enseignant peut être renouvelé (Haig, 2015).
101
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

De même, en Australie, les enseignants du secteur catholique du


Territoire du Nord doivent renouveler leur inscription auprès du
NTTRB (comité d’inscription des enseignants) tous les cinq ans, et
pour cela constituer un dossier sur leurs activités de développement
professionnel et de recherches pendant cette période, ainsi que sur leur
performance en tant qu’enseignant (Marshall, Cole et Zbar, 2012).
La proposition de structure de carrière en Jordanie aborde cette
question de la durée un peu différemment. Les enseignants choisissent
entre la voie accélérée qui consiste à atteindre en trois ans les critères
imposés pour chaque promotion, et la voie normale qui leur laisse cinq
ans entre deux promotions pour remplir les critères. Les enseignants ne
satisfaisant pas à ces exigences bénéficient de deux ans supplémentaires
et s’ils ne réussissent toujours pas au bout de ce délai, ils perdent leur
poste (Ghazleh, non daté).
Évaluation facultative à des fins de promotion
Des systèmes ont décidé de rendre facultatifs certains éléments des
nouveaux échelons de carrière. Ainsi, en Australie les deux premiers
grades –  « diplômé » et « expérimenté » – sont obligatoires, mais
les enseignants sont libres de postuler ou non aux grades de « haut
niveau » et « chef de file » (Ingvarson, 2013).
D’autres systèmes ont conservé dans son intégralité la grille
salariale unique (où la rémunération des enseignants augmente chaque
année indépendamment de toute évaluation), mais en y ajoutant un
échelon facultatif. Les enseignants continuent à progresser le long de
l’échelle salariale en fonction du nombre d’années d’enseignement,
mais ils peuvent aussi, s’ils le souhaitent, se soumettre à un processus
de certification comprenant parfois plusieurs niveaux. L’obtention
de cette certification (qui passe notamment par une évaluation de
l’enseignement) peut permettre d’accéder à un échelon salarial plus
élevé. C’est le cas dans de nombreux États des États-Unis pour les
enseignants qui passent les NBPTS. Si ce système incite certains
enseignants à améliorer leur pratique, c’est néanmoins une option
dispendieuse et qui n’empêche pas les enseignants peu motivés de
progresser le long de l’échelle salariale quoi qu’il advienne.
Au Chili, le programme « Excellence de l’enseignement » repose
sur une certification facultative. Les enseignants peuvent demander à
être évalués pour atteindre le niveau « Excellence » : ils passent un
102
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Les systèmes d’échelons de carrière

test et présentent un dossier comprenant des enregistrements vidéo


de leurs cours. Ils sont jugés par rapport à des normes, mais un quota
fixe chaque année le nombre d’enseignants qui peuvent être élevés à
ce grade. Ceux qui réussissent cette évaluation perçoivent une prime
pendant quatre ans, après quoi leur rémunération revient à son niveau
antérieur (Vegas, 2005).
Preuves d’efficacité
Peu nombreuses, les données de recherche sur les échelons de carrière
des enseignants sont principalement des évaluations des politiques
appliquées aux États-Unis. Dans leur rapport sur la politique de
carrière des enseignants en Amérique latine, Bruns et Luque (2014)
indiquent qu’il n’existe pas de données expérimentales sur les réformes
des plans de carrière, en Amérique latine comme ailleurs dans le
monde. Bien que plusieurs pays aient mis en place des structures de
carrière – certaines sont établies de longue date, comme à Singapour,
par exemple –, nous n’avons pu trouver qu’une évaluation quantitative
d’un programme national de structure de carrière : celle rendue
publique par le Portugal. Il est difficile de tirer des conclusions sur les
programmes d’échelons de carrière des enseignants en général ou sur
leur efficacité en particulier tant il y a de variables internes et externes
qui contribuent à leur succès comme à leur échec. Au lieu de chercher
à justifier ou réfuter les échelons de carrière en tant que concept, il est
plus utile d’examiner les caractéristiques individuelles des structures
de carrière qui sont efficaces et de celles qui ne le sont pas afin d’en
tirer des conclusions pour leur conception.
Le programme de l’Arizona
Dans cet État, le programme relatif à la carrière des enseignants prend
la forme d’une législation centrale qui s’applique à tous les districts
scolaires qui s’engagent dans le programme. Cette législation les oblige
à mettre en place des structures de carrière fondées sur les principes
suivants (Arizona, 2015) :
• Les niveaux et échelons doivent être liés à des critères
spécifiques d’avancement.
• La décision d’avancement doit être prise
par plusieurs personnes.
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

• L’avancement doit s’appuyer sur des niveaux croissants


de résultat des élèves.
• L’avancement doit se baser sur des niveaux croissants
de compétences pédagogiques.
• L’avancement doit s’établir sur des niveaux croissants
de responsabilité.
• Le programme doit offrir des possibilités satisfaisantes
de développement professionnel.
Chaque district participant conçoit librement son propre système, en
prenant en compte ces principes. Mais il doit de temps à autre soumettre
ses projets aux autorités de l’État, qui vérifient sa conformité avec la
législation. Comme le montrent ses principes, le système de l’Arizona est
à la fois holistique (fondé sur des normes) et critérié (promotion sans
compétition). Il possède des composantes d’élargissement des fonctions
et de rémunération liée à la performance. Cette dernière est spécifiée de
deux manières : les résultats des élèves et les compétences pédagogiques.
En fait, la plupart des districts ne mesurent pas les résultats des élèves par
des tests à enjeu élevé, mais plutôt par des contrôles de connaissances
internes à l’école. Les compétences pédagogiques sont généralement
évaluées par des inspections et les dossiers soumis à un conseil extérieur
à l’école.
Pour des raisons de financement, seuls 28 districts scolaires de
l’État ont participé au programme, ce qui a permis à des chercheurs de
faire des comparaisons expérimentales entre les districts participant et
les autres. En 1994, Sloat a comparé la performance des élèves dans les
14 districts ayant participé dès le début et celle des élèves des districts
n’ayant pas d’échelons de carrière. Il a constaté que les premiers étaient
plus efficaces que les seconds dans quatre domaines :
1. Décrochage scolaire : dans les districts participants, les taux de
décrochage sont plus faibles de 0,04 % en 1985-86 et de 1,86 %
en 1991-92.
2. Réussite aux examens : supérieure de 5 % en 1991 et de 8 % en
1992 dans les districts participants.
3. Scores NCE composites de l’ITBS : supérieurs de 7,95 % en
1988, de 8,14 % en 1990 et de 9,10 % en 1991 dans les districts
participants.

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Les systèmes d’échelons de carrière

4. Scores moyens ASAP 1993 : scores moyens ASAP 1993 en


8e  classe supérieurs de 4,67 %, à 5,81 % en lecture, mathématiques
et écriture (Sloat, 1994).
La participation au programme d’échelons de carrière étant
facultative pour les enseignants exerçant dans les districts participants,
Sloat (1994) a pu également comparer les performances des élèves
des classes dont les enseignants participaient au programme et celles
des élèves dont les enseignants n’y participaient pas. Il a constaté
que, dans 12 des 14 districts participant au programme, les élèves
dont les professeurs participaient au programme obtenaient de
meilleurs résultats de la maternelle à la 6e classe par rapport à ceux
dont les professeurs n’y participaient pas. Dans tous les districts,
les scores NCE des élèves dont les enseignants participaient au
programme étaient supérieurs de 1,7 % à ceux des élèves de classes
n’y participant pas (Sloat, 1994).
En 2002, Sloat a effectué une autre comparaison, incluant
cette fois les 28 districts participants, et les a comparés aux autres
districts. Il a constaté que les districts participants dépassaient les
districts non participants dans toutes les classes (2 à 8) en lecture,
en langue et en mathématiques, ainsi que l’ont montré les scores
moyens et médians. Le niveau de différence des scores moyens était
statistiquement significatif pour chaque classe et dans toutes les
disciplines, à l’exception de la lecture en 6e classe.
Une étude antérieure de Braver (1989) montre que l’existence
de ce programme n’est pas étrangère aux meilleurs résultats obtenus
par les États participants. Braver a comparé les résultats moyens des
élèves avant et après la mise en œuvre du programme dans les districts
qui y adhéraient et s’est rendu compte que les scores moyens avaient
progressé après la mise en œuvre du programme. Cette évolution des
résultats est cohérente sur les trois années mesurées suite à la mise en
place du programme.
Les échelons de carrière du Missouri
Le système d’échelons de carrière du Missouri est l’une des structures
de carrière les plus anciennes des États-Unis. Elle consiste pour les
enseignants à progresser jusqu’à l’échelon 1, puis de 1 à 2 et de 2 à
3, avec une augmentation de salaire pouvant atteindre respectivement
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

1 500 dollars, 3 000 dollars et 5 000 dollars par an. Les conditions à


remplir pour obtenir une promotion comportent des éléments liés
à la performance, au développement professionnel et aux fonctions
assurées. Les enseignants sont évalués par des administrateurs de leur
école à l’aide d’un outil d’évaluation – Performance Based Teacher
Evaluation Instrument (PBTE) – qui s’appuie sur 20 critères couvrant
six domaines (Silman et Glazerman, 2009) :
1. Susciter l’intérêt des élèves en classe.
2. Évaluer correctement les élèves.
3. Faire preuve d’une bonne connaissance du contenu disciplinaire.
4. Faire preuve de professionnalisme à l’école.
5. Participer au développement professionnel.
6. Adhérer à la mission éducative du district.
Le même ensemble de critères s’appliquant aux différents
échelons, il suffit de remplir ces critères pour postuler à l’échelon 1.
Pour les échelons 2 et 3, il faut afficher une performance supérieure
au niveau escompté pour 10 % et 15 % des critères. Dans une certaine
mesure, ce programme est ainsi fondé sur des normes, mais il laisse
le champ libre à une ambiguïté pour déterminer ce qui compte
comme performance au-delà du niveau escompté. Ces critères étant
les mêmes pour les niveaux 2 et 3, l’essentiel de la différence entre
les niveaux repose par conséquent sur les composantes relatives au
développement professionnel et aux fonctions.
Booker et Glazerman (2009) ont analysé sur neuf ans les
résultats des élèves aux tests de mathématiques et de lecture dans
les 524 districts scolaires de l’État, afin de comparer les niveaux de
réussite dans les districts appliquant les échelons de carrière et dans
les autres. Dans leur analyse, ils ont tenu compte des scores antérieurs
et ont également procédé à une comparaison à l’intérieur de chaque
district en utilisant la variation dans le temps de la participation au
programme. Ils en ont conclu qu’il existait un lien positif entre la
participation des districts au programme et les scores aux tests, mais
que les hausses étaient limitées pour les scores en mathématiques et
statistiquement non significatives pour les scores en lecture.
Se demandant quelles pouvaient être les raisons de ce résultat
décevant, Silman et Glazerman (2009) ont procédé à une étude
de cas qualitative de ce programme d’échelons de carrière, animé
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Les systèmes d’échelons de carrière

quatre groupes de discussion avec des enseignants et interrogé


les responsables de 15 districts scolaires sélectionnés de manière
aléatoire. Ils rapportent que la collaboration entre les administrateurs
et les enseignants à propos du PBTE est souvent mentionnée dans les
groupes de discussion comme dans les entretiens. En particulier la
possibilité pour les enseignants de décider quand ils seront inspectés,
et pour les administrateurs celle de vérifier que les enseignants
remplissent les critères d’avancement afin d’éviter toute confrontation.
Cela rappelle l’importance de recourir à plusieurs évaluateurs et à
des évaluateurs externes pour éviter que les relations personnelles
n’influent sur le résultat de l’évaluation. Silman et Glazerman ont
observé « peu de faits attestant d’une mise en œuvre rigoureuse ou
uniforme du PBTE dans le but d’inciter les enseignants à améliorer
leur performance » (27).
Les autres critères utilisés dans le programme pour accorder une
promotion sont la prise en charge de responsabilités supplémentaires
et la participation à des actions de développement professionnel.
Les responsabilités supplémentaires doivent « excéder la norme de
la profession », autrement dit être exercées en dehors des heures
de classe, et sont décomptées en heures. Pour les enseignants, « La
rémunération selon le système d’échelons de carrière est vue comme
récompensant l’ancienneté et l’accomplissement (preuves à l’appui)
d’activités spécifiques, telles que le mentorat, les activités extrascolaires
ou les stages de développement professionnel homologués » (Silman
et Glazerman, 2009 : 27). Dans ce contexte, et compte tenu de la nature
de l’évaluation, le fait qu’en 2002 49 % des enseignants concernés par
le programme avaient atteint le haut de l’échelle et gagnaient 5 000 $ de
plus par an n’est pas vraiment surprenant (Cornett et Gaines, 2002).
Le programme portugais de rémunération
liée à la performance
En 2007, le Portugal a réorganisé sa grille salariale unique en deux
échelons de rémunération : un échelon supérieur et un échelon
inférieur (Martins, 2010). L’écart entre les deux était particulièrement
important et les enseignants méritants promus de l’échelon inférieur
à l’échelon supérieur voyaient leur salaire augmenter de 25 %, passant
de 2 000  € à 2 500  € par mois. La promotion à l’échelon supérieur
reposait sur les variables de performance de l’enseignant, notamment
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

les résultats des élèves, l’avis des parents, son assiduité, sa participation
au développement professionnel, ses responsabilités managériales et
sa participation à des projets de recherche. Là aussi, ces exigences
s’inspiraient d’éléments liés à la performance, aux fonctions et
au développement professionnel, caractéristiques des trois types
d’échelons de carrière. Or, même si un enseignant était performant
dans tous ces domaines (selon une combinaison sommative), il n’était
pas assuré de pouvoir accéder à l’échelon supérieur, car le nombre de
places disponibles chaque année était limité par un quota. Autrement
dit, il s’agissait d’un système normatif qui mettait les enseignants en
compétition les uns avec les autres.
Martins (2010) a procédé à une analyse de double différence de
ce nouveau programme et considéré deux groupes de contrôle : des
écoles ayant adopté une version allégée du programme et des écoles
n’ayant pas du tout adopté le programme (écoles privées). Il en a
conclu que la réforme a entraîné un déclin relatif significatif et non
négligeable des résultats des élèves aux examens nationaux obligatoires
pour toutes les écoles. S’appuyant sur une analyse approfondie des
départs à la retraite précoces dans les écoles publiques, Martins avance
que la raison de ce déclin est « la cessation de la coopération entre
enseignants due à la compétition pour les promotions, ainsi que la
charge de travail administratif supplémentaire, les deux générant de
l’insatisfaction au travail » (Martins, 2010 : 25). Il faut donc avoir ces
deux facteurs présents à l’esprit lors de la conception de toute structure
de carrière pour les enseignants.
Le système indonésien de certification des enseignants
En 2005, l’Indonésie a adopté une loi de portée générale concernant
les enseignants. Elle réforme un certain nombre de domaines
interconnectés ayant trait à la qualité de la profession dans le but de
conférer un statut « professionnel » à l’enseignement. Elle prévoit
notamment l’élaboration de normes d’enseignement, l’obligation
pour tous les enseignants de suivre une formation minimum de
quatre ans pour pouvoir être certifiés et la création d’une formation
professionnelle postérieure à la formation initiale en quatre ans. Tous
les enseignants doivent être officiellement certifiés, sur la base soit d’un
dossier attestant de la formation suivie par l’enseignant et ses résultats,
soit d’un cours de rattrapage de 90 heures. Un aspect fondamental de
cette réforme est la mise en place d’une « indemnité professionnelle »
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Les systèmes d’échelons de carrière

accordée aux enseignants qui ont obtenu la certification, ce qui


augmente de manière significative leur rémunération et devrait
permettre de pratiquement doubler la masse salariale des enseignants
dans les années à venir (Cerdan-Infantes et Makarova, 2013).
Quand les enseignants obtiennent leur certification, ils
bénéficient d’une augmentation de salaire calculée en fonction de
leur score à l’évaluation annuelle de performance – autre réforme
introduite par la loi relative aux enseignants. Les connaissances et les
compétences des enseignants sont évaluées chaque année par rapport
à des normes, et un développement professionnel adapté à leurs
besoins leur est proposé.
Une étude récente de la Banque mondiale (Chang et al., 2013)
s’est intéressée aux effets de cette loi. Elle constate que la certification
des enseignants et le doublement de leurs revenus n’ont pas produit
les effets attendus en termes d’amélioration de l’enseignement et de
l’apprentissage. Aucune amélioration de la pédagogie ou des résultats
des élèves n’a été observée entre les enseignants d’écoles primaires
certifiés et ceux qui ne l’étaient pas. Ceci concorde avec les travaux de
recherche mentionnés au chapitre 2, qui concluent qu’il ne suffit pas
d’augmenter les salaires des enseignants (dans les pays où les salaires
couvrent déjà les besoins élémentaires) pour améliorer la qualité de
l’enseignement (Abd-El-Fattah, 2010 ; Bennell et Akyeampong, 2007 ;
Delannoy et Sedlacek, 2001 ; Michaelowa, 2002). L’absence d’impact
de la certification sur l’enseignement et l’apprentissage est par ailleurs
difficile à comprendre.
En revanche, les augmentations de salaire et la certification
semblent bien avoir pour effet d’accroître l’attractivité de la profession.
Chang et autres (2013) rapportent que les candidats qui postulent
aux instituts de formation des enseignants ont un meilleur niveau
(de meilleures qualifications) depuis l’adoption de la loi relative aux
enseignants. Le nombre de candidatures augmente chaque année à
un rythme supérieur à la moyenne nationale. Cependant, l’offre de
nouveaux enseignants stagiaires correspond à l’augmentation de la
demande et les bienfaits potentiels de la compétition pour les places
ne se sont pas encore fait sentir (Chang et al., 2013).

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Chapitre 6
Quelles leçons tirer pour concevoir
et mettre en œuvre des structures
de carrière ?

Plusieurs enseignements pour la conception des structures de carrière


des enseignants, tels qu’ils résultent des évaluations et des analyses des
structures existantes, ont été évoqués lors de l’examen des différentes
méthodes et approches de l’évaluation. Ils tiennent compte du rôle
central que joue l’évaluation dans les structures de carrière fondées sur
la performance. Après avoir passé ces enseignements en revue, nous
nous pencherons sur d’autres problématiques propres aux échelons de
carrière des enseignants.
Dans son rapport sur les moyens d’attirer et de fidéliser des
enseignants qualifiés au sein de l’Organisation des États de la Caraïbe
orientale (OECO), la Banque mondiale (2012) tire quelques
enseignements majeurs de la mise en œuvre des échelons de carrière.
Certains correspondent aux bonnes pratiques d’évaluation évoquées
plus haut. Elle affirme que, pour être fiable, toute promotion
doit reposer sur des décisions : prises avec des pairs (des chefs
d’établissement et d’autres acteurs agréés par les principales parties
prenantes, notamment les syndicats d’enseignants), fondées sur
plusieurs sources de données de performance objectives, valides
et fiables. La pluralité des évaluateurs rend la prise de décision plus
fiable et moins subjective, tandis que le recours à des sources multiples
permet au résultat général de remédier aux faiblesses des différentes
méthodes.
Un autre enseignement majeur est l’importance de la clarté
des critères d’évaluation, dans ce que les enseignants doivent faire ou
démontrer pour obtenir une promotion (par opposition à la méthode et
à la responsabilité des évaluateurs) (Banque mondiale, 2012). Comme
indiqué précédemment, différents systèmes ont défini une multitude de
critères que les enseignants doivent remplir, parmi lesquels les scores
des élèves, la participation au développement professionnel, la notation
par les parents ou encore les responsables hiérarchiques. Cela dit, la
110
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Quelles leçons tirer pour concevoir et mettre en œuvre des structures de carrière ?

complexité des critères d’évaluation est un problème majeur, auquel


plusieurs systèmes se sont heurtés. Le plan de carrière de la Caroline
du Nord a ainsi été suspendu à cause de la complexité du système
d’évaluation et des difficultés de mise en œuvre qui en découlaient. Le
programme de la ville de Cincinnati a lui aussi essuyé des critiques, en
particulier ses critères d’évaluation trop difficiles à comprendre pour les
enseignants (Cornett et Gaines, 2002).

Encadré 3. Le statut AST (Advanced Skills Teacher) australien


L’Australie a mis en place en 1990 un statut appelé AST (Advanced Skills Teacher). Il
donnait droit à une rémunération de 4 à 10 % supérieure à la rémunération la plus
élevée de l’échelle salariale de l’époque et qui venait récompenser les enseignants
ayant un excellent niveau de performance. Or, selon Ingvarson (2013), la mise
en œuvre de cette politique a été un échec dans la plupart des États en raison
de l’insignifiance des augmentations de salaire par rapport aux responsabilités
supplémentaires, sources de stress ; l’intention étant par ailleurs qu’ils continuent
à enseigner en classe.
Bien que cette nouveauté s’inscrive dans la politique nationale, les normes et
les critères d’évaluation pour obtenir le statut AST ont été laissés à l’appréciation
des collectivités locales, lesquelles ne possédaient pas l’expertise ou les ressources
nécessaires pour à la fois élaborer des méthodes valides et fiables et les tester. De ce
fait, la méthode d’évaluation la plus courante a consisté à faire passer à l’enseignant
un entretien avec un jury composé du chef d’établissement, d’un collègue, d’un
représentant des collectivités locales et d’un enseignant d’une autre école.
L’évaluation de l’enseignement n’étant pas prise en compte, il est devenu difficile
pour les jurys d’accorder le statut AST sans paraître subjectifs. Cela les a conduits à
accorder ce statut à presque tous les postulants qui remplissaient les conditions, ce
qui lui a fait perdre toute crédibilité.

Une solution consiste à opter pour des critères d’évaluation


normatifs avec des compétences, des connaissances et des pratiques
clairement définies que les enseignants doivent posséder ou
mettre en œuvre afin d’obtenir une promotion. Selon le rapport de
l’OCDE, Teachers for the 21st Century (OCDE, 2013), les normes
sont indispensables pour que les évaluations des enseignants soient
objectives et fiables. Les principales normes de référence utilisées pour
évaluer les enseignants sont :
• le profil professionnel des enseignants ou des normes
d’enseignement (profil général de compétence

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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

des enseignants), avec des profils spécialisés pour certains types


d’enseignants (par exemple : niveau de formation, discipline) ;
• un ensemble de missions générales et professionnelles
des enseignants, avec description des fonctions ;
• au niveau des écoles, un plan de développement de l’école,
un règlement intérieur et un plan annuel d’activité
(OCDE, 2013 : 21).
La façon de démontrer ces compétences (par des inspections
ou l’examen de dossiers) peut être laissée à l’appréciation du district
scolaire local ou des enseignants eux-mêmes, mais les évaluateurs
doivent être formés pour déterminer si oui ou non un enseignant
correspond à ces normes. C’est le contraire d’une approche
sommative, où chaque méthode d’évaluation particulière rapporte un
certain nombre de points ou possède une pondération différente, d’où
un manque de transparence.
Enfin, les données résultant de l’évaluation de la réforme
portugaise par Martins (2010) et découlant de la théorie psychologique
corroborent l’idée que les primes ou les promotions consécutives à
une évaluation doivent être critériées (fondées sur des normes), sans
imposer de quotas, qui sont une source de compétition. Au Portugal,
cette compétition, combinée à une surcharge de travail, a provoqué
une dégradation des résultats des élèves tout en décourageant la
collaboration entre enseignants.
Des difficultés posées par les normes et
le développement professionnel
Un autre aspect important dans la conception des structures de carrière
des enseignants est la facilité avec laquelle les enseignants peuvent
être promus. Des erreurs peuvent être faites dans les deux sens. Des
normes peu exigeantes ou des procédures d’évaluation peu rigoureuses
donnent une promotion à la majorité des postulants. Et ont pour
conséquence une baisse du statut de la fonction, une augmentation
des coûts et le risque de réduire la crédibilité du programme aux
yeux des enseignants. Au Texas, par exemple, 90 % des enseignants
remplissaient les conditions pour les deux premiers échelons de
la structure de carrière proposée. De ce fait, cet État n’a jamais mis
en œuvre les échelons supérieurs de cette structure. En effet, verser
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Quelles leçons tirer pour concevoir et mettre en œuvre des structures de carrière ?

une prime à 90 % des enseignants a coûté trop cher et le fait que neuf
enseignants sur dix puissent prétendre à cette gratification a fait naître
un certain scepticisme chez les enseignants (Cornett et Gaines, 2002).
Le statut AST australien a provoqué le même scepticisme quand il a
été accordé à la plupart des enseignants y postulant (Ingvarson, 2013).
Vegas fait en outre valoir que lorsqu’une promotion est trop facile, elle
incite moins les enseignants à améliorer leur enseignement en classe,
convaincus qu’ils sont de l’obtenir quoi qu’il advienne (Vegas, 2005).
À l’inverse, si les critères de promotion sont trop exigeants ou
si le nombre d’enseignants promouvables est très faible, l’effet sur la
motivation est là aussi minime : les enseignants ne se donnent pas
la peine d’essayer, ou pire, de s’exposer à un stress ou une charge de
travail accrus. En Colombie (voir la fiche n°2, page 132), rares sont les
enseignants qui postulent à une promotion malgré l’augmentation de
salaire substantielle dont elle s’accompagne. Selon Ome (2012 ; cité
dans Bruns et Luque, 2014), ce serait dû en partie au fait que celle-
ci est trop difficile à obtenir. En effet, seulement un cinquième des
enseignants y parviennent.
Selon Delannoy et Sedlacek (2001), la vision de ce que l’on
attend des enseignants « doit être définie à un niveau réaliste » (58).
C’est particulièrement important dans les pays en développement,
où la formation initiale des enseignants est parfois limitée et les
compétences peu développées. Les enseignants doivent avoir
l’impression que les échelons sont accessibles, ce qui implique
de définir les normes des échelons inférieurs par rapport aux
compétences effectives du corps enseignant et, si des éléments liés
aux fonctions s’ajoutent à la charge normale de l’enseignant, de lui
laisser du temps pour les assumer. En Éthiopie, par exemple, cela n’a
pas été le cas : les enseignants se plaignent que les normes à atteindre
à chaque échelon sont trop élevées et que les contraintes de temps
ne sont pas prises en compte (Tekleselassie, 2005). Un enseignant
de huitième classe s’exprime ainsi :
Les enseignants passent la plupart de leur temps en classe ; dans
des classes de 80, 90 voire 100 élèves, quel temps leur reste-t-il
pour faire autre chose ? Vous savez, je n’ai même pas le temps
de donner à chaque élève une appréciation sur ses devoirs en
classe ou à la maison. Maintenant, on nous demande de faire de
la recherche, de participer à plusieurs activités extrascolaires et,
113
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

pire encore, de participer aux activités de la communauté. Si on


ne se conforme pas à ces exigences, on perd sa promotion. Que
peut-on faire face à de telles contraintes ? Faire croire qu’on a fait
ce qu’en réalité on n’a pas fait ? Ou quoi ? (Tekleselassie, 2005 :
624).
Toute décision sur le degré de facilité ou de difficulté des
critères de promotion doit également tenir compte des ressources
financières disponibles. Si les fonds alloués au programme sont
modiques, les normes peuvent être fixées à un niveau relativement
haut afin de limiter le nombre d’enseignants susceptibles d’atteindre
les échelons les plus élevés, donnant droit aux salaires les plus
importants. Dans un rapport pour le Business Council of Australia
(BCA), Dinham, Ingvarson et Kleinhenz (2008) font cette analyse
pour l’Australie et avancent que, pour être équilibré, le système
national de certification des enseignants doit comprendre 30 %
d’enseignants au niveau « expérimenté » et 10 % au niveau « chef de
file ». Mais ils disent clairement que, pour parvenir à cet équilibre,
il faut conférer aux normes des niveaux de difficulté différents selon
les échelons de promotion. Ils déconseillent aussi de fixer des quotas
d’enseignants promouvables à chaque échelon.
Ne pas négliger le développement professionnel
Même avec des échelons de carrière parfaitement conçus et des
normes ou exigences clairement énoncées pour accéder à chaque
échelon, les enseignants peuvent être dans l’incapacité d’atteindre
ces normes faute de possibilités de développement professionnel de
qualité. Heneman III (1998) a procédé à une analyse qualitative de
ce que les enseignants d’un district de Caroline du Nord pensaient du
plan de performance en vigueur et a constaté que, malgré une opinion
globalement positive, ils doutaient de leur capacité pédagogique à
atteindre les objectifs de réussite scolaire des élèves qui leur avaient
été fixés. Ils pensaient avoir suffisamment de ressources, mais
estimaient qu’ils manquaient entre autres, de possibilités de travailler
en équipe, en matière d’enseignement comme de planification, de
possibilités de recueillir des informations sur les bonnes pratiques
comme de se perfectionner. Tekleselassie signale un problème
similaire à propos de la structure de carrière en Éthiopie (voir la
fiche n° 4, page 136), où on demande aux enseignants d’accomplir
114
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Quelles leçons tirer pour concevoir et mettre en œuvre des structures de carrière ?

des tâches pour lesquelles ils n’ont pas été formés, par exemple des
travaux de recherche.
Ce n’est pas sans rapport avec la distinction faite par Bennell
et Akyeampong (2007) entre la motivation d’intention et la
motivation de capacité. Ces enseignants sont dans la situation où
ils ont la première mais pas la seconde, ainsi décrite par Bennell et
Akyeampong : « une enseignante peut être extrêmement motivée
pour atteindre les objectifs d’apprentissage de l’école, mais ne pas
avoir les compétences nécessaires pour enseigner efficacement, ce
qui finit par la décourager et la démotiver » (40). Alors que si les
enseignants n’ont pas les compétences mais sont considérés comme
ayant néanmoins satisfait aux nouvelles normes, le système n’est
plus qu’un passage obligé purement bureaucratique et ne permet
pas d’atteindre le but recherché, qui est d’améliorer l’éducation des
enfants. Avoir accès au développement professionnel est donc crucial
pour assurer le succès de toute nouvelle structure de carrière. Dans
ses principaux enseignements pour la mise en œuvre des échelons de
carrière des enseignants, la Banque mondiale (2012 : 45) affirme que
le développement professionnel des enseignants « doit faire partie du
plan, notamment en prévoyant les mises en disponibilité, les aspects
financiers, etc. » La structure de carrière de Singapour (voir la fiche
n°5, page 138) a trouvé un moyen efficace de gérer cet aspect. Avant de
bénéficier d’une promotion, les enseignants doivent suivre des cours
de développement professionnel destinés à les préparer aux fonctions
auxquelles ils postulent.
Il est important que les possibilités de développement
professionnel correspondent aux critères ou normes d’enseignement
définis par les échelons de carrière. La mise en place d’échelons de
carrière de ce type peut faciliter l’organisation du développement
professionnel en lui donnant une orientation claire. Pour Dinham,
Ingvarson et Kleinhenz (2008), tout système de développement
professionnel devrait comporter au minimum les quatre éléments
suivants :
• Des normes d’enseignement définissant en détail
ce que l’on attend des enseignants.
• Des jalons de perfectionnement des enseignants
avec incitations et récompenses pour ceux qui les atteignent.
115
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

• Des ressources pour le développement professionnel


des enseignants en accord avec les normes.
• Un processus légitime et facultatif de certification
professionnelle, basé sur des évaluations de la performance
réelle.
Anticiper les aspects financiers
De nombreux systèmes d’échelons de carrière échouent faute de
financement. Il est important, avant toute mise en œuvre, d’anticiper
leurs implications financières et de prévoir des dotations budgétaires
suffisantes. Avec certains modèles de structure de carrière, une
augmentation des dépenses salariales est inévitable. Ainsi, les États
américains qui ont ajouté de nouvelles fonctions à la grille salariale
unique ont généré des coûts supplémentaires. En effet, les enseignants
continuent par ailleurs à bénéficier d’augmentations de salaire en
fonction de leur ancienneté et de leurs qualifications en plus de ce
qu’ils gagnent en accédant aux nouveaux échelons (Cornett et Gaines,
2002). À l’inverse, la législation de l’Arizona relative aux échelons
de carrière des enseignants (voir la fiche n°1, page 129) exige des
districts scolaires qu’ils restructurent les salaires des enseignants au
lieu de superposer les échelons à la structure existante. C’est ce qui
aurait assuré la stabilité du plan de l’Arizona en faveur des enseignants
(Cornett et Gaines, 2002). Cela dit, ce programme a lui aussi nécessité
des financements supplémentaires.
À condition de le concevoir de manière à ce que les sommes
dépensées pour les échelons supérieurs de carrière se substituent
à celles qui auraient été allouées aux salaires des enseignants ayant
le plus d’ancienneté (indépendamment de leur performance),
un nouveau système de rémunération peut avoir, à long terme,
les mêmes coûts salariaux que le système actuel (Hawley Miles,
Pennington et Bloom, 2015). Il est en théorie possible –  mais ni
souhaitable, ni pratique –, dans un système d’échelons de carrière, de
réduire les dépenses salariales en accordant uniquement à ceux qui
accèdent à un nouvel échelon à la suite d’une évaluation rigoureuse
réussie les mêmes augmentations que celles qu’ils obtiendraient
automatiquement dans le cadre d’une grille salariale unique. En
réalité, un tel système ne serait pas accepté par les enseignants.
Dans la négociation, le risque de ne pas bénéficier d’augmentations
116
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Quelles leçons tirer pour concevoir et mettre en œuvre des structures de carrière ?

automatiques doit être au moins compensé par la possibilité de


gagner davantage que ce qu’on aurait gagné pour une performance
excellente. De plus, la situation salariale dans de nombreux pays
en développement est déjà tellement difficile que toute réduction
perçue comme telle aggraverait la pénurie d’enseignants et
démoraliserait encore plus ceux qui sont en exercice. Que la facture
salariale augmente ou non, la mise en place d’un programme
efficace risque de générer à long terme des coûts supplémentaires
pour financer un développement professionnel adapté aux normes
d’enseignement, ainsi que des coûts administratifs d’évaluation et de
tenue des dossiers (Milanowski, 2003).
La mise en œuvre d’un nouveau système peut également avoir
un coût initial de transition et ce pour deux raisons. Premièrement,
le nouveau système entraînera une diminution de salaire pour ceux
des enseignants qui sont en haut ou presque de l’échelle salariale.
Des systèmes qui, comme celui de Cincinnati, ont essayé d’inclure
dans le nouveau plan tous les enseignants (à l’exception des plus
anciens, relativement peu nombreux), se sont sans surprise heurtés
à une résistance des syndicats d’enseignants, freinant ainsi l’adhésion
(Milanowski, 2003). D’autres, au contraire, ont préféré continuer
à payer ces enseignants jusqu’à leur départ à la retraite ou pendant
plusieurs années de transition en maintenant leur salaire à un
niveau constant, à défaut de continuer à l’augmenter. Cela rendait
le système d’échelons de carrière facultatif pour ces enseignants
et obligatoire pour les nouveaux (Hawley Miles, Pennington et
Bloom, 2015). Deuxièmement, pour réussir la mise en œuvre d’un
nouveau système d’échelons de carrière, toute personne chargée
d’évaluer les enseignants doit être correctement formée. La qualité de
cette formation est cruciale. En Indonésie, en raison d’un retard de
financement, ces cours de formation ont été conçus à la hâte et se sont
avérés inefficaces. Cela s’est traduit par des taux de réussite de près de
100 % à l’issue de la formation, ce qui suggère également un manque
d’impartialité dans les décisions d’évaluation (Chang et al., 2013).
La façon dont la structure de carrière est conçue a une incidence
non seulement sur la quantité d’argent dépensée, mais aussi sur la
prévisibilité des dépenses salariales annuelles. Comme nous l’avons
vu plus en détail au chapitre 4, l’évaluation normative (où un nombre
donné d’enseignants sont promus en fonction de leur performance
117
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

relative) permet souvent de déterminer le budget nécessaire avec


plus de certitude que l’évaluation critériée (où tous les enseignants
qui satisfont aux normes bénéficient d’une promotion).
L’Éthiopie (voir la fiche consacrée à ce pays en fin d’ouvrage)
utilise un système critérié. Les enseignants doivent répondre à certains
critères pour bénéficier d’une promotion. Cependant, une évaluation
normative est utilisée pour les échelons les plus élevés. À ce niveau,
les meilleurs de ceux qui remplissent les critères bénéficient d’une
promotion. Cela offre plus de certitude budgétaire, sans générer de
compétition ni réduire la collégialité entre les enseignants jusqu’aux
échelons les plus élevés de la carrière. De toute façon, à ce niveau-là,
les enseignants en concurrence viennent souvent d’écoles différentes.
L’Estonie (voir la fiche consacrée à ce pays en fin d’ouvrage)
utilise un système critérié à tous les échelons, mais les collectivités
locales peuvent prévoir avec exactitude le montant des dépenses car
les salaires ne sont pas fixes. En effet, un salaire minimum est garanti
aux enseignants, de même qu’est garantie une augmentation de salaire
pour toute promotion, mais la somme exacte accordée à chaque
enseignant dépend du nombre d’enseignants à chaque échelon.
Appropriation et gestion de la réforme
Il ne suffit pas que les enseignants comprennent le système
d’évaluation, il faut aussi qu’ils adhèrent au programme de carrière et
qu’ils le considèrent comme équitable et intéressant si l’on veut qu’il
ait un impact positif sur leurs motivations ou leurs compétences.
Pour cela, il est essentiel de faire participer les enseignants et leurs
représentants à la conception initiale et au développement du
système. Sans l’adhésion d’une masse critique d’enseignants, tout
nouveau programme de rémunération est voué à l’échec (Cornett
et Gaines, 2002 ; Banque mondiale, 2012). Or, cette adhésion d’une
masse critique est loin d’être la norme concernant les changements
politiques visant les enseignants, comme en témoigne un sondage
effectué par le VSO au Malawi, en Papouasie-Nouvelle-Guinée et en
Zambie. Il montre que la participation insuffisante des représentants
des enseignants à l’élaboration de la politique est une cause majeure
d’insatisfaction (VSO, 2002).
Delanoy et Sedlacek (2001) font remarquer que toutes les
réformes dont ils ont connaissance ont nécessité des négociations avec
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Quelles leçons tirer pour concevoir et mettre en œuvre des structures de carrière ?

les syndicats d’enseignants sur les « droits acquis », car les enseignants
passaient d’un système qui leur garantissait des augmentations de
salaire à un système où celles-ci étaient subordonnées à une évaluation.
Ils proposent trois recommandations, issues de l’État du Connecticut :
Premièrement, l’existence d’un consensus social sur la nécessité
de la réforme est une condition préalable indispensable. [...]
Deuxièmement, la nécessité d’échelons salariaux différenciés
(en fonction de la performance) doit être mise en balance avec
la nécessité de rendre les salaires des enseignants compétitifs sur
le marché (en tenant compte des avantages pécuniaires et non
pécuniaires). Troisièmement, la vision de ce que l’on attend des
enseignants, le « contrat social », doit être définie à un niveau
réaliste (Delanoy et Sedlacek, 2001 : 58).
Une bonne communication et un partage de l’information au
moment opportun sont eux aussi importants pour obtenir l’adhésion
sur le long terme des enseignants, en particulier de ceux qui n’ont
pas été associés directement au processus de conception et de mise
en œuvre. La Banque mondiale (2012) estime que « les enseignants
devraient être informés clairement, rapidement et en détail des
procédures d’évaluation et des politiques afférentes » (45).
Si les enseignants et leurs représentants syndicaux doivent être
associés à la conception du système d’évaluation et y apporter leur
contribution, ils ne doivent pas être considérés comme les seuls
responsables de sa performance, sauf à posséder l’expertise nécessaire
(par exemple en tant que membre d’une association professionnelle
d’enseignants). En s’appuyant sur les enseignements tirés de la mise en
œuvre du programme AST en Australie, Invargson (2013) affirme que :
Il faut une séparation claire entre le système de certification
qui doit être réglementé par un organisme professionnel, et les
systèmes de décision relatifs à la rémunération associée à cette
certification, lesquels doivent être légitimement négociés entre
les syndicats d’enseignants et les collectivités locales (248).
Le système de certification, composé d’un ensemble de critères
et de processus qui serviront à juger si les enseignants les ont remplis,
doit être conçu, avec les parties prenantes, par des spécialistes en
conception d’évaluations. Son but doit être d’élaborer un système
valable et fiable, inspiré notamment par l’expérience des enseignants.
119
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

L’État d’Arizona a adopté une législation qui définit un cadre


clair pour la conception des systèmes. Il donne aux districts scolaires
la liberté de décider de quelle façon ils le mettront en œuvre dans leurs
circonscriptions (Driscoll, 2015). Une fois qu’ils ont élaboré leurs
programmes, les districts doivent les soumettre à l’État, qui les valide.
L’équilibre entre autorité centrale et flexibilité locale dépend du niveau
de compétence des collectivités locales, du degré d’autonomie auquel
collectivités et écoles sont habituées et auquel elles estiment avoir
droit, mais aussi de la facilité avec laquelle les districts peuvent être
chargés des éléments du programme imposés par l’autorité centrale
(ce qui dépend, en partie, de la géographie du pays). Si les responsables
locaux ont généralement une meilleure connaissance du contexte
scolaire local ainsi que des capacités et besoins des enseignants, le
gouvernement central a plus d’expertise en matière de conception
de programmes, de mise en cohérence des systèmes d’évaluation des
enseignants et des objectifs nationaux.
Fullan et Miles (1992) nous rappellent toutefois qu’il est
particulièrement peu judicieux d’imposer des changements importants,
car ils exigent de la motivation, un savoir-faire et un jugement
discrétionnaire de la part de ceux qui doivent changer : enseignants et
chefs d’établissement.
Mise en œuvre
Mettre en place une structure de carrière pour les enseignants est
une entreprise considérable. Tout comme la conception d’une
structure de carrière, sa mise en place doit être planifiée (Banque
mondiale, 2012). Cela exige un investissement substantiel de la part
des principaux acteurs concernés, notamment des services centraux
et locaux en charge de l’éducation, les syndicats d’enseignants, les
universités, etc. Mais cela exige aussi un consensus entre ces groupes
sur les normes ou critères qui définissent la qualité d’un enseignant
et sur la façon de mesurer cette qualité (OCDE, 2013). Le ministère
des Finances, en particulier, doit être associé dès le début du
processus. En effet, faute d’être correctement chiffrée et budgétée,
la réforme ne pourra être mise en œuvre. Il faut prendre le temps de
former les évaluateurs (qu’il s’agisse de membres du personnel des
écoles ou d’autorités extérieures), de donner aux écoles comme aux
enseignants le temps de se préparer et de comprendre le nouveau
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Quelles leçons tirer pour concevoir et mettre en œuvre des structures de carrière ?

système, la logique qui le sous-tend et les normes auxquelles


ils devront se conformer. Trop souvent, les réformes sont de
circonstances et ne sont pas coordonnées entre elles. Il faut prêter
attention et consacrer du temps à la façon dont la réforme proposée
s’articule avec les autres réformes éducatives afin que l’effet global
soit cohérent et que les différentes politiques aillent toutes dans le
même sens (Fullan et Miles, 1992).
Pour aider à la mise en œuvre, il peut être utile d’effectuer un
essai à une échelle réduite, ce qui permettra d’aplanir les difficultés
ou de corriger les erreurs avant de lancer le programme à grande
échelle. Cette approche facilite également la planification budgétaire
car elle permet aux collectivités locales d’estimer avec plus de
précision la proportion d’enseignants susceptibles d’atteindre
chaque échelon et d’ajuster en conséquence les promesses de salaire
avant le lancement général. Ainsi, la facture salariale ne dépasse pas
les limites budgétaires.
Autres obstacles
Il existe d’autres obstacles potentiels dont il faut être conscient
quand on conçoit et met en œuvre une nouvelle structure de carrière
des enseignants. Dans de nombreux pays, les enseignants sont des
fonctionnaires dont le salaire est basé sur des grilles de rémunération
communes à tous les fonctionnaires. Cela peut être une difficulté
supplémentaire pour mettre en œuvre une nouvelle structure de
carrière, car d’autres fonctionnaires peuvent vouloir en bénéficier
eux aussi. À propos de ce lien entre la structure de carrière des
enseignants et celle des autres fonctionnaires, une solution peut être
d’adopter l’approche choisie par l’Éthiopie : maintenir les salaires
des enseignants dans le cadre général, mais utiliser une autre échelle
salariale pour les promotions. Une autre option, loin d’être facile à
mettre en place, consisterait à créer une échelle salariale totalement
distincte pour les enseignants.
Un autre obstacle potentiel est la disponibilité ou l’existence de
personnes adéquates pour évaluer les enseignants. Les promotions
basées sur une évaluation «  holistique » (qui va au-delà de
mesures limitées comme les résultats des élèves) reposent en partie
sur le jugement de professionnels plus chevronnés. Si les chefs
d’établissement et les responsables locaux de l’éducation ne savent
121
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Structurer les carrières pour motiver les enseignants

pas ou ne comprennent pas ce que doit être un bon enseignement,


la promotion en fonction de la qualité de l’enseignement posera de
véritables problèmes. Dans ce scénario, il est très important que ces
professionnels (ou toute personne chargée d’évaluer les enseignants
en vue de leur promotion) suivent une formation adéquate avant de
mettre en place une nouvelle structure de carrière. Faute de quoi, on
peut se retrouver au début à accorder des promotions à des personnes
qui ne les méritent pas. Et on court alors le risque que les enseignants
perdent confiance dans l’objectivité du système avant même que sa
mise en œuvre soit achevée.

122
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Conclusion

La présente étude de la littérature est consacrée à l’examen les


travaux de recherche sur l’organisation des carrières des enseignants.
Elle est partie de l’hypothèse que, quand les salaires sont suffisants
pour couvrir les besoins élémentaires des enseignants, des modèles
spécifiques d’organisation de carrière peuvent contribuer à renforcer
leur motivation au quotidien ainsi que l’attrait de la profession.
La présente section tire quelques conclusions concernant les cinq
questions posées dans l’introduction.
Quels problèmes spécifiques l’organisation des carrières
des enseignants pose-t-elle dans les pays en développement ?
La grille salariale unique est de loin le moyen le plus courant d’organiser
les carrières des enseignants, dans les pays en développement comme
dans les pays développés. Les problèmes que pose cette structure, et
dont la littérature se fait largement l’écho, sont notamment :
• l’absence de corrélation entre les facteurs régissant
les promotions (certificats et expérience) et l’efficacité
des enseignants ;
• l’absence de responsabilité quant à la qualité
de l’enseignement ;
• l’effet démotivant de la promotion automatique
de collègues peu investis dans leur travail ;
• une structure salariale uniforme qui rend la profession
moins attractive pour les plus capables ;
• l’absence de possibilités de progression de carrière
sans renoncer à l’enseignement en classe ;
• un sentiment limité d’autodétermination.
Changer la structure de carrière des enseignants au profit d’un
système qui leur offre des possibilités de promotion sans renoncer à
l’enseignement en classe et qui subordonne la promotion à la qualité
de l’enseignement pourrait donc potentiellement régler tous ces
problèmes. À condition que ce système soit bien conçu.

123
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Conclusion

Pour faire face à la demande croissante d’enseignants, de


nombreux pays en développement emploient des contractuels en
plus des personnels relevant du régime de grille salariale unique. Or,
bien souvent, ces enseignants ne possèdent pas les qualifications qui
sont exigées des enseignants fonctionnaires. Cette situation crée un
double problème : les élèves qui étudient avec ces enseignants ne
bénéficient pas des avantages qu’offre un professeur qualifié ayant reçu
une formation appropriée et ces enseignants qualifiés ont le sentiment
que le recrutement de candidats moins qualifiés nuit au statut de la
profession. Modifier la structure de carrière des enseignants peut
être un moyen de remédier à ces problèmes. On pourrait placer les
enseignants sous contrat au premier échelon de carrière et leur donner
accès à une formation qualifiante leur permettant d’acquérir le statut
d’enseignant fonctionnaire. Et on pourrait reconnaître les enseignants
qualifiés en leur offrant la possibilité de devenir « chefs de file »
ou « maîtres enseignants ». Cela leur permettrait de se démarquer
professionnellement des enseignants moins qualifiés.
Quels liens existe-t-il entre motivation
et organisation des carrières ?
La grille salariale unique n’est pas de nature à inciter les personnels à
faire des efforts ou à améliorer la qualité de leur enseignement dans
la mesure où, qu’ils le fassent ou non, cela n’a aucune incidence sur
leur carrière ou leur rémunération. Dans ce système effectivement
démotivant, les enseignants doivent trouver en eux-mêmes la
motivation pour être efficaces dans l’intérêt de leurs élèves. C’est ce
que nous avons vu plus haut.
Les types de motivation peuvent être classés selon une échelle
qui va de la motivation contrôlée (où l’on agit sous une pression
extérieure) à la motivation autonome (où l’on agit par désir intrinsèque
d’obtenir un résultat donné). Les incitations extrinsèques, telles que
les primes subordonnées à des résultats spécifiques, peuvent saper
la motivation autonome. C’est une situation à éviter à tout prix
en raison des effets très positifs de la motivation autonome sur la
résolution de problèmes, la persévérance et la créativité.
Le but de toute structure de carrière doit donc être d’encourager
la motivation autonome en créant un environnement qui valorise la
compétence, l’autonomie et de bonnes relations interpersonnelles,
124
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Conclusion

tout en rendant les enseignants comptables de la qualité de leur


enseignement. Pour cela, on peut inclure des incitations extrinsèques
et des mesures dissuasives pour ceux qui manquent de motivation,
en veillant à ce qu’elles ne soient pas perçues comme un contrôle
par ceux qui ont une motivation autonome. En d’autres termes, la
responsabilité de la qualité de l’enseignement est nécessaire, mais doit
être perçue comme créant des conditions favorables à l’autonomie
de tous les enseignants désireux d’améliorer leur pratique afin de
ne pas nuire à leur motivation autonome. Cela peut sembler une
véritable gageure, pourtant certaines structures de carrière semblent
trouver cet équilibre.
Quels sont les différents modèles d’organisation
de la carrière des enseignants dans le monde ?
Outre la grille salariale unique, avec ses augmentations de salaire en
fonction de l’expérience et ses promotions administratives à des postes
de direction exigeant l’abandon de l’enseignement en classe, il existe
trois modèles principaux d’organisation de carrière des enseignants.
Ils subordonnent tous d’une manière ou d’une autre le montant du
salaire à la qualité de l’enseignement. Ce lien est plus ou moins direct,
et la part faite aux conditions favorables à l’autonomie et à la solidarité
professionnelle varie d’un système à l’autre.
Les modèles de rémunération liée à la performance accordent
des primes ponctuelles en fonction soit des résultats des élèves soit
d’une évaluation plus générale de la performance des enseignants.
Un autre modèle est une variante de la grille salariale unique où les
augmentations de salaire à des échéances clés (par exemple tous
les trois ans) sont subordonnées à la réussite d’une évaluation. Les
normes par rapport auxquelles les enseignants sont évalués peuvent
devenir plus exigeantes avec l’ancienneté. Le dernier modèle est
celui des échelons de carrière. Au lieu de progresser le long de
l’échelle salariale en passant des évaluations, les enseignants peuvent
acquérir un nouveau statut ou assumer de nouvelles fonctions, par
exemple enseignant chef de file, s’ils remplissent les conditions.
Leur salaire est alors en rapport avec leur nouveau poste. Il existe
naturellement des variantes de ces trois modèles. Elles concernent,
par exemple, les personnes mandatées pour effectuer les évaluations,
les éléments constitutifs des normes, le caractère obligatoire ou

125
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Conclusion

non du développement professionnel ou encore les éventuelles


responsabilités supplémentaires liées aux nouvelles fonctions.
D’après les études disponibles, quels sont les modèles
les plus efficaces ?
Les études consacrées à ces modèles sont limitées en ce qu’elles ne
permettent pas de tirer de conclusions définitives. Selon celles qui
portent sur la rémunération liée à la performance, ce modèle serait
globalement inefficace, comme le montre le cas des 29 États américains
qui ont mis en œuvre des systèmes de paiement aux résultats en 1986
et les ont depuis abandonnés ou vidés d’une bonne partie de leur
substance. Toutefois, selon deux études sur la rémunération liée à la
performance appliquée en Inde et en Israël à différents enseignants, il
semblerait qu’elle puisse améliorer les résultats des élèves. La question
de savoir si ce succès est dû ou non à un effort de signalement (c’est-
à-dire un effort pour obtenir des résultats à court terme plutôt qu’un
apprentissage réel) est importante et reste à ce jour sans réponse.
Dans les pays développés, la rémunération liée à la performance a
malheureusement incité les enseignants à pratiquer l’entraînement
aux tests, à quitter les écoles « difficiles » et, dans certains cas, à tricher.
Les échelons de carrière sont un modèle plus prometteur car ils
permettent de lier indirectement le salaire à la performance tout en
offrant aux enseignants des possibilités d’évolution professionnelle.
Mais on observe des variations importantes au sein des structures mises
en place dans différents pays, et ces différences de caractéristiques
peuvent produire des résultats hétérogènes. Seuls trois systèmes
d’échelons de carrière ont fait l’objet d’une évaluation quantitative.
Le modèle de l’Arizona est normatif et critérié et fait participer de
nombreux évaluateurs externes aux décisions de promotion. Il a
permis de réduire les taux de décrochage scolaire, d’améliorer les
taux de réussite aux examens et les scores des élèves (par rapport
aux districts n’ayant pas participé au programme). Le modèle du
Missouri comporte des normes applicables aux enseignants qui sont
identiques à tous les niveaux de promotion et confie leur évaluation
aux administrateurs de leur propre établissement. Les résultats en
mathématiques n’ont que marginalement progressé et les résultats
en lecture pas du tout, ce que les évaluateurs attribuent à un manque
de rigueur dans l’application de la procédure d’évaluation dû à la
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Conclusion

connivence entre administrateurs et enseignants. Le Portugal a mis


en place à l’échelle nationale une structure de carrière obligeant
les enseignants à passer une évaluation pour accéder à un nouvel
échelon salarial. Cette disposition est sommative et normative,
mettant les enseignants en compétition les uns avec les autres. Cela
a eu pour effet de faire baisser les scores des élèves après la mise en
place de cette structure.
Il est très important de noter que le succès de ce modèle dépend
probablement d’un certain nombre de conditions préalables majeures
au nombre desquels doivent notamment figurer des ressources
financières suffisantes, un système d’évaluation des enseignants
fiable et transparent, et des cadres législatifs et réglementaires
solides. Il faut donc particulièrement veiller à prendre en compte
les contextes socioculturels et socioéconomiques des pays en
développement. De plus amples études s’imposent pour déterminer
comment fonctionnent les modèles d’échelons de carrière dans ces
contextes particuliers.
Quels enseignements peut-on en tirer pour la conception
et la mise en œuvre de systèmes d’échelons de carrière ?
Cette étude ainsi que des rapports qualitatifs sur d’autres structures de
carrière nous donnent des indices sur les éléments potentiellement les
plus efficaces pour concevoir la carrière des enseignants.
L’évaluation holistique (normative) critériée des enseignants
semble être plus efficace que l’évaluation sommative et normative,
du moins aux échelons de carrière inférieurs. L’évaluation critériée a
des implications financières, puisque quiconque répond aux normes
peut être promu et donc bénéficier d’une augmentation de salaire.
Mais cette incertitude financière peut être corrigée de deux façons :
soit en ajoutant un processus normatif supplémentaire pour opérer
aux échelons les plus élevés une sélection entre les enseignants qui
remplissent les conditions, ce qui génère de la compétition mais permet
de limiter les coûts ; soit en garantissant une augmentation de salaire
à toute personne qui remplit les conditions, mais en fixant le montant
de cette augmentation en fonction du budget global disponible.
L’évaluation par rapport à des normes doit être effectuée par
deux personnes minimum. Aux échelons inférieurs de la carrière, faire
127
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Conclusion

évaluer les enseignants par des membres chevronnés du personnel


de l’école est judicieux d’un point de vue pratique. En revanche, aux
échelons intermédiaires et supérieurs, il sera préférable de faire au
moins contrôler l’évaluation par un évaluateur externe. La formation
des évaluateurs externes et internes aux méthodes d’évaluation par
rapport à des normes doit également précéder la mise en place de la
structure de carrière.
En ce qui concerne les normes proprement dites, il faut associer
des enseignants ou leurs représentants à leur élaboration. Ces
normes doivent être réalistes et prendre en compte les contraintes
de temps pour ceux qui enseignent en classe. Les normes à l’échelon
inférieur doivent pouvoir être remplies par pratiquement tous les
enseignants, tandis qu’à l’échelon le plus élevé elles peuvent être plus
ambitieuses, tout en restant atteignables par des efforts soutenus et un
développement professionnel adapté.

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Annexe : Fiches pays

Fiche n°1 : ARIZONA


Avant son entrée en vigueur, cette organisation de la gestion de carrière des
enseignants de l’Arizona a été développée en 1984 en coopération avec des
responsables politiques, des représentants syndicaux, des enseignants et d’autres
acteurs éducatifs. En 1985, l’État a sélectionné 14 districts scolaires pour participer
à un projet pilote de cinq ans. Plus tard, 14 districts de plus sont entrés dans ce
projet. Par la suite, aucun district supplémentaire n’a pu y prendre part faute de
moyens financiers. Les districts participant au projet scolarisaient environ un tiers
des élèves de l’Arizona.
Comment était construite cette structure de carrière ?
Chaque district participant devait élaborer sa propre structure de carrière en
s’appuyant sur la loi de l’État. Le Career Ladder Program (Programme d’échelons
de carrière) comprenait des niveaux et des échelons dotés chacun d’une fourchette
de salaire. Cela dit, le nombre de niveaux et d’échelons n’était pas précisé par la loi
et variait d’un district scolaire à un autre.
Tous les districts devaient soumettre de nouveau chaque année leur structure
de carrière au State Career Ladder Advisory Committee pour approbation après
contrôle de leur conformité avec la loi. Le personnel de l’Arizona Department of
Education apportait une assistance technique au personnel des districts pour gérer
leur programme d’échelon de carrière.
Sur quoi se fondait la progression de carrière ?
En ce qui concerne la base sur laquelle était établie la rémunération des enseignants,
la législation exigeait que les programmes d’échelons de carrière prévoient :
• Des niveaux croissants de progrès scolaire des élèves, mesurés selon des
critères objectifs ;
• Des niveaux croissants de compétence des enseignants ;
• Des niveaux croissants de responsabilité des enseignants.
Le salaire des enseignants était donc fondé à la fois sur les fonctions et sur la
performance. La législation réclamait également que chaque district prévoie des
possibilités de développement professionnel adéquates et adaptées afin d’aider
les enseignants à acquérir les niveaux de compétences leur permettant de gravir
les échelons. Bien que le développement professionnel ne fût pas une exigence
imposée par la loi pour gravir les échelons, quelques districts imposaient des
activités de développement professionnel dans les responsabilités à assumer par
les enseignants à chaque niveau.

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Annexe : Fiches pays

Comment cela fonctionnait-il en pratique ?


La législation précisait que la promotion devait être fondée sur plusieurs mesures
de la performance de l’enseignant, en particulier la performance pédagogique, les
progrès scolaires des élèves et les responsabilités pédagogiques. Dans la pratique,
la plupart des districts se fondaient sur des mesures des progrès scolaires des élèves
en classe plutôt que sur des tests externes. Il était généralement demandé aux
enseignants de constituer des dossiers montrant leurs aptitudes et compétences.
La législation stipulait qu’au moins deux personnes devaient participer aux
décisions de promotion afin d’en garantir le sérieux, et qu’une procédure d’appel
devait être prévue. Les dossiers étaient souvent soumis à des comités locaux
composés d’enseignants ayant atteint les échelons supérieurs de la structure
de carrière et de parents. Ces comités évaluaient si l’enseignant remplissait les
critères pour l’échelon visé.
On l’a vu, les critères pouvaient différer d’un district à l’autre, mais tous
étaient fondés sur ce que disait la loi. Tous les enseignants qui satisfaisaient
aux critères bénéficiaient d’une promotion, comme le veut tout système critérié.
L’État encourageait activement la collaboration et le travail d’équipe. En ce qui
concerne la composante liée aux fonctions, les districts scolaires avaient un
continuum de responsabilités que les enseignants devaient assumer à mesure
qu’ils gravissaient les échelons.
Y avait-il d’autres primes ou allocations ?
En 1994-1995, une révision de la loi a autorisé tous les districts scolaires à
participer à une composante incitative supplémentaire. Tous les personnels
pouvaient y participer au niveau de chaque établissement, y compris le personnel
non-enseignant. C’étaient les districts qui déterminaient qui percevait l’incitation.
Quelles étaient les implications financières ?
Le financement par des crédits de l’État était calculé selon une formule basée
principalement sur les effectifs d’élèves. Quand cette organisation de gestion de
carrière était intégralement mise en œuvre, les districts pouvaient augmenter
leur niveau de financement de base de 5,5 % maximum, sous réserve du respect
des exigences imposées. Le projet pilote était également financé par les impôts
des districts.
Ce programme a-t-il été évalué ?
Oui, les districts scolaires participant au programme ont été comparés aux
autres. On a constaté chez eux une nette progression des résultats scolaires à
presque tous les niveaux de scolarité et dans presque toutes les disciplines (Stoat,
1994 ; 2002). Pour en savoir plus, voir le chapitre 5.
Ce programme posait-il des difficultés
ou des problèmes particuliers ?
Aucun autre district n’a pu intégrer ce projet pilote depuis 1994 par manque de
moyens financiers. En 2010, un district qui n’avait pu en bénéficier a porté plainte

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Annexe : Fiches pays

contre l’État ; le tribunal a estimé qu’il était contraire à la Constitution de


permettre à certains districts de bénéficier de ce financement et pas à d’autres.
L’État a donc dû choisir entre élargir ce financement à tous les districts souhaitant
participer et abroger ce programme. C’est cette dernière option qu’il a choisie
pour des raisons financières. La conséquence a été un abandon progressif de cette
forme de gestion de carrière.
Sources : Arizona, 2015 ; Driscoll, 2015.

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Annexe : Fiches pays

Fiche n°2 : COLOMBIE


Comment est construite cette structure de carrière ?
Le Estatuto de Profesionalización Docente (EPD, Statut du développement professionnel
des enseignants, en français) de la Colombie a été lancé en 2002 et a marqué un tournant
en regard de l’ancien système, fondé sur l’ancienneté. Les enseignants débutent à l’un des
trois grades du programme en fonction de leur niveau d’études. Chaque grade comprend
quatre échelons de salaire (A, B, C et D), qui peuvent être gravis par l’enseignant au cours
de sa carrière, en fonction de ses compétences. En 2011, dans les trois grades, 94 % des
enseignants étaient à l’échelon le plus bas (A).
Sur quoi se fonde la progression de carrière ?
Pour passer d’un niveau salarial à l’autre, il faut :
• Au moins trois années de service ;
• Avoir obtenu au cours des deux années précédentes un score d’au moins 60 % aux
évaluations annuelles obligatoires de performance ;
• Avoir obtenu 80 points ou plus à l’évaluation des compétences de l’EPD, qui
couvre le comportement, la pédagogie et la discipline enseignée.
La structure de carrière est donc basée uniquement sur la performance, à l’exclusion
des fonctions assumées et du développement professionnel. On le voit, il n’y a aucune
obligation de développement professionnel, alors même que cela peut être très utile pour
acquérir les compétences requises. Par ailleurs, la promotion n’est pas subordonnée à
l’acceptation de responsabilités supplémentaires et n’en crée pas.
Comment cela fonctionne-t-il en pratique ?
Les directeurs d’école évaluent officiellement les enseignants une fois par an et
les notent sur une échelle de 100 qui combine compétences et niveau d’étude. Mais
l’évaluation à des fins de promotion n’intervient que tous les trois ans tout au plus, et
c’est l’agence nationale d’évaluation (Instituto Colombiano para la Evaluación de la
Educación) qui s’en charge avec les collectivités territoriales.
Le résultat de l’évaluation EPD est déterminé de façon sommative (en additionnant
les points obtenus aux différentes composantes de l’évaluation), avec un score plancher
de 80 requis pour obtenir une promotion. Si cela rend officiellement la décision de
promotion critériée, les promotions dépendent en fait du budget disponible, priorité étant
donnée à ceux qui obtiennent les scores les plus élevés. Tout enseignant qui obtient deux
années de suite un score inférieur à 60 est démis de ses fonctions.
Les promotions sont difficiles à obtenir. En 2011, moins de 19 % des candidats ont
franchi le seuil requis pour être promus à un échelon supérieur (B, C ou D) et moins de
22 % ont été promus à un grade supérieur.
Quelles sont les implications financières ?
Les augmentations de salaire qui accompagnent la promotion sont substantielles. Par
exemple, le salaire de base de l’échelon D du grade 2 est supérieur de 81 % à celui du
niveau A. Mais peu d’enseignants remplissent les conditions pour bénéficier de promotions

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Annexe : Fiches pays

et, quand c’est le cas, il n’est pas garanti qu’ils bénéficient de cette augmentation de
salaire car les promotions sont aussi fonction des budgets. Cela rend la facture salariale
de la Colombie plus soutenable. Mais cela instaure aussi une véritable compétition entre
enseignants, ce qui pourrait expliquer pourquoi moins de 60 % d’entre eux ont passé
l’évaluation EPD en 2011.
Ce programme a-t-il été évalué ?
L’évaluation de ce programme pose des problèmes en raison du manque de données
fiables sur la situation avant la réforme. Pour y remédier, Ome (2012) a utilisé l’analyse
de régression dans le but d’établir une éventuelle corrélation entre les résultats aux tests
dans les écoles et la présence d’enseignants ayant passé l’évaluation EPD. Il a constaté
que les écoles avec le plus fort pourcentage d’enseignants participant à l’EPD avaient des
taux de décrochage scolaire inférieurs et des scores légèrement supérieurs dans certaines
classes et disciplines, mais que ces corrélations étaient variables.
Ce programme pose-t-il des difficultés ou des problèmes particuliers ?
Les enseignants candidats à une promotion sont peu nombreux malgré l’augmentation
de salaire conséquente qui l’accompagne. Cela pourrait être dû au fait que les normes
sont trop difficiles à atteindre (avec environ un cinquième des enseignants ayant
obtenu une promotion en 2011) ou au fait que les augmentations de salaire ne sont pas
garanties. Si cela est bon pour le budget, cela peut aussi avoir pour conséquence l’absence
de motivation de beaucoup d’enseignants à l’égard de ce programme.
Sources : Bruns et Luque, 2014 ; Ome, 2012.

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Fiche n°3 : ESTONIE


Comment est construite cette structure de carrière ?
En Estonie16, il existe quatre échelons professionnels (ametijärk) : enseignant débutant,
enseignant, enseignant confirmé et enseignant méthodologue. Le salaire de base est
directement lié à l’échelon.
Sur quoi se fonde la progression de carrière ?
L’échelon d’enseignant débutant est accordé à toute personne qui remplit les conditions
de titre pour enseigner. L’acquisition du statut d’enseignant se fait après un an de
pratique en tant qu’enseignant débutant. Pour accéder au statut d’enseignant confirmé
ou d’enseignant méthodologue, il faut avoir travaillé comme enseignant au niveau
inférieur pendant trois années consécutives et avoir effectué au minimum 160 heures de
développement professionnel au cours des cinq dernières années.
Toute décision tient compte des titres de l’enseignant. De plus, pour les grades supérieurs,
les responsabilités assumées (participation à des groupes de travail ou à des travaux de
recherche en pédagogie, par exemple) font partie des critères de promotion. Par exemple,
un enseignant doit avoir fait un travail de mentorat auprès de jeunes enseignants pour être
élevé au grade d’enseignant confirmé. Les exigences de compétences et de qualification
pour chaque échelon sont décrites dans un règlement de l’État qu’on pourrait traduire
par « Cadre de règles pour la formation des enseignants ».
Cette structure de carrière est basée sur le développement professionnel et les fonctions,
mais n’intègre pas d’élément basé sur la performance en dehors de la composante
d’évaluation prévue dans les cours de développement professionnel.
Comment cela fonctionne-t-il en pratique ?
Fondée sur les fonctions, l’approche estonienne se différencie de nombreux pays :
les enseignants assument certaines responsabilités du fait de leur promotion, et non
comme condition préalable à leur promotion. Le processus qui consiste à vérifier les
états de service de l’enseignant pour le promouvoir à l’échelon supérieur est appelé
« attestation ». D’aucuns estiment que ceux qui se chargent de l’attestation ne font rien
d’autre que vérifier l’autoévaluation de l’enseignant par rapport aux exigences fixées
afin de confirmer qu’il a déjà atteint un certain niveau, plutôt que pour véritablement
le promouvoir. Tout enseignant candidat à l’attestation doit fournir une demande écrite
accompagnée de documents prouvant qu’il remplit les conditions requises.
Les personnels en charge des attestations diffèrent selon les niveaux. C’est le chef
d’établissement qui accorde leur grade aux enseignants et aux enseignants débutants,
tandis que pour les enseignants confirmés, c’est une commission d’attestation mise en
place par le chef d’établissement, et pour les enseignants méthodologues une commission

16. Sur le système éducatif estonien, on peut, en français, se référer à de nombreuses sources de
l’OCDE. Notamment : www.keepeek.com/Digital-Asset-Management/oecd/education/examens-des-
politiques-nationales-d-education-estonie-2001_9789264289963-fr#page1

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Annexe : Fiches pays

sous tutelle du ministère de l’Éducation. La progression d’échelon en échelon étant


critériée, toute personne qui remplit les conditions pour un échelon donné bénéficie
d’une promotion.
Quelles sont les implications financières ?
Il n’existe pas de niveau salarial fixe pour chaque échelon, bien qu’un salaire plus
important soit garanti aux enseignants des échelons supérieurs. Les décisions concernant
les promotions sont indépendantes des décisions budgétaires. Les salaires sont prélevés
sur un budget salarial forfaitaire attribué à la collectivité locale, et basés sur un accord
entre représentants de la collectivité locale et syndicats d’enseignants concernant le
salaire minimum pour chaque échelon.
Ce système permet d’accorder des promotions avec une augmentation de salaire garantie
(mais dont le montant n’est pas précisément stipulé), sans quota ni limite au nombre de
promotions, tout en maintenant la dépense salariale à un niveau constant et prévisible.
Ce programme a-t-il été évalué ?
Non. Si les résultats de l’enquête PISA pour l’Estonie se sont sensiblement améliorés au
cours des 10 dernières années, rien ne garantit qu’ils soient liés à la structure de carrière
des enseignants.
Ce programme pose-t-il des difficultés ou des problèmes particuliers ?
Dans son étude sur l’évaluation de l’enseignement primaire en Estonie, Mannamaa (2010)
indique que « de l’avis général, le système ne fournit pas suffisamment d’informations pour
guider l’évolution de la ‘performance des enseignants’ » (226). Depuis, le gouvernement
estonien a mis en œuvre un projet intitulé « Améliorer les qualifications des professeurs
de l’enseignement général (2008–2014) », qui a pour but de soutenir le développement
professionnel des enseignants de l’enseignement général tout au long de leur carrière.
Sources : EURYDICE, 2010 ; Mannamaa, 2010 ; National Examinations and Qualifications
Centre, 2009.

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Annexe : Fiches pays

Fiche n°4 : ÉTHIOPIE


Comment est construite cette structure de carrière ?
Les échelons de carrière, tels que décrits par Tekleselassie en 2005, comptent quatre
échelons ou rangs : enseignant, enseignant confirmé, enseignant chef de file adjoint et
enseignant chef de file. Depuis 2005, la grille salariale a changé : les salaires augmentent
à chaque échelon et les enseignants titulaires d’un second grade universitaire sont
payés nettement plus, mais les quatre échelons de carrière ont été conservés (Ethiopian
Teachers Association, 2012).
Sur quoi se fonde la progression de carrière ?
Pour accéder à l’échelon suivant, les enseignants doivent répondre à diverses conditions :
• être efficaces dans leur enseignement ;
• s’attacher à améliorer leur profession et être prêts à partager leurs expériences
avec les autres ;
• être capables d’évaluer le matériel didactique au niveau de l’école et de l’adapter
aux besoins locaux ;
• être capables de soutenir les élèves et d’évaluer leurs changements de
comportement ;
• coopérer avec la communauté scolaire et les parents.
Depuis 2012, les enseignants peuvent postuler à l’échelon supérieur au bout de trois ans
(contre quatre, auparavant).
Comment cela fonctionne-t-il en pratique ?
La conformité de l’enseignant à ces conditions est déterminée de façon variable par des
évaluations effectuées par le chef d’établissement, les collègues, les parents et les élèves,
chaque exigence étant évaluée par au moins deux de ces groupes. Pour être promus aux
postes les plus élevés, à savoir enseignant chef de file adjoint et enseignant chef de file, les
enseignants doivent en outre produire un rapport de recherche et assumer des fonctions
administratives supplémentaires (comme chef de département, par exemple).
Quelles sont les implications financières ?
Bien que cette structure de carrière soit essentiellement critériée en ce que les enseignants
doivent remplir certains critères pour bénéficier d’une promotion, il n’y a pas suffisamment
d’argent pour payer tous les enseignants qui remplissent les conditions pour accéder aux
postes les plus élevés. De ce fait, il y a une sélection supplémentaire pour ces postes, ce qui
rend le programme plus facile à gérer sur le plan financier, mais confère finalement à la
structure de carrière un caractère normatif (générant par conséquent de la compétition)
aux niveaux les plus élevés.
Ce programme a-t-il été évalué ?
Il n’a pas été évalué quantitativement, mais Tekleselassie a eu des entretiens sur cette
politique avec sept enseignants de sept régions d’Éthiopie. Ce qui l’intéressait, c’était les
différences entre le régime initial de grille salariale unique et la nouvelle structure de
carrière qui l’a remplacé. Tekleselassie a interrogé principalement des enseignants qui

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Annexe : Fiches pays

avaient de nombreuses années de service et qui avaient donc connu les deux systèmes.
Le problème potentiel que pose cet échantillon est que les enseignants ayant le plus
d’ancienneté risquent davantage d’être hostiles aux structures de carrière basées sur
la performance dans la mesure où, avec la grille salariale unique, plus ils avaient
d’ancienneté, plus ils étaient payés, tandis qu’avec le nouveau système, ils doivent remplir
certaines conditions pour bénéficier d’une augmentation de salaire. Néanmoins, leurs
récriminations à l’égard du nouveau régime sont riches d’enseignements pour d’autres
pays qui mettent en œuvre de nouvelles structures de carrière.
Ce programme pose-t-il des difficultés ou des problèmes particuliers ?
La première critique rapportée par Tekleselassie est qu’il ne tient pas compte des
contraintes de temps des enseignants. Ces professeurs enseignent déjà dans des classes à
gros effectifs et ont du mal à trouver du temps pour évaluer tous les devoirs, qu’ils soient
effectués en classe ou à la maison. Or, depuis 2005 on réclame qu’ils fassent également des
recherches et prennent part à des activités collectives pour progresser. La seconde critique
concerne le manque de compétences et de formation des enseignants pour satisfaire à ces
obligations. Ils sont censés mener des recherches alors qu’ils n’ont reçu aucune formation
pour cela. Par ailleurs, les formations sont très limitées.
Une autre critique est le manque de temps et de compétences des chefs d’établissement
pour procéder aux évaluations des enseignants. Généralement élus par les enseignants
et non pas promus à la suite d’une évaluation, les chefs d’établissement ont, selon
les enseignants, d’autres motivations qui peuvent être contradictoires avec celle de
promouvoir les meilleurs enseignants.
Les autres reproches concernent le personnel chargé de l’évaluation des enseignants.
Les parents participent à l’évaluation des enseignants, ce qui, selon les enseignants
interrogés, n’est pas une bonne chose, car les parents ont peu de contacts avec eux et de
ce fait se fient à ce que leur dit le chef d’établissement pour les noter. L’évaluation par les
pairs est également critiquée, toujours selon les enseignants interrogés par Tekleselassie,
au motif qu’elle diminue le sentiment de collégialité et génère, aux niveaux supérieurs,
une compétition entre les enseignants.
Sources : Tekleselassie, 2005 ; Ethiopian Teachers Association, 2012.

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Annexe : Fiches pays

Fiche n°5 : SINGAPOUR


Comment est construite cette structure de carrière ?
La structure de carrière de Singapour comprend trois filières17 : enseignement, encadrement
et expertise. La filière de l’enseignement recouvre les fonctions d’enseignant confirmé,
d’enseignant chef de file, de maître enseignant et de maître enseignant principal. Pour la
plupart des fonctions de cette filière, les enseignants continuent à enseigner en classe, bien
que les maîtres enseignants soient basés à l’Academy for Singapore Teachers (Académie
des enseignants de Singapour) et travaillent avec de nombreuses écoles. La filière de
l’encadrement comprend les fonctions de responsable de discipline/niveau, responsable
de département, chef d’établissement adjoint, chef d’établissement, directeur académique,
recteur adjoint, recteur, directeur général de l’éducation. La filière de l’expertise comprend
également des fonctions qui excluent l’enseignement en classe et qui consistent dans de
nombreux cas à travailler hors de l’école à l’élaboration des programmes scolaires et à
d’autres politiques. Les fonctions de cette filière sont : spécialiste de niveau 1, spécialiste
de niveau 2, spécialiste chef de file, spécialiste principal et spécialiste en chef. Toute
progression le long de l’échelle s’accompagne d’une augmentation du salaire de base.
Sur quoi se fonde la progression de carrière ?
Le « Behavioural Indicators Document » (document d’indicateurs comportementaux)
décrit les compétences requises à chaque niveau. Il a été élaboré en collaboration avec des
spécialistes de la psychologie des organisations. Les échelons sont liés à la performance,
au développement professionnel et aux fonctions. Les enseignants sont évalués une fois
par an sur la base des résultats des élèves (qualité de l’enseignement, développement
global), de leurs résultats en tant que membre du personnel (travailler avec les autres,
partager les ressources) et de leurs résultats organisationnels (contribution à la vie de
l’école). Ils se voient ensuite attribuer une note de A à E. Cette note est décernée par
un jury d’évaluation, composé de l’équipe d’encadrement. Elle est prise en compte pour
obtenir une promotion et détermine également le montant de la prime annuelle versée
à l’enseignant.
La nomination à de plus hautes fonctions est elle aussi subordonnée au développement
professionnel de l’enseignant, notamment des cours de formation sur six mois pour
accéder à certains postes (une recommandation est cependant nécessaire pour pouvoir les
suivre). Certains de ces cours concernent des fonctions spécifiques. Par exemple, il existe
des cours que doivent suivre, avant de prendre ces fonctions, ceux qui ont été sélectionnés
par le ministère pour être promus au poste de chef d’établissement. La promotion est
également liée aux fonctions, car chaque nouvel échelon s’accompagne de nouvelles
responsabilités, lesquelles varient selon la filière. Dans certains cas, les enseignants
doivent même commencer à assumer ces responsabilités avant d’être officiellement
nommés à leur nouveau poste.

17. Voir la figure 3, page 99.

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Annexe : Fiches pays

Comment cela fonctionne-t-il en pratique ?


L’accès à un échelon supérieur est davantage une nomination que le résultat d’une
certification. Un quota fixe le nombre d’enseignants qui peuvent accéder à chaque
niveau. C’est le ministère de l’Éducation qui décide des promotions en dernier ressort,
en se basant sur les critères indiqués plus haut. Les enseignants peuvent indiquer leur
préférence pour une filière, mais le ministère peut décider qu’ils sont plus qualifiés pour
une autre filière.
Quelles sont les implications financières ?
Ce système prend beaucoup de temps car les enseignants sont évalués tous les ans et
leur grade est décidé par un jury. De ce fait il est également coûteux. En effet, il faut
suffisamment d’enseignants confirmés pour se charger de toutes ces évaluations.
Singapour investit beaucoup de ressources dans le développement professionnel associé
aux différentes filières. Malgré son caractère onéreux, le système a l’avantage d’être
prévisible, puisque le ministère contrôle qui est promu et à quel niveau.
Ce programme a-t-il été évalué ?
Pas publiquement.
Ce programme pose-t-il des difficultés ou des problèmes particuliers ?
Le processus d’évaluation a lieu tous les ans et il est très complet, ce qui veut dire que les
enseignants passent beaucoup de temps à constituer des dossiers. Certains se plaignent en
outre de se sentir obligés, pour satisfaire aux composantes de l’évaluation non directement
liées à l’enseignement, de se charger de cours et de projets extrascolaires qui réduisent le
temps qu’ils peuvent consacrer à la préparation de leurs propres cours.
Sources : Singapour, 2015 ; Lye, 2015.

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America. Washington, DC : Banque mondiale.
VSO (Voluntary Service Overseas). 2002. What makes teachers tick? A
policy research report on teachers’ motivation in developing countries.
Londres : VSO.
Wilson, S.M.; Floden, R.E.; Ferrini-Mundy, J. 2002. ‘Teacher
preparation research: An insider’s view from the outside’. Dans :
Journal of Teacher Education, 53(3), 190–204.
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Dans : Education Matters, 1(2), 67–74. Extrait de : http://
educationnext.org/ whystudentsinsomecountriesdobetter/
Yuan, K.; Le, V.-N.; McCaffrey, D.F.; Marsh, J. A.; Hamilton, L.S.;
Stecher, B.M.; Springer, M. G. 2013. ‘Incentive pay programs do
not affect teacher motivation or reported practices results from
three randomized studies’. Dans : Educational Evaluation and
Policy Analysis, 35(1), 3–22.
Zembylas, M.; Papanastasiou, E. 2006. ‘Sources of teacher job
satisfaction and dissatisfaction in Cyprus’. Compare: A Journal of
Comparative and International Education, 36(2), 229–247.
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Institut international de planification de l’éducation www.iiep.unesco.org
Publications et documents de l’IIPE

Plus de 1 500 ouvrages sur la planification de l’éducation ont été publiés par l’Institut
international de planification de l’éducation. Un catalogue détaillé est disponible ; il
présente les sujets suivants :
Planification de l’éducation
Généralités – contexte du développement
Administration et gestion de l’éducation
Décentralisation – participation – enseignement à distance – carte scolaire –
enseignants
Économie de l’éducation
Coûts et financement – emploi – coopération internationale
Qualité de l’éducation
Évaluation – innovations – inspection
Différents niveaux d’éducation formelle
De l’enseignement primaire au supérieur
Stratégies alternatives pour l’éducation
Éducation permanente – éducation non formelle – groupes défavorisés –
éducation des filles

Pour obtenir le catalogue, s’adresser à :


IIPE, Unité de la communication et des publications
info@iiep.unesco.org
Les titres et les résumés des nouvelles publications peuvent être consultés sur le site
web de l’IIPE, à l’adresse suivante :
www.iiep.unesco.org

Institut international de planification de l’éducation www.iiep.unesco.org


L’Institut international de planification de l’éducation
L’Institut international de planification de l’éducation (IIPE) est un centre international, créé par l’UNESCO
en 1963, pour la formation et la recherche dans le domaine de la planification de l’éducation. Le financement de
l’Institut est assuré par l’UNESCO et les contributions volontaires des États membres. Au cours des dernières
années, l’Institut a reçu des contributions volontaires des États membres suivants : Argentine, France, Norvège,
Suède et Suisse.
L’Institut a pour but de contribuer au développement de l’éducation à travers le monde par l’accroissement
aussi bien des connaissances que du nombre d’experts compétents en matière de planification de l’éducation. Pour
atteindre ce but, l’Institut apporte sa collaboration aux organisations dans les États membres qui s’intéressent
à cet aspect de la formation et de la recherche. Le Conseil d’administration de l’IIPE, qui donne son accord au
programme et au budget de l’Institut, se compose d’un maximum de huit membres élus et de quatre membres
désignés par l’Organisation des Nations Unies et par certains de ses institutions et instituts spécialisés.
Président :
Nicholas Burnett (Royaume-Uni, États-Unis d’Amérique)
Directeur général, Results for Development Institute, Washington D.C., États-Unis d’Amérique
Membres désignés :
Josephine Bourne (Royaume-Uni)
Directrice associée, Section de l’Éducation, 
Division des Programmes du Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF), New York,
États-Unis d’Amérique
James Campbell (Royaume-Uni)
Directeur, Personnels de santé, Organisation mondiale pour la santé
Directeur exécutif, Alliance mondiale pour les personnels de santé, Genève, Suisse
Takyiwaa Manuh (Ghana)
Directrice, Division pour le développement social
Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique, Addis Abeba, Ethiopie
Juan Manuel Moreno (Espagne)
Spécialiste principal de l’éducation, Département Moyen-Orient et Afrique du Nord,
La Banque mondiale, Madrid, Espagne107
Membres élus:
Rukmini Banerji (Inde)
Directrice, Centre ASER 
New Delhi, Inde
Dina El Khawaga (Égypte)
Directrice de L’Institut Asfari pour la Société Civile et la Citoyenneté
de l’Université Américaine de Beyrouth, Liban
Valérie Liechti (Suisse)
Direction du développement et de la coopération,
Département fédéral des affaires étrangères, Berne, Suisse
Dzingai Mutumbuka (Zimbabwe)
Président, Association pour le développement de l’éducation en Afrique (ADEA), Abidjan, Côte
d’Ivoire
Keiichi Ogawa ( Japon)
Professeur et chef de département, Graduate School of International Cooperation Studies
Université de Kobe, Japon
Jean-Jacques Paul (France)
Professeur d’économie de l’éducation, Recteur adjoint,
Université de Galatasaray, Istanbul, Turquie 
José Weinstein Cayuela (Chili)
Professeur et Directeur de l’École doctorale en Éducation 
Université Diego Portales, Santiago, Chili

Pour obtenir des renseignements sur l’Institut, s’adresser au :


Secrétariat du Directeur, Institut international de planification de l’éducation,
7-9, rue Eugène Delacroix, 75116 Paris, France
Institut international de planification de l’éducation www.iiep.unesco.org
Structurer les carrières pour motiver les enseignants
À propos de l’ouvrage
Un corps enseignant qualifié et motivé est crucial pour atteindre les buts du
programme Éducation 2030. La structure de carrière des enseignants est un
puissant levier pour renforcer leur motivation.
Quel lien y a-t-il entre l’organisation des carrières et la motivation des
enseignants ? Quels sont les modèles de structure de carrière qui existent
dans le monde ? Quels sont les plus efficaces d’après les études disponibles ?
Surtout, quels enseignements peut-on en tirer pour concevoir et mettre en
œuvre des systèmes d’échelons de carrière ?
S’appuyant sur l’expérience d’un grand nombre de pays, cet ouvrage explore
les liens entre structures de carrière et motivation des enseignants, identifiant
différents modèles d’organisation de carrière et les difficultés de mise en
œuvre qu’ils peuvent poser. Il donne des conseils avisés aux planificateurs de
l’éducation ainsi qu’aux gestionnaires des ressources humaines qui souhaitent
rendre la carrière d’enseignant plus attractive pour les candidats potentiels et
motiver ceux qui sont déjà en poste.

À propos de l’auteure
Lucy Crehan a commencé sa carrière comme professeure de sciences dans
une école secondaire de Londres, avant de s’intéresser à la politique éducative
et d’obtenir un master d’Éducation à l’Université de Cambridge. Elle a ensuite
mené une étude sur les systèmes d’éducation dans six pays répartis sur quatre
continents. Celle-ci a servi de base à son livre Cleverlands (2016). Elle travaille
Lucy Crehan
actuellement au sein de l’Education Development Trust, au Royaume-Uni, qui


conseille les gouvernements sur leurs réformes de l’éducation.

Structurer les carrières


Lucy Crehan

pour motiver les enseignants


ISBN : 978-92-803-2405-1

La gestion des enseignants

Cov_Teacher motivation and careers_fr.indd All Pages 20/10/2017 11:16:33

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