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Rapport 

Etude des herbiers à Magnoliophytes dans la baie du petit Havre 


Hourdé Bastian, Wenniger Anna, Balettini Tessa, Gouyer Anthony 

Introduction
 
Les écosystèmes aquatiques tropicaux abritent une biodiversité remarquable. Si les récifs
coralliens et mangroves sont souvent mis en valeur de par leur importance dans l’écologie
aquatique des milieux tropicaux, l’intérêt pour les herbiers à Magnoliophytes est généralement
sous-estimé. Ces herbiers sont définis comme des prairies sous-marines constituées de plantes
supérieures à fleurs : les Magnoliophytes. Ces végétaux, appartenant à la classe des
Monocotylédones, sont représentés en Guadeloupe par 7 espèces recouvrant près de 10 000
ha. Malgré cette faible richesse, elles jouent un rôle considérable dans le domaine côtier
puisqu’il s’agit d’espèces “ingénieurs” dont l’organisation permet de réaliser des fonctions clés
telles que la mise à disposition de micro-habitats, la production primaire ou encore la transition
entre les milieux marins. L’objectif du présent rapport est de réaliser le diagnostic
environnemental des herbiers ayant colonisé la baie de Petit Havre. A travers ce diagnostic, il
sera en effet possible d’évaluer l’impact de l’anthropisation sur ce site : par ses activités,
comment l’Homme a modifié la morphologie et composition des herbiers dans la baie de Petit
Havre ? Une cartographie, associée à une étude de répartition et un diagnostic de l’état de
santé de l’herbier permettront d’analyser la situation actuelle de la baie.

Matériels et méthodes

Le petit Havre est une baie de l'île de la Guadeloupe (Antilles française), colonisée par les
herbiers à Thalassia et bordée de récifs coralliens. Ces herbiers accueillent une ichtyofaune
juvénile riche sur laquelle a porté une étude de l’organisation des communautés en relation avec
les descripteurs de l’environnement. L’influence des descripteurs environnementaux sur les
herbiers et la faune associée est abordée par des analyses discriminantes. Il s'agit d'expliquer la
répartition des herbiers et la structure de ces habitats (longueur des herbiers, densité,
peuplement).
Une observation générale de la baie du Petit Havre est effectuée au niveau d’un point de vue
pour analyser la répartition de l’herbier et notamment voir les zones où il ne se développe pas.
La répartition des herbiers est d’abord évaluée par cartographie. Cette dernière est réalisée à
l’aide du logiciel Qgis. Les aménagements et activités anthropiques sont également représentés
sur la carte.  Une fois la répartition des herbiers analysée, une description du site est effectuée.
Le diagnostic des herbiers à Magnoliophytes de la baie de Petit Havre a été réalisé à partir de
trois relevés :
> Quadrats : un échantillonnage aléatoire est réalisé au sein des herbiers à l’aide d’un quadrat
de 20 cm². L’objectif de ce relevé est de déterminer le nombre d’individus dans chaque quadrat.
A partir de ces effectifs, il sera possible d’obtenir une densité moyenne au sein des herbiers.
> Transects : Au sein d’une portion d’herbiers, un transect linéaire de 20 m est réalisé afin de
déterminer la faune associée aux herbiers. Pour se faire, un décamètre est utilisé. A noter que
les observateurs notent que les espèces observées de face, ceux venant de derrière étant
ignorées pour éviter de compter 2 fois le même individu.
> Observations complémentaires : au-delà des mesures réalisées et mises en commun entre les
différents groupes, il a été réalisé une inspection générale des herbiers et assistée par Mme
DROMARD.  Ces observations ont notamment permis d’apporter des notions supplémentaires
concernant la faune, la flore ainsi que des généralités sur la biologie des herbiers.

Résultats 

Cartographie

Différentes zones peuvent être identifiées à l’aide de l’observation des espèces majoritairement
présentes sur le fonds, à savoir Thalassia testudinum, Halophila stipulacea et Syringodium
filiforme. Les herbiers quasi exclusifs à Thalassia testudinum sont présents dans les zones de
faible profondeur, à l'abri de la houle au Nord de la baie. Il est à noter une forte implantation
d’épiphytes sur les herbiers proches de la plage et une réduction graduelle de leur présence à
mesure que l’on s’en éloigne. En ce qui concerne les autres herbiers, T. Testudinum n'est plus
exclusivement présente et partage l'espace avec les autres espèces, notamment Syringodium
filiforme dans la zone de mouillage des bateaux. En son caractère de pionnière, elle est surtout
présente sur les bordures des herbiers où sa présence diminue en s'éloignant des périphéries.
On retrouve les Syringodium filiforme de façon éparse dans tous les troués sableuses, certaines
laissés par les ancres des bateaux au mouillage. Les tâches d'herbiers à l'Ouest de la zone de
baignade sont elles aussi fortement colonisées par les Syringodium filiforme. Pour Halophila
stipulacea, elle est la plus présente en bordures Nord des herbiers à Thalassia testudinum, au
Nord de la baie et de façon plus éparse dans les herbiers Sud, proche du récif. Au-delà de la
zone de baignade à l'Ouest, elle pousse en tapis peu développé là aussi en bordure des
Thalassia testudinum. Pour l’herbier Sud, proche du récif, le fond est composé de débris
coralliens de granulométrie importante comblé par du sédiment. Il ne comprend pas de
peuplement particulier et les trois espèces ne sont présentes que sporadiquement.

Dans un second temps, il est à noter la présence de plusieurs éléments, pour certains d’origine
anthropique, possiblement en interaction avec les herbiers dans l’ensemble de la baie. Une
zone de faible profondeur (maximum 150 cm) très fréquenté par les baigneurs sépare les
herbiers Nord, Ouest et Sud. Deux écoulements d’eaux usées se déversent dans la baie au
Nord de la zone de baignade. L’un d’eux, essentiellement issu du ruissellement de la route et du
parking en amont, est souvent encombré de détritus déversent des eaux très turbides pendant
les fortes pluies. L'écoulement, constant même par beau temps, laisse suspecter une autre
source, possiblement une évacuation des eaux usées du restaurant à proximité. Le deuxième
écoulement est lui issu de l'évacuation d’eau des douches publiques présente sur le site. Des
bateaux de pêche au mouillage sont présents au Sud-Est de la baie de façon permanente, la
partie chaînée du mouillage frottant le fond au gré de la houle. La zone de déferlement sur le
récif marque la limite sud de répartition des herbiers dans la baie.

Ecologie de l’herbier : 

> Mesure de la densité des herbiers : La mesure de la densité des herbiers a été réalisée
sur une seule portion des herbiers de la baie de Petit Havre. Cette portion, proche de la plage,
est composée en grande majorité de Thalassia testudinum. A partir de l’échantillonnage par
quadrats, la densité en m² de la portion d’herbiers a pu être calculée. Pour analyser les
résultats, il a été choisi de comparer les résultats du Petit Havre avec ceux d'une étude
antérieure basée sur les herbiers d’une réserve naturelle protégée du Grand Cul-de-Sac Marin :
l’îlet Fajou (Mege S., 2007). De cette analyse il en résulte le Tableau 1. Si l’on compare les
densités maximale et minimale, on observe qu’entre les deux sites les valeurs sont
comparables. Au sujet du nombre moyen de plants de Thalassia testudinum, les valeurs
obtenues au Petit Havre sont supérieures. A noter que ces différences peuvent être associées
aux surfaces des quadrats. En effet, alors que dans les relevés du Petit-Havre il a été utilisé un
quadrat de 20 x 20 cm, dans l’étude du Grand Cul-de-Sac Marin leur dimension était de 10 x 20
cm. Enfin, concernant la densité par m², il a été observé une densité moindre dans les herbiers
du Petit Havre (439 plants/m² contre 567.6 plants/m² en moyenne pour l’îlet Fajou) (Figure 1).
Tableau 1 : Nombre de plants de Thalassia testudinum dénombrés à l’aide d’un échantillonnage
par quadrats (10 x 20 cm pour l'îlet Fajou et 20 x 20 pour le Petit Havre)

Sites Année Densité max. Densité min. Moyenne Densité par m²

2005 23 6 11.5 575

2005 15 4 10.35 517


Ilet Fajou
2006 26 8 11.85 592

2006 13 6 11.8 590

2007 16 14 11.3 564

Petit Havre 2022 24 9 14.14 439

> Relevés des espèces : Les résultats des transects ont permis de déterminer la faune
abritée dans les herbiers de Petit Havre et sont résumés dans le Tableau 2. Il est possible de
classer les différentes espèces dans trois catégories correspondant à leur écologie. La première
concerne les espèces résidentes des herbiers. Cette catégorie comporte que quelques espèces
(36% des espèces observées) mais représente un effectif important (57% de l’effectif observé).
Le second groupe est associé aux espèces saisonnières. Il comporte beaucoup de juvéniles
répartis dans 36% des espèces observées. A noter que cette catégorie possède un faible effectif
(14%). La dernière catégorie d’espèces associées est celle des espèces occasionnelles. Elle est
constituée que de Lutjianus apodus, une espèce dont la présence semble liée à la prédation de
juvéniles.

Tableau 2 : Faune de la baie du Petit Havre

Espèce Effectif Ecologie  Régime


observé

Lutjanus griseus 9 Espèce résidente des herbiers Carnivore (C2)

Stegastes sp. 1 Espèce saisonnière (fréquente en Herbivore


stade juvénile)

Cryptotomus roseus 2 Espèce résidente des herbiers Herbivore

Sparisoma radians 1 Espèce résidente des herbiers Herbivore

Lutjianus apodus 2 Espèce occasionnelle Carnivore (C2)

Halichoeres 1 Espèce saisonnière (juvénile) Carnivore (C2)


maculipinna
Ocyurus chrysurus 1 Espèce saisonnière (fréquente en Carnivore (C2)
stade juvénile)

Odontodactylus sp. 1 Espèce saisonnière (fréquente en Carnivore (C1)


stade juvénile)

Tripneustes 4 Espèce résidente des herbiers Macrobrouteur


ventricosus

Eponges 6 NA Filtreur

Pour compléter les résultats des transects, les observations ont pu être faites, permettant
d’observer d’autres organismes tels qu’une raie pastenague mais aussi des macroalgues
récifales (Acanthophora spicifera, Halimeda incrassata), les épiphytes et des holothuries.

Discussion 

Répartition des herbiers  

Pour comprendre la répartition des herbiers, il est nécessaire de connaître les exigences
écologiques de ces derniers. En effet, il est reconnu que la colonisation des Magnoliophytes
sera facilitée dans des zones peu profondes (zone euphotique), calmes, abritées de la houle et
qui possèdent un substrat meuble (sableux ou vaseux). Ainsi, il a été possible d’observer les
herbiers dès les premiers mètres au niveau de la plage, jusqu’à près de 100 m au-delà de la
plage. En ce qui concerne la baie du Petit Havre, l’implantation des herbiers est possible du fait
de la présence du récif corallien en amont. Celui-ci permet de casser la houle et offre les
conditions adéquates pour le développement d’herbiers. A noter cependant que la répartition
des herbiers n’est pas homogène car il existe de nombreuses ouvertures au sein desquelles il
n’y persiste que du sédiment. Ce sont les perturbations naturelles et anthropiques directes et
indirectes, locales ou globales, qui vont maintenir des ouvertures de la couverture végétale
autorisant l'implantation d'espèces moins compétitives à terme. 

Perturbations anthropiques : Le Petit Havre est un site attractif de la Guadeloupe, ce qui


explique qu’il est soumis à de nombreuses pressions de nature humaine. Les herbiers sont ainsi
régulièrement victimes de deux types de dégradations. 

→ Dégradations directes : Elles sont notamment associées aux impacts physiques que l’Homme
exerce sur son milieu.
> Arrachage : Les plants de Magnoliophytes marines peuvent être détériorés de manière
mécanique par l’utilisation d’engins de pêche tels que les engins traînants, les casiers et les
outils utilisés lors de la pêche. L’impact des mouillages et des hélices de bateaux sur les
herbiers dans les secteurs où la plaisance est fortement développée, comme aux Antilles, n’est
pas à négliger (Sermage C., 2006). Ces changements entraînent une modification des courants
et une sédimentation plus intense. 
> Piétinement : La fréquentation des lagons par les baigneurs augmente le piétinement
des herbiers. Cette perturbation empêche l’herbier de se développer correctement et un fort
piétinement peut à terme empêcher la repousse de l’herbier et créer des zones de fonds blancs.
Il est à noter que les trouées observées dans les herbiers ne sont pas toutes provoquées par le
piétinement ou les mouillages mais sont pour certaines issues d’une érosion naturelle et des
mouvements de sédiments liés au développement de l’herbier.

→ Dégradations indirectes 
> Pollution domestique : Du fait de son attractivité, la plage de la baie du petit Havre est
aménagée de douches ou encore de restaurants. Il en résulte qu’elle est soumise à des apports
réguliers d’eaux usées et les rejets d’eau douce entraînent un retrait de l’herbier.
Les arrivées d’eaux douces dans la mer entraînent une dessalure empêchant les herbiers de s’y
développer du fait que des espèces comme T.testudinum ou S.filiforme sont relativement
sensibles à des variations de salinité. Quant aux arrivées des eaux usées des restaurants, elles
entraînent un déséquilibre des paramètres abiotiques. Ces eaux vont amener des nutriments
phosphatés et azotés tel que cet apport va favoriser le développement des macroalgues et des
épiphytes, entraînant une compétition avec les espèces des herbiers. Ces eaux usées vont
également augmenter la quantité de matière en suspension, et par conséquent la turbidité et la
dégradation du substrats marin. La pollution domestique va ainsi amplifier la compétition pour
l’espace et la lumière des organismes envahisseurs et pionniers. Fait intéressant, la baie du
Petit Havre est souvent infectée par Escherichia coli. Ces micro-organismes sont notamment
présents dans la flore intestinale des mammifères, chez l’Homme en particulier. Ils constituent
ainsi un indicateur du niveau de pollution par les eaux usées. Cette contamination régulière peut
être due aux évacuations du restaurant, des douches mais aussi des maisons qui se trouvent en
amont de la baie. 

La pollution par les déchets a de graves conséquences sur les herbiers. Elle enrichit les eaux
lagonaires en sels nutritifs, permettant un trop fort développement des épiphytes. Ces
organismes et particules en suspension limitent la pénétration de la lumière et donc limitent la
photosynthèse des feuilles. Certaines particules émises par les déchets sont toxiques ou
nuisibles pour les êtres vivants. De plus, la fréquentation de la baie du Petit Havre entraîne une
augmentation des macro-déchets de type sac plastique, bouteilles de verre ou en plastique,
papiers, emballages divers, etc.

Perturbations naturelles
> Cyclone et précipitations : Dans les zones tropicales, les cyclones et les fortes
précipitations sont des événements courants. Au cours de ces phénomènes, les arrivées d’eaux
douces sont importantes, diminuant ainsi la salinité des eaux lagonaires. Les fortes
précipitations vont entraîner des particules sédimentaires et polluées dans les eaux lagonaires.
Ces événements vont créer de forts courants marins. Or les herbiers se développent dans des
endroits calmes. Même s’ils présentent une meilleure résistance que les sédiments nus grâce à
leur système racinaire et rhizomateux, celle-ci est variable selon le système développé par
chaque espèce. Par exemple, Thalassia testudinum est dotée d’un très solide réseau racinaire
résistant remarquablement bien aux événements tempétueux (Cruz-Palacios et Van
Tussenbroek, 2005). Par contre, des espèces à feuilles étroites comme Syringodium filiforme,
qui plus est formant des herbiers peu denses avec de fines racines, résistent mal aux houles.
> Récifs coralliens : La baie du Petit Havre est délimitée par un récif corallien. Avec le
courant, un important dépôt calcaire se forme autour, notamment dans la portion Sud de la baie
(en dessous du récif), entraînant une modification du sédiment. Le substrat n’étant plus meuble,
les Magnoliophytes des herbiers ne peuvent plus s’y développer, laissant place à des espèces
d’algues récifales comme Acanthophora spicifera et Halimeda incrassata.
État de santé de l’herbier

Pour déterminer l’état de santé d’un écosystème, il est possible d’utiliser 3 propriétés de ce
dernier : la productivité primaire, sa résilience et son organisation (c’est-à-dire le nombre et la
diversité des interactions entre ses composantes) (Costanza R., 1992). Si les deux premières
propriétés n’ont pas pu être mesurées dans ce présent rapport, il est néanmoins possible
d’analyser l’organisation des herbiers au sein de la baie de Petit Havre. 

→ Magnoliophytes 
> Evaluation de la densité des Thalassia testudinum : La densité des T.testudinum joue
un rôle primordial dans l’efficacité des différentes fonctions de l’herbier comme la fonction de
nurserie, la production primaire, etc. Pour évaluer la densité des herbiers dans la baie du Petit
Havre, il a été choisi de comparer les valeurs obtenues avec celles concernant une réserve
naturelle protégée (îlet Fajou, Grand Cul-de-Sac marin). La comparaison entre les deux sites
permet d’observer une nette perte de densité dans le cas du site anthropisé, ce qui pourrait
évoquer un état de santé amoindri par rapport à un site naturel. A cela il faut ajouter qu’une
large portion de l’herbier de la baie du Petit Havre est mixte, mêlant T.testudinum et S.filiforme.
Cette composition est révélatrice d’ un état de santé de classe 2. De plus, la présence de
S.filiforme au niveau des zones de fonds blancs illustre le phénomène naturel de succession
écologique des herbiers et la tentative de l’herbier de recoloniser une zone suite à une
perturbation. Fait intéressant, il a été observé que la taille des feuilles paraît moindre à proximité
de la plage, en comparaison avec les herbiers plus au large. Cette observation peut être le
résultat des différentes pressions qui s’exercent préférentiellement à proximité de la plage, une
zone fortement en contact avec l’Homme. De tous ces faits remarquables, Il en découle
finalement que les herbiers ne sont pas dans un état de santé favorable pour avoir une efficacité
optimale dans ses différentes fonctions. 
> Relation Magnoliophytes/Epiphyte : La colonisation des épiphytes sur les
Magnoliophytes impacte la productivité de ces dernières. Il existe en effet une compétition entre
les deux vis-à-vis de lumière. Or le développement des épiphytes est favorisé par des eaux plus
riches en nutriments : un taux trop élevé d'épiphytes  limite la photosynthèse des feuilles des
Magnoliophytes et empêche leur développement. Dans le cas du Petit Havre, les épiphytes se
développent plus particulièrement en bord de plage, la zone où les interactions anthropiques
sont plus importantes. A noter qu’ils semblent moins denses dans les zones où ont été retrouvés
des macrobrouteurs. En effet, les invertébrés tels que Tripneustes ventricosus sont des
éléments essentiels dans le fonctionnement des herbiers et dans le contrôle de la production
primaire des épiphytes. Ils vont consommer les feuilles des Magnoliophytes et par conséquent
consommer et réguler les épiphytes. Néanmoins, ils peuvent également détériorer les herbiers.
D'après Heck et Valentine, ils peuvent brouter jusqu’à 0,5 g de matière sèche par jour et à long
terme infliger de gros dégâts si les racines sont touchées (Heck & Valentine, 1995). 

→ Diversité associée à l’herbier : L’un des rôles clés joué par les herbiers est celui de nurserie.
De nombreux organismes s’y abritent en effet à au moins un stade de leur cycle de vie. Si
quelques espèces comme Lutjanus griseus sont des espèces résidentes, la plupart ne les
fréquente que temporairement. Au sein de la baie du Petit Havre, les relevés n’ont pas permis
d’observer une diversité d’espèces occasionnelles. Cela semble problématique puisque ces
espèces devraient représenter près de la moitié de la richesse animale des herbiers. Ce fait
pourrait être dû à l’effort d’échantillonnage trop faible. Cependant, dans un contexte d’état de
santé dégradé, l’absence de ces espèces pourrait être aussi corrélée à l’affaiblissement de la
fonctionnalité de l’herbier : si la fonction de nurserie est amoindrie, du fait des nombreuses
perturbations, cela réduirait l’attractivité du site pour ces espèces. 
Concernant les herbivores, il est possible d’imaginer que, de la même façon, la dégradation de
la disponibilité de ressources ne favorise pas l’attractivité du site. Or, comme vu précédemment,
ces derniers sont essentiels dans le contrôle de la biomasse des algues épiphytes des herbiers.
De plus, l’augmentation de la densité des épiphytes tend à réduire la capacité photosynthétique
des Magnoliophytes, les rendant plus vulnérables face aux pressions du milieu du fait d’une plus
faible capacité de régénération. 
Plusieurs études ont mis en évidence que de nombreux poissons des récifs coralliens proches
pouvaient fréquenter saisonnièrement les herbiers, notamment lors des phases de reproduction,
le développement des juvéniles et leur survie étant favorisés d'une part par l'abondance de
petites proies facilement accessibles (Amphipodes, crevettes) et d'autre part grâce au couvert
végétal dense qui les protège relativement bien des prédateurs (Jackson J.B.C. et al, 2001)

Conclusion : observation générale de l’herbier 

La répartition des herbiers au sein de la baie du Petit Havre dépend de plusieurs facteurs
environnementaux et anthropiques. En effet, les différentes pressions qu’ils exercent induisent
une répartition hétérogène et un recouvrement partiel du substrat. Ces herbiers présentent une
organisation mixte de Thalassia testudinum, Halophila stipulacea et Syringodium filiforme,
témoignant d’un herbier d’état de santé de classe 2. Son état de santé, réduit notamment par les
activités anthropiques, amplifie les interactions compétitives entre les algues récifales, les
épiphytes et les Magnoliophytes. Il en résulte une perte de l’efficacité des différentes fonctions
des herbiers, à l’origine d’une perturbation de la répartition de la faune associée. Cependant,
certaines observations illustrent la résilience du milieu et permettent d’espérer, si les mesures
adaptées sont mises en œuvre, un retour à un stade climacique.

Bibliographie : 

Cruz-Palacios V. et Van Tussenbroek B. I., 2005. Simulation of hurricane-like disturbances on


caribean seagrass bed, Journal of experimental Marine Biology and Ecology, 324: 44-60.

Heck K.L., Valentine J.F., 1995. Sea urchin herbivory: evidence for long-lasting effects in
subtropical seagrass meadows. Journal of Experimental Marine Biology and Ecology,
180:205-217

Hily C., Duchêne J., Bouchon C., Bouchon-Navaro Y., Gigou A., Payri C., Védie F., 2010. Les
herbiers de phanérogames marines de l'outre-mer français. Hily C., Gabrié C., Duncombe M.
coord. IFRECOR, Conservatoire du littoral, 140 pp.

Jackson J.B.C., Kirby M.X., Berger W.H., Bjorndal K.A., Botsford L.W., Bourque B.J., 2001.
Historical overfishing and the recent collopse of coastal ecosystems. Science, 293: 629-638 .

Robert Costanza; Herman E. Mar., 1992. Daly Conservation Biology, Vol. 6, No. 1., pp. 37-46.

Sermage C., 2006. Suivi écologique des herbiers de la côte Sud Caraïbe de la Martinique et
impact des ancres des bateaux de plaisance. Rapport de stage de Master 2 Exploitation durable
des écosystèmes Littoraux, Observatoire du Milieu Marin Martiniquais, 45 pp. 
Simone MEGE ; Xavier D. Août 2007. Bilan des suivis des herbiers de Phanérogames marines
du Grand Cul-de-Sac Marin . Parc national de la Guadeloupe

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