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Pour citer cet article : Hain E, et al. Prise en charge du gastrinome. Presse Med. (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.

lpm.2016.04.012

Presse Med. 2016; //: ///

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GASTRO-ENT EROLOGIE
www.sciencedirect.com

Mise au point
Prise en charge du gastrinome

Elisabeth Hain 1, Romain Coriat 2,3, Bertrand Dousset 1,3, Sébastien Gaujoux 1,3

Disponible sur internet le : 1. AP–HP, hôpital Cochin, service de chirurgie digestive hépato-biliaire et
endocrienne, Paris, France
2. AP–HP, hôpital Cochin, service de gastroentérologie, 27,
rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris, France
3. Université Paris Descartes, 12, rue de l'École-de-Médecine, 75006 Paris, France

Correspondance :
Sébastien Gaujoux, Hôpital Cochin, service de chirurgie digestive et endocrinienne,
27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75679 Paris cedex 14, France.
sebastien.gaujoux@aphp.fr

Résumé
Le gastrinome est une tumeur rare entraînant une hypersécrétion de gastrine qui se traduit
cliniquement par un syndrome de Zollinger-Ellison (ZES) associant une maladie ulcéreuse sévère et
une diarrhée profuse. Cette pathologie peut être sporadique ou plus rarement survenir dans le
cadre d'une néoplasie endocrinienne de type 1 (NEM1). Le diagnostic repose sur la constatation
d'une hypergastrinémie associée à une hyperchlorhydrie ou un pH gastrique acide. La localisation
habituellement duodéno-pancréatique de la lésion n'est pas toujours facile compte tenu de sa
petite taille et de son caractère fréquemment multiple. Le but du traitement est 1/le contrôle du
syndrome sécrétoire 2/le contrôle tumoral. La chirurgie est le seul traitement potentiellement
curatif. Le gastrinome est une tumeur à évolution lente, le pronostic est en général bon avec une
survie médiane à plus de 10 ans et une survie à 5 ans supérieure à 80 %. En revanche, les récidives
sont fréquentes avec une récidive biologique observée dans 65 % des cas et une récidive
morphologique dans 40 % des cas à 2 ans. La survenue de métastases constitue un tournant
dans l'évolution de cette pathologie.

Summary
Management of gastrinoma

Gastrinoma is a very rare tumor leading to gastrin hypersecretion and characterised by Zollinger-
Ellisson syndrome (ZES) i.e. severe gastric and duodenal ulceration and profuse diarrhea. This
disease can be sporadic or familial within a multiple endocrine neoplasia type 1 (MEN-1)
syndrome. Diagnosis is based on hypergastrinemia/hypercholrhydria. Tumors are usually located
in the duodeno-pancreas. Preoperative tumor location by CT, echoendoscopy and fibroscopy is not
always possible because of the small size of the lesion that are frequently multiple. The aim of
gastrinoma treatment is 1/to control the hormonal hypersecretion 2/to remove the neoplasm
when it is possible. Surgery is the only chance to cure. Gastrinoma is a slow-growing tumor, and

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http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2016.04.012
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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overall survival is good with a median survival above 10 years and a 5-year survival above 80 %
in surgically resected patients. Recurrence is frequent, a biochemical recurrence is observed in
65 % of cases and morphological recurrence in 40 % of patients at 2 years. Metastases are
associated with a dismal prognosis.

Épidémiologie  des diarrhées chroniques dans 65 % des cas. Dans 20 % des


Le gastrinome est une tumeur neuroendocrine rare générale- cas, une diarrhée abondante et sévère peut être le seul mode
ment localisée au niveau du duodénum ou du pancréas et de révélation du ZES ;
 s'associent parfois nausées, vomissements ou amaigrissement.
associée au syndrome de Zollinger-Ellison (ZES). Le ZES a été
décrit pour la première fois en 1955 [1] et se caractérise par une La large diffusion des inhibiteurs de la pompe à proton, est
hypergastrinémie d'origine tumorale. Celle-ci entraîne une parfois la cause d'un retard diagnostique, compte tenu de leur
hypersécrétion gastrique acide se traduisant par une maladie efficacité remarquable sur les symptômes de la maladie, sou-
ulcéreuse sévère associée à une diarrhée importante. vent au prix de posologie importante, qui doivent alerter le
L'incidence du gastrinome est de 0,5 à 3 cas par million d'habi- prescripteur.
tant par an. Environ trois quarts des gastrinomes sont d'origine Concernant les patients NEM 1 (tableau I) présentant un gas-
sporadique. L'âge moyen au diagnostic chez ces patients est trinome, les mêmes signes cliniques peuvent être retrouvés
autour de la cinquième décade, avec un délai moyen de diag- accompagnés de signe d'hyperparathyroïdie (lithiases
nostic de 5,2 ans [2]. Un quart des gastrinomes se développe rénales. . .).
dans le cadre d'une néoplasie endocrinienne de type multiple 1 Les complications
(NEM1) [2], avec un diagnostic souvent plus précoce, autour de La maladie peut se révéler par les complications du syndrome
la troisième décade. Une NEM 1 doit être suspectée en cas sécrétoire :
d'antécédents personnels ou familiaux d'endocrinopathies,  maladie ulcéreuse grave avec ulcérations larges, multiples et
d'ulcère récidivant, d'hypercalcémie, ou de lithiase rénale [3,4]. étendues le long du tube digestif ;
 hémorragie, perforation qui avant l'avènement des IPP étaient
Physiopathologie
responsables d'une mortalité significative des patients porte-
Les gastrinomes sont pour la plupart des tumeurs neuroendo-
urs d'un gastrinome.
crines bien différenciées [5]. Leur production non contrôlée de
Ou par des manifestations liées à l'histoire naturelle de la
gastrine, va avoir une action trophique sur les cellules pariétales
maladie, avec en particulier l'apparition de métastases hépati-
antrales entraînant une hypersécrétion acide [6]. La plupart des
ques présente dans 10 à 15 % des cas au diagnostic.
patients développent donc une maladie ulcéreuse sévère, les
ulcères ayant pour caractéristiques d'être souvent larges, multi- Biologie
ples et fréquemment localisés au niveau de la partie distale du Le diagnostic de gastrinome repose sur la constatation d'une
duodénum ou de la partie proximale du jéjunum [7] contraire- hypergastrinémie associée à une hyperchlorhydrie ou un pH
ment à ce que l'on peut observer en cas d'ulcère secondaire gastrique acide (< 2). Avant tout dosage, il est important
à une infection à Helicobacter pylori ou à une prise d'AINS. de noter que les Inhibiteurs de la pompe à protons (IPP)
S'associe à ces douleurs ulcéreuses, une diarrhée multifacto- doivent être arrêtés 72 heures à 7 jours. L'arrêt de ces trai-
rielle, secrétaoire, par effet osmotique et malabsorption du fait tements n'est pas toujours anodin, et fait courir le risque
de l'inactivation des enzymes digestives [8,9]. d'une décompensation de la maladie ulcéreuse avec un
La plupart des gastrinomes se localisent dans le triangle de Stabile risque d'hémorragie, de perforation et de déshydratation
et Passaro, soit dans le duodénum (50-85 %) et la tête du par diarrhée aiguë. Il est également important d'éliminer
pancréas (25 %). Exceptionnellement, la tumeur primitive peut les causes d'hypergastrinémie secondaire (prise d'IPP, achlo-
être au niveau des ganglions lymphatiques abdominaux, et plus rhydries, gastrite atrophique, insuffisance rénale, antécédent
rarement d'autres sites extra-abdominaux (cœur, poumons) [10]. de vagotomie. . .).
La gastrine à jeun est de façon quasi constante élevée. À plus de
Diagnostic du gastrinome
10 fois la normale et associée à un pH gastrique inférieur à 2,
Clinique elle signe le diagnostic. Dans le cas contraire, un test à la
Le syndrome sécrétoire – Syndrome de Zollinger-Ellison sécrétine (qui de façon physiologique est une hormone anta-
Les manifestations cliniques les plus fréquentes sont : goniste de la gastrine) associé à une mesure du débit acide
 des douleurs abdominales le plus souvent à type de brûlure
basal est nécessaire [11,12]. Le test au gluconate de calcium,
épigastrique ; moins sensible n'est plus réalisé.
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TABLEAU I
Principales caractéristiques des gastrinomes sporadiques et génétiques

Forme sporadique Forme familiale

Fréquence 75 % des gastrinomes 25 % des gastrinomes (50 % des NEM1 ont un gastrinome)

Transmission Sporadique Autosomique dominante

Localisation préférentielle Duodénale, pancréatique (90 %)


Lésions associées – Hyperplasie parathyroïdienne (95 %)
Autre TNE pancréatiques (40–80 %)
Adénome parathyroïdien (20–40 %)

Caractéristiques Petite taille : 0,1 à 1 cm Le plus souvent multiple (90 %)


Fréquemment multiple : 10 à 20 %
Fréquemment malin : 60 à 70 %
Traitement Indications chirurgicales larges Chirurgie plus sélective
(sauf M+ non résécable) même en cas Chirurgie pour des lésions > 2 cm
d'imagerie initiale négative Signes de malignité (N+, invasion locale, M +)
Famille ayant une maladie agressive

Pronostic La guérison reste rare Croissance lente–meilleur pronostic mais 25 % de forme agressive
80 % de survie à 5 ans
65 % de récidive biologique à 2 ans
40 % de récidive morphologique à 2 ans

Imagerie et/ou une IRM abdominale qui complètent le bilan d'extension.


Une fois le diagnostic biologique établi, un bilan morphologique En cas de négativité du bilan initial, voir de façon systématique
(tableau II) est nécessaire dans le double but de : pour certain, un octréoscan permet de détecter les tumeurs de
 localiser de façon aussi précise que possible la lésion moins de 15 mm dans 40 % des cas et de rechercher une
primitive ; diffusion métastatique [14]. Les tests à la sécrétine injectée
 d'en faire son bilan d'extension [7]. de façon sélective en intra-arteriel sont aujourd'hui quasi aban-
En première intention est réalisée une fibroscopie œso-gastro- donnés [7,15]. En dépit d'un bilan d'extension poussé, dans
duodénale (FOGD) à la recherche d'une lésion primitive duo- environ 30 % des cas la lésion primitive n'est pas retrouvée. Sa
dénale et des complications de la maladie : ulcère ou sténose. localisation se fera alors, lorsqu'une indication chirurgicale est
L'écho-endoscopie reste cependant l'examen de référence en retenue, en peropératoire par la réalisation d'une fibroscopie
terme de sensibilité dans la détection des primitifs qu'ils soient avec trans-illumination, la palpation bidigitale du cadre duodé-
duodénaux ou pancréatique, et d'éventuelles métastases gan- nal après duodénotomie, et échographie peropératoire. De
glionnaires associées [13]. À ces 2 examens, vient systémati- nouveaux traceurs d'imagerie nucléaire ont fait récemment leur
quement s'ajouter un thoraco-abdomino-pelvien (TDM) injecté apparition dans la détection et le suivi des patients porteurs de
tumeur neuroendocrine comme le 68Ga-DOTA-NOC, 68Ga-
DOTA-TOC ou 18F-DOPA PET DOPA-PET [16–18]. Il semblerait
TABLEAU II que ces traceurs soient supérieurs à la scintigraphie à l'octréotide
Sensibilité diagnostique dans le gastrinome des examens conventionnelle dans la détection des tumeurs neuroendocri-
d'imagerie niennes, mais leur place respective reste à préciser et leur
disponibilité en France est encore très limitée.
Examens Sensibilité (%)

TDM 50 Génétique
Un quart des gastrinomes est lié à des mutations germinales du
IRM 25–50
gène NEM1 codant pour la ménine, près de la moitié des
Écho-endoscopie 70 patients atteints de NEM1 développant un gastrinome, une
Octréo-TDM 80 enquête familiale et une analyse génétique avec séquençage
des 9 exons codants et recherche de grands réarrangements
Canulation artérielle sélective 40–60
doit systématiquement être demandée devant un syndrome de
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Zollinger-Ellisson. Selon la recommandation du Groupe d'étude


des Tumeurs Endocrine (GTE), lorsqu'une mutation du gène
NEM1 est identifiée chez un cas index, après consultation
d'oncogénétique médicale sa recherche peut être réalisée chez
les apparentés en vue d'un diagnostic génotypique prédictif
à partir de 5 ans pour NEM1.

Traitement
Principe
Le principe du traitement du gastrinome est double incluant le
contrôle de la sécrétion acide et l'éradication du tissu tumoral. Le
seul traitement potentiellement curatif reste la chirurgie.
Inhibition de la sécrétion acide gastrique par un
traitement antisécrétoire
Après les anti-H2, l'apparition des IPP en 1989 a totalement
modifié la prise en charge de patients ayant un gastrinome
[19,20]. En effet, ces traitements très bien tolérés pouvant être Figure 1
utilisés au long cours, parfois jusqu'à des doses élevées de Triangle de Stabile et Passaro
360 mg/j, avec peu d'effet secondaire permettent un excellent
contrôle de la sécrétion acide gastrique et de ses complications
pouvant mettre en jeu le pronostic vital des patients. De ce fait,
 réalisation d'une fibroscopie peropératoire avec transillumina-
les indications de gastrectomie totale pour contrôle sécrétoire
tion duodénale permettant de mettre en évidence avec une
ont totalement disparu. Il est important d'insister sur l'obser-
plus grande sensibilité les petites lésions duodénales. Celles-ci
vance du traitement et l'éducation des patients, qui ne doivent
sont en effet dans la plupart des cas d'une taille
en aucun cas arrêter leur traitement par IPP, même en période
infracentimétrique ;
postopératoire.
 réalisation d'une duodénotomie [25] avec palpation bi-digi-
Éradication du processus tumoral primitif tale de la paroi duodénale afin de détecter des tumeurs sous-
Le problème sécrétoire étant réglé, seule la chirurgie permet de muqueuse de plus petite taille (1–2 mm) [26] ;
contrôler la progression tumorale et de prévenir la survenue de  examen minutieux du pancréas avec échographie pancréa-
métastases [21,22], et in fine de permettre la guérison des tique peropératoire [27] ;
patients. Les indications chirurgicales diffèrent selon que le  exérèse avec examen extemporané de toute lésions suspec-
gastrinome soit d'origine sporadique ou familiale. tes. Les lésions pancréatiques lorsque cela est techniquement
Forme sporadique possible sont énuclées. En cas de lésions corporéo-caudale
Le traitement chirurgical est le seul traitement possiblement pancréatiques le choix se discute entre l'énucléation et la
curatif, et il a été démontré que l'exérèse chirurgicale de la résection segmentaire. En cas de lésions céphaliques, si l'énu-
lésion primitive associée à un curage ganglionnaire augmentait cléation est impossible (lésion profonde, proche du canal de
la survie des patients atteints de gastrinome d'origine spora- Wirsung et/ou de la VBP), une duodénopancréatectomie peut
dique [22,23]. De ce fait, la chirurgie, dans un centre expert, doit être proposée. Celle-ci peut dans certaines équipes être réa-
systématiquement être discutée devant tout diagnostic de lisée de principe compte tenu du fait qu'elle permet d'empor-
gastrinome. ter la totalité du triangle de Stabile et Passaro. Les lésions
Le traitement chirurgical, qui doit être réalisé, repose sur : duodénales sont elles réséquées de façon élective dès qu'elles
 une exploration complète de la cavité abdominale à la recher- sont identifiées ;
che de lésions métastatiques (étage sus-mésocolique, foie,  un curage ganglionnaire régional est systématiquement asso-
péritoine. . .) ; cié au geste chirurgical, 40 à 70 % des patients présentent
 une mobilisation complète du duodénum et du pancréas afin une extension ganglionnaire au moment du diagnostic [23] ;
d'explorer la région appelée le « triangle du gastrinome » ou  l'examen anatomopathologique doit être réalisé par un patho-
triangle de Stabile et Passaro (figure 1) défini par la confluence logiste habitué à la prise en charge de ces lésions, dans l'idéal
canal cystique-voie biliaire principale, la deuxième et troi- selon les standards du réseau TENpath (Réseau National de
sième portion du duodénum inférieure et par la tête et le référence anatomopathologique de prise en charge des
corps du pancréas. C'est dans cette région que se situent plus Tumeurs neuro-Endocrines Malignes Rares Sporadiques et
de deux tiers (90 %) des gastrinomes [24] ; Héréditaires).
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En cas de présence de métastases hépatiques, si celles-ci sont des causes de décès des patients NEM1 [32]. Il est important de
résécables [28,29], la chirurgie du primitif et des métastases noter que dans le cadre des NEM1, il faut tout d'abord commen-
hépatiques doit être discutée sous réserve de l'absence de cer par traiter l'hyperparathyroïdie, avec un possible effet favo-
localisations secondaires extrahépatiques. rable de la normalisation de la calcémie sur la sécrétion acide et
Selon le thesaurus national de cancérologie digestive (http:// de gastrine.
www.tncd.org), en cas de formes métastatiques non résécables Une indication chirurgicale est généralement retenue, pour les
un traitement antitumoral doit être initié. Peut être discuté en lésions de plus de 2 cm dont le risque métastatique est plus
fonction de l'étendue de la maladie, son histoire naturelle, du important, ou en cas d'antécédents familiaux de forme agres-
grade histologique et du Ki-67, les analogues de la somatosta- sive et rapidement métastatique de gastrinome, ou de suspicion
tine à dose antitumorale, une chimiothérapie à base de strep- de gastrinome malin en imagerie (invasion locale vasculaire,
tozotocine, les thérapies ciblées (sunitinib ou évérolimus) sont ganglions suspects, métastases hépatiques). Un geste radical
en général recommandées en deuxième ligne [19,30,31]. à type de duodénopancréatectomie céphalique est dans ce cas
D'autres options sont envisageables, chimioembolisation, radio- privilégié [33]. Les lésions de moins de 2 cm sont en général
thérapie vectorisée interne avec les analogues radioactifs de la surveillées [2].
somatostatine (Ytrium 90 ou Lutetium 177) et doivent être
discutées au cas par cas en réunion de concertation pluridisci-
Surveillance et pronostic
plinaire RENATEN (Réseau national de référence clinique pour Le gastrinome est une tumeur à évolution lente avec une survie
les Tumeurs neuroendocrines malignes sporadiques et médiane à plus de 10 ans et une survie à 5 ans supérieure
héréditaires). à 80 % [7]. La guérison reste cependant rare, avec près de
65 % de récidive biologique et 40 % de récidive morphologique
Forme familiale dans le cadre d'une NEM1 à 2 ans. La taille avec un cut-off à 2 cm et les localisations
Si la prise en charge des formes sporadiques est aujourd'hui bien pancréatiques sont des facteurs de mauvais pronostic, l'appari-
codifiée, la prise en charge des formes familiales survenant dans tion de métastases hépatiques marque un tournant évolutif
le cadre d'une NEM 1 reste débattue. En effet, dans ce contexte, majeur dans l'histoire naturelle de la maladie [34]. Le suivi
les lésions sont le plus souvent multiples et de petite taille de ces patients se base tous les 3 à 6 mois sur un TDM abdo-
rendant la guérison biologique rare après traitement chirurgical. minal, scintigraphie à l'octréotide, une FODG, une gastrinémie.
De plus, les gastrinomes familiaux auraient une évolution plus L'arrêt des IPP est à éviter du fait du risque important de récidive.
lente, moins d'atteintes ganglionnaires et métastatiques, et au
final un meilleur pronostic en terme de survie globale [2]. Il faut Déclaration de liens d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de
cependant noter que les gastrinomes représentent plus de 20 % liens d'intérêts.

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