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CHAPITRE I

Nous sommes en 1941. Joseph Joffo, âgé de 10 ans, décrit sa bille préférée, dont la surface
rugueuse lui rappelle une planète. Ses bribes de pensées enfantines sont interrompues par
son frère aîné, Maurice (12 ans), qui est impatient de continuer leur jeu : « Alors, merde, tu te
décides ? ». Nous voyons Maurice, les chaussettes en spirale, assis par terre sur le trottoir
avec une pile de billes, surveillé par sa vieille voisine Mémé Esptein (noté le nom juif), rabougrie
et ridée comme « il n’est pas permis ». Nous apprenons que nous nous trouvons dans la partie
septentrionale de Paris, à la porte de Clignancourt dans le XVIIIe arrondissement, juste au nord
de Montmartre and de la Basilique Sacré Cœur. C’est un voisinage rempli de réfugiés
(« fuyards ») de l’est de l’Europe, dont de nombreux se sont installés ici depuis des décennies.

Joseph n’a pas encore joué avec sa bille et Maurice s’impatiente (« … qu’est-ce que tu
fous ? »). Puis Maurice est victorieux (il a les poches pleines de billes) and Joseph n’a plus
qu’une dernière bille, sa bien-aimée. Il hésite. Il tire. Il perd. Il pleure. Maurice lui demande
d’arrêter de chialer. Les deux garçons auraient dû être à la maison il y a une demi-heure de
cela. Ils vont se faire gronder.

Le salon de coiffure du père Joffo se trouve à la rue de Clignancourt dans « une colonie
juive ». Comme ils approchent, Maurice rend à son frère sa bille préférée. La boutique est
comble de clients : certains d’entre eux sont des habitués. Les garçons bâclent leurs devoirs
de maison et puis détalent, à travers la boutique, de nouveau dans la rue, leur terrain de jeu
préféré, le lieu où ils sont les plus heureux, où ils aiment explorer.

Deux hommes en noir marchent lentement tout en haut de l’avenue. Deux S.S. (partisans de la
Schutzstaffel dite la S.S. – organisation militaire du parti nazi en Allemagne. Ils participent
activement à la déportation et à l’extermination des Juifs). Des S.S. en uniforme. Les garçons
ont tout deux la même idée pour une fois. Ils se placent devant la devanture de la boutique,
obstruant la vue de l’avis jaune et noire sur la vitre : « Yiddish Gescheft » (Boutique pour les
Juifs). Les Allemands … Ils sont entrés dans la boutique et rejoignent les clients qui patientent
Les garçons rient pendant, que dans la boutique, un immense silence règne depuis que les
deux officiers patiente, « genoux joints au milieu des clients juifs de confier leurs nuques à mon
père juif ou à mes frères juifs. »

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