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Réfutation des principes hasardés dans le Traité des délits et peines, traduit de l'italien, par M. Muyart de Vouglans, avocat au
parlement.. 1767.
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Ì ET PEINES.
RÉFUTATION
ET PEINES, traduit de
sltalien.
A LAUSANNE,
& se trouve à Paris ^
Chez; DBSAINT, Libraire, rue du Foin-
Saint-Jacques.
M. DCC, L X V I L
LETTRE
Contenant la Réfutation de
MONSIEUR,
Mitre f fk^íslirste^tírfè^Ehan^-
rátíon^cté* des^flôr entes eí-
''. C
péces de crimes, 8e de leurs pei-
nes, ainsi que des procédures né-
cessaires pour parvenir à les con-
stater 8e a les punir* 8e
cependant
vous verrez avec surprise, que
rien de tout cela ne se rencontre
dans l'Quvrage en question.
L'Auteur, qui n'a pu se dissimu-
ler le reproche qu'on seroit en
droitde lui faire sur des omissions
aussi eíïentiellès, prétend l'élu-
r. der en disant: «"Quelamultitu-
7.
» de 8e la variété de ces objets.,
•> d'après les diverses circonstan-
»> ces des tems 8e des lieux, le
.»> jettéroient dans un détail imr
» mense 8è ennuyeux».Maisest-U
bien recevable dans une pareille
excusç? Quand on le voit annon-
cer en même tems, l'exâmen d'u-
ne multitude de Questions qui
exigeoient des détails beaucoup
plus iìrtrlíenses 8e rpoins analo-
gues à son sojet, tellçs que ÇQUQS«
ci. * Quelle est ('origine des Pei-
»nes^ Í8e le fondement du droit
w de punir?.,., Quels sont les
,? moyens particuliers dans une
» bonne saisir
Législation pour
•> le criminel 8e découvrir 8e
» constater le crime?... La Ques-
©>tìon est-elle juste, 8e conduit-
» elle au but que se. proposent
» les Loix ?..,,.. Comment éta-
» blir la
proportion que ÌQS pel-
»nes doivent avoir avec ìts
» crimes ?.... Quelle est la me-
» siire de. la grandeur des Dé-
•> lits ?...... La de nìort
peine
» est:eíle utile 8e nécessaire pour
»la sûreté 8e le bon ordre de la
» société ?.... faut-
Quellejpeine
•> il aux différéns cri-
infliger
» thés? ....Les mêmes peinés
» sont-elles utiles dans
également
» tousíes»tems?.M.Quelieinfluen-
» ce ont-ellesfurlèSmoeurs ?....
*» Quels sont les moyens les plus
Ci-/.
.,v-.-<?u.-, '.<•»•>
«efficaces ppurprévenir le^cri-
•>més?M.» '. : •
, ,
JVÍais ce qui né ypus surpren-
dra pas moins,Mpnfiçv^ i? c'est
qïíç( routeur d'â-
ose^es flatter,
vp(r renfermé ,<|ans up ,ge_tiï vò-
•4w#» *J ç/rRc^te?teRPí:
ment de tpiites ces Qijestion^qut
ne de m ano^e.r olt, nèn*. m oins; que
des Vqlun^èv'W^ o" ?y"à-.-«
Au reste la-
;laJ4gére1céa^ep
quelle jl tráit;e?tpus ces* p&jëts ï
yous .fera ;biéntpt juger Qu'ils
n'pní fait que de;Jui\seryir(jdé
p.rétçxtef^ppur y glií^^.jfe^T?riji-
*
cípes^artifjjiljìersi ''^i-S \
~: Nous ^vpns .'dêjà, -rapporté
cejix, qu'il ojÇe'jayanc'e'r ^ :çeUtì-
yêment aux ma^xirnes d.ejàv Lé-
i il yie nou^s r^ste plus
gislation
parqpurjr' ce
qu'à qu'il ^túqu-
la manière dqn.t:Ion doit
jc^ant
ï nnstructiorilv8e'Ù la
procéder
punition des crimes J ou plutôt,"
de réfuter les Objections parti-
culières,qun nous fait íur lun
8e l'autre de ces, jPojnjs,'
Mais, avant que dé nous livrer
à ce détail ,Qu'il nous soit permis
d'écarter d'avance ce reproche
général, que l'Auteûr fak á no-
tfe |urisorudençe > d'être, pure-
ment' offensives de p^tén.tgr
^iìlée de la force & <íe la puissan-
ce , plutôt que celle de lajûjllcè t
Trpus allez voir, Monsieur iqu'ií
npfftj: jamais de reproche moins
mérités par la marcliçaunlsa-
ge que méthodique l ayéc ía-
quel|e; elle.s'exerce dans nos Trî-
bunalfx j je pui^' même ajouter
dárís* l^srTribunaux des Nations
ÌQS plus 8e
policées ^l^Jîuro^e,
íînguliërèijieïit dans ceux du
Pays même où cet Ouvrage a
pris naissance.
D'abqrd': Quanti |a Procé-,
(30)
dure, en voici les Actes princi-
paux, tels qu'ils se trouvent mar-
qués par l'Ordonnance de r 670,
qu'on peut regarder comme i'A-
bregé de toutes les Loix les pitis
iages qui ont été rendues en
cette matière.
Le premier Acte, est celui de:
la PLAINTE^ qui se fait de deitx
manières, oii<,direclement par Re*
quête, ou par un Procès-verbal
que ie Juge dresse fur la décla-
ration de Ta Partie plaignantes
ou indircUtmmt par la voie de!
la Dénonciation > qui se lait au
Ministère public, lequel pour-
suit en son nom, 8c est tenu de
nomm,er íe Dénonciateur à, Tac-
çusé renvoyé absous, pour qu'il
puisse poursuivre contre lui. ses
dommages 8e intérêts,8e même le-
faire condamner á de plus gran-
des peines y si cette Dénoncia^
tion est jugée calomnieuse.
(3i)
Comme, pour fonder uhè Ac-
cusation, il y a deux choses à
établir; En premier lieu, que le
Grime a été commis,(cequ'on
appelle constater le Corps du Dé-
lit ) 8e en second lieu, que l'Ac-
cusé en est l'auteur $ i'Ordpn-
narice prescrit ensuite la manière
de parvenir à l'une 8e à l'autre
de ces Preuves j sçavoir A la pre*
miere^av les PROCÈS- TER-
BAUX des Juges, 8e par les
RAPPORTS DES MÉDECINS
ET CHIRURGIENS ,* Se à" la
seconde y par les INFORMA*
TIONS , qui doivent être com-
posées de témoins dignes de foi,
8e exempts de tous reproches j
. Quoique l'on puisse .aussi y en
admettre d'autres en certains
; qas > sauf aux Juges d'avoir tel
égard que de raison , á la soli-,
dité 8e a la nécessité de leurs té-
moignages.
C4
('3 «)
Indépendamment de la voie
des Informations, la Preuve du
crime peut encore s'acquérir de
trois autres manières , suivant
l'Ordonnance d'après la Loi.
Romaine* sçavoir :-par Ecrit,
par la Confession de l'accusé, ^c
par des Indices! ou Présom-
Ce a donné lieu à,
qui
a division
{ïtions. des Preuves en tes-
timoniale , littérale y vocale^ & con-
jeclurale.
C'est fur le vu des charges 8e
Informations que se donne le
DÉCRET contre l'accusé. L'Or-
donnance veut que ce Décret,
soit plus ou moins rigoureux,
suivant la nature du Crime , la
* Factí
Qtuestío est in arbitrid jiidiçis;
non étiam juris auctoritas,~ L, Or^inc tf,
-----~
fft ad mùhiclpaUm,
f*Poenai est cqmtyensuranda 4fijfer A
Sancimus. Ccd, dcP'oenis. y.auffi £•*$.#
çod. Tiù . ••"-•.-;•• ';•>•;.^;.;-7;T.'..'
comme
U9) . „
comme parmi les crimes, 11 y jan
a qui attaquent la Personne,
d'autres \%Honneur, d*àutres en-
fin, lesBien$\ les Loix ont aussi
distingué à ce sujet, trois sortes
de peines, les Corporelles où
afflictives, les Infamantes & les
Pécuniaires *. .
De toutes les peines corpo*
relies, la plus grande est cellë
de Mort\ qui a lieu principa-
lement pour les crimes qui ar>
taquent directement la vie des
hommes j quoiqu'elle puisse être
aussi infligée d'autres cri-
pour
mes , lorsqu'ils troublent essen*
tieilement Tordre public, & qu'il
a été reconnu par expérience,
qu'il n'y avoit point d'autre
moyen d'en empêcher le pro-
•• ^... A .Î.Ì.1,
Une MtrtR&GLH q^e }ç Juge
doit suivre
dansj'applicatîondçfi
peines, c'est qu'il n en peut point
prononcer d'autres, que celles
qui font établies parla Loi,,ou
par la V >
Jurisprudence
Une troinéme RÉGIE , c'est
que dans imposition des pei-
nes , le Juge ne doit affecter ni
de la rigueur ni de la clémence-,
mais employer, à propos l'une
& l'autre > suivant l'exigence
des cas j de manièrequ'il pànchc
plutôt pour la douceur en fait
de Délits légers \ & qu'à l'égard
des crimes graves, il tâche, en se
conformant à la Loi, d'y ap*
pojtër tp.us les tempéramrnén|s
qui peuvent dépençtre de lui +.
•'• ": -: !' " '
I I ''jàr-
T. .' III I I 1 ' _
• *Poena non irrogatur, nisi qu* quaquíe
lege, vel quo aliojure spécialités h'uic de-
licto iín'pôfitâ est. í, \ï„ff de verbòKsignis,
f Perspiciendum estijudicanti utquîdi,
aut durius, aut remîflìus conítttuatùr quatn
El
v Une quatrième RÈGLE, c'est
táue dans les cas absolument
'douteux, le Juge doit incliner
:pòur la clémence > par la raison >
comme nous l'avons dit, que
l'on doit toujours panchér en
faveur dé Pinnocence de l'ac-
cusé */
Une cinquième RÈGLE , c'est
qu'il doit augmenter ou dimi-
nuer les peines, suivant les Cir-
constances qui ont accompagné
le crime i c'est-à-dire , suivant
le Motif 'ou la Cause qui a porté
* Si
parum prudenter non exqulsitii
argumenm fimpliciter dehotare Irenár-
chem detulisse, sed si quod maligne aut jn-
terrogasse, ut non dicta retulisle prodlctis
eam compererit ut víndicet in exemplum»
ne quid & aliud postèa taie facerë molià*
tur. L, 6,Js, DÌVUÍ Adrìaws ff. de Custdd*
ut txkii, rtor-,
toujours
toujours eu pour maxime que
un crime est atroce, moins
plus
il doit se présumer ; òí, si nous
avons admis la preuve par indi-
ces pour ces sortes de crimes,
ce n'est, comme nous l'avons
dit, que parce qu'ils se conv
mettent si secrètement Ôc avëc
tant de précautions, qu'il seroit
le plus souvent impossible de
trouver des témoins qui les au-
roient vu commettre. Au reste
nous avons vu, d'après ces ter-
nies de la Loi Indiciis ad p/o-
bationem indubitatis, que cette
preuve pouvoit être aussi corn-
dans son genre, que cel-
plette
le par témoins \ ce qui s'entend
lorsque ces indices font tels qu'on
ne peut les regarder quecomme
une conséquence nécessaire dui
crime,qu'íls sonten certain nom-
bre, & qirïls font prouvés cha-
cun en particulier par deux tè:
(M)
moins 5 mais il faut fur-tout qu'ils
soient accompagnés dé ('existen-
ce du corps du Délit qu'on fait
devoir être la bazé de toute ac-
cusation dans des crimes qui
sont de nature à laisser des. tra-
ces, après eux. L'Auteur peut
d'autant moins contester ce
> qu'il est convenu d'ail-
Íïrincipe
curs, comme nous l'avons ob-
servé , que les preuves imparfait
tés pouvoient former une preu*
ve parfaite, lorsqu'elles étoient
en»certain nombre, ou avouées
tacitement par l'accusé qui ne
répondroìt rien de satisfaisant
à ce sujet. L'on seroit curieux
de savoir où il a le pré-
puisé;
tendu axiome qu'il nous oppo-
se j il le cite d'après tous les, Ju-
risconsultes en général, 6c ce-
pendant bien loin dé .trouver
ce langage unanime qu'il leur
fait tenir > l'on ose dire qu'il n'en
ejjt pas un se.ul dé toqseeutf.qul
font, les plus connus, même d'ï*
talie, tels que ju.liu's jClarus îjc
*
Farinaçius qui ne soutienne
des principes absolument op,-
posés* du-moins pourçe quj
.concerne la, condamnation cjfí
.l'Accusé, car, pour le Décret,
nous avons vu que la Loi n'exj-
geoit point une preuye , auíîì
complette ; 6c c'est vraisembla-
blement de ce dernier cas qu'au-
roient voulu parler les Jurip
consultes dans le prétendu axio-
me qu'on leur attribue.
" *
V. Jul. Clar. (5u. 10. vers. Iî«. & Fat.
.Qu.86íPr^.JCriui,; ; v
Fi
» jetter indistinctement le ténia!-
w des 6c de ceux
gnage infâmes
•• Font morts civilement ;...• de
qui
» faire prêter serment aux Accu-
» sés avant leur interrogatoire}..»
» la voie de la torture
d'employer
M leur faire confesser leurs
pour
»> crimes, ou révéler leurs corn-
» plices $... de prononcer la peine
» de /wor*,... 6c celle de la con*
nfiscadon des biens j... de ne
» point tant considérer dans le
» crime le dommage qu'il causé
» au Public, que ^intention de
» celui qui le commet, ía qualité
» de la personne offensée,^ i'in-
» jure qu'il fait à Dieu\», de pu-
» nlr également les crimes com-
» mencés, comme ceux qui font
» consommés ;... de punir moins
» sévèrement les crimes commis
w par des personnes d'un rang
» élevé > que ceux des personnes
» d'une condition basse )ii. de ne
KngSf*.
*
Quicumque sanguinem humanum eflfu-
derit, ejus quoque (anguis effundetur.
Gènes, Cap 9. v. o.
veroit visiblement en défaut A
cet égard.
Mais ce n'est pas seulement
contre le Droit naturel, òí le
Droit des gens que pèche le
système de l'Auteur, il est en-
core contraire A toutes sortes
de Droits positifs, l'on veut dire
au Droit civil òí canonique, au
Droit commun de toutes les
Nations, òí A PExpérience de
tous les siécles, qui autorisent
en même-tems qu'ils justifient
la nécessité de rétablissement de
la peine de Mort.
i° L'on dit d'abord que ce sys-
tème est contraire A la disposi-
tion du Droit *
canonique qui
autorise çettç peine d'après les
* Si
quis çer industriam aut infidias oc-
cident proximum suum S ab altare meo
éveils eum utmoriatur sExod. 21. v. 14.
** Epist. S. Paul, ad Rom.Cap. 13. 4.
f Qui aliénas oedes aceryumque fru-
menti juxta pofitum dolo malo commiíìc
vinctus, verbe ratus, igné necatur.
òí
(*9)
èí du Code, qui prononcent ex-
cette peine, non-seu-
pressément
lement en fait d'homicide $ mais
encore pour de certains crimes
qui troublent essentiellement
f ordre public, comme YIncen-
die y òíc,
3° II est de plus contraire au
Droit commun de toutes les
Nations. En effet, l'on ose dé-
fier l'Auteur d'en citer aucune
où cette peine n'ait toujours été
en usage. L'exemple unique-dé
f Impératrice de Russie ne peut?
être opposé A ce cri général de
toutes les Nations ; ÒÍ il peut
d'autant moins être tiré A consé-
quence, qu'il n'est fondé unique-
ment, comme l'on sait, que sur la
situation particulière d'une Pro-
vince qui tendoit A favoriser la
singularité de ce plan.D'ailleurs
l'Auteur petit d'autaHt moins
se prévaloir de cet exemp'b,
H
(90)
qu'U contrarie ouvertement le
Principe général dont il con-
vient lui-même 5 savoir} <* Que
» la peine, pour être juste, doit
» être publique, òí qu'elle ne
» doit point s'exécuter dans
» un lieu de celui où
éloigné
» a été commis le crime, de
» peur que ne soit
Pexemple
« perdu la Nation »J.
pour
40 Enfin ce système est con-
traire A ['Expérience dQ tous les
siécles, qui nous apprend que,
de tous les moyens qui ont été
employés jusqu'ici pour arrêter
h progrès des crimes, on, n'en
a point trouvé de efficace
plus
que celui d'y attacher la peine
du dernier supplice. C'est la rai-
son qu'en rendent tous les Lé-
gislateurs dans le préambule de
leurs Loix. C'est entr'autres le
motif particulier qui a déter-
miné ïimposition de cette peine
(90 gL
pour les crimes de Faux Òí aP
Vol, comme on peut le voir par
les Ordonnances de nos Rois.
Mais enfin, ce qui achevé de
démontrer toute la nécessité
qu'il y a de laisser subsister cette
peine, c'est f impossibilité même
où l'on a été jusqu'ici d'en trou-
ver aucune autre qui soit capa-
ble de la remplacer* Òí cette
impossibilité se prouve par l'in-
suffisance même de celle que
l'Auteur comme la plus
propose
capable d'y suppléer; En effet il
faut convenir que ['Esclavage
perpétuel dont il parle, est une
peine insuffisante, si elle ne rem-
plit aucune des trois fins pour
lesquelles les peines sont éta-
blies j savoir, de réparer le pré-
judice fait au particulier par le
crime, d'assurer Tordre public
en détournant les autres du
même crime par la sévérité de.
Hi
É(90:emple, òí enfin de contenir
le criminel, òí f de
empêcher
retomber lui-même dans le cri-
me, òí de nuire davantage A la
Société.
i° D'abord , l'on ne peut
dire que, par ['Esclavage perpé-
tuel, le Particulier, qui a souf-
fert du crime, soit suffisamment
vengé jpuisque si c'est un meurtre,
lés héritiers de la personne tuée
ne peuvent trouver de conso-
lation, ni de dédommagement
de la perte qu'ils ont faite, que
par laclestrucVion mêmedu meur-
trier , ou par le dépouillement
de ses biens; òí si la personne
envers qui le crime a été com-
mis est encore vivante, l'on ne
fait que lui rappeller son mal-
heur par )e spectacle de celui
qui en a été: fauteur, òí qui
oseroit même encore la braver
au milieu de son supplice»
i L'on ne peut dire non plus,
q.:e f Intérêt public scroit satis-
fait, puisque f esclavage n'em-
pêcheroit point que le criminel
ne puisse nuire encore A la So-
ciété de plusieurs manières ,soit
par le scandale que donncroit
sa présence 6c le souvenir de
son crime; soit par f habitude
de le voir, qui diminueroit in-
sensiblement fhorreur salutaire
que doit inspirer le crime>soit
par le danger de sa fréquenta-
tion qui le mettroit a portée
de communiquer la contagion y
non-seulement A ceux qui se-
roient associés A fa peine ; mais
encore A ceux qui seroient char-
gés de pourvoir A ses besoins^
soit enfin par le grand nombre
de ces criminels, dont f existence
deviendroir une surcharge pour
f Etat, òí l'appauvriroit bién-tôc
tant en troupes ^ A cause de la
(94)
multitude de personnes qu'u
faudroit pour les garder, qu'en
argent ì cause des frais immen-
ses qu'eritraîneroit leur subsis-
tance.
3° Enfin Ton ne peut dire
que cette peine soit capable de
contenir suffisamment le Crimi-
nel, en ce que, s'il est riche &
d'un rang distingué, il pourroic
non-seulement trouver le secret
de tempérer la rigueur de son
íùpplice par les secours qu'il
tireroit de fa famille} mais même
se soustraire entièrement "á la
peine par les séditions qu'il pour-
roic exciter,ou par la corruption
de ses gardes ; & que, si au con-
traire il est deconditionvile,& né
dans le sein de l'indigence, bien
loin que l'esclavage Tût pour lui
une peine rigoureuse, il ne seroit
qu'adoucir en quelque sorte son
lof tj en lui assurant du pain pour
(95)
le reste de ses jours, 6c le déli-
vrant par-là d'un souci qui fai-
soit le principal malheur de sa
vie, & qui avoit peut-être été
le seul aiguillon qui l'avoit porté
au crime.
Concluons donc de tout ce^
que ce n'est point tant la durée
de la peine, comme l'Auteur le
prétend, que la durée de l'im-
preíllon que la rigueur"^! e cette
même peine fait nécessairement
fur les esprits, qu'il fa \t consi-
dérer en cette matière. Ainsi >
comme la peine de Mort est*
fans contredit, de toutes les pei-
nes celle qui est la plus capable
de faire impression fur les esprits,
par son extrême rigueur, & par
les torts irréparables qu'elle en-
traîne Î ce n'est donc que par
cette forte de peine que l'on
peut punir les crimes les plus
atroces ôc les plus nuisibles à h
Société»
(90
j° L'Auteur voudrolc bannir
des Jugemens la peine de la
CONFISCATION. L'on croiroit
d'abord, que c'est uniquement
par haine contre le Fisc dont
il se que l'esprit domine
plaint
singulièrement dans notre Ju-
risprudence : mais, comme la
raison en rend est la même
qu'il
que celle sur laquelle il se sonde
d'ailleurs, pour prouver qu'on
ne doit point prononcer de pei-
nes pécuniaires en fait de vol ;
savoir, que ces sortes de con-
damnations tendent à précipi-
ter des familles innocentes dans
Tindigence & dans le désespoir j
il y a lieu de croire que le prin-
cipal but de TAuteur en ceci, est
de bannir en général toutes les
pécuniaires, &; cela dans
Í>eines
a vue de favoriser les familles
á^s coupables: c'est-à-dire qu'une
fàhíìlle, qui se sëroit enrichie du
fruit'
(97)
fruit des rapines d'un scélérat,
& dans le sein de laquelle il au-
roit puisé lui-même la déprava-
tion de ses moeurs, soit par la
négligence qu*on auroit apporté
à son éducations/s parles mau-
vais exemples qu'il y auroit re-
çu, mérite jplusde considération
éc de ménagement aux yeux de
l'Auteur, que l'innocent même
qui auroit été la victime de son
crime, ou que la famille de ce
dernier,qui en auroit ressenti les
fuites fâcheuses.
Est-ce donc là bien entendre
ies intérêts de l'humanité, &
.rnériter le glorieux titre que
l'Auteur se donne d'en être le
Défenseur? Mais non, c'est en-
core trop faire grâce à l'Au-
teur , que de ne lui supposer ici
qu'un simple motif de commi-
sération pour les malheureux :
Qui ne voit qu'il en est un autre
I
qui J'affecte ^nçore davarìt^ge J
par cette exclamation séditieuse
qu'il fait en parlant du Droit dé
propriété, lorsqu'il dit: DROIT
P. io6, TE R k}BLE, & qui ne fi toit
peut'être pas nécessaire......
6P Toujours rem pli del'idéé
de son Pacte social, & que lé
crime n'est aiitre chose que ia
violation de ce; níême Pacte,
TAuteur prétend que la gravité
du crime, 6ç la grandeur de sa
- ne -doivëntí '
se mesurer
peine,
que sur la grandeur du dom-
mage qu'il cause au Public * 6ç
il veut en conséquence que Ton
ri'áìt égards-'rii1â ïintèritioii de
celui qui íè sommet, ni à Já
'qualité de celui envers'qui il est
commis, ni meme à la grandeur
dé l'ossense faite à Dieu. •
• il ne veut point
D'abord, que
l'on 1éófìûdkï&Yintentlori± farce
que,- dit' il / les hommes ne fi en-
(99) , .
Vent la connoître,à moins que ' J
Dieu ne la leur révèle > & que
souvent avec la meilleure inten-
tion l'on peut nuire à la société;
tandis la mauvaisel P. '77-
qu'avec plus
intention,l'on peut lui rendre des
services essentiels. C'est-à-dire,
suivant l'Auteur , que l'on ne
doit avoir aucun égard aux actes
extérieurs qui manifesteroient
cette intention, pas même aux
actes les plus prochains du cri-
me & qui en seroient insépa-
rables : eniorte que, si un parti-
culier avoit été vu en embus-
cade sur un grand chemin, à une
heure indue, tirant un coup de
fusil dont il auroit tué un homme,
qu'il auroit ensuite dépouillé de
. ses essetSjdefquels il fetrouveroit
saisi au moment de sa; capture $
il saudroit, en partant du,système
cle l'Auteur, une révélation polir
s'assurer que ce mênYe particti-
I 2.
( roò )
; lier est m Assassin & un Voleur*
<3e n*est pas tout! si, pour juger
de la grandeur du crime & de
h punition qu'U mérite, Ton
ne devait point tant considérer
iïntention * que la grandeur du
dommage réel cauíe à la socié-
té yìì g'ensuivroit encore, que
non-seulement Mnsensé & Hnv
pubère ne devrolent pa$ être
moins punis, que tout autre qui
4uí'oic causé le dommage en plei-
ne connoissançe de cause j mais
que celui qui, par un cas fortuit-,
ou par une simple négligence,
auroit mis le feu à fa maison,
-& par*là occasionné l'inç-endie
de celles de ses voisins Î OU dont
le fusil seroit par mégarde
j>arti
& auroit blessé ou tué un nom-
me qui passoit dans la rue j ou
enfin <qui auroit tué dans la
nécessité d'une légitime défense,
auroit fait un plus grand crime
(ta)
& devrolt être puni plus rîgott*'
reufement que celui qui, à deP 4
sein prémédité [dolà malo) au-
roit tenté démettre le feu, oiï
de tuer ,s& qui en auroit été ein-
pêché par quelqu'obstaclé sur-
venu j par cela seulement que
îe premier auroit en effét causé
de que le dernier*
plus dommage
qui auroit fait néanmoins toué
ce qui dépendoit de lui, poúr
en causer de beaucoup plus con*
íidéïables. Toutes ces consé-
quences qui fé présentent si na*
rurellementà l'espric, suffiroient
sans doute fátte réjetter
pour
avejc hòxttnt ttn pttèifcftfrftjié;
quanA il n.e; seroit pa& d'aijlôurs
réprouvé hautement jtá* le>
hoMyíwtwtlesquelles,on doit
si bien considéíer ^intention*>
veuj; entemème, qu'en, fëfc
e crimes;
Ju'elies atroces - teí qu&îat
saffinat* ton punisse le simpte
1$
(roi)N
attentat aussi rigoureusement
que si le crime avoit été en-
tièrement consommé*,& qu'au
contraire l'on ne punisse point
une action, quoique rnauvaise
de fa.nature, íi elle n'est point
faite à mauvais desseins.
L'Auteur prétend, en second
Heu, que l'on ne doit pas non
plus dans l'imposition de la peine
avoir égard à h Qualité de
celui envers qui le crime a été
commis 5 & il en donne pour
raison, que tous les hommes dé-
• * In maleficiis voluntas
spectatur non
e.xitus. V. L.-\^)ff,adLeg. Corn, deSicc.
Qui hominem volumariè occidere vo«
luent, & perpetrare non potuerit, homi«
cida tamen habçtur. V, Capìcul. de Char-
lemogne. Cap. j. ììb. 7. . . -
' f Divús Adriànus
rescripsit eiim qui
hominem occìch't >si lion qccidendi animo
hoc admisit absolvi .ppste.' L, Divins Adr%
jjfí *ád íoy Cornes, de Siccarìis,
•...;...Ctimen eriim cohtrahitur ,si & voluit»
)tas,noccndi intercédât.T. L.,i, Ibid,
(i03)
^pendent également de' la société
dont ils font membres., II veutp> l7$
aussis par larmême.ra.iíon , que
l'on punisse les' perfonn.es du
plus háiit rangs comme, le der-
nier des Citoyens.
L'on sent encore tout le dan-
ger & l'absurdité d'ut) tel prin-
cipes qui n'est pas seulemenj:
contraire à la'dispositions,des
JLoix , qui ont toujours distin»
gué la Qualité des personnes
dans l'ordre des peines; & même
_à ['expérience journalière qui
nous apprend que les,personnes
d'une condition relevée ayant
plus à coeur l'honneur que la
vie même *, ^imposition d'une
peiné infamante fait fur
simple
• • v :
v. .: -r-:"i '-. -':í>
' ;:• -n-.. :-
t'" r:.i\
„> -*Mors eis solatium est 8ç yita suppli-
cium. fust, Lips. de donsi.Liï, 2. C. 17. f,
'L. y, f» Legis Corneii*, & I,. ptnult, fs^ad
yLtg,Córitéltde$iccart. ' \\'
' " '''
•14
eux une plus vive impression, quç
ne feroient des peines corpo-*
relies fur des personnes dç bàíse
condition * mais il est* encore
contraire au propre système d$
l'Auteur, en ce que IHntéifêtpu-
blic qu'il a si fort en vue^derrí aride
qu'on ait des égards particuliers
pour des personnes nobles on
constituées en dignité,donc l'fcx*
tinctîonou la flétrissure, ne pouiv
roieno manquer de? eaufér d£
dommage à la société. Ce n'est:
pas à & vérité ,,qu1t n'y ait dfc
certains çrììmes atroces clone fô
noirceur dégrade l'hiimanité,tefe>
l'assassinat, 6c pour lesquels J&
2ue
JOÌ veut que tes coupables soient
punis fans aucune: distinction dé
qualités.C'est même une maximes
particulièrede'notre Droit Fran-
çois *. Mais,, hors çe ça^s particu-
* V.
Loysel > Reg. 29. lib., ê. ùu 1. VY
«ustU'atu i?4, rOsdonnance dftfilstíik
lier, H feut convenir, encore une
fois(> que rien ne seroit plus ab*
sttrde; & en même^tems plus,
dangereux, que 4e vouloir éta-
blir pour régie générale, comme;
felt r Auteur, que; la Qualit&dea
personnes ne doit point influer
fur la grandeur du crime ni de
la peine ; puisque, si cela étoit,
tagEnfans&les Furieux ne, de*
vrolencpas être moins punisjque
toute autre personne jouissant
de fa pleine raifort, le Médecin
qui empoifonneroit, le Tuteur
qui vloleroifi fa Pupille, le Geo.-»
Kèç qui abuserait de. sa Prison*
nière, le; Notaire qui seroit u&
acte faux, l'Or/évrê qui ferohi
de la fausse monnoie, ne se-*
f oient pas plus coupables & ne
devroiehfc pas être puni plus,
sévèrement quede simples Par*
ticuliers qui soroient tombés
fam les. mêmes crimes*
Uo6)
Par une suite du même systè-
me, l'Auteur va encore jusqu'à
p» ru're qu'on ne doit point
comJ„:er la gravité du crime
par rapport à la grandeur de
y offensé au*il fait à DIE U ,
parce que, dit-ìl, la grandeur
du péché dépend de la malice
du coeur, que les hommes ne
peuvent connoître, à moins que
Pieu ne la leur révèle. Pitoyable
subterfuge que nous avons ré-
futé d'avance, & qui se trouve
d'ailleurs confondu fans ressour-
ce par toutes ÌQS Loix, tant di-
vines qu'humaines; Pat Lói$
divines, nous voulons parler de
celles que le suprême Législa-
teur a tracé lui-même aux Con*
ducteurs de son Peuple, & oíi
l'on voit éntr'autres qu'il y a d<&s
publiques portées contré
Î>eines
es Blasphémateurs, les Sacrilè-
ges, & autres criminels de Lfeze•
Majesté Divine,
(.107)
Ce sont ces mêmes Loix
qui
ont servi de fondement à celles
que tous les Princes Chrétiens
ont rendu en conséquence podr
la punition de ces sortes de cri-
rne * $ parce qu'en effet ils ont
senti que la Religion étant sans
*
contredit une partie essentielle
de l'ordre public, toutes \ts fois
que la violation du respect qui
lui est dû s'est manifesté parades
?^es. extérieurs, il faloit néces-
íaitement la punir par des pei-
nes extérieures, qui réparent le
scandale que cette violation a
causé dans le Public, & empê*
client les autres de tomber dans
le même cas,
: MONSIEUR;
Paris , ce ìo
Novembre 1766,
APPROBATION.
PONCET DE LA GRAVE.