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petite introduction
aux microrubans
Robert Lacoste (Chaville)
Rappels...
À mes lecteurs qui auraient malencontreusement raté le pre-
mier épisode de la série Hors Circuits, je rappelle que j’y avais
présenté les bases de l’adaptation d’impédance [1]. En bref :
pour qu’il y ait un transfert d’énergie optimal, l’impédance
d’une charge doit être adaptée à l’impédance interne de la
source. Cette adaptation est atteinte lorsque ces deux impé-
dances sont conjuguées, c’est-à-dire lorsque que les résistances
sont égales et que les réactances sont de signes contraires
(une source capacitive doit être associée à une charge induc-
tive et vice-versa). Si ce n’est pas le cas, de l’énergie se perd.
Relisez l’article du mois dernier, ce sera limpide.
Vous pensez peut-être que beaucoup d’électroniciens ne se
sont jamais préoccupé de ça et ne s’en portent pas plus mal.
Une ligne à impédance contrôlée peut être réalisée sur un circuit imprimé
par l’association d’un plan de masse sur une couche et d’une ligne de
largeur donnée en couche supérieure, formant un microruban.
tance série (le conducteur du câble), associée à une petite trip ? Principalement en jouant sur la largeur de la piste. Si
capacité vers la masse (la capacité entre le conducteur cen- l’on augmente celle-ci, la capacité parasite vers la masse aug-
tral et le blindage). Vous m’accorderez que ces deux valeurs mente, et l’impédance baisse. Réciproquement, si on la réduit,
sont approximativement proportionnelles à la longueur dZ du alors l’inductance série augmente et l’impédance aussi. Il y a
tronçon, donc on peut les noter L x dZ et C x dZ respective- donc une largeur de piste correspondant précisément à 50 Ω.
ment, avec L en henrys par mètre et C en farads par mètre. Cette largeur dépend bien sûr des caractéristiques du circuit
Le câble est donc une succession de petites cellules L/C. Si imprimé en lui même. Tout d’abord l’épaisseur, plus exacte-
l’on applique une tension à une extrémité, les condensateurs ment l’écart entre la couche supérieure et le plan de masse,
vont se charger de proche en proche jusqu’à ce que les ten- qui peut être soit la couche inférieure soit une couche interne
sions soient équilibrées. Pendant un bref instant il circule donc dans le cas de multicouches. Plus cet écart est petit, plus les
un courant vers le câble même si son extrémité est ouverte. pistes doivent être fines pour une même impédance. Le rôle
Imaginez maintenant que vous êtes très riche et que vous du type de substrat utilisé pour fabriquer le circuit imprimé est
ayez un câble de longueur infinie. Si vous appliquez une ten- également important. Le matériau le plus classique, le FR4,
sion alternative à l’entrée, le courant se propagera dans le a une constante diélectrique assez peu stable, de l’ordre de
câble, mais ne se stabilisera jamais. Ce câble présentera donc 4,6. Certains matériaux plus exotiques présentent des carac-
une certaine impédance. Voilà, cette impédance est l’impé- téristiques mieux définies mais ils sont plus chers, comme le
dance caractéristique du câble. Et l’on peut montrer que cette RO4003 de Rogers. Attention : Dans le cas d’un microstrip,
impédance est simplement la racine carrée du quotient L/C. le conducteur est pour moitié au contact du substrat et pour
moitié dans l’air. La constante diélectrique à utiliser pour les
Pour résumer un câble « 50 Ω » de longueur infinie présentera calculs est alors ce qu’on appelle la constante diélectrique
une impédance de 50 Ω à sa source. De même un tronçon effective. Tout ceci se calcule (fig. 2).
de câble 50 Ω terminé sur une charge de 50 Ω présentera
aussi une impédance de 50 Ω : il ne perturbe pas l’adapta- Et en pratique ? En gros, retenez qu’une piste 50 Ω correspond
tion d’impédance. Par contre, choisir un câble d’impédance à une largeur de 3 mm sur un circuit imprimé FR4 double face
caractéristique différente de la charge et de la source perturbe
significativement celle-ci. Pour le vérifier, remplacez donc le
câble de votre antenne TV par un câble 50 Ω, de préférence
à quelques minutes seulement de l’heure de diffusion de la
série préférée de votre conjoint(e), vous comprendrez...
Microrubans ?
Laissons maintenant de coté les câbles coaxiaux et intéres-
sons-nous aux circuits imprimés. Comment raccorder deux
composants sur un PCB tout en conservant une impédance
caractéristique donnée, p. ex. 50 Ω ? La technique la plus clas-
sique porte le doux nom de microstrip, que l’on peut traduire par
microruban. Le concept est simple : Prenez un circuit imprimé
double face, avec un plan de masse complet en face inférieure.
Faites une piste de largeur fixe en face supérieure (fig. 2), vous
avez un microstrip. C’est exactement la même chose que pour
un câble coaxial : un tel microruban peut être décomposé en
petits tronçons, équivalents chacun à une inductance série plus
une capacité vers la masse. Cette technique est la plus utilisée
pour les circuits imprimés RF ou numériques rapides, car elle Figure 2 : Voici un microruban, constitué d’une piste de largeur fixe,
est simple et très bien adaptée aux CMS. placée sur un plan de masse. Gardez sous la main ces formules de calcul
Comment régler l’impédance caractéristique d’une ligne micros- et les valeurs usuelles associées.
Figure 3 : AppCad est un petit utilitaire bien pratique développé par Composants gratuits !
Agilent. Il inclut un calculateur de micro-rubans très efficace. Vous savez maintenant calculer la largeur d’une piste pour
obtenir une impédance donnée, disons 50 Ω. Que se passe-t-il
si vous augmentez ou diminuez cette largeur sur un morceau
de 1,6 mm d’épaisseur, et à une largeur de 1,5 mm pour une de piste ? Rappelez-vous le modèle L/C. Si vous réduisez la
épaisseur de 0,8 mm. C’est d’ailleurs pourquoi, en RF, il est largeur de la piste, vous augmentez l’impédance du tronçon,
souvent plus intéressant de choisir des substrats plus fins... Si ce qui équivaut à l’ajout d’une petite inductance en série.
vous devez calculer des impédances dans des cas plus com- Réciproquement, si vous augmentez la largeur, vous réduisez
plexes et si vous n’avez pas envie de vous tromper dans les l’impédance, ce qui revient à ajouter un petit condensateur
calculs, je vous conseille l’excellent et gratuit logiciel AppCad vers la masse. Tout ça se calcule (fig. 4), et permet magique-
proposé par Agilent (fig. 3). ment d’obtenir des condensateurs ou des inductances gra-
tuites. Pour être précis, ceci est vrai tant que la longueur du
Résumons : Une ligne à impédance contrôlée peut être réali- tronçon reste suffisamment petite par rapport à la longueur
sée sur un circuit imprimé par l’association d’un plan de masse d’onde du signal, sinon c’est plus compliqué... Comment faire
complet sur une couche et d’une ligne de largeur donnée en en pratique ? Imaginez que vous ayez une ligne 50 Ω et
couche supérieure, formant un microruban. besoin d’une inductance série. Fixez d’abord une impédance
plus grande correspondant à une largeur de piste restant rai-
sonnable, p. ex. 100 Ω. Calculez ensuite la largeur de piste
correspondante, puis la longueur du tronçon nécessaire pour
obtenir l’inductance désirée avec les formules de la figure 4.
Enfin, vérifiez que cette longueur est bien plus petite d’un
ordre de grandeur que la longueur d’onde du signal de plus
haute fréquence que vous devez traiter.
l !eff
C! (si l ! ! )
cZ ' Un filtre... avec zéro composant
Il est temps d’expérimenter un peu, non ? Que peut-on faire
avec des inductances série et des capacités parallèle ? Un filtre
passe-bas p. ex. ! Essayons de créer un filtre passe-bas 1 GHz
avec zéro composant. La première étape est de concevoir le
filtre avec de « vrais » inductances et condensateurs. Vous pou-
vez rechercher les formules ou les abaques, ou utiliser l’un des
l Z ' !eff bons outils de calcul disponibles sur la toile. Voyez en figure 5
L! (si l ! ! )
c le résultat obtenu avec l’un d’eux, développé par Tony Fisher de
l’université de York. Il suffit de définir le type de filtre désiré,
la fréquence de coupure, l’ordre du filtre et son impédance
Figure 4 : Avec des microrubans, il est facile de réaliser des d’entrée/sortie et clic, les composants sont calculés, la courbe
condensateurs parallèles ou des inductances série en changeant de réponse aussi. Ici, il nous faut donc trois inductances de
simplement la largeur de la piste sur une petite longueur. 9,12 nH, 15,7 nH et 9,12 nH, et deux condensateurs de 4,36 pF.
Figure 8 : Un analyseur de réseau vectoriel HP8510 au travail dans le Figure 9 : La mesure du filtre. L’échelle horizontale est de 45 MHz à
laboratoire de la société de l’auteur. 4 GHz. Très proche de la simulation, non ?