Vous êtes sur la page 1sur 7

Master 01: GL,GI

Chapitre 3: Logique des prédicats du


premier ordre
1. Limites de la logique propositionnelle:
La logique propositionnelle ne permet de formaliser que petite partie des raisonnements
possibles, elle n'est donc pas en mesure de prouver la validité de certaines déductions qui
sont pourtant très intuitives. Prenons l'énoncé suivant comme exemple:

Tout homme est mortel

Socrate est un homme

Donc Socrate est mortel

Cet énoncé se traduit, en logique propositionnelle, comme suit:

(p ˄ q) → r

avec :

- p: Tout homme est mortel


- q: Socrate est un homme
- r: Socrate est mortel

Ce raisonnement est dit : correct si :

╞(p ˄ q) → r, ou p , q ╞ r ( en utilisant une approche sémantique ou la table de


vérité).

Ou

Ͱ(p ˄ q) → r, ou p , q Ͱ r ( en utilisant une approche syntaxique ou un système de


preuve comme SP0).

(p ˄ q) → r est une formule satisfiable mais pas une tautologie, nous ne pouvons donc pas
conclure, en utilisant la logique propositionnelle, que le raisonnement sous jacent est
correct.

Le problème qui se pose avec la logique propositionnelle est que les propositions sont vues
comme étant des objets atomiques. Les mots : Homme (présent dans les propositions p et
q), Mortel (présent dans les propositions p et r), ainsi que Socrate (présent dans les
propositions q et r) qui apparaissent dans plusieurs endroits échappent à cette logique et p,
q, et r sont vues comme étant des propositions qui expriment des faits indépendants les
uns des autres.

1
Master 01: GL,GI

Nous verrons, dans ce chapitre, que nous pouvons exprimer plus de choses en logique des prédicats
du premier ordre qu'avec la logique propositionnelle.

2. Eléments de base:
Les formules de la logique des prédicats du premier ordre sont définies en faisant appel aux
ensembles suivants:

- V: ensemble des variables.{x, y, z, u, v, w..}


- C: ensemble des constantes. {a, b, c, d…}
- F: ensemble des symboles fonctionnels. {f, g, h..}. Chaque symbole fonctionnel est
caractérisé par son arité (le nombre d'arguments). Si x est un entier, alors Succ(x) est
un exemple d'un symbole fonctionnel qui pour x donne la valeur x+1.
- P: ensemble des symboles relationnels ou ensemble des prédicats. {p, q, r, s, t……}.
Chaque prédicat est caractérisé par son arité. estPère(x, y) est un exemple d'un
prédicat qui signifie: x est le père de y.

A partir de ces ensembles, nous pouvons définir Σpr, l'alphabet sur lequel la logique des
prédicats repose.

- Σpr= C ∪ V ∪ F ∪ P ∪ {˄, ˅, ˥, →, ↔} ∪ {∀, ∃} ∪ { ( } ∪ { , } ∪ { ) }.

Remarque:

Un symbole de prédicat d'arité 0 (sans arguments) se réduit à une proposition semblable à


celle du calcul propositionnelle. Nous pouvons dire que le calcul propositionnel est inclus
dans le calcul des prédicats du premier ordre.

3. Syntaxe du calcul des prédicats du premier ordre:


A partir de Σpr, nous définissions les éléments syntaxiques qui entrent dans la composition
des formules de la logique des prédicats, à savoir: les termes et les atomes.

3.1.Les termes:
Nous appelons l'ensemble des termes: T. Un terme t de T peut être une constante, une
variable ou un symbole fonctionnel dont les arguments sont des termes.

Exemples:

a, b, x, f(a), g(y), h(x, f(y))… sont des termes.

3.2.Les atomes ou les formules atomiques:


Nous appelons l'ensemble des atomes: A. Si t1, t2,…tn sont des termes, et p ∈ P (ensemble
des prédicats ) alors: p(t1, t2,…tn) ∈ A.

Exemples:

2
Master 01: GL,GI

p, q, p(x, g(y)), q(a), r(f(x), f(g(y))… sont des formules atomiques.

3.3.Les formules :
Nous appelons l'ensemble des formules du calcul des prédicats: Fpr. Une formule F est
définie comme suit:

- Si F est un atome alors F ∈ Fpr.


- Si A, B ∈ Fpr, alors (A ˄ B), (A ˅ B), (A → B), (A ↔ B) , (˥A ), (∀ x A) et (∃ x A) ∈ Fpr.

Exemples:

p, (p → q), ∀ x ((p(x)˅q(x))→ ∃ y r(x,y)) sont des formules.

3.4.Portée d'un quantificateur, variables liées et variables libres:


- Si A est de la forme: Q x B tels que : Q∈ {∀, ∃ }, x ∈ V, alors, B est la portée du
quantificateur Q.
- x est une variable liée dans A ssi x apparait dans la portée d'un quantificateur
universel ou existentiel portant sur x dans A.
- x est une variable libre dans A ssi x apparait hors de la portée d'un quantificateur
portant sur x dans A.

Exemple:

A= ∀x ∃z ( p( x, f(y) ) ˄ r(x, z) )

- Variables libres de A: {y}


- Variables liées de A: {x, z}

Remarques:

1.Une formule sans variables libres est dite Close ou bien fermée.

2.Soit la formule suivante:

A= ∀x p(x) → q(x)

La première occurrence da la variable x est liée alors que la seconde occurrence de x est libre
car la priorité des quantificateurs est plus élevée que celle des connecteurs. Pour éviter de
tomber dans l'ambigüité, soit on met les parenthèses si on veut utiliser une seule variable,
soit en remplace la deuxième occurrence de la variable x par une autre variable, autrement
dit:

A= ∀x (p(x) → q(x))

Ou

A= ∀x ∀y (p(x) → q(y))

3
Master 01: GL,GI

3.5.Expressions courantes:
- (Tous les A sont des B) ≡ ∀x (A(x) →B(x))
- (Seuls les A sont des B) ≡ ∀x (B(x) →A(x))
- (Aucun A n'est B) ≡ ∀x (A(x) →˥B(x))
- (Quelques A sont des B ) ≡ ∃x (A(x) ˄B(x))

Exemples:

- Tout homme est mortel ≡ ∀x ( Homme(x) → Mortel(x) )


- Socrate est un homme ≡ Homme(Socrate)
- Socrate est mortel ≡ Mortel(Socrate)

Avec :

- Homme(x): un prédicat signifiant: x est un homme.


- Mortel(x): un prédicat signifiant: x est mortel.
- Socrate: est vu comme étant un élément faisant partie d'un domaine ou d'un
univers de discours ( ici par, exemple, les êtres humains).

4. Sémantique de la logique des prédicats du premier ordre:


Les formules de la logique des prédicats, comme celles de la logique propositionnelle, sont
susceptibles d'être interprétées (c’est-à-dire recevoir une valeur de vérité qui peut être vraie
ou fausse), on parle alors de formules: satisfiables, isatisfiables, ou valides.

4.1.Interprétation d'une formule:


On appelle interprétation ou réalisation, et on la note I, d'une formule, la donnée de :

I= <D, Ic, If, Ip>


Avec:

- D: un ensemble non vide appelé: domaine d'interprétation ou univers de discours.


Les éléments de D sont référencés dans les formules par le biais des variables et des
constantes.
- Ic: C →D: une application de C dans D qui à chaque élément c de C associe un
élément d= I(c) tel que d D.
- If : Dn → D: une application définie pour caque symbole fonctionnel f d'arité n.
- Ip : Dn →{V, F}: Une application définie pour chaque prédicat ou symbole relationnel
d'arité m.

A partir de ces données, on définit:

It : Dk →D: une application définie pour chaque terme t ayant k arguments comme suit:

4
Master 01: GL,GI

 Si t = v (une variable), alors I (t)= d / d ∈ D.


 Si t =c (une constante), alors I (t)= I (c).
 Si = f(t1, t2….tn), alors I (t)= I (f) (I (t1), I (t2),… I (tn))

IFpr: D l→{V, F}: une application définie pour chaque formule A ayant l variables libres
comme suit:

 Si A= p(t1, t2, …tk) avec : p comme étant un prédicat et t1, t2, …tk des termes, alors :
I(A) = I(p) (I(t1), I(t2), …I(tk)).
 Si A= ˥ B alors pour tout (d1, d2,…dl) ∈ Dl :

I(A) (d1, d2,…dl) =V si I( B) (d1, d2 ,…dl)= F.

I(A) (d1, d2,…dl) =F si I( B) (d1, d2 ,…dl)= V.

 Si A= B→ C alors pour tout (d1 , d2,…dl) ∈ Dl :

I(A) (d1, d2,…dl) =V si I( B) (d1 , d2,…dl)= F ou I( B) (d1, d2 ,…dl)= V

I(A) (d1, d2,…dl) =F sinon.

 Les autres connecteurs (˄, ˅, ↔) ont la même valeur de vérité que ceux de la
logique propositionnelle.
 Si A= ∀ x B(x, y1, y2, …yl) alors pour tout (d1 , d2,…dl) ∈ Dl :
 I(A) (d, d1, d2 ,…dl) =V si I( B) (d,d1 , d2,…dl)= V pour tout d ∈ D
 I(A) (d, d1, d2 ,…dl) =F sinon.
 Si A= ∃x B(x, y1, y2, …yl) alors pour tout (d1 , d2,…dl) ∈ Dl :
 I(A) (d, d1, d2 ,…dl) =V s’il y a au moins un d∈ D / I( B) (d,d1 , d2,…dl)= V
 I(A) (d, d1, d2 ,…dl) =F sinon.

Une fois définie, l'interprétation détermine l'attribution d'une valeur de vérité à


n'importe quelle formule.

Exemple:

Continent Superficie (en km²) Population


Afrique >= 30 millions >=1.3 milliards
Asie >= 44 millions >= 4.6 milliards
Amérique >= 42 millions >=1 milliards
Antarctique >= 14 millions ≈0
Europ >= 10 millions >= 700 millions
Océanie >= 8 millions >= 40 millions

Soient les prédicats suivants:

S (x, y) désigne: x a une superficie supérieure ou égale à celle de y.

P( x, y) désigne: x a une population supérieure ou égale à celle de y.

5
Master 01: GL,GI

Soit I une interprétation dont la définition est comme suit:

I= <D, Is, Ip> tels que:

D= {Afrique, Asie, Amérique, Antarctique, Europ, Océanie}

I(S) = {(Afrique , Asie )→ F ; ( Afrique, Amérique ) →F ; (Afrique , Antarctique) →V …}.


Cet ensemble désigne l'interprétation du prédicat S selon I. L'attribution des valeurs de
vérité se fait selon le contenu de la colonne : Superficie du tableau qui se trouve en haut.

I(P)= {(Afrique, Asie ) →F ; (Afrique, Amérique) → V ; (Afrique, Antarctique) → V ;…}.


Cet ensemble désigne l'interprétation P selon I. L'attribution des valeurs de vérité se fait
selon le contenu de la colonne: Population du tableau qui se trouve en haut.

Soient:

A= ∀x P(Asie, x)

B= P(Europ, Antarctique) ˄ S(Antarctique, Europ)

C= ∀ x (S (Afrique, x)→ P(Afrique, x))

D = ∀ x ∀ y ((S (x, y)→ P(x, y))

Questions:

1. Qu'est ce qu'on cherche à exprimer à travers les formules A, B, C et D.


2. Donner la valeurs de vérité des formules A, B,C, D selon I.

Réponse:

1. Signification des formules:

A: La population d'Asie est supérieure ou égale à celle des autres continents. Ou encore:
Tous les continents ont une population inférieure à celle d'Asie.

B: La population d'Europ est plus grande que celle de l'antarctique et la superficie de ce


dernier est plus grande que celle d'Europ.

C: Tout continent dont la superficie est plus petite que celle d'Afrique a une population
plus petite que celle d'Afrique.

D: Pour chaque deux continents, si la superficie du premier continent est supérieure ou


égale à celle du deuxième alors la population du premier continent est supérieure ou
égale a celle du deuxième.

2. Interprétation des Formules:

I(A) = V.

I(B)= V.
6
Master 01: GL,GI

I(C) =V Car :

x I(S(Afrique, x)) I(P(Afrique, x)) I (→)


Asie F F V
Amérique F V V
Antarctique V V V
Europ V V V
Océanie V V V

I(D)= F car :

x y I(S(x,y)) I(P(x,y)) I(→)


Afrique Asie F F V
Asie Afrique V V V
. . V
. . V
Antarctique Europ V F F
. . . . .
. . . . .

Vous aimerez peut-être aussi