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L’ESSAI (L’ARGUMENTATION) 

: Méthode par l’exemple.


Sur le thème de « La bonne éducation ».

Sujet (inspiré de l’extrait du discours de Jacqueline Romilly) :


« Toute la vie et même les réussites matérielles les plus simples
dépendent de la facilité que l’on a à exprimer clairement et
correctement sa pensée, à comprendre celle des autres et à éviter
ainsi le malentendu. » a écrit Jacqueline de Romilly.
Dans quelle mesure une bonne maîtrise de la langue semble-t-elle
indissociable d’une bonne éducation ?
Vous répondrez à cette question dans un développement organisé,
argumenté et illustré d’exemples. Vous appuierez votre réflexion sur
l’extrait de Jacqueline de Romilly, votre lecture de Gargantua
(chapitres 11 à 24), les textes lus sur le thème de l’éducation, voire
sur votre expérience personnelle et votre culture en général (films
…).

ACTIVITE

Vous complèterez le tableau suivant qui vous donne tantôt


l’argument, tantôt l’exemple.
ARGUMENTER = Ne pas se contenter d’affirmer = Expliquer
POURQUOI.
L’ARGUMENT est général, il vaut pour tous, de façon globale ;
l’exemple est le cas précis, concret.
Vous devrez impérativement puiser certains exemples dans
Gargantua. (D’où la nécessité de se constituer un petit recueil de
citations à apprendre par cœur).
I. POURQUOI est-il fondamental de maîtriser l’expression (écrite, orale) ? Pourquoi
l’apprentissage de la langue fait-il nécessairement partie d’une éducation réussie ?

ARGUMENTS EXEMPLES
Premièrement, savoir s’exprimer permet de Jacqueline de Romilly donne ainsi des exemples
… : CONVAINCRE. concrets pris dans la vie courante : l’entretien
d’embauche, le fait de défendre un projet dans sa vie
- se présenter de façon convaincante professionnelle, dans l’engagement politique, la vie
- être clair, méthodique et précis pour mieux associative ... On pourrait ajouter à cette liste le fait
convaincre, se faire entendre. de se sentir concerné par un débat, impliqué, apte à
- se sentir légitime quand on prend la parole suivre le débat, à y participer …
- argumenter, réfuter, riposter, débattre sans
se laisser impressionner.

= Savoir s’exprimer permet d’avoir une


liberté de pensée et d’expression.

D’autre part, savoir s’exprimer correctement - Un (contre)- exemple pris dans Gargantua,
et précisément évite des situations chapitre 15, p.77-78 ?
humiliantes ou même le recours à la A contrario, ne pas savoir s’exprimer peut
violence : Mieux vaut s’expliquer, éviter le placer dans une situation humiliante : c’est le
malentendu, exprimer ce que l’on ressent cas pour le jeune Gargantua lorsqu’on lui
que de garder en soi une rancœur, une demande de ‘’rivaliser’’ avec le page
honte, un complexe d’infériorité ou une Eudémon. Gargantua reste coi, incapable de
colère qui dégénèrent parfois en agressivité prendre la parole après le compliment que lui
ou en malentendus. a adressé Eudémon, et il se met même à
pleurer. La comparaison entre Eudémon et lui-
même, à ce moment-là, est dégradante pour
Gargantua.

- Un exemple pris dans Le Premier homme (le


souvenir de la grand-mère au cinéma).
De même, la grand-mère d’Albert Camus,
d’après le roman autobiographique de
l’écrivain, était illettrée, chose qui n’a rien de
honteux en soi si, comme elle, on n’avait pas
eu la chance d’être instruite. Mais la grand-
mère, qui adorait le cinéma (muet à cette
époque-là), était frustrée de ne pouvoir lire les
vignettes qui accompagnaient les plans
cinématographiques. Or, pour son petit-fils qui
devait lui lire les intertitres, c’était un supplice
de lire assez fort pour qu’elle entende, c’est-à-
dire trop fort pour les autres spectateurs : il en
retirait beaucoup de honte … jusqu’au jour où,
plus âgé, plus mature, il eut honte … d’avoir eu
honte (de sa grand-mère).
Enfin, maîtriser la langue permet d’échanger, - Un exemple pris dans Gargantua ?
d’être sur un pied d’égalité avec autrui, Pour prendre un exemple dans Gargantua,
permet de partager des expériences, des l’enseignement de l’humaniste Ponocratès repose
souvenirs de voyages, des passions … Il en beaucoup sur l’échange entre le maître et le disciple ;
résulte un certain plaisir de recevoir et de Gargantua est invité à proposer des exemples qui
partager ou de transmettre. illustrent les leçons du jour, de sorte à mieux observer
la nature humaine, à partir d’anecdotes, de
rencontres, de faits concrets. De même tous deux
rencontrent-ils des voyageurs, des lettrés ou des
artisans : Gargantua développe sa curiosité à travers
l’échange. Les ‘’leçons’’ données par Ponocratès
prennent souvent l’allure de conversations, si bien
qu’il lui transmet ainsi des connaissances mais aussi
l’envie de connaître, d’observer, d’interroger et de
comprendre. C’est le modèle humaniste en matière
d’éducation. Ponocratès lui transmet une curiosité et
des valeurs humanistes.

II. Néanmoins, la maîtrise parfaite ou correcte de la langue ne saurait suffire ; pour envisager
une éducation réussie, elle s’avère indispensable mais certainement pas suffisante.
POURQUOI ?

ARGUMENTS EXEMPLES
D’une part, Gargantua, dans le 1er Ex : Lequel vaut mieux, en effet, de Christian de Neuvillette,
roman de Rabelais intitulé Pantagruel, amant de Roxane qui a l’infortune de ne pas savoir
écrit ceci à son fils Pantagruel parti s’exprimer (dans Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand) ou
étudier à Paris : « science sans de Don Juan, personnage de Molière, beau parleur sans foi
conscience n’est que ruine de l’âme », ni loi qui ne respecte jamais sa parole auprès des femmes
autrement dit … qu’il séduit puis délaisse ?
Cela signifie que l’on peut maîtriser la
rhétorique, l’art du discours et mal s’en Ex : Prenons un nouvel exemple : les maîtres sophistes de la
servir pour humilier les autres, les Sorbonne, présents dans le roman de Gargantua, comme
dominer, les manipuler, les berner, maître Janotus de Bragmardo (p.85-87, chap.19) ou Thubal
mentir, flatter (comme le personnage Holoferne, savent discourir, ce sont des maîtres de la
de Renart dans les fables de La rhétorique, mais ou bien ils parlent à vide (comme maître
Fontaine). La science ou la maîtrise du Janotus), pour ne rien dire, soit ils ont l’art de justifier tout
langage ne suffit donc pas pour et n’importe quoi, avec mauvaise foi (p.92, chap.21).
constituer une éducation réussie.
« Science sans conscience n’est que Ex : Ou encore, dans Le Malade imaginaire, M. Diafoirus ou
ruine de l’âme » signifie que le savoir Thomas Diafoirus savent s’exprimer, ils sont même pédants,
ne suffit pas : il faut aussi acquérir une mais cela ne leur sert qu’à imposer indûment leur autorité
double conscience critique et morale. ou à avoir le dernier mot : « Vous avez beau raisonner :
Une conscience critique pour exercer Monsieur est frais émoulu du collège, et il vous donnera
son esprit critique : discerner le vrai du toujours votre reste », ironise Toinette (p.102). D’ailleurs,
faux, la vérité de la propagande, de pour Molière, tout l’autorité usurpée des médecins de son
l’endoctrinement ou du préjugé pour siècle réside dans un « galimatias savant ».
être véritablement un esprit libre …
Une conscience morale, c’est-à-dire Ex : Enfin (dernier exemple), la grand-mère de Jacques
acquérir des valeurs morales. Et Cormery (ou de Camus) ou sa mère, dans Le Premier
souvent, les valeurs morales homme, n’ont pas la maîtrise de la langue qui permet de
s’acquièrent moins par des discours s’exprimer avec ampleur, mais elles lui inculquent toutes
qu’en présence de personnes qui deux des valeurs morales, comme l’honnêteté, la vaillance,
puissent devenir des modèles. la droiture ; plus exactement, par leur courage quotidien,
elles incarnent la droiture.

D’autre part, la maîtrise de la langue Ex : A titre d’exemple, dans Gargantua, Ponocratès prend
est l’une des acquisitions parmi soin de diversifier son enseignement : pour lui donner le
d’autres d’une éducation qui doit ouvrir goût de l’arithmétique, il joue aux cartes avec lui dans le but
l’esprit et le rendre curieux en variant de lui apprendre à compter ; ils observent tous deux le
le champ des connaissances, comme mouvement des astres pour s’initier à l’astronomie,
elle se doit d’exercer le corps autant herborisent ; ils pratiquent la musique et le chant. Et cela ne
que l’esprit, le plus grand nombre de s’arrête pas là : Gargantua et son maître rendent visite aux
facultés. artisans pour découvrir outils, machines, ‘’métiers’’, gestes
spécifiques, techniques singulières. C’est comme cela
d’ailleurs que Gargantua apprend à admirer et à respecter
le travail de ses futurs sujets. Enfin, l’exercice du corps
prend une large place, là encore de manière intelligente,
pour développer moins la force que l’endurance, la volonté,
la combativité, le courage, la souplesse, la dextérité
(l’habileté), la précision du geste …, et tout simplement
pour se sentir bien dans son corps et sa tête en acquérant
une certaine confiance en soi.

Enfin, une bonne éducation est celle Reprenons pour exemple Gargantua. Lors de sa première
qui permet à l’enfant, à terme, devenu éducation, il ne prend que de très mauvais plis (la
plus grand, de s’émanciper. Or, goinfrerie, la paresse, le manque d’hygiène, les arguments
l’apprentissage de l’autonomie repose de mauvaise foi …). En revanche, éduqué par Ponocratès,
bien en partie sur la capacité de Gargantua adopte un rythme de vie sain ainsi que de saines
s’exprimer mais pas uniquement. On habitudes de propreté, il apprend en quelque sorte à se
peut en effet savoir s’exprimer et respecter. Cet apprentissage se fonde d’abord sur la
pourtant douter de soi au point de ne contrainte ; néanmoins, la contrainte finit par être oubliée,
pas oser. Ou bien, on ne saura pas se Gargantua acquiert de saines habitudes de vie dont il ne
débrouiller, prendre d’initiative, ou saurait plus se passer, et qui lui permettront aussi de
simplement assumer le quotidien : tout devenir une personne sociable, respectueuse de soi-même
cela s’apprend, tout cela aussi est et des autres.
affaire d’initiation, de ‘’pli’’ pris (ou pas)
grâce à l’éducation. Ou bien, pour choisir un exemple moins lettré, de l’enfant
qui apprend à nouer ses lacets à l’adolescent qui écrit sa
première lettre de motivation et accomplit ses premières
démarches pour rechercher un stage ou une école, il s’agit
toujours de devenir autonome.
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Dans un discours adressé en 2008 à l’Académie Française, Jacqueline de


Romilly fait le constat de ce qu’elle appelle une « crise de l’éducation », c’est-à-dire un
divorce entre la transmission de connaissances intellectuelles (l’instruction) et la
formation morale de la personne. La preuve en est, selon elle, deux disciplines,
considérées à tort comme moins ‘’utiles’’, pâtissent (souffrent) de ce divorce, la maîtrise
de la langue et l’Histoire, qui participent pourtant à la formation morale, en formant
l’esprit critique et en transmettant des valeurs, des mises en garde, des expériences du
passé. Pourtant, objecte-t-elle pour défendre l’enseignement de la langue française,
« Toute la vie et même les réussites matérielles les plus simples dépendent de la facilité
que l’on a à exprimer clairement et correctement sa pensée, à comprendre celle des
autres et à éviter ainsi le malentendu. » Cet enseignement est donc indispensable. Dans
quelle mesure une bonne maîtrise de la langue semble-t-elle indissociable d’une bonne
éducation ? C’est la question qui guidera notre réflexion. Nous rechercherons d’abord
pourquoi, selon Jacqueline de Romilly, la maîtrise de la langue fait fondamentalement
partie d’une éducation réussie. Néanmoins, pour être indispensable, cet apprentissage
ne saurait bien sûr suffire, et nous verrons pourquoi.

(2 lignes)

Examinons d’abord pourquoi il est précieux d’acquérir la maîtrise de la


langue, à l’oral comme à l’écrit.
Premièrement, savoir s’exprimer inspire un certain respect, rend crédible (et ne
pas savoir s’exprimer correctement peut à l’inverse discréditer la personne) et, plus
encore, permet de convaincre. C’est être apte à se présenter de façon probante, ce qui
est par exemple utile, indispensable même, pour un entretien d’embauche, comme le
souligne Jacqueline de Romilly dans son discours. C’est aussi la possibilité de convaincre,
grâce à un discours clair, méthodique, précis, et là encore l’académicienne prend diverses
situations en exemples : défendre un projet dans sa vie professionnelle, dans
l’engagement politique ou la vie associative (même si, bien sûr, les actes comptent
autant, sinon plus que les discours). Savoir s’exprimer donne aussi une certaine
assurance, on se sent plus légitime en prenant la parole, on débat plus facilement sans se
laisser impressionner, on est plus à même de réfuter. En bref, maîtriser l’expression,
écrite et orale, permet de participer plus facilement au débat, quel qu’il soit ; c’est une
liberté.
D’autre part, …..

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