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Université Moulay Ismail

Faculté des Sciences


Département de Mathématiques

Support du cours sur le


calcul des probabilités
Filière: SMIA
Semestre III
Chapitre2:Notion de probabilité

Réalisé par: J. H’michane

Année Universitaire 2020-2021


CHAPITRE 1

NOTION DE PROBABILITÉ

I. Le langage des probabilités

1. Expérience aléatoire

Définition
On appelle expérience aléatoire une expérience qui, reproduite dans des conditions identique,
peut conduire à plusieurs résultats possibles, et dont on ne peut prévoir le résultat par avance.
c’est-à-dire toute expérience entraînant des résultats qui dépendent du hasard.

L’espace de tous les résultats possibles est appelé espace d’État ( où l’Univers) associé à l’expérience,
il sera noté par Ω.
Un résultat possible de l’expérience est appelé épreuve et est noté classiquement par ω.
Les jeux de hasard, tels pile ou face, lancer d’un dé, jeux de cartes, loterie, fournissent des
exemples d’expériences aléatoires pour lesquelles Ω est fini, mais Ω peut être un espace plus com-
pliqué.
Exemple 1. "Lancé d’un dé régulier" est une expérience aléatoire avec : Ω = {1, 2, 3, 4, 5, 6}.
ω = 1 est un résultat possible de cette expérience.
Exemple 2. "Lancé de deux pièces de monnaie" est une expérience aléatoire avec :
— Ω = {(P, P ), (P, F ), (F, P ), (F, F )}.
— ω = (P, F ) est un résultat possible.
Exemple 3. "Durée de vie d’un produit éléctrique" est une expérience aléatoire avec :
— Ω = [0, +∞[.
— t = 2000h est un résultat possible.
Exemple 4. "Temps de passage des voyageurs à un guichet" est une expérience aléatoire avec :

Ω = (R+ )N .

1
CHAPITRE 1. NOTION DE PROBABILITÉ

Exemple 5. "L’observation d’un prix d’actif financier sur un intervalle de temps [t1 , t2 ]" est une
expérience aléatoire avec :
Ω = C([t1 , t2 ], R+ ).

La difficulté vient du fait qu’il est possible, pour une même expérience aléatoir, de définir plu-
sieurs univers, suivant ce que l’on entend par le terme «résultat possible». Par exemple, pour le
lancer d’un fléchette sur une cible circulaire, on peut considérer comme résultats possible le point
d’impact, dans ce cas Ω = R2 , après avoir muni le plan d’un repère, ou la trajectoire suivi par la
fléchette, et dans ce cas la Ω = C([0, 1], R3 ).

Remarque 1. Si on répète la même expérience d’univers Ω, on pourra choisir comme univers Ωn


dans le cas de n répétition, et ΩN si on la répète indéfiniment.

2. Événements aléatoires

Définition
Nous appelons événement aléatoire associé à l’expérience, un sous-ensemble de Ω qui peut ou
non se réaliser suivant l’issue de l’expérience.

Exemple 6. Si l’expérience consiste en un lancer d’un dé ; A :«le lancer est impair» est un
événement aléatoire.

Exemple 7. Si l’expérience consiste en un lancer de deux pièces de monnaie ; A :«on obtient


deux Faces» est un événement aléatoire.

Exemple 8. Si l’on s’intéresse au prix d’un actif financier sur le temps [t1 , t2 ] ; l’ensemble A :«le
prix est inférieur au seuil α» est un événement aléatoire.

• Réalisation d’un événement :


Soit A un événement de l’unvers Ω et soit ω le résultat de l’expérience. Alors, A se réalise si
et seulement si ω ∈ A.
— L’événement A = Ω est l’événement certain (tous les résultats de l’expérience prennent
leurs valeurs dans Ω), A = Ω se réalise toujours.
— A = ∅ est l’événement impossible. Il ne se réalise jamais.
— A = {ω} s’appelle événement élémentaire.
• Opérations sur les événements :

♦ Complémentaire (contraire) de A : est un événement constitué des résultats élémen-


taires de Ω qui ne sont pas dans A.
X A = {ω ∈ Ω, ω ∈
/ A}
X A se réalise si et seulement si A ne se réalise pas.
♦ Réunion de A et B : est un événement constitué des résultats élémentaires de Ω qui
appartiennent à A ou B ou aux deux.
X A ∪ B = {ω ∈ Ω, ω ∈ A ou ω ∈ B}.

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CHAPITRE 1. NOTION DE PROBABILITÉ

X A ∪ B se séalise si et seulement si A se réalise ou B se réalise.


♦ Intersection de A et B : est un événement constitué des résultats élémentaires de Ω
qui appartiennent à la fois à A et à B.
X A ∩ B = {ω ∈ Ω, ω ∈ A et ω ∈ B}.
X A ∩ B se séalise si et seulement si A et B se réalisent.
♦ Inclusion : l’événement A est inclus dans l’événement B si et seulement si tout élément
de A appartient à B.
X A ⊂ B ⇔ (ω ∈ A ⇒ ω ∈ B).
X si A est réalisé, alors B est réalisé.
♦ Incompatibilité (Disjonction) : A et B sont incompatible si et seulement si A et B
n’ont pas d’éléments communs (A ∩ B = ∅).
♦ Système complet d’événements : Soit (Ai )i∈I une famille d’événements. On dit que
la famille (Ai )i∈I constitue un système complet d’événements, si ils forment une partition
de Ω. C’est-à-dire, si
G
Ai ∩ Aj = ∅ pour tout i 6= j et Ai = Ω.
i∈I

Notation 1. Nous notons par A l’ensemble de tous les événements. Il modélise l’information
qui peut être obtenue à partir des résultats de l’expérience.
Remarque 2. Pour que la modélisation soit cohérente avec l’intuition, A doit être stable par
les opérations ensemblistes si-dessus :
si A, B ∈ A, alors A ∪ B ∈ A, A ∩ B ∈ A, A ∈ A aussi Ω ∈ A et ∅ ∈ A (A est dit une tribu
ou σ-algèbre).
• Correspondances entre opérations ensemblistes et événements aléatoires :
Terminologie probabiliste Terminologie ensembliste Notation
événement certain ensemble tout entier Ω
événement impossible ensemble vide ∅
événement élémentaire singleton {ω}
événement contraire de A complémentaire de A A ou Ac
A ou B réunion de A et B A∪B
A et B intersection de A et B A∩B
A implique B A inclus dans B A⊂B
A et B incompatible A et B disjoints A∩B =∅
ω réalise A ω appartient à A ω∈A

II. Définition générale des probabilités

1. Ensembles dénombrables :

3
CHAPITRE 1. NOTION DE PROBABILITÉ

Définition
Un ensemble E est dit dénombrable s’il est en bijection avec N, c’est-à-dire si ses points peuvent
être énumérotés en une suite (xn )n∈N .

Exemple 9. — Les ensembles N, Z et Q sont des ensembles dénombrables.



— Les ensembles E = {0, 1}N , R et [a, b] (a < b) ne sont pas dénombrables.

Propriétés
 Tout ensemble dénombrable est infini. Mes la réciproque est fausse.
 Toute partie d’un ensemble dénombrable est elle-même finie ou dénombrable.
 La réunion d’une famille finie ou dénombrable d’ensembles eux-même fini ou dénom-
brable.
 Si A n’est ni fini, ni dénombrable, il en est de même de A\B, pour tout B ⊂ A qui est
fini ou dénombrable.

2. Tribu :

Définition
La classe A ⊂ P(Ω) est dite une tribu (ou σ-algèbre) si elle vérifie les assertions suivantes :
. ∅ ∈ A et Ω ∈ A.
. A est stable par complémentaire : A ∈ A =⇒ A ∈ A.
. A est stable par réunion et intersection dénombrable : (An )n∈N une suite d’éléments de
[ \
A implique que An et An sont dans A.
n∈N n∈N

On dit que (Ω, A) est un espace probabilisable (mesurable dans le langage de la théorie des
mesures).

Exemples 10. • A = {∅, Ω} est la tribu grossière (triviale). C’est la plus petite tribu de Ω
(au sense de l’inclusion).
• A = P(Ω) est la tribu discrète (des parties). C’est la plus grande tribu de Ω.
• Si Ω = {a, b, c, d} alors A = {∅, {a}, {b, c, d}, Ω} est une tribu.

Définition
Si G ⊂ P(Ω), on appelle tribu engendrée par G et on la note par T (G), la plus petite tribu
contenant G. Elle existe toujours, car d’une part P(Ω) est une tribu contenant G, et d’autre
part l’intersection d’une famille quelconque de tribus est une tribu. Ainsi, la tribu engendrée
par G est l’intersection de toutes les tribus contenant G.

4
CHAPITRE 1. NOTION DE PROBABILITÉ

Exemples 11. • La tribu engendrée par un événement A est T (A) = {∅, A, A, Ω}.
• Tribu des borélienne B. C’est la tribu engendrée par la classe des intervalles ouverts de R.
— Lorsque Ω = R, BR = {] − ∞, a], a ∈ Q(ouR)} = {]x, y[, x, y ∈ R}.
— Lorsque Ω = I intervalle de R, BI = {]a, b[, a < b, (a, b) ∈ I 2 }.
• Si F est constitué d’un nombre fini ou dénombrable d’événements (An )n∈N , qui forment une
partition de Ω, la tribu engendrée par F est exactement l’ensemble des réunions quelconques
d’événement An . Par exemple, si F = {A, A}, alors T (F) = {∅, Ω, A, A}.

• Choix d’une tribu : Se fait en fonction de l’information qu’on a sur l’expérience.


— Si Ω est fini ou dénombrable, nous choisisons systématiquement la tribu A = P(Ω).
— Si Ω = R, nous choisisons la tribu A = BR .
— Si Ω = I intervalle de R, nous choisisons la tribu A = BI .

3. Définition d’une probabilité :

Nous cherchons à définir, pour un ensemble possible de réalisations de l’expérience A ∈ A,


la vraisemblance accordée a priori à A. Il s’agit donc d’affecter à chaque événement A un poids
P(A) compris entre 0 et 1, qui représente la chance que cet événement soit réalisé si l’on effectue
l’expérience aléatoire.

Définition
Etant donné un espace probabilisable (Ω, A), on appelle probabilité (dite aussi mesure de
probabilité) sur (Ω, A) toute application P : A −→ [0, 1] satisfaisant aux axiomes suivants :
. P(Ω) = 1 (totalité).
. Pour toute suite (An )n d’éléments de A deux-à deux disjoints, on a :
[ X
P( An ) = P(An ) (σ − additivité).
n n

Remarque 3. Avec le vocabulaire de la théorie de la mesure, P est une mesure positive finie, de
masse totale égale à 1. Le cadre dans lequel nous travaillons est mathématiquement développé par
le théorie de mesure.

Dans la modélisation d’une phénomène aléatoire, la tribu représente un ensemble de parties de


Ω dont on va pouvoir mesurer la chance de réalisation. C’est pour un élément A de cette tribu que
nous allons être capable de définir sa probabilité de réalisation P(A), tandis que P(A) n’aura pas de
sens dès lors que A n’appartient pas à la tribu A. Donc, la tribu modélise l’information que nous
donne cette expérience.

Définition : Modèle de probabilité (Kolmogorov 1933)


On appelle le triplet (Ω, A, P) un espace de probabilité (espace probabilisé). C’est un espace
mesuré dans le langage de la théorie de la mesure.

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CHAPITRE 1. NOTION DE PROBABILITÉ

La modélisation probabiliste consiste donc à décrire une expérience aléatoire par la donnée d’un
espace de probabilité.

Définition
Soit (Ω, A, P) un espace de probabilité.
— Si P(A) = 0, on dit que A est P-négligeable (A est un événement presque impossible).
— Si P(A) = 1, on dit que A est P-presque-sûrement (A est presque certain).

Propriétés
Toute probabilité P possède les propriétés suivantes :
1) P(∅) = 0.
2) ∀(A, B) ∈ A2 , A ⊂ B ⇒ P(A) ≤ P(B).
3) ∀A ∈ A, P(A) = 1 − P(A).
4) Fromule de Poincaré : ∀(A1 , A2 , ..., An ) ∈ An ,
n n
(−1)k−1 pk ,
[ X
P( Ai ) =
i=1 k=1

X
où pk = P(Ai1 ∩ Ai2 ∩ ... ∩ Aik ).
1≤i1 <i2 <...<ik ≤n
En particulier,
P(A ∪ B) = P(A) + P(B) − P(A ∩ B)
et

P(A ∪ B ∪ C) = P(A) + P(B) + P(C) − P(A ∩ B) − P(A ∩ C) − P(B ∩ C) + P(A ∩ B ∩ C).

5) Si (Ai )i∈N est une suite croissante d’événement, alors la suite réels (P(Ai ))i∈N est crois-
sante, et on a :

[
lim P (An ) = P ( Ai ).
n−→+∞
i=1

6) Si (Ai )i∈N est une suite décroissante d’événement, alors la suite réels (P(Ai ))i∈N est
décroissante, et on a :

\
lim P (An ) = P ( Ai ).
n−→+∞
i=1

7) Si (Ai )i∈N est une famille finie ou dénombrable d’événements, alors on a :


[ X
P( Ai ) ≤ P(Ai ).
i∈N i∈N

Démonstration :
1). On utilise l’additivité de P. On a P(Ω ∪ ∅) = P(Ω) + P(∅) et donc P(∅) = 0.
2). On a A ⊂ B ⇒ B = (B ∩ A) ∪ A,
d’où : P(B) = P(B ∩ A) + P(A) (car B ∩ A et A sont disjoints)
⇒ P(B) − P(A) = P(B ∩ A) ≥ 0 (car P est positive)
⇒ P(B) ≥ P(A).
3). On a A ∪ A = Ω ⇒ P(A) + P(A) = 1.

6
CHAPITRE 1. NOTION DE PROBABILITÉ

4). On démontre la formule par récurrence sur n.


n n
Soit Pn la propriété : ∀(A1 , A2 , ..., An ) ∈ An , P( (−1)k−1 pk .
[ X
Ai ) =
i=1 k=1
∗ Initiation : Pour n = 1. Il est claire que P1 est vraie.
Pour n = 2. On a A1 ∪ A2 = A1 ∪ (A2 ∩ A1 ) (union disjointe)
⇒ P(A1 ∪ A2 ) = P(A1 ) + P(A2 ∩ A1 ),
d’autre part : A2 = (A2 ∩ A1 ) ∪ (A2 ∩ A1 ) (union disjointe)
⇒ P(A2 ) = P(A2 ∩ A1 ) + P(A2 ∩ A1 )
d’où P(A1 ∪ A2 ) = P(A1 ) + P(A2 ) − P(A2 ∩ A1 ).
∗ Hérédité : On démontre que : ∀n ∈ N, Pn ⇒ Pn+1 .
n+1
[ n
[ n
[
On a Ai = ( Ai ) ∪ (An+1 ∩ Ai ) (union disjointe),
i=1 i=1 i=1
n+1
[ n
[ n
[
⇒ P( Ai ) = P( Ai ) + P(An+1 ∩ Ai ).
i=1 i=1 i=1
n
[ [n
Or An+1 = (An+1 ∩ Ai ) ∪ (An+1 ∩ Ai ) (union disjointe),
i=1 i=1
n+1
[ n
[ n
[
alors P( Ai ) = P( Ai ) + P(An+1 ) − P(An+1 ∩ ( Ai )) ; d’autre part :
i=1 i=1 i=1
n n n
0
(−1)k−1 pk
[ [ X
P(An+1 ∩ ( Ai )) = P( (Ai ∩ An+1 )) =
i=1 i=1 k=1
0 X
où pk = P(Ai1 ∩ Ai2 ∩ ... ∩ Aik ∩ An+1 ).
1≤i1 <i2 <...<ik ≤n
Donc :
n+1 n n
0
(−1)k−1 pk
[ [ X
P( Ai ) = P( Ai ) + P(An+1 ) −
i=1 i=1 k=1
n n
0
(−1)k−1 pk − (−1)k−1 pk
X X
= P(An+1 ) +
k=1 k=1
X X
= P(An+1 ) + P(Ai ) − P(Ai1 ∩ Ai2 ) + .... +
1≤i≤n 1≤i1 <i2 ≤n

(−1)k−1
X
P(Ai1 ∩ Ai2 ∩ ... ∩ Aik ) + ... +
1≤i1 <i2 <...<ik ≤n
n
(−1)n−1 P(Ai1 ∩ Ai2 ∩ ... ∩ Aik ∩ An ) −
X
P(Ai ∩ An+1 ) +
i=1

P(Ai1 ∩ Ai2 ∩ An+1 ) + (−1)k


X X
P(Ai1 ∩ Ai2 ∩ ... ∩ Aik ∩ An+1 ) +
1≤i1 <i2 ≤n 1≤i1 <i2 <...<ik ≤n
... + (−1)n P(A1 ∩ A2 ∩ ... ∩ An ∩ An+1 ).
n+1
(−1)k−1 pk .
X
=
k=1
5). Il est claire que la suite (P(An ))n∈N est croissante et majorée par 1, donc elle est convergente et
sa limite est inférieure ou égale à 1.
n
[
Puisque la suite (An ))n∈N est croissante, alors pour tout n ∈ N on a : Ai = An .
i=0
On définit une suite d’événements (Bi )i∈N par :

B0 = A0 et ∀i ≥ 1, Bi = Ai \ Ai−1 = Ai ∩ Ai−1 .
n
[ n
[
On a donc : ∀n ≥ 0, Ai = Bi (facile à vérifier).
i=0 i=0

7
CHAPITRE 1. NOTION DE PROBABILITÉ

Grâce au σ-additivité de P, on en déduit que :



[ ∞
[ ∞
X
P( Ai ) = P( Bi ) = P(Bi )
i=0 i=0 i=0
n
X
= lim P(Bi )
n−→+∞
i=0
n
[
= lim P( Bi )
n−→+∞
i=0
[n
= lim P( Ai )
n−→+∞
i=0
= lim P(An ).
n−→+∞

6). Les mêmes démarches de la propriété précédente (il suffit de passer au complémentaire).
7). Nous traiterons les deux cas séparément.
 Si I est fini. Alors, il s’agit de montrer que pour tout k entier,

P(A1 ∪ A2 ∪ ... ∪ Ak ) ≤ P(A1 ) + P(A2 ) + ...P(Ak ).

Nous montrons cette propriété par récurrence sur k :


∗ Initiation : Évidente.
∗ Hérédité : Supposons que la propriété est vraie pour k − 1, avac k ≥ 2, et montrons qu’elle
est vraie pour k.
Posons E = A1 ∪ A2 ∪ ... ∪ Ak−1 et F = E ∪ Ak . En vertu de la propriété (4), nous avons :

P (E ∪ Ak ) + P (E ∩ Ak ) = P (E) + P (Ak ) = P(E) + P(Ak )


⇒ P(F ) ≤ P(E) + P(Ak )
⇒ P(A1 ∪ A2 ∪ ... ∪ Ak ) ≤ P(A1 ) + P(A2 ) + ...P(Ak ).

d’où, la propriété est vraie pour k.


 Si maintenant I est dénombrable. Nous pouvons supposer que I = N∗ .
n
[ [
Posons Bn = Ai , qui croît vers l’ensemble C = An .
i=1 n∈N
D’aprés la première partie de la démonstration, nous avons
n
X
P(Bn ) ≤ P(Ai )
i=1

et d’aprés la propriété (5) on a


X
P(C) ≤ P(An ),
n∈I
[ X
d’où P( An ) ≤ P(An ).
n∈N n∈I

4. Probabilité sur un espace fini ou dénombrable :

On suppose que l’univers Ω est fini ou dénombrable. On note Ω = {ω1 , ω2 , ..., ωn , ...}, n ∈ N
(l’ensemble des resultats possibles).

8
CHAPITRE 1. NOTION DE PROBABILITÉ

— On définit la probabilité pi de chaque résultat élémentaire {ωi }, on obtient alors une suite
(pn )n de nombres tels que :
n
X
0 ≤ pi ≤ 1 et pi = 1.
i=1
X
— La probabilité d’un événement quelconque A est donné par : P(A) = pi
ωi ∈A

Proposition
Une probabilité sur un ensemble fini ou dénombrable est entièrement caractérisée par ses
valeurs sur les singletons.
n
X
Etant donnée une suite (pn )n de nombres réels tels que : 0 ≤ pi ≤ 1 et pi = 1, elle lui
i=1
correspond une unique probabilité P tels que pour tout A,
X X
P(A) = P({ωn }) = pn .
ωn ∈A ωn ∈A

Démonstration :
La démonstration du cas dénombrable est similaire a celle du cas fini. Nous traitons alors seulement
le cas d’un univers fini.
Posons Ω = {ω1 , ω2 , ..., ωn }. Soit P une probabilité sur Ω, et soit pω = P({ω}). Il est alors claire que
0 ≤ pω ≤ 1, de plus
[ X X
P(A) = P ( {ω}) = P({ω}) = p{ω} .
ω∈A ω∈A ω∈A
[ X n
X
D’autre part P(Ω) = P( {ω}) = P({ω}) ⇒ pi = 1.
ω∈Ω ω∈Ω i=1
n
X
Inversement, considérons n nombres (pi )1≤i≤n tels que 0 ≤ pi ≤ 1 et = 1. Nous posons P({ωi }) =
i=1
pi et pour tout A ⊂ Ω, nous définissons P(A) par :
X
P(A) = pω .
ω∈A

Vous pouvez vérifier facilement que P est une probabilité sur Ω.


θn
Exemple 12. Soit θ > 0 et pn = e−θ .
n!
X θn
pn = e−θ
X
On a 0 ≤ pn ≤ 1 (∀n ∈ N) et = 1,
n n n!
donc la suite (pn )n∈N définit une probabilité sur N, appelée loi de Poisson de paramétre θ.

Proposition
Soit Ω = {ω1 , ω2 , ..., ωn , ...} un ensemble dénombrable et soit P une probabilité définie sur Ω,
et pn = P({ωn }).
Alors, ∀A ∈ P(A), on a :
X
P(A) = pn δωn (A)
n

avec
 δω , appelée mesure de Dirac en ω, est définie de la manière suivante : ∀A ∈ P(A)
 δ (A) = 1, si ω ∈ A
ω
 δω (A) = 0, si ω...A.

9
CHAPITRE 1. NOTION DE PROBABILITÉ

X
La probabilité P peut donc s’écrire : P = pn δωn .
n

Probabilité uniforme : Un exemple important de probabilité sur un espace d’états Ω fini


est celui de la probabilité uniforme, pour laquelle chaque singleton ω ∈ Ω a la même chance de
réalisation.

Définition
On dit que la probabilité P sur un espace fini Ω est uniforme ( où équiprobable), si pω = P ({ω})
ne dépend pas de ω. Donc, pour tout ω ∈ Ω on a :
1
pω = .
card(Ω)

Ainsi, si A ⊂ P(Ω) un événement, alors :

card(A)
P(A) = .
card(Ω)

Remarque 4. — Le calcul d’une probabilité uniforme se ramène à des dénombrements (calcul


combinatoire).
— Sur un espace fini Ω, il existe une et une seule probabilité uniforme. Cette probabilité décrit
mathématiquement l’expression intuitive de "au hasard".

Exemple 13. On jette deux fois un dè non truqué et on note les deux numéros obtenus.
Soit B l’événement "la somme des deux numéros obtenus est 7".
On a B = {(1, 6); (2, 5); (3, 4); (6, 1); (5, 2); (4, 3)}, donc card(B) = 6.
1 1 1
D’autre part ∀(i, j) ∈ Ω2 , P {(i, j)} = 2 , donc P(B) = 6 × 2 = .
6 6 6

5. Conditionnement (Probabilité conditionnelle) :

Définition
Soit A et B deux événements avec P(B) > 0, alors on appelle probabilité conditionnelle de A
sachant B que l’on note P(A/B), le rapport

P(A ∩ B)
P(A/B) = .
P(B)

Remarque 5. L’application
P(./B) : A −→ [0, 1]
A 7−→ P(A/B)
définit une probabilité sur Ω, appelée probabilité conditionnelle sachant B.

10
CHAPITRE 1. NOTION DE PROBABILITÉ

Proposition
Si P(A) > 0 et P(B) > 0, alors : P(A/B) × P(B) = P(A ∩ B) = P(B/A) × P(A)

Proposition
Si A1 , A2 , ..., An sont des événements de Ω tels que P(A1 ∩ A2 ∩ ... ∩ An−1 ) > 0, alors :
n
\ n−1
\
P( Ai ) = P(A1 ) × P(A2 /A1 ) × P(A3 /A1 ∩ A2 ) × ... × P(An / Ai ).
i=1 i=1

Démonstration :
Nous montrons ce résultat par récurrence sur n.
∗ Initiation : Pour n = 2. On a P(A1 ∩ A2 ) = P(A1 ) × P(A2 /A1 ) (conditionnement)
∗ Hérédité : Supposons que la propriété est vraie pour n − 1 et montrons qu’elle est vraie pour
n.
n−1
\
Soit B = Ai . On a P(B ∩ An ) = P(B) × P(An /B),
i=1
n
\ n−1
\
donc P( Ai ) = P(A1 ) × P(A2 /A1 ) × ... × P(An / Ai ).
i=1 i=1

Proposition : Formule des probabilités totales


Soit (Ai )i∈N une partition finie ou dénombrable d’événements de Ω, telle que P(Ai ) > 0 pour
chaque i. Alors, ∀B ∈ A, on a :
X X
P(B) = P(B ∩ Ai ) = P(B/Ai ) × P(Ai ).
i∈N i∈N

Démonstration :
[
On a B = (B ∩ Ai ) et par hypothèse, les ensemble (B ∩ Ai ) sont deux-à-deux disjoints.
i∈N [ X X
Ainsi, P(B) = P( (B ∩ Ai )) = P(B ∩ Ai ) = P(Ai ) × P(B/Ai ).
i∈N i∈N i∈N

Proposition : Formule de Bayes


Soit (Ai )i∈N une partition finie ou dénombrable d’événements de Ω, telle que P(Ai ) > 0 pour
chaque i. Si P(B) > 0, alors :

P(B/Ai )P(Ai )
∀i ∈ N, P(Ai /B) = P .
j P(B/Aj )P(Aj )

Démonstration :
P(B/Ai ) × P(Ai ) P(B/Ai )P(Ai )
On a P(Ai /B) = =P .
P(B) j P(B/Aj )P(Aj )

Application 1. Un individu est tiré au hasard dans une population où l’on trouve une proportion
10−5 du virus Covid-19. On lui fait passaer un test de détection du virus Covid-19. Par ailleurs,
des expériences antérieures ont permis de savoir que les probabilités d’avoir un résultat positif lors

11
CHAPITRE 1. NOTION DE PROBABILITÉ

de l’application du test si l’individu est touché par le virus, ou s’il ne l’est pas, sont respectivement
égales à 0.99 (sensibilité du test) et à 0.001 (spécificité du test). Sachant que le test donne un résultat
positif, quelle est la probabilité pour que l’individu soit effectivement contaminé par le virus.

Solution : On considère les événements suivants :


A :«l’individu est contaminé par le virus» et B :«le test de détection donne un résultat positif».
On a P(A) = 10−5 ⇒ P (A) = 0.99999, d’autre part, P(B/A) = 0.99 et P(B/A) = 0.001 (donnés).
P(A ∩ B) P(B/A) × P(A)
Ainsi, P(A/B) = = ' 0.01
P(B) P(B/A) × P(A) + P(B/A) × P(A)
({A, A} est une partition de Ω).

Application 2. On considère une urne U1 contenant deux boules blanches et une boule noire, et
une urne U2 contenant une boule blanche et une boule noire. On choisit une urne au hasard puis on
prélève une boule dans cette urne. Les boules sont indisernables au toucher.
1. Quelle est la probabilité de tirer une boule blanche ?
2. Quelle est la probabilité que la boule soit extraite de l’urne U1 ?

Solution : 1). L’univers de cette expérience est : Ω = {(U1 , B1 ); (U1 , B2 ); (U1 , N1 ); (U2 , B3 ); (U2 , N2 )}.
On considère les événements : B :«la boule tirée est blanche», E1 :«la boule tirée est extraite de
l’urne U1 » et E2 :«la boule tirée est extraite de l’urne U2 ».
L’énoncé permet de définir les probabilité conditionnelle P(./E1 ) et P(./E2 ) par :
1
P((U1 , B1 )/E1 ) = P((U1 , B2 )/E1 ) = P((U1 , N1 )/E1 ) = et P((U2 , B3 )/E1 ) = P((U2 , N2 )/E1 ) = 0.
3
de même : P((U1 , B1 )/E2 ) = P((U1 , B2 )/E2 ) = P((U1 , N1 )/E2 ) = 0 et P((U2 , B3 )/E2 ) = P((U2 , N2 )/E2 ) =
1
.
3
D’aprés l’énoncé on a : P(E1 ) = P(E2 ), et comme la famille {E1 , E2 } forme une partition de Ω,
1
alors : P(E1 ) + P(E2 ) = 1 et donc P(E1 ) = P(E2 ) = .
2
Ainsi, ∀A ∈ P(Ω) on a : P (A) = P(A/E1 ) × P(E1 ) + P(A/E2 ) × P(E2 ) (Probabilité totale).
2 1 1 1 7
Donc, P (A) = P(B/E1 ) × P(E1 ) + P(B/E2 ) × P(E2 ) = × + × = .
3 2 2 2 12
Notons que la probabilité P ainsi définie n’est pas uniforme.
2). On applique la formule de Bayes. On trouve :
2
P(B/E1 ) × P(E1 ) × 12
3 4
P(E1 /B) = = 2 = .
P(B/E1 ) × P(E1 ) + P(B/E2 ) × P(E2 ) 3
× + 21 ×
1
2
1
2
7

5. Indépendance :

Définition
Deux événement A et B sont dits indépendants, relativement à la probabilité P , si

P(A ∩ B) = P(A) × P(B).

Intuitivement, deux événement A et B sont indépendants si le fait de savoir que A est réalisé ne
donne aucune information sur la réalisation de B et réciproquement.
Attention : Ne pas confondre indépendance avec incompatible, car dans ce dernier cas A∩B = ∅
et P(A ∩ B) = 0.

12
CHAPITRE 1. NOTION DE PROBABILITÉ

En conséquence, si P(B) > 0, alors A sera dit indépendant de B si :


P(A ∩ B)
P(A/B) = = P(A).
P(B)
Remarque 6. 1) La notion d’indépendance est une notion liée au chois de la probabilité P et n’est
pas une notion ensembliste.
2) Si P(A) > 0 et P(B) > 0, alors :
P(A ∩ B) = P(A) × P(B) ⇐⇒ P(A/B) = P(A) ⇐⇒ P(B/A) = P(B)
on dit que la notion d’indépendance est symétrique.
Exemple 14. On lance un dé rouge et un dé noire et on considère les événements suivants :
A : «le dé noire affiche 6» et B : «le dé rouge affiche 5».
L’espace d’état de cette expérience est : Ω = {1, 2, 3, 4, 5, 6} × {1, 2, 3, 4, 5, 6}.
1
Les épreuves de cette expérience sont équiprobables : P ({ω}) = 2 .
6
Comme A = {6} × {1, 2, 3, 4, 5, 6} et B = {1, 2, 3, 4, 5, 6} × {5} et A ∩ B = {(6, 5)}, alors :
card(A) 6 1
P(A) = = 2 =
card(Ω) 6 6
card(B) 6 1
P(B) = = 2 =
card(Ω) 6 6
card(A ∩ B) 1
P(A ∩ B) = = 2
card(Ω) 6
et donc A et B sont indépendants.
Bien entendu, ce resultat est évédent, il n’y a pas d’influence d’un dé sur l’autre.

Proposition

A et B indépendants ⇐⇒ A et B indépendants
⇐⇒ A et B indépendants
⇐⇒ A et B indépendants.

Démonstration :
Exercice.
Indépendance mutuelle: Soit (An )n une suite d’événements d’u espace de probabilité (Ω, A, P).
Il y a lieu de distinguer l’indépendance deux-à-deux qui impose :
P(Ai ∩ Aj ) = P(Ai ) × P(Aj ), 1 ≤ i 6= j ≤ n
et l’indépendance mutuelle, condition plus forte qui s’écrit :
P(Ai1 ∩ Ai2 ∩ ...Aik ) = P(Ai1 ) × P(Ai2 ) × ... × P(Aik )
pour toute suite finie (i1 , i2 , ..., ik ) d’entiers deux-à-deux distincts.
La notion d’indépendance mutuelle est délicate. Par exemple, pour que la suite (A, B, C) soit in-
dépendante, la propriété doit être vérifiée pour toutes les intersections de deux ensembles et l’in-
tersection des trois ensembles. Il ne suffit pas d’avoir P(A ∩ B ∩ C) = P(A) × P(B) × P(C). En
effet, prenons un lancé de dé avec A = {1, 2, 3}, B = {2, 4, 6} et C = {1, 2, 4, 5}. Nous avons
1 1 2
P(A) = , P(B) = et P(C) = . Ainsi, nous avons bien P(A ∩ B ∩ C) = P(A) × P(B) × P(C)
2 2 3
mais P(A ∩ B) 6= P(A) × P(B) et donc A, B et C ne sont pas mutuellement indépendants.

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