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2 Topologie de l’espace Rm

1.1 Espaces vectoriels normés

Dans cette section, nous allons munir un espace vectoriel réel E de dimension quelconque par une structure
supplémentaire dite structure normée. Comme on va le voir dans la suite, c’est grâce à la notion de normes
que nous serons en mesure de développer une analyse moderne (i.e. limite, continuité, différentiabilité ...)
pour les applications vectorielles qui dépendent de plusieurs variables réelles.

1.1.1 Structures normées

Définition 1. Soit E un espace vectoriel réel. Une application N : E → R+ qui vérifie les axiomes suivantes s’appelle
norme :

1. Séparation : N(x) = 0 =⇒ x = 0 ∈ E ;
2. Homogénéité : ∀xE, ∀λ ∈ R, N(λ · x) =| λ | N(x) ;
3. Inégalité triangulaire : ∀x, y ∈ E, N(x + y) 6 N(x) + N(y).

Un espace vectoriel E qui est muni d’une norme N s’appelle espace vectoriel normé et se note (E, N).

Exemple 1. 1) La valeur absolue | · |: R → R+ réalise une norme sur l’espace vectoriel réel E = R.
2) Vérifions que l’application N1 : R3 → R+ définit par l’expression,

N1 (x, y, z) =| x | + | y | + | z |
est une norme sur l’espace R3 .

Notons que les propriétés de séparation et d’homogénéité sont évidentes pour l’application N1 . Pour vérifier l’inégalité
triangulaire on procède comme suit.

N1 ((x, y, z) + (a, b, c)) = N1 (x + a, y + b, z + c)


= |x+a|+|y+b|+|z+c|
6 (| x | + | a |) + (| b | + | y |) + (| c | + | z |)
6 N1 (x, y, z) + N1 (a, b, c

Exercice 1. Vérifier que les fonctions N1 et N∞ : Rn → R+ définies pour tout vecteur


Exercice.
v = (x1 , · · · , xn ) ∈ Rn par les formules suivantes :

N1 (v) =| x1 | + · · · + | xn | et N∞ (v) = max(| x1 |, · · · , | xn |),

sont des normes sur l’espace vectoriel réel Rn .

Solution. 1) Vérifions que l’expression N1 (v) =| x1 | + · · · + | xn | définie une norme


sur l’espace vectoriel Rn .
- Séparation : Évidente.
- Homogénéité : Pour tout réel λ ∈ R et pour tout vecteur v = (x1 , · · · , xn ) ∈ Rn on a,

N1 (λ · v) = N1 (λx1 , · · · , λxn ) =| λx1 | + · · · + | λxn |=| λ | N1 (v).

- Inégalité triangulaire : Pour tout couple de vecteurs u = (x1 , · · · , xn ) et v = (y1 , · · · , yn )


on peut écrire :

N1 (u + v) = N1 (x1 + y1 , · · · , xn + yn )
= | x1 + y1 | + · · · + | xn + yn |
6 (| x1 | + | y1 |) + · · · + (| xn | + | yn |)
6 N1 (u) + N1 (v).
3 Topologie de l’espace Rm

2) 1) Vérifions que l’expression N∞ (v) = max(| x1 |, · · · , | xn |) définie une norme sur


l’espace vectoriel Rn .
- Séparation : Évidente.
- Homogénéité : Pour tout réel λ ∈ R et pour tout vecteur v = (x1 , · · · , xn ) ∈ Rn on a,

N∞ (λ · v) = N1 (λx1 , · · · , λxn ) = max(| λx1 |, · · · , | λxn |) =| λ | N∞ (v).

- Inégalité triangulaire : Considérons un couple de vecteurs u = (x1 , · · · , xn ) et v =


(y1 , · · · , yn ). Puisque pour tout indice 1 6 i 6 n on a | xi |6 N∞ (u) et | yi |6 N∞ (v)
il en résulte que pour tout indice 1 6 i 6 n,

| xi + yi |6| xi | + | yi |6 N∞ (u) + N∞ (v) =⇒ N∞ (u + v) 6 N∞ (u) + N∞ (v).


p
Exercice 2. Pour tout vecteur v = (x, y, z) ∈ R3 on pose, N2 (v) = x2 + y 2 + z 2 .
1) Démontrer que pour tout couple de vecteurs u = (a, b, c) et v = (x, y, z) éléments de R3 on a l’inégalité de
Cauchy-Shwartz, | ax + by + cz |6 N2 (u)N2 (v).
Indication : On pourra utiliser le fait que pour tout réel t le trinôme,

N2 (tu − v) > 0, ∀u, v ∈ R3 .

2) En déduire que l’application N2 : R3 → R+ vérifie l’inégalité triangulaire,

N2 (u + v) 6 N2 (u) + N2 (v), ∀u, v ∈ R3

3) Montrer alors que l’application N2 : R3 → R+ définit une norme.

Solution. 1) Pour un couple de vecteurs fixés u = (a1 , · · · , an ) et v = (x1 , · · · , xn )


éléments de Rn et pour tout réel t ∈ R posons,
 2
P(t) = N2 (t · u − v) = (ta1 − x1 )2 + · · · + (tan − xn )2
= (a21 + · · · + a2n )t2 − 2t(a1 x1 + · · · + an xn ) + (x21 + · · · + x2n ).

Maintenant, comme la fonction P(t) est un trinôme positif il en résulte que son discrimi-
nant réduit est négatif ou nul :

∆′ = (a1 x1 + · · · + an xn )2 − (a21 + · · · + a2n )(x21 + · · · + x2n ) 6 0.

Ainsi, si on applique la racine carrée sur la dernière inégalité on obtient l’inégalité de


cauchy-Shwartz,
q q
| a1 x1 + · · · + an xn |6 a1 + · · · + an x21 + · · · + x2n = N2 (u)N2 (v).
2 2

2) Montrons que la fonction N2 : Rn → R+ vérifie l’inégalité triangulaire.


En effet, pour tout couple de vecteurs u = (a1 , · · · , an ) et v = (x1 , · · · , xn ) on peut écrire,
 2
N2 (u + v) = (a1 + x1 )2 + · · · + (an + xn )2
= (a21 + · · · + a2n ) + 2(a1 x1 + · · · + an xn ) + (x21 + · · · + x2n )
 2
6 N2 (u)2 + 2N2 (u)N2 (v) + N2 (v)2 = N2 (u) + N2 (v) .

Donc, si on applique la racine carrée sur l’inégalité précédente on obtient l’inégalité tri-
angulaire :
N2 (u + v) 6 N2 (u) + N2 (v), ∀u, v ∈ Rn .
Topologie de l’espace Rm 4

3) Pour montrer que la fonction N2 est une norme il nous reste qu’à vérifier les axiomes
de séparation et d’homogénéité :
- Séparation : Évidente.
- Homogénéité : Pour tout réel λ ∈ R et pour tout vecteur v = (x1 , · · · , xn ) ∈ Rn on a,
p
N2 (λ · v) = N2 (λx1 , · · · , λxn ) = (λx1 )2 + · · · + (λxn )2 =| λ | N2 (v).

Définition 2. Soit E un espace vectoriel réel. On dira que deux normes N, N′ : E → R+ sont équivalentes lorsqu’il
existe deux réels α > 0 et β > 0 tels que,

αN(x) 6 N′ (x) 6 βN(x), ∀x ∈ E. (1.1)

Exemple 2. Sur l’espace vectoriel R3 montrons que les deux normes N1 (u) =| x | + | y | + | z | et N∞ (u) =
max(| x |, | y |, | z |) sont équivalentes.

Notons que par définition du max on a l’inégalité N∞ (u) 6 N1 (u). D’autre part, puisque on a les trois inégalités :
| x |6 N∞ (u), | y |6 N∞ (u) et | z |6 N∞ (u) on déduit donc que N1 (u) 6 3N∞ (u). D’où la double inégalité,

1
N1 (u) 6 N∞ (u) 6 N1 (u),
3
qui montre que la norme N1 est équivalente à la norme N∞ .

Le théorème suivant, nous montre que toutes les normes d’un l’espace vectoriel réel de dimensionfinie E = Rn
sont équivalentes deux à deux.

Théorème 1. Toutes les normes d’un espace vectoriel réel de dimension finie sont
sont équivalentes. C’est-à-dire, étant
n +
données deux normes arbitraires N et N : R → R on peut trouver deux réels α > 0 et β > 0 tels que pour tout

vecteur x ∈ Rn on a,
αN(x) 6 N′ (x) 6 βN(x).

Notons que le résultat du théorème n’est pas vrai pour les espaces vectoriels réels de dimension infinie.

1.1.2 Structures métriques

Définition 3. Soit E un espace vectoriel réel. Une application d : E × E → R+ qui vérifie les trois axiomes suivantes
s’appelle distance :
1. Séparation : d(u, v) = 0 =⇒ u = v.
2. Symétrie : d(u, v) = d(v, u), ∀u, v ∈ Rn .
3. Inégalité triangulaire : d(u, v) 6 d(u, w) + d(w, v), ∀u, v, w ∈ Rn .
Un espace vectoriel E qui est muni d’une distance d s’appelle espace métrique et se note (E, d).

Etant donné un espace vectoriel normé (E, N), il est facile de vérifier que si pour tout couple de vecteurs x
et y éléments de E on pose,

dN (u, v) = N(u − v), (1.2)

on obtient de cette façon une structure métrique dN : E × E → R+ dite associée à la norme N.


Topologie de l’espace Rm 5

Exemple 3. En utilisant (1.2) on conclut que les expressions suivantes définissent des distances sur l’espace vectoriel
R3 .

1. d1 ((x, y, z), (a, b, c)) = N1 (x − a, y − b, z − c) =| x − a | + | y − b | + | z − c |.


2. d∞ ((x, y, z), (a, b, c)) = N∞ (x − a, y − b, z − c) = max(| x − a |, | y − b |, | z − c |).
p
3. d2 ((x, y, z), (a, b, c)) = N2 (x − a, y − b, z − c) = (x − a)2 + (y − b)2 + (z − c)2 .

Exercice 3. Vérifier que l’application d : R∗+ × R∗+ → R+ définie par l’expresion,

1 1
d(x, y) =| − |
x y
réalise une distance sur la demie-droite réelle R∗+ .

Exercice 4. Soit (E, d) un espace métrique. Pour tout couple de points x et y éléments de l’espace E on pose,
d(x, y)
d′ (x, y) = .
1 + d(x, y)
a) Démontrer que si trois nombres réels a > 0, b > 0 et c > 0 vérifient l’inégalité a 6 b + c alors on a l’inégalité,
a b c
6 + .
1+a 1+b 1+c
x
Indication : On pourra utiliser la fonction croissante, x → .
1+x

d(x, y)
b) En déduire que l’expression d′ (x, y) = définit une distance sur E.
1 + d(x, y)

Définition 4. Soient d, d′ : E × E → R+ deux distances. On dira que la distance d est équivalente à la distence d′
s’il existe deux réels α > 0 et β > 0 tels que,

αd(u, v) 6 d′ (u, v) 6 βd(u, v), ∀u, v ∈ E. (1.3)

Proposition 1. Soient N, N′ : E → R+ deux normes équivalentes. Alors, les distances associées dN (u, v) = N(u−v)
et dN′ = N′ (u − v) sont équivalentes dans l’espace vectoriel Rm . En particulier, les distances d1 , d2 et d∞ associées
respectivement aux normes N1 , N2 et N∞ sont équivalentes dans l’espace Rn .

1.1.3 Limite d’une suite de vecteurs

Dans ce paragraphe, on va utiliser les structures métriques pour définir la notion de convergence des suites
de vecteurs éléménts d’un espace vectoriel réel E.

Définition 5. Soient (E, d) un espace métrique et vn ∈ E le terme général d’une suite vectorielle. On dira que la
suite de vecteurs vn ∈ E converge vers le vecteur L ∈ E relativement à la distance d si,

(∀ε > 0)(∃n0 ∈ N)(∀n ∈ N, n > n0 ) =⇒ d(vn , L) < ε. (1.4)

Quand, la distance d est assiciée à une norme N : E → R+ (i.e, d(x, y) = N(x − y)) on préfère dire que la suite vn
converge vers L ∈ E relativement à la norme N.

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