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Géostratégie et géopolitique

Espaces, enjeux et acteurs Pr. Yasser MAYSSOUR


2023 / 2024
+
Programme du cours

´ Géopolitique et Géostratégie
´ Les Doctrines géopolitiques
´ Géopolitique des mondes arabes
Définition de la géostratégie et la géopolitique

´ Terme apparu au 19ème siècle sous la plume de Général Giacomo Durando, il connait
une popularité importante à partir de la moitié du 20ème siècle. Terme flou et souvent
confondu avec la « géopolitique » ou la géographie militaire, cette branche de la
géopolitique désigne la fabrication des espaces par la guerre.

´ Il a ainsi essentiellement une portée militaire, même s’il est de plus en plus utilisé
pour étudier des phénomènes non militaires mais à la source de conflits (internet par
exemple).
Définition de la géostratégie et la géopolitique

´ La géostratégie consiste ainsi à étudier les implications politiques et guerrières de situations


géographiques (ressources naturelles, espaces frontaliers, espaces maritimes).

´ Ces espaces ne sont pas structurellement stratégiques mais le deviennent dès lors que le
contexte politique, social ou économique évolue.

´ Ainsi, l’amiral Castex souligne dans ses Mélanges stratégiques que les régions polaires ont
acquis un intérêt stratégique à partir du moment où les moyens techniques se sont améliorés,
les rendant accessibles et source de tensions.
La géopolitique
´ Concernant la géopolitique, on peut dire d’une façon générale qu’il s’agit de la discipline qui traite
des relations entre pouvoir et territoire, l’espace étant considéré comme un enjeu que se disputent
diverses entités politiques, principalement des États. Emmanuel Fabre propose la définition
suivante:

´ "La géopolitique est l’étude des enjeux territoriaux mobilisant différents pouvoirs rivaux (étatiques,
mais aussi intra- et interétatiques). C’est un savoir (une science?) de la conflictualité, celle-ci
résultant de l’expression plus ou moins violente de représentations contradictoires d’un territoire.
C’est un savoir pratique et opératoire qui a pour fondement une méthode d’analyse scientifique
reposant sur la prise en compte des multiples échelles de temps et d’espace." Emmanuel Fabre, De la

géopolitique. Le point de vue des dictionnaires de géopolitique.


La géostratégie
´ Quant à la géostratégie, on peut dire qu’elle traite des conflits liés aux enjeux géopolitiques
lorsque ceux-ci prennent une dimension militaire, la guerre étant envisagée comme la
"continuation de la politique par d’autres moyens" (Clausewitz). Ainsi pour Stéphane Rosière il y
a continuité entre la géopolitique et la géostratégie:

´ "Un problème géopolitique devient géostratégique s’il y a conflit. Le niveau stratégique


n’annulant jamais la dimension politique, fondamentale, on peut donc considérer la
géostratégie comme un développement spécifique de la géopolitique. Géopolitique et
géostratégie se distinguent dans la mesure où la première est d’abord civile, politique (…)
et la seconde militaire." Stéphane Rosière, Géographie poli4que, géopoli4que et géostratégie: dis4nc4ons opératoires
Géographie militaire, géopolitique, géostratégie : quelles
différences ?
´ Comment distinguer alors la géostratégie de la géopolitique définit par Yves Lacoste
comme « rivalités de pouvoir sur des territoires »?

´ Tandis que la géopolitique permet de décrypter ou d’asseoir la politique et les desseins


des Etats ou ensembles régionaux, la géostratégie a une vocation militaire prescriptive et
dynamique. Les acteurs qui en font l’usage sont essentiellement militaires, et se
différencient en cela de ceux qui font l’usage de la géopolitique ou de la géoéconomie
(acteurs civils, industriels)

Aujourd'hui, cette guerre incarne la bataille acharnée en économie.


´ sur la géographie, à une échelle plus petite (région, Etat) et permet la
définition de manœuvre des armées, l’approche géostratégique repose sur
l’échelle macrogéographique ensemble d’Etats, voies de communication
internationales) et permet à une échelle beaucoup plus petite la coordination
des théâtres d’opération. Cette approche permet d’envisager l’effet produit
par les opérations d’un théâtre sur les autres.

´ L’approche géostratégique repose ainsi sur une « conscience spatiale »


développée et un certain « recul historique ».
Exemple :

´ il existe des situations militaires non géostratégiques ayant des objectifs géostratégiques :
l’invasion du Koweït par l’Irak, conduite sur un seul théâtre et dont l’objectif était
géostratégique dans la mesure où les dividendes du pétrole koweïtien auraient permis le
renforcement du potentiel militaire irakien, donc sa capacité à frapper un jour sur plusieurs
théâtres à la fois.

´ De même, certaines guerres géostratégiques sont menées pour des enjeux non perçus comme
géostratégiques : l’invasion de l’URSS par l’Allemagne lors de la Seconde Guerre Mondiale a
eu lieu sur plusieurs théâtres (Baltique, plaines centrales, Caucase, guérilla sur les arrières de
la Wehrmacht) et revêt ainsi des aspects géostratégiques alors que l’objectif était idéologique.
´ La géostratégique constitue ainsi une pratique et une méthode d’action concrète :

action militaire, menée sur plusieurs théâtres à échelle macrogéographique avec

comme objectif l’acquisition d’espaces ou ressources considérés comme vitaux.

´ Avec le recul, relatif, des opérations armées et le développement des nouvelles

formes d’affrontements (cyber-guerre, soft power, criminalité organisée etc.), le

terme de géostratégie est utilisé dans des contextes variés et pose à moyen terme
la question de son adaptation conceptuelle afin de la distinguer au mieux de la

notion de géopolitique.
Quelle implication pour l’entreprise?

´ Le concept de géostratégie appliqué à l’entreprise dispose d’éléments clés lui


permettant une clé de lecture heuristique et originale des modalités de genèse des
stratégies d’entreprise.

´ Les facteurs d’analyse géographiques abordés avec certains des concepts et des
théories de la stratégie sont divers (couverture géographique, saisonnalité,
localisation, et ressources diverses) ; ils permettent notamment d’appréhender les
stratégies d’internationalisation et de globalisation des entreprises.
La définition reste ambigüe
´ Les différents auteurs qui cherchent à appréhender la « géostratégie » ne s’accordent pas
sur sa définition [T. de Montbrial & J. Klein, 2000].

´ En effet, le caractère non univoque de ce concept illustre l’existence d’une grande


diversité, et des contradictions dans les acceptions possibles de la géostratégie. Néanmoins,
la géostratégie se définit le plus souvent par référence à la géopolitique [H. Courtau-
Bégarie, 1999].

´ le paradigme de la géostratégie qui renvoie au « conflit », répond à la finalité de la Sécurité


et de la Défense. Ce cadre militaire associé à la guerre ne fait pas partie de notre analyse.
L’intelligence économique
´ L’intelligence économique a pour objet le traitement de l’information au sens large afin de
servir la politique et la stratégie. Elle succède au renseignement qui correspond en fait à un
moyen d’action et de pouvoir [Besson & Possin, 1997].

´ La question qui se pose est de savoir si l’intelligence économique est subordonnée à la


géostratégie d’entreprise et quels en sont ses apports ?
´ L’action de renseignement obéit à des objectifs prédéfinis, ce qui suppose une première
réflexion et une ébauche stratégique.
´ De plus, la géostratégie est aux mains de ceux qui décident, alors que l’intelligence
économique est opérée par ceux qui renseignent, l’intelligence économique est alors un «
métalangage » et un processus de traitement de l’information environnementale de
l’entreprise.
´ On peut donc en déduire que la géostratégie se nourrit des informations produites
par l’intelligence économique, mais qu’il reste alors à la géostratégie de dérouler sa
réflexion stratégique dans le cadre d’un processus de décision.

´ Par ailleurs, la veille stratégique participe également en tant que moyen


systématique de surveillance [Baumard, 1991] et système d’informations
stratégiques à la mise en œuvre de la géostratégie d’entreprise.

´ Enfin, nous considérons que l’hypothèse géographique inclut un territoire


économique désormais global et sans frontières, hormis celles générées par une
construction virtuelle dans laquelle l’enjeu de l’entreprise est d’y trouver et
d’anticiper des marchés solvables ou émergents.
De la stratégie à la géographie
´ La prise en compte de la géographie au travers des outils de la stratégie d’entreprise est limitée. Ainsi, on
ne retrouve au sein de certains outils d’analyse stratégique que des éléments épars. Pour commencer, un
des thèmes abordé par la stratégie est celui de la surveillance de l’environnement concurrentiel, où
Raymond Vernon [1966] introduit la notion d’écart de développement entre différents pays comme étant
un catalyseur explicatif des stratégies de croissance de l’entreprise et de ses produits.

´ Dans le cadre de la formulation de la stratégie et de l’élaboration des décisions, l’analyse de


l’environnement national et international prédomine chez K.J. Andrews [1971] ; plus précisément, H.
Weihrich [1982] intègre des vecteurs d’analyse du champ géographique (zone géographique,
démographie) en favorisant l’action cognitive des dirigeants par une conception active et interrogative
qui se préoccupe du rapport entre l’entreprise et son environnement.
´ Un autre axe d’analyse portant sur les hommes est appréhendé sous deux aspects : celui des «
ressources humaines » cité par C.W. Hofer et D. Schendel, et sous celui d’un facteur social qui est
le « changement démographique » traité par A.C. Hax et NS. Majluf.

´ Enfin, dans une autre perspective, Michael Porter [1997] définit différentes stratégies
d’internationalisation des industries en fonction notamment du mode de configuration
géographique des activités

´ Ainsi, les outils stratégiques abordent certains champs de la géographique (répartition dans
l’espace et localisation, ressources énergétiques, démographie) en les positionnant essentiellement
comme des variables secondaires de choix stratégique.
La nouvelle économie géographique
´ La Nouvelle Économie Géographique (NEG) en ce qui concerne l’explication des choix
stratégiques des entreprises paraît limitative, en s’étayant sur les trois concepts clés suivants
[J.L. Mucchielli, 2001]: les économies d’échelle ou rendement croissant, les externalités qui
rendent compte des agglomérations, et le coût de transport.

´ Ces trois concepts excluent par définition le poids plus ou moins prépondérant d’autres facteurs
contingents qui à notre sens accentuent le choix des dirigeants, notamment dans leur vision
géographique du monde. Les chefs d’entreprise perçoivent dorénavant le monde comme des
représentations géographiques très différenciées. De plus, la modification des choix stratégiques
des dirigeants est aussi accélérée par les phénomènes et les conséquences de la mondialisation.
´ D’autres facteurs de décisions ne sont pas explorés par la géographique
économique laquelle inscrit davantage ses analyses autour d’une dichotomie
« concentration/déconcentration » des localisations des entreprises.

´ Tandis que la prise en compte des ressources, des populations, des cultures,
ainsi que d’autres facteurs ne sont pas encore abordés.
De la géographie à la stratégie
´ La première dimension de la géographie est celle de l’intelligence de l’espace [Brunet & Ferras,
1993] ou la science des espaces et des lieux [Nonjon, 1992]. Ce premier champ reste quelque
peu limitatif : en effet, différentes approches de la géographie contribuent à l’analyse des
facteurs pouvant entrer dans le cadre de l’élaboration de la stratégie de l’entreprise, de la
prospective et de la gestion des décisions concernant le devenir de l’entreprise.

´ Il s’agit des concepts propres à la géographie économique, la géographie humaine, et la


géopolitique.

´ Élisée Reclus, géographe libertaire, initialise la géographie universelle qui s’intéresse, entre
autres à l’ensemble des phénomènes économiques, sociaux et culturels, notamment à l’étude des
mouvements géopolitiques et géostratégiques auxquels il accorde une grande importance
[Reclus, 1875].
´ Les définitions de [Nonjon, 1992] nous permettent de mieux appréhender ces différents registres.

´ Selon cet auteur, l’espace géographique est un espace « concret, cartographiale, organisé par les
différents flux concernant les différents agents de l’économie », tandis que l’espace économique
est « un espace abstrait, défini par les relations économiques structurelles qui existent entre les
différents éléments économiques ».

´ Pour F. Perroux, les espaces économiques se résument à trois éléments : un espace homogène
composé d’un système de prix, un champ de force correspondant à une zone d’influence
économique et un plan rendant compte des relations entre la firme, les fournisseurs et les
acheteurs

´ Il existe donc « une dualité référentielle » entre un « espace concret » et un « espace


économique », entre ces deux espaces permettant de projeter la stratégie de l’entreprise.
L’APPORT HEURISTIQUE DU CONCEPT DE
« GÉOSTRATÉGIE D’ENTREPRISE »
´ Le concept de géostratégie peut alors s’appliquer à l’entreprise par analogie à la géostratégie appréhendée au
sens politique et militaire, mais également en complétant les différents corpus que nous avons signalés. Il
devient une clé de lecture originale des modalités de genèse des stratégies d’entreprise des dirigeants dans le
contexte de la mondialisation.

´ Parallèlement, la géostratégie d’entreprise devrait traduire les principes suivants :

- L’intégration par les entreprises d’éléments d’analyse géographique dans leur processus stratégique,

- Dorénavant, du fait du phénomène de la globalisation, la question géographique détermine non seulement


intrinsèquement la stratégie mais elle lui impose également un conditionnement extrinsèque.

´ Le schéma ci-dessous ne se veut pas exhaustif, mais il fournit un éclairage des différents courants qui
permettent d’appréhender le concept de géostratégie d’entreprise :
LA MONDIALISATION COMME CATALYSEUR DE LA MISE
EN EXERGUE DE L’HYPOTHÈSE GÉOGRAPHIQUE
LA FIN DE L’ILLUSION CARTOGRAPHIQUE
´ Les barrières géographiques tombent avec la mondialisation de l’économie en permettant de
nouvelles stratégies d’entreprise. Ainsi, les frontières jusque-là infranchissables laissent la
place à un champ d’opérations mondial global. Le monde peut alors être vu comme une
totalité.

´ L’augmentation de l’espace géographique des marchés avec moins de contraintes


s’accompagne de la naissance de l’entreprise sans frontières [Kenichi Ohmae, 1991 & 1996].

´ Cet auteur dénote que les états-nations sont devenus des unités opérationnelles artificielles
dans une économie planétaire alors que les états-régions sont les moteurs de la prospérité
mondiale.
´ la mutation de l’économie s’accentue avec la prédominance du capital privé plutôt
que public et avec la fin de la souveraineté des nations au profit des grandes sociétés
multinationales. Des réseaux autonomes de firmes privées interdépendantes élaborent
des stratégies de marchés globaux et possèdent des entités régionales, ne faisant plus
partie de « frontières » physiques

´ Les pays acceptent dorénavant les capitaux étrangers et l’installation de firmes et de


compétences mondiales. Le développement régional est alors privilégié par les
gouvernements d’Etats, en même temps que se décentralisent les pouvoirs politiques
et publics. Ce sont les pays en voie de développement qui profitent de ce changement
de structuration du marché (Hong Kong, Singapour, etc.) ainsi que les états-régions.
Recommandation de lecture
Les Doctrines géopolitiques
Rappel :
´ La géopolitique est fondée sur les réalités de la géographie physique et humaine,
et sur les déterminismes qui en découlent. Le mot a été forgé par le juriste suédois
Rudolf Kjellen vers 1900, comme la science de l’État en tant qu’organisme
géographique, tel qu’il se manifeste dans l’espace.

´ La géopolitique a été un courant porteur au XIXe et au début du XXe siècle,


servant en cela les objectifs politiques des États, puis occultée à la fin de la
seconde guerre mondiale, au profit des systèmes fondés sur le poids des
« idéologies» .
Les principales doctrines géopolitiques

L’école allemande
L’école anglo-saxonne
L’école américaine
L’école francophone
L’école russe
1- L’ECOLE ALLEMANDE :
LA PUISSANCE CONTINENTALE
´ Pour cette école, le contrôle de l’Eurasie peut seul donner la suprématie mondiale. Deux théoriciens
principaux en ont jeté les bases. Friedrich Ratzel a écrit en 1897 Géographie politique et en 1901 Au sujet
des lois de l’expansion spatiale des États.

´ Ces ouvrages sont influencés par un voyage aux États-Unis, au cours duquel il intègre le facteur que
constitue l’expansion géographique pour porter un projet politique.

´ Il critique alors l’étroitesse des frontières européennes, et appelle à un pan européanisme, porté par un
leadership allemand.

´ Ratzel accorde à l’espace géographique un rôle primordial : la notion de peuple est pour lui un ensemble
de groupes et d’individus qui n’ont besoin d’être liés ni par la langue ni par la race, mais par un sol
commun. L’Europe peut avoir l’ambition d’une suprématie mondiale, et pour cela, une alliance avec
l’Asie, et en particulier l’Extrême-Orient est nécessaire.
Ratzel définit les 7 lois universelles d’expansion spatiale
des États :
1. - une croissance spatiale parallèle au développement de leur culture
2. - une expansion parallèle au renforcement de leur puissance économique,
commerciale ou idéologique
3. - une extension par absorption ou assimilation d’entités plus petites
4. - la frontière est un organe vivant, matérialisant un état de fait à un moment donné, et
elle est donc un facteur modifiable
5. - la logique géographique prévaut pour absorber des régions et conforter la viabilité
du territoire, par l’acquisition de plaines, de bassins fluviaux, de marges littorales
6. - l’extension est favorisée par la présence en périphérie d’une civilisation inférieure
7. - la tendance à l’expansion est un mouvement autoalimenté.
´ Karl Haushofer a écrit en 1912 Dai Nihon. Reprenant les idées de Ratzel, il
accentuait la nécessité de prendre en compte les dangers de la géopolitique pour
l’Allemagne, par la création d’un vaste espace vital. Le monde doit s’organiser
autour de 4 grandes zones :
´ - une zone paneuropéenne, incluant l’Afrique, et dont l’Allemagne aurait le
leadership
´ - une zone panaméricaine, dominée par les États-Unis
´ - une zone panrusse, incluant l’Asie centrale et le sous-continent indien
´ - une zone pan asiatique, dominée par le Japon
´ Haushofer prône l’alliance de l’Allemagne, puissance terrestre, et du Japon,
puissance maritime, afin de contrer les velléités de conquête de l’Empire
britannique et des États-Unis.

´ Associé au nazisme, Haushofer s’est cependant opposé, au nom de sa théorie


des zones, à l’attaque contre la Russie et à la politique anti-juive, le sol, et
non la race, devant fédérer les populations
´ Ratzel a été accusé de favoriser l’argumentation scientifique du recours à la
guerre, et de légitimer celui-ci.

´ Ses idées ont servi de fondement aux volontés expansionnistes du IIIe Reich.

´ il faut souligner que s’il prônait un leadership allemand, son idée maîtresse était
la naissance d’un vaste espace européen unifié.
Actualités de cette école :

´ - l’Ostpolitik (politique de l’Est) puis la réunification allemande


´- l’extension de l’Union européenne vers l’est
´- la constitution de la CEI (communauté des Etats indépendants)
pour maintenir une zone d’influence russe en Asie centrale
´- l’alliance indo russe
´- l’Alena et la zone de libre-échange des Amériques
2 . L’ECOLE ANGLO-SAXONNE :
LA PUISSANCE MARITIME
´ Cette école repose sur le principe que le contrôle des mers assure le contrôle du
commerce et de la périphérie des empires. Trois auteurs principaux sont à retenir.
Alfred Mahan a écrit L’influence du pouvoir maritime sur l’histoire en 1890 et
Les intérêts de l’Amérique dans la maîtrise des mers en 1897.
´ Amiral, il prône la domination du monde par les États- Unis grâce à une maîtrise
stratégique des mers : pour cela, il convient de contrôler, sur toutes les mers
importantes et dans les détroits stratégiques, des ports et des bases, comme l’ont
fait les Britanniques. Il suggère d’ailleurs une alliance avec le Royaume-Uni,
puissance navale importante de la fin du XIXe siècle, pour contenir l’Allemagne,
puissance continentale, en s’opposant à ses prétentions maritimes et extra-
européennes, et en grignotant les marges de l’Empire.
´ Il appelle également à juguler les ambitions asiatiques par une défense
coordonnée des Américains et des Européens, visant clairement le Japon
´ Halford Mackinder a écrit en 1904 Le pivot géographique de l’histoire. Sa pensée
s’inscrit dans le fil des inquiétudes anglaises face aux prétentions hégémoniques
continentales du début du XXe siècle. Il développe la théorie du « heartland », le
pivot du monde, qui pour lui est l’Eurasie, et même plus précisément la Russie,
entourée d’un glacis protecteur (Sibérie, Himalaya, Gobi), autour duquel se
trouvent les terres à rivages (Europe de l’Ouest, Moyen-Orient, Asie du Sud-Est),
puis l’anneau extérieur ou systèmes insulaires (États-Unis, Grande-Bretagne,
Japon, Océanie).
´ Pour Mackinder, qui tient l’Europe orientale tient l’Europe centrale, qui tient
l’Europe centrale domine l’île mondiale, qui domine l’île mondiale domine le
monde.
´ La géopolitique doit donc tendre à empêcher une alliance entre la Russie et
l’Allemagne, et favoriser l’alliance entre les systèmes insulaires et les terres à
rivages, d’où une nécessaire puissance maritime.
´ Nicolas Spykman a écrit en 1938 Géographie et politique étrangère. Il s’oppose au
déterminisme de Haushofer et conteste la théorie du pivot de Mackinder, s’appuyant
sur les faits issus de la première guerre mondiale (échec de l’alliance russo-
germanique).
´ Pour lui, la zone pivot est le «rimland », la région intermédiaire entre le « heartland »
et les mers riveraines : d’où le choc inévitable entre les puissances maritimes et
terrestres : celui qui domine le « rimland » domine l’Europe, celui qui domine
l’Eurasie domine le monde.
´ Ce choc se vérifie pour Spykman dans l’histoire, par le grand jeu entre Russes et
Anglais en Asie centrale, par la première guerre mondiale. Il est impératif d’empêcher
l’unification de l’espace euro-asiatique, et de contrôler les mers et les espaces
périphériques de cet ensemble.
´ La théorie de Spykman a servi de base à la politique américaine de l’endiguement,
notamment avec les traités de l’Otan, de l’Otase et le pacte de Bagdad.
Actualités de cette école :

´ - maintien d’une présence navale américaine et britannique, et contrôle de


bases militaires dans le monde

´ - efforts américains pour limiter le rapprochement euro-russe et russo-iranien

´ - alliances pour contrer l’influence russe (présence américaine en Asie


centrale, en Afghanistan, en Géorgie, intérêt pour la Caspienne).
3. L’ECOLE AMERICAINE
Deux thèses principales sont à différencier.

´ La théorie confrontationnelle de Samuel Huntington (Le choc des civilisations,


1997, n’est pas à proprement parler un ouvrage de géopolitique, mais il présente
une vision globale du monde par l’aspect civilisationnel, donc pouvant être
rattaché à la géographie humaine et physique) : pour lui, le modèle américain
n’est pas universel, il ne reflète que les valeurs d’une civilisation particulière.
´ Le monde est divisé en grandes zones, dont les principales sont l’Occident, avec
les États-Unis comme pôle dominant, le bloc confucéen (avec la Chine comme
leader), le bloc orthodoxe (mené par la Russie), le monde islamique (sans
pouvoir dominant).
´ Les chocs entre civilisations sont des fronts ouverts entre les blocs, notamment
entre Occident et islam (terrorisme), entre orthodoxie et islam (Tchétchénie,
Balkans). Le danger essentiel vient de la volonté expansionniste de l’islam,
contre les blocs occidental, orthodoxe, africain, et confucéen. Pour Huntington,
l’Europe doit clairement se ranger derrière les États-Unis, et renoncer à toute
politique méditerranéenne.
´ Le courant rationaliste de Kenneth Waltz (Théorie de politique internationale,1979) et
de Zbigniew Brzezinski (Le grand échiquier, 1997). Pour cette école, les acteurs
étatiques n’agissent pas en fonction de l’idéologie, mais pour leur survie et l’extension
de leur influence (d’où le conflit sinosoviétique et les oppositions Europe-États-Unis).
´ La démocratie n’est pas garante de la paix. La paix est mieux défendue par la
bipolarité, système dans lequel les puissances dominantes sont dépendantes de leurs
alliés pour garder la maîtrise de zones plus vastes. Le risque pour les États-Unis serait
une alliance étroite de l’Europe ou du Japon avec la Russie.
´ Pour Brzezinski, il est impératif d’isoler la Russie sur ses marches, par le suivi de la
politique de l’endiguement, en évitant 3 dangers, la reconstitution d’un nouvel empire
russe, un désordre incontrôlé en Asie centrale, et une coalition des États voyous
Actualité de ces courants :

´ - regain de faveur pour les thèses de Huntington au lendemain des attentats du 11


septembre 2001
´ - présence américaine accrue en Asie centrale (Afghanistan, CEI, Georgie)
´ - intervention américaine dans les Balkans
´ - pressions sur les États voyous, interventions en Afghanistan et en Irak
´ - hésitations face à la Chine (hostilité marquée - cf. affaire de l’avion espion en
2001 - , mais volonté de ne pas arriver à un affrontement politique avec Pékin)
4. L’ECOLE FRANÇAISE
´ La géopolitique a historiquement présenté moins d’intérêt en France, du fait de
l’unification relativement ancienne du pays, avec des frontières quasiment stables sur des
limites naturelles, si ce n’est pour contrer les prétentions allemandes, notamment la théorie
de l’espace vital. Trois théoriciens sont à retenir pour cette vieille école :
´ Paul Vidal de la Blache a écrit en 1898 La géographie politique et en 1917 La France de
l’Est. Par l’étude géographique et sociale, il entendait démontrer la francité de l’Alsace-
Lorraine. Son courant illustre une tradition française de la micro géographie, propension à
définir des unités géographiques minimales au détriment des ambitions paneuropéennes
des Allemands.
´ André Cheradame a écrit en 1902 L’Allemagne, la France et la question d’Autriche, puis
en 1942. Il a tout d’abord prôné, avant la première guerre mondiale, une alliance des
nations non germaniques en Europe pour faire contrepoids aux ambitions paneuropéennes
du Reich, puis dès 1939 une intervention des États-Unis dans la guerre européenne,
considérant que le nazisme n’était que l’aboutissement logique du plan de conquête de
l’Europe par l’Allemagne. Sa théorie peut être rapprochée de celle de Spykman, mais pour
Cheradame, la clé du monde dans le «rimland » est l’Europe centrale et les Balkans.
´ Jacques Ancel a écrit en Géopolitique en 1936, Géographie des fronts en 1938 et
un Manuel géographique de politique européenne entre 1936 et 1943. Pour lui,
les limites naturelles ne peuvent constituer de réelles frontières.
´ La mer et les fleuves rapprochent, et ne séparent pas (cf. la Grèce antique et le
Danube), les montagnes ne sont que des obstacles physiques, et non politiques
(cf. Oural et Carpates). Ce sont les relations humaines et le vouloir-vivre-
ensemble qui déterminent les États et leur étendue géographique.
´ L’école française de géopolitique connaît un renouveau depuis 1976 et la
fondation de la revue Hérodote, sous la direction d’Yves Lacoste, qui cherche à
mettre en valeur les fondamentaux
´ géographiques, ethniques et sociaux des relations internationales
Actualité de cette école :

´- volonté de maintien de l’influence française en Europe ;


´- refus de se laisser atlantiser, volonté d’une politique
étrangère indépendante.
5. L’ECOLE RUSSE
´ L’URSS a combattu la notion de géopolitique, préférant se fonder sur l’idée
que c’est l’idéologie qui conduit les relations internationales.
´ Mais dans les faits, l’Urss, puis la Russie ont axé une géopolitique sur la
domination de l’Eurasie.
´ Le panslavisme a été le moteur de la domination de l’Europe centrale,
l’eurasisme le moteur vers l’Asie centrale.
Actualité de cette école :

´ - volonté de maintien d’une zone d’influence russe en Communauté des Etats


Independants

´ - politique de soutien de la Russie aux frères orthodoxes (Serbie, Bosnie)

´ - développement de la politique asiatique et pro islamique de la Russie


(participation active de V. Poutine aux sommets des pays islamiques et de l’Apec,
rapprochement prudent avec la Chine).

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