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Avoir ou être, telle est la question!

L’avoir est avare en prise de recul et en introspection, il finit par nous détourner de nos
talents, de nos ressources, de nos valeurs, bref de nous-même. A l’inverse, être nous ouvre
sur un infini fécond et créateur dans lequel l’émotion devient une ressource qui va nous
permettre de mieux nous connaître et exprimer nos besoins.

Texte: Nicolas Quoëx

La quête matérielle nous amène à conjuguer dans un élan de frénésie et de profusion le


verbe avoir: il s’agira de la dernière voiture, du dernier portable, de la nouvelle collection de
prêt à porter… chacun vivra cet auxiliaire à sa manière. Au travail, il s’agira souvent d’avoir
plus de responsabilité, plus de pouvoir, une rémunération plus élevée, un bureau plus grand,
une place de parking devant l’entrée, un accès aux soirées VIP (masqué bien sûr)…

Le verbe avoir nous emmène ainsi sur des chemins ou le jugement et la comparaison
fleurissent en abondance, et ou notre destination est souvent, très souvent, l’insatisfaction.
Ce n’est jamais assez, le verbe avoir entraine une soif inextinguible ou il y aura toujours
quelque chose que notre désir souhaitera acquérir… et paradoxalement le verbe avoir
exacerbé nous amène tôt ou tard à une impasse, car des limites se dresseront
inévitablement devant nous. Les repousser toujours plus loin nous permettra de constater
qu’elles réapparaissent comme par l’enchantement d’un mauvais génie souhaitant
interrompre notre tendance à l’accumulation plus ou moins frénétique.

Principe de Peter
En termes de trajectoire professionnelle, c’est le fameux principe de Peter qui veut que nous
finissions par occuper un poste qui va au-delà de nos capacités. L’avoir est avare en prise de
recul et en introspection, il finit par nous détourner de nos talents, de nos ressources, de nos
valeurs, bref de nous-même. C’est un constat que l’on fait souvent lorsque l’on accompagne
des personnes en transition de carrière. Elles arrivent, presque toujours, avec le même
objectif: avoir un nouveau poste. Et elles découvrent, presque toujours, les bienfaits d’une
prise de recul, d’une réflexion sur qui elles sont vraiment, puis quel projet leur correspond
pleinement. Jetant ainsi un pont entre leur être profond et les besoins du marché du travail
elles se mettent en mouvement, non plus pour avoir un poste, mais bel et bien pour être au
bon endroit au bon moment, et ainsi ouvrir un nouveau chapitre de vie professionnel, qui
viendra nourrir leur être en profondeur tout en leur permettant, par ailleurs, d’avoir un
salaire pour assurer le nécessaire.

Danse désynchronisée
Dans nos relations cette pratique grammaticale nous entrainera aussi dans une danse
désynchronisée qui ne favorisera pas nécessairement notre capacité à interagir avec nos
collègues, nos clients et toutes les autres personnes qui souhaiteraient échanger avec nous:
avoir raison, avoir le dessus, avoir la main, avoir le dernier mot… repensons à toute ces
réunions durant lesquelles chacun et chacune semble écouter et, en réalité, prépare
l’argument suivant pour avoir raison. Apprendre à être avec les autres pour faire émerger le
plus d’options possible et choisir la meilleure semble d’une simplicité enfantine, mobiliser
l’intelligence collective est finalement fort simple! Probablement, en prenant soin de choisir
le bon auxiliaire, afin de conjuguer les talents au lieu de nourrir les égos.

Avoir reste bien entendu un verbe intéressant et utile à conjuguer, nous en avons besoin
pour nous sentir en sécurité et construire notre vie. Il n’est pas du tout question de le
supprimer mais plutôt de savoir trouver un équilibre avec son compère complémentaire,
l’auxiliaire être!

Qui suis-je?
Ce dernier nous invite à une toute autre aventure, qui commence par la découverte de la
magnifique personne que nous croisons tous les jours devant le miroir: qui est donc cette
personne, comment fonctionne-t-elle, de quoi a-t-elle besoin, quels sont ses rêves?
Une fois les présentations faites, nous pouvons alors allez sereinement à la rencontre des
autres, nous saurons leur donner notre mode d’emploi et recueillir le leur pour engager
rapidement des relations riches et fécondes ou l’être nous permettra à coup sûr de créer les
conditions d’un véritable échange et ainsi d’avoir des résultats.

Être soi-même, être présent, être en relation, être conscient de ses modes de
fonctionnement, de ses besoins… c’est se reconnecter à la terre pour éviter les surtensions
et autres dépressions. Là où circule de l’énergie, une prise de terre semble être salutaire! Et
apprendre à canaliser cette énergie va nous permettre de nous réaliser pleinement.
Être nous ouvre sur un infini fécond et créateur dans lequel l’émotion devient une ressource
qui va nous permettre de mieux nous connaître et exprimer nos besoins, tout en
augmentant notre capacité à comprendre les autres, nous entrainant ainsi dans un
processus de synchronisation avec autrui.

Le bon équilibre
Être un leader efficace consiste à faire en sorte que les autres atteignent leurs objectifs
Une bonne équipe ne compte-elle pas sur l’entraide, le partage de connaissance et de
compétences? Une atmosphère de sécurité ne permet-elle pas de se donner du feedback en
confiance, de reconnaître ses erreurs et d’avancer ensemble?
Conjuguer efficacement les auxiliaires avoir et être consiste donc à trouver le bon équilibre,
celui qui nous convient, et qui sera probablement différent d’une personne à l’autre:
avoir confiance pour oser être soi-même et se délester au maximum des jugements d’autrui,
avoir une bonne connaissance de soi pour être capable de vraiment entrer en relation avec
les autres.

Cet équilibre impliquera également de poser les bons choix, de poser les bonnes intentions,
de réfléchir en profondeur à notre contribution. Par exemple, souhaitons-nous avoir un
poste de manager ou être au service d’une équipe?
Alors, le moment n’est-il pas propice à une petite révision des basiques de la conjugaison?
Avoir quelque chose entraine mécaniquement le risque de le perdre, serait-ce la raison de
notre tendance à en vouloir toujours davantage? Être la personne que nous sommes, au
contraire, devient de plus en plus puissant plus on se l’autorise, et cela amène beaucoup
d’énergie notamment grâce à l’alignement avec nos valeurs et nos talents… Conjuguer (trop
souvent) le verbe avoir, c'est se confronter tôt ou tard à une limite... conjuguer le verbe être,
c'est s'ouvrir sur l'infini!
Zitate :

«Conjuguer (trop souvent) le verbe avoir, c'est se confronter tôt ou tard à une limite...
conjuguer le verbe être, c'est s'ouvrir sur l'infini!»

L’auteur + photo
Nicolas Quoëx est le co-fondateur de Skillspotting, société de conseils RH qui a notamment
dévelloppé le SkillspotTM, la solution de management par les compétences (cartographie et gestion
dynamique). Lien: skillspotting.com

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