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JEAN-AUGUSTE-DOMINIQUE INGRES

Considéré comme une des figures emblématiques du néoclassicisme, Jean-


Auguste-Dominique Ingres est un peintre d’origine française, né en 1780 à
Montauban. Il fait ses premiers pas dans le monde artistique dès le plus jeune âge
au côté de son père, qui est à la fois sculpteur, ornemaniste, peintre, architecte, et
professeur de dessin. Ainsi, il est comme prédestiné à l’avenir de peintre, ou du
moins à un avenir dans le milieu culturel et artistique.
Ingres débute ses études artistiques à l’Académie de Toulouse, et intègre à l’âge
de 17 ans l’École des Beaux-Arts de Paris, où il a comme maître le peintre
Jacques-Louis David. Là-bas, il reçoit un enseignement académique centré sur la
représentation du corps humain. Son enseignement artistique prend un tournant
en 1801, lorsqu’il remporte pour la première fois le prix de Rome, pour son œuvre
Achille recevant les envoyés d’Agamemnon. Grâce à ce prix, Ingres se rendra en
Italie dans l’Académie de France à Rome, connu sous le nom de Villa Médicis,
pour poursuivre son enseignement artistique.
En tant que grand admirateur des peintres de la Renaissance en règle générale, ce
séjour en Italie sera l’occasion pour lui de visiter le berceau de la Renaissance, de
pouvoir admirer les œuvres des plus grands et s’en inspirer.

Ingres a, depuis son plus jeune âge, toujours été fasciné par Raphaël. Il tire cet
amour, cette admiration pour Raphaël de l’œuvre Vierge à l’Enfant et Saint-Jean
Baptiste enfant, simplement dite La Vierge à la Chaise. Pour le citer, cette œuvre
de Raphaël, qu’il découvrit grâce à son maître, « fit tomber le voile de [ses] yeux ;
Raphaël [lui] était révélé. ». Ainsi, cette œuvre constitue une réelle inspiration
pour Ingres, qui va régulièrement y faire référence dans ses propres tableaux,
comme source d’inspiration. Par exemple, on la retrouve dans le Portrait de
Napoléon 1er sur le trône impérial, sur le tapis, dissimulé parmi les signes du
zodiaque. On remarque notamment l’importance et l’influence qu’a Raphaël sur
Ingres lorsque ce dernier peint Raphaël et la Fornarina, inspiré par l’œuvre Portrait
d’une jeune femme dite La Fornarina de Raphaël. Ici aussi, on retrouve une
référence à La Vierge à la Chaise, une copie étant dissimulé en arrière-plan du
tableau.

Outre la profonde admiration pour Raphaël et la Renaissance en général, Ingres


partage également une obsession pour le motif du nu. En effet, bien que son idéal
artistique soit différent de l’idéal académique, l’enseignement qu’il tire de son
séjour aux Beaux-Arts à Paris le marqua profondément. Ainsi, son œuvre se
focalise intensément sur le thème du nu, notamment le nu féminin.

Il peint en 1808 un grand portrait en pied intitulé La Baigneuse Valpinçon. Dans


cette œuvre, Ingres s’approprie le thème du nu féminin ; le peintre va
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volontairement simplifier l’anatomie en adoptant le rythme de la ligne courbe


dans le but de faire converger les formes au service de son propre idéal artistique.
De la même façon qu’Ingres est fasciné par La Vierge à la Chaise, Man Ray
admire La Baigneuse Valpinçon. Cette dernière sera ainsi reprise par Man Ray,
qui réalisera un photocollage intitulé Le Violon d’Ingres, en référence au talent
musical d’Ingres.

En plus du motif du nu, Ingres attache une grande importance à la primauté du


dessin sur la peinture. Pour le citer, « le dessin est la probité de l’art ».
Pour la réalisation de son tableau Le bain Turc, représentant un groupe de femmes
nues dans un harem, Ingres a réalisé de nombreuses études préparatoires pour
représenter le corps des femmes fidèlement à son idéal. La plupart des études de
ce tableau ont été réalisées selon le modèle de Madeleine Chapelle, sa première
femme, qu’il épousa en 1813. C’est également Madeleine qui a inspiré La
Baigneuse Valpinçon. On la retrouve d’ailleurs au premier plan dans Le Bain
Turc, dans la même posture que dans La Baigneuse Valpinçon.

En 1819, Ingres peint La Grande Odalisque, tableau commandé par Caroline


Bonaparte et exposé au Salon.
Ingres va chercher à montrer qu’il sait représenter les matières : on peut le voir à
travers le décor, les textures des différentes matières, des tissus jusqu’au bijoux,
la représentation du drapé, etc. Il veut également montrer qu’il sait représenter la
femme nue, une femme idéale mais selon ses principes à lui. Ainsi, il fait des
erreurs d’anatomie volontaires dans la représentation du corps de la femme nue.
Cette œuvre va inspirer Picasso, qui va reprendre le modèle et se concentrer
uniquement sur les lignes – il ne représente pas le décor – du corps de la femme.
On peut dire que les deux artistes partagent un idéal artistique similaire. Un peu
comme Ingres, qui déforme la réalité pour qu’elle réponde à son propre idéal,
Picasso, en tant que peintre cubiste, trouve son idéal dans la représentation de la
réalité par des formes géométriques. Ils partagent le même idéal de beauté ; ils
déforment la réalité pour la représenter telle qu’ils la souhaitent.

Par la suite, lorsque le mouvement néo-gothique émerge et prend une place


importante au 19è siècle, un nouveau style de peinture, la peinture Troubadour se
développe. Ingres s’inspire de ce style de peinture et peint en 1818 François 1er
reçoit les derniers soupirs de Léonard de Vinci. Ici, Ingres réinvente la mort de
Léonard de Vinci et l’imagine s’éteindre dans les bras de François 1er. On retrouve
les caractéristiques de la peinture troubadour : le petit format de l’œuvre, les
couleurs très émaillées, les costumes d’époques, le décor, puis la scène en général,
qui raconte une histoire.
On retrouve les mêmes caractéristiques dans son tableau Paolo et Francesca, peint
en 1819, qui raconte l’histoire tragique de deux amants, Paolo et Francesca,
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tableau inspiré par La Divine Comédie de Dante, un des plus grands chefs-
d’œuvre de la littérature.

Il est important de noter que si Ingres est resté en Italie après la fin de son
enseignement artistique, c’est parce que sa peinture ne plaisait pas au Français. Il
s’est donc installé à Rome, et s’est même marié. Mais, depuis 1815, après la chute
de Napoléon 1er, les temps sont d’autant plus durs pour Ingres. Il rencontre
d’importantes difficultés économiques liées au climat politique en France. Il finit
donc par quitter Rome en 1820 pour rejoindre Florence, où il espère trouver une
nouvelle clientèle. Pendant cette période, il a l’occasion de réaliser de nombreux
portraits, pour subvenir à ces besoins. Mais pendant ce séjour à Florence, il se
concentrera notamment sur une commande de l’État français, Le Vœu de Louis
XIII. Il lui faudra pratiquement quatre ans pour finir ce tableau, qui sera exposé
au Salon en 1824. Ce tableau, inspiré de la Madone Sixtine de Raphaël, rencontre
immédiatement un immense succès, succès qui encouragea Ingres à revenir
s’installer à Paris. Eugène Delacroix, appartenant à la jeune école romantique,
expose la même année un tableau nommé Scène des Massacres de Scio, qui
rencontra un succès égal à celui d’Ingres. Ces deux artistes seront régulièrement
comparés et opposés, en raison de leurs conceptions artistiques diamétralement
opposées.

Après sa réussite au Salon, Ingres devient officiellement considéré comme un


grand peintre néo-classique. Il reçoit la croix de la Légion d’honneur et est élu à
l’Académie des Beaux-Arts. Au même moment, il décide d’ouvrir son propre
atelier. Pendant les dix prochaines années, Ingres va former de jeunes artistes-
peintres et réalisera de nombreuses commandes, dont L’Apothéose d’Homère,
exposée au Salon en 1827, une commande qu’il peint pour un des plafonds du
Louvre.

En 1835, lorsqu’il est nommé directeur de l’Académie de France à Rome, Ingres


retourne en Italie pendant 5 ans, jusqu’en 1840. Là-bas, il ne peignera que très
peu, sa principale activité se limitant à la gestion de la Villa Médicis. À son retour
en 1841, il est chaleureusement accueilli par les Français. Ingres recommence à
peindre et se lance dans un nouveau projet, mais le décès de Madeleine Chapelle
en 1848 l’ayant fortement affecté, ce projet est abandonné. Ingres se remariera
quelques années plus tard, en 1852, avec Delphine Ramel, et recommencera à
peindre. Il continuera à peindre malgré la vieillesse, et ce, jusqu’à sa mort, à l’âge
de 86 ans.

La mort d’Ingres en 1867 marque la fin d’une brillante carrière artistique,


marquée par un style particulier, à la croisée du néo-classicisme et d’un
apprentissage académique singulier, centré sur la représentation du nu féminin.
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Admiré entre autres de par son idéal artistique, sa façon de représenter les choses,
sa maîtrise des détails et sa brillante technique, ce sont ses talents de dessinateur
qui le placent auprès des plus grands peintres de l’histoire. D’ailleurs, il souligna
tout au long de sa carrière l’importance du dessin dans la peinture. L’œuvre
d’Ingres constituera une grande source d’inspiration pour des artistes comme
Degas, Matisse ou encore Picasso ; on parlera alors d’Ingrisme pour désigner son
impact sur les artistes et les caractéristiques rappelant son œuvre.
Aujourd’hui, Ingres repose au cimetière du Père Lachaise, à Paris. Il laissa
derrière lui le souvenir de son œuvre, qui sera conservé dans sa ville natale à
Montauban, à travers de nombreuses collections de tableaux et dessins qu’il légua
à la ville avant sa mort.

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