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servir leur ambition et peut-être même leur pays, n’auront servi que
d’étroits intérêts et de longues rancunes de caste.
Enfin, il y a le patriote échauffé, le bon patriote, comme ils disent.
Oh ! ceux-là sont les grands coupables. D’autant plus inexcusables
que, tout en versant de chaudes larmes sur l’abandon des grands
idéals du passé, sur la montée de l’individualisme, ils suivent, eux
aussi, dans le terre-à-terre de la vie, l’humble morale du bonheur. Ils
n’ont jamais été profondément influencés par la foi qu’ils professent.
Dans l’existence, ils se conduisent comme de simples pacifistes.
Tout en maudissant le progrès, ils en usent. Mais non, ils ne veulent
pas en convenir. Ah ! ceux-là, pourquoi ne peut-on pas leur crier que
le culte de la personne humaine — ce culte qu’ils servent pour eux-
mêmes — entraîne celui de la collectivité, mais non point d’une
collectivité réduite à un coin de terre.
Je maudis leur doctrine de haine. Ils veulent chasser l’étranger,
ses représentants, ses produits. Qu’adviendrait-il donc de notre
richesse, si l’étranger appliquait la loi du talion, supprimait le
bienfaisant échange ? Je les maudis de battre monnaie avec un
idéal qu’ils considèrent comme sacré, en mettant au jour des
romans, des pièces — dont ils touchent les droits — qui exploitent
un chauvinisme exaspéré. Je maudis le patriote de table d’hôte,
celui qui décerne des diplômes de bon français, qui les détient, qui
en a le monopole. Celui qui veut sur la nappe un pot de moutarde
français, bien français. Et qui louche sur son voisin dès que la
courbe de son nez ne lui paraît pas bien française. Celui qui ravale
l’homme au rang de la bête, en le poussant à foncer sur quiconque
ne lui ressemble pas. Oh ! celui-là, j’appelle de tous mes vœux sa
disparition de la surface de la terre. Je n’ai de haine que pour la
haine…
CHAPITRE PREMIER
DE L’ÉDUCATION : PRINCIPES ET MOYENS D’ACTION
Pour améliorer une race, il ne faut guère compter sur les lois, qui
ne sont que l’enjeu des luttes de partis. Il faut agir directement sur
ses mœurs. C’est l’œuvre de chacun, qui tient ainsi un peu de
l’avenir dans ses mains. Et l’action la plus facile, la plus logique, la
plus urgente, ne doit-elle pas s’exercer sur l’éducation, par
l’éducation ?
Il faut insister sur cette idée qu’en ne punissant pas les enfants,
on leur évite de mentir. En effet, ils emploient le mensonge comme
un bouclier. Ils se dissimulent derrière lui. C’est un moyen de cacher
la faute et d’éviter le châtiment. Si, lorsqu’ils ont commis une
maladresse, cassé quelque objet, ils savent qu’en l’avouant on ne
les grondera pas, qu’on ne les frappera pas, qu’on leur dira
simplement : « Ce n’est pas bien. Tâche de faire attention », qu’on
leur représentera le prix des choses, le soin qu’il en faut avoir, dans
ce cas-là, ils avoueront, ils ne mentiront pas. Ils auront acquis, pour
l’avenir, le précieux bénéfice de la franchise.
Argent.
Cette formule d’un fort banquier m’a toujours frappé et vaut qu’on
la creuse et la médite : « Si je n’étais pas honnête par nature, je le
serais par intérêt. »
Oui, c’est notre intérêt d’être honnête. C’est l’habileté suprême,
quoi qu’il y paraisse.
Ménage.
Une femme doit connaître à peu près le prix des choses que sa
cuisinière achète. Sans quoi, comment modérer la danse du panier ?
Un excellent entraînement pour l’adolescente, c’est d’accompagner
parfois la domestique aux Halles.
Et puis, il faut pouvoir au besoin mettre la main à la pâte,
connaître des principes et un peu de pratique culinaires. La patronne
qui réprimande sa cuisinière sans rien savoir du métier, manque
autant de prestige et frise autant le ridicule qu’un ingénieur qui
reprend un ouvrier sans pouvoir saisir l’outil et lui montrer comment
s’en servir.
De la parure.