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Mars 2010

Numéro 16

Langues
et cité
Langues en contact
L’observation des pratiques linguistiques montre, à travers diverses
études récentes, que plusieurs centaines de langues sont en usage
sur le territoire national. Pour la France métropolitaine, le volet
linguistique de l’enquête familiale associée au recensement de
1999, qui a porté sur un échantillon exceptionnel de 380 000

Langues et cité Bulletin de l’obser vatoire des pratiques linguistiques


personnes, livre l’image d’un foisonnement de langues : 26 % des
Une richesse p. 2 adultes interrogés déclarent que lorsqu’ils avaient 5 ans leurs
parents leur parlaient une autre langue que le français ; plus de
Jeunes urbains p. 3 20 % déclarent qu’il leur arrive d’avoir des conversations dans une
autre langue que le français ; 400 langues apparaissent dans
Lycéennes p. 4
l’enquête de façon significative. Dans les DOM-TOM, il existe une
Jeunes d’origine cinquantaine de langues autochtones auxquelles s’ajoutent des
turque p. 5 langues apportées par les flux migratoires.
Ces langues se côtoient non seulement dans la société, mais
Vallée de Suse p. 6 aussi dans le cerveau des locuteurs. En effet, nombre de nos
concitoyens sont bilingues ou plurilingues. L’étude des pratiques
Guyane p. 8
montre aussi que les langues se mélangent dans les énoncés
La Réunion p. 9 produits (pratique de l’alternance codique ou « code switching »)
et s’influencent les unes les autres. C’est ainsi que le français
Surdité p. 10 parlé intègre des éléments provenant des langues indigènes, de
celles de l’immigration ou de différentes langues de diffusion
internationale. Les autres langues, quant à elles, intègrent des
éléments provenant du français.
Les études sur les contacts de langues se sont notablement
développées ces dernières années et sont un objet d’intérêt
majeur pour la sociolinguistique, non seulement pour des raisons
propres aux différents « terrains » où ces contacts sont étudiés,
mais aussi parce que l’analyse de ces contacts soulève des
questions d’ordre théorique et méthodologique.
Ce numéro de Langues et cité n’a pas la prétention de dresser un
panorama exhaustif du domaine ni d’aborder des questions théo-
riques, mais seulement de donner au lecteur une idée de la diver-
sité et de l’importance des problématiques liées aux contacts de
langues à travers l’exposé de différentes situations.
Une richesse du français : le contact de langues
22

Jean-Louis ROUGÉ kinyarwanda, kru, lao, lari, lingala, ou sérère. Les enfants qui pratiquent le
Laboratoire LLL, université d'Orléans malgache, mandingue, monokotuba, tchétchène ou le géorgien sont aussi en
portugais, penjabi, peul, russe, sango, contact avec le russe. Les parcours

I
mpulsé par le Laboratoire ligérien de senufo, serbo-croate, mahorais, slovaque, personnels ou familiaux expliquent des
linguistique, le programme LCO- soninké, soussou, tchétchène, tchèque, plurilinguismes émergeant au cours de
PANGLOSS (Langues en contact à turc, ourdou, vietnamien, wolof, yakoma, trajets migratoires : ainsi l’allemand est-il
Orléans) fixe au nombre de ses objectifs etc., mais aussi occitan et solognot. par fois pratiqué par des familles
de procéder à l’inventaire des langues turcophones. Un élève de CE2 arrivé
parlées dans l’agglomération orléanaise. Maman parle deux congolais… d’Italie dans les mois précédant l’enquête
L’une des entrées dans la connaissance déclarait parler italien, mais communiquait
des interactions concerne l’école qui est à Cette longue liste, loin d’être complète, en arabe avec un de ses condisciples qui
la fois le principal instrument de la masque la difficulté qu’ont les locuteurs à lui servait d’interprète auprès du reste de
transmission de la norme linguistique et un dénommer leur(s) langue(s), et partant la classe… Par recoupement, il s’est avéré
lieu privilégié d’observation du contact des celle de l’enquêteur à les rapporter à la que sa famille était algérienne.
langues en France. Les enfants repré- nomenclature ISO. « Maman parle deux
sentent une population particulièrement congolais, celui que je comprends, celui Que savent les linguistes ?
représentative des phénomènes en jeu que je ne comprends pas », cette réponse
dans l’évolution linguistique, car ils d’une petite fille est à cet égard caracté- Lorsqu’une collégienne déclare parler laari
assument une maitrise des langues ristique. Le plus souvent, lorsque l’on et kikongo, alors que les bantouistes
différenciée mais souvent équivalente. La demande aux enfants, mais aussi parfois considèrent généralement le laari comme
connaissance de la réalité sociolinguistique aux parents, de citer les langues parlées à un dialecte du kikongo, faut-il que les
dans laquelle ils grandissent peut être utile la maison, on obtient un nom de catégories du linguiste priment les
à l’élaboration de stratégies pédagogiques nationalité : « Je parle sénégalais, malien, intuitions de la locutrice ? Le programme
favorisant une meilleure maitrise de pakistanais… ». Or, s’agissant de pays LCO-PANGLOSS correspond à un besoin
l’ensemble des langues en présence. Enfin, plurilingues, peu d’informations peuvent social : avoir une connaissance précise
l’école est le lieu par lequel, dans le cadre être déduites de cette identification. des langues dans leurs interactions et, à
de cette enquête, des contacts avec les Comment interpréter la réponse de la ce titre, il s’insère dans un questionnement
familles (parents, grands-parents) vivant à petite Congolaise : sa mère parle-t-elle social, à l’échelle locale, nationale et
Orléans peuvent être engagés. C’est donc deux langues ou deux dialectes d’une internationale. Mais les réponses
tout naturellement qu’en concertation même langue ? Utilise-t-elle deux façons qu’apportent les locuteurs, qu’il s’agisse
avec les autorités académiques différentes de parler en présence de sa fille, une que du classement de leur langue ou des
enquêtes ont été menées dans les celle-ci comprend et l’autre non ? De degrés de maitrise et des contextes
établissements scolaires de l’agglo- même, un nom de nationalité pour désigner d’usages, constituent aussi un défi pour
mération, parallèlement à d’autres une langue induit parfois une interprétation les linguistes dans l’élaboration de leurs
recherches entreprises auprès des
traducteurs agréés par la justice, des
communautés immigrées…
erronée. Pour un enfant qui dit parler
mauritanien chez lui, l’arabe classique,
langue officielle, ou l’arabe hassaniya,
analyses .
nomenclatures et dans la conduite de leurs

langue dominante dans ce pays, ne


Des enquêtes réalisées, il ressort que, s’imposent pas comme la référence
dans certaines classes, plus des deux tiers première en contexte orléanais où ce sont
des élèves sont engagés quotidien- plutôt le peul, le soninké, voire le wolof, qui
nement, en famille, dans des interactions sont représentés. La substitution d’un nom
plurilingues, ce qui ne signifie pas toujours de pays à un nom de langue peut tenir à
qu’ils soient capables de parler les langues l’ignorance du nom de la langue, mais
auxquelles ils sont exposés. Souvent, l’un aussi à un jugement selon lequel
des parents parle dans une langue et l’interlocuteur serait incapable de connaitre
l’enfant répond dans une autre, le nom d’une langue qui ne correspondrait
généralement le français. Les langues pas à celui d’un pays.
citées dans ces enquêtes sont les plus
diverses : allemand, arabe, arménien, attié, Les premiers résultats des enquêtes
bambara, baoulé, berbère, catalan, chinois, montrent que les enfants sont souvent au
comorien, créoles guadeloupéen et haïtien, contact quotidien non pas de deux mais de
dan, espagnol, ewondo, persan, géorgien, plusieurs langues. Dans une famille
hindi, hmong, italien, kikongo, kimbundu, sénégalaise, on parlera wolof et peul, diola
Jeunes, ville par l’emploi d’un argot pétri de contacts
de langues et, qui, tout en étant sans
de mots d’autres langues d’immigration :
ainsi des termes empruntés à l’espagnol,
3

et contacts cesse renouvelé, présente d’indéniables


continuités avec celui des ouvriers, artisans
au portugais (caray, bacala) ou à l’italien
(giro), qui à force d’usage, s’intègrent au

de langues : ou commerçants du quartier, souvent


eux-mêmes immigrés ou descendants
« français populaire » local.

l’exemple de
d’immigrés. Ainsi, comme celui de leurs Enfin, les adolescents ont aussi recours
ainés, une des caractéristiques de cet argot à l’anglais, langue scolaire, mais surtout
adolescent est d’intégrer de nombreux élément de présentation de soi et vecteur
Grenoble éléments d’autres langues de France,
emprunts plus ou moins établis stabilisés
d’intégration générationnelle, dont l’usage
manifeste à la fois conformité sociale et
dans les pratiques vernaculaires1. C’est volonté d’intégration à une culture supra-
Cyril Trimaille particulièrement le cas de mots romanis locale valorisée.
LIDILEM, université Stendhal, Grenoble assez nombreux (comme narvalo : fou,
dicav : regarder, nachav : partir), dont on Au total, bien que les villes aient souvent
peut interpréter la présence comme une une forte tendance à « digérer » et à

L
es villes sont des espaces de appropriation, par plusieurs générations réduire la diversité linguistique qu’elles
cohabitation et de hiérarchisation de locuteurs des classes populaires, génèrent (à cause de la non-transmission
sociale et spatiale de populations et d’éléments linguistiques d’une population de langues de migration ou de la réduction
des lieux où se rencontrent des langues stigmatisée résistant depuis des siècles de la diversité des formes en usage),
et des variétés de langues (français dits à l’assimilation au groupe majoritaire. la diversité linguistique créée par la
« populaire », « régionaux » ou « des cités », Cette appropriation a été favorisée par la coexistence de populations de conditions
etc.). En effet, en raison de leur fonction sédentarisation de Roms dans plusieurs sociales et d’origines diverses subsiste,
économique, les villes fonctionnent quartiers de la ville. aussi bien dans les pratiques langagières
comme des pôles attracteurs pour les que dans les systèmes linguistiques qu’elle
migrants. Les migrations, endogènes et Au-delà de ces éléments argotiques, ce contribue à modifier.
exogènes, temporaires ou définitives, sont les langues de socialisation (familiale,
y sont des facteurs de contacts de amicale et scolaire) des jeunes, bases Les contacts sont en effet de puissants
langues et de variétés langagières. Ainsi, de leur répertoire plurilingue, qui sont facteurs d’évolution des langues, favorisant
la ville de Grenoble, qui nous intéressera les plus représentées dans leurs usages. par exemple les emprunts, mais aussi les
ici, est, comme la plupart des centres Le français est la langue de loin la plus changements phonétiques (l’introduction
industriels urbains français, une région utilisée, dans la diversité de ses formes, en français du son -ng est liée à l’emprunt
d’immigration, de plurilinguisme et « jeune » (avec toutes les précautions d’une série de mots anglais tels que
de contacts linguistiques. Mais ces qu’appelle cette désignation), ordinaire, parking, jogging). Ainsi, si l’on a conscience
contacts ne se produisent jamais entre scolaire, médiatique… Souvent mêlés au que le français actuel résulte pour partie
des systèmes linguistiques abstraits français, on observe la présence (plus du contact prolongé entre latin vulgaire,
et désincarnés. Ce sont des locuteurs ou moins dense selon les locuteurs, les langues celte et franque, puis d’emprunts
qui, par leurs compétences bilingues activités langagières et les interlocuteurs) à des langues de science et de culture
ou plurilingues, leurs pratiques et leurs de segments issus des langues familiales (latin classique, arabe, italien, anglais…),
interactions (sociales et langagières), sont des jeunes, la plus courante étant l’arabe celui de demain a toutes les chances
les « lieux » et les acteurs du contact des maghrébin. Ces alternances de codes vont d’intégrer des éléments apportés par des
langues. Parmi ces locuteurs, cet article de la prononciation particulière de sons immigrés et transformés et intégrés par
s’intéressera aux quelques manifestations
du contact de langues dans les pratiques
langagières de jeunes garçons grenoblois
du français (les phonèmes /a/ ou /r/
articulés à l’arrière de la bouche), à des
phrases dans une autre langue, en passant
.
leurs descendants (halal, inch allah, labes,
etc.)

issus de l’immigration auprès de qui une par des mots (meskin : malheureux,
enquête ethnographique a été menée. halal : qualifie une viande égorgée ou une
action qui n’est pas un « péché ») ou des
D’abord, précisons que, comme chez expressions figées (inch allah : si Dieu le
tous les sujets, le langage est une veut, labes alik : ça va ?). Il est important
ressource fondamentale qui permet aux de préciser que ces formes introduites
jeunes garçons de construire leur statut dans les échanges amicaux par des
d’adolescent. Les jeunes enquêtés font arabophones sont parfois reprises par leurs
souvent un usage jubilatoire de la parole camarades non arabophones. C’est aussi
et des langues, cet aspect jubilatoire le cas, en quantité nettement moindre,
pouvant tenir aux caractères ludique,
transgressif, cryptique ou identitaire de 1 Une langue est dite vernaculaire lorsqu’elle sert à la
certains usages. Ils construisent leur communication au sein d’un groupe. La fonction véhi-
identité socio-langagière adolescente culaire d’une langue désigne à l’inverse son utilisation
pour la communication intergroupe.
Contacts de langues dans les répertoires verbaux de
4

lycéennes grenobloises
Patricia Lambert en effet comme des héritières plurilingues et culturelle, s’efforçant de cloisonner
UMR ICAR – INRP, Lyon d’histoires migratoires familiales. Les strictement leurs univers linguistiques
expériences socio-langagières qu’elles scolaire et extrascolaire, d’autres en
relatent s’inscrivent dans l’histoire des revanche revendiquent le recours ponctuel

D
ans la continuité d’une série migrations, et des situations de contacts à des formes (lexicales, phonétiques)
de travaux sur les pratiques de langues qui en découlent, à Grenoble. associées à d’autres langues dans leurs
langagières de descendants de Selon différentes modalités de contact pratiques d’adolescentes (cf. Trimaille
migrants résidant à Grenoble1, une avec le français, les environnements ici même). Ces pratiques langagières
recherche-action a été conduite dans un linguistiques de ces jeunes filles peuvent juvéniles marquées par les contacts
lycée professionnel de cette ville (Lambert, ainsi comprendre, depuis leur petite de langues sont perçues par certains
2005). Un des objectifs de cette recherche enfance, des langues du Maghreb, du enseignants comme source d’enfer-
était de décrire la diversité des ressources Cameroun, des Comores, d’Arménie, mement linguistique et identitaire,
linguistiques des élèves et de prendre en d’Italie ou du Portugal. Même lorsque particulièrement lorsque la perception
compte ces ressources dans des pratiques leur présence apparait résiduelle dans du contact renvoie à la présence –
pédagogiques. La réalisation de ce projet les pratiques décrites, ces langues sont emblématique d’une appartenance socio-
a comporté, entre autres, une observation généralement investies d’une forte valeur urbaine stigmatisée – de formes emprun-
participante dans une classe de seconde identitaire. tées à « l’arabe ».
professionnelle secrétariat-comptabilité.
Ce texte présente quelques-uns des Les récits biographiques rendent compte Les significations sociales, attribuées
éléments constitutifs de l’hétérogénéité de liens complexes entre la diversité des à ce type de contacts et la focalisation
linguistique dans cette classe, lieu de parcours migratoires, la dynamique des négative dont ils font l’objet, jouent un
tensions sociales et idéologiques qui répertoires familiaux et les statuts des rôle non négligeable dans le masquage de
autorisent, stimulent ou interdisent langues qui les composent. On trouve, l’étendue des répertoires langagiers et des
l’expression des ressources linguistiques par exemple, la trace de ces processus registres identitaires de certains élèves. Ce
et identitaires des élèves. dans l’usage courant de certaines dési- constat invite à développer des activités
gnations qui renvoient à l’intériorisation pédagogiques qui visent la connaissance
Par le jeu de processus de sélections de la minorisation d’une langue familiale et la reconnaissance, dans la classe,
sociales et scolaires, les classes de (« arabe barbare » par ex.) ou à l’usage peu des usages linguistiques hétérogènes
secrétariat-comptabilité de ce lycée en
zone d’éducation prioritaire rassemblent
en très large majorité des filles issues
valorisé, bien qu’éminemment ordinaire
en situations de contact, de formes lin-
guistiques mêlées ou alternées (« le
d’interactions sociales des élèves .
en vigueur dans les différentes sphères

de milieux populaires et descendantes remix », « moitié moitié »).


de migrants de diverses provenances.
Les élèves sont recrutés localement2, Si le plurilinguisme constitue donc pour
généralement à la suite d’orientations par elles une ressource ordinaire partagée,
défaut. elles évoquent bien souvent des
expériences scolaires susceptibles d’avoir
La classe observée partage l’ensemble de contribué aux processus de dévalorisation
ces caractéristiques et, sur les 23 élèves des pratiques linguistiques en famille
(16 à 18 ans), 18 jeunes filles déclarent et à leur confinement dans des espaces
l’usage régulier d’au moins une autre privés.
langue que le français, dans différents
contextes, notamment familiaux. Au lycée : entre masquage de la
diversité linguistique et focalisation sur
Des héritières plurilingues des migra- le contact français/« arabe »
tions
Au plan des usages observés dans
Au cours d’activités scolaires portant l’établissement scolaire, on constate des
sur le plurilinguisme et les contacts de modes d’investissement différenciés des
langues, ces adolescentes se présentent composantes des répertoires linguistiques.
En rupture avec la diversité des pratiques
1 Parmi les études conduites au laboratoire de lin- plurilingues déclarées en usage à l’extérieur
guistique et didactique des langues étrangères et du lycée, et de manière très attendue, le
maternelles (Lidilem, Grenoble), voir par exemple : français est largement majoritaire dans les
Dabène & Billiez (1984), Billiez & Merabti (1990),
Billiez et al. (2003) interactions. Mais alors que certaines filles
2 Dans des collèges ZEP-REP de la périphérie de se trouvent manifestement engagées dans
l’agglomération grenobloise. un parcours d’assimilation linguistique
P
our les jeunes de la au français n’est pas symétri- d’autres groupes de migrants. 5

Les contacts de langues chez les jeunes d’origine turque en France deuxième génération de que à celui du turc tant au ni- Le français occupe néanmoins
migrants turcs, le fran- veau de l’oral que de l’écrit. En une place prépondérante dans
çais est quotidiennement au observant leur déclaration sur les pratiques déclarées. On
contact du turc quand ils par- les choix de langue avec leurs rejoint là encore l’importance
lent avec leurs parents, leurs parents, il apparait que ces de la langue dans laquelle s’est
frères et sœurs et leurs amis jeunes utilisent soit exclusive- effectuée la scolarisation pour
de même origine. Le contact ment le turc, soit le français et le devenir des activités relati-
du turc et du français se fait le turc, mais jamais exclusive- ves à l’écrit.
également au niveau des ac- ment le français. Les jeunes
tivités liées à l’écrit. La mise d’origine turque qui déclarent En France, en effet, les jeunes
en perspective des pratiques utiliser exclusivement le turc d’origine turque situent leurs
de jeunes d’origine turque dans les relations verticales activités de lecture et d’écri-
avec d’autres jeunes issus de « s’éloignent » des tendances ture davantage du côté du
la migration a d’ailleurs révélé observées auprès d’autres jeu- français que du turc, ce que ne
un attachement particulier nes enfants de migrants. Cette font pas les jeunes migrants
des Turcs à leur culture et leur particularité du groupe d’ori- d’origine turque en Angle-
langue d’origine (Mortamet, gine turque s’explique notam- terre. En menant une enquête
2005). Ce rapport « privilé- ment par le fait qu’il est fort comparable auprès de jeunes
gié », comparé aux migrations rare que les mères travaillent d’origine turque en Angleterre,
maghrébine ou africaine, peut à l’extérieur et qu’il existe très nous avons en effet pu consta-
être éclairé par au moins deux peu de mariages mixtes entre ter que ces derniers utilisent
facteurs. D’abord, la langue Turcs et Français. Au niveau davantage le turc à la fois à
turque n’a jamais entretenu des choix de langues avec l’oral avec leurs frères et sœurs
de rapport diglossique avec leurs frères et sœurs et leurs et leurs amis de même origine,
le français, alors que de tels pairs, les jeunes Turcs de la et à l’écrit dans leurs activités
rapports perdurent aujourd’hui deuxième génération décla- de lecture et d’écriture. Parmi
encore entre l’arabe et le fran- rent utiliser soit exclusivement l’ensemble des facteurs socio-
çais, et, a fortiori, entre les lan- le français soit à la fois le fran- logiques classiques suscepti-
gues africaines et le français. çais et le turc, mais jamais bles d’éclairer ces différences
Dans la quasi-totalité des pays exclusivement le turc. La ten- entre les deux groupes : sexe,
d’Afrique noire qui ont été colo- dance dans les échanges ho- âge, temps d’installation dans
nisés par la France, le français rizontaux est donc à l’opposé le pays d’installation, catégorie
reste la langue officielle unique, de celle dans les échanges socioprofessionnelle des pa-
la langue de la scolarisation et verticaux. L’usage quotidien du rents, etc., aucun n’est satis-
des médias. On imagine alors français à l’école explique ces faisant. Nous avons alors fait
mal une pratique de lecture et choix. L’utilisation exclusive du l’hypothèse que les pays d’ins-
d’écriture en langue africaine français dans les échanges ho- tallation ont des effets sur les
pour les personnes résidant rizontaux pour nombre d’entre pratiques langagières des mi-
en France. De surcroit, l’accès eux présage que le turc ne do- grants. Il convenait de recourir
à la langue turque est facilité minera pas les échanges de la à d’autres facteurs pour tenter
par une culture de l’écrit. La prochaine génération. d’interpréter ces tendances et
littérature turque s’enorgueillit notamment les politiques lin-
d’un prix Nobel récent (2006) : On note cependant que l’uti- guistiques et scolaires des
l’écrivain O. Pamuk. De même, lisation des langues mêlées pays d’installation à l’égard
la culture journalistique est n’est revendiquée qu’en cas des langues des migrants. Il
particulièrement développée d’incompétence lexicale en semble que la reconnaissance
en Turquie : il existe davan- turc. Il n’y a pas de revendi- et la valorisation des langues
tage de quotidiens turcs que cation d’identité métissée, à d’origine dans les écoles, plus
français et ils sont largement l’inverse de ce que l’on a pu importante en Angleterre qu’en
diffusés. En outre, l’attache- observer auprès des jeunes France favoriseraient les prati-
ment particulier des Turcs à migrants originaires d’Afrique ques à l’oral et à l’écrit dans la
Jeanne Gonac’h & Fabienne Leconte
Université de Rouen, EA Lidifra 4305

leur origine et à leur langue est du Nord ou d’Afrique subsaha- langue d’origine. à l’inverse, le
aussi lié au statut de la langue rienne. C’est une impression manque de reconnaissance et
turque en Turquie : elle est le de cloisonnement des réper- la dévalorisation des langues
symbole de la naissance de la toires en fonction des interlo- des migrants dans les écoles
république laïque et le critère cuteurs qui domine dans les en France encourageraient la
par excellence de l’unification déclarations. Les déclarations plus forte pénétration du fran-
et de l’identité du peuple turc. des jeunes sur la fréquence çais dans les échanges hori-
Une étude sur les pratiques
langagières de jeunes d’ori-
gine turque de la deuxième gé-
de leurs pratiques de l’écrit
indiquent que le turc tient une
place non négligeable à côté
.
zontaux et dans les pratiques
de l’écrit

nération en France (Gonac’h, du français, contrairement à


2008), montre que le rapport ce qui a pu être observé pour
66
Contacts occitan-piémontais-français-italien-
francoprovençal dans la Haute Vallée de Suse (Italie)
Jean Sibille La plupart des habitants sont linguistiques sont plus codifiés plus en plus d’origine scolaire
MoDyCo (CNRS, UMR 7114) au moins trilingues, voire et plus rigides que dans les alors qu’auparavant elle était
souvent quadrilingues, mais grandes villes modernes). acquise en dehors de l’école
on observe des différences (dans les générations les plus

L
e présent article est de entre les générations. Les La rupture de la transmission âgées, il est assez fréquent
l’ordre du témoignage. personnes nées avant ou familiale de l’occitan intervient que des personnes parlant
Il n’est pas issu d’un pendant la Première guerre dans les années 60 ou 70 correctement le français ne
projet de recherche prédéfini, mondiale étaient/sont pour la avec un décalage de 10 à 15 sachent absolument pas l’écri-
mais résulte des observations plupart quadrilingues occitan- ans entre les bourgs et les re ni même le lire). C’est ainsi
empiriques faites par l’auteur italien-français-piémontais, hameaux de montagne. Dans qu’en quatre générations, on
(qui est par ailleurs linguiste) avec généralement une bonne les générations nées à partir passe d’un quadrilinguisme
dans la région d’origine de sa compétence active dans les de la fin des années 50 et quasi général, à un quasi mono-
famille paternelle. quatre langues ; sauf en ce jusque dans les années 70, linguisme italien.
qui concerne les femmes la transmission de l’occitan
La Haute Vallée de Suse (ou des hameaux de montagne régresse progressivement, non Il est à noter enfin, que
Vallée d’Oulx), du côté italien éloignés du chef-lieu de la pas au profit de l’italien, le bilinguisme occitan-
du col du Montgenèvre, ainsi commune, qui assez souvent mais au profit du piémontais, francoprovençal est rare : il ne
que la vallée du Haut Cluson ignoraient le piémontais. dialecte de la plaine et se rencontre guère que chez
(qui communiquent par le Dans cette génération, rares dialecte urbain pratiqué par des enfants issus de couples
col de Sestrières) étaient étaient les personnes n’ayant la bourgeoisie turinoise. On mixtes ou chez des personnes
jadis partie intégrante du jamais travaillé en France, trouve dans ces générations s’étant mariées dans un village
Dauphiné. Elles ont été cédées dans leur jeunesse ou pour des personnes à qui leurs alloglotte. Contrairement à
par la France au Royaume de des travaux saisonniers ; tout parents occitanophones ont ce qu’on peut observer dans
Piémont-Savoie lors du traité le monde avait des parents parlé piémontais, et qui ont d’autres zones, il n’existe pas
d’Utrecht en 1713. La langue proches (frères, sœurs, oncles, donc le piémontais comme ici de zone de transition entre
parlée historiquement par la tantes) établis en France : langue première (ceci est occitan et francoprovençal ;
population autochtone est une le plus souvent à Lyon ou à valable dans les bourgs, la limite est nettement tran-
variété d’occitan alpin (oc) qui Marseille, parfois en région beaucoup moins dans les chée, l’occitan local et le
présente peu de différences parisienne ou dans l’Est. Dans hameaux de montagne où la francoprovençal local ne sont
les générations nées entre les rupture de la transmission de pas intercompréhensibles, pas

.
avec le dialecte parlé du côté
français de la frontière, dans deux guerres mondiales et l’occitan est plus tardive et où plus qu’ils ne le sont avec le
les environs de Briançon. jusque dans les années 1960, l’on passe plutôt directement piémontais
on observe une régression de de l’occitan à l’italien), mais
Dans la Haute Vallée de Suse, la compétence en français : la plupart de ces personnes,
le vernaculaire local est en la connaissance du français dont le piémontais peut être
contact avec deux autres y reste largement répandue, considéré comme la langue
langues vernaculaires : le mais moins qu’auparavant première, ont une compétence
francoprovençal (fp) parlé et avec des degrés de passive ou active partielle
dans la moyenne vallée (de compétences actives très en occitan, voire une bonne
Gravere à Busolleno, sauf divers, en fonction de l’histoire compétence active dans le cas
à Suse-même qui est une personnelle de chacun. Il de ceux qui ont consolidé leur
enclave piémontaise depuis le semblerait que, dans cette compétence par une pratique
18e siècle), et le piémontais (pi) génération, on trouve plus plus ou moins volontariste ou
parlé à Suse et dans la basse de francophones dans les ont été amenés à pratiquer
vallée, près de Turin (Grassi hameaux de montagne isolés, l’occitan en dehors de la
1964). À la fin du 19e siècle, restés davantage tournés vers famille nucléaire.
l’italien (it) s’y est substitué la France économiquement
au français (fr) comme langue et familialement, que dans À partir des générations nées
véhiculaire et langue de l’admi- les bourgs chefs-lieux de dans les années 80, la langue
nistration municipale ; les commune. Il est à remarquer acquise par transmission
générations nées jusque vers que dans cette société familiale est le plus souvent
1880 sont encore scolarisées plurilingue la pratique de l’italien. Dans ces générations,
en français, les générations l’alternance codique (code- les locuteurs véritablement
suivantes en italien ; certains switching) est inexistante (ceci actifs de l’occitan et du pié-
notaires dressent encore des est probablement dû au fait montais se font rares. Quant
actes en français au tout début que dans les sociétés rurales à la compétence en français,
du 20e siècle. traditionnelles les usages lorsqu’elle existe, elle est de
7

Un cas pratique
Nous sommes en 2001, au village de V, dans la Haute Vallée de parlée dès le plus jeune âge avec les père et mère) ; un [–] en
Suse, Madame X (née en 1961) est mariée avec Monsieur Y (né exposant indique une compétence exclusivement passive, un
en 1955), ils ont une fille, F, âgée de 12 ans. Ils résident dans le [±], une compétence active limitée, l’absence d’exposant in-
bourg, chef-lieu de la commune. X est originaire d’un hameau de dique une bonne compétence active (X, Y et F ont également
montagne situé à plusieurs kilomètres du bourg. Ses parents y des compétences scolaires en anglais, mais cette langue n’in-
résident ; son père (pX) y est né ; sa mère (mX) est originaire tervient pas dans les interactions) :
d’un hameau situé dans une commune voisine. Les parents de / X : oc, fr, it, pi– / mX : oc, it, fr, pi– / pX : oc, it, pi, fr± /
Y résident dans le bourg ; son père (pY) y est né, sa mère (mY) / F : it, fr±, oc–, pi–/
est originaire d’une commune limitrophe de langue francopro- / Y : pi, oc, it, fr±, fp– / mY : fp, oc, pi, it / pY : oc, pi, it /
vençale. Les parents de X sont nés à la fin des années 30, ceux X dont la langue maternelle est l’occitan, a ensuite acquis le
de Y au début des années 30. L’observateur (O), né en 1955, est français grâce aux contacts familiaux (avec des cousins, cou-
cousin à la deuxième génération avec X. sines, oncles, tantes, établis en France) avant d’apprendre l’ita-
lien à l’école primaire.
Les compétences linguistiques de chacune de ces personnes
sont décrites ci-après ; pour chaque personne la première Si on observe quelle(s) langue(s) est/sont utilisée(s) par chaque
langue citée (en gras) est la langue considérée comme la langue individu pour s’adresser aux autres (y compris à l’observateur),
première ou « maternelle » (qu’on définira comme la langue on obtient les données suivantes1 :

émetteur
mX pX X Y pY mY O
d mX oc oc oc oc oc fr (oc)
E
S pX oc oc pi oc oc oc (fr)/
T
I X oc oc it (oc) oc oc fr
N Y oc pi (oc) it (oc) pi pi fr oc it/
A
T pY oc oc oc pi oc (pi) oc it
A
I mY oc oc oc pi oc (pi) oc it
R
E O fr (oc) oc/ fr oc it (fr)/ oc it oc it
Les interactions entre F et les adultes ont lieu exclusivement en italien.

Commentaire : Le fait que les parents Y aient parlé piémontais à leur fils plutôt
Globalement les faits décrits illustrent les différences existant qu’occitan s’inscrit dans une tendance. Mais cela peut sans
entre les hameaux de montagne et les bourgs, chefs-lieux de doute aussi s’expliquer par le fait que mY, jeune mariée venant
commune. Par rapport aux bourgs, les hameaux présentent les d’un village alloglotte, ne maitrisait pas encore l’occitan (qui fut
caractéristiques suivantes : rupture de la transmission de l’oc- la langue d’intégration à sa belle famille) au moment de la nais-
citan plus tardive, pénétration du piémontais faible voire nulle, sance de Y, et que donc la langue de communication du couple
moindre recul du français (il nous a été rapporté que, à l’école pY-mY à cette époque était probablement le piémontais.
primaire de V, vers la fin des années 60, les enfants du bourg se
moquaient des enfants des hameaux car ces derniers parlaient Dans le couple pX-mX le mari pratique le piémontais, mais pas
occitan entre eux). la femme ; en revanche la femme a une bonne compétence ac-
tive en français tandis que son mari, s’il le comprend sans diffi-
On n’observe pas, dans le cas étudié, de véritables interactions culté, a une compétence active limitée dans cette langue. Cela
asymétriques, mais cela peut se produire : par exemple, Y illustre le fait qu’il est assez fréquent que les femmes des ha-
s’adressait en piémontais à son grand-père maternel qui lui ré- meaux, qui ont peu de contact avec la plaine, ne pratiquent pas
pondait en francoprovençal. On remarque que Y dont la langue le piémontais, tandis que beaucoup d’hommes travaillent à Turin
première est le piémontais s’adresse en piémontais à ses pa- ou dans d’autres localités de la plaine. Dans le cas présent, mX
rents et à son beau-père, mais en occitan à sa belle-mère qui ne a travaillé en France dans sa jeunesse et après s’être mariée n’a
parle pas le piémontais. Y s’adressait également en occitan à guère quitté le hameau, tandis que pX a travaillé pendant toute
ses grands-parents paternels. sa vie professionnelle à Turin, à une époque où, dans cette ville,
la pratique sociale du piémontais était générale, y compris dans
beaucoup de milieux professionnels.

1 Lorsque deux langues figurent dans la case, elles sont utilisées indifféremment ; lorsque l’une d’elles figure entre parenthèses, elle n’est utilisée que de façon occa-
sionnelle ; le signe [/] à la suite de l’indication de la langue signale une interaction asymétrique (A parle à B dans une langue, B lui répond dans une autre langue) ou
pas totalement symétrique.
8
Contacts de locuteurs – « natifs » ou non – représentant
au moins 1 % de la population ; plusieurs
plus de 80 % non francophone, ne reçoit
aucune formation ni dans les langues
sont véhiculaires (créole guyanais, français, locales les plus représentées ni dans des
langues en portugais, sranan tongo, ndyuka…), mais langues véhiculaires. Dans la plupart des
aucune de celles-ci n’est pratiquée par services (administration, santé, justice)
Guyane plus de 60 % de la population. les traducteurs sont extrêmement rares.

Les populations présentes depuis plu- Comme il est habituel en situation de plu-
Isabelle Léglise sieurs siècles en Guyane et les groupes rilinguisme, on observe une gamme de
CNRS-CELIA plus récemment arrivés sont majoritaire- phénomènes de mélange et alternance
ment non francophones et leurs langues des langues. Un domaine particulièrement
premières continuent à jouer un rôle im- intéressant concerne les différents créo-

L
’immigration et les mouvements portant dans la vie quotidienne guyanaise. les à base anglaise dont l’utilisation par
de population sont constitutifs du Dès lors, l’école apparait comme l’un des des non-natifs a des effets sur d’autres
peuplement de la Guyane française : premiers lieux de confrontation, entre langues. Ces changements linguistiques
mobilité des populations amérindiennes langues de la famille et français, langue s’accompagnent de redéfinitions des clas-
depuis plus de 2000 ans, colonisation et officielle, mais également entre langues sifications ethniques traditionnelles et des
esclavage, puis migrations économiques premières. La grande majorité des en- frontières de langues.
et politiques ces quatre derniers siècles. fants, d’origine guyanaise ou étrangère,
Le recours à l’immigration a longtemps sont actuellement scolarisés, mais le taux Après une première phase de description
été considéré comme un moyen essentiel d’échec scolaire y est le plus important de générale, deux programmes de recherche
de valorisation de l’espace guyanais avant France, tous DOM compris. sont actuellement en cours, sur ces ques-
que la Guyane, depuis les années 1970, ne tions. Le premier s’intéresse aux effets de
reçoive une immigration spontanée des Un certain nombre de travaux (Léglise et ce contact linguistique sur les pratiques
pays voisins. Cette immigration inquiète et Migge 2007 notamment) – financés en langagières (alternance, emprunt, code
la question migratoire est actuellement au partie par la DGLFLF – permettent d’ores mixing, crossing, etc.) et sur les langues
cœur de l’actualité politique, économique et déjà d’affirmer que : elles-mêmes (variations, emprunts, res-
et sociale de ce DOM ; elle constitue tructurations syntaxiques etc.)1. Le se-
de fait un enjeu pour les politiques de > les langues parlées depuis plusieurs cond s’intéresse aux conséquences des
développement, de gestion urbaine, de siècles sur ce territoire continuent de se mobilités sur le plateau des Guyanes2 sur
santé et de scolarisation. Parallèlement, transmettre mais certaines – des langues les langues pratiquées et transmises par
la population n’a cessé de progresser, amérindiennes notamment, mais aussi le les individus, en lien avec les problémati-
passant de 73 000 habitants en 1982 à créole guyanais – sont en recul ; ques de l’identité et de l’intégration, et les
157 000 en 1999 et près de 200 000 politiques linguistiques, familiales et édu-
aujourd’hui, dont environ 30 % d’immigrés > les langues issues de l’immigration bé- catives. La Guyane constitue assurément
(Surinamiens, Haïtiens, Brésiliens…).

Du point de vue linguistique, les migrations


néficient d’une bonne transmission fami-
liale ; tions .
un terrain propice à ce type d’investiga-

en Guyane ont eu, et continuent d’avoir, > certaines jouent même un rôle véhiculaire
des effets importants : elles ont apporté (portugais du Brésil, sranan Tongo) en
de nouvelles langues sur ce territoire ; elles particulier en zone frontalière avec le pays
ont augmenté le poids démographique que d’origine ;
certaines représentaient ; elles participent
à l’accroissement du plurilinguisme de > les enfants possèdent, dès leurs pre-
la population et à la véhicularisation mières années de socialisation, plusieurs
de certaines langues en présence. Un langues dans leur répertoire et alternant
certain nombre de ces migrants ne sont les langues en fonction des situations et
toutefois pas complètement « étrangers » : de leurs interlocuteurs ;
ils partagent avec les sociétés établies
dans ce DOM depuis quelques siècles > si l’école guyanaise tente de prendre en
(Amérindiens, Créoles, Marrons) un fonds compte la diversité linguistique au sein
linguistique et culturel, et parfois aussi des de ses classes au travers de différents
pans d’histoire, ce qui brouille la distinction programmes (Langue et Culture Régionale
formelle entre mobilités régionales (de pour le créole, Intervenant en Langue
part et d’autre des fleuves) et migrations Maternelle pour les langues amérindiennes,
internationales. les langues noir marronnes et le hmong,
éveil aux langues pour les autres langues),
La Guyane constitue sans doute, dans le il ne semble pas exister de politique
contexte français, un cas particulier pour linguistique - au niveau du département
ce qui est des questions linguistiques : comme au niveau des différentes 1 ANR 2009-2013 « CLAPOTY - Contacts de Langues :
on y dénombre une trentaine de langues administrations – en faveur des langues Analyses Plurifactorielles assistées par Ordinateurs et
typologiquement variées (dont une douzaine parlées dans le département. Le personnel conséquences Typologiques ».
2 ANR Les Suds 2008-2010, « Dynamiques des circu-
peuvent être qualifiées de « locales ») ; une hospitalier de l’ouest guyanais par exemple,
lations migratoires et mobilités transfrontalières entre
vingtaine sont parlées par des groupes de au contact d’une population de patients à
Guyane, Surinam, Brésil, Guyana et Haïti ».
Contact de communication quotidienne :
« Bon, c’est vrai que dans le
paysage auparavant diglos-
sique où seule la langue
un cadeau et qu’ou dis ‘Je
déboucherai plus tard’… et là
9

langage, on parle français, et « basse », le créole, servait band zoreil i di à ou qu’on ne


langues à La ben, on laisse partir des mots de vernaculaire. D’autre part, débouche pas des cadeaux…
de créole, dedans. Voilà. On la jeune génération vit la ben i fé qoué alors ? »5. Cette
Réunion : mélange. C’est un petit mélange
de toute façon. Surtout pour,
coexistence des langues
française et créole d’une façon
nouvelle pratique de l’écrit
participe entièrement à la
« On ne pour les jeunes d’aujourd’hui.
Voilà. Euh, je trouve que c’est
beaucoup plus pacifique et,
de ce fait, donne davantage
décrispation de la diglossie,
dont l’évolution est étudiée
débouche pas bien, au moins, bon ben, ils
gardent quand même le créole
de légitimité au mélange.
Ainsi, il est très fréquent
depuis 10 ans sur corpus.
Amorcé par les jeunes, ce

des cadeaux. et ben, ils parlent français


aussi ».
d’entendre les termes créoles
comme « èk » (avec), « un
changement s’ancre dans
toute la société grâce aux

Ben i fé qoué La fréquence des mélanges


augmente par ailleurs, comme
tako » (beaucoup) ou « koma »
(comme ça) en français dans
la bouche des jeunes : « et que
médias en général .
nouvelles technologies et aux

alors ? » le montre la comparaison


à travers le temps, dans la
je branche èk mon ordinateur
et que je branche èk euh mon
Gudrun Ledegen base Valirun2, des particules téléphone » ; « aide cantinière
LCF-UMR 8143 - université de énonciatives employées en un truc koma ouais ». Traits que
La Réunion créole : les corpus oraux nous retrouvons naturellement
datant des années 70 attestent aussi dans leurs écrits libres.

L
a situation de contact 4 particules françaises sur 34 ;
de langues à La Réunion pour les corpus modernes Les nouvelles technologies,
est remarquable à plus (2000-…), on passe à 28 internet et sms tout spécifique-
d’un titre : elle met ensemble particules sur 34 (je sais pas, ment, apportent un nouveau
le créole – à base française tu vois, on dirait...), lesquelles changement radical dans
– et le français, créant ainsi sont très fortement intégrées le rapport aux langues en
une situation linguistique au créole comme le montrent contact. Ces nouveaux écrits
particulière qu’on décrit à l’aide les exemples ‘je sais pas’ se calquent sur l’oral ordinaire
du concept de continuum, «[∫epa] moin» (je sais pas moi), et de fait mélangeant. Ainsi,
un arc-en-ciel d’usages – et l’hybride [∫pakwe] (je sais une étude de 15 000 sms
et non pas une séparation pas quoi). récoltés à La Réunion (www.
stricte entre les variétés en lareunion4sciences.org) révèle
présence – s’organisant de Ce métissage accru des deux que les jeunes y pratiquent
façon graduelle entre les langues est pleinement à pour un tiers du français,
deux pôles du français et du l’œuvre dans les parlers jeunes du créole et le mélange des
créole ; il existe ainsi entre les réunionnais : cette pratique deux langues : « T lè ga lè tro
deux langues une multitude de identitaire en émergence se dangeureu!atpr »3, atpr étant la
variétés intermédiaires, entre revendique comme un mélan- version créole (« a ter pou rir »)
lesquelles les frontières sont ge de créole, de français (plus de mdr. « KikOo cmt sa va? […]
floues. De fait, on manque particulièrement « jeune » et ou mank à mOin ti kfriNe »4.
souvent d’arguments linguisti- familier) et de quelques termes Par ailleurs, internet amorce
ques pour discerner la frontière anglais. Elle est innovante à l’affichage diasporique positif
entre français et créole1. deux égards : d’une part, en de la communauté réunion-
ce qui concerne les ingré- naise, avec des mises en
Du fait de la proximité entre dients des langues et variétés exergue de l’identité régionale,
les deux langues et de leur mélangées ; en effet, le entre autres dans son aspect
contact intense, dans le DOM français familier, absent du linguistique. Un site de
qu’est La Réunion depuis paysage sociolinguistique des Facebook où on propose de
1946, la situation est propice générations précédentes, est compléter la phrase « Tu sais
aux mélanges linguistiques. revendiqué par les jeunes pour que tu viens de La Réunion
Une locutrice décrit ainsi la les communication identi- quand… » comporte ainsi des
taires, familières et ludiques. scénarios alternant créole et
Cette appropriation du français français et mettant en lumière
1 Ce d’autant plus que près de 15 %
familier redistribue ainsi les des particularités culturelles
des pratiques ordinaires se situent
dans une zone « flottante » (Ledegen), cartes linguistiques dans un et linguistiques : « ou gaigne
où le linguiste peut difficilement déci-
der si tel énoncé relève du créole ou
du français : ainsi cette citation de pa-
roles de l’institutrice au sein d’un récit 2 Variétés linguistiques de La Réunion ; 3 « Hé, les gars, c’est trop super !
en créole pourrait être transcrite en le site Corpus de la parole du ministère mdr ». Les graphies originales sont 5 « … tu reçois un cadeau et que tu
français, i(l) faut red(e)mander à papa de la Culture et de la Communication toutes respectées. dis « Je déboucherai plus tard »… et là,
ou à maman un cahier, ou en créole, présente plusieurs extraits de cette 4 « Coucou comment ça va ? […] tu les zoreils (‘Métropolitains’) te disent
i fo red(e)mandé a papa ou a maman base de données orales : www.corpus- me manques petite cafrine (‘ma petite qu’on ne débouche pas des cadeaux…
in kayé. delaparole.culture.fr. copine’) ». ben, on fait quoi alors ? »
10
Surdité et contacts de langues
Agnès Millet autour de la tempe avec une forme de La communication, chez tous les sujets
LIDILEM - université Stendhal, main renvoyant respectivement à /R et de l’étude, s’adapte aux situations et
Grenoble. à /I/. D’autres signes de la LSF, dont les spécialement au statut « sensoriel » (sourd
mots français correspondant sont des vs entendant) de l’interlocuteur. Chez
mots courts, trouvent leur origine dans la certains, les pratiques sont essentiellement
Un contact de langues nécessaire dactylologie – tels [sûr] [gaz] [oui], dont situées sur le pôle bilingue du continuum.
la rapidité d’exécution laisse cependant Même lorsque l’interlocuteur (sourd ou
Les représentations sociales font que oublier cette origine dactylologique.
entendant) maitrise la LSF, le parler est
le plus souvent les sourds sont pensés Comme toute langue, la LSF est en
bilingue et superpose les deux langues.
comme monolingues : ils seraient soit contact avec d’autres et emprunte ; les
des « sourds gestuels », soit des « sourds jeunes générations empruntent d’ailleurs On parlera alors d’un profil mixte, dans
oraux » (Millet, 2003). Cette représentation également à l’anglais, avec, par exemple, lequel le strict monolinguisme est rare.
dominante est issue vraisemblablement un signe très en vogue actuellement D’autres locuteurs ont plutôt un profil à
de la querelle multiséculaire qui agite renvoyant à « I love you ». Ainsi, pas plus base gestuelle où la modalité gestuelle
les milieux de l’éducation des sourds – que n’importe quelle langue, la LSF n’est est constamment sollicitée : sous forme
à savoir l’opposition farouche entre la un isolat de pureté – autre fantasme de labialisations dans un parler à base
méthode dite « oraliste » et la méthode parfois évoqué, cette fois-ci, par des LSF ; sous forme de gestualité non verbale
dite « bilingue »1. Si quelques sourds, d’un sourds locuteurs de cette langue. dans une adaptation communicative à un
côté comme de l’autre, sont effectivement locuteur entendant ne maitrisant pas la
monolingues – ou se revendiquent comme Un contact en actes : le parler bilingue LSF ; et, enfin, sous forme d’une utilisation
tels pour des raisons idéologiques : bimodal alternée de superpositions redondantes
affirmer sa différence ou au contraire
ou lacunaires des langues avec des
vouloir s’identifier aux entendants –, la Loin des fantasmes, l’observation des
plupart des sourds sont bilingues français/ entendants maitrisant peu ou prou la LSF.
pratiques nous renseigne sur la réalité
LSF et les langues se trouvent donc en On observe aussi les manifestations d’une
de ce contact de langues si particulier
contact dans leurs pratiques langagières. adaptation constante des langues et des
puisque les langues, n’utilisant pas la
Il ne s’agit pas bien sûr d’envisager ce modalités. Le parler est alors influencé par
même modalité, peuvent se superposer.
bilinguisme comme la maitrise parfaite la langue des interlocuteurs vers laquelle
Un ensemble de pratiques langagières
des deux langues, mais de considérer que le locuteur converge très fortement. Il
de huit jeunes adultes sourds bilingues
ces langues sont utilisées par les Sourds s’agit d’un profil bimodal, puisque les
âgés de 19 à 21 ans a pu être observé
dans leur vie quotidienne pour des besoins deux modalités y sont utilisées, dans
récemment (Millet, Estève & Guigas,
différenciés. Ce contact est une nécessité leur dimension linguistique, de manière
2008). Les analyses ont permis de mettre
communicative pour une majorité de différenciée – les superpositions de
en lumière différents phénomènes liés aux
sourds : de ce contact nécessaire, la LSF langues y étant très rares. Ainsi, loin
dynamiques des répertoires langagiers
porte d’ailleurs trace. des représentations et des fantasmes
bilingues et bimodaux (vocal et gestuel)
cloisonnant les langues et assignant des
des locuteurs. Tout d’abord, on peut
identités monolingues aux locuteurs,
LSF et traces des contacts de langues noter que ces pratiques prennent place
le contact de langues, dans le cas de la
le long d’un continuum allant d’énoncés
surdité aussi, reconfigure les parlers selon

.
La LSF fait souvent peur aux parents monolingues en français à des énoncés
les rencontres sociales et les sensibilités
entendants d’enfants sourds, qui, dès lors, monolingues en LSF, en passant par tout
individuelles
choisissent la méthode « oraliste ». Cette un ensemble de « pratiques médianes »
peur est alimentée par le fantasme du formant un « pôle bilingue ». Certains de
ghetto, par la représentation d’une langue ces énoncés bilingues ont la LSF comme
fermée sur elle-même et enfermante. langue support – le français n’étant
Or, cette langue, parce qu’elle est parlée présent que ponctuellement par des
par des locuteurs qui sont également en labialisations ou des vocalisations2 –,
contact avec le français, emprunte certains tandis que d’autres s’articulent sur le
éléments au français. En marge de la LSF, français qui se voit émaillé de signes
il existe d’ailleurs un alphabet manuel – la de la LSF. Les deux langues peuvent
dactylologie – qui permet des ponts entre nous dire la même chose et, en ce cas,
les deux langues. Ainsi, certains signes de l’énoncé est composé de deux messages
la LSF, tout en conservant leur iconicité linguistiques identiques, mais souvent les
originelle, peuvent s’exécuter avec une deux messages se complètent, réalisant
forme de main rappelant la première lettre un vouloir dire spécifiquement bilingue.
du mot français correspondant au signe
– tels [rêver] ou [imaginer] qui s’articulent 2 Contrairement aux vocalisations, les labialisations
consistent à produire les mouvements des lèvres cor-
1 L’« oralisme » exclut la LSF, tandis que le « bilin- respondant aux mots français, mais sans émission
guisme », au moins pour certains, exclurait le français sonore.
oral.
Parutions Latry Guy (dir.) 2009, La voix occitane :
Actes du VIIIe Congrès de l’Association
original des différentes communications
en français, roumain, espagnol, italien,
11

internationale d’études occitanes Bordeaux, anglais, polonais, allemand, danois,


Patrick Sauzet et François Pic (dirs) 12-17 octobre 2005, Presses universitaires de finnois, tchèque, néerlandais, bulgare ;
2009, Politique linguistique et enseignement Bordeaux, 2 tomes, 1 506 p. le deuxième en propose la traduction en
des « langues de France », L’Harmattan, Paris, Depuis l’an Mil, la langue d’oc, ou occitan, allemand, anglais et français (disponible
304 p. fait entendre en Europe une voix singulière, auprès de la DGLFLF ; la version française
C’est par l’enseignement que le français à travers une oralité à la richesse bien est téléchargeable sur : ww.dglf.culture.
s’est diffusé et l’école a été en France le connue, mais aussi à travers une tradition gouv.fr).
lieu le plus visible de l’exclusion des autres d’écriture qui va des Troubadours,
langues, notamment, mais pas seulement, inventeurs de la poésie lyrique moderne, Extramiana Claire (coord.) 2009,
des langues « régionales ». Qu’en est-il à Frédéric Mistral et, au XXe siècle, à Multilinguisme, compétitivité économique
de leur enseignement et quels en sont des auteurs aussi considérables que et cohésion sociale, Ministère de la Culture
les effets ? Parvient-il à faire acquérir Max Rouquette ou Bernard Manciet. et de la Communication, Délégation générale
ces langues aux élèves (breton, occitan, Réunis à Bordeaux à l’occasion du VIIIe à la langue française et aux langues de France,
basque, créoles…) et les cultures qu’elles congrès de l’Association internationale Paris, 60 p.
portent ? Aujourd’hui, les « langues de d’études occitanes (AIEO), chercheurs, Cette brochure reprend (parfois sous une
France » s’enseignent et les analyses enseignants, étudiants ou simples forme abrégée) certains articles publiés
développées dans ce volume allient l’étude amateurs venus des cinq continents ont sur le forum de discussion des États
concrète des situations et la réflexion de entendu une centaine de communications généraux du multilinguisme : http://www.
fond sur les enjeux de cet enseignement. portant sur la langue, la littérature et la contribution-multilinguisme.culture.gouv.
civilisation occitanes, tant médiévales fr, mis en place par la DGLFLF d’avril à
Renault-Lescure Odile & Goury que modernes et contemporaines, dans septembre 2008.
Laurence 2009, Langues de Guyane, IRD une approche renouvelée qui les replace,
Éditions, Paris, 192 p. au-delà du cadre étroitement français (on François-Salsano Dora 2009, Découvrir
En Guyane, département français parle occitan aussi au Val d’Aran et dans le plurilinguisme dès l’école maternelle,
d’Amérique, une trentaine de langues se plusieurs vallées du Piémont italien), dans L’Harmattan, Paris, 188 p.
côtoient. Parmi elles, plus d’une dizaine l’ensemble européen. Dans notre société actuelle un argumentaire
sont des « langues de France » : langues diversifié défend l’entrée des langues
amérindiennes, créoles et même une André Martinet 2008, Œuvres, tome 1 : étrangères à l’école maternelle en tant
langue asiatique. Qui les parle ? Où Science et linguistique, langues et double qu’apprentissage. Cet ouvrage développe
vivent leurs locuteurs ? Quelles sont leurs articulation, EME, Fernelmont (B), 376 p. une approche spécifique à l’école
histoires, leurs structures linguistiques Au moment de célébrer le centenaire de maternelle, prenant en considération le
les plus frappantes ? Dix spécialistes la naissance d’André Martinet, il a semblé développement du jeune enfant, proposant
tentent de répondre simplement à ces souhaitable de rassembler et de mettre à un parcours de découverte multilingue et
questions à l’aide de repères et d’outils la disposition du public le plus vaste une multiculturelle, en faveur de la diversité.
particulièrement clairs. Organisé comme collection de 16 volumes réunissant tous Les jeunes enfants peuvent alors entrer
un parcours de découverte, cet ouvrage les articles, comptes rendus, entretiens en contact avec plusieurs langues, sans
montre les singularités de ces langues et et préfaces d’un des plus remarquables être submergés, la perspective étant de
à l’aide de nombreuses photos et cartes linguistes français du XXe siècle. Le tome I construire des enfants « europhones »
inédites, leurs espaces communs. se distingue par le caractère fondateur de épanouis.
son contenu. Il manifeste le souci constant
Thierry Bulot (dir.) & Lorène Labridy de l’auteur de conférer à la linguistique Depecker Loïc 2009, Comprendre
(coll.) 2008, Sociolinguistique urbaine des le statut de science. Ainsi, ce recueil de Saussure d’après les manuscrits, coll. « Lire
zones créolophones, Cahiers de Linguistique 28 articles contribue à répondre à deux et comprendre », Armand Colin, 192 p.
34/2, EME, Cortil-Wodon (B), 169 p. questions essentielles : Qu’est-ce que la Le Cours de linguistique générale de
Les recherches en sociolinguistique linguistique ? Qu’est-ce qu’une langue ? Ferdinand de Saussure a été rédigé par
urbaine – et en particulier les recherches deux de ses disciples : Bailly et Sechehaye,
sur les corrélations entre langues et Présidence française du Conseil de pour l’essentiel d’après des notes
espace – se sont notablement déve- l’Union européenne 2009, États généraux d’étudiants, et publié après sa mort. De ce
loppées depuis une dizaine d’années. du multilinguisme, Paris, 2 volumes : 140 et Cours, Saussure lui-même n’en a pas écrit
Toutefois, elles n’ont encore jamais 272 p. une ligne. La découverte en 1996, des
porté spécifiquement sur les zones Le 26 septembre 2008 à la Sorbonne, manuscrits d’un « livre sur la linguistique
créolophones. Si l’on peut considérer que à l’occasion de la Journée européenne générale » et d’autres textes, publiés en
les créoles présentent un certain nombre des langues, la présidence de l’Union 2002 sous le titre Écrits de linguistique
de caractéristiques commune sur le plan européenne a invité près d’un millier générale, jette un jour nouveau sur la
linguistique, identitaire et fonctionnel, de personnes venues de l’espace pensée du refondateur des sciences du
ils n’ont pas encore été analysés sur économique européen à participer aux langage modernes. Ce petit livre invite le
le plan de l’urbanité, l’urbanisation, le États généraux du multilinguisme. Léonard lecteur à découvrir un nouveau Saussure
Orban, commissaire européen chargé du et veut contribuer à faire comprendre sa

.
confinement linguistique. L’objet de cette
livraison est d’ébaucher une analyse de la multilinguisme, y a présenté les mesures pensée dans toute sa cohérence et toute
situation des créoles en milieu urbain en prises par l’Union dans ce domaine. Ces sa portée
posant une question centrale : y a-t-il une deux volumes constituent les actes de
créolophonie urbaine ? cette journée. Le premier propose le texte
Références bibliographiques :
. .
p. 4 Billiez J.et al. 2003, Pratiques et représentations langagières de groupes de pairs en milieu urbain, rapport de recherche remis
à la DGLFLF, Université Grenoble 3. Dabène Louise & Billiez Jacqueline 1984, Recherche sur la situation sociolinguistique des

.
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.
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halshs-00419204/fr.

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Langues et cité
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de l’orthographe, proposées de l’observatoire : Pierre Encrevé Observatoire des pratiques linguistiques
par le Conseil supérieur Rédacteurs en chef : Olivier Baude, Jean Sibille Ministère de la Culture et de la Communication
de la langue française (1990), Coordination : Dominique Bard-Cavelier 6 rue des Pyramides, 75001 Paris
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