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Mots clés : Endommagement laser, couches minces, interaction laser matière, composants
optiques, mixtures, impulsion sub-picoseconde, impulsion femtoseconde.
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4
ABSTRACT
Laser fluence resistance of optical surfaces is a major challenge for the development of
high power and short duration pulse lasers. Studies on laser matter interactions show that the
damage initiation is the result of highly nonlinear excitation process such as photoionization,
impact ionization and electronic avalanche. In this PhD thesis we focused on the study of
the damage and the response of materials after this initiation and their dependence with laser
parameters (wavelength, pulse duration, repetition rate…), this in order to better understand
the complex mechanisms of damage, identify laws of relevant scales for applications, and
enable new optical design with higher laser resistance and lifetimes.
A multi parametric experimental testing setup was developed for studying laser resistance of
optical components. To collect new data on thin film materials damage dependences, which
have been less studied in the literature, different experimental studies have been conducted
on dielectrics, in coating or bulk form. The study of the dependency of damage with laser
wavelength reveals different ranges characterized by the electronic processes occurring
during the interaction. We have considered also the effect of multiple pulse irradiations,
with different wavelengths and on coatings realized by different technologies. All these
experimental results have been discussed with the help of a numerical simulation model we
have developed and presented in this thesis. We have considered also the damage metrology
and proposed an original method based on optical phase difference measurement for damage
characterization and study. We finished with some experiments on the time resolved
microscopy measurements and investigations of damage processes.
Keywords: Laser damage, optical thin films, laser-matter interaction, optical components,
mixtures, sub picosecond pulses, femtosecond pulses.
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REMERCIEMENTS
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8
À toi maman, partie trop tôt mais éternellement dans nos mémoires,
A ma fille Dadjié.
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« La science est une bénédiction pour qui la saisit et une malédiction pour qui la fuie. Mais
on ne doit jamais être orgueilleux de son propre savoir puisqu’il n’y a pas de limite dans la
science et que personne ne peut arriver à la perfection. Ecouter est la plus belle chose qui
existe »
Ptah-hotep
« L'homme n'est pas le maître de la terre, mais la terre est le maître de l'homme. »
Proverbe ivoirien
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Contenu
Introduction générale 15
Chapitre I. Interaction laser-matière en régime ultracourt et endommagement des
matériaux en couches minces 19
I.1. Introduction 19
I.2. Absorption en régime d’impulsions courtes dans un milieu diélectrique 20
I.2.1 Absorption linéaire et structure électronique 21
I.2.2 Phénomènes non-linéaires 24
I.2.3 Processus de relaxation 31
I.3. Processus de modification du matériau 34
I.3.1 Equation du taux de densité électronique 35
I.3.2 Le modèle de Drude-Lorentz 36
I.3.3 Température électronique et effets thermiques 38
I.3.4 Endommagement du matériau 40
I.4. Cas des couches minces optiques 42
I.5. Conclusion 45
Chapitre II. Simulation numérique du processus d’endommagement 47
II.1. Introduction 47
II.2. Le processus d’excitation électronique 47
II.2.1 Single Rate Equation 48
II.2.2 Multiple Rate Equation 53
II.3. Dynamique du processus d’excitation 54
II.4. Le seuil d’endommagement 60
Conclusion 64
Chapitre III. Dispositifs expérimentaux et métrologie de l’endommagement 65
III.1. Introduction 65
III.2. Métrologie de l’endommagement : Définitions et procédure de test 65
III.2.1 Définitions 65
III.2.2 Procédures de tests 66
III.3. Caractérisation de couches minces 67
III.4. Source laser et caractérisations 69
III.5. Développement d’un banc de tests multi-longueur d’onde et multi-tirs 72
III.5.1 Présentation du banc 72
III.5.2 Détection des dommages 74
III.5.3 Mesure de la fluence et calcul du seuil d’e do age e t 75
III.6. Conclusion 79
13
Chapitre IV. Etude multiparamétrique de la tenue au flux laser des matériaux en couches
minces 81
IV.1. Introduction 81
IV.2. Etude de l’influence de la longueur d’onde sur la tenue au flux de couches
minces 84
IV.2.1 Expériences et caractérisations 85
IV.2.2 Te ue au flu d’o des et o pa aiso à u od le SRE 87
IV.2.3 E te sio à d’aut es at iau et o pa aiso à u od le MRE 89
IV.2.4 A al se de la pa titio spatiale de l’ e gie a so e 93
IV.3. Etude de l’influence du nombre de tirs 94
IV.3.1 Oxyde de niobium Nb2O5 94
IV.3.2 O de d’haf iu HfO2 95
IV.3.3 Dioxyde de silicium (SiO2) 97
IV.3.4 Analyse comparative en multi tirs 99
IV.4. Etude de la tenue au flux des mixtures d’oxydes et de fluorures 102
IV.4.1 Caractérisations 103
IV.4.2 Résultats 104
IV.5. Analyse du dépôt d’énergie et corrélation aux morphologies de dommage 107
IV.5.1 A al se du d pôt d’ e gie da s u e ou he de HfO2 107
IV.5.2 Mo phologies d’e do age e t 110
IV.6. Conclusion 116
Chapitre V. Microscopie de phase quantitative et résolue en temps pour l’analyse des
processus d’endommagement 119
V.1. Introduction 119
V.2. Mesures de phase quantitatives appliquées aux problématiques d’endommagement
laser 119
V.2.1 Description et dispositif expérimental 121
V.2.2 Résultats expérimentaux 123
V.3. Microscopie résolue en temps 130
V.3.1 Configuration expérimentale 131
V.3.2 Mi os opie d’i te sit 133
V.3.3 Microscopie de phase 139
V.4. Conclusion 142
Conclusion générale 143
Annexes : articles publiées 157
14
INTRODUCTION GENERALE
15
publications sur le sujet ont montré que les processus d’endommagement sont liés à une
multitude de paramètres physiques de la matière et du faisceau laser. Plusieurs études
publiées concernent l’endommagement avec un laser à 800 nm et des paramètres tels que la
durée de l’impulsion laser [25], le nombre de tirs [26], la technologie de dépôt des couches
minces [27] et la composition chimique du matériau ont été étudiés [28, 29]. Il existe
beaucoup moins d’études à d’autres longueurs d’ondes. Les oxydes étant des matériaux de
prédilection pour la réalisation de couches minces, la plupart des études présentes dans la
bibliographie s’y sont intéressées. La connaissance des paramètres physiques de la matière
est une des clés de la compréhension des processus d’endommagement et l’utilisation sous
forme de couches minces est une barrière importante car les matériaux en question ne sont
ni parfaitement amorphes ni parfaitement cristallins et leurs propriétés sont mal connues et
dépendent des conditions de dépôt.
Les études sur l’influence des paramètres ou de leurs couplages sont incontournables pour
une meilleure compréhension des processus d’endommagement. L’objectif de toutes ces
études étant de comprendre ces processus et si possible ouvrir la voie à l’amélioration de la
tenue au flux des composants optiques. Dans cette optique l’utilisation des mixtures pour la
fabrication des couches minces est une solution particulièrement intéressante. Les mixtures
sont des matériaux « hybrides » formés à base de différents matériaux purs. Elles ont
l’avantage de permettre un ajustement de différents paramètres de la couche (indice de
réfraction, énergie de bande interdite, paramètres thermomécaniques de la couche…) à partir
du contrôle des proportions du mélange et des conditions de dépôt [30].
Lors de ce travail de thèse, nous nous sommes intéressés à l’étude des interactions laser-
matière à l’échelle des impulsions sub-picosecondes dans son ensemble. L’objectif étant
d’avoir de nouvelles données expérimentales sur l’influence de différents paramètres
(longueur d’onde et nombre de tirs notamment) sur la tenue au flux laser des composants
optiques. Nous nous sommes particulièrement intéressés aux monocouches mais aussi à
quelques matériaux massifs.
Le chapitre I sera consacré à la description des phénomènes d’interaction laser-matière en
général, basée sur les équations de Maxwell et les différents processus électroniques. De
cette description générale nous passerons au cas des mécanismes d’endommagement laser et
exposerons les théories développées à ce sujet.
Dans le chapitre II nous passerons à une application de ces théories à travers le modèle de
simulation numérique que nous avons développé. Ce modèle sera décrit et servira à une
étude préliminaire des processus en jeu. Nous présenterons l’intérêt d’un tel modèle, les
approximations et les limites.
Le chapitre III présentera le travail expérimental qui a été fait pour la mise en place d’un
dispositif expérimental de test de tenue au flux multiparamétrique. Nous passerons en revue
les définitions et normes, puis détaillerons le fonctionnement du dispositif expérimental et
les procédures que nous avons appliquées. Une description complète des sources laser sera
faite.
L’ensemble des résultats des études de tests multiparamétriques de tenue au flux laser
effectués sur le dispositif sera présenté dans le chapitre IV. Nous nous intéresserons à
l’influence de la longueur d’onde, du nombre de tirs, de la technique de dépôt des couches
minces et de la composition des mixtures, sur la tenue au flux laser de différentes couches
minces. Le modèle développé au chapitre II nous servira de fil conducteur pour
l’interprétation des différents résultats.
16
Enfin au chapitre V nous présenterons un ensemble de travaux qui concernent l’étude
quantitative de l’interaction laser-matière. Dans un premier temps nous décrirons une
méthode originale de mesure du seuil d’endommagement sur laquelle nous avons travaillé.
Cette méthode est la mesure quantitative de phase utilisée dans d’autres domaines de la
physique et que nous avons appliquée à l’étude des processus d’endommagement laser.
Ensuite nous présenterons le dispositif expérimental que nous avons développé pour
l’imagerie résolue en temps de l’endommagement laser. Ce dispositif nous permettra
d’étudier un peu plus en profondeur les différents processus en jeu au cours de l’interaction
laser-matière. La dernière partie de ce chapitre sera consacrée à l’utilisation conjointe de la
métrologie de l’endommagement par mesure de phase et de la mesure résolue en temps de
l’interaction laser-matière. Nous aborderons alors l’influence des processus sous un autre
angle.
17
18
Chapitre I. INTERACTION LASER-MATIERE EN REGIME
ULTRACOURT ET ENDOMMAGEMENT DES MATERIAUX
EN COUCHES MINCES
I.1. Introduction
Nous nous intéressons dans ce chapitre à l’interaction laser-matière en régime ultracourt
c'est-à-dire à l’étude de la réponse temporelle et spatiale d’un milieu soumis à un champ
électromagnétique impulsionnel de durée dite « ultracourte ». L’impulsion ultracourte est
définie ici comme toute impulsion dont la durée est petite devant la durée du processus de
transfert énergétique des électrons excités vers le réseau atomique qui est de l’ordre de
quelques picosecondes. A ces échelles temporelles les processus électroniques jouent un
rôle majeur dans l’interaction laser matière et ce sont eux qui vont nous intéresser
principalement. Nous allons voir que cette interaction peut être à faible ou à forte absorption
en fonction de l’énergie par unité de temps et de volume absorbée par le milieu.
L’absorption est dite faible si elle ne permet pas la modification de l’état microscopique de
la matière. Dans le cas contraire, l’énergie absorbée par la matière permet de modifier sa
structure électronique et peut ainsi causer une modification temporaire ou permanente de ses
propriétés optiques. Il peut y avoir alors endommagement de la matière. L’endommagement
est l’apparition d’une modification irréversible du matériau sous irradiation. Dans ce
chapitre nous décrivons les hypothèses et équations utilisées pour décrire la propagation et
l’interaction d’une impulsion laser sub-picoseconde dans un milieu diélectrique. Nous nous
focaliserons sur le mécanisme d’absorption dans ces milieux et la modification du matériau.
Puis nous finirons avec le cas particulier des couches minces optiques.
L’étude qui va être faite tout au long de ce chapitre sera basée sur le traitement classique et
semi-classique de l’électromagnétisme dans la matière. Les équations de base qui permettent
d’étudier l’interaction entre une onde électrique et la matière sont essentiellement les
équations de Maxwell et les équations constitutives de la matière non magnétique : � =
�. et = . . Le vecteur champ électrique E, le vecteur densité de courant �, et le
vecteur induction électrique D sont définis dans l’espace-temps �, . est la permittivité
diélectrique et σ la conductivité électrique du matériau; lorsqu’un matériau diélectrique est
soumis à une onde électromagnétique de fréquence , sa permittivité diélectrique est liée à
sa susceptibilité diélectrique � ou à son indice optique complexe ̃ par la relation :
ε ω = ε .( +� � =ε ̃ (1)
�
= + . (2)
Par la suite c’est cette expression généralisée de la permittivité que nous utiliserons et que
nous noterons . Pour étudier l’interaction entre un faisceau laser et la matière il est donc
nécessaire d’étudier l’influence de l’impulsion sur les propriétés électromagnétiques de la
matière. Cette influence dépendra de l’état initial de la matière elle-même et aussi des
caractéristiques de l’impulsion laser.
19
Le faisceau laser impulsionnel est caractérisé par ses données temporelles et spatiales. Ses
données temporelles sont essentiellement la durée d’une impulsion notée communément � et
sa fréquence de répétition . Dans le régime ultracourt tel que nous le définissons dans ce
manuscrit, la durée d’une telle impulsion est inférieure à la dizaine de picosecondes car le
temps de transfert énergétique dans la matière est de l’ordre de la dizaine de picosecondes
[31] comme nous le montrerons plus loin. La représentation de l’amplitude du champ sur
l’axe temporel définit un profil temporel [Figure I.1-1] qui peut être gaussien ou de type
sécante hyperbolique dans les cas les plus courants. La durée de l’impulsion � est
généralement assimilée à la largeur à mi-hauteur du profil d’intensité noté FWHM (Full
Width at Half Maximum).
(b)
Figure I.1-1 : (a) Comparaison des profils temporels d’intensité de types gaussien et sécante hyperbolique ayant la
même durée à mi-hauteur FWHM. (b) en haut vue de dessus d’un faisceau gaussien et en bas, profils normalisés
d’amplitude du champ électrique et d’intensité dans une direction.
Du point de vue spatial, la répartition de l’intensité du champ dans un plan (x, y) définit un
profil spatial qui est généralement gaussien mais d’autres configurations sont possibles. La
Figure I.1-1(b) montre les profils 2D et 1D d’un faisceau gaussien. On définit le rayon du
faisceau par sa demi-largeur à une hauteur de ⁄ du profil d’intensité. Nous reviendrons
sur la caractérisation de faisceaux laser avec plus de précisions dans le paragraphe §III.2.
I.2. Absorption en régime d’impulsions courtes dans
un milieu diélectrique
Nous avons distingué l’interaction laser-matière en deux catégories : une à faible absorption
qui n’induit pas de modification, et une autre à forte absorption qui induit un changement
des propriétés de la matière. L’interaction à faible absorption concerne l’étude de la
propagation d’une onde électromagnétique dans un matériau de propriétés optiques fixes. La
réponse du milieu soumis à un champ électromagnétique est traduite par le changement de
son vecteur polarisation [32, 33] :
�, = .∑� � [ �, ] (3)
20
de ces équations combiné avec l’équation ( 3 ) donne l’équation de propagation du champ
électrique suivante [32] :
�, + �, =− �, (4)
= � (5)
Où � représente le champ magnétique qui est lié au champ électrique par l’équation de
Maxwell-Faraday. La densité volumique d’énergie absorbée est donnée par le théorème de
Poynting dans un milieu, dont le vecteur densité de courant est noté �, par la formule [34] :
= −∇. − �. (6)
Son application pour une onde plane dans un milieu diélectrique sans charge et non
magnétique permet de calculer la densité d’énergie absorbée au point M :
′′
M = −∇. = . . ² M (7)
Dans le cas d’un matériau d’épaisseur e baignant dans l’air et représenté sur la Figure I.2-1,
on note les coefficients de réflexion, de transmission et d’absorption R, T et A entre deux
milieux notés (1) et (2). Les coefficients de réflexion et transmission relatifs à l’interface 1-2
Rint, Tint peuvent être calculés en utilisant les formules de Fresnel [34] :
β −
=
β +
.β (8)
=
{ β +
Avec
= cos en pola��sat�on TE
{ (9)
= cos en pola��sat�on TM
.
21
Épaisseur e
Einc
Milieu 1
Milieu 2
Etransm
Erefl
Figure I.2-1 Schéma. Le champ incident Einc (r,t) part du milieu 1 vers le milieu 2, une partie Erefl est réfléchie par le
dioptre 1-2, et une autre partie Etransm est transmise dans le milieu 2.
Pour faire le bilan énergétique, Qinc est l’énergie portée par Einc dans le milieu 1, Qrefl
l’energie portée par Erefl au dioptre 1-2 et Qtransm est l’énergie portée par Etransm dans le
milieu 2 à l’interface de sortie. On aura Qabs = Qinc-Qrefl-Qtransm. Si l’on s’intéresse à
l’énergie absorbée dans le milieu 2 pour une propagation dans ce milieu sur une distance e,
on en déduit, en introduisant l’équation ( 7 ), la relation :
′′
ω
�= = . ( 10 )
� �
Puisque les processus électroniques vont jouer un rôle majeur il nous parait utile de
rappeler ce qu’est la structure électronique d’un matériau et de décrire brièvement la
dynamique des processus électroniques.
Les différents états possibles des électrons dans un cristal sont obtenus à partir de la
résolution de l’équation de Schrödinger en présence du potentiel cristallin périodique. Les
solutions de l’équation de Schrödinger sont des fonctions de Bloch telles qu’il existe un
vecteur k permettant d’écrire [33] :
� � = � � . exp �. � ( 11 )
22
Figure I.2-2 Exemple de structure électronique (1) et représentation simplifiée (2). [35]
23
Figure I.2-3 Dynamique des processus électroniques (1) Absorption (2) Relaxation intra-bandes (3) Relaxation
inter-bandes
La bande de conduction étant formée de plusieurs bandes, l’électron peut donc monter dans
n’importe lequel des états disponibles. Cette situation étant instable, il perdra de l’énergie
par des processus de relaxations qui se produisent par collisions avec d’autres électrons ou
les phonons [36]. L’électron revient dans l’état libre le plus inférieur de la bande de
conduction (relaxations intra-bandes ou thermalisation), sinon il revient finalement dans la
bande de valence dans son état initial (relaxation inter-bandes). [Figure I.2-3]
La polarisation induite peut être réécrite en une somme de parties linéaire (ordre 1) et non-
linéaire et est introduite dans l’équation de propagation ( 4 ). On obtient la formule
suivante :
�, �
�, + [ �, + ]=− �,
ε
≥ ( 12 )
∂
=− ∑� � [ �, ]
c ∂t
24
phase, l’auto-focalisation ou la génération de solitons. Pour plus d’information sur les
phénomènes optiques non linéaires, le lecteur pourra consulter la référence [37].
Un phénomène important pour les problématiques d’endommagement dans les diélectriques
est l’auto-focalisation. Elle est due à la création d’un indice non-linéaire dépendant de
l’intensité de l’onde et qui crée un gradient d’indice local avec comme conséquence la
focalisation de l’onde. En considérant la formulation de l’équation ( 1 ) nous pouvons
exprimer l’expression de l’indice non-linéaire, en utilisant la formulation de la susceptibilité
d’ordre 3, sous la forme :
NL | |
= + = + + ( 13 )
≈ + . ( 14 )
= | | ( 15 )
.
= ( 16 )
.
� ,
= , . ( 17 )
Par ailleurs lorsque la puissance du faisceau est trop élevée, les phénomènes électroniques
peuvent créer un plasma d’électrons dont la densité électronique peut conduire à l’effet
inverse et donc à la défocalisation du faisceau. Dans certaines conditions, l’auto focalisation
et le plasma peuvent se compenser et conduire à la formation d’endommagements
particuliers appelés filaments [39].
L’interaction laser-matière étant régie par les mouvements des électrons entre les différents
états électroniques, les processus de base sont : l’absorption qui fait passer un électron de la
bande de valence vers la bande de conduction et les relaxations intra bande et inter bande
qui permettent à l’électron de retrouver un potentiel plus stable dans la structure
électronique. Cependant, lorsque les densités d’énergie sont élevées, d’autres processus
d’absorption peuvent intervenir. On distingue deux types de processus : la photoionisation
non-linéaire et l’ionisation par impact.
25
a. Photoionisation non-linéaire
La photoionisation non-linéaire est un processus qui permet à un électron de passer de la
bande de valence à la bande de conduction par un chemin autre que l’absorption d’un
photon unique. Selon les propriétés du champ incident et les propriétés du matériau deux
types de photoionisation sont distinguées : l’ionisation multiphotonique (MPI multi photon
ionisation) et l’ionisation par l’effet tunnel [Figure I.2-4]. Le processus de photoionisation a
été étudié par le russe Keldysh qui en proposa une théorie unique pour évaluer les
probabilités des deux types de photoionisation en 1965 [40]. La limite entre les deux types
de photoionisation est définie selon cette théorie par le paramètre de Keldysh qui tient
compte des paramètres de la matière et du champ électrique. Les phénomènes physiques à
l’origine de ces deux types de photoionisation sont très différents.
Figure I.2-4 Diagramme de potentiels atomiques illustrant les différents processus d'excitation non-linéaire pour
différentes valeurs du paramètre de Keldysh. L’inclinaison du potentiel est due au champ électrique externe dans la
direction indiquée, causé par la lumière incidente [41]
L’effet tunnel apparait lorsque le champ électrique a un potentiel assez élevé pour abaisser
la barrière de potentiel de Coulomb qui lie un électron à son atome parent. Comme le
montre la Figure I.2-4, en supprimant la barrière de Coulomb le champ électrique modifie
temporairement la structure électronique de l’atome et permet à l’électron de se libérer de sa
liaison avec l’atome et de se retrouver dans la bande de conduction. L’effet tunnel sur un
atome isolé (cas des gaz) est caractérisé par la pulsation de l’électron qui passe la barrière et
qui est notée [40, 42] :
= √ ( 18 )
̌
= ( 19 )
26
multiphotonique d’un électron d’absorber un nombre k de photons est le produit du
coefficient d’absorption multiphotonique � par l’intensité I du laser à la puissance k :
�( =� . ( 20 )
Pour un matériau dont la largeur de la bande interdite est notée Eg, le nombre de photons
nécessaires pour réaliser une ionisation multiphotonique est le plus petit entier naturel pour
lequel ℏ ≥ où ℏ est la constante réduite de Planck et la pulsation de champ
électrique. L’ionisation multiphotonique est caractérisée par un champ électrique faible dont
la fréquence est élevée par rapport à la fréquence tunnel :
Dans un milieu diélectrique, le potentiel d’ionisation lors de l’effet tunnel prend en compte
la structure électronique et la création d’un trou lorsque l’électron passe dans la bande de
conduction. En considérant que le niveau d’énergie de l’état final de l’électron est la somme
des énergies de l’électron et du trou [40], la fréquence de l’effet tunnel est modifiée et
Keldysh établit le paramètre tel que :
∗
= .√ ( 21 )
∗
est la masse effective de l’électron. L’introduction de la notion de masse effective
permet de prendre en compte la perturbation énergétique de l’environnement de l’électron.
Nous reviendront sur cette notion un peu plus loin.
Les valeurs des probabilités de photoionisation sont établies selon la valeur du paramètre de
Keldysh et on a :
Pour < , où le champ électrique est fort et la longueur d’onde du laser est
grande devant la longueur d’onde tunnel ( ), la photoionisation a essentiellement
lieu par effet tunnel et sa probabilité est donnée par la relation :
ℏ �
�( = ( ) ) exp {−
� ℏ ℏ ℏ
( 22 )
× − }
Pour > , où le champ électrique est faible et la longueur d’onde du laser est
petite devant la longueur d’onde tunnel ( ), la photoionisation a essentiellement lieu
par multiphotoionisation et on a :
�( = Φ [( ] + [− ) ]
� ℏ ℏ ℏ
27
] + [
ℏ�0
× exp { ] + [. − } ( 23 )
ℏ
Avec
= + ; Φ = ∫ exp − ( 24 )
exp
� ≈ ; = ( ) ( 25 )
� ℏ ( ℏ
(√ − (√
�( = ( ) , exp −�. ] + [ ( 26 )
� ℏ√ (√ξ
Avec
,
∞
� (√� − (√�
=√ ∑ {exp − �. .Φ √ + } ( 27 )
(√ =
(√
= ; = ( 28 )
+ +
�
= (√ ; =] + [− ; = ( 29 )
�ℏ √ (√ (√
� �
=∫ � ; =∫ √ − s�n � � ( 30 )
√ − s�n �
28
numériques de résolution d’équations de propagation du champ électrique ont vu le jour. Un
résumé de ces différents modèles a été fait dans l’article de Bourgeade et al. [47] et un
modèle basé sur la résolution des équations de Maxwell en régime de photoionisation y est
aussi présenté.
Figure I.2-5 (1) Absorption par inverse Bremsstrahlung (2) Ionisation par impact
Cet électron dans un état élevé de la bande de conduction, en perdant de l’énergie pour
descendre dans un état moins énergétique ionise par impact un atome, provoquant le passage
d’un autre électron de la bande de valence vers la bande de conduction et le processus
recommence pour les deux électrons qui peuvent ioniser deux autres atomes par impact, et
ainsi de suite. L’ionisation par impact requiert quelques électrons libres dits « germes »
présents dans la bande de conduction pour enclencher le phénomène d’avalanche. Le taux
d’électrons créés par avalanche peut être écrit sous la forme [48] :
� = × ( 31 )
Où est le coefficient d’ionisation par impact, le champ électrique incident et N(t) est la
densité totale d’électrons dans la bande de conduction. Différentes théories ont été
développées pour formuler le calcul du coefficient d’ionisation par impact.
Celui basé [49] sur le modèle de Keldysh est dit classique car il se base sur l’étude
du mouvement des électrons dans le système de gaz de particules :
−
= �( ) ( 32 )
29
+
= ≈ , ( 33 )
+
= ( 34 )
� √ ( )
� ( 36 )
�= ; � =
+ � √
Un troisième modèle est celui proposé par Thornber. Il est basé sur une dépendance
du coefficient d’ionisation avec le champ électrique du laser et suppose une distribution
d’énergie non-uniforme des électrons dans la bande de conduction [51] :
� �
= exp [− ] ; � = ( 37 )
( + )+ �
ℎ
Avec la vitesse de dérive des électrons, � , ℎ et � les champs seuils pour que les
porteurs dépassent les effets de décélération liés à la diffusion d’ionisation, à la diffusion par
les phonons optiques et à la diffusion thermique respectivement. est la valeur du champ
électrique incident. Ce modèle a été utilisé par Du et al. pour expliquer la variation du seuil
d’endommagement avec la durée d’impulsion[52].
Précisons qu’il existe bien sûr d’autres modèles de description du taux d’ionisation par
impact que nous n’aborderons pas ici.
30
I.2.3 Processus de relaxation
L’état final d’un électron est un état d’équilibre qui peut être stable ou instable. Il est dans
un état d’équilibre s’il occupe le plus bas niveau libre dans la structure. Lors de l’ionisation
d’un atome par absorption linéaire ou non-linéaire, l’électron se retrouve dans un état
nouveau dans la bande de conduction. Ce nouvel état est instable. Dans le cas où ce niveau
n’est pas un état d’équilibre, l’électron perd de l’énergie afin de descendre vers le niveau
d’équilibre le plus proche ; d’où le terme de « processus de relaxation ».
Figure I.2-6 Processus de thermalisation (1) Distribution des porteurs (2) Processus électron-électron (3) Processus
électron-phonon
Les électrons excités ont une énergie cinétique que l’on exprime par une température
électronique Te et la constante de Boltzmann KB : = . La probabilité d’occupation
des niveaux d’énergie est régie par la statistique de Fermi-Dirac avec Te<TF ; TF étant la
température de Fermi. A l’équilibre, cette distribution suit la loi :
= � − � ( 38 )
+ �
31
Figure I.2-7 Mesures de spectres de la densité électronique par Fann et al. [53] à différents temps après un tir laser
(674nm, 180fs) de fluence 300µJ/cm² sur un échantillon d’or. La courbe en tiret représente un ajustement par une
distribution de Fermi-Dirac et la température électronique d’ajustement est notée sur chaque courbe.
L’excitation des électrons a donné lieu à l’occupation de niveaux d’énergie qui étaient
vides jusqu’alors. La présence d’électrons dans ces niveaux d’énergie crée un potentiel
32
perturbateur sur la structure électronique à l’équilibre. On modélise l’action de cette
perturbation en étudiant le cas simple de la perturbation d’une bande d’énergie. La
résolution de l’équation de Schrödinger pour une bande de niveau n=0 dans la bande de
conduction permet d’établir l’énergie de ce niveau sous la forme [58] :
ℏ
= = + ( 41 )
Avec la masse de l’électron dans le vide. Si on considère la présence d’un potentiel Ep,
l’expression de l’énergie de ce niveau devient :
ℏ ℏ
= = + + = + ∗
( 42 )
∗
=
( 43 )
+
Dans le cas de collisions électrons-phonons, l'énergie est libérée du gaz d’électron vers les
phonons afin de permettre aux électrons de trouver un état plus stable dans la structure
électronique. Les électrons peuvent passer de leur niveau excité dans la bande de conduction
à un autre niveau dans la bande de conduction : dans ce cas on parle de relaxation intra-
bande [Figure I.2-6]. Mais lorsque les conditions le permettent, les électrons reprennent un
état dans la bande de valence : relaxation inter-bandes. Dans les deux cas, les électrons
perdent de l’énergie et de la quantité de mouvement par émission ou absorption d’un
phonon. La population d’électrons libres dans la bande de conduction est donc modifiée, il y
a transfert d’énergie vers la matière (variation de température) et la distribution en énergie
des électrons dans la bande de conduction est modifiée. Il y a donc un effet indirect sur la
masse effective de l’électron [56] et sur la permittivité diélectrique du matériau. En
négligeant les effets autres que l’échange d’énergie électrons-phonons (variation de la
température, effet du champ électrique…) et en utilisant les résultats de Landau [59],
Kaganov [60], Allen [61], II’insky et Keldysh [62] proposent de calculer le temps d’échange
d’énergie électron-phonons en première approximation par la formule :
−
� − ℎ = =[ ] ( 44 )
− ℎ ℏ
33
On remarque que dans le cas d’une interaction avec un laser femtoseconde, l’énergie des
électrons est transférée aux phonons dans un temps caractéristique supérieur à la durée de
l’impulsion. D’où la définition des interactions en régime ultracourt que nous avons posée
en introduction.
Il existe un cas particulier d’interaction électron-phonon qui n’apparait que dans certains
matériaux et qui peut avoir lieu en plus de celle décrite précédemment.
Il s’agit de la relaxation par recombinaison indirecte. Les électrons (ou trous) perdent leur
énergie en se « faisant piéger » dans un niveau d’énergie de la structure électronique. Il
arrive qu’il se crée des défauts dans le réseau cristallin suite à l’excitation initiale de
l’électron ou certains matériaux disposent de défauts naturels de par leur structure
cristallographique. Ces défauts créent des niveaux d’énergie supplémentaires dans la bande
interdite qui sont appelés « pièges » ou « traps » en anglais, car ils constituent des niveaux
où les électrons sont « auto-piégés ». L’Al2O3 présente des défauts connus sous le nom de
« centre F ». La présence de tels défauts a été montré aussi dans la silice [63]. La durée de
vie de ces défauts doit être prise en compte quand ils existent car ils font varier la population
de porteurs libres dans la bande de conduction. A titre d’exemple, Guizard et al. [64] ont
mesuré un temps de recombinaison de 150 fs dans la silice (SiO2), et dans d’alumine
(Al2O3) ils ont trouvé environ 100 ps.
ℎ− ℎ ≈ ℎ � ℎ− ℎ ℎ ∝ ( 45 )
ℏ
On remarque que la fréquence des collisions est proportionnelle à la température T L. Par
conséquent, la capacité calorifique CL de la matière sera fonction de TL. La température de
la matière étant liée à la température des électrons par les interactions électrons-phonons,
l’étude de la dissipation de l’énergie dans la matière ne peut donc pas être dissociée de la
température des électrons. Les interactions électrons-phonons ayant permis un transfert
d’énergie à la matière au niveau de la zone d’interaction, cette énergie va être transmise à
tout le réseau de phonons. La description de ce transfert peut être modélisée par le modèle à
deux températures que nous aborderons plus tard.
Nous pouvons évaluer la réaction des phonons à travers leur temps de « réaction »
� ℎ− ℎ = qui est à la température ambiante de quelques dizaines de femtosecondes
�ℎ−�ℎ
(39fs dans le Bismuth) [65].
I.3. Processus de modification du matériau
Comme nous l’avons vu, si nous ne considérons pas la présence d’effets optiques non-
linéaires, l’interaction laser-matière aux échelles temporelles sub-picoseconde peut être
34
décrite par l’absorption de l’énergie des photons par les atomes, l’ionisation et le transfert de
l’énergie puis les processus de relaxation. L’évolution de la densité d’électrons libres dans la
matière est donc un facteur clé dans la modélisation de l’interaction. Nous avons vu que
l’indice de la matière et sa fonction diélectrique dépendent de la structure électronique. Il en
découle que la connaissance de la dépendance de la fonction diélectrique avec la densité
électronique est nécessaire pour décrire précisément le processus. Dans ce paragraphe nous
allons exposer le modèle de génération d’électrons libres puis le processus de modification
de la matière à travers l’expression de l’indice complexe en fonction de la densité
électronique et enfin l’étude des effets énergétiques.
,
= � + � − � ( 46 )
Où est l’énergie cinétique des électrons dans la bande de conduction, � désigne le taux
d’électrons générés par photoionisation, � le taux d’électrons générés par effet
d’avalanche et � le taux d’électrons ayant perdu de l’énergie par relaxation. Pour tenir
compte des niveaux d’énergie des électrons dans la bande de conduction, le calcul des
différents taux d’ionisation et de relaxation doit prendre en compte la structure électronique.
Pour cela, il est nécessaire de faire un calcul complet de la fonction de distribution en
énergie des électrons. Cela revient à faire une approche quantique du problème, en utilisant
les principes de base décrits précédemment pour les différents processus. Cette approche,
très complexe d’un point de vue mathématique, est qualifiée de modèle cinétique complet
(Full Kinetic Equation). Ce modèle nécessite d’ajouter à l’équation du taux de densité
électronique celle décrivant la distribution d’énergie dans la bande de conduction [49, 66,
67]. Nous n’aborderons pas la description détaillée de cette méthode.
Une autre méthode, basée sur la discrétisation des niveaux d’énergie dans la bande de
conduction [Figure I.3-1] permet de faire une description relativement précise. Ce modèle
appelé « Multiple Rate Equation » (MRE), permet de calculer la densité électronique du
niveau de discrétisation k en considérant des échanges d’énergies avec les niveaux de
discrétisation (k-1) et (k+1) à l’intérieur de la bande de conduction.
Figure I.3-1 Discrétisation de la bande de conduction en j niveaux, � correspond à la densité d’électrons possédant
une énergie �� [68]
35
Dans ce modèle le taux d’ionisation par avalanche est calculé en prenant comme critère une
énergie critique des électrons au-delà de laquelle l’ionisation par impact se produit. Ceci
conduit à la résolution d’un système d’équations défini tel que [68, 69] :
= � + − ( 47 )
= − − − ( 48 )
= � + ( 49 )
La théorie de Drude-Lorenz est une théorie qui repose sur deux hypothèses principales : le
système d’électrons libres peut être décrit comme un gaz d’électrons, les mouvements sont
associés à des oscillations amorties de fréquence égale à celle du laser et de temps
caractéristique égal au temps de collision des électrons � (interaction électrons-électrons).
Le calcul de la polarisation induite par ces mouvements d’électrons soumis au champ
électrique E du laser, en association avec les équations ( 1 ) et ( 3 ) permet de calculer la
fonction diélectrique en fonction du nombre d’électrons N [70] :
, = − ∗
= [ñ , ] ( 50 )
+
�
En posant
=√ ∗
( 51 )
On a :
36
ñ , =√ − ( 52 )
+
�
× ∗
=( ) × ( 53 )
Figure I.3-2: Evolution de la partie réelle (n’) et de la partie imaginaire (n’’) de l’indice de réfraction complexe en
fonction de la densité électronique d’après l’équation ( 52 ). Le calcul est effectué pour trois valeurs du temps de
collision des électrons � , une durée d’impulsion de 500fs et une longueur d’onde de 1030nm.
37
I.3.3 Température électronique et effets thermiques
′ ′′ ′ ′′ ′ ′′
= (ñ = + = − + ( 54 )
′ ′′
= × , × , ×[ ] ( 55 )
Figure I.3-3: Variation de la densité d’énergie absorbée au cours de l’impulsion laser. En trait plein le calcul prend
en compte la variation de la densité électronique en fonction du temps et en tiret le calcul ne considère que la densité
électronique à la fin de l’interaction.
Ce calcul a été réalisé sur une couche de SiO2 d’épaisseur 500nm et une irradiation à une
longueur d’onde de 1030nm avec une durée d’impulsion de 500fs. Comme on pouvait s’y
attendre, le calcul ne prenant pas en compte les modifications au cours de l’interaction
surestime la densité d’énergie absorbée par la matière.
Comme tout échange d’énergie dans la matière, cette énergie absorbée va mettre en jeu les
électrons et les phonons. D’un point de vue énergétique, les électrons seront les premiers à
« chauffer », et les phénomènes de relaxation permettront à la matière de dissiper cette
énergie dans la matière environnante non-irradiée et à l’extérieur. Ce phénomène thermique
38
peut être modélisé en utilisant le modèle dit à « deux températures ». Ce modèle est basé sur
l’approximation de la séparation du système en deux sous-systèmes d’électrons et de
phonons en la justifiant par la grande différence entre les temps de couplage énergétiques
électron-électron et phonon-phonon [73]. Le problème est donc ramené à l’échange
d’énergie dans chaque sous-système et au couplage entre les deux. Cette théorie a été
développée par Ginzburg et al. et Kaganov et al. [60, 73], et peut être résumée par les
équations suivantes :
=− − +
{ ( 56 )
=− −
=� s t ( 57 )
�
≈ ( 58 )
En restant toujours dans le modèle de gaz d’électrons libres, la loi de Dulong et Petit peut
être appliquée. Ceci implique que la capacité convergera vers la valeur lorsque
augmente (à haute température électronique) [56]. Ces deux formules de la capacité
calorifique des électrons permettent d’estimer dans les conditions de l’approximation la
température des électrons à la fin d’une impulsion courte et avant le transfert de l’énergie
vers les phonons. Comme le montre la Figure I.3-4, l’énergie absorbée par la matière permet
dans un premier temps de chauffer les électrons, puis on remarque l’augmentation
progressive de la température de la matière.
39
Figure I.3-4: Variation des températures électroniques et de la matière par un calcul suivant le modèle à deux
températures sur une couche d’or. Les détails et paramètres du calcul sont dans l’article [76]
Le dépôt d’énergie conduit à des modifications au sein de la matière qui sont responsables
de l’endommagement. On appelle endommagement toute modification de la matière
détectable à l’œil nu ou avec un microscope [77]. On peut classer les dommages observés
lors de l’interaction laser-matière en différentes catégories :
Les changements d’indice dans la zone irradiée, qui apparaissent plutôt dans les
matériaux photosensibles ou des matériaux dans lesquels on note la présence d’excitons
dans la structure électronique.
La fracturation du matériau par effets thermomécaniques
Les modifications structurelles du matériau dues aux effets thermiques (changement
de phase, cristallisation,…).
L’enlèvement de matière, appelé « ablation », qui peut être partielle ou totale.
L’ablation peut avoir lieu par explosion électrostatique due à une variation rapide de la
température électronique au-delà d’un seuil [78-80], ou à un effet thermique dû à la
sublimation de la matière ou à une fusion suivie d’évaporation.
La nature d’un dommage peut donc être optique, thermique ou mécanique ; ce qui implique
la connaissance de paramètres thermodynamiques, cristallographiques ou mécaniques si l’on
veut modéliser avec précision l’endommagement. Mais quel que soit la nature du dommage,
il est causé par le dépôt d’énergie dans la matière.
Une vaste gamme de techniques a été développée afin de détecter le seuil à partir duquel le
matériau est irrémédiablement modifié, conduisant ainsi à différents critères
d’endommagement. La surface de l’échantillon peut être observée à l’aide d’un microscope
optique classique ou à contraste interférentiel [81]. Il est également possible de mesurer
l’émission plasma du volume focal, d’évaluer la géométrie du cratère d’ablation ou le
volume ablaté [82]. D’autres techniques ont été développées telles que la détection par
changement de la diffusion lumineuse, par mesure de déflection, par détection acoustique,
40
par spectroscopie ou par observation de la diffraction, réflexion et absorption de
l’échantillon [83].
Le dépôt d’énergie dans le matériau est un processus qui dépend à la fois des paramètres
physico-chimiques de la matière, de l’environnement et des paramètres du faisceau laser
d’irradiation.
Du fait des mécanismes physiques mis en jeu en régime femtoseconde il existe une
dépendance forte du seuil d’endommagement avec la largeur de bande interdite. Comme le
montre la Figure I.3-5, le seuil d’endommagement de films monocouches évolue
linéairement avec la largeur de bande interdite suivant l’équation [43] :
ℎ( ,� = ( + � ( 59 )
−
Avec =− , ± , . . − , = , ± , . −
. − . − et
= , ± , des paramètres indépendants de la classe du matériau et de la durée
d’impulsion. ℎ correspond ici à la fluence seuil interne, déterminée à partir du maximum
du champ électrique au sein de la couche. La dépendance du seuil vis-à-vis de la largeur de
bande interdite est extrêmement intéressante pour la conception de miroirs diélectriques,
puisqu’elle peut être utilisée facilement dans le processus de conception d’un composant
multicouches. Abromavicius et al., par exemple, sont parvenus à améliorer la tenue au flux
de leurs optiques d’un facteur 2 en ajustant la structure d’empilement, de telle manière que
la valeur maximale du champ électrique soit localisée au sein du matériau ayant la plus
grande largeur de bande interdite [84].
Un autre paramètre dont l’influence sur le seuil d’endommagement a été étudiée est la durée
d’impulsion. De nombreuses études ont été menées afin de comprendre le comportement de
la fluence seuil Fth en fonction de la durée d’impulsion � [31, 52, 82]. Malgré des résultats
qui s’avèrent parfois contradictoires deux régimes temporels distincts peuvent être
identifiés. Pour les durées supérieures à quelques picosecondes le seuil d’endommagement
est approximativement proportionnel à � / , caractéristique du phénomène de relaxation
thermique. Pour des durées inférieures à la picoseconde, on constate une déviation
41
significative du comportement du seuil d’endommagement, comme l’illustrent les résultats
obtenus par Stuart et al. représentés en Figure I.3-6.
Figure I.3-6 : Dépendance du seuil d’endommagement en fonction de la durée de l’impulsion pour la silice [31].
42
Figure I.4-1: Représentation schématique d’un empilement multicouche éclairé par une onde plane (flèche rouge)
=√ − = √ − ( 61 )
⃗⃗⃗� ( + ℎ = ⃗⃗⃗
,ℎ . � (
⃗⃗⃗� ( = ⃗⃗⃗⃗⃗⃗⃗⃗
�+ ( ( 63 )
Tel que
43
−�ℎ
,ℎ =| �ℎ
| et =| | ( 64 )
Avec
+ + + − + +
= et = ( 65 )
= en TE ; = en TM ( 66 )
⃗⃗⃗⃗ = . ⃗⃗⃗⃗⃗⃗⃗⃗
�+ ( avec = … ( 67 )
= et = ( 68 )
∗ ∗
= . et = . ( 69 )
( , =
|⃗⃗⃗� | ( 70 )
=[ ]
{ |⃗⃗⃗⃗⃗+ |
44
Figure I.4-2: Profil du champ stationnaire dans une couche de Nb2O5 d’épaisseur 500nm pour différentes longueurs
d’onde. Les maximums des coefficients de correction sont mis en évidence.
La Figure I.4-2 illustre l’influence des effets interférentiels dans une couche de Nb2O5
d’épaisseur 500nm sur l’interaction laser-matière. Cette figure présente la variation du
coefficient de correction pour une irradiation incidente d’amplitude égale à l’unité. On
remarque que le profil n’est pas le même en fonction de la longueur d’onde et la valeur de
l’intensité lumineuse responsable de l’interaction laser-matière n’est pas la même en tout
point de la couche. On note aussi la présence de maximums qui caractérisent l’intensité
maximale « vue » par la matière. Le coefficient de correction dans le cas d’une irradiation à
1030nm est de 0,66 dans cette couche de Nb2O5, pour une irradiation à 515nm on environ
0,45 et à 343nm il est de 0,4 environ.
I.5. Conclusion
Dans ce premier chapitre nous avons abordé dans un cadre général l’interaction laser-
matière aux échelles temporelles sub-picoseconde puis développé les processus de
modification de la matière qui peuvent conduire à l’endommagement de la matière.
L’interaction laser-matière est à prime abord un phénomène d’échange d’énergie. L’énergie
absorbée peut entrainer des phénomènes non-linéaires optiques et électroniques. Comme
phénomènes optiques non-linéaires on peut citer l’auto-focalisation, la génération de
solitons ou la génération d’harmoniques. Ces phénomènes apparaissent lorsque la
susceptibilité du matériau possède une telle propriété de non-linéarité optique. Dans le cas
de l’auto-focalisation, la puissance du laser incident doit être supérieure à une puissance
critique. Les phénomènes non-linéaires électroniques sont caractérisés par une ionisation des
atomes sous différents processus et la création d’électrons « libres ». La variation de la
densité électronique dans la bande de conduction conduit à la modification des propriétés
optiques de la matière. Les temps caractéristiques de ces processus d’interaction
électronique étant très courts, le taux d’absorption en énergie du matériau change au cours
de l’impulsion. L’énergie des électrons est ensuite échangée avec la matière par interactions
électron-phonon dans des temps d’interaction de quelques picosecondes.
Plusieurs modèles sont utilisés dans la littérature pour modéliser l’interaction laser-matière à
ces échelles temporelles. La plus complète, c’est-à-dire celle avec le minimum
d’approximations, est l’approche cinétique dite « Full Kinetic Equation » (FKE). Elle utilise
45
les distributions statistiques de Fermi-Dirac et de Bose-Einstein pour décrire les niveaux
d’énergie de la structure électronique et des phonons à faible température [49] et celle de
Maxwell pour les hautes températures électroniques. Les taux d’ionisation sont des
fonctions du temps et de l’énergie, ainsi que les paramètres comme la permittivité
diélectrique, les paramètres thermiques des électrons et les paramètres de couplage électron-
phonon qui dépendent de la densité d’état des électrons.
Une autre approche est celle considérant l’approximation du gaz d’électrons. Cette approche
est celle du « Multiple Rate Equation » (MRE) [68]. Cette approximation simplifie le calcul
de certains paramètres physiques en leur appliquant la théorie de Drude. Pour tenir compte
de la distribution énergétique des électrons dans la bande de conduction, celle-ci est
discrétisée en différentes bandes comme nous l’avons montré sur la Figure I.3-1. Les
interactions intra-bande sont donc prises en compte dans la modélisation. L’expression des
taux d’ionisation reste donc fonction du temps et des niveaux d’énergies discrétisées.
Une autre approche plus simple à modéliser est celle nommée « Single Rate Equation ». Elle
diffère du MRE par le fait que l’influence de la discrétisation de l’énergie est négligée. En
effet dans l’approche du SRE, on supposera que les interactions inter-bandes l’emportent sur
celles intra-bandes. L’avantage de ce modèle est qu’il est moins lourd à implémenter et
malgré les approximations il donne des résultats suffisamment corrects pour des
interprétations.
46
Chapitre II. SIMULATION NUMERIQUE DU
PROCESSUS D’ENDOMMAGEMENT
II.1. Introduction
Dans le premier chapitre nous avons énoncé le contexte théorique, discuté des différentes
approximations qui permettent de mettre en équation différents aspects de l’interaction
laser-matière aux échelles temporelles sub-picosecondes et présenté quelques approches
théoriques. Dans ce deuxième chapitre, nous allons nous intéresser à la simulation
numérique de l’endommagement dans les couches minces et présenter l’approche que nous
avons mise en œuvre au cours de la thèse. Modéliser les interactions laser-matière nécessite
une connaissance multi physique des phénomènes en jeu. En effet ce type d’interaction fait
appel à la fois à des notions de physique du solide, d’électromagnétisme et de mécanique,
comme nous avons pu le constater dans le chapitre précédent. Cette pluridisciplinarité est
source de complexité de la simulation numérique de l’endommagement. L’une des
difficultés est la connaissance des différents paramètres physiques ; certains sont bien
connus, d’autres indéterminés et dans certains cas d’autres suscitent débat au sein la
communauté scientifique. Il faut noter aussi que le cas des couches minces accentue cette
difficulté car certains paramètres connus pour le matériau massif ne le sont pas dans les
couches minces. Par ailleurs certains de ces paramètres servent de variable d’ajustement
simulation/expérience. Le processus d’endommagement commence tout d’abord par un
couplage de l’énergie du faisceau laser dans le matériau. Nous nous intéresserons donc dans
une première partie à la description numérique de ce processus d’excitation basée sur des
équations de taux. Puis dans un deuxième temps nous étudierons l’influence de différents
paramètres physiques dans le cadre des approximations faites, étudierons la dynamique du
processus d’excitation électronique au cours de l’interaction, puis nous essaierons d’évaluer
le seuil d’endommagement sur la base de différents critères résultant de la phase
d’excitation : densité d’électrons libres et énergie déposée.
II.2. Le processus d’excitation électronique
Compte tenu de l’ordre de grandeur des durées d’impulsion considérées dans ce travail,
nous avons montré que la simulation numérique du processus d’excitation électronique dans
une couche devrait prendre en compte la répartition des ondes stationnaires dans la couche.
Nous proposons donc d’utiliser une démarche adaptée : évaluer les processus d’excitation
électronique en prenant en compte la répartition spatiale du champ électrique dans la
structure multicouche et les matériaux composant le système multicouche. L’équation ( 70 )
donne la relation de répartition spatiale du champ électrique insérée dans l’équation
différentielle ( 46 ) qui permet d’estimer la densité électronique dans la bande de
conduction. L’équation ( 46 ) dépendant à la fois du temps et du niveau d’énergie des
électrons, un calcul complet nécessite la connaissance des niveaux d’énergie de la structure
électronique du matériau. Cette méthode complexe à mettre en œuvre ne sera pas abordée.
Ici nous présenterons en premier les résultats d’une simulation numérique selon la méthode
SRE, où l’hypothèse est que l’effet de la répartition énergétique de la structure électronique
sur le processus d’excitation est faible, ce qui permet de résoudre l’équation ( 46 )
uniquement en fonction du temps. Ensuite nous aborderons un modèle qui prend en compte
la distribution en énergie des électrons dans la bande de conduction à travers la méthode
MRE.
47
II.2.1 Single Rate Equation
B1 : 0,40298 - B2 : 0,40289 - B3 : = ∗
7,5 500nm 0,35428 - C1 : 4100,73826 - C2 : = , . −
3903,60912 - C3 : 15914,24583
Tableau II.2-1 : Valeur de différents paramètres physiques de la silice
A partir des équations ( 21 ) à ( 30 ) nous pouvons évaluer les taux de photoionisation par
effet tunnel et par multiphotoionisation selon le modèle de Keldysh pour différentes
fluences d’incidence et pour différentes longueurs d’onde.
Figure II.2-1: Taux de photoionisation dans une couche de SiO2 à 1030nm et une durée d’impulsion de 500fs :
comparaison des formulations d’approximation à la formulation complète.
48
y correspond. Sur la silice, les seuils mesurés dans nos conditions expérimentales sont de
autour de 5J/cm², et l’on peut remarquer que le paramètre de Keldysh autour de cette fluence
est proche de 1,5. La formule générale du modèle s’avère donc la seule adaptée, et sera la
formule utilisée dans la suite de ce manuscrit lorsque nous ferons référence à la théorie de
Keldysh. Sur la Figure II.2-1 on peut remarquer très clairement que pour < , la
photoionisation est essentiellement due à l’effet tunnel alors que pour > , c’est plutôt la
multiphotoionisation qui l’emporte sur l’effet tunnel. On observe que la
multiphotoionisation est caractérisée par des fluences élevées ou champs électriques dits
forts (cas > , ) et l’effet tunnel par des fluences faibles ou champs électriques dits
faibles ( < , ). Notons que le paramètre de Keldysh dépend de la masse effective des
électrons. Il apparait alors qu’un changement de valeur de la masse effective fera varier le
paramètre de Keldysh et ainsi fera prévaloir un phénomène de photoionisation sur l’autre. 4
paramètres sont donc à considérer dans l’analyse des processus de photoionisation en jeu : le
champ électrique, la longueur d’onde, la durée d’impulsion et la masse effective.
Pour une vision générale de la « compétition » des processus de photoionisation, la Figure
II.2-2 représente sur un graphe le taux d’ionisation par effet multiphotonique et le facteur de
Keldysh en fonction de la fluence et de la longueur d’onde dans l’approximation de la non-
variation de la masse effective en fonction du champ électrique incident.
Figure II.2-2: Variation du taux de photoionisation par effet multiphotonique dans la silice en fonction de la
longueur d’onde et de la fluence. Les lignes de contours représentent les valeurs du paramètre de Keldysh.
Cette courbe donne une vue d’ensemble de la variation du taux d’ionisation multiphotonique
lors de l’interaction laser-matière avant l’endommagement. De par sa définition nous savons
que l’ionisation multiphotonique est croissante avec la fluence incidente mais aussi avec
l’énergie des photons comme le confirme la Figure II.2-2. Lorsque cette carte est corrélée
avec les valeurs du paramètre de Keldysh, on remarque dans le cas de la silice que : d’une
part l’ionisation sera essentiellement de l’ionisation par effet multiphotonique pour des
longueurs d’onde dans l’UV, et d’autre part qu’elle sera au contraire essentiellement par
effet tunnel lorsqu’on sera dans l’infrarouge moyen avec des fluences supérieures à 2J/cm².
Sachant que le seuil de la silice est de l’ordre de 5J/cm², les phénomènes physiques qui
gouverneront le processus d’endommagement de la couche de silice dans l’infrarouge
moyen et dans le visible-UV ne sont donc pas les mêmes.
49
Comparons à présent le taux de photoionisation au taux d’ionisation par impact. Pour cela,
nous nous placerons dans l’approximation de double flux [25, 48, 50]. Dans cette
approximation, les énergies de photons doivent être suffisamment faibles par rapport à
l’énergie du band gap. Le taux d’ionisation par impact est donc évalué dans cette
approximation en utilisant les équations ( 34 ) à ( 36 ) qui supposent une dépendance
linéaire avec l’intensité laser et dont nous rappelons ici les expressions.
�
= avec = ( 71 )
� √ ( ) ( 72 )
�
�= ; � =
+ � √
Figure II.2-3: Variation du taux d’ionisation par impact en fonction de la longueur d’onde et de la fluence
50
dépendant de la densité électronique, les comparaisons sont faites pour les cas où la densité
électronique est égale à la densité critique (équation ( 53 )) et où la densité électronique lui
est inférieure, en occurrence 3 décades en dessous.
Figure II.2-4: Variation des taux d’ionisation par impact et par photoionisation en fonction de la fluence et de la
longueur d’onde pour deux configurations : (a) et (b) proche du seuil d’endommagement, soit N=Ncritique, (c) et (d)
avant le seuil d’endommagement, soit N=Ncritique×10 -3.
51
donné par le modèle d’approximation de double flux, équations ( 34 ) à ( 36 ). Dans le calcul
des taux d’ionisation, le temps de collision des électrons est donné par l’équation ( 39 ). Le
taux de relaxation électronique est supposé proportionnel à la densité électronique dans la
bande de conduction et inversement proportionnel au temps caractéristique du passage des
électrons d’un niveau excité dans la bande de conduction à un niveau relaxé (recombinaison
dans la bande de valence ou piégeage sur des défauts). Nous dénommerons ce temps
caractéristique noté �� le temps de relaxation des électrons :
,�
� ,� = ( 73 )
��
Figure II.2-5 : Répartitions de l’intensité du champ électrique et de la densité électronique dans l’épaisseur (500nm)
d’une couche de HfO2 et pour une impulsion de durée 500 fs, une fluence incidente de 4,5 J/cm², à une longueur
d’onde de 1030nm
52
II.2.2 Multiple Rate Equation
�
� = ̃ =
�
�= ∗
( 74 )
+ �
{ = ( +
Avec � la surface efficace de collision, � le temps moyen de collision des électrons dans la
∗
bande de conduction, = ² ²/ l’énergie moyenne d’oscillation des électrons
dans le champ électrique du laser de fréquence et I l’intensité. ̃ est la probabilité
d’ionisation par impact. L’ensemble des processus d’ionisation et de relaxation est décrit par
un ensemble d’équations différentielles qui donne la densité électronique dans les niveaux
d’énergie discrétisés de la bande de conduction :
= � − + ̃ + +
= −
⋯ ( 75 )
⋯
= − −
+
= − ̃ +
53
Où � est le taux de photoionisation qui est décrit par la théorie de Keldysh, est la
probabilité d’absorption intra-bande à un photon, est l’énergie du photon, (k+1) est le
��
nombre de niveaux d’énergies discrétisées tel que + =] + [ et l’absorption
linéaire. Dans le cas des longueurs d’onde UV le coefficient d’absorption linéaire de la
matière peut être important. Il est donc important dans cette gamme de longueur d’onde de
prendre en compte l’absorption à un photon induite à travers le terme que nous avons
introduit : / . La probabilité d’absorption intra-bande à un photon est estimée en
fonction de la longueur d’onde selon la formule suivante telle que décrite dans le modèle
original [68] :
�
= ( 76 )
ln √ −
On peut ainsi évaluer la densité électronique dans la bande de conduction, et à travers les
équations de changement des propriétés optiques de la matière nous pouvons aussi évaluer
l’énergie absorbée par la matière.
Figure II.2-6: Comparaison de la densité électronique calculée en fonction du temps selon des modèles de SRE et
MRE
Comme l’avait montré Rethfeld dans son article [68] on remarque que le modèle SRE
surestime la densité électronique dans la bande de conduction. Cette surestimation est
attribuée au taux d’ionisation par impact qui est surestimé dans le modèle SRE car ne
prenant pas en compte les différents niveaux énergétiques des électrons dans la bande de
conduction.
II.3. Dynamique du processus d’excitation
Dans les paragraphes §I.2 et §I.3 nous avions décrit les différentes modifications que
peut subir la matière. Les temps caractéristiques des interactions électrons-électrons peuvent
prendre des valeurs de l’ordre de quelques femtosecondes à la picoseconde en fonction du
matériau. En considérant une impulsion laser de quelques centaines de femtosecondes,
l’influence de ces interactions se retrouve dans les mêmes échelles de temps que la durée de
l’impulsion. Il est donc important de prendre en compte les modifications de la matière
54
durant l’interaction laser-matière. La variation de la densité électronique dans la bande de
conduction entraine la modification des paramètres optiques de la matière telle que nous
l’avons décrite à travers le modèle de Drude-Lorentz. Ce modèle permet d’évaluer les
modifications transitoires de l’indice optique complexe ̃ en fonction de la variation de la
densité électronique (confer §I.3.2) :
, = [̃ , ] = − ∗ ( 77 )
+
�
Dans ce modèle basé sur le mouvement des électrons dans la bande de conduction, le temps
de collision des électrons � est un des paramètres principaux à évaluer aux échelles de
temps sub-picosecondes. C’est le temps caractéristique des collisions électrons-électrons qui
permettent un échange d’énergie entre les électrons de haute énergie et ceux de basse
énergie. La modification du profil énergétique du système électronique modifie le potentiel
électronique et peut aussi avoir un impact sur la masse effective ∗ de l’électron. La masse
effective étant choisie comme paramètre d’ajustement de notre modèle, nous évaluons le
temps de collision des électrons par la formule (confer §I.2.3.1) :
−
ℏ
� = ( 78 )
2
Avec =√ ∗� la fréquence plasma. Le temps de collision des électrons dépend donc de
0
la densité électronique dans la bande de conduction. Pour une longueur d’onde de 1030nm
et N=Ncritique, on trouve dans le HfO2 � = , × − .
La variation de l’indice optique et de l’absorption optique avec la densité électronique va
impacter la propagation de l’impulsion et entraine dans le cas d’une couche mince une
modification du profil du champ électrique dans la couche. Ces variations du profil du
champ électrique impliquent à leur tour une variation de l’interaction laser-matière en
fonction de la position dans l’épaisseur de la couche et donc de la densité électronique, qui à
son tour modifie les propriétés optiques de la matière et produit une nouvelle distribution de
la densité électronique. On a donc un effet de rétroaction sur le processus d’ionisation.
Cette boucle de modifications est à prendre en compte dans la simulation numérique pour
une meilleure interprétation des phénomènes physiques en jeu. Le calcul de la densité
électronique à travers l’équation différentielle ( 46 ) est rebouclé dans le temps avec la
modification des propriétés optiques de la matière, notamment l’indice complexe qui est
donné à chaque instant en fonction de la densité électronique dans la bande de conduction
par l’équation ( 52 ) ; mais aussi la répartition spatiale du champ électrique stationnaire dans
la couche qui est donnée par l’équation ( 70 ) à travers le coefficient de correction sur
l’intensité incidente .
L’application de l’équation ( 7 ) nous permet d’évaluer la répartition temporelle et spatiale
de la densité d’énergie absorbée . On obtient alors un système d’équations dépendantes
les unes des autres en fonction du temps et de la variable spatiale z :
55
,
= �( , + �( , , , − � ( ,
, = . ( ,̃ ,
, . ( 79 )
̃ , =√ −
∗ +
�
{ , = .ℑ [( ̃ , ].(
56
Figure II.3-1: (a) Calcul de la densité électronique avec prise en compte des modifications de la matière pendant
l’interaction laser-matière (1030nm, 500fs). (b) Variation de l’indice complexe de la matière au cours de
l’interaction laser-matière
Figure II.3-2: Simulation numérique de la densité massique d’énergie absorbée au cours de l’interaction laser-
matière (1030nm, 500fs).
57
D’après l’équation ( 8 ) cette diminution de la partie réelle de l’indice complexe implique
une croissance du coefficient de réflexion de la couche et parallèlement l’augmentation de la
partie imaginaire entrainera une croissance du coefficient d’absorption. La réponse de la
matière est donc caractérisée par une augmentation de l’énergie absorbée favorisée par la
croissance du coefficient d’absorption mais limitée par la croissance du coefficient de
réflexion. Comme on peut l’observer sur la Figure II.3-2 la matière a absorbé de l’énergie
pendant le front descendant de l’impulsion.
Figure II.3-3 : Evolution des profils de (a) la densité électronique et de (b) la densité massique d’énergie absorbée
dans une couche de HfO2 d’épaisseur 500nm irradiée à 4,5 J/cm². (1030nm, 500fs)
58
montre l’évolution des profils spatiaux, de la densité électronique [Figure II.3-3(a)] et de
l’énergie absorbée [Figure II.3-3(b)]. Dans le cas d’étude présent où l’intensité incidente sur
la couche de HfO2 est inférieure au seuil d’endommagement, on remarque que la répartition
du champ électrique au cours de l’interaction est lentement modifiée par rapport à l’état
initial. La densité électronique et l’énergie absorbée varient elles aussi et on remarque trois
maxima : à l’interface air/couche, à l’intérieur de la couche et à l’interface couche/substrat.
Lorsque l’intensité incidente est élevée, les modifications sont plus abruptes, et la variation
des coefficients de réflexion, de transmission et d’absorption est plus nette comme on peut
l’observer sur la Figure II.3-4. On remarque qu’une grande partie de l’énergie est absorbée
dans la partie externe de la couche. Au cours de l’impulsion, on note la croissance du
coefficient d’absorption avec un maximum qui coïncide avec le maximum de l’impulsion
laser.
Figure II.3-4 : Evolution des profils de (a) la densité d’énergie absorbée et (b) des coefficients R, T et A dans une
couche de HfO2 d’épaisseur 500nm et irradiée à 8 J/cm² (1030nm, 500fs).
59
En conclusion, nous retenons que la simulation numérique de la densité électronique dans la
bande de conduction est un processus dynamique qui prend en compte les différentes
variations des propriétés physiques de la matière au cours du temps. Nous avons mis en
exergue les phénomènes d’interaction entre le faisceau laser et la matière aux échelles sub-
picosecondes et nous sommes intéressés uniquement aux processus électroniques de
photoionisation et relaxation en fonction du temps et de l’espace qui seront responsables du
dépôt d’énergie dans la couche.
II.4. Le seuil d’endommagement
Nous avons décrit l’endommagement laser-matière comme toute modification
permanente de la matière que l’on peut détecter à l’aide d’un microscope. Du point de vue
de la physique du solide, cette modification peut être issue d’un apport d’énergie à la
structure électronique ou d’un apport d’énergie à la matière par l’intermédiaire des phonons.
Dans le cadre de la simulation numérique de l’endommagement, il est nécessaire de
déterminer un critère d’endommagement par rapport à un ou plusieurs paramètres donnés. Il
est commun, dans la communauté scientifique de l’endommagement aux très courtes durées
d’impulsion, d’utiliser comme critère d’endommagement la densité électronique critique
définie par l’équation ( 53 ) et qui est la densité électronique pour laquelle la fréquence du
plasma d’électrons est égale à la fréquence du laser. Ce choix est justifié par le fait que
l’absorption du matériau est maximale à la fréquence plasma comme illustré sur la Figure
II.3-1. Quéré et al. ont réalisé des expériences [93] qui montrent que la densité électronique
critique varie avec la durée d’impulsion du laser incident. D’autres études expérimentales
réalisées récemment pour étudier la dynamique de la densité électronique pendant
l’interaction laser-matière [94] ont révélé une forte corrélation entre l’énergie absorbée et le
processus d’endommagement. Ces études proposent de lier l’endommagement à
l’absorption d’une quantité critique d’énergie absorbée. L’énergie absorbée apparait donc
être un paramètre qui pourrait définir un seuil d’endommagement. La définition du seuil
d’endommagement à travers l’énergie absorbée par le matériau fait d’ailleurs écho à l’un des
deux types d’ablation que nous avions définis : l’ablation par effet thermique. Dans le cas
d’une ablation par explosion électrostatique l’on ferait plutôt référence à l’énergie des
électrons quantifiée par la température électronique. Il apparait alors que l’on pourrait
définir différents critères d’endommagement dans le cadre de la simulation numérique, en
lien avec les paramètres suivants : la densité électronique critique, la température
électronique et l’énergie absorbée par le matériau.
Dans la détermination du seuil d’endommagement, la détermination du critère
d’endommagement constitue la pierre angulaire du problème. Concernant la densité
électronique, le caractère métallique (partie imaginaire de l’indice élevée) que confère au
matériau l’interaction avec le laser à la fréquence plasma est utilisé pour définir un critère
d’endommagement : il y a endommagement si la densité électronique dans la bande de
conduction est supérieure ou égale à la densité critique. De par la définition de
l’endommagement il est juste d’énoncer qu’il y a endommagement si l’énergie absorbée par
le matériau a conduit à une modification d’état localisée ou non. Selon la physique du
solide, les changements d’état qui peuvent avoir lieu sont la fusion et la sublimation. Nous
pouvons alors définir comme critère : il y a endommagement si l’énergie transférée aux
phonons est suffisante pour provoquer un changement d’état de moindre énergie, c’est-à-
dire la fusion. Le changement d’état peut être initié aussi par les électrons, avant le transfert
énergétique des électrons vers les phonons. Dans ce cas l’énergie des électrons dans la
bande de conduction doit être suffisante pour briser les liaisons chimiques présentes dans la
60
matière : il y a endommagement si l’énergie des électrons est supérieure à l’énergie de
liaison interatomique.
Prenons pour cas d’étude la couche de SiO2 d’épaisseur 500nm sur un substrat de suprasil.
Les paramètres thermodynamiques du SiO2 sont présentés dans le Tableau II.4-1. Il faut
noter qu’il s’agit de paramètres donnés pour le matériau massif, qui peuvent être différents
des valeurs que l’on pourrait mesurer sur le matériau en couche mince.
60,08 (g.mol-1) 2,65 (g.cm-3) 9,6×103 (J.mol-1) 44,46 (J.K.mol-1) 1722 (K) [96] ~621eV
[95] [95] [96] [96]
Tableau II.4-1 : Paramètres thermodynamiques du SiO2.
Pour que la simulation numérique soit la plus proche de l’expérience, il est nécessaire de
calibrer les paramètres d’ajustement que sont la masse effective et le temps de relaxation des
électrons. En se basant sur la mesure expérimentale faite sur la couche de SiO2 à 1030nm et
une durée d’impulsion de 500fs, nous allons simuler l’interaction laser-matière, pour
différentes valeurs de masse effective et de temps de relaxation, et calculer l’erreur relative
du seuil calculé avec le seuil mesuré. Ainsi nous pouvons trouver le couple de valeurs masse
effective ∗ et temps de relaxation �� qui permet de mieux simuler les interactions laser-
matière en jeu.
Figure II.4-1 : Courbe d’erreurs quadratiques en pourcentage entre le seuil mesuré et le seuil calculé pour
différentes valeurs des paramètres masse effective et temps de relaxation � � ; les valeurs des paramètres
d’ajustement sont affichées sur chaque point sous la forme ( � � || ) avec = ∗/
La Figure II.4-1 montre la courbe permettant l’ajustement des valeurs de la masse effective
et du temps de relaxation pour la couche de SiO2. L’erreur quadratique entre la fluence
mesurée expérimentalement et la fluence seuil calculée à partir du couple de valeurs �� /
∗
est tracée en fonction de la fluence incidente. Le calcul de la fluence seuil pour réaliser
cet ajustement a été fait en choisissant arbitrairement le critère d’endommagement sur
l’énergie absorbée. Le couple de valeurs choisi pour l’étude des interactions laser-matière
sera celui qui a la plus faible erreur quadratique. Les valeurs choisies pour la suite de l’étude
sur la couche de silice sont : ∗ = , et �� = − . Les paramètres d’ajustement
ayant été fixés, nous allons à présent étudier les différents critères d’endommagement que
nous avions énumérés. Dans un premier temps, regardons les variations de la densité
61
électronique et de l’énergie absorbée. La Figure II.4-2 présente la densité électronique et la
densité d’énergie absorbée en fonction de la fluence incidente sur la couche de SiO2.
Figure II.4-2 : Densité électronique et densité d’énergie absorbée pour différentes fluences incidentes sur la couche
de SiO2. La valeur des critères d’endommagement est représentée.
La variation de la densité électronique présente une très forte pente entre 5,3 J/cm² et
5,5J/cm². Cet intervalle de forte croissance correspond au passage de la couche d’un
comportement de type diélectrique à un comportement de type métallique avec une forte
absorption. On remarque d’ailleurs une corrélation de la variation de la densité d’énergie
absorbée avec celle de la densité électronique. Par contre il est à noter que la fluence à
laquelle la densité critique est atteinte (c’est-à-dire pour laquelle la fréquence plasma est
égale à la fréquence laser) est légèrement différente de la fluence à laquelle l’énergie
absorbée atteint l’énergie nécessaire à la fusion du matériau. Selon le critère
d’endommagement choisi, le seuil d’endommagement est de ~5,45 J/cm² si l’on se réfère à
l’énergie absorbée ou de ~5,3J/cm² si l’on se réfère à la densité électronique soit une
variation inférieure à 3%, ce qui est peu au regard de notre connaissance des paramètres
physiques de la couche. Le fait que la densité d’énergie dépende aussi des paramètres
thermodynamiques du matériau qui sont assez mal connus en couches mince entraine une
différence entre les deux seuils. Mais ce cas d’étude effectué sur une couche de silice nous
permet d’observer que les deux critères d’endommagement traduisent relativement les
mêmes phénomènes.
En considérant le critère sur la densité d’énergie absorbée, analysons la répartition de
l’énergie absorbée pour des fluences autour du seuil d’endommagement. Le seuil
d’endommagement calculé étant de 5,45 J/cm², nous avons représenté sur la Figure II.4-3 le
profil spatial de la densité d’énergie absorbée pour trois valeurs de fluence autour du seuil :
, , , et , / ². Le maximum de la densité d’énergie absorbée à la fluence de
5,3J/cm² (inférieur au seuil) est inférieur à la densité d’énergie nécessaire à la fusion du
matériau, il n’y a donc pas d’endommagement. A 5,4J/cm² la densité d’énergie totale
absorbée est légèrement inférieure à la densité d’énergie de fusion mais le profil spatial
présente des points où la densité d’énergie lui est supérieure : à 123nm de la surface à
l’intérieur de la couche et à l’interface couche-substrat.
62
Figure II.4-3 : Profil spatial dans la couche de la densité d’énergie absorbée pour différentes fluences incidentes.
L’endommagement serait donc initié à ces profondeurs, entre 5,3 et 5,4 J/cm². À 5,5J/cm²
l’énergie totale absorbée double et est essentiellement située dans les premiers 130nm.
Sachant que l’enlèvement de matière nécessite un apport d’énergie après fusion et qu’il y en
a suffisamment dans l’intervalle [0, 130nm] de la couche, on peut s’attendre donc à une
ablation légère de la couche à une profondeur d’environ 130nm.
Figure II.4-4 : Fluence incidente au seuil d’endommagement d’une couche de SiO2 d’épaisseur 500nm et à une
longueur d’onde de 1030nm en fonction de la durée d’impulsion. Pour comparaison, les mesures de Mero et al. [43]
et Lenzner et al. [82] sont représentées.
A présent appliquons ces deux critères à un cas d’étude. Nous allons nous intéresser à une
couche de SiO2 d’épaisseur 500nm, dont l’indice optique mesuré à 1030nm est de 1,467 et
l’énergie de bande interdite est de 7,5 eV. Les calculs de détermination du seuil
d’endommagement de cette couche ont été réalisés en utilisant les paramètres d’ajustement
�� = − et ∗ = , × . On note sur la Figure II.4-4 que les deux critères
d’évaluation permettent de retrouver des valeurs assez proches. De plus les valeurs calculées
63
ont des ordres de grandeur en adéquation avec les données expérimentales de Mero et al. et
Lenzner et al.
Conclusion
Dans ce chapitre nous nous sommes intéressés à la simulation numérique des processus
d’endommagement et du calcul du seuil d’endommagement. Nous avons montré que dans la
diversité des modèles de calcul, l’application du modèle simplifié de type « Single Rate
Equation » avec la prise en compte des modifications de la matière au cours de l’interaction
permet de donner des interprétations théoriques en accord avec l’expérience. Nous
utiliserons en première approche ce modèle de simulation pour interpréter les différents
résultats expérimentaux, et pour les cas plus complexes nous aurons recours au modèle
« Multiple Rate Equation » pour des analyses plus précises. Un point particulièrement
important du modèle numérique que nous avons souligné à travers des exemples est la
possibilité de décrire spatialement et temporellement le dépôt d'énergie dans un système
multicouche.
64
Chapitre III. DISPOSITIFS EXPERIMENTAUX ET
METROLOGIE DE L’ENDOMMAGEMENT
III.1. Introduction
Nous avons décrit dans les deux premiers chapitres l’interaction laser-matière d’un point de
vue théorique et simulation numérique. Nous avons mis en exergue le caractère multi-
physique des phénomènes en jeu. Il apparait que la mesure expérimentale du seuil
d’endommagement sera influencée par de nombreux paramètres : impulsion laser (durée,
profil, polarisation, etc…) mais aussi la procédure de test, les moyens de détection ou
l’environnement. De la qualité des caractérisations sur le faisceau laser et sur la couche
optique, dépendra la qualité et la précision des mesures de seuil d’endommagement ainsi
que les interprétations que nous pourrons en faire. Un problème que nous avons posé dans le
chapitre précèdent revient mais cette fois dans le contexte expérimental : le critère
d’endommagement. L’endommagement étant défini comme toute modification détectable,
sa mesure peut devenir très relative si elle n’est pas faite dans des normes précises ; et il est
clair que la définition du critère d’endommagement dépendra de la méthode de détection.
Dans ce chapitre nous allons décrire le banc de mesure qui a été réalisé pour la mesure de
seuil d’endommagement dans le régime femtoseconde et pour trois longueurs d’ondes
différentes. Dans un premier temps nous nous intéresserons à la métrologie de
l’endommagement avant de parler des techniques utilisées pour la caractérisation des
couches minces et la caractérisation des faisceaux lasers, puis nous décrirons le
fonctionnement du banc de mesure et les méthodes de caractérisation et de mesure adoptées
dans le cadre de ce travail.
III.2. Métrologie de l’endommagement : Définitions et
procédure de test
Le terme métrologie désigne ici les définitions des éléments de base ainsi que les procédures
qui permettront l’obtention de mesures précises et répétables. L’étude de la tenue au flux
laser des composants optiques requiert des procédures bien définies et adoptées par la
communauté scientifique. L’ensemble de ces définitions et procédures ont été standardisées
par la norme ISO 21254 [77, 97, 98].
III.2.1 Définitions
Il est important avant toute chose de définir les différents termes que nous allons utiliser
dans ce chapitre. L’endommagement laser est défini selon le standard ISO21254 comme
toute modification permanente induite par l’irradiation laser et pouvant être observée par
une technique de contrôle avec une sensibilité en rapport avec l’application prévue du
produit. La norme ISO 21254 fait la différence entre l’endommagement de surface et
l’endommagement volumique. L’endommagement est dit de surface lorsque la modification
est localisée à la face avant ou arrière du composant, et lorsqu’elle est située dans le volume
on parle d’endommagement volumique.
Le seuil d’endommagement est défini comme la « plus grande quantité de rayonnement
laser incident sur le composant optique pour laquelle la probabilité extrapolée
65
d’endommagement est nulle, où la quantité de rayonnement laser peut être exprimée en
densité d’énergie (fluence) ou densité de puissance ».
On définit aussi des termes tels que la surface effective qui est le rapport de l’énergie
d’impulsion à la densité surfacique d’énergie maximale de l’impulsion laser dans le plan de
test sur l’échantillon. Nous ne ferons ici pas la liste complète des définitions présentes dans
la norme ISO 21254 ; pour toute information complémentaire nous invitons le lecteur à
consulter la première partie de la norme ISO21254-1 :2011 [77].
Le principe général d’un test de tenue au flux laser consiste à irradier le matériau à
différentes fluences, à analyser les zones irradiées et conclure sur la présence ou non
d’endommagements. Dans le régime sub-picoseconde, l’approche la plus utilisée par la
communauté scientifique et que nous avons adoptée est une approche statistique. Elle
consiste à caractériser la tenue au flux par la probabilité d’endommagement en fonction de
la fluence incidente sur l’échantillon.
Figure III.2-1 : Principe d’une mesure statistique de tenue au flux laser : n sites sont testés pour chaque fluence (ici
n=10). La probabilité d’endommagement p du matériau est alors donnée par � = �/ avec k le nombre de sites
endommagés. Cette approche permet d’obtenir une courbe de probabilité d’endommagement du composant en
fonction de la fluence d’irradiation laser.
66
Ces procédures ont pour avantage de permettre une mesure du seuil d’endommagement avec
une grande précision, mais nécessitent une large quantité de points de mesure. La procédure
1on1 permet une mesure de la tenue au flux (TFL) dépendant uniquement des mécanismes
de base définis dans le premier chapitre en s’affranchissant de tout effet d’incubation ou de
mémoire. Par contre la procédure Son1 est celle qui permet de se rapprocher plus des
conditions réelles d’utilisation des composants optiques. On peut ainsi étudier le
comportement du composant suite à une longue utilisation et évaluer sa durée de vie.
En plus de ces approches statistiques, il existe une approche globale qui consiste à irradier
l’ensemble du composant afin de révéler tous les défauts présents. Dans le cas d’optiques de
grandes dimensions, il est plus compliqué d’éclairer toute la surface avec un seul faisceau.
La procédure dite « Raster Scan » permet de pallier à ce problème en proposant une
irradiation quasi uniforme de la surface du composant par recouvrement des tirs successifs
du faisceau laser. Une surface représentative du composant est balayée à fluence constante
par un faisceau laser. Les dommages initiés sont ensuite comptés et associés à la fluence
d’irradiation afin de représenter la densité de dommages en fonction de la fluence.
Lamaignère et al. ont proposé dans la référence [83] une méthode qui permet d’obtenir des
densités de dommages indépendantes de la forme, de la dimension et des fluctuations du
faisceau laser de test. La procédure Raster Scan a l’avantage de tenir compte de l’ensemble
des défauts des composants et en particulier de révéler des défauts présents en très faible
densité.
III.3. Caractérisation de couches minces
Intéressons-nous à présent aux caractérisations quantitatives et qualitatives qui peuvent être
faites sur les couches minces afin de connaitre leurs propriétés physiques (et chimiques)
pour une meilleure interprétation des résultats Il existe différentes méthodes de fabrication
et de caractérisation des couches minces optiques. Nous nous intéresserons uniquement à
celles qui ont été utilisés pour les différentes couches utilisées dans cette étude. Les
techniques utilisées pour la fabrication des couches utilisées ont été :
EBD (Electron Beam Deposition ou évaporation par canon à électrons) et IAD (Ion
Assisted Deposition ou EBD assisté par faisceau d’ions) : lors du dépôt de couche
mince par EBD le substrat est chauffé à une température entre 200°C et 250°C puis
le matériau à déposer est vaporisé à l’aide d’un faisceau d’électrons. Les couches
obtenues par cette méthode ont pour désavantage d’être poreuses, ce qui les rend
sensibles à l’environnement extérieur et rend leurs propriétés optiques peu stables.
Une variante de cette technologie est l’IAD qui permet d’améliorer la compacité de
la couche. Elle utilise un faisceau d’ions dirigé vers le substrat apportant ainsi une
énergie supplémentaire durant le dépôt du matériau. Les couches obtenues présentent
une microstructure extrêmement dense.
RLVIP (Reactive Low Voltage Ion Plating ou dépôt assisté par plasma) : le dépôt
assisté par plasma permet de rendre les couches minces très denses à l’aide d’un
plasma réparti dans toute la chambre de dépôt. Cette méthode présente l’avantage de
donner des couches qui sont moins sensibles aux conditions expérimentales.
IBS (Ion Beam Sputtering ou dépôt par pulvérisation ionique) et DIBS (Dual Ion
Beam Sputtering ou Pulvérisation ionique assistée par faisceau d’ions) : lors d’un
dépôt par IBS, le matériau à déposer est pulvérisé par un faisceau d’ions
énergétiques puis se dépose sur le substrat ; on obtient ainsi des couches denses.
Pour améliorer la compacité on peut faire un dépôt par DIBS qui consiste à utiliser
un deuxième faisceau d’ions dirigé vers le substrat apportant ainsi une énergie
67
supplémentaire durant le dépôt du matériau. Bien que les couches réalisées par DIBS
présentent l’avantage d’être insensible à l’environnement extérieur, leur forte
compacité entraîne la formation de contraintes mécaniques pouvant être pénalisantes
du point de vue de l’endommagement.
MS (Magnetron Sputtering ou pulvérisation magnétron) : cette méthode consiste en
l’utilisation d’une paire d’électrodes planaires. Le substrat est placé sur l’anode, et le
matériau à déposer est placé sur la cathode (cible). Les deux électrodes sont placées
dans la chambre de dépôt remplie d’un gaz inerte tel que l’argon (Ar) et sous basse
pression (~0,1 Torr). Dans un premier temps on applique une tension négative à la
cible, ce qui a pour but d’accélérer les ions Ar vers la cathode et provoquer ainsi le
bombardement de la surface de la cible par ces ions et entraîner une cascade de
collisions et l’éjection d’atomes puis la production d’électrons secondaires. Les
trajectoires des atomes éjectés étant aléatoires, une faible quantité d’entre eux
heurtent l’anode conduisant à la formation de la couche sur le substrat. Des champs
électriques et magnétiques forts sont appliqués pendant tout le processus afin
d’augmenter l’ionisation par collision du gaz neutre près de la cible.
Après le dépôt des couches, celles-ci sont caractérisées afin de déterminer leur indice de
réfraction complexe, l’épaisseur exacte et leur énergie de bande interdite optique. La
caractérisation est faite par la mesure des coefficients de réflexion et de transmission sur une
large gamme de longueurs d’onde de l’infrarouge (IR) à l’ultraviolet (UV), puis les
paramètres optiques sont déterminés par ajustement avec des modèles de dispersion.
Certains modèles permettent de déterminer tous les paramètres à la fois tandis que d’autres
ne permettent que la détermination de certains paramètres à partir des autres. Par exemple
l’indice optique et l’épaisseur peuvent être déterminés par ajustement paramétrique de la
formule de R et T en fonction de la longueur d’onde, établie analytiquement par une
méthode matricielle comme celle présentée au paragraphe §I.4 [34, 99]. Mais il est plus
commode d’utiliser des modèles de dispersion plus robustes mathématiquement surtout
quand il s’agit de multicouches. Les modèles classiques utilisés sont la relation de Kramers-
Kronig, le modèle de Forouhi-Bloomer, le modèle de Drude modifié ou le modèle de Tauc-
Lorentz. Pour plus d’information sur les modèles d’ajustement et la caractérisation des
couches minces nous invitons le lecteur à lire l’article de G. Lihong et al. [100] et la thèse de
Benoit Mangote [101]. Une étude menée au sein de l’Institut Fresnel a montré que le choix
du modèle dépend aussi du matériau à analyser [100]. Notons que la plupart des équipes de
recherche en couches minces ont développé leurs méthodes numériques d’ajustement basées
sur ces modèles principaux.
Les différentes couches minces utilisées dans cette étude ont été réalisées et caractérisées
par différents partenaires :
- L’équipe « Recherche en matériaux, composants et technologies de Couches Minces
Optiques » (RCMO) de l’Institut Fresnel, spécialisée dans les couches minces
optiques et le filtrage optique interférentiel.
- L’entreprise Cilas Marseille, experte dans les composants optiques et les traitements
pour l’espace, la défense ainsi que pour la science et l’industrie.
- Les groupes « Caractérisations » et « Laser Coatings » du Laser Zentrum Hannover
(LZH) en Allemagne, spécialisé dans le développement de sources laser et de leurs
applications.
Les spectres de transmission et de réflexion des couches présentés dans ce travail ont été
mesurés au sein de l’Institut Fresnel à l’aide d’un spectromètre de type Lambda 18
68
PerkinElmer® et au LZH à l’aide d’un PerkinElmer Lambda 900 ou un spectrophotomètre
DUV/VUV. L’indice optique complexe et l’épaisseur sont calculés par ajustement des
spectres à l’aide d’une méthode numérique propre à chaque groupe (RCMO ou LZH).
III.4. Source laser et caractérisations
Il est primordial de connaitre de manière précise les paramètres spatiaux et temporels de la
source laser pour une meilleure maîtrise du test de tenue au flux. Dans ce paragraphe nous
allons décrire les paramètres des différents faisceaux lasers utilisés et les moyens utilisés
pour les caractériser.
La source utilisée est un laser commercial femtoseconde Ytterbium (Amplitude Systèmes S-
Pulse HP, Pessac France) émettant dans le proche infrarouge et dont le spectre d’émission
est centré à 1030nm. A cette source un module de conversion avec des cristaux non-linéaires
a été ajouté pour générer le second et le troisième harmonique. Les caractéristiques
principales des différents faisceaux en sortie de ce système sont présentées dans le tableau
suivant :
Fréquence 1 kHz 100 kHz 1 kHz 100 kHz 1 kHz 100 kHz
Polarisation Linéaire
Tableau III.4-1 : Caractéristiques des différentes sources laser.
- Stabilité en énergie
Il est important dans l’évaluation de la précision des mesures de connaitre la stabilité en
énergie de chacun des faisceaux. La Figure III.4-1 montre la mesure de stabilité réalisée en
mesurant l’énergie de chaque faisceau sur 25000 impulsions consécutives à une cadence de
10 Hz. Nous mesurons un écart type relatif inférieur à 0,5% et une variation maximale
inférieure à 2% pour toutes les longueurs d’onde.
- Profil temporel
La durée de l’impulsion et le profil temporel sont déterminants dans le mécanisme et le seuil
d’endommagement d’un matériau. Il est donc indispensable de les connaitre avec précision.
Pour mesurer le profil temporel, nous avons utilisé un autocorrélateur (AVESTA ASF 70fs-
3ps). La Figure III.4-2(a) montre un exemple de courbe d’autocorrélation obtenue. Cet
autocorrélateur n’étant sensible que pour un faisceau à 1030nm, nous n’avons pas mesuré
les profils des faisceaux 515nm et 343nm. Selon les spécifications du fabriquant du système
de laser, la variation de la durée d’impulsion des faisceaux générés par le boitier de
conversion harmonique par rapport à la durée d’impulsion du faisceau IR est inférieure à
10%. Le profil temporel du laser est de type sécante hyperbolique carré, et la durée
d’impulsion � est la durée à mi-hauteur. � est liée à la durée caractéristique � du modèle de
type sécante hyperbolique = . sech /� par la relation � = , × � . La stabilité
de la durée de l’impulsion a été mesurée sur 1000 impulsions consécutives et à une cadence
de 10 Hz [Figure III.4-2(b)].
69
(a) (b)
(c)
Figure III.4-1 : Stabilité en énergie des trois sources, (a) 1030 nm (b) 515 nm et (c) 343 nm, à une fréquence de
répétition de 10 Hz
- Profil spatial
Le dernier paramètre du laser à connaitre est le profil spatial. Ce dernier dépend du
dispositif expérimental mis en œuvre pour la mesure de tenue au flux. Dans notre étude, le
laser est focalisé à l’aide d’une lentille sur l’échantillon à tester ; le profil spatial à mesurer
est donc celui du faisceau focalisé dans le plan de test. Ce profil est mesuré à l’aide d’une
caméra CCD 14 bits (Dataray WinCamD UCD-23). Le profil au point de focalisation (ou
waist) de la source IR est généralement de type gaussien comme présenté sur la Figure
III.4-3. Mais il faut noter que le passage dans les cristaux non-linéaires peut déformer
légèrement le profil initial de la ligne IR, ce qui conduit quelques fois à l’obtention de
profils spatiaux non-gaussiens sur les lignes à 515 nm et 343 nm. Le diamètre du faisceau
est le diamètre mesuré à une hauteur de 1/e² du maximum du profil. La Figure III.4-4
présente la caustique du faisceau à 1030nm focalisé à l’aide d’une lentille de 150 mm de
focale. On note à première vue que le faisceau est en réalité légèrement elliptique ; le facteur
M2 qui caractérise l’ellipticité d’un faisceau gaussien est de 1,4. La profondeur de champ est
d’environ 2 mm selon les caustiques. Ce qui implique que la tolérance de positionnement
(par rapport au waist) n’est pas critique car nous utilisons une platine micrométrique pour
positionner la lentille.
70
Figure III.4-2 : (a) Trace d’autocorrélation d’une impulsion de la source laser à 1030nm. (b) Stabilité de la durée
des impulsions sur un échantillon de 1000 impulsions.
(a)
(b)
(c)
Figure III.4-3 : Profils spatiaux du laser focalisé à l’aide d’une lentille (a) de focale 150 mm pour la source à 1030
nm, (b) de focale 200 mm pour la source à 515 nm et (c) de focale 150 mm pour la source à 343 nm.
71
Diamètre axe majeur (µm) Diamètre axe mineur (µm)
Diamètre moyen (µm) Ajustement axe majeur (µm)
145
Ajustement axe mineur (µm) Ajustement diamètre moyen (µm)
135
125
115
Diamètre (µm)
105
95
85
75
65
-2 -1 0 1 2 3 4 5
Position par rapport au waist (mm)
Figure III.4-4 : Caustique du faisceau laser à 1030nm focalisé par une lentille de 150mm de focale. Les caustiques
sur les deux axes du profil spatial en 2D sont représentées, ainsi que la caustique du diamètre moyen.
72
Figure III.5-1 : Schéma du dispositif expérimental ; HR. : Miroir à haute réflexion, BS : miroir semi-réfléchissant
Pol. : Polariseur, Pyro. : Pyromètre, Calo. : Calorimètre, Ech. : Echantillon, M : Microscope Nomarski. Miroirs
basculables représentés en pointillés.
La détection des dommages sur chaque site est réalisée in-situ à l’aide d’un microscope
Nomarski équipé d’un objectif 50X à longue distance de travail (50X Mitutoyo Plan Apo SL
Infinity-Corrected Objective) et d’une camera CCD (COHU High Performance CCD). A
chaque tir le site testé est analysé par imagerie à l’aide d’un programme LabVIEW. Une
image est prise avant le tir et après le tir, puis le programme procède à la comparaison des
deux images par traitement d’images.
Figure III.5-2 : Présentation de l’interface du programme LabVIEW pour le pilotage automatique des tests de
tenue au flux.
Le programme LabVIEW [Figure III.5-2] permet entre autre de piloter l’ensemble des
instruments, les moteurs et de faire le post-traitement des mesures et l’enregistrement
automatique des résultats (les fluences de tests, les coordonnées des sites, les
probabilités…). Parmi les tâches réalisées automatiquement on peut citer :
- Le pilotage de la source laser
73
- La rotation des lames demi-onde
- L’acquisition de l’énergie pour chaque impulsion
- La réalisation de matrices de positionnement et le déplacement de la platine de
positionnement de l’échantillon
- L’acquisition et le traitement des images de la caméra pour la détection des
dommages.
- La calibration du système
- La réalisation de marquages sur l’échantillon
Le banc de test est réalisé pour effectuer les tests de tenue au flux selon les procédures 1on1
et Son1.
Figure III.5-3 : Détection in-situ d’un endommagement par soustraction des images prises avant et après irradiation
laser du site.
La détection ex-situ est réalisée manuellement après les tests de tenue au flux. Un
microscope optique (Carl Zeiss Axiotech) disposant de trois modes de fonctionnement est
utilisé : mode Nomarski, mode lumière blanche et mode diffusion. Ce microscope est muni
de différents objectifs : 10X, 20X, 50X et 100X. Cette détection ex-situ permet d’éliminer
d’éventuelles erreurs lors de la détection automatique (tels que la présence d’artefacts vus
par le programme comme dommages) et la détection de dommages en volume. Notons que
cette détection ex-situ, réalisée au début systématiquement sur chaque échantillon, est
devenue par la suite accessoire lorsque la détection in-situ a été améliorée. En effet suite au
changement de position du filtre coupe bande dans le système de microscopie et à d’autres
améliorations, les prises d’images in-situ seront de meilleure qualité et donc la détection
automatique se fait avec moins d’erreurs.
74
Toute modification induite par une irradiation laser et observable par ces deux microscope
est un dommage. D’autres observations quantitatives peuvent être faites pour l’étude des
morphologies d’endommagement. Pour cela nous disposons d’un microscope électronique à
balayage (HITACHI, T1000), d’un microscope à force atomique (Brucker, Dimension-
Edge) et d’un profilomètre optique de surface (ZygoNewview).
�
= � ( 80 )
75
(a) (b)
(c)
Figure III.5-5 : Mesure de la stabilité de la surface effective du faisceau laser en fonction du temps pour (a) le
faisceau à 1030nm, (b) le faisceau à 515 nm et (c) le faisceau à 343 nm.
Où ET est l’énergie totale mesurée, Em l’énergie maximale du faisceau sur un pixel et Spixel la
surface d’un pixel. L’énergie totale dans cette équation est évaluée en faisant la somme des
valeurs de tous les pixels. L’impulsion laser sera alors caractérisée spatialement par sa
largeur à une hauteur de 1/e² [Figure III.4-3] et sa surface effective. La fluence de
l’impulsion est calculée en divisant l’énergie totale mesurée par le détecteur pyroélectrique
par la surface effective. La Figure III.5-5 montre la mesure de la stabilité de la surface
effective de la ligne 1030nm effectuée sur 5000 impulsions consécutives. On mesure à
1030nm un écart type relatif de 0,4% et une variation maximale de 1,2%.
Le calcul de l’incertitude sur la fluence F doit prendre en compte l’incertitude sur la mesure
de l’énergie totale E et l’incertitude sur la mesure de la surface effective. Un calcul
d’incertitude de type logarithmique permet d’écrire l’erreur sous la forme:
∆ ∆ ∆
= ⇒ = + ( 81 )
L’erreur sur la mesure de l’énergie ne prend en compte que les fluctuations d’énergie.
L’erreur systématique de l’appareil n’est pas prise en compte car il s’agit de mesures
comparatives. La fluctuation de l'énergie est calculée en prenant l’écart type relatif entre les
n tests statistiques de la procédure 1on1 ou Son1, et en y ajoutant l’écart type relatif entre les
mesures d’énergie de toutes les impulsions lors d’un test Son1. L’erreur relative sur la
mesure de la surface effective est évaluée par une mesure de stabilité telle que celle
présentée sur la Figure III.5-5 lors de la caractérisation du faisceau laser. Comme exemple
prenons les valeurs des mesures de stabilité en énergie [Figure III.4-1] et de la surface
effective [Figure III.5-5] pour le faisceau à 1030nm ; l’énergie moyenne est de 5,64±0,02
76
µJ, la surface effective moyenne de 2239±8 µm² ; on aura donc une fluence moyenne de
0,25 J/cm² avec une erreur relative de 0,02 J/cm².
En résumé, à l’issu de chaque test nous avons une courbe de probabilité en fonction de la
fluence avec l’erreur sur la fluence en chaque point tel que le montre la Figure III.5-6.
Figure III.5-6 : Définition du seuil d’endommagement, la ligne rouge représente la valeur moyenne entre la fluence
la plus haute de probabilité nulle et la plus basse fluence de probabilité non nulle.
Le seuil de dommage est défini comme la valeur moyenne entre la plus haute fluence ayant
une probabilité nulle d’endommagement, minorée de son erreur, et la plus faible fluence
avec une probabilité non nulle d’endommagement, majorée de son erreur. L’erreur sur la
mesure du seuil est définie à partir des valeurs extrêmes des 2 valeurs de fluence considérées
comme le montre la Figure III.5-6.
Figure III.5-7 : Profils de l’intensité du champ électrique dans une couche de Nb2O5 d’épaisseur 500nm pour
différentes longueurs d’onde d’irradiation.
Dans le paragraphe §I.4 nous avions discuté du cas des couches minces et énoncé la
nécessité de prendre en compte les effets interférentiels dans la couche mince. Sur la figure
suivante qui reprend la figure présentée dans le chapitre I du profil des champs stationnaires
77
dans une couche de Nb2O5 pour différentes longueurs d’onde d’irradiation, on note
différents maximums du champ à l’intérieur de la couche.
Pour un champ incident d’amplitude égale à l’unité, on note à 343nm un maximum de 0,4
environ, à 515 nm un maximum de 0,45 environ et à 1030nm un maximum de 0,6 environ.
La fluence effective d’interaction est donc fonction de ce maximum de la répartition du
champ dans la couche qui est lui-même fonction de la longueur d’onde d’irradiation et des
caractéristiques de la couche mince. Pour une étude des processus physiques en jeu, il est
donc intéressant de définir le seuil d’endommagement interne de la couche qui est calculé en
tenant compte du maximum de la répartition du champ (équation ( 70 )) dans la
couche. On définit alors le seuil interne d’endommagement (Laser Induced Damage
Threshold (LIDT) en anglais) en fonction du seuil mesuré Smesuré par la formule :
�
= � × é =| | × é ( 82 )
Où Emax désigne le maximum du champ dans la répartition du champ dans la couche et Einc
l’amplitude du champ incident.
Remarquons qu’il existe un phénomène optique non-linéaire qui pourrait fausser le calcul de
la fluence au seuil d’endommagement. Les couches minces ont des épaisseurs de quelques
centaines de nanomètres et cette distance est assez faible pour favoriser une auto
focalisation. Comme nous l’avons vu au paragraphe §I.2.2.1, l’auto-focalisation est un
phénomène optique non-linéaire qui peut induire une focalisation du faisceau sur la couche
(par auto-focalisation dans l’air). La surface du faisceau, mesurée à basse fluence, ayant
conduit à l’endommagement de la couche est donc différente de celle incidente sur la
couche. Nous avions aussi vu que pour que ce phénomène ait lieu il faut que la puissance du
laser atteigne une puissance critique définie par la formule ( 17 ) dans le cas d’un faisceau
gaussien. L’auto-focalisation étant possible à la fois dans l’air et dans le substrat, analysons
les possibilités qu’elle ait lieu dans ces deux milieux. Le tableau suivant récapitule les
valeurs des indices non-linéaires de quelques matériaux massifs ayant les indices non-
linéaires les plus élevés parmi les matériaux utilisés dans cette étude et la puissance critique
correspondante. La puissance crête maximale disponible à 10Hz est de pour la ligne
1030nm, , pour la ligne 515nm et , pour la ligne 343nm.
Puissance critique (GW)
Matériaux Indice non-linéaire (cm²/W)
1030nm 515nm 343nm
On peut remarquer que la puissance critique dans l’air est supérieure aux puissances
critiques disponibles aux trois longueurs d’onde mais de même ordre de grandeur. Par
contre notons aussi que dans les faits nous n’utilisons pas le laser à sa puissance maximale.
78
Ceci implique donc qu’il est très peu probable que le faisceau laser subisse un effet d’auto-
focalisation dans l’air avant la traversée du matériau. Par contre dans le SiO 2 et l’Al2O3 cet
effet d’auto-focalisation est probable si la densité d’énergie dans le matériau le permet.
L’auto focalisation est possible dans le substrat comme nous l’observerons dans certains cas
expérimentaux dans le chapitre suivant. En présence d’auto-focalisation l’endommagement
a lieu en volume, et cela peut être détecté lors de l’inspection ex-situ, ce qui nous permet de
reconsidérer l’analyse des résultats pour cet échantillon.
III.6. Conclusion
Dans ce chapitre nous nous sommes intéressés aux aspects expérimentaux du travail de
thèse, aux caractérisations, à la métrologie de l’endommagement puis à la réalisation d’un
banc d’essai. Nous avons passé en revue les différentes méthodes de caractérisation des
couches minces et des sources laser. Nous avons aussi défini les normes et les procédures
utilisées dans cette étude. Une attention particulière a été portée au calcul du seuil et à son
incertitude. Nous invitons le lecteur intéressé par un approfondissement sur la métrologie de
l’endommagement et les méthodes existantes, à lire la thèse de Bénoit Mangote [101] à
laquelle ce travail fait suite ou consulter l’ensemble des publications de la norme ISO 21254
[77, 97, 98]. Nous retenons aussi que l’auto-focalisation peut être considérée comme
négligeable dans la majorité des cas et une attention particulière sera portée aux cas faisant
exception. Précisons ici que seule l’étude de tenue au flux dans les couches minces nous
intéresse en priorité dans cette thèse, et que dans cette optique tout dommage dans le
substrat ne sera pas étudié en détails.
Le banc de test de tenue au flux laser multi longueur d’onde et multi-tirs que nous avons
réalisé a été caractérisé selon les modalités que nous avons définies dans ce chapitre. Tous
les résultats expérimentaux présentés dans la suite de ce manuscrit ont été mesurés selon ces
procédures, sauf mention contraire.
79
80
Chapitre IV. ETUDE MULTIPARAMETRIQUE DE LA
TENUE AU FLUX LASER DES MATERIAUX EN
COUCHES MINCES
IV.1. Introduction
Après avoir présenté le banc de test que nous avons développé et défini les procédures
de test, nous allons présenter et analyser dans ce chapitre les différents résultats obtenus
expérimentalement. Comme nous l’avons vu précédemment, ce banc de test dispose de trois
lignes de mesure (les trois harmoniques du 1030nm) et permet de réaliser des tests en multi
tirs (procédures 1on1 et Son1). Dans ce chapitre nous nous intéresserons à l’influence de la
longueur d’onde, du nombre de tirs et de la technique de dépôt sur la tenue au flux des
couches minces. Nous présenterons aussi une étude portant sur la tenue au flux de matériaux
utilisé pour l’ingénierie d’indice optique des couches minces. Les différents échantillons
dont les résultats sont présentés dans ce chapitre sont répertoriés dans le Tableau IV.1-1.
L'étude de l'évolution du seuil d'endommagement avec différents paramètres d'irradiation ou
en fonction des propriétés des matériaux est particulièrement utile du point de vue
fondamental et applicatif. Du point de vue fondamental ces études permettent d'obtenir des
données pouvant être confrontées aux résultats de simulations. En ce qui concerne les
applications, l'obtention de lois d'échelle est nécessaire pour estimer la résistance au flux
laser d'un matériau utilisé dans des conditions différentes des tests de tenue au flux laser.
Plusieurs études publiées sur l’endommagement laser se sont intéressées à l’influence de la
durée d’impulsion sur le seuil d’endommagement [31, 82, 103] car ce dernier paramètre
influe beaucoup sur les processus d’endommagement et notamment sur l’importance
relative de l’ionisation par impact et de la photoionisation. D’autres études se sont
intéressées à la variation du seuil d’endommagement en fonction de l’énergie de bande
interdite des matériaux [43, 104, 105] . Il faut noter que la majorité de ces études ont été
réalisées à la longueur d’onde de 800nm. Dans la lignée de ces études, notre équipe de
recherche a procédé à des études sur la variation du seuil d’endommagement en fonction de
l’énergie de bande interdite des matériaux et de leurs indices de réfraction. Ces études ont
fait l’objet de différentes publications [106-110] et constituent la base du travail que nous
vous présenterons dans ce chapitre. Un des principaux résultats issus de ces différentes
études est la dépendance linéaire du seuil d’endommagement dans les couches d’oxydes
avec l’énergie de bande interdite. Dans le cadre de la thèse de B. Mangote [101], différentes
expériences réalisées montrent une dépendance linéaire du seuil d’endommagement en
fonction de l’énergie de bande interdite [Tableau IV.1-1], mais la dépendance en fonction de
l’indice optique n’est pas linéaire [107]. Mangote et al ont proposé une loi en / en
comparant le seuil d’endommagement de différentes couches d’oxydes [109].
Un autre point intéressant à explorer dans l’étude des interactions laser-matière est
l’influence de l’énergie du photon incident. En effet selon les différentes théories
développées, l’énergie du photon joue un rôle très important car elle définit le nombre de
photons nécessaires à l’ionisation multiphotonique et le potentiel d’ionisation par effet
tunnel.
81
Epaisseur à Fabricant /
Matériaux Techniques Substrats Références
1030nm Fournisseur
MgF2
SiO2 IBS λ/2 LZH [105]
FS
MgF2
Al2O3 IBS λ/2 LZH [105]
Silice
MgF2
AlF3 IBS λ/2 LZH [105]
Silice
CVI – Melles
CaF2* -- Massif -- [114]
Griot
CVI – Melles
Si* -- Massif -- [114]
Griot
CVI – Melles
ZnSe* -- Massif -- [114]
Griot
Tableau IV.1-1 : Tableau récapitulatif des échantillons analysés au cours de la thèse. (*matériaux testés sous forme
de substrat et non de couche mince).
82
Figure IV.1-1 : (a) Evolution du seuil d’endommagement interne à 1030nm en fonction de l’énergie de bande
interdite ajustée par une loi linéaire de la forme , (± , �� − � − , ± , �� − , les lignes en
pointillés représentent les limites d’erreur selon cette équation [107]. (b) Evolution du seuil d’endommagement
interne à 1030nm en fonction de l’indice optique ajustée par une loi / [107, 109].
Il est donc important de relever les différences de comportement des matériaux en fonction
de l’énergie du photon mais aussi de comparer les mesures aux simulations numériques afin
de comprendre les processus physiques en jeu. Il existe à notre connaissance très peu
d’études sur l’influence de la longueur d’onde sur le seuil d’endommagement. Simanovskii
et al. ont étudié l’influence de la longueur d’onde sur le seuil d’endommagement dans le
domaine du moyen infrarouge (4,7 – 7,8µm) dans le régime picoseconde [115]. Selon leurs
conditions d’étude, ils supposent que la formation du plasma induisant la forte absorption
des matériaux est due à l’ionisation par effet tunnel avec dans certaines conditions une
contribution de l’ionisation par impact non négligeable. Jia et al. [116] se sont intéressés aux
matériaux à haute énergie de bande interdite (SiO2 et CaF2) avec des longueurs d’onde de
test entre 250nm et 2000nm puis une durée d’impulsion de 150fs. Ils ont noté une croissance
du seuil pour les longueurs d’onde du proche UV vers le visible puis une stabilisation du
seuil dans le proche infrarouge. Plus récemment Grojo et al. [92] ont étudié la tenue au flux
laser de différents matériaux à énergies de bande interdite diverses dans le domaine 1200-
2200nm. Ils ont montré que dans ce domaine de longueur d’onde, la dépendance du seuil
d’endommagement avec la longueur d’onde est négligeable sauf pour les matériaux à faible
énergie de bande interdite.
Dans le cas de l’influence du nombre de tirs sur la tenue au flux, il existe quelques études
aboutissant à la même conclusion : le seuil d’endommagement décroit avec le nombre de
tirs puis une stabilisation du seuil est généralement observée après un certain nombre de tirs
[26, 87, 89, 117-119]. Ce phénomène de décroissance du seuil en fonction du nombre de tirs
est connu sous le nom d’ « effet d’incubation » ou effet de « fatigue ». Par exemple,
Rosenfeld et al. [87] ont réalisé une étude sur un échantillon de a-SiO2 à l’aide d’impulsions
laser 100fs/800nm et ont trouvé une décroissance du seuil de 70% après seulement 20 tirs
puis une saturation de l’effet d’incubation. L’incubation peut être expliquée par une
accumulation d’électrons provenant de sites « auto piégés » ou excitons dans le cas de
matériaux susceptibles d’en avoir (Al2O3, SiO2, Ta2O5) comme proposé par Mero et al. [89]
mais aussi provenant de défauts électroniques créés par chaque impulsion dans la structure
électronique du matériau [120]. Ces défauts serviraient alors de source d’électrons pour
initier une ionisation par avalanche à une relativement faible fluence.
Une étude multiparamétrique a été réalisée dans le cadre de cette thèse sur les couches
d’oxydes de silicium (SiO2), d’hafnium (HfO2) et de niobium (Nb2O5), dont les résultats ont
fait l’objet d’une publication [112]. Dans les lignes qui suivront, nous présenterons
83
l’ensemble des mesures expérimentales multiparamétriques qui ont été réalisées puis
analyserons dans chaque cas l’influence des différents paramètres et les phénomènes
physiques qui pourraient permettre d’interpréter les résultats. Dans un premier temps nous
nous intéresserons aux mesures faites sur des monocouches d’oxyde et analyserons
l’influence de la longueur d’onde et du nombre de tirs sur la tenue au flux, puis dans la
deuxième partie nous présenterons les mesures sur des mixtures de matériaux.
IV.2. Etude de l’influence de la longueur d’onde sur la
tenue au flux de couches minces
Pour une étude théorique de l’influence de la longueur d’onde sur le seuil
d’endommagement, nous pouvons citer en première approche les publications de Gamaly et
al. sur l’étude de l’ablation laser de matériaux diélectriques en régime femto-seconde [80].
Deux hypothèses sont émises, selon lesquelles (1) lors de l’ablation le matériau est
totalement ionisé et que l’on est dans des conditions d’un gaz idéal, et (2) il y a ablation
lorsque l’énergie absorbée par les électrons est au moins égale à la somme de l’énergie
nécessaire à l’ionisation et de l’énergie de liaison atomique . Dans les conditions de
gaz parfait, la capacité calorifique des électrons peut être prise égale à selon la loi de
Dulong-Petit, et l’on peut évaluer l’énergie absorbée par les électrons à travers la
température électronique en résolvant l’équation ( 57 ). En absence d’effets d’interférence
l’énergie absorbée peut être estimée en calculant l’épaisseur de peau = . ñ .
�
Gamaly et al évaluent alors la fluence seuil d’ablation, selon les hypothèses (1) et (2), sous
la forme :
ℎ = + . ( 83 )
�
� × ∗
Avec = 0 × , la densité électronique critique servant de critère
d’endommagement. En première approximation, le seuil d’ablation et donc
d’endommagement par extrapolation croit linéairement avec la longueur d’onde. D’autres
études portant sur l’étude de la tenue au flux avec des longueurs d’ondes comprises entre
l’UV et le proche IR confirment cette tendance [114, 116]. Cette croissance du seuil
d’endommagement peut être attribuée à la contribution de l’ionisation multiphotonique dans
les processus physiques en jeu dans cette gamme de longueurs d’onde. Comme nous l’avons
montré dans le chapitre II le paramètre de Keldysh est de l’ordre de 1,5 dans le cas de la
silice pour une longueur d’onde de 1030nm, justifiant le fait qu’aucun des processus
d’ionisation n’était prépondérant sur l’autre. Par contre dans le cas des grandes longueurs
d’ondes on a , et la photoionisation est essentiellement due l’effet tunnel, puis le
nombre de photons nécessaires à l’ionisation multiphotonique peut être relativement grand.
C’est ce qu’ont montré Grojo et al. dans [92] et Simanovskii et al. dans [115]. Leurs études
ont porté sur la tenue au flux de matériaux dans le moyen infrarouge (MIR). Pour les
matériaux dont le nombre de photons nécessaire à l’ionisation multiphotonique était
supérieur à 2, le paramètre de Keldysh calculé est inférieur à 1 et le seuil d’endommagement
ne varie presque pas en fonction de la longueur d’onde dans cette gamme [92]. La
photoionisation étant essentiellement due à l’effet tunnel, or ce dernier étant indépendant de
la longueur d’onde, le seuil d’endommagement sera très peu dépendant de la longueur
d’onde. Par contre pour les très grandes longueurs d’onde (>3µm) on observe une
décroissance du seuil en fonction de la longueur d’onde sur les matériaux à grandes énergies
interdites (>9 eV) [115]. Ce comportement a été attribué au fait que le processus
84
d’avalanche devenait prépondérant sur la photoionisation par effet tunnel, or le taux
d’ionisation par avalanche décroit lorsqu’on augmente la longueur d’onde [Figure II.2-3].
Ces différentes études sur l’influence de la longueur d’onde sont récentes, et peu
nombreuses pour une critique approfondie. Toutefois elles permettent l’analyse des
processus physiques en jeu. L’obtention de nouvelles données expérimentales a un fort
intérêt pour la communauté scientifique. Nous allons ainsi présenter dans un premier temps
les résultats obtenus sur notre expérience, puis dans un deuxième temps des résultats
expérimentaux que nous avons obtenus au Laser Research Center (Vilnius University) dans
le cadre d'un projet LaserLab Europe déposé spécifiquement pour cette thèse.
Chaque ligne de mesure a été caractérisée selon les procédures définies dans le chapitre
précédent. Les mesures de profil temporel et spatial ont été réalisées dans les mêmes
conditions ainsi que celles des surfaces effectives. Le diamètre à une hauteur de 1/e² du
faisceau focalisé est de 75µm pour la ligne 1030nm, 45µm pour la ligne 515nm et 35µm
pour la ligne 343nm. Les tests de tenue au flux dans l’IR ont été effectués à un moment où
le laser présentait une durée d’impulsion de 375 fs alors que les tests dans le vert et l’UV ont
été réalisés à une durée d’impulsion de 550 fs. Pour une meilleure représentation et
comparaison des données, les mesures dans l’IR ont été recalées à une durée d’impulsion de
556 fs selon la loi en � , présenté dans la référence [43] :
,
=( . + � ( 84 )
Longueur Valeur
Paramètres Minimum Maximum Ecart type
d’onde (nm) moyenne
Durée
1030 556 fs 551 fs 563 fs 2,4 fs
d’impulsion
85
L’oxyde de niobium a un gap de 3,45eV et représente les matériaux à faible gap, l’oxyde de
silicium a un gap de 8eV et représente les matériaux à haut gap tandis que l’oxyde
d’hafnium a un gap de 5,2eV, ce qui le place dans la moyenne des gaps de matériaux
diélectriques. Le choix de ces trois gaps de matériaux, testé à trois longueurs d’onde
différentes, permet de mettre en jeu des processus d’absorption multiphotonique à différents
nombre de photons [Figure IV.2-1], mais aussi d’observer l’effet de l’absorption linéaire sur
le processus d’endommagement. Nous nous sommes aussi intéressés à l’influence de la
technique de dépôt de couche, et pour cela nous avons testé des matériaux déposés par
différentes techniques. Le tableau suivant récapitule les paramètres physiques des différents
échantillons après caractérisation :
Indice
Echan- Technologie Energie de Epaisseur Indice complexe à Indice complexe
complexe à
tillons de dépôt gap (eV) (nm) 515 nm à 343 nm
1030 nm
Les valeurs de seuil d’endommagement présentées sont des valeurs de seuil interne prenant
en compte la répartition du champ électrique dans la couche, ou prenant en compte le
coefficient de transmission dans le cas du substrat de silice.
86
IV.2.2 Tenue au flux d’oxydes et comparaison à un modèle SRE
Pour étudier l’influence de la longueur d’onde sur le seuil d’endommagement nous allons
nous intéresser aux seuils en mode 1on1. L’ensemble des résultats est compilé sur la Figure
IV.2-2. On remarque une variation linéaire en fonction de l’énergie de bande interdite quelle
que soit la longueur d’onde.
Figure IV.2-2 : Seuils d’endommagement 1on1 en fonction de l’énergie de bande interdite, aux trois longueurs
d’onde.
Différentes expériences menées dans notre équipe de recherche ont montrées que le seuil
d’endommagement varie en général linéairement avec l’énergie de bande interdite, quelle
que soit la technique de dépôt des couches en tenant compte des erreurs de mesures [107,
109]. En analysant les formules ( 26 ) à ( 30 ) on peut remarquer que le taux de
photoionisation est fonction de l’énergie de bande interdite Eg. Cette dépendance du taux de
photoionisation selon la théorie de Keldysh avec l’énergie de bande interdite pourrait
expliquer la dépendance linéaire du seuil observée comme proposé dans les références [107]
et[43].
La tendance linéaire des seuils d’endommagement à 1030nm a été ajustée en fonction de
l’énergie de bande interdite Eg, comme le montre la Figure IV.2-2, par une l’équation :
− − −
= , . × − , . ( 85 )
Les variations des seuils d’endommagement à 515nm et 343nm ont été également ajustées
par les mêmes types d’équations :
− − −
= , . × − , . ( 86 )
Et
− − −
= , . × − . ( 87 )
On remarque que la pente de la droite d’ajustement décroit avec la longueur d’onde alors
que l’ordonnée négative en zéro croit inversement à la longueur d’onde. Nous pouvons
87
approximer ces trois équations par une seule équation en fonction de l’énergie de bande
interdite et l’énergie des photons = ℏ telle que :
− − , − , − − , ,
= , . × × − , . × ( 88 )
En nous basant sur le modèle « Single Rate Equation » décrit au §II.2.1 et prenant en
compte la dynamique des modifications en fonction du temps, nous pouvons simuler le seuil
d’endommagement afin de pouvoir rendre compte de cette loi empirique. En prenant comme
critère d’endommagement l’énergie absorbée dans la couche, nous pouvons tracer la
variation du seuil en fonction de la longueur d’onde. La Figure IV.2-3 montre cette variation
sur les couches HfO2, Nb2O5 et SiO2. Comme défini dans le chapitre II les valeurs de la
masse effective et du temps de relaxation dans le modèle ont été trouvés par ajustement du
seuil simulé à 1030nm avec la mesure expérimentale. Les valeurs trouvées sont : ∗ =
, × /�� = − pour le Nb2O5, ∗ = , × /�� = − pour la couche de
HfO2 et ∗ = , × /�� = − pour la couche de SiO2.
On remarque dans un premier temps que la simulation traduit relativement bien les valeurs
expérimentales pour des longueurs d’onde inférieures à 2µm, sauf dans le cas de la couche
de Nb2O5. Cette exception sur la couche de Nb2O5 peut s’expliquer par deux paramètres : la
forte absorption linéaire de la couche dès 530nm et la dépendance des paramètres
d’ajustement (masse effective et temps de relaxation) avec la longueur d’onde d’interaction.
En effet la faible valeur d’énergie interdite du niobium d’oxyde (3,4eV) favorise une
absorption linéaire dans l’UV et le vert ; la théorie d’absorption multiphotonique de Keldysh
ne s’y applique plus lorsque l’absorption linéaire devient relativement importante. En outre,
le calcul multi longueur d’onde a été réalisé en utilisant les valeurs de la masse effective et
du temps de relaxation des électrons trouvées par ajustement au seuil à 1030nm en
supposant une invariance en fonction de la longueur d’onde en absence de données
bibliographiques nous permettant d’établir une fonction de dépendance.
Dans un deuxième temps, on remarque que le seuil d’endommagement se stabilise lorsqu’on
se rapproche de l’infrarouge moyen (2µm à 3µm). Ce type de comportement avait été
rapporté par Jia et al. et Grojo et al. [92, 115, 116]. Cette stabilisation du seuil peut
s’expliquer par le fait que pour les grandes longueurs d’ondes l’ionisation est dominée par
les processus d’avalanche et d’effet tunnel dans certaines conditions (confer §II.2).
L’effet d’avalanche, induite par l’ionisation par impact, varie très peu en fonction de la
longueur d’onde. Dans le cas des matériaux à large bande interdite, Simanovski et al. ont
observé une décroissance du seuil d’endommagement dans l’infrarouge moyen [115].
La loi empirique définie par l’équation ( 88 ) rend compte relativement bien de la variation
du seuil d’endommagement en fonction de la longueur d’onde et de l’énergie de bande
interdite du matériau dans les longueurs d’onde où le processus d’ionisation n’est pas
négligeable. Cette loi empirique n’est donc pas adaptée à la description du seuil
d’endommagement dans le domaine de l’infrarouge moyen où le processus d’ionisation par
impact semble prendre le dessus sur la multiphotoionisation. Elle pourrait constituer une loi
d’échelle utile du seuil d’endommagement des oxydes dans le domaine proche UV à proche
IR.
88
(a) (b)
(c)
Figure IV.2-3 : Comparaison des variations de seuils d’endommagement expérimentaux et calculés par simulation
en fonction de la longueur d’onde pour (a) une couche de HfO2 ( ∗ = , × /� � = − ), (b) sur une
couche de Nb2O5 ( ∗ = , � × /� � = − ) et (c) une couche de SiO2 ( ∗ = , × /� � = − ). La loi
de variation en fonction de la longueur d’onde est tracée sur chaque courbe.
L’ensemble de ces résultats est relativement bien représenté par le modèle numérique de
base en SRE que nous avons défini. Rappelons que ce modèle ne prend pas en compte les
niveaux d’énergie des électrons excités dans la bande de conduction du fait de la
photoionisation et comme nous l’avions montré semble surestimer les taux d’ionisation par
impact. On peut cependant noter que les résultats numériques révèlent une fonction assez
complexe du seuil en fonction de la longueur d'onde (nombreux sauts). Pour mieux
comparer simulation et expérience il s'est donc avéré nécessaire d'approfondir l'étude
expérimentale (plus de matériaux et de longueurs d'onde), ce qui est l'objet de la prochaine
partie.
Nous nous sommes intéressés à l’étude d’autres matériaux, en couche mince ou non, afin
d’étendre la gamme des valeurs d’énergie de bande interdite. Pour cela nous avons réalisé
des tests sur des semi-conducteurs à faible énergie de bande interdite mais aussi des
diélectriques à haute énergie de bande interdite : Silicium (Si), Séléniure de zinc (ZnSe),
Niobium d’oxyde (Nb2O5), Oxyde de tantale (Ta2O5), Oxyde d’hafnium (HfO2), Oxyde de
scandium (Sc203), Oxyde d’aluminium (Al2O3), Silice (SiO2) et du Fluorure de calcium
(CaF2). Nous avons ainsi une gamme d’énergie de bande interdite allant de 1eV à 10eV.
89
Dans le but d’explorer aussi d’autres longueurs d’ondes que les trois harmoniques sur notre
banc d’essai à l’Institut Fresnel, des mesures complémentaires ont été réalisées sur des
installations du LRC à Vilnius (Lituanie) dans le cadre d’un financement LaserLab Europe.
Ce centre est doté d’un système d’amplificateur paramétrique optique qui délivre des
impulsions de l’ordre de 100fs avec des longueurs d’onde allant de 310nm (4eV) à 1030nm
(1,2eV). Pour une meilleure compréhension du lien entre énergie de bande interdite et
énergie de photons puis la dépendance du seuil d’endommagement, les expériences ont été
réalisées par pas d’énergie de photons de 0,5eV. Le laser primaire du système
d’amplification paramétrique optique est un laser Ti :Saphire (Coherent, ‘‘Libra’’) avec un
spectre centré à 800nm et une durée d’impulsion de 100fs [Figure IV.2-4]. Ces résultats ont
fait l’objet d’une publication [114].
Figure IV.2-4 : Schéma de la configuration expérimentale au LRC. OPA : Amplificateur paramétrique optique,
SHG/THG : génération de deuxième et troisième harmonique.
Toutes les caractéristiques des faisceaux lasers et les propriétés optiques des matériaux aux
différentes longueurs d’onde sont dans l’article [114] ; ainsi que les détails sur les conditions
d’expériences. Les mêmes procédures de test et de détection des dommages que celles
décrites au chapitre III et utilisées à l’Institut Fresnel ont été appliquées. Les seuils
d’endommagements présentés sont des seuils pour lesquels la répartition du champ dans la
couche a été prise en compte (seuils « internes »). Les résultats obtenus précédemment aux
longueurs d’onde de 343nm, 515nm et 1030nm sur les oxydes et présentés au paragraphe
§IV.2.2 ont été ajustés en utilisant la loi empirique de l’équation ( 84 ) afin de compiler et
comparer tous les résultats.
90
Figure IV.2-5 : Seuils d’endommagement internes mesurés et calculés en fonction de la longueur d’onde pour
différents échantillons.
Pour l’étude des processus physiques, le modèle de simulation « Multiple Rate Equation »
que nous avons décrit au paragraphe §II.2.2 a été appliqué. Rappelons que ce modèle a pour
avantage de prendre en compte la distribution énergétique des électrons dans la bande
conduction grâce à une discrétisation des niveaux d’énergie. Le taux d’ionisation par impact
est alors estimé avec une meilleure précision qu’avec le modèle SRE. Les équations de
modification dynamique dans le temps et l’espace des propriétés optiques du matériau,
définies au paragraphe §II.3, ont été prises en compte dans le modèle. Le critère
d’endommagement utilisé est la densité d’énergie absorbée par le matériau. La masse
effective des électrons a été prise égale à , × sauf pour le ZnSe et le Si pour lesquels
elle est égale à , × , avec la masse de l’électron dans le vide.
L’ensemble des résultats expérimentaux et numériques sont présentés sur la Figure IV.2-5.
On remarque à première vue que le modèle numérique décrit relativement bien les
variations du seuil d’endommagement en fonction de l’énergie de photon. Le modèle prédit
des sauts du seuil d’endommagement correspondant aux transitions d’absorption
multiphotonique de n photons à n+1 photons. Ces sauts ne peuvent malheureusement pas
être décrits expérimentalement par la présente expérience car cela nécessiterait un plus
grand nombre de longueurs d’onde de tests et aussi une meilleure précision dans la
détermination du seuil d’endommagement expérimental. Notons toutefois que ce type de
comportement a déjà été observé expérimentalement par Jupé et al. sur du TiO2 [85] dans
les mêmes conditions expérimentales. Il faut ajouter aussi que le fait que le modèle MRE
91
soit basé sur la discrétisation des niveaux d’énergies en fonction de l’énergie des photons et
ne prenne pas en compte l’énergie cinétique des électrons dans la bande de conduction, sont
des facteurs de dégradation de la précision du calcul du seuil lors de la transition n à n+1
photons.
Considérons l’évolution du seuil d’endommagement en fonction de l’énergie de bande
interdite pour les longueurs d’onde de 800nm et 400nm. Les données expérimentales ainsi
que la comparaison à la simulation sont présentées sur la Figure IV.2-6.
On peut remarquer sur la Figure IV.2-6(a) que le seuil d’endommagement croit de manière
continue et régulière avec l’énergie de bande interdite. Cette variation est presque linéaire et
colle relativement bien avec les mesures de Mero et al. réalisées à 800nm [43] en régime
sub-picoseconde sur des oxydes : TiO2, Ta2O5, HfO2, Al2O3 et SiO2.
Figure IV.2-6 : Seuils d’endommagement internes mesurés et calculés en fonction de l’énergie de bande interdite
pour une irradiation à (a) 800nm et (b) 400nm.
92
apparait que la majorité des publications de la communauté scientifique ont été faites à la
longueur d’onde de 800nm qui se situe dans un domaine de prédominance de processus
multiphotonique. Hors de ce domaine les lois empiriques sont moins adaptées.
Figure IV.2-7 : A droite : observation MEB d’une monocouche de HfO2 déposée sur un substrat de silice et irradiée
à 1030 et 343nm, pour différentes fluences (fluences croissantes de gauche vers la droite). A gauche : simulation de
la répartition de la densité électronique dans la couche pour des fluences supérieures au seuil d’endommagement.
Les positions des maximas de la répartition électronique sont corrélées avec la localisation des dommages.
Figure IV.2-8 : A droite : observation MEB d’une monocouche de Ta2O5 déposée sur un substrat de silice et irradiée
à 1030 et 343nm, pour différentes fluences (fluences croissantes de gauche vers la droite). A gauche : simulation de
la répartition de la densité électronique dans la couche pour des fluences supérieures au seuil d’endommagement.
Les positions des maximas de la répartition électronique sont corrélées avec la localisation des dommages.
On peut observer sur ces deux échantillons que la localisation de l’endommagement dépend
de la fluence d’irradiation et de la longueur d’onde : localisation à la surface, dans
l’épaisseur de la couche à différentes positions ou à l’interface couche/substrat. On note sur
ces images à 343nm la présence d’initiations de dommages circulaires à différentes
profondeurs dans la couche. Les mêmes observations ont été faites sur d’autres couches
93
(Nb2O5 et SiO2). Un point intéressant sur les morphologies de dommages de la couche de
HfO2 testée à 1030nm est le décollement presque intact de la couche sur le substrat, ce qui
implique que le processus d’endommagement est très localisé. Cette localisation est très
bien traduite par les simulations numériques de la répartition spatiale de la densité
d’électrons comme on peut le voir sur les courbes présentées à gauche des figures.
Dans le cas de la couche de Ta2O5 irradiée à 1030nm, les simulations montrent un dépôt
d’énergie à 200nm de profondeur (à partir de l’interface air/couche) et à l’interface
couche/substrat pour des fluences élevées. Les images MEB (complétées de mesures avec
un profilomètre optique) montrent que l’endommagement a lieu dans un premier temps à
cette profondeur de 200nm. Et pour des fluences élevées il y a ablation totale de la couche
due à l’initiation de l’endommagement à l’interface couche/substrat (partie noire de la
dernière image). Ces mesures sont donc fortement corrélées avec les simulations
numériques. Des observations et interprétations similaires peuvent être faites dans le cas
d’une irradiation à 343nm : l’endommagement a lieu aux maximums de la répartition de la
densité électronique. Les mêmes correspondances sont observées, sur la couche de HfO2
testée à 343nm, entre la simulation de la répartition de la densité électronique et la
localisation des dommages.
IV.3. Etude de l’influence du nombre de tirs
L’autre aspect de l’étude multiparamétrique auquel nous nous sommes intéressés au cours
de ce travail de recherche est l’influence du nombre de tirs sur le seuil d’endommagement.
Dans cette partie nous allons présenter les résultats expérimentaux sur les différents
échantillons que nous avons utilisés. Les expériences ont été réalisées sur notre banc d’essai
à trois longueurs d’onde (343, 515 et 1030 nm) dans les mêmes conditions que les
expériences en mode 1on1 aux trois longueurs d’onde que nous avons décrites
précédemment (§IV.2.1). Les tests ont été réalisés sur les mêmes échantillons également.
Les résultats de tests multiparamétriques de tenue au flux réalisés sur les deux échantillons
de Nb2O5 sont représentés sur la Figure IV.3-1. On remarque une croissance du seuil
d’endommagement en 1on1 avec la longueur d’onde semblable à celle déjà reportée
précédemment et aussi une décroissance du seuil en fonction du nombre de tirs. Par contre
le taux de décroissance et sa stabilisation dépendent de la longueur d’onde et varient d’un
échantillon à l’autre.
A 1030nm, on observe une décroissance de plus de 60% entre le seuil 1on1 et le seuil
1000on1 puis une stabilisation du seuil. On observe le même comportement sur les deux
échantillons, ce qui implique qu’il n’y a pas d’influence de la technique de dépôt, et suggère
que les mêmes types de défauts électroniques, purement intrinsèques au matériau, sont
responsables de la décroissance du seuil à 1030nm. A 515nm, la décroissance est plus lente
et il n’y a pas de stabilisation dans la limite des 100.000 tirs. La couche déposée par MS a
un seuil 1on1 plus bas que celle déposée par IAD, mais l’effet d’incubation est le même sur
les deux comme le montre la courbe normalisée ; ce qui suggère dans ce cas aussi
l’existence de mêmes types de défauts électroniques.
94
Figure IV.3-1 : Seuils d’endommagement mesurés en fonction du nombre de tirs et de la longueur d’onde sur deux
échantillons de Nb2O5 déposés par IAD et MS. (a) Valeurs mesurées, (b) valeurs normalisées avec la valeur du seuil
en 1on1.
Les résultats des tests multiparamétriques de tenue au flux laser sur les couches d’oxyde
d’hafnium sont représentés sur les figures suivantes. La Figure IV.3-2 présente une
comparaison des résultats sur les différentes technologies de dépôt.
Figure IV.3-2 : Seuils d’endommagement mesurés en fonction du nombre de tirs et de la longueur d’onde sur les
trois échantillons de HfO2 déposés par IP, IAD et MS, (a)Valeurs mesurées, (b) valeurs normalisées avec la valeur
du seuil en 1on1.
Sur les couches d’oxyde d’hafnium les seuils d’endommagement 1on1 croissent avec la
longueur d’onde indépendamment de la technique de dépôt. On remarque que les seuils de
la couche déposée par MS sont élevés par rapport à ceux des couches déposées par IAD et
95
IP ; ceci peut être lié au fait que cette couche est une mixture contenant 5% de silice. A
1030nm, on observe une décroissance du seuil d’endommagement jusqu’à 100 tirs, puis il y
a stabilisation progressive pour les couches déposées par MS et IP alors que pour la couche
déposée par IAD le seuil continue à décroitre mais avec une pente moins élevée. La
décroissance observée sur la couche IAD peut toutefois être négligée si l’on prend en
compte les barres d’erreurs. Ces résultats expérimentaux sont similaires à ceux observés par
Nguyen et al. [121] dans des conditions expérimentales comparables (800nm, 1 ps et 1kHz).
Comme nous l’avons dit en introduction, certains travaux [104] attribuent cette décroissance
du seuil d’endommagement à la croissance de la densité des défauts électroniques (profonds
et peu profonds). La différence de comportement de la courbe d’évolution du seuil en
fonction du type de dépôt serait donc liée à la nature et la densité des défauts électroniques
présents ou induits dans les différentes couches. D’autre part il a été montré [122] que le
spectre de photoluminescence d’une couche de HfO2 pouvait dépendre des conditions de
dépôt de la couche. Le spectre de photoluminescence étant relié directement aux niveaux
d’énergies, cette variation des spectres en fonction des conditions de dépôt est une
conséquence de la différence de nature et de densité des défauts électroniques pour
différentes conditions de dépôt. Lorsqu’on regarde les courbes normalisées, on s’aperçoit
que le taux de décroissance varie en fonction de la longueur d’onde pour les couches IP et
IAD, alors que cela n’est pas le cas de la couche MS. Sur la couche déposée par MS, les
trois courbes ont presque la même tendance ; la dépendance en fonction de la longueur
d’onde du taux de décroissance et de stabilisation en multi-tirs est donc fonction du type de
dépôt.
96
Figure IV.3-3 : Seuils d’endommagement mesurés en fonction du nombre de tirs et de la longueur d’onde sur les
trois échantillons de HfO2 déposés par IP, IAD et MS. (a), (c) et (e) Valeurs mesurées, (b), (d) et (f) valeurs
normalisées avec la valeur du seuil en 1on1.
Les résultats de mesures sur les échantillons de silice sont représentés sur la Figure IV.3-4.
Il faut noter que sur les couches MS et IAD, les tests d’endommagement ont révélé dans
certains cas un endommagement volumique du substrat à l’interface avec la couche.
L’observation du profil géométrique de ces dommages nous permet de penser qu’il s’agit
d’un endommagement dû à une auto-focalisation. Nous avions vu en effet que la puissance
critique d’auto-focalisation du SiO2 massif était assez faible pour permettre ce phénomène
97
avec la puissance crête disponible sur notre banc expérimental [Tableau III.5-1]. Les
résultats à 343nm sur ces deux couches n’ont donc pas été reportés. Nous avons observé le
même phénomène à d’autres longueurs d’onde aussi mais cette fois en multi tirs.
L’apparition de ce phénomène en multi-tirs pourrait être expliquée par deux hypothèses :
initiation d’un dommage par l’auto-focalisation lors des premiers tirs puis croissance au
cours des tirs suivants, ou modification des propriétés non-linéaires de la matière d’un tir à
l’autre. Les résultats relatifs à la création de l’auto-focalisation en multi-tirs ont été mis en
évidence sur la courbe ; les valeurs des seuils correspondants sont donc à analyser avec
considération du phénomène d’auto-focalisation.
En prenant en compte les barres d’erreur, il apparait que la variation du seuil
d’endommagement est la même pour les trois échantillons à chaque longueur d’onde, autant
pour les couches minces que pour le substrat. Une possible raison à cela serait que le
substrat ait un seuil plus bas que les couches et donc limiterait la tenue au flux des couches.
Une autre observation qui corrobore cette affirmation est que nous avons observé que les
dommages sont initiés en général dans le substrat. Il est fort probable que les seuils mesurés
sur les trois échantillons soient en fait des seuils liés au substrat et donc des seuils de tenue
au flux de la silice (pas en couche mince). Cela signifierait que dans ce cas le seuil des
couches minces de silice est supérieur ou égal à celui de la silice massive.
Figure IV.3-4 : Seuils d’endommagement mesurés en fonction du nombre de tirs et de la longueur d’onde sur les
trois échantillons de SiO2 dont deux déposés par IAD et MS puis le troisième qui est un substrat massif. Les points
encerclés font référence aux tests en multi tirs présentant des dommages volumiques. (a) Valeurs mesurées, (b)
valeurs normalisées avec la valeur du seuil en 1on1.
A 1030nm on observe une décroissance du seuil de plus de 50% sur 100.000 tirs, avec une
valeur à 4J/cm² en mono tirs. Dans la référence [107] des résultats similaires en mode 1on1
ont été trouvés par différents groupes de recherches à 800nm, 1030nm et 1053nm. On
trouve par contre très peu d’études sur l’étude en multi tirs. Rosenfeld et al. [87] ont mesuré
sur du a-SiO2 (silice amorphe) une décroissance de l’ordre de 70% sur 20 tirs suivie d’une
stabilisation du seuil, avec un laser 100fs/800nm. Dans notre cas le seuil ne se stabilise pas
mais décroit continuellement jusqu’à 100.000 tirs. La différence principale entre nos
conditions expérimentales est la durée des impulsions.
A 515nm et 343 nm, il n’y a pas de donnée publiée à notre connaissance sur la silice en
multi tirs. Jia et al. ont publié des données de seuil d’endommagement en mono tir sur la
silice (Fused silica) avec un laser à 150fs et pour différentes longueurs d’onde : 2J/cm² à
800nm, 1,05J/cm² à 500nm, 1,1J/cm² à 400nm et 0,9J/cm² à 267nm.
98
IV.3.4 Analyse comparative en multi tirs
Pour une comparaison des différentes techniques de dépôt, deux paramètres sont à prendre
en compte : le seuil en mono tir et le seuil de stabilisation en multi tirs. Toutefois le
paramètre le plus important à prendre en compte pour une application pratique doit être le
seuil de stabilisation car il met en évidence l’effet de fatigue de la couche. La Figure IV.3-5
présente les coefficients d’incubation pour chaque type de matériau et pour les trois
longueurs d’onde différentes pour 1000 tirs et 100.000 tirs. Le coefficient d’incubation est
défini ici comme le rapport du seuil multi tirs sur le seuil mono tir ; ce coefficient peut
permettre de quantifier l’effet de fatigue du matériau.
Figure IV.3-5 : Coefficient d’incubation (rapport du seuil multi tirs sur le seuil mono tir) des différents échantillons
testés aux trois longueurs d’onde pour N=1000 tirs et N=100.000 tirs.
A 1030nm et 515nm les couches déposées par MS ont des seuils 1on1 plus élevés dans la
plupart des cas, mais les coefficients d’incubation ont tendance à décroitre rapidement. Par
contre les couches déposées par IAD ont une bonne tenue au flux à 343nm et les coefficients
d’incubations semblent être meilleurs (plus faibles). Par contre il est difficile de tirer une
conclusion précise sur la variation de la tenue au flux (seuils et incubation) avec la technique
de dépôt des couches car il nous faudrait encore plus d’échantillons.
En observation générale, quels que soient la longueur d’onde et le matériau, on remarque
une décroissance du seuil d’endommagement avec le nombre de tirs suivie ou non d’une
stabilisation après un certain nombre de tirs. Cela implique une densité élevée de défauts
électroniques, qui ne peuvent pas être uniquement intrinsèques au matériau comme proposé
dans la référence [104]. Il est fort probable qu’il s’agisse plutôt de défauts induits qui
apparaissent au cours de l’interaction laser-matière [120] : désexcitation des sites auto-
piégés (sur des matériaux comme la silice), lacunes dans le réseau cristallin, liaisons
pendantes, etc… La probabilité de création de ces défauts induits serait fonction de la
fluence, et aussi de la longueur d’onde ; d’autre part ces défauts induits peuvent s’accumuler
d’un tir à l’autre et ainsi permettre une ionisation à faible fluence (plus importante qu’en
mono tir) qui constituerait une source d’électrons pour l’effet d’avalanche. La stabilisation
du seuil observée sur certains matériaux serait donc due à une saturation de la densité
électronique des niveaux d’énergie où se situent ces défauts induits. L’absence de
stabilisation du seuil sur du SiO2 pourrait donc être liée à la non saturation de la densité de
99
défauts induits, un seuil de densité de saturation qui ne serait pas atteint. Cela permet
d’expliquer aussi le fait que les nombres de tirs auxquels la stabilisation apparait varient en
fonction de la technique de dépôt et de la longueur d’onde.
Il est à noter aussi qu’en multi tirs, nous observons un effet probabiliste sur le seuil
d’endommagement ce qui n’est pas le cas en mono tir. En effet une étude approfondie lors
de la thèse précédente a montré que le seuil d’endommagement en régime sub-picoseconde
est déterministe en mono tir, mais il n’existe aucune étude en notre connaissance sur le
déterminisme de la probabilité d’endommagement en multi tirs en régime sub-picoseconde.
Sur la Figure IV.3-6, il est représenté les courbes de probabilité d’endommagement en multi
tirs sur la couche HfO2 déposée par MS.
1
1on1
0.9
Probabilité d'endommagement
0.8 10on1
0.7
100on1
0.6
0.5 1000on1
0.4
0.3 10000on1
0.2 100000on1
0.1
0
1.5 1.7 1.9 2.1 2.3 2.5 2.7 2.9 3.1 3.3 3.5
Fluences
Figure IV.3-6 : Probabilités d’endommagement multi tirs sur la couche de HfO2 déposée par MS.
Chaque point est une moyenne d’environ 5 mesures différentes, et l’erreur de mesure sur la
fluence est de ~ , / . On note le caractère déterministe de l’endommagement en
mono tir et aussi en 10on1 dans la limite de l’erreur de mesure sur la fluence. Par contre
cette courbe présente des probabilités intermédiaires lorsque le nombre de tirs est supérieur
à 10.
Ces différentes hypothèses de description du phénomène d’incubation dans les diélectriques
peuvent être mises en équation par une description de type équation de taux. Le modèle
simplifié du diagramme d’énergie dans cette description est schématisé sur la Figure IV.3-7.
On associe aux différents niveaux de défauts induits un seul niveau moyen qui est
caractérisé par une section efficace d’absorption � à un photon qui permet l’excitation des
électrons accumulés lors du tir précédent. L’accumulation de défauts induits est réalisée par
une relaxation des électrons de la bande de conduction vers le niveau des défauts
électroniques caractérisée par un temps � puis il y a relaxation des électrons vers la bande
de valence avec un temps caractéristique � � .
100
Figure IV.3-7 : Schématisation du diagramme d’énergie des niveaux électroniques avec un niveau de défauts
électronique.
Cette description du diagramme d’énergie a été utilisée par Li et al. pour interpréter l’effet
du conditionnement laser [123] mais aussi par Nguyen et al. dans l’interprétation de
l’endommagement à double impulsion [124]. Nous avons intégré cette description à notre
modèle de simulation de l’endommagement dans le cas de la couche de HfO2. Au final nous
avons un système d’équations des taux de densité électronique dans la bande de
conduction, dans les niveaux associés aux défauts électroniques et � dans la bande de
valence de la forme :
I t
= � + � + σ. �(I t . − � −
ℏω
I t
= − σ. �(I t . − � ( 89 )
ℏω
{ � = � = − + �
101
Figure IV.3-8 : Seuils d’endommagement multi tirs calculés à partir du modèle défini avec défauts électroniques,
sur une couche de HfO2 d’épaisseur 500nm, et une irradiation 1030nm, 500 fs.
102
Figure IV.4-1 : Seuils d’endommagement internes de différentes mixtures d’oxydes en fonction de l’énergie de
bande interdite.
Nous allons vous présenter dans la partie suivante les études que nous avons menées sur
d’autres types de mixtures d’oxydes et de fluorures.
IV.4.1 Caractérisations
103
atomiques mesurées par EDX ne prennent pas en compte les types de liaison des molécules
de Al avec les molécules de O et de F.
Figure IV.4-2 : (a) Indices optiques à différentes longueurs d’onde en fonction des pourcentages de Al et O. (b)
Evolution de l’énergie de bande interdite en fonction de l’indice de réfraction à 1030nm.
Les valeurs des indices calculées à partir des spectres de transmission et de réflexion seront
alors privilégiées par rapport au modèle utilisant les mesures EDX. On observe aussi la
possibilité d’une réelle ingénierie des énergies de bande interdite qui ont des valeurs
comprises entre les maxima et minima des matériaux de base.
Les tests de tenue au flux ont été réalisés sur les lignes IR (1030nm) et UV (343nm). La
durée des impulsions était de 500fs lors des tests sur les mixtures Al2O3/SiO2, et 380fs lors
des tests sur les mixtures Al2O3/AlF3. Le diamètre du faisceau focalisé est d’environ
λ=50µm à λ=1030nm et 20µm à 343nm.
IV.4.2 Résultats
Les seuils d’endommagement internes des couches de mixtures sont représentés en fonction
des indices de réfraction ou des énergies de bande interdite. La Figure IV.4-3 montre une
comparaison des seuils d’endommagement des deux séries de mixtures à 1030nm. On
remarque une décroissance du seuil inversement à l’indice de réfraction sur les mixtures
Al2O3/AlF3, avec une exception de la couche de AlF3 pure. Par contre il n’y a pas de
variation importante sur l’ensemble des seuils d’endommagement des mixtures Al2O3/SiO2.
On note une différence notable entre les seuils des deux couches de SiO2, l’une avec un
substrat de SiO2 et l’autre avec un substrat de MgF2. L’influence du substrat n’est donc pas
négligeable, et on le remarque aussi sur les couches d’Al2O3 des deux séries. Il est important
de noter que les valeurs des seuils d’endommagement des mixtures Al2O3/SiO2 sont
comprises entre celles des couches de Al2O3 et SiO2, et l’ensemble montre une évolution
linéaire en fonction de l’énergie de bande interdite [Figure IV.4-4] telle qu’observée par les
différentes études déjà citées [43, 107].
104
Figure IV.4-3 : Comparaison des seuils d’endommagement internes des deux séries de mixtures en fonction de
l’indice de réfraction à une longueur d’onde de 1030 nm.
Figure IV.4-4 : Seuils d’endommagement internes des mixtures Al2O3/SiO2 à 1030nm et 343nm en fonction de
l’énergie de bande interdite
Les valeurs de seuils à 343 nm montrent une tendance moins nette. En tenant compte des
barres d’erreurs on peut tracer une tendance linéaire mais il est difficile d’en déduire une
conclusion générale sur cette tendance. Sur les mixtures Al2O3/AlF3, on peut noter aussi une
tendance linéaire nette mais avec la couche d’AlF3 qui fait exception aux deux longueurs
d’onde [Figure IV.4-5].
105
Figure IV.4-5 : Seuils d’endommagement internes des mixtures Al2O3/AlF3 à 1030nm et 343nm en fonction de
l’énergie de bande interdite
AlF3
106
Eg= 6,24eV TFL=2,56J/cm² Eg= 6,39eV TFL=3,9J/cm²
Al2O3
Tableau IV.4-1 : Morphologies de dommages obtenues par imagerie MEB sur les couches en mixtures d’Al 2O3/AlF3.
Sur chaque image, il est indiqué l’énergie de bande interdite et le seuil d’endommagement (1030nm, 500 fs).
Les morphologies varient avec les différents types de mixtures. D’un endommagement avec
un mécanisme de brûlure sur du AlF3 pur, on observe une évolution progressive vers un
mécanisme de fonte sur du Al2O3 pur en passant par un mécanisme de fonte avec éjection de
matière. Il y a clairement un lien entre le type de morphologie d’endommagement et la
composition de la couche.
Nous nous sommes intéressés dans nos analyses des morphologies d’endommagement au
dépôt de l’énergie dans la couche au cours de l’endommagement et aux éventuelles
corrélations à la dimension latérale et en profondeur des dommages. Pour cela nous avons
calculé la répartition de la densité massique d’énergie absorbée dans la couche en 2D
(latérale et axiale) conformément aux descriptions établies au §II.3. On considère que le
profil spatial du faisceau d’irradiation est parfaitement gaussien, et que la divergence due à
sa propagation sur l’épaisseur d’une couche de quelques centaines de nanomètres est
négligeable. La répartition latérale de l’intensité à la surface de l’échantillon est déterminée
par la fonction telle que :
= exp − ( 90 )
107
, ,
= �( , , + �( , , , , , − � ( , ,
, , = , . ( ,̃ , .
, , . ( 91 )
̃ , , =√ −
∗ +
�
{ , , = .ℑ [( ̃ , , ].( ,
108
Figure IV.5-1 : Répartition spatiale (r, z) de la densité massique d’énergie absorbée dans une couche de HfO 2
d’épaisseur 500nm, irradiée à une fluence de 3,5 J/cm² (1030nm, 500fs). Le niveau de l’énergie de fusion dans le
HfO2 (1300J/g) est représenté.
Figure IV.5-2 : Répartition spatiale (r, z) de la densité massique d’énergie absorbée dans une couche de HfO 2
d’épaisseur 500nm, irradiée à une fluence de 6 J/cm² (1030nm, 500fs). Le niveau de l’énergie pour une valeur de
18000J/g est représenté.
Nous avons réalisés des mesures du diamètre à la surface et de la profondeur au centre des
dommages à l’aide d’un profilomètre optique et d’un microscope à force atomique.
L’ensemble de ces mesures expérimentales a été comparée aux calculs basés sur l’énergie
absorbée. La Figure IV.5-3 représente la variation du diamètre des dommages sur une
couche de HfO2 d’épaisseur 500nm, irradiée à 1030nm et 343nm. Les seuils d’ablations
définis par l’énergie de fusion dans le HfO2 qui est 13000 J/g et le niveau E= 18000 J/g
trouvé précédemment ont été utilisés pour déterminer le diamètre des dommages. Pour une
irradiation à 1030nm, on remarque que les deux seuils d’ablations définis permettent de
reproduire relativement bien la variation du diamètre des dommages. Une erreur absolue de
5µm environ est faite sur le diamètre calculé par le critère utilisant l’énergie de fusion pour
109
des fluences incidentes inférieures à 10 J/cm². Au-delà de 10 J/cm² les valeurs calculés et
mesurées convergent progressivement vers une valeur de 62 µm. cela peut s’expliquer par le
fait que pour les fluences élevées le diamètre du dommage se rapproche du diamètre du
faisceau qui est de 70 µm.
Figure IV.5-3 : Variation du diamètre des dommages sur une couche de HfO2 irradiée à (a) 1030nm et (b) 343nm.
Les deux valeurs utilisées comme critère d’ablation permettent d’encadrer relativement bien
les valeurs expérimentales. Il en résulte que la vraie valeur du seuil d’ablation de la couche
pourrait être comprise entre ces deux valeurs.
Pour une irradiation à 343 nm on note deux phases de croissance du diamètre de dommage
qui ont été caractérisées par observation au microscope. Une première phase, définie entre
1,8 J/cm² et 2,2 J/cm², qui correspond à un endommagement sans enlèvement de matière. La
deuxième phase définie pour les fluences supérieures à 2,2 J/cm² correspond à l’enlèvement
de matière. On peut remarquer que le critère utilisant l’énergie de fusion permet de
reproduire le comportement sans enlèvement de matière mais la variation du diamètre
qu’elle donne par la suite ne représente plus correctement la variation des diamètres mesurés
dans la phase d’enlèvement de matière. Il est donc probable que les processus physiques au
cours de ces deux phases soient différents. On peut émettre l’hypothèse que les dommages
au cours de la première phase sont liés à la fusion de la matière alors que ceux au cours de la
deuxième phase pourraient être liés à l’évaporation de la matière.
Nous avons réalisé une étude comparative de la morphologie des dommages pour
différentes épaisseurs de couches de HfO2 et de Nb2O5 déposées par MS. Les morphologies
des sites endommagés ont été observées au microscope à balayage électronique (MEB) afin
de mettre en évidence l’évolution des morphologies d’endommagement pour chaque
couche. Les épaisseurs optiques des échantillons testés sont et / pour une longueur
d’onde de 1030nm, / pour 515nm et / pour 343nm. Les échantillons ont été irradiés à
1030nm et 343nm. Les mesures MEB des différents sites testés sont présentées sur les
figures ci-dessous pour chaque matériau et une longueur d’onde d’irradiation, en fonction de
l’épaisseur des couches et pour des fluences croissantes.
110
Figure IV.5-4 : Images MEB de monocouches de Nb2O5 de différentes épaisseurs irradiées à 1030nm
111
Figure IV.5-5 : Images MEB de monocouches de Nb2O5 de différentes épaisseurs irradiées à 343nm
112
Figure IV.5-6 : Images MEB de monocouches de HfO2 de différentes épaisseurs irradiées à 1030nm
113
Figure IV.5-7 : Images MEB de monocouches de HfO2 de différentes épaisseurs irradiées à 343nm
On peut remarquer que quel que soit la longueur d’irradiation (IR ou UV)
l’endommagement des couches de Nb2O5 est toujours caractérisé par des effets thermiques :
fonte de la couche et évaporation. Sur la plus épaisse des couches (457 nm) il a été plus
facile d’observer la modification de surface sur de l’échantillon provoquée par le plasma
lorsqu’on est proche du seuil d’endommagement. L’endommagement des couches de HfO2
est plutôt caractérisé par une brulure de la couche et un éclatement de la couche due au
maxima de la répartition de l’énergie absorbée dans la couche.
114
Figure IV.5-8 : Répartition de la densité massique d’énergie absorbée dans les couches de Nb2O5 d’épaisseur (a)
457nm et (b) 114nm, irradiée à une longueur d’onde de 1030nm et une fluence de 3J/cm².
La Figure IV.5-8 présente le calcul de la répartition spatiale de l’énergie absorbée dans les
couches de Nb2O5 de 457nm et 114nm. La simulation numérique montre une absorption à la
surface de l’échantillon sur une profondeur de 20nm, puis on distingue deux maximums
d’absorptions l’une à 200nm et l’autre à l’interface couche/substrat. Par contre dans le cas
de la couche d’épaisseur 114nm il n’y a pas de dépôt d’énergie à la surface et le dépôt
d’énergie a essentiellement lieu à l’interface couche/substrat.
La présence d’un dépôt d’énergie à la surface de la couche la plus épaisse peut être corrélée
avec les modifications de surface que l’on observe sur les couches épaisses de Nb2O5 et
HfO2 (Figure IV.5-2 ) irradiés à 1030nm. En plus une mesure de la profondeur des
dommages sur la couche de Nb2O5 d’épaisseur 457nm à l’aide d’un profilomètre optique
donne 220nm pour une fluence incidente de 2,5 J/cm² et 500nm pour une fluence incidente
de 3,5 J/cm². Ces mesures sont en parfaite corrélation avec la localisation des maximas
d’absorption dans la couche. De même sur la couche de HfO2 d’épaisseur 508nm on mesure
pour une fluence incidente de 6J/cm² une profondeur ablatée de 290nm ; ce qui coïncide
avec le deuxième maxima au-dessus du seuil d’ablation de 18000 J/g que nous avions
définie sur la Figure IV.5-2. Sur les couches moins épaisses, la morphologie des
endommagements est en accord aussi avec la répartition de l’énergie absorbée. Nous
n’avons pas observée de modifications à la surface et l’éclatement net observé sur la
deuxième image (en partant du bas) sur la couche de HfO2 d’épaisseur 127nm indique la
localisation de l’initiation de l’endommagement à l’interface couche/substrat comme le
montre la mesure de la profondeur du dommage que nous avons faite.
Par contre la simulation de la répartition de l’énergie absorbée pour une irradiation de
343nm révèle une distribution spatiale différente comme on peut le voir sur la Figure
IV.5-9. Les positions des maximas d’absorption sont nombreuses et assez proches. La
mesure de la profondeur des dommages révèle qu’elle coïncide avec un des maximas de la
répartition de l’énergie absorbée. Il est toutefois impossible de prédire par avance au vu de
ces courbes la localisation précise de l’initiation du dommage. Nous pensons qu’il est
nécessaire de prendre en compte d’autres effets dans la simulation (effets hydrodynamiques
par exemple) pour localiser l’initiation de l’endommagement dans la couche.
115
Figure IV.5-9 : Répartition de la densité massique d’énergie absorbée pour une irradiation à 343nm dans (a) la
couche de Nb2O5 d’épaisseur 457nm, à une fluence de 0,4 J/cm² et (b) la couche de HfO2 d’épaisseur 508nm à une
fluence de 2J/cm².
IV.6. Conclusion
Dans ce chapitre nous avons passé en revue différentes études paramétriques que nous avons
réalisées sur l’endommagement en régime sub-picoseconde. Quatre paramètres ont été
retenus dans cette étude : la longueur d’onde, le nombre de tirs, la technique de dépôt et la
composition chimique des couches de mixtures.
Nous retenons que l’influence de la longueur d’onde sur le seuil d’endommagement est liée
directement aux processus électroniques mis en jeu. On distingue trois gammes de
variations. Dans l’UV, l’absorption linéaire à un photon étant importante, la variation du
seuil est moins liée aux processus électroniques d’ionisation. Par contre du visible au proche
IR, on observe une croissance du seuil d’endommagement avec la longueur d’onde ; cette
évolution peut être interprétée par les simulations basées sur les différentes théories
d’ionisation qui révèlent que cette croissance du seuil est liée à la diminution du taux
d’ionisation multiphotonique avec la longueur d’onde. A partir de l’IR moyen et au-delà,
l’ionisation multiphotonique est moins efficace et la prédominance de l’ionisation par effet
tunnel conduit à une stabilisation du seuil comme on peut le voir sur les courbes de
simulations.
Sur l’étude de l’influence du nombre de tirs sur le seuil d’endommagement, nous avons
essayé de compléter les études existantes en nous intéressant à l’étude à d’autres longueurs
d’onde. Nous avons montré que la variation du seuil d’endommagement avec le nombre de
tirs était peu dépendante de la longueur d’onde. On observe le même type de variation
caractérisé par une décroissance suivie d’une stabilisation du seuil quelle que soit la
longueur d’onde d’irradiation. Par contre le coefficient d’incubation varie avec la longueur
d’onde mais aucune conclusion ne peut être tirée sur le type de variation. Il apparait que la
variation du coefficient d’incubation dépend beaucoup de la technique de dépôt des couches
comme nous avons pu le voir. Un autre résultat important que nous avons relevé sur
l’influence du nombre de tirs est l’apparition d’un effet probabiliste sur la probabilité
d’endommagement en mode Son1 alors que cette probabilité est déterministe en mode 1on1.
La dépendance linéaire du seuil d’endommagement avec l’énergie de bande interdite des
matériaux a été observée à diverses reprises dans cette étude, et il est apparu que la pente de
variation linéaire dépend du type de matériaux. Ainsi on observe une pente de variation
linéaire sur les oxydes différente de celle observée sur les mixtures d’oxydes, différente de
la pente observée sur les mixtures d’oxy-fluorure.
116
Nous avons pu observer les différentes relations entre le seuil d’endommagement et les
paramètres étudiés, mais il est souvent difficile de faire des investigations profondes sur les
processus électroniques en jeu par manque de connaissance sur les paramètres physiques
liés aux matériaux (masse effective, temps de relaxation électronique…). Il est donc
nécessaire de mener des études complémentaires pour mieux comprendre les processus en
jeu, c’est ainsi l’objectif du chapitre suivant.
117
118
Chapitre V. MICROSCOPIE DE PHASE QUANTITATIVE
ET RESOLUE EN TEMPS POUR L’ANALYSE DES
PROCESSUS D’ENDOMMAGEMENT
V.1. Introduction
Comme nous en avons discuté dans le chapitre précédent, pour aller plus loin dans l’analyse
des processus d’endommagement, et notamment pour comparer les résultats de simulations
numériques à des données expérimentales, la mesure des seuils d’endommagement n’est pas
suffisante. Outre le seuil, la dynamique d’absorption/relaxation de l’énergie, les durées
caractéristiques de la formation du dommage, la profondeur et l’extension des dommages,
les éventuelles modifications d’indice sont des informations particulièrement pertinentes,
notamment s’il est possible de les résoudre spatialement et temporellement. C’est pourquoi
au cours de ce travail de thèse nous avons cherché à développer un outil expérimental qui
permettrait d’analyser de façon quantitative la formation d’un dommage laser à l’échelle
temporelle sub-picoseconde et à l’échelle spatiale submicronique. Nous nous sommes ainsi
orientés vers une technique de microscopie de phase résolue en temps, et nous allons relater
dans ce chapitre les différentes étapes de qualification et de mise en place de ce système.
Tout d’abord nous allons décrire le fonctionnement de cette technique de mesure de phase
quantitative, basée sur un système commercialisé par la société PHASICS SA, et développé
en collaboration avec l’équipe MOSAIC de l’Institut Fresnel avec qui nous avons travaillé.
Puis nous présenterons des résultats concernant l’analyse de dommages laser par cette
technique et nous comparerons les résultats obtenus à des techniques plus classiques (AFM,
profilomètre optique). Cette technique a ensuite été appliquée à la mesure de seuil
d’endommagement et nous verrons que des résultats très concluants ont été obtenus. Nous
décrirons ensuite la mise en place d’une expérience de microscopie « pompe / sonde » basée
sur une caméra classique et les résultats que nous avons obtenus sur des couches minces
optiques. Enfin les premiers résultats de microscopie quantitative de phase résolue en temps
seront présentés.
Selon la norme ISO [77], l’endommagement de surface est défini comme « toute
modification permanente des caractéristiques de la surface d’un échantillon, provoquée par
un rayonnement laser et pouvant être observée par une technique de contrôle avec une
sensibilité en rapport avec l’application prévue du produit ». La détermination du seuil
d’endommagement est donc fonction de la méthode de détection et de sa sensibilité. Par
conséquent différentes méthodes de détection ont été utilisées par les différents groupes de
recherche dans la bibliographie, chacun essayant de déterminer avec la meilleure précision
possible le seuil d’endommagement. C’est dans cette optique que nous proposons dans la
première partie de ce chapitre une nouvelle méthode de détection liée à la modification des
paramètres optiques de la matière basée sur des mesures de phase.
119
Les techniques de détection utilisées dans la bibliographie peuvent être classées en deux
catégories : celles basées sur la détection locale du dommage lui-même et celles basées sur
la détection d’évènements liés à l’apparition d’un dommage. En ce qui concerne la première
catégorie, la plus connue des méthodes et la plus simple à mettre en œuvre est sans doute la
technique de mesure de diffusion par la zone à inspecter [135]. Cette technique est basée
soit sur la mesure de la puissance diffusée d’un faisceau sonde par la surface ou sur la
diffusion du faisceau laser de test lui-même [90, 136]. Cette technique très utilisée est
toutefois sujette à l’influence de plusieurs sources de bruit comme une variation de la
puissance diffusée due à des défauts de surface (poussière, rayures…). Elle est donc très
souvent complétée par d’autres techniques telles que l’imagerie par microscopie ex-situ [83,
119]. Une autre technique proche est la mesure des variations de transmission de la couche
testée [137]. La plus utilisée des techniques, celle recommandée par la norme ISO [97], est
l’imagerie par microscopie et de préférence une imagerie par microscopie à contraste
interférentiel (DIC). Cette technique est très souvent utilisée pour des détections ex-situ
mais elle peut aussi être utilisée in-situ [81]. Les techniques basées sur la détection
d’évènements liés à l’apparition du dommage quant à elles sont en général des techniques de
détection de l’onde de choc générée par un dommage, ou de détection du plasma émis lors
d’un endommagement. On peut citer par exemple la mesure de l’effet photo-acoustique à
l’aide d’un détecteur piézo-électrique, d’un microphone, ou par déflection d’un faisceau
laser sonde [138-141]. Dans le cas de la détection de plasma, on peut utiliser une caméra ou
une photodiode pour sonder l’apparition du plasma généré. Il est également possible de
mesurer la transmission / réflexion sur la surface du faisceau de test au cours du tir [142,
143]. Il a été démontré que lorsque ces différentes techniques sont mises en place dans les
mêmes conditions expérimentales, celles basées sur la détection locale du dommage sont
plus sensibles et robustes [144]. Plus précisément la détection par microscopie à contraste
interférentiel (DIC) présente de meilleurs résultats car elle permet la détection simultanée de
différents effets : variation d’indice optique, effets de biréfringence liés aux contraintes, la
variation d’épaisseur liée à l’enlèvement partiel de matière, brûlures de surface liées au
plasma etc… Par contre les mesures par microscopie DIC sont essentiellement des mesures
qualitatives. Pour obtenir des données quantitatives, on est obligé de se référer à d’autres
techniques de mesure qui ne peuvent être effectuées in-situ : microscopie à force atomique
(AFM), microscopie à balayage électronique (MEB), profilométrie optique etc….
Dans ce contexte nous proposons une alternative à ces techniques quantitatives qui est la
technique de mesure de front d’onde optique utilisée dans la caractérisation d’impulsions
laser et aussi plus récemment dans la microscopie de phase. Son avantage est qu’elle est
relativement simple à mettre en œuvre, s’utilise dans une configuration d’imagerie classique
par microscopie et peut donc être mise en œuvre in-situ. Il s’agit d’une technique de mesure
de front d’onde appelée « quadri-wave lateral shearing interferometry » (QWLSI) [145-147]
ou littéralement « interférométrie par cisaillement latéral à quatre ondes ». Cette technique a
été développée par la société PHASICS SA (Palaiseau, France) [148], et a permis la
fabrication d’une caméra commerciale de mesure de phase dénommée : SID4Bio©. Ce type
de capteur est compatible avec une illumination en lumière blanche, et dispose d’un logiciel
de traitement d’images qui permet une mesure quantitative directe et presque instantanée de
la différence phase. Nous nous intéresserons à une comparaison des mesures effectuées par
ce système avec d’autres techniques quantitatives dont nous disposons au sein de l’institut
Fresnel. Mais dans un premier temps nous allons décrire le dispositif expérimental ainsi
qu’une description brève du fonctionnement du système.
120
V.2.1 Description et dispositif expérimental
Le système utilisé est basé sur une technique d’interférométrie multi ondes. Le capteur de
front d’onde utilise un dispositif d’optique diffractive (un masque de Hartmann modifié) qui
permet de générer 4 répliques de l’onde incidente, déphasées les unes des autres et qui
forment une figure d’interférence à 4 ondes sur la surface d’un capteur CCD [147-149]
[Figure V.2-1(a)]. L’interférogramme obtenu est une carte d’interférence à deux dimensions
spatiales qui contient les informations de phase dans les directions X et Y. Par une analyse
de Fourier de la figure d’interférence, une carte d’intensité et une carte de différence de
phase en deux dimensions sont calculées. L’utilisation de l’optique diffractive est l’élément
clé de la simplicité et de la praticité du capteur, mais le prix à payer est la réduction de la
résolution de l’image. La figure d’interférence à quatre ondes est utilisée lors de l’analyse de
Fourier pour déterminer l’intensité et la différence de phase en chaque position. Dans notre
cas nous avons utilisé une caméra dont l’échantillonnage spatial est de 4×4 pixels, soit
, × , µm avec 300×400 points de mesures. Le fait que la mesure de la différence de
phase se fait par autoréférence à chaque mesure et la possibilité d’utiliser tous types
d’illumination (cohérente ou non) sont les deux paramètres qui caractérisent la praticité et la
simplicité d’utilisation du système.
(a) (b)
(c) (d)
Figure V.2-1: (a) Présentation du capteur avec son optique diffractive et sa camera CCD. (b) Un exemple
d’interférogramme obtenu en observant un dommage laser, et reconstructions correspondantes des cartes
d’intensité (c) et de phase (d). La barre correspond à 10µm.
121
V.2.1.2 Mise en place sur le dispositif expérimental de tenue au flux laser
Le dispositif expérimental utilisé pour la mesure de phase est basé sur le banc de métrologie
d’endommagement laser que nous vous avons présenté au §III.5. Les mesures peuvent donc
être effectuées à trois longueurs d’ondes différentes (1030nm, 515nm et 343nm) avec des
durées d’impulsions comprises entre 500fs et 3ps. De la description présentée sur la figure
[Figure III.5-1], seul le système de détection est modifié. La caméra de détection COHU est
remplacée par le capteur de front d’onde, et tout le reste est inchangé : le microscope
optique Olympus BX51, l’objectif de grandissement 50X à longue distance de travail
(Mitutoyo Plan Apo SL Infinity-Corrected Objective) et l’illumination de type Koehler avec
une lampe large bande (lumière blanche). Ce système a été utilisé dans deux configurations
différentes, une à incidence normale et l’autre à incidence 45° comme le montre la Figure
V.2-2. Le protocole de mesure in situ de la différence de phase est réalisé comme suit :
- Une mesure de référence est effectuée par l’opérateur sur le site de test
d’endommagement juste avant le tir,
- Après le tir laser, une deuxième mesure est effectuée avec possibilité de faire une
moyenne sur 30 ou 50 images si nécessaire dans le cas où l’on fonctionne en limite
de détection,
- Un traitement automatique des mesures avant tir et après tir est effectué et génère
une carte de mesures de différences de phase et une carte de mesures d’intensité.
(a)
Sample
(b)
Laser beam
Figure V.2-2 : Configurations de tests avec le capteur de front d’onde : (a) une en transmission avec une incidence
normale et (b) une en réflexion avec une incidence de 45°
122
Longueur Diamètre du faisceau focalisé dans le plan de
Durée d’impulsion
d’onde l’échantillon en incidence normale
Nous nous sommes intéressés à des échantillons présentant différentes énergies de bande
interdite et aussi différentes épaisseurs. Des mesures de morphologies de cratères et de seuil
d’endommagement ont été effectuées aussi bien sur des couches minces que sur un substrat
de silice. L’ensemble des échantillons ainsi que leurs paramètres sont compilés dans le
tableau ci-après :
Echantillons Technique de dépôt Epaisseur (nm) Energie de bande (eV) n à 1030 nm n à 343 nm
40
HfO2 MS 5,3 2,03 2,15
507
31
Nb2O5 MS 3,4 2,25 2,8+0,035i
458
Nb2O5 IAD 231 3,4 2,21 2,76+0,04i
Ta2O5 IAD 488 4,1 2,10 2,35
SiO2 Substrat - 8 1,45 1,48
Tableau V.2-2 : Caractéristiques des échantillons testés
Des systèmes commerciaux de mesure (présentés au §III.5.2) ont été utilisés afin de
procéder à l’étude comparative des données quantitatives avec les mesures de différence de
phase ou pour avoir des données complémentaires :
- Un microscope optique à contraste interférentiel (DIC), Zeiss Axiotech, muni
d’objectifs de grandissement 20X, 50X et 100X
- Un profilomètre de surface optique (OSP), Zygo Newview.
- Un microscope à force atomique (AFM), Brucker Dimension-Edge
Le profilomètre de surface optique (OSP) et le microscope à force atomique (AFM) sont les
systèmes qui nous ont permis de faire des comparaisons quantitatives. L’OSP a été calibré
optiquement par une référence plane en carbure de silicium afin de corriger les aberrations
optiques résiduelles. Sa résolution axiale est de 1nm et sa résolution latérale (limitée par la
taille des pixels de la caméra) est de 1,1 µm.
V.2.2.1 Mesures de différence de phase sur des cratères obtenus sur un substrat de
silice
123
l’indice de matière concernée et e son épaisseur, entre la mesure après irradiation laser et la
mesure de référence prise avant irradiation :
= × ( 92 )
La mesure de l’OPD ne permet pas toute seule de séparer les variations respectives de
l’indice et de l’épaisseur.
Le Tableau V.2-3 montre une carte de mesures 1on1 avec une impulsion laser à 1030nm et
500fs, à une incidence de 45°, et des fluences d’irradiation comprises entre 3,3J/cm² et
5,24J/cm². Pour chaque site testé, nous avons comparé les mesures quantitatives par
différence de phase à celles effectuées ex-situ à l’aide du profilomètre commercial Zygo
Newview, aussi vérifié la détection par le microscope DIC. Nous pouvons ainsi tracer les
profondeurs mesurées à l’aide du capteur de front d’onde et le profilomètre tel que le montre
la Figure V.2-3 et comparer les différents profils.
(e)
(a) (f)
Figure V.2-3 : Comparaison des mesures obtenues par le capteur de front d’onde SID4 et celles par profilométrie
optique en différents points de la surface. (a) Variation de la profondeur ablatée en fonction de la fluence incidente,
(b) profil du point B, (c) profil du point C, (d) profil du point D, (e) profil du point E et (f) profil du point F.
Pour les sites à fluences élevées ou encore pour des cratères dont la profondeur est
supérieure à la dizaine de nanomètres, on a une très bonne concordance entre les deux
méthodes de mesure quantitatives. Cette concordance est mise en évidence par la
comparaison des profils de surface du site irradié à 5,24J/cm² [Figure V.2-3 (b) (c)]. Pour
des fluences basses par contre la concordance des deux mesures est moins bonne. Cela peut
être dû au fait qu’à faible fluence l’enlèvement de matière est moins net, la rugosité de
124
surface étant importante, et à la différence de résolution latérale entre les deux systèmes de
mesure.
Fluence
SID4 OSP DIC
(J/cm²)
5,24
4,94
4,67
4,33
3,98
3,78
3,73
3,35
Tableau V.2-3 : Mesures obtenues sur le substrat de silice ; on distingue dans ce tableau la mesure du profil de
surface par le capteur de front d’onde (Phase à gauche), par le profilomètre optique OSP, et l’image
correspondante par microscopie DIC
125
Comme on peut le voir sur les figures (d), (e) et (f) les mesures de l’OSP révèlent une
surface abrupte dont les pics n’ont pas été visiblement résolus latéralement par le capteur de
front d’onde. Ces résultats s’avèrent assez concluants et montrent qu’il est possible d’obtenir
in situ des résultats très comparables à ceux obtenus par un système bien calibré tel que le
profilomètre optique.
(a) (b)
Figure V.2-4 : Comparaison des mesures de seuil d’endommagement par mesure de phase et par imagerie DIC à (a)
343 nm et (b) 1030 nm, durée d’impulsion de 500fs, sur la couche de Nb2O5 déposée par MS.
On remarque que les mesures par différence de phase sont plus sensibles que les détections
par microscope DIC lors des tests de tenue au flux sur cet échantillon de Nb2O5. En effet
quelle que soit la longueur d’onde de test, les seuils par mesure de différence de phase sont
inférieurs aux seuils par détection DIC. Il faut préciser aussi que la détection par
microscopie est une technique qui dépend en grande partie de l’opérateur car la détection
des modifications est soumise à sa seule qualification, alors que la mesure de différence de
phase ne l’est pas. La sensibilité du dispositif permet des mesures de différence de phase de
quelques nanomètres.
126
Nous avons réalisé ces mesures à 1030nm sur différents échantillons, en mode 1on1 et
Son1, puis compilé les résultats sur la Figure V.2-5.
Figure V.2-5 : Comparaison des mesures de seuil d’endommagement en mode Son1 par différence de phase SID4 et
par imagerie DIC. La différence des mesures de seuil (DIC-OPD) est aussi représentée en pourcentage.
D’un point de vue général, on remarque que les seuils de détection issus des deux
techniques sont assez proches. Mais il est intéressant de noter que pour la plupart des
échantillons, il y a des modifications qui sont quantifiables par mesures de différence de
phase SID4 au-delà de la résolution du microscope DIC. Notamment en mode 1on1 ou
10on1 où les modifications peuvent être très faibles et nécessitent une technique très
sensible pour être détectées. Le substrat de silice présente les plus grandes variations entre
les deux mesures de seuil, avec une différence de plus de 10% en 1on1. On peut remarquer
justement, dans le cas de la couche de Nb2O5 sur la Figure V.2-4(b), que la détection par
microscope DIC ne commence qu’après une différence de phase de près de 5nm. Ces petites
modifications mesurables peuvent être des variations d’indice ou une modification
mécanique de la surface ou une combinaison des deux, et peuvent aider à la compréhension
du processus d’endommagement car elles donnent des informations sur l’évolution d’un
dommage en fonction de la fluence. Dans ce sens nous proposons dans le paragraphe suivant
d’analyser quantitativement ces informations de phase en étudiant un processus
d’endommagement.
Dans ce paragraphe nous allons nous intéresser à l’étude des informations quantitatives
issues de mesures de phase SID4, afin d’en tirer des informations sur l’évolution d’un
processus d’endommagement. Notre cas d’étude portera sur la couche de Nb2O5 déposée par
IAD, d’épaisseur 231 nm et testée à 343nm-350fs, en mode 1on1 en incidence normale. La
Figure V.2-6 montre la carte de phase SID4 et un profil latéral de mesure pour différents
sites testés à différentes fluences.
On distingue sur cet échantillon deux étapes dans le processus d’endommagement : une
première étape caractérisée par une modification de la surface sans enlèvement de matière,
et une deuxième étape caractérisée par la délamination de la couche. Selon la mesure de
phase SID4, la fluence à laquelle apparait la première étape de modification est 0,15J/cm² et
la deuxième étape apparait à une fluence de 0,26J/cm². Ces deux étapes sont observables sur
127
un microscope DIC avec des fluences caractéristiques des deux étapes égales respectivement
à 0,18J/cm² et 0,26J/cm². La différence entre les fluences caractéristiques de la première
étape données par les deux techniques est une fois encore due au fait que les variations de
phase induites pour des fluences inférieures à 0,18J/cm² sont très faibles (inférieur à 1,5nm)
et ne peuvent être observées par le microscope DIC. La première étape de modification
correspond à un surélèvement de la couche au niveau de la surface irradiée. Cette
observation a été confirmée par une mesure sur un microscope à force atomique comme on
peut l’observer sur la Figure V.2-7(a) sur laquelle les deux profils de surface sont comparés
pour deux sites différents. Le profil de surface obtenu à partir de la mesure de différence de
phase a été calculé en négligeant toute variation d’indice de la surface irradiée. La mesure
par microscopie à force atomique étant une mesure strictement de topologie de surface, il
apparait que le profil de surface calculé à partir de la mesure de différence de phase sous-
estime la hauteur de la surélévation. Cela pourrait être dû au fait qu’il y ait une variation
d’indice non négligeable de la zone irradiée. Cette variation d’indice pourrait provenir soit
d’un effet électronique soit d’un effet thermique. En effet s’il y a piégeage permanent
d’électrons dans un niveau associé à un défaut dans le diagramme électronique de la
matière, ces défauts pourraient contribuer à faire diminuer l’indice optique de la matière.
Mais aussi une fusion rapide de la matière suivie d’un refroidissement rapide peut modifier
de manière significative les propriétés de la couche et ainsi faire varier son indice optique.
Lorsqu’on augmente la fluence d’irradiation, cas du site irradié à 0,25J/cm², il y a une forte
croissance du signal de phase SID4. Une corrélation avec la mesure par microscopie AFM
[Figure V.2-7(d)] révèle de petits grains dans la zone irradiée qui peuvent être reliés à une
cristallisation locale. La distance entre ces grains est de l’ordre micrométrique, inférieure à
la résolution latérale du capteur que nous avons utilisé pour les mesures. La mesure de
différence de phase est donc en réalité une moyenne de ces grains dans la zone irradiée.
128
nm nm
1.5
1.2
0.8
0.4
0.0
0.17J/cm² 0
2.5
3.5
2.0
1.5
1.0
0.5
0.23J/cm² 0 0.0
19 20
15
10
0.25J/cm² 0
0
105 40
20
-20
0.27J/cm² 0 -40
100 40
20
-20
-40
0.31J/cm² 0
-20 -15 -10 -5 0 5 10 15 20
µm
Figure V.2-6 : Evolution d’un dommage sur une couche de Nb2O5 en fonction de la fluence d’irradiation à une
longueur d’onde de 343 nm et une durée d’impulsion de 350 fs.
129
(a) 10 Phase (c) 1.0
343nm
8 AFM
0.8
6
4
nm
0.6
|E2/E2inc|
2
0.4
0
-2 0.2
(b) 300
Air Film Substrate
0.0
240 0 44nm 100 200 300
Distance from air/film interface (nm)
180 (d)
120
nm
60
0
-60
-20 -15 -10 -5 0 5 10 15 20
µm
Figure V.2-7 : Comparaison des profils de surfaces mesurés par différence de phase SID4 et par microscopie à force
atomique sur deux sites : (a) l’un avec surélèvement de la couche (site irradié à 0,23 J/cm²) et (b) l’autre avec
enlèvement d’une partie de la couche (site irradié à 0,31 J/cm²). (c) Profil du champ électrique dans la couche de
Nb2O5 à 343 nm. (d) Observation résolue à l’AFM d’un site testé à faible fluence (cas du site irradié à 0,25 J/cm²).
130
dispositif sur le banc déjà existant, puis présenterons les résultats des expériences de
microscopies d’intensité et de phase qui ont été faites.
L’objectif de ce dispositif est de disposer d’un outil nous permettant de mesurer avec la
meilleure précision temporelle et spatiale possible la modification du matériau à un instant
donné au cours de la formation d’un dommage laser : pendant l’interaction et après
l’interaction.
Comme nous l’avons vu, les modifications de la matière sont caractérisées dans une
première étape par une variation de la densité électronique dans la bande de conduction, la
génération de défauts électroniques ou la modification de la distribution électronique sur les
niveaux de la bande interdite associés à ces défauts. Ces processus ont pour conséquence
directe la modification de l’indice complexe, ce qui entraine une variation des coefficients
de réflexion, transmission et absorption de la couche. Mesurer des modifications de la
matière peut donc se faire par l’observation de la variation d’un de ces coefficients en
fonction du temps, dont la précision de mesure dépendra des caractéristiques du faisceau de
mesure et du temps d’acquisition. Le principe de fonctionnement de ce type de mesure dit
« pompe-sonde » est de provoquer la modification dans la matière à l’aide d’un faisceau
pompe puis de mesurer cette modification induite à l’aide d’un faisceau sonde à un instant
voulu. Le faisceau sonde ne doit donc pas être une variable des modifications que l’on
cherche à mesurer ; ce qui implique que sa durée d’impulsion, sa longueur d’onde et sa
fluence doivent être choisies de façon à ne pas influer sur les modifications de la matière.
Nous disposons de trois longueurs d’ondes (1030, 515 et 343 nm) sur notre installation. Le
choix du faisceau sonde a été porté sur la ligne à 515 nm car la plupart des caméras ont une
très bonne sensibilité dans le visible et aussi parce que nous avons fait le choix de nous
intéresser dans un premier temps à l’étude des interactions pour un faisceau pompe dans
l’IR. La Figure V.3-1 illustre le principe de la mesure pompe-sonde que nous avons mise en
place.
Figure V.3-1 : Principe d’une mesure pompe-sonde avec le faisceau pompe à 1030 nm et le faisceau sonde à 515 nm.
Le générateur de délai optique est un dispositif qui permet d’induire un délai temporel entre la pompe et la sonde
afin de choisir l’instant � de mesure des modifications induites.
Le générateur de délai optique est un dispositif mécanique qui permet de faire varier la
différence de chemin optique entre le faisceau sonde et le faisceau pompe. Ainsi l’on génère
un retard temporel entre les deux faisceaux, et l’on peut choisir le temps auquel la mesure
est faite. Nous disposons d’une ligne à retard Thorlabs ODL220-FS/M, pilotée par une
interface informatique. La résolution temporelle du générateur de délai est de , fs selon
131
les données constructeur. La durée du faisceau sonde caractérise la résolution temporelle des
modifications mesurées. Dans le cas présent, la mesure des modifications se fera par
microscopie d’intensité ou de phase. L’intensité ou la phase mesurée sur chaque impulsion
du faisceau sonde contient les informations sur les modifications ayant eu lieu pendant toute
la durée de cette impulsion. La valeur enregistrée de la mesure est la moyenne temporelle de
ces modifications sur la durée de l’impulsion sonde. Il est donc préférable d’avoir un
faisceau sonde de durée plus courte que le pompe afin de pouvoir facilement résoudre
temporellement les modifications au cours de l’impulsion pompe mais aussi pour avoir le
minimum de bruit. Sur notre banc expérimental, les deux faisceaux sont issus de la même
source et donc ont la même durée d’impulsion. Pour nos premières expériences, nous avons
décidé de nous affranchir d’un compresseur et de garder la durée du faisceau sonde égale à
celle du faisceau pompe. Ultérieurement il est envisagé de compresser l’impulsion sonde
pour améliorer l’expérience.
La Figure V.3-2 présente la configuration expérimentale qui a été mise en place sur le banc
de mesure.
Figure V.3-2 : Schéma du dispositif de mesure pompe sonde intégré au dispositif de mesure de tenue au flux
présenté précédemment. Tr : trou de filtrage spatial, L1, L2 et L3 : lentilles
Le faisceau sonde est filtré spatialement (cf schéma du dispositif) et mis en forme à l’aide
d’un télescope afin d’avoir une illumination la plus homogène possible sur l’échantillon. La
polarisation de chaque ligne est contrôlable indépendamment (lames de phase non
représentées). Les deux lignes ont été caractérisées temporellement, conformément aux
procédures définies précédemment. Le faisceau pompe a été caractérisé spatialement pour
différentes positions du générateur de délai optique (différentes positions de la platine de
translation). La caustique du faisceau a été tracée, par mesure du diamètre du faisceau
focalisé dans le plan de test, pour chaque position de la platine et l’ensemble est représenté
sur la Figure V.3-3. Le diamètre moyen du faisceau focalisé, pour toute position de la
platine du générateur de délai, est de µ ± µ avec une tolérance de positionnement de
l’échantillon dans le plan du waist de 1mm.
132
Figure V.3-3 : Caustiques du faisceau pompe pour différentes positions de la platine du générateur de délai (noté
DL)
La durée d’impulsion des faisceaux pompe et sonde est de 1 ps. Les expériences ont été
réalisées en mode 1on1 et Son1. Pour chaque site testé, une impulsion du faisceau pompe
induit des modifications qui seront sondées par une impulsion du faisceau sonde.
Après cette brève présentation du dispositif de mesure, nous présentons dans les lignes à
suivre les deux types de mesures qui ont effectuées : dans un premier temps de la
microscopie d’intensité, puis dans un deuxième temps de la microscopie d’intensité et de
phase.
Pour nos premières mesures pompe-sonde, nous nous sommes intéressés à la variation de la
transmission d’une couche au cours de l’interaction laser-matière. Pour cela une caméra à
faible bruit et haute définition (PCO1600) avec un temps d’exposition minimal de 500ns et
une définition de 1600×1200 pixels² a été utilisée sur le microscope. Chaque prise d’image
est synchronisée sur l’instant d’arrivée de l’impulsion du faisceau sonde. Les tests ont été
réalisés sur la couche de Nb2O5 d’épaisseur 500nm déposée par MS (magnetron sputtering)
et dont l’indice à 1030nm est 2,26 et 2,38 à 515nm.
Pour des mesures de transmission optimales, il faut éliminer toutes les sources de bruit qui
pourraient provenir non seulement du dispositif expérimental mais aussi de tout effet
transitoire causé par l’interaction. La maitrise de ces sources de bruit a été réalisée lors du
montage du dispositif et du choix de la méthodologie expérimentale.
En tout premier lieu on s’affranchit du bruit thermique lié à la caméra en soustrayant une
image prise en l’absence de pompe et de sonde aux images d’intérêt.
En ce qui concerne les effets transitoires causés par l’interaction et qui sont sources
d’artefact et de bruit nous pouvons citer:
133
-la diffusion du faisceau pompe à la surface de la couche suite à l’effet miroir créé par le
plasma généré,
-la radiation que peut provoquer la génération du plasma de surface,
-l’éventuel rayonnement thermique ou la génération d’harmoniques dans certains cas.
La seule mesure qui nous intéresse étant la modification induite par la matière sur le
faisceau sonde lors de son passage. Dans notre cas la génération d’harmoniques est
impossible dans les couches car leur épaisseur est trop faible et nous ne nous sommes pas
intéressés aux matériaux non-linéaires. Pour détecter la présence de ces effets, nous avons
procédé à différentes mesures : image avec ou sans présence d’un filtre coupe bande centré à
1030nm puis avec ou sans faisceau sonde. La présence ou non d’un filtre coupe bande
centré à 1030nm permettra de détecter la présence d’une éventuelle diffusion du faisceau
pompe. L’absence du faisceau sonde nous permettra de détecter la présence d’un
rayonnement autre que le faisceau sonde.
Figure V.3-4 : Comparaison d’images prises sans faisceau sonde par microscopie d’intensité sur la couche Nb 2O5,
avec et sans filtre coupe bande centré à 1030nm.
La Figure V.3-4 montre une comparaison d’images prises sans faisceau sonde en comparant
l’effet de la présence d’un filtre coupe bande centré à 1030nm. Le premier constat que l’on
peut faire est qu’il y a un rayonnement émis par la matière qui est détecté par la caméra en
l’absence du faisceau sonde. La quantité de rayonnement n’est pas fonction du temps
d’intégration de la caméra, ce qui indique que ce rayonnement est émis dans une durée
inférieure à 1µs. Il est évident que ce rayonnement est une source de bruit pour les mesures
que nous voulons réaliser à l’aide du faisceau sonde. Dans un deuxième temps on constate
qu’il y a une différence entre les images avec et sans filtre ; ce qui implique l’existence
d’une diffusion du faisceau pompe à la surface de la couche. En présence du filtre, la
radiation détectée est soit due au plasma, soit due aux effets thermiques qui ont lieu au cours
du processus d’endommagement. L’utilisation d’un filtre coupe bande centré sur la longueur
d’onde du faisceau pompe s’avère donc nécessaire pour diminuer le niveau de ce
rayonnement. Un résiduel étant cependant toujours présent, nous avons adapté le traitement
des images afin de soustraire cette part de rayonnement détecté en absence du faisceau
sonde de l’image brute prise en présence du faisceau sonde.
Pour mettre en évidence les modifications de la matière révélées par le faisceau sonde, c’est-
à-dire la variation de la transmission de la couche, il faut faire la division de l’image en
intensité prise à l’instant au cours de l’interaction par l’image d’intensité avant
l’interaction. Mais chaque image doit être corrigée par le bruit de la caméra CCD ; pour cela
134
une image du bruit de la caméra est prise sans aucun éclairage puis soustraite des images de
mesure avec le faisceau sonde.
Figure V.3-5 : Exemple de procédure de traitement des images pour un site irradié à 2,4 J/cm². La différence entre
une mesure avec correction de radiation sans faisceau sonde et une mesure sans correction est mise en évidence.
La Figure V.3-5 montre un exemple du processus de traitement des images. La couche a été
irradiée à une fluence de 2,4 J/cm². On y distingue l’image du bruit de la camera, l’image
sans le faisceau sonde puis les images avec le faisceau sonde avant, pendant et après
l’interaction entre le faisceau pompe et la matière. L’image sans correction du rayonnement
en absence du faisceau sonde ne prend en compte que le bruit de la caméra : on fait une
division de l’image prise pendant l’interaction à laquelle on a soustrait le bruit par l’image
avant l’interaction à laquelle on a soustrait le bruit. L’image avec correction a été calculée
en faisant la division de l’image prise pendant l’interaction à laquelle on a soustrait l’image
avec le rayonnement sans faisceau sonde par l’image avant l’interaction à laquelle on a
soustrait le bruit de la caméra. On remarque que l’image de transmission sans correction
surestime la transmission de la couche. Dans la suite de ce chapitre, les mesures de
transmission qui seront présentées ont été calculées selon la procédure prenant en compte le
bruit de la caméra et le rayonnement en absence du faisceau sonde. Notons que ce
rayonnement n’est présent que lors de l’occurrence d’un dommage.
135
Figure V.3-6 : Séquence d’images de transmission de la couche prises par microscopie d’intensité à différentes
positions du générateur de délai optique (en mm).
Cette séquence d’images représente les ratios des coefficients de transmission avant et
pendant l’interaction en chaque point de la couche. Les faisceaux sonde et pompe sont
synchronisés temporellement pour la position 153,8-9 mm de la ligne à retard, le ratio aux
positions inférieures devrait donc être égal à l’unité. On note la présence d’un résidu qui a
une valeur de 0,15 environ, qui est certainement lié au rayonnement thermique que nous
avons évoqué précédemment et dont on ne s’est pas affranchis complètement sur cette série
d’images. Les étapes caractéristiques de cette séquence d’image sont représentées Figure
V.3-7 : chute de transmission, saturation de la baisse de transmission, augmentation lente de
la transmission vers son état initial et apparition d’anneaux, puis état final du site.
136
150µm
T/Tref
Figure V.3-7 : Etapes caractéristiques de la transmission du site irradié à 2,4 J/cm² dans l’intervalle d’une seconde.
Sur ces données il est possible d’analyser le profil spatial du ratio de transmission pour
chaque image comme le montre l’exemple de la Figure V.3-8.
Figure V.3-8 : Exemple de profil 1D du ratio de transmission pour un délai de 2,6ps (image à 157,5 mm) sur une
section latérale tel qu’indiqué sur l’image de droite. On distingue sur l’image (à droite) la zone d’intérêt ainsi que
les valeurs moyenne, minimum et maximum du ratio de transmission.
Si l’on définit une zone d’intérêt, à l’intérieur de la zone d’interaction, dans laquelle on
recherche la valeur moyenne, la valeur minimale et la valeur maximale du ratio de
transmission (Figure V.3-8), on peut alors tracer la variation du ratio de transmission de la
couche en prenant en compte les minima et maxima tel que représenté sur la Figure V.3-9.
137
Figure V.3-9 : Variation de la transmission de la couche de Nb2O5 en fonction du temps, irradiée à une fluence de
2,4J/cm². Les points de mesure représentent les valeurs moyennes dans chaque zone d’intérêt, et les valeurs
minimales et maximales sont représentées par l’aire colorée.
On observe sur cette courbe une très forte chute de la transmission, liée à la forte densité
d’électrons dans la bande de conduction, le matériau ayant acquis un coefficient d’extinction
très élevé à ce stade. Après excitation on observe une cinétique de relaxation lente, qui
dépend du niveau d’excitation initial.
Ces premiers résultats, et notamment la qualité des images obtenues s’avèrent très
prometteurs pour la suite des travaux sur la problématique de l’endommagement laser. Un
autre exemple d’acquisition sur la Figure V.3-10 montre notamment comment ce dispositif
peut permettre de mettre en évidence, par des images résolues en temps, une excitation liée à
des défauts sub-micrométriques sur une couche mince.
Figure V.3-10 : Observations effectuées sur la couche mince de HfO2 (MS) après 2 tirs laser (images du haut), et
images résolues en temps (+5ps après le pompe) correspondant aux 2 tirs laser.
138
V.3.3 Microscopie de phase
Des résultats probants ayant été obtenus par imagerie classique, la suite de nos travaux a
concerné la mise en place de l’imagerie de phase. L’avantage du capteur de front d’onde
utilisé est qu’il nous permettra de remonter à la fois à l’image en intensité et à l’image de
phase. Nous pourrons remonter à deux paramètres liés aux modifications de la matière lors
de l’interaction laser-matière, la transmission et la phase, et par une analyse basée sur les
modèles présentés précédemment connaitre la variation de l’indice complexe en fonction du
temps.
Les conditions expérimentales sont les mêmes que l’expérience en microscopie d’intensité à
l’exception de la caméra qui est remplacée par le capteur de front d’onde. La principale
difficulté pour effectuer les mesures de phase par rapport à ce qui a été présenté
précédemment est l’impossibilité de moyenner sur plusieurs acquisitions, ce qui rend les
mesures de phase pompe/sonde nécessairement plus bruitées. Nous présentons dans ce
document une série de mesures sur la couche de Nb2O5 à trois fluences incidentes : 2 J/cm²,
2,5 J/cm² et 3 J/cm² pour illustrer le système qui a été mis en place. Les mesures d’intensité
sont similaires à celles obtenues précédemment, mais avec une résolution inférieure. On
reporte sur la Figure V.3-11 la mesure du ratio de transmission au centre de la zone irradiée,
indiquant un comportement similaire à celui observé précédemment.
Figure V.3-11 : Variation en fonction du temps du ratio de la transmission de la couche de Nb2O5 irradiée par un
faisceau à 1030nm aux fluences incidentes de 2 et 2,5 J/cm².
Les mesures de phase obtenues pour les différentes fluences sont données Figure V.3-12,
Figure V.3-13 et Figure V.3-14.
139
Figure V.3-12 : Cartographies de phase obtenues pour différents délais lors de l’irradiation d’une couche mince de
Nb2O5 à 2J/cm². L’échelle est en nm
Figure V.3-13 : Cartographies de phase obtenues pour différents délais lors de l’irradiation d’une couche mince de
Nb2O5 à 2,5 J/cm². L’échelle est en nm
140
Figure V.3-14 : cartographies de phase obtenues pour différents délais lors de l’irradiation d’une couche mince de
Nb2O5 à 3 J/cm². L’échelle est en nm
Sur ces images de phase, nous attribuons la forte variation de phase asymétrique observée
dans les premiers délais à de l’effet Kerr dans le substrat. Dans la zone centrale on observe
une augmentation du déphasage puis une relaxation lente telle que nous l’avions observé en
transmission. La figure suivante montre la variation de la phase en fonction du temps au
centre de la zone irradiée aux trois fluences d’irradiation. Quelle que soit la fluence
incidente, la phase de croissance du déphasage dure environ 10 picosecondes. La relaxation
lente dure beaucoup plus longtemps et sur les trois courbes elle présente un court temps
mort à environ 30 ps. Il y aurait donc peut être deux phases de relaxation, l’une qui dure
environ 20 ps et l’autre qui dure au moins 500ps. Vu les ordres de grandeurs, l’on pourrait
associer la première phase de relaxation à la relaxation électronique et la deuxième phase à
la relaxation thermique. En effet la relaxation des électrons de la bande de conduction se fait
pour des durées de l’ordre de quelques picosecondes, tandis que la relaxation thermique est
de l’ordre de la nanoseconde. Une autre hypothèse est la présence de défauts électroniques
dans la bande interdite qui présentent des temps de relaxation plus longs que ceux des
électrons de la bande de conduction. Il est donc nécessaire de faire de nouvelles expériences
afin de mieux comprendre les processus mis en jeu.
141
Figure V.3-15 : Variation de la différence de phase optique en fonction du temps pour les fluences d’irradiation 2
J/cm² et 2,5 et 3 J/cm². Les barres représentent les valeurs min et max de la différence de phase dans la zone
d’intérêt.
V.4. Conclusion
Nous avons montré dans ce chapitre la possibilité d’observer in-situ, à l’échelle du
micron avec des échelles temporelles de la picoseconde, des variations de phase avec un
bruit de l’ordre de quelques nanomètres lors de l’endommagement d’une couche
diélectrique. Ceci grâce à une technique originale qui permet de mesurer à la fois l’intensité
et le déphasage au cours du temps. Les résultats obtenus ont été satisfaisants, car c’est la
première fois que nous mettons en place une expérience de type pompe sonde dans l’équipe.
Au vu de ces résultats intéressants, nous allons perfectionner la technique afin d’avoir une
meilleure résolution latérale et de mesure de déphasage. L’utilisation d’un objectif 100X à
grande distance de travail permettrait d’améliorer la résolution latérale. La compression du
faisceau sonde, afin que sa durée d’impulsion soit de l’ordre de la dizaine de femtosecondes,
nous permettra de mieux résoudre temporellement les mesures, et donnera des informations
capitales en intensité et en phase pour la compréhension du processus d’endommagement
dans les couches minces aux échelles de temps sub-picosecondes.
142
CONCLUSION GENERALE
Les connaissances sur les interactions laser-matière évoluent d’année en année et avec
l’apparition de nouveaux types de lasers. Dans le cadre de l’étude de la tenue au flux des
matériaux, il est admis que le processus de base de l’interaction laser-matière est l’ionisation
électronique. Différentes théories ont été établies mais leurs applications numériques aux
systèmes réels restent complexes. Cette complexité peut être justifiée par l’aspect
pluridisciplinaire des processus en jeu et la difficulté de connaitre certains paramètres
physiques de la matière. En effet comme nous l’avons vu, les interactions laser-matière sont
à l’interface de l’électromagnétisme, de la physique du solide et de la thermodynamique. La
majorité des paramètres physiques de la matière sont évalués par différentes
approximations. La conséquence directe de l’aspect pluridisciplinaire de ces interactions est
leur dépendance à différents paramètres optiques, électroniques et thermodynamiques. Du
haut de ses cinq décennies d’âge, l’étude de la tenue au flux laser des matériaux est un
domaine scientifique en pleine expansion dans lequel beaucoup reste à faire.
Dans le chapitre II nous nous sommes intéressés à la simulation numérique des processus
d’endommagement et du calcul du seuil d’endommagement. Nous avons montré que dans la
diversité des modèles de calcul, l’application du modèle simplifié de type « Single Rate
Equation » avec la prise en compte des modifications de la matière au cours de l’interaction
permet de donner des interprétations théoriques en accord avec l’expérience. Un point
particulièrement important du modèle numérique que nous avons souligné à travers des
exemples est la possibilité de décrire spatialement et temporellement le dépôt d'énergie dans
un système multicouche.
Dans le chapitre III nous nous sommes intéressés aux aspects expérimentaux du travail de
thèse, aux caractérisations, à la métrologie de l’endommagement puis à la réalisation d’un
banc d’essai. Nous avons passé en revue les différentes méthodes de caractérisation des
couches minces et des sources laser. Nous avons aussi défini les normes et les procédures
utilisées dans cette étude. Une attention particulière a été portée au calcul du seuil et à son
incertitude.
Dans le chapitre IV nous avons passé en revue différentes études paramétriques que nous
avons réalisées sur l’endommagement en régime sub-picoseconde. Quatre paramètres ont
été retenus dans cette étude : la longueur d’onde, le nombre de tirs, la technique de dépôt et
la composition chimique des couches de mixtures. Nous retenons que l’influence de la
longueur d’onde sur le seuil d’endommagement est liée directement aux processus
électroniques mis en jeu. On distingue trois gammes de variations. Dans l’UV, l’absorption
linéaire à un photon étant importante, la variation du seuil est moins liée aux processus
électroniques d’ionisation. Par contre du visible au proche IR, on observe une croissance du
seuil d’endommagement avec la longueur d’onde ; cette évolution peut être interprétée par
les simulations basées sur les différentes théories d’ionisation qui révèlent que cette
croissance du seuil est liée à la diminution du taux d’ionisation multiphotonique avec la
longueur d’onde. A partir de l’IR moyen et au-delà, l’ionisation multiphotonique est moins
efficace et la prédominance de l’ionisation par effet tunnel conduit à une stabilisation du
seuil comme on peut le voir sur les courbes de simulations. Sur l’étude de l’influence du
nombre de tirs sur le seuil d’endommagement, nous avons essayé de compléter les études
existantes en nous intéressant à l’étude à d’autres longueurs d’onde. Nous avons montré que
la variation du seuil d’endommagement avec le nombre de tirs était peu dépendante de la
longueur d’onde. On observe le même type de variation caractérisé par une décroissance
suivie d’une stabilisation du seuil quelle que soit la longueur d’onde d’irradiation. Par contre
143
le coefficient d’incubation varie avec la longueur d’onde mais aucune conclusion ne peut
être tirée sur le type de variation. Il apparait que la variation du coefficient d’incubation
dépend beaucoup de la technique de dépôt des couches. Un autre résultat important que nous
avons relevé sur l’influence du nombre de tirs est l’apparition d’un effet probabiliste sur la
probabilité d’endommagement en mode Son1 alors que cette probabilité est déterministe en
mode 1on1.
Nous avons montré enfin dans le chapitre V la possibilité d’observer in-situ, à l’échelle du
micron avec des échelles temporelles de la picoseconde, des variations de phase avec un
bruit de l’ordre de quelques nanomètres lors de l’endommagement d’une couche
diélectrique. Ceci grâce à une technique originale qui permet de mesurer à la fois l’intensité
et le déphasage au cours du temps.
L’objectif de ce travail de thèse a été l’investigation expérimentale de l’influence de
différents paramètres sur la tenue au flux laser des couches minces optiques. Dans cet
objectif nous avons développé un dispositif expérimental qui permet l’étude de l’influence
d’un certain nombre de paramètres sur la tenue au flux et assez flexible pour permettre des
modifications futures. Ce dispositif piloté par une interface informatique nous a permis de
réaliser différentes expériences pour étudier l’influence de la longueur d’onde, du nombre de
tirs, de la composition des mixtures et de la technologie de dépôt de couches minces, sur la
tenue au flux des composants optiques. Toujours grâce à ce dispositif nous avons pu mener
des études sur la métrologie de l’endommagement en proposant une méthode basée sur la
mesure quantitative de la différence de phase. Ensuite nous nous sommes intéressés aux
mesures résolues en temps afin d’étudier l’évolution dans le temps des processus en jeu.
Les différents résultats obtenus montrent la complexité des processus en jeu. Parmi les
nombreuses perspectives que nous avons, trois paraissent d’une grande importance pour la
compréhension des processus :
- L’étude résolue en temps des processus d’initiation de l’endommagement en
fonction de la fluence (avant le seuil d’endommagement, au seuil d’endommagement
et après le seuil).
- L’étude résolue en temps des transitions d’absorption de n photons à n+1 photons,
- Et en dernier l’étude de l’effet probabiliste de la détermination du seuil
d’endommagement en multi-tirs.
144
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155
156
ANNEXES : ARTICLES PUBLIEES
157
Relation of optical properties and femtosecond
laser damage resistance for Al2O3/AlF3
and Al2O3/SiO2 composite coatings
We report on the realization of aluminum oxyfluoride thin films and alumina/silica mixture coatings with
different ratios by ion beam sputtering. The atomic compositions quantified by energy dispersive x-ray
spectroscopy are correlated with the optical properties calculated from spectrophotometry and laser
calorimetry measurements. Furthermore, the femtosecond laser damage resistance (τ 400 fs) of single
layers is investigated in the infrared at 1030 nm and in the ultraviolet at 343 nm wavelengths.
Experimental results on the wavelength scaling of the laser-induced damage threshold for oxyfluoride
and oxide composite coatings are presented. © 2014 Optical Society of America
OCIS codes: (310.0310) Thin films; (320.0320) Ultrafast optics; (140.3330) Laser damage.
http://dx.doi.org/10.1364/AO.53.00A383
2. Experimental Setup
All thin films prepared for this study are coated in a
cryo-pumped BALZERS BAK640 deposition plant
equipped with a Veeco 16 cm RF ion source and a
modified 66 cm focal point molybdenum grid set.
Xenon with a purity of 99.999% is used as the sputter
gas. Oxygen and an argon/fluorine mixture can op-
tionally be added through separate mass flow con-
trollers into the vacuum chamber. The deposition
Fig. 1. Ion energy distributions measured with a RFA in the tar-
process is started at a background pressure below get plane for the employed Veeco 16 cm RF ion source operated
8.0 × 10−6 mbar. The substrate temperature during with different beam voltage set-point values.
the process is about 50°C. Employing a broadband
optical monitoring system in combination with pre-
coated test samples, a film thickness of two quar- values on fused silica substrates indicates the lowest
ter-wave optical thickness at 1064 nm wavelength extinction coefficients for ion energies around 800 eV.
is precisely realized. A more detailed description of By adjusting the ion energy distributions maxima
the coating plant and some aspects of the deposition and keeping the reactive gas flows and the beam
process for mixture thin films are published in [20]. current constant, extinction coefficients at 193 nm
between 2.0 × 10−3 and 5.5 × 10−2 are observed.
A. Ion Beam Sputtering of AlF3 Coatings The influence of the reactive gas environment on
Before describing the deposition approaches for oxy- the optical properties of AlF3 thin films is investi-
fluoride and oxide mixture coatings, the process op- gated by adding defined gas flows of the argon/
timization and the limitations for the realization of fluorine mixture into the vacuum chamber while
pure aluminum fluoride coatings are briefly dis- coating a single layer on fused silica substrates.
cussed. In different optimization series, AlF3 single Applying an LZH DUV/VUV spectrophotometer [22],
layers are sputtered applying a hot pressed AlF3 the transmittance (T) and the reflectance (R) spectra
target specified with a purity of at least 99.9%. of those single layers are measured under nitrogen
The following parameters and process steps have atmosphere to suppress the absorption band of
shown a significant influence on the optical proper- oxygen. In Fig. 2, the transmittance and the optical
ties of the AlF3 coatings: losses in terms of (100%-T-R) are plotted for AlF3 thin
1. the ion source parameters, especially the ion films deposited in different reactive gas environ-
energy distribution, ments. These results obviously show that the argon/
2. the reactive gas environment and the chamber fluorine mixture is essential as a reactive gas to real-
base pressure, and ize aluminum fluoride coatings with a stoichiometric
3. the ex-situ post-treatment of coatings by UV composition and the lowest optical losses.
irradiation. A reduction of optical losses by ex-situ UV irradi-
ation has been reported for ion-assisted fluoride
The fact that the listed parameters and process steps coatings in [10]. The ex-situ UV treatment in this
are dependent on each other to some extent makes
the process optimization and the interpretation of
the results even more difficult.
The energy distribution of the xenon ions extracted
in the Veeco 16 cm RF source is studied by replacing
the AlF3 target with a retarding field analyzer (RFA)
which is described in more detail in [21]. For different
beam voltage set-point values, a collector current Icol
is measured as a function of the retarding voltage
Uret , which is ramped from zero up to 1200 V. The
different ion energy distributions are determined
as the derivative of the collector current with respect
to the retarding voltage. Sections of the ion energy
distributions showing the main peak are plotted in
Fig. 1 for different beam voltage set-point values.
The correlation of the ion energy distributions
maxima with the optical properties of AlF3 single Fig. 2. T and (100%-T-R) spectra for AlF3 thin films deposited
layers deposited with similar beam voltage set-point under different reactive gas environments.
Fig. 4. TEM high-resolution bright-field image and diffraction Fig. 5. High-resolution XPS spectra of (a) Al2p and Al2s, (b) Fls,
image of an AlF3 thin film. and (c) O1s peaks measured for an AlF3 thin film.
Fig. 6. Transmittance spectra of four different Al2 O3 ∕AlF3 oxy- Fig. 8. Absorption coefficients as a function of photon energy for
fluoride thin films deposited applying an AlF3 or an Al2 O3 target Al2 O3 ∕AlF3 mixture coatings of different compositions and the
combined with either F2 ∕Ar or O2 reactive gas. SiO2 reference thin film.
which the absorption at fluence H → 0 mJ∕cm2 is Since the LIDT measurements at 1030 nm for the
easily extracted using a linear fit. Furthermore, Al2 O3 ∕SiO2 mixture thin films are performed at a
the measurement results indicate a negligible dose slightly different pulse duration, the results are re-
dependence on the absorption. The qualitative char- scaled for the comparison by a factor of 0.921. The
acteristic for all samples is very similar to the exam- applied scaling factor is determined from a temporal
ple shown in Fig. 12. It can be assumed that optically scaling law of the LIDT, obtained by Mero et al.,
as well as thermally induced structural changes in based on measurements of different pure material
the coating (as well as in the substrate bulk material) single layers [35].
have reached a state of saturation. B. Relation between Optical Properties, Chemical
D. Laser-Induced Damage Threshold Measurements Composition, and Laser-Induced Damage Threshold
The test facility and the calibration procedures used The refractive indices of mixture thin films can be
for the LIDT measurements are described in detail calculated from the refractive indices of the cosput-
in [14,33]. As the laser source, a commercial femto- tered pure materials and the film composition, using
second diode-pumped ytterbium amplified laser different effective medium approximation theories.
(Amplitudes Systemes S-Pulse HP) operating at a In the present study, the Lorentz–Lorenz Eq. (3) is
wavelength of 1030 nm with a spatially Gaussian applied to calculate the refractive indices for both
beam profile is applied. Additionally, a new line to mixture sample sets [36,37]
generate third harmonic radiation at 343 nm, apply-
ing a nonlinear crystal, is implemented for the UV n2eff − 1 n2a − 1 n2b − 1
f a f b : (3)
damage tests. The linear-polarized beam is focused n2eff 2 n2a 2 n2b 2
at normal incidence on the front face of the coated
sample by a plano-convex lens. The pulse duration In Fig. 13, the index of refraction at 343 and 1030 nm
at 1030 nm is obtained by autocorrelation traces of derived from transmittance and reflectance mea-
the laser beam, measured with an ASF Avesta surements is compared to the refractive index calcu-
system. The LIDT measurements at 1030 nm are lated from the atomic compositions. The two curves
performed at two slightly differing pulse durations for the Al2 O3 ∕SiO2 sample set, plotted as a function
of 500 fs for the Al2 O3 ∕SiO2 mixture thin films of the Al fraction of the sum of the Al and the Si con-
and 380 fs for the Al2 O3 ∕AlF3 composite coatings. tent, show an acceptable agreement for both wave-
Both LIDT test series at 343 nm are realized with lengths, whereas for the data of the Al2 O3 ∕AlF3
a pulse duration of 380 fs for the first harmonic. sample set, plotted as a function of the O fraction
The effective spot sizes, as defined in the correspond- of the sum of the F and the O content, significant de-
ing ISO 21254:2011 international standard [34], are viations are observed. Since the EDX measurement
measured before each experiment to calibrate the provides no information about the chemical bonding
fluence with a WinCam UV CCD camera and a of the fluorine and the oxygen atoms, no explicit con-
magnification system. The LIDT measurements at clusion about the different types of molecules in the
343 nm are performed at a beam diameter on the film can be obtained. For more precise calculations,
sample surface of about 20 μm at 1∕e, whereas the the determination of the molecular composition for
LIDT tests at 1030 nm are conducted with a beam the aluminum oxyfluoride thin films requires further
diameter of about 50 μm at 1∕e. The error budget investigation.
Fig. 14. Comparison of E04 and ETauc optical band gap energies Fig. 16. Comparison of the LIDT at 1030 nm as a function of
as a function of the refractive index at 1030 nm for Al2 O3 ∕AlF3 the refractive index at 1030 nm for Al2 O3 ∕AlF3 and Al2 O3 ∕SiO2
mixture coatings of different compositions. mixture thin films.
4. Conclusions
The deposition of Al2 O3 ∕AlF3 and Al2 O3 ∕SiO2
mixture thin films with continuously adjustable re-
fractive indices and the absorption coefficients is
demonstrated by IBS applying a zone target setup.
Although for the pure AlF3 coatings no oxygen is in-
serted during the deposition process, an oxygen frac-
tion of about 16%–20% of the sum of the oxygen and
fluorine content is quantified by two different meas-
urement techniques. The optical losses of Al2 O3 ∕
AlF3 composite coatings with an oxygen fraction of
Fig. 17. LIDTs measured at 343 and 1030 nm wavelengths as a the oxygen and fluorine content below 46% could
function of the optical band gap energy E04 for Al2 O3 ∕AlF3 be reduced by an ex-situ UV treatment. The calcula-
composite coatings. tion of the refractive indices by applying the
Lorentz–Lorenz equation provides reasonable re-
sults only for the Al2 O3 ∕SiO2 mixture coatings.
refractive index. The distinct deviation of about A comparison of the E04 and the ETauc optical band
1.2 J∕cm2 measured for the two pure SiO2 thin films gaps for the Al2 O3 ∕AlF3 composite coatings revealed
might be explained by the different optical band gap an offset of about 5%. By the comparison of the LIDT
energies of the applied substrate materials. By com- measurements at 343 and 1030 nm for the Al2 O3 ∕
paring the results at 343 nm for the two SiO2 coatings AlF3 sample set, a linear dependency with the optical
on fused silica and MgF2 substrates, no difference in band gap energy E04 and a wavelength scaling factor
the LIDT is observed. This discrepancy is not under- of 1.9 is observed. Finally, a slightly higher LIDT
stand so far and will need further investigation on the than for the SiO2 reference coating is measured for
thin film properties as well as on the measurement an oxyfluoride thin films with 23% O fraction of
conditions. To obtain information about the wave- the F O content at both wavelengths.
length scaling of the LIDT, the results at 343 and
1030 nm are compared in Fig. 17 for the Al2 O3 ∕ The authors thank the German Federal Ministry of
AlF3 composite coatings and in Fig. 18 for the Economics and Technology (BMWi) for the financial
Al2 O3 ∕SiO2 mixture thin films. At both wavelengths, support of the research project “TAILOR” under
a linear dependency of the femtosecond LIDT with the Contract No. 16IN0667 within the framework of
optical band gap energy E04 is observed for the two the “InnoNet” program. Also, funding by the German
different material combinations. For the Al2 O3 ∕AlF3 Research Foundation (DFG) within the Cluster of
sample set a clear offset by a factor of 1.9 is deter- Excellence 201, “Centre of Quantum Engineering
mined, whereas the results for the Al2 O3 ∕SiO2 and Space Time Research,” QUEST, is gratefully
mixtures exhibit a wider scope for different interpre- acknowledged.
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Fig. 18. LIDTs measured at 343 and 1030 nm wavelengths as a magnetron sputtering,” Appl. Opt. 45, 4598–4602 (2006).
function of the optical band gap energy E04 for Al2 O3 ∕SiO2 7. F. Sarto, E. Nichelatti, D. Flori, M. Vadrucci, A. Santoni, S.
composite coatings. Pietrantoni, S. Guenster, D. Ristau, A. Gatto, M. Trovò, M.
Abstract. Optical materials submitted to multiple subpicosecond irradiations are known to exhibit a decrease of
the laser-induced damage threshold (LIDT) with the applied number of pulses, an effect referred to as “fatigue” or
“incubation.” In this work, we experimentally investigate this effect for the case of optical thin films submitted to
multiple exposures with 500 fs pulses at different wavelengths: 1030, 515, and 343 nm. Niobia, hafnia, and silica
films made with dense coating techniques (magnetron sputtering, ion-assisted deposition, and reactive low volt-
age ion plating) are studied, as well as the surface of a fused silica substrate. These samples have been exposed
to different pulse numbers (from 1 to 100,000) at a low-frequency repetition rate (less than 1 kHz) and the LIDT
has been measured. The results reveal the differences between materials and for the various wavelengths such
as the decrease rate of the LIDT or the stabilization level that is reached after multiple exposures. All the results
evidence the role of native- and laser-induced defects that we discuss on the basis of published works on the
subject. © 2014 Society of Photo-Optical Instrumentation Engineers (SPIE) [DOI: 10.1117/1.OE.53.12.122509]
Keywords: laser damage; thin films; silica; niobia; hafnia.
Paper 140718SS received May 3, 2014; revised manuscript received Jul. 11, 2014; accepted for publication Jul. 14, 2014; published
online Aug. 6, 2014.
Fig. 2 (a) Autocorrelation trace of the temporal profile of the beam at 1030 nm with sech2 fitting, (b) spatial
profile of the beam at the focus point on the sample for the three wavelengths.
the ISO standards.27 In the case of the 1-on-1 tests, each site is dependent on the electric field distribution in the film.
is irradiated one time at a specified fluence, and in the case of The internal LIDT is then derived from the experimental
S-on-1 tests, each site has been irradiated S times at a con- value and is more convenient for comparisons:
stant fluence. For each energy, we have tested five indepen-
dent sites to make sure that the result is repeatable. A LIDTinternal ¼ jEmax ∕Einc j2 LIDTmeasured ; (1)
maximum number of 100,000 shots has been defined in
order to obtain a reasonable duration of the experiments and with Emax ∕Einc the ratio of the maximum of the standing
to obtain the LIDT stabilization level. However, as we will wave electric field distribution in the film to the incident one.
see in the results section, the stabilization level can be The damage detection and the damage criterion are two
obtained above this number of pulses. key elements of a test procedure. The detection is made in
To evaluate the maximum fluence Fm on the sample, we situ by a Nomarski microscope with a 50× Mitutoyo Plan
used the effective area equation that links the total energy Apo SL infinity-corrected objective mounted on a BXFM
and the beam image in the sample plane (see Refs. 27 Olympus (Tokyo, Japan) microscope. Before and after each
and 26). With this method, we can determine a precise shot, an image of the irradiated area is done with a charge
value of the fluence incident on the sample by taking the coupled device (CCD) camera (COHU high performance
CCD). An image processing algorithm realizes the subtrac-
real shape of the beam into account. Table 1 shows the sta-
tion, filtering, and binarization process to determine any
tistics of the measurement of the effective area of the beam
changed pixel value compared to a threshold defined by
and the temporal width. The damage threshold is calculated
the user. For some measurements, an ex situ observation
to be between the highest fluence with no damage and
through another Nomarski microscope with three objectives
the lowest fluence at which damage occurred. The LIDT (20×, 50×, and 100×) is made. The damage criterion is then
any visible modification detected through this system. This
modification can be mechanical as well as refractive index
Table 1 Error budget on the experiment. changes.
Table 2 Sample properties. Band gap energies are estimated values based on previous studies24 (therefore, we have added a reasonable error
bar), thickness and refractive index have been determined by the analysis of spectrophotometric measurements.
Deposition Energy gap Thickness Refractive index Refractive index Refractive index
Sample technology (eV) (nm) at 1030 nm at 515 nm at 343 nm
MS (with 5% silica content) 5.6 0.2 500 2.02 2.07 2.14 þ 0.0003i
Fig. 5 Results of the S-on-1 LIDT measurements made on the two Nb2 O5 samples (IAD: ion-assisted
deposition; MS: magnetron sputtering). (a) LIDT values as a function of the number of applied pulses and
wavelength, (b) same results but normalized with the single-shot LIDT.
Fig. 6 Results of the S-on-1 LIDT measurements made on the different HfO2 samples. (a) and (b) HfO2
film made by ion-assisted deposition, (c) and (d) HfO2 film made by reactive low voltage ion plating, (e)
and (f) mixture film of HfO2 and SiO2 made by magnetron sputtering. The same scale is used for all
the samples.
Fig. 7 Results of the S-on-1 LIDT measurements made on the two HfO2 samples. (a): LIDT values as
a function of the number of applied pulses and wavelength, (b) same results but normalized with
the single-shot LIDT.
effect but only after multiple irradiations: for a low number for bulk silica and the laser-induced damage resistance is
of pulses, damage is initiated at the surface and for a large then linked to the intrinsic properties of silica.
number of pulses damage initiates in the bulk. We have given At 1030 nm, the single-shot LIDT value is 4 J∕cm2 and
the information about the damage location in the results dis- then continuously decreases with the applied number of
played in Fig. 8. pulses: it is less than 50% of the single pulse value after
The results obtained on the three different silica samples 100,000 shots.The single-pulse LIDT value is comparable
are very similar at 1030 and 515 nm: either in thin film or to what has been measured by other groups at 800, 1030, or
bulk form, the single pulse LIDT and the fatigue effect are 1053 nm (see a review on silica LIDT values in Ref. 24).
the same if we take the error bars on the measurements into There are, however, few systematic studies of the LIDT
account. One possibility for such an observation would be dependence with the number of pulses in the literature.
that the subtrate is limiting the LIDT of the film samples, Rosenfeld et al.10 have studied the dependence on the
so that we have measured the LIDT of the substrate three pulse number of the surface damage threshold for a-SiO2
times. This is also corroborated by the fact that the damage with 100 fs∕800 nm pulses and they have observed a 70%
initiates in the bulk. Therefore, the damage threshold of the decrease in the damage threshold in the first 20 shots, and
films is the same or higher than the values reported in Fig. 8 then a saturation of the incubation effect. In our case, the
Fig. 8 Results of the S-on-1 LIDT measurements made on the two thin films SiO2 samples (IAD: ion-
assisted deposition; MS: magnetron sputtering) and the bare fused silica susbtrate. (a) LIDT values as a
function of the number of applied pulses and wavelength. The black circles/ellipses point out the case
where damage initiates in the subsurface, (b) same results but normalized with the single-shot LIDT.
4 Conclusion
A new experimental tool for the study of laser damage re-
sistance from the UV to the NIR in the subpicosecond regime
has been introduced in this paper. Using this instrument, we
have reported on the experimental data that were not avail-
able in the community until now: the laser damage resistance
of optical thin film materials for multiple pulse irradiations
from 343 to 1030 nm. These data are of particular interest
for various applications, but also for the comparison of theo-
retical models in experiments, particularly the scaling law of
LIDT with the photon energy in the case of a single-pulse
irradiation. Based on published works on the subject, the
“fatigue” or “incubation” of the materials that has been
Fig. 10 Incubation coefficient of the different tested samples (ratio observed could be related to electronic defects in the
between the LIDT after N shots and the single-shot LIDT) for different different materials under study, but at this point only some
wavelengths and 1000∕100; 000 shots. The LIDT values are given at speculations about the defects involved could be done: to
500 fs for the different wavelengths.
obtain more knowledge on these defects, further studies
are required using, for instance, specific experimental tech-
irradiation. The incubation coefficient can also be strongly niques such as pump/probe measurements or nondestructive
dependent on the wavelength: different defects or channels analysis for the characterization of linear and nonlinear
are possibly activated depending on the photon energy in absorptions (photothermal techniques, luminescence, etc.).
this case. If we look at details for the results for each material
below: References
1. E. W. Van Stryland et al., “Pulse-width and focal-volume dependence
• Nb2 O5 : the results are the same for the two samples, of laser-induced breakdown,” Phys. Rev. B 23(5), 2144 (1981).
except in the UV, but in this case the wavelength is 2. D. L. Merkle, N. Koumvakalis, and M. Bass, “Laser-induced bulk
very close to the absorption edge and the material damage in SiO2 at 1.064, 0.532, and 0.355 μm,” J. Appl. Phys.
55(3), 772 (1984).
has no real significance for high power applications. 3. D. Kitriotis and L. D. Merkle, “Multiple pulse laser-induced damage
In the IR and the UV, there is a significant difference phenomena in silicates,” Appl. Opt. 28(5), 949 (1989).
between the incubation coefficient, but as was shown 4. L. Gallais, J. Y. Natoli, and C. Amra, “Statistical study of single and
multiple pulse laser-induced damage in glasses,” Opt. Express 10(25),
in the previous section, the stabilization regime was not 1465 (2002).
reached at 515 nm after 100,000 pulses. So it is not 5. A. Hildenbrand et al., “Laser-induced damage investigation at
1064 nm in KTiOPO4 crystals and its analogy with RbTiOPO4 ,”
possible to compare the stabilization threshold for Appl. Opt. 48(21), 4263 (2009).
these two wavelengths. 6. C. S. Lee, N. Koumvakalis, and M. Bass, “A theoretical model for
multiple-pulse laser-induced damage to metal mirrors,” J. Appl. Phys.
• In the case of HfO2 , the results are similar no matter 54(10), 4727 (1983).
what the wavelength, except for one sample in the UV 7. R. M. O’Connell, T. F. Deaton, and T. T. Saito, “Single- and multiple-
with some correlation to a high extinction coefficient shot laser-damage properties of commercial grade PMMA,” Appl. Opt.
23(5), 682 (1984).
(compared to other samples). For this material, the 8. M. Mero et al., “On the damage behavior of dielectric films when illu-
stabilization threshold is reached: for instance, in the minated with multiple femtosecond laser pulses,” Opt. Eng. 44(5),
051107 (2005).
case of the MS samples, we know the significant differ- 9. A. E. Chmel, “Fatigue laser-induced damage in transparent materials,”
ence between the incubation coefficient after 1000 or Mater. Sci. Eng. B 49(3), 175 (1997).
100,000 pulses no matter what the wavelength. This 10. A. Rosenfeld et al., “Ultrashort-laser-pulse damage threshold of trans-
parent materials and the role of incubation,” Appl. Phys. A 69(1), S373
material is then of particular interest for high power (1999).
applications. It could be a better choice compared to 11. J. Bonse, A. Rosenfeld, and J. Kruger, “Implications of transient
higher bandgap materials that have a higher single-pulse changes of optical and surface properties of solids during femtosecond
laser pulse irradiation to the formation of laser-induced periodic
LIDT (Sc2 O3 ) but a higher incubation coefficient.18,22 surface structures,” Appl. Surf. Sci. 257(12), 5420 (2011).
• For SiO2, there is a continous decrease of the LIDT 12. O. M. Efimov et al., “Color-center generation in silicate glasses
exposed to infrared femtosecond pulses,” J. Opt. Soc. Am. B 15(1),
with the number of applied pulses and it was not pos- 193 (1998).
sible to observe a stabilization threshold with the maxi- 13. M. F. Koldunov, A. A. Manenkov, and I. L. Pokotilo, “Thermoelastic
and ablation mechanisms of laser damage to the surfaces of transparent
mum of pulses that we have applied. Considering also solids,” Quantum Electron. 28(3), 269 (1998).
the results of Rosenfeld et al.10 with a measured incu- 14. K. Bien-Aimé et al., “Impact of storage induced outgassing organic
bation coefficient of almost 0.2 and the fact exposed contamination on laser induced damage of silica optics at 351 nm,”
Opt. Express 17(21), 18703 (2009).
previously, we have no indication yet of a possible 15. W. Riede et al., “Laser-induced contamination on space optics,”
threshold for stabilization of the LIDT. It appears that Proc. SPIE 8190, 81901E (2009).
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in some conditions, after a large number of pulses the phosphate: statistical interpretation of measurements and the damage
thresold of SiO2 can be the same as that of HfO2 . This initiation mechanism,” Opt. Eng. 51(12), 121906 (2012).
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18. C. S. Menoni et al., “Advances in ion beam sputtered Sc2 O3 for optical 26. B. Mangote et al., “A high accuracy femto-/picosecond laser damage
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native and laser-induced states on the dielectric breakdown of wide 31. S. S. Mao et al., “Ultrashort-laser-pulse damage threshold of trans-
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bulk and coating optical materials at 1030 nm, 500 fs,” Appl. Opt.
53(4), A186 (2014). Biographies of the authors are not available.
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194.167.230.230 On: Tue, 16 Jun 2015 13:25:29
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damage process are expected when changing the wave- excitation, particularly for the case of thin films for which in-
length; and the comparison of theoretical and experimental terference effects have to be taken into account.
results should allow optimizing, improving, and verifying Let us note that in the present work, we investigate only
the excitation models that have been often compared only to the single pulse damage threshold dependence on wave-
NIR results. There have been only few studies dedicated to length. The case of multiple pulses should also be of very
such a topic. Simanovskii et al.12 have studied the optical high interest but should be a complete study in itself. Indeed,
breakdown threshold dependence with wavelength, for wide the incubation behavior under successive irradiations
and narrow gap materials, in the case of mid-IR picosecond involves native or laser-induced electronic defect states that
pulses (4.7–7.8 lm). In these conditions and depending on require specific models to address15 and are beyond the
the bandgap of the material, tunnel ionization (TI) alone or scope of this paper.
TI with subsequent avalanche was reported as the cause for The paper is organized as follows: in a first part, we ana-
dense plasma formation leading to laser absorption and dam- lyze the wavelength dependence of the different ionization
age. Jia et al.13 have also studied the wavelength dependence mechanisms, second, we describe experiments and models,
of high bandgap materials (fused silica and CaF2 crystals) in then the experimental and numerical results are reported and
the range 250–2000 nm with 150 fs pulses. The threshold flu- eventually a discussion is conducted.
ences were observed to be nearly constant in the NIR region,
and to decrease rapidly with laser wavelength in the visible II. IONIZATION MECHANISMS AND THEIR
and Near UltraViolet (NUV) regions. From the comparison DEPENDENCE ON WAVELENGTH
of the experimental results and model the authors conclude
A phenomenological description of light-matter interac-
that conduction band electron absorption, via sub-
tion at high intensities can be described as follows. In materi-
Conduction Band (CB) transitions, and subsequent impact
als for which there exists an energy gap between the valence
ionization plays an important role in the damage of dielec-
and conduction band, i.e., semiconductors and dielectrics, it
trics irradiated by the visible and NUV fs lasers. Recently,
is necessary to supply enough energy to bridge this gap to
Grojo et al.14 have studied various band-gap materials with
promote electrons to the conduction band. Depending on the
tightly focused femtosecond laser pulses with wavelengths
photon energy, the absorption can be either linear or non-
in the range 1200–2200 nm. In these conditions, they show
linear. In each case, the result of the absorption process is
that nonlinear absorption is independent of the wavelength,
except for low bandgap materials. the creation of free electrons in the material. Because both
In the present work, the optical breakdown threshold of absorption mechanisms initiate the excitation process by cre-
a large range of materials, from semiconductors to high ating seed electrons for the avalanche, we will refer to it as
bandgap dielectrics, is explored: Silicon (Si), Zinc Selenide the “early ionization mechanism.” The resulting free elec-
(ZnSe), Niobium Oxide (Nb2O5), Tantalum Oxide (Ta2O5), trons may further absorb single photons and gain energy, a
Hafnium Oxide (HfO2), Scandium Oxide (Sc2O3), process that we will refer as “free electron heating.” Once
Aluminum Oxide (Al2O3), Silica (SiO2), and Calcium electrons have gained sufficient energy, they can transfer
Fluoride (CaF2). Such a set of samples provide materials energy to bound electrons by collisional excitation which
with bandgap ranging from 1 to 10 eV. An optical parametric will generate other free electrons. The last mechanism gives
amplifier system delivering 100 fs pulses was used to mea- the potential for an avalanche process. Eventually, an impor-
sure the breakdown threshold in a range of wavelengths from tant effect that has to be taken into account is the modifica-
the UV (310 nm) to the NIR (1030 nm) thus providing pho- tion of the material properties during the irradiation that
ton energies from 1.2 to 4 eV. In order to investigate the scal- influences the pulse propagation and absorption in the mate-
ing of the femtosecond laser damage threshold with the rial. In order to apprehend the influence of the photon energy
bandgap and photon energy, increments of 0.5 eV were cho- on the excitation processes, we analyze in the following its
sen to set the different photon energies of the tests thus pro- influence on each separate mechanism.
viding a two-dimensional parametric study (bandgap/photon
energy). In order to calculate the optical breakdown, we A. Early ionization mechanisms
have modeled the evolution of the free-electron density in In the case of a transparent material at the wavelength of
the conduction band of the laser-irradiated materials. The irradiation, the initial excitation of carriers involves non-
Keldysh theory is used to obtain the photoionisation coeffi- linear processes due to the strong electric field. This process
cient and the multiple rate equation introduced by Rethfeld6 can be described by the Keldysh theory,1 and we will use its
to describe collisional excitation and avalanche. This complete formulation for solids in this work. An important
approach has been indeed shown to be valid in broad range parameter for this description is the so-called Keldysh pa-
of time scales. However, the applicability at different wave- rameter, c, given as
lengths has not been studied. Additionally, another pathway
pffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffi
for direct electronic excitation has been added to the model c ¼ x m Eg =eE; (1)
in order to take into account linear absorption when going
down to the UV. Eventually, a time and space dependence of with x being the laser frequency, m* being the electron
the optical properties of the materials with the electron den- reduced mass, Eg being the bandgap of the material under
sity has been introduced in an electromagnetic wave equa- consideration, e being the electron charge, and E being the
tion model, thus providing a complete description of the applied electric field.
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223103-4 Gallais et al. J. Appl. Phys. 117, 223103 (2015)
energy has to be provided in addition to the bandgap when where n0 is the refractive index of the unexcited material.
an electron is to be shifted from the VB into the CB. Its Absorption in the electron plasma is the main mechanism for
contribution is a squared dependence with wavelength. energy transfer from the light field to the solid leading to
For instance, in the case of a 100 fs pulse with 1 J/cm2, damage if sufficient energy is deposited. A critical electron
which is a typical laser-induced breakdown value in this re- density Nc can be defined when the material becomes
gime, osc 1.5 eV in the NIR (1 lm)and 0.1 eV in the UV strongly absorbing, which occurs when x ¼ xp
(300 nm).
Considering the different elements discussed above and x2 0 m
Nc ¼ : (7)
in order to estimate the impact ionization rate evolution with e2
wavelength, we can in a first approach calculate the mean The critical density value is increasing when the wavelength
rate of energy absorbed by the electrons, which is the rate of is decreasing: a higher density of electrons is required in the
energy absorbed by one electron (rI, with I being the inten- UV to induce a strong absorption. Once the onset of absorp-
sity) multiplied by the number of electrons. The rate of tion is reached the material acquires metal-like properties
impact ionization can then be estimated by such as a finite penetration depth that can be defined as
ls ¼ k=ð4pÞimgð~ n Þ. The energy is then deposited in a thin
dN rIN layer and the higher the photon energy, the thinner the layer.
¼ : (5)
dt c Considering this effect, Gamaly et al.18 have derived a rough
estimate of the threshold dependence with wavelength
We have plotted on Figure 2 this ionization rate. We
have chosen to plot it for electronic densities in the range of 3
Fth ¼ ðb þ Ji Þknc ; (8)
magnitude of what can be experimentally measured at the p
damage threshold:16 1020 cm–3. It is plotted on the same
with b being the binding energy of ions in the lattice and Ji
graph with the photo-ionization rate, for the sake of
being the ionization potential, that depend on the material,
comparison.
and Nc being the critical density that is used to define thresh-
In the case of a low bandgap material, such as Niobia in
old. A linear relationship of the LIDT with wavelength is
the example shown on Fig. 2, PI should be the main ioniza-
therefore expected from these considerations.
tion mechanism leading to the generation of a high density
of free carriers from the UV to the visible: indeed even in the III. EXPERIMENTS
case of a very high carrier density as plotted on Fig. 2, the
Impact Ionization (II) rate is of the same order of magnitude The objective of the experiments was to study the laser
or lower than the PI rate and no avalanche should occur. damage resistance of optical materials as a function on the
Only in the NIR the effect of II could have a significant con- photon energy. For this purpose, a femtosecond laser facility
tribution. However, in the case of high bandgap materials with a tunable output wavelength from DUV to Infrared was
such as silica in the present case, the PI should start the exci- used in order to explore the defined photon energies in the
tation, but during a 100 fs pulse the impact ionization should maximum range as possible. Because the photon energy is
be the dominating excitation mechanism from the NIR to the the relevant parameter in the models, we tried to adjust line-
visible. In the UV (for photon energies greater than 3 eV), arly this parameter and a step target of 0.5 eV was defined
only PI should be involved. with a minimum of 1 eV and a maximum of 5 eV. The differ-
These considerations are based on an oversimplified first ent wavelengths/photon energies that have been used in prac-
order estimation of the II rate. A more accurate description tice in the experiments are given in Table I.
takes into account the CBE energy distribution as discrete Different materials were under investigation in order to
levels, and only CBE that have reached a critical energy can study the different processes involved as a function of the ra-
transfer their energy to a VBE. This approach is described in tio of photon to bandgap energies. Materials with bandgap in
the range from 1 eV (silicon) to 10 eV (CaF2) were chosen
detail by Rethfled7 and shows that II is overestimated with
with a targeted step of 1 eV. Therefore, LIDT of the mate-
the approach we have based on discussions. We will go fur-
rials can be investigated in a two-dimensional space.
ther on these points in Sec. IV by applying the MRE model
for interpretation of results.
A. Samples
D. Energy deposition into the material Thin films and surface of bulk samples have been inves-
tigated. The films were oxides (Nb2O5, Ta2O5, HfO2, Sc2O3,
Once a high density of free carriers has been generated
Al2O3, and SiO2) deposited on fused silica substrates.
in the material, the optical properties change dramatically.
Nb2O5, Ta2O5, HfO2, and SiO2 films were deposited by
This effect has consequences on the pulse propagation in the
material. The refractive index (~n ) dependence on the elec- TABLE I. The different photon energies (wavelengths) explored in the
tronic density can be described based on the Drude model experiment.
sffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffiffi
Photon energy (eV) 1.2 1.5 1.9 2.5 3.1 3.5 3.6 4
Ne2 1
n~ð N Þ ¼ n20 2
; (6) Wavelength (nm) 1030 800 650 500 400 357 343 310
m 0 x þ ix=sD
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TABLE II. Optical properties (bandgap energy and refractive index) of the samples.
Material Si ZnSe Nb2O5 Ta2O5 HfO2 Sc2O3 Al2O3 SiO2 SiO2 CaF2
Form <–Bulk–> <–Thin film–> <–Bulk–>
Bandgap energy (eV) 1.06a 2.7a 3.46b 4.11b 5.55b 5.66b 6.12b 7.5c 8.5a 10a
n at 1240 nm 3.75a 2.4a 2.21b 2.1b 1.98b 1.94b 1.66b 1.50b 1.45a 1.43a
n at 800 nm 3.73 þ 0.005ia 2.5a 2.24b 2.12b 1.99b 1.95b 1.67b 1.50b 1.45a 1.43a
n at 650 nm 3.9 þ 0.02ia 2.58a 2.27b 2.13b 2.00b 1.96b 1.67b 1.50b 1.46a 1.43a
n at 500 nm 4.32 þ 0.07ia 2.75 þ 0.1ia 2.27b 2.18b 2.02b 1.98b 1.67b 1.51b 1.46a 1.44a
n at 400 nm 5.2 þ 0.26ia 2.8 þ 0.4ia 2.35b 2.25b 2.05b 2.02b 1.67b 1.51b 1.47a 1.44a
n at 350 nm 5.6 þ 3ia 2.9 þ 0.5ia 2.69 þ 0.015ib 2.33b 2.08b 2.05b 1.67b 1.52b 1.48a 1.45a
n at 310 nm 5 þ 3.6ia 3 þ 0.7ia 3 þ 0.27ib 2.44b 2.12b 2.09b 1.67b 1.53b 1.49a 1.45a
n at 361 nm 2 þ 4ia 3.2 þ 0.9ia 2.95 þ ib 3 þ 0.3ib 2.22b 2.21b 1.68b 1.55b 1.50a 1.46a
a
Value extracted from Handbook of optical materials.36
b
Data obtained from UV-visible spectrophotometric measurements and fit of data with Tauc-Lorentz model.
c
Data obtained from DUV spectrophotometric measurements and Tauc-gap plot.
electron beam deposition with ion assistance and Sc2O3, energy was adjusted by motorized k/2 plate and broadband
Al2O3 films were deposited with Ion Beam Sputtering. These polarizer. A photodiode calibrated with a pyro-electric
two techniques can produce dense, smooth, and stoichiomet- energy meter head (Ophir, “PE10-C”) was employed to
ric layers. Their optical properties (refractive index, absorp- determine and record the energies of the incident laser
tion coefficient, and band gap energy) have been determined pulses. Depending on the available energy at various wave-
from UV-visible spectrophotometric measurements and fit- lengths, the beam was focused into the target plane sample
ting algorithms.19 The bulk materials come from different by one of fused silica lens (f ¼ 4.5, 7.5, 10, and 50 cm). The
vendors as windows for laser applications. The optical prop- effective beam diameter was specified at Imax/e level of in-
erties of the samples are given in Table II. tensity for the different wavelengths. Spectral widths and
beam diameters used at particular wavelength are summar-
B. Experimental set-up ized in Table III. The maximal output power available from
secondary OPA source was strongly dependent on the wave-
Experimental set-up used for characterization of LIDTs
length and for some samples, having higher LIDTs, maxi-
was developed at Vilnius University (Fig. 3). High peak
mum fluence was not enough to cause damage. Note that
power Ti:Sapphire laser system (Coherent, “Libra”) was
additional tests were conducted at 1030 and 343 nm on
combined with commercial Optical Parametric Amplifier
another experiment, described in Ref. 20, for comparison of
system—OPA (Light Conversion, “Topas 4–800”) in order
results and additional data.
to produce light pulses at desired wavelength. The irradiation
of primary laser source was centered at 800 nm wavelength
C. Test procedures
with pulse duration of 100 fs and a repetition rate of 500 Hz.
After nonlinear light conversion in OPA system, a set of All the samples have been measured with the same ex-
dichroic separator mirrors was used to extract spectrum of perimental configuration and with the same procedure. The
testing pulses from residual irradiation (either from pump or samples have been tested at normal incidence, with the sur-
one of signal-idler wavelengths). The laser pulse spectrum face to be tested facing the incoming beam (front face test-
was characterized by a fiber spectrometer (Avantes, ing), with a linear polarization. The damage process was
“AvaSpec series”). The number of incident laser pulses was found to be very deterministic, and therefore, measurements
set by a computer controlled mechanical shutter. Pulse were performed in 1-on-1 mode by gradually increasing laser
fluence in fresh unexposed sites. Since measurements for all
wavelengths were done on the same samples with very lim-
ited area budget at least 50 sites were irradiated for each
sample and wavelength. The increment of fluence step was
dependent on the relative threshold of the sample at particu-
lar wavelength and varied from 0.02 J/cm2 to 0.07 J/cm2 for
low and high LIDT samples, respectively. This resulted in at
least 10% or better measurement accuracy. The state of
TABLE III. Beam diameters and spectral widths used for testing at different
wavelengths.
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223103-6 Gallais et al. J. Appl. Phys. 117, 223103 (2015)
irradiated sample was determined from post mortem 800 nm and 1030–1053 nm are plotted in Fig. 5, along with
Nomarski microscopy (Olympus, BX51). Damage was the same results rescaled at 100 fs with the scaling law
defined as any modification observed in the irradiated area described in Ref. 10.
with Nomarski mode. The damage threshold is calculated to The different values are found to be in the range of 2–5
be between the highest fluence with no damage and the low- J cm–2, with a mean value of 3.35 J cm–2. The discrepancy
est fluence at which damage occurred. in the results of the groups may be due to experimental dif-
The experimental LIDT data have been rescaled in order ferences: the LIDT can depend on the damage test proce-
to take into account of the electric field distribution in the dure, damage criterion, damage detection, and laser
samples (see, for instance, Fig. 4). The internal, or intrinsic stability. Another possible explanation may be that, since
LIDT is then derived from the experimental data and is the the tested fused silica samples were not the same, depend-
relevant value for comparisons21 ing on the fabrication and polishing processes used, the
samples may have different properties. In our case, the
LIDTinternal ¼ jEmax =Einc j2 LIDTmeasured ; (9) measured damage threshold of the fused silica sample at
800 nm/100 fs is 3.68 J cm–2 (not corrected with internal
with Emax/Einc being the ratio of maximum of the standing Electric Field value).
wave electric field distribution in the film to the incident one.
This correction factor is applied to the coating samples, since IV. NUMERICAL SIMULATIONS
there are interference effects in the film, and also to the bulk The model employed to simulate the LIDT dependence
samples to compare all samples on the same basis (in this with wavelength is described. Photo-ionization is calculated
case, Emax is the value on the surface). This ratio is calcu- with the Keldysh theory, as described in the first section. The
lated numerically based on the refractive index and film evolution of the free-electron density in the conduction band
thickness given in Table II. is calculated with a multiple rate equation, taking into
It has to be pointed out that due to this rescaling factor, account the kinetic energy of photo-ionized electrons. The
the experimental data are not directly comparable to other pulse propagation in the excited material is described with a
published data. For instance, in the case of silicon, a LIDT one-dimensional electromagnetic wave equation using a
of 0.04 J cm–2 is obtained at 800 nm which corresponds to a Drude model for the dielectric permittivity. We solve
measured LIDT of 0.25 J cm–2. To compare the LIDT val- numerically the coupled equations and obtain the wavelength
ues reported in this paper with other published data, we dependence of threshold fluences and a description of energy
have investigated the results of several LIDT measurements deposition in the material.
that were made on the surface of fused silica, the most
widely studied dielectric material in the literature. Only
A. Rate equation
experiments involving single pulses were selected, since
incubation effects occur for multiple pulses, which can In order to describe the generation of free electrons in
make the results non comparable. Also, only results the conduction band and the evolution of their density under
between 50 fs and 500 fs were selected, closed to our exper- short laser irradiation, we used the MRE model.6 This model
imental conditions. The results found by different groups at takes into account the non-stationary electron distribution in
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223103-7 Gallais et al. J. Appl. Phys. 117, 223103 (2015)
the CB, by discretizing the conduction band into discrete The asymptotic value was estimated from a fixed cross
energy levels separated by one photon energy. It provides an section derived from Drude absorption (Eq. (5)), taking into
accurate estimation of the role of the impact ionization and account the ln(2) factor mentioned in Ref. 7. Consequently,
avalanche process with a simple formalism. The single rate
equation results indeed in an overestimation of the avalanche r 1
W1pt ¼ p ffiffiffi I: (12)
and with it the free electron density.7 As a consequence, a ð Þ
ln 2 c 21
k
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223103-8 Gallais et al. J. Appl. Phys. 117, 223103 (2015)
pffiffiffiffi
3e2 m 3=2 of the energy absorption as it will be described latter. The
see ¼ E : (14)
16p0 kin increase of the complex refractive index will lead to strong
coupling of the energy in the material. The two parameters
For se–i the simple model derived by Starke et al. is are connected, and transient calculations of the intensity dis-
employed17 tribution are necessary for a complete description of energy
pffiffiffiffi 3=2 deposition in the material.
16p20 mEkin
sei ¼ pffiffiffi : (15)
2e4 N
C. Pulse propagation
The overall scattering time time is given as The electric field distribution in the sample is calculated
in the frequency domain, i.e., under stationary assumption,
s1 1 1
D ¼ see þ sei : (16)
with the matrix method that is classically used in the field of
It can be seen from these equations that sD is depend- optical thin films:40 it offers the ability to take into account
ent on the electron density and the excitation level of the the polarization and the incidence angle of the incoming
electrons. The mean kinetic energy of the conduction band wave. An assumption of negligible spectral dispersion is
electrons is necessary for calculating the collision time. done: calculation is done at the central wavelength of the
We roughly estimated it to Ekin ¼ 0.5Eg. Typical values laser which we have considered as reasonable given the
obtained for fused silica with the previous expressions are spectral widths reported in Table III. Practically, the system
se–e ¼ 0.2 fs and se–i ¼ 1.6 fs (with N ¼ 1021 cm3). A more is divided in thin slices, typically 1 nm, each slice being
accurate estimation would be to take the mean energy characterized by constant material properties (bandgap) and
value taking into account the contribution of electrons at time dependent properties (electronic density and refractive
each energy level in the conduction band, as defined in the index). The system is then equivalent to a multilayer stack in
MRE model. However, given the assumptions used for the which the electric field has to be recalculated for each time
estimation of sD, it seems as an unnecessary and compli- iteration. At each of these iterations, the optical properties at
cated refinement. Fig. 6 shows how the optical properties the end of the previous step are taken as an input. A
(refractive index and extinction coefficient) depend on free Gaussian temporal shape is considered. This approach
electron density evolution. The calculation is conducted involves coupled differential equations that are solved
for a low bandgap (niobia) and high bandgap (silica) numerically. An example of calculation is given in Fig. 7 for
material.
The optical properties are strongly affected when the
electronic density is increasing, the materials gradually ac-
quire a metal-like behavior. The changes are more pro-
nounced when the material bandgap is higher, because the
kinetic energy of the electrons can reach higher levels in the
conduction band. The modification of the refractive index
will induce phase shifts that will have an effect on the elec-
tric field distribution in the sample, particularly in optical in-
terference coatings. This effect can change the localization
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223103-9 Gallais et al. J. Appl. Phys. 117, 223103 (2015)
the case of an optical thin film under investigation in the energy being in the form of excited electrons. Subsequent
experiments. to the laser irradiation, the laser energy has to be transferred
The modifications are mainly induced at the location of from the heated electronic system to the lattice. Without
the peaks of standing electric-field. In the particular case going in the detail of this transfer mechanism, one can
under investigation in Fig. 7, they occur at the film/substrate assume that damage of the material takes place when the
interface and in the middle of the film. At these locations, deposited energy is larger than a critical energy that is suffi-
the optical response of the dielectric material is strongly cient to cause material modifications (for instance, melting,
modified due to the high free electron density. This results in vaporization). In order to obtain the theoretical damage
local absorption and a decrease of the electric field in the threshold, it is possible to use a criterion based on the total
film. At the end of the pulse, the maximum E-field occurs at absorbed energy density at the end of the pulse. However,
the air/film interface and a new peak of electronic density because the material becomes strongly absorbing when the
appears. The correlation between these localized modifica- critical density (Eq. (7)) is reached, the criteria of the criti-
tions and the observed morphologies will be established in cal density are often used to evaluate the damage threshold.
Sec. V B. Recently, it was demonstrated that the energy criteria was
more appropriate than the critical density one.41 An exam-
D. Energy deposition in the material
ple of calculation is given in Fig. 9 for the case of a Nb2O5
film. The specific energy (energy per unit of mass) depos-
When the material is irradiated with the laser pulse a ited in the material at the end of the irradiation is calculated
fraction of the laser energy is reflected, another is transmitted as a function of the fluence, as the maximum electronic
and a certain percentage is absorbed. Except in the UV for density that is reached. Taking into account an order of
low band-gap materials, there is no initial absorptivity. The magnitude of 1 kJ/cm3 for the melting threshold and 1021
interaction and subsequent transmission, reflection, and electrons/cm3 for the critical electron density, the respec-
absorption of laser energy into the material can be described tive theoretical damage thresholds are 0.6 J/cm2 and 0.35 J/
with the previous numerical model. Since we can calculate cm2. A significant difference is obtained because the criti-
the time-dependent optical properties and hence absorptivity cal density is only a criteria for the onset of absorption
linked to the evolution of the free electron density, we whereas the energy criteria takes into account the onset of
directly obtain the absorbed energy in the material with time absorption and the quantity of deposited energy in the
integration of the absorbed intensity. An example that corre- material.
sponds to the previous case of Fig. 7 is given in Fig. 8. The
energy is absorbed in this case at the trailing end of the
V. RESULTS AND DISCUSSION
pulse, after sufficient free electrons have been generated by
the avalanche process for the material to be locally highly A. Comparison between experimental and numerical
absorbing. For a fluence of 6.4 J cm2, the absorbed fluence results
is 0.5 J cm2.
For all samples and wavelengths, a deterministic behav-
ior has been observed: there is a clear transition between the
E. Damage threshold fluences for which damage and no damage occurs. The meas-
ured damage thresholds, rescaled according to Eq. (9), are
The described model has the ability to evaluate in
shown in Figs. 10–13. The data are also available plotted as
space and time the energy absorbed in the material, this
a function of wavelength in the Appendix (Figs. 18–21).
FIG. 9. Case of Nb2O5 film irradiated with 500 fs pulses at 1030 nm. The
FIG. 8. Same case as Fig. 7. The incident intensity on the structure is plotted energy per unit of mass is calculated as a function of the incident fluence
as a function of time, as the reflected, transmitted (through the substrate) and and compared to the electronic density reached. Taking into account a criti-
absorbed part. The absorbed fluence can be obtained by time integration of cal specific energy of 1 kJ/cm3 and a critical density of 1021 cm3, two thresh-
the absorbed intensity (red filled area). olds can be defined.
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223103-10 Gallais et al. J. Appl. Phys. 117, 223103 (2015)
FIG. 10. Experimental and calculated laser-induced damage threshold ver- FIG. 12. Experimental and calculated laser-induced damage threshold ver-
sus wavelength for silicon and zinc selenide. sus wavelength for hafnium oxide, scandium oxide and aluminum oxide.
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223103-11 Gallais et al. J. Appl. Phys. 117, 223103 (2015)
FIG. 14. Single pulse LIDT of optical materials measured at 100 fs/800 nm. FIG. 15. Single pulse LIDT of optical materials measured at 100 fs /
Results of numerical simulations are compared to experimental data. 400 nm. Results of numerical simulations are compared to experimental
data.
the MRE model does not account for the kinetic energy of
electrons injected in the CB, therefore, the model should not 8.3 eV were investigated and their findings suggest a phe-
be accurate at the N N þ 1 transitions and when near the nomenological formula Fth ¼ (c1 þ c2Eg)tk, with k a mate-
linear absorption band. rial and pulse duration independent constant (k 0.3). The
Second, we have calculated the evolution of the LIDT threshold fluence is then determined by the band gap of the
with the bandgap of the material for specific wavelengths. material only. This linear behavior was explained by taking
These calculations were done at 800 nm and 400 nm for into account the physical processes involved in the ioniza-
which a large number of different materials were tested tion processes at the initiation of the damage event (photo
(because of the high fluence available at these 2 wave- and impact ionization) and their dependency with the
lengths). The results of the simulations are compared to the bandgap. A similar behavior was also observed at 1030 nm/
experimental data on Figs. 14 and 15. It should be noted that 500 fs for oxide films.35 A comparison to the phenomeno-
with the exception of the wavelength, exactly the same simu- logical model of Mero et al. is done on Fig. 14, with the
lations parameters were used in both cases. coefficients taken from the original publication, including
Looking at Fig. 14 that corresponds to 800 nm, one can the error bars. The linear behavior is observed to be in good
observe that the experimental LIDT values are increasing agreement with LIDT values in a limited range of values.
with the bandgap of the material in a regular and continu- In the case of high bandgap materials (Calcium Fluoride in
ous way. These results can be compared to the ones of our case), there is a deviation from this linear relationship.
Mero et al.10 that were obtained at 800 nm at different sub- Indeed, the avalanche process requires seed electrons that
picosecond pulse durations: different oxides (TiO2, Ta2O5, are generated by photo-ionization, and as the bandgap is
HfO2, Al2O3, and SiO2) with band gaps ranging from 3.3 to increasing this generation is obviously less efficient. The
FIG. 16. Right: SEM observations of a single layer HfO2 film deposited on a fused silica substrate and irradiated at 1030 or 343 nm with different fluences
(increasing fluences from the left to right). Left: simulation of the electron density for irradiating fluences above the damage threshold. The positions of the
peaks of electron density are correlated to the locations of damage initiation.
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223103-12 Gallais et al. J. Appl. Phys. 117, 223103 (2015)
FIG. 17. Right: SEM observations of a single layer Ta2O5 film deposited on a fused silica substrate and irradiated at 1030 or 343 nm with different fluences
(increasing fluences from the left to right). Left: simulation of the electron density for irradiating fluences above the damage threshold. The positions of the
peaks of electron density are correlated to the locations of damage initiation.
non-linear behavior is explained very well with the model. the air/film interface, and at the film/substrate interface for
Additionally, the simulations are in accordance with experi- higher fluences. The SEM observation that has been com-
mental data at both wavelengths. In the case of 400 nm, pleted with optical profilometry measurements (not
large steps are predicted due to the predominant contribu- reported here) reveals that damage occurs first at this
tion of PI at this wavelength and the low number of photons 200 nm depth in the film, which is separated in two parts.
involved in the process: 2 photons from 3 to 6 eV, 3 photons At higher fluence, the film is totally removed because of
from 6 to 9 eV. However, these steps cannot be really evi- damage at the film substrate interface (black area on the
denced on the experimental data. last figure). This is very well correlated with what can be
expected from simulations. Similar observations and inter-
B. Analysis of spatial energy deposition
pretations can be done in the case of UV irradiation: dam-
age occurs at the location of the peaks of electronic
The localization of the deposited energy and therefore density. The same agreement between calculations and ex-
the localization of the damage initiation are related to the perimental observations is evidenced in the case of the
wavelength of irradiation. In the case of the surface of bulk HfO2 film.
materials, the absorption in the ionized dielectric occurs in
a skin layer near the surfaces that scales linearly with the
VI. CONCLUSIONS
wavelength.18 In the case of thin films, that were investi-
gated in our study, the energy deposition process is how- The laser-induced damage threshold of optical materials
ever more complex because of interference effects that has been studied experimentally and numerically in a range of
modulate the intensity distribution in space, but also in wavelengths from the NIR to the UV with pulse durations of
time due to the transient optical effects described in 100 fs. Experimental results reveal a decrease of the damage
Sec. IV. As an example of such complex deposition proc- threshold with the wavelength with a dependence on the
esses, observation of damage sites by SEM are displayed bandgap of the material, bringing new data for the community
in Figs. 16 and 17. in this field. Numerical models based on nonlinear ionization
In these two figures, it can be observed that on these two processes have been applied using Keldysh photo-ionization
samples damage occurs at different locations depending on theory and the description of impact ionization by a multiple-
the irradiation fluence and wavelength: localized at the sur- rate-equation system. By taking into account the change in the
face, inside the film at different depth, or at the film/substrate dielectric function of the materials during the laser pulse, its
interface. Multiple damage initiations at different depths in consequence on the intensity distribution in the material, and
the films are evidenced by the ring structures on the images. applying a critical energy level for the theoretical damage
These effects have also been observed on the other sample threshold, a fair description of the experimental data could be
materials (Niobia and silica films). A really interesting point obtained, both for the localization of the damage initiation
that is illustrated for the case of Hafnia is that the integrity of and for the quantitative evolution of the damage threshold
the film can be preserved when removed from the substrate, with photon energy and material properties.
meaning that the damage process is very localized. Therefore, the main conclusion of this paper is that
Simulations have been conducted based on the model devel- using a simple and generic model, taking into account only
oped in this work and are reported on the left hand side of few unknown parameters that were estimated based on rea-
Figs. 16 and 17. sonable physical assumptions, the wavelength and material
In the case of the Ta2O5 film irradiated at 1030 nm, dependence of the laser damage threshold can be obtained.
energy should be deposited preferentially at 200 nm below This is of main interest particularly in the case of materials
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223103-13 Gallais et al. J. Appl. Phys. 117, 223103 (2015)
ACKNOWLEDGMENTS
The research leading to these results has received
funding from LASERLAB-EUROPE (Grant Agreement No.
284464, EC’s Seventh Framework Programme).
FIG. 18. Laser-induced damage threshold versus wavelength for silicon and FIG. 21. Laser-induced damage threshold versus wavelength for silicon ox-
zinc selenide. ide (in film and bulk form) and calcium fluoride.
1
L. V. Keldysh, Sov. Phys. JETP 20, 1307 (1965).
2
M. Sparks, D. L. Mills, R. Warren, T. Holstein, A. A. Maradudin, L. J.
Sham, E. Loh, and D. F. King, Phys. Rev. B 24, 3519 (1981).
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