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26/09/2023 09:58 Incidences de l’usage du numérique sur le fonctionnement de la filière cinématographique burkinabè

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Revue française des


sciences de l’information et
de la communication
21 | 2021
Environnement, nature et communication à l’ère de l’anthropocène
Ligne Sud

https://web.archive.org/web/20210306044507id_/https://journals.openedition.org/rfsic/10567 1/20
26/09/2023 09:58 Incidences de l’usage du numérique sur le fonctionnement de la filière cinématographique burkinabè

Incidences de l’usage du
numérique sur le fonctionnement
de la filière cinématographique
burkinabè
Evariste Dakouré
https://doi.org/10.4000/rfsic.10567

Résumés
Français English Español
Le numérique a contribué à booster la production cinématographique dans des pays africains
comme le Burkina Faso où elle avait fortement baissé à la fin des années 1990. De manière
générale, la digitalisation dans le secteur du cinéma a engendré des apports multiformes dans
différentes branches de cette filière. Ce qui nous a conduit à l’interrogation suivante : au vu des
opportunités que le digital offre pour la redynamisation des différents maillons du cinéma,
quelles sont les incidences de l’usage du numérique dans la chaîne cinématographique
burkinabè ? Après avoir examiné les différentes branches de la filière cinématographique
burkinabè, il ressort de ce travail que l’avantage principal du digital pour ce cinéma est qu’il a
engendré des économies significatives dans le processus de production. Notons aussi que les
maillons de la distribution et de l’exploitation en salles ont aussi été impactés par l’usage du
numérique dans le cinéma. Mais on peut remarquer que le secteur de la production est celui où il
y a eu les principaux avantages. Concernant les deux autres maillons, l’effet du numérique a
parfois engendré des problèmes comme le piratage qui touche à la fois la distribution et
l’exploitation en salles. En outre, la majorité des salles de cinéma burkinabè ne diffusent plus de
films internationaux, faute d’équipements en numérique pour répondre aux exigences des
standards internationaux.

Digital technology has helped boost film production in African countries such as Burkina Faso,
where it had fallen sharply at the end of the 1990s. In general, digitization in the film sector has
generated multifaceted contributions in different branches of this sector. Faculty. Which led us to
the following question: in view of the opportunities that digital offers for the revitalization of the
different links of the cinema, we ask ourselves the question of what are the consequences of the
use of digital in the Burkinabè cinema chain? After examining the different branches of the
Burkinabè film industry, it emerges from this work that the main advantage of digital for
Burkinabè cinema is that it has generated significant savings in the production process. It should
also be noted that the links in distribution and theatrical exhibition have also been impacted by
the use of digital technology in cinema. But we can notice that the production sector is where
there have been the main advantages. Regarding the other two links, the effect of digital
technology has at times given rise to problems such as piracy which affects both distribution and
theatrical exploitation. In addition, the majority of Burkinabè cinemas no longer show
international films, due to a lack of digital equipment to meet the requirements of international
standards.

La tecnología digital ha contribuido a impulsar la producción cinematográfica en países africanos


como Burkina Faso, donde había caído drásticamente a finales de la década de 1990. En general,
la digitalización en el sector cinematográfico ha generado contribuciones multifacéticas en
diferentes ramas de este sector. Facultad. Lo que nos llevó a la siguiente pregunta : ante las
oportunidades que ofrece lo digital para la dinamización de los diferentes eslabones del cine, nos
preguntamos cuáles son las consecuencias del uso de lo digital en la cadena de cines de Burkina
Faso ? Después de examinar las diferentes ramas de la industria cinematográfica burkinabe, de
este trabajo se desprende que la principal ventaja del cine digital para el cine burkinabé es que ha
generado importantes ahorros en el proceso de producción. También cabe señalar que los
vínculos en la distribución y exhibición teatral también se han visto afectados por el uso de la
tecnología digital en el cine. Pero podemos notar que el sector productivo es donde ha habido las
principales ventajas. En cuanto a los otros dos eslabones, el efecto de la tecnología digital ha dado
lugar en ocasiones a problemas como la piratería que afecta tanto a la distribución como a la
explotación teatral. Además, la mayoría de los cines de Burkina Faso ya no proyectan películas

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internacionales debido a la falta de equipos digitales para cumplir con los requisitos de las
normas internacionales.

Entrées d’index
Mots-clés : cinéma, production, distribution, exploitation, Burkina Faso, numérique,
incidences
Keywords: cinema, production, distribution, exhibition, Burkina Faso, digital, impacts
Palabras claves: cine, producción, distribución, exhibición, Burkina Faso, digital, impactos

Texte intégral

Introduction
1 Depuis le début des années 2000, les professionnels du cinéma africain ont
graduellement adopté le numérique dans la filière. Cette adoption a d’abord concerné le
processus de production, puis progressivement d’autres maillons de la chaîne
cinématographique comme la distribution, l’exploitation en salle, la diffusion (films
africains en ligne) ont aussi opté pour le digital. Cet usage du numérique a donné un
nouvel élan à un cinéma africain en difficulté. Sur le continent, seuls quelques pays
comme le Maroc, le Nigéria et l’Afrique du Sud ont une production cinématographique
conséquente.
2 Excepté l’Afrique du Sud et le Nigéria qui ont un secteur de la distribution qui
contribue à faire tourner leurs industries du cinéma, la distribution fonctionne mal
dans l’Afrique Subsaharienne en général et au Burkina Faso en particulier. « Le
problème le plus important auquel est confronté le cinéma africain reste la
distribution. Ce n’est pas le moindre des paradoxes que de découvrir aujourd’hui que
le cinéma africain reste malgré des efforts considérables un cinéma mal connu en
Afrique » (Fonkoua, 2004, p. 6) Au Burkina Faso par exemple, le secteur de la
distribution a pratiquement disparu du pays, au point où certains réalisateurs de films,
du fait des dysfonctionnements de la filière et du manque de finances, sont à la fois
réalisateurs, producteurs et distributeurs de leurs propres films. Comme le souligne
Colin Dupré (20131) « rares sont les pays qui ont réussi à développer une industrie
cinématographique efficace, comprenant tous les maillons de la chaîne industrielle et
commerciale, y compris des salles ». Le Burkina Faso, pays du Fespaco (Festival
Panafricain du Cinéma et de la Télévision de Ouagadougou), le plus grand festival de
cinéma en Afrique, fait partie des pays africains dont le cinéma est peu structuré
(Dakouré, 2019). Or, selon Anne Vincensini, le cinéma, pour bien se développer suit
une logique industrielle depuis sa naissance, nécessitant des capitaux importants pour
son extension. Selon elle,

L’infrastructure de l’industrie du cinéma repose sur trois secteurs clefs :


exploitation, distribution et production. Le rôle du producteur est de rassembler
les éléments nécessaires à la fabrication d’un film. Le distributeur, mandataire du
producteur, démarche et négocie afin de placer le film auprès des salles, dans les
meilleures conditions possibles pour sa carrière. L’exploitant possède ou gère le
fonds de commerce que représente la salle. Il détermine le programme par sa
sélection de films. (Vincensini, 1993, p. 210)

3 La numérisation du cinéma burkinabè est importante pour contribuer à redynamiser


l’ensemble des maillons de la filière cinématographique du pays. Concernant la chaîne
de distribution de films dans des pays africains comme le Burkina Faso, Romuald
Fonkoua (2004, p. 7) parie sur le fait que le développement des TIC permettra « qu’un
film produit en haussa puisse être vu en bambara si la situation sociale l’exige d’une
région à une autre, ou en anglais si les conditions de réception le permettent. De toute

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façon, il est venu le temps des traductions entre les langues européennes et africaines
et entre les langues africaines elles-mêmes. » Ainsi le numérique faciliterait aussi la
distribution et diffusion de films africains.
4 Au vu des opportunités que le digital offre pour la redynamisation des
différents maillons du cinéma, nous nous posons la question de savoir
quelles sont les incidences de l’usage du numérique dans la chaîne
cinématographique burkinabè. Nous soutenons l’idée selon laquelle certes, le
numérique a permis de réduire grandement les coûts de production de films au Burkina
Faso et a aussi favorisé l’entrée d’autodidactes dans le domaine. Il s’agit de cinéastes
qui ne sont pas passés par une école de cinéma, comme c’était de tradition au Burkina
Faso, pays où l’INAFEC (Institut Africain d’Études Cinématographiques) a formé
beaucoup de professionnels de cinéma. Par contre, le manque de structuration de la
filière et l’insuffisance de moyens financiers font que le cinéma burkinabè est encore
loin de l’industrialisation. En outre, l’arrivée du numérique a créé de nouvelles
difficultés dont l’impossibilité depuis plusieurs années de diffuser certains films
internationaux (notamment américains qui sont les plus prisés) dans des salles de
cinéma exploitées par des acteurs burkinabè de la filière. Cela s’explique par le faible
équipement des salles en technologie du Digital Cinema Package (DCP) afin de recevoir
ce type de films.
5 Dans la suite de l’article, nous analyserons les incidences du numérique sur la filière
cinématographique burkinabè à travers les maillons suivants : production, distribution,
exploitation. Un état des lieux de chaque maillon sera fait avant d’examiner ce que le
numérique apporte comme changement. Dans l’étude de chaque maillon, nous ferons
des analyses sur un certain nombre d’actions qui peuvent être menées afin de donner
de meilleures perspectives au cinéma burkinabè.

Approche méthodologique
6 Nous avons utilisé une méthodologie de recherche faisant appel d’une part, à une
revue de littérature sur l’industrie cinématographique africaine, sur l’arrivée du
numérique dans le cinéma africain et les incidences de l’usage du digital dans ce
cinéma.
7 D’autre part, nous avons réalisé en février 2019, une première série d’entretiens et
une seconde série a été réalisée en septembre-octobre 2019. Ainsi nous avons
interrogé : 4 réalisateurs/producteurs et 1 réalisateur ; 2 responsables de chaînes de
télévision : la chaîne publique nationale et BF1 une chaîne privée (ce choix s’explique
par le fait qu’il s’agit des deux principales chaînes en termes d’audience). Nous avons
aussi rencontré en focus group, 2 projectionnistes et leur responsable, ils ont été choisis
parce qu’il s’agit de travailleurs du Ciné Neerwaya, la plus grande salle de cinéma au
Burkina Faso. Nous avons aussi échangé avec le gestionnaire des salles Canal Olympia
du groupe Vivendi. Les deux salles Canal Olympia de Ouagadougou disposent de DCP
pour la réception et diffusion de films internationaux, l’interview avec le gestionnaire de
ces salles a permis de saisir les enjeux liés à l’usage du DCP dans le contexte burkinabè.
En outre, le Directeur Général du Cinéma et de l’Audiovisuel (DGCA) a aussi été
interrogé, ce, parce qu’il est le premier responsable de la direction en charge des
questions du cinéma au Burkina Faso. Notons aussi qu’un responsable actuel du
Fespaco et deux anciens délégués généraux du Fespaco (et anciens ministres de la
Culture du Burkina Faso) ont été interrogés dans le cadre de cette recherche parce
qu’ils ont une fine connaissance du fonctionnement des différentes branches du cinéma
burkinabè.
8 Nous avons interrogé le dernier directeur général de la Société Nationale
d’exploitation Cinématographique du Burkina (SONACIB) ; il s’agit de la principale
structure nationale qui s’occupait du financement du cinéma burkinabè. L’échange avec

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ce Directeur a permis de saisir plusieurs aspects d’un des principaux mécanismes de


financement du cinéma burkinabè c’est-à-dire le « fonds 30115 ».
9 Parmi les personnes enquêtées, nous avons également échangé avec un des plus
grands distributeurs au Burkina. Il s’agit du premier responsable de PUB NEERE, un
acteur majeur de cette branche. En outre, il est le président de l’association des
distributeurs burkinabè de films.
10 Nous pouvons dire que le fait d’interroger des responsables de premier plan de la
filière cinématographique burkinabè nous a permis d’obtenir des données pour une fine
compréhension du fonctionnement de la chaîne cinématographique de ce pays et une
appréhension des enjeux en cours actuellement dans cette filière.
11 Pendant les entretiens nous avons évoqué les thématiques suivantes : l’organisation
et le fonctionnement de la filière cinéma au Burkina Faso (en tenant compte de ses
différentes branches), la réglementation en matière de cinéma au Burkina Faso, les
soutiens de l’action publique dans le domaine du cinéma (notamment le
fonctionnement des différents fonds de soutiens au cinéma burkinabè), l’analyse de la
chaîne de production de films, l’analyse des apports du numérique dans différentes
phases de la production de films au Burkina Faso, les relations entre les producteurs de
cinéma et les chaînes de télévision au Burkina Faso, les incidences du numérique sur les
segments de la distribution et exploitation de films au Burkina Faso, entre autres.
12 En tout quinze2 entretiens semi-directifs et un focus groupe ont été conduits. Chaque
entretien semi-directif a une durée moyenne d’une heure. Tous les entretiens ont été́
enregistrés et intégralement retranscrits pour exploitation. L’exploitation a consisté à
utiliser des verbatims pour appuyer des idées avancées dans le cadre de l’analyse des
incidences du numérique sur les différents maillons de la chaîne cinématographique
burkinabè. Sur certains aspects, l’exploitation des données a permis de faire une mise
en tension des propos tenus par des acteurs de secteurs différents que les enjeux de la
distribution de films au Burkina Faso amènent parfois à tenir des propos divergents
voire à polémique.

Numérique et redynamisation de la
production cinématographique au
Burkina Faso
13 Les difficultés actuelles du cinéma Burkinabè remontent aux années 1990 où les
programmes d’ajustement structurel (imposés par le Fonds Monétaire International et
la Banque Mondiale), la dévaluation du franc CFA et la mauvaise gestion de la Société
nationale d’exploitation cinématographique du Burkina a fait progressivement
disparaître le fonds d’appui au développement des activités cinématographiques,
dénommé fonds 30115. Ce fonds était alimenté par un prélèvement de 15 % des recettes
d’entrée en salle de cinéma pour contribuer à financer la production
cinématographique. Parallèlement à la disparition de ce fonds, on assiste aussi à la
raréfaction des financements étrangers (essentiellement européens) dont des
réalisateurs étaient bénéficiaires à la suite d’appel à projet. Selon Baba Hama, ancien
délégué général du Fespaco et ancien ministre de la Culture que nous avons interrogé,
« pendant longtemps l’Union européenne soutenait des réalisateurs en leur octroyant
des fonds pour tourner des films et après ils ont décidé de donner les fonds à des
maisons de production considérées comme plus structurées et donc chaque réalisateur
a créé sa maison de production. » (Baba Hama, entretien du 04-02-2019) Depuis cette
période (fin des années 1990), la plupart des réalisateurs burkinabè sont producteurs et
de plus en plus distributeurs de leurs films faute de structuration convenable de la
filière. À cette époque des années 1990, les acteurs de la filière savaient que le cinéma
burkinabè entrait dans une période difficile et la recherche de solutions était à l’ordre
du jour. Certains professionnels avaient l’idée de s’inspirer du modèle de la production

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vidéo qui prenait de plus en plus d’ampleur au Nigéria et au Ghana (un pays voisin du
Burkina Faso). C’est ainsi que des acteurs de la filière ont initié un voyage au Ghana
pour voir comment les Burkinabè pouvaient expérimenter ce modèle vidéo. À ce propos
Stanislas Méda, ancien secrétaire général du ministère de la Culture que nous avons
enquêté nous a indiqué ceci :

Je dois d’abord dire que j’ai dirigé l’union nationale des cinéastes du Burkina
de 1993 à 1999. On avait des ambitions pour le cinéma burkinabè. La question
était de passer à une industrie. Les conditions de réalisation de films se
compliquaient à cette époque car les guichets tant au niveau national
qu’international demandaient qu’on crée des projets viables pour avoir des
financements auprès des banques ou qu’on ait la capacité de rentabiliser les
financements en tournant de bons films qui permettront de refinancer d’autres
films. Dans la recherche de solutions, j’ai conduit une centaine de professionnels
du cinéma burkinabè au Ghana en 1994, car le Ghana faisait l’expérience de la
vidéo en tournant dans des délais courts des films qu’ils rentabilisaient et
réinvestissaient cet argent pour faire d’autres films. Je voulais qu’on puisse s’en
inspirer, mais le Burkina Faso était un pays de cinéma et les gens ne voulaient pas
faire de la vidéo. C’était péjoratif de faire de la vidéo. (Stanislas Méda, entretien du
25 -09-2019)

14 Signalons que le numérique a été largement adopté au Burkina Faso au début des
années 2000. Pour répondre à certains puristes qui refusaient le numérique, un de nos
enquêtés, Sounkalo Dao, un réalisateur/producteur qui tourne en numérique, dit
qu’« une œuvre cinématographique reste un choix. Tu peux filmer en argentique ou
numérique, mais le plus important c’est le sujet traité et la manière de le traiter. La
maîtrise du traitement du sujet est essentielle. Le numérique n’est qu’un support. Il y a
des grands réalisateurs qui ont fait de grands films avec du numérique et qui les ont
gonflés après pour passer en salle. » (Dao Sounkalo, entretien du 26-09-2019) De son
côté, Jean-Paul Colleyn résume assez bien la logique économique qui guide le modèle
ghanéen dont certains professionnels burkinabè voulaient s’inspirer.

Je préfère être un homme d’affaires prospère plutôt qu’un artiste fauché. C’est par
ce slogan bien connu que les producteurs d’Accra me résumaient leur philosophie
professionnelle. D’une certaine manière, il s’agit d’une production de flux, une
production de divertissement peu soucieuse de créer du patrimoine. Les films
disparaissent en effet très rapidement du marché́, car les producteurs
escomptent un retour sur investissement rapide, faute de quoi le piratage leur
couperait l’herbe sous les pieds. (Jean-Paul Colleyn, 2013, p. 3)

15 Pendant que le cinéma burkinabè qui avait des réalisateurs majeurs comme Idrissa
Ouédraogo, Gaston Kaboré, tournait des films qualifiés de chefs-d’œuvre, déclinait, le
modèle vidéo ghanéen (et nigérian) misait moins sur la production d’œuvres
monumentales, et mettait l’accent sur un type de films qui leur procurait plus de profit
financier. Indiquons que ce modèle vidéo ghanéen a eu plus de succès que celui qui s’est
par la suite développé au Cameroun et dont Giovanna Santanera en fait cas en disant
que :

Les videomakers de Douala appartiennent aux classes moyennes inférieures du


milieu urbain. Rarement diplômés, ils ont généralement suivi quelques années de
lycée, puis ont abandonné l’école pour se lancer dans la vie active, en raison des
faibles moyens économiques de leurs familles […] Dans ce cadre, la vidéo
représente l’un des nombreux « petits jobs » que les individus — les jeunes
notamment — exercent pour multiplier leurs sources de revenus, car la
technologie numérique a été accueillie comme une nouvelle opportunité pour se
débrouiller. (Giovanna Santanera, 2019, p. 724)

16 Vu sous cet angle des opportunités, le numérique est perçu en Afrique et au Burkina
en particulier comme une aubaine pour tourner des films puisque les coûts de
production baissent significativement. Selon Gervais Kwené, un producteur burkinabè
que nous avons interrogé,

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le principal avantage du numérique pour le cinéma burkinabè est en rapport avec
le coût de production. Aujourd’hui avec la miniaturisation, on n’utilise plus de
grosses caméras, de grosses cassettes, de grosses bandes à transporter et on
dépense moins d’argent. Aujourd’hui quand vous voyagez pour un tournage c’est
plus pratique. Et puis quand le film est fini, on peut l’envoyer via un lien internet à
des partenaires à travers le monde. Avant il fallait transporter des bandes et c’était
onéreux.

17 On comprend donc pourquoi la production de films en argentique (avec des


pellicules) a progressivement disparu au Burkina Faso.

Impact du numérique sur la production de films au


Burkina Faso
18 Dans les lignes qui suivent, dans un premier temps, nous résumerons le processus de
production d’un film en quatre principales étapes : phase d’écriture du film ou
développement, pré-production, production et postproduction. Parallèlement à cela et
partant d’entretiens menés, nous évoquerons la plus-value que le numérique apporte à
chacune de ces étapes dans la pratique de professionnels burkinabè du cinéma.
19 Le processus de création d’un film peut s’étendre sur plusieurs mois, voire plusieurs
années.
- La phase d’écriture et de conception du film, aussi appelée « le développement »,
consiste à développer une idée originale pour pouvoir ensuite la communiquer aux
différents interlocuteurs nécessaires à la fabrication du film. Bien souvent on attribue
les origines du film au réalisateur, mais il faut noter que l’idée du film peut aussi
provenir du scénariste ou d’un producteur. Au cas où l’idée du film vient d’une œuvre,
un roman par exemple, le producteur devra acheter les droits qui lui permettront
d’exploiter cette idée.
20 Lors du développement du film, l’apport du numérique en gain de temps et d’argent
se constate dans la pratique des professionnels burkinabè. En effet, il y a encore
quelques années, les cinéastes burkinabè écrivaient en manuscrits les différentes idées
du développement du film qu’ils remettaient à une secrétaire qui « tapait à la machine à
écrire ». Cela rallongeait les délais de cette étape, et ce, d’autant plus qu’après la saisie,
le professionnel du cinéma devait encore relire le document et y apporter d’éventuelles
corrections. De nos jours avec le développement des TIC, les idées du scénario sont
directement saisies à l’ordinateur et peuvent être envoyées numériquement aux
différents acteurs qui interviennent à cette étape de la production. Les fonds qui
devaient être dépensés en frais de secrétariat sont économisés et il y a un gain de temps.
À ce sujet, voici ce qu’en dit le réalisateur/producteur Gervais Kwené :

En matière de développement, il y a un gain de temps parce qu’avant le scénariste


devait faire un manuscrit qu’il donnera à une secrétaire dactylographe qui va
dactylographier pour que le scénariste revienne corriger et parfois il y a une
trahison de l’esprit véhiculé dans les idées du scénariste. Mais aujourd’hui avec
l’usage des ordinateurs on gagne en efficacité, parce qu’on a moins de va-et-vient
pour corriger par ci, par là. Et il y a aussi moins de risque de trahison des idées du
scénariste parce qu’il saisit lui-même son texte. Il faut aussi noter le gain
économique parce qu’il y a un maillon qui saute, le maillon de secrétaire
dactylographe qu’on devrait payer. (Kwéné Gervais entretien du 27-09-2019)

21 – La pré-production : lors de cette phase, on définit et recherche les moyens


techniques, humains et financiers qui permettront de réaliser le film. Pendant la pré-
production, on prépare le tournage et dans ce sens, il y a une recherche des divers lieux
de tournage possible, une sélection est faite par le réalisateur en collaboration avec
l’équipe technique. Au Burkina Faso, lors du repérage (pré-production), le numérique
est utilisé pour gagner notamment en temps. Il ressort de nos enquêtes qu’avant l’usage
du numérique par les professionnels burkinabè du cinéma, il fallait amener une équipe
technique sur plusieurs sites de repérage pour voir si ceux-ci conviennent pour le

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tournage. De nos jours, une fois qu’un site est repéré et s’il ne s’agit pas d’un lieu à
plusieurs centaines de km par rapport au « camp de base » de l’équipe technique de
tournage, on ne déporte plus toute l’équipe sur place (avec toute la logistique et le coût
y afférant) comme cela se faisait avant. Actuellement, certains professionnels
réunissent les membres de leur équipe, puis ils envoient un drone sur le site. Celui-ci
envoie des informations à temps réel que toute l’équipe réunie peut analyser sans pour
autant aller elle-même sur le site.

Par exemple, si l’équipe est à Tampouy (un quartier périphérique du Nord de


Ouagadougou dont l’accès était difficile il y a encore un an), il y a les risques liés à
l’insécurité routière pour y arriver. Dans les embouteillages on y perdait trop de
temps. Et bien sûr il fallait trouver un véhicule pour amener tout le monde sur le
lieu ; donc quand on veut faire une comparaison, économiquement, on gagne
beaucoup plus avec l’usage du numérique actuellement. De plus, les drones
donnent des précisions, des angles de vue qu’on aurait du mal à faire l’œil
nu. (Gervais Kwené, entretien du 27-09-2019)

22 Pendant la phase de pré-production, le numérique donne aussi des avantages sur le


plan administratif, notamment pour faciliter la signature des contrats des différents
acteurs intervenant dans le film. Avant la possibilité de numériser des documents et de
les envoyer par courriel, quand il avait des professionnels étrangers qui devaient
travailler sur un film burkinabè, il fallait leur envoyer le scénario par la poste. Mais
maintenant le document est envoyé directement par courriel ou même via l’application
de messagerie Whats App. De même concernant les contrats, il est possible d’envoyer
un contrat par fichier numérique que le correspondant imprime, signe, scanne et
retourne au producteur. Tout ceci permet de gagner en temps et en argent car, avant il
fallait payer des frais d’envoi par la poste et parfois les professionnels étrangers
prenaient l’avion pour venir régler certains aspects contractuels, ce qui engendrait aussi
des frais au niveau de la production.
23 – La production du film correspond à la phase d’organisation du tournage et prend
en compte le tournage proprement dit. Le tournage en numérique donne des avantages
fort appréciés par les professionnels burkinabè toujours en termes de gain de temps et
d’argent. Lorsque ces professionnels tournaient leurs films en argentiques, ils devaient
envoyer le contenu dans un studio hors du Burkina Faso (bien souvent en France) pour
le visionnage qui permet de vérifier si les prises sont bonnes ou pas. Cela prenait deux à
trois jours pour avoir la réponse. Si cette réponse était positive on passait à une autre
étape. Et au cas où certaines images ne convenaient pas, le studio informait le cinéaste
burkinabè pour que certaines scènes soient tournées de nouveau.

En ce moment-là, un comédien peut avoir fini de tourner ce qui lui concerne.


Dans ce cas de figure, vous devez le garder 72 h par exemple, pendant lesquelles
vous devez le loger (s’il vient d’une autre ville), le nourrir, prendre en charge ses
déplacements, et lui payer ses perdiems. Et quand le studio dira OK, vous avez des
bonnes images, vous pouvez libérer ce comédien. Dans le passé quand on tournait
en argentique, si vous libérez un comédien avant le OK du studio, ce comédien
pouvait s’engager ailleurs et au cas où le studio vous dit de reprendre certaines
images, vous êtes coincés. De nos jours, avec le numérique on ne connait pas ce
type de problème, puisqu’en tournant en numérique on a une carte mémoire qui
peut prendre par exemple une heure de tournage voire plus. Et après ce tournage,
séance tenante, on peut visionner et voir s’il y a des plans à reprendre. Gervais
Kwené, entretien 27-09-2019)

24 Sur cette même question de gestion du personnel pendant le tournage (dans le passé
avec les pellicules), M. Dao ajoute que certains réalisateurs, pour limiter les dépenses,
instauraient un système de pause pendant la période de tournage. « Les techniciens et
comédiens pouvaient faire 3 jours de travail et 2 jours de pause. Ces 2 jours de pause
permettaient d’attendre la réponse du studio sur la qualité des images avant de
reprendre le tournage. Une fois que ce système de pause est prévu dans le contrat de
chacun, les uns et les autres savent par exemple qu’ils ne seront pas payés pendant
cette période ». (Dao Sounkalo, entretien du 26-09-2019)

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25 Toujours concernant les avantages du fait de tourner en numérique, M. Dao


Sounkalo ajoute qu’il y a de nos jours à Ouagadougou des cartes SD de
64 gigaoctets (Go) qui coûtent 100 000 F CFA l’unité et une caméra qui contient une
carte de 64 Go peut filmer pendant une heure de temps. En outre, cette carte est
réutilisable contrairement aux pellicules qu’on utilisait dans le passé. Selon M. Dao,
lorsqu’il fait une heure de tournage sur la carte SD, il « décharge » le contenu sur un
disque dur externe de 1 ou 2 téraoctets, et réutilise la même carte SD pour d’autres
tournages. Ce disque dur externe de 1 ou 2 téraoctets peut contenir plusieurs semaines
de tournages couvrant l’ensemble de la période pour le film. Tous les éléments tournés
et stockés dans le disque dur externe constituent les rushes qui seront envoyés en post-
production.
26 – La post-production correspond à la phase de montage après le tournage. À cette
étape de la production, on choisit les meilleures images, on peut éventuellement ajouter
des effets spéciaux, du son, entre autres. À ce stade aussi, l’usage du numérique permet
également de gagner en temps et en argent. À ce propos, M. Dao en dit ceci :

Avec le numérique, tout ce que nous avons pris comme images lors du tournage
est plus rapidement traité pendant la post-production. On n’a pas besoin de
développer des bandes de pellicules avant de commencer le montage. En effet,
quand on tournait en argentique, il fallait développer d’abord les pellicules, faire
un tri des images avant de commencer le montage. Mais avec le numérique
chaque séquence tournée peut être visionnée pour vérifier s’il faut supprimer
certaines images. Donc, on gagne plus en temps avec le numérique. Et bien sûr on
gagne en coût aussi puisqu’en cinéma une fois que tu économises en temps, tu
économises financièrement aussi. Cela parce que si tu prends un monteur qui doit
faire 1 ou 2 mois pour un film long métrage en format argentique 16 mm ou
35 mm, le montage de ce même film en format numérique peut prendre
3 semaines environ. (Sounkalo Dao, entretien du 26-09-2019)

27 Notons aussi que lorsqu’on travaille avec des acteurs non professionnels comme c’est
souvent le cas au Burkina Faso, l’usage du numérique facilite la tâche à moindre coût
dans la mesure où contrairement à ce qui se faisait avec l’argentique, les réalisateurs
ont la possibilité de multiplier les prises de vues autant de fois que nécessaire pour
obtenir la qualité souhaitée. En outre, la grande performance de certaines caméras
permet de s’adapter parfois à des conditions de tournage offrant peu d’éclairage.
28 Colin Dupré (2013) soutient qu’afin de répondre aux problèmes liés à
l’industrialisation du cinéma africain, il faut créer un marché local. Pourtant, les
chaînes industrielles et commerciales du cinéma dans des pays africains comme le
Burkina Faso sont incomplètes, obligeant par exemple beaucoup de réalisateurs à
effectuer les travaux de laboratoires, de postproduction à l’étranger. Bien souvent en
France pour certains réalisateurs d’Afrique de l’Ouest francophone. En se référant à
Dupré, on peut dire que le numérique permet de replacer ces étapes de postproduction
localement, ce qui contribue progressivement à reconstruire un maillage plus complet
dans l’industrie cinématographique de certains pays africains.
29 Ainsi, les avantages du numérique sont multiples pour la production
cinématographique burkinabè et selon l’enquêté Yssouf Saré, spécialiste des industries
culturelles et directeur général de la chaîne de télévision BF1 au Burkina Faso,
« l’évolution technologique liée à l’avènement du numérique et les facilités de
production qu’il confère, a emmené de nombreux producteurs à s’orienter vers la
production vidéo. Depuis 2004, il n’y a plus eu de production cinématographique avec
pellicule argentée. Toutes les productions utilisent le support vidéo » (Yssouf Saré,
entretien du 07-02-2019)
30 Du fait que beaucoup de réalisateurs ont commencé à tourner en numérique, des
professionnels du cinéma burkinabè ont proposé que le numérique soit pris en compte
au niveau des compétions au Fespaco, mais certains puristes s’y sont opposés. À ce
propos, M. Meda nous a tenu ce propos :

En 2007, nous avons recommandé que le Fespaco s’équipe en matériel pour


diffuser en numérique, mais les gens disaient que même en France ils ne se sont
https://web.archive.org/web/20210306044507id_/https://journals.openedition.org/rfsic/10567 9/20
26/09/2023 09:58 Incidences de l’usage du numérique sur le fonctionnement de la filière cinématographique burkinabè
pas encore mis au numérique pourquoi nous allons le faire. Avec le temps les gens
ont commencé à comprendre qu’il n’y a pas assez de financements pour tourner
des films en argentique donc ils se sont lancés dans le numérique pour minimiser
les coûts de production. Aujourd’hui nous produisons en numérique, mais la
qualité baisse car certains réalisateurs travaillent avec rapidité en accordant peu
d’attention à la qualité. (Stanislas Meda, entretien du 25-09-2019)

31 En effet, une des critiques faites au cinéma burkinabè est qu’avec l’arrivée du
numérique, certains réalisateurs à force de minimiser les coûts de production en
finissent par produire des films de faible qualité esthétique, même en termes
d’éclairage.
32 Une autre technique utilisée par des réalisateurs burkinabè pour réduire les coûts de
production consiste à tourner les films avec des amateurs dont certains acceptent
parfois d’être payés à la sortie du film, grâce à son exploitation en salles. Il faut noter
qu’au Burkina Faso le manque de financements est tel que certains réalisateurs
avancent leurs fonds propres pour produire les films. D’autres s’endettent auprès
d’institutions bancaires en mettant en gage leurs titres fonciers d’habitation. C’est au vu
de cette situation que ceux qui s’engagent sur les plateaux de tournage acceptent parfois
d’être payés après la sortie du film. À ce sujet le responsable de Pluriel production,
laisse savoir que :

Aujourd’hui au Burkina Faso comparativement au début des années 2000, la


production a vraiment augmenté. On a beaucoup de jeunes réalisateurs issus
d’ISIS studio école et malgré la rareté des moyens ils tournent. Ils font une
production sans avancer beaucoup d’argent. En fait, ils signent des contrats avec
des techniciens et des comédiens qui acceptent être payés après la sortie du film.
Ainsi, ils produisent le film qu’ils mettent en salles et ce sont les cachets en salles
qui paient la grosse partie des contrats signés. La question est de savoir si cela
peut tenir dans le temps. (Sounkalo Dao, entretien du 26-09-2019)

33 Parfois, cet aspect impacte négativement la qualité des films. À ce propos, la


responsable de Pilimpiku production dit ceci : « il est important d’entreprendre des
actions pour casser ce côté informel lié à l’emploi dans le domaine du cinéma. Pour
bosser sur un plateau, il faut connaître quelqu’un qui connait quelqu’un. Et c’est dans
ça on laisse tomber les professionnels qui ont vraiment de l’expérience, on met en
avant le relationnel et ça ne fait pas du bien à nos films » (Aminata Nikiéma, entretien
du 02-10-2019). Pendant nos enquêtes, nous avons aussi rencontré le Directeur
Général du Cinéma et de l’Audiovisuel (DGCA) qui nous a expliqué que des textes ont
été adoptés en 2003 (intitulés textes règlementaires sur le cinéma et l’audiovisuel) afin
de réguler l’exercice des différents métiers du cinéma. Mais, sa direction ne dispose pas
de moyens nécessaires pour faire des contrôles réguliers et s’assurer que ces textes sont
respectés. M. Baba Hama quant à lui, nous a indiqué que la filière cinématographique
au Burkina Faso doit être règlementée, malgré le fait que des textes ont déjà été
adoptés. « Il faut organiser le secteur en le rendant plus professionnel, en étant plus
exigeant sur l’exercice des métiers. Par exemple qui peut être producteurs, dans quelle
condition. Il y a des textes qui ont été adoptés, mais ils sont peu respectés. Il faut aussi
encourager la création de salles par une fiscalité avantageuse en allégeant les taxes
pour matériel de construction, de projection, pour ne citer que ceux-là » (Baba Hama,
entretien du 04-02-2019) De manière générale, les professionnels du secteur et les
autorités sont conscients que les métiers du cinéma ne sont pas toujours exercés dans le
respect des textes qui les régissent. L’arrivée de nouveaux entrants dans la filière et le
regain de production avec le numérique favorise aussi d’une certaine façon le recours à
des acteurs amateurs sur des plateaux de tournage.

De la nécessité de développer des partenariats


entre producteurs de films et chaînes de télévision
au Burkina Faso
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26/09/2023 09:58 Incidences de l’usage du numérique sur le fonctionnement de la filière cinématographique burkinabè

34 Au pays du Fespaco, Boubakar Diallo est un des premiers réalisateurs à avoir adopté
le numérique pour la production de films. Il est aussi l’un des plus productifs à une
époque où beaucoup de réalisateurs burkinabè ont du mal à produire un film par an et
attendent les subventions spéciales que l’État offre à l’occasion de chaque édition du
Fespaco, pour avoir la chance de réaliser un film. Au sujet de Boubakar Diallo, Colin
Dupré soutient que,

face aux problèmes de production et de distribution, il a monté sa propre maison


de production […] et surtout, il distribue lui-même ses films aux exploitants, sur
format DVD dans les salles burkinabè (au niveau international, le réalisateur
passe par un distributeur). Il a aussi développé des accords avec la TV nationale
consistant en un échange de droits de diffusion des “vieux films” contre la
diffusion de bandes-annonces pour les films sortants, ce qui permet une
promotion efficace. (Colin Dupré, 2013)

35 La diffusion télévisuelle est aussi un débouché pour les productions du continent,


toutefois rares sont les chaînes de télévisions africaines qui achètent des droits de
diffusion des films africains. « En effet, elles n’ont pas de capacités commerciales
suffisantes pour acheter les droits TV de la plupart des films. La méthode de Boubakar
Diallo est là encore assez significative. » (Dupré Colin, 2013) La pratique « d’échange
marchandise » avec les chaînes de télévision est fréquente au Burkina Faso. Elle
consiste pour un réalisateur ou producteur à céder des droits d’un ancien film contre
des passages de bandes d’annonce pour la promotion d’un nouveau film. Les chaînes de
TV le font en disant aux réalisateurs/producteurs qu’ils n’ont pas d’argent pour payer
les droits des films. Cette posture des chaînes de TV burkinabè est critiquée par certains
réalisateurs/producteurs burkinabè qui dénoncent le fait que ces chaînes puissent
acheter des droits de séries latino-américaines (télénovelas) mais refusent de soutenir
la production locale de films. Le responsable des programmes de la Radio Télévision du
Burkina (RTB) de son côté, ne partage pas l’avis des professionnels du cinéma qui
affirment que la RTB n’achète pas de films burkinabè. Il indique que cette chaîne
dispose d’un budget annuel afin de se doter de programmes. Dans l’utilisation de ce
budget, une part est réservée pour l’achat de films nationaux. Et il ajoute, « nous
payons certains films en numéraire et non en échange marchandise. Mais les gens
dénigrent la RTB en disant que nous n’achetons pas de films burkinabè ». En plus du
fait que certains professionnels du cinéma burkinabè reprochent aux chaînes de
télévision locales de ne pas acheter des droits de films burkinabè, ils leur reprochent
aussi et en particulier à la télévision publique (RTB), d’usurper le rôle de producteur de
films alors que la RTB est pour eux un diffuseur. « C’est dommage au Burkina de voir
notre télévision nationale produire elle-même une série. La télé reste diffuseur. Une
série comme « affaire publique » pouvait être confiée à une structure de production
privée. Pour moi la RTB n’est pas productrice. Elle peut avoir une cote part dans la
production d’un film. » selon un producteur interrogé. Toutefois, il faut mentionner
également que la RTB fait de la coproduction avec des réalisateurs burkinabè même si
certains cinéastes estiment qu’elle peut en faire davantage. Le responsable des
programmes de la RTB nous a affirmé que « la RTB fait de la coproduction de films
avec des réalisateurs burkinabè. On se partage les charges pour la réalisation d’un
film (aide matériel ou logistique) et en contrepartie la RTB demande une copie pour
diffusion gratuite. Parfois la RTB apporte un soutien en numéraire et par convention
si on n’est pas le principal bailleur, on demande la 2e diffusion. Souvent des chaînes
comme TV5 sont les principaux bailleurs et exigent la première diffusion. » (Omar
Yago, entretien 06-02-2019) Pour ce qui est du principe d’échange marchandise, il ne
s’agit pas une spécificité africaine, elle se fait également dans des pays développés
comme la France, même si elle n’est pas qualifiée là-bas d’échange marchandise.
36 Concernant ce pays, Laurent Créton (2011) affirme que l’économie de la production
cinématographique française s’est profondément transformée, passant d’un mode de
financement basé sur la prévalence d’une logique d’amortissement, où le producteur
prend un risque direct sur les films, à une logique de préfinancement par des chaînes de

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26/09/2023 09:58 Incidences de l’usage du numérique sur le fonctionnement de la filière cinématographique burkinabè

télévision en échange d’une partie des droits d’exploitation. Il faut dire que dans ce
pays, les chaînes de télévision sont le premier débouché de la production
cinématographique, et sa principale source de financement jusqu’à dépasser 40 % au
tournant des années 2000. Ces apports financiers des chaînes sont rendus obligatoires
par les accords interprofessionnels et ont constitué une contribution nécessaire au
développement du cinéma français pendant plus d’une vingtaine d’années. (Creton
Laurent, 2011) Les collaborations entre chaînes de TV du Burkina Faso et les
réalisateurs /producteurs sont à encourager pour faciliter la mobilisation de plus de
ressources endogènes afin de financer la production et promotion de contenus locaux.
En effet, les coûts de production ont baissé avec l’arrivée du numérique mais il ne suffit
pas de produire des films, leur promotion compte pour beaucoup aussi dans le succès
de ces films et en cela les chaînes de TV peuvent être d’un soutien important aux
cinéastes. Cela sans oublier le fait que même si les chaînes de télévision du Burkina ont
peu de moyens financiers pour soutenir la production comme c’est le cas en France par
exemple, d’autres formes de soutiens (en contrepartie de cessions d’une partie des
droits de films) sont possibles à travers par exemple la mise à disposition de matériels
de tournage ou autres types de soutiens matériels. Cela minimiserait les dépenses en
termes de location ou d’achats d’équipements dans le cadre de la production de films.
Par ailleurs, depuis l’année 2019, le nombre de chaînes de télévision a augmenté au
Burkina Faso avec la généralisation de la Télévision Terrestre Numérique (TNT) qui a
permis la naissance de nouvelles chaînes. Celles-ci pour fonctionner ont besoin de
contenus, il peut donc avoir des échanges fructueux entre réalisateurs/producteurs de
films et chaînes de télévision burkinabè, à condition que des accords convenables pour
chacune des parties prenantes soient établis.
37 Cette section a montré que le numérique dans le cinéma burkinabè a eu pour
avantage de booster les tournages de films, mais les difficultés de distribution,
d’exploitation, de diffusion des films demeurent. On peut aussi se demander quelles
incidences la digitalisation a eu sur le maillon de la distribution au Burkina Faso.

Numérique et relais de distribution de


films burkinabè
38 À l’image du soutien qui a été apporté au maillon de la production avec notamment le
fonds 30115, des actions publiques ont aussi été entreprises au Burkina Faso pour
faciliter la distribution de films dans le pays. En effet, à l’issue de la nationalisation
en 1970 des salles de cinéma en Haute-Volta (ancienne appellation du Burkina Faso
jusqu’en août 1984), l’État a créé la Société nationale voltaïque de cinéma (SONAVOCI)
qui avait pour rôle d’acquérir des films et d’en faire la distribution d’une part, pour les
salles de cinéma dont cette société d’État avait la charge et d’autre part, pour les salles
privées. Selon François Vokouma, le dernier directeur général de la SONACIB que nous
avons interrogé, cet organisme avait pour mission : « l’importation, la distribution,
l’exploitation de films sous forme de monopole. Elle reçoit les films qu’elle peut donner
à d’autres salles privées. À partir de 1984 le président Sankara a décidé que chaque
province aura une salle et la SONACIB a pris en charge la construction des salles dans
les provinces qui n’en avaient pas, en plus de nouvelles salles à Ouagadougou. »
(François Vokouma, entretien du 02-09-2019) A noter que c’est à la faveur du
changement de nom du pays que la SONAVOCI a aussi changé de nom pour devenir la
SONACIB en 1984. Et comme nous l’avons mentionné supra la SONACIB a connu des
difficultés à partir des années 1990 et cela a même conduit à sa liquidation en 2004.
Ainsi, le rôle qu’elle jouait en matière de soutien à la production et à la distribution de
films s’est estompé. Et depuis lors le maillon distribution de films a pratiquement
disparu au Burkina Faso.
39 En plus de la SONACIB, le Consortium Inter-africain de Distribution
Cinématographique (CIDC) avait aussi été créé pour s’occuper de la distribution de
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26/09/2023 09:58 Incidences de l’usage du numérique sur le fonctionnement de la filière cinématographique burkinabè

films dans un certain nombre de pays d’Afrique francophone dont le Burkina Faso.
Cette structure a aussi connu des difficultés de fonctionnement et a disparu. En effet, en
1974 plusieurs États africains membres de l’Organisation Commune Africaine et
Malgache (OCAM) ont signé à Bangui en République centrafricaine, un protocole
créant le CIDC et le Consortium Interafricain de Production de Films (CIPROFILM)
dont le siège était à Ouagadougou en Haute Volta et la France était un des fournisseurs
privilégiés de ce consortium. Selon Patrick Ndiltah, à travers ce système les Africains
étaient arrivés à mettre en place un marché commun de distribution de films qu’ils
contrôlaient. En effet, le CIDC avait pour rôle de réguler et alimenter le marché
commun en films y compris en films africains dont une partie des bénéfices sont à
reverser au CIPROFILM. Lequel devait soutenir la production de nouveaux films. Mais
dès le début des années 1980 ce système a rencontré des difficultés d’ordre économique
et politique. À ce sujet, « selon le directeur général du CIDC à l’époque, Inoussa
OUSSEINI, alors qu’il était prévu un capital social de 300 millions de francs CFA, le
total des acomptes reçus n’était que de 135 millions de francs CFA, moins de la moitié
du capital requis » (Patrick Ndiltah, 2013, p. 48) Concernant les problèmes politiques
qui ont contribué à faire disparaitre le CIDC, toujours selon Patrick Ndiltah,

la crise qui éclata en 1983 entre les États membres du CIDC n’était pas d’ordre
financier, mais portait sur un problème relatif au maintien ou à l’abandon d’une
structure d’approvisionnement en films basée à Paris, qualifiée par certains de
néocolonialiste. En attendant le dénouement de cette crise, les activités du CIDC
étaient bloquées et il ne pouvait plus acheter de nouveaux films. (Patrick Ndiltah,
2013, p. 48)

40 C’est ainsi que de difficultés en difficultés, le maillon de la distribution a


pratiquement disparu de la filière cinématographique dans certains pays africains dont
le Burkina Faso, conduisant ainsi des réalisateurs à distribuer eux-mêmes leurs films.
Cette pratique n’est pas bien appréciée par l’association des distributeurs du Burkina.
Et son président lors de notre entretien nous a laissés entendre ceci :

On n’a vu qu’après la disparition de la SONACIB, la branche distribution de film a


aussi presque disparu. Actuellement, si tu prends une autorisation pour être
producteur, les autorités compétentes te donnent aussi une autorisation pour être
distributeur car on sait que ce segment est défaillant. Si vous prenez une
autorisation pour être diffuseur on vous donne aussi l’autorisation pour être
distributeur. Dans le cadre de notre faitière, l’association des distributeurs
cinématographiques et audiovisuels (ADCIA) nous avons dénoncé cela. (Rodrigue
Kaboré, entretien du 14-10-2019)

41 Concernant les incidences du digital dans le domaine de la distribution au Burkina


Faso, mentionnons que l’arrivée du numérique a engendré un lot de problèmes dont le
piratage des œuvres auquel les professionnels du cinéma burkinabè font face. À cause
du peu d’effet que l’action publique produit au Burkina Faso en matière de lutte contre
le piratage des films, les professionnels du cinéma à l’image de ce qui se fait dans
d’autres pays africains développent des stratégies pour contenir les effets négatifs du
piratage. Ainsi, au lieu de recourir aux voies légales, Giovanna Santanera indique que
« les artistes tentent d’empêcher le piratage en expérimentant une gamme variée de
stratégies de distribution : vente au détail de dvd/vcd, diffusion télévisée, et, parfois,
des projections collectives payantes et le streaming en ligne. » (Giovanna Santanera,
2019, 732) Il est important de souligner que le digital n’a pas eu que des incidences
négatives sur la distribution de films.
42 Autant le numérique engendre des économies dans le processus de production de
films, autant il le fait aussi dans le secteur de la distribution. Selon Auffret Gwendal, les
distributeurs regardent avec intérêt les économies que le numérique engendre. « Le
tirage à partir du négatif argentique original et l’envoi vers les salles de pellicules
35 mm coûte entre 200 $ et 2 000 $ par copie. La somme investie par les studios
hollywoodiens dans la réalisation et le transport des copies 35 mm dans le monde
entier est ainsi estimée à environ 1,36 milliard de dollars par an. » (Auffret Gwendal,

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26/09/2023 09:58 Incidences de l’usage du numérique sur le fonctionnement de la filière cinématographique burkinabè

2004, p. 87) Ainsi l’évolution du numérique qui a permis de mettre le film sous forme
de fichier, facilite sa reproduction à des coûts modestes comparativement aux coûts de
réplication d’une copie argentique. De plus, la distribution du film sous forme de fichier
numérique se fait aisément de nos jours avec des transferts via satellite à des coûts
abordables également, comparativement au passé. À ce propos, Colin Dupré laisse
savoir que :« ces fichiers sont le plus souvent envoyés physiquement sur des disques
durs, mais de plus en plus la distribution se dématérialise dans les villes disposant
d’une connexion internet à très haut débit. Cette clé de codage lit le fichier film à une
salle en particulier, à son matériel (projecteur), à une date et à une plage horaire
précise, ce qui est assez contraignant, mais limite le piratage. » (Dupré Colin, 2013)
En cela, la technologie du Digital Cinema Package (DCP), l’équivalent en numérique de
la copie de projection argentique, a beaucoup aidé les grosses industries
cinématographiques, américaines essentiellement, puisque c’est Hollywood qui exporte
le plus de films au monde.
43 Dupré rappelle que le cinéma africain souffre du piratage, lequel est facilité par
l’essor du numérique. La rapidité et l’ingéniosité des pirates de films dépassent parfois
les capacités d’innovation des professionnels du cinéma. À titre d’exemple, « à
Ouagadougou, peu de temps après le Fespaco, on pouvait déjà voir certains films
comme Waga Love, série burkinabè de Guy Désiré Yaméogo, ou encore Moi Zaphira le
long métrage d’Apolline Traoré, s’échanger sur téléphone portable en quelques
minutes pour 100 FCFA (0,15 €)… Il est difficile de faire plus compétitif et plus
rapide. » (Dupré Colin, 2013) Ce type de pratiques entrave les possibilités de
développement d’un marché du DVD au Burkina Faso privant les professionnels de
relais de revenus. Et les risques de piratage limitent les possibilités de réception de
films internationaux au Burkina car les distributeurs ne veulent pas exposer leurs films
au piratage. De ce fait, en dehors des salles exploitées par des acteurs français (l’institut
français et les deux salles de Canal Olympia du groupe Vivendi) aucun exploitant de
salle burkinabè ne dispose de DCP pour recevoir ces contenus internationaux. À ce
propos, Rodrigue Rakis Kaboré, un exploitant de salle (Ciné Neerwaya) et distributeur à
Ouagadougou, nous a laissés entendre en entretien qu’avec le développement du
numérique ils ont des difficultés pour la location et l’achat de films. « Avant j’achetais
en gros plusieurs films que je prenais avec un distributeur français, Les films 26.
Mais comme nous n’avons pas de DCP, j’ai dû arrêter mon contrat avec Les
Films 26, car je n’ai pas d’installations adaptées pour recevoir ses films. » (Rodrigue
Rakis Kaboré, entretien du 14-10-2019) Or, comme l’indique UniFrance films (2014), la
société française Les Films 26 a obtenu la licence des studios américains pour
l’Afrique francophone. Ne disposant pas de DCP le ciné Neerwaya ne diffuse plus
(depuis plusieurs années) de films américains comme il l’a fait pendant de longues
années. Aujourd’hui les cinéphiles Ouagalais qui veulent voir des films américains
doivent se rendre dans une des deux salles de Canal Olympia qui mise sur ce type de
films. Certains employés du ciné Neerwaya que nous avons interrogés nous ont affirmé
avoir tout fait pour convaincre leur patron d’investir dans le DCP afin de diversifier
l’offre de films pour le public car les Ouagalais sont demandeurs de films américains et
que le retour sur investissement serait assez rapide. Mais le propriétaire de la salle ne
compte pas investir les 100 millions de francs CFA nécessaire. Il estimerait
l’investissement très élevé pour une activité qui lui rapporte peu.

L’équipement pour la projection de films internationaux coûte cher actuellement,


il faut du DCP pour recevoir des films étrangers envoyés grâce à des liens internet.
Actuellement au Burkina, seules les salles de Canal Olympia et de l’institut
français en disposent. Au ciné Neerwaya, nous avons fait des prospections et il
faut au moins 100 millions de F CFA pour s’équiper. Ça fait maintenant des
années que nous demandons à notre patron d’équiper la salle mais il ne fait pas le
nécessaire parce que le cinéma ne marche pas actuellement avec les films
africains. Il n’y a pas suffisamment de bénéfices à réinvestir. Si nous avions du
DCP dès qu’il y aura une sortie de films sur le marché américain, on pourrait
projeter. Le cinéma marche bien, il y a même des jeunes à Ouaga qui ont parfois

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26/09/2023 09:58 Incidences de l’usage du numérique sur le fonctionnement de la filière cinématographique burkinabè
envie de faire sortir leurs copines pour voir un film mais l’offre est limitée. (Selon
des employés du ciné Neerwaya interrogés en focus groupe du 05-02- 2019)

44 Lors d’un entretien réalisé en octobre 2019, le gérant des deux salles de Canal
Olympia, M. Rex Bassono, nous a effectivement confirmé que leurs salles ne
fonctionnent qu’en numérique. « On utilise internet pour la réception de certaines
données techniques de films. Nous fonctionnons uniquement en numérique avec du
DCP. Donc on reçoit des clés de films via des liens internet. » En outre, il affirme qu’en
termes de marché, les films qui font salle comble sont des blockbusters américains bien
appréciés des jeunes. « Le cinéma au Burkina est porté par la jeunesse. Force est de
constater que quand des films font salle pleine, ce sont des jeunes de 18 à 20 ans en
moyenne qui viennent voir des block Buster américains, et nous utilisons les réseaux
socionumériques pour promouvoir ces films auprès des jeunes. » C’est donc un
avantage supplémentaire pour Canal Olympia de pouvoir recevoir des films américains
du fait qu’il dispose du DCP.
45 L’analyse des incidences du faible équipement en DCP des salles de cinéma au
Burkina Faso a révélé de nouvelles contraintes pour un autre maillon de la filière
cinématographique burkinabè qui est en difficulté : l’exploitation en salle.

Analyse des enjeux de la numérisation


des salles d’exploitation de films au
Burkina Faso
46 Le Burkina Faso fait partie des pays africains dont les États ont eu une politique
volontariste en matière de cinéma et cela ne s’est pas résumé dans le cas de ce pays, à
l’accompagnement institutionnel du Fespaco ; différents maillons de la filière
cinématographique ont été soutenus dont le secteur de l’exploitation en salles. Sous la
période révolutionnaire (1983-1987), l’État a ouvert des salles de cinéma dans les
30 provinces du pays ; ces salles étaient alimentées par la SONACIB. Mais, pendant les
années 1990, en plus de la conjoncture économique défavorable évoquée plus haut,
l’arrivée des vidéo-clubs3 a aussi eu un effet négatif sur la distribution et l’exploitation
en salles de films au Burkina Faso.
47 À ce propos, Patrick Ndiltah (2013) soutient que ce circuit des vidéo-clubs
s’approvisionne par le biais de la piraterie qui instaure un nouveau type de marché
cinématographique parallèle et de ce fait des exploitants de salles se transforment en
importateurs non règlementés.

On peut dire qu’à partir de 1990, le phénomène des vidéo-clubs explose. Les salles
de cinéma traditionnelles ne peuvent se maintenir face à cette prolifération. Des
exploitants jettent l’éponge. Ils ne peuvent supporter les charges car la
fréquentation des salles diminue. Et même si certains exploitants privés tentent
encore de tenir le coup en maintenant la fréquentation à des niveaux honorables,
ils croulent sous le poids des taxes. Ce constat d’un exploitant camerounais est à
ce titre emblématique. (Patrick Ndiltah, 2013, p. 49)

48 Rappelons aussi que les péripéties qu’a connues la SONACIB pendant des années et
qui ont entraîné sa liquidation, ont engendré aussi la fermeture de la majorité des salles
de cinéma au Burkina Faso, celles-ci étaient exploitées par la société d’État.
49 Aujourd’hui les salles de cinéma dignes d’être appelées ainsi à Ouagadougou (par
exemple) sont le Ciné Neerwaya, le Ciné Burkina, la salle de ciné de l’Institut Français
et les deux salles de Canal Olympia. Les salles en province avaient pratiquement toutes
fermé et depuis ces trois dernières années, l’État a entrepris la restauration des salles
dont certaines ou rouvert récemment à Bobo Dioulasso, à titre illustratif.
50 Parmi les difficultés que vivent les salles de cinéma au Burkina Faso, on peut
également faire cas du niveau de taxation élevée selon les professionnels du milieu. À ce

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propos, un exploitant de salle nous a laissés entendre :

Le problème est que même si nous remplissons notre salle, il y a trop de taxes. On
se retrouve avec presque 37,5 % de taxes sur un ticket d’entrée qui est de
1 000 F CFA (1,50 euro). C’est énorme. Pour l’électricité, on paie 100 %. Alors que
certaines industries ont des allègements au niveau de l’énergie. Donc quand vous
faites le plein de la salle, vous avez beaucoup d’argent mais après déduction des
charges courantes, vous vous retrouvez avec à peine de quoi payer le personnel.
On ne dégage pas vraiment de bénéfices. (Rodrigue Rakis Kaboré, entretien du 14-
10-2019)

51 Le constat fait au Burkina Faso quant au peu de volonté de l’État d’accompagner les
exploitants de salles avec des allègements fiscaux est une réalité dans d’autres pays
africains aussi, et Patrick Ndiltah indique à ce sujet qu’il est clair que ces États africains
se soucient peu de promouvoir le secteur culturel par le biais d’allègements fiscaux,
alors qu’on pourrait espérer qu’ils utilisent cette incitation pour permettre à ce secteur
de s’épanouir. « On mesure ainsi à quel point cette carence de l’État et cette politique
fiscale peu cohérente constituent un lourd handicap pour les exploitants. » (Patrick
Ndiltah, 2013, p. 50) Il soutient que c’est souvent la taxation élevée qui est à l’origine du
développement du commerce parallèle, de la fraude, dans le secteur du cinéma,
notamment.
52 Patrick Ndiltah (2013) indique que les fermetures des salles sont une réalité dans
beaucoup de pays africains et qu’elles ont pris une ampleur considérable avec le
développement du numérique du fait de l’accès croissant à des supports numériques
comme le DVD et aux matériels de diffusion qui leur sont liés (lecteur/graveur,
vidéoprojecteur). Selon lui, l’accès à la télévision par satellite et l’accès croissant des
populations africaines à des images par exemple via internet, contribue aussi à mettre
les salles de cinéma en difficulté. Si le développement du numérique a eu des incidences
négatives sur l’exploitation des salles de cinéma, il faut noter que toutes les incidences
du numérique sur le segment de l’exploitation ne sont pas négatives. Le simple fait de
pouvoir faire plusieurs copies d’un film sur des supports différents, DVD, clés USB,
disque dur externe, donne plus de possibilité pour l’exploitation de films en salle au
Burkina. Il y a encore quelques années, les producteurs qui venaient au Fespaco avaient
une seule copie de leur film, et c’est cette unique copie qui tournait de salle en salle
pendant le festival.

Dans le passé, quand le film était présent dans un pays, il ne pouvait pas être en
même temps dans un autre ; ça fait que les gens se plaignaient qu’après le
Fespaco, on ne pouvait plus voir certains films. Les gens ne savaient pas qu’à la fin
du festival le producteur ou réalisateur partait avec son film. Aujourd’hui avec le
développement du numérique et les possibilités de faire plusieurs copies, ça ne
fonctionne plus toujours comme avant. Le film peut être sur une clé USB et on
peut même l’héberger sur des sites internet. (Gervais Kwené, entretien du 27-09-
2019)

53 Par ailleurs, partant du constat que très peu de salles en Afrique sont équipées en
DCP, Dupré (2013) constate aussi que rares sont les salles en Afrique qui peuvent
actuellement accéder à des films internationaux du fait des coûts exorbitants pour
équiper les salles, entre 70 000 € et 150 000 € s’il est décidé de s’équiper en qualité,
pour répondre aux standards internationaux. Selon lui, le DCP, correspond plus aux
réalités de certaines grandes villes où de grosses sociétés d’exploitation (à l’image de
Canal Olympia dans certaines villes africaines comme Ouagadougou) ont les moyens
d’investir dans la numérisation et dans tout ce que cela implique comme modifications
collatérales ­comprenant les conditions matérielles requises. Ce qui écarte beaucoup de
villes africaines dans leur ensemble.
54 Après la disparition de la SONACIB, l’État burkinabè a remis en place un système de
soutien aux activités culturelles à travers la mise en place d’un fonds de développement
culturel et touristique (FDCT) auquel les professionnels du cinéma peuvent postuler,
même s’il faut mentionner que les sommes octroyées sont faibles. Mais l’État burkinabè

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ne soutient pas l’exploitation en salles des films. Comme nous venons de le montrer,
même la taxation des entrées en salles est considérée exorbitante et constitue une
entrave à la santé financière des salles. Or le cinéma est une filière, et il faut que
l’ensemble de la chaîne fonctionne convenablement pour qu’il y ait une saine émulation
dans la filière. Avec le développement du numérique, certains pays comme la France
ont mis la puissance publique en action pour aider les salles de cinéma à se mettre aux
standards internationaux. Selon Passevant Christiane et Portis Larry, (1998), en
France, le parc des salles est en train d’achever sa transition numérique « 98 % des
cinémas sont aujourd’hui équipées. Une aide du CNC est d’ailleurs accordée aux
petites salles de cinéma indépendantes dont les travaux d’adaptation au numérique,
très coûteux, risqueraient de provoquer une faillite rapide. » De son côté, Colin
Dupré (2013), soutient aussi que dans certains pays c’est l’État qui a financé la mise aux
normes des salles de cinéma et qu’en France cela s’est fait à travers l’action du CNC.
Mais les États de la plupart des pays africains sont loin de pouvoir mener de telles
actions et de ce fait la numérisation du parc de salles reste un vaste chantier.
55 Certes, le Burkina Faso est loin d’avoir les moyens dont dispose l’État français pour
accompagner la numérisation des salles à la hauteur de ce qui a été fait en France, mais
avec de la volonté, des appuis peuvent néanmoins être apportés aux exploitants de
salles de cinéma. Comme nous l’avons vu supra, ces salles ont du mal à fonctionner
correctement et parmi leurs difficultés, le fort taux de taxation du ticket d’entrée est
mentionné. L’État burkinabè dispose à ce niveau d’un levier d’action qui consisterait à
alléger le taux de taxation. Cela peut même se faire de manière dérogatoire pour une
période donnée, le temps de permettre aux salles de cinéma de retrouver une bonne
santé financière et d’offrir ainsi la possibilité à celles qui sont de taille importante, de
s’équiper en DCP par exemple. Ce qui permettra de diversifier les offres de films en
diffusant de nouveau, des films américains à même de drainer un grand public. À noter
qu’actuellement, les salles de cinéma exploitées par des acteurs burkinabè diffusent
uniquement des films africains, majoritairement burkinabè. Ce qui est bien en termes
de promotion de films burkinabè, mais limite les marges de profits des exploitants de
salles. Certes, l’équipement en DCP coûte cher, mais selon le gérant des salles Canal
Olympia à Ouagadougou, le retour sur investissement est rapide car on donne plus
d’attractivité aux salles exploitées, en limitant le piratage et la vente parallèle de tickets
d’entrée. Voici ce qu’il en dit :

Chez nous, l’exploitation des salles est très suivie. Aujourd’hui si on vend
100 tickets comme tout est connecté du fait du DCP, automatiquement à Paris les
responsables sont au courant car les machines sont reliées par internet. Et les
responsables peuvent savoir combien on gagne. Cela ne laisse pas de marge pour
des ventes parallèles de tickets. Et puis les responsables nous contactent chaque
semaine pour le reporting. Cet avantage qu’apporte le numérique nous met à l’aise
et met aussi les investisseurs en confiance parce qu’ils ont aujourd’hui un moyen
de suivi plus fiable grâce en partie à la technique du DCP. Si un film est
programmé pour 2 mois au Burkina, on programme la clé (le lien internet) pour
2 mois et après elle est désactivée. Le DCP est cher mais ça s’amortit bien. Les
taux d’occupation des fauteuils chez nous sont croissants. Et cela s’explique en
partie par l’offre, la qualité des films. (Rex Bassono, entretien du 14-10-2020)

56 En rencontrant le Directeur Général du Cinéma et de l’Audiovisuel en février 2019,


celui-ci nous a laissés savoir pendant l’entretien que l’État burkinabè envisage remettre
en place un système de billetterie (celui-ci avait disparu avec le fonds 30115) pour
financer la production nationale de films. On se pose la question de savoir comment un
système de billetterie pourrait engendrer suffisamment d’argent dans le contexte actuel
où la majorité des salles de cinéma burkinabè ne sont pas rentables. Donner la
possibilité aux salles d’avoir une meilleure santé financière est un préalable qui
contribuera au bon fonctionnement d’une billetterie et à la redynamisation de
l’ensemble de la filière. Les salles des grandes villes qui ont les moyens pourraient
s’équiper aux standards internationaux pour conquérir des cinéphiles supplémentaires
avec des films étrangers à grands succès, et la bonne dynamique introduite dans la

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filière pourrait également favoriser la renaissance de beaucoup de salles de provinces


ont qui fermé depuis bientôt deux décennies. Pour qu’une telle perspective puisse voir
le jour, il faudrait que l’État burkinabè accompagne la filière cinématographique à se
structurer de sorte que les différents maillons de la chaîne du cinéma fonctionnent
convenablement.

Conclusion
57 L’arrivée du numérique dans la production cinématographique burkinabè au début
des années 2000 a été une aubaine pour un cinéma en difficulté. La production en
numérique a eu un succès rapide dans ce pays parce qu’elle a permis de réduire
significativement les coûts de production et a favorisé de ce fait aussi, l’arrivée de
nouveaux entrants dans la filière. Par ailleurs, la baisse des coûts de production
conjuguée à l’entrée de nouveaux acteurs et à la volonté pour certains cinéastes
d’optimiser le temps de tournage en limitant les coûts, a eu parfois des impacts négatifs
sur la qualité des films sortis.
58 Ce présent travail a montré que l’usage du numérique a également impacté les
maillons de la distribution et de l’exploitation en salles de films au Burkina Faso. En
matière de distribution, le piratage des œuvres s’est très développé avec l’usage accru de
supports numériques de distribution (DVD, Clé USB, entre autres) sans sécurisation du
contenu, mettant davantage à mal une filière qui ne se portait déjà pas bien. Notons en
plus de cette situation, que le manque de distributeurs professionnels a conduit
beaucoup de réalisateurs burkinabè à devenir aussi distributeurs de leurs propres films.
Du reste, certains distribuent en supports numériques, notamment en DVD.
59 Concernant l’exploitation en salles, le développement des vidéos clubs au courant des
années 1990 a également mis à mal beaucoup de salles de cinéma qui étaient déjà dans
des difficultés. En outre, le manque d’équipements de la plupart des salles de cinéma du
Burkina Faso en numérique avec la technologie du DCP fait que ces salles ne diffusent
plus de films internationaux (américains par exemple) limitant l’offre à des films
africains et majoritairement burkinabè.
60 À l’issue de l’analyse des incidences du numérique sur ces trois maillons de la filière
cinématographique burkinabè, on peut dire que ces effets du numérique ont été positifs
(principalement) pour le secteur de la production. C’est à ce niveau que les cinéastes
burkinabè profitent le plus de l’usage du digital dans leur filière.

Liste des personnes rencontrées en entretiens

Personnes Dates de
Structures Postes occupés
rencontrées l’entretien
Directeur Général
Sounkalo Dao Pluriel Production 26-09-2019
(Réalisateur/producteur)
Ministère de la Ancien délégué général du Fespaco et
Baba Hama 04-02-2019
Culture ancien ministre de la Culture
Focus groupe
avec 3
Ciné Neerwaya Projectionnistes en salle de cinéma 05-02-2019
travailleurs
(anonymes)
Hamadou Sondé Fespaco Conservateur Archiviste 05-02-2019
Radio Télévision du
Omar Yago Chef de programmes 06-02-2019
Burkina
Yssouf Saré BF1 (chaine de TV) Directeur Général 07-02-2019
Direction Générale
Armel Hien du Cinéma et de Directeur Général 07-02-2019
l’Audiovisuel
Ancien Secrétaire Général du ministère
Ministère de la de la Culture
Stanislas Méda 25-09-2019
Culture Ancien Directeur de la Cinématographie
Nationale

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Philippe Ministère de la Ancien délégué général du Fespaco et


11-02-2019
Sawadogo culturelle ancien ministre de la Culture
Vokouma 02 - 09-
SONACIB Ancien Directeur Général
François 2019
Directeur Général
Pierre Roumba CLAP-AFRIQUE 24-09-2019
(Producteur)
PILIMPOUKOU Directrice générale
Aminata Nikiéma 02-10-2019
PRODUCTION (Réalisatrice/productrice)
DOUBACOM Directeur Général
Gervais Kwené 27-09-2019
PRODUCTION (Réalisateur/producteur)
Toussaint
Institut Imagine Réalisateur 08-10-2019
ZONGO
Exploitant du ciné Neerwaya et
Rodrigue Rakis Ciné Neerwaya et Directeur Général de PUB NEERE
14-10-2019
Kaboré PUB NEERE maison de production et distribution
cinématographique
Canal Olympia Gérant des salles Canal Olympia
Rex Bassono 14-10-2019
Ouagadougou Ouagadougou

Bibliographie
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Notes
1 Document en ligne non paginé : https://larevuedesmedias.ina.fr/les-cinemas-africains-face-au-
chantier-du-numerique, le consulté le 22 mars 2020.
2 Voir en Annexe, le tableau de la liste indicative sur les entretiens et leurs dates de réalisation.
3 Les Vidéo clubs sont des lieux sommairement aménagés avec des bancs sous un hangar (le plus
souvent) où un public paie habituellement la somme de 100 F CFA (environ 15 centimes d’euros)
pour visionner des films essentiellement étrangers : américains, indous, entre autres.

Pour citer cet article


Référence électronique
Evariste Dakouré, « Incidences de l’usage du numérique sur le fonctionnement de la filière
cinématographique burkinabè », Revue française des sciences de l’information et de la
communication [En ligne], 21 | 2021, mis en ligne le 01 janvier 2021, consulté le 06 mars 2021.
URL : http://journals.openedition.org/rfsic/10567 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rfsic.10567

Auteur
Evariste Dakouré
Evariste Dakouré est enseignant-chercheur en Sciences de l’Information et de la Communication
à l’Université Aube Nouvelle (Ouagadougou, Burkina Faso) où il dirige l’UFR Lettres, Langues et
Sciences Humaines. Il est membre associé à la Chaire Unesco en communication et technologie
pour le développement à l’Université du Québec à Montréal (Canada) et chercheur associé au
Groupe de Recherche sur les Enjeux de la Communication/GRESEC (Université Grenoble Alpes,
France). Il travaille sur les usages sociaux du numérique, sur les stratégies de développement
de multinationales des télécoms, et sur les concepts de diversité culturelle et industrie culturelle.
evaristedakoure(at)hotmail.com

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TIC et développement en Afrique : approche critique d’initiatives et enjeux [Texte intégral]
ICTs and development in Africa : a critical approach to initiatives and issues
Paru dans Revue française des sciences de l’information et de la communication, 4 | 2014

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