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Dr Bernard FAYE.
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1° Edition - 1997
JP>ourquoiun
"Guide de l'!Elevage du Dromadaire " ?
Notre volonté d'investir sur le continent africain n'est plus à démontrer .
Nous avons toujours cru en notre mission et, tout au long de ces dernières années, su
démontrer notre ambition :
Plus que des médicaments de qualité à prix compétitifs pour toutes les espèces
animales, nous avons voulu également proposer un environnement à leur utilisation, tant
par le biais de notre présence sur le terrain, nos formations d'éleveurs ou l'édition de
documents à vocation pédagogique.
Trait d'union entre deux océans, de multiples langues ou dialectes et autant de cultures
venues du fond des figes, le dromadaire domine, de son regard de sage, l'infinité du désert
vers le futur de nos temps.
Sa place prépondérante dans la vie des populations du Sahel nous renvoyait l'écho
permanent des éleveurs qui s'interrogeaient sur l'oubli dans lequel les tenaient les acteurs
mondiaux de la pharmacie vétérinaire.
Nous avons donc voulu briser cet isolement et relever ce défi en mettant doublement
nos compétences au service des camélidés :
Nous souhaitons donc, ici, remercier tous ceux qui ont cru en ce projet.
Que ce Guide apporte donc à ceux qui ont le privilège de partager la vie de ce vaisseau
du désert, les informations qu'ils recherchent pour mieux comprendre et développer leur
élevage ... ..
. ... afin que nous puissions encore longtemps contempler le roulis du pas
nonchalant de cet animal mythique qui hante /'inconscient du genre humain depuis la nuit
c:s~~--
Jean François DEBERNARD
-.._
Dr Catherine THOM/ERES
Directeur AFRIQUE Marketing et Communication AFRIQUE
ANIMALE
2
Sommaire
Préambule .......................................................... 7
Classification générale ... ........ .. ...................... ..... ........... ... .................... .. ..... ... ..... .. 21
Les races principales ..................... ... ...... .... .. ..... ..... ..... ... ......... ..:... ............... .......... 22
Les marqueurs génétiques ........................ .......... .... ............. ..... ... ..... .. .. ..... ....... ..... 25
Les hybrides .... ... ................................... .... .... ........... .... ............................... .... ....... 26
Anatomie générale ............... ............. ... .. .. .. ..... ............ ... ....... .. ........ .. ........ ..... ... .. .... 27
Anatomie interne ... ..... .... ..... ............... .. ....... ......................... ... ..... .... ...... ... ...... ..... ... 31
Physiologie générale ... .. ....... .. ........... ... .. .... .... .... ... .. ..... .. .... .... ... ... .. .... .. ..... .. ........... 35
1. Adaptation à la chaleur .. .... .... ..... ...... .......... ........ ...... .. ............... ....... .. .. ..... 35
2. Adaptation à la sècheresse ................ ............ .. ... .... .. ......... ... ......... .. ... ..... .. 36
3. Adaptation à la sous-alimentation ...... .. ...... ... ................ ............... .. ... ...... .. . 40
Adaptation à la sous-nutrition énergétique
Adaptation à la sous-nutrition azotée
Adaptation à la sous-nutrition minérale
Les grands systèmes d'élevage chamelier ...... ... ... ............. .... .... ..... .. ..... .. ... .... .. ..... 45
1. Les systèmes pastoraux extensifs .... ... ...... ............. .. .... ... .. ......................... 45
2. Les systèmes agro-pastoraux semi-intensifs .... ..... .. .... .... .. .... ... .. ..... ..... ... .. 47
3. Les systèmes intensifs ..... ........ .. ......... .... .... .. ...... ..... .... ... ........................... 47
La taille et la composition des troupeaux ........ ..... .... ... ..... .... ........... .......... .... ......... 48
Les pratiques d'élevage: LA REPRODUCTION .......... .. ....... .. .......... .... .................. 50
1. L'entrée en reproduction .................. .. .. ... ... .... .... .... ... .. ... .. ...... ... .... ..... .... .... 50
2. Les cycles de reproduction ....... ...... .. ... .. ...... .... .. ... .... ... ....... .. ... .. ... .. .. .. .. .... . 51
Les cycles sexuels
Les cycles saisonniers
3. La copulation .... ... ...... .. .... .......... .... ..... ... .... .... ...... .. ...... ...... .... ... .. ............... 52
4. La gestation ..... ........ .. ................ .... ... ........ .... ..... .... ... ... ... .. ... .. .. ... ..... ... ... .. ... 53
Le diagnostic de gestation
La parturition
5. Les techniques de reproduction ................ ....... .... .... .... ............. .. ....... ........ 54
La gestion des mâles
La gestion des femelles
3
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
4
Sommaire
5
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
6
Préambule
7
Origine et Domestication
L'un des ancêtres commun à ces deux genres, apparu à l'Eocène moyen il y a
environ 35 millions d'années , nommé Protylopus par les paléont9logues, avait la
taille d'un gros lapin . Cependant , le premier genre considéré comme l'ancêtre en
ligne directe des camélidés actuels est le Protomeryx apparu à !'Oligocène supérieur
dans ce qui est aujourd'hui l'Amérique du Nord. L'hypothèse admise actuellement est
que l'ancêtre de nos chameaux traversa le Détroit de Bering au Pléistocène
supérieur, au début donc de la période glaciaire. Les camélidés occupèrent
rapidement les zones arides de l'hémisphère nord et plusieurs représentants du genre
Came/us sont répertoriés en divers point de l'Ancien Monde. Ainsi, dans le sud de la
Russie , on a pu identifier un C. knob/ochi et en Roumanie , un C. a/utensis. L'espèce
apparemment la plus répandue à l'époque en Europe et en Asie semble être
cependant C. thomasi. Dans le nord de l'Inde, dès le Pliocène, on trouve un C.
siwalensis et un C. antiquus. Ce sont ces deux dernières espèces qui sont
considérées comme étant les plus proches des espèces actuelles.
Le dromadaire (ou un ancêtre très proche) aurait pénétré en Afrique par le Sinaï
jusque dans la Corne de l'Afrique, puis en Afrique du Nord jusqu'à l'Atlantique, il y a 2
ou 3 millions d'années. Cependant, d'après les données actuelles, il aurait disparu du
continent africain pour n'y être réintroduit que beaucoup plus tard , à la faveur de la
domestication .
De nos jours, le genre Came/us comprend deux seules espèces: C. dromedarius
communément appelé dromadaire ou "chameau à une bosse" et 1C. bactrianus ou
chameau de Bactrian qui n'est autre que le "chameau à deux bosses". Au-delà de
leur particularité anatomique, dromadaire et chameau de Bactriane se distinguent par
leur aire de répartition géographique. Tandis que le premier est l'animal des déserts
chauds d'Afrique, du Proche et du Moyen-Orient jusqu'au désert du Thar en Inde
(Etat du Rajasthan) , le second est celui des déserts froids d'Asie Centrale jusqu'aux
confins de la Mandchourie en Chine. Toutefois, les deux espèces peuvent cohabiter
en quelques rares endro its. Sauf mention spéciale , l'essentiel de notre propos dans le
présent ouvrage sera consacré au Came/us dromedarius.
La domestication du dromadaire apparaît fort récente au regard de l'apparition
Les rela tions
plus ancienne des autres espèces actuellement domestiques. En effet , il est probable
que le dromadaire fut domestiqué par l'homme dans le sud de la péninsule arabique en tre l'homme et
environ 2000 ans avant J.-C . (3000 ans selon d'autres sources) à partir d'une le dromadaire
population sauvage occupant les vallées arides de l'actuel Hadramaout. A titre de remon tent à
comparaison , la domestication des petits ruminants (chèvres et moutons) date de 2000 ans avant
9000 à 10000 ans B.P. (Before Presenf) . celle des bovins à environ 8000 ans et celle JC
du cheval à 6000 ans. L'utilisation première du dromadaire relève de l'activité de bât
et demeure sans doute associée au commerce des épices, fort florissant à cette
époque entre le sud de la péninsule arabique et le pourtour méditerranéen. L'histoire
retient d'ailleurs que la visite de la reine de Saba au roi Salomon (955 avant J.-C.) se
fit grâce à une imposante caravane de dromadaires portant les effets de la suite
royale au travers du désert d'Arabie . Ce commerce caravanier a permis de fait la
naissance de quelques glorieuses civilisations : celle des Nabatéens qui fondèrent
Pétra dans l'actuelle Jordanie . en étant un exemple .
9
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
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10
La Place du Dromadaire et du Chameau dans le Monde
Distribution actuelle
Il est difficile de connaître avec exactitude la population caméline mondiale , du fait
de l'absence de vaccination obligatoire dans cette espèce et de la nature des
écosystèmes dans lesquels il évolue , ce qui en rend le recensement sujet à caution .
Les chiffres proposés par la FAO s'appuient sur des estimations qu'un recensement
exhaustif mais quasi-impossible dans l'état actuel des choses risquerait de contester
fortement. L'effectif de 20 millions de "grands camélidés" (groupe comprenant des
dromadaires et les chameaux, à distinguer des "petits camélidés" d'Amérique andine)
dont un peu plus d'un million de chameaux "à deux-bosses" sous-estime sans doute
la population réelle . Au demeurant, la population caméline est peu importante au
regard de la population bovine mondiale par exemple (environ 1300 millions de
têtes), mais la faiblesse de cette représentation est à mettre en regard de l'espace
occupé.
Le dromadaire est répertorié dans 35 pays "originaires" s'étendant du Sénégal à 35 pays
l'Inde et du Kenya à la Turquie . Le chameau de Bactriane n'est présent, quant à lui d'origine, mais
que dans une zone étroite s'étendant de la Turquie à la Chine comprenant à peine une évolution
une dizaine de pays. L'importance relative du dromadaire est fort variable cependant étroitement liée
d'un pays à l'autre. au climat
L'aire origina ire de distribution du dromadaire est bien entendu associée aux
caractéristiques climatiques du milieu compte-tenu de l'adaptabilité remarquable de
cette espèce aux conditions d'aridité . A l'inverse, les performances du dromadaire se
trouvent fort limitées dès que la pluviométrie devient importante , et on trouve
rarement l'animal en Afrique ou en Asie lorsque la pluviométrie dépasse 400 à 550
mm . Dans les pays montagneux tel l'Ethiopie où la pluviométrie est fortement
associée au relief, on ne trouve guère de dromadaires au-delà de 1500m d'altitude.
Toutefois , l'espèce supporte fort bien des altitudes plus élevées dès lors que le climat
y demeu re sec. Les contraintes sanitaires accompagnant les climats plus humides
contribuent également à limiter l'extension de l'espèce au-delà des régions évoquées.
Dans un biotope plus humide, le buffle domestique ou le zébu s'avèrent plus
performants et mieux adaptés aux besoins des populations .
L'aire de distribution découle aussi d'un facteur social d'importance : le dromadaire
est tout d'abord l'animal du nomade , célébré comme tel par le Coran , même si son
utilisation par les bédouins de l'Arabie, sans doute historiquement les premiers
chame li ers , est antérieure à ·l'Islam.
Cependant , dans son extension à la faveur de l'expansion de l'Isl am , le dromadaire Un animal
du nomade a rencontré le cultivateur méditerranéen ou oasien , et s'est donc vénéré par le
sédentarisé . Il n'en demeure pas moins que son aire de répartition recouvre celle des Coran
populations pastorales nomades ou transhumantes qui au cours de leur histoire l'ont
11
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
adopté comme auxiliaire incontournable dans la mise en valeur des zones arides. Il
est remarquable, par exemple, que face à la désertification progressive du milieu
depuis quelques décennies, mais aussi en raison des avantages comparatifs de
l'espèce, des populations pastorales dévolues à l'élevage bovin (les peuhl en Afriq ue
de l'Ouest ou les borana en Afrique de l'Est) ont significativement modifié la
AIRES DE composition de leurs troupeaux souvent exclusivement bovin au profit du
DISTRIBUTION DE dromadaire. De tels événements militent d'ailleurs en faveur de l'argument d'u ne
L'ESPECE croissance démographique non négligeable de l'espèce en dépit de la croyance selon
laquelle le commerce caravanier périclitant par la concurrence de la route et du
CAMELINE
camion, aurait précipité la chute des effectifs.
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La Place du Dromadaire et du Chameau dans le Monde
Tous les pays d'Afrique du Nord à l'exception de la Tunisie sont concernés (Maroc 2. les pays dans
hors Sahara , Algérie , Libye , Egypte) ainsi que le Mali , l'Ethiopie et le Kenya . Dans lesquels l'élevage
ces pays , l'élevage camélin relève soit de populations pastorales occupant les zones camé/in peut
appropriées pour le dromadaire (les Afar, les Somali, les Oromo en Ethiopie par représenter une
exemple , ou les Somali au Kenya et les Touareg au Mali) , soit de populations part importante
sédentaires exploitant le dromadaire en tant qu'auxiliaire de l'agriculture (Afrique du de /'activité
Nord surtout) . En Asie , les pays appartenant à cette catégorie sont le Pakistan , économique pour
l'Afghanistan , l'Irak et Oman . En Israël , le dromadaire occupe essentiellement le sud certains groupes
du pays (désert du Neguev). Dans tous ces pays , les populations sont de population
consommatrices de viande et de lait et souvent , le cheptel national ne suffit pas à la (entre 1 et 8% de
demande (le cas le plus flagrant étant celui de l'Egypte). la BHD).
En Afrique du Nord seule la Tunisie est concernée . Mais on y retrouve surtout les
3. les pays dans
pays sahéliens (Niger, Tchad , Soudan) dans lesquels une part considérable des
lesquels l'élevage
populations pastorales et même sédenta ires vivent de l'é levage du dromadaire . On
observe d'ailleurs une augmentation de la part caméline de la BHD dans la plupart
camé/in constitue
des pays sahéliens suite aux crises climatiques répétitives de ces dernières une part
décennies. En Asie , ce sont les pays de la péninsule arabique, berceau de l'espèce importante de
qui relèvent de ce groupe : Arabie Sa c.udite, Jordanie , Bahrein , Koweit et Yemen . l'économie
L'intérêt "multi-usage" du dromadaire est bien établi dans ces régions : on exploite agricole (entre 8
l'a nimal pour le la it , la viande , le transport , mais aussi po ur le loisir (course de et 20% de la BHD) .
dromadaires) .
13
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
4. les pays dans Ce sont des pays, au demeurant peu nombreux, où la place "culturelle" du
lesquels l'élevage dromadai re est centrale . Parmi les grands pays , la Somalie vient bien entendu en
camé/in est tête. Malgré l'insécurité politique, l'exportation de dromadaires sur pied en direction
primordial dans de la péninsule arabique représente la première source de devises pour le pays. La
/'économie du consommation de lait est assurée à plus de 60% par le lait de chamelle et près de
pays (plus de 20% 80% des foyers en zone pastorale commercialisent du lait de chamelle . En
de la BHD). Mauritanie et dans les provinces sahariennes du Maroc (ex-Sahara espagnol), le
dromadaire joue également un rôle incontestable dans l'approvisionnement des vill es
et dans l'occupation et la valorisation de l'espace pastoral désertique. Le contexte
climatique de Dj ibouti n'autorise guère d'autres activités que celle de l'élevage
camél in associé à celui des petits ruminants. Ces 4 pays d'Afrique représentent à eux
seuls près de 40% de la population caméline mondiale . En Asie, ce sont les Emirats
Arabes et Quatar qui relèvent de ce groupe. Bien entendu , l'économie caméline est
dérisoire dans ces Etats par rapport à l'extraction pétrolière , mais le dromadaire est
culturellement indéboulonnable en dépit des évolutions sociologiques liées à
l'enrichissement de la population .
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La Place du Dromadaire et du Chameau dans le Monde
16000
Effectifs
Evolution comparative
14000 des effectifs du
.. . dromadaire en Afrique
et en Asie
.. . .. ..
12000
Afrique
10000 -
Asie
8000 -
6000 -
4000 Evolution
comparative des
effectifs du
61 65 70 75 80 85 90 95 dromadaire dans
Années
les principaux
pays producteurs
7000
Mauritanie 1 \ Kenya
Effectifs Effectifs
- ,•'
1000
Tchad
6000 ,. , . I '\ . ,,: Soudan
Niger Ethiopie
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Années
61 75 85 OO 95
15
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
tAE~fMBJJ~ DÊ i!/!A MÂUR11J,'d/;J!é · · · · · · · · · · · / ...·.· ·•·•·•·•·•· · · · · · · · · · · · · · • ············•· · ····· · ·•· .· · · · . · · · ·. · · ··· · · · .····· •· · · · · · · · · · <t F ·
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•.• 1000 i .. y
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••••••
A ces 4 catégories de pays , il faut bien entendu ajouter un cinquième groupe, fort
2 groupes de hétérogène, de pays ou de régions d'implantations récentes , mais dans lesquels
pays l'élevage du dromadaire n'est pas destiné à un développement conséquent et
d'implantation demeurera quoi que l'on décide, une activité marg inale.
récente
On peut distinguer deux groupes de pays d'implantation récente pour le dromadaire :
16
La Place du Dromadaire et du Chameau dans le Monde
Dès la découverte par les européens des vastes étendues désertiques du centre de 1. les pays
l'Australie , l'idée de l'introduction du dromadaire allait de soi. En 1849, 6 animaux en comprenant des
provenance des lies Canaries furent acheminés par bateau jusqu'au port d'Adélaïde. zones arides ayant
Cependant un seul d'entre eux survécut au voyage . D'autres dromadaires suivirent la fait l'objet d'une
même année et les années suivantes, notamment en provenance des Indes tentative
britanniques, mais toujours en assez petit nombre. En 1866, de Karachi dans l'actuel d'implantation
Pakistan, parvinrent 121 spécimens de dromadaire (accompagnés de 31 chameliers durable: Australie,
indiens) qui constituent avec les quelques éléments ayant atteint le continent USA, Amérique
quelques années plus tôt , la base du troupeau camélin australien. En 1895, on latine, Afrique du
comptabilisait déjà 6000 dromadaires, les chameaux de Bactriane comptant pour Sud.
quantité négligeable .
A son apogée vers 1920, l'effectif du troupeau australien atteignait plus de 12000
individus, essentiellement concentré dans les zones Sud et Ouest du pays. Le
dromadaire était un auxiliaire remarquable pour l'exploration du continent soit comme
animal de bât, soit comme animal de selle , soit comme animal de trait (dans les
années 50, policiers et postiers se déplaçaient encore à dos de dromadaire !) .
Curieusement, son utilisation zootechnique au sens strict (lait , viande) est restée
marginale.
Avec la motorisation , l'intérêt du dromadaire en Australie a donc considérablement
décru et on ne comptait plus dans les années 60 qu'environ 2000 animaux
domestiques. Cependant , un autre phénomène remarquable devait surgir: le retour à
l'état sauvage d'une part importante du cheptel camélin (la "féralisation"). Ce retour
devait être initié lors de l'abandon d'animaux au cours des nombreuses expéditions
au travers du désert central australien. Privé quasiment de prédateurs, bénéficiant
d'un milieu désertique assurant un minimum de fourrages et de points d'eau, le
dromadaire féra! allait se développer d'une manière considérable. Dans les années
60, on évaluait à près de 90000 têtes l'effectif de ce cheptel sauvage . Aujourd'hui , les
estimations varient entre 100000 et 500000 têtes . L'isolement et le peu de
pénétration de ce désert devaient faciliter cette croissance. Aux marges désertiques,
le dromadaire féra! rentrant en concurrence avec les autres espèces domestiques, un
came/ destruction Act fut édité en 1925, autorisant l'abattage des animaux "en
surnombre". L'histoire retient, entre autres , pendant la sécheresse de 1961 , l'abattage
de 1150 têtes autour de 3 points d'eau.
La tendance aujourd'hui est à l'utilisation "touristique" du dromadaire domestique (il
y a aujourd'hui environ 40 entreprises australiennes organisant des randonnées à dos
de dromadaires dans les zones désertiques du pays) , et à l'exploitation rationnelle du
cheptel sauvage par abattage au fusil pour la consommation de viande. Par ailleurs ,
de nombreuses recherches éthologiques et écologiques sont menées sur ce troupeau
féra! sans doute unique au monde, permettant ainsi de mieux comprendre le
fonctionnement de l'espèce sans la gestion imposée par l'homme.
• Aux Etats-Unis, ce sont des considérations militaires qu i ont suscité les
responsables politiques à introduire le dromadaire dans les zones arides du sud du
pays. Si le premier grand camélidé a été introduit vers 1701 comme animal
d'attraction, la tentative d'adaptation de l'espèce a vraiment démarré en 1856 sous
l'impulsion de Jefferson Davis. Ainsi , 75 dromadaires, 2 chameaux de Bactrianee,
1 hybride furent introduits au Texas au cours des années précédant la guerre
civile . Le succès ne fut pas à la hauteur des attentes. Les soldats et les pionniers
préféraient le cheval et dès 1866, les animaux survivants furent soldés à quelques
prospecteurs comme animaux de bât. Il est vraisemblable qu'il ne reste plus de
trace aujourd'hui de ces auxiliaires de l'armée américaine .
• En Amérique latine, toute les tentatives d'implantation dans les zones arides du
Pérou ou du Brésil échouèrent, la maladie décimant la plupart des animaux . Les
introductions de grands camélidés dans les plantations de canne à sucre pour le
transport lors des récoltes relèvent de l'anecdote et ne connurent pas de
lend emai n, du fait des conditions environnementales défavorables.
17
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
2. Les pays
tempérés faisant Il ne s'agit pas là de l'introduction du dromadaire ou du chameau en nombre
l'objet d'une restreint pour les besoins des cirques et des parcs zoologiques où l'espèce a encore
implantation de un beau succès. Presque tous les pays du monde tempéré peuvent dans ce cad re,
circonstance. s'enorgueillir de posséder quelques individus. Il s'agit plutôt d'évoquer des
introductions à visée plus "économique". C'est essentiellement en Europe du Sud que
le dromadaire a été implanté avec cette intention.
• En Espagne, le dromadaire avait accompagné l'expansion de l'Islam et on
comptait encore un troupeau conséquent au début du siècle. En 1925, on
répertoriait près de 4000 dromadaires dans la péninsule. La plupart d'entre eux
disparurent au moment de la guerre civile en 1936. Quelques individus à moitié
sauvages étaient encore signalés dans le delta du Guadalquivir dans les années
70.
• En France , quelques animaux ont été utilisés au XIXéme siècle dans les mines de
sel du sud du pays. Plus récemment , quelques éleveurs (une dizaine) se sont
lancés dans la constitution de troupeaux pour répondre aux besoins de loisir de
l'homme moderne : randonnées dans les Causses, promenades sur les plages,
courses de chameaux, films publicitaires ....
• En Italie , plusieurs individus furent introduits par Ferdinand Il de Médicis dès
1622. Par suite d'autres importations, notamment en provenance de Tunisie, le
cheptel camélin italien représentait 196 têtes vers 1800. Quelques-uns des
descendants survécurent jusqu'à la seconde guerre mondiale.
• Enfin , sur l'île de Chypre, près de 3000 têtes étaient comptabilisées avant la
seconde guerre mondiale, mais ce troupeau relativement important a
pratiquement complètement disparu dans des circonstances mal élucidées.
Au demeurant donc, à l'exception de l'Australie, le dromadaire est resté fidèle à son
aire de répartition d'origine et les tentatives assez nombreuses d'implantations en
dehors des zones habituelles d'élevage ont échoué ou ont confiné notre animal à la
marginalité.
Evolution numérique
L'analyse de la tendance 64-94 , en prenant l'hypothèse vraisemblable d'un
ajustement logarithmique, donne un effectif de 15 millions de têtes en 2020 dans le
seul continent africain contre 14,1 millions aujourd'hui , soit un taux de croît annuel de
0,4%. Au niveau mondial , cela conduit à estimer une population caméline comprise
entre 22 et 23 millions de têtes à l'horizon 2020. L'accroissement naturel de l'espèce
aurait pu favoriser l'hypothèse d'un effectif plus important mais deux phénomèn es
vont sans doute moduler cette croissance :
18
La Place du Dromadaire et du Chameau dans le M onde
19
Races et Types de Dromadaires dans Je Monde
Classification générale
21
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
dans les travaux agricoles dans les piémonts de l'Atlas, du targui, coursier renommé
du Sahara qui a fait la fortune des compagnies méharistes et des razzieurs. En Asie,
les agriculteurs de la plaine fluviale du Tigre font de l'lndi un auxiliaire efficace de
l'activité agricole avec son corps lourd et massif, alors que les nomades du désert du
Thar montent avec élégance le Bikaneri de conformation longiligne.
Corne de l'Afrique
Kenya 1. Turkana
2. Gabra (MS) Rend ile
Somalie, Kenya 3. Benadir (MS) Bimal , Fili, Garre, Gerra , Helai, Sidfar, Gherra
Somalie 4. Mudugh (P6) Eidime, Eydimma, Galjoal , GHELI Medu
Mijertein, Nogal, Galgial , Goloial.
S. Guban
6. Hoor Hor
Somalie, Ethiopie 7. Somali (MS) Elai, Ooaden
Ethiopie, Djibouti 8. Dankali (P6) Arho , Danakil, Issa , Gurba , Ayub.
Ethiopie 9. Grain (P6) Cajeh , Chameau côtier.
Soudan , Ethiopie 10. Arabi Deaili, Dçiasrin , Diabali, Shaçiali , Airi , Adimani
Erythrée 11.Rashaidi (P6) Bahl-el Arab, Zibedi
12. Anafi (M4) Tzad i, Tzodi , Eact
Soudan, Erythrée 13. Bishari (M4) Adendoa , Amarar, Asharaf, Beni Amir Haboab,
Beia, Read Sea Hills, Keih, Hadendoa
Afrique sahélienne
Tchad , Soudan 14. Arab (G2) Kordofan , Kababish, Soudani, Sudanese Pack
Tchad , Niger 1S. Manga (MS) Mohamid , Borno, Sokoto, Batha, Bélt de l'lmanan
16. Tibesti (P8) Ennedi , Gorane, Kanem , Borcou , Selle de
l'/manan
Niçier 17. Aïr Azbin, Touareo
Niger, Mali 18. Azaouak (G3) Doçiondoutchi , Oullemeden
Mali 19. Adrar (G2)
20. Fleuve (G1)
Mali , Mauritanie 21. Berabiche Kou nt a
22. Sahel (G3) Hodh ,
Reçiuibi
Sénéçial 23. Gandiol(G 1)
22
Races et Types de Dromadaires dans le Monde
Afrique du Nord
Aloérie , Mauritanie 24 . Reouibi (G3)
Aloérie , Maroc 2S. Saharaou i (P7) Ouled Sidi Cheikh
Algérie 26 . Chambi de Ben i Abbès
(P7)
27 . Taroi (G2)
28 . Aiier
Maroc 29 . Ait Khebbach Aftouth
Maghreb 30 . Maghreb (P7) Chambi d'EI Golea , chameau du sud,
chameau des Hauts-plateaux
31 . Chameau de la steppe
(P8)
Tunisie 32 . Chameau du Sahel (P6)
Libye 33 . Urfilla (G3) Oulad Busaif
Libye , Egypte 34 . Soudani (G2)
Eovote 3S . Mowalled
Eovote 36 . Fellahi (G1)
Proche et Moyen-Orient
Proche-orient 37 . Chami
Arabie 38 . Azmivah (MS) Maoattir, Moihim
39 . Umaniyah (G3) Batiniyah
Irak , Svrie 40 . Khuwar
Irak 41. lndi Beni-teir
Iran , Pakistan 42 . Mekrani (P8) Brohi , Kach es, Peshin , Powindah
Afghanistan 43 . Chameau du Nord
Iran , Asie centrale 44. Khiva Turkestan , Nar, lrkek
Péninsule indienne
Inde, Pakistan 4S. Riverine (G1)
46. Bikaneri (G3) Bahawalouri , Thari
47 . Jaisalmeri
48 . Kachchhi
Pakistan , Afghanistan 49 . Bari (P8) Bagri , Gainda , Hazara , Sohawa , Thalwan ,
Kala Chitta
Pakistan SO. Deshi (MS)
S1 . Dera lsmail Khan (MS)
Les Principales races de dromadaires à travers le Monde
23
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
Cette liste, qui fait abstraction des implantations extérieures à la zone originaire du
dromadaire (il est probable que le chameau sauvage "australien" devienne peu à peu
une race particulière) , témoigne de la difficulté à identifier nettement des groupes
homogènes d'individus. En s'appuyant sur quelques critères morphologiques simples
(taille, poids , conformation, robe, pelage, "rusticité"), l'utilisation principale (bât, selle,
trait , lait) et l'habitat (types de plaine, montagne), on peut globalement identifier 8
groupes de dromadaires dans le monde d'où il apparaît que la taille représente l'un
des facteurs les plus discriminants:
8 groupes de • les types de dromadaires de grande taille qui comprend 3 catégories,
dromadaires sont
(G1) les individus caractéristiques des races de plaines fluviales ou côtières, peu
identifiés dans le rustiques , lourdes et médiolignes, utilisées pour le bât (la race Fleuve au Mali en est
monde l'archétype) ;
(G2) des individus assez hétérogènes regroupant des races de conformation, de
pelage , mais surtout d'habitat et de mode d'utilisation très variés (Arab, Soudani,
Targi, Adrar) ;
(G3) les animaux des plaines désertiques, rustiques, longil ignes, à pelage ras et
de coloration variable , utilisés pour la selle et souvent appelés Méhara (par exemple
le Reguibi) .
• les types de dromadaires de taille moyenne regroupés en 2 catégories, (M4)
des animaux soudanais , longilignes, à la robe claire , servant de monture, et (MS)
des bêtes de somme médiolignes, à robe très variée, assez lourdes, vivant en
plaine (par exemple Manga , Azmiyah) .
• les types de dromadaires de petite taille comprenant également 3 catégories
d'animaux, (P6) les races de plaines fluviales ou côtières élevées essentiellement
en Afrique de l'Est, légères, utilisées pour le bât, plutôt rustiques, médiolignes et
de couleur fauve (par exemple le Guban en Somalie), (P7) les races du Maghre b,
rustiques , médiolignes et de robe foncée, d'utilisation mixte et préférentiellement
vivant dans les plaines désertiques (par exemple la race Ouled Sidi Cheikh en
Algérie), enfin (P8) les races brévilignes de montagne, à pelage long et foncé , très
rustiques, rarement montées, tel que le Bari au Pakistan .
24
Races 1et Types de Dromadaires dans le Monde
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Quelques travaux ont été mis en oeuvre dans ce sens , mais les résultats restent
parce ll aires et n'intéressent qu'un nom bre fort limité de races présumées. Des
marqueurs génétiques ont été testés, ma is les informations réco ltées demeurent
ba lbutiantes. Les groupes sanguins par exemple sont encore mal connus et les
quelques études sur le sujet sem blent indiquer que la plupart des gra nds ca mélidés
relèvent d'u n se ul groupe (8) alors que les petits camé lidés présentent 6 groupes
sa nguins nommés A, 8 , C, D, E et F.
A partir des recherch es fo rt partielles men ées sur les polymorphismes biochimiques,
notamment protéiques, très peu de va ri ations génétiqu es ont été re levées. Aucune
différence n'a pu être observée pa r exemple sur des param ètres tels que l'estérase-
D, la glucose-phosphate isomérase, la phosph ogluconate dehydrogénase , l'albumine ,
la protéine de transport de la vita mine D ou la transferrin e. Cependant , des va riations
ont été répertoriées en Soma lie sur l'hémoglobine et la beta-lactoglobuline , et au
Soudan , sur l'albumine et l'haptoglo bine. Concernant la catalase , des avis
contradictoires sont répertoriés dans la littérature. En Inde, aucun polymorphisme des
protéi nes du lait n'a été observé , en revan che, des différen ces raciales ont été
relevées concernant les phosphatases et l'amylase lactée.
Globalement, le dromadaire se caractérise pa r une faible variation génétique des
marqueurs sanguins d'origine protéique , ce qui va à l'encontre de ce qui est observé
25
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
chez les autres espèces domestiques. Les causes d'une telle situation sont encore
mal élucidées. L'utilisation de typage ADN s'appuyant sur les outils de la biolog ie
moléculaire demeure récent et conduira sans doute dans un proche avenir à mieux
cerner les bases permettant de décrypter le génome du dromadaire.
Les hybrides
Une mention particulière doit être apportée aux croisements entre le dromadaire et le
chameau de Bactriane, pratique courante dans les pays où les deux espèces
cohabitent à savoir la Turquie , la Russie, les républiques d'Asie centrale , le nord de
l'Iran et de l'Afghanistan . Historiquement, l'hybridation est connue depuis longtemps
puisque les parthes la pratiquait dès le début de l'.ère chrétienne pour obtenir des
animaux de bât le long de la route de la soie . L'hybridation était encore largement
pratiquée dans toutes la zone de contact entre les deux espèces au début du siècle,
notamment en Anatolie , pour obtenir des animaux bien adaptés au transport de
marchandises. Au XIXème siècle et jusqu'à la veille de la prem ière guerre mondiale,
on importait encore en Anatolie près de 10000 dromadaires en provenance de Syri e
et d'Arabie, pour les besoins d'hybridation. C'est dire l'importance non négligeable de
ce commerce .
L'hybridation donne naissance à un animal connu sous le nom de chameau turkoman.
Les connaissan ces acquises sur les hybrides sont principalement dues aux trava ux
réalisés en Russie et au Kazaksthan . On sait que le nombre de chromosomes est
identique entre chameaux de Bactriane et dromadaires. Le croisement le plus usuel
est celui qui associe un mâle bactrien à une femelle dromadaire, mais l'inverse est
possible. Les hybrides F1 sont normalement fertiles, cependant les hybrides mâles
peuvent présenter une spermatogénèse stérile ou une difficulté à assurer la
conception . En revanche la femelle hybride est toujours fertile et est capable de
mettre bas un chamelon ressemblant au père qu'il s'agisse d'un chameau de
Bactriane ou d'un dromadaire.
Les produits issus des croisements présentent des caractéristiques intermédiaires aux
deux parents du point de vue de la conformation générale, de l'endurance, de la
production laitière ou lainière et de certaines caractéristiques sanguines telle que la
numération érythrocytaire, généralement plus élevée chez le chameau que chez le
dromadaire. L'hybride est muni d'une large bosse très légèrement subdivisée , le
pelage est abondant sur les membres et le haut du cou à la manière ·du bactrien ,
mais les épaules ne sont pas couvertes.
Un hybride L'hybride est un animal robuste , bien adapté au bât et au travail attelé. C'est d'ailleurs
pour son caractère alliant la force naturelle du chameau et l'endurance à la marche
capable de
du dromadaire que les anciens l'appréciaient. Il serait capable de transporter jusqu'à
porter 550 kg de 550 kg de marchandises sur le dos pendant plusieurs jours, ce qui en faisait un
marchandises auxiliaire prisé des caravaniers voués aux très grandes distances, tels ceux assurant
le commerce de la soie et des épices au travers du continent asiatique. Cependa nt,
les meilleures performances semblent acquises par l'hybride de première génération,
ou à la rigueur par le croisement d'un hybride femelle avec un chameau de Bactriane.
26
Particularités Anatomiques et Physiologiques
Si des variations dans cette morphologie générale ont été succinctement décrites
dans le chapitre précédent en vertu de différences raciales, il est notable que la
plasticité anatomique est moins spectaculaire que dans d.'autres espèces
domestiques. Le fait que le dromadaire soit spécialisé du point de vue écologique à
un biotope marqué par l'aridité du milieu contribue sans doute à limiter la variabilité ,
que la diffusion dans des écosystèmes forts différents semble autoriser pour les
espèces qui ont envahi presque tous les milieux de la planète , à l'instar des bovins.
Nous ne donnerons pas ici une description exhaustive de l'anatomie et de la
physiologie du dromadaire, s'agissant d'un ouvrage de portée généraliste. Nous nous
attarderons essentiellement sur les modalités qui font du dromadaire un animal
particulier et renvoyons le lecteur aux ouvrages spécialisés sur le sujet.
Anatomie générale
• Le squelette du dromadaire est composé d'os épais dont la morphologie générale Un squelette
ne se distingue en rien de celle des autres mammifères. Le crâne , comparable à identique à celui
celui du cheval de par sa taille, présente une crête occipitale fort proéminente, à des autres
laquelle se rattache un puissant ligament cervical de nature à soutenir une tête mammifères avec
aussi lourde sur un cou aussi long . Les sinus sont amples et profonds et
des particularités
procèdent , de ce fait , de l'adaptabilité du dromadaire à la vie désertique comme
nous le verrons plus loin. La partie osseuse du voile du palais est étroite, ce qui
morphologiques
facilite l'extériorisation de sa partie molle chez le mâle en période de rut. Le uniques
maxillaire inférieur, long, présente une constriction centrale marquée, ce qui le
fragilise et conduit à des fractures fréquentes lors des combats occasionnels entre
mâles.
Comme la quasi-totalité des mammifères et en dépit de la longueur de son cou, le
dromadaire possède 7 vertèbres cervicales. Pour le reste, il ne se distingue que peu
des autres herbivores domestiques: 12 vertèbres thoraciques (13 pour les bovins et
les ovins), 7 vertèbres lombaires (6 pour les bovins et les ovins) et 4 vertèbres
sacrales (5 chez les bovins et 4 chez les ovins) . Les apophyses épineuses des
vertèbres thoraciques et lombaires, bien que supportant la bosse , n'en sont pas plus
longues pour autant. Les os des membres sont longs, traduisant l'éloignement du
corps (thorax et abdomen) du sol lorsque l'animal se tient debout.
• Dentition : Comme la plupart des mammifères, le dromadaire a une dentition Formule dentaire
temporaire (dents de lait) et une dentition permanente. La formule dentaire de la
première comprend 22 dents. Chez l'animal adulte, la formule dentaire
permanente comprend 34 dents au total et s'enrichit de la présence de molaires.
L'évolution de la formule dentaire permet, comme chez tous les herbivores,
d'apprécier l'âge de l'animal. Toutefois , il subsiste de fortes variabilités inter-
indivieuelles qui incitent à une certaine prudence dans l'interprétation des résultats.
27
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
28
Particularités Anatomiques et Physiologiques
L'usure des dents remplaçantes permet d'évaluer l'âge des animaux adultes:
•8 ans : les Pinces usées jusqu'au bas de leur palette, Coins peu usés
•9 ans : Coins ras; table des Pinces ovale; Mitoyennes elliptiques
•10-11 ans : Pinces arrondies; Mitoyennes et Coins ovales
•12 ans : Mitoyennes rondes
•13-15 ans: Pinces biangulaires
•14-15 ans : Mitoyennes biangulaires; Coins ronds
•16-17 ans : toutes les incisives sont biangulaires
•> 17 ans : les dents se déchaussent et passent à l'état de chicots faciles à arracher
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29
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
• La peau, contrairement aux autres herbivores, est peu mobile ce qui désavantage
Peau et considérablement l'espèce dans les zones à fortes densités d'insectes piqueurs ou
Glandes simplement volants, d'autant plus que l'animal est muni d'une queue courte,
inefficace pour chasser les importuns. Au demeurant, la peau est épaisse , surtout
sur le dos, et donc moins susceptible d'être lésée par des harnais ou une
végétation agressive . Les glandes sudoripares, peu nombreuses, sont éparpillées
sur l'ensemble du corps et participent, de par leur relative rareté , à la limitation
des pertes hydriques par transpiration.
30
Particularités Anatomiques et Physiologiques
Anatomie interne
Le système digestif du dromadaire , bien que polygastrique , diffère de celui des vrais
ruminants . La lèvre inférieure du dromadaire est très mobile et a une activité
préhensile importante lors de la prise de nourriture . Dans la cavité buccale , le voile
du palais a la particularité de s'extérioriser sous l'effet des gaz du rumen , notamment
chez le mâle en rut , qui présente alors à l'extérieur de la bouche , un tissu rose et
humide en émettant un bruit caractéristique . La "doufa", ainsi dénommée par les
arabes , est un signe notable de l'activité sexuelle saisonnière du dromadaire.
• Du fait de la longueur du cou , le tube oesophagien est long et présente des
glandes sécrétoires en grande quantité, ce qui conduit à humecter en permanence
la ration alimentaire souvent sèche de l'animal , facilitant ainsi le transit dans les
voies supérieures du tube digestif. Le dromadaire, comme les vrais ruminants , est
un polygastrique. Cependant, de notables différences s'inscrivent entre les
ruminants et les tylopodes , le sous-ordre auquel appartiennent les camélidés. Les
estomacs du dromadaire, bien que dénommés rumen, reticulum,
omasum/abomasum par commodité de langage , ne sont que partiellement
comparables à ceux des bovins par exemple.
• Le rumen a la particularité de posséder des sacs aquifères, diverticules contenant
des millions de cellules glandulaires jouant un rôle important dans la
potentialisation de l'action salivaire et la production d'une partie liquide abondante,
caractéristique du contenu stomacal des dromadaires. Par ailleurs, le débouché de
!'oesophage, placé entre le rumen et le reticulum chez les ruminants , se situe
directement sur le rumen chez les camélidés. Enfin, la paroi externe du rumen du
31
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
dromadaire est dépourvue des piliers musculeux observables chez les bovins et
les petits ruminants. Ces différences entre les tylopodes et les ruminants attestent
de leur relative éloignement dans la classification taxonomique , en dépit d'une
activité de rumination comparable .
• Le reticulum qui fait suite au rumen montre une structure comparable à celle des
sacs aquifères et possède des papilles disposées en alvéoles d'abeille.
Extérieurement , il n'est pas possible pratiquement de distinguer la partie omasum
32
Particularités Anatomiques et Physiologiques
33
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
mètres. C'est au niveau du côlon , que l'essentiel de l'eau du tube digestif est
réabsorbé . Le foie est abondamment lobé et , à l'instar du cheval , dépourvu de
glande biliaire . Le canal cholédoque est commun au canal pancréatique unique.
La rate est attachée , non au diaphragme comme chez les bovins, mais sur le côté
gauche du rumen . Chez l'animal en bonne santé , le poids de la rate est compris
entre 1 et 1,5 kg.
• La plupart des interventions médicales ou chirurgicales se font sur l'animal en
décubitus sternal , c'est-à-dire en position "baraquée". La topographie viscérale est
donc intéressante à connaître chez le dromadaire dans cette position et non
debout. On peut en avoir une idée par les planches ci-contre. Elles montrent en
résumé les points suivant:
- sur la partie latérale ~auche, on peut avoir accès au rein gauche refoulé
vers l'arrière contre les 5ème . 5 me et 7 ème vertèbres lombaires; à la rate, située au
creux du flanc gauche , adhérente au rumen et proche du rein; au rumen qui occupe
l'essentiel de l'espace abdominal; au côlon spiral , qui s'intercale entre l'extrémité
caudale du rumen et l'entrée de la cavité pelvienne . La caillette ne se projette que sur
un espace très petit entre le 5 ème et 7 ème espace intercostal.
34
Particularités Anatomiques et Physiologiques
Physiologie générale
Depuis longtemps, les naturalistes se sont interrogés sur les capacités
physiologiques du dromadaire à s'adapter à la vie désertique, mais ce n'est qu'à partir
des années 50, avec les travaux fondamentaux de Schmidt-Nielsen en Afrique du
Nord, relayés ultérieurement entre autres par des chercheurs australiens
(Macfarlane) . israëliens (Yagil), indiens (équipe du National Came/ research Center)
ou marocains (équipes de l'Institut Agronomique et Vétérinaire de Rabat) qu'a
progressé la connaissance de la physiologie du dromadaire en relation avec son
adaptation aux écosystèmes arides.
La plupart des mammifères vivant dans les zones désertiques. s'astreignent de
l'effet de la chaleur et de la sécheresse en s'enfouissant dans le sol pendant les
heures chaudes. Il est bien évident qu'un animal de la taille du dromadaire ne saurait
satisfaire à une telle exigence. Aussi , notre animal a-t'il développé d'autres
arguments pour s'adapter aux conditions qui sont les siennes.
1. Adaptation à la chaleur
La bosse du dromadaire, contrairement à une légende tenace souvent colportée La bosse : une
par un public ignorant, n'est pas une réserve d'eau , mais d'énergie. Sa présence sur
le dos de l'animal lui assure également un rôle dans la thermorégulation. En effet, la
réserve d'énergie
concentration des réserves adipeuses limite leur répartition sous la peau et donc
facilite la dissipation cutanée de la chaleur. Par ailleurs, alors que la déshydratation
s'accompagne chez la plupart des espèces d'une augmentation de la viscosité
sanguine conduisant à une augmentation de la température interne souvent fatale, le
sang du dromadaire reste fluide, ce qui lui permet de maintenir sa fonction de
transfert de chaleur de la périphérie (plus fraîche du fait de l'évaporation) au coeur.
Une autre propriété remarquable du dromadaire est sa capacité à faire varier sa
température interne en fonction de la chaleur externe , ce qui autorise à considérer Thermorégulation
que notre animal n'est pas un strict homéotherme à l'instar des mammifères passant
une partie de leur existence en hibernation . Lorsque la température ambiante décroît,
notamment pendant la nuit, la température interne du dromadaire peut descendre à
34 °C. Durant les heures les plus chaudes, la température rectale peut atteindre 42°C
sans que l'on puisse parler de fièvre . De tels écarts de température corporelle sont
mortels pour la plupart des mammifères. Il faut noter par ailleurs que ces processus
de refroidissement corporel, non seulement contribuent à économiser l'énergie
nécessaire au maintien de la température interne, mais de plus s'effectuent sans
consommation supplémentaire d'eau contrairement aux autres mammifères. Il a été
mesuré qu'une augmentation de 6°C de la température corporelle chez un
dromadaire pesant environ 600 kg lui permettait d'économiser 5 litres d'eau.
La morphologie générale et le comportement du dromadaire signent aussi son
adaptation à la chaleur : lorsque le sol est chaud et que l'animal se tient debout, ses
longs membres isolent la masse corporelle des calories dégagées par le terrain;
lorsque le sol est plus froid que l'animal, même lorsque le dromadaire se tient en
position baraquée, le coussinet sternal maintient l'abdomen légèrement au-dessus du
sol, permettant ainsi une circulation d'air favorisant la dissipation de la chaleur. Par
ailleurs, aux heures chaudes, le dromadaire se tient préférentiellement face au soleil
afin d'exposer la plus faible superficie possible au rayonnement solaire maximal.
Lorsqu'il est au pâturage, il choisit préférentiellement de brouter les fourrages ligneux
plutôt que les graminées dès lors que la température externe augmente : cela lui
permet de s'alimenter tout en restant à l'ombre des arbres. A l'inverse, en début et en
fin de journée, notre animal consommera de préférence les tapis herbacés.
35
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
2. Adaptation à la sécheresse
Nous avons vu que les mécanismes d'adaptation à la chaleur mettaient en oeuvre
un ensemble de procédures physiologiques qui contribuent à économiser l'eau . Mais
c'est dans les situations extrêmes, notamment lors de déshydratation poussée que le
dromadaire montre ses exceptionnelles qualités.
La résistance proverbiale du dromadaire à la privation d'eau a intrigué depuis
longtemps les physiologistes et il s'agit là d'un des aspects les plus étudiés chez cette
espèce . Sans rentrer dans les détails métaboliques que les mécanismes de
préservation du statut hydrique du dromadaire mettent en jeu , on peut inventorier les
principaux processus de régulation de l'ingestion , de l'utilisation et de l'excrétion
d'eau.
L'eau qu'ingère l'animal est absorbé par les glandes salivaires, l'estomac et
l'intestin. L'eau d'origine métabolique est disponible en quantité insignifiante surtout
chez l'animal en état de déshydratation qui , nous l'avons vu, réduit dès lors son
métabolisme de base. L'excrétion hydrique survient par les voies respiratoires , les
voies digestives, la peau, les reins et la glande mammaire chez la femelle en
lactation . C'est , de fait, à tous ces niveaux que les processus d'économie d'eau lors
de privation temporaire se mettent en place pour assurer les besoins de survie de
l'animal.
En ce qui concerne l'ingestion hydrique (et a contrario la privation d'eau), la
littérature scientifique et documentaire ne manque pas d'évoquer les cas
remarquables d'animaux pouvant se passer de toute boisson pendant plusieurs
semaines. Plus généralement, la quantité d'eau ingérée par le dromadaire dépend de
la qualité de l'alimentation (plus ou moins riche en matières sèches) , de la
température externe , et de son état de déshydratation antérieur. On admet qu'en
saison fraîche , avec une alimentation riche en fourrages verts, le dromadaire se suffit
de la quantité d'eau disponible dans la ration et peut dès lors se passer de boire
pendant un mois. En saison chaude , avec une alimentation plus sèche , un
36
Particularités Anatomiques et Physiologiques
dromadaire 72 38 - 76
mouton 60 62 - 127
chèvre 65 76 - 196
zébu 65 63 - 178
buffle 66 108 - 203
37
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
38
Particularités Anatomiques et Physiologiques
250 oSolides
200
150
100
50
0
Animal Animal
Hydraté Des hydraté
39
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
Ainsi donc, le dromadaire utilise avec parcimonie les ressources en eau interne
dont il dispose et limite au maximum les pertes hydriques dans la limite de la survie
du jeune chez la femelle allaitante. Minimisation des pertes et optimisation des
ressources sont les deux stratégies mises en oeuvre par le "vaisseau du désert" :
fluctuation de la température interne pendant la journée pour minimiser les besoins
en eau nécessaires à l'homéothermie, dépression du métabolisme de base pour
diminuer globalement les besoins et les excrétions métaboliques, diminution de la
consommation d'oxygène pour minimiser les pertes respiratoires et les besoins
nécessaires à la lutte contre la chaleur, excrétion de matières fécales sèches,
concentration des urines et réabsorption rénale massive de l'eau en provenance du
tube digestif. Le dromadaire est un adepte de la physiologie économe. D'ailleurs sa
réputation d'économe ne s'arrête pas là. Vis-à-vis de l'alimentation aussi, le
dromadaire a développé des mécanismes de recyclage .
3. Adaptation à la sous-alimentation
Le milieu désertique n'est pas seulement un écosystème chaud et sec. Il se
caractérise aussi par la faiblesse des ressources alimentaires. leur grande dispersion
et une forte variabilité saisonnière, voire inter-annuelle. Le dromadaire, principal
animal domestique utilisateur de cet espace , ne doit sa survie qu'à sa capacité à
gérer au mieux la faible densité et la faible valeur nutritive de la végétation
désertique. Plusieurs études comparées ont montré qu'il avait une meilleure capacité
Un recyclage à digérer les fourrages pauvres que les ruminants domestiques. Cette supériorité
alimentaire s'explique par une plus grande rétention des particules solides dans les préestomacs,
se traduisant par un temps de contact plus long des aliments avec les micro-
performant
organismes qui les digèrent.
Comme tous les herbivores, le dromadaire ne tire sa subsistance que des
fourrages naturels auxquels il a accès, et des fourrages cultivés ou des compléments
alimentaires organiques ou minéraux que l'homme met à sa disposition. En matière
de nutrition, le dromadaire a besoin pour vivre des mêmes éléments que n'importe
quel .autre mammifère: d'énergie, de protéines, de minéraux et de vitamines. Pour
chacun de ces éléments qui peuvent à un moment ou à un autre lui faire défaut da ns
l'environnement qui est le sien, le dromadaire a développé des mécanism es
d'adaptation qui marquent, une fois de plus, sa particularité .
40
Particularités Anatomiques et Physiologiques
On estime ains i qu'un drom adaire de 750 kg dispose d'environ 150 kg de lipides
Une réserve
de réserve . Or, le catabolisme (c'est-à-dire la destruction métabolique) de 3kg de
lipides apporte 160 mégajoules d'énergie mobilisable , soit l'énergie nécessaire à 8
lipidique
jours d'entretien d'un dromadaire déshydraté , ou 4 jours du besoin d'entretien d'une aisément
femelle en lactation normalement alimentée . mobilisable
Sur le plan du métabolisme énergétique , le dromadaire diffère notamment des
ruminants. En effet, ceux-ci assurent l'essentiel de leurs besoins énergétiques à partir
de la production d'acides gras volatils et une faible quantité de glucose est générée,
ce qui explique la faiblesse de la glycémie chez les bovins et les petits ruminants . Le
dromadaire en revanche , présente une glycémie normale de l'ordre de 1g/I soit une
valeur tout-à-fait comparable à celle des monogastriques, notamment l'homme.
Par ailleurs , il présente une néoglucogénèse très active tant au niveau du foie que
du rein , ce qui lui permet de maintenir une glycémie presque normale en cas de La cétogénése,
privation de nourriture. Chez les ruminants, la prise de repas et surtout le jeûne se à l'inverse des
traduisent par une cétogénèse importante avec en particulier l'accumulation de corps autres
cétoniques comme le 3-hydroxybutyrate dans le sang qui peuvent , en cas de ruminants, est
privation de nourriture prolongée ou d'ingestion insuffisante (exemple de la vache
faible chez le
laitière en début de lactation) conduire à des troubles sanitaires graves (acétonémie
ou cétose) . Chez le dromadaire , la cétogénèse est faible en toute circonstance. Le
dromadaire
butyrate absorbé par l'animal au cours du cycle de transformation des acides gras
volatils est directement utilisé par le rein comme source d'éne rgie, et par le tissu
adipeux comme précurseur de la synth èse des acides gras.
41
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
42
Particularités Anatomiques et Physiologiques
200
150
100
____
--- ---
...............
50
t
-
.... - ... -
0 1 7 17 24 31 38 48 55 62 69 80 87 94 101 108 115 122 129 136 150 164 178 195
Temps (en jours)
1Dromadaire - - Vache
43
L 'Elevage du Dromadaire
45
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
46
L 'Elevage du Dromadaire
Par ailleurs, toutes les espèces ne sont pas aussi sensibles aux effets de la Dromadaires et
maladie ou de la sécheresse , et elles ne sont pas affectées de la même manière petits ruminants
aux épidémies. Aussi, les "civilisations chamelières" sont rarement
monospécifiques. La plupart des éleveurs camélins possèdent aussi des petits
ruminants, parfois des bovins et des ânes. Les somali, les touareg, les maures
disposent d'importants troupeaux de chèvres ou de moutons. Les afar associent
l'élevage camélin à celui des bovins et des moutons. En cas de perte de gros
bétail, les mécanismes de reconstitution du cheptel s'appuient d'ailleurs
essentiellement sur le déstockage des petits ruminants dont la productivité est
globalement plus élevée et les cycles de reproduction plus courts, permettant ainsi
des prélèvements plus intensifs.
• Répartition des risques dans le temps : le confiage d'animaux à des proches ou
à des membres de son clan est une pratique courante chez tous les peuples Gardiennage de
pastoraux. Cela a deux avantages: d'une part, le confiage autorise tout
dromadaires
propriétaire à multiplier les zones d'élevage et donc à diluer les risques, les
contraintes climatiques , politiques, sanitaires ayant peu de chance de frapper
toutes les unités ainsi réparties dans l'espace ; d'autre part , l'obligation pour tout
bénéficiaire d'un animal confié de restituer ultérieurement celui-ci ou un
équivalent, assure au propriétaire la possibilité d'une reconstitution rapide d'une
partie du cheptel initial. Cette pratique permet donc d'anticiper les coups durs, et,
en même temps , de constituer un tissu de relations sociales et d'obligations
réciproques qui assurent la cohésion des groupes pastoraux par nature dispersés
géographiquement. En Ethiopie par exemple , chez les afar, les femmes placent
une partie de leur cheptel dans le troupeau de leur père ou de leur frère et
obéissent ainsi à la règle de prudence de la dispersion . Les animaux prêtés sont
désignés sous le terme de hantila. Les prêts se font à l'intérieur de la famille ou
des relations ce qui constitue un réseau social de solidarité basé sur le confiage
des animaux. Ce réseau porte le nom de kataisa .
47
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
Les tentatives Les tentatives d'embauche intensive de dromadaires en vue d'obtenir une
production de viande de qualité restent fort limitées. Quelques essais sont décrits
d'embauche
notamment en Iran en utilisant des sous-produits de l'agriculture et des concentrés
sont restées énergétiques . Pourtant , la viande de dromadaire est appréciée et les capacités
limitées d'engraissement de l'espèce sont réels, bien que sa productivité pondérale comparée
à celle des petits ruminants ou même des bovins soit nettement inférieure.
Bien que très particulier, on peut intégrer dans les systèmes intensifs, les élevages
d'animaux de course . Dans les pays du Golfe, la course de dromadaires est une
véritable institution et les écuries de course sont entretenues avec grand soi n.
L'alimentation des animaux, leur entraînement, les moyens mis en oeuvre pour leur
protection ou leur sélection relèvent dans tous les cas des principes d'intensification,
la production de ces élevages étant la performance sportive .
A tout bien considérer, lie dromadaire est capable de céder aux exigences de la
"modernité" en élevage et de subir une intensification de sa production pour satisfai re
aux demandes croissantes des populations urbaines des zones désertiques et sem i·
désertiques. Il bénéficie de plus d'un préjugé favorable de par son image d'an imal
des grands espaces même si le mode d'élevage intensif le rapproche de plus en plus
des autres espèces. Cette capacité à répondre aux défis alimentaires du mond e
moderne lui donne une place prometteuse dans les productions animales de demain .
48
L 'Elevage du Dromadaire
49
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
1 . L'entrée en reproduction
Des conditions La femelle est rarement mise à la reproduction avant 4 ans , et le mâle avant 6
optimales ans. La durée de gestation étant d'environ 13 mois, dans des conditions extensives,
la première mise bas n'apparaît pas avant l'âge de 5 ans et plus généralement à 6
d'alimentation
ans.
ont permis une
mise à la Dans des conditions très intensives d'alimentation, à la station de Mateur en
reproduction Tunisie, des femelles ont été fécondées dès l'âge de 2,5 ans (32 mois). Elles avaient
atteint au moment de la saillie fécondante un poids moyen de 380 kg , soit 65 % du
dès 2,5 ans
poids adulte. Ce dernier facteur est déterminant : l'alimentation et l'entretien des
50
L 'E/ievage du Dromadaire : La Reproduction
jeunes chamelles sont la garantie d'une croissance qui permettra aux chamelles
d'entrer en reproduction plus précocement. Ainsi , en Tunisie , les femelles ont mis bas
à partir d'un âge de 3 ans et demi.
Bien que l'ovulation ne soit garantie que par l'accouplement, la femelle extériorise
les signes du rut au moment de !'oestrus. Le mâle manifeste également le rut à
certaines périodes de l'année. Il amène alors la femelle à se baraquer.
L'accouplement se produit la nuit ou tôt le matin et la détection des femelles en
chaleur demande une surveillance à ces heures de la journée. L'éleveur assiste
souvent l'accouplement en conduisant le pénis du mâle dans les voies génitales de la
femelle . Les femelles s'accouplent à plusieurs reprises pendant leurs chaleurs. Les
femelles doivent être mises à la reproduction dès le premier et le deuxième jour des
chaleurs. C'est à ce moment que les proportions de saillies fécondantes sont les plus
élevées.
Le premier retour en chaleurs après la naissance se produit à un intervalle très
variable . La cyclicité peut reprendre tout de suite après la naissance , surtout si le
chamelon ne survit pas . L'accouplement est alors possible 4 semaines après, mais
51
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
3. La copulation
La femelle en chaleur stimule l'ardeur du mâle par la vue , les sons et l'odeu r.
Pendant la phase pré-copulatoire, le mâle manifeste une excitation parfois violente
avec morsure. Il force alors la femelle à se placer en position baraquée , pu is la
chevauche en maintenant ses membres antérieurs autour du thorax de sa partena ire.
L'accouplement chez le dromadaire se caractérise par sa durée, remarquableme nt
p!us longue que chez les bovins : elle varie entre 7 et 35 minutes, avec une moyenne
comprise entre 11 et 15 minutes. Le mâle est capable de copulations répétées
pendant plusieurs heures. On considère qu 'il est capable de couvrir 70 femelles au
cours d'une saison de rut à raison de 3 ou 4 femelles par jour. Le volume de l'éjacula!
52
L 'Elevage du Dromadaire : La Reproduction
4. La gestation
L'appareil génital de la chamelle
se caractérise par un utérus bifide
mais asymétrique , la corne utérine
gauche étant légèrement plus
développée que la droite. Bien que
les ovaires droit et gauche
fonct ionnent de fa çon égale , la
gestation a toujou rs lieu dans la
corne utérine gauche. Des
ovulations multiples se produisent parfois, mais les jumeaux sont extrêmement rares.
Des chiffres variant de 0,1 à 0,4% sont cités dans la littérature . Cela indique un risque
élevé de mortalité embryonnaire . La gestation chez le dromadaire dure environ 390
jours, avec une assez grande variabilité liée notamment au sexe du foetus ou à la
saison de naissance. La durée de gestatio n est un peu plus longu e chez le chameau
de Bactriane.
Les avortements ne sont pas rares ch ez la cham elle. En Ind e, des taux d'incidence
supérieurs à 10% sont observés dans les troupeaux. Les causes prin cipales sont la
trypanosomiase et les déficits alimenta ires .
• Le diagnostic de gestation
La méthode traditionnellement utilisée par les éleveurs est celle du relevé de la
queue. Une femelle gestante relève la queue quand un dromadaire mâle ou même
quand l'éleveur s'approche d'elle.
L'absence de fiabilité de cette méthode demande d'avoir recours à la palpation
rectale pour confirmer le diagnostic. L'animal doit être baraqué . Il accepte mal cette
manipulation , ce qui nécessite parfois l'utilisation d'un tranquillisant. Les signes
perçus sont les suivants :
• 1er mois: présence d'un corps jaune sur l'un des ovaires ;
• mois: utérus toujours dans le bassin ; corne utérine gauche uniformément
2 ème
élargie ; le corps jaune est indifféremment sur l'ovaire droit ou sur le gauche;
• 3 ème mois: corne utérine gauche nettement plus grosse que corne droite; ovaire en
position abdominale ;
• 4 ème mois: col au bord du bassin ; utérus encore totalem ent palpabl e en bordure du
bassin
• 5 ème mois: utérus en position abdominale; foetus parfois palpable ;
* 6 ème mois: paroi dorsale de l'utérus lég èrement en dessous du plancher du bassin ;
ovaire de la corne droite toujours palpable ;
* 7 ème mois: utérus sous le plancher du bassin mais encore palpable ; tête et pattes
du foetus identifiables;
* 5 ème mois: tête , cou et pattes avant du fo etus palpables ;
* g ème mo is: foetus dont les mouvements deviennent détectables et qui peut être
balancé vers le flanc droit;
* 1o ème mois: mouvements évidents; début du développement mammaire; l'ovaire
de la corne droite devient diffi cil ement palpable ;
53
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
• La parturition
3 à 24 heures avant l'apparition de la poche des eaux, l'animal se montre agité, se
couche et se redresse. La femelle a tendance à s'isoler et s'éloigne du troupeau. Le
chamelon se présente la plupart du temps en positi9n antérieure, les pattes en avant
puis, assez rapidement , la tête . L'accouchement est généralement rapide. La durée
du travail varie selon les observations entre 10 et 300 mn . Les cas de dystocie
(difficulté de mise bas) sont rares et ne nécessitent qu'exceptionnellement une
assistance à la mise bas . Liquide et membranes foetales sont généralement expulsés
dans l'heure qui suit. Les cas de rétention placentaire sont rares en élevage extensif.
L'involution de l'utérus se produit dans les trois semaines suivant l'accouchement. Il
est important de couper, si nécessaire, et de désinfecter Je cordon ombilical dès
l'expulsion du foetus.
Le nouveau-né se lève et tête dans les 15 minutes qui suivent. Les malformations ne
sont pas rares dans les élevages où existent une forte consanguinité . De même, dans
de mauvaises conditions d'alimentation, les morts-nés sont fréquents.
L'environnement conditionne aussi Je poids à la naissance puis, par les performances
de lactation de la mère, la croissance du chamelon et donc ses chances de survie
dans la première année après la naissance où il est Je plus fragile. Dans des
systèmes de production où un marché existe pour Je lait et non pour la viande
(Djibouti par exemple) , les nouveaux-nés mâles sont systématiquement abattus dès
la naissance pour prélever l'intégralité de la production de lait. Globalement Je taux
de survie des chamelons avant un an est de 70% à peine . Il est de 90% chez les
jeunes des classes d'âge 1-2 ans et 2-3ans, et de 95% au-delà (cf. Paragraphe sur la
viabilité du jeune).
54
L 'Elevage du Dromadaire : La Reproduction
* anesthésie
* contention de l'animal couché sur la côté
* désinfection des bourses
* incision du testicule supérieur, peau et paroi scrotale
* mise en place haute d'une pince type Reimers puis exérèse
* opération identique avec le testicule bas
* pas de suture cutanée
* désinfection de la plaie et application sur le pourtour de la plaie d'un répulsif
insecticide, répétées tous les jours pendant la semaine suivant l'opération .
* L'âge de la castration est très variable : de la naissance à 5-6 ans au plus tard . En
moyenne, les éleveurs préfèrent une castration au moment de la puberté du mâle,
vers 3-4 ans. Cependant , si l'animal est destiné au bât, la castration n'est
effectuée que lorsqu'il a atteint sa pleine maturité, soit vers 7-9 ans.
55
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
L'âge Une femelle mise trop jeune à la reproduction affaiblit son capital de fertilité. La
gestation se développera au détriment de sa propre croissance, qui sera également
en compétition avec la lactation . Le temps gagné pour la première naissance risq ue
d'être perdu par l'intervalle de temps que demandera la jeune femelle pour
reconstituer ses réserves avant la deuxième naissance . En fait plus qu'un critère
d'âge, qui peut varier entre 2 ans et demi et 5 ans , le facteur à prendre en
considération pour décider de la mise ou non à la reproduction est celui du poids de
la jeune femelle : il ne doit pas être inférieur à 65% du poids adulte.
La pathologie Après l'alimentation , la pathologie représente le premier facteur limitant les
performances de reproduction; la trypanosomiase est la principale cause
d'avortements; la brucellose, plus rare, également. Avant la mise en reproduction , les
femelles doivent être testées. Les métrites peuvent entraîner une infertilité chronique.
La palpation rectale de l'appareil génital peut s'avérer nécessaire en cas d'absence de
retours en chaleurs après la mise bas ou en cas de saillies non fécondantes. Cet
aspect est traité plus loin .
La lactation Un anoestrus de lactation apparaît généralement après la mise bas pendant les 4
ou 5 premier mois de l'allaitement ; il n'existe généralement pas lorsque le chamelon
est mort ou écarté de la mère et que la traite supplée la tétée . Cela conduit la feme lle
à attendre la saison de reproduction suivante pour être à nouveau fécondée, soit 6 à
12 mois plus tard. Même si la lactation continue , la femelle doit être mise en
présence du mâle dès le début de la saison de reproduction si sa condition d'entretien
le permet. L'intervalle entre les 2 naissances peut alors être de 19 à 30 mois, car
lactation et gestation ne sont pas physiologiquement incompatibles. Retarder cette
mise à la reproduction risquerait de perdre une saison entière et de porter à 3 années
la période entre 2 mises bas. Cela se produit régulièrement lorsque la stratégie
économique de l'éleveur est la pérennité plus que la rentabilité.
56
L 'Elevage du Dromadaire : La Reproduction
57
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
Nous avons vu qu 'en moyenne, la chamelle donne naissance à un petit tous les 2
ans , mais dans 1O à 20% des cas selon les observations , cet intervalle peut être
inférieur à 15 mois. La survie du jeune est fondamentale pour assurer une bonne
productivité du troupeau. Malheureusement, celle-ci est difficile et grève
considérablement les performances générales de l'espèce .
1. La viabilité du jeune
La survie du chamelon pose problème dès avant la parturition , puisqu'on décèle
environ 20% de femelles reproductrices affectées d'anomalies génitales, et bien
qu'aucune donnée sérieuse ne soit disponible, plusieurs observations plaident pour
une mortalité embryonnaire précoce importante. Nous avons vu également que le
taux d'avortement n'était pas négligeable dans l'espèce caméline . La mortalité chez
le jeune est considérable dans les conditions d'élevage extensif, bien que son
estimation demeure difficile, étant donné le peu d'informations issues d'un su ivi
régulier de reproductrices. En règ le générale , plus de 80% des cas de mortalité
surviennent avant l'âge de 6 mois. Des taux de mortalité de 30 à 50 % entre la
naissance et l'âge de 5 mois sont relevés dans des conditions d'élevage extensif en
Afrique de l'Est. Des chiffres similaires sont rapportés au Maroc et en Inde , mais il
existe une forte variabilité inter-annuelle et inter-troupeaux. Les causes de cette
mortalité sont multiples, et sont tour à tour évoqués les troubles respiratoires, les
troubles digestifs (la diarrhée du chamelon est un facteur essentiel de la mortalité du
jeune), les intoxications par les plantes, les accidents , le parasitisme gastro-intestinal
et la sous-nutrition .
100
80
60
40
0
().1 1-2 2-3 J..• • -5 S-6 6-7 7-8 6-9 9-10 10-11 11 - 12 12- 13 13-14 14· 15 15-16 16-17 17-18 18-1 9 19-20
Classes d'âge
La survie du jeune pose des problèmes de fond et renvoie aussi bien à la question
des pratiques d'élevage (distribution du colostrum , pratiques de sevrage et
d'allaitement) qu'à celle du statut immunitaire des jeunes animaux. Nous avons vu
que le dromadaire se caractérisait par un taux de zinc plasmatique particulièrement
faible . Or, le zinc joue un rôle notable dans la protection immunitaire. On sait
également que les immunoglobines du dromadaire sont, de par leur structure , pl us
58
L 'Elevage du Dromadaire : L 'Elevage du Jeune
proches de celles de l'homme que de celles des autres herbivores, notamment des
bovins, alors que son mode de vie le rappro che plutôt de ces derniers. Faut-il en
conclure une faiblesse particulière du jeune chamelon : seuls ceux capables de
survivre jusqu 'au sevrage étant susceptibles de résister aux fortes contraintes du
milieu ? Les chamelons sont-ils victimes d'une sélection naturelle pressante
expliquant leur remarquable adaptation ?
Toutefois , il faut noter qu'il subsiste une forte variabilité des performances inter-
troupeaux et donc que des améliorations sensibles peuvent être obtenues par
l'amélioration des pratiques d'élevage , notamment des pratiques de soins destinés
aux jeunes.
2. L'adoption
Une des causes de la mortalité est l'incapacité pour la mère d'allaiter son petit,
soit par refus du jeune, soit par manque de lait , soit pour tout autre raison (tétée
douloureuse ou décès de la mère) . Afin de sauvegarder le chamelon , les pasteurs ont
développé des pratiques d'adoption plus ou moins efficaces visant à faire accepter le
chamelon par sa propre mère ou par une autre chamelle en lactation ayant perdu son
petit.
Les techniques les plus simples consistent à présenter à la mère, un chamelon
étranger enveloppé du placenta de son chamelon mort-né, ou bier. de placer au côté
de la mère dont on a préalablement bandé les yeux, un mannequin fabriqué avec la
peau du chamelon mort-né, puis de présenter le chamelon de substitution au moment
de l'enlèvement du bandeau.
Des pratiques plus coercitives sont en usage chez les éleveurs touareg. Par Des techniques
exemple, on peut coudre l'anus de la femelle pour empêcher l'excrétion fécale
d'adoption
pendant 24 heures. Parfois , on ajoute à cette technique , l'obstruction des naseaux
pour éviter une confusion entre les odeurs du chamelon mort-né et du chamelon de
parfois
substitution . Au bout de ce laps de temps , on clécoud l'anus, donnant ainsi à la mère coercitives
l'illusion d'une mise bas, et on présente le chamelon de substitution dès la fin de
l'opération. Parfois, on procède à un véritable psychodrame : on attache le chamelon
de substitution à la femelle adoptive dont on a bandé préalablement les yeux , puis,
les éleveurs aidés des chiens simulent une agression avec des cris , des aboiements,
parfois des coups et des jets de projectiles ; le chamelon affolé tente de se réfugier
auprès de la femelle qui , à son tour, par instinct de préservation, cherche à protéger
le jeune qu 'elle sent près de lui. Après plusieurs dizaines de minutes d'une telle
perturbation , on ôte le bandeau de la femelle tout en laissant le chamelon de
substitution attaché à elle. En général , l'adoption est acquise avec un bon taux de
succès par de tels procédés.
3. Le sevrage
L'âge au sevrage dépend beaucoup de la finalité laitière ou non du troupeau et du
degré de dépendance de l'éleveur vis-à-vis de la production laitière. Il existe en effet ,
comme pour la plupart des herbivores domestiques, une compétition entre la
production de lait commercialisable et l'allaitement du jeune d'une part, et une
compétition entre la lactation et l'accélération de la mise à la reproduction d'autre
part.
Dans les systèmes traditionnels, les chamelons sont généralement sevrés Pas de "stress
naturellement vers 10-12 mois voire jusqu'à 18 mois, mais certains éleveurs optent du sevrage "
pour un sevrage précoce (3 mois) afin d'augmenter la disponibilité en lait. Plusieu rs chez le
études tendent à montrer que le chamelon supporte fort bien l'utilisation précoce dromadaire
d'une ration alimentaire à base de fourrages . On n'observe d'ailleurs pas de stress du
sevrage comme chez beaucoup d'autres espèces.
59
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
4. La croissance du jeune
Le poids de Le poids à la naissance varie peu semble-t'il en fonction des conditions
d'alimentation de la mère, mais dépend surtout du génotype. Des valeurs comprises
naissance : un
entre 26 et 42 kg sont répertoriées dans la littérature scientifique avec un poids
caractère observé sensiblement plus élevé chez le mâle. Globalement, les poids à la naissance
génétique paraissent plus élevés en Inde et au Moyen-Orient qu 'en Afrique , notamment en
Afrique du Nord . Dans les conditions climatiques indiennes, il n'a pas été relevé
d'effet saisonnier sur le poids à la naissance, ni non plus d'ailleurs d'effet du rang de
lactation de la mère, mais ces données proviennent de stations expérimentales et on
dispose de peu d'informations en situation réelle . L'héritabilité du poids à la naissan ce
serait élevée , supérieure à 0,50 , voire 0,60.
En milieu traditionnel d'Afrique de l'Est, la croissance pondérale des chamelons
est de l'ordre de 190 à 310 g/jour au cours de la première année . Dans des conditions
expérfmentales, lorsque la totalité du lait de la mère est mise à la disposition du jeu ne
et qu'un apport alimentaire complémentaire est proposé , le gain moyen quotidien
(GMQ) varie de 440 à 580 g. En Libye, dans des conditions alimentaires optimales,
des valeurs atteignant 750 g/j ont été relevées. En Inde, le GMQ de 0 à 6 mois est
supérieur à 600 g et diminue à 380 g entre 6 et 12 mois. Il existe cependant une forte
variabilité inter-annuelle, les années de sécheresse et plus généralement les
conditions alimentaires (et donc la saison de naissance) peuvent influer
considérablement sur la croissance du jeune entre O et 1 an , en dépit du fait que le
sevrage ne constitue pas un élément perturbateur significatif.
Entre 1 et 2 ans, le GMQ observé en Tunisie est de l'ordre de 420 g dans des
conditions expérimentales. A Djibouti, des chamelons complémentés en protéines et
en minéraux ont présenté un GMQ de 550 g. En Inde, les valeurs observées se sont
avérées plus faibles et sont de l'ordre de 250 g. Cependant le dromadaire pourra it
présenter des capacités de croissance plus importantes qu 'on ne le pense
généralement. Dans des conditions d'embauche en Iran , il est rapporté en effet des
valeurs de GMQ de 950 g et en Australie, en milieu extensif, un chiffre record de
11 OO g est avancé.
Au-delà de 2 ans , le GMQ dépasse difficilement 200 g et le poids adulte est
généralement atteint vers 7 ans, mais cet âge varie en fonction des races et des
conditions sanitaires ou alimentaires. Les races les plus lourdes proviennent de la
Corne de l'Afrique. Des mâles ayant des poids vifs dépassant 800 kg ne sont pas
rares. Mais en général , les poids vifs adultes varient entre 300 et 700 kg, la moyenne
se situant autour de 430 kg . Toutefois, les données précises sont rares compte-tenu
de la difficulté de peser les animaux dans les conditions pastorales et la plupart des
informations disponibles proviennent de stations expérimentales ou d'abattoirs. Aussi,
60
L 'Elevage du Dromadaire : L 'Elevage du Jeune
1. L'allaitement
Le premier lait (colostrum) doit être entièrement laissé au nouveau-né , car sa
richesse en immunoglobulines maternels (IG1, IG2) et en facteurs antimicrobiens
Le colostrum
(lactoferrine , lysozyme) permet au chamelon de résister aux infections jusqu'à ce qu 'il doit être
soit capable d'assurer ses propres défenses immunitaires. Diverses croyances font impérativement
que cette pratique n'est pas universelle. Ainsi , au Niger, les touareg considèrent que distribué au
le colostrum distribué en saison chaude est néfaste pour le petit. Les éleveurs ch a melon
recherchent d'ailleurs ce premier lait pour leur besoin personnel et le consomment
sous forme "d'omelette". Il s'en suit
une recrudescence du nombre et de EVOLUTION DE LA CONCENTRATION POST-PARTUM DES
la gravité des cas de diarrhée chez FACTEURS ANTIMICROBIENS DANS LE LAIT DE CHAMELLE
Tau x d'l.G . Taux de lactoferrlne l lysozyme
le chamelon . Le colostrum de la 60 ~--------------------~ 1.4
chamelle contient 30% de matières
organiques et minérales après la 50 1.2
naissance, puis ce taux décline
rapidement à 18%, à peine 3 40
heures plus tard. La teneur 0.8
"normale" (12% environ) est atteinte 30
après le 5ème jour. Le taux de 0.6
matières grasses du colostrum est 20
0.4
faible (0,2%) et augmente ....
progressivement pendant
semaine pour atteindre environ 4%,
une 10
v .•,•.v
•. - . · .;:m;--.,.,,,~,.,.«>w.~N.u~,.,..,,_,,,,..,~w~~~~;,··
-.-. • • - ~ •• ~ • -~ ' ~ •. · . ~
0.2
61
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
2. La traite
Habituellement, la chamelle est traite deux fois par jour, le matin avant le départ
De 2 traites par pour les pâturages, et le soir, au retour au campement, mais en cas de besoin, le
jour à un tirage berger peut tirer le lait toutes les 2-3 heures. L'augmentation de la fréquence de tra ite
"à la demande" augmente d'ailleurs la production. Ce phénomène est bien connu des pasteurs,
certains n'hésitant pas à tra ire les femelles 7 à 8 fois par jour. Une fréquence de tra ite
passant de 2 à 4 fois par jour augmenterait la production de 12%. Mais il arrive aussi
que la traite soit très irrégulière, les chamelles passant parfois 24 heures ou plus sa ns
que le berger ne retire le lait. Une telle irrégularité de la fréquence de traite peut avoir
des conséquences néfastes tant sur la production que sur les risques d'infections
mammaires. Pour conserver la totalité du lait, les jeunes mâles sont parfois sacrifi és
très jeunes, comme c'est le cas en Somalie.
La traite des chamelles est généralement plus facile que pour la vache . Da ns
beaucoup de pays, seuls les hommes sont habilités à assurer la traite, mais ce n'est
pas une généralité. Le trayeur se tient debout sur le côté de l'animal, le chamelon
étant normalement attaché à la mère au côté opposé . L'homme peut traire d'une
seule main afin de tenir le récipient de l'autre main . En Ethiopie, les trayeurs afar se
tiennent sur une jambe, l'autre jambe étant repliée pour permettre de maintenir le
récipient à traire. Lorsqu'il s'agit de fortes productrices, deux hommes placés de
chaque côté de l'animal peuvent être amenés à traire simultanément. L'expérience
des trayeurs est un facteur important pour assurer la traite dans les meilleures
conditions possibles (habilité , vitesse de traite , bonne vidange de la mamelle) .
L'hygiène de la En milieu traditionnel , le lait est récolté dans des calebasses ou , comme en
Ethiopie, dans des paniers ~1 traire , imperméabilisés avec de la graisse de boeuf. Les
traite est trop
récipients en plastique sont cependant de plus en plus préférés, car ils sont plus
souvent facilement nettoyables. Les récipients traditionnels sont souvent générateurs de
médiocre contamination importante du lait. D'une manière générale, l'hygiène de la traite est
nettement insuffisante : les mamelles sont rarement nettoyées avant la traite , les
mains du trayeur ne sont pas lavées, les récipients rarement nettoyés d'une tra ite à
l'autre.
Dans les élevages laitiers intensifs, il existe des machines à traire adaptés à la
morphologie de la mamel'le du dromadaire . Dans les kholkozes du Kazaksthan
spécialisés dans la production de lait de chamelle de Bactriane, la descente de lait
est provoquée par une injection d'ocytocine (OCYTOVEM ®) quelques minutes ava nt
la traite , les chamelons étant séparés de la mère.
Les aspects quantité et qualité du lait seront abordés ultérieurement dans le
chapitre consacré aux productions camélines.
62
L 'Elevage du Dromadaire : L 'Alimentation
63
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
relativement restreint d'ind ividus . Cette variété floristique est plus importante dans les
zones rocheuses ou argileuses (hamada, djebel, tassili, reg) que dans les régions
sableuses (erg) .
La dispersion de cett1e couverture végétale se traduit par une productivité
pastorale faible à l'unité de surface. La charge animale à l'hectare est donc
généralement très faible et on estime à plus de 20 ha par an la superficie nécessa ire
à l'affourragement d'un dromadaire adulte . Il s'agit bien entendu d'une moyenne, et
une grande variabilité est observée selon les régions et selon les saisons.
Un autre élément important relatif aux ressources alimentaires du dromadaire est
l'utilisation des ressources ligneuses qui peuvent être supérieures aux ressources
herbacées aux marges du1 désert. La qualité des "pâturages aériens" est souvent
supérieure à celle des graminées et autres plantes herbacées. Par ailleurs, la
longueur du cou de l'animal lui permet d'avoir accès aisément aux feuillages des
arbres de bonne taille .
64
L 'Elevage du Dromadaire : L 'Alimentation
Dans les systèmes plus intensifiés, le dromadaire peut avoir aisément accès à
d'autres ressources issues de l'agriculture (brisures ou son de riz ou de blé, orge,
drêches de brasserie , sous-produits d'huilerie, etc ... ) ou à des compléments du
commerce . En Inde , des essais d'ensilage ont été réalisés à partir de graminées
(Lasiurus sindicus et Cenchrus ciliaris) additionnées d'Aerva sativa, une plante
habituellement non appétée par le dromadaire. Cependant , la qualité de cet ensilage
s'avère assez faible . Plus généralement, il n'est pas utile dans des conditions
alimentaires favorables d'augmenter inconsidérément le taux de protéines de la
ration , compte-tenu des capacités de recyclage de l'azote décrites précédemment.
Par ailleurs , il faut éviter les rations enrichies en urée du fait de la toxicité potentielle.
On évitera donc par exemple les blocs de mélasse-urée dont la distribution est
encouragée chez les vaches laitières.
65
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
fourrager et organisent leur déplacement pour accéder aux meilleures cond itions
d'alimentation possibles .
10
66
L 'Elevage du Dromadaire : L 'Alimentation
de concentré n'a pas d'effet négatif sur la digestion du fourrage qui constitue la base
de la ration . Par exemple , un apport de concentré à raison de 20% de la ration de
base augmente l'ingestion de 17 à 22%. Ce résultat s'explique par une plus grande
vitesse d'élimination des produits de la digestion microbienne (acides gras volatils,
ammoniaque) liée à un turn-over plus rapide de la phase liquide des digesta et une
absorption plus importante par la paroi digestive. La sécrétion de bicarbonate et de
carbonate par la muqueuse des pré-estomacs contribue également fortement à
l'homéostasie du milieu fermentaire et à l'efficacité digestive des micro-organismes.
Il existe également une variabilité individuelle qui n'est pas négligeable. De
différents essais réalisés en station , il ressort que la consommation de matière sèche
chez l'adulte varie entre 2,3 et 3,4 kg par 1001<g de poids vif. Rapporté au poids vif,
les quantités ingérées totales sont donc plus faibles chez le dromadaire que chez les
bovins.
Au Maroc, on n'a pas observé de variabilité de cette valeur · selon les types
Une grande
génétiques des animaux, les quantités ingérées de matières sèches variant de 3 à 3,1 kg
par 100 kg de poids vif. A Djibouti , chez le chamelon sevré , la quantité ingérée varie variabilité
entre 1,8 et 2 kg de matières sèches par 1OO kg de poids vif. Après une période de individuelle et
disette, le dromadaire présente une aptitude plus grande à augmenter le volume de en fonction du
ses pré-estomacs que des moutons confrontés à la même situation , ce qui permet type de
aux premiers d'augmenter les quantités ingérées habituelles. fourrages
D'autres études ont conduit à préciser ces quantités en fonction du type de
fourrages, soit distribué à l'auge , soit au pâturage . Les valeurs observées varient
entre 1,6 et 3,8 kg /1 OO kg de poids vif. Lorsque le fourrage est plus riche en azote , la
consommation totale augmente significativement alors que les produits pauvres, tels
que la paille sont ingérés en moindre quantité . Toutefois, cette diminution est
compensée par une bonne valorisation des rations pauvres. En effet , la digestibilité
des pailles est d'environ 5 points supérieurs à celle mesurée chez le mouton .
Plusieurs travaux semblent indiquer que du point de vue de la digestibilité des
aliments, le dromadaire est plus proche du mouton que des bovins. Mais ses
performances s'avèrer:it particulièrement remarquables en état de déshydratation . En
effet, chez les animaux abreuvés ad libitum , la digestibilité de la cellulose brute d'une
ration à base de paille et de trèfle est d'environ 50% chez le mouton et environ 55%
chez le dromadaire. En revanche , chez le mouton déshydraté (après 3 jours de
privation d'eau) , la digestibilité reste inchangée, alors que chez le dromadaire
déshydraté (après 12 jours de privation d'eau), la digestibilité augmente de 2 points
pour atteindre 57% .
Cependant , en règle générale, on manque encore d'informations sur cette espèce
dans ce domaine. L'utilisation de canules du rumen pour l'étude de la digestibilité in
vivo reste encore peu fréquente bien que la technique soit bien maîtrisée.
67
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
tenir compte de la dépense musculaire. Les besoins azotés d'entretien sont estimés à
90 g de protéines brutes par 1OO kg de poids vif. Ceci correspond à des valeurs
inférieures à celles des autres herbivores domestiques, du fait des capacités de
recyclage déjà évoquées.
énergie et en 3
protéines en 200
fonction du
poids vif 2 150
100
50
0 0
200 250 300 350 400 450 500 550 600
Poids vif (en kg)
U.F. /jour - - Protéines digestibles - -
68
L 'Elevage du Dromadaire : L 'Alimentation
Les besoins de gestation sont négligeables pendant les huit premiers mois de
Besoins de
gestation. Les besoins en énergie nette doivent être augmentés de 25% pendant les
9ème et 1oéme mois et de 50% ensuite jusqu 'à la mise bas . Concernant les protéines gestation et de
digestibles, les besoins ont été estimés à 290 g par jour pendant le dernier tiers de la lactation
gestation pour une chamelle de 400 kg de poids vif.
EVOLUTION DES BESOINS QUOTIDIENS DE GESTATION EN PROTEINES ET EN ENERGIE
NETTE EN FONCTION DU POIDS VIF
Energie nette (en UF)
--- ---
100
:1 • • n
d'une plus grande Evolution des
efficacité que les 600 besoins de
bovins dans la
transformation des 500 lactation
ressources 5 quotidiens en
400
alimentaires en lait 4 énergie et en
et viande . Le 300 protéines en
3
dromadaire a, par 200 fonction du
ailleurs, la capacité 2
poids vif
de limiter son 100
ingestion dès lors 0 +."-'--"'4"""----""4-'"'---"""'+-"'--'-+-'-'--'-:.:.+:.:.'-'---'-'+-''--=-+ 0
que ses besoins 400
300 350 450 500 550 600 Poids vif (kg)
sont couverts. Il
développe donc à
tous les niveaux
des procédures
physiologiques d'économie et d'efficacité .
69
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
d'un litre de la it nécessite 1,5 litres d'eau supplémentaire. Au cours du dernier tiers de
la gestation , les femelles gestantes augmentent leur besoin en eau de 20% environ.
Les besoins en sel (chlorure de sodium) sont en revanche élevés. Ils sont estim és
Besoins en sel
à 20 g par 1OO kg de poids vif. Cela correspond pour un animal de 400 kg à un apport
de 28 à 34 kg de sel par an . Au-delà de ces valeurs, l'excrétion urinaire en sel
augmente de façon proportionnelle à la quantité ingérée. Compte-tenu de la teneur
en sel du lait, les besoins de la chamelle allaitante se situent autour de 2,5 g par litre
de lait. En revanche , la gestation ne modifie pas les besoins. La complémentation en
sel peut être assurée par l'apport de blocs de sel surtout si les animaux n'ont pas
accès à des plantes halophytes.
Nous avons vu que les coefficients d'utilisation digestive de phosphore et du
Des besoins calcium sont plus élevés que chez les bovins. Les besoins d'entretien chez le
calciques dromadaire sont estimés à 4 g de calcium et 2,5 g de phosphore pour 1OO kg de poids
accrus pour vif. Compte-tenu des teneurs dans le lait, les besoins de la chamelle allaitante sont
/'ossification du estimés à 1,9 g de calcium et 1,1 g de phosphore pa r litre de lait produit. Les apports
foetus nécessaires pour l'ossification du foetus pendant le dernier tiers de la gestation sont
mal connus. Par extension des résultats observés dans d'autres espèces, on peut
cependant estimer ces besoins à 9,5 g de calcium et 5,5g de phosphore par jour. Les
besoins de croissance sont en revanche non connus.
Concernant le magnésium , il n'existe pas de références précises. On sait
cependant qu 'un apport quotidien de 3g par 1OO kg de poids vif permet de maintenir
une magnésémie normale.
Les besoins en oligo-éléments sont mieux connus suite à de récents travaux
réalisés à Djibouti et au Maroc. La régulation du cuivre étant comparable à celle des
bovins , les besoins sont apparemment les mêmes soit environ 15 mg par 1OO kg de
poids vif. En revanche , le métabolisme du zinc est différent de celui des bovins, et si
les apports recommandés sont de l'ordre de 60 mg par 1OO kg de poids vif, soit une
valeur comparable à celle des bovins, il est vraisemblable que les besoins réels so nt
inférieurs. Il en est de même pour le sélénium, le dromadaire étant très sensible à un
apport.complémentaire comme nous l'avons déjà évoqué. Les apports recommand és
sont deux fois inférieurs à ceux des bovins soit 0,06 mg par 1OO kg de poids vif.
En revanche, les besoins en vitamines ne sont pas connus. Il est vraisemblable
La vitamine C cependant que les besoins en vitamine C soient importants chez la chamelle
est très allaitante compte-tenu de la richesse du lait en cet élément. Toutefois, comme chez,
importante chez les ruminants, l'essentiel de l'acide ascorbique est synthétisé au niveau du foie. Les
la chamelle rares dosages de vitamines réalisés dans le plasma montrent que les concentrations
al/ailante de P-carotène (pro-vitamine A) sont très faibles (ce qui explique la couleur translucide
du plasma du dromadaire) . La teneur plasmatique en vitamine E est également
comparativement plus faible que chez les autres herbivores domestiques. En
revanche , acide folique (vitamine B) et biotine (vitamine H) présentent des
concentrations plasmatiques similaires à celles des bovins. Ces résultats sont
cependant insuffisants pour préciser les besoins et les carences vitaminiques sont
mal connus dans cette espèce, bien qu 'il y ait vraisemblablement un lien entre
sensibilité à la gale et déficit en vitamine A.
70
Les Productions : Le Lait
1. La production de LAIT
Lors des transhumances, il n'est pas rare que le berger qui accompagne les Quand le lait de
troupeaux ne s'alimente que du lait des chamelles. Il s'inscrit dès lors dans une chamelle
interdépendance totale avec son cheptel. Le lait de chamelle peut devenir pendant devient la
ces phases transitoires, plus que la base essentielle de l'alimentation humaine : sa nourriture
base exclusive .
exclusive du
On dispose de nombreuses références, malheureusement souvent incomplètes et berger
éparses. Toutefois , l'intérêt grandissant de la spéculation la itière dans cette espèce a
multiplié des données récentes sur le sujet tant sur la quantité que sur la composition .
A l'échelle mondiale, on peut estimer l'effectif des femelles en lactation à plus de 3
millions de têtes, ce qui représente une production laitière globale estimée de 7,5
millions de tonnes dont 55% environ est prélevé par les chamelons.
71
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
mois et assure une production de 1000 litres environ pour une lactation.
Généralement, on considère que les races asiatiques sont de meilleures laitières que
les races africaines .
La courbe de lactation de la chamelle laitière est comparable dans sa forme à
Caractéristiques
celle de la vache laitière. Le pic de lactation survient vers 2-3 mois et atteint 5-6 litres
de la lactation pour des lactations de 1800-2000 1, 8-10 litres pour une production pouvant atteind re
3000 à 3500 litres.
Le coefficient de persistance qui exprime la quantité produite au mois m+ 1 par
rapport au mois m précédent est élevé, toujours supérieur à 80% dans les
observations disponibles. Globalement donc, dans les mêmes conditions climatiques
et alimentaires, le dromadaire exprime une meilleure performance laitière que la
vache . En Ethiopie par exemple, les pasteurs Afar qui élèvent simultanément bovins
et camélins , obtiennent une production quotidienne moyenne d'1-1 ,5 litres avec le
zébu afar contre 4-5 litres avec la chamelle Dankali.
La durée de la lactation varie entre 8 et 18 mois et semble sous la dépendance
de quelques pratiques, notamment des fréquences de traite ou de tétées . La
présence du jeune au pis est un élément important pour initier la descente du lait et
maintenir l'activité de production laitière de la mère. L'alimentation joue aussi un rô le
sur la durée de la lactation . Dans de meilleures conditions générales d'alimentation ,
la durée de lactation passe de 8 - 12 mois à 16 - 18 mois. Les différences entre races
peuvent d'ailleurs parfois être attribuées plus à des différences des conditions
alimentaires que des fa cteurs raciaux au sens strict. La du rée de la lactation semble
également liée à l'état de gestation de la mère. D'une part , la lactation inhibe l'activité
ovarienne et donc retarde la mise à la reproduction , d'autre part la fin de la gestati on
peut conduire à un refus de traite de la part de la chamelle . On remarq ue
généralement que la durée de lactation augmente avec l'intervalle entre les mises
bas. On ne peut affirmer cependant que lactation et gestation sont incompatibles pour
autant.
Néanmoins, les facteurs de variation de la production sont nombreux (génétiqu e,
Variabilité de la
qualité et quantité de l'alimentation disponible, conditions climatiques, fréquence de
production la traite , rang de mise bas, état sanitaire) et si on dispose de quelques résultats
laitière partiels, il demeure beaucoup d'interrogations. Notons également que la chamelle est
sensible à l'hormone de croissance bovine (Bovine Somatotropin ou BST) et que
l'injection d'une telle molécule augmente la production d'environ 15%.
72
Les Productions : Le Lait
2. La composition du lait
Le lait de chamelle a un goût assez doux, légèrement âpre mais il peut être
parfois salé , selon l'alimentation reçue par la femelle . On trouvera la composition et
les caractéristiques du lait de chamelle dans le tableau ci-dessous (valeurs exprimées
en pourcentage du produit brut) .
On peut donc retenir que le lait de chamelle est en moyenne plus faible en Un lait qui reste
matières grasses que le lait de vache et qu 'il présente un taux de matières azotées homogène,
comparable . Cependant , les globules gras du lait de chamelle sont de très petite taille
même après 24
(1 ,2 à 4,2 µ de diamètre) et restent donc en suspension même après 24h au repos,
contrairement au lait de vache par exemple qui constitue une couche grasse en
heures de repos
surface au bout de quelques heures.
Par ailleurs, la matière grasse du lait de chamelle apparaît liée aux protéines . Tout
ceci explique la difficulté à baratter le lait de chamelle pour en extraire le beurre .
Le lait de la chamelle de Bactriane est plus riche en matières grasses que le lait
de dromadaire. En Chine , on rapporte en effet des valeurs en pourcentage variant de
4,7 à 6,9 selon le stade de lactation et une moyenne de 5,5% . Le taux de matières
sèches est également plus élevé chez la chamelle de Bactriane.
Ces valeurs sont susceptibles d'être modifiées, notamment par l'état de
déshydratation de l'animal, comme nous l'avons signalé préalablement. Le taux de
matières grasses en particulier peut décroître de 4% à moins de 1%. En revanche, le
taux de lactose n'est pas modifié, mais la teneur en eau passe de 86 à 91 %. La
composition du lait ne semble pas modifiée par l'augmentation de la production à
l'exception du taux azoté du lait de chamelle qui diminue chez la femelle forte
productrice . Comparées au lait de vache ou de brebis, les matières grasses du lait de
chamelle contiennent moins d'acides gras à courte chaîne . De ce point de vue, ce qui
73
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
Pourcentage
18
111 Matières sèches •Protéines
16
Composition Ill Matières grasses o Lactose
14
moyenne (en O Cendres
pourcentage du 12
produit brut) du 10
lait de 8
différentes 6
espèces 4
d'herbivores 2
0 ~
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74
Les Productions : Le Lait
Les constituants minéraux du lait sont le calcium (120 à 150 mg/1 OO ml de lait) , le Oligo-éléments
phosphore (80 à 1OO mg/1 OO ml) , le sodium (90 à 1OO mg/1 OO ml) , le potassium (200 à
230 mg/1 OO ml), le magnésium (1 O à 20 mg/1 OO ml) et le fer (0,30 à 0,35 mg/1 OO ml). Il
existe peu de références disponibles concernant les éléments-traces : cuivre (3-19
µg/1 OOml), zinc (150-450 µg/1 OO ml) , manganèse (170-210 µg/100ml) et iode (6-12
µg/1 OOml) sont les plus couramment recherchés. Cependant en cas d'intoxication ,
des éléments-traces tels que le plomb, le nickel ou le chrome peuvent être retrouvés
dans le lait.
Globalement, la composition minérale du lait de chamelle est fort variable et
dépend de l'alimentation et de l'état de déshydlratation . Les teneurs en sodium et en
potassium en particulier augmentent dans le lait de la chamelle déshydratée.
Tout comme le colostrum, le lait de charnelle contient également des facteurs
antimicrobiens tels que la lactoferrine et la lysozyme. L'activité antimicrobienne du
lait de chamelle est en moyenne supérieure à celle du lait de vache .
Compte-tenu de la composition décrite ci-d1essus; il est convenu que 1,8 litres de
lait de chamelle permettent de couvrir les besoins protéiques quotidiens de l'homme
adulte et que les besoins énergétiques sont assurés avec 3 à 4 litres.
3 . la transformation du lait
L'essentiel du lait de chamelle est consommé cru par les membres de la famille
après la traite. Tout au plus , sa conservation est prolongée en Afrique de l'Est par la
pratique du fumage des récipients qui attribue une sensible odeur de fumée au lait.
Dans les élevages péri-urbains traditionnels, le lait commercialisé est un lait frais qui
est, lui aussi, rapidement consommé . Pourtant, face à la demande croissante , on
assiste progressivement à des transformations en vue d'une conservation plus longue
du produit, soit sous forme de lait pasteurisé et empaqueté, soit sous forme de
produits transformés tels que le beurre ou le fromage.
75
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
• Le lait pasteurisé
Si la pasteurisation du lait de chamelle ne pose pas de problème technique
particulier, le contrôle de la pasteurisation ne peut se réaliser comme pour le lait de
vache . En effet, les marqueurs enzymatiques classiquement utilisés chez le lait de
vache (lactoperoxydase et phosphatase) sont inactivés par un chauffage de plus
d'une minute à 70°C ou de 15 secondes à 80°C. Ces marqueurs, notamment la
lactoperoxydase , sont donc utilisés pour vérifier si la pasteurisation a été bien
conduite , sachant qu'une pasteurisation haute est menée à 72°C pendant 20
secondes. Or, dans le lait de chamelle , aucun des marqueurs enzymatiques usuels
n'est inactivé à cette température, lactoperoxidase et phosphatase étant beaucoup
plus thermorésistants que dans le lait de vache . Des travaux de recherche sont en
cours pour déterminer la possibilité d'utiliser d'autres marqueurs. Des enzymes
comme la xanthine-oxydase, la catalase ou l'a-amylase ont été testés en Mauritanie,
mais aucun de ces marqueurs n'est inactivé aux températures normales de
pasteurisation .
L'acceptation de la pasteurisation d'un produit recherché par les populations
Des freins urbaines récemment sédentarisées pour ses qualités diététiques à l'état frais semble
psychologiques en fait représenter le principal obstacle à la vulgarisation d'une telle pratique.
à la Cependant, l'évolution des modes de vie milite pour un développement de tels
pasteurisation produits. Le succès grandissant de laiteries dans les périphéries urbaines (telle la
Laitière de Mauritanie à Nouakchott) en est un exemple illustratif.
En mélange avec du lait de vache , le lait de chamelle est parfois utilisé de façon
traditionnelle pour la préparation de la its fermentés (c'est le cas du chai ou du shubat
en Inde). Il semble en effet que le lait de chamelle s'acidifie moins rapidement que le
lait de vache , et le mélange des laits est nécessaire pour obtenir des produ its
fermentés. Par ailleurs , plusieurs exemples réussis de commercialisation de lait
stérilisé U.H.T., de lait en poudre reconstitué , notamment dans les pays du Proche et
du Moyen-Orient, attestent de la capacité d'intégrer la production laitière caméline
dans les filières modernes.
Au Kazakhstan,
le lait de Enfin , le lait de chamelle fermenté (shubat) est utilisé au Kazakhstan dans le
chamelle traitement de la tuberculose humaine. Le produit contient 5% de protéines, 9% de
matières grasses, 1,4% de lactose et 7,9 mg de vitamine C. Il est par ailleurs très
fermenté est
riche en éléments-traces et en prostaglandines. Il est donné à raison de 0,5 1 par jour
utilisé pour au début de la cure et jusqu'à 2 1 par jour en fin de traitement. La cure dure environ 2
traiter la à 4 mois. Ce traitement est bien toléré et assure une amélioration rapide de la
tuberculose condition générale des patients. Dans les pays d'Asie Centrale, on s'intéresse
d'ailleurs aux propriétés médicinales du lait de chamelle, notamment à son rôle dans
le traitement du diabète, des ulcères gastriques ou des calcules biliaires. Des
traitements curatifs à base de lait de chamelle sont également préconisés dans le
traitement de la diarrhée et des troubles respiratoires chez l'enfant.
• Beurre et fromage
Les sociétés traditionnelles ont toujours eu des difficultés à transformer Je lait de
chamelle en fromage ou en beurre. De fait , le lait de chamelle ne caille pas aussi
aisément que le lait de vache . Cette différence peut être attribuée aux
caractéristiques des caséines du lait qui chez la chamelle contiennent une pl us
grande quantité de molécules acides et une taille des micelles plus petites. La
coagulation du lait n'est de fait possible qu 'en ajoutant une grande quantité de
présure (50 à 100 fois la quantité nécessaire pour le lait de vache). Dans ces
conditions le lait coagule en une dizaine de minutes et se transforme en un coagulum
assez mou , friable et d'aspect floconneux. On dit que le lait de chamelle possède de
faibles propriétés rhéologiques (14 fois inférieures à celles du lait de vache) .
Plusieurs traitements ont été proposés pour améliorer la transformation fromagère du
lait de chamelle : apport de sels ce calcium, mélange avec du lait de vache, de
76
Les Productions : Le Lait
77
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
2. La production de VIANDE
Qualité et poids La qualité et le poids des carcasses vont donc dépendre du type d'animaux
des carcasses abattus, la viande de chamelon étant plus tendre que celle des animaux adultes
embouchés et a fortiori que celle des animaux de réforme. Il est difficile, au plan du
goût de distinguer la viande de dromadaire de celle de boeuf, élevé dans des
conditions comparables. Le rendement carcasse n'est pas aussi négligeable qu'on
peut le penser. Si une moyenne de 50% est généralement admise (avec des
oscillations comprises entre 45 et 55%), il peut varier considérablement selon le
degré de finition des animaux. C'est dans la Corne de l'Afrique où il existe une
tradition solide d'embauche caméline que l'on obtient les rendements les plus
intéressants pouvant atteindre 59%. Dans les mêmes conditions d'élevage , le
78
Les Productions : La Viande
rendement carcasse est supérieur de 1,5 à 2,5% chez le dromadaire comparé aux
bovins.
Le poids de carcasse dépend bien entendu de l'âge d'abattage et du sexe des
animaux concernés, les mâles, spécialement les castrés , étant plus lourds. Des
valeurs comprises entre 150 et 300 kg sont rapportés dans différentes études , les
carcasses les plus lourdes étant observées en Somalie Ousqu 'à 310 kg).
La composition de la carcasse a été étudiée par divers auteurs. En moyenne,
pour 1OO kg de carcasse de premier choix, on obtient 77 kg de viande , 5 kg de
graisse et 16 kg d'os . Ces valeurs pour des carcasses de second choix sont 68-7-21
respectivement et 53-0-38 pour des carcasses de dernier choix (animaux très
maigres). Le rapport viande/os serait donc en moyenne plus favorable chez le
dromadaire que chez les bovins élevés dans les mêmes conditions, ma is sur ce point
toutes les observations ne concordent pas. La contribution de la bosse à la part de
graisse est éminemment variable . En effet le poids de la bosse peut varier de 3 à
près de 1OO kg (!) avec une moyenne de 18 kg . La bosse contribue environ pour 5%
au poids de la carcasse .
3 . La production de sang
Il s'agit d'une production anecdotique , mais qui joue un rôle culturel important pour
quelques populations pastorales vivant aux confins de l'Ethiopie et du Kenya
(populations Turkana , Rendi//e et Gabbra et accessoirement Borana et certains clans
Somali) . Cette pratique non autorisée par l'Islam consiste à inciser la veine jugulaire
ou la veine faciale pour récupérer de 5 à 7 litres de sang 2 à 3 fois par an , voire plus
si les besoins nutritionnels des pasteurs l'exigent. Le sang est consommé frais ou
mélangé à du lait et apporte des protéines à raison de 83 g par litre et de l'énergie à
raison de 1430 kJ par litre. La pratique de la saignée ne semble pas affecter l'an imal
s'il est suffisamment nourri. La consommation de sang par ces populations
pastorales, censée donner vigueur au consommateur, n'est pas exclusive de l'espèce
dromadaire puisqu 'elle est aussi pratiquée chez les bovins .
79
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
50
LAIT VIANDE
80
Les Productions : Le Travail
3. La production de TRAVAIL
Outre pour ses productions assurant l'alimentation de l'homme, le dromadaire
s'est taillé une réputation incontestable en tant qu 'auxiliaire du commerçant (transport
caravanier) , du guerrier ou du sportif (monte sellée), voire de l'agriculteur (travaux
agricoles).
/V
81
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
La charge supportable par le dromadaire varie bien sûr en fonction de son poids et
Jusqu'à 680 kg de son entraînement. Quelques observations fournies par la littérature mentionnent
des charges variant de 1OO à 680 kg (!) . En Ethiopie , les animaux de race Dankali
de charges à
transportent 1OO à 200 kg à raison de 25 à 40 km par jour. En Mauritanie et en
transporter Tunisie , on cite des charges de 150 à 200 kg portées sur 50 km . Au Souda n, les
dromadaires peuvent porter 300 kg de marchandises sur plusieurs centaines de
kilomètres à raison de 25 km par jour. Au Pakistan , des charges de 400 à 500 kg
assurées sur de courtes distances sont rapportées. Les races asiatiques sont
généralement plus lourdes et plus performantes que les races africaines.
Toutefois , ces chiffres attestent surtout de la capacité de surcharge des animaux
par les caravaniers . A tel point, que des réglementations diverses de l'époque
coloniale, notamment dans les compagn ies méharistes des armées, limitaient les
charges à environ 200 kg , voire moins.
Dans les caravanes, les animaux sont attachés les uns derrière les autres en une
Les mythiques ou deux colonnes , la corde généralement passée dans un anneau nasal étant
caravanes du accrochée à la queue de l'animal qui précède. Cet ordonnancement confère aux
désert déplacements caravaniers une allure très caractéristique. Le paquetage , variable en
fonction des marchandises, s'appu ie sur une armature en bois adaptée à la
morphologie de l'animal. La charge est généralement répartie de façon symétriq ue de
chaque côté de la bosse .
82
Les Productions : Le Travail
83
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
Performances
Force de Traction Puissance
de traction
90 1,2 comparées
111FOR::ECE1RACTION (en Kg)
ao
entre
mRJSSAllŒ (en OJ)
différen tes
70 espèces
OO
domestiques
50
0,6
40
:)'.) 0,4
20
0,2
10
0 0
AflE VAQ-E BOB.F Mil BlFFLE a-EVAL CROMl\D'\I~
84
Les Productions : Le Travail
85
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
selon les régions et , de ce fait , ait conduit à des types de monte différents. Chez les
touareg, la selle munie d'un pommeau en forme de croix caractéristique, se place à
l'avant de la bosse, et le cavalier se tient les jambes s'appuyant sur le cou de
l'animal. Chez les maures et les reguebats, la selle en forme de vasque est placée
sur la bosse et les pieds du cavalier pendent de chaque côté, éventuellement en
appui sur des étriers dans les formes modernisées mises en place pour les corps
d'armée . Dans les pays du Golfe, le cavalier se tient à l'arrière de la bosse sur une
selle rudimentaire. C'est
Les Selles pour Dromadaires ... (dessin de l'auteur) d'ailleurs la position des
jockeys dans les courses de
dromadaires organisés da ns
cette région du monde.
Mais il existe aussi des
installations particulières,
notamment pour le transport
des femmes, lors des
transhumances ou de
différentes manifestations
festives. Pour les mariages
par exemple, la jeune
épousée est à l'abri des
regards dans une sorte de
palanquin juché sur le dos
de l'animal dans un
amoncellement de coussins
et de tissus colorés.
Le dromadaire de selle
est notablement plus
efficace que le cheval en
terrain sablonneux. Il pe ut
se déplacer à une vitesse
moyenne de 10-12 km/h et
parcourir 50 à 1OO km par
jour. Des trajets quotidiens
de 150 km sont décrits dans
la littérature, notamment en
Mauritanie . Lors de raids
militaires, des animaux bien
entraînés peuvent couvrir
dans la journée une
distance de 200 km à la
vitesse de 20-25 km/h.
Comme pour le bât , la
monte en selle du dromadaire nécessite un dressage qui commence dès l'âge de 3
ans, mais seul l'animal adulte (vers 6 ans) est réellement utilisé . L'allure normale du
dromadaire est le trot à !'amble (les membres d'un même côté se déplacent
parallèlement contrairement au cheval), ce qui confère à l'animal cette démarche
chaloupée si caractéristique. Cependant, dans les courses rapides sur faibles
distances, le dromadaire est capable de galoper comme le cheval.
La course de dromadaire est occasionnellement organisée dans la plupart des
pays sahéliens , mais c'est dans les pays du Golfe qu'elle est le plus formellement
institutionnalisée (sélection des meilleurs coureurs, recherches de pointe sur la
physiologie de l'effort , courses orgànisées dans un camélodrome , primes aux
vainqueurs , etc .. .). Les meilleurs coursiers sont capables de galoper sur 1O km à la
vitesse moyenne de 34 km/h avec des pointes de 40 km/h. La saison 'des courses à
lie u d'août à avril. Les distan ces parco urues vari ent de 4-6 km en début de saison à
86
Les Productions : Autres Productions
10 km en fin de saison , mais des courses plus longues (20 km) sont parfois
organisées en Arabie Saoudite. Les animaux réputés les plus rapides viennent du
Soudan. Les jockeys sont de jeunes enfants (environ 8 ans) maintenus sur la
couverture de selle à l'arrière de la bosse par des bandes velcro cousues dans
l'entrejambe de leur pantalon .
Les changements hématologiques et bioch imiques à la suite d'un intense effort de
course sont bien connus et il existe de nombreuses publications sur le sujet. Après
une course de 5 km , !'hématocrite et le nombre de leucocytes augmente dans le
sang . Il en est de même pour le taux de protéines totales et de sodium , ainsi que des
enzymes témoignant de la souffrance cellulaire (lactate deshydrogénase ou LDH,
créatinine phosphokinase ou CPK). En revanche , le pH diminue ainsi que les acides
gras libres, à l'inverse du glucose. Ces deux derniers points incitent à considérer que
le dromadaire utilise les acides gras libres lors d'exercice intense, et que le
métabolisme du glucose est fortement accéléré (la glycémie double lors de l'effort
intense) , ce qui n'est pas observé chez d'autres espèces sportives comme le cheval.
4. Autres productions
87
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
88
Les Maladies du Dromadaire - Rappels Anatomo-Physio/ogiques
s'appuyer aussi bien sur l'éleveur que sur les services san itaires et Iff :''iiiii:
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contraintes de type sanitaire (y compris des pertes de fertilité
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multifactorielles) maintiennent la productivité de cette espèce à son :'' '@mmwrnmrn
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niveau le plus bas exprimant alors un minimum de son potentiel
génétique et ce , malgré le savoir-faire traditionnel des éleveurs en matière de
prévention . De plus dans ces régions, des infrastructures limitées ne permettent pas
en général de faire appel à des services trop coûteux et l'éleveur se trouve réduit à
mettre en œuvre des techniques traditionnelles trop limitées ou à circonscrire son
intervention sanitaire ce qui entraîne des pertes économiques . Enfin le dromadaire
étant aussi devenu une composante de l'élevage péri-urbain destiné à couvrir les
besoins alimentaires des villes en lait et en viande, il convient de prendre mieux en
compte certaines contraintes liées à l'intensification de son système d'élevage .
Dans ce chapitre , le choix a été de faire le point de manière très simple sur les
pathologies dominantes de l'élevage du dromadaire , en axant la présentation du texte
d'après une logique proche de celle de l'éleveur et en ajoutant certaines remarques
plus techniques (diagnostic, épidémiologie) destinées à un service d'encadrement ou
d'intervention ou même aux services publics de santé . Cette synthèse réunit donc
des informations concernant l'épidémiologie ou le diagnostic des principales
pathologies du dromadaire en milieu extensif et en milieu périurbain .
Dans la mesure du possible ce texte fait référence à l'information internationale la
plus récente dans ce domaine et en particulier faisant appel à la base de
documentation réunie par le CIRAD-EMVT et l'UCEC depuis plus de 20 ans qu 'elle
soit d'origine scientifique ou issue de l'expérien ce de projets camélins de
développement. Cependant cette synthèse s'appuie aussi pour partie sur les travaux
de base des pionniers de la pathologie du dromadaire qu 'il faut citer en préambule
tels que Sergent (1919) , Leese (1927) ou Curasson (1947) .
89
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
2. Eléments de séméiologie
90
Les Maladies du Dromadaire - Eléments de Séméiologie
1. Examen clinique
On peut suggérer, pour un examen clinique complet de l'animal, un protocole basé
sur les critères suivants :
• lnfonnation générale (anamnèse) sur le troupeau d'origine, le sexe, l'âge , le poids
• Description des principaux symptômes visibles
•Appétit de l'animal
• Date du dernier abreuvement
• Prise de température rectale : la température normale est comprise entre
35 ,5°C et 37 ,S°C le matin et 39 à 41 °C le soir
• Mesure de la fréquence respiratoire et examen de la respiration : la fréquence
normale est de 5 à 12 inspirations par mn; en cas de troubles respiratoires , la
respiration devient laborieuse, l'animal garde la bouche ouverte; il peut présenter de
la toux (surtout la nuit) et du jetage, signe d'inflammation ou de parasitisme nasal ou
sinusal ; lors d'i nfestation nasale par les tiques , on peut observer des saignements de
nez
• Mesure du pouls sur l'animal en position baraquée . Plusieurs artères du
membre postérieur sont accessibles : l'artère tibiale postérieure , l'artère sacrale ou
l'artère fémorale; chez le chamelon , l'artère caudale est la plus facile; en cas de
difficulté, l'auscultation cardiaque peut être nécessaire; le pouls normal du
dromadaire est souvent irrégulier et est compris au repos entre 32 et 50/mn
• Examen des muqueuses : pâleur, rougeur, piqueté hémorragique sont autant
d'indicateurs de l'état de santé
• Palpation des ganglions lymphatiques accessibles (au nombre de 1O); en
cas de maladie systémique, tous les ganglions périphériques sont atteints et
deviennent douloureux, chauds et enflés; en cas d'infection localisée, seul le ganglion
associé à la zone anatomique affectée est sensible
Principaux
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accessibles
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91
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
2. Contention et prélèvements
• Techniques de contention
Le dromadaire est un animal qu'il n'est pas toujours facile de maîtriser, en
particulier les mâles entiers. li peut être nécessaire, notamment pour les
prélèvements de sang ou les biopsies, d'assurer une contention sévère de l'animal. Si
l'opérateur est rapide et habile, et l'animal naturellement calme ou habitué aux
manipulations par l'homme (animaux des stations expérimentales, animaux astreints
à des activités de travail quotidiens) , le prélèvement sanguin peut se réaliser par une
contention très légère (animal debout, membres entravés), voire même sa ns
entraves. Mais dans la quasi-totalité des cas, la contention des grands camélidés
constitue , en temps et en énergie, l'investissement le plus considérable dans la mise
en oeuvre des protocoles de prélèvement.
La position naturelle de repos des grands camélidés est celle dite du baraqué,
l'animal étant placé en décubitus sternal, les membres repliés sous lui. En cas de
contention classique, il importera de veiller à susciter par la force ou la persuasion
une telle attitude. Le plus souvent, le savoir-faire de l'éleveur suffit. Il incite par la
voix ou la simple mise en place d'un licol, le baraquage de l'animal. Il peut être
nécessaire d'ajouter au licol passé par un intervenant, le maintien d'un membre
antérieur replié par un second intervenant. Le baraquage s'impose généralement
92
Les Maladies du Dromadaire - Eléments de Séméiologie
spontanément dans ces conditions. Il suffit alors d'entraver les membres dès lors que
la position est acquise pour empêcher le relevé au moment de l'intervention .
Cependant , l'animal peut être récalcitrant ou inquiet et refuser dans ce contexte de
Maintenir
se plier aux injonctions de son maître. Lorsqu'il s'agit de mâles entiers en période de
rut ou de femelles venant de mettre bas , l'exercice de contention peut devenir l'animal baraqué
franchement difficile, sans un minimum de savoir-faire . Il convient dès lors pour assurer sa
d'intervenir plus fermement. Un des moyens largement utilisés par les éleveurs pour contention
forcer le baraquage est le suivant : une corde est passée derrière les membres
postérieurs par deux intervenants situés de chaque coté de l'animal. Pendant qu'un
troisième intervenant plie un des membres antérieurs . Les deux premières personnes
tirent la corde de façon à pousser les membres postérieurs vers l'avant de l'animal ,
l'obligeant ainsi à plier l'ensemble de ses membres et à se reposer sur son coussinet
sternal. Une fois baraqué, l'animal est maintenu dans cette position par l'entrave des
deux membres postérieurs ajoutée à celle des membres antérieurs. En effet , pour se
relever, les camélidés procèdent en deux temps, le premier étant l'extension des
membres postérieurs. Toute entrave limite donc considérablement la capacité de
l'animal à se relever. Si nécessaire, la saisie de la lèvre supérieure au moment de
l'opération proprement dite de prélèvement assure l'immobilisation totale de l'animal.
On peut être amené à utiliser des méthodes destinées à tranquilliser l'animal , comme
l'utilisation d'une cordelette munie d'un noeud coulant , passée autour du cou . Cette
corde provoque une constriction du flux sang uin au niveau de la veine jugulaire, ce
qui conduit à un inconfort calmant l'animal et a l'avantage de susciter un gonflement
de la veine jugulaire propice à une prise de sang ultérieure. La contention d'un
membre antérieur maintenu replié peut également suffire sans être amené à forcer le
baraquage .
Dans de rares cas, il peut être nécessaire de procéder à une tranquillisation par
voie chimique . Plusieurs produits peuvent être utilisés chez le dromadaire. On
trouvera dans le tableau ci-dessous quelques exemples de tranquillisants , sédatifs et
anesthésiants parmi les plus utilisés dans cette espèce.
Nom du produit Dose (mg/kg PV) Mode d'injection Effet
• Prélèvement de sang
Le prélèvement de sang sur l'animal debout se fera de préférence cou tendu tiré
vers le bas pour faciliter une stase veineuse . Les membres antérieurs seront entravés
car certains animaux ont la capacité dans cette: position de "botter" vers l'avant.
Sur l'animal baraqué , la prise de sang est rendue plus aisée sur le cou replié
contre le corps de l'animal. Une telle position rend difficile tout mouvement
intempestif et impossible le relevé , les grands camélidés se servant de leur cou
comme d'un puissant balanGier pour reprendre la station debout. La zone de
prélèvement sur la veine jugulaire est facilement repérable surtout après une
pression même légère exercée à la base du cou ou , de préférence , à mi-distance
entre le thorax et la tête . Le point de prélèvement le plus aisé est situé près de la
93
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
tête . Cependant chez le mâle, cette région anatomique est dotée d'une pilosité
abondante et longue qui peut rendre difficile la perception tactile de la veine jugulaire.
De plus , une confusion de la veine jugulaire avec la partie distendue de la gorge chez
l'animal en colère ou stressé n'est pas impossible. Il faut donc bien veiller à sentir le
roulement de la veine sous les doigts avant de procéder à l'opération. Le sang peut
également être prélevé en d'autres endroits , notamment sur la veine métacarpienne
médiale (visible sur la face médiale du carpe) et la veine métatarsienne dorsale
(visible sur le bord craniolatéral du métatarse entre les tendons extenseurs) . Chez les
femelles en lactation, il est aisé de prélever du sang sur la veine mammai re
généralement bien apparente.
k Sa.V\_'.)•
,,
94
Les Maladies du Dromadaire - Eléments de Séméiologie
être différées, il est impératif d'assurer aux prélèvements une conservation dans les
meilleures conditions possibles. En particulier, les paramètres enzymatiques et
hormonaux supportent mal une rupture de la chaîne du froid . D'un point de vue
général, il n'y a pas de règles spécifiques de prélèvement sanguin et de stockage des
prélèvements chez les camélidés. Les règles en question demeurent identiques à
celles mises en oeuvre chez les autres espèces d'intérêt zootechnique . Toutefois,
l'écologie du dromadaire (zones arides et semi-arides d'accès parfois difficile) et son
mode d'élevage extensif (nomadisme , transhumance) imposent des précautions
supplémentaires pour assurer un stockage des prélèvements dans les meilleures
conditions possibles.
En situation d'élevage en milieu traditionnel , la principale difficulté ne provient pas
des aspects techniques de contention et de prélèvement , les éleveurs étant souvent
des auxiliaires efficaces pour la contention des animaux. Le problème majeur réside
plutôt dans la persuasion des éleveurs à effectuer un prélèvement de sang sur des
animaux pour lesquels ils manifestent souvent un attachement affectif profond ,
généralement beaucoup plus marqué que pour d'autres espèces (notamment les
petits ruminants) . A l'exception des populations pastorales de la Corne de l'Afrique
pratiquant la saignée pour consommer le sang à l'état frais ou mêlé au lait, l'accès
aux animaux pour un prélèvement sanguin peut être difficile ..
Il importera donc de convaincre l'éleveur de l'innocuité des prélèvements, au
besoin par l'intermédiaire des chefs coutumiers. Pour cela , il convient d'effectuer les
prélèvements dans les règles de l'art.
• Prélèvement d'urine
Contrairement en médecine humaine, la collecte d'urine est moins aisée chez les
Le rein : organe
animaux que la collecte de sang. Les analyses d'intérêt clinique sont de ce fait
beaucoup moins usitées chez le dromadaire , d'autant plus que la pertinence des de recyclage
résultats nécessite une collecte sur une durée de 24h . Il existe cependant des hydrique majeur
techniques de collecte des urines de 24h consistant à mettre en place un sachet de
plastique dont la forme est adaptée à l'appareil urogénital (donc différent selon le
sexe de l'animal) , fixé à l'aide d'une colle et d'une ficelle . Il est bien entendu évident
qu'une telle technique n'est opérationnelle qu'en conditions expérimentales. Il paraît
difficile et finalement de peu d'intérêt de mettre au point une technique adaptée au
terrain .
Les capacités de recyclage des éléments nutritifs chez le dromadaire font du rein
un organe d'un intérêt considérable . Le dosage de paramètres urinaires renseigne en
conséquence sur l'état de santé du rein , mais permet aussi d'apprécier le niveau
d'excrétion de certains nutriments par la voie liquide . Toutefois, compte-tenu des
difficultés techniques évoquées , les prélèvements urinaires ne sont pratiquement pas
réalisés en routine.
• Prélèvement de lait
Le lait représente un substrat biologique spécifique des femelles de mammifères,
de surcroît aisé à prélever, contrairement à l'urine. Il est cependant d'un faible intérêt
clinique et l'alimentation n'influe que partiellement sur sa composition chimique. Il
peut toutefois constituer un émonctoire pour des éléments abiotiques ou certains
paramètres témoignant d'une déviation du métabolisme. A ce titre , quelques études
sont disponibles dans la littérature. Le prélèvement de lait chez la chamelle peut être
parfois difficile à réaliser en dehors de la présence du chamelon si l'on n'a pas affaire
à un animal habitué à la traite . Une injection d'ocytocine (OCYTOVEM®) peut être
nécessaire pour faciliter la descente du lait.
95
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
• Prélèvement de fèces
Comme l'urine, les fèces témoignent de l'excrétion des éléments apportés par
l'alimentation ou liés au métabolisme interne. Leur analyse n'a donc d'intérêt qu'en
cas d'intoxication d'origine digestive ou d'évaluation de l'excrétion de nutriments
divers. Le prélèvement de fèces est cependant surtout utilisé pour le diagnostic
parasitaire . Le prélèvement de fèces est facile . Il peut se faire directement per
rectum . Le tau x d'humidité étant particulièrement faible dans les excréments du
dromadaire, la conservation est des plus aisées.
• Biopsie hépatique
La plupart des organes peuvent être soumis à biopsie , mais en clinique vétérin aire
seule la biopsie hépatique est à l'occasion pratiquée . La bosse du dromadaire peut
faire aussi parfois l'objet de biopsie, mais la nature du tissu visé (paquet musculo-
graisseux) n'autorise guère que la mesure des adipocytes, ce qui n'a d'intérêt que
dans le cadre de protocoles de recherche bien précis.
Au demeurant, la biopsie de la bosse ne pose aucune difficulté particulière com pte
tenu de l'absence d'irrigation nerveuse ou sanguine de cette zone anatomique. Il n'en
est pas de même pour les prélèvements de tissu hépatique qui nécessitent des
précautions et un certain savoir-faire .
Plusieurs méthodes ont été décrites dans la littérature chez le dromadaire adu lte.
Technique de Nous décrivons ici la méthode utilisée au Maroc : l'animal est entravé et reçoit une
biopsie utilisée injection intraveineuse d'un sédatif général (1 ml de Xylazine, XYLA VET®) , puis pl acé
au Maroc en décubitus sternal. Le champ opératoire est rasé , dégraissé à l'alcool et désinfecté
à la teinture d'iode . Après anesthésie locale avec une injection de 5ml d'un~ solution
de xylocaïne 2% (XYLOVET®), une petite incision cutanée de 1cm environ est
pratiquée . Le point de ponction est précisément situé du côté droit au niveau du g éme
espace intercostal , soit le 3 ème à partir de la dernière côte , à 15 cm environ au dessus
de l'apophyse xiphoïde, soit légèrement au dessous d'une ligne horizontale joignant la
pointe de l'épaule à la pointe de la hanche. Après avoir traversé les muscles
intercostaux et le péritoine , la sonde à biopsie est enfoncée légèrement vers l'avant.
L'opérateur reconna ît le foie par sa consi stance moins ferme que celle des organes
voisins (piliers du diaphragme , compartiments gastriques). Après avoir enfoncé la
sonde à biopsie , l'opérateur effectue un mouvement sec en arrière pour réaliser la
biopsie . Cette méthode permet de prélever environ 1OO à 500mg de tissu frais.
Celui-ci est stocké dans 0,5 ml d'acide sulfurique . Un point de suture sur la peau
suffit pour assurer une cicatrisation rapide de la plaie cutanée , mais ce n'est pas
indispensable. La pulvérisation d'un produit antiseptique (ALUMISOL ®, NEGEROL®)
sur la plaie chirurgicale , et l'injection intramusculaire d'un antibiotique longue act ion
(oxytétracycline longue action , TENALINE 20 % L.A . ®)à raison de 5mg/kg (1 ml/ 10
kg de poids) évitent les surinfections post-opératoires éventuelles. Les risques
d'hémorragie sont minimes . Dès la fin de l'effet sédatif l'animal se lève et se met à
manger. Aucune complication, ni chute d'appétit, ni séquelle à long terme n'ont
généralement été observées . La procédure de biopsie peut éventuellement être
répétée deux semaines plus tard sans conséquence apparente sur l'animal.
96
Les Maladies du Dromadaire - Eléments de Séméiologie
3. Autopsie
Il n'y a pas de particularité technique à la réalisation de l'autopsie du dromadaire.
Si l'animal est sacrifié en phase agonique , il peut l'être en position baraquée , auquel
cas , l'autopsie peut très bien se faire dans cette position en empruntant les
techniques traditionnelles des bouchers pour le dépeçage. Le délai écoulé entre la
mort et l'autopsie doit être le plus court possible pour éviter une trop rapide altération
des organes surtout dans le contexte climatique souvent chaud dans lequel vit le
dromadaire. Des indicateurs tels que la rigor mortis, la présence de caillots sanguins
ou la survie des endoparasites témoignent de l'ancienneté du décès.
L'examen nécropsique se base sur l'observation visuelle des organes,
éventuellement leur palpation . Un examen complet comprend les phases su ivantes :
• Observation de l'état corporel du cadavre dans son ensemble : animal gras,
maigre, cachectique
•Examen des anomalies apparentes du squelette , d'éventuelles fractures
• Examen de la couleur de la peau et des membranes
• Examen de la couleur et de la consistance des muscles et du gras
• Examen des organes (coeur, poumon , reins , rate , foie, glandes endocrines) sur
lesquels on observe la couleur, le poids, les dimensions, la consi stance , la
topographie , les adhérences , le rapport cortex/medulla (sur les reins, les glandes
surrénales, la thyroïde et la parathyroïde) , la présence de corps étrangers dans le
tractus digestif
• Examen des liquides péritonéal , pleural , biliaire et des contenus digestif,
cardiaque, rénal afin d'observer leur couleur, leur odeur, leur quantité, leur viscosité,
la présence d'éléments étrangers
• Observation des lésions (abcès, ulcère , tumeur, hémorragie , escarres, plaies,
kystes) , de leur étendue , de leur distribution , de leur forme et de leur taille , de leur
consistance et texture , de leur odeur et de leur couleur
• Observation des parasites externes ou internes , de leur nombre, de leur
localisation et de leur statut au moment de l'autopsie (mort ou vivant)
La dissection de l'animal dans les conditions de terrain doit suivre de préférence le
protocole suivant:
- positionnement de l'animal sur le côté gauche
- incision cutanée sur la ligne médiane du ventre en évitant les organes
génitaux chez le mâle
- rabat de la peau sur le dos, levée du membre antérieur en incisant les
attaches musculaires reliant l'épaule au thorax et incision de la symphyse pelvienne
- incision de la base du cou
- ouverture de la cavité abdominale par la ligne ventrale
- incision des côtes près du sternum et des apophyses épineuses et levée du
volet costal
- éviscération de la cage thoracique (coeur et poumons)
- éviscération du tractus gastro-intestinal
- extraction des reins , du tractus génital et des glandes surrénales
- incision de la peau des membres et des articulations
- ouverture de la boîte crânienne
97
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
4. La médecine traditionnelle
Les maladies les plus fréquentes sont bien connues des éleveurs chameliers et
leur diagnostic est souvent pertinent. Il existe un grand nombre de noms
vernaculaires des maladies répondant à des entités pathologiques bien identifié es
(comme le surra qui est le nom vernaculaire le plus connu de la trypanosomose) . Les
éleveurs , souvent éloignés des centres de soins et surtout ayant peu accès aux
médicaments modernes , soit pour des raisons économiques, soit pour des raiso ns
institutionnelles (absence de réseaux de commercialisation), font souvent appel à la
médecine traditionnelle . Ils utilisent un grand nombre de plantes médicinales pour des
préparations orales , des ongue!nts , des désinfectants locaux. Ils pratiquent aussi
souvent , notamment dans la Corne de l'Afrique , des marques de feu pour traiter les
plaies , les abcès , les fractures, voire des maladies infectieuses. Il existe des types de
marques pour chaque type de pathologie. La marque de feu peut avoir quelq ue
efficacité sur des affections localisées en activant l'afflux sanguin dans la zone
atteinte .
Quelques ~ .....-.r-
exemp/es de/ ~
marques de feu
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98
Les Maladies du Dromadaire - Les Grandes Maladies Infectieuses
1. La peste bovine
Elle a été décrite au début du siècle chez le dromadaire, notamment en Inde et
pourrait avoir étè testée avec une possible reproduction expérimentale de la maladie
au début du siècle . Les cas cliniques décrits ont été constatés suite à un contact étroit
avec du bétail infecté. Les symptômes seraient comparables à ceux observés chez
les bovidés( peu caractéristiques : abattement , amaigrissement), mais la plupart des
auteurs pensent qu'il ne s'agit pas d'une maladie importante chez le dromadaire. Le
diagnostic reste essentiellement sérologique .
De fait, les cas rapportés sont extrêmement rares et des tentatives d'infection
expérimentale par voie nasale récemment réalisées en Egypte ont échoué . De
même, aucune séroconversion n'a été identif iée sur des sérums issus de régions
dévastées par l'épizootie africaine de 1960. La plupart des enquêtes sérologiques
montrent cependant l'existence d'anticorps aintibovipestiques dans une proportion
allant de 8 à 15% des animaux.
L'éventualité d'u n portage sain ne peut être exclue et peut avoir son importance
en cas d'épidémie ou de surveillance sérologique du Morbillivirus pour la maladie du
bétail , compte tenu de la grande mobilité des dromadaires et de la persistance d'un
état de veille dans les zones pastorales (programme PARC en Afrique) .
3. Fièvre aphteuse
Dans une enquête réalisée en Ethiopie en 1979, on ne relève aucune trace
sérologique par l.D.G. sur 55 dromadaires issus d'un foyer identifié de fièvre
aphteuse bovine. En Egypte cependant, des chercheurs ont réussi à infecter un
dromadaire par voie intra-nasale avec excrétion fécale du virus pendant 6 jours après
inoculation. Des données historiques issues de la médecine vétérinaire coloniale
semblent aussi montrer que le dromadaire peut souffrir de ces épisodes de fièvre
aphteuse au plan clinique et justifie les efforts de l'Organisation Internationale des
Epizooties (OIE) et de !'Organisation pour !'.Agriculture et !'Alimentation (FAO en
anglais) pour une surveillance globale de cette maladie y compris dans cette espèce .
Les symptômes sont identiques à ceux observés chez les bovins (papules sur les
muqueuses) . Cependant, la réceptivité du alromadaire à cette maladie demeure
faible .
99
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
4. Pasteurellose
Décrite pour la première fois en 1920, la pasteurellose à P. multocida peut avoir
Une des expressions très variables . La forme aiguë est dominée par des symptômes
contamination entériques , oedémateux ou pulmonaires, avec association possible . La forme
par les zébus ou suraiguë, correspond à la Septicémie Hémorragique des bovins et son expression
les petits clinique , à celle de la forme barbone. La mort survient en 2 à 5 jours.
ruminants Les zébus seraient une source d'infection pour les dromadaires. Cependa nt,
certains considèrent que le dromadaire est relativement résistant à P. multocida type
B, agent de la septicémie hémorrag ique des bovins, bien que des étud es
sérologiques en révèlent la présence dans 2 à 14% des échantillons suivant les
études. Des enquêtes sérologiques (hémagglutinations et seuil au titre 1/40) montrent
la prédom inance des types A en Eth iopie, et A et E au Tchad . Lors des épisodes de
mortalité survenus en Afrique de l'Est en 1995 et 1996 sur les troupeaux de
dromadai res ayant des signes respiratoires aigus, la pasteurellose a été désign ée
comme responsable des surinfections mortelles suite à l'infection cameline atypiq ue
par un virus de la peste des petits ruminants . La réponse des antibiotiques est
généralement bonne (Oxytetracycl ine longue action : TENALINE 20 % L.A .®,
sulfam ides : SULFA 33 ®) et une vaccination peut être envisagée si elle est
multivalente (PASTEROVIS ®) .
5. La rage
Il existe une forme furieuse de la rage chez le dromadaire décrite depuis
longtemps. Des auteurs plus récents distinguent une fo rme ag ressive avec attaq ue et
morsure de l'homme et des autres animaux, et une forme sourde où prédomi ne
terreur et cris . Une forme paralytique aurait été id entifiée en Somalie , mais sa ns
identification formelle du virus. Bien que cette pathologie soit relativement rare, le
pouvoir infectieux élevé des sécrétions salivaires et la crymales chez le dromadaire
représente un danger réel pour l'homme en parti culier dans les zones d'end émie
rabique . Les règles de prophylaxie médicale et sanita ire (vaccination préventive ,
isolement et observation des animaux suspects) sont identiques à ceux pratiqués
chez les autres espèces.
100
Les Maladies du Dromadaire - Les Grandes Maladies Infectieuses
7. La tuberculose
La place de la tuberculose dans les systèmes d'élevage de dromadaires connaît
un regain d'intérêt dû à plusieurs facteurs .
Premièrement la tuberculose humaine qui émerge de nouveau nécessite de mieux
connaître tous les réservoirs potentiels du bacille de Koch , mais aussi de caractériser
la forme des atteintes de tout le cheptel et les facteurs de transmission de la maladie.
Enfin les systèmes périurbains de production cameline sont le plus souvent axés
sur la production de lait et il est nécessaire de s'assurer de la qualité sanitaire de ce
lait vendu majoritairement cru dans les marchés urbains. En ce qui concerne la
présence du germe dans la viande , les données sont insuffisantes mais la plupart des
législations sanitaires nationales exclut la viande des animaux tuberculeux pour la
consommation humaine en rendant l'impact économique important. La production de
viande de dromadaire reste en effet considérable pour des villes comme Le Caire ou
en Arabie Saoudite où elle contribue à la couverture alimentaire des classes les plus
pauvres de la population . Elle est principalement issue des bassins d'élevage de
l'Afrique de l'Est (Soudan , Tchad) et ce commerce pourrait être ralenti par des
restrictions sanitaires des pays importateurs sur la tuberculose .
Dès 1917, on décrit des épisodes de tuberculose cameline , et la plupart des
observations provient des données de l'abattoir du Caire en Egypte où l'on
comptabilise alors 2,9% d'infection tuberculeuse sur les carcasses. Il s'agit d'un type
de Mycobacterium bovis qui mène dans 60 % des cas à des lésions pulmonaires et
des adénites aux noeuds bronchiques et dans 7% des cas à des lésions généralisées
de type milliaire. Entre 1962 et 1971 , on décrit encore en Egypte plusieurs enquêtes
d'abattoir relevant des taux d'infection entre 12 % et 33 %, ce qui reste non
négligeable. Des données issues du Kazakhstan confirment ce phénomène et la
prédominance de la tuberculose pulmonaire tant chez le chameau de Bactriane que
chez le dromadaire issus des systèmes extensifs en steppes et des fermes laitières.
La tuberculose pulmonaire à Mycobacterium bovis, principale manifestation de la
tuberculose chez le dromadaire, est également signalée en élevage sédentaire lors
d'association avec des bovins tuberculeux . Le dromadaire semble particulièrement
résistant, mais il peut développer une tuberculose chron ique susceptible de se
réveiller à l'occasion d'un stress .
Le système d'élevage des dromadaires égyptiens étant mixte (avec cheptel
bovin), le mode de contagion est alors décrit comme respiratoire . Ce facteur peut être
généralisé aujourd 'hui à la plupart des systèmes transhumants où la mixité des
espèces semble redevenir la règle en particulier lors des séjours communs en saison
sèche ou lors des pratiques communes d'abreuvement (incorporation de camélins à
des troupeaux de bovins et de petits ruminants pour diminuer le risque de pertes par
sécheresse), ainsi qu 'aux nouveaux systèmes périurbains plus intensifs du point de
vue du logement.
D'autres observations montrent que les lésions chez le dromadaire semblent
différer des lésions chez les bovins. Ainsi on relève plutôt des lésions de type
sarcome, et des caractères histologiques à pyogranulomes où la révélation des
cellules géantes caractéristiques et des germes acido-résistants est rare .
La lutte contre cette maladie chez le dromadaire nécessite l'adaptation d'un test
de diagnostic plus fiable que l'intradermo-tuberculination (à tester en zone post-
axillaire chez le dromadaire) . Ce test , lorsque la prévalence est faible , offre une
spécificité de moins de 50 % et une valeur prédictive insuffisante pour proposer des
plans de lutte sanitaires qui soient acceptés par les éleveurs.
101
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
8. La trypanosomose
Cette maladie est considérée par l'ensemble des pathologistes et par les éleve urs
Une comme la plus sévère et la plus répandue en élevage camélin . Elle existe dans toute
transmission l'a ire de distribution de l'espèce dans la mesure où elle ne dépend pas de la prése nce
par d'autres de la glossine mais d'autres vecteurs hématophages dont la connaissance est encore
insectes que la imparfaite (Stomoxes et tabanidés) . Il faut cependant moduler son importance pour
glossine les éleveurs en fonction du type d'élevage considéré , de la nature et de la fréque nce
des risques pris lors de la conduite d'élevage (regroupement sur les sites à vecteurs).
Elle reste une contrainte citée depuis fort longtemps par les éleveurs (le nom
vernaculaire est Surra) parmi les trois premières en Afrique de l'Est autant par les
éleveurs Rendille au Kenya, Borana en Ethiopie, ou Somali en Somalie , mais aussi
par les éleveurs arabes du Kordofan au Soudan , au Tchad ou en Afrique de l'Ouest,
au Mali , et en Mauritanie. Son ubiquité en fait une contrainte qui justifie les efforts
des laboratoires pour en permettre la lutte. Toutefois de nouvelles recherches sont
nécessaires en dehors des voies de la chimiothérapie soumise au risque des
résistances afin de lutter par une meilleure connaissance des vecteurs responsables
de son extension'.
L'agent étiologique en est Trypanosoma evansi, différencié depuis peu de
T.brucei, protozoa ire sanguin d'environ 25 µm à noyau allongé et kinétoplaste
subterminal. Il est transmis à l'animal mécaniquement par des insectes
hématophages. T. evansi peut aussi bien infecter les dromadaires, que les chiens et
les chevaux, très sensibles , chez qui l'issue est souvent fatale. Occasionnellement , le
dromadaire peut aussi être parasité par les trypanosomes du bétail , Trypanosoma
brucei, T. congolense , et T. vivax notamment dans les zones infectées par la mouche
tsé-tsé. Il développe alors des formes suraiguës rapidement mortelles. Du fait de la
descente des camélins dans des régions de plus en plus au sud des traditionnelles
zones de migrations en Afrique , cette cohabitation des glossines et des dromadai res
devient moins rare et il faut toujours avoir cette possibilité en tête en présence d'un
cas critique (cf Encad ré : la pathogénie et les symptômes du Surra).
102
Les Maladies du Dromadaire - Les Grandes Maladies Infectieuses
103
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
Dans le cadre d'une transmission immédiate d'un animal à l'autre , la probabi lité
d'infection par les tabanidés est de :
-1 chance sur 2 pour le genre Tabanus
-1 chance sur 11 pour le genre Chrysops
-1 chance sur 40 pour le genre Hematopota
Les Chrysops peuvent jouer un rôle majeur en compensant leur méd iocre pouvoir
infectieux par une densité et une agressivité supérieure. Enfin la période d'activité la
plus intense des tabanidés serait entre 8h00 et 12h00 puis entre 15h00 et 17h30 pour
une journée moyennement ensoleillée en Somalie tandis que l'on observe rien de tel
par temps couvert . De telles études devraient être multipliées de manière à adapter,
au cas par cas , les méthodes de lutte à la biologie des vecteurs concernés.
Très récemment, la découverte de formes immatures vivantes de T. evansi da ns
des larves de Cepha/opina titillator (myiase des cavités nasales) suggère un rôle
possible de leur part dans l'épidémiologie. Mais il pourrait s'agir d'une particularité ou
d'un artefact si cette découverte n'était pas confirm ée. Des recherches sont en cours
pour étudier la survie du trypanosome au stade adulte et sa transmissibilité à un
dromadaire sain . De nombreuses expériences restent à réaliser pour préciser le
pouvoir pathogène et le poids économique de cette maladie , notamment dans sa
forme chronique . De même , l'épidémiologie, en particulier le rôle de réservoi r des
animaux sauvages et domestiques et la biologie des vecteurs , est encore fort mal
connue .
Le traitement chimiothérapique de cette maladie est assuré par les éleveurs et les
services de santé animale selon diverses procédures. On trouve ainsi sur le marché
des molécules anciennes et nouvelles (lsometamidium VERIDIUM ®., Suramine ou
Nagano! N.D., Quinapyramidine ou Trypacide/ Tryquin N.D., à l'exclusion du
Diminazène reconnu comme toxique chez le dromadaire ), et qui possèdent une
variété d'effets secondaires ou des résistances (Suramine , Quinapyramidine) plus ou
moins bien connus des éleveurs et des services techniques. Leur réelle utilisation est
cependant totalement dépendante de la forme de leur distribution en milieu éleveur.
Depuis quelques années , un nouveau produit, le Melarsomine (Cymelarsan N.D.) , a
été introduit sur le marché. Tous les traitements effectués chez le dromadaire
concluent que ce produit est d'une excellente efficacité (à la dose de 0,25 mg/kg de
poids vif) et innocuité. Par ailleurs , les souches résistantes à la Suramine s'avèrent
sensibles au Melarsomine. Il est probable cependant qu'à long terme, des résistances
sont susceptibles d'apparaître. Une lutte efficace doit, de toute façon, inclure des
mesures de prévention de l'infestation que les éleveurs utilisent déjà aujourd 'hui,
renforcées de mesures issues des dernières connaissances sur la biologie des
vecteurs.
Autres Il existe d'autres maladies dues à des protozoaires, mais leur importance est
complètement mineure. Quelques cas de coccidioses dus à Eimeria cameli, E.
protozooses
rajasthani et E. dromedarii ont été décrits. Chez le chameau de Bactrianee, on a
isolé Eimeria Bactrianei et E. pel/erdyi. Cette maladie a longtemps été considérée
comme bénigne . Pourtant , une sévère épizootie a sévi récemment (en 1996) dans
104
Les Maladies du Dromadaire - Les Endoparasitoses
les Emirats Arabes Unis provoquant des entérites hémorragiques violentes et des
taux de mortalité élevés. En URSS, on recommandait des traitements à base
d'Oxytétracycline associés à des sulfam ides adm inistrés par voie parentérale . Le
dromadaire est également sensible à la toxoplasmose (cf. plus loin) et à la
sarcosporidiose qui affecterait plus de 4% des animaux au Soudan selon une étude
déjà ancienne et 81 % des carcasses à l'abattoir selon une étude plus récente en
Egypte.
Parmi les protozoaires du groupe des piroplasmidae , The/eiria camen/ensis a été
observé au Tukmenistan, en Egypte et en Somalie et Theleiria dromedarii a été décrit
en Inde, mais leur rôle pathogène n'est pas attesté .
4. Les endoparasitoses
• Nématodes gastro-intestinaux
Dans la plupart des cas, s'agissant de strongles, l'une infestation est mixte Strongles
associant le plus fréquemment Haemonchus /ongistipes (caillette) , Came/ostrongylus gastro-
mentulatus (caillette) , Trichostrongylus ssp (chymivore de l'intestin grêle), intestinaux
Oesophagostomum co/ombianum (histophage du gros intestin et du colon) dans
divers secteurs du tractus digestif des dromadaires. D'autres nématodes sont parfois
isolés tels que Cooperia, Nematodirus, lmpalaïa ssp (/. nudicollis chymivore dans le
duodenum et le jéjunum). L'essentiel de l'effet pathogène est dû cependant à H.
longistipes (cf. plus loin) et à Tric/10strongylus ssp.
Les strongyloides (Strongyloides papillosus dans l'intestin grêle) sont fréquents Strongyloïdes
(taux de prévalence parasitaire de plus de 80 % selon diverses études en Eth io pie) et
souvent associés aux strongles et aux trichures lors d'autopsies. Il s'agit du seul
parasite digestif chez les jeunes à la mamelle. Il présente la particularité d'avoir un
cycle parasitaire externe. L'infestation se fait essentiellement par voie cutanée , dans
105
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
des conditions d'hygiène défectueuses. Les oeufs ont une résistance élevée dans le
milieu extérieur. Leur rôle pathogène est difficile à apprécier bien qu'ils soient de
régime histophages et hématophages. Ils pourraient favoriser des épisodes de
Salmonellose.
Trichures Ils sont très fréquents (Trichuris globulosa dans le caecum et le colon), mais
semblent peu pathogènes bien qu'hématophages. Des études coproscopiques en
Ethiopie montrent des taux allant de 20 % à 78 % de prévalence.
• L 'haemonchose
Cette pathologie était autrefois considérée comme mineure. Divers travaux au
Tchad , en Ethiopie, au Soudan et en Mauritanie ont montré l'extrême gravité de cette
helminthose répandue dans toutes les zones d'élevage du dromadaire. Sur le pl an
clinique la spoliation sanguine est massive et l'anémie marquée dans 10 à 45% des
cas .
Une diarrhée profuse accompagne souvent l'infestation . Dans le cas d'infestation
massive , cachexie et oedèmes apparaissent en quelques mois et entraînent une
mortalité importante. La forme chronique est plus difficile à diagnostiquer. Les
dromadaires sont maigres et peu productifs. Il y a alternance de diarrhées et de selles
normales. Plusieurs auteurs associent certains troubles respiratoires avec l'infestation
par les Haemonchus. Au Niger, on a pu constater une augmentation du ta ux
d'anticorps anti-pasteurelles corrélée avec l'intensité de l'haemonchose.
Le parasite Haemonchus /ongistipes est un nématode quasi-exclusif des
camélidés . Il a exceptionnellement été signalé chez d'autres espèces et on a déjà
réussi à reproduire la maladie dans toute sa gravité chez les caprins. Dans une
moindre mesure cela a pu se faire chez le mouton . Le parasite Haemonchus
contortus du mouton a également été rapporté chez le dromadaire .
Son cycle est comparabre à celui décrit pour les autres strongylidés . La péri ode
pré patente est de 1 à 2 semaines . Les oeufs évoluent en larves infestantes en 6 à 10
jours sur le sol humide. La maladie sévit essentiellement en saison des pluies et
touche plus sévèrement les jeunes, mais certains auteurs considèrent les individ us
âgés plus sensibles. Comme pour les autres strongylidés , les circonstances
d'infestations méritent d'être éclaircies (cf Encadré: le cycle d'Haemonchus)
106
Les Maladies du Dromadaire - Les Endoparasitoses
CYCLE DE
L'HAEMONCOSE
Fèces
- - -:;A;:
-;/
- ~ --
~
~---r---1 Oeuf
En étudiant l'évolution de l'excrétion fécale des oeufs chez 429 femelles tout au
long de l'année, au Soudan , on a pu affiner l'épidémiologie de cette infestation . On
met ainsi en évidence une saisonalité très marquée, notamment chez H. /ongistipes
(mais on constate aussi ce phénomène avec une intensité variable chez les autres
strongylidés). On note un pic d'infestation de juin à octobre, soit pendant la saison
des pluies. L'excrétion des oeufs coïncide avec le pic de précipitations au mois de
juillet et précède même parfois l'arrivée des pluies. L'infestation des pâturages en
larves L3 infestantes cu lmine en août , pendant lequel on observe le maximum de cas
cliniques .
La baisse brutale d'excrétion des oeufs au mois de septembre fait suspecter un
phénomène d'auto-guérison, bien connu chez le mouton avec H. contortus. De même
la reprise des pontes avant même le début de la saison des pluies, alors qu'aucune
larve n'est encore présente dans le milieu extérieur, amène certains à suspecter une
phase d'hypobiose, reconnue dans d'autres espèces. Les premiers résultats des
travau x sur des dromadaires mauritaniens, confirment cette hypothèse d'hypobiose
qui de surcroît serait plus intense que chez les autres ruminants domestiques.
Ces découvertes, si elles se confirment, sont déterminantes pour la mise en place
de stratégies de vermifugation . Cependant , de nombreuses données manquent
encore, notamment sur la réalité de l'infestation des petits ruminants par H.
Longistipes et leur rôle de réservoir. De même, les interactions entre l'hemonchose,
les facteurs d'environnement et la gravité des symptômes, mériteraient d'être
approfondies.
107
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
108
Les Maladies du Dromadaire - Les Ectoparasitoses et Maladies Cutanées
109
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
• Les tiques
L'infestation des dromadaires par les tiques est le plus souvent massive. Il s'agit
essentiellement du genre Hya/omma , notamment H. dromedarii, H. impeltatum et H.
anato/icum. Rhipicephalus ssp et Amblyomma ssp sont aussi fréquemment observés.
Les tiques sont généralement plus caractéristiques des zones géographiques que
d'une espèce animale déterminée.
Cycle et Les tiques femelles pond1ant leurs oeufs en des endroits ombragés. Les larves, les
h é . nymphes, puis les adultes (chaque stade de développement du parasite nécessite un
pat og me repas de sang sur un hôte) patientent sur la végétation jusqu'au passage de l'animal.
110
Les Maladies du Dromadaire - Les Ectoparasitoses et Maladies Cutanées
Ils s'attachent n'importe où, mais de préférence autour des yeux, dans les oreilles et
les naseaux, en région axillaire ou inguinale , et autour du périnée .
Les tiques mâles restent généralement plus longtemps sur l'animal. Lorsque le
parasite s'est gorgé de sang ou de lymphe, il se détache et le cycle recommence.
Leur rôle pathogène semble essentiellement lié à l'action traumatique et spoliatrice
(un parasite peut prélever 2 ml de sang et un chamelon peut supporter plus d'une
centaine de tiques). Aucun rôle de vecteur n'a pu leur être attribué bien qu 'il ait été
évoqué pour la lymphadénie ou des rickettsioses . Des paralysies à tiques sont
signalées occasionnellement dans la littérature, notamment du fait des larves de
Hya/omma dromedarii. L'évolution peut être fatale . Dans la Corne de l'Afrique , des
épizooties de scepticém ie hémorragique ont été associées à des infestations
massives par Hya/omma dromedarii.
Infestation
Les tiques sont présentes toute l'année su r le dromadaire, mais l'infestation est massive en
maximale en saison humide, où les conditions sont réunies pour l'éclosion des oeufs saison humide
et la survie des différents stades dans le milieu extérieur ou sur d'autres hôtes.
La densité animale , la station prolongée dans un même pâturage , les
concentrations autour des points d'eau facilitent les contaminations .
Le traitement curatif s'appuie sur l'apport d'acaricide pour-on ou en pulvérisation
(VETACAR ® par exemple) , surtout chez le chamelon qui peut être victime de
spoliation importante. Des pratiques visant à éviter les parcours fortement
contaminés, les trop fortes concentrations autour des points d'abreuvement, le
brûlage des enclos d'épineux au départ de la transhumance , peuvent contribuer à
diminuer les risques d'infestation . Pour une plus grande efficacité , un traitement
alterné de différents produits acaricides peut être proposé (par exemple , un organo-
phosphoré type Diazinon et de l'Amitraz)
2. Les poxviroses
111
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
Une forme En Somalie, on rapporte une forme hypervirulente avec concentration des lésions
autour des yeux et de la bouche , une hyperthermie, de la diarrhée, de la
hypervirulente déshydratation , des surinfections et la mort. Ces formes touchent alors 100% des
en Somalie animaux, avec un taux de mortalité de 10 à 50% selon les troupeaux, notamment
chez les jeunes mâles. L'immunité acquise semble solide. Lors d'une réce nte
épizootie survenue dans les Emirats Arabes Unis, des pox-virus ont été isolés sur des
tiques du dromadaire.
L'affiliation à une zoonose est discutée dans la littérature. La transmission serait
possible à l'homme dans certaines conditions . En Ethiopie, on a observé la présen ce
de pustules chez des enfants vivants au contact d'animaux infectés. Cependant , dans
une étude portant sur 59 prélèvements réalisés sur des nomades Somaliens, le vi rus
n'a pas pu être isolé. Plus récemment d'ailleurs , la transmissibilité du virus à l'homme
a été contestée et les cas cliniques observés chez l'homme sont mis sur le compte de
l'herpès virus de la varicelle et du came/ parapoxvirus de l'ecthyma contagieux des
dromadaires.
La transmission du virus entre les animaux se fait de manière directe ou indirecte
vraisemblablement par le biais des croûtes. Seuls des traitements symptomatiqu es
peuvent être conduits. Des vaccins vivants atténués sont maintenant disponibles sur
le marché (Ducapox) . Mais plus généralement, des règles classiques d'hygiène,
l'isolement des animaux malades, peuvent contribuer à limiter l'extension de la
maladie .
112
Les Maladies du Dromadaire - Le•s Ectoparasitoses et Maladies Cutanées
• Papillomatose cameline
La papillomatose caméline est décrite en Somalie et au Kenya . Maladie due à un
virion , elle se manifeste par des nodules caractéristiques , tout-à-fait similaires à ceux
observés chez les bovins , et qui se disposent de préférence sur la tête, le cou,
éventuellement les épaules et la mamelle. La maladie n'est pas mortelle et peut
affecter aussi bien les jeunes que les adultes. Il semble qu 'il existe des relations entre
la papillomatose et la variole et des épizooties simultanées ont été observées en
Somalie.
La guérison est spontanée à condition d'éviter les surinfections cutanées par des
mesures d'hygiène classique et l'animal développe une immunité de longue durée.
Chez le chamelon, le diagnostic clinique dilfférentiel est difficile à faire entre la
variole , l'ecthyma et la papillomatose .
• La lymphadénie
Cette pathologie , connue sous le nom de mal/a en Ethiopie et Somalie, est
caractérisée par la présence d'abcès froids, indolores, sous-cutanés , intéressant
souvent les noeuds lymphatiques, particulièrement les noeuds lymphatiques Des abcès de la
cervicaux situés à la base du cou dans 70% des cas environ . Ils se localisent aussi taille d'un oeuf à
fréquemment ailleurs sur le cou, sur les maxillaires, les cuisses et les lombes. Des celle d'un ballon
localisations internes secondaires sont mentionnées par les éleveurs, notamment au de football
niveau abdominal et thoracique . La taille des abcès varie entre celle d'un oeuf et
celle d'un ballon de football.
Il s'agit cependant d'une maladie contagieuse , sévère et souvent fatale. Elle
évoluerait de manière sporadique à enzootique pendant toute l'année sur les adultes
âgés de plus de 5 ans. Cette pathologie est considérée en Ethiopie comme
dominante chez les dromadaires adultes dont elle pourrait affecter habituellement
plus de 10% des représentants par troupeau . En Arabie saoudite , on a décrit une
épidémie de lymphadénie atteignant 15% de 2500 dromadaires.
L'étiologie a été longtemps controversée . Attribuée à une souche de
Corynébactéries hautement pathogène , on a pu isoler en Ethiopie Corynebacterium
pyogenes à partir de 6 échantillons de pus sur 15 (40%). Dans une autre étude , on a
pu trouver sur 59 prélèvements, des Streptocoques seuls ou en association dans 57%
des cas, Corynebacterium pseudotuberculosis dans 37% des cas, Staphylococcus
ssp dans 10% des cas et des Corynebacterium pyogenes dans 6 à 7% des cas. On a
pu reproduire une clinique comparable par injection l.V. d'un mélange de
Streptocoques type B et de Corynebacteries.
Dans une autre étude , on a pu isoler C. pseudotuberculosis sur 27 pus prélevés ,
sur 10/12 noeuds lymphatiques, sur 4/6 prélèvements de lait et sur 10/14 tiques du
genre Hya/omma gorgées de sang de dromadaires atteints. Plus récemment, le rôle
prépondérant de C. pseudotubercu/osis a été confirmé par sa présence en culture
pure sur 80% des abcès fermés et sur 57,7% des abcès ouverts, à partir de 150
prélèvements. Le mode de transmission pourrait faire intervenir les arthropodes
hématophages comme les tiques.
Le traitement est toujours difficile. Il s'appuie soit sur l'incision et le drainage des
abcès associé à un nettoyage avec des solutions iodées, soit sur l'excision
chirurgicale . Le traitement général avec des antibiotiques est peu efficace compte-
113
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
tenu de l'enkystement des germes responsables. Des essais de vaccination ont été
proposés.
• Nécrose cutanée
En Ethiopie, on la considère comme la deuxième maladie pyogène la plus
fréquente après la Corynebactériose.
L'incubation dure de 8 à 12 jours. Il y a apparition d'abcès chauds, fermés et
douloureux surtout sur le cou , la tête , les épaules , les côtes et les cuisses . Les abcès
s'ulcèrent spontanément laissant apparaître des zones nécrotiques parfois profond es,
mesurant de 2 à 15 cm , et ayant tendance à s'étendre. La transmission de la maladie
se ferait par contact et serait moins fréquente en élevage nomade. L'étiologie reste
peu connue .
Le traitement est similaire à celui de la lymphadénie, mais le traitem ent
antibiotique systémique est souvent plus efficace (TENALINE 20 % L.A . ®,
ERYTHROCINE 200 ®) .
Outre les troubles nerv eux liés à la rage ou à l'oestrose, on décrit plusie urs
syndromes d'étiologie variable se caractérisant essentiellement par des atteintes
Tétanos
nerveuses. En Afrique de l'Est, les éleveurs décrivent ainsi un syndrome du "cou
raide" qui peut prendre une forme aiguë , souvent mortelle en 10-15 jours ou une
forme chronique qui peut durer plusieurs mois et se traduire par une baisse
progressive de l'état génénal. La forme aigue est due à C/ostridium tetani (tétanos)
auquel le dromadaire est sensible au même titre que les autres espèces animales. La
forme chronique se manifeste par une forte rigidité musculaire au niveau du cou et
souvent une grande difficulté à ouvrir la bouche . Son étiologie est imprécise
(rhumatisme trypanosomien, luxation de l'articulation atlanto-occipitale, lésions des
vertèbres cervicales) .
La prévention du tétanos par l'utilisation de sérum antitétanique (TETASER ® ,
TETANISERUM ®)est possible . Dans les formes chroniques , les éleveurs pratiqu ent
couramment des marques cle feu spécifiques le long du cou avec quelque chance de
succès. La vaccination reste recommandée (COGLAVAX ®) .
Le torticolis se distingue de l'affection précédente par la déformation en S du
Torticolis cou. Cette affection touche préférentiellement les jeunes sevrés et se guérit
spontanément. Un traitement à base d'injection de vitamines 86 semble effica ce,
ma is la carence en ces vita1mines n'est pas attestée . Les marques de feu le long du
cou sont le remède préféré des éleveurs pour ce type de problème .
En cas de traumatismes divers, les lésions nerveuses ne sont pas rares et
peuvent provoquer diverses paralysies plus ou moins réversibles selon l'importan ce
de la lésion. Divers traitements anti-inflammatoires peuvent améliorer le pronostic.
Par ailleurs, de nombreuses plantes toxiques peuvent occasionner des troubles
nerveux (torticolis , incoordination , paralysie des membres, convulsions).
Maladies Dans ce groupe de mala1jies, il faut ajouter les maladies oculaires qui sont assez
oculaires courantes. Une enquête réalisée en Inde a permis d'éva luer l'incidence des troubles
oculaires à près de 7%. Leur étiologie est fort variable allant du traumatisme
(épineux, piqûres de tiques ou de mouches) aux myiases (larves de Theilaria lees1) en
passant par des maladies virales (variole caméline , ecthyma contagieux) .
114
Les Maladies du Dromadaire - Autres pathologies infectieuses
Ces affections se traduisent par une conjonctivite et des larmoiements. Chez les
dromadaires âgés, des cécités causées par l'opacité de la cornée sont rapportées,
mais l'étiologie est inconnue.
115
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
• Salmonellose
Cette entérite aiguë !bactérienne est provoquée par différents types de
Salmonelles : Salmonella typhimurium, S. enteritidis, S. kentucky et S. St Paul. Elle
se manifeste par une diarrhée aiguë verdâtre, brune puis hémorragique avec
déshydratation, baisse de l'état général et mortalité importante en moins de 1 mois.
A l'autopsie, des pétéchies (petites taches hémorragiques) sont retrouvées sur la
plupart des organes. Des formes aiguës, évoluant en 10 à 15 jours, sont parfois
signalées. Les femelles pleines infectées avortent fréquemment.
La salmonellose affecterait toutes les classes d'âge , évoluant le plus souvent sous
une forme épizootique , avec un taux de prévalence de 50 à 70% des animaux da ns
un troupeau touché . Elle a été identifiée comme une cause majeure de mortalité des
chamelons en Ethiopie, avec un taux de mortalité approchant 20% dans certa ines
régions.
La thérapeutique s'appuie sur l'utili sati on de réhydratants (5 litres de sol uti on
isotonique distribués par voie intrave ineuse) et de sulfamides par voie parentéra le
(SULFA 33).
• Colibacillose
Il s'agit d'une entérite a1igu ë à Eicherichia coti, sévissant fréquemment chez les
nouveau-nés des espèces domestiques et de l'homme. Cependant, très peu d'étud es
cliniques ou d'enquêtes ont été réalisées pour étudier son importance réelle chez Je
dromadaire. Dans une étude en Afrique de l'Ouest, cinq souches de E. Coli dont 3
toxinogènes ont été isolées chez 7 dromadaires (dont 2 chamelons) souffrant de
diarrhée (100%) . Cependant, dans cette même étude , d'autres sérotypes de E. coti
sur 60% des dromadaires en bonne santé ont été également isolés.
Ces dernières souches n'étaient pas toxinogène s; cependant , certaines d'entre
elles étaient connues pour provoquer des troubles graves chez d'autres espèces
domestiques. E. coti est donc un hôte habituel du dromadaire, dont certai ns
sérotypes , en tant que pathogènes primaires ou secondaires, peuvent être amenés à
jouer un rôle dans les diarrhées du chamelon .
Des études supplémentaires seraient souhaitables pour préciser ce rôle pathogè ne
et son incidence réelle .
La thérapeutique spécifique des colibaciloses peut faire intervenir des
antibiotiques à base de Colistine (COL/VET ®).
• Rotavirose
L'action pathogène du rotavirus dans les diarrhées du nouveau-né est bien conn ue
dans d'autres espèces , notamment chez le veau .
La susceptibilité du chamelon a été étudiée au Maroc. Sur 55 sérums de
chamelons recueillis à l'abattoir, presque 50% ont été trouvés positifs par immuno-
électro-osmophérèse .
• Maladie des muqueuses
Des traces sérologiques du virus de la BVD ont été relevées sur 15,7% de
femelles soudanaises. Aucune relation avec une quelconque expression clinique , n'a
pu à ce jour être identifiée en région d'élevage du dromadai re.
• Coccidiose
Ce parasite du tube digestif tel que le genre Eimeria ssp., et notamment E. cameli,
a été tenu responsable de dliarrhées hémorragiques en Arabie Saoudite. La malad ie
sévissait toute l'année , en particulier au mois de septembre et, sur 960 dromadaires,
14% hébergeaient des coccidies .
116
Les Maladies du Dromadaire - Autres Pathologies Infectieuses
• Brucellose
Pathologie infectieuse due à Bruce/la abortus ou B. melitensis, à l'origine
d'avortements en première moitié de gestation, sans autres symptômes .
Elle provoque une séroconversion qui disparaît au bout de 4 années . On note une
chute importante de la fertilité dans les élevages infectés. Certains auteurs accordent
peu d'importance à la maladie et estiment que les avortements brucelliques sont
exceptionnels. Cependant des traces sérologiques de la brucellose ont été signalées
partout en Afrique de l'Est. Mais fort peu d'études ont visé à id entifier le germe
responsable . Les réactions croisées avec Yersinia enteroco/itica incitent à la
prudence.
Les taux de prévalence sont compris entre 1,9 et 30% selon les différents auteurs.
Au Soudan , on observe dans une enquête un taux maximal de 30% sur 15 troupeaux
et Bruce/la abortus est isolé dans 5 échantillons sur 38 mis en culture à partir
notamment de frottis vaginaux, de noeuds lymphatiques supra-mammaires et
inguinaux et de testicules. Le taux de prévalence sérologique serait maximal en
saison des pluies. Il serait deux à trois fois supérieur chez les femelles : 32,9% contre
15,1% chez les mâles (ou 13,76% contre 4,95% dans une étude plus récente) . Les
jeunes seraient moins touchés : 7% entre 0 et 6 mois, 0% entre 6 mois et 1 an.
117
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
Le mode d'élevage a son importance. En effet l'impact est beaucoup plus faible en
Une persistance élevage nomade. La femelle mettant bas à l'écart du troupeau , la contagion à partir
qui s'éteint au des produits de l'avortement est minimale. De plus, l'intervalle supérieur entre les
bout de 4 ans mises bas en élevage nomade diminue le nombre d'avortements possibles par
femelle. En effet, la brucellose est réputée ne pas persister au delà de 4 ans chez le
dromadaire. Ceci semble minimiser le risque de zoonose , à redouter du fait de la
consommation traditionnelle de lait cru ou fermenté (Somalie). On constate une
séroprévalence importante chez les petits ruminants élevés en mixité avec les
dromadaires en Somalie, ce qui permet de s'interroger sur un rôle éventuel de
réservoir de la maladie . Des tentatives de vaccination existent.
• Toxoplasmose
Il s'agit d'une protozoose due à Toxop/asma gondii. L'infestation des dromadaires
semble se réaliser par l'ingestion d'ookystes sporulés éliminés dans le milieu
extérieur par des félid és infestés. En milieu nomade , il s'agit probablement de chats
sauvages (Felis sy/vestis Jybica) .
Toxop/asma gondii est à l'origine d'avortements, notamment chez la brebis et la
femme . Le taux de prévalence élevé chez le dromadaire en fait un facteur étiologique
possible d'avortements. La maladie a été surtout étudiée au Soudan où on considère
que l'infection y est largement répandue. La prévalence apparaît supérieure sur les
dromadaires âgés de plus de 7 ans. Mais en élevage sédentaire arabe , on n'observe
pas d'influence du sexe . L'impact économique est secondaire mais les conséquences
sur la santé publique ne sont pas négligeables.
Les populations nomades, qui consomment le lait cru et le foie peu ou pas cuit
(tradition culinaire à l'abattage) , sont particulièrement exposées.
118
Les Maladies du Dromadaire - Autres Pathologies Infectieuses
4. Mammites
Les mammites cliniques aiguës ch ez le dromadaire ont été traditionnellement
décrites comme extrêmement rares et la mam elle sembl erait exceptionnellement
résistante . Cependant il faut relativiser cette affirmation par l'examen des résultats
récents de nombreux auteurs . L'observation des pratiques des éleveurs peut , il est
vrai, conduire à sous-évaluer l'importance de ces pathologies. Par exemple , les
techniques traditionnelles destinées à empêcher le chamelon de téter, notamment par
introduction de morceaux de bois dans les trayons, sont rarement suivis de
mammites. Quand cela arrive , les manifestations cliniques sont comparables à
d'autres espèces (douleur, chaleur, tuméfaction , modification du la it...) . Il n'est pas
rare qu 'il y ait alors nécrose et chute d'un quartier.
Les mammites sub-cliniques semblent plus répandues (37% dans une étude en
Somalie). Toujours en Somalie, dans une autre enquête , on a trouvé en moyenne
10,2% des femelles atteintes dans 40 troupeaux de 40 animaux en moyenne (de 3 %
à 20 % d'atteinte sur 1616 animaux) .
Il s'agirait le plus souvent de femelles de 9 à 16 ans , en particulier dans les 3
premières lactations. Dans une étude réalisée sur 50 femelles en lactation en Irak, on
a pu obtenir les résultats indiqués dans les tableaux ci-dessous .
119
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
5. Boiteries
Bien que peu étudiées , les pathologies podales ne sont pas rares chez le
dromadaire. Dans une enquête menée en Inde , l'incidence des boiteries a été
évaluée à 10,6%, soit une fréquence comparable à celle observée chez les vach es
laitières dans les pays tempérés.
L'étiologie est traumatique , inflammatoire ou infectieuse. Les cas sont plus
fréquents chez les animaux de bât (pression plus forte sur les pieds du fa it du
portage) et chez les animaux amenés à se déplacer sur des terrains caillouteux . La
nécrose de la sole est associée à une carence en sodium.
Une complémentation de la ration constitue un facteur de protection en favorisant
l'intégrité du pied .
6. Maladie hémorragique
Il s'agit d'une maladie observée sur les chameaux de course des Emirats Arabes
Unis qui s'est traduite par l'émission de fèces mêlées à des caillots de sang, sa ns
aucun signe de diarrhée , associée à des signes généraux (faiblesse général isée,
larmoiement, hyperthermie) . Le taux de mortalité chez les animaux atteints a été de
50% .
L'étiologie probable est bactérienne et Bacil/us cereus serait l'agent responsable.
120
Les Maladies du Dromadaire - Autres Pathologies Infectieuses
7. Pathologie de la reproduction
121
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
• Prolapsus vaginal
Considéré comme dû à une alimentation excessivement riche , notamment en
légumineuses, ou à un manque d'exercice , le prolapsus du vagin est pourtant assez
fréquemment rencontré dans les troupeaux extensifs.
Léger, il n'est pas incompatible avec la gestation. Prononcé , il représente surtout
une gêne pour l'animal et une source possible d'infection . Plusieurs traitements sont
possibles:
* Application topique d'une solution à base d'antiseptique et de sucre : efficace
pour les prolapsus légers ;
* Utilisation d' "épingles de nourrice" identiques à celles utilisées pour les bovins,
laissées en place une semaine ;
* Exérèse d'une partie de la matrice qui ressort avec des ulcérations, de la
nécrose ou un oed ème puis suture de la matrice ; opération à pratiquer sous
anesthésie par épidurale ;
• Autres pathologies chez la femelle
* Présence massive de tiques autour de la vulve : ce type d'i nfestation peut
s'accompagner d'infections et doit être traité par application d'acaricides
(VETACAR ®)et d'antiseptiques.
* Infections utérines : métrites et pyomètres peuvent apparaître après la mise
bas ; l'involution utérine post-partum peut être contrôlée par palpation rectale ; la
mise en place in utero d'oblets gynécologiques à base de tétracycl ine
(OBLICARMINE ®) est suffisante dans le premier cas; elle peut être précédée
d'un traitement à base de prostaglandine (ENZAPROST ®) en cas de pyomètre
pour vider l'utérus.
123
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
Principes actifs : Les principes actifs relèvent de plusieurs types de toxiques: les alcaloïdes (comme
par exemple la ca/otropine cle Calotropis procera ou la tryptamine de Phalaris minor),
alcaloïdes,
les cyanures (Perra/deria coronopifolia, Lotus joly1) , l'atropine (Hyscyamus muticus) , le
cyanures, sel lorsqu'il dépasse un taux: de 3% de la matière sèche (Sa/so/ea vermicu/ata) .
atropine et... sel I
De nombreuses autres espèces, notamment sahariennes, ont mauvaise réputation
(Genista saharae, Malva parviflora, Artemisia campestris, baies de Capparis
tomentosa ... ), mais il est évident, dans ce domaine, que des investigations plus
poussées doivent être menées pour préciser le rôle exact des plantes dans
l'apparition des troubles observés , leur(s) principe(s) toxique(s) et les éventuels
antidotes possibles , la plupart des traitements n'étant que symptomatiques.
124
Conclusion
125
GUIDE DE L'ELEVAGE DU DROMADAIRE
The camel par R.T. Wilson (1984) , Editions Longman , Londres, 223 pp.
The one-humped camel in eastern-Africa par Schwartz et Dioli (1992), Editi ons
Verlag , Weikersheim, 282 pp.
The racing camel par Saltin et Rose (1994) , Editions Acta physiologica
Scandinavia , Stockholm , 95 pp .
126
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