Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Remerciements à
Gregor, grâce à qui tout a commencé,
David Joubard et Luc Rémon,
relecteurs de la première heure,
Elliott Biehler pour ses suggestions,
Carole Paillard, chasseuse de coquilles,
Florian Raclet, ciseleur perfectionniste,
Jean-François Jeunet, mon éditeur,
Stéphane Le Roux, pour son attention et sa précision.
Si malgré leurs efforts il subsistait quelques erreurs
ou imprécisions, elles sont du fait de l’auteur.
G. J.
De l’autre côté
du miroir
L’ARTIFICE DE LA FICTION / MYSTÈRE ET PLAISIR /
LA DRAMATURGIE AU QUOTIDIEN
1. De l’autre côté du miroir (1872) est la suite du célèbre roman Les Aventures
d’Alice au pays des merveilles (Lewis CARROLL – 1865).
L’artifice de la fiction
Grande question : quand vous aurez cette connais-
sance, vous sera-t-il encore possible de regarder un film
avec simplicité, de vous laisser emporter dans une
intrigue, de suspendre un temps votre incrédulité ?
Si vous avez la capacité d’analyser les ressorts d’une
dramaturgie, ne risquez-vous pas d’en percer les arti-
fices, bref, de ne plus vivre les émotions du récit comme
n’importe quel spectateur ?
Pensez aux tours de prestidigitation : on cherche à
comprendre le truc, mais si jamais on le découvre,
l’émerveillement change de nature.
Lorsqu’un magicien réussit un numéro extraordi-
naire sans que vous ne compreniez comment il a fait, le
mystère fait partie de l’émotion ressentie.
Si vous connaissez son secret, le merveilleux se dis-
sipe. Il reste à apprécier les performances techniques et
artistiques, mais ce n’est plus la même chose.
Mystère et plaisir
Il me semble que la plupart des amateurs de spec-
tacles de prestidigitation ont plus ou moins conscience
que leur plaisir provient en partie du mystère du tour
réussi.
En tant que cinéphile, bédéphile ou amateur de
bonnes histoires en tous genres, vous-même pourriez
souhaiter garder votre innocence de spectateur ordinaire
et préserver ce plaisir que Christopher Nolan décrit si
bien dans Le Prestige2 (2006) : le plaisir d’être dupé.
Je ne peux répondre pour vous, mais, personnelle-
ment, enseigner la dramaturgie a certainement changé
mon regard sur le cinéma, sur l’écriture, et plus large-
ment sur le monde médiatique.
La dramaturgie au quotidien
Au-delà de la seule sphère de la fiction, je perçois
l’usage qui est fait de techniques visant à susciter et
MODE D’EMPLOI 13
Nourrir votre pratique
J’en resterai au postulat que vous, qui lisez, êtes
aussi auteur ou voué à le devenir. Si vous êtes enseignant
en cinéma ou exercez un métier de communication, je
pense que vous y trouverez aussi votre compte.
Il sera beaucoup question de cinéma, mais tout ce
que je dis est transposable à la bande dessinée, au
roman, au théâtre, et même au jeu vidéo.
Ce livre n’est pas destiné à être lu d’une traite. Il
s’agit de présenter et d’expliquer des notions concrète-
ment utilisables en dramaturgie, de les relier à des exem-
ples et de proposer des exercices de mise en pratique.
Si vous ne connaissez pas certaines des œuvres
citées, pas d’inquiétude : des résumés accompagnent la
plupart des explications.
Parfois, je reste vague pour vous laisser le plaisir de
découvrir par vous-même certains aspects d’une œuvre.
Si vous êtes un lecteur actif, vous chercherez à iden-
tifier dans vos œuvres préférées les techniques et les
mécanismes dont traite cet ouvrage.
Je vous y encourage vivement, tout comme je vous
encourage à échanger avec d’autres auteurs sur vos tra-
vaux respectifs, dans le cadre de cercles de lecture ou
de rencontres.
Très important aussi, et même plus important encore
que n’importe quel livre, il y a la pratique de l’écriture.
Pratiquer l’écriture
On ne peut pas apprendre sans pratiquer, et l’écriture
ne fait pas exception.
Lire des centaines de pages d’explications ne garantit
rien. C’est uniquement ce que l’on a soi-même assimilé
MODE D’EMPLOI 14
dans la pratique qui se révèle utile. D’où l’intérêt, selon
moi, d’un aller-retour entre pratique et théorie, dans cette
expérimentation intime qu’est l’apprentissage personnel.
Votre liberté
Vous pouvez choisir de circuler entre les différentes
parties du corpus au fil de votre inspiration.
Bien entendu, il est possible de tout lire, dans l’ordre,
du début à la fin.
Si vous préférez bâtir votre parcours personnel,
chaque fin de chapitre vous suggère différentes direc-
tions possibles, selon votre sensibilité, vos envies ou vos
besoins.
Enfin, vous pouvez aussi considérer ce livre comme
une boîte à outils, un ensemble de ressources utilisables
au coup par coup, et à la demande.
Que vous soyez au début d’un projet, en plein travail
sur le dénouement ou sur les rebondissements de votre
partie centrale, libre à vous de piocher où vous voulez.
MODE D’EMPLOI 15
mais la plupart sont suffisamment universels pour servir
dans n’importe quelle histoire.
6. Jean FAILLER est l’auteur (entre autres) d’une quarantaine de romans d’in-
vestigation se déroulant en Bretagne et mettant en scène le personnage
de Mary Lester.
MODE D’EMPLOI 16
Vous voulez directement commencer
à développer vos idées ?
Comment travailler
fi Cliquez ici
sur la cohérence du récit ?
MODE D’EMPLOI 17
Mise en forme
À QUI S’ADRESSE UN SCÉNARIO /
QUALITÉS ESSENTIELLES / QUATRE PARTIES /
ÉCRIRE CE QUI SE VOIT ET CE QUI S’ENTEND / TRANSITIONS /
DIALOGUES IN, OFF, OVER / CAS PARTICULIERS /
INTENTIONS / NOTE DE RÉALISATION /
PITCHER SON PROJET / ANNEXES
MISE EN FORME 19
la forme de votre scénario est impeccable, vous aug-
mentez directement vos chances d’être produit simple-
ment en augmentant vos chances d’être lu. Observez
les modèles proposés et n’hésitez pas à en chercher
d’autres sur Internet. Même la qualité du papier produit
un effet, visuel et tactile.
MISE EN FORME 20
Seconde qualité essentielle :
la fluidité
Ne vous encombrez pas de détails secondaires dans
vos descriptions. Seuls comptent les éléments qui jouent
un rôle dans votre récit.
Même si vous avez en tête de quoi remplir une page
entière pour décrire un lieu, quelques indications suffi-
ront généralement au lecteur pour que sa propre imagi-
nation prenne le relais.
1. La page de titre
Elle comporte le titre de votre scénario, la nature du
projet et vos coordonnées.
Elle n’a pas de numéro. La numérotation commence
conventionnellement à la page 2. Ne jamais indiquer de
numéro de version sur la page de titre, et encore moins
de mention du type « version finale » : un scénario est
susceptible de changements à toutes les étapes de la
production. Évitez les polices de caractères fantaisistes
et ne mettez aucune image.
Si vous avez déposé votre œuvre à la SACD8, il est
d’usage d’indiquer le numéro de dépôt.
MISE EN FORME 21
2. Le synopsis
Rédigé au présent de l’indicatif, c’est un résumé
complet du récit donnant un aperçu succinct de tout ce
qu’il contient : univers, personnages, enjeux, événe-
ments, rebondissements, climax, dénouement.
MISE EN FORME 22
3. La continuité dialoguée
C’est la partie la plus longue.
Elle contient l’intégralité des scènes du récit dans
l’ordre, sans numérotation. Le texte doit être en police
courier, taille 12.
Certaines productions tolèrent les polices Times New
Roman, Arial ou Verdana. Toute autre police est à proscrire.
Pourquoi la police courier 12 ?
Par tradition d’abord, car c’est la police des machines
à écrire utilisées par les scénaristes depuis les débuts
du cinéma. Mais il y a une autre raison. C’est une police
non proportionnelle : tous les caractères occupent le
même espace.
Ceci permet de rédiger des pages qui comportent
toutes le même nombre de lignes, voire le même nombre
de signes.
Dans ce standard, on considère que :
1 page de scénario = 1 minute de film.
Le texte doit être aligné à gauche, et non justifié. Le
plus simple est d’observer l’exemple ci-dessous.
ASTRID
Didascalie
Ah Martin ! J’arrive à temps ?
MISE EN FORME 23
MARTIN (opinant)
Dialogue
Il n’a pas bougé, Madame.
MARTIN
Il y a un code de sécurité. Mais ce
n’est pas tout.
ASTRID (choquée)
Je boirais bien un cognac.
MISE EN FORME 24
Ils comportent la position de la caméra (intérieur ou
extérieur), le lieu de l’action et son moment (jour ou nuit).
Par convention, on écrit INT pour intérieur ou EXT
pour extérieur. Si une scène intègre des positions de
caméra à la fois à l’intérieur et à l’extérieur, on peut indi-
quer dans l’intitulé INT – EXT. Ce sera le cas par exem-
ple si un personnage ouvre sa porte pour discuter avec
le facteur resté à l’extérieur.
Si une action se déroule dans une chambre, mais
qu’elle doit être filmée du point de vue d’une caméra
placée dans la rue, l’intitulé doit indiquer EXT… Quitte à
préciser le point de vue en didascalie.
Ne pas numéroter les scènes, ce n’est utile que lors
de la préproduction, quand on prépare le tournage des
plans du film11.
11. En cherchant des exemples sur Internet, vous pouvez tomber sur des
scénarios en anglais avec des scènes numérotées. Attention, c’est un piège.
Les Anglo-saxons distinguent le speculative script, SPEC SCRIPT, que nous
appelons continuité dialoguée, du shooting script que nous appelons décou-
page technique.
12. On définit classiquement une scène par son unité de lieu et de temps.
13. Story (Robert MCKEE – 2000).
14. La Dramaturgie (Yves LAVANDIER – 1994).
MISE EN FORME 25
Dans une séquence, les événements se déroulent en
continuité temporelle dans plusieurs lieux. Par exemple,
une poursuite, un combat, une exploration. La notion de
séquence peut servir quand on travaille à la structuration
des grandes parties de l’histoire et à leur équilibre.
Pour une scène se déroulant dans un espace large,
on peut utiliser des sous-titres de scène (en majuscule
également) précisant la partie du décor utilisée.
DERRIERE LE COMPTOIR
SOUS LA TABLE
DEVANT LA PORTE DE LA CUISINE
b. Les didascalies
En italique, elles décrivent en langage clair (non tech-
nique) ce que le spectateur voit et entend, en temps réel.
Le texte est obligatoirement rédigé au présent de l’indi-
catif.
Évitez absolument les références à l’intériorité des
personnages (pensées, intentions, souvenir) : elles ne
pourront pas être filmées.
Bannissez les mots « car, donc, pour, parce que »,
les verbes « penser, comprendre, croire, décider, deviner,
imaginer, espérer, craindre, inquiéter »…
Si votre personnage remplit un arrosoir, écrivez : « X
remplit un arrosoir », et surtout pas : « X remplit un arro-
soir, inquiet pour ses plantes jaunissantes et décidé à
en prendre soin ». Tout ce qui est d’ordre causal, comme
les motivations des personnages, devrait se déduire de
l’action perçue par le spectateur. La didascalie doit abso-
lument s’en tenir à cela, uniquement au perceptible
(images et sons au cinéma).
Évitez de commencer vos phrases par On. Il est
implicite que la didascalie contient uniquement ce qui
MISE EN FORME 26
se voit ou s’entend. On voit le personnage ouvrir la porte
doit être remplacé par le personnage ouvre la porte, plus
concis et direct.
La pratique a conduit les scénaristes professionnels à
donner en didascalie diverses indications précisant les
types de transition. On peut les mentionner en majuscules
alignées à droite, par exemple comme ceci:
CUT TO
(passage sans transition de la dernière image d’une scène
à la première image de la scène suivante)
OUVERTURE AU NOIR
(l’image apparaît progressivement à partir d’un écran noir)
FERMETURE AU NOIR
(l’image s’assombrit progressivement jusqu’à devenir noire)
DEBUT GENERIQUE
(incrustations successives des noms des techniciens et des acteurs)
FIN GENERIQUE
FONDU ENCHAINE
(les dernières images du plan de la scène précédente
se mêlent aux premières images de la scène suivante)
FERMETURE À L’IRIS
(le champ de l’image se réduit à un cercle de plus en plus petit
entourant un personnage)
MISE EN FORME 27
En général, il ne faut pas mentionner dans le scéna-
rio les placements des caméras ou les valeurs de plan,
qui relèvent du découpage technique (shooting script)15.
En revanche, il est possible de suggérer un découpage
par la didascalie.
c. Les dialogues
c1 . Voix IN, OFF, OVER
Il n’est pas obligatoire d’avoir des dialogues dans un
récit. De plus, le terme englobe toutes les voix entendues
par le spectateur, même si une seule personne parle.
On distingue les voix dont la source est dans le
champ (IN), de celles dont la source est hors-champ
(OFF) ou ajoutée au montage (OVER). Par défaut, tout
dialogue est IN.
Une voix sortant d’un combiné téléphonique est IN si
le combiné est visible dans l’image, OFF s’il est hors-champ.
MISE EN FORME 28
Les pensées des personnages et les voix de narration
sont toujours OVER.
Pour ne pas se tromper, entre OFF et OVER, il suffit
de se demander si les autres personnes présentes à
l’image peuvent entendre ce qui est dit.
Si la réponse est oui, la source est hors-champ dans
la scène, donc OFF. Sinon, la source est extérieure à la
scène (extradiégétique16), donc la voie est OVER.
Les dialogues peuvent aussi comporter des préci-
sions entre parenthèses, qui sont de fait des didascalies,
mais dont la brièveté ne justifie pas une pleine ligne.
BOB (hésitant)
De la bière Suisse ?
(il goûte, grimace)
Pas si mal.
BOB
Paix sur Terre (SHLAK), aux hommes
de bonne volonté (SHLAK), et les
autres (SHLAK), je pense pouvoir les
convaincre.
16. Diégèse : « Tout ce qui est censé se passer, selon la fiction que présente
le film ; tout ce que cette fiction impliquerait si on la supposait vraie. »
Vocabulaire d’esthétique (Étienne SOURIAU – 1990). Par extension, on qualifie
de diégétique ce qui fait partie de l’univers du récit, et d’extradiégétique ce
qui lui est extérieur, comme par exemple une musique d’accompagnement
ou un narrateur extérieur au récit.
MISE EN FORME 29
c2 . Voix de narration
Si votre récit comporte un narrateur, vous pouvez
l’indiquer tout simplement ainsi :
NARRATEUR (OVER)
Voici l’histoire d’un petit garçon
bien ordinaire, appelé Charlie
Bucket.
17. Oompa-Loompas : peuple fictif inventé par Roald Dahl dans le roman
Charlie et la chocolaterie (1964). Engagés par Willy Wonka (Johnny Depp)
pour travailler dans sa chocolaterie, ils sont tous incarnés dans le film de
Tim BURTON par un seul et même acteur.
MISE EN FORME 30
INT/MAISON MICHEL — EXT/VOITURE JACQUES/JOUR
Michel et Jacques parlent au téléphone.
MICHEL
Je suis au point de rendez-vous.
JACQUES
Parfait. Tu es sûr que personne ne
t’a suivi ?
MICHEL
Non, non, t’inquiète.
MISE EN FORME 31
4. La note d’intention
C’est un texte très personnel, qui vous donne la pos-
sibilité de vous exprimer avec une relative liberté. Vous
pouvez y utiliser le « Je », ainsi que tous les mots bannis
de la didascalie. Il s’agit d’expliquer votre démarche et
votre projet. Le but est de convaincre un producteur, ou
un éditeur, de la capacité de votre récit à toucher un public.
C’est la base fondamentale pour lancer toute pro-
duction.
Pour que votre scénario soit retenu, des producteurs
doivent estimer que votre projet justifie d’importants
investissements humains et matériels. Vous allez expli-
quer pourquoi vous avez imaginé ce récit, à qui il
s’adresse, quels thèmes vous abordez, avec quels points
de vue… et surtout à quelles fins.
Vous devez préciser le type d’émotions que vous sou-
haitez créer, et comment vous allez vous y prendre pour
les concrétiser à partir du medium et du format choisi.
Les mots-clés (que vous devez avoir en tête, mais
pas nécessairement écrire) sont l’originalité, l’universa-
lité, la sincérité et l’engagement.
Nous reviendrons plus en détail sur ces différents
éléments dans le chapitre suivant.
5. La note de réalisation
Depuis quelques années, plusieurs sociétés deman-
dent une note de réalisation, distincte de la note d’in-
tention.
Il s’agit d’expliquer sur un plan technique les moyens
envisagés pour réaliser le film.
En principe, ces éléments devraient être déjà abor-
dés dans la note d’intention, mais pour les chargés de
MISE EN FORME 32
production et les techniciens appelés à travailler sur
votre scénario, il est effectivement pratique d’avoir un
document plus spécifique, plus succinct, exposant com-
ment on va s’y prendre sans détailler le pourquoi.
On y précise dans quel contexte on envisage de tour-
ner; quels décors, quel matériel de prise de vue, d’éclairage,
de captage de son, le casting si jamais un(e) acteur(trice)
bankable18 a manifesté de l’intérêt pour votre projet.
Ces questions sont parmi les premières que l’on doit
se poser lorsqu’on démarre un travail d’écriture. On
conseille même parfois aux auteurs de commencer par
rédiger une première note (quitte à la réécrire plus tard)
pour organiser leurs idées et mieux cerner leur sujet.
MISE EN FORME 33
Mieux vaut s’y entraîner. Si vous êtes à l’aise et mon-
trez une parfaite connaissance de votre scénario et de
ses ressorts, ce sera un plus indéniable.
Mais pour en arriver là, vous devez d’abord écrire.
7. Les annexes
Si votre scénario concerne un univers particulier sur
le plan visuel, vous avez tout intérêt à ajouter des images
en annexe.
• Études préparatoires des décors, et design des per-
sonnages pour un film d’animation.
• Schémas, plans ou photos de véhicules particu-
lièrement importants (voiture, camion, paquebot,
voilier, sous-marin, vaisseau spatial, etc.).
• Panoramas des lieux de tournage pressentis (ville,
montagne, désert, fonds marins, etc.).
• Études ou images de références pour les costumes
(films d’époque, de science-fiction ou fantas-
tiques).
• Essais techniques pour un effet particulier (pers-
pective faussée, maquillages, accessoires).
Exercice 1
Visionnez plusieurs fois la première scène d’un
film inconnu. Rédigez, en respectant toutes les
règles de mise en forme, la continuité dialoguée
correspondant à ce que vous avez vu et entendu.
MISE EN FORME 34
Exercice 2
Écrivez une scène d’une page, dans laquelle un
personnage agit et discute, tout en pensant à autre
chose. Indiquez ses pensées par une VOIX OVER.
Exercice 3
Écrivez deux scènes, en montage parallèle, l’une
montrant un personnage occupé à bricoler bruyam-
ment chez lui, l’autre montrant un autre person-
nage, en train de regarder un film d’horreur, et qui
panique à chaque fois qu’un des sons du voisin bri-
coleur se superpose à ceux du film qu’il regarde.
Et maintenant, voulez-vous :
aborder quelques-uns
fi Cliquez ici
des outils du scénariste ?
MISE EN FORME 35
Rédiger sa
note d’intention
PIÈGES À ÉVITER / FONCTION DE LA NOTE D’INTENTION /
ÉLÉMENTS TECHNIQUES OBLIGATOIRES /
QUI, QUOI, COMMENT, OÙ, POURQUOI ? /
SIGNIFICATION / STYLE / POINT DE VUE
21. Sous-texte : dialogue pensé mais non dit, suggéré par une situation ou
une périphrase. Un personnage dit une chose, mais nous devinons par le
contexte qu'il a autre chose en tête. Cliquez ici.
Exercice 1
Imaginez que vous êtes metteur en scène. Rédigez
en une page, et en une heure maximum, ce que
pouvait être la note d’intention d’un film que vous
aimez.
Pensez bien que cette note est sensée être rédigée
avant la réalisation du film.
Exercice 2
La prochaine fois que vous découvrez un film, pre-
nez quelques notes et donnez-vous une heure
pour réaliser le même exercice.
Exercice 3
Rédiger un court récit en 15 lignes, mettant en
scène deux ou trois personnages. À partir du récit
proposé, expliquez ce que vous pourriez en faire
en tant qu’auteur et rédigez une note d’intention
d’une page du film que vous imaginez (ou BD, ou
pièce de théâtre).
la posture schizophrénique
fi Cliquez ici
de l’auteur ?
l’importance des
fi Cliquez ici
valeurs morales d’un récit ?
Maintenir la suspension
Maintenir la suspension de l’incrédulité sur la durée
d’un film est essentiel.
En effet, vous allez devoir sans cesse ajouter des élé-
ments au récit : continuer la caractérisation des person-
nages, révéler de plus en plus de choses sur l’univers, et
cela sans jamais vous contredire ni tricher avec vos pro-
pres règles, sous peine de rompre le charme.
Le spectateur attend de l’auteur qu’il reste toujours
vraisemblable, c’est-à-dire qu’il lui rende compréhensi-
ble et prévisible l’univers du récit.
Les mêmes causes doivent produire les mêmes
effets, qu’il s’agisse de gadgets futuristes ou de pouvoirs
magiques. Même si les codes sociaux de votre univers
diffèrent de ceux du monde réel, ils doivent amener des
situations comparables, générer des émotions humaines
identifiables suscitant l’empathie.
La rupture assumée
À l’inverse, un auteur peut aussi assumer de ne pas
être crédible et d’en faire un jeu avec son spectateur. Il y
a un public pour l’humour non-sens, les films outrageu-
sement incohérents et les récits tellement contradic-
toires qu’y chercher un sens s’avère presque impossible,
voire inutile.
Certains deviennent même parfois des films « cultes ».
Les fers de lance de ce mouvement furent les Monty
Python29.
Citons Sacré Graal de Terry Jones et Terry Gilliam
(1975), mais aussi La Vie de Brian (1979) et Monty Python,
le sens de la vie (1983).
Ce type de narration est à la dramaturgie ce que le
clown est au théâtre : une forme extrême, décalée, appa-
remment hors-codes… alors qu’en fait la violation des
règles crée en soi un autre système de référence.
Les clowns, comme les bouffons médiévaux, ont
toujours eu une place importante dans la société, juste-
ment parce qu’ils permettent, le temps d’un spectacle,
de ne pas prendre le monde au sérieux, et donc de le
considérer avec distance.
Le nanar
Il peut aussi arriver qu’une œuvre soit ratée au point
de devenir « culte ».
Pour certains fans, un réel plaisir peut naître du
visionnage partagé de ce type de films. Une visite sur
http://nanarland.com vous donnera un aperçu de ce que
peut donner une complète rupture, généralement non
assumée, de la suspension de l’incrédulité.
Exercice 1
Repensez au dernier film ou à la dernière BD que
vous avez le moins aimé, un récit dans lequel vous
n’êtes pas entré. Identifiez les éléments de carac-
térisation de l’univers et des personnages qui vous
ont repoussé, tenu hors du récit. Quels change-
ments seraient nécessaires à votre avis ?
Exercice 2
Voyez ou revoyez Raiponce de Nathan Greno et
Byron Howard.
Identifiez, dans les cinq premières minutes du film,
l’ordre d’installation des éléments fantastiques du
récit. Listez-les, puis classez-les du plus extraor-
dinaire au moins extraordinaire. Comparez avec
la chronologie d’exposition.
Construire la confiance
Tout univers de fiction s’appuie sur un subtil
mélange de règles issues du monde réel, et d’autres
règles propres à l’univers du récit.
Ces règles, c’est vous, l’auteur, qui les établissez au
fur et à mesure, installant petit à petit une connivence
avec le spectateur. Cette connivence est fondée sur la
confiance, qui se développe uniquement sur la base des
Changer de focalisation
On peut aussi jouer de plusieurs points de vue. C’est
un moyen de faire passer le spectateur d’une émotion à
une autre, pour créer des contrastes émotionnels, par-
ticipant au rythme de la narration.
Le passage d’un point de vue à un autre peut se faire
de plusieurs manières :
• Par montage parallèle, on alternera d’une scène à
l’autre les protagonistes et les lieux.
• Par de courts inserts type flashs37, on peut partager
avec le spectateur le ressenti d’un personnage par-
ticulier à un moment donné.
• Par la construction d’intrigues secondaires38
concernant une partie des personnages.
Exercice 2
Voyez ou revoyez Reservoir Dogs (Quentin Taran-
tino – 1992). Identifiez, pour chaque séquence du
film, le type de focalisation choisi et les effets que
ce choix permet de produire sur le spectateur.
Exercice 3
Même consigne que l’exercice précédent pour une
autre œuvre de votre choix : livre, BD, film, épisode
de série, court-métrage…
Exercice 4
Choisissez un de vos propres scénarios et cherchez
ce que des changements de focalisation pourraient
permettre d’installer, d’exploiter ou de résoudre.
LA STRUCTURE TERNAIRE 67
des actions. C’est pourquoi je propose d’appeler cette
première partie installation.
Point très important, le spectateur doit être en
mesure de comprendre, par cette installation, qui est le
protagoniste41, quel est son problème et quel est son but.
De plus, il doit être en mesure de prendre parti pour
ou contre le protagoniste, c’est-à-dire que l’installation
doit poser des enjeux amenant une implication émo-
tionnelle de sa part. Pour y parvenir, le meilleur moyen
est de créer une situation de conflit42 ou de perspective
de conflit.
Cela implique que dès l’exposition, il faut aussi ins-
taller des obstacles et des adversaires. La caractérisation
des personnages et de l’univers du récit43 fait implicite-
ment partie de ce processus.
On doit également y placer des implants : ce sont
des faits, des accessoires ou des personnages, que le
spectateur s’attend à voir exploités dans la suite du récit.
Cela peut être n’importe quoi : un prospectus, une
épée, un bijou, un walkman, un homme en noir44…
Si l’implant ne sert à rien, il s’agit d’un faux implant.
On les utilise pour distraire l’attention du spectateur et
éviter qu’un récit soit trop prévisible.
Plus important, vous devez installer un incident
déclencheur.
LA STRUCTURE TERNAIRE 68
Incident déclencheur
C’est un événement (ou un enchaînement d’événe-
ments) conduisant vos personnages à entrer en action
de façon irrévocable (passage à l’acte 2).
Pour certains auteurs, l’incident déclencheur est le
premier événement qui perturbe la situation initiale et
pousse de fil en aiguille le protagoniste à se mettre en
action. Pour d’autres, c’est l’événement précédant
immédiatement sa décision. En quelque sorte la goutte
qui fait déborder le vase.
Concrètement, cet incident bouleverse un équilibre
initial, pousse le personnage à la rupture, et par consé-
quent vers l’étape suivante de son cheminement.
C’est un fait simple en lui-même mais qui, s’ajoutant
à tous les autres, achève de convaincre le personnage.
Contraint et forcé, il doit aller de l’avant alors que jusque
là, il se contentait de demi-mesures.
Pour simplifier, disons que le déclencheur est l’évé-
nement ou l’enchaînement d’événements qui propulse
le protagoniste sur le chemin des épreuves.
Le déclencheur ne doit pas être confondu avec la char-
nière dramatique vers l’acte 2, dont il est la préparation.
Classiquement, le déclencheur bouleverse une situa-
tion initiale stable45 et crée un déséquilibre. L’incident
déclencheur est souvent conflictuel, mais ce n’est pas
obligatoire. Il suffit qu’il soit porteur d’une promesse de
conflit pour le protagoniste.
Si le récit comporte plusieurs protagonistes, on peut
considérer un déclencheur distinct pour chacun, mais
ils doivent être connectés d’une façon ou d’une autre.
45. Stable ne veut pas dire confortable. Un personnage peut par exemple
se trouver dans le couloir de la mort dans l’attente de son exécution. C’est
le cas dans La Ligne verte (Frank DARABONT – 1999).
LA STRUCTURE TERNAIRE 69
Une autre confusion à éviter : celle avec le fantôme
(ghost)46. Certains événements trouvent leur racine dans
un fait passé, mais le déclencheur, lui, intervient dans le
temps même du récit.
• Dans Bienvenue chez les Ch’tis (Danny Boon –
2008), le protagoniste Philippe Abrams (Kad
Merad) voit sa mutation sur la côte d’Azur refusée.
C’est l’incident déclencheur. Abrams tente ensuite
de se faire passer pour un handicapé, se fait pren-
dre et sanctionner par une mutation dans le Nord
– il s’agit de la charnière dramatique vers l’acte 2.
• Dans Rain Man (Barry Levinson – 1988), nous finis-
sons par comprendre que toute l’histoire de Charlie
(Tom Cruise) et Raymond (Dustin Hoffman) s’est
nouée pendant leur enfance. Ce qui s’est passé a
conduit à l’internement de Raymond, Charlie
oubliant même qu’il avait un frère. C’est le fantôme.
Mais dans la narration, le déclencheur est la mort
du père. L’importance de l’événement est magni-
fiée par le demi-tour effectué sur la route par Char-
lie lorsqu’il apprend la nouvelle.
• Dans La Guerre des étoiles (George Lucas – 1977),
récit à multiples protagonistes, le premier élément
déclencheur est la capture du vaisseau de la prin-
cesse Leia (Carrie Fisher). Les protagonistes locaux
au début sont les deux robots, D2-R2 et Z-6PO.
Ensuite, le protagoniste est Luke (Mark Hamill), et
son incident déclencheur, c’est le message confié
par Leia à D2-R2. Le vol des plans de l’étoile noire
appartient au fantôme.
46. Le fantôme, c’est la vie des personnages avant que le récit ne commence.
Cliquez ici.
LA STRUCTURE TERNAIRE 70
cela soit fait assez rapidement pour ne pas lasser le spec-
tateur.
On ne doit donc pas répondre à toutes ces nécessités
séparément les unes des autres : il faut au contraire les
intégrer et les traiter autant que possible de façon conco-
mitante. C’est pourquoi le début d’un récit requiert fré-
quemment plusieurs réécritures.
LA STRUCTURE TERNAIRE 71
Ces moments de renversement sont appelés char-
nières (ou pivots) dramatiques47.
Ce sont des scènes « sans retour », c’est-à-dire mar-
quées par des actions irréversibles. Elles sont très impor-
tantes pour relancer un récit, surprendre le spectateur
et maintenir son attention.
LA STRUCTURE TERNAIRE 72
On peut l’obtenir par l’évolution des personnages, mais
ce n’est pas obligatoire. C’est parfois la résistance d’un
personnage au changement qui fait la saveur d’une réso-
lution. Par exemple, à la fin du Retour du Jedi, l’empereur
Palpatine (Ian McDiarmid) échoue à transformer Luke Sky-
walker (Mark Hamill) en serviteur du côté obscur.
Chronologie et narration
On pourrait croire que certains films ne respectent
pas le schéma ternaire.
LA STRUCTURE TERNAIRE 73
Citons Memento (Christopher Nolan – 2000) dont la
narration se fait à rebours du déroulement du temps.
Ainsi, nous partageons ce que ressent le personnage
principal (Guy Pearce), atteint d’un trouble de la mémoire
immédiate.
Mais l’analyse de cette narration non-chronologique
fait tout de même émerger des actes et des charnières
dramatiques.
Cela veut dire que la chronologie de la narration n’est
pas celle des faits.
LA STRUCTURE TERNAIRE 74
de l’épave du Titanic, par exemple, est l’épilogue de
l’histoire de ce navire. Mais pour James Cameron, c’est
une partie importante de l’exposition de son film (Tita-
nic – 1997).
Structures imbriquées
Chaque partie ou sous-partie du récit peut être consi-
dérée par l’auteur comme une structure en elle-même,
avec à chaque fois un début, un milieu et une fin.
Au sein de chaque séquence, il est possible d’utiliser
des éléments installés dans une séquence précédente, ou
d’installer des éléments destinés aux séquences suivantes.
Ce n’est pourtant pas simplement comme si les
structures s’emboîtaient, à la façon de poupées russes.
En fait c’est plutôt comme une tapisserie : des fils s’en-
trecroisent, certains s’arrêtent, d’autres s’ajoutent pour
faire évoluer le motif, la couleur, le rythme52.
LA STRUCTURE TERNAIRE 75
Là réside la force, mais aussi toute la difficulté de
mise en œuvre du schéma ternaire : on doit le travailler
à différentes échelles du récit tout en maintenant la
cohérence de chaque sous-structure avec les autres.
En fait, cette structuration, si elle est nécessaire, n’est
ni suffisante ni exclusive des autres éléments constituant
le récit.
Le plus important, c’est que tous ces éléments ins-
tallés soient connectés entre eux, et entrent en jeu dans
l’exploitation et surtout dans la résolution. C’est pour
cela que les faits doivent être organisés en système.
Non seulement le récit doit respecter une logique
de narration, qui est celle de l’auteur, mais en plus tout
le déroulement doit avoir une logique interne inatta-
quable, au moins en apparence.
Exercice 1
Entraînez-vous à repérer les trois actes de la struc-
ture ternaire en visionnant des courts-métrages,
en lisant des histoires ou en repensant à vos œuvres
préférées.
LA STRUCTURE TERNAIRE 76
Exercice 2
Écrivez une scène installant, exploitant et résol-
vant la situation suivante : un serveur de restaurant
mélange les commandes de plusieurs de ses
clients à des tables différentes. Faites en sorte qu’à
la fin, ils retrouvent leurs plats et soient tous assis
à la même table.
Exercice 3
Écrivez un récit avec deux personnages et les trois
temps suivants : le coup de foudre, les conflits de
la vie commune et (au choix) une rupture ou une
réconciliation.
Et maintenant, voulez-vous :
LA STRUCTURE TERNAIRE 77
Système des faits
et milking
UNITÉ D’ACTION / LE CAS DE RETOUR VERS LE FUTUR /
EXPLOITATION ET MILKING / LE TOPPER, MILKING ULTIME
Unité d’action
Renversons la proposition positivement: pour l’au-
teur, il s’agit d’intégrer chaque scène de son récit dans un
enchaînement cohérent de causes et d’effets, d’actions
Exploitation et milking
Une astuce merveilleuse pour relier au maximum
les éléments d’un récit consiste à réutiliser autant que
possible les faits précédemment installés.
C’est le milking (du verbe to milk : traire, en anglais).
Exercice 1
Dans Retour vers le futur, l’essentiel du récit se
déroule en 1955, lorsque Lorraine tombe amou-
reuse de Marty sans savoir qu’il est son fils. Cher-
chez comment sont installés les éléments de cette
intrigue secondaire dans l’exposition du film, et
en particulier comment des situations conflic-
tuelles nous poussent à nous y intéresser.
Exercice 3
Écrire deux scènes : dans la première, installer un
objet (par exemple une épée, un briquet, un télé-
phone…), une information (passage d’une comète,
résultat du loto, remise du prix Nobel…), ainsi
qu’un conflit lié à l’objet et à l’information.
Dans une seconde scène, exploitez ce conflit sans
le résoudre, en faisant du milking avec les éléments
installés. La première scène doit faire au maximum
2 pages, la seconde peut en faire 3 ou 4.
comment articuler
fi Cliquez ici
différentes parties d’un récit ?
Commencer par la fin
Des années après un drame, ou même après la mort
du héros, des personnages fouillent un site archéolo-
gique, évoquent le passé ou questionnent leurs grands-
parents.
Qu’un témoin raconte une horrible vérité cachée,
qu’une lettre la révèle ou qu’une minutieuse enquête
61. Insert : plan inséré au montage dans une scène, montrant un autre lieu
ou un autre moment du récit.
Exercice 2
Parmi les films que vous n’appréciez pas, choisis-
sez-en un dont le point d’entrée vous paraît mal
choisi. Proposez au moins deux autres possibilités
de point d’entrée, avec les avantages qu’elles pro-
curent pour le reste de la structure (installation
d’ironie dramatique, caractérisation, enjeux).
Exercice 3
Votre producteur préféré vient de vous comman-
der un scénario sur la vie d’Albert Einstein. Propo-
sez au moins trois points d’entrée différents.
Choix et renoncement
Avoir à choisir entre partir à la pêche et rester chez
soi ne sera pas une charnière dramatique… sauf si l’action
comporte un enjeu véritable. Si votre protagoniste doit
renoncer à quelque chose pour y aller, avec un risque de
ne jamais le retrouver, et qu’il est conscient de ce risque,
alors vous aurez bel et bien une charnière dramatique.
Le spectateur devra en outre connaître cet enjeu avant
que le protagoniste ne prenne sa décision, en partager le
poids pour se sentir un minimum impliqué.
Préparation et décision
Accomplir une action irréversible ne peut jamais être
anodin. Quitter sa femme, braquer une banque, tuer
quelqu’un, partir pour Mars, faire le tour du monde, ris-
quer sa vie pour une cause… Ces actes relèvent de déci-
sions qui sont l’aboutissement d’un parcours personnel.
Le fonctionnement et la crédibilité de vos charnières
dépendront essentiellement de votre capacité à faire
partager les enjeux de ce parcours à votre spectateur.
Pour travailler ce parcours, n’oubliez jamais que vos
personnages doivent être perçus comme sensibles,
réflexifs et dotés de libre arbitre.
Même si ce sont des animaux, des objets ou des
véhicules, visualisez-les comme de vrais êtres capables
de voir, de sentir, d’entendre, de souffrir et d’agir.
Si vos personnages ne sont pas humains, il faudra
les anthropomorphiser, c’est-à-dire leur donner des
traits humains, au moins sur le plan psychologique.
Appuyez-vous sur les trois particularités qui distin-
guent l’homme de la plupart des animaux : la mémoire
(l’apprentissage), l’émotion (le ressenti) et la cognition
(la pensée).
Mémoire, émotions et pensées forment le socle de
tout travail sur l’évolution des personnages et les char-
nières dramatiques qu’ils traversent.
L’enchaînement des faits et leur logique permettent
au spectateur de mémoriser les règles propres à l’univers
Mouvement, tension
et rupture dramatique
On utilise couramment les termes de charnière ou
de pivot avec l’idée d’un récit articulé autour de ces élé-
ments. L’image évoque le côté mécanique du scénario,
mais ce dernier doit aussi être organique : autrement dit,
pousser les personnages au bout de leurs limites phy-
siques et psychologiques.
Le désir met le personnage en action (mouvement),
les obstacles et les conflits le mettent sous une pression
qui s’accumule jusqu’à un point de rupture, marqué par
une décision/action radicale : la charnière dramatique.
Pour ma part, j’insiste sur le fait qu’il s’agit d’une
construction par étapes successives, s’enchaînant logi-
quement.
Évidemment il ne s’agit pas de soumettre la pro-
gression dramatique à la seule logique cartésienne. Vos
personnages peuvent avoir leurs coups de sang.
L’essentiel reste l’enchaînement cohérent des faits
et des actions.
Charnière émotionnelle
Quand la charnière dramatique a un enjeu émotion-
nel, l’implication du spectateur est décuplée. Plus le per-
sonnage aura de difficulté à prendre une décision (choix
moral/choix affectif), plus le spectateur sera touché.
Il se sentira fier si le protagoniste a été courageux,
honteux s’il a été lâche.
On voudra le voir réussir s’il a souffert, et le voir
échouer s’il a été méprisable. Bref, on espérera une juste
récompense pour ce qu’il aura accompli.
62. Nous reviendrons sur cette question du rythme narratif dans le prochain
chapitre.
Exercice 2
Dans le film Da Vinci Code (Ron Howard – 2006),
intéressez-vous aux charnières dramatiques impli-
quant le personnage de Sir Leigh Teabing (Ian
McKellen).
– Identifiez les incohérences entre la caractérisation
du personnage et les actions qu’il entreprend.
– Comment le scénariste aurait-il pu faire selon
vous pour rendre l’évolution de ce personnage
plus logique ?
Rythmer la structure
Construire le rythme d’un récit, c’est un travail à dif-
férentes échelles. L’échelle globale d’abord. On doit tra-
vailler sur les principales articulations du récit et leur
préparation.
Ensuite, s’occuper de l’enchaînement des scènes
proprement dites : en tenant compte de leur durée
moyenne, en faisant alterner des scènes de longueurs
différentes, et en travaillant par contraste les écarts de
durée entre scènes rapides et scènes plus lentes.
En même temps, il s’agit de doser la densité du
drama, c’est-à-dire la fréquence des effets drama-
tiques63, leur préparation (annonce), leur exploitation et
leur résolution (paiement).
Ne pas confondre la densité du drama avec la densité
des événements qui se déroulent. Une séquence peut
comporter beaucoup d’action physique mais peu d’effets
dramatiques. C’est une erreur très fréquente de croire
qu’un enchaînement très rapide d’actions donnera for-
cément un récit rythmé. Pour produire un bon effet de
rythme, on doit avoir posé de façon limpide des enjeux
très simples permettant de nombreux conflits, et sub-
séquemment de nombreuses émotions.
24 heures chrono
Cette série (crée par Robert Cochran et Joel Surnow)
est construite pour donner la sensation du temps réel.
Les auteurs y parviennent en alternant plusieurs fils nar-
ratifs, nous faisant partager les situations et les actions
de différents personnages, en plusieurs lieux, enchaînant
action, poursuite, dialogue, exploration, interrogatoire,
prises de décision, échecs, réussites, vitesse, lenteur, etc.
Il y a de fait des ellipses temporelles dans 24 heures
chrono, mais elles sont presque invisibles, nous avons
toujours l’impression d’être là où les choses se déroulent.
Ces fils narratifs permettent aussi aux scénaristes
d’installer des intrigues secondaires : on découvre avant
Jack Bauer (Kiefer Sutherland) ce que font ses ennemis,
La narration lente
Il existe aussi quelques œuvres remarquables dont la
narration impose au spectateur une forme de lenteur. Un
rythme lent est toujours une prise de risque, mais peut
fonctionner même sans qu’un enjeu net ne soit posé.
Alternance et transformations
Les problèmes de rythme narratif commencent
lorsqu’on néglige l’alternance émotionnelle au sein des
scènes et dans leur succession.
Selon Robert McKee68, les personnages doivent pas-
ser par des transformations émotionnelles : du rire aux
larmes, des larmes à la peur, de la peur à l’espoir, de
l’espoir à l’angoisse, etc.
Un personnage principal qui reste du début à la fin
du récit sans jamais vivre de transformation émotionnelle
devient très rapidement ennuyeux. C’est l’une des prin-
cipales faiblesses de La Menace fantôme (George Lucas
– 1999) dont le scénario, entièrement tourné vers le spec-
taculaire, néglige de nous faire partager les basculements
psychologiques des personnages.
Exercice 1
Intéressez-vous de près aux cinq à dix premières
minutes de votre film préféré. Identifiez chacune
des transformations émotionnelles vécues par les
personnages, puis relevez la manière dont ces
transformations sont préparées, exploitées et réso-
lues. Notez la durée de chaque séquence et le
timing des enchaînements.
Exercice 3
Écrivez une scène dans laquelle le protagoniste
passe successivement et de façon crédible par les
émotions suivantes : l’espoir, la haine, le désir.
John Truby73 lui aussi le dit bien : les désirs des per-
sonnages définissent les enjeux du récit. Désirs de jouis-
sance, de domination, de possession, de reconnaissance,
d’amour, d’immortalité, de mort…
72. Tanha peut aussi se traduire par soif, avidité, désir, convoitise.
73. Dans Anatomie du scénario (2010).
74. La formulation proposée ici des quatre vérités est une synthèse de deux
traductions du Mahavagga : celle d’Alexandra David-Néel dans Le Boud-
dhisme du Bouddha (édition du Rocher – 1989), et celle de Rahula Walpola
(L’Enseignement du Bouddha – 1961).
75. Le MacGuffin est expliqué par Alfred HITCHCOCK à François TRUFFAUT dans
leurs célèbres entretiens (Hitchcock/Truffaut – 1966).
76. NSA : National Security Agency. Organisme gouvernemental de la
Défense des États-Unis. C’est l’équivalent, toutes proportions gardées, de
la DGSI (ex-DST) française.
77. Extrait d’un entretien enregistré en 1993, publié en juin 1998 par
HK Magazine.
78. Jidai-geki : littéralement Histoire des temps anciens. Genre à part entière
au Japon. Il définit les films historiques en costumes, comme Les Sept
Samouraïs (Akira Kurosawa – 1954) ou Le Héros sacrilège (Kenji Mizoguchi
– 1955).
Attachement et identification
L’attachement aux personnages passe à la fois par
l’humanité de leurs émotions et par la cohérence de
Caractériser du début à la fin
Contrairement à une idée répandue, la caractérisa-
tion ne concerne pas uniquement la première partie du
récit. Elle s’étend sur toute sa durée et doit être envisagée
dans chaque scène.
La caractérisation continue permet de divulguer au
spectateur des indices de l’évolution82 (ou de la non-
évolution) des personnages.
Le spectateur perçoit ainsi les transformations des
personnages, en même temps que s’affine sa connais-
sance de l’univers du récit.
Ainsi, à la fin de Tootsie (Sydney Pollack – 1982), le
protagoniste Michael Dorsey (Dustin Hoffman) se
retrouve pour la première fois sous son apparence mas-
culine devant Julie (Jessica Lange), qui quelques jours
avant le prenait encore pour une femme.
Il va se faire pardonner ses mensonges, mais surtout
montrer qu’il a changé, avec ce dialogue truculent :
MICHAEL
J’ai été mieux comme mec avec toi
en étant une femme, que je ne l’ai
jamais été avec une femme en étant
mec. Faut encore que j’arrive à
vivre ça sans robe.
Exercice 2
Choisissez trois œuvres que vous aimez, et traitant
d’un thème commun (enquête policière, histoire
d’amour, de fantômes, de morts-vivants, de sor-
ciers, d’extra-terrestres, etc.).
Identifiez, par rapport à ce thème, les choix spéci-
fiques opérés par les scénaristes dans chaque dié-
gèse.
Présentez votre analyse sous la forme d’un tableau
à double entrée indiquant les questions com-
munes liées au thème, et les réponses différentes
correspondant à chacun des trois récits.
MARTY McFLY
Vous voulez dire que j’aurais un
ticket avec ma mère ! ? !
Oh, dur, c’est pas le pied.
LEIA
Je crois que vous avez encore
beaucoup de choses à apprendre sur
les femmes.
Non-dit et sous-texte
Communiquer sans mot, ou au-delà des mots, fait
appel à l’implicite.
Une scène dans laquelle les personnages ne disent
rien pourra être parfaitement compréhensible par les
actions concrètes qui y sont menées.
Quand des faits contredisent des dialogues, vous
obtenez du sous-texte.
Il ouvre un secrétaire.
RAOUL
Je m’en vais lui faire une
ordonnance…
RAOUL
Et une sévère.
ROGER
Pourquoi ?
EVE
Je vous l’ai déjà dit, vous me
plaisez.
EVE
C’est interminable, une nuit
en train…
ROGER (dubitatif)
Oui…
EVE
Et je trouve assez ennuyeux le
livre que j’ai commencé.
Vous avez compris ?
ROGER
Heu… Je réfléchis…
Long silence.
ROGER (souriant)
Oui. Je suis certain d’avoir
compris.
83. Ce plan vient du film Sept ans de réflexion (Billy WILDER – 1955).
84. Filmé par Abraham ZAPRUDER à Dallas le 22 novembre 1963.
86. Ollie JOHNSTON et Frank THOMAS étaient deux animateurs vétérans des
studio Disney, auteurs du livre The Illusion of life, une référence pour les
animateurs du monde entier.
Icônes et clichés
Les grandes stars sont souvent des personnalités
positives, mais pas toujours. Lee Van Cleef, par exemple,
est devenu célèbre en jouant les méchants. De même,
les icônes humaines ne sont pas toujours positives. Gen-
gis Khan, Joseph Staline ou Adolph Hitler sont des icônes
aussi universellement connues que Dark Vador ou la
sorcière de Blanche Neige.
De nombreux signes iconiques ont une connotation
négative : le symbole de la radioactivité, la guillotine, le
Jolly Roger (aussi appelé pavillon noir), ou la tenue
blanche encapuchonnée du Ku Klux Klan.
Communication subliminale
Un message subliminal est un stimulus, visuel ou
auditif, trop faible pour être perçu consciemment, mais
suffisant pour impacter l’inconscient.
Le sujet est sulfureux, relevant historiquement du
vocabulaire publicitaire, associé à la propagande et à la
Exercice 1
Intéressez-vous au personnage du cheval Maximus
dans Raiponce (Nathan Greno et Byron Howard –
2010).
Comment communique-t-il avec les différents
humains qu’il côtoie au long du film ? Intéressez-
vous particulièrement à sa gestuelle lors de sa pre-
mière rencontre avec Raiponce. Quel autre animal
a pu inspirer les animateurs ?
Exercice 2
Au début de To Be or Not to Be (Ernst Lubitsch –
1942), Maria Tura (Carole Lombard) reçoit dans sa
loge le lieutenant Sobinski (Robert Stack). Leur dia-
logue comporte un sous-texte assez truculent que
je vous invite à analyser en détail.
Exercice 4
Relisez vos propres scénarios et cherchez à quels
endroits vous pourriez jouer davantage avec le
non-verbal, le sous-texte et le non-dit.
Et maintenant, voulez-vous :
Choix et transformation
Chaque étape de l’évolution d’un personnage devrait
correspondre à un véritable choix de sa part.
Pas un choix entre une bonne et une mauvaise chose,
mais un authentique dilemme : le choix doit induire un
renoncement net, sans retour en arrière possible.
• Le personnage doit choisir entre deux maux, par
exemple trahir ses parents ou la femme qu’il aime.
• Il doit choisir entre deux bonheurs, par exemple obte-
nir une promotion ou faire le voyage de ses rêves.
• Le choix remet en cause ses valeurs, si par exemple
il est pacifiste mais qu’un ennemi le menace d’une
arme mortelle.
Symboles et mythologie
Au-delà de cette cohérence, on peut aussi tenter de
donner à l’évolution des personnages une valeur sym-
bolique ou même mythologique. Le spectateur sentira
que votre récit le touche davantage même s’il ne sait
pas pourquoi.
• Le fait que Luke Skywalker devienne un chevalier
Jedi a une valeur dans l’univers de La Guerre des
étoiles. Le chevalier est un symbole qui fait écho
aux romans de chevalerie, à la spiritualité orientale
et aux contes de fée. Symboliquement, l’adoube-
ment final de Luke est un passage à l’âge adulte.
Son histoire renvoie aux grands récits initiatiques,
qui touchent le spectateur parce qu’il a vécu, vit
ou aimerait vivre ce type d’expérience.
Vie et transformation
Qu’est-ce que vivre, sinon traverser une multitude
d’expériences transformantes ? Nous commençons par
la naissance pour finir par la mort, et entre les deux,
nous pouvons appendre, grandir, désirer, lutter, aimer,
décider, renoncer, nous remettre en question, échouer,
réussir, etc.
L’évolution d’un personnage doit être inattendue,
mais pour être intéressante elle doit aussi renvoyer cha-
cun à un motif psychologique profond et signifiant dans
lequel il puisse se reconnaître.
Concrètement, plusieurs schémas peuvent guider le
scénariste lorsqu’il élabore les étapes de l’évolution d’un
91. Pour ARISTOTE (Poétique – 335 avant J.C.), [Le protagoniste] est un homme
qui n’a rien de supérieur par son mérite ou ses sentiments de justice, et qui
ne doit pas à sa perversité et à ses mauvais penchants le malheur qui le
frappe, mais plutôt à une erreur (ou faute, ou péché) qu'il commet pendant
qu’il est en pleine gloire et en pleine prospérité.
92. Le conseil est de Robert MCKEE (Story – 2000).
Le parcours du héros
de Joseph Campbell
1. Le Monde ordinaire : le héros, dans son milieu
ordinaire, est incomplet, imparfait. Il est guidé par ses
désirs, mais ne se rend pas compte que ce qu’il désire
n’est pas ce dont il a vraiment besoin. Il lui manque
quelque chose mais il ne voit pas clairement quoi (conflit
entre désir conscient et besoin inconscient).
Exercice 1
Voyez ou revoyez le film Intouchables (Olivier
Nakache et Éric Toledano – 2011). Repérez les prin-
cipales étapes de l’évolution du protagoniste.
Exercice 3
Relisez une de vos histoires et identifiez au moins
deux transformations de votre protagoniste. Pour-
riez-vous mieux les préparer et/ou mieux les dra-
matiser ?
utiliser un flash-back
fi Cliquez ici
pour impacter un personnage ?
LEIA
Seigneur Tarkin. Je ne suis pas
surprise de vous voir dans l’ombre
de Dark Vador. J’ai senti votre
odeur méphitique dès que je suis
montée à bord.
BELLOQ (condescendant)
Docteur Jones. Encore une fois vous
le voyez, il n’est rien que vous ne
possédiez dont je ne réussisse à
m’emparer. Et vous savez bien que je
ne renonce jamais.
Indy sort son arme. Les indiens Hovitos
le menacent de leurs arcs. Indy donne son
arme à Belloq.
BELLOQ
Vous avez mal choisi vos amis,
Jones, et cela va vous coûter cher,
très cher.
Belloq tend la main.
INDY (amer)
Dommage que les Hovitos ne vous
connaissent pas comme je vous
connais, Belloq !
Indy donne l’idole en or à Belloq.
Construire un fantôme
Le processus de création du fantôme est en réalité
bien plus complexe qu’il n’y paraît, car il ne s’agit pas
seulement de trouver deux ou trois idées : il faut sou-
vent explorer plusieurs voies et passer beaucoup de
temps pour enfin choisir celle qui offre les meilleures
possibilités.
Une option consiste à commencer par une trame
peu précise d’une quinzaine de lignes, et d’y revenir
régulièrement pour l’enrichir au fur et à mesure du déve-
loppement du récit.
Une autre méthode est de commencer par travailler
le climax du récit, pour déterminer les conflits majeurs,
de sorte qu’ensuite on puisse identifier plus clairement
ceux qui correspondent au temps de la narration et ceux
Exercice 2
Écrire une scène d’une page, avec deux person-
nages. Fantôme : ils ont été très proches, mais un
événement grave les a séparés, que chacun a vécu
très différemment.
Attention : ne révélez pas le passé, suggérez-le.
Exercice 3
Écrire une scène de deux pages : dans la conversa-
tion, nous devons comprendre, en même temps
que Bob, que Clara est sa fille mais qu’elle l’ignore.
Elle devine que quelque chose cloche.
Exercice 1
Voyez (ou revoyez) Un jour sans fin (Harold Ramis
– 1993). Listez l’installation, l’exploitation et la réso-
lution des conflits autour desquels se construit
l’histoire.
Pour vous aider à démarrer : un des premiers
conflits est installé lorsque Phil Connors (Bill Mur-
ray) apprend qu’il doit aller faire un reportage à
Punxsutawney.
Exercice 2
Choisissez votre film préféré et effectuez le même
travail d’analyse.
Y-a-t-il parfois des tensions provenant de pers-
pective de conflit, et non de conflits réels ?
Remarquez que l’installation de certains conflits
intervient alors que d’autres, déjà en cours d’ex-
ploitation, n’ont pas encore été résolus.
Exercice 2
Dans Les Évadés (Frank Darabont – 1994), Andy
Dufresne (Tim Robbins) est confronté à plusieurs
antagonistes. Faites-en l’inventaire. Identifiez la
caractérisation de chacun d’eux et la chronologie
de leurs entrées dans le récit.
Exercice 3
Albert, archéologue, arrive sur une île perdue
pourvu d’une carte indiquant l’emplacement d’un
trésor, près d’un site de nidification d’oiseaux
marins. Ses adversaires : le petit-fils du pirate ayant
enterré le coffre, un scientifique œuvrant à la pro-
tection des oiseaux et une habitante de l’île qui
veut chasser les intrus.
Utilisez ces éléments pour construire les person-
nages en développant leurs oppositions, puis éla-
borez la liste des conflits pouvant se succéder dans
une intrigue les faisant tous intervenir.
Différentes échelles
On peut faire fonctionner l’ironie dramatique à
l’échelle d’une scène, d’une suite de scènes, sur plusieurs
scènes dispersées, et dans certains cas sur toute la durée
d’un récit.
Victimes
Pour que ça marche, toute ironie dramatique doit
faire une ou plusieurs victimes : le moment où la vérité
qui leur était cachée est enfin révélée au grand jour
constitue une scène essentielle, quasi obligatoire.
David Bowman comprend en voyant son coéquipier
se faire tuer. Sugar comprend lorsque Joe, pourtant
déguisé en femme, ne résiste pas à l’envie de venir l’em-
brasser sur scène. Et Quaritch comprend en voyant l’ava-
tar de Jake Sully démolir les caméras d’un bulldozer.
Exercice 2
Choisissez un film, un livre, une BD, un manga ou
un jeu vidéo que vous connaissez et dans lequel
vous pensez trouver des ironies dramatiques. Repé-
rez-en trois, en précisant comment chacune est
installée, les principales exploitations qui en sont
faites et la manière dont chacune est résolue.
Exercice 3
Vérifiez dans vos propres scénarios si vous avez
implicitement utilisé des ironies dramatiques. Si
c’est le cas, félicitations !
Vérifiez maintenant comment elles fonctionnent,
comment elles s’enchaînent et (cerise sur le gâteau),
comment elles sont connectées.
Promesse de conflit
Autant l’installation d’une ironie dramatique peut
être discrète et passer inaperçue sur le moment, autant
une annonce doit être clairement posée et perçue
comme telle.
C’est l’équivalent de la promesse du magicien lorsqu’il
vous déclare qu’il va couper son assistante en deux ou
faire disparaître un lapin. Toute l’attention du spectateur
et toute son imagination sont concentrées et focalisées
par l’annonce, le poussant à chercher le truc, comprendre
Paiement direct
C’est un paiement immédiat, qui pourtant ne résout
pas l’ironie de la situation. C’est même un paiement qui
nous plonge dans l’inquiétude, car ce que Guido a
annoncé dans sa fausse traduction risque par la suite
d’être éventé.
Une scène peut ainsi être à la fois un paiement d’une
annonce précédente, tout en annonçant des paiements
ultérieurs. C’est le principe même de l’exploitation en
dramaturgie.
Effets de surprise
La mécanique de l’annonce-paiement peut aussi
permettre de préparer des effets de surprise. Le specta-
teur identifie une annonce, anticipe sur les paiements
possibles que cette annonce promet, et du coup ne voit
pas venir une exploitation tout à fait inattendue d’un
élément qui a été installé en même temps que l’annonce,
ou lors d’un paiement associé à cette annonce.
Le gros lot
C’est un paiement au-delà des attentes, après un
premier paiement déjà satisfaisant, constitué d’une
scène complète bien plus dense qu’un topper102.
À la fin de Braindead (Peter Jackson – 1992), a lieu
une séquence de carnage total. Lionel (Timothy Balme)
démembre les zombies qui encombrent son salon à
grands coups de tondeuse à gazon. On pense un moment
que tout est fini, tant nous sommes soulagés de voir la
bataille se terminer victorieusement pour les héros.
Sauf que toute cette violence nous a fait oublier
qu’un personnage important et dangereux manque à
l’appel pour que les problèmes de Lionel soient réso-
lus… jusqu’à sa petite phrase « Je n’ai pas vu maman »,
qui précède le grand final du film. Le carnage à la ton-
deuse à gazon n’était qu’une mise en bouche, un paie-
ment encore plus énorme nous attend.
Exercice 1
Repérez les annonces-paiements dans le scénario
des Dents de la mer (écrit par Peter Benchley).
Notez en particulier ce qui transforme l’horrible
mort de Quint (Robert Shaw) en paiement.
Exercice 2
Écrivez deux scènes séparées par une ellipse de
plusieurs jours. La première doit caractériser un
personnage exécrable et annoncer son intention
de commettre un meurtre. La seconde doit com-
porter un paiement sans que personne ne meure…
utiliser l’annonce-paiement
fi Cliquez ici
pour rythmer un récit ?
Pitching, développement,
notes préparatoires
Le pitch est un résumé de l’essentiel du récit en
quelques phrases, idéalement deux. Il faut parfois des
jours de réflexion et de tâtonnement avant de dégager
une idée centrale claire et originale, connectée à un
thème principal bien identifié.
La mise en forme du pitch, lorsqu’elle est remise à
plus tard au lieu d’être posée comme une donnée fon-
damentale d’un projet, peut in fine rendre caduque des
pans entiers d’un scénario déjà écrit.
Je recommande donc d’y travailler dès le début et
d’établir au minimum une première version des propo-
sitions dramatiques et thématiques de vos projets.
Scène-à-scène (traitement)
Il peut être intéressant (mais pas obligatoire), de
découper le récit en séquences, résumées en quelques
phrases, sans les dialogues.
En parallèle, gardez une trace de tout ce qui est spé-
cifique à l’univers de votre récit. Si vous écrivez du fan-
tastique, vous devez savoir comment fonctionne votre
fantastique. Si vous écrivez de la science-fiction, défi-
nissez avec soin ce que les sciences et techniques de
votre univers permettent de faire… ou de ne pas faire103.
Le séquencier (appelé aussi scène-à-scène, ou trai-
tement) donne une vue d’ensemble des mécanismes
mis en œuvre dans une narration : le point d’entrée
(appelé aussi accroche), les annonces, les paiements, la
préparation des effets, le rythme narratif, l’équilibre
action/dialogue/contemplation, etc.
Il permet aussi de visualiser plus facilement les
temps forts, les charnières dramatiques104 et les intrigues
secondaires105.
C’est également un document dont le format peut
intéresser un producteur. Un séquencier de vingt à trente
pages est plus rapide à lire qu’un scénario complet de
quatre-vingt-dix ou cent pages.
103. Voir la caractérisation de l’univers et des personnages d’un récit, cliquez ici.
104. Voir les charnières dramatiques, cliquez ici.
105. Voir les intrigues secondaires, cliquez ici.
Dualité fonctionnelle
de la continuité dialoguée
La continuité dialoguée est l’étape finale de mise en
forme du récit scénarisé.
Chaque geste, regard, bruit, parole, mouvement doit
avoir sa double justification ou disparaître.
Exercice 1
Partez d’un film que vous connaissez et établissez-
en le séquencier. Repérez ensuite dans ce séquen-
cier les charnières dramatiques, les annonces-paie-
ment, les préparations/exploitations/résolutions.
Exercice 2
Livrez-vous au même exercice sur le scénario d’un
film non tourné. Cherchez ensuite ce qui pourrait
améliorer ce scénario.
107. Cette série raconte le parcours d’un professeur de chimie, Walter White
(Bryan Cranston) atteint d’un cancer en phase terminale, qui décide de se
lancer dans la fabrication de drogue (la fameuse blue meth) pour assurer
la sécurité financière de sa famille. Il obtient l’aide d’un ancien élève, Jesse
Pinkman (Aaron Paul), dont les erreurs répétées compliquent systémati-
quement les plans de Walter, surtout dans les premières saisons.
Permis de tricher
Il est possible de jouer avec des effets inattendus
carrément invraisemblables, assumant, vis-à-vis du
spectateur, un complet décrochement narratif. C’est par-
fois ce que font les Monty Python109 dans leurs films.
Entre ces deux postures extrêmes (effets vraisem-
blables/invraisemblables) peut aussi exister une certaine
ambiguïté, pour faire osciller le spectateur entre la sidé-
ration et le doute. Tim Burton le fait souvent, par exem-
ple dans Charlie et la chocolaterie (2005).
En tant qu’auteur, vos intentions ne doivent pas être
équivoques, même si les situations que vous créez le
sont pour vos personnages.
Attention : voir un protagoniste réussir une action
extraordinaire contre tout espoir n’est pas un effet inat-
tendu. En effet, on peut espérer contre toute attente,
croire aux chances du héros en dépit de tous les signes
qui annoncent son échec.
L’inattendu, c’est autre chose : ce devrait être un évé-
nement qui déjoue autant l’espoir que la crainte, et sur-
tout qui réoriente les attentes du spectateur dans une
nouvelle direction.
Il y a une part évidente de subjectivité dans la façon
dont nous percevons les effets dramatiques. Voyons un
exemple.
110. J’assume ici mon point de vue, que vous pouvez bien entendu ne pas
partager.
Effets comiques
On pourrait croire que le comique ne s’intéresse
qu’aux sujets légers, excluant de fait tout élément
funeste, effrayant ou triste. Ce n’est pas si simple.
Henri Bergson, dans Le Rire, essai sur la signification
du comique (1900), fait trois remarques :
• N’est comique que ce qui est humain.
• Le fait de rire exclut temporairement toute affec-
tion, toute compassion.
• Le rire n’a de signification que dans son milieu
naturel qui est la société.
112. L’Hubris, (du grec ancien ὕϐρις), est un sentiment démesuré d’orgueil
menant à tous les excès : abus de pouvoir, vol, agression, profanation,
sacrilège…
113. Bugs Bunny et Donald Duck parlent, agissent et réagissent comme des
humains. Ce sont des animaux anthropomorphisés. Même chose pour les
jouets de Toy story (John LASSETER – 1995) ou les voitures dans Cars (John
LASSETER – 2006).
114. Voir l’ironie dramatique page 219, cliquez ici.
115. Quiproquo : double ironie dramatique, voir page 220, cliquez ici.
Par le contraste
Toujours dans La Grande Vadrouille, Augustin et
l’aviateur anglais Peter Cunningham (Claudio Brook) sont
poursuivis. Ils se réfugient dans l’appartement de Juliette
(Marie Dubois). Les Allemands frappent à la porte, et évi-
demment on craint le pire. Augustin et Juliette improvi-
sent alors une dispute conjugale totalement inattendue.
L’ironie dramatique de la situation (nous savons
qu’ils simulent) installe une tension, mais le contraste
entre le risque encouru et ce qui se déroule effective-
ment crée un excellent effet comique.
Plus tard, les fugitifs s’enfuient par les égouts, guidés
par un chanteur d’Opéra vêtu en Méphistophélès116. Au
moment de la séparation, il les gratifie d’un puissant
« Dieu vous garde » qui résonne dans les profondeurs.
Le contraste inattendu entre les paroles pieuses et l’ap-
parence démoniaque du locuteur crée un effet comique.
Un autre contraste, celui du niveau social entre Sta-
nislas, le chef d’orchestre, et Augustin, le peintre en bâti-
ment. Stanislas prend systématiquement de haut son
compatriote.
Ainsi, quand après avoir quitté Paris ils tombent en
panne, les Anglais et Augustin poussent la voiture, mais
pas Stanislas, même si on lui demande poliment. Lorsqu’ils
Rire de tout
On peut créer du comique même autour d’un cada-
vre, si le décédé est un inconnu comme dans Arsenic et
vieilles dentelles (Frank Capra – 1944) ou une personne
détestable comme Siletsky (Stanley Ridges) dans To Be
or Not to Be (Ernst Lubitsch – 1942).
C’est plus dur de créer du comique autour d’un
meurtre ou d’une scène de torture… mais la chose reste
possible.
En assumant une violence très caricaturale, la dis-
tance créée avec les personnages peut amener un effet
comique même avec la souffrance ou le sang.
Quentin Tarantino ne s’en prive pas dans certaines
scènes de Kill Bill (2003), en particulier lors de la grande
scène de combat contre les Crazy 88.
C’est aussi le cas dans Braindead (Peter Jackson –
1992), quand par exemple Lionel (Timothy Balme)
affronte des zombies armé d’une tondeuse à gazon.
– tension/détente ;
– calme/mouvement ;
– réussite/échec ;
– frustration/satisfaction ;
– silence/bruit/musique ;
– dialogue/gestes silencieux ;
– dans la foule/dans l’intimité ;
– lumière/pénombre ;
– attendu/inattendu ;
– action/contemplation ;
– comique/tragique…
119. Voir page 117, cliquez ici, chapitre consacré au rythme narratif.
120. Voir l’annonce-paiement, page 227, cliquez ici.
Exercice 1
Continuons avec La Guerre des étoiles.
Partant de l’exemple de la page 260, établissez
pour le reste du film la façon dont les effets dra-
matiques sont préparés et exploités, pour quel type
d’émotion, s’ils sont attendus ou inattendus, et la
façon dont ils alternent.
Exercice 3
Reprenez les quatre premières scènes d’un de vos
scénarios. Cherchez comment modifier l’enchaîne-
ment des effets pour alterner attendu et inattendu,
tension et détente. Comment pourriez-vous donner
une dimension comique à l’une des scènes?
Ellipses naturelles
Les ellipses les plus courantes passent totalement
inaperçues, tant nous y sommes habitués. D’autres
demandent au spectateur un travail d’attention et d’ima-
gination.
Trois exemples
1. Un enquêteur reçoit un appel l’informant qu’un
crime a été commis à l’autre bout de la ville ; dès la
scène suivante il arrive sur place pour commencer
son enquête. Si rien d’important ne se déroule pen-
dant un trajet, il n’y a aucun intérêt à le montrer.
2. Une scène se termine de nuit, la suivante débute
de jour.
Il est sous-entendu que le temps occulté est un
temps mort, ou bien que s’il s’est passé quelque
chose, nous l’apprendrons en même temps que le
protagoniste.
3. Une scène se termine dans un bureau, et dans la
scène suivante nous retrouvons un des personnages
sur une plage. Il a pu se passer une heure ou plu-
sieurs jours, mais nous avons l’habitude en tant que
spectateurs de ne pas tout saisir dans l’instant, ce
qui nous amène à guetter au fil du récit les indices
permettant de préciser l’ampleur de l’ellipse.
Préserver le spectateur
Une autre fonction importante de l’ellipse peut être
de préserver le spectateur d’une scène très dure. Au
début d’Amours chiennes (Alejandro Iñárritu – 2000) se
déroule un combat de chiens. La scène de ce combat
est coupée dès la première seconde. Nous avons compris
ce qui se passait et le cinéaste a judicieusement estimé
inutile de nous l’infliger en entier. Nous avons suffisam-
ment de détails en tête pour l’imaginer.
Ellipses de connivence
Le premier type, qu’on pourrait appeler ellipse de
connivence, consiste à ne pas s’étendre sur des actions
que nous intégrons sans avoir besoin de les voir.
Dans M le Maudit (Fritz Lang – 1931), une ombre
menaçante apparaît sur l’avis de recherche près duquel
joue une fillette. Nous n’avons pas besoin de voir la suite
pour comprendre que l’assassin va frapper. Le metteur
en scène nous a suffisamment caractérisé M pour que
nous sachions ce qui est en jeu.
Dans Les Tontons flingueurs (Georges Lautner – 1963),
plusieurs bagarres sont suggérées sans être montrées,
avec l’utilisation d’une petite musique récurrente qui
revient comme un gimmick, créant un leitmotiv burlesque.
Dans Tootsie (Sidney Pollack – 1982), Michael Dorsey
(Dustin Hoffman) discute avec son ami Jeff (Bill Murray)
de la meilleure manière d’annoncer à sa petite amie Sandy
(Teri Garr) qu’il lui a piqué le rôle qu’elle convoitait.
JEFF
Tu lui dis rien.
MICHAEL (plaisantant)
Et le fric, je lui dis qu’il tombe
du ciel ? Qu’est-ce que je vais
inventer ? Que je viens de perdre une
cousine qui me lègue son blé ?
CUT TO
INT/APPARTEMENT DE SANDY/JOUR
SANDY
Oh mon dieu, c’est arrivé quand ?
SANDY
Elle est morte de quoi ?
Ellipses de dissimulation
Le second type d’ellipse, bien plus délicat à manier,
consiste cette fois à cacher volontairement des faits au
spectateur.
Je propose de les appeler ellipses de dissimulation.
Dissimuler certains faits importants permet de les
utiliser ultérieurement afin de produire un effet.
Il s’agit presque toujours d’un effet de surprise, aussi
faut-il prendre garde à ce que cette surprise ne concerne
pas seulement le spectateur.
Préparer un twist
Dans son film Shutter Island (2010) par exemple,
Martin Scorsese nous dissimule bon nombre d’informa-
tions sur l’enquêteur dont nous suivons le parcours,
jusqu’à un moment de révélation terrible, que je préfère
ne pas spoiler.
Pour créer un effet de surprise maximale, il prend
soin de nous donner de nombreux indices, sous forme
de flashs psychologiques123, et de ne jamais nous montrer
le point de vue des autres personnages.
Le choix de focalisation permet de justifier les
ellipses de dissimulation préparant le twist.
Utilisations particulières
Le scénario de Very Bad Trip (Todd Phillips – 2009)
fonctionne sur une ellipse qui correspond à l’amnésie des
personnages principaux. L’un d’eux a mis du GHB (la
drogue du violeur) dans la boisson que tous ont consom-
mée et, au lendemain de l’enterrement de vie de garçon
de leur copain Doug (Justin Bartha), les autres découvrent
que ce dernier a disparu, qu’il y a un bébé dans un placard
et un tigre dans la salle de bains de leur suite.
Évidemment ils n’ont aucune idée de ce qui s’est passé.
Leur but: reconstituer le déroulement de cette folle nuit
pour retrouver Doug qui doit se marier le lendemain.
Certains cinéastes osent parfois faire des ellipses sur
des pivots. C’est le cas de Joel et Ethan Cohen dans No
Country for Old Men (2007). Llewelyn Moss (Josh Brolin)
découvre un charnier après un règlement de compte
entre trafiquants. Il s’empare de deux millions de dollars
en liquide qui lui valent d’être poursuivi par un tueur
implacable (Javier Bardem), auquel il échappe plusieurs
fois de justesse.
Vers la fin du film, énorme surprise, on découvre
que ce personnage a finalement été tué… mais la scène
est absente du montage.
Exercice 1
Le Doulos, de Jean-Pierre Melville, bâtit un magni-
fique hareng rouge, grâce à de nombreuses ellipses
de dissimulation. Visionnez ce film une première
fois, puis une seconde pour repérer à quels
moments certaines informations ont été sciem-
ment ellipsées.
Exercice 2
Dans La Véritable Histoire du petit Chaperon rouge
(2005), Cory et Todd Edwards procèdent à toute
l’exposition du film par l’intermédiaire de flash-
back successifs focalisés sur les personnages prin-
cipaux, chacun comportant des ellipses qui se
comblent petit à petit. Voyez, puis revoyez le début
du film et établissez dans un tableau les chrono-
logies des flash-back, ainsi que les ellipses qui y
sont utilisées pour ménager des effets de surprise.
125. Figures III (Gérard GENETTE – 1972). Dans la partie Discours du récit, l’au-
teur parle en fait d’analepse et de prolepse, son propos concernant tout
type de narration. Au cinéma, comme en bande dessinée, les termes équi-
valents sont flash-back et flash-forward.
Exercice 2
Voyez ou revoyez Next (Lee TAMAHORI – 2007), dans
lequel Cris Johnson (Nicolas Cage) peut voir ce qui
va lui arriver trois minutes à l’avance. Identifiez les
différentes manières d’installer les flash-forward
du personnage et les fausses pistes induites.
Remarquez au passage la façon dont la révélation
tardive de certains flashs conduit le spectateur à
une réécriture a posteriori du récit dans sa propre
imagination.
Exercice 2
Faire le même exercice avec une BD ou un film
que vous adorez (et qui comporte des intrigues
secondaires).
Exercice 3
Relisez vos propres scénarios et choisissez-en un
comportant des intrigues secondaires. Vérifiez les
fonctions dramatiques remplies par chacune
d’elles, leur connexion avec l’intrigue principale et
leur résolution.
Attente et anticipation
Avant d’être une fausse piste, tout récit doit construire
une piste tout court. Personnages, buts, enjeux, contexte,
tout doit concorder pour faire entrer le spectateur dans
une première interprétation des événements. On doit
129. Hareng rouge : voir note de bas de la page 51, cliquez ici.
130. Voir les charnières dramatiques, cliquez ici.
Préparer le renversement
Quelques indices doivent préparer le renversement,
suffisamment ambigus pour ne pas éveiller de soupçons.
Il faut absolument installer ces indices, sans lesquels la
révélation du hareng rouge ne sera pas acceptée par le
spectateur. Si ce dernier est face à une surprise totale-
ment déconnectée de tous les éléments déjà installés, il
va se déconnecter du récit.
Exploiter un mystère
En même temps que l’on prépare un renversement,
il faut continuer à mener le récit, c’est-à-dire à exploiter
les éléments déjà en place tout en continuant d’en ins-
taller d’autres.
Dans un segment du scénario, on peut tout à fait
exploiter un mystère, autrement dit confronter les per-
sonnages à des faits inexpliqués dont ils tentent de saisir
le sens.
Leur parcours, forcément infructueux, permettra
d’affiner et de développer leur caractérisation, tout en
maintenant les protagonistes dans le drama, c’est-à-dire
dans l’action.
Utilisation de flashs
et d’ellipses de dissimulation
Dans Shutter Island (2010), Martin Scorsese nous
focalise d’entrée de jeu sur le personnage de Teddy
Daniels (Leonardo DiCaprio), sur sa migraine et ses trou-
bles de la perception.
L’enquête qu’il doit mener le met mal à l’aise, mais
nous avons des motifs raisonnables d’attribuer cela à
ses souvenirs traumatiques, que des flashs nous révèlent
en partie.
Au fil du récit, ses visions se multiplient, alors même
que les indices sur la réalité de la situation s’accumulent.
Pourtant nous n’avons pas vraiment de moyens d’as-
sembler les pièces du puzzle avant la confrontation avec
le docteur Cawley (Ben Kingsley).
Même là, nous avons toujours un doute quant à ce
qui est vrai ou fantasmatique, à cause de la focalisation
sur un personnage qui doute de tout.
Pour obtenir cet effet très troublant, plusieurs tech-
niques :
Le positionnement de l’auteur
Une autre façon de travailler l’implication du spec-
tateur est de réfléchir au positionnement de l’auteur par
rapport à son public. Les films qui suscitent le plus effi-
cacement l’adhésion jouent souvent sur l’installation
Exercice 1
Relevez dans Psychose les indices préparant la
révélation finale du film et les procédés permettant
de dissimuler jusqu’au bout la vérité.
Exercice 3
Construire un séquencier avec le hareng rouge sui-
vant: Tim est un flic infiltré dans un groupe de
truands qui prépare un braquage. Il leur tend un piège
en vue de leur arrestation. En fait, son vrai but est de
trahir tout le monde et de s’enfuir avec le butin.
différentes possibilités
fi Cliquez ici
de point d’entrée ?
Comment y parvenir
La première chose, c’est de bien connaître son uni-
vers et ses personnages. Robert McKee139 en a fait un de
3. Réécris.
Cela revient à assumer nos limites mais aussi notre
capacité d’évolution et d’amélioration. Être content
d’une scène dès sa première mouture ne devrait pas
empêcher de tenter de l’améliorer, voire d’en écrire une
autre, différente, pour se donner le choix ou vérifier que
toutes les potentialités d’une situation ont été explorées.
Réécris, c’est une prise de distance avec soi-même
et avec son travail de création, un recul qui doit nous
permettre d’englober tous les points de vue, d’échapper
précisément aux postures schizophréniques que nous
imposent les premières étapes du travail d’écriture d’un
scénario.
La schizophrénie de l’auteur
comme sujet
Quelques films fameux donnent à partager les affres
par lesquels passe un auteur qui s’égare dans sa propre
création.
Citons Le Magnifique de Philippe de Broca (coécrit
par lui-même, Jean-Paul Rappeneau, Vittorio Caprioli
et Francis Veber – 1973). Le protagoniste, François Merlin
Exercice 2
Voyez ou revoyez Le Doulos (Jean-Pierre Melville
– 1962) ou Sixième Sens (M. Night Shyamalan –
1999). Rédigez ensuite le récit tel qu’il est vécu du
point de vue des personnages principaux, ainsi
que le récit tel qu’il est perçu par le spectateur.
Exercice 3
Écrivez sous forme de synopsis trois paragraphes :
le premier décrivant le plan d’un truand pour déro-
ber un trésor, le second la façon dont un concur-
rent découvre ce plan et parvient à le détourner à
son profit, le troisième racontant comment le poli-
cier chargé de l’enquête parvient à reconstituer
(ou pas) l’enchaînement des événements.
143. Pour ARISTOTE, la Catharsis est une purgation des passions par la repré-
sentation artistique. Vivre intensément un spectacle libère les émotions
(en particulier la pitié et la peur) amenant un allégement accompagné de
plaisir. Dans l’Antiquité, la tragédie avait vocation à la purgation cathartique
du corps social, et pas seulement à celle des individus.
144. Poétique (ARISTOTE – 335 avant J.C.).
À univers différents,
systèmes de valeurs différents
Dans le cas d’un schéma manichéen, avec des
méchants et des gentils bien identifiés, la position
morale est généralement claire pour tout le monde. Les
gentils sont droits, honnêtes, sympathiques, tandis que
les méchants sont fourbes, malfaisants, désagréables.
Pensez à Blanche-Neige et à la sorcière, à Luke Skywal-
ker et Dark Vador.
On peut aussi faire autrement. Par exemple, imagi-
ner un héros roublard et violent (The Chaser – Hong-
Jin Na – 2008), un antagoniste droit et honnête (Arrête-
moi si tu peux — Steven Spielberg – 2002) ou un super-
héros mal embouché et alcoolique (Hancock, Peter Berg
– 2008).
Exercice 2
Formulez pour chacun de vos propres récits votre
positionnement moral d’auteur.
Exercice 3
Choisissez une œuvre que vous connaissez mais
que vous n’avez pas aimée et identifiez ce qui cloche
pour vous du point de vue de la question morale.
Caractériser un système
fi Cliquez ici
de valeur ?
Citons-en deux :
• Opération Lune (William Karel – 2002) est un faux
documentaire racontant comment un certain
148. Je vous invite à vérifier par vous-même ce qu’il en est. J’ai conscience
de présenter les choses d’une manière très superficielle, mais vous aurez
compris qu’il ne s’agit pas ici de faire une analyse complète de la situation
politique libyenne.
149. Déclaration de Mansour SAIF AL-NASR (du conseil national de transition
libyen) le 20.10.2011 sur BFMTV.
Exercice 1
Plusieurs séquences du film American Beauty (Sam
Mendes – 1999) mettent en jeu une caméra dié-
gétique. Repérez ces séquences et analysez les
effets qu’elles produisent.
Exercice 2
Visionnez Chronique des morts-vivants (George A.
Romero – 2007).
Quels sont les codes du documentaire utilisés dans
ce film ?
Quels sont ceux de la fiction ?
Comment sont-ils renversés pour créer un effet
de réel ?
Exercice 3
Choisissez une scène d’un de vos scénarios et
réécrivez-la de sorte qu’elle implique une caméra
diégétique.
Commencer à développer
fi Cliquez ici
une structure ?
INDEX 331
Blake et Mortimer (8 albums, Edgar P. Christine (John Carpenter, 1983) 213,
Jacobs 1946 à 1990) 207 241
Blanche-Neige et les sept nains (W. Chronique des morts-vivants (George
Disney, D. Hand, 1937) 40, 46, 90, A. Romero, 2007) 329
141, 211, 312
Cid (Le) (Pierre Corneille, 1637) 167
Blow (Ted Demme, 2001) 170
Cliffhanger 123
Bombe (La) (Peter Watkins, 1965) 278
Climax 22, 72-73, 81, 113, 119, 185-
Bon, la brute et le truand (Le) (Sergio 186, 193, 202, 283, 284, 301,
Leone, 1968) 96, 121, 313 314, 320
Bouddhisme du Bouddha (Le) (Alex- Cloverfield (Matt Reeves, 2008) 319
andra David-Néel – 1959) 133
Colombo (68 épisodes, R. Levinson et
Boulevard du crépuscule (Billy Wil- W. Link, 1971 à 2003) 170
der, 1950) 99
Comédie 53, 97, 151, 250, 252, 257-
Braindead (Peter Jackson, 1992) 232, 258, 309
258
Comique 39, 83, 86, 151, 155, 204,
Brazil (Terry Gilliam, 1985) 209, 276
221, 230-231, 245, 250-253,
Breaking Bad (Vince Gilligan, 2008 à 255-259, 262, 267, 282, 285
2013) 243
Commune de Paris (1871) (La) (Peter
Burlesque 86, 257, 266 Watkins, 2000) 321
C’est arrivé près de chez vous (Rémy Conflit 93, 110-111, 118, 121, 123-124,
Belvaux, 1992) 309, 319 127, 131-134, 157, 167-168, 175,
Ça tourne à Manhattan (Tom DiCillo, 177, 182-184, 190, 193, 196-198,
1995) 101 201-209, 213-216, 227-229,
Calendrier meurtrier (Pat O’Connor, 231, 242, 256, 258, 261, 282,
1989) 211 297, 299, 301, 308, 313
Caractérisation 47, 49, 54, 59, 68, Contes de la lune vague après la
77, 91, 93, 97, 104, 114, 127, pluie (Les) (K. Mizoguchi, 1953) 138
129-132, 140-143, 152, 160, Continuité dialoguée 21, 23-25, 34,
170, 174, 194, 213, 215-216, 37, 39, 41, 235, 241
237, 249, 290, 294, 327
Coraline (Henry Selick, 2009) 211
Cars (John Lasseter et Joe Ranft –
Couleur de l’argent (La) (Martin Scor-
2006) 96, 252
sese, 1986) 169
Certains l’aiment chaud (Billy Wilder,
1959) 209, 221
Crabe aux pinces d’or (Le) (Hergé,
1940) 193
Charlie et la chocolaterie (Tim Bur-
ton, 2005) 30, 158, 248 Cuirassé Potemkine (Le) (Sergueï
Eisenstein, 1925) 157
Charnière dramatique 69-70, 81,
108, 110, 112, 115, 183, 206, Cycle de Dune (Le) (6 romans, Franck
229, 243 Herbert, 1965 à 1985) 139
Chaser (The) (Hong-Jin Na, 2008) 312 Da Vinci Code (Ron Howard, 2006) 114
Château dans le ciel (Le) (Hayao Dark Knight (The) (Christopher Nolan,
Miyazaki, 1986) 68, 122 2008) 99, 212
Chemins de la liberté (Les) (Peter Weir, De Cape et de Crocs (10 tomes, Alain
2010) 94 Ayroles et Jean-Luc Masbou) 139
Chocolat (Le) (Lasse Hallström, 2000) Déclencheur 67-70, 81, 90, 96, 124,
314 182
INDEX 332
Dents de la mer (Les) (Steven Spielberg, Ellipse temporelle 25, 263, 265
1975) 94, 171, 200, 212, 229, 233
Empire contre-attaque (L’) (Irvin
Dernier exorcisme (Le) (Daniel Stamm, Kershner, 1980) 150, 203, 269
2010) 320
Enfants loups (Les) (Mamoru Hosoda,
Désir 59, 71, 90, 93, 99, 110, 114, 2012) 271
124, 127, 132-135, 142, 155, 173,
Ennemi d’état (Tony Scott, 1998) 119,
177, 182-185, 189, 197-198, 208,
135
247, 307, 329
Enseignement du Bouddha (L’)
Deus ex machina 80, 219, 223-224,
(Rahula Walpola, 1961) 133
232, 299
Dexter (James Manos Jr., 2006 à 2013) Évadés (Les) (Frank Darabont, 1994)
267, 310 216, 314
Dialogue 19, 22, 24, 28-29, 31, 41, Excalibur (John Boorman, 1983) 68
63, 82-83, 102, 122, 140, 143, Exploitation 58, 71, 73-74, 76, 79,
147-149, 151-153, 155, 164, 177, 82, 86, 118, 121, 194, 205, 222,
237, 259, 265 225, 227, 229, 230-231, 241-
Didascalie 23-29, 31-32, 117, 120, 242, 246, 256, 262, 281, 289
298 Extradiégétique 29, 30, 318, 323
Diégèse 29, 46, 137-138, 144, 196, Fabuleux destin d’Amélie Poulain
250, 300, 313, 319 (Le) (Jean-Pierre Jeunet, 2001) 30,
Diégétique 29-30, 241, 243, 317- 209
320, 323, 329 Faiblesse 22, 59, 71, 90, 95, 114, 125,
Discours sur le poème dramatique 133-134, 168, 173, 178, 182-184,
(Pierre Corneille, 1600) 13, 282 189, 198, 205, 208, 211, 214-216,
District 9 (Neill Blomkamp, 2009) 97 250, 253, 255, 291, 299, 329
Documenteur (Agnès Varda, 1981) 323 Fantômas (Pierre Souvestre et Marcel
Allain, 1910 à 1911) 211
Domicile conjugal (François Truffaut,
1970) 169 Fantôme 70, 105, 124-125, 137-138,
144, 182, 189-190, 192-195,
Doulos (Le) (Jean-Pierre Melville, 1962)
208, 213, 301
51, 271, 305
Fantômes contre fantômes (Peter
Dragons (Chris Sanders et Dean
Jackson, 1996) 138
DeBlois, 2011) 100, 201, 215
Drama (action en grec) 118, 197, 245 Farenheit 451 (François Truffaut
d’après Ray Bradbury, 1966) 209
Dramaturgie (La) (Yves Lavandier,
2008, 2014) 25, 168, 228 Fargo (Joël et Ethan Cohen, 1996) 171,
325
Drive (Nicolas Winding Refn, 2011) 96
Fausse piste 51, 58, 65, 89, 100, 101,
Duel dans le Pacifique (John Boor- 155, 234, 268, 272, 287, 289-
man, 1962) 73
291, 327
Dumbo (Ben Sharpsteen, 1941) 125
Fièvre du samedi soir (La) (John Bad-
E.T. l’extraterrestre (Steven Spielberg ham, 1977) 161
– 1982) 172
Fight Club (David Fincher, 1999) 51,
Effet téléphoné 227, 231 164, 209
Ellipse de connivence 266 Figures III (Gérard Genette, 1972) 61,
Ellipse de dissimulation 272 74, 275
Ellipse naturelle 265 Flash psychologique 273-274
INDEX 333
Flash-back 60, 94, 98-99, 101-103, 289-291, 293, 295, 327
187, 194, 196, 271, 273-280, Harry Potter (J.K. Rowling, 1997/ 2007)
292-293 139, 302, 308
Flash-forward 102, 273, 275, 277- Héros aux mille et un visages (Le)
280 (Joseph Campbell, 1948) 174, 181
Flûte à six Schtroumpfs (La) (Peyo, Histoire de fantômes chinois (Ching
1960 [BD], 1976 [film]) 201
Siu-Tung, 1987) 138
Folie des grandeurs (La) (Gérard Oury,
Histoire du futur (L’) (23 nouvelles,
1971) 253
R. A. Heinlein, 1939 à 1963) 139
Forrest Gump (Robert Zemeckis, 1994)
Hitchcock/Truffaut (Entretiens, 1966,
324
1980) 135, 160, 240
Funny Games (Michael Haneke, 1997)
Hitcher (Robert Harmon, 1986) 212
214
Homme d’Aran (L’) (Robert Flaherty,
Game of Thrones (David Benioff,
1934) 12
Daniel B. Weiss, 2011) 311-312
Gardiens de la galaxie (Les) (James Hot Fuzz (Edgar Wright, 2007) 96, 263
Gunn, 2014) 68 Identification 59, 61, 105, 125, 129-
Géant de fer (Le) (Brad Bird, 1999) 158 130, 134, 140, 160, 257, 309
Ghost 70, 182, 187, 189, 196 Il était une fois dans l’Ouest (Sergio
Leone, 1968) 286
Ghost (Jerry Zucker, 1990) 138
Il faut sauver le soldat Ryan (Steven
Goodbye Bafana (Bille August, 2007)
Spielberg, 1998) 99, 135
165
Île du docteur Moreau (L’) (H.G Wells,
Grand Blond avec une chaussure
1896) 210
noire (Le) (Yves Robert, 1972) 202-
203, 254 Implant 58, 68
Grande Vadrouille (La) (Gérard Oury, Inception (Christopher Nolan, 2010)
1966) 203, 209, 254-255 209
Grease (Randal Kleiser, 1978) 161 Incident déclencheur 67-70, 90,
Guerre des étoiles (La) (George Lucas, 96, 124, 182
1977) 70, 91-92, 107, 111, 140- Incroyable destin de Harold Crick
141, 171, 190, 203, 212, 245, (L’) (Marc Forster, 2006) 298
260-261, 302, 308, 314 Indestructibles (Les) (Brad Bird, 2004)
Guerre des mondes (La) (adaptation 158
d’Orson Welles, 1938) 318
Inglorious Basterds (Quentin Taran-
Guerre des mondes (La) (H.G. Wells tino, 2009) 211, 325
– 1898) 317
Insert 31, 60, 103
Guerre psychologique (La) (Paul M.
Installation 54, 58, 68, 73-74, 82,
A. Linebarger, 1948) 328
91, 93, 95, 97, 99, 104, 110, 185,
Guerriers de la nuit (Les) (Walter Hill, 205, 222, 225, 227-228, 241,
1979) 97 246, 262, 281, 284, 293, 321
Halloween : la nuit des masques Intitulé 22-25, 30-31
(John Carpenter, 1978) 57, 62
Intouchables (Olivier Nakache, Éric
Hamlet (William Shakespeare) 83 Toledano – 2011) 102, 114, 186,
Hancock (Peter Berg, 2008) 312 314
Hareng rouge 51, 234, 268, 271, Invictus (Clint Eastwood, 2009) 165
INDEX 334
Ironie dramatique 58, 60-61, 65, Matrix (Andy et Larry Wachowski, 1999)
98, 104, 123, 165, 185, 206, 217, 10, 211
219-226, 228, 252, 254-255, Mauvais pantalon (Un) (Nick Park,
257, 285 1993) 212
James Bond (12 romans, Ian Fleming, Memento (Christopher Nolan, 2000)
1953 à 1966) 94, 160, 170, 308 74, 169, 276
JCVD (Mabrouk El Mechri, 2008) 162- Menace fantôme (La) (George Lucas,
163 1999) 125
Jetée (La) (Chris Marker, 1962) 278 Mermaids : the Body Found (Sid Ben-
Johnny s’en va-t-en guerre (Dalton nett, 2011) 322
Trumbo, 1971) 276 Milking 79, 82-87, 96, 222, 234, 257,
283
Jour sans fin (Un) (Harold Ramis, 1993)
86, 140, 144, 205, 221 Minority Report (Steven Spielberg,
2002) 209, 241
Kick-Ass (Matthew Vaughn, 2010) 202,
294 Mon nom est personne (Tonino Vale-
rii, 1973) 95
Kill Bill (Quentin Tarantino, 2003) 101,
258 Mon voisin Totoro (Hayao Miyazaki,
1988) 50, 124, 125
King Kong (Merian C. Cooper et Ernest
B. Schoedsack, 1933) 212
Mondes de Ralph (Les) (Rich Moore,
2012) 30, 133
Léon (Luc Besson, 1994) 212, 245, 249,
Monstres & Cie (Peter Docter, 2001)
310
96
Lifeforce (Tobe Hooper, 1985) 213
Monty Python, le sens de la vie (T.
Ligne verte (La) (Frank Darabont, 1999) Jones et T. Gilliam, 1983) 52, 101
69
Mort aux trousses (La) (Alfred Hitch-
Liste de Schindler (La) (Steven Spiel- cock, 1959) 57, 63-64, 135, 153,
berg, 1993) 162 212, 239
Livre du scénario (Le) (Bernard Tre- Mr Nobody (Jaco Van Dormael, 2009)
mege, 2009) 59 74
Long chemin vers la liberté (Un) Mystère 9-11, 181, 232, 289-290
(Justin Chadwick, 2013) 165 Mystérieuses cités d’Or (Les) (Édouard
Long dimanche de fiançailles (Un) David et Bernard Deyriès, 1983) 223,
(Jean-Pierre Jeunet, 2004) 99 279
Lost (J. Lieber, J.J. Abrams, D. Lindelof, Nausicaä de la Vallée du Vent (film,
2004 à 2010) 211, 277-278 Hayao Miyazaki, 1984) 139
M le Maudit (Fritz Lang, 1931) 266 Next (Lee Tamahori, 2007) 279
INDEX 335
Octopussy (John Glen, 1983) 94 112, 119, 127, 134, 143, 157, 160,
Opération Lune (William Karel, 2002) 162, 167-169, 173-174, 182-187,
321 202, 207-210, 213-214, 216,
229, 232-234, 240, 247-248,
Opposant 22, 206-207 251, 261, 267, 270, 275-277,
Paiement 118, 228, 230, 232-234, 283, 290-291, 298-300, 303-
237, 247, 258 304, 309-311, 321, 327
Parrain (Le) (Francis Ford Coppola, Psychose (Alfred Hitchcock, 1960) 51,
1972) 136 113, 212, 289-290, 293-294
Peter Pan (C. Geronimi, W. Jackson, Pulp Fiction (Quentin Tarantino, 1994)
H. Luske, 1953) 50 74, 103, 161
Piège de cristal (John McTiernan) 212 Punishment Park (Peter Watkins, 1970)
Pitch 19, 21, 33, 40, 236, 242 321
Pivot 72, 107-108, 110, 185, 187, 269 Quatre cents Coups (Les) (François
Truffaut, 1959) 169
Planète des singes (La) (Franklin J.
Schaffner, 1968) 157 Quiproquo 58, 63, 133, 155, 219-
221, 254
Planète Terreur (Robert Rodriguez,
2007) 53 Rain Man (Barry Levinson, 1988) 70,
177, 194
Poétique (Aristote, 335 avant J.C.) 13,
50, 67, 79, 82, 174, 241, 311 Raiponce (Nathan Greno et Byron
Howard, 2010) 54, 100, 152, 164,
Point d’entrée 88-93, 96, 99, 101-
211
104, 146, 237, 295
Ramoneurs (Les) (Lloyd French, 1933)
Poisson nommé Wanda (Un) (Charles
85
Crichton, 1988) 85, 253, 256, 284
Ratatouille (Brad Bird, 2007) 46, 48,
Poltergeist (Tobe Hooper, 1982) 138,
187
213
Réponse dramatique 72, 186
Predator (John McTiernan, 1987) 95
Requiem for a dream (Daren Aro-
Prestige (Le) (Christopher Nolan, 2006)
nofsky, 2000) 209
11
Reservoir Dogs (Quentin Tarantino,
Prince of Persia (film, Mike Newell,
1992) 64, 212
2010) 139
Résolution 39, 72-74, 76, 110, 118,
Prince of Persia (jeux de J. Mechner
202, 205, 219, 222-225, 241-
et Y. Mallat, 1989 à 2008) 139
242, 246, 250, 256, 262, 281,
Princesse Mononoké (Hayao Miya- 283, 286
zaki, 1997) 39, 216
Retour des morts-vivants (Le) (Dan
Prix du danger (Le) (Yves Boisset, O’Bannon, 1985) 325
1983) 94
Retour des tomates tueuses (Le)
Projet Blair Witch (Le) (D. Myrick, (John de Bello, 1988) 53
E. Sanchez, 1999) 319
Retour du Jedi (Le) (Richard Mar-
Prophète (Un) (Jacques Audiard, 2009) quand) 57, 73
302
Retour du Roi (Le) (Peter Jackson, 2003)
Proposition dramatique 40, 236 73
Proposition thématique 40, 236 Retour vers le futur (Robert Zemeckis,
Protagoniste 22, 40, 46, 52, 60, 62- 1985) 68, 79-80, 82, 86-87, 149,
63, 68-72, 90-91, 93-97, 108, 221
INDEX 336
Rire, essai sur la signification du SOS Fantômes (Ivan Reitman, 1984)
comique (Le) (Henri Bergson, 138, 213
1900) 251
Sous-texte 22, 41, 146-148, 152-
Robocop (Paul Verhoeven, 1987) 212 155, 164-165
Rocky Horror Picture Show (The) Spiderman (Sam Raimi, 2002) 40
(Jim Sharman, 1975) 53
Split-screen 123
Ruée vers l’Or (La) (Charles Chaplin,
1925) 203
Star Trek (Gene Roddenberry, 1966 à
1969) 170
Sacré Graal (Terry Jones et Terry Gil-
liam, 1975) 52 Story (Robert McKee, 2000) 25, 125,
130, 174, 204, 299-300
Saga Vorkosigan (La) (Lois McMaster
Bujold, 1995-) 139 Superman (Joe Shuster et Jerry Siegel,
1933-) 211
Scarface (Brian de Palma, 1983) 93, 169
Sur la route de Madison (Clint East-
Scène-à-scène 235, 237
wood, 1995) 99
Secret de la Licorne (Le) (Hergé, 1943)
Surprise 48, 51, 61, 80, 83, 100, 102,
193
119, 124, 142, 167, 170, 183, 227,
Seigneur des anneaux: les deux tours 230, 241, 248, 258, 267-269,
(Le) (Peter Jackson, 2002) 324 271, 289-290, 294
Seigneur des anneaux (Le) (John Suspense 123, 219-221, 260
Ronald Reuel Tolkien, 1954) 139,
200-201, 211, 221, 302, 324 Suspension consentie de l’incré-
dulité 17, 20, 45, 49, 299
Sept Samouraïs (Les) (Akira Kuro-
sawa, 1954) 136, 140, 199 Synopsis 21-22, 37, 39, 41, 305
Séquence 25-26, 48, 62, 64, 74-75, Terminator (James Cameron, 1984) 86,
86, 91, 94, 96, 100-101, 103, 115, 172
117-119, 122-123, 126, 177, 232, Thème 32, 37-38, 40-41, 144, 159,
237, 239-240, 264-265, 277, 162, 210, 236, 242, 278, 281,
314, 329 283-284, 287, 301-302, 309
Séquencier 226, 237-238, 240-243, Thing (The) (John Carpenter, 1981) 213
287, 295
Thorgal (J. Van Hamme, G. Rosinski,
Seven (David Fincher, 1996) 211
1977 à 2006) 207
Shadoks (Les) (René Borg et Jacques
Titanic (James Cameron, 1997) 198
Rouxel, 1968) 161
To Be or Not to Be (Ernst Lubitsch,
Shaun of the Dead (Edgar Wright,
1942) 83, 164, 222, 225, 258, 262
2004) 93
Sherlock Holmes (60 récits, A. Conan Tontons flingueurs (Les) (Georges
Lautner, 1963) 49, 151, 153, 220,
Doyle, 1887 à 1927) 211, 308
266
Shining (Stanley Kubrick, 1980) 83, 133,
169 Tootsie (Sydney Pollack, 1982) 143,
220, 266, 283-284
Shutter Island (Martin Scorsese, 2010)
51, 268, 292 Topper 79, 85-86, 96, 232, 256
Signes (M. Night Shyamalan, 2002) 270 Toy Story (J. Lasseter, A. Brannon et L.
Unkrich, 1995) 96, 231, 252, 302
Silence des agneaux (Le) (Jonathan
Demme, 1994) 211 Toy Story 2 (John Lasseter, 1999) 100
Sixième sens (S. Night Shyamalan, 1999) Toy Story 3 (Lee Unkrich, 2010) 100,
51, 138, 209, 293, 305 320
INDEX 337
Tragédie 82, 250-251, 257-258, 311 Véritable histoire du petit Chaperon
Tragicomique 250 Rouge (La) (C. et T. Edwards, 2005)
271
Tragique 39, 119, 151, 155, 250-257,
259, 282, 309 Very Bad Trip (Todd Philips, 2009) 269
Trésor de Rackham le Rouge (Le) Vie de Brian (La) (Terry Jones, 1979) 52
(Hergé, 1943) 193 Vie est belle (La) (Roberto Benigni,
Trône de Fer (Le) (J.R.R Martin, 1996-) 1997) 209, 229-230
139 Vocabulaire d’esthétique (Étienne
True Grit (Joël et Ethan Cohen, 2010) 171 Souriau, 1990) 29
Twixt (Francis Ford Coppola, 2011) 304 Wall-E (Andrew Stanton, 2008) 96-97
Usual Suspects (Bryan Singer, 1994) Wayne’s World (Penelope Spheeris,
211 1992) 53
V pour Vendetta (James McTeigue, Witness (Peter Weir, 1985) 97, 134, 136
2005) 94, 209
X-Men (Stan Lee, Jack Kirby, 1963) 212
Vacances de Monsieur Hulot (Les)
(Jacques Tati, 1953) 75 Z comme Zorglub (André Franquin,
Jidehem et Greg, 1960) 210
Valse des pantins (La) (Martin Scor-
sese, 1982) 100
INDEX 338
Table des matières
Collection Scénars
www.edition-lettmotif.com
érique
version num epub
pdf ou
Va5m94e63
mise
votre code re
z ci- de ss us pour obtenir le tt m ot if. com
Gratte r www.editio
n-
vo s tit re s su
et commandez