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Cédric Laubier

Gus van Sant


Nous ne sommes jeunes qu’une seule fois dans notre vie. Je l’ai été à Providence. J’ai
éprouvé le doute, l’inquiétude de mon âge dans l’Etat de Rhode Island. J’ai rencontré des
compagnons et des amants. Les souvenirs qui m’en viennent sont marqués par des lignes de
fuites, de larges perspectives, errance.
Maintenant que j’erre, je suis ému par tout ces chemins croisés, tant de destins noués. Il y a
Allen, Eric et Mala bien sûr, mais il y a aussi tout les autres dont leur noms ont disparus. Il
me reste de ces demi-inconnues des portraits, des nus dans une chambre, la leur le plus
souvent. J’aimais aussi les peindre habillés même lorsqu’ils ne l’étaient pas, j’aimais leur
voler un instant qui ne m’était pas destiner, quelque chose de brute de soudain, un flash.
Dans ces chambres le plus souvent derrière les murs on entend les roulements d’un
skateboard, une pause, puis le fracas de la planche retombée sur le béton plus vraiment gris.
Ce bruit-là est une note de liberté. Un son faisant son chemin agilement, il n’est pas beau
mais il signifie « Je suis là ».
Je suis toujours un peu le sujet de mes films, on peut me le reprocher. Mes films sont une
extériorisation, évidement, un cri aussi sans écho signifiant liberté. Liberté de parole, liberté
d’exister, liberté liberté, la fin de la liberté comme avortée. Je parle de revendication, de la
jeunesse où nait l’inquiétude. J’ai toujours souhaité etre libre dans mon travail pour faire des
films comme je l’entend. Des films qu’on placerait à coté de ceux qui m’ont accompagné
dans les caves du cinéma Américain, poussé par la Nouvelle vague. Indépendance est un
maitre mot. Heureusement je ne fais pas que du cinéma, le cinéma a le défaut de ne pas etre
dans l’instantané du moins pas pour moi. Je ne me suis jamais éloigné de la photographie ou
des arts plastiques, que je trouve parfois plus beau que le cinéma, plus proche. La frontière
entre moi et le spectateurs est plus fine à travers l’instantané que j’exerce, mais le cinéma
est plus noble, réfléchie il me raconte plus dans mon ensemble. On me connait à travers mes
films, on devine à travers ma photographie ou mes œuvres picturales et plastiques.
J’ai beaucoup déménagé pendant mes études, c’est difficile de se construire une identité
lorsque l’on est déraciné régulièrement. La seule chose qui reste alors c’est nous même. Je
me suis construit une identité sur moi-même. Ça doit être également pour cela que
beaucoup de mes courts-métrages étaient autobiographiques. Sur les routes je suis seul, le
paysage défile, il ne reste que mon reflet posé sur la vitre de la voiture. Mes parents ne sont
pas des artistes et non pas grand-chose à faire de l’art. Ce sont mes professeurs qui m’ont
initié à la peinture et au dessin. Je leur dois beaucoup, l’art à avoir avec soi et j’avais besoins
donc sur ces routes d’extériorisé mon soi.
Je crois que j’ai été beau maintenant je ne sais pas, on a arrêté de me le dire. Je suis un
simple qui aime les corps simples. Je ne suis pas marié, je ne pouvais pas. Je suis seulement
accompagné de temps en temps et cela me suffit. Tant qu’il y a la chaleur du corps, alors il y
a tout.
Cédric Laubier

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