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Claude BOUCHEZ

Date du récit: 07 juillet 2023


Rédaction & mise en page : Céline BOUCHEZ
L’école maternelle, je ne sais pas si j’y suis allé. Je me suis quand même souvenu que
lorsque l’on habitait aux Lanières, un petit village à côté de la Longueville, j’étais allé
parfois dans la classe de M. Gabert. L’école se situait dans le fond du coron. M. Gabert,
c’était l’instituteur, mais aussi un des meilleurs amis de mon père, alors je ne sais plus
si nous passions simplement lui rendre visite après la classe ou si, peut-être, j’ai passé
une année en classe avec lui. Ça devrait correspondre à une année de grande section.
La maternelle dans les années 1960, ce n’était pas comme aujourd’hui !

Après, on a déménagé, on est allés à côté, à la Longueville, et j’y ai fait toute ma


scolarité primaire, du CP au CM2.

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L’école primaire

J’ai un énorme souvenir de ma maîtresse du CP et des beaux moments passés avec elle.
Cette dame, Mme Lecq, elle m’a marqué vraiment très fort, et je lui dois beaucoup. J’ai
toujours fonctionné à l’affectif…
D’ailleurs, pour l’anecdote, ma mère m’a souvent raconté que cette année-là, je suis
rentré un jour de l’école et lui aurais dit “plus tard, je serai instit” !

La méthode de lecture utilisée en CP semble t-il à l’époque, ce que m’a dit Mme Lecq
lorsque, jeune instit en devenir, je l’ai retrouvée lors d’un stage à l’école normale

En CP, j’étais en tête de classe, j’étais un très bon élève. D’ailleurs, d’après ce qu’on
m’a dit, j’ai appris très vite à lire.

En cours d’année, on m’avait dit que mon futur instit pour le CE1, M. Castella, était
quelqu’un d’une sévérité terrible.
Je me réveillais le matin avec de gros maux de ventre, des maux de ventre dont je me
rappelle encore aujourd’hui ! Mes parents voyant cela me disaient “ Bon, t’es vraiment
malade”. Ils avaient même appelé le docteur, je n’avais rien mais je n’allais pas à
l’école… et à 9h, je n’avais plus rien!
J’ai compris après qu’en fait je faisais ma 1ère maladie somatique. Au bout de quelques
temps, Mme Lecq, qui elle avait tout compris, m’a dit “ne t’inquiète pas, l’an prochain
tu n’auras pas M. Castella parce qu’il part à l’armée”. Et de ce jour, je n’ai plus jamais
été malade…

2
À la rentrée suivante, j’ai démarré mon CE1 avec M. Lebry. Sa classe de CE1-CE2
n’était pas dans l’école, elle était un peu plus bas, au-dessus de la Mairie.
Un jour, un Monsieur arrive : J’ai compris après qu’il s’agissait de l’Inspecteur. Il me
fait lire, me pose des questions (j’étais un peu inquiet quand même) et là mon instit me
dit “ Bon, Claude, tu changes de place”. Du côté gauche réservé aux CE1, j’ai rejoint le
côté droit, près de la fenêtre. J’avais démarré mon CE1 depuis une semaine et je
passais en CE2 !

Dans le fond de la classe, il y avait une bibliothèque, une grande verrière.


Je me souviens, ce devait être cette année-là, j’avais emprunté les Aventures de Marco
Polo. J’ai demandé à mes parents de me l’acheter et je l’ai lu environ 50 fois je crois.
C’est là que je suis devenu un dévoreur de livres.
À cette époque-là, pour pouvoir lire il fallait avoir un pupitre. Moi, c’est mon
grand-père qui me l’avait fabriqué, avec des lanières de bois blanc.

Après, toujours avec mon année d’avance, je suis passé en CM1, dans la classe du
Directeur : M. Mazars. Là, il y avait le CM1, le CM2 et le “Fin d’Etudes”, parce qu’à
cette époque-là il y avait le “Fin d’Etudes” où ils passaient le Certificat.
Je me souviens qu’il s’accoudait près de la fenêtre et nous racontait l’Histoire : c’était
de sacrés moments ! c’est un peu à cause ou grâce à lui que j’ai aimé l’Histoire.

Ce Monsieur, qui, je me souviens, portait sa blouse grise ceinturée, avait un énorme


défaut, c’est qu’il buvait bien ! De temps en temps, il quittait la classe : il descendait les
marches de son petit perron. Après j’ai découvert qu’il rejoignait son logement de
fonction, juste à côté, pour aller boire son verre de vin. Évidemment, on en profitait
pour faire des sottises : on se faisait des lancers de porte-plume en prenant le tableau
pour cible !

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Les bêtises… et les punitions

Le matin, on avait des services à faire. Parfois,


on arrivait à l’école en avance pour aller chercher le lait
pour le directeur à la ferme.

Il fallait aussi remplir les encriers. On y mettait des bouts


de craie !

Après, les punitions pleuvaient comme à Gravelotte : conjuguer les verbes aux 8 temps
d’abord puis aux 16 temps... Si on allait chercher le lait, ou si à 11h30, on allait faire
les courses pour le directeur, le nombre de temps diminuait. Si on aidait dans le jardin,
qui était juste derrière l’école, on faisait aussi baisser nos punitions. Quand j’y pense
c’est pour ça que je n’ai jamais aimé jardiner ! Mais à côté de l’école il y avait une
brasserie. Les gars nous amenaient de la limonade alors on se battait pour aller faire le
jardin, mais l’instit, lui, il n’a jamais compris pourquoi !

Parfois les punitions c’était plus violent. Mazars, lui, il n’hésitait pas : il nous faisait
passer les doigts dans l’encrier et avec sa règle, il tapait.
D’autres fois, il donnait des coups sur l’épaule avec sa règle. 60 ans après, je me
souviens encore d’un copain, Lemire, qui avait eu 1 bleu énorme sur l’épaule. Ses
parents étaient venus à l’école, mais bon, à l’époque on ne disait rien au directeur.

Un jour, on devait être en CM2, un gars de la classe, Wattier il s’appelait, avait trouvé
des balles dans la grange de son père. On était dans les années 60 donc peu de temps
après la guerre.
C’était en hiver, on était à l’étude entre 16 et 17h30.
Inconscients et couillons, on avait ouvert les balles, récupéré la poudre qu’on avait
répartie en petits tas sur le trottoir, et on les avait allumés.
Le directeur a appelé la mairie, le garde-champêtre est venu à la maison.
Je me suis fait allumer et j’ai fait 1 jour de prison : tout le groupe s’est retrouvé dans la
chaufferie de la mairie, avec 1 verre d’eau , 1 tranche de pain et 1 morceau de sucre.

4
Mon CM1 et mon CM2 se sont très bien passés, jusqu’à cet événement qui allait décider
de la suite de ma scolarité. Je me souviens, ce devait être en janvier, il y avait de la
neige, M. Mazars avait convoqué mes parents. J’attendais avec mon frère, Daniel, dans
la cour, mais je n’avais pas pu m’empêcher d’aller écouter ce qui se disait. Le ciel m’est
tombé sur la tête quand j’ai entendu le directeur dire à mes parents que ce serait
compliqué que je parte en 6ème, trop jeune, etc. c’était mieux que je fasse un 2ème
CM2.
À partir du 2ème CM2, alors qu’auparavant j’étais en tête de classe, je crois
qu’inconsciemment je me suis dit que ça ne servait à rien de bosser. Je m’ennuyais et
j’avais tellement trouvé ça injuste.

5
Les copains

À la récré, on jouait aux billes, aux gendarmes et aux voleurs, on faisait le tour de la
cour en se prenant par les épaules, et on cherchait du monde en criant “ Qui est-ce qui
veut jouer aux gendarmes et aux voleurs?”

Les copains, j’en avais 1, peut-être 2 mais c’était sans plus à l’époque de la maternelle
et du primaire. Il y avait Didier Dupont, Jean-Marc. Les Dupont, c’étaient nos voisins.
Beaucoup de copains de l’école primaire je les ai retrouvés après, souvent beaucoup
plus tard, au foot.

En primaire et au collège, j’étais transparent. Aujourd’hui ça paraît peut-être difficile à


croire, et mon parcours ensuite en tant qu’instit en a étonné quelques-uns car à
l’époque j’étais extrêmement timide !

Au collège, j’étais tout seul à venir de ma classe à la Longueville, les autres allaient
bosser ou faire des CAP. Sur cette période, je ne me souviens pas d’avoir eu de
copains… J’ai surtout eu de vrais ennemis. Une fois, je me suis retrouvé le long du mur
du collège, 2 garçons m’avaient attrapé et j’avais une marque d’Opinel sur le cou. Il y
avait déjà des terreurs à l’époque.

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Le catéchisme & le patronage

On avait classe de 8h30 à 11h30 et de 13h30 à 16h30 du lundi au samedi, avec un


jour de repos, le jeudi.
À la Longueville, il n’y avait rien au niveau socio-culturel.

Dans les villages à cette époque on retrouvait 3 personnages : le curé, l’instit et le


maire.

Le curé organisait le catéchisme le jeudi après-midi. L’école n’était pas mixte, jusqu’au
collège mais le catéchisme c’était mixte alors c’est là qu’on a rencontré nos 1ères filles !
Les filles en primaire on les entendait mais on ne les voyait pas. Elles étaient juste à
côté. Une porte, toujours fermée, dans le mur du préau séparait nos écoles.

Il y avait aussi des jeux le dimanche après-midi et des excursions organisées. ça


s’appelait le patronage, une sorte de centre de loisirs. On construisait des planeurs, on
faisait du foot, du volley. Alors qu'à l’école, sur toute ma primaire j’ai fait 1 heure de
sport !
Pour avoir accès à tout ça, pour les garçons il fallait être enfant de cœur. Alors,
parallèlement à ma scolarité je suis devenu enfant de cœur, de 8/9 ans à 15 ans
environ. Le curé, l’Abbé Delbouille, je l’aimais bien alors avec lui mon boulot je le
prenais au sérieux.
J’étais devenu chef des enfants de cœur, cérémoniaire ça s’appelait. Bon, croire en
Dieu, non ça… déjà à l’époque… mais là je me suis fait des copains. Il y avait Albert
Fiorio, qu’on appelait le Rital, Didier Dupont que j’ai retrouvé comme ça.
Nous, dans le village, on était les enfants du Grec.
C’était génial les voyages qu’on faisait avec le curé : on a découvert Bruges, les
châteaux de la Loire pendant 3 semaines, Andaye.
On partait en Quatrelle, on faisait du camping… c’était génial !

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Le collège

Au collège, je suis allé à Bavay, c’était le chef-lieu de canton. C’était à 5km de la


maison et aussi la 1ère fois que je prenais le bus tout seul : c’était chouette on se
marrait bien dans le bus.
J’ai commencé, comme on dit familièrement, à glander. J’étais vraiment complètement
déconnecté de l’école.
En 6ème, je suis tombé sur un professeur de français, M. Lenglet, qui nous donnait des
poésies à apprendre, ce que je ne faisais pas au début. Une fois il m’interroge, voyant
que je ne répondais pas, il m’as mis une baffe… une sévère, devant toute la classe. Il
avait une chevalière à la main droite qu’il n’a pas retourné, ce qui m’a valu une marque
mais à l’époque personne ne disait rien.
En 6ème toujours, le 2ème prof qui m’a marqué, mais lui de façon positive, c’était mon
prof d’histoire-géo, M. Crampon. Lui aussi m’a donné ce goût pour l’Histoire.

En 5ème, j’ai continué à bien glandouiller. En français par contre ça allait, je bossais
parce que j’aimais bien ma prof, Mme Didier. J’ai toujours bien travaillé avec les gens
que j’aimais bien.
Par contre en maths, j’avais des résultats catastrophiques avec Mme Gravet… que j’ai
retrouvée ensuite d’ailleurs. À tel point qu’à la fin de l’année j’ai été orienté vers une
4ème en segment court. Ça voulait dire qu’en 3ème je serais parti en lycée
professionnel, je n’aurais pas fait de longues études… pour être instit, c’était foutu.
Alors, une fois mon 1er trimestre de 4ème commencé, je me suis mis à bosser. Mme
Nicolas, qui était à la fois ma prof de français et la femme du Principal, est intervenue
pour dire que je n’avais rien à faire en segment court.
Mme Nicolas, je lui dois énormément car c’est elle qui m’a permis de faire ce que j’ai
fait après. Elle m’a permis de démarrer mon 2nd trimestre de 4ème dans
l’enseignement long.
Je me souviens, ça s’appelait la “4ème Moderne” et j’y suis arrivé avec 1 trimestre
d’allemand à rattraper par rapport aux autres ! J’ai appris beaucoup plus tard que Mme
Baillon, ma prof d’allemand qui m’a fait bosser toute ma 4ème, était la cousine d’une de
mes tantes. Là vraiment j’ai bossé, à tel point que j’ai rattrapé tout le monde et je me
suis retrouvé en tête de classe. Ça m’a montré que je pouvais bosser.

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Ensuite je suis passé en 3ème, tranquille.
Mon prof de maths cette année-là, M. Gravet, c’était un fou. Quand il rentrait en classe,
il montait sur l’estrade, jetait son cartable sur le bureau, tendait les bras et se laissait
tomber dans l’allée.
Moi, il m’avait pris en grippe et me disait “Bouchez, tu dois arriver à mieux que ça”,
alors qu’il vouvoyait tout le monde. Je crois, avec le recul, qu’il savait que je pouvais
faire mieux. Un jour, il m’a dit “de toute façon, tu ne passeras pas en Seconde”. Je lui
avais répondu très poliment que j’aurais mon brevet des collèges et que donc, pour moi,
je passerais en 2nde. Il a fallu que je rattrape en peu de temps les 52 leçons
d’histoire-géo que je ne connaissais pas et j’ai eu mon brevet les doigts dans le nez ! Ma
mère connaissait les leçons aussi bien que moi, combien de fois elle me l’a dit ! Et le
brevet ce n’était pas comme maintenant hein, ce n’était pas en contrôle continu, c’était
le vrai 1er examen.
J’ai passé mon certificat d’études, à ma demande, puisque normalement on le passait en
fin de primaire et je l’ai obtenu aussi.
Avec le certif il y avait toute une tradition, le vélo qui allait avec, etc.

Malgré cela, M. Gravet a tenu sa promesse, il m’a fait redoubler ma 3ème.


Cette 2ème classe de 3ème, en 68, j’en ai très peu de souvenirs. Je me souviens qu’au
1er trimestre j’avais 19.5 de moyenne en maths ! Cette année-là, elle a été finalement
très positive.

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